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J’en ai encore des frissons. Rien qu’à l’évocation de ces souvenirs, mon corps est pris de
spasmes soudains et incontrôlables. Je revois ces vastes étendues rouges, ces forêts mortifères
incandescentes, ces citées encastrées dans la roche maudite, et ces quartiers où la folie
semblait régner en maître. J’ai tout vu de mes propres yeux. J’ai vu l’Enfer.
Prière Impie :
« J’ai passé ma vie à baigner dans le mensonge divin et les Saints enseignements. Aujourd’hui
plus que jamais, j’estime être libre de choisir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. Aujourd’hui
plus que jamais j’estime être libre de voir ce que je veux. Voir l’interdit. Voir ce qui m’a
toujours été prohibé. Aujourd’hui…le savoir n’a plus aucune limite. Dorénavant ce ne seront
plus des pages qui dicteront mes croyances, mais mon esprit lui-même. Il est l’heure. L’heure
de connaître la vérité. Prenez-moi, Seigneur du Mal. J’offre mon corps à Satan. Je lui offre mon
âme, en échange d’un titre. Celui de Prince de Ténèbres. Je traverserais l’Enfer et plus encore,
à pieds s’il le faut. J’irais réduire Jérusalem en cendres si tel est votre désir. Mais donnez-moi la
force de combattre le mal qui, depuis toujours, me prends la main et prêche les bons
enseignements. Je nagerais à travers tout l’Erèbe s’il le faut, irais dialoguer avec le Diable
pardonné afin d’apprendre les valeurs infernales. Puis j’irais rejoindre Belzebuth,
Méphistophélès, ainsi qu’Azazel, sur leur Citadelle errante. Ensembles, nous domineront
l’Enfer. Je vous offre mon corps. Prenez-le…père. »
Préface :
J’ai mis dans ce recueil certaines de mes pensées les plus noires, mes réflexions de jeune
adolescent mal dans sa peau, mes instants de mélancolie suicidaire, mes histoires impies, ainsi
que mes crises de paniques qui me réveillent en pleine nuit.
J’ai finit par apprendre à vivre avec ces songes, et en ai fait mon univers propre, dans lequel
j’aime me noyer chaque jour à la recherche de nouvelle sensations, au travers de récits épiques
et mythologies infernales.
Pour Adèle…
L’Enfer :
Elle avançait, de ses pieds frêles et innocents, dans le froid, la pauvreté, la vie. Elle avait les
cheveux blanchis par la neige de janvier, et les pieds meurtris par le verglas de décembre. Les
deux compères avaient malmenée la pauvre enfant jusqu’à la pousser à bout. Elle avançait à
petits pas, dans la nuit noire, heureuse et triste du sinistre sort qui l’attendait au bout du
tunnel. À ses pieds, des chaînes avaient été disposées, et elle avait été forcée de les mettre.
Son corps endolori par les saisons, toutes plus injustes les unes que les autres, semblait
craquer de toute part. Elle n’était plus qu’un sac de viande, qui allait servir à assouvir le désir
incessant de vérité des humains, et l’incompétence du Christ. Ses jambes portaient de
nombreuses coupures, telles des griffures causées tant par la folie humaine que le démon de
l’Eglise. La petite traversait la dernière salle de sa vie : l’aboutissement, le constat, le jugement.
