Le droit constitutionnel occidental classique est né des Révolutions anglaises au 17ème siècle puis
américaine et française au 18ème siècle. Ces révolutions sont à l'origine de ses idéaux et de techniques
constitutionnelles originales : la technique du mandat représentatif théorisée en France, la technique de la
balance des pouvoirs constitutionnels développée en Angleterre... Ce droit constitutionnel reste actuel ;
mieux, il continue de s'universaliser comme on a pu le voir à la fin du 20ème siècle : adoption par les
nouvelles démocraties d'Europe de l'Est et d’Afrique de l’Ouest par exemple. Pourtant cette réussite du
droit constitutionnel classique occidental, sans concurrent véritable aujourd’hui, est un phénomène
trompeur. Il masque les échecs et la crise profonde qu’il traverse.
Les échecs sont immenses. Ce droit dont l’objectif premier est de lutter contre la barbarie, de la faire
disparaître de notre horizon d’action, a été ainsi incapable d’empêcher l’arrivée de régimes de domination
totale. Cela a été le cas en France dès l’installation du nouveau droit révolutionnaire en 1792 avec la
Terreur. Cela a été le cas plus tard au 20ème siècle avec l’instauration des régimes totalitaires (dont
certains survivent toujours en Chine, Corée du Nord...).
La crise que connaît ce droit est plus difficile à mettre en évidence. Les symptômes sont les suivants :
- L’incapacité du droit constitutionnel occidental classique à prendre en compte et éradiquer la persistance
de phénomènes totalitaires : les crimes de génocides (Bosnie Herzégovine, Rwanda, Soudan,
Tchéchénie...), la bureaucratie d’Etat, l’emprise de l’idéologie qui ne se traduit plus par une soumission à
une propagande d’Etat mais par une fascination hypnotique pour le virtuel ou le spectaculaire mis en
scène par les medias, le terrorisme qui n’est plus seulement d’Etat mais est descendu dans la société.
- La désaffection vis-à-vis des institutions crées au moyen du droit constitutionnel classqiue. Cette
désaffection atteint aussi bien des régimes anciens (Cf. le taux d’abstention aux élections américaine) que
des institutions nouvelles (Cf. le désintérêt vis-à-vis de la construction européenne).
- L’absence de véritable réponse face aux remises en cause récentes nées du développement des
intégrismes religieux et des nationalismes ethniques qui ne sont même pas étudiés ou si peu par les
juristes occidentaux. Pourtant sont en jeu des problèmes non résolus par le droit constitutionnel
classique : le problème de la fondation et de la légitimité des ordres juridiques, leur rapport avec le
théologique, etc.
La conséquence de cette crise est que le droit constitutionnel est devenu une superstructure qui tourne en
grande partie à vide, déconnectée de la réalité vécue. Il est temps de procéder à une critique radicale de ce
droit. C’est pourquoi nous procéderons à une approche non seulement analytique mais critique du droit
constitutionnel classique occidental.
L'ÉTAT
Il est temps de proposer une analyse critique de ces concepts qui serait incomplète sans la prise en compte
de leurs aspects métaphysiques et théologiques.
§1. L'État
B Eléments constitutifs
Traditionnellement, on considère que l’Etat se compose de certains éléments. En réalité ces éléments ne
font que refléter les modalités d'exercice du pouvoir d’État. Ce pouvoir s'exerce sur une population, sur
un territoire à l’aide d’institutions ou d’organes spécifiques :
a) une population. Il n'y a pas d'État sans une population. Cette population ne s'identifie pas forcément à
une Nation même si en Occident, c'est presque toujours le cas.
Rappel : une Nation est une population qui est unie :
- par des liens objectifs (comme l'origine géographique, l’unité de langue, de religion, d’ethnie...) selon la
conception objective d'origine allemande (Cf. Fichte)
- ou des liens spirituels (comme la volonté de vouloir vivre ensemble...) selon la conception subjective
d'origine française.
Il existe des Nations sans État (la Nation kurde, palestinienne), des États sans Nation comme certains
États du tiers monde crées artificiellement à partir des anciennes frontières coloniales (d'où une situation
inverse par rapport à l'Occident : antériorité de l'État), des États binationaux (comme le Canada) ou
multinationaux (comme l'ancienne URSS)
b) un territoire. Il n'y a pas d'État sans territoire [= un espace terrestre, maritime, aérien délimité par des
frontières (qui sont des lignes matérialisées sur une carte dont le franchissement emporte des
conséquences juridiques)]. La notion de frontière n’a été formalisée que tardivement, au XVIe siècle.
. L’origine de l’Etat.
Le cadre dans lequel peut s'épanouir, se développer le droit constitutionnel classique occidental est l'État.
Une institution millénaire puisque les premiers Etats occidentaux dits modernes apparaissent vers le XIe
siècle, notamment en France pour se consolider au XVIe siècle.
L’Etat moderne par opposition avec les premiers Etats, notamment antiques a pour particularité d’être une
personne collective abstraite et éternelle détenant le monopole de la violence légitime. Toutes ces
propriétés font de lui comme dira Hobbes un « Dieu mortel » en qualifiant le Léviathan. Ce n’est pas
fortuit : les historiens ont démontré que l’Etat n’avait pu être inventé par les juristes que grâce à des
analogies faites entre le Roi et le Pape, voire entre le Pape et le Christ.
- Une personne collective : Hobbes explique que la République est « l’unité réelle de tous en une seule et
même personne, unité réalisée par convention » (ou contrat). L’Etat unifie toutes les volontés en une
seule. C’est donc une personne capable de vouloir juridiquement, de détenir des droits. Cette notion de
personnalité collective ou de corporation avait déjà été appliquée au Moyen Age à l’Eglise et son chef, le
Pape qui prétendait imiter le Christ ; le Christ ayant deux corps, son corps naturel simple et son corps
mystique ou figuré. Ce dernier est un corps spirituel, collégial, c’est-à-dire figurant toute la communauté
des croyants. Le Christ est incorporé à tous les croyants et eux à lui.
- Abstraite et éternelle : l’Etat est abstrait car il ne saurait être vu, ni touché et il ne meurt pas.
(L’Etat se survit même si les régimes dont il est le support disparaissent cf. CE arrêt du TA de Paris du 27
juin 2002. Pour le Commissaire du gouvernement, "l'Etat républicain ne [saurait] échapper à l'héritage de
Vichy. Il est tenu d'assumer toutes les conséquences de l'action présente et passée de ses services, même
lorsque ces services, agissant sous la tutelle d'autorités illégitimes, ont commis de graves illégalités"). En
cela il a hérité des caractéristiques du Christ dont le corps mystique ou divin est seulement spirituel et
évidemment éternel.
- Monopole de la violence légitime : les deux corps du Christ sont l’un naturel, l’autre spirituel. Par
analogie, on va considérer que le Pape puis le Roi est à la fois personne privée et personne publique. D’où
deux sphères : l’une privée où le recours à la violence est interdit et sanctionné, l’autre étatique où le
gouvernement peut employer une violence qui est légitime car utilisée dans l’intérêt général. ]
B le risque de la statocratie
Parce qu’il a le monopole de la violence, parce qu’il incarne seul l’intérêt général, parce que ses organes
produisent un droit supérieur à tous les autres droits, parce qu’il détient des pouvoirs extraordinaires
(police, armée, monnaie), parce qu’il exerce l’autorité souveraine du peuple, l’Etat au lieu de se
considérer comme un simple moyen peut très facilement prétendre être une fin en soi.
Les conséquences en sont connues : despotisme d’Etat, abus de pouvoir des agents de l’Etat, mise en
avant exclusive des intérêts de l’Etat (qui ne sont souvent que le masque d’intérêts de certains organes
d’Etat, donc d’intérêts particuliers). Comme le droit constitutionnel occidental ne conçoit pas d’extériorité
à l’Etat, de droit effectif en dehors ou au-dessus de l’Etat produisant une limite au pouvoir d’Etat (échec
du droit de résistance), il ne peut éviter de telles dérives. Pire, ce droit rend possible l’arrivée de régimes
dit de statocratie comme le fascisme où l’Etat devient le seul pouvoir. Cela ne signifie pas extension du
domaine de l’Etat ou de la sphère publique mais domination totale de l’Etat. (cf. le régime nazi qui
admettait une économie libérale, l’URSS au noir). Dans ces régimes, l’Etat devenu la seule valeur agit
pour l’Etat dans une logique nihiliste.
La souveraineté
A Origine
La notion d'autorité souveraine a sans doute une origine théologique, notamment chrétienne. Cette origine
divine de la souveraineté se manifeste par ses caractères extraordinaires : autorité absolue, indivisible,
incommunicable, suprême... etc. Caractères qui ont été conservés pour qualifier la souveraineté non plus
de Dieu mais du peuple ou de la Nation à partir de la Révolution française. Cf. Art 1er Constitution 1791
Titre III art. 1 « La Souveraineté est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible. Elle appartient à la
Nation... ».
a) Sous l'Ancien Régime en France
Il est clair à cette époque que la Souveraineté appartient non pas à tel individu, tel corps mais à Dieu seul.
Elle est d'essence divine. Les textes les plus souvent cités sont les suivants : Ancien Testament (Livre de
la sagesse) « C'est par moi que règnent les lois », Nouveau Testament, St Jean « Dieu est le souverain des
rois de la terre ».
Le roi qui est à l';image de Dieu tire la force de son autorité de celle de Dieu. Si le roi est appelé le
souverain, c'est seulement en tant qu'il est le dépositaire de l';autorité souveraine et non parce qu';il en est
le titulaire.
Bodin, un des plus grands théoriciens de la souveraineté dans les Six livres de la République (1576)
reprend le thème de l'imitation de Dieu pour caractériser l'autorité souveraine. Cette autorité insiste-t-il est
indivisible (il n'y pas de « parties de la souveraineté »), absolue (elle est au dessus des lois puisqu'elle les
fait) ou encore perpétuelle. Il va ainsi fixer les attributs de la souveraineté. Mais son principal apport, un
apport dangereux consiste à associer Souveraineté et République (ou État), expliquant que la
Souveraineté donne sa puissance, son être à la République. Il appartient aux organes d'État d'exercer cette
autorité quasi surnaturelle. [Loyseau, Des Seigneuries, 1608 sera encore plus étatiste en définissant la
souveraineté comme « la propre seigneurie de l'Etat »]. Le risque devient grand alors que l'Etat se
proclame le souverain ou que le souverain s'identifie à l'Etat.
C'est ce qui va se passer très vite. Les juristes ne tarderont pas à parler d'État souverain ; de son côté le roi
expliquera : « l'Etat, c'est moi » (Formule apocryphe de Louis XIV).
b) A partir du XVIIIe siècle
Les philosophes des Lumières et les révolutionnaires notamment français n'ont pas une conception de la
Souveraineté très différente. Rousseau par exemple insistera sur le caractère indivisible et inaliénable de
la souveraineté qui selon lui est affaire non pas de puissance mais de liberté. L'Etat passif ne fait que
transmettre la souveraineté. La différence essentielle par rapport à l'AR, c'est évidemment que pour les
penseurs modernes, le titulaire de la souveraineté n'est plus Dieu mais la Nation ou le peuple.
B Signification
Au sens strict, la souveraineté (Souveränität en allemand) est une autorité suprême. Celui qui est titulaire
de la souveraineté, le souverain (Herscher) n'a donc pas d'autorité au dessus de lui ; sa compétence ne
relève d'aucune autorité supérieure. En conséquence, le souverain est complètement libre ou indépendant.
Cette liberté ou indépendance se manifeste en droit constitutionnel : le peuple français est ainsi libre de se
donner la législation qu'il souhaite, de réviser sa Constitution (voire de l'enfreindre selon certains juristes)
et en droit international : ainsi, l'Etat français en tant qu'il exerce l'autorité souveraine du peuple français
bénéficie d'une parfaite égalité juridique par rapport aux autres États.
Bodin avait compris très tôt les avantages politiques de l'idée de suprématie de l'autorité souveraine. Il
avait pu ainsi légitimer, raffermir l'autorité du roi de France par rapport aux grands seigneurs féodaux sur
un plan interne, par rapport aux autres autorités temporelles (telles l'Empereur du saint Empire Romain
1. La notion de Constitution
A Origine de la Constitution
a) L'idée d'une loi suprême dont le contenu est invariable et qui s'impose à toutes les autres normes
juridiques est évidemment religieuse.
L'Ancien Régime admet l'idée d'un droit supérieur d'origine divine qui fonde et limite à la fois le pouvoir
politique. Ce droit tiré de la Bible est dit droit naturel : il est au delà de la volonté humaine. Le pouvoir
royal est donc encadré et finalisé : il faut conduire le peuple vers une fin temporelle mais aussi spirituelle.
(Opposition avec l'Etat antique où le pouvoir est attaché à la personne du chef et ne vient pas de Dieu).
Mais si le pouvoir vient de Dieu, est fondé par une loi religieuse, pour autant son titulaire n'est pas
désigné par Dieu. Sa désignation est affaire humaine et peut dépendre du peuple. L'absolutisme qui
affirme que le roi détient son pouvoir immédiatement, exclusivement et directement de Dieu est une
déformation de la doctrine de l'Eglise catholique.
b) la Constitution sous l'AR
Par imitation de la loi divine, l'AR connaît des lois fondamentales qui sont supérieures aux lois ordinaires
et qui contrairement à elles ne sont ni modifiables, ni révocables par le Roi. Cependant , d'une certaine
façon ces lois fondamentales sont l'œuvre du Roi puisqu'il est le seul à les promulguer.
D'où un paradoxe encore actuel qui heurte la logique : le Roi fait et est fait par les LF.
Le contenu des LF impose des obligations au pouvoir royal (loi de catholicité) et règle sa transmission
(loi de masculinité).
B Définition de la Constitution
C'est la norme juridique généralement suprême qui contient à la fois :
- les principes directeurs de l'ordre juridique étatique : la Constitution définit quels sont les buts, finalités
qui doivent guider les opérateurs du droit
- les règles de base concernant l'aménagement et la transmission du pouvoir d'État : la Constitution
institue des organes d'État qu'on appellera « pouvoirs constitués » (cf. Des institutions politiques comme
le Parlement, le Tribunal constitutionnel) et organise les mécanismes pacifiques visant à assurer leur
renouvellement.
- l'énoncé des libertés fondamentales protégées par l'Etat : ces droits sont généralement énoncés dans le
Préambule de la Constitution qui lui-même contient une Déclaration de droits ou s'y réfère.
C Types de Constitutions
- on a oublié que la DDHC contenait du droit naturel qui par définition est hors la volonté des hommes,
éternel et immuable. On en a fait du droit positif modifiable selon les circonstances, interprétable selon
des motifs politiques. On l'a donc fragilisé…
Nota : Sous la IIIe et la IVe République en France les Préambules n'étaient pas considérés comme du
droit. Quant à la DDHC de 1789, on lui conférait de façon implicite valeur de loi ; ce qui justifiait un
contrôle de la conformité des actes administratifs à la Déclaration par le juge administratif.
2. L'élaboration de la Constitution
Dans le droit constitutionnel occidental classique, la Constitution qui est généralement écrite, supérieure
aux autres normes juridiques fait l'objet de procédés d'établissement particuliers, solennels. Le procédé le
plus souvent retenu depuis le XVIIIe siècle consiste à avoir recours à une Assemblée constituante ou au
gouvernement approuvé par le peuple. Un procédé qui permet de respecter le principe de souveraineté
démocratique. Assemblée ou gouvernement exercent alors le pouvoir constituant au nom du Souverain.
B le pouvoir constituant
On admet généralement que l'organe qui élabore la Constitution détient un pouvoir constituant :
- originaire (ou inconditionné) notamment à la naissance d'un État ou à l'occasion d'un changement
complet de régime politique (révolution). Dans ce cas l'organe agit au nom du souverain en toute liberté.
- institué (c'est-à-dire conditionné) les conditions étant généralement prévues par la Constitution
précédente ou une loi spéciale. C'est le cas lorsqu'il y a simple révision. Ici l'organe agit au nom du
souverain mais est lié par des obligations, interdits fixés au préalable.
3. La protection de la Constitution
Cette protection de la Constitution écrite se justifie évidemment par l'importance des règles ou garanties
pour les libertés qu'elle contient. Cette protection peut se manifester de deux façons. Par la mise en place :
- d'une procédure spéciale de révision qui sera longue, complexe pour éviter que la Constitution ne soit
modifiée trop facilement
- d'une procédure de contrôle de la conformité à la Constitution des normes qui lui sont inférieures pour
éviter que de telles normes soient édictées et viennent ainsi enfreindre et modifier implicitement la
Constitution.
NOTA Dans le cas rare où une Constitution est contenue dans une loi ordinaire, il n'existe pas de
procédure spéciale pour l'élaborer ou la réviser. On la dit alors souple. C'est le cas à certains détails prés
en Angleterre où le Parlement peut adopter suivant la procédure ordinaire toutes les lois constitutionnelles
écrites et ensuite les modifier, voire les abroger.
c) exercice du contrôle
Le contrôle de constitutionnalité effectué par un juge peut intervenir selon deux mécanismes très
différents :
1- le contrôle par voie d'exception
- Définition : C'est un contrôle effectué par un juge ordinaire, non spécialisé à l'occasion d'une
quelconque action en justice. Le justiciable invoquera le non respect de la Constitution (= une exception
d'inconstitutionnalité) par la loi appliquée à son cas. Et le juge en conséquence vérifiera si cette loi est
conforme ou non à la Constitution.
- Origine : Le contrôle par voie d'exception est né et s'est développé aux États-Unis au XIXe siècle. Dans
une décision Marbury contre Madison (1803), la Cour Suprême américaine a considéré que le juge
ordinaire avait le pouvoir de faire un tel contrôle. La cour a estimé que ce contrôle était inhérent à la
fonction de juger. Car le juge doit toujours faire prévaloir la norme supérieure sur la norme inférieure ; ici
la Constitution sur la loi. En cas de contradiction, il ne fera pas application de la loi.
Dans la pratique, les juges ordinaires américains sont habilités à examiner le respect des lois par rapport à
la Constitution d'un État fédéré ou par rapport à la Constitution fédérale. La Cour suprême n'intervient
qu'en dernier recours comme juge d'appel.
Nota : Le Conseil constitutionnel comme tout tribunal constitutionnel exerce principalement le contrôle
de conformité des lois ordinaires à la Constitution. Ce contrôle a fait l'objet de deux extensions, l'une par
rapport à son objet, l'autre par rapport à son déclenchement :
- objet. Elle est intervenue en 1971 à la suite d'une décision du Conseil constitutionnel concernant la
liberté d'association. Le Conseil a admis qu'il devait faire un contrôle par rapport à la Constitution au sens
large, c'est-à-dire la Constitution et son Préambule qui renvoie lui-même à la DDHC de 1789 et au
Préambule de 1946 ; ce qui revenait à considérer que ces derniers textes et les libertés fondamentales
qu'ils contiennent avaient valeur constitutionnelle.
- déclenchement. Une réforme constitutionnelle de 1974 a permis que le Conseil constitutionnel soit saisi
en plus des autorités déjà prévues (Le Président de la république, le Premier ministre, les Présidents des 2
chambres), par 60 députés et 60 sénateurs. Aujourd'hui le Conseil constitutionnel est concurrencé dans
son rôle de protecteur des libertés par le juge ordinaire lorsque ce dernier exerce un contrôle de
conventionnalité de la loi par rapport aux traités (notamment la Convention européenne des droits de
l'homme). (Voir sur ce point l'opinion de D. Rousseau).
NOTA Une réforme constitutionnelle qui a échoué en 1988 (en raison de l'opposition du Sénat) a proposé
l'élargissement de la saisine du Conseil constitutionnel. Il s'agit de permettre au citoyen ordinaire de saisir
indirectement le Conseil. La procédure fonctionnerait en 3 temps.
1 devant un juge ordinaire, tout citoyen pourrait invoquer une violation de ses droits fondamentaux (= de
la Constitution au sens large) par la loi qu'on lui applique
2 si le juge estime la question sérieuse, il la transmet devant la juridiction la plus haute : le CE ou la C de
C selon le type de droit ou de juridiction concerné (droit privé ou droit public)
3 Si ces tribunaux jugent la question recevable, ils la transmettent au Conseil constitutionnel.
Notons que cette réforme très complexe à mettre en œuvre ne change pas fondamentalement la nature de
notre contrôle de constitutionnalité des lois ; il reste malgré les apparences un contrôle par voie d'action
qui existera a priori et a posteriori.
4. L'abrogation de la Constitution
La Constitution peut être totalement ou partiellement abrogée. Cela ne pose pas de difficultés
particulières dans le cas de constitutions coutumières. Apparaissent alors de façon plus ou moins
progressive, des coutumes contraires aux coutumes constitutionnelles existantes qui peuvent les abroger
ou les remplacer facilement car elles ont même valeur juridique. Dans le second cas, celui des
Constitutions écrites, cette abrogation partielle ou totale doit être soigneusement organisée et contrôlée
sans quoi des dérapages peuvent intervenir.
Le droit constitutionnel occidental classique est né notamment des Révolutions anglaise au XVIIème
siècle puis américaine et française au XVIIIème siècle. Ces révolutions sont à l'origine de ses principes
essentiels ; principes toujours valables et capables de s'universaliser (voir leur adoption par les
démocraties d'Europe de l'Est lors de la chute de l'URSS par exemple).
Ces principes sont à la fois :
- des principes constitutifs : c'est-à-dire des principes dont découlent certaines règles, normes
d'organisation concrètes incorporées au droit constitutionnel occidental.
- des principes régulateurs : au sens où leur mise en œuvre par les États est une tâche jamais achevée.
Aucun État ne saurait dire qu'il est devenu un État de droit en tous domaines, que la protection des
libertés y est pleinement assurée sur son territoire, etc.
Ils sont caractéristiques de l'idéal moderne d'émancipation que porte l'Occident depuis le XVIIIème siècle
(Les Lumières). Le droit constitutionnel occidental se légitime en effet par l'idée que l'application de ces
principes doit nous permettre de nous libérer, de progresser, de rejeter la barbarie. Évidemment, nous
savons que la réalisation de ces principes nous renvoie à un futur, sans doute inatteignable. Le projet
occidental ne s'inscrit donc pas dans le présent, dans le réel mais dans un possible-impossible. Cet aspect
utopique est cependant la principale force du droit constitutionnel occidental classique. Car il contraint les
États occidentaux à la modestie, à l'effort contrairement aux États totalitaires qui prétendent toujours
avoir atteint des objectifs grandioses et vivent dans le mensonge.
Quelle est sa faiblesse ? C'est qu'il repose sur un "optimisme transcendantal". Nous voudrions tous la
liberté, le progrès ; il y aurait un accord universel potentiel autour de certaines valeurs humanistes. Mais
cet optimisme n'a plus lieu d'être après Auschwitz. Nous avons fait cette expérience inimaginable pour
Rousseau, Voltaire qu'un peuple "civilisé", vivant selon le droit des Lumières pouvait approuver un
régime raciste qui a fini par nier l'humanité de l'homme en organisant un génocide (la Shoah). Expérience
qui s'est répétée depuis sous d'autres formes au détriment d'autres peuples. Après la Shoah, le droit
constitutionnel occidental a perdu de sa crédibilité ; il est entré en crise. Une crise que semble pourtant
ignorer nombre d'interprètes de ce droit qui se contentent de proposer des analyses internes et
techniciennes de nos Constitutions.
On peut dégager au moins 4 principes tous liés logiquement entre eux.
§ 1. L'État de droit
A Définition
On entend par État de Droit, un État dans lequel tous les individus ou collectivités ont leurs activités
déterminées et sanctionnées par le droit.
Un État de droit s'oppose à un État où règne l'arbitraire, le bon plaisir du prince ; bref, l'État où certaines
personnes, autorités ne voient pas leurs activités et pouvoirs encadrés, limités par le droit. C'est l'Etat de
police.
Nota: il faut distinguer entre les notions juridique et politique de l'État de droit. La notion politique
identifie État de droit et État libéral (Etat qui protège les libertés fondamentales). Cependant, les deux
notions peuvent être reliées. On ne voit pas en effet comment un État qui se voudrait un État de droit au
sens juridique ne serait pas aussi en partie un Etat de droit au sens politique ; au sens où il est bien obligé
de respecter un minimum de libertés fondamentales tout simplement s'il veut être obéi ou être efficace.
B Historique
Un des moments essentiels dans l'apparition de l'Etat de droit en Occident a été la formalisation d'un
principe fameux en droit pénal : le principe de légalité des délits et des peines. Ce principe a été énoncé
C Sanction
Il faut insister sur le fait que la notion d'État de droit est vide, n'induit pas de conséquences pratiques s'il
n'y a pas de sanction, si les règles juridiques ne voient pas leur application contrôlée.
Deux contrôles cumulés ou non sont possibles :
- le contrôle politique : par exemple, aujourd'hui le président de la République en France est le garant
politique du respect de la Constitution (art. 5) par les autres institutions politiques
- le contrôle juridictionnel : par exemple, aujourd'hui, le Conseil constitutionnel est le garant
juridictionnel du respect de la Constitution par le Parlement (art. 61).
§2 La représentation démocratique
Le droit constitutionnel occidental classique ne connaît et n'organise que des régimes politiques fondés
sur le principe de représentation démocratique ; c'est-à-dire des régimes où le peuple (ou la nation) ne
gouvernent pas directement. Ils le font seulement à travers des institutions politiques ou administratives
composées de représentants élus. En France, ce sont par exemple, les députés à l'Assemblée Nationale, le
président de la République française pour les institutions politiques, les conseillers généraux, municipaux,
régionaux pour les institutions administratives.
Les Français au XVIIIe siècle ont largement contribué à l'élaboration d'une doctrine de la représentation
(notamment grâce à Montesquieu et Sieyès). Une doctrine qui au moment de la Révolution n’a presque
pas rencontré d’adversaires. Ainsi, Aulard dans son Histoire politique de la Révolution Française, Paris,
A. Colin, 1901, reéd. 1926, p. 257 rappelle que sous la Révolution « Tout le monde semble d'accord pour
établir une république représentative. L'idée que le Peuple pût et dût exercer directement sa souveraineté
ne fut guère formulée, à ma connaissance, que par un membre de l'assemblée électorale de Seine et Oise,
qui proposa un mandat d'après lequel les députés « demanderaient que le peuple exerçât sa souveraineté
non par des délégués, mais par lui-même ». Cette motion ne fut même pas discutée.
A Justification
Le passage de la multitude à l’unité, la constitution d’un corps politique (ou incorporation) permettant la
formation de l’Etat et de tous ses organes peut être assimilé à un phénomène de représentation. Quelque
uns vont parler au nom de tous. Entendue de cette façon, la représentation n’est pas une idée moderne.
Elle est connue sous l’antiquité grecque et romaine. Selon Mommsen, « les pouvoirs de l’Etat n’exercent
pas un droit propre ; ils exercent tous par représentation les droits du peuple ; le prince lui-même n’est
a) Arguments favorables
1. Arguments pratiques (Montesquieu)
- l'impossibilité d'organiser dans les grands États des systèmes de gouvernement direct (Cf. les exceptions
des cantons suisses de Glaris, d'Unterwalden et d'Appenzell = système des assemblées générales du
peuple, "Landsgemeinde").
- la lourdeur et la complexité des tâches de gouvernement.
Ces caractères les rendent impraticables par le peuple. "Le grand avantage des représentants, écrit
Montesquieu, c'est qu'ils sont capables de discuter les affaires. Le peuple n'y est point du tout propre ; ce
qui forme un des grands inconvénients de la démocratie" in l'Esprit des lois Livre XI Chapitre VI. Pour
autant, le peuple peut entrer et doit entrer dans le Gouvernement pour choisir ses représentants, "ce qui est
très à sa portée. Car, s'il y a peu de gens qui connaissent le degré de la capacité des hommes, chacun est
pourtant capable de savoir, en général, si celui qu'il choisit est plus éclairé que la plupart des autres...".
Nous ne pouvons effectuer des tâches de gouvernement ni évaluer exactement comment ceux qui en sont
chargés les maîtrisent mais nous pouvons au moins juger de la compétence générale de nos représentants.
