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3.23 CONSIDR ATIONS GÉNRALES , etc..

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et cette richesse de nuances qui ajoutent tant
de charmes aux tableaux, quand elle s'unit à
la perfection du dessin.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES Il appartenait à un Ministre protecteur des
sciences , dont il reculé les bornes, même au
SUR les Couleurs, suivies d'un procédé pour milieu du soin des affaires publiques, dé vou-
préparer !tue couleur bleue aussi 'belle que loir qu'on fît pour lapeinture ce qu'il a fait pour
l'outremer. plusieurs autres arts ; qu'on éclairât par la chi-
mie les procédés qu'elle emploie dans la fabri-
Par le Cit. THENAIID. cation des côuleurs ; qu'on rectifiât les uns
qu'on proscrivît les autres ; qu'on en- créât de
-nouveaux , et qu'on les assujettît tous. à une
QtJ0IQUE les couleurs aient déjà été l'objet .marche constante et certaine. Il a bien voulu,
d'un grand nombre de recherches, à peineen
connaissens nous qui possèdent le degré de me charger de ce travail important. Si je n'a-
perfection; qu'exige la peinture. -
vais consulté que mes forces, la crainte de ne
Quelques - unes manquent d'intensité; pas réussir m'eût sans doute empêché de l'en-
sieurs ne sont point assez vives ; la plupart ne treprendre ; mais plein du désir de découvrir
sont pointassez pures, et toutes alors ne pro- dans la matière de nouvelles et d'utiles pro-
duisent, Même sous le pinceau le plus habile, priétés, guidé d'ailleurs par les sages avis des
que des effets beaucoup moins frappons. Il en. Cit. rincent et illérinze'e , sensible sur-tout à la
est encore qui séduisent par l'éclat dent-elles marque d'estime dont le Ministre m'honorait,
brillent ; mais peu solides, elles ne sauraient je me suis empressé de remplir ses intentions
résister aux agens. destructeurs qui se trouvent en commençant des recherches qui ont un but
dans l'atmosphère. Ce sont celles-ci sur-tout d'utilité réelle , et qui ne peuvent être que
qui, dans tous les teins, furent pour les peintres plus ou moins avantageuses à la science.
la source des- plus justes regrets. Combien de De toutes les couleurs qui manquent à la
,leurs ouvrages sont à peine vénus jusqu'à nous, peinture il n'en est aucune qui lui soit plus
ou au moins ont éprouvé du tems des altéra- nécessaire que le bleu ; on peut même dire que
tiens si.profondes , qu'ils sont loin d'êtres au- c'est celle dont elle-a le plus besoin.
jourd'hui ce. qu'il S étaient- il y a un siècle! En effet , elle trouve dans les combinaisons
Qu'on examiné les chef-d'ceuvres des grands du plomb avec Tox-ygène , des blancs, dont le
maîtres anciens, même de ceux qu'on appelle seul défaut est de s'altérer légèrement avec le
coloristes, on y voit sans doute des parties a & teins. Le fer lui fournit des rouges et des jaunes,
mirables, mais la plupart,
art, noircis ou décolorés, auxquels il ne manque que peu d'éclat ; et elle
ont perdu la fraîcheur qu'ils avaient d'abord, possède dans l'arsenite de cuivre, un vert, qui
et Volume 15.
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ne laisse à désirer qu'un degré de .plus d'inten- réussit constamment ; elle eut encore plus de.
sité. L'outremer lui offre, à la vérité, le bleu succès avec le phosphate de cobalt, et j'ob-
le plus beau et le plus solide qui puisse exis- tins aussi une belle couleur en me servant de
ter; mais cette couleur...autrefois si commune, borate. Mon premier soin fut alors d'essayer s'il
que le prix en était assez modique pour que serait possible de substituer, dans ces différen-
tous les peintres pussent l'employer, est deve- tes opérations, les autres bases salifiables à
nue si rare aujourd'hui, qu'elle se paie plus l'alumine; pour cela je variai les doses de cha-
qu'au poids de, l'or, ,;et que la miniature seule cune d'elles ; je graduai le feu avec beaucoup
pour ainsi dire , peut en. faire usage. Dans de ménagement : voici ce qu'ont produit tous
toute autre circonstance, on est presque tou- ces essais.