Qu’avait été toute son existence ? Misère, pauvreté, viol et bizutages en tout genre ? Gaieté,
joie de vivre et foyer ? Seul le démon pouvait le savoir. Lui seul semblait s’être préoccupé
d’elle. Lui et sa femme mortuaire l’avaient comme contemplée depuis sa naissance, convoitée
dès les premiers instants, lui réservant sa place dans leurs appartements ardents. Son lit de
bronze serait visité chaque soir par des créatures à la peau de charbon, lui déversant la haine
de la race humanoïde, lui rappelant chaque instant à quel point les fils de dieu l’avaient
méprisée, haïe et avaient voulu sa mort à chaque respiration. À quel point la colombe l’avait
jetée au milieu des boucs, à quel point ses géniteurs l’avaient battue et n’avaient jamais
ressenti la moindre étincelle mystique d’affection. Elle était un déchet, une fille de Dieu, qui,
malgré les enseignements divins, n’avait pas été digne de vivre dans le monde du Seigneur. Le
puissant lui avait jeté une matraque pour qu’elle se batte toute seule, qu’elle soit sa propre
mort, qu’elle soit le rebus assumé d’une existence vaine et sans but. Elle aurait pu être
beaucoup de choses, mais la seule chaussure qu’on lui ait trouvée, fut une botte en métal,
remplie de clous et de venins. Les satires des hommes, les mépris des femmes, tout semblait
n’avoir été créé que pour qu’elle en souffre. La voix céleste semblait avoir dicté un jour à
l’enfer d’ouvrir ses portes à cette enfant, à qui le Christ ne donnerait aucun amour, aucune
chance, qu’il condamnerait dès qu’elle verrait le jour. « C’est donc ça le paradis, l’endroit où se
retrouvent tous les purs de ce monde ? » avait-elle pensé avant de monter sur l’estrade. « Je
préfère adorer celui qui me propose un foyer, qui ne me refuserait jamais, plutôt qu’un vil
dictateur, roi d’un peuple stupide, qui trône sur les cieux regardant ses pions s’entretuer, de
loin, plutôt que de les secourir… je préfère encore adorer l’enfer que le mensonge ! ». Et dans
cet élan, elle sauta dans les bras d’un Morphée vêtue de noir, la faisant sombrer dans un
sommeil sans réveil, un aller sans retour. La lame s’abattis sur son cœur, transperça la chair
d’une enfant enlaidie par le pêcher, la livrant à son unique et véritable père : l’enfer !
Haine :
« Il n’existe de mots pour décrire l’horreur qu’il aspire. La description que je m’apprête à en
faire, pourrait non seulement s’avérer être la dernière chose que j’écris de mon vivant, mais ne
décrira en plus qu’une infime partie de l’horreur impie qu’Il aspire.
Dans mes cauchemars, je ne le perçois pas correctement. L’image est trouble, comme sur un
écran sale. Je me réveil en sursaut. Je me souviens être dans mon ancienne chambre d’enfant.
Je me lève, mort de peur. Je me dirige vers la chambre de mes parents. Arrivé là-bas, je toque.
Aucune réponse. Il est trop tôt dans la nuit pour qu’ils dorment déjà. Je retoque. Toujours
aucune réponse. Je décide d’entrer. Le bois de la maison craque sous mes pieds. La vision
d’horreur ne fait que commencer. La pièce est plongée dans l’obscurité, seuls persistent des
bruits de craquement, ceux du bois et d’autre chose, ainsi qu’un autre son, gélatineux, comme
de la viande que l’on frappe contre un mur. Je mets ma main sur l’interrupteur. Ma respiration
s’arrête. La lumière jaillit de l’ampoule.
Les murs….les murs sont tapissés de sang et de tripes. Une cascade de sang coule du lit de mes
parents. Sur le lit. Il est là. Sur le lit. Je ne le distingue pas clairement. Juste une forme noire,
épaisse, qui dévore de la chair et des os. Il se retourne. Il n’est pas constitué que de deux bras
et deux pieds : il en jaillit de son corps à volonté. Un couinement se fait entendre : une plainte
d’un de mes deux parents. Un bras puissant sort de sa côte, et se munit de la tête de sa pauvre
victime, et l’arrache violement. Je ne vois que son visage. Cette espèce de crâne aux dents
épaisses et affutées. Il croque dans le crâne comme je croquerais dans une pomme. Le bruit de
l’os cédant à la pression de sa mâchoire me fait frissonner. Il me fixe tout en mastiquant son
repas. Je le regarde fixement, complètement terrorisé. Il pose pied à terre. Le sol tremble. Il se
déplace avec difficulté. D’abord un pied jaillit de son entre-jambe, puis un autre, et encore un
autre, au total je compte cinq pieds qui sortent pour l’aider à se déplacer. Il se dresse devant
moi. Il doit faire dans les trois mètres. Il me regarde. Puis il fixe le sol. Il se baisse, écarte une
planche et commence à creuser. Je me réveille. Je n’ai qu’un nom en tête à partir de ce
moment-là : Paer.
« S’il existe une justice en ce bas monde, ce n’est certainement pas le Seigneur qui la dicte et
l’exerce. Je ne veux vénérer un faible, un couard qui trône sur les cieux et qui observe ses
sujets, tels de pions sur un échiquier, s’entretuer. Je désir embrasser la vérité : je désir le mal.