Notons que le rejet de la technique du référendum (comme technique de démocratie directe sans
intervention des représentants) par les pays anglo-saxons est justifié aujourd'hui encore souvent par cet
argument. Il reste que certains Etats américains comme la Californie les appliquent (référendum, recall)
2. Arguments théoriques (Madison-partisans de la souveraineté nationale)
- facteur de stabilité et de vertu : La démocratie directe est soumise aux désirs multiples et changeants qui
peuvent émaner du peuple. La représentation introduit de la stabilité, homogénéise la volonté du peuple et
peut même la limiter. Elle permet surtout aux représentants de faire des lois correspondant à l'intérêt
général ; un intérêt dont les individus ne sont pas forcément conscients eux-mêmes.
CF Madison The Federalist n°10 "The effect of the first difference is, on the one hand, to refine and
enlarge the public views, by passing them through the medium of a chosen body of citizens, whose
wisdom may best discern the true interest of their country". Madison préfère la République entendue
comme démocratie représentative à la démocratie directe.
- compatibilité avec l’idée de Nation : la Nation au sens moderne n’est pas un être concret. Elle n’a pas de
volonté empirique identifiable. Elle doit donc être représentée, c’est-à-dire incarnée. La représentation en
droit public diffère sur ce point avec la représentation en droit privé. Il n’y a pas ici de représenté qui
confie un mandat au représentant.
b) Arguments critiques
1 arguments logiques (Rousseau-Sieyès)
La représentation est impossible si l’on veut respecter le principe de souveraineté démocratique selon
Rousseau. Le peuple sauf à ne plus être souverain ne saurait céder ou aliéner sa volonté au profit de
délégués parlant en son nom. Autrement il ne serait plus souverain, il ne serait plus le peuple. La volonté
n’est pas transmissible ; c’est un attribut essentiel, indétachable de la personnalité du peuple. La seule
solution est une démocratie directe ou indirecte (où les délégués ou « commissaires » obéissent à des
consignes données par ceux qui les ont élus).
B Mécanisme juridique
Il repose entièrement sur la mise en place d'un mandat représentatif : le représentant (un député par
exemple en France) va bénéficier d'un mandat qui a deux caractéristiques. C'est un mandat :
a) collectif le représentant représente l'ensemble de la Nation (ou du Peuple) et non pas les individus qui
l'ont nommé ou qui l'ont élu. L'article 7 de la première constitution française de 1791 précise : "Les
représentants nommés dans les départements ne seront pas les représentants d'un département particulier
mais de la Nation entière".
exemple : un député français élu de la 1e circonscription de Meurthe et Moselle n'est pas député de cette
circonscription ou encore de la Lorraine : il est député de la Nation française tout entière.
b) non impératif le représentant est en droit complètement libre. Il a entière liberté d'opinion, de parole, de
vote (notamment par rapport à ceux qui ont permis son élection, l'ont élu). Il n'existe aucune
subordination juridique de d'un représentant élu à ses électeurs. En conséquence, le représentant est
irresponsable. En droit, il n'a pas de comptes à rendre à ceux qui l'ont désigné. Il ne peut donc être
révoqué. Par exemple, il ne peut démissionner sur la pression de ceux qui l'ont nommé ou élu ou encore il
ne saurait rédiger une lettre de démission en blanc. cf. article 27 de la Constitution de la Vème
République (« Tout mandat impératif est nul »).
Illustration: Condorcet : « Mandataire du peuple, je ferai ce que je croirai le plus conforme à ses intérêts.
Il m'a envoyé pour exposer mes idées, non les siennes ; l'indépendance absolue de mes opinions est le
premier de mes devoirs envers lui ».
C. Évolution de la représentation
Double évolution :
D La « crise » de la représentation :
Plusieurs symptômes au moins peuvent être identifiés :
2 de façon insidieuse
C’est l'intervention dans le fonctionnement même des institutions politiques élues (défendant en principe
l'intérêt général) d’organismes défendant des intérêts particuliers de type économique, politique, social. Il
s’agit des groupes de pression (ou lobbies), des syndicats et partis politiques qui cherchent à avoir une
influence sur les représentants au risque de menacer leur liberté d'expression. Dès lors le risque est que les
représentants agissent sans le dire selon un mandat impératif.
Exemple : en France, les partis politiques selon l'article 4 de la Constitution française de 1958 devraient
seulement "concourir à l'expression du suffrage". En fait, ils font bien plus. Ils sont conduits à établir des
programmes électoraux, à investir des candidats et à financer leur campagne ou encore à les encadrer
lorsqu'ils sont élus... etc. ; mais, par ce biais, les partis politiques influencent sinon déterminent largement
les positions de nos représentants. Par exemple, à l'Assemblée Nationale ou au Sénat, les élus sont
prisonniers pour la plupart d'une discipline de vote partisane. Ils votent en fonction des consignes données
par les chefs des groupes parlementaires, émanations de partis politiques. Du coup, le mandat
représentatif de nos députés et sénateurs devient en grande partie théorique.
Exemple : la parité sociale, ethnique, religieuse est de plus en plus revendiquée. Mais cet objectif pose
deux types de problèmes.
1) Le but originel de la représentation était de favoriser la formation, l’expression de l’intérêt général et
non de refléter la composition de la société ou d’exprimer la volonté de ses différentes composantes
politiques, sociales, ethniques, etc... La recherche de la parité si sa logique est poussée jusqu’au bout
contredit la représentation. En effet, une Assemblée composée à l’image de la société « réelle » risque de
devenir une réunion de mandataires d’intérêts particuliers.
2) La parité peut conduire à l’introduction de procédures portant atteinte au principe d’égalité. Des
citoyens, indépendamment de leurs mérites et de leur réelle conviction (critère subjectif), auront un poste
de représentant en fonction de leur sexe, de leur origine ethnique (critère objectif). C’est contraire à l’art.
6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le Conseil constitutionnel l’a rappelé
lui-même dans une décision du 18 novembre 1982.
Ce principe nous vient de la Grande-Bretagne. Ce sont les anglais qui, à partir du 17ème siècle, ont
commencé à le mettre en pratique. Ce sont les premiers qui ont essayé de diviser, de partager le pouvoir
politique qui n'appartenait traditionnellement qu'à un seul titulaire, le Roi. Mais dans un second temps, ce
sont les penseurs politiques français (dont Montesquieu) et américains qui au 18ème siècle ont théorisé et
popularisé avec succès ce principe qu'on peut énoncer ainsi : une même autorité ne doit pas cumuler entre
ses mains tous les pouvoirs au sein de l'Etat. On peut dire qu'avec les révolutions française et américaine,
la séparation des pouvoirs devient à la fois un "lieu commun" et un "dogme" de la pensée politique :
- un lieu commun car ce principe n'est pas contesté ou critiqué chez les partisans des Lumières. Même
Rousseau qui est souvent présenté comme un adversaire de la théorie y est favorable. Il déclare presque
banalement dans le Contrat Social : "Il n'est pas bon que celui qui fait les lois les exécute, ni que le corps
du peuple détourne son attention des vues générales pour la donner aux objets particuliers" liv. III, chap.
IV. Ce consensus ne signifie pas pour autant que l'on s'entend sur les modalités de la séparation des
pouvoirs. A cet égard, les Constitutions de 1791 et de 1793 organisent de façon très différente la
séparation des pouvoirs.
- un dogme car on arrive à considérer qu'une société qui ne respecte pas le principe de séparation des
pouvoirs est inévitablement despotique ou tyrannique. Sa Constitution n'est donc que de papier. D'où
l'article 16 de la DDHC de 1789 qui déclare qu'une société dans laquelle la séparation des pouvoirs n'est
pas déterminée n'a pas de constitution.
Revenons d'abord sur l'expérience anglais.
En Grande-Bretagne, à l'époque féodale finissante, les pouvoirs pour l'essentiel étaient confondus dans les
mains du Roi (comme dans les autres monarchies européennes). Le monarque anglais détenait ainsi le
pouvoir de faire la loi, de l'exécuter et d'exercer la justice. Cependant, dès le 13ème siècle, apparaît un
Parlement comprenant des représentants répartis entre deux chambres selon des critères sociaux et
géographiques. En 1295, se réunit ce qu'on appelle le "Parlement modèle" composé de :
- représentants de la noblesse et de l'église qui forment la Chambre des Lords
- représentants des bourgs et des comtés qui forment la Chambre des Communes.
Ce Parlement, fort de sa légitimité "nationale" va tenter d'arracher au roi le pouvoir de faire la loi
ordinaire : soit de la proposer et de la voter. Comment va-t-il s'y prendre? Les parlementaires vont exercer
un chantage de plus en plus efficace sur le Roi en profitant d'une prérogative que la grande Charte de
1215 (§2) leur avait donnée : les impôts ne pouvaient être levés par le Roi sans leur consentement. Du
coup, en échange de l'acceptation d'un impôt, le Parlement exigera du roi qu'il signe les pétitions (bills)
votées par les parlementaires. Ce qui a pour effet de leur donner valeur de loi (statutes). Familièrement
dit, si vous voulez de l'argent, il vous faudra accepter nos propositions de loi.
Tout ira bien pour le Parlement jusqu'au 17ème siècle. En effet, à cette époque, les souverains Stuart vont
se rebeller : ils vont notamment prétendre créer des impôts sans le consentement du Parlement. C'est une
Ce principe s'analyse chez Montesquieu et ses contemporains en une recette de gouvernement destinée à
éviter le despotisme.
A. La justification du principe :
Montesquieu part du constat que toute personne qui détient des pouvoirs, (a fortiori tous les pouvoirs),
aura tendance à en abuser. Autrement dit, il aura tendance à utiliser ses compétences sans respecter
aucune limite, notamment de droit. C'est une "loi" psychologique ou sociologique qu'on peut vérifier
facilement. Les français de l'époque pensent à la Monarchie absolutiste, celle d'un Louis XIV par exemple
usant sans retenue de lettres de cachet.
Il faut donc faire en sorte que s'instaure un "Gouvernement modéré" ; idéal de Montesquieu comme des
premiers révolutionnaires français, américains... Autrement, les libertés, la sûreté comme on disait à
l'époque ne seront pas garanties.
La solution : diviser le pouvoir, ne pas le confier dans son entier à un seul titulaire quel qu'il soit ( Roi,
Prince, Sultan, Peuple). S'il est distribué à différents individus, organes, alors la puissance d'État sera
mieux répartie, freinée et du coup, la tyrannie sera évitée. On veillera en conséquence que les trois
grandes fonctions étatiques distinguées par Montesquieu (et avant lui par Locke notamment) ne soient
jamais confiées à un même titulaire. Quelles sont ces trois grandes fonction ?
Par ordre díimportance (et donc hiérarchiquement) :
1 la fonction de légiférer : "faire des lois pour un temps, ou pour toujours, la corriger ou l'abroger"
2 la fonction exécutrice : exécuter les lois et au sens large gouverner: "faire la paix ou la guerre, envoyer
ou recevoir des ambassades, établir la sûreté et prévenir les invasions". (= pouvoir fédératif selon Locke).
3 la fonction de juger : punir les crimes ou juger les différends des particuliers.
Or, nous dit Montesquieu, "Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps de principaux, ou des
nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs".
B. L'originalité du principe :
A. La séparation horizontale
Pour aller plus loin :
a. Notion
C’est cette séparation qui va être théorisée surtout par les auteurs européens, notamment Montesquieu. Ce
dernier va distinguer trois grandes fonctions étatiques qui ne doivent jamais être confiées à un même
titulaire au sommet de l’Etat. Par ordre d’importance (et donc hiérarchiquement) :
- la fonction de légiférer : « faire des lois pour un temps, ou pour toujours, la corriger ou l'abroger »
- la fonction exécutrice : exécuter les lois et au sens large gouverner : « faire la paix ou la guerre, envoyer
ou recevoir des ambassades, établir la sûreté et prévenir les invasions ». (= pouvoir fédératif selon
Locke).
- la fonction de juger : punir les crimes ou juger les différends des particuliers.
Or, nous dit Montesquieu, « Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps de principaux, ou
des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs ».
Mais, une fois que l’on a admis la nécessité de répartir les fonctions étatiques (exécuter, légiférer, juger)
entre différentes autorités, il reste à établir comment cette répartition va se faire. Différentes difficultés
surgissent qui appelleront des solutions divergentes : on ne s’entendra pas sur le choix des titulaires de
ces fonctions, sur la nature de leurs relations (seront-ils indépendants ou dépendants). Pourront-ils agir les
uns sur les autres ? etc.
La difficulté la plus grande est la suivante : comment faire en sorte que l’autorité qui est chargée de la
fonction législative, (fonction la plus noble mais aussi la plus importante) ne profite pas de sa suprématie
pour se saisir des autres fonctions et devienne finalement despotique. Dans ce cas, on aurait échangé une
tyrannie (celle du Roi) pour une autre (celle du Parlement)... Deux grandes solutions vont être imaginées
qui vont conduire à l’édiction de Constitutions très différentes au 18ème siècle.
B. La séparation verticale
a. Notion
La séparation verticale recherche un équilibre des pouvoirs entre le sommet et la base de l’Etat.
L’autonomie concédée à des pouvoirs locaux permet de limiter le pouvoir central. Il appartient aux
américains d’avoir compris que la préservation des la libertés des individus exigeait qu’une séparation des
pouvoirs n’existe pas seulement qu’au sommet de l’Etat. D’autres « balances » devaient être mises en
place notamment entre le pouvoir central et des pouvoirs décentralisés et fédérés. J. Adams en 1814 voit
dans la Constitution américaine ainsi deux balances fédérales : gouvernement central et Etats américains
fédérés, Sénat fédéral et législatures fédérales.
C’est évidemment le fédéralisme inventé par les États-Unis en 1787 qui retient l’attention et que nous
décrirons en premier. En effet, la décentralisation était déjà connue et pratiquée dans la vieille Europe
sous le féodalisme (autonomie des villes, Parlements, etc. ) et garantie (Cf. la Charte de 1215 anglaise).
b. Le fédéralisme
« Dans les conditions prévues par la loi organique, les projets de délibération ou d'acte relevant de la
compétence d'une collectivité territoriale peuvent, à son initiative, être soumis, par la voie du référendum,
à la décision des électeurs de cette collectivité.
« Lorsqu'il est envisagé de créer une collectivité territoriale dotée d'un statut particulier ou de modifier
son organisation, il peut être décidé par la loi de consulter les électeurs inscrits dans les collectivités
intéressées. La modification des limites des collectivités territoriales peut également donner lieu à la
consultation des électeurs dans les conditions prévues par la loi. »
Avec les nouveaux titres XII et XIII de la Constitution, on aboutit à une sorte de « régionalisation » qui
rapproche la France, État unitaire d’un État fédéral (où les Etats fédérés ont un pouvoir législatif et
réglementaire). Ce type de régionalisation existe déjà en Italie et en Espagne. Déjà, dans près de la moitié
des Etats membres de l’Union européenne ont un pouvoir législatif.
Nota Italie : Dès 1947, la Constitution italienne a divisé l'Italie en 20 régions dotées d'un pouvoir
législatif dans des matières nombreuses énumérées à l'article 117 : police locale, assistance publique,
médicale, urbanisme, mais dans « les limites des principes fondamentaux établis par les lois de l’Etat ».
D’autre part, les régions italiennes peuvent faire des propositions aux chambres pour modifier les lois de
la République italienne. La réunion de 5 conseils régionaux peut déclencher un référendum d'abrogation
de ces lois. L'abrogation reste cependant exclue en matière financière et fiscale, en matière pénale et à
propos des lois de ratification des traités (article 75). Enfin, aux termes de l’article 123, les régions
déterminent elles-mêmes leur statut établissant leur organisation intérieure. Cependant une loi de la
République doit approuver ces statuts.CONCLUSION
Rappelons que la séparation des pouvoirs en tant que principe régulateur se traduit par une tâche encore à
accomplir, qui n’est jamais terminée. Cette tâche est celle d'éviter que ne se reconcentre le pouvoir sous
toutes ses formes : politique, économique, social.
§4. La protection des libertés fondamentales
Dernier des principes du droit constitutionnel occidental classique. Mais last non least, c'est celui qui
justifie ou confirme tous les autres.
c) En dehors de l'État
Il s'agit de ce qu'on appelle les " droits de l'homme " ; soit des droits qui donnent aux individus ou
groupes d'individus la possibilité de réaliser en toute indépendance leur destinée personnelle au sein de la
société civile (sphère ainsi distinguée de l'État et même protégée contre lui). De tels droits caractérisent
une liberté-autonomie au sens moderne (comme on l'entend à partir du XVIIe siècle) pouvant être exercée
hors de l'Etat, voire contre lui ; ce qui revient à limiter les prérogatives étatiques.
- Ces droits ont essentiellement une origine anglaise et hollandaise. (Cf Pour aller plus loin : B. Kriegel
La politique de la Raison, Payot,1994). Nous devons à Hobbes la formulation du droit à la sûrete : chaque
homme a droit à son corps, à sa vie. En conséquence personne ne doit être esclave et aucun pouvoir n'a
droit de vie et de mort sur personne. À Spinoza, nous devons la formulation de la liberté de conscience :
chaque homme a le droit d'opiner comme il lui semble ce qui fonde les libertés d'opinion et d'expression.
Aucun pouvoir ne peut contraindre le jugement en conscience. À Locke, nous devons le droit ou la
liberté de propriété : chaque homme a le droit de s'approprier une part des objets de la nature. Ce qui
implique que l'Etat ne peut s'approprier la domination de la Nature à la place des individus. À tous ces
auteurs nous devons l'idée d'égalité abstraite des individus fondée sur une idée propre aux religions du
Livre : l'identité de l'humanité.
Parmi toutes ces libertés, l'une des plus essentielles est bien sûr la liberté d'opinion dont la garantie par le
droit constitutionnel occidental conduit à le distinguer fortement d'autres droits constitutionnels (fasciste,
théocratique...). Un des corollaires de cette liberté est la liberté religieuse. Cette liberté implique la mise
en place d'une séparation entre l'Eglise et l'Etat ; une séparation en France qui ne signifie pas
indépendance ou indifférence réciproque. Il s'agit en fait plutôt d'une séparation tolérante connue sous le
nom de régime de laïcité. Ce régime découle de l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du
citoyen de 1789 : " Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses... " et de la loi du 9
décembre 1905 portant séparation entre l'Eglise et l'Etat. Le contenu de la laïcité tient en deux points :
- L'Etat ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. L'Etat ne reconnaît aucune religion. Il n'y
a pas de religion d'Etat. Tous les cultes sont sur le même plan. En conséquence, l'Etat ne saurait financer
aucun culte ; il pourra cependant subventionner certaines activités d'intérêt général s'exerçant dans un
cadre confessionnel (hospices, crèches), rémunérer des ministres du culte quand ceux-ci rendront des
services à des personnes publiques ...
- L'Etat garantit la liberté de conscience : l'Etat s'oblige lui-même à respecter cette liberté et à en prévenir
les violations. Cela implique notamment qu'il garantisse le droit pour chacun d'avoir la religion de son
choix et d'en voir protéger le secret (CE, 9 juillet 1943, Ferrand), le droit pour tout agent public de ne pas
être défavorisé en raison de ses croyances (CE Melle Weiss, 28 avril 1938).
B droits-libertés et droits-créances
Les droits fondamentaux garantis aujourd'hui par les Constitutions modernes peuvent être des droits
individuels mais aussi des droits sociaux. Les premiers ont été proclamés au XVIIIème siècle
essentiellement et correspondent à l'idéologie libérale. Ils conduisent à ce que l'État s'abstienne. Les
seconds ont été proclamés vers la fin du XIXème siècle et correspondent plutôt à l'idéologie socialiste,
voire communiste. Ils conduisent à ce que l'État intervienne.
a) Pour les libéraux : les individus doivent avant tout compter sur eux-mêmes. Les libertés sont donc des
possibilités, potentialités que nous possédons déjà et que devons développer par nous mêmes ; ce sont
selon l'expression du doyen Hauriou des « routes ouvertes au devant de l'indépendance et de l'initiative
des individus ». Ce n'est pas l'Etat qui nous rend libre, nous le sommes déjà virtuellement.
Double conséquence :
- la reconnaissance par l'Etat que tout homme [quelle que soit son origine sociale, culturelle, ethnique] est
libre de naissance et la garantie par l'Etat que cet homme pourra jouir de sa liberté sans entraves. On en
déduit que le droit constitutionnel proclamera des droits individuels (en tant que droits de s'exprimer,
d'agir en toute indépendance) et devra défendre le principe d'égalité devant et dans la loi. On trouve
l'énoncé de ces droits-libertés dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
- l'État se voit borné à une mission d'Etat-gendarme : soit la mission d'assurer la sécurité extérieure, la
justice, la police, un minimum de commodités communes... pour rendre possible l'exercice des droit
individuels. Pour le reste, il doit s'abstenir. Cela veut dire que tous les autres domaines doivent être pris
b) Pour les socialistes : les individus ne sauraient compter sur eux-mêmes uniquement. Il faut que l'État
nous aide pour que nous soyons effectivement libres. Si l'État ne le faisait pas, si on nous laissait se
débrouiller avec des droits individuels comme le veulent les libéraux, alors seulement certains individus
seraient libres : ceux qui sont les plus intelligents mais aussi les plus favorisés par leur naissance, leur
milieu familial, social, etc.
En conséquence, les libertés deviendront réelles, réalisables pour tous que si nous pouvons réclamer à
l'État de nous aider, surtout parmi nous les plus défavorisés. Cela implique la mise en place de garanties
collectives qu'on peut analyser comme des "droits-créances" (= droits de demander à l'État certaines
prestations).
Double conséquence :
- l'octroi de droits collectifs sociaux et économiques modulés en fonction des besoins de chacun : droit à
la santé, à des allocations sociales, droit aux congés payés, aux loisirs, à l'assistance en cas d'invalidité...
(Cf. la Constitution soviétique : droit à un emploi). On trouve l'énoncé de ces droits dans le Préambule de
la Constitution de 1946.
- l'État voit ses missions s'élargir : d'où l'expression moderne d'Etat-Providence chargé de créer une
liberté et une égalité de fait. Ce qui passe par le développement des institutions administratives chargées
de services publics (enseignement public, sécurité sociale).
C'est le rôle des Cours constitutionnelles, en France du Conseil constitutionnel français d'essayer de
rendre compatibles, même complémentaires les droits individuels et collectifs. Une opposition peut
demeurer entre ces types de droits surtout si on pousse trop loin leur logique. Ainsi la préservation
acharnée des droits individuels peut conduire à un Etat minimaliste sans conscience social ; d'autre part
un développement excessif des droits sociaux pourrait créer un État tentaculaire compromettant nos droits
individuels.
A. L'intervention du législateur
La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 réservait déjà à la loi, expression de la
volonté du peuple, la réglementation des libertés. Ce principe a été constamment repris en France
notamment en 1946 (par exemple à propos du droit de grève) et en 1958. Concernant, notre Constitution,
l'article 34 dispose que " la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux
citoyens pour l'exercice des libertés ". Les conséquences de ce principe sont les suivantes :
- le législateur peut toujours proclamer une liberté qui n'a pas été consacrée par la Constitution ou son
Préambule. Il en a été ainsi dans le passé avec la liberté d'association (loi de 1901). L'exécutif se trouve
alors lié par la loi et ne saurait y déroger par voie de réglementation.
- le législateur peut se contenter de déterminer le statut d'une liberté déjà consacrée par le constituant.
C'est le cas du droit de grève aujourd'hui.
Il appartient au juge de vérifier si les actes des particuliers ou de l'Etat sont conformes aux lois qui
réglementent des libertés : juge ordinaire dans le premier cas, juge administratif dans le second cas.
B. L'intervention du constituant
La Constitution peut elle-même consacrer une liberté. Ainsi dans la Constitution de 1791, on trouve au
titre 1er cette règle générale : "Le pouvoir législatif ne pourra faire aucune loi qui porterait atteinte et
mettrait obstacle à l'exercice des droits naturels consignés dans le présent titre et garantis par la
Plus récemment, le 14 octobre 2000 à Biarritz, les Etats de l’Union européenne ont adopté le projet d’une
« Charte des droits fondamentaux » que devront accepter les futurs adhérents. Cette Charte a été intégrée
dans la partie 2 du projet de Constitution européenne qui a été présenté au Conseil européen de
Thessalonique en mai 2004.
S 1. Les gouvernements
Classiquement, les Etats peuvent être distingués selon l’origine de la souveraineté qui les fondent et la
manière dont le pouvoir d’Etat est exerce. On parlera dans un cas de gouvernements et dans l’autre cas de
régimes (politiques). La recherche d’une classification des gouvernements est pratiquée depuis
l’Antiquité ; Platon et Aristote en avaient déjà établi une. La typologie des régimes est plus récente. Elle a
été développée surtout à l’époque moderne, soit à partir du 18e siècle. On peut tout à fait combiner ces
deux genres de typologies.
§ 1. Les gouvernements
1. La notion de gouvernement
A définition
Les gouvernements (forma imperii) sont classés selon l’origine de la souveraineté. La distinction repose
sur la réponse à la question : « Qui gouverne et au nom de quoi ? ».
B origine
Ce critère a été utilisé par la pensée politique notamment à partir de Platon et Aristote. Pour différencier
les Etats, ces auteurs ont recherché qui gouvernait au sens large, ou encore qui était titulaire du pouvoir
d’édicter les normes juridiques. Ils ont ainsi décrit des formes de gouvernement dont certaines sont
devenues archaïques. Il en est ainsi de la « timocratie » (gouvernement de ceux qui recherchent les
honneurs).
Un tel critère est avant tout qualitatif (notamment pour Platon). En effet, chaque forme de gouvernement
est associée à certains caractères que l’on retrouve dans les Constitutions de ces gouvernements et chez
les gouvernants eux-mêmes (il s’agit de leurs « âmes »). La prise en compte de ces caractères permet
alors de juger et de hiérarchiser les formes de gouvernement.
Par exemple, chez Platon (La République, livre VIII), on trouve cette hiérarchie : 1. l’aristocratie des «
rois-philosophes » est associée à la sagesse 2. la timocratie est associée à la recherche des honneurs 3.
l’oligarchie est le gouvernement de ceux qui sont avides de richesse 4. la démocratie est fondée sur la
tolérance et l’égalitarisme 5. la tyrannie repose sur les passions (la peur, le désir bestial)
C évolution
Les théoriciens modernes de l’Etat (Bodin, Hobbes, Montesquieu) restent encore fidèles à ce critère. Par
exemple Hobbes dans le Léviathan explique que « la différence qui existe entre les Républiques repose
sur celle qui se trouve entre leurs souverains... ». D’où sa distinction entre trois types de Républiques (ou
États) :
1 quand le représentant (celui qui détient le pouvoir souverain) est un seul homme, la République est une
Monarchie
2 quand « c’est l’assemblée de tous qui voudront part à la réunion, c’est une démocratie ou une
République populaire »
3 quand « c’est l’assemblée d’une partie seulement de l’ensemble, on l’appelle Aristocratie » (p. 192).
Mais ils vont tenter de rationaliser la typologie fondée sur ce critère. C’est le cas de Montesquieu qui veut
s’appuyer sur les lois ou les Constitutions pour déterminer ce qu’il appelle « le principe » ou ce qui fait
agir chaque gouvernement. Il ne s’agit plus dit-il de s’appuyer sur « des choses d’accident comme les
vertus ou les vices du prince » tel Aristote. (p. 306 L’esprit des lois). Ils vont aussi hiérarchiser les
gouvernements de manière nouvelle : ainsi, pour Montesquieu : la République (principe : vertu), la
Monarchie (principe : honneur), le Despotisme (principe : crainte).
§ 2. Les régimes
b) Typologie contemporaine
Typologie utilisée aujourd'hui. Elle part toujours du critère de la séparation des pouvoirs et donc ne fait
que complexifier la typologie à partir Montesquieu.
