Vous êtes sur la page 1sur 28

.

LA PERCEPTION

Rapport
Mohammed GUEDIRA
PLAN

I – TENTATIVE DE DEFINITION

1. Etymologie
- Exercice

2. Définition de Lalande
- Exercice (vu, entendu, senti)

3. Polysémie

II – THEORIES DE LA PERCEPTION

A/ Les approches théoriques

1. La perception et la philosophie classique


- Exercice

2. La perception et la psychologie moderne


- Structuralisme
- Béhaviourisme
- Gestalt

B/ Les éléments de base du processus de la perception

o Les illusions perceptives

III – LA PERCEPTION SOCIALE

1. Les facteurs déterminants notre perception sociale


2. Les erreurs dans la perception sociale
- Activité
- Exercice

IV – LA PERCEPTION, LE MANAGEMENT ET L’ART

1. L’effet de la perception sur le comportement organisationnel

2. L’art, comme manière de percevoir le monde (activité)

V – LA PERCEPTION CRITIQUE : POUR AVOIR DES


PERCEPTIONS PLUS INTELLIGENTES
Devenu le plus puissant, grâce à une faculté qu'il est le seul (jusqu'à maintenant) à
posséder: la pensée réflexive, l’homme - de par ce pouvoir - a pu élaborer des explications,
des théories, lui permettant de mieux comprendre son environnement, de le contrôler et de
saisir la réalité.
La science est une quête de cette réalité, une tentative d'explication. Durant des siècles,
plusieurs sont les recherches, les théories, les courants voire mêmes les perceptions qui ont
tenté d’aborder toutes les dimensions, biologique, physiologique, émotionnelle, sociale, de cet
être.
Chacun a, depuis sa naissance, une expérience riche de perceptions, d’idées, de
croyances sur ce monde où l’on vit.
Dans le présent travail, nous allons tout d’abord essayer de recouvrir les acceptions et
les significations de la perception. Nous aborderons ensuite la question sous l’angle
philosophique et psychologique. A ce stade, il est impératif d’étudier les éléments de base du
processus de la perception. Puis, nous nous attarderons sur les facteurs déterminants la
perception sociale des individus et les erreurs qui entravent la relation avec autrui. Nous
évoquerons après la place de la perception dans le management et l’art. Nous terminerons
avec des conseils pour améliorer nos perceptions erronées.
I- TENTATIVE DE DEFINITION

Le concept de perception reste toujours difficile à cerner. Le mot trouve son origine en
latin : ● "per" ne signifie pas ici à travers mais parfaitement, complètement,
● "ception" a pour origine "capere" (= prendre).
Percevoir désigne, classiquement, une action pleinement achevée qui consiste à
s'emparer de quelque chose, au sens de recevoir, prendre connaissance de l'extérieur par les
sens, de ce qu'il y a ici et maintenant.
Cependant, peut-on réduire la perception à une représentation déterminée, une prise
complète d’une chose ? Que reste-t-il alors de la perception elle-même devant l’apport de la
mémoire, du vécu ?
Pour beaucoup, le mot signifie la connaissance consciente que nous avons du monde à
travers nos sens. C’est « L’acte par lequel – disait LALANDE – un individu, organisant
immédiatement ses sensations, les interprétant et les complétant par des images et des
souvenirs, s’oppose un objet qu’il juge spontanément distinct de lui, réel et actuellement
connu de lui.»
Reconnaître la perception, dans ce cas, ce n'est pas nier la collaboration de
l'imagination, de la mémoire et de la culture, c'est plutôt mettre à jour, en deçà de ces
élaborations, que celui qui perçoit juge que l'objet est distinct de lui et connu par lui, et ce,
immédiatement.

Aussi, Le nom de perception, comme celui de la plupart des mots polysémiques,


s'applique - t -il, suivant les circonstances, tantôt au domaine des impôts, tantôt au mode de
représentation visuel, tantôt au processus, au résultat de l'opération ou synonyme de sensation.

La difficulté qu’on trouve pour définir le mot émane, comme nous l’avons vu, des
diverses acceptions et d’idées sur ce qu’est la perception. Il existe des manières très variées
d’aborder l’étude de cette dernière. Dans la partie qui suit, nous allons passer en revue les
différentes théories qui ont traité de la perception.
II- THEORIES DE LA PERCEPTION

1- Les approches théoriques


De tout temps, les théories, les courants voire les sciences se sont interrogés sur le
parcours de l’Homme. Chaque discipline du champ des sciences humaines, que ce soit la
psychologie, la sociologie, l’économie ou l’anthropologie a essayé d’apporter une réponse aux
questions posées en cherchant à déterminer, à décrire et analyser l’objet d’étude.
Depuis toujours et d’antan, le sujet de la perception a pris place chez les philosophes
présocratiques. Dans leur écrit, on trouve des observations sur la vision, le tact, le goût qui
font ressortir soit :
 les fluctuations du jugement perceptif comme on le constate chez PLATON lorsqu’il
donne l’exemple de la personne malade pour qui le goût du vin devient amer.
 les erreurs et les illusions dues à la forme de certains objets, de l’éloignement spatial…
Le problème de ce sujet de la perception paraît le plus simple et il est sans doute un
des plus complexes de la psychologie. Il a alimenté depuis les origines de la psychologie, les
discussions métaphysiques. Le débat métaphysique inévitable est celui-ci : la perception nous
donne-t-elle un renseignement sur l’être du monde extérieur ? Pour certains, c’est là un faux
problème mais on ne peut cependant nier que ce sujet est toujours à l’horizon d’une étude de
la sensation. Mais, préalablement, il est une question à se poser : peut-on et doit-on distinguer
« sensation » et « perception » ?

