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marocaine
Nul ne pourra nier que les suites de la crise du Covid-19 seront tous
azimuts. Elles le sont déjà.
Elles n’ont épargné ni région du globe, ni secteur. La raison en
est la virulence et la forte mobilité du virus, conjuguée à la forte
contagiosité de la pathologie. Mais la raison en est aussi que
l’économie mondiale est devenue fortement mondialisée, sous
l’effet de la délocalisation de la production et de la globalisation
des échanges. Les flux des hommes, des marchandises et des
capitaux n’ont plus de frontières. En fait, L’incidence de cette
pandémie dépasse largement la grande récession de 2009 et la
grande dépression des années 30. Tous les économistes,
spécialistes et analystes s’accordent à dire que les effets du
Covid-19 seront particulièrement profonds, douloureux,
durables et en cascades. Ils conviennent que ces répercussions
se traduiront in finé par une grande récession économique. Les
premières prémisses de celle-ci apparaissent déjà au niveau du
secteur secondaire et du secteur tertiaire, y compris les
professions libérales. Elles retentissent tant sur le secteur
officiel que sur le secteur informel et la perte de confiance a
sérieusement gagné les marchés de capitaux et de valeurs
mobilières.
1
Si la crise du Covid-19 ne fait que commencer, son impact
économique se fait déjà sentir. Personne ne sait quand la situation
«se normalisera», si le qualificatif de «normal» revêt encore une
signification. En tout cas, ce ne sera pas pour demain!
2
L’analyse des derniers indicateurs conjoncturels disponibles,
quoique provisoires, a permis de révéler que le comportement des
différents secteurs de l’économie marocaine, face à la crise sanitaire,
n’a pas été homogène. En effet, certaines branches d’activité,
particulièrement celles qui dépendent de la demande étrangère, ainsi
que celles à l’arrêt, par décision des pouvoirs publics, ont été
lourdement impactées, alors que d’autres l’ont été à des niveaux plus
ou moins déplorables.
3
– La demande étrangère au Maroc présenterait un fléchissement
significatif. Elle passerait de +1,3 % à – 3,5 %, conséquence directe de
la régression vertigineuse des commandes en provenance de
l’Europe occidentale.
4
Automobile : Le secteur représente 27% des exportations totales. 97 %
des voitures nationales, exportées vers le monde, sont destinées aux
marchés français, espagnol et allemand. Les répercussions de la
crise ont touché 18 000 employés et 250 équipementiers. L’objectif de
production annuelle tant scandé de 1 million de véhicules d’ici l’an
2022 et d’un chiffre d’affaire à l’exportation de 100 milliards de DHS
sont fortement compromis.
Hydrocarbures : Sous l’effet de l’arrêt de l’activité économique, des
mesures de confinement et de la forte contraction de la demande qui
s’en est suivie, les cours du brut sur le marché international ont
essuyé des baisses spectaculaires. Le prix du baril s’est effondré à 11
dollars vers la 3ème semaine d’avril 2020, se retrouvant ainsi à son
niveau du milieu des années 80. Au Maroc, les prix à la pompe se sont
ainsi repliés à 20-25 %. Ils devraient baisser davantage vers la fin du
mois d’avril, avec l’effondrement du prix du baril à – 37 dollars.
Immobilier : La combinaison de plusieurs facteurs a fait que ce secteur
connaissait déjà un marasme depuis 2010. Le Covid-19 n’a fait
qu’enfoncer le clou, à telle enseigne qu’il est permis de dire que le
secteur ne verra plus le bout du tunnel avant longtemps !!
Offshoring : Considéré comme l’un des métiers phares du Royaume,
l’offshoring semble ne pas échapper aux lourdes conséquences de la
pandémie. Si ce secteur a réussi en 20 ans à briller de mille feux, avec
un développement exponentiel, illustré par une croissance à deux
chiffres (28% en 2019), la crise sanitaire risque de le tirer brutalement
vers le bas. Le chiffre d’affaire du secteur a régressé de 10 à 15 % au
mois de mars 2020. Les professionnels pensent que cette régression
passerait à une fourchette de 35 à 45%, d’ici le mois de juin prochain.
Finances publiques : Les répercussions internationales de la pandémie
et le gel de l’activité économique, se traduiraient inéluctablement par
un manque à recouvrer pour le Trésor Public, au titre des recettes
fiscales et douanières.
5
Transfert de devises : A l’image de plusieurs pays du globe, la
pandémie va avoir raison de trois principales sources de devises pour
le Maroc, qui vont tarir pour une longue période, au moins pour deux
années. Il s’agit en l’occurrence des recettes touristiques, des
rapatriements des marocains résidents à l’étranger (MRE) et des
investissements directs de l’étranger (IDE).
Main d’oeuvre : S’agissant du volet social, pas moins de 726 000
employés ont été mis au chômage, des suites des difficultés ou de la
cessation d’activité de 142 000 entreprises. Cette population, qui s’est
retrouvée brusquement désœuvrée, est à ajouter aux 1 100 000
chômeurs recensés à fin 2019, soit un total de 1 826 000 chômeurs
permanents et partiels. Ces effectifs ne tiennent pas compte, bien
entendu, du chômage conjoncturel observé dans le secteur informel,
par suite de la pandémie. Compte tenu de ces chiffres, le taux de
chômage au secteur formel passe de 9,2 % en 2019 à 15%.