jours obligé de se servir de bleu de Prusse. Ce
bleu est bien exempt de la plupart des incon- 1". La silice m'a donné une matière fritée
véniens que présente l'azur;' il est -vraiment et violette.
céleste et si intense qu'il paraît noir ; il se ré- 2. La magnésie, une substance d'un blanc
duit facilement en poudre ; il se mêle aussi bien grisâtre.
avec l'huile qu'avec -la gomme ; il réunit enfin 3°. La chaux, la halite et strontiane ont dé-
toutes les qualités, si on en excepte une seule, composé le sel, et l'oxyde absorbant l'oxygène,
la solidité ; mais ce défaut est le plus à crain- est devenu noir.
dre parce qu'il est sans' remède. Qu'on jette les 4c. La potasse et la soude sont les seules qui
yeux sur un tableau moderne ; le ciel qui en est aient formé un bleu vif à la vérité, mais sen-
d'abord admirable, perd bientôt de son éclat ; siblement violet, et qui d'ailleurs ne pouvait
il s'altère, il devient promptement vert, et dès- sécher.
lors on n'y reconnaît plus celui de la nature.
Je devais donc .commencer par rechercher Convaincu d'après cela ,que l'alumine était
,un bleu qui pût Suppléer l'outremer. Le trouver, la seule base salifiable, qui pût par la calcina-
était un problème dont la solution ne me pa- tion avec les sels de cobalt former une couleur
raissait que difficile et non pas impossible. je bleue, il ne me restait plus qu'à déterminer
.le résolus beaucoup plutôt que. je ne l'espérais. quel était celui d'entre eux qui donnait la plus
J'avais observé que le beau bleu qui orne les belle et la plus pure. Je ne tardai point à re-
vasei:de la manufacture de Sèvres, était fait avec connaître que le bleu du borate égalait à peine
de l'arseniate de cobalt ; je pensai qu'en faisant celui qu'on obtenait avec les autres sels de co-
un mélange exact de ce '.Sel et d'almnine r&' balt; et remarquant d'ailleurs que son prix se-
cemment :précipités , on obtiendrait peut-être rait beaucoup trop considérable , je ne crus
le même résultat. Je fis l'expérience , elle eut pas devoir le soumettre à de plus longues épreu-
ui plein succès ; répétée plusieurs fois , ves. Je portai donc. toute mon atter tion sur les
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1752 coNsinrRATTorrs ALES
SUII: LES COULEURS'.
phosphates et les arseniates ; je les mêlai en. à basde phosphate, 1 de phosphate, r,5; 2 et 3
proportions différentes avec l'alumine , et à d'alumine. Avec moins d'alumine , on obtient.
force d'essais, je parvins bientôt à trouver les des nuances violettes ouvertes ; avec plus d'alu-
meilleures. mine , il en résulte des nuances bleues , mais
1". Partie égale d'alumine et de phosphate moins foncées. Celles des arseniates m'ont paru
m'ont donné un bleu tirant sur le vert. constamment, quelle que frit la quantité d'alu-
2e. 1,5 d'alumine et 1 de phosphate m'ont mine moins vives et moins intenses que celles
donné un bleu assez beau. des phosphates, et celles des phosphates elles-
mêmes le sont moins: que l'outremer à cent
3'. 2 d'alumine et i de phosphate m'ont francs l'once.
donné un bleu très-beau , très-vif et très-pur. Au reste, on conçoit que le coup de feu
4.. 3 d'alumine et de phosphate m'ont
1 doit singulièrement influer sur le ton que
donné un bleu presque aussi beau que le pré- prend la couleur. J'ai fait à cet égard plu-
cédent. sieurs observations qui pourront servir de gui-
5e. 4 d'alumine et 1 de phosphate m'ont de. Quand le mélange se compose-, de parties
donné une nuance moins riche , mais pure. égales, le- coup de feu nécessaire est le rouge
cerise ; il doit être plus fort , si la quantité:
6'. 5 d'alumine et i de phosphate m'ont d'alumine', est phis grande ;. il ne faut pas..