A- La perception et la philosophie classique


Les philosophes classiques opèrent une distinction entre sensation et perception. Pour
ses adeptes, la « sensation » est un phénomène plus « élémentaire » que la perception. La
sensation donne purement et simplement les qualités. On ne peut définir inversement la
qualité que comme un « sensible » élémentaire. Salé, sucré, amer, rouge, chaud, froid, etc.,
voilà autant de « qualités » qui sont des sensations en-deçà des mots mêmes qui les
généralisent et les conceptualisent.
La perception, toujours selon la psychologie classique, est différente de la sensation
dans la mesure ou cette dernière est une qualité présente. Définir la perception, c’est donner à

cette qualité une signification .


a- Selon le point de vue intellectualiste
Il n’est pas inutile de savoir avant d’aborder la question sous l’angle intellectualiste,
les importants principes de ce courant.
L’intellectualisme : doctrine philosophique ; elle instaure la nécessité de la
prééminence de l’intelligence sur les sentiments et la volonté. Ses adeptes n’abordent aucune
recherche si d’avance toute notion est dépourvue d’évidence rationnelle. La raison est le
principe, non seulement de toute science mais de la morale et de la religion même. Dans cette
optique, connaître le monde matériel c’est le réduire en éléments mathématiques.
La perception, selon les intellectualistes, implique alors un acte spécial de
l’intelligence et un contact avec une réalité « objective ». La comparaison qui fera mieux
comprendre l’esprit intellectualiste est celle-ci : imaginez que votre main soit dans un gant
dont l’épaisseur est importante, et imaginez que vous tentiez de saisir et de reconnaître, par le
seul moyen de cette main, un objet extérieur, vous allez avoir des sensations, mais vous ne
saurez déterminer si elles sont dues à l’objet ou à la matière qui compose le gant ; vous
pourrez dire cependant qu’il y a quelque chose. Et si l’on ôte le gant, vous pourrez savoir avec
plus de vérité de quel objet il s’agit.
De cette expérience découle le résultat incontestable, c’est que les sens sont autant de
causes d’erreur ; à travers eux il y a cependant un acte positif de connaissance qui rencontre
une réalité. Mais il faut dépouiller toutes les sensations pour saisir par l’intelligence seule la
nature réelle ou vraie de l’objet. Donc perception égale des sensations et un contact entre un
acte intellectuel et une réalité extérieure.

b- Selon le point de vue des pragmatistes


Doctrine qui prend pour critère de la vérité la valeur pratique. Pour le pragmatisme, est
vrai ce qui réussit, et il n’y a pas de vérité absolue.
Selon la doctrine auquel se place BERGSON, il y a effectivement une différence entre
sensation et perception. Bergson appelle la sensation la « perception pure ». Elle est une
certaine prise de notre sensibilité sur la réalité mouvante et complexe qui nous entoure. Cette
perception pure est dans les choses, elle est du monde et non pas de la conscience. A cette
perception pure, la conscience ajoute les souvenirs qu’elle sélectionne et qui permette
l’action. Dans ce sens, percevoir serait dans ce cas se souvenir.
Donc perception = perception pure + mémoire.
Pour passer au second chapitre, il est à conclure que chez les intellectualistes ou pour
les pragmatistes, sensation se distingue de perception. Les sensations sont la matière de cette
perception et c’est le jugement et la mémoire qui leur donnent une forme.

B- la perception et la psychologie moderne


Avant d’aborder cette question, il est à noter que la psychologie tout au long du
XIXème siècle a connu d’énormes difficultés pour se constituer en science autonome. Les
découvertes scientifiques à l’époque - physique, physiologique - ont conduit à aborder les
problèmes de sensation, de mouvement sous un nouvel angle. La psychologie scientifique
pouvait alors naître sur de nouvelles bases.
 Gustav Théodor FECHNER (1801-1887)
En 1860, une nouvelle discipline fut fondée par FECHNER à mi-chemin entre la
philosophie et la physique, celle de la psychologie. En divisant le monde corporel en deux
parties : le monde corporel interne ou physiologique et le monde corporel externe ou
physique, ce médecin avait pour ambition de mesurer les phénomènes qui résultent des
impressions exercées par le monde physique sur les organes sensoriels et qu’il appelle les
sensations.
 Wilhelm WUNDT (1832 – 1920)
Fondateur d’une nouvelle science : la psychologie expérimentale, WUNDT définit la
perception comme l’ensemble de deux ou plusieurs sensations pures combinées par les
mécanismes d’association qui permettent de construire des systèmes de représentation du
monde extérieur.
 Edward Bradford TITCHENER (1867 – 1927)
Le structuraliste anglais distingue trois classes du processus élémentaires :
 La sensation, élément de la perception possède au moins 4 attributs:
*qualité (bleu, froid…)*intensité (forte ou faible)*clarté *durée
 L’image, élément caractéristique de l’idée, elle est différente de la
sensation par l’infériorité de son intensité et de sa durée.
 L’affection, élément de l’émotion, elle ne possède que deux qualités:
plaisir, déplaisir.
 Le courant behavioriste
Le courant béhavioriste trouve son origine dans la philosophie positiviste et scientiste
du XIXème siècle et la philosophie américaine du début du XXème siècle. Il accorde une
importance primordiale au comportement observé et à l'environnement. C'est Watson (Etats-
Unis) qui, en 1913, crée le béhaviorisme comme méthode d'observation de la modification du
comportement d'un organisme en fonction des modifications du milieu. Le schéma de l'étude
psychologique comportementale s'élabore autour du stimulus et de la réponse.
Le courant béhavioriste a considéré le psychisme humain comme une boîte noire. Les
psychologues de l'époque estimaient que le psychisme ne devait faire l'objet d'aucune
investigation propre : seuls devaient être considérés les stimuli provenant de l'environnement
extérieur et les réponses obtenues par un sujet. D'après les béhavioristes, le comportement est
la résultante d'un apprentissage qu'il faut observer mais ne pas chercher à comprendre ni à
interpréter.
Les grands noms qui ont marqué ce courant sont Watson, Tolman, Lashiey, Hull ; et
pour la seconde génération, Piéron, Sherrington et Von Helmotz.
 L’école gestaltiste : une psychologie allemande de la forme 

L’école gestaltiste est apparue en Allemagne à peu près à la même période que le
mouvement behaviouriste. Ce terme désigne en allemand, la structure ou la forme. Ayant une
signification beaucoup plus complexe, ce mot a été conservé aussi bien en français, en anglais
ou en japonais.