S’il faut devenir la dextre du Malin, alors je le ferais. Je donnerais mon corps au Dieux Impies
que les ouvrages sacrés réfutent et ont bannis, uniquement pour contempler le vrai visage de
cet interdit qu’on me cache depuis bien trop longtemps. »
« Vous qui lisez ces lignes, abandonnez-vous à Elles sont la réponse à toutes vos
la perdition. interrogations.
Prière Impie :
J’ai vu l’Enfer, corrompu par les chevaliers Gloriae Satana (Gloriae Satana)
de Belzebuth
Réduisez en cendre leurs uniques espoirs
J’ai vu les Anges pénétrer l’antre de notre
seigneur Glorie Satana (Gloriae Satana)
J’ai vu les messagers célestes corrompre Affrontez la fureur des démons de l’Enfer
nos terres Gloriae Satana (Gloriae Satana)
Détruire notre héritage et souiller nos
Redoutez le retour du père suprême
esprits
Gloriae Satana (Gloriae Satana)
Sonnez vos trompettes, Gabriel !
Redoutez le retour de Satan !
Restez tapis dans votre antre, attendez
Sonnez vos trompettes, Gabriel !
Envoyez vos guerriers de lumière
Bientôt vous n’entendrez plus que la mort !
Nous les briserons
Extrait du Manuscrit :
« Les forêts qui longent l’Erèbe…ces étendues mortifères sordides…je les vois encore. Je m’y
étais aventuré en quête de l’Abysse : la porte vers l’Antichambre. J’avais recruté un Gobelin,
Deadliämos, un servant d’un des treize Princes des Ténèbres. Les Princes des ténèbres ont créé
l’Antichambre. Un endroit maudit. Pourtant je désirais m’y rendre plus que tout. La prise de
pouvoir par Belzebuth et les Chevaliers de l’ordre de la mouche avaient obligés les Princes des
ténèbres à se rendre. Dorénavant, n’importe qui pouvait se rendre dans l’Antichambre, si
toutefois vous surviviez aux cauchemars que la porte jusqu’à cette dernière vous faisais subir.
Deadliämos m’avait assuré que l’endroit n’était en aucun cas sûr : selon ses renseignements,
l’un des treize Princes s’y trouvait encore : Elokh. Qu’importe, je le tuerais s’il le faut, ils n’ont
plus aucun pouvoir dorénavant. Il m’avait également mit en garde quant au fait que les rares
fois où il était descendu dans l’Antichambre, les horreurs qu’il avait vu dépassaient totalement
ce que je pouvais m’imaginer. Je savais que l’Abysse serait une partie de plaisir par rapport aux
couloirs de l’Antichambre. Mais je devais m’y rendre.
Les forêts de cendres s’étendaient à perte de vue : les étendues rouges. Bientôt, nous
arriverions à destination. »
Ils sont les choses les plus puissantes qui existent en ce monde.
Rien ne peut les arrêter : La vérité, Les faits, refont toujours surface.
Ils ont marqué l’humanité, et ont soumis l’espèce humaine à leurs lois.
Ils sont ce terrifiant reflet dans le miroir que l’on s’obstine à ne pas regarder.
Vous pensez être quelqu’un, mais depuis le début ils vous manipulent.
Ils vous façonnent, et décident de qui vous êtes bien avant que vous ne le sachiez.
« Je n’ai que trop servi L’ordre de la mouche. Aujourd’hui je prends les armes, seul et
déterminé. Je ne désire tuer personne, aucun humain, aucun archange, aucun démon, je ne
désire pas faire couler le sang. Tout cela je ne le désire pas, mais il arrive un jour, un moment
dans votre vie, ou semer la mort est l’unique option.
J’ai vendu mon âme aux ténèbres, et je désire combattre la lumière. Mais pas la lumière qui
nous sauve, celle décrit dans les textes sacrés, non, je désire anéantir cette pureté factice, ce
mensonge venimeux qu’est Malvolence, la citadelle du Paradis. Je veux détruire cette idéologie
et montrer les horreurs de la vie, du Paradis comme de l’Enfer : je veux montrer la vérité, la
libérer de ses chaines.
Aujourd’hui plus que jamais, après tous les orifices que j’ai commis au nom d’une cause que je
croyais juste, que je croyais mienne, je désire mourir. Oui, je désire la liberté.