Les régimes parlementaires contemporains monistes ou dualistes peuvent être classés en deux autres
types : majoritaires et non majoritaires
- Si les élections législatives conduisent à la victoire d'une coalition de partis peu nombreux, unis,
disciplinés (obéissant aux consignes de leurs leaders), alors on parle alors de régimes parlementaires
majoritaires. Ces régimes ont l'avantage d'être stables politiquement car le Parlement n'aura pas la
possibilité politique de s'opposer au Gouvernement et de le renverser. Ces régimes ont un inconvénient.
Ils connaissent en pratique une tendance à la confusion des pouvoirs au profit de l'Exécutif. On parlera de
tendance présidentialiste. Exemple : l’Angleterre, la R.F.A., le Japon, la France de la Vème République.
- Si les élections législatives conduisent à la victoire d'une coalition de partis nombreux, non unis,
indisciplinés (n'obéissant pas aux consignes de leurs leaders), alors on parle de régimes parlementaires
non majoritaires. Ces régimes ont l'inconvénient d'être instables politiquement car le Parlement a la
possibilité de s'opposer au Gouvernement et de le renverser (ce dont ils ne se prive pas). Dès lors, ils
connaissent une tendance à la confusion des pouvoirs au profit du Parlement. On parle de dérive vers le
Régime d'Assemblée. Exemple : l'Italie jusqu'en 1993, Israël, la France de la IVe République.
c) Critique de la classification moderne des régimes
a) l'État unitaire
C'est un État dans lequel l’exercice du pouvoir juridique d’État est monopolisé par un seul centre
politique ou Gouvernement central. Corollaire : tous les individus sont soumis au même Gouvernement
qui seul dispose d’un pouvoir normatif propre. Cela n’exclut pas que l’Etat unitaire admette en son sein
l’existence de collectivités territoriales capables de créer leur propre droit (règlements, lois). Mais dans ce
cas, les collectivités devront se soumettre à un droit commun minimal issu du gouvernement central.
Cette forme d'organisation qui caractérise l'État français actuel et la majorité des États dans le monde est
la plus ancienne. Historiquement, les premiers États occidentaux apparus au XIe, consolidés au XVIIe
siècle étaient unitaires.
On distingue deux types d'États unitaires : centralisés et décentralisés. Cette distinction doit être
relativisée en pratique. En effet, un Etat unitaire ne peut accepter une décentralisation complète sauf à
disparaître, démembré en plusieurs Etats. Donc chaque Etat recherche un équilibre entre centralisation et
décentralisation.
a) les États centralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est exercé seulement par des agents
nommés et soumis à l’autorité hiérarchique du Gouvernement central. Ils n’ont donc aucun pouvoir
juridique propre.
Un État centralisé est généralement déconcentré au sens où certains de ses agents bénéficiant de
délégations pourront être délocalisés. Exemple : le Préfet en France. La concentration est donc un mode
théorique d'organisation administrative.
b) les États décentralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est en partie confié aux individus
eux-mêmes qui, à travers certaines institutions administratives généralement élues vont s’administrer avec
un contrôle souple du Gouvernement central. Cette « libre administration » peut conduire lorsqu’elle est
très poussée à permettre à ces institutions de disposer d’un pouvoir normatif (réglementaire, législatif…)
autonome (Espagne, Italie) dans certains domaines. Mais ce pouvoir ne saurait être constituant ; donc
permettre aux institutions décentralisées de définir leur propre statut.
Le principe de « libre administration » se manifeste par le fait que les institutions décentralisées ont :
la personnalité juridique (ce qui leur permet d'avoir leurs propres agents publics et ressources).
disposent d'une compétence spécialisée sous le contrôle de l'État : en France on distingue la tutelle
(contrôle administratif exercé par le Préfet sur les personnes et les actes) du contrôle juridictionnel moins
b) L’Etat fédéral
C’est un État dans lequel le gouvernement central confie l’exercice de certaines compétences à des entités
(Républiques, Provinces...) qui vont se diriger elles-mêmes. Principe de « libre gouvernement ».
Corollaire : les individus seront soumis à des normes fédérales communes (Constitution fédérale, lois
fédérales...) et à des normes locales propres aux entités fédérées (Constitution, lois des entités fédérées).
Le gouvernement central conserve en général des compétences dites « régaliennes » : droit de faire la
guerre, droit d'avoir des représentations diplomatiques à l'étranger, droit de battre monnaie.
Nota : il est souvent difficile de distinguer entre un État fédéral et un État unitaire décentralisé. Cela parce
qu'il n'y a pas de différence essentielle entre décentralisation gouvernementale et décentralisation
administrative, État unitaire et État fédéral. En effet, en dernière analyse, la compétence des institutions
décentralisées et des entités fédérées dépend dans les deux cas d'un ordre juridique supérieur et peut être
modifiée par le pouvoir central. Il n'y a entre l'un et l'autre système qu'une "différence de degrés".
La coopération interétatique
La coopération internationale entre les Etats se traduit par la mise en place d’organismes destinés à gérer
certains domaines d’action communs. Le statut de ces organismes résulte d’un traité et le droit produit par
ces organismes est distinct du droit interne des Etats. En conséquences, les souverainetés nationales sont
préservées et aucun Etat nouveau n’est créé au-dessus des Etats. On parle alors de confédérations d’Etats.
Cependant, comme dans le cas de l’Union européenne, la coopération interétatique est si poussée dans
certains domaines (économiques, monétaires) qu’on aboutit à un système mixte en partie fédéral et
confédéral.
1. La confédération
1. La confédération
La confédération se présente comme l'association d'États unitaires ou fédérés qui acceptent de gérer
ensemble certaines compétences grâce à des organes communs. Ils forment une alliance dans un but de
coopération dans des domaines plus ou moins fondamentaux (économie, militaire...). En aucun cas, le ou
les organes communs ne constituent un autre État ni du point de vue interne (pour les individus membres
des États confédérés), ni point de vue externe (pour les autres États sur la scène internationale).
1) origine
Les confédérations modernes sont apparues au 18ème et 19ème siècles ; elles étaient fondées sur une
identité ou solidarité nationale qui ne pouvait s'exprimer par la création d'un seul État (État
unitaire/fédéral). Exemples :
- la confédération des États-Unis de l'Amérique du nord (1778-1787)
- la confédération germanique (1815/1886).
Ces confédérations, en tant que formes transitoires ont disparu assez vite lorsqu'elles ont pu déboucher sur
la création d'un seul État. Ex : 1787 pour les États-Unis et 1871 Pour l'Allemagne.
Les confédérations modernes (celles du 20e siècle) sont fondées plutôt sur une solidarité d'intérêts
(intérêts économiques, politiques...). Elles sont méconnues car en trop grand nombre, créées à l'occasion
de la conclusion de nombreux traités internationaux. On peut citer parmi les plus célèbres le
Commonwealth, dernier vestige de l'Empire colonial anglais, l'OTAN, la CEE (à laquelle a succédé l’UE
en 1992)), etc. Parmi les plus récentes, la Sénégambie (1982) qui a disparu depuis, la CEI qui s'est
substituée à la fédération de l'URSS et demain peut être l'alliance entre Bohème Moravie et Slovaquie, le
Canada et le Québec...
2) caractéristiques
On peut s'interroger sur la nature de l'Union européenne, notamment depuis l’adoption du traité de
Maastricht en 1992. Confédération ou fédération ? La réponse semble si difficile à donner que certains
auteurs ont créé une catégorie sui generis pour l’Union européenne. Par exemple, P. Pactet utilise la
notion d’« organisation supranationale ». On peut considérer que l’Union européenne est un système de
coopération original, très poussé dont le fonctionnement dans certains domaines est proche de celui d’une
fédération. Pour autant, l’Union européenne n’est pas un devenue un Etat ; elle peut toujours être
assimilée à une confédération.
A. Historique
À l’origine, il a été question de créer une Europe fédérale sur le modèle américain (les « Etats-Unis
d’Europe »). Mais cette voie s’est révélée sans issue. Le projet Briand, présenté le 7 septembre 1929 à
l’Assemblée générale de la SDN, n’a pas connu de suite. Il en a été de même avec le « message aux
Européens » qui avait conclu le congrès des mouvements fédéralistes les 8-10 mai 1948.
Le plan Shuman en tira les conséquences : il préfère une intégration plutôt économique que politique, de
procéder par étapes en créant des solidarités de fait plutôt que d’un seul coup. Le postulat était qu’en
procédant de manière pragmatique, on fabriquerait un engrenage qui aboutirait finalement à une solution
fédérale. On suggéra de commencer par la mise en commun de ressources comme le charbon et l’acier
(des ressources nécessaires pour faire la guerre ; leur mise en commun entre la France et l’Allemagne
devait empêcher toute nouvelle guerre). L’acceptation de cette proposition par 5 Etats (Allemagne,
Belgique, Italie, Luxembourg, Pays-Bas) fut formalisée par la signature du premier grand traité européen
instituant le 18 avril 1951 la CECA.
On peut dire que cette idée a à la fois réussi et échoué :
- la réussite, c’est évidemment que l’intégration économique s’est effectivement produite et renforcée
jusqu’à la création d’une monnaie européenne unique. Dans ce domaine, on peut parler d’un
fonctionnement quasi fédéral de la Communauté européenne. Les étapes auront été les suivantes :
• La C.E.E.A. : la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom) visant à promouvoir
l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et le développement d’une industrie nucléaire. 25
mars 1957
• La C.E.E. : la Communauté économique européenne qui tente de créer un marché commun, c’est-à-dire
un marché unique étendu aux territoires des 6 états signataires. Cela impliquait une union douanière (libre
circulation interne des marchandises et tarif douanier commun), la libre circulation des facteurs de
production et une protection de la libre concurrence. 25 mars 1957
• Le S.M.E. : le système monétaire européen de 1978.
Les 6 et 7 juillet, le sommet de Brême décide d'instaurer un système monétaire européen (SME). Il vise à
établir en Europe une zone monétaire stable, moins sensible aux grandes variations de taux de change
entre les monnaies européennes. Il se substitue au "serpent" monétaire, constitué en 1972.
• Le traité de Nice de 2001 (entré en vigueur en 2003). Il prévoit une nouvelle répartition des sièges au
Parlement européen, une nouvelle composition de la Commission et une nouvelle définition de la
majorité qualifiée au Conseil. Les Etats membres les plus peuplés perdent à partir de 2005, la possibilité
de proposer un deuxième commissaire.
- l’échec, c’est le fait que l’intégration économique n’a pas été relayée par une intégration politique
notamment dans les domaines de la diplomatie, de la sécurité intérieure et extérieure. Dans ces domaines,
il n’existe qu’une coopération institutionnalisée de type confédéral. Le traité de Maastricht a certes crée
une entité nouvelle, l’Union européenne chargée d’harmoniser les politiques dans ces domaines mais
cette entité n’a pas de personnalité juridique et notamment n’a pas de capacité d’engagement
international. Cet échec s’explique par le fait que ne s’est pas constitué comme l’espéraient les
fédéralistes, un Peuple de l’Union, une Nation européenne ou au moins une opinion publique européenne.
On comprend alors pourquoi l’Europe a été incapable d’agir de façon unie notamment lorsque les conflits
au sein de l’ex-Yougoslavie ont conduit à des génocides à répétition ou encore lorsqu’il s’est agi de
prendre position sur l’intervention américaine en Irak. L’idée d’une souveraineté européenne capable de
subsumer les souverainetés nationales reste une utopie.
b. Le Parlement européen
Le Parlement crée en 1957 était composé de représentants des Parlements nationaux. Depuis 1979, il est
élu au SU direct par les peuples des Etats membres. L’Acte unique de 1986 lui a conféré le titre de «
Parlement européen ». Pour autant, ce Parlement souffre encore d’un grave « déficit démocratique » et de
la faiblesse de ses attributions. Mal élu, peu connu des opinions publiques, il ne détient pas la réalité du
pouvoir législatif.
1. composition : 626 sièges. La répartition des sièges par Etat tient compte du principe d’égalité comme
du souci d’assurer une représentation significative aux plus petits pays. Les groupes parlementaires sont
constitués en fonction d’affinités idéologiques et non de l’appartenance nationale des députés. Les
élections dans chaque Etat sont marquées par un fort abstentionnisme et la prédominance de thèmes non
européens. Les Etats membres n’ont pu se mettre d’accord sur une procédure électorale uniforme ; ils ont
adopté un mode de scrutin en conformité avec leurs traditions électorales sauf la France qui a choisi le
scrutin proportionnel dans un cadre national [La loi du 11 avril 2003 a cependant régionalisé l’élection].
2. statut des députés : ils sont élus pour 5 ans et ont un mandat représentatif. Ils bénéficient de
l’irresponsabilité (pas de poursuites pour les opinions et les votes émis dans l’exercice de leurs fonctions)
et de l’inviolabilité (soit des immunités reconnues aux membres du Parlement de leurs pays).
3. attributions :
c. La Cour de Justice
La Cour de Justice de la Communauté est composée de 15 juges, assistés de 8 avocats généraux ; tous
sont nommés pour 6 ans d’un commun accord par les gouvernements (Art. 167 CE). Ils sont
renouvelables par moitié toutes les trois années. Ils sont totalement indépendants des Etats. Les juges
élisent eux-mêmes en leur sein leur Président
La mission de la Cour est d’assurer le respect des traités.
Elle est juge de la conformité aux traités des actes du Conseil et de la Commission. Dans cette fonction,
elle peut être saisie par les Etats, les différentes institutions de la Communauté et par les particuliers ayant
un intérêt à agir. La Cour pourra ainsi juger de recours en annulation.
Elle a aussi une activité interprétative ; elle peut être saisie par les Etats membres pour interpréter la
législation communautaire. La procédure est la suivante ; une juridiction nationale ayant à appliquer le
droit communautaire à un litige porté devant elle interroge la Cour en cas de doute. On dit que la Cour
agit par la voie préjudicielle (l’intervention de la Cour ne constitue qu’un incident du litige qu’elle ne
tranche pas).
Enfin, la Cour peut également imposer aux Etats membres le respect des obligations qui leur incombent
en vertu des traités. Elle est alors saisie par la Commission ou par un Etat membre après avis de la
Commission.
L'échec de la tentative d'instaurer une "constitution" européenne a débouché récemment sur la mise en
place d'un mini traité dont voici le contenu :
Voici les principaux points du traité modificatif qui devrait entrer en vigueur mi-2009.
- Système de vote : Les règles de vote actuelles, définies par le traité de Nice continueront à s'appliquer
jusqu'en 2014. La règle de la double majorité prévue par la Constitution entrera en vigueur le 1er
novembre 2014 : une décision sera adoptée si elle obtient le soutien de 55 % des États membres
représentant 65 % de la population de l'Union. Du 1er novembre 2014 au 31 mars 2017, un État membre
pourra toujours demander l'application du système de Nice. Jusqu'en 2017, le système de « Ioanina »
s'applique. Il permet à un groupe d'État risquant d'être mis en minorité de prolonger la discussion. Ce
système est renforcé à partir de 2017. Le champ d'application de la majorité qualifiée est étendu à une
quarantaine de domaines, principalement la coopération judiciaire pénale et policière. La Grande-
Bretagne et l'Irlande bénéficient d'un opting in dans les affaires de justice et de police : elles peuvent
participer aux politiques communes lorsqu'elles le souhaitent. L'unanimité demeure la règle pour la
politique étrangère, la fiscalité, la politique sociale, les ressources de l'UE ou la révision des traités.
- Terminologie, symboles Les symboles (drapeau, hymne, devise) ne figurent plus dans les traités, même
si ces derniers continueront à exister. Les expressions « loi » et « loi-cadre européenne » sont
abandonnées au profit de règlements, directives, décisions.
- Présidence Un président stable du Conseil européen sera élu par ses pairs pour deux ans et demi, au lieu
de l'actuelle rotation semestrielle par pays.
- Diplomatie de l'UE Le titre de « ministre » des Affaires étrangères est supprimé. Il est remplacé par
celui de « haut-représentant pour la Politique étrangère et la Sécurité ». En 2009, il sera aussi vice-
président de la Commission. Il disposera d'un service diplomatique propre (service pour l'action
extérieure).
- Charte des droits La charte des droits fondamentaux ne sera plus reprise in extenso. Un article y fera
référence. Son caractère juridiquement contraignant est maintenu. Londres bénéficie d'une dérogation à
son application. La Pologne a obtenu la garantie que la charte « ne porte atteinte en aucune manière au
droit des États de légiférer dans le domaine de la moralité publique, du droit de la famille, de la protection
de la dignité humaine, de l'intégrité humaine physique et morale ».
- Coopérations renforcées Elles sont facilitées et étendues aux domaines judiciaires et policiers. La
création d'un parquet européen devient possible.
- Contrôles des Parlements nationaux Les Parlements nationaux pourront demander à la Commission
européenne de réexaminer une proposition s'ils jugent qu'elle empiète trop sur les compétences
nationales. Si la Commission ne les suit pas, ils pourront demander aux États membres de la bloquer.
- Concurrence : La concurrence libre et non faussée disparaît des « objectifs de l'UE » tels que définis par
la Constitution. Un protocole a été ajouté précisant que le marché intérieur nécessitait « un système où la
concurrence n'est pas faussée ».
- Services publics : Un protocole souligne leur « rôle essentiel » et « la grande marge de manoeuvre » des
États membres dans « la fourniture, la mise en service et l'organisation » des services publics.
Le Conseil européen réuni à Laeken en décembre 2001 avait chargé une « Convention sur l’avenir de
l’Europe » de proposer en juin 2003 une refonte des structures de l’Union, sous la forme d’un « traité
constitutionnel » qui doit, après approbation des gouvernements et des Parlements nationaux, être soumis
à référendum dans les Etats membres. La déclaration de Laeken avait posé un certain nombre de
questions : comment renforcer la capacité d'impulsion de l'Union et donner à la fois un leadership et un
visage à l'Europe ? Selon quelles règles répartir les compétences entre l'Union et les Etats membres ?
Comment simplifier et rendre compréhensible l'Europe auprès des citoyens ? Par quels moyens
rapprocher l'Europe des peuples et améliorer son fonctionnement démocratique ? Un projet de
Constitution a été présenté au Conseil européen de Thessalonique en juin 2003 ; il devait être ensuite
examiné par une Conférence intergouvernementale. La Conférence intergouvernementale s'est ouverte à
Rome le 4 octobre 2003 dans un climat d'incertitude, parfois de défiance, marqué par l'opposition de deux
pays, l'Espagne et la Pologne, au compromis institutionnel que proposait la Convention. L'échec du
Conseil européen du 13 décembre 2003 allait plonger l'Union dans le doute. Finalement le 18 juin 2004,
un accord a été trouvé entre les chefs d’Etat et de gouvernements.
La victoire du non lors des réferendums en France et aux Pays-Bas a compromis l'avenir de la
Constitution européeenne.
• La définition de la majorité qualifiée (article I-24) au sein du Conseil des ministres et du Conseil
européen
Au cœur du clivage qui a opposé les « petits » aux « grands » pays, la définition de la majorité qualifiée a
bien failli faire échouer la négociation sur la Constitution européenne. L'Espagne et la Pologne avaient
déjà fait part, au sein de la Convention, de leur hostilité au principe même de cette double majorité, qui
leur est moins favorable que les dispositions sur la pondération des voix prévues par le traité de Nice.
Mais l'évolution de la position espagnole consécutive au changement de gouvernement a finalement
ouvert la voie à un compromis sur cette question. La solution retenue par la Conférence
intergouvernementale préserve l'essentiel, à savoir cette double majorité qui combine une double
légitimité sur laquelle repose l'Union européenne en tant que « fédération d'Etats nations » : d'une part, la
légitimité des Etats, d'autre part, celle des peuples.
B Les opinions opposées à l'opinion unique fasciste ne peuvent plus s'exprimer et ne peuvent avoir de
publicité ou de représentation partisane. Elles sont considérées comme criminelles car meurtrières pour
l'État. Par contre l'opinion unique représentée par le parti unique devient officielle ; le parti unique est un
parti officiel, organe même de l'État participant à son administration et à son Gouvernement.
C Le principe de majorité qui veut qu'en démocratie, le parti majoritaire à la suite d'une élection libre soit
appelé à gouverner est supprimé. Le parti fasciste en Italie lors des élections de 1924 est devenu le parti
majoritaire mais ce n'est qu'une justification subsidiaire de son pouvoir.
(Cf. la déclaration de son secrétaire général : "Quand bien même 12 millions de oui se transformeraient en
24 millions de non, Mussolini demeurait au Palazzo Venezia et la révolution des chemises noires
poursuivrait sa route... Si 24 millions de non étaient déposés dans les urnes, cela voudrait dire que la
masse des électeurs a été saisie d'une folie collective, que toute l'Italie n'est plus qu'un asile d'aliénés.
Raison de plus pour que les sages demeurent à leur poste...").
Le droit constitutionnel théocratique dont la source se veut exclusivement religieuse est lui aussi fondé
sur des principes qui s'opposent à ceux du droit constitutionnel classique occidental (XVIIIe siècle).
Nous prendrons pour exemple celui qui est issu de l'Islam parce qu'il est le plus vivace, connaît une
application dans certains Etats. Ainsi, on a assité à la tentative de fondation d'États dits islamistes dans de
nombreux pays (cf. l'Afghanistan des Talibans, l'Iran, le Pakistan, le Soudan). Cependant, il existe des
mouvements intégristes issus d'autres religions (le catholicisme en Irlande, le judaïsme en Israël avec les
partis religieux) qui revendiquent aussi la création d'un État théocratique.
Concernant l'Islam, il faut préciser que, schématiquement deux conceptions du droit constitutionnel
répandues dans les pays musulmans s'affrontent aujourd'hui :
- l'une " modérée " appliquée dans la majorité des pays musulmans notamment au Maghreb (Maroc,
Tunisie...) et au Machrek (Égypte). Selon les partisans de cette conception, il existerait une compatibilité
entre l'Islam et le droit constitutionnel occidental classique. Il est tout à fait possible d'importer des
institutions et techniques juridiques occidentales à condition de séparer Religion et Politique. Cela sans
heurter la Religion musulmane. En effet, le Coran ne parlerait pas d'Etat, d'Etat islamique, etc. ; il serait
une affaire de cœur, de conscience avant tout. La séparation Religion-Politique n'excluerait pas cependant
que le législateur s'inspire de la religion musulmane et donc que le Coran devienne une source de droit
parmi d'autres.
- l'autre " radicale " appliquée avec des nuances importantes dans une minorité de pays musulmans
comme l'Iran, le Soudan, le Pakistan et revendiquée par une partie de l'opposition religieuse en Algérie,
Égypte, Turquie (Cf. le parti de la prospérité de Neematin Erbakan dissout par la Cour Constitutionnelle
turque en 1998), etc. Selon les partisans de cette conception, le droit constitutionnel occidental est en
partie incompatible avec l'Islam qui fournirait un modèle de gouvernement original, des normes
juridiques propres pouvant conduire à la création d'États théocratiques dits " islamistes ". Cette
conception se réfère à un islamisme fondamentaliste ou intégriste né dans les années 30, propagé par des
organisations comme les " Frères musulmans " en Égypte (cf. Hassan al-Banna) et " les Dévoués de
l'Islam " en Iran ; deux mouvements qui ont été sévèrement réprimés, l'un par Nasser en 1954 et l'autre
par le Chah d'Iran en 1956. Ce qui est sans doute une des causes de la radicalisation (et notamment du
recours à la violence) de certains courants islamistes.
À partir de l'exemple de l'Iran, des États du Golfe, nous allons étudier les principes suivants déduits de la
seconde conception :
Nota : la loi religieuse devient idéologie au sens où l'on essaye de tirer d'elle des normes morales mais
aussi politiques et juridiques, valables dans les domaines de la vie privée et publique, capables de tout
régir. Les recueils contemporains de fatwâ (consultations juridiques) illustrent cela à la perfection. On y
traite à la demande des fidèles les questions suivantes : est-il licite de vendre des appareils de radio et de
télévision, quid du Coca-Cola et du Pepsi-Cola ? etc. Le sermon devient un média idéologique : le
prédicateur ne prononce pas seulement des discours édifiants, mais donne aussi des ordres, prend des
décisions, émet un avis sur des affaires politiques et en général sur des affaires intéressant la
communauté.
On aboutit à une politisation très forte de la religion.
b) La mise en pratique
1) dans l'histoire :
(Nota : les Talibans en Afghanistan prônent le retour au Califat du début de l'ère islamique).
C'est le point le plus délicat. Ici les deux conceptions se contredisent, se heurtent le plus nettement. La
conception radicale tend à démontrer que le régime des libertés en terre d'Islam doit être fondé sur une
lecture stricte, littérale de la Charî'a qui conduit à refuser la vision occidentale des droits de l'homme
comme des absolus. La conception modérée refuse cette lecture et affirme soit qu'on peut réinterpréter de
façon libérale le droit musulman traditionnel, soit qu'est légitime une séparation définitive entre religion
et droit qui permettrait une véritable émancipation des individus, notamment des femmes.
A la conception radicale
B la conception modérée
Deux solutions :
a)la réinterprétation de la charî'a et du droit musulman
Les partisans de cette solution expliquent que le Coran peut et doit être interprété si on veut être fidèle à
son esprit. D'ailleurs le droit musulman qu'on peut en tirer a toujours su évoluer selon différentes
méthodes. Ainsi au moins deux méthodes sont utilisables aujourd'hui :
- le Talfik : on interprète le droit musulman en essayant de remonter à son origine pour en comprendre les
défauts actuels et pour l'adapter. C'est la méthode adoptée par le législateur tunisien.
- L'herméneutique : on recherche par de là la lettre l'esprit du Coran. Et l'on cherche à placer chaque
question dans le dessein divin global. C'est que l'esprit est éternel, la lettre circonstancielle. Le droit
musulman peut alors évoluer, être abrogé. (idem pour le judaïsme, le catholicisme).
Si on n'utilise pas de telles méthodes, alors on est condamné à une application littérale par exemple de la
loi du talion ou d'un statut pour la femme discriminant. C'est le recours aux châtiments corporels comme
la flagellation publique, l'amputation de la main, du pied, de l'œil... Concernant la femme, le refus de lui
donner des droits politiques. Procéder ainsi revient à nier :
- d'une part la tradition musulmane à laquelle on prétend se référer. Par exemple, selon certains auteurs le
châtiment de la main coupée n'a été appliqué que 6 fois durant les 6 premiers siècles de l'Hégire. En Iran,
l'établissement de la loi du talion serait en contradiction avec l'histoire de ce pays
- d'autre part, des siècles de science juridique classique musulmane (le fiqh) qui a permis d'adapter, de
systématiser et finalement au 20ème siècle de moderniser le droit islamique. Exemple d'interprétation
moderne : la polygamie. Si le Coran autorise les hommes à prendre 4 épouses, il impose une parfaite
égalité de traitement entre elles, ce qui est impossible dans les sociétés actuelles. On peut donc conclure à
l'interdiction de la polygamie.
2) la séparation totale entre droit et religion
Seule cette solution selon certains juristes musulmans permettrait de faire accéder le monde musulman à
une conception réellement universelle et égalitaire des droits de l'homme comme en Occident. Cette
solution a eu un début d'application dans les années 50 (cf. la Déclaration universelle des droits de
l'homme adoptée par l'ONU a été approuvée en 1948 par tous les pays musulmans, avec la seule
abstention de l'Arabie Saoudite) mais depuis elle est en déclin. Certains Etats musulmans modérés ont
ainsi adopté (l'Algérie) ou maintenu (le Maroc) des codes civils ou de statut personnel inspirés par une
Charî'a interprétée strictement. Ainsi au Maroc, si la polygamie se fait très rare (200 demandes en 1999),
la répudiation augmente (environ 10 % par an selon certaines sources).
On peut parler d’un modèle de pensée postmoderne apparu d’abord aux Etats-Unis (cf. Richard Rorty),
inspiré en partie par un ensemble de philosophes français (la "French theory") pendant les années 1960 et
70. Parmi ces auteurs, citons Michel Foucault, Jean-François Lyotard et Jacques Derrida. Le contexte
politique qui a favorisé la diffusion de la pensée postmoderne est notamment celui des mouvements
sociaux et estudiantins de 1968 (dont mai 68 en France).