Le verbe « Gestalten » signifie « mettre en forme, donner une structure signifiante ».


Prenons une symphonie comme exemple : elle est une autre chose qu’une succession de notes.
Si j’écoute une mélodie, ce n’est pas les notes une par une comme elles sont écrites sur le
papier, que j’entends, mais c’est « l’air », la mélodie comme Gestalt que je saisie 1. Donc, « la
Gestalt est une forme structurée, complète et prenant sens pour nous », c’est-à-dire, que
lorsque nous observons un objet pour une première fois, nous captons le tout et non pas les
composants. Les détails peuvent apparaître par la suite, nos esprits saisissent les formes les
plus simples.

On associe généralement le développement du mouvement gestaltiste à ces trois


personnages : Marx WERTHEIMER (1880-1943) ; Kurt KOFFKA (1886-1941) et Wolfgang
KOHLER (1887-1967). En effet, ces auteurs ont formulé les principales lois sur lesquelles
toute la psychologie de la gestalt s’est reposée : la loi de la bonne forme, et la ségrégation
figure-fond.

O       La loi de la bonne forme.

1 : Roger MUCCHIELLI,  Philosophie de la connaissance,  Bordas p. 69


Selon les partisans de cette théorie, la forme perçue tend par nature à être « la
meilleure possible »[2], la plus simple et la plus significative. Ainsi, les objets qui se présentent
à la vue ou à l’ouie peuvent donner lieu à des perceptions de formes différentes, l’une de ces
perceptions est généralement privilégiée et s’établit de préférence à toute autre. De là découle
le principe le plus important qu’est celui de la globalité. En effet, les divers éléments d’un
objet sont perçus simultanément et s’organisent entre eux pour former un tout. Par exemple,
un groupe d’étoiles est perçu comme « constellation »[3]. L’esprit humain  saisit souvent la
forme prédominante qui est la plus significative, à son sens. 

O       Ségrégation figure-fond. 

C’est la structure première de notre perception. Toute forme se donne à nous se


détachant sur un fond. Selon notre concentration, nous pouvons saisir soit le premier plan soit
le second.

En observant cette image, certains peuvent  saisir la partie noire détachée sur un fond
blanc, c’est-à-dire, les deux visages pris de profil.

Par contre, le premier plan ou la forme perçue serait pour d’autres l’image du vase,
c’est-à-dire la partie blanche détachée sur un fond noir.

  La théorie de la Gestalt a largement contribué à la compréhension des phénomènes de


la perception. Elle s’est aussi distinguée par rapport aux autres théories. D’une part, par l’idée
que «  le tout n’est pas la somme des parties », contrairement aux cartésiens. Et d’autre part,
selon la gestalt, il n’y a pas deux modes : la sensation puis la perception, mais un seul, et il
faut employer indifféremment l’un ou l’autre mot.[ 5]

2- Les éléments de base du processus de la perception


2 : R. MUCCHIELLI, idem, p. 71

3 : ibidem, p. 69.
« La perception est un mécanisme premier par lequel les êtres humains arrivent à
connaître leur univers. Elle est aussi un processus de traduction : les stimulations
sensorielles sont converties en impressions de la réalité »4
De façon consciente ou inconsciente, l’individu classe et organise ses sensations de
façon à leur donner un sens. Il identifie, sélectionne, classifie et juge l’information perçue par
les sens.
Le tableau ci-dessous résume les éléments de base du processus de la perception à
partir de l’observation initiale jusqu’à l’interprétation de cette observation.
Bien évidemment, les stimuli que nous recevons de l’environnement passent par les
cinq sens : le goût, l’odorat, l’ouïe, la vue et le toucher. Cependant, nous accordons
sélectivement notre attention à certains aspects de l’environnement et nous en ignorons
d’autres selon notre état psychique et physiologique. Par exemple, une maman qui écoute son
bébé crier, sent quelque chose brûler dans la cuisine et qui regarde son enfant qui est sur le
point de tomber, va sélectionner et de manière assez rapide, la stimulation qui est la plus
importante.
Ce processus de sélection met en jeu à la fois des facteurs externes et internes grâce
auxquels les personnes filtrent les stimulations sensorielles afin de déterminer celles qui
recevront le plus d’attention.
Les facteurs externes constituent des caractéristiques qui déterminent si les stimuli
seront perçus ou ignorés.
Parmi les facteurs externes, nous pouvons citer :
* La dimension : la dimension de l’objet perçu a une influence assez importante sur
notre perception. En ce sens qu’un objet plus grand ou plus petit par rapport aux objets qui
l’entourent capte plus rapidement l’attention.
* L’intensité : plus le stimulus provoqué par l’objet est intense et plus il a de chances
d’être perçu.
 Même le langage qu’utilise un patron dans une note adressée à un employé peut
illustrer le principe d’intensité. Une note qui dit : « veuillez, SVP, passer à mon bureau quand
vous le pourrez » ne suscitera pas le sentiment d’urgence qu’en lisant une note qui dit :
« venez, dans mon bureau, immédiatement ».5
* Le contraste : nous avons tendance à nous adapter et à nous habituer aux
stimulations courantes de notre environnement. Les stimuli inattendus ou inhabituels attirent
davantage notre attention. Ainsi, un ouvrier qui travaille dans une usine hautement mécanisée