Je suis un être qui se bat avec l’obscurité pour arriver à la lumière, je suis démon libre,
déterminé à en finir : je suis un Prince des Ténèbres. »
Prière Impie :
« L’aube rougeoyante s’élève peu à peu dans le ciel. Rouge…comme le sang…du sang…
beaucoup de sang…je le sens…le sang…bien cent fois que je ne sens que le sang à l’aube
sanguinaire. Du sang a coulé cette nuit, c’est une certitude. Tout se sang…s’en est presque
ridicule…les exécutions continuent en Enfer : ceux qui résistent à l’Ordre de la mouche sont
tués sur le champ…Belzebuth…bientôt tu noieras ton domaine du sang qui ne fait qu’accroitre
la puissance de ton ennemi : tu noieras le Grand conseil infernal du sang des innocents. »
L’Ode à la guerre :
« Il est l’heure de prendre les armes, de croiser le fer avec l’aube pour plonger à jamais ce
monde dans ce qu’il a toujours été et ce dont il a toujours voulu se préserver : les ténèbres. Il
est l’heure, mes frères, de pourfendre la lumière. Nous briserons ceux qui se mettront en
travers de notre chemin. L’heure de gloire de notre mère à tous a sonné : libérer la mort et
laissez-là envouter votre être entier. Laisser notre salvatrice apprendre à ces marmots ce que
nous sommes. Aux armes ! »
Se noyer en pensée…
Depuis bien trop longtemps mon corps brûle d’un feu ardent qui ne semble jamais s’éteindre.
Depuis bien trop longtemps je me sens me noyer en cette masse opaque, ce magma visqueux
de vie, cette substance informe. Et je tombe et je tombe. Depuis trop longtemps mes pensées
se noient et brulent. Depuis trop longtemps le sang ardent bouillonne, brûle, et me consume.
Consume ma chair, mon esprit, mes songes. Et je tombe et je tombe. Bientôt, la chute sera
rude. Je n’y survivrai pas. Je n’en ressortirai pas vivant…et je sombre et je sombre. Et dans les
ténèbres m’asphyxier. Sans trop comprendre pourquoi. Comme on efface un mauvais trait sur
un beau dessin. Et je brûle et je brûle. Sans trop comprendre comment : je m’y engouffre.
L’abysse semble devenir de plus en plus grande et pourtant infinie. Comme si la conclusion à
toute cette histoire était qu’il n’y en avait pas. Et je sombre, et je brûle…et toujours aucune
trace de lumière.
Trop de mes frères sont tombés au combat. J’entends le clairon funeste sonner l’heure de la
charge. Cette mélodie : ce signal. Trop de têtes. Trop de membres. Trop d’éléments à la fois.
Mes tympans bourdonnent : comment apaiser ces songes ? Trop. Beaucoup trop. La folie.
Voilà qu’elle me tend la main. Une si belle main. Si lisse. Si faible…si misérable…et pourtant si
belle. Pourtant ne pas la saisir ? Pourquoi ne pas s’en emparer ?! J’ai soif de chair fraiche et
pure ! N’est-ce pas là l’agneau qui s’échappe de la bergerie pour rejoindre le loup ? Trop.
Beaucoup trop. Au diable les coïncidences ! Au Enfers la bienséance ! Viens à moi. Laisse-moi
tordre tes membres. Laisse-moi te faire souffrir comme tu l’as toujours voulu. Laisse-moi te
faire un sort : laisse-moi. Laisse-moi. Laisse-moi. Laisse-moi. Brise-moi.
Pitié.
Le Satyricon (1):
Il m’est apparu un soir d’hiver, alors que je m’afférais à contempler le feu qui consumait le
métal de ma chaudière. Je l’ai vu de mes propres yeux : j’ai vu ce visage de mort. Celui d’un
crâne aux contours pointus, aux globes incandescents munit de pupilles de cendres. Cette
représentation maléfique et si blasphématoire, celle d’un être qui, dorénavant, n’aurait de
cesse de me fasciner. Il m’a pris en chasse. Je ne peux que l’adorer et le fuir. Il s’agit là de la
plus funeste des punitions : fuir le désir. Celui qui brûle, celui qui consume l’âme. Les mélodies
infernales que sont ses murmures résonnent dans mon esprit, le torturent et n’ont aucune pitié.
Je t’ai vu grandir, grandir et t’envoler. Tes ailes n’ont pas tenu le fracas des lames contre les os.