Demande : «Sans pouvoir d’achat, point d’économie ». Les 1 826 000
de chômeurs recensés, correspondent en fait à plus de 1,8 million de
ménages (soit 9 millions de consommateurs environ), qui n’ont pas
de pouvoir d’achat. Cette situation, conjuguée à la baisse tendancielle
de la consommation en général, qui sera observée comme réaction
logique des ménages au lendemain de la crise, rejaillira
inéluctablement sur la demande intérieure, et partante sur la
production.
Banques et assurances : Il va sans dire que ces deux secteurs, en
particulier, ont toujours connu des périodes d’expansion continue en
période normale. Aussi, vu la nature de leurs activités, sont-ils plutôt
épargnés par un impact direct du Covid-19. Enregistrant tout au plus
un certain manque à gagner, dû à la crise que connaissent leurs
clients, lesdits secteurs sont, aujourd’hui plus que jamais, les mieux
indiqués pour venir à la rescousse de l’appareil productif, dont ils
dépendent pourtant fortement.
Télécommunications : A quelque chose malheur est bon! Le secteur
des télécommunications semble être le rescapé de la crise
pandémique, dans la mesure où il aurait réalisé globalement une
envolée en termes de chiffre d’affaires, pendant la période de
confinement. Les appels téléphoniques et l’internet auraient servi en
effet comme refuge salutaire pour bon nombre de gens, dans ces
moments difficiles. L’alimentaire et les produits de consommation
courante semblent aussi avoir tiré leur épingle du jeu, en maintenant
leurs ventes à des niveaux élevés.
Des mesures économiques prises par les pouvoirs publics au Maroc pour
combattre le fléau
6
L’opinion publique internationale a salué les mesures proactives
prises par le Maroc pour anticiper les effets de la pandémie. Ces
mesures, qui sont déclinées sur la base d’un plan d’action intégré,
sont nombreuses et se situent dans plusieurs domaines. On peur en
citer notamment :
La création du Comité de Veille Economique (CVE) : Cette cellule
interministérielle, placée sous la présidence du ministre chargée des
finances, a été chargée du suivi des répercussions économiques de
l’épidémie Covid-19 et de la définition des mesures à prendre en vue
d’en atténuer l’impact. Les principales mesures prises par le CVE se
résument comme suit :
7
– Assouplissement des procédures de déclaration des salariés
affiliés à la CNSS qui sont en arrêt provisoire. Les déclarations
peuvent être faites sur une fréquence hebdomadaire, à compter de ce
mois d’avril 2020.
La Création d’un fonds national de solidarité pour la gestion de l’épidémie
(compte d’affectation spéciale) : Ce fonds est dédié à la gestion de la
pandémie du Covid-19. Doté d’un montant initial de 10 milliards de
dirhams, imputé sur le budget général, ce fonds sera consacré à la
prise en charge des dépenses de mise à niveau du dispositif médical,
en termes d’infrastructures adaptées et de moyens supplémentaires à
acquérir dans l’urgence.
8
Mesures en relation avec les finances publiques : Comme suite à la
baisse prévisionnelle de ses recettes fiscales et douanières et en vue
d’adapter ses prévisions de finances publiques aux impératifs du
contexte pandémique, l’Etat s’est attelé à réviser en baisse, pour
l’année budgétaire 2020, les crédits ouverts et autorisés au titre de la
loi des finances en vigueur. Cette mesure a été également étendue
aux budgets des établissements et entreprises publics et des
collectivités territoriales. L’objectif consiste à ne retenir, désormais,
que les crédits correspondant aux dépenses réputées urgentes,
nécessaires et prioritaires, avec réduction du train de vie de l’Etat et
de ses démembrements.
9
– Penser à bâtir le nouveau modèle de développement sur une vision
plus sociale de l’économie, à donner une nouvelle impulsion au
secteur de la santé, aux activités génératrices d’emploi et de revenus
(PME, PMI, TPE et start up et auto-entrepreneuriat) et à l’éducation
nationale, parents pauvres des politiques publiques.
– Le budget de l’Etat (loi des finances), tout comme ceux des EEP et
des collectivités territoriales, ne doivent plus être considérés comme
de simples actes de prévision et d’autorisation de crédits. Ils
devraient traduire la déclinaison technique des politiques publiques
et sectorielles et constituer un moyen décisif, pour élaborer des choix
économiques plus judicieux, sur la base de programmes pluriannuels
de développement inclusifs, cohérents et intégrés.
10
– L’outil fiscal n’est pas du reste. Il doit moduler sa fonction de simple
pourvoyeur de fonds à l’Etat et renouer avec la plénitude de ses
fonctions classiques. La fiscalité est censée constituer un instrument
privilégié au service de l’Etat, en vue d’encourager certaines branches
d’activité créatrices de richesses et de valeur ajoutée. Or, le constat
est que la fonction économique de l’outil fiscal, en tant que vecteur
d’incitation et de résorption du secteur informel, à travers
l’élargissement de l’assiette et la lutte contre la fraude et l’évasion
fiscales, a été sacrifiée à l’autel de l’équilibre budgétaire. Il en est tout
aussi bien de sa fonction sociale de redistribution des revenus et de
justice sociale. Il est tout à fait possible de concilier entre un niveau
acceptable de pression fiscale, un financement optimum des
dépenses publiques, et un déficit budgétaire soutenable. Les
dernières Assises fiscales regorgent d’idées et de propositions
novatrices en la matière.
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Il a réappris à nouveau à vivre en communauté et à renouer avec les
vertus de solidarité et d’entraide, qui, depuis des générations,
semblent avoir pris le dessus sur les pulsions d’individualisme et
d’égoïsme.
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