4 « Méthodes de communication interpersonnelle » Chapitre 1. p. 67

5 : Hellriegel, Slocum, Woodman « Management des organisations » p. 70.


en vient à ne plus entendre le bruit des machines. Or, si celles-ci s’arrêtent, il percevra
immédiatement le silence.
* La mobilité : un facteur mobile sera plus probablement perçu qu’un facteur fixe.
En général, les individus sont plus sensibles aux objets qui bougent qu’à ceux qui sont
immobiles.
Par exemple, un conférencier qui se déplace en parlant maintient mieux l’intérêt qu’un autre
qui reste assis et lit calmement son texte.6
* La répétition : un stimulus attire plus l’attention s’il est répété. C’est le principe
sur lequel s’appuient les directeurs de marketing pour essayer de capter l’attention de leurs
clients potentiels. Pour être plus efficace, une publicité répétée à plusieurs reprises est
toujours utilisée lors de la mise en marche d’un nouveau produit.
* La nouveauté – familiarité : un stimulus nouveau dans un milieu familier attire
facilement l’attention. Ce phénomène est à la base du système de rotation des tâches instauré
dans de nombreuses entreprises.
De la même façon, un stimulus familier dans un milieu nouveau est beaucoup plus
perceptible. Un américain visitant la Chine pour la première fois sera attiré par une annonce
de Coca Cola.
A côté de ces facteurs externes, il existe également des facteurs internes et qui sont
aussi importants. Par facteur interne, nous entendons tout facteur inhérent à la personnalité de
l’individu. Les plus importants demeurent la culture, la motivation et les sentiments.
* La culture : l’appréhension de la réalité est un phénomène étroitement relié à la
culture de l’individu, ses habitudes, son cadre de vie, son langage. 7 Ainsi, l’appartenance d’un
individu à une culture donnée affecte sa perception et les différences culturelles
s’accompagnent de différences perceptuelles.
* La motivation : Celle-ci a une influence très forte sur la perception. En un certain
sens, l’individu perçoit ce qu’il veut, et ses besoins actuels orientent ses choix perceptuels. Si
quelqu’un est affamé, il percevra plus facilement les restaurants que les librairies.
* Les sentiments : nos sentiments et nos émotions peuvent jouer un rôle assez
important dans la façon dont nous percevons le monde extérieur. Généralement, l’information qui
suscite des sentiments négatifs ou qui bouleverse est perçue moins facilement que celle qui est
neutre émotionnellement.

6 : Nicole Coté « la personne dans le monde du travail » Gaetan morin éditeur p. 82

7 : Nicole Coté « la personne dans le monde du travail » p. 85


Après la sélection, vient l’étape de l’organisation de la perception. Celle-ci est le
processus par lequel les sujets regroupent les stimuli de l’environnement pour les agencer en
structures identifiables et signifiantes8.
Une fois que la sélection a eu lieu, c’est l’organisation qui prend le relais. L’individu
organise les stimulations sensorielles à travers un certain nombre de moyens, et les plus
importants sont :
* La continuité : La continuité est la tendance à percevoir les objets en tant que
structures permanentes. Cependant, elle peut aussi présenter des aspects négatifs. Par exemple, les
managers dépourvus de souplesse peuvent insister pour que leurs employés respectent
scrupuleusement les habitudes établies. Ils peuvent refuser de tolérer toute activité guidée par le
hasard, même si elle permet de résoudre les problèmes, car cela bouscule leur besoin de
continuité9.
* La fermeture du contour : C’est la tendance à compléter une forme pour qu’elle
soit perçue comme un objet achevé. L’individu perçoit un objet dans sa totalité même si une
partie seulement de cet objet est apparente.
* La proximité : Un groupe d’objets peuvent être perçus comme reliés en raison de
leur proximité les uns par rapport aux autres.
Souvent, les personnes qui travaillent dans le même service sont perçues comme une
unité à cause de leur proximité physique. Par exemple, si quatre personnes du troisième étage
quittent leur emploi, même pour quatre raisons différentes, le département du personnel peut
percevoir ces départs comme le symptôme d’un problème existant au troisième étage.10
* La ressemblance : Selon ce principe, plus les objets sont semblables plus est grande
la tendance à les percevoir comme un groupe commun.
Ces principes constituent les divers moyens utilisés par chaque personne afin de
donner un sens à son environnement.
La manière dont nous interprétons ce que nous percevons varie considérablement.
Chaque personne sélectionne et organise les stimuli sensoriels différemment, ce qui conduit
incontestablement à des interprétations et à des réactions différentes. Selon William JAMES :
« Si une partie de ce que l’on perçoit provient grâce à nos sens, de l’objet perçu, une autre partie
provient toujours de notre tête ». De là nous pouvons dire que la perception est un processus
fortement subjectif.