On te les a brisé. Je t’ai vu devenir puissant et téméraire. Tu as été humilié, pris en martyr sur
une place publique, et égorgé comme un veau à l’abattoir sans aucune pitié. Je crois qu’au final
je comprends ce que tu voulais me dire : il ne sert d’être grand, il ne sert d’être puissant. Il
suffit d’être rusé, il suffit d’être fourbe : la Malice annihile toute forme de résistance.
Maintenant relève toi et contemple l’étendue du désastre qu’est ton existence. Regrette, et
songe à la vengeance. Laisse la haine entrer en toi. Laisse là te gangrener et éradique l’espoir.
Relève-toi et pleure. Pleure d’être faible. Pleure d’être toi-même. Ta vision est maladive. Ta
chair pourrie, tes os se ramollissent. Relève toi et regarde ce que l’on gardera de toi : Petit
Ange Morbide.
Black sound :
Sombre murmure, terrible susurre, tel est le son, qui envahit mon être. Ténébreuse augure,
sordide carrure, tel est le corps, qu’arbore cet être. Chant mortuaire, Mélodie endiablée, tel est
la nature, de mes immondes pensées. J’entends et ressent, la corruption s’épandre en moi.
J’entends et ressent, ces cris de douleurs. J’entends et ressent, cet appel à l’aide. Mais
qu’importe leur provenance : le silence les faits taire. Et alors ils recommencent, de leurs
cuivres enflammés, à jouer leur hymne, rien de plus qu’une chanson pour le commun des
mortels : il s’agit en vérité, de l’ode à la mort.
Je vais mal :
Mais comment leur dire ?! Comment peuvent-ils s’imaginer une seule seconde ce que l’on
ressent ?! Ils n’ont que faire des émotions, ils vivent dans le présent, les faits, le réel. Ils ne
s’intéressent qu’au contenant, pas au contenu. Si seulement ils savaient….ils seraient morts
depuis bien longtemps.
Il se fond dans la masse, voguant sur cette mer agitée, ignorant la tempête qui bouillonne en
son cœur, perdition qui sommeil en chaque homme. Il avance, malgré le givre du temps,
malgré les ravages des saisons, ne prenant pas en compte les guerres extérieures : l’âme est
une arme dont le vivant s’amuse et abuse, il tue et détraque, car les pertes sont invisibles. Les
autres ne le remarquent pas, et quoi de plus beau que le calme en cet Enfer ? Il n’a que faire de
leurs querelles, sordides murmures, qui se brisent en son cœur : dorénavant, il ne se cachera
plus en se montrant…il pensera, simplement.
Elle :
Ne sera bientôt plus de mon monde, car, tard dans la nuit, mes tendres souvenirs,
disparaitrons.
La Prison :
Elle était située sur l’un des plus hauts points de la ville de Fribourg, proche de la gare où,
chaque matin, les trains déversaient leurs gens sur cette même citée. Ces mêmes matins, très
précisément, la ville s’emplissait d’un soleil trompeur. Le bâtiment à travers lequel la lumière
blanche fusait par l’immense véranda du mur gauche, n’en restait pas moins sobre et hideux,
gris comme un après-midi de Janvier. Son intérieur était divisé en trois étages, comptant
chacun à peu près une dizaine de cellules. Une horrible couleur bleu marine englobait les parois
ainsi que les poutres qui soutenaient les différents étages supérieurs. Au sol, une moquette sale
et grise qui rappelait les plus mauvais appartements New-Yorkais avait été austèrement
disposée, de sorte que le contraste entre le sol et les parois ne soit que plus visible. Mais tout
ceci, ce décor vaseux, ne dérangeait pas les détenus, dociles et acharnés.
Chaque matin, les détenus quittaient leur siège du train, pour venir ici, à cette Prison, qui trône
sur les Hauts de Fribourg…
Blue :
« Elle est belle vous savez ? Terriblement belle. Mais chaque contact avec sa peau me brûle et
me consume un peu plus. C’est une formidable contradiction, une antithèse vivante. Je l’adore
comme le je la crains. Je la désire comme je le renie. Ses paroles sont or à mes oreilles, mais
lames à ma raison : elle me fait mal, et j’y reviens, incessamment, désireux de l’aider
également. Mais j’ai quelque chose à vous avouer…vous pouvez garder un secret ?
Je la déteste.
Et chaque soir, avant de m’endormir, je la prie et chérie plus que tout, de me faire souffrir et…
vivre.