Le postmodernisme a eu des effets idéologiques dans le domaine des arts (notamment en architecture)
mais aussi dans le domaine politique. Dans ce dernier domaine, se développe aujourd’hui ce qu’on peut
désigner comme une « doctrine politique postmoderne ».
Nous étudierons la forme « vulgaire » ou pédagogique de cette doctrine telle qu’elle est par exemple
illustrée dans les ouvrages de Georgio Agamben, Michael Hardt et Antonio Negri.
Préalable :
Les auteurs postmodernes expriment un doute sur le projet universel d’émancipation de l’homme élaboré
par les Modernes, sur la possibilité même de le renouveler. Nous n’aurions pas de « signes » que les Idées
de liberté et d’égalité tendent à se réaliser dans l’histoire ; qu’un progrès politique, moral est en cours.
Auschwitz signifie peut-être la mort de ce projet (Cf. J-F. Lyotard, Le différend, Minuit, 1986). Dès lors,
on doit remettre en cause les principes juridiques issus des Lumières (état de droit, représentation
politique, séparation des pouvoirs, protections des droits de l’homme) censés favoriser cette
émancipation. Peut-être sont-ils devenus obsolètes et ne conservent-ils au fond qu’une utilité de type
idéologique dans les discours de légitimation des États ? Comme l’explique G. Agamben in « Le commun
: comment en faire usage ? », 1992, « Les termes de « souveraineté, de droit, de nation, de peuple, de
démocratie et de volonté générale recouvrent désormais une réalité qui n’a plus rien à voir avec celle que
désignaient ces concepts et celui qui continue de s’en servir de manière acritique ne sait littéralement pas
de quoi il parle ».
Cependant certains auteurs postmodernes comme M. Hardt et A. Negri estiment que l’idéal démocratique
ouvre encore des possibilités réelles d’action ; cela à condition de réinterpréter les principes juridiques
issus des Lumières. Cette réinterprétation devrait se faire dans un sens différentialiste (plutôt
qu’universaliste) au profit de la souveraineté du peuple (plutôt que la souveraineté nationale qui justifie la
représentation politique) et en favorisant la résistance à l’Etat souverain. Les analyses de M. Hardt et A.
Negri vont s’appuyer en partie sur des concepts néo-marxistes et décisionnistes (C. Schmitt). Ce qui
confirme qu’elles ne rompent pas complètement avec le projet d’émancipation des Modernes.
Nous procéderons en développant et en critiquant les nouveaux principes du droit postmoderne formulés
dans les ouvrages de M. Hardt et de A. Negri (notamment, Multitude, 10-18, 2006 - 1ère édition en
français La Découverte, 2004) :
Pour les auteurs post-modernes, l’Etat-Nation souverain organisé selon le classique système de séparation
des pouvoirs est en déclin. Son dépassement vers une Fédération des Etats mondiales (Kant) dans le cadre
d’une histoire cosmopolite et universelle orientée vers la paix n’est pas en cours.
Apparaît au contraire une Souveraineté supranationale (notion d’Empire) qui ne fait que perpétuer un état
de guerre insoluble et traduit la perte d’influence de l’Etat nation. Cette souveraineté se développerait à
l’aide d’un droit d’exception et de police [G. Agamben, Etat d’exception, Seuil, 2003] et se fonderait sur
une pseudo morale universelle. Une pseudo morale invoquée notamment par les tribunaux internationaux
qui entérineraient implicitement des hiérarchies politiques (par exemple en sanctionnant les crimes contre
l’humanité commis par certains Etats seulement).
L’alternative postmoderne consiste à refuser tout retour à l’Etat souverain (quitte à lui résister) ou encore
toute tentative d’accaparer le pouvoir d’Etat. Car cela reviendrait à conserver un « modèle de pouvoir
transcendant » plus ou moins centralisé, faussement divisé.
Il s’agit au contraire de promouvoir des modes d’organisation nouveaux en réseau où « l’autorité réside
dans les relations coopératives » (p 40). De ce point de vue, la politique doit imiter le social-économique
dont la transformation en cours dans le capitalisme contemporain contient « un énorme potentiel de
transformation sociale positive » (p. 89). Ainsi les nouvelles formes de travail immatériel ne sont
possibles qu’à travers des réseaux fondés sur la communication, les relations affectives qui peuvent être
orientées vers une coopération politique.
On aboutira alors au développement d’un « mécanisme immanent » (p. 109) permettant le passage à une «
démocratie absolue » (p. 116). [Hardt et Negri utilisent la métaphore de la « chair politique qui se
gouverne elle-même » par opposition à celle du « corps politique » qui justifierait l’hétéronomie] (p. 127).
Aujourd'hui encore, le régime parlementaire britannique comme tous les régimes parlementaires
modernes n'admet que le principe d'une responsabilité ministérielle (concernant seulement le
Gouvernement ou Cabinet ministériel). Cela parce que le monarque a progressivement perdu la plupart de
ses compétences au profit du Cabinet. Il a ainsi perdu le pouvoir de dissoudre la Chambre des
Communes, pouvoir qui est passé à partir de 1714 aux mains du Cabinet. Il est logique qu'en raison de
son dessaisissement le monarque ne soit pas responsable devant le Parlement.
Au total, dès la fin du 18ème siècle, le parlementarisme britannique avec ses mécanismes fondamentaux
(dissolution/responsabilité) est en place. Il s'agit d'un parlementarisme moniste : le Roi ou la Reine s'étant
effacés, le cabinet n'est responsable que devant le Parlement.
B non écrites : il s'agit principalement de normes d'origine coutumière qui ont été interprétées et
sanctionnées par le juge. Ces normes ont trait aux compétences de la Couronne, aux droits fondamentaux
notamment des justiciables devant un Tribunal (Habeas Corpus). Elles sont très peu nombreuses ; ce qui
fait qu'il est faux de dire que la Grande Bretagne a un régime politique fondé sur du droit constitutionnel
coutumier.
§1 l'Exécutif
Il est bicéphale mais pas dyarchique. Ce qui veut dire que c'est un Exécutif à deux têtes (le Souverain, le
Cabinet) dont une seule gouverne. Il n'y a pas de double commandement ce que suppose l'idée de
dyarchie. On distingue entre :
A le monarque
Il n'exerce aucun pouvoir véritable ; c'est une simple autorité morale mais dont le rôle est essentiel. « Le
roi règne mais ne gouverne pas ». Ce rôle est double :
a) rôle de représentation : le monarque est l'incarnation vivante de la Nation. Il garantit son unité et sa
permanence. Les sentiment de loyauté et de patriotisme du peuple britannique s'adressent avant tout à lui.
Pourtant, c'est depuis seulement une époque récente qu'on constate un véritable attachement envers le
souverain, et à travers lui à la personne du roi et de la reine (depuis le règne de Victoria 1837/1901).
b) rôle de magistrature morale : le Monarque peut exercer une influence personnelle en période normale ;
influence qui en période exceptionnelle peut se traduire par un véritable pouvoir.
Cette influence personnelle vient du fait que le Souverain est un personnage très renseigné. Ainsi, tous les
documents destinés au Cabinet (dépêches d'agences, diplomatiques) lui sont communiqués. De plus,
chaque semaine, le Premier ministre lui fait un compte rendu oral des délibérations qui ont eu lieu au sein
du cabinet. Cette influence s'exercera surtout dans les domaines qui ne sont pas très politisés, ceux où les
partis politiques n'exercent pas une pression trop forte. (exemple : politique étrangère CEE).
Dans des périodes exceptionnelles (instabilité politique, tripartisme...) le Souverain peut être amené à user
de certaines prérogatives qu'il avait autrefois comme choisir le Premier ministre :
Ex : 1923, lors de la démission de Bonar Law pour raison de santé. George V a alors choisi Baldwin à la
place de Lord Curzon, en demandant l'avis de Balfour, ancien leader conservateur
Ex : 1931, MacDonald (travailliste) démissionne et demande à George V , contre l'avis du parti
travailliste de le rappeler pour former un gouvernement d'union nationale.
Ex : 1974, les élections n'avaient pas permis de dégager une majorité nette aux Communes :
- les travaillistes d'H. Wilson étaient minoritaires en voix mais disposaient du groupe le plus nombreux :
ils proposaient cependant de gouverner.
- les conservateurs d'E. Heath avaient obtenu le plus grand nombre de voix mais étaient minoritaires en
sièges : ils voulaient faire un gouvernement d'Union nationale avec les libéraux].
La Reine Elisabeth II s'en est tenu à la tradition en appelant le chef du groupe le plus nombreux, donc le
travailliste H. Wilson.
B le Cabinet
Le cabinet dirigé par le Premier ministre exerce l'essentiel des compétences gouvernementales. Il émane
du Conseil Privé du Souverain, ancien organe de Gouvernement qui est demeuré mais dont les
compétences sont honorifiques (proclamation du successeur à la couronne, proclamation de la déclaration
de guerre...). C'est donc l'organe de Gouvernement au sens strict (par opposition au Ministère composé de
toute les personnes au sein de l'Exécutif appartenant au parti majoritaire et responsables devant le
Parlement) qui est l'organe de Gouvernement au sens large.
a) composition :
Le cabinet moderne comprend un peu moins ou un peu plus d'une vingtaine de membres. Aucun texte
écrit ne fixe la composition de ce cabinet mais des contraintes politiques et administratives réduisent la
liberté de choix du Premier ministre. On y trouve :
- le Prime Minister lui-même, bien sûr, qui est à la tête du gouvernent. Mais il n'est formellement qu'un
primus inter pares: un ministre parmi les autres.
- les ministres : obligatoirement, le ministre de l'intérieur (Home Secretary), le ministre des Affaires
Étrangères (Foreign Secretary), le ministre de l'Économie (Chancellor of the Exchequer), le ministre de
la Justice (Lord Chancellor) dont la fonction a été réformée par le Constitutional Reform Act de 2005.
- les secrétaires d'État :
- les ministres d'État (ou Parliamentary Secretaries) chargés de s'occuper des relations avec le Parlement.
--- vis-à-vis du Parlement : il exerce une compétence essentielle, la dissolution. Dissolution qui a
aujourd'hui surtout un but électoral : choisir le meilleur moment pour provoquer des élections anticipées
en fonction des sondages.
§2 Le Parlement
a) composition
= très variée, elle ne doit rien à l'élection: environ 600 membres dont:
- 550 pairs nommés à vie par le Souverain
dont 27 pairs d'Appel dont 12 "Law Lords in ordinary" qui jugent et 15 Law Lords susceptibles de le
devenir lorsqu'ils auront atteint l'âge de 75 ans.
- 26 Lords spirituels ou évêques représentant l’épiscopat d’Angleterre (dont l’archevêque de Cantorbéry).
En pratique, il n’y a guère plus de 200 à 400 Lords qui participent aux réunions de la Chambre, présidée
par le Lord Chancelier, ministre du Gouvernement.
nota 1: en 1999, ont été supprimés les pairs héréditaires (750) [House of Lords Act de 1999] qui dès 1963
(1963 Peerage Act) avaient pu renoncer à leur titre pour être élus aux Communes. Un amendement a
prévu que 92 d’entre eux choisis par leurs collègues et les groupes parlementaires de la Chambre des
Lords seraient maintenus en fonction. Le gouvernement travailliste a produit un “Dossier blanc” le 7
novembre 2001 proposant une Chambre des Lords nommée avec 120 membres élus. Une consultation a
eu lieu s'est terminée le 31 janvier 2002 ; la faible proportion de membres élus a fait l’objet de
nombreuses critiques.
nota 2 : 1958 Life Peerage Act, le Premier ministre se voit reconnaître la droit de nommer des Pairs
viagers parmi lesquels des femmes (cf. Mme Thatcher)
b) rôle
- avant le 20ème siècle:
A l'origine du parlementarisme britannique, la Chambre des Lords a un rôle prépondérant par rapport à la
Chambre des Communes. Cette prépondérance vient
- de ses compétences vis-à-vis du Cabinet: le Premier ministre vient de la Chambre des Lords, elle
préside le ministère et elle contrôle le cabinet en jugeant les ministres lors de la mise en oeuvre de la
procédure de l'impeachment (responsabilité pénale)
- de ses compétences au sein de la procédure législative: la Chambre des Lords vote comme la C des
Communes la loi. Mais elle fait toujours preuve de retenue; les lords ont tendance à céder lorsque la
Chambre des Communes n'est pas de leur avis. En cas de conflit persistant, c'est le peuple qui décide: il y
a dissolution de la Chambre des Communes et si les électeurs renvoient la même majorité, alors les Lords
s'inclinent.
-- après le 20ème siècle:
A l'époque moderne, la Chambre des Lords perd sa prépondérance.
D'une part, le Premier ministre cesse de provenir de la Chambre des Lords, la direction du Ministère
devient théorique tandis que l'impeachment est très peu utilisé.
D'autre part, la Chambre des Lords perd le pouvoir de voter la loi à égalité avec la Chambre des
Communes. C'est la conséquence du vote des 2 lois constitutionnelles (ou Parliement Acts) de :
1911: il faut distinguer entre:
- les lois financières (money bills): elles ne peuvent être modifiées par les Lords. Ces lois sont
promulguées dans les 30 jours quelque soit l'attitude des Lords (rejet, modifications...).
- les lois ordinaires: les Lords peuvent s'y opposer pendant 2 ans; cela revient à un veto suspensif (Si la
Chambre des Communes vote lors de 3 sessions successives pendant un délai minimum de 2 ans, la loi
est considéré comme adoptée).
L'origine de la Chambre des Communes remonte au XIVème siècle, c'est-à-dire à l'époque où le Conseil
féodal primitif fut divisé en deux chambres. Mais le caractère d'assemblée démocratique est récent : il
remonte à la réforme électorale de 1832. Le suffrage universel (ouvert aux femmes) ne date que de 1918.
a) composition :
Environ 650 membres élus pour 5 ans au suffrage universel direct ; mais ce mandat est régulièrement
abrégé par la dissolution de la Chambre. Le mode de scrutin est majoritaire à un seul tour. Ce système
brutal ne permet pas une représentation exacte de l'opinion. Cependant, il est efficace dans la mesure où il
oblige les tendances voisines à se grouper pour bloquer leurs voix sur un seul candidat; cela conduit
généralement au bipartisme qui est lui-même une condition de la stabilité politique. Le bipartisme actuel
se traduit par la domination de deux grands partis aux Communes :
- les conservateurs (Tories). Ce parti est appelé conservateur depuis 1836. Il est idéologiquement
favorable au capitalisme libéral et s'oppose ainsi à tout dirigisme dans l'économie (cf. Les
dénationalisations de Mme Thatcher en 1979). Il fait référence à la grandeur passée de l'Empire
britannique et reste nationaliste (cf. La guerre des Malouine en 1983). C'est un parti de cadres au plan des
structures qui revendique pourtant 1500000 adhérents. Il est centralisé avec à sa tête un Conseil Central. Il
est dirigé par son leader qui a vocation à devenir Premier ministre. Le leader actuel est Brian Mawhinney
qui a succédé à J. Hawley, et à J. Major, ancien Premier ministre.
- les travaillistes (Labour). C'est un parti de masse fondé en 1900 grâce notamment aux syndicats. A
l'origine, on ne pouvait adhérer directement au parti ; il fallait adhérer à un syndicat ou à une mutuelle,
coopérative. Le Labour est plutôt favorable à la social démocratie, est partisan des nationalisations.
Depuis le congrès de Wembley en 1981, le leader n'est plus désigné par le groupe parlementaire aux
Communes mais par un collège électoral dans lequel les syndicats détiennent 40% des voix, les
parlementaires 30% et les délégués locaux, 30%. Les modérés ont tenté une scission qui a abouti à la
Lectures complémentaires :
- la devolution :
- A propos de : Constitutional Future, edited by Robert Hazell, Oxford University Press, february 1999
(en anglais)
NI accessoire ni folklorique, la « dévolution » de l'Ecosse - autrement dit son autonomie -, décidée par
référendum en septembre 1997, témoigne d'une importante redistribution des pouvoirs en Grande-
Bretagne, selon le voeu du premier ministre britannique, M. Anthony Blair. L'ancien royaume d'Ecosse,
uni sous la contrainte à celui d'Angleterre depuis 1707, disposera dès l'année prochaine de son propre
Parlement et deviendra, au sein de l'Europe, une région à la singularité aussi spécifique que la Catalogne
ou la Bavière. Mais rien n'assure que cette étape soit la toute dernière.
A grands pas, l'Ecosse sort du giron britannique et prend sa place en tant que nation autonome en Europe.
Le 11 septembre 1997, presque trois siècles après l'abolition du dernier Parlement écossais, le pays a en
effet massivement voté en faveur du rapatriement de ses affaires politiques vers Edimbourg. Le Scotland
Act, qui confère de larges pouvoirs dévolutifs au Parlement écossais, devrait être adopté par la Chambre
des communes britannique avant l'été 1998. Les élections législatives devraient avoir lieu en 1999. Si
l'Ecosse demeure au sein du Royaume-Uni, ce statut politique pourrait être une étape vers l'indépendance
au sein de l'Union européenne.
Le 1er mai 1997, la victoire du « New Labour » de M. Anthony Blair a ramené le problème de
l'autonomie écossaise au centre de la politique britannique. Il y a presque vingt ans, en 1979, la dernière
tentative de décentralisation avait été balayée par la victoire des conservateurs qui, sous la direction de
Mme Margaret Thatcher puis de M. John Major, demeurèrent, durant leur dix-huit années d'exercice du
pouvoir, de farouches opposants au projet.
La réforme constitutionnelle s'avère être, en revanche, l'élément-clé du programme « moderniste » du «
New Labour » : outre la création des Assemblées écossaise et galloise, le gouvernement propose
l'établissement d'une législation sur la liberté de l'information, l'intégration de la convention européenne
des droits de l'homme dans les lois du Royaume-Uni, l'abolition de la transmission héréditaire des pairs
de la Chambre des lords et l'élection du maire de Londres. Alors que les réformistes constitutionnels
espèrent ainsi parvenir à une « révolution démocratique (1) », « certains observateurs craignent que les
vastes pouvoirs conférés à l'Ecosse n'aboutissent à l'éclatement du Royaume-Uni (2) ».
Différente en cela de celle d'Ecosse, l'Assemblée galloise ne disposera d'aucun pouvoir législatif. Il n'est
pas davantage prévu de créer des parlements régionaux anglais. De ce fait, le Parlement écossais, qui sera
élu en 1999, deviendra le premier et l'unique contre-poids à Westminster. Il constituera également un
symbole : celui des aspirations nationales des 5 100 000 Ecossais.
Depuis le traité de 1707 (qui déboucha sur la dissolution du dernier Parlement d'Ecosse), le pays a
conservé son système légal, éducatif et sa religion, autant de singularités qui ont façonné une culture et
une identité nationale particulières. Depuis 1886, les institutions nationales ont également acquis une
dimension territoriale, politique et administrative importante grâce au Scottish Office. Basé à Edimbourg,
celui-ci est dirigé par le secrétaire d'Etat aux affaires écossaises, qui siège au conseil des ministres et est
responsable devant la Chambre des communes. C'est le besoin d'étendre le contrôle démocratique, en
Ecosse, par rapport au Scottish Office, qui a motivé la création d'un Parlement écossais (3). Les Ecossais
possédant presque toutes les caractéristiques d'une nation, leur spécificité institutionnelle a largement
(1) Anthony Barnett, This Time : Our Constitutional Revolution, Vintage, Londres, 1997.
(2) Tom Nairn, Faces of Nationalism : Janus Revisited, Verso, Londres, 1997.
(3) Lindsay Paterson, The Autonomy of Modern Scotland, Edinburgh University Press, Edimbourg, 1994.
A propos de: Constitutional Future,edited by Robert Hazell, Oxford University Press, february 1999.
In 1999, Britain begins a radical experiment in devolving power to the nations that make up the United
Kingdom. Brian Groom and Andrew Parker ask where it will all end; "I suspect the trouble may be
terminal. Britishness has passed from being one of the soundest properties on the international ideas-mart
(liberal, trustworthy, decent, first among equals, Mother of this-and-that, progressive haven etc) to being
a downmarket left-over - not quite a slum, but heading in that direction." Thus Tom Nairn, Scotland's
leading nationalist intellectual, put his case bluntly to the Commons Scottish affairs committee. The
government's crash programme of constitutional reform, he suggested, had come too late to save the
crumbling United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland.
Mr Nairn predicted the UK would rapidly become "an archipelago-system of effectively independent
polities, meeting regularly to discuss or decide issues of common interest". Scotland would achieve de
facto independence after 2000, he predicted, and de jure independence by 2010.
Other crystal ball-gazers dispute his vision, or at least his timetable, but few doubt the momentous nature
of the changes about to be unleashed. Even if devolution, as the process is known in the UK, does not tear
the union apart, it will transform the country irreversibly.
There is no turning back. For better or worse, 1999 is the year in which devolution moves from the
drawing board to reality. On May 6, elections will be held for a devolved Scottish parliament and a Welsh
assembly. A Northern Ireland assembly is already being created. From April 1, eight English regions will
have development agencies, overseen by regional chambers of councillors and business people. Next year
London will have a directly elected mayor and regional authority.
Tony Blair, UK prime minister, claims his government's constitutional plans are "the biggest programme
of change to democracy ever proposed". Timid on other matters, he leads a radical, reforming government
on this. Eleven constitutional bills were passed in the first parliamentary session, including incorporation
of the European Convention on Human Rights into UK law. Still on the agenda are the reform of the
House of Lords, the unelected upper chamber of parliament, freedom of information, and the national
electoral system.
The reforms aim to bring government closer to the people. The result may appear lop-sided - tax-raising
powers for Scotland, law-making powers for Scotland and Northern Ireland, only secondary legislative
powers for Wales, and very little for England - but ministers say they are responding to the varying
demands of different regions. The stakes could hardly be higher. Because he has invested so much
personal capital in Labour's devolution plans, the Scottish elections will be the stiffest test yet for Mr
Blair and his 20-month-old government. If Labour loses Scotland to the Scottish National party - which
wants to hold a referendum on independence - it would cast a deep pall over achievements in other fields.
The forthcoming elections underline how difficult it has proved to hold the nations of the UK together
since the demise of the global empire that once gave them common purpose.
Picture a future in which all the assemblies have enhanced their authority. The Scottish parliament,
independent or not, has used its tax powers. The Northern Ireland assembly has the right to tax and the
Welsh assembly has been transformed into a parliament with rights to legislate and tax. England has
strong elected mayors in its big cities and elected assemblies in several regions. The Lords has become a
largely elected body representing the nations, regions and cities. The Commons, or lower house of
parliament, is elected by proportional representation. A Bill of Rights has been passed with a Freedom of
Information Act, and a Supreme Court created.
That is the "maximal" scenario. There is a "minimal" one as well, but even under this, Mr Hazell argues,
"the cumulative impact will be profound, because the constitutional reforms will unleash a political and
legal dynamic that the government will not be able to rein back". Devolution is a process, Mr Hazell says,
not an event. There can be no fixed "settlement". Each part will affect the others. "There is likely to be a
process of leapfrog whereby the slower English regions seek to catch up with those that have established
regional assemblies; and Wales seeks to emulate Scotland. This may lead the Scots to press for further
devolution to stay one step ahead," the book says.
Political parties will be deeply affected. Even without proportional representation for Westminster,
devolution is likely to fragment national parties and spawn new regional ones.
It will be difficult for the prime minister to impose his will, despite the choice of Blairite Labour
candidates in Scotland and Wales. "To compete against the SNP electorally the Scottish Labour party will
have to emphasise its Scottishness and distance itself sharply from the British Labour party," the book
says.
Judges will be drawn into political disputes about the validity of Scottish or Northern Irish legislation.
Devolution will mean big changes for Whitehall, which is likely to face pressure for the Scottish
parliament and Welsh assembly to have their own civil service, as in Northern Ireland.
The most controversial impact will be on Westminster. "Europe and devolution will weaken it, as
parliamentary sovereignty is squeezed from above and below," the book says.
The executive's dominance may be reduced by devolution, the human rights convention, freedom of
information, the onward march of the European Union, parliamentary reform and electoral reform. Mr
Hazell comments: "To those outside it will seem like a long overdue taming of the
leviathan."
There will be tensions. The biggest is likely to be over finance, with English regions becoming
increasingly restive over the higher public spending enjoyed by the other nations. "The time will come
when the government is forced to concede a fresh needs assessment," the authors say.
The greatest uncertainty is over English devolution. The government has blown hot and cold over elected
regional assemblies - recent comments suggest they are firmly on the agenda for a second term, but some
see this as conflicting with proposals for elected mayors in the cities. The book says: "There may not be
room for two political leaders claiming to be the voice of the region. Which model wins through may
depend on who occupies the political space first. At present the elected mayors look likely to get there
first."
Devolution is already causing headaches for Labour. The SNP is at its heels in Scotland, helped by
allegations of Labour sleaze and poor organisation. In Wales, where Labour had seemed assured of a
working majority, things are less certain after Ron Davies resigned under a cloud as Welsh secretary. The
But the game has scarcely begun. Vernon Bogdanor, professor of government at Oxford University and a
devolution supporter, remains optimistic. Separatist pressure would be stronger if Scotland had been
denied its parliament, he says, adding that people respond positively to having the chance to run their own
public services.
The government must, though, find ways to bind the UK together. Lords reform may offer an opportunity
to include representatives from the devolved institutions. Also, a joint ministerial committee will be a
crucial liaison point between Edinburgh, Cardiff, Belfast and Whitehall.
"To come to terms with the new political culture the centre will have to relax and be willing to let go," Mr
Hazell wrote. "It will have to treat the devolved governments as equal partners, not subordinates."
Britishness, however, remains a fragile concept. Created by the political union of England, Wales and
Scotland in 1707, and expanded to include Ireland in 1801, full union lasted only until southern Ireland
defected in 1922. Any further cracks in the edifice could prove fatal.
§3 Pourquoi les États-Unis n'ont pas connu l'évolution vers le parlementarisme moderne ?
Deux raisons au moins l'expliquent :
- l'Exécutif n'étant pas royal mais républicain et élu, il n'y avait pas de raison pour que le Congrès remette
en cause son statut et ses compétences
- les constituants à cause de la forme de leur État (= fédérale) ont craint les conflits entre État fédéral et
États fédérés ; ils ont donc fait en sorte que la Constitution fédérale qui prévoit la répartition de leurs
compétences respectives soit rigide, protégée par une Cour Suprême qui se donnera bientôt la compétence
de contrôler la constitutionnalité des lois.
Du coup, la Constitution américaine a très peu évolué comme le régime qu'elle organisait. Elle a maintenu
tel quel le mode de séparation des pouvoirs (avec il est vrai le développement d'une collaboration de fait
entre les trois branches).
Section 2 Le fonctionnement
Le fonctionnement du régime est fondé sur une règle de gouvernement très simple inspirée des idées de
Montesquieu sur la Balance des Pouvoirs ; c'est la règle des "Checks and Balances" (poids et contre
poids). Exécutif, Législatif mais aussi Judiciaire même s'ils sont assez isolés sur un plan fonctionnel
peuvent agir les uns les autres pour se contraindre et finalement mieux travailler ensemble : le conflit est
institutionnalisé mais il dégénère souvent en raison de l'absence de possibilités de révocation réciproque
de l'Exécutif et du Législatif.
§1 l'Exécutif :
L'Exécutif aux États-Unis (comme dans tous les pays qui ont adopté un moment à un autre le régime
présidentiel : par exemple la France en 1791et en 1848) est monocéphale. Le Président américain est à lui
tout seul Chef de l'État et Chef de Gouvernement. Il n'existe pas de Gouvernement américain proprement
dit. Cela au sens où il n'existe pas à côté du Président un organisme doté de la personnalité juridique,
exerçant des compétences collectives. Le Président est simplement entouré de collaborateurs qu'il nomme
et révoque à volonté.
A désignation du Président
Le processus est d'une grande complexité teintée d'archaïsme. Les gouvernants doutant que la masse des
citoyens fut en mesure de faire "un choix intelligible", ont opté pour un système indirect à deux étapes à
la fois pour la désignation des candidats à l'élection et celle du président lui-même.