8 : « Management des organisations » p. 74

9 : « Management des organisations » p. 75

10 : « Management des organisations » p. 76


Le processus de la perception

Stimuli de l’environnement

Sensation

- Goût - Vue
- Odorat - Toucher
- Ouïe

Sélection perceptive

Facteurs externes Facteurs internes


- Dimension - Culture
- Intensité - Motivation
- Contraste - Sentiments
- - Mobilité
- Répétition
- Nouveauté
- Familiarité

Organisation de la perception

- Continuité
- Fermeture du contour
- Proximité
- Ressemblance
Interprétation

- Subjectivité de la perception
- Intervention des facteurs internes et externes

Donner un sens au monde qui nous entoure est une opération qui nécessite comme
nous l’avons expliqué, un travail de sélection, d’organisation et d’interprétation. La
perception d’un objet diffère d’une personne à une autre car l’expérience est individuelle,
personnelle donc subjective.
La manière dont les gens se perçoivent est incontestablement importante puisque cela
est la base de toute relation, de tout jugement.
Dans la seconde partie, nous nous concentrons sur les facteurs qui influencent la
perception sociale et qui induit souvent à des perceptions erronées.

III - La perception sociale

La perception sociale ou la perception d’autrui se trouve au cœur des relations


sociales. Elle est justement le moyen par lequel les gens se forment des impressions et
peuvent arriver à se comprendre les uns les autres.
C’est ainsi qu’on peut définir la perception sociale comme étant « un processus par
lequel nous attribuons à des personnes  certaines caractéristiques ou certains traits »11
Notre perception sociale est influencée par un certain nombre de facteurs. Les plus
importants sont : les caractéristiques de la cible, les caractéristiques du percevant, l’influence
du contexte et l’attribution.

1- les facteurs déterminants notre perception sociale

11 : « Management des organisations » p. 78


 Les caractéristiques de la cible
La personne perçue joue un rôle très important dans la perception sociale. On
percevant quelqu’un d’autre, nous relevons des indices divers au sujet de cette personne : son
âge, sa taille, sa beauté..., et certaines caractéristiques amènent le percevant à adopter un
comportement particulier.

1. L’apparence physique
La beauté physique est l’une des caractéristiques les plus étudiées. En effet, les
hommes et les femmes attirants physiquement sont jugés en général de façon plus positive
que les personnes moins attirantes12.
Il y a également un autre aspect de l’apparence physique qui peut influer sur nos
perceptions ou sur nos impressions et qui réside dans la déficience ou l’handicap.
En effet, l’handicap pourrait constituer une étiquette toute aussi saillante que le sexe
ou l’ethnie, voire davantage. Face à une personne handicapée, la déficience est certainement
l’information la plus directement accessible, à tel point que derrière cette étiquette, risquent de
s’effacer toutes les autres appartenances catégorielles.
Une personne handicapée est d’abord perçue comme handicapée avant d’être
identifiée comme un homme ou une femme, un noir ou un blanc. Certains parlent même du
handicap comme un troisième sexe et illustre leurs propos par l’exemple des toilettes
publiques qui affichent des endroits réservés aux hommes, d’autres aux femmes et encore
d’autres aux handicapés.

2. La tenue vestimentaire.
Notre perception sociale est également influencée par la tenue vestimentaire de la
personne perçue. Ainsi, une personne qui porte un blouson noir, qui a les cheveux rasés, qui a
une cicatrice sur les joues et qui est vêtue d’un jean sale et un peu déchiré activera
certainement chez le percevant une structure ou un schéma sur une catégorie de personnes,
soit les agresseurs dans la société. Les caractéristiques saillantes de la cible (les indices qui
ressortent le plus) dicteront le comportement à suivre.
Notons cependant que l’impact de différentes tenues vestimentaires peut varier
considérablement selon la culture et les années. En général, les individus qui présentent une
tenue vestimentaire conforme aux attentes de leur groupe, produisent de meilleures
impressions que ceux qui dérogent à ce principe.13

12 :R.J.Vallerand « Les fondements de la psychologie sociale » Gaeten morin éditeur p. 228

13 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 229.


L’habillement de la personne peut également avoir des conséquences sur le plan
professionnel. En 1985, DRAKE et COX ont démontré que lorsque des candidates à un poste
de directeur se présentaient à l’entrevue habillées de façon masculine (tailleur de couleur
foncé), il leur était attribué des traits beaucoup plus masculins : athlétiques, sincères,
compétitives… Par contre, les femmes portant des vêtements provocants étaient perçues
comme des femmes moins sincères, moins gentilles, moins attentionnées.14

3. Les ouï-dire
Les ouï-dire sont les informations du second ordre ou les informations qui nous
viennent des autres. Nous nous faisons constamment des impressions des gens par le biais de
l’information qui nous est parvenue par nos amis, par l’entourage ou même par les médias.
Par exemple, nous avons souvent de très fortes opinions, parfois très claires du
professeur d’un de nos amis, sans pour autant n’avoir jamais rencontré cette personne.

Malgré les pièges que cela présente, nous formulons habituellement des hypothèses
sur ce que sont les autres à partir de leurs caractéristiques physiques ou des brefs rapports que
nous avons eus avec eux.
Les renseignements sur la cible ont probablement constitué le sujet de plus grand
nombre d’études. Toutefois, le percevant a aussi un rôle à jouer dans la perception sociale.

 Les caractéristiques du percevant


Il est possible que l’information perçue soit influencée par un certain nombre de
facteurs caractérisant le percevant. Il s’agit d’abord de l’influence de l’humeur et ensuite de la
motivation du percevant.

