Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
AS
SI
M
Table des matières
Le mot du directeur de Collection
Remerciements
Préface
Introduction
Chapitre 1 L’écosystème de la crise 2.0
Partie 1 Comprendre les crises sur les médias sociaux
1.1 Les autoroutes de l’information, ou la viralité d’une
information
1.2 Le bouche-à-oreille
1.3 Le phénomène du buzz
1.4 Bad Buzz et crises
1.5 Typologie des crises M
SI
1.6 Interview François Mathieu
AS
2.2 La socialisation
2.3 L’influence majoritaire
2.4 L’influence minoritaire : un indice manifeste
Partie 3 Les crises : risque ou opportunité ?
3.1 Les crises : un modèle narratif qui facilite la mémorisation
3.2 Un bad buzz est-il forcément préjudiciable ?
Chapitre 2 La place de l’entreprise dans la prévention et la gestion de crise
Partie 1 D’où naissent les erreurs stratégiques des entreprises et
comment y remédier ?
1.1 S’adapter à de nouvelles logiques de communication
1.2 Un manque d’expérience pour savoir répondre efficacement
1.3 La nécessité d’intégrer les consommateurs
1.4 Formuler des promesses et des engagements
1.5 La production de faux, que ce soit des profils ou des avis
Partie 2 Repenser la structure interne de son entreprise
2.1 S’adapter ou disparaître ?
2.2 Développer une culture sociale
2.3 Déployer une charte d’utilisation
2.4 Améliorer la circulation d’information
2.5 Améliorer les processus décisionnels
2.6 Identifier les personnes ressources pour créer une cellule de
crise
2.7 Comprendre la pensée de groupe
2.8. Interview d’Alexis Bernard
2.9 Interview de Patrice Hillaire
Partie 3 Le risque
M
3.1 Qu’est ce qu’un risque
3.2 Interview Francine Charest
SI
Partie 4 Organiser une veille
AS
culture Web ?
2.1 Interview de Flavien Chantrel
BY
M
2.2 Raté : DeepWater Horizon
SI
Chapitre 8 Ouverture et conclusion
AS
M
diffusion, puis à la curée qui se prépare jusqu’à l’hallali final.
SI
Au moment où ce livre partait à l’impression, un bad buzz lié à un soi-disant bug sur le
mur Facebook avait enflammé la Webosphère. A peine apaisé par un non-lieu, un autre
AS
bad buzz développait un nouveau brasier sur la toile. C’est l’opération « pigeons »
lancée par un entrepreneur français ayant lancé sa start up dans la Silicon Valley. Ce
nouveau bad buzz très relayé – tant sur la toile que dans les médias traditionnels – avait
BY
l’objectif d’influencer le gouvernement pour éliminer la taxe sur les plus values lors de
la revente d’une start up. Il a atteint son objectif puisque le gouvernement a amendé le
projet de loi à ce propos. A quand le prochain bad buzz ?
L’intérêt du livre d’Antoine Dupin et de Ronan Boussicaud que vous allez lire
maintenant, est multiple :
– c’est une des rares livres, voire le premier, pertinent sur le sujet.
– il est à la fois théorique et pratique, illustré par de nombreux exemples encore
tout frais dans nos mémoires.
– il fait l’analyse de ce phénomène tant sur le plan « communicationnel » que
psychologique.
– il prodigue aux marques qui en sont victimes tous les conseils pour réagir et le
désamorcer dès qu’il se présente.
M
SI
AS
BY
Remerciements
La rédaction de cet ouvrage a été une projet de longue haleine, ponctuée par
l’intervention de plusieurs professionnels que nous souhaitons remercier
chaleureusement : ils représentent tous des sources de qualité pour nous.