donné une nuance d'un bleu pur, mais en- qu'il soit trop violent, la couleur serait moins
core moins foncée. brillante et moins. intense. En général, pour
1".,x d'alumine et i d'arseniate M'ont donné saisir le degré de feu le plus convenable,
une nuance violette. faut retirer de teins à autre , de la matière du
2°. i d'alumine et i d'arseniate m'ont donné creuset, et observer avec soin la teinte qu'elle'
un bleu foncé vif et pur. a. Quoique cette règle soit assez certaine
elle ne doit pas cependant dispenser , 'avant
3e. 2:d'alumine ét i d'arseniate m'ont donné d'opérer en. grand , de consulter soi-même-
une couleur presqu'aussi riche que la précé- l'expérience un grand nombre de fois-; car
dente. malgré l'habitude que j'ai acquise , il m'est
4.. 3 d'alumine et 1 d'arseniate m'ont donné arrivé , comme on le verra dans les. échantil,
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une couleur encore moins foncée , mais tou- Ions que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Ins-
jours pure. titut,. de ne point arrêter l'opération à pro,
pos:, et d'obtenir des tonsplUs.oumoins foncés
Ainsi les proportions les plus avantageuses et plus ou moins brillans.
sont : pour le bleu à base d'arseniate , i d'ar- La manière de préparer l'arseniate et la
seniate et i , 1,5, 2 d'alumine; et pour le bleu phosphate de cobalt na pas. moins d'influence
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134 CONSIDRATIONS Gi,'NRALES SUR LES COULEURS.. 135
que la température sur les résultats de l'ex- la liqueur pour enlever l'acide qui n'est point
périence. On ne saurait prendre trop de pré- en 'combinaison réelle ; alors en l'étendant
cautions pour en séparer le fer que la mine d'eau, et y versant du phosphase de soude
de cobalt contient toujours. Sa présence nui- on forme du phosphate de cobalt , qui se, dé-
rait singulièrement à la pureté de la couleur ;. pose sous la forme de flocons d'un violet foncé..
c'est pourquoi je me permettrai d'entrer dans Une partie de mine donne une demi-partie de
quelques détails à ce sujet. phosphate de cobalt ; on en retire aussi la
Pour faire de l'arseniate de cobalt avec cette même quantité d'arseniate. De là on peut fa-
mine, que je suppose composée , comme celle cilement estimer le prix du bleu, soit à base
de Tunaberg dont je me suis servi, de soufre, d'arseniate , soit à base de phosphate. Le pre-
d'arsenic, de fer et de cobalt , je la change mier calterait au fabricant, depuis 20 francs
par l'acide nitrique en acide sulfurique., et jusqu'à 29 francs les cinq hectogrammes ; 29:
en arseniate de fer et de cobalt ; après avoir' francs, s'il était formé de partie égale d'alu-
évaporé la liqueur pour en dégager l'excès d'a- mine et d'arseniate 23 francs, si la quantité
cide nitrique, je l'etends d'eau , et j'y ajoute d'alumine était double .de celle de Parseniate
peu-à-peu une dissolution faible de potasse et 20 si elle était triple. Le second ne coûterait
qui en sépare tout Parseniate de fer sous la presque pas davantage, parce qu'il peut con-
forme de flocons blancs : alors filtrant et ajou- tenir un tiers plus d'alumine que le- preinier,
tant de nouveau de la potasse toujours éten- et être aussi intense et même plus intense
due. d'eau , j'obtiens un beau précipité rose qui que lui.
est farseniate de cobalt. On ne doit pas mettre. Ces divers résultats , quoique très-satisfai-
un excès d'alkali ; le précipité serait en partie sans , me laissaient encore beaucoup à désirer.