1. L’influence de l’humeur du percevant


Nous pouvons observer que lorsque nous sommes de bonne humeur, nous pensons à
des choses positives. Ces pensées nous incitent à voir le monde qui nous entoure de façon plus
positive, influant par le fait même sur les perceptions que nous avons des gens autour de nous.
On peut également évoquer le cas des personnes optimistes, qui ne relèvent que les
aspects favorables des choses.
Pourquoi donc, ces gens portent-ils des jugements positifs sur les gens ?
14 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 229
Un élément de réponse issu des travaux de MATLIN et STANG (1978) s’appelle
« principe de pollyanna »15. Ce principe n’est pas très connu en français, car les études de
base ont été faites en anglais.
Pollyanna est un roman d’Eléanor PORTER, publié en 1913, repris par Walt Disney
dans un film de 1960, puis dans une série de dessins animés japonais.
C’est l’histoire d’une fille orpheline à qui il arrive des malheurs, mais qui s’obstine à
ne voir que le bon côté des choses et à rendre les gens meilleurs autour d’elle.
Par la suite, ce principe est devenu un mécanisme psychologique qui incite toute
personne normale à préférer les aspects positifs ou favorables des choses et à favoriser le beau
et l’agréable dans tous les domaines de l’existence.
Ce principe suggère également que les gens se sentent mieux s’ils sont entourés de
bonnes choses et par conséquent, ont tendance à émettre des appréciations favorables sur
autrui.

2. Objectifs et motivations du percevant


Le processus utilisé pour percevoir une cible peut également être modifié par la nature
des objectifs visés par le percevant. Ainsi, le processus utilisé lorsque nous percevons une
personne pour la première fois ne serait pas le même que lorsque nous rencontrons
régulièrement la même personne.
De même, notre perception à son égard se modifiera, et au cours d’interactions
répétées, nous serons plus portés à étudier ses gestes en profondeur.
Les objectifs poursuivis par le percevant vont déterminer la nature des interactions
entre la cible et le percevant et, éventuellement, la perception résultante de la cible. Par
exemple, les processus par lesquels vous percevez un autre étudiant dans votre cours et les
perceptions qui en résulteront seront probablement différents si 16 :
1) Vous percevez cette personne tout simplement, car elle a attiré votre attention.
2) Vous devez choisir de passer ou non vos notes de cours à cette personne, ou
3) Vous devez décider d’accepter de faire un travail avec elle17.

 L’influence du contexte

15 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 249

16 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 207

17 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 207


Le contexte joue un rôle majeur dans les perceptions sociales. Il a trait généralement à
toutes les caractéristiques de la situation qui ne sont pas directement liées au percevant ou à la
cible. Il englobe plusieurs éléments notamment, le caractère social de la situation, et le lieu
géographique dans lequel se déroule l’action.
Il est important de noter, que le contexte amorce parfois l’activation de certaines
structures qui amènent à des perceptions parfois immédiates. Par exemple, vous lisez le
journal et vous apprenez qu’il s’est produite une agression au couteau dans le bus. Si vous
prenez le bus quelques heures plus tard, il y a de fortes chances pour que vous soyez attentifs
aux déplacements des gens que vous allez côtoyer.
Donc, on peut dire que le contexte représente cette toile de fond qui permet au
percevant de donner un sens à ce qu’il observe.

 Le rôle de l’attribution
L’attribution est une inférence ayant pour but d’expliquer pourquoi un événement a eu
lieu.
En effet, une attitude innée chez l’humain consiste à attribuer à un événement une
cause particulière : « S’il lui arrive cela, c’est pour çà ! ». L’explication donnée devient la
cause perçue d’un événement ou d’un comportement et correspond à une attribution.
Nous retiendrons en particulier sur ce thème les travaux de Fritz HEIDER (1896-
1988), psychosociologue d’origine autrichienne dont le sujet de travail peut être résumé
comme suit :
Comment l’homme perçoit et analyse son environnement ?
Comment explique-t-il les phénomènes qui l’entourent ?
Fritz HEIDER a relevé que les gens ressentent une motivation profonde à comprendre
leur environnement et ce faisant, à se poser plusieurs questions relatives aux causes des
événements et des comportements des autres18.
Selon le même auteur, le processus de l’attribut est déterminant dans la perception
sociale car il permet au percevant de forger une conception cohérente et organisée de la
personne cible, et par conséquent, l’environnement devient explicable, prédictible, voire
contrôlable.
En général, les conditions favorables pour émettre des attributions sont au nombre de
trois19 :

18 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 269

19 : « Les fondements de la psychologie sociale » p. 271


D’abord, l’incertitude peut nous mener à chercher l’information et à mieux
comprendre une situation ou un comportement.
Ensuite, les événements inattendus comme le fait de voir une personne nu-jambes se
promener dans la rue en plein hiver, peuvent pousser le percevant à se demander et à chercher
la cause d’un tel comportement.
Les situations d’échec ou de réussite représentent les derniers facteurs amenant la
production d’attributions. Souvent, les gens privilégient des causes internes pour expliquer
leur réussite : « je suis fort, j’ai travaillé dur … ». Par contre, en cas d’échec, ils avancent que
ce n’était pas de leur faute, et attribuent un tel résultat à des causes externes.
Dans la perception d’autrui, on remarque le processus inverse. Les gens ont tendance à
attribuer des causes externes pour expliquer le succès d’autrui et à attribuer des causes
internes en cas d’échec.
Il est judicieux de signaler que nos attributions ne sont pas toujours correctes et
objectives. Celles-ci diffèrent, et la même situation peut donner lieu à des explications et à des
attributions différentes selon les individus et selon les circonstances. Puisque chacun de nous
a sa propre façon de percevoir son environnement social, il y a de fortes chances que chacun
fasse des attributions, en fonction de ses expériences antécédentes, sa culture et sa motivation.
De façon générale, la perception sociale étant un processus fortement subjectif, les
différences perceptuelles ne sont que choses normales. Mais il arrive que la perception puisse
entraîner de véritables erreurs de jugement.