Nous remercions les intervenants de qualité qui ont bien voulu partager leurs
expériences : Gegory Pouy (Consultant en stratégies digitales), François Mathieu
(Responsable Contenu/Conversion portail MaVille.com), Francine Charest (Professeure
à l’Université Laval et directrice générale de l’Observatoire des médias sociaux en
relations publiques), Terry Zimmer (Consultant et enseignant dans les domaines de la
veille, de la communication et de la réputation en ligne), Setphane Pluchois (Co-
fondateur associé du cabinet conseil The Persuaders.), Alexis Bernard (Responsable
Communication 2.0 pour la SNCF), Loïc Chauveau (Directeur Social Media chez Marcel,
Publicis), Camille Alloing (Chercheur en innovations digitales), Cyril Rimbaud (Digital
Strategist et Creative Technologist chez Curiouser), Fadhila Brahimi (Dirigeante et
fondatrice de FB-Associés, spécialiste en stratégie de présence), Fabien Bareti (Directeur
M
Marketing expert de la télévision connectée & sociale), Patrice Hillaire (Community
Manager du Groupe La Poste).
SI
Nous remercions également les connecteurs qui nous ont permit de trouver les bons
AS
interlocuteurs, ou qui ont essayé, et de nous avoir aidé avec le sourire, Yaëlle Stein
Teicher (Responsable du Community management de Voyages- sncf.com), Philippe
BY
Khattou (Chef de Projet Marketing), Jérôme Deiss (Social Media Management France
Télévision), Franck LaPinta (Responsable Marketing Web et R.H 2.0 Société Générale).
Enfin, nous remercions des professionnels qui n’ont pas participé directement à cet
ouvrage, mais qui ont profondément influencés notre vision du web, notamment Brian
Solis, Cédric Deniaud, Frédéric Cavazza, Jeremiah Owyang et Fabrice Epelboin.
Nous vous remercions, vous lecteur, d’avoir acheter ce livre.
Antoine Dupin
Je remercie mon père et ma mère pour leur soutien et le modèle qu’ils ont été pour moi.
La fierté que je ressens à leur égard me pousse à toujours offrir le meilleur de moi
même. Je remercie ma femme Marjorie pour ses encouragements indéfectibles pendant
l’écriture de cet ouvrage, des mots qu’elle a su trouver pour me stimuler qui m’ont
permis d’aller toujours puiser le meilleur de moi-même.
Je remercie mes amis de tous horizons, grâce à qui chaque jour je découvre le monde
sous un regard neuf.
Un grand merci à ce cher Ronan, qui a agit avec beaucoup de professionnalisme et a
réussit à supporter mon perfectionnisme.
Je remercie tous les professionnels du web que je croise ça et là lors de conférences
dont les échanges passionnés m’accompagnent chaque jour dans une réflexion global
quant à mon métier.
Je remercie tout l’éco-système de Rennes qui m’a permis de grandir en me témoignant
leur confiance et en partageant leur expertise, que ce soit les blogueurs, les
entrepreneurs, les institutionnels, les universitaires ou les associatifs. J’ai un grand
plaisir à remercier particulièrement Flavien Chantrel, François Mathieu, Hugues Aubin,
Norbert Friant, Daniel Gergés, Simon Chignard, Richard De Logu et Pascal Plantard.
Je remercie l’équipe de l’agence Chalifour pour son soutien alors que j’arrivais au travail
les yeux cernés de nuits de relectures, notamment son président Christian, personnage
passionné et passionnant, qui m’a offert la chance de travailler au Québec, pays
d’adoption. Je remercie également l’Observatoire des Médias Sociaux de l’Université
Laval pour leur confiance en me proposant d’intervenir régulièrement.
Je m’excuse d’avance pour ceux que j’ai oublié, ils comprendront !
Ronan Boussicaud
M
SI
Je remercie ma mère Sylvie et ma sœur Audrey pour leurs encouragements et la
AS
Je vous vois ouvrir ce livre, découvrir les premières lignes pour essayer de comprendre
pourquoi vous deviez acheter celui-ci plutôt qu’un autre…
Il est certain qu’il y a désormais beaucoup de littérature sur le sujet du Web social et
pourtant il semble que vous soyez toujours perdus et n’arriviez pas à comprendre
comment utiliser de manière optimale les réseaux sociaux dans le cadre d’une stratégie
d’entreprise.
Vous travaillez peut être pour une marque, pour une agence ou êtes encore étudiant…
dans tous les cas, la réponse ne semble pas simple et vous êtes perdu sur un site
marchand ou bien chez votre libraire devant tant d’ouvrages souhaitant vous expliquer
comment faire.