Je sais Docteur. Mais je ne peux m’empêcher de me dire que je ne suis pas le seul. »
Espoir :
C’est l’unique lumière qu’il me reste, simple allumette au milieu de mes chandelles éteintes.
Pourtant, à chaque mot, elle embrase un peu plus ma chaumière décimée, elle me porte et
m’emporte, me permet d’y croire à nouveau, enfin. C’est cette allumette qu’a tout un chacun…
et quant elle finit de brûler, quand elle nous quitte…ne reste alors qu’une chose : l’espoir, celui
de brûler à nouveau. »
Ô Noir :
Ténèbres, vous avez été bien des choses, mais jamais mes ennemies. Vous m’avez
accompagné, dans mes nuit, mes folies, partout où j’allais, vous saviez où j’errais. Je ne
puis me résoudre à, de la sorte, vous abandonnez ; mais qu’importe le prix, la manière, ou
les mots…au final, c’est la nuit que vous me sermonnerez.
Je suis une plume simple, un écrivain, un artiste, qu’un souvenir parmi tant d’autres. Et
pourtant vous persistez, sachant mes défauts et mes péchés. J’ai été un mauvais disciple,
un moine comme Baudelaire : vos fleures du mal, jamais ne m’atteindrons, puisque dans
votre jardin d’éden, plus rien ne pousse. Votre gangrène est votre arme, mais bien mal
vous à pris d’en abuser ainsi : votre ennemi, c’est vous, ainsi que la nuit.
Ténèbres, je vais ai aimé autant que je vous ai haïs. Mais une seule chose je retiendrai :
moi, jamais je ne vous ai trahis.
Tu étais si grand. Si beau. Avec tes grandes Ailes dorées. Survolant une terre brisée, gangrenée,
terrassée, que nul n’aurait su quitter et laisser, abandonner pour ne jamais repartir et mourir,
loin d’ici, pour une nouvelle vie.
En te promenant, dégustant les saveurs de la vie, les péchés et les fruits, d’une existence jeune
et pure, préservée de toute souillure.
Plus le temps passe, plus tu trépasse, jusqu’à ce que la mort, tes restes ne ramasses.
Tes ailes ont pourries petit ange. Et le fracas de tes os brisés à terre n’a été que musique à son
égard. Et tu rampes, agonisant, chérissant et réclamant, la pire des engeances, qui ta brisée,
torturé, humilié, et achevé…et tu en réclames à nouveau, ce bâton interdit qui t’a tant battu et
assouvi…Regardes-toi petit ange : Misérable. Comme elle au final…si faible…si misérable…et
pourtant si belle !
Quel dommage petit ange …petit ange Morbide. Dorénavant, tes hurlements ne sont que
fanfare à mes oreilles.
Le fil de fer :
Tel un funambule sur la mort, j’oscille entre la vie et le rêve. J’y vois, je perçois, des existences
pareilles à la mienne : je sais en ressent, leur mal-être invisible. Moi seul les comprends,
puisque qu’ils sont propres à mon palais. Le fil s’effile à travers mes jardins, déchirant la chair
de mes appartements, il entaille les semailles, et brise les églises, vivants piliers qui me servent
de refuge, avant de pénétrer en mon fort intérieur, l’endroit ou personne n’ose aller. Le fil de
fer, m’entaille la main, et laisse sortir, une partie de mon âme. Je sens les particules, diffuses
dans l’air : je sens la mort devenir réelle.
Derrière le rideau :
Quel est ce son ? Cette douce mélodie ? Tranchez nos existences !
Vous semblez troublé, auriez-vous peur ? Vous êtes misérable et pourtant si fort
Ou avez-vous quelque chose à vous Vous êtes puissant mais pourtant si seul
reprocher ?
Vous êtes Goliath, vous avez créé David !
Vous vous assurez la gloire, en exterminant Comprenez-moi, je vous jure qu’il est ici
l’espoir
Une emprise bien menée, et maintenant il
Laisser donc ce monde, en proie au me poursuit
désastre
Il surveille mes moindres faits et gestes, je
Catastrophe néfaste, que vous incarnez ! le regarde, lui dit laisse-moi, il rigole et
réponds tait toi
La détente aussi
Je le fuis le chérie, il est mon opiomanie !
Le Satyricon !!!
Le Satyricon !!