Nota : depuis quelques années se présentent aux élections des candidats dits indépendants qui
n'appartiennent pas aux deux grands partis. Ils n'ont donc pas été désignés selon la procédure habituelle
(cf. Ralph Nader aux dernières élections)
Nota 2 : le rôle des medias et notamment d'Internet dans le choix des candidats est devenu essentiel.
Certains candidats comme Howard Dean pour les élections 2004 ont émergé grâce à Internet. Cf. Petit
article sur le Journal du Net avec les sites des différents candidats.
b) l'élection présidentielle
C'est une élection au SU indirect. On ne décompte pas les voix des électeurs au niveau national comme
cela se fait en France. On décompte les voix des grands électeurs qui ont été élus par chaque Etat,
fédéralisme oblige. Les deux étapes sont les suivantes :
1) l'élection des grands électeurs
Cette élection a lieu en novembre au scrutin de liste majoritaire à un seul tour à la pluralité de voix dans
chaque Etat. Le nombre de grands électeurs par Etat est égal à celui des parlementaires (sénateurs +
représentants) élus dans chaque Etat. Les électeurs se prononcent pour la liste des grands électeurs se
réclamant du candidat présidentiel de leur choix. Mais par le jeu du scrutin majoritaire, si la liste d'un
candidat l'emporte, ne serait-ce que d'une dizaine de voix, celui-ci obtient tous les votes des grands
électeurs de cet État. Comme les candidats aux fonctions de grands électeurs se sont engagés à choisir X
ou Y, on sait normalement qui sera Président dès la fin de la 1è étape. Il suffit de compter le nombre de
Grands électeurs pour chaque candidat . Celui qui a la majorité absolue est le Président virtuel.
Nota : lors des dernières élections, le président virtuel n'a pu être déterminé au soir de la première étape
car les deux candidats ne pouvaient atteindre la majorité sans les voix litigieuses de la Floride.
2) l'élection du président
En décembre, les grands électeurs élisent le Président et le vice-président qui doivent avoir la majorité
absolue (270) pour être élus. En cas d'absence de majorité, la Chambre des Représentants départage les 3
candidats arrivés en tête et le Sénat fait de même pour le vice-président. Tel fut le cas pour Thomas
Jefferson en 1800 et John Quincy Adams en 1824. Il faut noter qu'il n'y a pas de proportion rigoureuse
entre la population réelle des Etats-Unis et le nombre des grands électeurs. Cela a abouti deux fois à
Nota : un Président n'est rééligible qu'une fois. Cet usage n'est devenu une règle constitutionnelle qu'après
l'adoption du 22ème amendement en 1951. Avant cela dans des conditions très spéciales, F. Delano
Roosevelt a été réélu 4 fois entre 1932 et 1945.
B compétences du Président
Le président américain est l'équivalent du monarque anglais de 1750 qui régnait et gouvernait. Ce qui
signifie qu'il détient à la fois les compétences d'un chef d'État (soit les compétences traditionnelles que
sont le droit de représenter les Etats-Unis à l'étranger, le droit de promulguer les lois, le droit de
message...), et celles d'un Premier ministre à l'ancienne (ayant la compétence globale d'exécution des
lois...). Précisons cette dernière compétence.
Tout le pouvoir du Président est tiré juridiquement du fait qu'il a le quasi monopole de la fonction
exécutive ; fonction entendue :
----- au sens strict dans les circonstances normales. Le Président doit se contenter d'appliquer la loi (ou
statute) proposée et votée par le seul Congrès. S'il n'applique pas ou ne respecte pas la loi, il encourt le
risque de voir la chambre des Représentants mettre en jeu sa responsabilité pénale (cas de
l'impeachment). Il sera alors jugé par le Sénat. Par deux fois, dans la période récente, un président a failli
subir cette procédure : 1974 Nixon à l'occasion du Watergate et 1988 Reagan à l'occasion de l'Irangate.
----- au sens large dans les circonstances exceptionnelles. Le président peut alors user de :
- pouvoirs d'urgence (Emergency Powers): le Président demande au Congrès de prendre les mesures
nécessaires pour faire face à une situation de crise ; mesures qui vont au-delà de la simple exécution des
lois. [Application importante de ces pouvoirs à partir de Roosevelt]
- pouvoirs délégués (Statutory Powers) : le Président demande au Congrès de légiférer à sa place. Le
Congrès s'il est d'accord et avec le contrôle de la Cour Suprême donnera une habilitation expresse au
Président.
Le fondement du pouvoir présidentiel (Executive power) fait que le Président est dans une situation
moins favorable que celle d'un Premier ministre dans un régime parlementaire moderne. Ce dernier est à
l'origine des lois (il a l'initiative des lois en droit et en fait), détient un pouvoir réglementaire autonome, a
une majorité parlementaire pour le soutenir ... Le président lui n'est pas source de droit (sauf à travers ses
proclamations et ses executive orders) et reste subordonné à un Congrès dont la majorité lui est souvent
hostile.
NOTA : le Président dans l'exercice de son pouvoir gouvernemental bénéficie de ce qu'on appelle le
"Privilège de l'Exécutif" qui a été précisé non par la Constitution mais par la Cour Suprême. Il a le droit
de ne pas révéler, dans l'intérêt général, le contenu de documents confidentiels se rapportant à des secrets
diplomatiques ou militaires (donc ayant trait à la sécurité nationale). Dans une décision Etats-Unis c.
Nixon de 1974, la Cour a rappelé que le Président n'avait pas un privilège "absolu". A l'opposé de ce que
prétendait Nixon, le Président ne peut faire échec au pouvoir des tribunaux notamment en considérant
comme confidentielles les conversations enregistrées dans son bureau ovale qui n'avaient pas un caractère
militaire ou diplomatique.
Nota : le Congrès par une loi du 9 avril 1996 avait accordé un nouveau veto au président : le Line Item
veto. Ce veto avait trois particularités :
- il devait intervenir après que le bill soit devenu une loi (c'est-à-dire après que le texte voté par les deux
chambres soit entré en vigueur)
- il était partiel : il ne pouvait concerner qu'une partie de la loi
- il intervenait en matière financière (trois types de dispositions : 1 any dollar amount of discretionary
budget authority 2 any item of new direct spending 3 any limited tax benefit)
Le président Clinton a eu recours a ce veto pour la première fois le 11 août 1997. Mais la Cour Suprême a
jugé en 1998 qu'il était inconstitutionnel dans sa décision W.J. ClINTON, PRESIDENT OF THE
UNITED STATES, et al., APPELLANTS v. CITY OF NEW YORK et al.
----------- L'impoundment (ou Impoundments Powers) revendiqué d'abord par Nixon. Le Président
s'autorise à refuser de dépenser des fonds votés par le Congrès ; fonds servant à financer tel ou tel projet
voulu par les congressmen. Une loi de 1974 est venue organiser et limiter ce pouvoir présidentiel dont la
constitutionnalité est douteuse.
- si le Président veut simplement différer une dépense, les Chambres peuvent s'y opposer en votant une
résolution concordante.
- si le Président veut supprimer une dépense, la proposition du Président ne prend effet que si dans les 45
jours le Congrès a voté une loi acceptant cette suppression ou la diminuant.
Nota : la Cour Suprême ne s'est pas prononcée explicitement sur la constitutionnalité de ce pouvoir.
Seulement dans une décision Train v. NY 420 US 35 à propos d'une loi, la Cour a estimé que le Congrès
n'avait pu conférer au Président un pouvoir discrétionnaire de rétention budgétaire.
Nota : notons la différence entre la conception de la séparation des pouvoirs en France et les Etats-Unis ;
aux Etats-Unis, le juge n'est pas indépendant car il est considéré comme un pouvoir politique comme les
autres qui peut entraver l'action du Gouvernement. Voilà pourquoi on peut agir sur lui.
§2 le Congrès
Le Congrès est un Parlement bicaméral composé d'une Chambre des Représentants (435 membres élus
pour 2 ans) et du Sénat (une centaine de membres élus pour 6 ans). Il a l'avantage de pouvoir maîtriser :
- le processus de création de la loi
- le processus de contrôle de l'exécutif
Cela fait de lui juridiquement et politiquement l'organe le plus fort du régime politique américain.
- traités : il approuve à la majorité des 2/3 les traités normaux. Il peut aussi approuver certains traités en
forme simplifiée (les Executive Agreements) qui n'exigent pas de ratification. Il s'agit ici d'une pratique
qui a été admise par la Cour Suprême in USA v. Belmont, 1937.
Face au développement des traités en forme simplifiée, le Sénat a essayé de réagir en 1954 (amendement
Bricker émanant du Sénat : tout accord international devait être soumis à l'autorisation des deux chambres
aux fins de ratification. Échec faute de voix), 1972 (Case Zablocki Act oblige le président à communiquer
pour information au Congrès l'ensemble des executive agreements conclu), en 1979 (loi du 8 juin :le
Sénat décide que son approbation serait nécessaire pour autoriser à rompre tout accord de défense
mutuelle entre les Etats-Unis et un pays tiers).
- actes de guerre : le Congrès a tenté d'accroître son influence dans le domaine des affaires étrangères à la
suite de la Guerre du Vietnam : il a voté ainsi en 1973 une résolution sur les pouvoirs militaires du
Président. Cette résolution prévoit notamment à propos de l'envoi de troupes sur des théâtres d'opérations
extérieures :
- en l'absence de Déclaration de guerre, l'envoi de forces armées américaines doit faire l'objet d'une
justification écrite présidentielle envoyée au Speaker de la Chambre des Représentants et au Président du
Sénat.
- dans un délai de 60 jours après la transmission de ce rapport, l'utilisation des forces armées doit cesser à
moins que :
1le Congrès ait voté une déclaration de guerre ou ait autorisé l'intervention militaire
2 il a accordé au Président un nouveau délai de 30 jours seulement.
3 le Congrès est dans l'impossibilité de se réunir en raison d'une attaque armée contre les États-Unis.
b) pouvoir de surveillance :
Principalement grâce à ses commissions permanentes qui siègent sans interruption, sont ouvertes au
public et peuvent se faire communiquer tout document (sauf Privilège de l'exécutif), le Congrès est en
mesure non seulement de surveiller mais aussi de paralyser le Président.
c) pouvoir de veto
= le veto législatif : il consiste pour le Congrès à annuler des mesures présidentielles prises en vertu d'une
délégation législative. Par exemple, le Congrès s'autorise à pratiquer des coupes dans un budget dont il
avait confié au Président le pouvoir de l'élaborer.
Ce veto législatif a été interdit par l'arrêt Chadha du 23-6-1983 (puis le 7-7-1986). La Cour Suprême
annule une disposition de la loi Gramm-Rudman permettant à un contrôleur général nommé par le
président mais révocable par le Congrès de pratiquer des coupes automatiques pour réduire le déficit
budgétaire, comme contraires à la séparation des pouvoirs.
d) pouvoir d'impeachment
Cette procédure complexe, longue, presque archaïque permet au Congrès de destituer le Président (mais
aussi le vice-président et les fonctionnaires civils) non pas sur des motifs politiques mais pour des raisons
de violation grave ou abus du droit. On parle en conséquence de responsabilité pénale.
- Motifs de destitution : " trahison, concussion, crime contre la chose publique ou délit grave "
- Procédure : la Chambre des Représentants prend l'initiative. Il suffit que l'un de ses membres dépose une
proposition d'impeachment qui est transmise à la Commission des Affaires Judiciaires. Cette commission
vote une résolution indiquant s'il y a lieu d'engager une enquête d'impeachment et dans le cas favorable
commence des auditions. Elle se prononcera finalement sur une résolution d'impeachment. Si cette
commission émet un avis favorable, alors l'assemblée à la majorité simple vote sur la mise en accusation
et saisit le Sénat.
Le Sénat se transforme alors en Haute Cour de Justice. Elle se prononce sur le dossier qui lui a été
transmis, après avoir entendu l'accusation, la défense et les témoins. Si la condamnation est votée à la
majorité des 2/3, alors le président est démis de sa charge.
- Application : cette procédure tombée en désuétude est revenue à la mode après que le Président Nixon
ait démissionné en 1974, suite à l'adoption par la Commission des Affaires judiciaires d'une résolution
§3 La Cour Suprême
La Cour Suprême comme son nom l'indique se situe au sommet de la hiérarchie des tribunaux aux Etats-
Unis.
Que ce soit les tribunaux de la fédération qui sont :
- en 1e instance les cours de district
- en 2e instance les cours d'appel
Que ce soit les tribunaux des États qui sont coiffés par les Cours Suprêmes des États.
La Cour Suprême est aussi une Cour constitutionnelle. Certes tous les tribunaux ont pour mission de
contrôler la constitutionnalité des actes pris par les pouvoirs législatifs, exécutif, (locaux ou fédéraux).
Mais la Cour Suprême a le dernier mot en la matière : elle peut casser ou réformer les décisions des
tribunaux de la fédération que la Constitution qualifie dans l'art. 3 Section I de "cours inférieures". Elle
intervient en dernier ressort lorsque les tribunaux des États se sont prononcés sur un problème de
conformité à la Constitution fédérale.
A composition
(voir plus haut) + article sur les rapports entre l'élection US et la composition de la CS.
CONCLUSION :
INTRODUCTION
Lorsque le 6 avril 1814, le Sénat impérial après avoir proclamé la déchéance de Napoléon rappelle "la
monarchie légitime", il peut sembler que la France va tirer un trait sur les acquis notamment
institutionnels de la révolution.Ne va t-elle pas simplement revenir en arrière, à la monarchie absolutiste ?
Après avoir participé à l'invention du droit constitutionnel moderne, elle semble tout prêt de l'oublier pour
revenir aux vieilles coutumes de l'ancien Régime.
Cela peut après tout se comprendre : l'expérience révolutionnaire et plus encore napoléonienne semble
avoir conduit à un échec monstrueux, sanglant. On a proclamé de beaux principes (souveraineté du
peuple, séparation des pouvoirs, etc.) mais on n'en a appliqué aucun ; à supposer qu'ils aient été
applicables. Durant cette période, la France n'a connu que la dictature :
- d'abord la dictature révolutionnaire (au profit de l'Assemblée)
- puis la dictature napoléonienne (au profit de l'Exécutif).
On comprend alors que ceux qui sont restés royalistes souhaitent qu'on en finisse avec ces
expérimentations institutionnelles.[C'est la thèse des théoriciens favorables à un retour à l'AR tels que
Burke en Angleterre, Rheberg en All.]
Revenons rapidement aux deux types de dictature qu'ont connus les français pour mieux comprendre
pourquoi la Monarchie va de nouveau avoir sa chance en France :
- la dictature révolutionnaire :
lorsque le 10 août 1792, Louis XVI oppose son veto à deux décrets de l'Assemblée Nationale (concernant
les biens des émigrés et les prêtres réfractaires), l'Assemblée législative ne le supporte pas et prend le
pouvoir. Elle démet de ses fonctions le Roi suspect d'intelligence avec l'ennemi et crée un "Conseil
Exécutif Provisoire".
On passe à un régime d'Assemblée. Ce régime marque un véritable tournant pour au moins 3 raisons:
--- il marque l'échec de la première tentative d'instaurer en France un régime de séparation des pouvoirs ;
la Constitution de 1791, première constitution française avait en effet mis en place un régime de balance
des pouvoirs inspiré des idées de Montesquieu (qui aurait pu s'orienter dans le sens du parlementarisme
moderne: on avait vu par exemple s'instaurer une responsabilité politique avec le renvoi de Délesser,
ministre des affaires étrangères par le Roi).
--- la prise du pouvoir par l'Assemblée va signifier la fin de la vieille monarchie française capétienne
qu'avait pérennisé la Constitution de 1791
--- c'est l'apparition d'un type de Gouvernement inédit : un Gouvernement d'Assemblée ou conventionnel
qui va se traduire très vite par une dictature au profit de révolutionnaires radicalisés, fanatiques membres
du parti jacobin. Trois étapes peuvent être distinguées:
1 l'assemblée législative auquelle va se succéder une assemblée constituante appelée Convention
gouverne par le biais d'un "Conseil Exécutif Provisoire". Elle élabore une Constitution, la Constitution du
24 juin 1793 qu'elle décide de ne pas appliquer.
2 chute des révolutionnaires modérés (les girondins) le 31 mars 1793. Cela conduit à un glissement de
l'autorité de la Convention au Comité de salut public, puis à Robespierre. C'est le début de la Terreur.
3 le 9 Thermidor an II (27/071794), la Convention lasse de la Terreur fait exécuter Robespierre. Elle
éparpille la puissance du Comité de Salut Public au profit de plusieurs comités. Fin de la dictature
révolutionnaire.
Bilan institutionnel: la dictature a été rendue possible sur le plan juridique pour au moins deux raisons :
- le Gouvernement d'assemblée n'était pas fondé sur un strict respect du droit constitutionnel en vigueur.
Les révolutionnaires n'ont appliqué ni la Constitution de 1791, ni celle de 1793 (dite "Montagnarde").
C'était un Gouvernement d'exception justifié par l'état de guerre intérieure et extérieure. Ainsi, le 10
octobre 1793, la Convention déclarait que le "Gouvernement sera révolutionnaire jusqu'à la paix".
- le Gouvernement d'assemblée n'était pas pur. Jamais, l'Assemblée à elle seule n'aurait pu organiser,
mettre en œuvre la dictature. Elle a donc délégué, peut être cédé son autorité à des comités émanant
- la dictature napoléonienne:
Le 1er Prairial de l'an III (20 mai 1795), la Convention décimée et à bout de souffle refuse de mettre en
application la Constitution de 1793. L'esprit est au compromis et au repos. Est décidée au contraire la
mise en chantier d'une nouvelle Constitution qui va renforcer l'Exécutif, rétablir la Séparation des
pouvoirs. Le problème, c'est que le nouveau régime, appelé Directoire, mis en place par la Constitution de
l'an III va aller de crise en crise, de coup d'État en coup d'État jusqu'au dernier, celui du 18 Brumaire de
l'an VIII qui permet à Napoléon de détenir seul le pouvoir.
Quelques mots sur la Constitution de l'an III. Elle est originale à plusieurs titres:
1 La Déclaration des Droits qui la précède exige en contrepartie des devoirs. Ex. "Nul n'est bon citoyen
s'il n'est bon fils, bon père, bon frère, bon ami, bon époux".
2 Le régime mis en place est un régime de séparation stricte des pouvoirs. C'est donc la seconde tentative
d'instaurer en France le régime présidentiel. Il n'y a point de responsabilité ministérielle et point de
possibilité de dissoudre l'Assemblée.
3 Le pouvoir Exécutif est confié à un organe collégial : le directoire composé de 5 membres. Par crainte
du pouvoir personnel, on n'a pas voulu rétablir un Chef d'État.
Bilan institutionnel: Il y a peu de choses à dire sur les Constitutions de l'Empire. Plus intéressant est
l'Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire, signé par Napoléon lors des 100 jours (fin Mars-18
juillet 1815), c'est-à-dire après son retour de l'Ile d'Elbe. Cette constitution hâtivement rédigée qui se
voulait libérale fut soumise à acceptation populaire. Pour plus de 5 millions d'inscrits, il n'y eut environ
que 1300000 suffrages exprimés dont moins de 5000 NON. Elle fut promulguée lors de la cérémonie du
Champ de Mai qui précéda de peu le départ de Napoléon pour Waterloo. La reprise des hostilités, puis la
défaite firent que cet acte resta à l'état d'intention.
Il s'agissait, affirmait l'Empereur, "de combiner le plus haut point de libertés publiques et de sûreté
individuelle avec la force et la centralisation nécessaire pour faire respecter par l'étranger l'indépendance
du peuple français et la dignité de la couronne".
L'Acte additionnel prévoyait que le Pouvoir législatif serait exercé par l'Empereur et par 2 Assemblées, la
chambre des Pairs et la Chambre des Représentants. Les Ministres, responsables des actes du
Gouvernement et de l'exécution des lois, pouvaient être mis en accusation par la Chambre des
Représentants et jugés par la Chambre des Pairs.
Les droits et libertés individuels qui avaient été souvent bafoués par la police impériale, étaient garantis.
La censure préalable était supprimée et le jury devenait compétent, même en matière correctionnelle, pour
les infractions commises par voie de presse.
D'où venait ce tardif libéralisme de Napoléon? Il devait en fait beaucoup à la Charte constitutionnelle
accordée le 4 juin 1814 par le roi Louis XVIII lors de la première Restauration et qui reprit force après la
seconde. Car comme nous allons le voir, la Restauration n'a pas conduit à un retour en arrière, à un retour
à l'ancienne monarchie absolutiste mais paradoxalement a permis l'implantation en France du régime
Parlementaire; ce que la Révolution elle n'a pas réussi à faire...
Les faits: Louis XVIII de retour en France rétablit la monarchie en deux fois ; soit en 1814, puis en 1815
après l'échec des 100 jours. Dès juin 1814, il accorde à ses sujets une Charte constitutionnelle qui, sur la
A) la forme de la Charte :
La Charte ne repose pas comme les Constitutions modernes sur un contrat passé entre les dirigeants et le
peuple ou par le peuple avec lui-même. La Charte est octroyée par le Roi, c'est-à-dire donnée de plein gré,
arbitrairement par le Roi au Peuple. Ce que montre la formule employée à la fin du préambule : "Nous
avons volontairement et par le libre exercice de notre autorité royale, accordé et accordons, fait
concession et octroi à nos sujets, tant pour nous que pour nos successeurs, et à toujours, de la Charte
constitutionnelle qui suit..."
Cette notion d'octroi tout comme la référence à la Divine Providence suffisent à montrer que l'on est
revenu à une souveraineté de droit divin. Pour autant, ce retour à la légitimité traditionnelle ne signifie
pas que le Roi retrouve une autorité sans limites. C'est ce que l'on découvre si l'on étudie sur le fond cette
charte.
B) le contenu de la Charte :
Les pouvoirs du Roi sont limités d'une double façon :
a) La Charte maintient l'essentiel des droits donnés aux français par la Révolution: égalité devant la loi,
liberté individuelle, liberté d'opinion et de publication... Si la religion catholique est déclarée religion
d'État, chacun peut professer sa religion avec une égale liberté.
B) Le Roi est le chef suprême de l'État, détient seul la puissance exécutive (article 13), propose et
promulgue seul la loi (article 16) et enfin nomme les juges (article 58). Cela signifie que le Roi règne et
gouverne ; mais ce qui est plus important, c'est qu'il existe l'esquisse:
- d'une séparation des pouvoirs: ainsi, les deux Chambres (des Pairs et des Députés) détiennent une
"portion de la puissance législative". Et d'autre part, si "toute justice émane du Roi", les juges sont
"inamovibles".
- d'une collaboration des pouvoirs: ainsi, "les ministres peuvent être membres de la Chambre des Pairs et
de la Chambre des Députés. Ils ont en outre leur entrée dans l'une ou l'autre des deux Chambres, et
doivent être entendus quand ils le demandent" (article 54).
- de facultés de révocation:
--- le Roi peut dissoudre la Chambre des Députés (article 50)
--- les ministres peuvent être accusés pour fait de trahison ou de concussion par la Chambre des
représentants et jugés par la Chambre des Pairs. Dans ce dernier cas, il ne s'agit que d'une responsabilité
pénale mais on a vu au siècle précédent, en Angleterre, que la simple menace par la Chambre des
Communes d'engager la responsabilité pénale avait amené ceux-ci à démissionner. La notion de
responsabilité politique, sanctionnée non par une peine mais par le départ du Gouvernement s'était ainsi
dégagée.
De plus, les chambres d'après la Charte, votent le budget et consentent l'impôt. En refusant d'accorder des
moyens financiers au Gouvernement, les Assemblées pourraient amener les ministres à se retirer.
Au total, on peut dire que la Charte, si elle n'organisait pas un régime parlementaire pouvait être un cadre
qui autorisait son apparition. Il suffisait pour cela de la bonne volonté du Roi et de quelques années de
paix extérieure et intérieure; facteurs qui ont été effectivement réunis.
Cela s'est fait de façon paradoxale lors de l'apparition de la responsabilité politique des ministres. Les
ministres désignés par Louis XVIII furent en butte aux attaques des députés monarchistes les plus
conservateurs (les ultra); ces derniers soutinrent l'idée que la Chambre des Députés avait le droit de
renverser les ministres nommés par le Roi. Mais cette idée conduisait en fait à diminuer l'autorité du Roi,
à créer le régime parlementaire ; ce qui était le résultat inverse de ce qu'ils avaient souhaité.
Le premier des ministres qui furent amené à se retirer dans ces conditions fut le Duc de Richelieu, arrière
petit neveu du Cardinal, principal ministre en 1815. Ce sont donc les adversaires du parlementarisme qui
contribuèrent à l'instaurer. Cependant, lorsque en 1824, Charles X succéda à Louis XVIII, ils crurent
qu'on allait enfin revenir à l'Ancien Régime. En effet, Charles X favorable à leurs idées tenta de briser
l'évolution vers le régime parlementaire. Il essaya de gouverner sans tenir compte de l'opinion de la
majorité des parlementaires et nomma en conséquence des Ministres Principaux non souhaités par la
Chambre des Députés comme Polignac.
Le résultat de cette politique fut la Révolution de 1830. Révolution qui en amenant au pouvoir Louis
Philippe ne fit que renforcer l'évolution vers le Parlementarisme.
Les faits: la Révolution de 1830 provoque l'abdication de Charles X (qui avait essayé de museler
l'opposition en prenant des ordonnances qui suspendaient notamment la liberté de la presse), l'élimination
de la branche ainée des Bourbons au profit de Louis-Philippe, Duc d'Orléans. Celui ci contrairement à ses
prédécesseurs, va passer un véritable compromis avec la Révolution et va admettre l'implantation d'un
parlementarisme qui a cependant le défaut d'être dualiste et de ne pas avoir de base populaire.
Louis Philippe accepte tout d'abord le principe de souveraineté nationale. La nouvelle Charte
constitutionnelle est fondée sur un accord politique entre le Roi et le Parlement. La Charte de 1830 est en
fait celle de 1814 amendée par les deux Chambres. C'en est fini de la souveraineté de droit divin et du
drapeau à fleur de lys. Les amendements portent eux-mêmes trace du compromis. Ils ont pour
conséquence :
- l'ajout de nouveaux droits fondamentaux comme la liberté de la presse. De plus la religion catholique
n'est plus considérée comme religion d'État ; elle est considérée simplement comme la religion de la
majorité des français.
- le Roi renonce au droit d'édicter des ordonnances pour la sûreté de l'État : elles ne doivent avoir comme
objet que l'exécution des lois.
- Les Pairs héréditaires sont supprimés ; il n'y aura plus à la Chambre des Pairs que des Pairs nommés.
a) dualiste: Louis Philippe veut gouverner. C'est pourquoi il choisit les ministres et les révoque. Mais
comme d'autre part, il ne veut pas gouverner sans le soutien du Parlement, il admet que les ministres
soient aussi responsables politiquement devant les Chambres. (Principe de la double responsabilité =
dualisme). Il faut noter que cette responsabilité va s'exercer à travers un procédé aujourd'hui interdit :
l'interpellation.
[Définition : il s'agit d'une question posée à un ministre suivie d'un débat général qui est conclu par le
vote d'un ordre du jour favorable ou non à ce ministre. S'il est défavorable, le ministre démissionne]. A
l'époque, l'interpellation était encore un droit collectif ; son exercice requérait l'assentiment de la majorité
au Parlement.
D'autres procédés typiques du parlementarisme, toujours en vigueur naissent à cette époque : les
questions orales, les enquêtes parlementaires. Ils sont nés de la pratique, c'est-à-dire d'interprétations
extensives de la Charte.
b) sans base populaire: si on peut parler de régime parlementaire, on ne peut parler de démocratie
parlementaire. En effet, le suffrage n'était pas universel ; seuls votaient les citoyens qui acquittaient un
minimum d'impôts, le cens électoral. Sous la première Charte, il fallait pour être électeur, payer au moins
trois cents francs de contribution directe et être âgé d'au moins de 30 ans ; la version de 1830 renvoyait la
question à la loi qui réduisit ces exigences sans les supprimer. Conséquence:
- 1830: 300000 électeurs
- 1848: 450000 "
La campagne menée par les Républicains pour l'abolition du cens conduisit à la révolution du 22-24
février 1848 et à l'avènement de la République.