La réalité est que ce qui rend compliqué le Web social, c’est surtout la peur que l’on peut
M
avoir de l’inconnu, de la nouveauté ou encore de mal faire car comme l’exprime
parfaitement le dicton « sur le Web, vous êtes aussi faible que le plus faible de vos
SI
maillons ».
AS
Aucun doute, le fait que les consommateurs puissent désormais s’exprimer et viraliser
facilement au plus grand nombre une information peut sembler être une perte de
maîtrise.
BY
Mais il ne s’agit que de montrer à tout le monde ce qui se disait déjà tout bas, il faut
accepter que vous n’avez jamais vraiment eu la maîtrise de votre marque.
Et ce n’est sans doute pas en ignorant le Web social que cela va venir…
Le Web est avant tout constitué d’une série d’outils mais il s’agit surtout d’une
évolution des comportements qu’il est essentiel de comprendre afin de pouvoir naviguer
sans crainte dans ce nouvel océan.
Cependant, avant même de s’intéresser aux outils il est indispensable de comprendre
que le web social vous invite plus que largement à revenir aux bases de ce qu’est le
marketing.
Quelles sont les valeurs ? Les codes ? À quoi sert votre marque ? Qu’est-ce qui
manquerait aux consommateurs si elle disparaissait ?
Comment inspirer et rassembler si vous ne savez répondre à ces questions?
Le Web social vous remet face à votre réalité !
Beaucoup trop de marketers se voient retourner dans le « brand book » quand on leur
pose de telles questions… À force de vouloir plaire au plus grand nombre, ils ont oublié
leur promesse initiale ou ne se remettent pas en cause pour essayer d’y répondre
toujours mieux.
L’exemple de Kodak dans ce sens est sans doute le plus marquant passant de 90% de
part de marché en 1976 au niveau mondial à la faillite en 2012.
Pourtant, c’est autour de valeurs que l’on rassemble des personnes, et sans cela, pas de
communauté… malgré votre page Facebook aux millions de fans difficilement gagnés
par des concours.
Ce n’est pas un hasard si Harley Davidson ou d’autres arrivent à sortir du lot.
Quand on achète une Harley Davidson, ce n’est pas simplement une moto que l’on
achète mais un style de vie et que vous aimiez ou pas les motos ou la marque, nous
avons tous une relative bonne compréhension de la marque.
Red Bull est en train de réaliser la même chose sur un créneau différent.
Alors quand arrive Internet, ces marques sont évidemment les mieux armées mais cela
ne suffit pas.
Le Web implique une organisation différente, car il fait sauter les silos que l’on retrouve
généralement dans les entreprises :
M
SI
– Silo entre les services, car le digital touche toute l’entreprise, des ressources
humaines à la finance en passant par le marketing.
AS
Alors évidemment, tout cela ne va pas se transformer d’un jour à l’autre dans
l’entreprise mais il faut comprendre que les consommateurs avancent, eux, leurs usages
aussi, et il est plus qu’indispensable que vous vous concentriez sur l’essentiel qu’est
votre marque, mais aussi sur la manière dont elle pourrait embrasser ces nouveaux
outils digitaux !
Ce livre est là pour vous expliquer comment !
Les 2 auteurs connaissent parfaitement les rouages de l’ensemble de ces outils et, à la
lecture de cet ouvrage, vous comprendrez comment ils fonctionnent.
Charge à vous ensuite de comprendre comment l’appliquer dans le cas de votre
entreprise, de vos problématiques, de vos valeurs.
Gregory Pouy
Grégory Pouy est un marketer français qui, à travers son blog essaie d’expliquer sa
vision du marketing en particulier à la lumière du digital. Après 12 années d’expérience,
il accompagne désormais les marques dans la compréhension et l’intégration du
digital.