Le fou d’Hurlevent :
L’inspectrice avançait dans le couloir de l’asile. Ce bâtiment situé dans la banlieue d’Hurlevent
abritait les pires des malfrats. C’était une sobre petite maison de pierre, qui n’attirait que très
peu le regard. Mais à l’intérieur, tout était différent. Le peu d’humanité qu’il vous restait
disparaissait. Ici vous étiez un cobaye, rien de plus. Inspecteur, détenu, vous subissiez tous des
expériences, certaines particulièrement atroces. L’inspectrice générale, Maelva Sang-pourpre,
était très connue. Elle avait la charge d’un détenu…particulier : Erebus Kaerebas. Son nom était
une légende dans l’asile, mais il était inconnu à Hurlevent. Ce patient était trop dangereux. Il
devait rester caché.
Durant le premier jour, ses pupilles étaient vertes, et il affichait un grand sourire. Il était
accroupi. Sa peau de couleur terne, presque grise en faisait un parfait démon. Pourtant il était
de sang humain. Une immense chevelure noire se traînait derrière lui. De temps en temps il
frémissait, mais l’épais manteau chevelu ne bougeait pas. Il n’était pas nu, mais très peu vêtus.
Il portait une sobre toge en toile brune et sale, ainsi qu’une veste en cuir. Il n’avait rien avalé.
Personne ne s’était risqué à l’approcher. Et puis, la nuit approchant, il avait commencé à
effacer son sourire malsain pour laisser place à une expression stoïque, et, une fois le soleil
totalement couché, son visage évoquait une terreur certaine. Au milieu de la nuit, il s’était mis
à crier de toutes ses forces. Il se frottait la tête frénétiquement, et murmurait des « Tout vas
bien, tout vas bien, tout vas bien… » Sans arrêt. Il s’arrêtait de temps en temps pour fixer la
vitre des surveillants. Ses pupilles affichaient un orange pétant, et son expression rechangeait ;
il affichait de nouveau se sourire malsain. Et puis il revenait à ses grattements frénétiques. Il
était fou, cela ne faisait aucun doute.
Le deuxième jour, au petit matin, après toute l’activité de la nuit, un surveillant s’était aventuré
dans la cellule pour lui parler et, au passage, lui apporter quelque chose à manger. Selon le
personnel, il aurait engagé la conversation très calmement. Les autres surveillants, derrière la
vitre, avaient tout vu et entendus : « Erebus, s’est ça ? avait demandé timidement le garde.
- Exact. Je vous en prie, approchez-vous, vous n’avez pas à avoir peur de moi, avait
simplement répondu Erebus, tout en se balançant sur lui-même, toujours tout
sourire. »
Le garde avait avancé, prudemment. Il tenait dans une de ses mains une dague luminescente, à
l’aura verte, très peu chaleureuse. Dans l’autre, un plat avec de la viande et des légumes.
Erebus avait continué: « Je sens de la nourriture. Qu’est-ce que c’est ?!
- De la viande de bœuf, avec des légumes sautés. Ça a été préparé spécialement pour
vous par le chef, répondit le garde toujours aussi peu rassuré.
- Vous sentez ? L’odeur qu’a cette viande…
- Quoi, qu’est-ce qu’elle a ?
- J’ai crus comprendre, en écoutant à travers ses murs, que vous, les surveillants, vous
avez un plat différent du nôtre.
- C’est exact.
- Je peux vous posez une question ? demanda Erebus, se retournant brusquement, et
avançait très lentement à quatre pattes, toujours aussi souriant.
- Dites toujours, mais restez en place, répondit le garde un peu déstabilisé.
- Est-ce que vous avez peur de moi ?
- Non, du moins vous ne me faites pas peur, vous êtes plus dérangeant. Et restez en
place ! s’écria le surveillant, commençant à paniquer.
- Enfin quelqu’un d’honnête ! Et est-ce que vous mangeriez se plat ?
- Bien sûr que non, il est pour les détenus. Je préfère le mien, répondit le garde pointant
sa dague, toujours aussi apeuré.