2- Les erreurs dans la perception sociale

Comme il a été dit, la perception est un processus subjectif. Chaque personne a sa


propre façon de voir et d’appréhender son environnement social. Cela étant, il est normal que
ces différences perceptuelles engendrent des divergences de points de vue. Cependant, ces
divergences peuvent entraîner des erreurs de jugement. Les principales erreurs dans la
perception sociale sont : les stéréotypes, l’effet de halo, les projections. 

o       Les stéréotypes

Le stéréotype est un ensemble de croyances et d’idées donnant une image simplifiée


des caractéristiques d’un groupe. C’est un processus par lequel nous cataloguons les individus
selon les traits prédominants de leur groupe, sans pour autant s’intéresser aux caractéristiques
individuelles.
Les stéréotypes sont à l’origine de plusieurs erreurs de jugement dans la perception
sociale. Le fait qu’il y ait consensus autour d’eux rend bien évidemment difficile leur
élimination. Quoique non justifiés, les stéréotypes sont malheureusement bien ancrés dans la
conscience collective des groupes.

Les stéréotypes peuvent aussi avoir des conséquences sur le plan professionnel. Un
grand nombre de personnes croient que la femme est trop émotive pour occuper des postes de
direction20. De même. En gestion des ressources humaines, les stéréotypes peuvent aussi se
manifester dans les processus de sélection, de recrutement et de promotion. L’âge, la race et la
religion mènent également à certaines formes de stéréotypes : « les musulmans sont tous des
terroristes », « les blancs sont tous des racistes … ». 

Egalement, dans le domaine de l’enseignement, nombreux sont les facteurs, les


préjugés et les stéréotypes qui poussent les enseignants à montrer des espérances faibles pour
un élève :
1) Le statut économique et social
2) La race/ l’appartenance à une ethnie.
3) Le type d’école, le lieu où l’école est située.
4) L’apparence: la façon dont s’habillent les élèves peut influencer les attentes des
enseignants.
5) Le langage employé: si l’élève ne parle pas ou mal le français, l’enseignant aura des a
priori à son sujet.
6) Le manque d’organisation de la part de l’élève.
7) L’empressement: l’immaturité ou le manque d’expérience peuvent être confondus avec les
capacités d’apprentissage, entraînant des attentes faibles de la part de l’enseignant.
8) L’effet de halo: certains professeurs généralisent une caractéristique que peut avoir
l’apprenant et en tirer des conclusions non fondées sur les aptitudes de l’élève ou son
comportement.
9) L’endroit où s’assoit l’élève.
10) Les commentaires négatifs sur les élèves.
11) Le placement de l’élève dans un groupe qualifié de faible peut engendrer des
représentations négatives.

O       L’effet de halo

20 : Nicole Côté. La perception in « la dimension humaine des organisations » Gaeten Morin éditeur. P. 114.
L’effet de halo consiste à se faire une opinion générale d’une personne à partir d’une
seule caractéristique. Le percevant, peut ainsi croire qu’une personne ponctuelle est aussi
honnête, active ou même généreuse, alors que ces différents traits de caractère ne sont pas
obligatoirement liés à la ponctualité ni au rendement.

O       Les projections

La projection est un phénomène qui consiste à nier ses propres traits de caractère, ses
sentiments et ses angoisses en les attribuant à l’autre. Ce processus est très courant chez les
individus qui éprouvent des sentiments négatifs à leur égard21, et qui refusent à admettre en
eux-mêmes.

Ainsi, les personnes timides peuvent facilement déceler ce trait chez les autres plus
que ne le font les autres personnes.

O L’effet pygmalion

Pygmalion était un roi légendaire de Chypre issu de la mythologie grecque. Etant


sculpteur, il tailla dans la pierre la statue d’une femme superbe et finit par en tomber
amoureux. Il demanda donc à Aphrodite (la déesse de la beauté et de l’amour) de donner vie à
la statue, ce qu’elle fit. Ensuite, il épousa sa propre sculpture devenue femme.
Les sociologues ont été les premiers à s’intéresser à ce phénomène, c’est-à-dire qu’en
croyant que quelque chose est vrai on peut la rendre réelle. C’est une prophétie autoréalisée
ou une prédiction réalisante.

La nature humaine étant sociale, par essence, les individus ne vivent que dans un
groupe, en interaction avec les autres membres et ne pourront se passer de ce que pensent les
autres d’eux. Cette relation, vitale pour les Hommes, se fait à partir des perceptions
mutuellement construites par eux, se tissent dans les groupes et laissent, souvent, surgir des
erreurs portées sur les personnes.
Qu’en est-il alors de l’impact des perceptions dans le monde organisationnel ? Peut-on
échapper de cet univers qui emprisonne notre liberté de voir et de sentir les choses ?
Nous tenterons, dans la partie qui suit, d’apporter des réponses à ces questions.

21 Nicole Côté. La perception in « la dimension humaine des organisations » Gaeten Morin éditeur, p. 107.
IV- LA PERCEPTION, LE MANAGEMENT ET L’ART

1- L’effet de la perception sur le comportement organisationnel


La perception dans le domaine du travail revêt une grande importance du moment où
la perception de la situation en organisation devient la base des comportements des individus.
Dans la plupart du temps, ces derniers ne sont pas conscients de l’impact des perceptions sur
les relations et par conséquent sur le rendement au travail. La productivité, l’absentéisme sont
entre autre des réactions relatives aux perceptions des employés d’une part de la relation entre
les personnes et, d’autre part de la satisfaction aux conditions de l’organisation.