M
SI
AS
BY
Introduction
d’apparence nouveau et soudain : Internet devenait social. Dès lors, deux périodes
s’opposaient logiquement et chronologiquement :
BY
Convenons-en, les terminologies pour qualifier le Web n’ont aucun sens. D’une part, car
l’internet statique existe encore à l’ère des interactions, et d’autre part, car Internet en
général a muté lentement, sans passer par des paliers spécifiques. Il y a eu de ce fait une
évolution, qui s’est faite par une démocratisation dans de nombreux domaines (hausse
des débits, acquisition d’appareils de captation numérique comme les caméras).
Révolution : « Changement brutal ».
Evolution : « Transformation progressive ».
Démocratisation : « Rendre accessible au plus grand nombre ».
La différence est notable car les internautes n’ont pas été confrontés à de nouvelles
technologies qui ont changé brutalement leur manière d’être en ligne. Non, ce sont leurs
usages sur le long terme qui ont façonné les technologies sur leur modèle
comportemental. Les médias sociaux, et autres sites sociaux, se sont forgés lentement
en fonction de l’utilisation qui en était faite. Par exemple, Twitter à ses débuts n’avait
pour vocation que de dire ce que vous faisiez à un instant T, comme « je mange », « je
dors ». Les événements comme les attentats de Mumbai, l’atterrissage sur l’Hudson
River ou encore la révolution Iranienne lui ont fait endosser un rôle de catalyseur de
l’information. Le slogan de la plateforme est passé de « que faites-vous ? » à « que se
passe-t-il ? », signe d’une évolution notable dans la diffusion de contenus, moins
centrés sur la personne et plus sur le monde.
Autre fait intéressant sur les évolutions technologiques : saviez-vous qu’une nouvelle
version de Facebook était réalisée tous les mardis, avec plus de 12.000 modifications par
mois (http://bit.ly/UVxaLL) ? Le secret de sa longévité, contrairement à ses nombreux
prédécesseurs (MySpace ou Friendster) est sa faculté à s’adapter aux usages et aux
humeurs de ses utilisateurs.
Brian Solis, expert des médias sociaux reconnu mondialement, définit leur essence
comme telle : « les médias sociaux sont avant tout une science sociale qu’une
technologie ». Il est de ce fait nécessaire de prendre du recul pour comprendre que tous
les comportements sur les médias sociaux ne sont qu’une représentation virtuelle de
phénomènes sociologiques déjà observés dans le réel, existants depuis l’aube de
l’humanité.
M
Réseaux Sociaux : le terme a été inventé en 1954 par l’Australien John A. Barnes qui
étudiait des pêcheurs en Norvège. Mais le concept même de réseau social peut remonter
SI
à la nuit des temps. Un homme des cavernes, par exemple, vivait déjà en réseau social.
AS
concept repose sur le fait qu’une personne peut être reliée à n’importe quelle autre, au
travers de relations individuelles comprenant au plus cinq niveaux, comme les amis des
amis de mes amis. À noter que l’un des tout premier réseau social, qui par ailleurs en
inspirera un bon nombre, se nommait sixdegrees.com, un clin d’œil des fondateurs.
La force des liens faibles : le terme est né de Mark Granovette en 1973. Les individus
avec qui l’on est faiblement lié (connaissances) évoluent dans des cercles différents et
ont donc accès à des informations différentes de celles que l’on reçoit des personnes
avec qui l’on est fortement lié (famille). Les médias sociaux reposent en grande partie
sur cette dynamique, bien que des réseaux comme Facebook ne font guère de
différenciation dans leur dénomination.
Nombre de Dunbar : le terme concerne la taille d’une communauté et a été établi en
1990 par Robin Dunbard. Ce nombre évoque que pour qu’une communauté fonctionne,
il ne faut pas qu’elle dépasse 150 individus. Au-delà de cette limite, la confiance se brise,
et ne permet plus d’assurer le bon fonctionnement du groupe. Par exemple, de
nombreuses études ont mis à jours qu’en moyenne sur Facebook un utilisateur avait
environ entre 130 et 150 contacts.
Les concepts ne sont donc pas nouveaux, il n’y a pas eu de révolution dans les
comportements sociologiques, ces derniers ayant déjà été observés dans le réel. Il faut
également savoir que même la technologie n’est pas novatrice. Par exemple, c’est en
1994 qu’apparaissaient les premiers réseaux sociaux, avec Class Mates, ou en 1995 les
premiers wiki.