Si les monarchistes ont réussi à implanter le parlementarisme, il revient aux républicains de l'avoir fait
fonctionner durablement. Grâce à eux, le régime parlementaire ébauché entre 1875 et 1848 va cette fois
fonctionner durablement de 1875 à 1940, soit pendant près de 65 ans. Cette réussite s'explique sans doute
en partie parce que les Républicains ont voulu la démocratisation du régime parlementaire en instaurant le
suffrage universel.
Genèse: en réalité, les Républicains de 1848 sont très divisés. On peut distinguer entre deux tendances qui
ne sont d'accord que sur une seule chose : pas de balance des pouvoirs.
- les républicains les plus radicaux : ils se donnent pour modèle les Montagnards de 1793 dont ils imitent
l'attitude, le langage et les raisonnements. Leur projet constitutionnel est simple et logique : un peuple
souverain, une seule assemblée pour délibérer en son nom, un exécutif subordonné à cette assemblée.
C'est le système que décrivait ainsi Félix Piat : "tous les inconvénients tombent si le pouvoir exécutif est
ce qu'il doit être, le bras de l'Assemblée; le bras obéit à la tête, il exécute unitairement la volonté de tous".
Ce "bras" devait être un Comité exécutif ou, comme le proposait J. Grévy, lui-même futur Président de la
IIIème république, un Président du Conseil des Ministres élu et révocable par l'Assemblée. En bref, ces
républicains confondaient régime parlementaire et régime d'assemblée ;
- les républicains modérés de conviction ancienne ou de ralliement récent, voient les choses tout
autrement. Point de romantisme révolutionnaire chez eux, mais la volonté de clore une bonne fois pour
toute la Révolution.
N'oublions pas que pour beaucoup de français de cette époque, la République faisait penser à la
Convention, à la Terreur. Pour les républicains modérés, il s'agissait en conséquence de faire la
République sans ressusciter le régime conventionnel. Point d'Assemblée unique donc mais un pouvoir
législatif prudemment réparti entre deux Chambres. Point de Comité exécutif ou de chef de
Gouvernement subordonné au législatif, mais un chef de l'État fort assisté de ministres. Mais comment
donner à ce Président l'autorité nécessaire sinon en le faisant élire par le peuple ? Il pourra dire aux
Assemblées: "Vous êtes les élus de la Nation, moi aussi !"
Le comité constitutionnel chargé par l'Assemblée de préparer le projet dut trouver un compromis entre les
thèses des républicains modérés et radicaux. D'abord, il opta contre l'avis de quelques uns de ses membres
pour une Assemblée unique. L'idée d'une deuxième Chambre, d'une Chambre Haute n'était pas dans
l'esprit de l'époque: elle rappelait la Chambre des Pairs, le Sénat impérial, l'aristocratique Chambre des
Lords anglais. Mais si le pouvoir législatif était concentré en une seule Assemblée, il fallait trouver un
contre poids suffisant. Voilà pourquoi on opta pour un Président élu au suffrage universel direct. Voilà
pourquoi on donna une grande liberté d'action à ce Président, ce qui conduisait à exclure le fait que les
ministres nommés par lui soient renversés par l'Assemblée. les ministres ne pouvaient être révoqués (et
nommés) que par le seul Président (pouvoirs propres art. 67). La contre partie logique était que le
Président ne puisse pas dissoudre cette Assemblée.
Au total, sans l'avoir vraiment voulu, les Républicains ont instauré un régime de séparation absolue des
pouvoirs où les facultés de révocation étaient absentes; même le droit de veto était absent [On retrouve le
principe de spécialisation cher à Rousseau]. Cela avec un grave risque de conflits qui ne connaissent pas
de mode de résolution pacifique. Les avertissements ne manquèrent pas : "pouvoirs indépendants, conflits
de pouvoirs, révolutions" affirma J. Grévy. Selon, Vivien, membre dela Commission, on ne pouvait
Cette nouvelle expérience institutionnelle ne nous retiendra guère. Il faut savoir seulement que par un
plébiscite de décembre 1851, le Président obtient de transformer la République présidentielle en
République autoritaire.
Une nouvelle Constitution fut élaborée: celle du 14 janvier 1852. Elle comportait un Président élu au
suffrage universel pour 10 ans qui nommait et révoquait les ministres, un Sénat dont presque tous les
membres étaient nommés par le Président, un Corps législatif dont le Président et les vice-présidents
étaient nommés par le Président qui n'avait pas le droit d'initiative législative.
Dès le 7 novembre 1852, la dignité impériale était rétablie par un acte du sénat. Après 18 ans d'Empire
d'abord autoritaire puis plus libéral, un autre acte du Sénat daté du 21 mars 1870 établit une Constitution
impériale amendée que la majorité du peuple français approuva. Sans la guerre de 1870 et la défaite de
Sedan, l'application de cette constitution aurait pu amener le pays au régime parlementaire.
les faits: Napoléon III capitule le 2 décembre 1870. L'organisation d'une régence par l'Impératrice
Eugènie échoue. Un Gouvernement provisoire présidé par le Général Trochu se forme. Il demande un
armistice qui est conclu le 28 janvier 1871; cet armistice rend possible l'élection d'une Assemblée
Nationale le 8 février 1871. Curieusement, les élections conduisent à la victoire des monarchistes qui
étaient favorables à la paix alors que les républicains étaient pour la continuation de la guerre.
Cette assemblée, sans véritable souffle novateur qui nomme Thiers comme chef du pouvoir exécutif va se
contenter de gérer le provisoire en attendant une restauration improbable (compte tenu du conflit de
légitimité entre les prétendants à la Couronne). Il faudra attendre les débuts de 1875 pour que les
Républicains devenus majoritaires à l'Assemblée réussissent à établir une République Parlementaire.
Cependant, lors de cette période transitoire, 3 grandes lois sont adoptées qui esquissent le régime
Parlementaire:
- la loi Rivet du 31 Août 1871:
On essaye de rendre responsable politiquement devant l'Assemblée à la fois le Chef de l'État et un vice-
président du Conseil des Ministres.
- la loi des Trente du 13 Mars 1873 : (ou "Constitution De Broglie")
On essaye d'encadrer l'Exécutif en obligeant par exemple Thiers à demander au Conseil des Ministres
l'autorisation de faire des déclarations de politique intérieure devant le Parlement.
- la loi du Septennat du 20 novembre 1873 :
Cette loi confie pour 7 ans le pouvoir exécutif au Maréchal de Mac-Mahon, successeur de Thiers. Il
s'agissait d'organiser une présidence personnelle suffisamment longue pour attendre que "Dieu ouvre les
yeux au futur Henri V ou daigne les lui fermer". Henri V n'ayant pas d'enfant, on espérait qu'à sa mort le
trône reviendrait au Duc d'Orléans qui lui était plus favorable aux idées nouvelles (acceptant le drapeau
tricolore, la Monarchie constitutionnelle).
Enfin, cette loi décida la création d'une Commission de 30 membres pour mettre au point des lois
constitutionnelles.
Au total, on a bien l'impression de se trouver devant une troisième Charte ; c'est-à-dire un cadre qui rend
possible le fonctionnement durable d'un parlementarisme fondé sur les facultés de révocation classiques :
- le droit de dissolution royale (car donné au chef de l'État et non à un chef de Gouvernement ou Président
du Conseil qui n'est pas prévu par la Constitution)
- la responsabilité politique des ministres devant la Chambre des députés.
Mais ce parlementarisme prendra en fait deux formes selon que ce seront les républicains ou les
monarchistes qui seront au pouvoir. On peut dire que si la IIIème République conservera toujours un
régime constitutionnel parlementaire, son régime politique évoluera adoptant une forme dualiste puis
moniste.
Des efforts seront faits pour restituer au régime une efficacité et restaurer l'Exécutif:
- organisation de la Présidence du Conseil: le poste de Président de Conseil est d'abord crée de facto ; puis
après 1914, la Présidence du Conseil est organisée administrativement (un Secrétariat Gouvernemental
est crée). Enfin, en 1934, une loi de finance reconnaît l'existence d'un "Ministre chargé de la Présidence
du Conseil" qui aura un local particulier : l'Hôtel de Matignon.
-apparition des décrets-lois: pendant la Guerre 14-18, le Parlement accepte de déléguer au Gouvernement
le pouvoir de faire la loi. Puis, à partir de 1924, Poincaré obtient de nouveau l'autorisation du Parlement.
Il y aura généralisation des décrets-lois entre 1934 et 1940.
Ces remèdes ne résoudront rien.
Conclusion:
Cette crise explique la chute de la IIIème République. Face à la guerre et surtout face à la défaite, le
régime se révélera incapable de réagir. L'exécutif se divisera sur la question : continuer la lutte ou
demander un armistice. Finalement, par la loi du 10 juillet 1940, le Parlement préférera donner les pleins
pouvoirs au Maréchal Pétain et lui permettra de réviser la Constitution.
Les républicains ont donc réussi à faire fonctionner le parlementarisme dans le cadre de la République.
Mais en lui donnant une orientation moniste (à la limite du Gouvernement d'Assemblée), ils ne purent
éviter qu'il entre en crise. Après la Guerre 40-45, les Républicains crurent qu'en réformant la
Parlementarisme moniste, ils pourraient éviter les errements de la IIIème République. Avant d'étudier la
réforme du Parlementarisme moniste et son échec, il nous faut rappeler comment s'est installée la IIIème
République.
Cette idée de rationalisation du parlementarisme n'est ni nouvelle, ni propre à la France. D'une part, on la
retrouve exprimée par de nombreux hommes politiques sous la IIIème République (Cf. Tardieu, Blum...).
D'autre part, d'autres pays comme la R.F.A., l'Italie tenteront de l'appliquer au sortir de la 2ème G.M.. Il
s'agit au moyen de techniques juridiques (véritables béquilles) de permettre à un Gouvernement de
trouver une majorité de soutien alors que le mode de scrutin, le système de partis ne la fournissent pas.
La chute du régime:
Si la IVème République a pu relever l'économie, elle n'a pu maîtriser le problème de la décolonisation.
1947: insurrection de Madagascar
1950: crises au Maroc et en Tunisie
1954: insurrection algérienne du 1er novembre 1954;
A ses débuts, personne ne la considère comme grave. M. Mitterrand, alors ministre de l'Intérieur du
Cabinet Mendès-France s'associe aux déclarations de son président du Conseil disant: "l'Algérie, c'est la
France". Il est vrai que la décolonisation semble impensable dans le cadre algérien compte tenu de sa
spécificité:
- l'Algérie est un département français et contrairement par exemple à un protectorat, elle n'a pas vocation
à devenir indépendante.
- l'Algérie compte près d'un million d'européens à côté de 8 à 9 millions de musulmans.
M. E. Faure qui a succédé à M. Mendès-France décide en avril 1955 l'état d'urgence en Algérie. le
nouveau Gouvernement socialiste issu des élections du 2 janvier 1956 devait en principe marquer un
tournant "libéral" de la politique algérienne. Dans sa campagne électorale, M. Guy Mollet qui va devenir
Président du Conseil avait parlé de guerre "imbécile et sans issue". Mais le 6 février 1956, venu à Alger
voir les choses sur place, il est l'objet de manifestations d'hostilité et de jets de tomates. Refusant
d'apparaître comme le bradeur de l'Algérie, il propose une politique qui, deviendra la politique officielle
de la IVème République. Elle tient en trois termes:
- Cessez-le-feu à obtenir par nos armes
- élections libres; ce qui n'est pas évident car il y a toujours deux collèges, un collège français et un
collège musulman
- négociations mais avec qui? ainsi, le F.L.N. ne veut pas parler; il pose un préalable qui n'est pas le
cessez-le-feu mais l'indépendance.
On poursuivra donc la "lutte contre la rébellion". Pour cela, M. G. Mollet obtient des pouvoirs spéciaux
votés à la quasi unanimité et décide l'envoi du contingent. Son successeur, M. Bourgès-Maunoury
propose une réforme libérale: le collège électoral unique mais dont les Européens d'Algérie ne veulent pas
car ils seraient très minoritaires (1/10), un Parlement fédératif, une organisation exécutive propre. Il est
renversé le 30 septembre 1957 notamment grâce aux communistes et aux poujadistes. M. F. Gaillard,
nouveau P du C réussit à faire voter le projet mais sous une forme affadie ; de plus le projet doit entrer en
application après le cessez-le-feu. Cela ne peut évidemment apporter de solution à l'affaire algérienne qui
s'internationalise. Les propositions anglo-américaines reprises par F. Gaillard provoquent un vif débat à
l'Assemblée le 15 avril. Le Gouvernement est renversé le 15 avril: il a eu contre lui les communistes, 150
voix de droite et une vingtaine de gauche dont M. Mitterrand et M. Mendès-France. S'ouvre alors la
grande crise de "mai 1958".
Devant l'enlisement des gouvernements et le risque de guerre civile, le Président de la République finit
par désigner le principal adversaire du régime, De Gaulle comme Président du Conseil. Il est investi le
1er juin. Ont voté contre lui principalement les communistes et une grosse moitié des socialistes, 49 sur
95. Ce dernier demande le vote par l'Assemblée de 3 lois qui seront adoptées le 3 juin:
- une loi qui reconduit les pouvoirs spéciaux en Algérie : cette loi ne fait pas problème car c'est pour
régler l'affaire algérienne qu'on a appelé le G. de Gaulle. Il est normal qu'on lui donne des pouvoirs aux
moins égaux à ceux donnés à ses prédécesseurs.
- une loi lui permettant au Gouvernement de modifier la législation par ordonnances pour une durée de 6
mois. (Ce sont les anciens décrets-lois)
- surtout une loi qui donne au Gouvernement le pouvoir d'élaborer un projet de Constitution nouvelle. Ce
projet soulève de longues discussions. En fait, pour De Gaulle, il faut d'abord réformer l'État; c'est cela
seul qui permettra de résoudre la question algérienne. la déclaration d'investiture du est très nette: "ce ne
serait rien que de remédier provisoirement, tant bien que mal, à un état de choses désastreux, si nous ne
décidions pas à en finir avec la cause profonde de nos épreuves. Cette cause - l'Assemblée le sait et la
nation en est convaincue - c'est la confusion et, par là même, l'impuissance des pouvoirs". mais comment
arrive-t-on à passer de la IVème à la Vème République ? Cette dernière loi se contente de déroger à la
procédure de révision prévue par l'article 90 de la Constitution de 1946 afin de permettre au seul
Gouvernement de réviser la Constitution. Celui-ci pourra établir un nouveau projet de Constitution mais
dans le respect des principes; il ne s'agit pas de recommencer Vichy. On ne veut pas donner un chèque en
blanc au général de Gaulle. les 5 principes sont les suivants
1 le suffrage universel est source de tout pouvoir
2 séparation entre les pouvoirs exécutif et législatif
3 responsabilité du Gouvernement devant le Parlement.
4 indépendance de l'autorité judiciaire
5 organisation constitutionnelle des rapports entre la république et les peuples associés.
Ces principes dont seuls les 3 premiers ont été revendiqués explicitement par De Gaulle constitueront le
cadre de la future Vème République. Après avis d'un Comité consultatif et du Conseil d'État, le projet est
arrêté en Conseil des Ministres puis sera adopté lors du référendum du 28 septembre 1958 à:
- 78% pour les départements métropolitains ou d'outre mer.
- 86% pour les territoires des ex-colonies (sauf la Guinée de Sékou Touré).
Du côté des Non:
- les Communistes, un nouvel organisme rassemblant les forces de gauche, c'est l'UFD, sorte de cartel
rassemblant des syndicalistes, la gauche de la SFIO, des radicaux (Cf Mendès-France), de l'UDSR (Cf.
M. Mitterrand).... et les professeurs de droit qui trouvent la Constitution rétrograde et rappellent le
précédent de la Monarchie de Juillet.
du côté du OUI :
- la majorité des socialistes (CF G. Mollet, G. Defferre), des radicaux, le M.R.P., les indépendants
Contrairement aux régimes précédents (les IIIème et IVème Républiques), la Vème n'est pas un régime né
de compromis entre tendances ou partis politiques. La Constitution de la Vème est l'œuvre d'un seul
homme, le général de Gaulle, écrite par ses fidèles partisans comme M. Debré. C'est pourquoi elle est
fondée sur une logique ou un système juridiques tout à fait cohérents et originaux. Ce système se justifie
par une finalité très claire, très simple : donner enfin à la France un véritable régime de séparation des
§1 le diagnostic
Ce diagnostic est donné très tôt par le général de Gaulle, notamment dans le discours de Bayeux du 16
juin 1946. Pour le général de Gaulle, il y a un « mal français » que les précédents constituants n'ont pas
aperçu ou ignoré. Ce mal, c'est « notre vieille propension gauloise aux divisions et aux querelles ». Par
nature ou tempérament, les français sont portés à se diviser et oublier les intérêts supérieurs du pays. Les
conséquences au niveau politique sont les suivantes par ordre de conséquence :
- la division du suffrage (en courants d'opinions irréductibles)
- la multiplication et la rivalité des partis
- l'instabilité gouvernementale et institutionnelle
Le risque ultime est la désaffection des citoyens à l'égard de leur régime et la tentation de la dictature. Les
3 précédentes Républiques n'ont-elles pas fini ainsi ? Bien sûr, il est des périodes où les français savent se
rassembler à droite ou à gauche et oublier leurs divisions ; ce qui conduit à une simplification du système
des partis et à une la stabilité gouvernementale. Mais ces périodes ne sont que provisoires.
§2 les remèdes
A) le retour à l'orléanisme :
La spécificité de ce mal enraciné dans notre psychologie et notre sociologie justifie que l'on mette en
place un parlementarisme original, adapté ; cela afin que les institutions nouvelles « compensent par elles-
mêmes les effets de notre perpétuelle effervescence politique ». Il nous faut un parlementarisme à la
française différent du parlementarisme à l'anglaise partout appliqué en Europe ; ce dernier ne pouvant
qu'échouer en France car il est tout entier fondé sur l'existence d'un suffrage universel non divisé
conduisant à un système de partis simple, efficace et finalement à la stabilité gouvernementale. Ce qui est
une situation rare, voire exceptionnelle en France.
Le parlementarisme à la française sera un parlementarisme orléaniste qui donne au Chef de l'État un rôle
essentiel, celui d'arbitre ; un arbitre qui incarne naturellement l'intérêt national, préserve la séparation des
pouvoirs et doit être le garant ultime de la survie de l'Etat et de son régime. Ce qui implique qu'il peut
entrer dans le domaine gouvernemental mais aussi parlementaire sans pour autant se substituer au Premier
ministre et au Parlement.
Le général de Gaulle trouve donc la solution dans notre histoire en revenant à une formule déjà utilisée
par Louis Philippe (sous la Monarchie de Juillet) ou encore Mac Mahon (sous la IIIème république
jusqu'à la crise de 1877). Peut-être aurait-il pu trouver la solution à l'étranger en se référant notamment au
régime présidentiel américain. Les américains n'ont-ils pas réussi à instaurer une séparation des pouvoirs
rigoureuse avec un Chef d'État élu au suffrage universel capable de parler au nom de tous ?
B) la tentation d'imiter le régime présidentiel :
La tentation d'imiter le régime présidentiel a sans doute existé et continue d'exister chez les gaullistes (cf.
Ms Seguin, Balladur). M. Debré dans son discours du 27 Août 1958 reconnaît les qualités de ce régime.
Mais deux raisons, l'une conjoncturelle, l'autre structurelle s'opposaient en 1958 à ce que les gaullistes
aillent vers cette solution.
a) conjoncturelle : le régime présidentiel à l'américaine exige qu'on fasse élire au suffrage universel le
Président ; mais compte tenu de la composition du corps électoral, il y avait deux risques que ne voulaient
pas courir les gaullistes :
- qu'un candidat communiste soit élu
- qu'un candidat élu soit minoritaire en métropole et majoritaire dans les ex-colonies.
b) structurelle : il fallait mettre en place une séparation sticte ; cela supposait le non respect de la loi
constitutionnelle du 3 juin qui exigeait la mise en place d'une responsabilité obligatoire du
Gouvernement. Le général de Gaulle lors du débat du 2 juin à l'Assemblée Nationale sur la loi
constitutionnelle déclarait : "Ce texte spécifie que le Gouvernement doit être responsable devant le
Parlement, ce qui est incompatible avec un régime présidentiel... Le futur Président de la République ne
pourra se confondre avec le Chef du Gouvernement, puisque celui-ci sera responsable devant le
Voilà pourquoi la solution du parlementarisme orléaniste fut préférée. Solution que l'on trouve tout
entière ou presque dans le discours de Bayeux. Mais de Gaulle et M. Debré ne revendiquent pas
explicitement cette étiquette : ils se contentent d'insister sur la nature parlementaire du régime. Ils
admettent cependant que l'autorité donnée au Chef de l'État constitue une innovation. Cette innovation est
porteuse d'ambiguïtés qui continuent de troubler les commentateurs.
Nota : pour la plupart des observateurs de l'époque (1958), la Constitution ouvrait la possibilité de deux
phases successives, normalement prévisibles : la première phase avec de Gaulle, Président de la
République ; sa personnalité dominera le fonctionnement des institutions ; et la seconde phase, quand de
Gaulle ne sera plus (quand l'affaire algérienne sera réglée), c'est un régime parlementaire qui pourrait
revenir à la IIIème République telle qu'on l'avait conçue à l'origine
a) le résultat des élections législatives ne doit plus être essentiel. Si ces élections conduisent à un
multipartisme intégral, à l'apparition de majorités fragiles et hétéroclites (comme sous les précédents
régimes), le Gouvernement sera affaibli mais il pourra compter sur les armes fournies par la
rationalisation et en principe sur un Président arbitre titulaire de pouvoirs essentiels (pouvoirs qui sont par
exemple le droit de dissolution utilisable sans contreseing (art 12) ou le recours au référendum ordinaire
ou constitutionnel (art 11 et 89)...). Ces compétences sont à mêmes de dissuader le Parlement de s'opposer
2° d'une autre manière, le pouvoir législatif dont maintenant tenir compte de la tutelle du pouvoir
judiciaire avec la création d'une Cour constitutionnelle ; celle-ci pourra contrôler la constitutionnalité de
la loi (art 61). Certes, la IVème république avait institué un Comité constitutionnel chargé de vérifier
l'adéquation de la loi à la Constitution. Mais en cas de contradiction, c'était la Constitution qui devait être
modifiée. Selon l'article 93 de la Constitution de 1946, "la loi qui, de l'avis du Comité, implique une
révision de la Constitution, est renvoyée à l'Assemblée Nationale pour nouvelle délibération. Si le
Parlement maintient son premier vote, la loi ne peut être promulguée avant que la présente Constitution
n'ait été révisée..."
c) les partis politiques ne doivent plus contrôler le fonctionnement de l'Exécutif et plus globalement le
fonctionnement du régime. Selon l'article 4, ils doivent se contenter de "concourir à l'expression du
suffrage". Bien sûr, ils feront beaucoup plus en fait mais le retour à la partitocratie semble impossible.
Deux éléments juridiques permettent d'expliquer ce pronostic qui s'est réalisé :
- le passage au scrutin majoritaire à 2 tours pour l'élection des députés et en 1962 du Président de la
République ; cela favorise aux élections législatives un phénomène de bipolarisation (apparition de 2
grandes pôles politiques droite gauche avec des alliances électorales des grands partis et sous
représentation des petits partis) et par conséquent à l'Assemblée un phénomène majoritaire. Du coup, le
Premier ministre n'est plus l'otage de petits partis pour composer son Gouvernement. Cela dit un mode de
scrutin ne peut pas tout...
- le passage à une investiture présidentielle ; cette investiture contrairement aux investitures
parlementaires des III et IVème Républiques ne peut plus être contrôlée par les partis politiques. Certes, il
peut arriver que le Président ait été un chef de parti ou conserve une influence sur certains partis mais il
ne pourra choisir son Premier ministre au regard de ses seules préférences partisanes sauf à nier la logique
parlementaire du régime. Le Premier ministre doit aussi avoir la confiance de l'Assemblée. C'est encore
plus vrai en période de cohabitation.
Voilà pourquoi le débat sur une réforme du régime s'est trouvé relancé à partir des années 90. On veut à
la fois renforcer le Parlement et préserver le pouvoir présidentiel de nouveaux changements liés aux
élections législatives. L'échec de la dernière dissolution voulue par le Président Chirac a fini de démontrer
que la Vème République pouvait s'installer durablement dans un système de cohabitation ; hypothèse qui
était toujours apparue jusque là comme une situation soit impossible (avant 1986), soit exceptionnelle
(depuis 1986). Or la cohabitation provoque certains dysfonctionnements au sein de l'Exécutif dont on ne
peut souhaiter qu'ils durent (rivalité entre le Chef d'État et le Premier ministre qui s'accroît avec les
échéances électorales, désaccords sur la gestion de dossiers internationaux et surtout de politique
intérieure...).
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Nota : précisons que la Vème République malgré l'originalité de son régime (qui ressemble quant même à
celui du Portugal, de la Pologne aujourd'hui) possède de nombreux traits communs avec les régimes
précédents. Il y a continuité au moins sur deux points, l'un par rapport à la IVème, l'autre par rapport à la
IIIème :
- la rationalisation : l'idée de la rationalisation n'est pas abandonnée même si on ne compte plus sur elle
seule pour garantir la stabilité gouvernementale comme sous la IVème République. La rationalisation est
même renforcée. On notera par exemple:
1 l'apparition d'un strict régime de sessions parlementaires ; le Parlement ne peut plus se réunir comme il
le veut; ce n'est plus un organe permanent de la vie politique. Il y a deux session prévues en 1958 ; l'une à
l'automne destinée au budget, l'autre de printemps destinée au travail législatif ordinaire. Depuis une
révision constitutionnelle du 4 août 1995, il existe une session unique mais dont le début (octobre) et la
fin (juin) sont fixés par la Constitution et non par le Parlement.
2 la délimitation d'un domaine pour la loi (art 34) ; la loi ne peut plus tout faire; certaines matières, il est
vrai les plus importantes lui sont réservées.
3 la procédure législative peut être maîtrisée par le Gouvernement. Il faut noter par exemple les deux
nouveautés que sont le vote bloqué (soit la possibilité pour le Gouvernement de demander le passage au
vote sur un texte en ne retenant que les amendements qu'il désire) ou encore le fameux 49.3 (soit la
possibilité pour le Gouvernement d'engager sa confiance sur un texte et en cas de non dépôt de motion de
censure de l'opposition de voir ce texte adopté sans vote de l'Assemblée nationale)
4 la mise en place des incompatibilités parlementaires: un ministre ne peut être aussi parlementaire. Il
doit obligatoirement choisir entre les deux fonctions.
- par rapport à la IIIème république, c'est l'orléanisme d'avant la crise du 16 mai 1877. On peut dire que
De Gaulle a réussi là où Mac Mahon avait échoué. Avec la Constitution de 1958 il y a à la fois:
* un rejet défi de la "Constitution Grévy" : le Président de la République retrouve les pouvoirs que les
lois de 1875 lui donnaient à l'origine ; notamment le droit de dissolution et de nommer le Chef du
Gouvernement... On peut même dire qu'il y a extension de ces pouvoirs avec le droit de recourir au
référendum ou aux pouvoirs exceptionnels de l'art 16. Comme l'avait souhaité Mac Mahon, le Président
retrouve un rôle régulateur qui lui est donné parce qu'il peut parler au nom de la nation toute entière.
Attention, cela ne fait pas de lui un Chef d'Exécutif ou encore un super chef du Gouvernement. Selon la
Constitution de 1958, le Président doit laisser le champ libre à son Premier ministre et à son
Gouvernement qui selon l'art 20 "détermine et conduit la politique de la nation". Il est vrai que la pratique
comme nous le verrons divergera beaucoup de la lettre de la Constitution particulièrement sur ce point.
* la reconnaissance du dialogue entre le Président et la Nation. Mac Mahon se voulait seul responsable
devant la Nation, faisant appel à elle pour régler un conflit entre deux pouvoirs. C'est dans ce sens qu'il
eut recours au droit de dissolution en 1877.