 La productivité
Etre productif au travail n’est pas perçu de la même manière par chacun. Cela dépend
de la perception que ce fait l’individu de sa situation dans l’organisation. Certains peuvent
être influencés par des enjeux comme le salaire, les conditions, la nature du travail… mais
pour d’autres, la satisfaction au travail engendra une productivité et un rendement que s’ils
perçoivent que l’effort déployé est estimé par les autres.
 L’absentéisme
Comme pour la productivité, l’absentéisme est le résultat d’un jugement perceptuel.
Bon nombre d’individus préfèrent ne pas contribuer à la promotion du travail et estiment que
la non présence vaut mieux que de changer le milieu où ils s’y trouvent. L’insatisfaction au
travail, l’inexistence des occasions pour décrocher des promotions, le mépris de la nature de
sa tâche…mèneront la personne à être agressif avec les autres, indifférent à la productivité.
2-L’art, comme manière de percevoir le monde
En quel sens peut-on dire que le regard de l’artiste sur le monde diffère du regard
habituel sur les choses ?

Bergson y donne une réponse dans ce qu’il appelle l’élargissement de la perception  :


« Il y a, en effet, depuis des siècles, des hommes dont la fonction est justement de voir et de
nous faire voir ce que nous n’apercevons pas naturellement. Ce sont les artistes »22. Pour
Bergson, l’art sert à nous montrer « des choses qui ne frappaient pas explicitement nos sens et
notre conscience ».
La peinture est un art où s’expriment largement les différences perceptuelles. Les
formes et les couleurs dans le même tableau sont perçues différemment par les percevants.
Par ailleurs l’artiste est tout le temps curieux de connaître les perceptions des autres.
Pour lui, un tableau c’est toute une histoire, tout un vécu, des émotions qu’il projette à travers
cette manière de se libérer.
L’artiste perçoit pour percevoir. Quand il regarde une chose, il la voit pour elle et non
pas pour lui, il perçoit pour le plaisir. Et comme le dit si bien Bergson, c’est parce que l’artiste
est « détaché de la réalité », ou encore «moins adhérent à la vie » que sa perception est plus
large et plus profonde du monde.
La manière dont chaque personne perçoit sa personne, l’autre, le travail…présente un
intérêt particulier dans le comportement humain car delà découle le type de relation que
l’individu entretient avec le monde qui l’entoure. Etre conscient de ses propres perceptions de
l’extérieur aide à évaluer ses actions, à promouvoir ses rapports et à se rendre compte de ses
erreurs pour les éviter ultérieurement.
Dans la dernière partie de ce travail, nous essaierons de donner quelques conseils afin
que nos perceptions soient plus perspicaces.

22 : « La pensée et le mouvant » Bergson, p. 149-150


V- LA PERCEPTION CRITIQUE : POUR AVOIR DES
PERCEPTIONS PLUS PERSPICACES

Se tromper sur l’interprétation d’un fait ou d’un comportement n’est que chose
normale. En effet, la subjectivité de la perception peut nous amener à certaines erreurs, qui
par le fait d’en avoir conscience, nous permet déjà de réajuster le tir et de réorienter notre
perception.

La première étape est de se connaître soi-même .Il est important de s’interroger sur
soi, et de prêter attention aux différents aspects de notre personnalité .Il est donc essentiel de
mieux se connaître, afin de mieux connaître l’autre.

Etablir des relations, communiquer, reconnaître les différences et les similitudes


constituent également la base d’une perception plus objective. L’interférence entre le
percevant et la cible ne peut que faciliter la compréhension, et permet d’éviter toute
perception basée sur des stéréotypes ou des préjugés.

Par ailleurs, admettre la diversité des personnes engendre le respect des différences
culturelles. Entrer en relation avec autrui demande de la personne de ne pas faire des a priori
mais de formuler des hypothèses ou des idées au sujet des autres et les vérifier en suite par
plus d’informations ou de preuves.
Au terme de ce travail, il est à noter que notre souci majeur est de sensibiliser les
personnes au fait qu’aucune réalité n’est pour autant objective. Le rapport qu’on entretient
avec le monde rend nos jugements subjectifs, nos perceptions orientées et nos comportements
conditionnés.

Etant donné que la perception est le processus psychologique par lequel les individus
sélectionnent, organisent et interprètent les faits, l’expérience acquiert de ce fait un aspect
personnel voire subjectif.

Nous avons expliqué auparavant que la manière dont les personnes se perçoivent est
particulièrement importante car delà se dessine le rapport entre eux et la nature de leur
comportement. Souvent, le processus de perception peut aboutir à des erreurs de jugement et
cela altère la relation entre les individus. Le sujet revêt une grande importance lorsque les
erreurs de perception affectent le comportement au sein des organisations. La perception de
son travail, de ses rapports avec autrui et de sa situation implique d’énormes résultats sur le
rendement, l’efficacité et la productivité de l’employé.
CONCEPTS ET MOTS CLEFS

Perception

Sensation

Perception sociale

Effet de halo

Apprentissage

Préjugés

Erreurs perceptuelles

Illusions perceptives

Attribution

Processus de perception

Attribution

Gestalt
BIBLIGRAPHIE

C. BONNET et all, Psychologie Cognitive, Collection Grand Amphi

Hellriegel, Slocun, Woodman , Management des Organisation, Nouveaux Horizons, 1996.

Jean-Pierre GRUÈRE & Patrice STEAM, Faciliter la communication de groupe ; Edition


des Organisations, 2002.

Jean-Pierre GRUÈRE, La Communication Interpersonnelle en 48 fiches ; Edition des


organisations,1995.

Joseph A. DEVITO, Les Fondements de la Communication Humaine, Edition Gaëten


Morin, 1993.

Nicole CÔTÉ, « La perception » in La Dimension Humaine des Organisations ; Edition


Gaëten Morin, 1994.

Nicole CÔTÉ, « La perception » in La Personne dans le Monde du Travail.


R.J. Vallerand, « Les perceptions et les cognitions sociales » in Les Fondements de la
psychologie sociale, Gaëtan Morin éditeur, 1993.

Vous aimerez peut-être aussi