Il a fallu cependant attendre presque 10 ans, soit 2004 et le Web 2.0, pour décréter qu’il
y avait quelque chose de révolutionnaire, qu’Internet avait muté subitement et
massivement. Étrange non ? En fait, pour comprendre ce phénomène, il faut remonter
deux ans auparavant. En 2002, Friendster est alors le réseau social qui a le plus grand
nombre d’utilisateurs, fédérant plus d’un million en peu de temps. C’est lorsque les
plateformes, au travers de leurs membres, atteignirent une taille visible qu’elles
suscitèrent un intérêt pour les entreprises. Il y a eu évolution, non-révolution : ce fut un
long processus qui a atteint une taille critique qui le rendit observable à un instant
donné.
Pourquoi est-il nécessaire de comprendre cela ? Au XVIe siècle Francis Bacon disait
« On ne commande à la nature qu’en lui obéissant ». Par cette phrase, le philosophe
explique que le pouvoir sur les écosystèmes passe avant tout par leur connaissance, par
une obéissance à des lois identifiées et comprises. Bien qu’ayant des siècles, cette
M
philosophie est au cœur même du Web social : l’entreprise ne saurait s’imposer sur les
nouveaux canaux de communication si elle ne prend pas en considération leur
SI
fonctionnement. Elle se doit dorénavant d’obéir à un ensemble de règles tacites
tournant autour de notions diverses telles que la transparence, l’écoute et l’engagement.
AS
Qui de plus, elle n’est plus dans des logiques de communication qu’elle maîtrise, comme
l’audience, mais bien dans de nouveaux mécanismes tournant autour de la notion
BY
M
l’entreprise interagit avec un ensemble d’acteurs pour améliorer et orienter ses
actions de communication.
SI
Sur les médias sociaux la communication de crise doit donc être basée sur la notion
AS
celui recherché.
Afin d’être efficiente, une gestion de crise se pense en amont et non en aval : il ne faut
pas attendre de subir pour agir, mais bien agir pour éviter de subir. Cela se traduit par
une réflexion avec toutes les hiérarchies pour identifier des processus modulables
pouvant être mis en application de manière rapide, tel un premier discours de dirigeant
comme c’est souvent le cas. Nous insistons sur le terme « modulables » car ces
processus devront pouvoir évoluer selon une situation ou un environnement observé,
que cela soit en anticipation ou au moment de la crise. Une entreprise n’aura pas la
même réaction si elle est attaquée par une association pour des questions liées à
l’éthique que si son produit s’avère dangereux pour la santé de ses consommateurs.
C’est pourquoi le plan de communication réalisé en amont devra prendre en
considération un large éventail de scénarios identifiés sans jamais entrer dans des
détails afin de laisser une marche de manœuvre suffisante pour s’adapter à une
situation précise dans un temps restreint.
Mais attention, si ces processus vont permettre de mettre en application des actions de
communication avec célérité, l’entreprise devra éviter toute précipitation. Comme il est
souvent observé, cela conduit généralement à un premier communiqué maladroit qui ne
fait qu’embraser une situation déjà délicate.
De l’appréhension des médias sociaux par les entreprises
Soyons clair, très souvent, les crises sont des tempêtes dans des verres d’eau, à savoir
qu’elles n’auront qu’un faible impact sur le devenir de l’entreprise. Notamment
lorsqu’elles ne sont qu’en ligne. Nous avons analysé de très nombreux cas et il est très
rare que de tels événements viennent nuire à long terme sur la santé de la marque.
Comme nous le verrons au cours de ce livre, il existe plusieurs typologies de crises, la
plupart ne concernant que des éléments mineurs n’ayant pas d’impact majeur sur le
métier même des sociétés. En effet, très souvent, le consommateur n’a qu’une vision
sur du court terme car émotive : il retrouve très rapidement ses habitudes de
consommation pour diverses raisons qu’elles soient (pression sociale, appétence
familiale).