- Oh, je vois. Et bien dans ce cas vous devriez avoir peur de moi ! »
A ces mots, Erebus bondit sur lui. Il fila à travers le faible coup asséné par le surveillant, et
l’attrapas par la gorge. Il lui brisa le cou et commença à disséquer sa gorge. Il plongea sa main
à travers sa trachée, dans un grand craquement, et en ressortis un poumon. Il continua de
vider sa victime et disposait ses organes aux quatre coins de la pièce. Derrière la vitre, les
autres surveillants regardaient la scène, horrifiés. L’un d’entre eux était l’inspectrice générale
Maelva Sang-pourpre. Elle était séduite et terrifiée par l’attitude du détenu. Ce dernier sentis
cette sorte d’admiration et s’approcha de la fenêtre. Il fixa Maelva pendant de longues
minutes. Puis il finit par lâcher : « Aurai-je l’honneur de vous voir dans cette cellule, et non à
travers un mur ? Votre esprit est si intéressant à analyser…mais il serait bien mal venus pour
moi de m’y introduire trop profondément…je voudrais vous connaître, madame Maelva Sang-
pourpre. » Cette dernière eut l’air surprise. Elle regarda autour d’elle. Ses collègues la
dévisageaient, l’air de lui dire de ne pas y aller. Mais aucun d’eux ne fut en mesure de formuler
la moindre phrase. S’est alors que son voisin de gauche lui dit « Vas-y, ça pourrait être
intéressant. Au moins on pourrait en apprendre plus sur lui. » Elle s’était alors exécutée. Elle
avait franchi la lourde porte en métal renforcé, et s’était retrouvée né-à-nez avec Erebus. Ce
dernier eut l’air de relâcher un certain poids à la vue de l’inspectrice. « Décidément, vos
collègues ont l’esprit bien fragile, mais tous les occuper n’a pas été chose facile, enfin, vous
êtes là, c’est l’essentiel.
L’inspectrice pris peur et voulut s’enfuir, mais elle constata que la porte était fermée. Tous ces
collègues étaient partis. Il ne restait plus qu’elle. Elle et se fou. Elle le fixa en pleure. « Laissez-
moi sortir !
- Oh ça non…non, vous m’avez l’air intéressante. Je préfère que l’on parle. Cela vous
plairait ?
- Laissez-moi sortir, je…je vous en supplie…
- Eheh, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, non, et…non.
Laissez-moi donc vous lire l’esprit. »
Erebus eut l’air de se concentrer. Maelva ne put bouger ; elle était comme paralysée. Soudain,
après plusieurs minutes de silence et de recherches, le visage d’Erebus sembla s’éclairer. Il
s’exclama d’une voix douce et murmurée « Vadzha-leisgzh » Maelva fondit en pleure. Erebus
l’attrapa par les cheveux, et lui caressa le visage avec ses doigts. Des doigts longs et fins,
presque pointus. Il la regarda tendrement. « Si faible…si misérable…et pourtant si belle ». à ces
mots, Maelva sembla s’évanouir. Elle ne se réveilla que quelques heures plus tard. Entre-temps,
les pupilles d’Erebus étaient passées à l’orange pétant.
Et enfin le troisième jour. Maelva récupérait de la journée de la veille, et personne n’était entré
dans la cellule. L’asile avait fait venir des mages afin de créer des sortes de brouilleurs qui
empêchaient Erebus de prendre le contrôle d’esprits ou de les explorer. Ce dernier avait passé
la journée assis à croupis à fixer la vitre des surveillants. Son sourire était totalement revenu.
Ses pupilles quant à elles, étaient passées au bleu éclatant, presque mélancolique. Mais malgré
la présence de brouilleurs, quatre prisonniers s’étaient arraché la langue, les uns après les
autres avant de s’étouffer avec. Il ne pouvait y avoir qu’un responsable d’un tel « accident » :
Erebus Kaerebas.
L’inspectrice avançait dans le couloir de l’asile, furieux et prête à en découdre. Elle entra de
force dans la cellule. Là, Erebus semblait l’attendre. Il la regarda d’un air surpris et pourtant
ravis. « Ma chère, que me vaut l’honneur de votre visite ?
Le détenus eut l’air de s’offusquer et s’élança sur l’inspectrice. Il rugit et la mordit au cou, mais
pas mortellement. « Jouer ? Si vous voulez je peux jouer…je peux par exemple vous dire qui est
votre père, qui est votre mère, avec qui vous tromper votre mari, avec quels détenus vous avez
déjà accordés des « faveurs », quels détenus vous avez diagnostiqué injustement, qui vous
avez tué, et bien plus encore…alors, vous voulez que je joues ?
- Dites-moi, Erebus.
- Pour ça il faut demander au maître…
- Alors qui est ce « maître » ?
- Le corrupteur ! »