décomposé ; il deviendrait bleu et ne serait Mes recherches eussent été presque infriictueu-
plus si propre à remplir l'objet qu'on se pro- ses , si ces couleurs, belles en. apparence, n'eus-
pose. De toute autre mine de cobalt, on pour-. sent point été d'un bleu parfait, et si à un em-
rait par un moyen semblable ou légèrement. ploi facile elles n'eussent point réuni la pro-
modifié , obtenir l'arseniate de cobalt. priété d'être inaltérables. Les Cit. Vincent et
Dans la préparation du phosphate de co- Mérimée, dont les conseils m'ont été si utiles,
hait , il faut suivre un autre procédé. On grille ont bien .voula en faire un grand nombre- d'es-
d'abord la mine, jusqu'à c.e qu'il ne s'en dé- sais , soit à la gomme soit à l'huile; tous ont
gage plus de vapeurs arsenicales malgré la réussi au-delà de leurs espérances on peut ju-
violence d'un feu long-tems soutenu ;. puis on ger de leur beauté par ceux que j'ai eu l'honneur
la traite -par l'acide nitrique ; le fer s'oxyde de mettre sous les yeux de la Classe. L'un de
en rouge et ne se dissout pas ; par la filtra, ces essais, qui est d'outremer de première qua-
tion on le sépare ; ensuite on fait rapprocher lité diffère si peu des autres, qu'il est presque
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136 CONSIDÉRATIONS G TJ\-.É'R ALES etc. 137
impossible de le reconnaître (1). Je ne sais si
leur solidité sera aussi grande que leur éclat est
frappant; le teins seul peut le prouver ; mais
tout semble nous le promettre. Exposé depuis MÉMOIRE
deux mois à une lumière vive, ils n'ont subi
jusqu'à présent aucune espèce d'altération; leur, SUR l' Administration des Mines en Allemagne,
couleur, dans son état de pureté, n'est atta- et sur les lois relatives à cette partie.
quée à la température de l'atmosphère, ni par
l'acide muriatique oxygéné, ni par aucun des Par le Cit. Du HA auE L père , membre de l'Institut de
acides non plus que par les alkalis et France , et inspecteur des mines (1).
connus'
l'hydrogène sulfuré. Or si on considère qu'il
n'existe pas dans la nature de corps plus des-, DAN, tout l'Empire d'Allemagne, ainsi qu'en
tructeurs que ces agens auxquels elle résiste, Bohème et en Hongrie , les mines et minières
que l'art n'en crée pas de plus puissans ; si on ont de tout teins été regardées" comme proprié-
observe d'ailleurs que soixante jours d'exposi- tés nationales ; l'Empereur et tous les Elec-
tion au soleil, doivent produire plus d'effet que teurs ont en conséquence, et depuis des siècles,
plusieurs années dans l'ombre, on sera forcé fait des lois à ce sujet, et des règlemens qu'ils
de convenir au moins, qu'on peut concevoir ont successivement changés ou étendus suivant
les plus justes espérances, et qu'on a le droit les circonstances. L'expérience leur a appris Écbies des
de dire, que si les expériences ne sont point en- que pour tirer le parti le plus avantageux de mines.
core assez décisives pour convaincre l'homme toutes ces substances enfouies dans la terre, il
sage, celui qui ne juge jamais sans examiner était nécessaire de faire instruire des sujets,
avec attention, elles sont néanmoins plus que qui les a portés à ériger des écoles où l'on en-
suffisantes pour le persuader. seigne tout ce qui est relatif à l'exploitation
(I) Les essais à l'huile d'outremer à IO° francs l'once, e. (1) Quoiqu'un Mémoire du Cit. Daubuisson , inséré
de bleu à base d'arseniate et de phosphate , ne peuvent se dans le n°. 61 (t-orne ) de ce Journal, traite des mêmes
distinguer : mais si au lieu d'huile on emploie de la gomme,. objets , relativement aux mines de la Saxe , nous croyons
ils deviennent moins difficiles à reconnaitre ceux d'outre, cependant devoir publier celui-ci , qui a été lu à la Con-,
raee sont alors un peu plus intenses que les. a.utres. férence des mines , il y à déjà plusi,?,urs années. Il est un.
extrait des Voyages nzétallurgiques de Jars et Duhamel
voyages faits il y a près d'un demi-siècle. La conformité
qu'on observera entre plusieurs articles de ce Mémoire , et
de celui du Cit. Daubuisson , servira à prouver que les lois
sur les mines n'éprouvent (lue peu de cliangernens en Aile-
eagne,

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