Face aux différents événements émergents sur la toile, de nombreuses entreprises
peinent donc à franchir le cap des médias sociaux. Comme évoqué en début de cette
introduction, la relation « présence en ligne = risque de crise » est un raccourci souvent
observé alors qu’il faut y voir au contraire une manière d’anticiper des évènements. Les
médias sociaux peuvent faire surgir une crainte irrationnelle entraînant une sorte de
blocage chez certaines entreprises. Irrationnelle car elle n’est fondée que sur une vision
M
subjective des enjeux, à savoir la phase de crise, le déferlement d’une colère. La pratique
de l’autruche, qui vise à enfoncer sa tête dans le sol pour ne pas voir ce qu’il se dit sur
SI
elle, peut être dangereuse car elle n’éteindra pas la colère et au contraire pourra la
AS
Object du livre
À travers cet ouvrage, nous souhaitons vous initier et vous sensibiliser aux nouveaux
enjeux que représentent les médias sociaux et le Web social dans la gestion de crise
pour les entreprises. Plus qu’une solution clé en main (qui n’apporterait pas grand-
chose tant chaque cas est unique) il s’agit avant tout de vous aider à comprendre cette
« nouvelle » discipline.
Nous avons découpé ce livre selon un chapitrage chronologique, afin de suivre pas à pas
les différentes étapes dans la mise en application d’une communication efficace et
d’apprécier un ensemble de concepts propre à cet écosystème qu’est le Web social.
Cet ouvrage a pour objet également de vous faire découvrir une crise de l’intérieur. Par
l’analyse des mécanismes sociaux en vigueur entre les internautes, il vous aidera à
mieux comprendre les facteurs en jeu afin de décoder la face cachée des bad buzz.
Attention, les réponses analysées dans les études de cas peuvent permettre de
comprendre certains facteurs clés de succès ou d’échecs mais les stratégies qui y sont
inhérentes ne sont pas applicables à tous les cas.
Chapitre 1
L’écosystème de la crise 2.0
La démocratisation d’Internet a ouvert un nouveau canal d’expression pour plus de 2
milliards d’internautes (http://read.bi/RTFw8g), changeant drastiquement le rapport de
force entre les entreprises et ses consommateurs. La notion de communication de crise
a, de ce fait, inexorablement changé, répondant à de nouveaux enjeux et à de nouveaux
mécanismes interactionnels.
Si les crises existent depuis de nombreuses années dans le monde réel, elles prennent
une tout autre ampleur dans les univers virtuels. L’arrivée du Web participatif a brisé
beaucoup de codes et a engendré de profondes mutations. Les canaux de diffusion ne
sont plus seulement les entreprises ou les médias, il faut aujourd’hui prendre en
considération le poids des internautes. Leurs propos, dénués de toute forme de
mercantilisme et de toute neutralité informationnelle, bouleverse les entreprises dans la
gestion de leur image.
M
L’usage des plateformes sociales, comme les médias sociaux, permet dorénavant de
diffuser et de relayer des contenus sensibles. Les internautes ont dorénavant la
SI
possibilité, au même titre que toute entreprise ou média, de commenter, d’échanger,
AS
voire de critiquer une information. Cette liberté d’expression a décuplé les frontières de
concepts sociaux comme la sociabilisation, l’influence numérique ou la viralité. En ce
sens, Internet est devenu un facteur clé de l’éclosion de nouvelles formes de crises,
BY
Parce que le contenu est la matière première des réseaux, les plateformes sociales ont
développé un ensemble de produits tiers afin de favoriser cette viralité. Ainsi, depuis
quelques années est apparue la possibilité d’intégrer des boutons de partages sur des
BY
– Un attrait pour ce que les autres regardent déjà (par mimétisme, intérêt pour ce
qui suscite de l’intérêt).
– Un attrait pour la nouveauté (obsolescence rapide des contenus).
Les évolutions technologiques, qu’elles soient software ou hardware, ont affranchi les
barrières physiques, temporelles et spatiales, participant à accroître la « puissance » de
l’information. Par exemple, la mobilité permet aujourd’hui à tout mobinaute d’être en
permanence connecté au monde, quelque soit le lieu et l’heure, et de pouvoir se tenir
informé, partager, commenter et diffuser des informations en temps réel.