De la même façon, le président sous la Vème république est responsable uniquement devant le peuple et
non devant le Parlement. Une motion de censure ne peut l'atteindre sauf peut-être indirectement. Il n'est
pas obligé de démissionner si l'opposition remporte les élections législatives par exemple. Le Président
élu pour 7 ans comme sous la IIIème n'est responsable que s'il se représente pour un second mandat. De
Gaulle ajoutera le cas du référendum en pratique. Enfin, le Président peut recourir à la dissolution ou au
référendum pour demander au peuple son avis.
Conformément aux idées du général de Gaulle, le Président de la République n'a pas le statut habituel des
chefs d'État en régime parlementaire (comme aujourd'hui en Allemagne ou en Italie). En effet, le
Président a le privilège d'être élu par la population et non par le Parlement. Cette différence essentielle
fait de lui un véritable "représentant de la Nation" ; ce qui conforte son autorité au sein de l'Exécutif.
Cependant, malgré cette autorité nouvelle le Président reste comme sous les IIIe et IVe républiques,
irresponsable politiquement devant le Parlement.
Selon l'article 6 de la Constitution, le Président est élu pour 5 ans au suffrage universel direct.
-------- origine : dès 1958, il est prévu que le Président ne sera pas élu par le Parlement. C'est la
conséquence de la volonté du général de Gaulle de voir le Président s'élever au dessus des autres pouvoirs
constitutionnels, des partis politiques. Déjà en 1946, dans le discours de Bayeux, il avait affirmé que le
chef de l'État serait "placé au-dessus des partis, élu par un collège qui englobe le Parlement, mais
beaucoup plus large et composé de manière à faire de lui le Président de l'Union Française en même
temps que celui de la République".
Dans un premier temps, c'est seulement un collège électoral élargi de 80000 personnes qui va désigner le
Président. On a transposé sur le plan national les collèges électoraux des sénateurs dans les départements .
Sa composition : des parlementaires (plus de 800), des conseillers généraux (plus de 3000), les maires des
38000 communes de France auxquels s'adjoignent, en nombre variable selon l'importance de la
population des communes, des conseillers municipaux et des délégués des conseils municipaux. Du coup,
les parlementaires ne représentent plus qu'1% du nouveau collège électoral. Le Président ne procède donc
plus du Parlement.
Son"défaut" : le Président n'a pas autant de légitimité que le Parlement car ce dernier est élu au suffrage
universel direct. Ce défaut sera corrigé en 1962. Pourquoi seulement en 1962 ? Dans ses Mémoires
d'espoir, tII, le G. de Gaulle dira ne pas avoir voulu "tout faire à la fois" et avoir voulu tenir compte "des
préventions passionnées que, depuis Louis-Napoléon, l'idée de plébiscite soulevait dans maints secteurs
de la population ".
Historique :
En octobre 1962, le général de Gaulle propose qu'à l'occasion d'un référendum sur la base de l'art 11 la
Constitution soit révisée. Le Président qui a lié son sort au projet de révision veut être élu au suffrage
universel direct comme les Députés et les Sénateurs. L'opposition qui conteste à la fois l'opportunité du
projet et la validité de la procédure employée s'insurge :
- concernant l'opportunité : l'opposition fait part de ses craintes que le Président en étant élu au suffrage
universel direct passe du statut d'arbitre à celui de véritable chef du Gouvernement.
- concernant la procédure: elle reproche au Président de n'avoir pas utilisé l'art 89, seule procédure
utilisable pour réviser la Constitution et qui permet au Parlement de d'avoir un veto. M. G. Monnerville,
président du Sénat parlera de "Violation délibérée, voulue, réfléchie, outrageante de la Constitution...
arbitraire... forfaiture du Premier ministre". M. P. Reynaud dans un discours rédigé comme une décision
de justice déclare : "Considérant qu'en écartant le vote par les deux Chambres le Président de la
République viole la Constitution dont il est le gardien ; Considérant qu'il ouvre une brèche par laquelle un
aventurier pourrait passer, un jour, pour renverser la République et supprimer les libertés ; considérant
que le Président de la République n'a pu agir que sur la proposition du Gouvernement ; "Censure le
Gouvernement, conformément à l'article 40, alinéa 3, de la Constitution".
- pour une activité n'entrant pas dans le cadre des ses fonctions :
L'article 68 ne faisait référence qu'à l'activité du président dans le cadre de ses fonctions ; on pouvait donc
penser que les actes délictueux du président commis hors ses fonctions donnaient lieu à une responsabilité
pénale appréciée par le juge ordinaire dans les conditions du droit commun. Ce cas a constitué pnedant
longtemps une hypothèse d'école. Mais la mise en cause du président Chirac dans des affaires en cours
d'instruction concernant la Ville de Paris a été à l'origine d'une controverse qui touche à l'interprétation de
l'article 68 de la Constitution. A l'occasion d'une décision relative à la Cour pénale internationale du 22
janvier 1999, le Conseil constitutionnel a estimé que le président était soumis à un régime dérogatoire du
droit commun. Pour les actes délictueux extérieurs à sa fonction, il ne pouvait donc être mis en cause par
le juge ordinaire pendant la durée de ses fonctions mais devait être accusé par les Assemblées (comme
pour la haute trahison). Cela impliquait que ce même juge devait attendre que le président quitte
l'Elysée... Le président relevait cependant du droit commun pour ce qui concerne sa responsabilité civile.
La plupart des commentateurs avaient admis jusqu'en 1992 que le président au titre de simple particulier
pouvait être traduit devant ces tribunaux sans condition. L'absence de motivation des considérants de la
décision du Conseil constitutionnel (risque d'atteinte à la séparation des pouvoirs ? à la fonction du chef
d'Etat ?) a pu faire douter de la pertinence (sinon l'objectivité) de ce point de vue. Pour sortir du flou, il
semble nécessaire d'organiser une « inviolabilité présidentielle » sur le modèle de l'inviolabilité
parlementaire.
Article 67 :
Le Président de la République n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des
dispositions des articles 53-2 et 68.
Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis
de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite.
Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu.
Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre
lui à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation des fonctions.
Article 68 :
Le Président de la République ne peut être destitué qu'en cas de manquement à ses devoirs manifestement
incompatible avec l'exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en
Haute Cour.
La proposition de réunion de la Haute Cour adoptée par une des assemblées du Parlement est aussitôt
transmise à l'autre qui se prononce dans les quinze jours.
La Haute Cour est présidée par le président de l'Assemblée nationale. Elle statue dans un délai d'un mois,
à bulletins secrets, sur la destitution. Sa décision est d'effet immédiat.
Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres
composant l'assemblée concernée ou la Haute Cour. Toute délégation de vote est interdite. Seuls sont
recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution.
Une loi organique fixe les conditions d'application du présent article.
Commentaire critique : une fois encore, on oublie que le Président a deux corps : le corps mystique du
chef de l'Etat mais aussi son corps naturel de simple citoyen relevant des lois et de la justice ordinaire
pour ses activités non liées à sa fonction. Son immunité est justifiée dans ce dernier cas. Apparaît
simplement un nouveau motif de destitution plus large et très flou : "le manquement à ses devoirs
manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat" ; un motif de plus contraire à l'esprit du
régime. En effet, le Président devient responsable devant le Parlement en vertu d'une procédure qui peut
être utilisée pour des motifs politiques.
Il aura fallu attendre la fin de la législature et du quinquennat de Jacques Chirac pour que soit inscrite à
l'ordre du jour du Parlement la révision du titre IX de la Constitution concernant le régime de la
responsabilité du président de la République. Le projet de réforme constitutionnelle examiné, mardi 16
janvier, à l'Assemblée nationale, y a pourtant été enregistré le 3 juillet 2003. Mais la décision de le mettre
en discussion fut plus difficile à prendre que l'engagement formel énoncé au printemps 2002 par M.
Chirac, alors en campagne pour un deuxième mandat présidentiel.
Les propositions de la commission Avril, installée par M. Chirac après sa réélection, dont s'inspire la
réforme, se heurtent aujourd'hui à de nombreux griefs. Le projet de loi doit rendre incontestable sur le
plan juridique l'inviolabilité pénale dont bénéficie le chef de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions. Mais il
ouvre une hypothèque sur sa responsabilité politique, dont le Parlement deviendrait le juge. Une
procédure de destitution est créée. L'initiative peut être prise indifféremment par l'une ou l'autre des deux
assemblées. Pour être acceptée, elle nécessite une majorité simple du Parlement réuni en Haute Cour.
Paradoxalement, le premier à s'alarmer des conséquences de ce texte voulu par M. Chirac fut un de ses
plus fidèles confidents : Jean-Louis Debré. Dans une note écrite - fait rarissime - adressée en juillet 2003
au président de la République, le président de l'Assemblée nationale mettait en garde ce dernier sur les
risques de "déstabilisation des équilibres institutionnels" que cette nouvelle procédure pouvait entraîner. Il
Le septennat avait été mis en place la première fois sous la IIIe République pour des raisons
conjoncturelles (faire durer la présidence de Mac-Mahon et ainsi donner du temps aux royalistes). Sous la
Ve République, il avait une cause structurelle. Il s'agissait de rendre le Président indépendant à l'égard de
toute majorité parlementaire. Le Président ne pouvait être associé, identifié à un gouvernement. En bref,
sa neutralité et son rôle d'arbitre étaient préservés.La prise en considération de cette cause structurelle
explique sans doute pourquoi ce mandat si souvent remis en cause n'avait jamais été réformé jusqu'en
2002. Rappelons que G. Pompidou avait proposé en octobre 1973 une révision instaurant le quinquennat ;
révision qui avait été adoptée par les 2 Chambres mais la procédure n'avait pas été poursuivie. Valéry
Giscard D'Estaing en 1974 (puis à nouveau en 1994) s'était montré favorable à un raccourcissement du
mandat. En 1981, dans une des 110 propositions, F. Mitterrand s'était prononcé pour un mandat de 5 ans
renouvelable une fois ou de 7 ans non renouvelable. A la fin de son second mandat, il avait proposé une
durée de 6 ans mais n'avait rien entrepris.
La réduction du mandat à 5 ans semble avoir trouvé un consensus en sa faveur. Le projet n'a pas soulevé
de véritable débat. On a ignoré semble-t-il cette cause structurelle qui justifiait le mandat de 7 ans au
risque de mettre en péril le rôle présidentiel et le régime lui-même. Pas étonnant si maintenant les projets
de réformer le régime fleurissent...
Là encore, la Constitution de 1958 innove en attribuant pour la première fois au Président des
compétences essentielles qu'il peut utiliser sans le contreseing ou la signature des ministres : on parle de
"pouvoirs propres". Expression trompeuse car les pouvoirs en question ne peuvent tous être exercés par le
président lui-même, de son propre mouvement. En effet certains d'entre eux sont subordonnés à la
proposition de les utiliser par une autre autorité. Il est ainsi comme on le verra du recours au référendum
ordinaire (art. 11) soumis à proposition du gouvernement ou du Parlement. Ces pouvoirs propres
permettent au président d'assurer sa fonction d'arbitre décrite à l'article 5 : « Le président de la République
veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs
publics ainsi que la continuité de l'Etat. Il est le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du
territoire et du respect des traités ». Le recours au Conseil constitutionnel correspond à la première
phrase. L'article 16 correspond aux autres phrases, pour des circonstances exceptionnelles. En temps
normal, « le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat » sont assurés
par les autres pouvours propres : nomination du Premier ministre, dissolution de l'Assemblée Nationale
et référendum ordinaire.
En dehors de ses pouvoirs propres, le Président conserve à l'image d'un Chef d'État de régime
parlementaire classique des pouvoirs dits "partagés". Ces pouvoirs sont partagés avec le Gouvernement.
En d'autres termes, le Président doit les utiliser avec l'autorisation des ministres concernés. Cela suppose
négociation et un accord qui est formalisé par le contreseing ministériel ; c'est-à-dire la signature apposée
par le ministre concerné sur l'acte. Ce contreseing rend responsable de l'acte présidentiel le ministre
signataire devant le Parlement. Sous les III et IVème républiques, tous les pouvoirs du Chef de l'État
étaient partagés.
Revenons aux pouvoirs propres qui manifestent l'indépendance jugée excessive par certains du Président.
* le domaine du référendum était très étroit à l'origine ; seulement 3 catégories de lois peuvent être
soumises à approbation populaire :
Le président Mitterrand a tenté en 1984 d'élargir le champ de l'article 11 aux garanties fondamentales des
libertés publiques. Mais le Sénat qui devait selon l'article 89 approuver cette révision constitutionnelle s'y
opposa. Il a considéré d'une part qu'il était dangereux de demander au citoyen moyen peu informé et
facilement influençable son opinion sur des sujets de société (comme la peine de mort). D'autre part, il a
estimé que c'était donner au Président de la République une occasion d'obtenir un vote de confiance
populaire déguisé qui renforcerait son autorité.
En 1995, une révision constitutionnelle voulue par le président Chirac a ajouté une nouvelle catégorie de
lois : les lois portant sur "des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la Nation et aux
services publics qui y concourent". Par contre, il n'a pas été question jusqu'à présent de donner aux
citoyens la possibilité de demander l'organisation d'un référendum. (sur le modèle de la Suisse).
2) Parmi les autres pouvoirs partagés, il faut aussi mentionner dans un second temps les pouvoirs partagés
par le Président concernant la politique extérieure de la France
--------- la conduite des armées
Selon l'article 15, le Président est le Chef des Armées et préside les conseils et comités supérieurs de la
Défense Nationale. Mais selon l'article 20, le Gouvernement a aussi un pouvoir de décision puisqu'il est
prévu qu'il "dispose de la force armées".
Il est clair que ces deux articles se contredisent ou du moins se concilient mal. La Constitution est mal
rédigée sur ce point. Elle semble organiser moins un partage de compétences qu'une concurrence entre
Président et Gouvernement. On ne sait pas qui doit réellement diriger les armées.
La réponse à cette question peut cependant être trouvée si l'on se réfère aux articles 5, 8, 9 de la
Constitution. Ces articles précisent que le Président est à la fois le garant ultime de la sauvegarde du pays
et qu'il a une supériorité hiérarchique sur le Premier ministre du fait qu'il le nomme et dirige le Conseil
des Ministres. On peut en déduire que la conduite des armées appartient bien au Président de la
République avec la collaboration du Gouvernement.
Cela implique pour le Président la possibilité d'engager les forces armées françaises, de diriger ou gérer
une intervention extérieure et enfin de déclencher le feu nucléaire.
Cette dernière compétence a été légitimée et organisée par un décret du 14 janvier 1964 qui prévoyait que
le Président pouvait déclencher une riposte nucléaire aérienne. Compte tenu de la modernisation, on a
admis que le Président pouvait aussi utiliser l'arme atomique navale par l'intermédiaire des SNLE et
décider une riposte terrestre par l'intermédiaire des fusées enterrées du plateau d'Albion (fusées en cours
de démantèlement aujourd'hui). Ce décret a été abrogé et remplacé par un décret du 12 juin 1996 dont le
contenu est légèrement modifié. Il affirme plus nettement le rôle du Conseil de défense (au sein duquel
les conditions d'engagement des forces nucléaires sont décidées) et du Premier ministre (qui prend les
"mesures générales d'application" de la décision d'engagement).
On peut donc dire que si le Président décide seul, il n'agit pas seul. Cela est vrai d'ailleurs dans tous les
domaines de l'action militaire ; il a besoin du concours à la fois :
3) Enfin, parmi les autres pouvoirs partagés, il reste ceux ayant trait aux compétences normatives du
Législatif, de l'Exécutif et du Peuple :
* Le législatif :
------ la promulgation et la demande d'une nouvelle délibération de la loi (art10)
Selon l'article 10 al.1, le Président "promulgue les lois définitivement adoptées dans les 15 jours qui
suivent la transmission de la loi définitivement adoptée". Par sa signature, le Président authentifie la loi et
la rend exécutoire. Une loi simplement votée par le Parlement n'a aucune valeur. En droit, le Président
doit se contenter d'examiner la forme de la loi ; il vérifiera ainsi si la loi a été discutée et adoptée en
conformité avec la Constitution. En conséquence, le Président est obligé de promulguer une loi même si
son contenu ne lui convient pas. S'il ne respectait pas le délai de 15 jours, il s'exposerait à être soumis à la
procédure de la Haute Trahison (art 68).
Selon l'article 10 al.2, le Président peut demander qu'une loi dont la régularité formelle serait douteuse
soit délibérée à nouveau par le Parlement. Cette faculté d'empêcher était déjà donnée au Chef de l'État par
la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 et la Constitution de 1946. Les assemblées ne peuvent en droit
refuser la demande du Président et seront obligées de procéder à une nouvelle lecture du texte ou de
certains de ses articles.
* Le Peuple :
-------- le réferendum constituant de l'article 89 :
Le président intervient ici à deux niveaux :
- celui de l'initiative. Selon l'alinéa 1, il appartient au président de décider de lancer la procédure de
révision mais sur la proposition du Premier ministre ou des membres du Parlement. Le président est alors
lié par le contenu de la proposition.
- celui du choix entre le Congrès ou le référendum. Le président peut décider de soumettre les projets de
révision au Parlement convoqué en Congrès plutôt qu'au référendum qui est la procédure normale. Par
contre lorsqu'il s'agit d'une proposition, le président n'a plus cette option : seul le peuple se prononcera.
Enfin, dans la liste des pouvoirs partagés, il reste une compétence assez anecdotiquesqui normalement ne
confère au Président aucune autorité politique.
--------- l'exercice du droit de grâce
Article 17: le Président, selon un privilège très ancien quasi royal, peut commuer une peine (dans le seul
cas de la peine de mort) ou remiser en tout ou en partie la durée de cette peine. Sa décision doit être
précédée par une consultation du Conseil supérieur de la Magistrature (art. 65).
Comme la peine de mort a été abolie en 1981, seule reste la deuxième possibilité. Si le droit de grâce est
soumis à contreseing comme tout pouvoir partagé, il est à noter que la tradition en régime parlementaire
veut que les députés ne discutent pas son utilisation. Comme le note M. Burdeau, l'objet même de cette
compétence, un problème de conscience plus que de politique exclut que le chef de l'État soit tenu de
discuter avec le Premier ministre et de faite avaliser par lui la déchoie qu'il y a lieu de prendre. on peut
donc dire qu'en pratique, il s'agit d'un pouvoir propre.
a) Statut
Nous insisterons sur 4 aspects:
1 nomination: rappelons que le Président de la République nomme le Premier ministre sans intervention
du Parlement ou encore des partis politiques. D'autre part, le rôle de coordonnateur du Premier ministre et
sa supériorité sur les autres ministres se manifestent par le fait que les ministres sont nommés par le
Président de la République sur proposition du Premier ministre (et avec son contreseing).
2 la hiérarchie gouvernementale: contrairement à ce qui était prévu par les précédentes Républiques, il
existe une différenciation hiérarchique très nette entre les ministres qui résulte non de la Constitution ou
de la loi mais de l'usage politique.
Le Premier ministre est bien le premier des ministres comme cela se déduit de l'article 21 qui lui confie
seul le soin de diriger l'action du Gouvernement.
On trouve ensuite par ordre décroissant selon l'usage :
. le ministre d'État : c'est un privilège plus personnel que fonctionnel(simple titre honorifique). Sous les
III et IVèmes Républiques, ce titre signalait le poids politique d'un ministre qu'on voulait associer au
Gouvernement pour obtenir le soutien de tel ou tel parti politique.
. le ministre : c'est le ministre ordinaire dont le titre lui permet cependant de participer de droit au Conseil
des ministres. Il reste que le Ministre de l'Économie et des Finances compte tenu de ses attributions a
autorité sur tous les autres ministres dits "dépensiers". On a essayé de casser cette autorité en confiant ses
attributions soit à deux ministres (économie et budget), soit au Premier ministre (Cf. R. Barre).
. le ministre délégué : en principe, il s'agit d'un ministre qui ne peut agir que par délégation du Premier
ministre. Ex: le Ministre délégué à la Fonction publique, aux relations avec le Parlement, au plan... Cela
permet au Premier ministre de se concentrer sur ses seules tâches de direction et de coordination
gouvernementale.
Depuis 1981, on a vu apparaître des ministres délégués auprès d'un simple ministre. La participation au
Conseil des Ministres de ces Ministres ne semble pas être de plein droit.
. le secrétaire d'État : très dépendant, généralement du Premier ministre ou d'un simple ministre, le
Secrétaire d'État n'agit que par délégation. Ils ne peuvent signer ou contresigner seuls aucun décret.
Il faut noter que sont apparus de façon temporaire sous la Vème République des "sous Secrétaires
d'État" : les Secrétaires d'État autonomes en 1974 et en 1986. Ils étaient presque exclus du Conseil des
Ministres.
3 les incompatibilités gouvernementales
Pour des raisons de moralité, un ministre pour exercer sa charge peut être amené à renoncer à exercer sa
profession antérieure qu'elle concerne le secteur privé ou le secteur public. Ces incompatibilités sont
prévues par l'article 23.
* secteur privé : l'incompatibilité est générale avec l'exercice de toute activité professionnelle ou de toute
fonction de représentation professionnelle. (ex avocat et garde des Sceaux). En conséquence, un membre
du Gouvernement qui vient d'être nommé doit choisir les deux types d'activité.
* secteur public : il faut distinguer entre :
- une fonction publique nominative : règle du non cumul (ex au plan national: membre du Conseil
constitutionnel ou Conseil Économique et social...; ou au plan européen de la Commission...)
- une fonction publique élective : règle du cumul (ex conseiller municipal, général, régional) sauf pour les
mandats nationaux ou européens (ex député, sénateur ou membre du Parlement européen).
Cette dernière exception prévue par l'article 23 doit être soulignée. En effet, l'incompatibilité entre les
fonctions de ministre et celles de membre d'une Assemblée rompt avec la tradition Parlementaire. Selon
cette tradition, les ministres sont aussi députés ou sénateurs de façon à ce que le Gouvernement puisse
jouer un rôle de liaison entre Exécutif et Législatif. C'est une des conséquences du principe de
collaboration entre les pouvoirs en Régime parlementaire.
Le général de Gaulle a justifié une telle rupture avec la tradition en invoquant la nécessité de moraliser le
vie publique. On ne peut disait-il être à la fois contrôleur et contrôlé. Un choix est nécessaire de façon à
b) compétences du Gouvernement
Il est habituel de distinguer entre :
- les compétences du Gouvernement en tant que tel
- les compétences du Premier ministre
a pratique constitutionnelle
avertissement : la pratique constitutionnelle n'est considérée ici en aucun cas comme créatrice de droit ou
comme fait coutumier. Elle est seulement la mise en application (quelquefois contestable) de la
Constitution.
Dans les périodes « normales », la pratique révèle un renforcement du chef de l'Etat au détriment du
Premier ministre et de son gouvernement. Certains pouvoirs présidentiels font l'objet d'interprétations
extensives ; par contre certains des pouvoirs du gouvernement deviennent presque nominaux. La
conséquence ultime de ce phénomène, c'est, comme l'admettent la plupart des observateurs, une dérive
"présidentialiste" du régime. L'application de la Constitution se fait dans un sens favorable à l'Exécutif,
particulièrement au chef de l'Etat au risque de mettre en péril l'équilibre des pouvoirs qui était recherché
par le Constituant.
- l'autre politique qui tient au fait que les principales forces politiques du pays qui ont été au pouvoir ont
non seulement accepté progressivement la logique parlementaire orléaniste qui découle de notre
Constitution mais surtout ils ont admis sa radicalisation. Un consensus politique s'est formé réunissant les
principaux partis à droite et à gauche en faveur de l'idée d'un président fort, véritable chef de L'Exécutif
(dérive vers le présidentialisme) et non plus ou pas seulement arbitre. Dès lors, les différents Présidents
de la République qui se sont succédés depuis 1958 ont pu continuer à interpréter et appliquer la
Constitution dans un sens qui leur était favorable (ou même à fausser son esprit) sans rencontrer de
véritable opposition politique.
- Dans les périodes dites « exceptionnelles » mais qui tendent à ne plus l'être, le Premier ministre et son
gouvernement se renforcent, retrouvant presque la plénitude de leurs pouvoirs constitutionnels. De
nouveaux usages politiques issus d'un nouveau rapport de forces conduisent à un affaiblissement du chef
de l'Etat.
b) les périodes exceptionnelles dite de "cohabitation" (le président et le Gouvernement sont de tendance
politique différente)
Les périodes de cohabitation (1986-1988 et 1993-1995) se sont caractérisées par les conditions politiques
suivantes:
1 désaccord politique entre le Président et la majorité parlementaire
2 discipline de vote des députés en faveur du Premier ministre, chef de la majorité Parlementaire sans
délégation du Chef de l'État. Ce dernier ne bénéficie donc plus de l'appui (indirect) de l'Assemblée
Nationale.
En conclusion, on peut dire que le fonctionnement de l'Exécutif sous la Vème n'a jusqu'à présent pas
correspondu à l'esprit de la Constitution (ou encore aux intentions des constituants). La pratique a révélé
l'existence de certains usages politiques ou conventions de la Constitution qui a permis l'instauration d'un
régime à tendance présidentialiste à éclipse. Si l'on fait un résumé rapide :
------ D'un côté la Constitution de 1958 (corrigée en 1962) a organisé un Exécutif orléaniste qui donne au
Président un rôle original d'arbitre, garant de la séparation des pouvoirs et du respect de cette même
Constitution. Pour cela, elle l'a doté d'une légitimité forte et de compétences essentielles qui sont les
pouvoirs propres (art19). Le Premier ministre, de son côté s'est vu donné enfin les moyens de se
comporter en Chef du Gouvernement fort pouvant s'appuyer sur le Chef de l'État.
----- D'un autre côté, la pratique politique a inventé un tout autre scénario :
- en période normale, on a vu le Président sortir de son rôle constitutionnel d'arbitre pour devenir le
véritable Chef de l'Exécutif. Cette évolution n'a été possible que parce que le Premier ministre a laissé le
Président interpréter en sa faveur les pouvoirs partagés. On peut parler d'une pratique présidentialiste (ou
encore de "dérive monarchique") qui a commencé dès les débuts de la Vème avec le général de Gaulle.
- en période de cohabitation, cette pratique cesse sauf dans le domaine extérieur. Le Président affaibli
perd dans les autres domaines sa capacité d'initiative et de direction au profit du Premier ministre ; ce
dernier retrouve enfin l'usage de ses prérogatives constitutionnelles qui font de lui un Premier ministre à
l'anglaise. Miraculeusement, il peut alors jouir des pouvoirs d'un Premier ministre classique d'un régime
parlementaire moniste. Une seule différence persiste ; c'est qu'il doit compter avec la capacité de
résistance du Chef de l'État. On aboutit en conséquence parfois à une situation de conflit au sein de
l'Exécutif en contraste avec l'harmonie voulue par la Constitution et la sujétion imposée par la pratique
présidentialiste.
§2 le Législatif
A Statut du Parlement
2 Sénat
Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect pour 6 ans selon un mode de scrutin mixte ; le Sénat
se renouvelle par moitié tous les trois ans. Il compte 331 membres (loi organique du 7 juillet 2003 +
dossier).
Qui élit les sénateurs ? En premier lieu et de plein droit, les députés, les conseillers généraux et
régionaux. Mais ils ne constituent qu'une petite fraction du collège électoral. En effet, la grande majorité
des électeurs sénatoriaux est faite des délégués des conseils municipaux. Si le nombre des sénateurs est
fonction du nombre des habitants par départements, le nombre des électeurs est quant à lui fonction de la
population des communes.
Les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire à deux tours dans les 70 départements (de métropole et
d'outre-mer), en Nouvelle-Calédonie et dans les 6 collectivités d'outre-mer (Polynésie française, Wallis-
et-Futuna, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin) où sont élus au plus
trois sénateurs, et à la représentation proportionelle dans les 30 départements (de métropole et d'outre-
mer) où sont élus 4 sénateurs et plus.
La "Haute assemblée" est composée de 331 sénateurs. (voir site web du sénat)
Le dernier renouvellement a eu lieu le dimanche 21 septembre 2008.
La loi organique n° 2003-696 du 30 juillet 2003 ( JO n° 175 du 31 Juillet 2003) a réduit la durée du
mandat des sénateurs et a réformé la composition du Sénat afin de mieux représenter la réalité
démographique et les collectivités territoriales.
En 2007, la loi n° 2007-224 du 21 février 2007 (JO n° 45 du 22 février 2007) a créé deux nouvelles
collectivités d'outre-mer (COM), les îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, désormais
indépendantes de la Guadeloupe. (lire le dossier)
Pour tenir compte de ces modifications, la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 (JO n° 45 du 22
février 2007) a créé deux sièges de sénateurs (à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin). La réforme de 2003
(complétée par celle de 2007) a prévu un accroissement graduel de l’effectif sénatorial, qui est passé de
321 avant la réforme de 2003 à :
* 331 sièges au renouvellement 2004
* 343 sièges au renouvellement 2008
* 348 sièges au renouvellement 2011.
Les élections devaient initialement se tenir en 2007 et 2010, mais en raison de la modification du
calendrier électoral des élections municipales et cantonales (lire le dossier) et afin que les sénateurs soient
élus désormais et dans les années à venir par des grands électeurs en début de mandat, les élections
sénatoriales ont été décalées d'une année soit septembre 2008, 2011 et 2014.
Il sera procédé pour la première fois à l'élection des sénateurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin en
septembre 2008.
En 2011, le Sénat sera composé de 348 sénateurs :
* 326 seront élus dans les départements de métropole et d'outre-mer
* 2 en Polynésie française
* 1 dans les iles Wallis et Futuna
* 1 à Saint-Barthélemy
* 1 à Saint-Martin
* 2 en Nouvelle Calédonie
1. incompatibilités
Certaines occupations à titre privé ou public sont dites incompatibles avec l'exercice du mandat
parlementaire (c'est-à-dire ne peuvent être cumulées avec lui). Une incompatibilité contrairement à une
inéligibilité n'empêche pas un candidat d'être élu ; elle l'oblige seulement à opter entre l'occupation
incompatible et le mandat parlementaire.
1.11. Les fonctions publiques électives, en principe ne sont pas incompatibles les unes avec les autres. On
peut être à la fois député et maire, sénateur et conseiller général. Toutefois, certaines lois sont venues
limiter le cumul de fonction électives. Ce cumul a plusieurs inconvénients bien connus :
- la concentration du pouvoir dont bénéficient les cumulants rend inopérant les mécanismes normaux
d'équilibre et de contrôle au sein des institutions administratives. Que signifie la séparation des pouvoirs
lorsque les parlementaires siègent en même temps dans l'exécutif de puissantes collectivités, villes,
départements, régions?
- les parlementaires cumulants sont amenés à faire des arbitrages dans la gestion de leur agenda, dans les
intérêts contradictoires entre intérêts nationaux et intérêts locaux.
- la pratique du cumul favorise l'absentéisme à l'Assemblée Nationale
Voilà pourquoi certaines lois organiques sont intervenues pour limiter le cumul des mandats. La dernière,
voulue par L. Fabius en 1985 restreint le cumul du mandat national et des mandats locaux. Désormais un
parlementaire ne peut cumuler plus d'un des mandats suivants :
- représentant au Parlement européen
- conseiller général, régional, de Paris
- maire d'une commune de plus de 20000 habitants autre que Paris
- adjoint au maire d'une commune de 100000 habitants ou plus, autre que Paris.
Mais, ce texte a vite trouvé ses limites. D'une part, il n'a concerné au moment de son application qu'une
cinquantaine de parlementaires. D'autre part, il a facilité en pratique le cumul par procuration. Par
exemple un candidat célèbre accepte le temps d'une élection d'être en tête d'une liste municipale ou
régionale pour augmenter le score de cette liste, puis abandonne après l'élection surtout si cette liste n'a
pas obtenu la majorité. D'autres font élire leurs collaborateurs, parents ou épouse.
1.12. Les fonctions publiques non électives sont incompatibles avec le mandat législatif. L'exception
traditionnelle qui permettait la compatibilité entre la fonction de ministre et celle de parlementaire afin de
faciliter la collaboration entre Exécutif et Législatif a disparu sous la Vème République. (Cf art. 23 déjà
étudié). Une autre exception mineure persiste concernant les professeurs dans l'enseignement supérieur
car ces derniers bénéficient de garanties statutaires assurant leur indépendance.
Nota: l'exercice de fonctions non électives conférées par un État étranger ou une organisation
internationale est incompatible avec les fonctions de député ou de sénateur.
1.13. Les fonctions privées sont en principe compatibles avec le mandat parlementaire. Cela évite une
professionnalisation des parlementaires. Cependant, les exceptions se sont multipliées. Ce qui se justifie
du fait qu'il y a une certaine anomalie à ne pas voir de différence sinon de hiatus entre une activité
parlementaire dominée par le souci de l'intérêt général et une activité privée dominée par la recherche du
plus grand profit.
3 l'indemnité
Il s'agit de mettre l'élu à l'abri du besoin ... et des tentations. L'indemnité comprend l'indemnité principale
(31000F brut en 1994) et une indemnité de fonction (1/4 de l'indemnité principale). Depuis 1992, le
parlementaire est imposé sur la totalité.
Les articles 29 et 30 de la Constitution de 1958 prévoient également des sessions extraordinaires qui
peuvent être demandées par le Premier ministre ou la majorité des membres composant l'Assemblée
Nationale. Des précautions ont été prises pour qu'elles ne durent pas trop longtemps. Elles se tiennent sur
un ordre du jour déterminé et, si elles ont lieu à la demande de l'Assemblée, le décret de clôture intervient
dès que le Parlement a épuisé l'ordre du jour pour lequel il a été convoqué et au plus tard 12 jours à
compter de sa réunion. Le président de la République ouvre et clôt les sessions extraordinaires par décret.
Il résulte à la fois des termes de la Constitution, des travaux préparatoires et de la tradition parlementaire
Enfin, il nous faut mentionner que le Parlement peut être amené à se réunir de plein droit au vu de
certaines circonstances. 5 cas :
- après une dissolution, le second jeudi qui suit son élection
- après des élections législatives si ces élections ont lieu en dehors des périodes prévues pour les sessions
extraordinaires.
- lorsque le Président de la République décide d'appliquer l'article 16. Dans ce cas, l'Assemblée Nationale
ne saurait être dissoute.
- en cas de message présidentiel adressé aux Chambres, hors session, le Parlement est convoqué
spécialement à cet effet. (art. 18)
- la clôture de la session ordinaire ou des sessions extraordinaires est retardée pour permettre, le cas
échéant l'application de l'article 49. A cette fin des sessions supplémentaires sont de droit.
1 le Bureau
C'est une autorité collective, élue par l'assemblée et chargée de la direction des travaux parlementaires et
de l'organisation matérielle des services de la Chambre. Les fonctions et l'organisation du bureau sont
sensiblement les mêmes au Sénat et à l'Assemblée Nationale. Prenons l'exemple de celui de l'Assemblée
nationale.
La Constitution de 1946 lui attribuait un rôle politique en le chargeant notamment de contrôler l'action du
Gouvernement lorsque la Chambre était en vacances. Les constituants de 1958 n'ont pas voulu étendre ses
compétences au delà de ses fonctions techniques.
3 Les Groupes
A la Chambre des Députés de la IIIème République, il existait de nombreux organismes qui, sous le nom
de "groupes de défense" réunissait les députés pour la défense d'intérêts locaux ou professionnels. Ces
groupes mettaient en danger le caractère représentatif des mandats des députés. Ils furent interdits par le
règlement de l'Assemblée Nationale de la IVème République mais se reconstituèrent. Le règlement actuel
les interdit aussi.
Échappent à cette condamnation les groupes parlementaires constitués pour l'étude d'un problème
déterminé.
Ils sont formés de la réunion des parlementaires professant les mêmes opinions politiques de telle sorte
qu'ils constituent approximativement la représentation des partis. Approximativement car si le groupe
communiste ou socialiste sont étroitement rattachés à leurs partis respectifs, eu centre et à droite les liens
sont plus lâches.
La formation des groupes n'est pas libre. Pour éviter leur pullulement, le règlement de l'Assemblée
Nationale exige qu'ils comptent au moins 20 membres (30 avant une résolution de1988 qui a permis au
parti communiste de conserver un groupe), apparentés non compris. Les apparentés sont des
parlementaires qui, n'étant pas membres du parti qui représente le groupe s'associent à lui sur un plan
administratif.
4 Les commissions
4.1 Les commissions spéciales: il s'agit de commissions temporaires dont la durée de vie dépend de la
durée du processus de décision relative au texte de loi qu a motivé leur création. Leur composition reflète
celle des Assemblées. Elle se fait au prorata des groupes parlementaires. L'article 43 de la Constitution
prévoit que l'examen d'un texte de loi est confié à "des commissions spécialement désignées à cet effet" à
la demande du Gouvernement ou d'une Assemblée. Si cette demande n'est pas intervenue, le texte est
envoyé à une commission permanente.
En pratique, le recours à ces commissions a été rapidement abandonné et on est revenu à la tradition qui
veut qu'un projet ou une proposition de loi sont envoyés à une commission permanente. (10 seulement de
1981 à 1993).
Actualité :
a) la fonction législative
b) La fonction d'information
c) la fonction de contrôle
a) la fonction législative :
En rupture avec la tradition, le Parlement n'a plus la maîtrise absolue de la procédure législative. Le
Premier ministre et son gouvernement peuvent contrôler la création de la loi. Il reste que l'opposition
parlementaire au fil des années a su développer des moyens d'obstruction qui gênent considérablement le
gouvernement. Nous allons le vérifier en étudiant successivement les étapes principales de la création de
la loi puis plus largement les rapports gouvernement-parlement.
1 l'initiative de la loi
Selon l'article 39, elle appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement. Les
sénateurs ont les mêmes prérogatives que les députés.
- les projets de loi sont délibérés en Conseil des Ministres après avis du Conseil d'Etat. Ils sont déposés
indifféremment sur le bureau de l'une des deux assemblées. Seuls les projets de loi de finances doivent
être soumis en premier lieu à l'Assemblée Nationale. Une convention de la Constitution veut cependant
que les projets de loi relatifs aux collectivités territoriales sont présentés devant le Sénat.
- les propositions de loi bénéficient d'une préparation moins minutieuse. Ils émanent en droit d'un élu
mais de plus en plus les groupes parlementaires autorisent en fait le dépôt de propositions de loi par leurs
membres. L'initiative parlementaire devient donc collective.
2) La discussion
Normalement, la procédure de la discussion est fixée par le Règlement de chacune des Assemblées.
Cependant, la Constitution a entendu poser certaines règles de manière à renforcer la situation du
Gouvernement lors du débat. La discussion commence en commission, se poursuit en séance plénière et
de termine par la transmission à la seconde Assemblée.
-Pour empêcher la poursuite du débat, l'opposition ne se prive pas en général de déposer des motions de
procédure. Ces motions qui donnent lieu à discussion et à vote visent à démontrer que le texte a été mal
rédigé ou est inconstitutionnel. Il s'agit par exemple de l'exception d'irrecevabilité ou encore de la
question préalable.Il est clair que l'utilisation de ces motions par l'opposition s'inscrit dans une stratégie
de retardement. L'opposition minoritaire par définition sait qu'elle n'a aucune chance de voir ses motions
adoptées mais en ralentissant la procédure, elle se donne un moyen de chantage sur le Gouvernement qui
sera prêt alors à faire des concessions.
- Après le rejet des motions de procédure commence la discussion et la mise aux voies articles par
articles. Chacun des articles est discuté. A nouveau interviennent les mêmes orateurs mais ici le temps de
parole est limité sauf pour le ministre concerné et le rapporteur. Enfin, il est proposé un vote sur
l'ensemble du texte en l'absence d'une seconde délibération demandée par le Gouvernement ou la
commission compétente.
- Il faut préciser que l'opposition durant toute cette discussion pourra avoir recours au droit
d'amendement; elle le peut le faire en espérant débaucher certains députés membres de partis de la
majorité ou encore tout simplement dans le but de retarder la procédure. Dans ce dernier cas, le droit
d'amendement apparaît alors comme un moyen d'obstruction redoutable. Il faut savoir qu'on assiste à une
inflation d'amendements depuis une dizaine d'année. Les députés de l'opposition ont tendance à déposer
jusqu'à des milliers d'amendements dont certains complètement fantaisistes pour freiner la procédure.
En théorie, le Gouvernement semble bien armé pour se défendre. Il peut utiliser notamment toutes les
irrecevabilités dont nous avons parlé : articles 40, 41 mais aussi 44-2. Dans ce dernier cas, le
gouvernement "peut s'opposer à l'examen de tout amendement qui n'a pas été antérieurement soumis à la
commission". En pratique, on considère que l'expression "avant l'ouvertur des débats" peut signifier avant
la discussion détaillée des articles. Le gouvernement peut surtout utiliser la procédure dite du "vote
bloqué" (art 44-3). Selon cet article, si le Gouvernement le demande, l'Assemblée saisie se prononce par
un seul vote sur tout ou partie d'un texte en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le
Gouvernement. Cela restreint considérablement la liberté de décision des parlementaires puisqu'ils sont
placés devant l'alternative du tout ou rien. Soit ils adoptent le texte du voulu par le Gouvernement avec
les seuls amendements retenus par ce dernier, soit ils refusent le texte. Cela implique que la majorité
préférera suivre le Gouvernement même si elle estime que certains amendements voulus par l'opposition
sont pertinents. Dès lors, le Gouvernement peut éviter que ses textes soient déformés sans avoir à mettre
en jeu sa responsabilité.
Il faut noter cependant que l'usage de l'article 44-3 est rare car il ne procure qu'un gain de temps limité.
En effet, s'il restreint le nombre de votes (en dérogeant au principe de spécialisation des votes), il
n'empêche pas que la discussion ait lieu sur les différents amendements.
Signalons enfin que le Gouvernement a reçu le soutien du Conseil constitutionnel. Ce dernier s'est donné
en effet un pouvoir général d'appréciation sur la recevabilité des amendements au titre de l'article 41 et
61-2. Il a estimé notamment que les amendements devaient avoir un lien réel avec le texte de loi en
discussion (décision n° 85-198 du 13 décembre 1985) ou encore qu'ils ne devaient pas dépasser par leur
objet ou leur portée, "les limites inhérentes à l'exercice du droit d'amendement" (décision n° 86-221 du
29-12-86).
3) Le vote
Les décisions de chaque Assemblée sont finalement prises par un vote qui ne peut avoir lieu que si est
présente la majorité absolue du nombre des députés ou sénateurs. Le vote s'accomplit selon des formes
diverses:
- vote à mains levées ou par assis et levés qui la solution est la plus rapide
- vote public ordinaire : traditionnellement, les parlementaires votent en utilisant un bulletin recueilli par
les huissiers. L'usage voulait sous les précédentes Républiques que les absents votent aussi par
l'intermédiaire d'un collègue auquel ils avaient confié leur boîtier, soit leur boite à bulletins. Toutefois,
par une résolution du 26 juillet 1955, l'Assemblée nationale décida que pour les scrutins importants, seuls
pourraient voter les députés présents. La constitution de 1958 a érigé l'exception en principe. L'article 27
décide que le droit de vote des membres est personnel. Cependant, le vote électronique introduit en 1959
permet de tourner cette règle puisqu'il suffit que l'absent laisse à un de ses collègues la clé permettant de
faire fonctionner le système.
En septembre 1993, le Président de l'Assemblée Nationale, M. Seguin a proposé une redéfinition du vote
qui impose une plus grande assiduité dans l'hémicycle. Il a été décidé notamment que chaque député ne
pourrait être détenteur de plus d'une délégation. En d'autres mots, il ne peut voter que pour un seul député
absent. Ces nouvelles modalités ont conduit à une petite fronde parlementaire contre le Président.
Le vote au scrutin public ordinaire est obligatoire :
- si les résultats du vote à mains levées ou pas assis/levés sont douteux
- à la demande du Gouvernement, du Président de l'Assemblée ou de la Commission saisie.
- à la demande d'un Président de groupe.
- le scrutin public à la tribune: il est appelé ainsi parce que naguère, à l'appel de leur nom, les députés
allaient déposer leur bulletin dans une urne placée sur la tribune. Le vote électronique a simplifié
l'opération sans en supprimer l'importance. Ce mode de scrutin est obligatoire lorsque la Constitution
exige la majorité absolue ou lors que le Gouvernement engage sa responsabilité.
- le scrutin secret: il notamment requis pour la nomination de personnes à un poste important: Président
de l'Assemblée, membres de la Haute Cour de Justice...
6) La promulgation
C'est l'acte par lequel le Président de la République authentifie le texte de la loi, constate la régularité de
son adoption et la déclare valable. En promulguant, le Président ne fait pas œuvre de volonté législative:
il se borne à reconnaître que la loi a régulièrement pris naissance. C'est en ce sens que la promulgation
diffère de la sanction par laquelle, dans les monarchies constitutionnelles, le roi participe à l'œuvre
législative par son droit de paralyser la volonté du Parlement en refusant de sanctionner le texte qu'il a
voté (idem pour le droit de veto du Président américain).
Les formes dans lesquelles est faite la promulgation sont fixées par un décret publié au J.O. le 20 mai
1959. Elles sont les suivantes:
“L'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,
“le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
texte de loi
“La présente loi sera exécutée comme loi de l'État.
“Fait à..., le...,
“Par le Président de la République,
“Le Premier ministre,
“Le ministre de....”
A part les commissions d'enquête dont nous avons déjà étudié le fonctionnement, l'information du
Parlement dépend essentiellement des questions :
1) questions écrites : ces questions qui reposent uniquement sur un usage politique sont des demandes de
renseignement adressées par un parlementaire à un membre du Gouvernement. Ce dernier doit répondre
dans un délai d'un mois. La réponse figure au Journal Officiel.
Lorsqu'une question écrite n'a pas obtenu de réponse dans les délais indiqués, son auteur est invité par le
président de l'assemblée à lui faire connaître s'il entend ou non la convertir en question orale. Dans la
négative, le ministre compétent dispose d'un nouveau délai d'un mois.
Il faut remarquer que le nombre de questions écrites a tendance à augmenter (IXème législature 1988-
1993 : pas loin de 70000 questions) mais leur objet est de moins en moins politique.
2) questions orales : l'article 48 de la Constitution révisé en 1995 prévoit qu'au moins une séance par
semaine est réservée par priorité aux questions des parlemntaires. Initialement, on distinguait entre
questions avec ou sans débat. Les premières qui ne pouvaient être suivies d'un vote pour éviter de
ressusciter les interpellations ne sont plus pratiquées. Les secondes existent toujours sous trois formes
différentes :
1 les questions orales classiques organisées à l'origine le vendredi après-midi.
2 les questions au Gouvernement du mercredi après-midi nées en 1974 qui sont retransmises à la
télévision.
3 les questions "cribles" apparues 1988 qui sont adressées à un seul membre du gouvernement qui doit
être présent.
c) la fonction de contrôle :
Cette fonction fortement compromise depuis 1958 par la conjonction de la rationalisation et du fait
majoritaire est en passe d'être réhabilitée depuis quelques années en raison des efforts de l'Exécutif et du
parlement lui-même (à travers le rôle joué notamment par certains des derniers présidents de l'Assemblée
Nationale). Le renforcement de cette fonction passe actuellement par la réforme des organes de contrôle à
la disposition des chambres ou par la mise en place d'une nouvelle organisation du travail parlementaire.
Cependant un nouveau chantier s'est ouvert avec la tentative récente de permettre au Parlement français
de contrôler non seulement l'Exécutif français mais aussi l'Exécutif européen
L'efficacité des commissions d'enquête reste limitée pour une série de raisons :
- la création des C dépend d'un simple vote d'une résolution à la majorité : cela permet au Gouvernement
de susciter ou de refuser la création de C. d'enquêtes
- la désignation des membres des C se fait au scrutin majoritaire ; ce qui permet d'en éliminer l'opposition.
De plus, comme le rapport de la C doit être adopté à la majorité de ses membres et qu'il ne donne lieu à
aucun débat, le recours aux C n'est pas dangereux pour le Gouvernement.
- Il ne peut être crée de commissions d'enquête lorsque les faits ont donné lieu à des poursuites judiciaires
et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Si une commission d'enquête a déjà été créée, sa
mission prend fin dès l'ouverture d'une information judiciaire relative aux faits qui ont motivé sa création.
(Ordonnance du 17 novembre 1958).
- la mission des C est très courte : 6 mois
- possibilité pour le Gouvernement d'invoquer le secret diplomatique ou militaire avec un contrôle
juridictionnel.
Une des causes d'affaiblissement du Parlement français est bien sûr le fait qu'en raison de la construction
européenne une bonne part des normes issues des organes de l'union (et notamment l'Exécutif européen)
échappe aux assemblées. On a donc essayé d'améliorer l'information des Assemblées et de leur donner
des moyens d'action à ce sujet :
- information :
§3 L'AUTORITÉ JUDICIAIRE
(page en construction)
Historique : comme le rappelle G. Burdeau, les lois de 1875 ne s'occupaient que de la justice politique.
Par contre la Constitution de 1946 traitait des diverses justices :
- de la justice ordinaire en établissant un Conseil de la magistrature
- de la justice politique en instituant une Haute Cour
- de la justice constitutionnelle en instaurant un Comité Constitutionnel chargé pour la première fois en
France d'effectuer un contrôle de la conformité des lois à la Constitution.
La Constitution de 1958 s'inspire de ce précédent en traitant de ces trois justices dont le statut
constitutionnel est amélioré.
A) LA JUSTICE ORDINAIRE
La Constitution tente de garantir l'indépendance des juges à travers la constitutionalisation de leur statut
et la mise à l'abri de leur carrière vis-à-vis des interventions de l'exécutif.
----------rôle du CSM :
Concernant la carrière des magistrats des garanties supplémentaires sont prévues :
1 nomination :
- pour les magistrats du siège, il est prévu en 1958 qu'il fait des propositions pour les nominations de
magistrats à la C de C et pour celles de premier président de la CA. Il donne son avis sur les propositions
du ministre de la justice pour les autres nominations. Avec la réforme de 1993, la Conseil fait aussi des
propositions pour les nominations de président de TGI. Les autres magistrats sont maintenant nommés sur
son avis conforme.
Projet de réforme mars 1998 : maintien de la procédure
- pour les magistrats du parquet, en 1958, il n'intervient pas. Depuis la réforme de 1993, il donne un avis
simple pour leur nomination mais n'est pas consulté pour ceux qui sont nommés en Conseil de Ministres
comme les Procureurs généraux.
Projet de réforme mars 1998 : renforcement des pouvoirs du CSM. Désormais toutes les nominations du
parquet, y compris celle des procureurs généraux, seront soumise au CSM qui rendra un avis auquel le
ministre sera tenu de se conformer. Les propositions de nomination en revanche continuent à émaner du
garde des Sceaux. Le gouvernement après avoir envisagé de se départir de ce pouvoir en le confiant au
CSM a reculé estimant qu'il fallait maintenir un lien de dépendance entre le ministre et les parquetiers.
2 sanctions :
- pour les magistrats du siège, en 1958, le Conseil statue comme Conseil de discipline et est présidé par le
1er Pt de la C de C. Depuis 1993, inchangé.
- pour les magistrats du parquet, en 1958 le Conseil n'intervient pas. Depuis 1993, il donne son avis sur
les sanctions disciplinaires les concernant. Le Conseil, ou plutôt la formation compétente est alors
présidée par le procureur général près la C de C.
Projet de réforme de mars 1998 : le CSM pourra être saisi non plus seulement par le garde des Sceaux,
mais aussi par les chefs de juridictions. Les décisions du conseil de discipline seront rendues publiques et
les audiences ne seront plus soumise à la règle du huit clos : les débats seront ouverts au public.
Une nouvelle voie est inaugurée permettant la mise en cause de la responsabilité disciplinaire des
magistrats en créant des « commissions d'examen des réclamations des justiciables ». Tout justiciable qui
s'estime « lésé en raison d'un acte accompli par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions et susceptible
de recevoir une qualification disciplinaire » pourra adresser à cette commission une réclamation. Le
ministre de la justice pourra diligenter des investigations et engager des poursuites disciplinaires.
B) LA JUSTICE POLITIQUE
Tous les régimes ont institué des juridictions spéciales pour connaître des activités politiques contraires à
l'intérêt général de l'État. L'existence de cette justice se justifie généralement de trois points de vue :
- l'intérêt du régime : les juges ordinaires n'auraient pas l'indépendance nécessaire à l'égard d'hommes qui
ont été au pouvoir ou qui peuvent y revenir.
- l'intérêt de la magistrature qui exige qu'elle ne soit pas mêlée aux controverses politiques
- l'intérêt des accusés dont l'activité doit pouvoir être appréciée par un organe compétent pour connaître
de toutes les circonstances.
Ces justifications ne sont guère convaincantes et n'excluent pas le caractère de juridictions d'exception
des organes de la justice politique.
L'existence d'une justice politique se traduit généralement par la mise en place de procédures spéciales
pour la mise en accusation ou encore de tribunaux spéciaux pour le jugement. Cette justice s'adresse aux
citoyens ordinaire ou aux ministres et chefs d'État soupçonnés d'entreprendre des activités contraires à
l'intérêt de l'État. (pour ces derniers, on passe outre leur irresponsabilité concernant les activités
entreprises dans le cadre de leur fonction).
Notons cependant qu'en Angleterre, les ministres sont soumis aux mêmes règles de droit que les citoyens
ordinaires, il n'existe pas de juridictions d'exception. Mais traditionnellement et exceptionnellement, le
Parlement peut juger les ministres en cas de Haute trahison ou de crimes graves.
1 Le système de la IIIe République: sous les lois de 1875, l'organe de la justice politique était le Sénat
constitué en Haute Cour de Justice. Sa compétence était double:
- du point de vue des personnes, il était compétent pour juger le Président de la République et les
ministres. Dans ce cas, c'était la Chambre des députés qui mettait en accusation.
- du point de vue du contenu, la Haute Cour était compétente pour juger toutes les personnes prévenues
d'attentat à la sûreté de l'État ou de complot tendant à changer la forme du Gouvernement. Dans ce cas,
c'était au Gouvernement qu'il appartenait de décider s'il y avait lieu de dessaisir les tribunaux de droit
commun et de poursuivre l'accusation devant la Haute Cour.
Dans tous les cas, la Haute Cour demeurait une juridiction, c'est-à-dire qu'elle était chargée d'appliquer la
loi. Elle ne pouvait par conséquent punir un fait qui n'était pas puni par la loi, ni appliquer à un fait
punissable une peine autre que celle prévue par la loi. (La Haute Cour ne s'est pas toujours crue liée par
cette règle: affaire Malvy).
2 Le système de la IVe République: les articles 57 à 59 prévoient l'existence d'une Haute Cour qui a été
organisée par la loi du 27 octobre 1946. Elle se composait d'un Président, de deux vice-présidents, de 30
juges titulaires et de 30 juges suppléants tous élus par l'Assemblée Nationale. La Haute Cour avait pour
vocation de juger le Président de la République en cas de Haute trahison (art. 42) et les ministres (art. 57).
Ils sont mis en accusation par l'Assemblée Nationale.
La Haute Cour devait ne prononcer que des peines prévues par les lois pénales ordinaires. Le vote était
secret et la décision prise à la majorité absolue.
3 Le système de la Ve République.
NOTA: Précisons qu'une loi du 15 janvier 1963 avait crée une Cour de sûreté de l'État chargée de juger
certaines infractions qui pouvaient être appréciées selon un critère politique; infractions pouvant être
commises par tous. Elle était compétente notamment pour connaître de toute une série de crimes ou délits
“lorsqu'ils sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective consistant ou tendant à substituer
une autorité illégale à l'autorité de l'État” (ancien art. 698 du Code Pénal). Les juges appartenaient à la
magistrature judiciaire et à l'armée. Cette Cour a été supprimée en 1981.