1.2 Le bouche-à-oreille
Les médias sociaux ont participé à la sacralisation de la parole de l’internaute.
Dorénavant, il peut s’exprimer, montrer un intérêt ou partager une information qu’il
juge pertinente. Pour définir ce phénomène, les Américains évoquent le terme de
« word of mouth », que nous traduisons en français par le bouche-à-oreille.
Traditionnellement, ce dernier est basé sur des échanges directs, face à face, induits par
un contexte social de proximité. Depuis les années 2000 et la démocratisation du Web,
ce phénomène a muté pour devenir global. Internet abrogeant les frontières physiques,
la dématérialisation des échanges a permis aux individus de recréer des contextes
sociaux sur des plateformes adaptées.
Il existe 3 composants clés du bouche à oreille :
M
– Le nœud de cravate (ou « Tie strenght ») désigne la force du lien. Par force, nous
SI
entendons l’importance et la fréquence des échanges entre internautes. Ces
derniers peuvent se sentir proches d’une communauté en fonction des valeurs
AS
réside essentiellement dans le poids des liens sociaux qui gravitent autour d’elle.
C’est pourquoi, plus un membre de sa communauté va relayer un contenu, et plus
nous serons à même de faire de même.
– L’homophilie découle directement d’un désir de rassemblement. Les internautes
tentent de s’affilier autour de groupes sociaux partageant un intérêt commun.
L’individu va donc chercher à s’entourer de sources d’appartenances et de
références, afin d’exister socialement et de disposer d’un réseau qui lui est propre.
La recherche de similitude chez ses paris démontre une volonté de créer un
équilibre cohérent dans la perception de sa vision du monde. De ce fait, plus un
internaute qui me ressemble partage une information et plus je suis tenté de
l’imiter.
– La source de crédibilité signifie que le profil de la source de l’information va
impacter directement sur le choix du partage. L’internaute va instinctivement
évaluer la source en fonction de son aura, de son métier, de sa légitimité pour se
laisser influencer ou non. Une estimation du degré de crédibilité et d’attractivité qui
prouve que les internautes opèrent une attention sélective face aux émetteurs
informationnels. La réputation numérique joue beaucoup dans ce cas. Ainsi, plus
un contact est respecté et reconnu dans son domaine, et plus je suis disposé à
relayer ses contenus.
Avec l’avènement des médias sociaux, et donc du partage de contenus, le buzz marketing
est devenu un enjeu stratégique pour de nombreuses entreprises qui cherchent un
BY
provoqué par une action initiale de la marque. Il repose sur les mêmes mécanismes que
le buzz à ceci prêt qu’il n’est généralement pas désiré. Il constitue un revers pour toute
entreprise car pointe un dysfonctionnement suffisamment émotionnel qu’il en devient
BY
viral.
Un bad buzz est une segmentation de la crise, car il n’est inhérent qu’à la seule
expression de l’entreprise sur le Web. Il constitue une des raisons majeures qui rend
craintif les marques à user des médias sociaux : des propos mal interprétés, une attitude
inadéquate, autant de facteurs sensibles qui font craindre une mésentente avec les
consommateurs. C’est pourquoi les bad buzz entachent principalement l’image ou la
réputation de l’entreprise, n’étant réellement nuisible que sur du court terme.
Une crise est un terme global qui témoigne de l’incapacité d’une entreprise à faire face à
une situation donnée (saturation des capacités de communication face à l’afflux des
demandes par exemple). Au-delà de la perception du consommateur, elle peut impacter
sur la motivation des salariés ou encore susciter la méfiance des fournisseurs à l’égard
de l’organisation.
Une crise s’inscrit généralement dans un contexte, même si elle peut être le fruit de faits
qui en seraient déconnectés. En ce sens, elle est souvent prévisible dès lors qu’il a été
identifié des éléments susceptibles de déclencher ce type d’événement. Cela signifie que
si l’entreprise ne peut empêcher les événements de se produire, elle peut anticiper une
réponse adaptée en ayant pris en considération ces éléments. Par exemple, un
restaurant pourra anticiper et prévoir une communication de crise en appréciant
l’impact négatif inhérent à une hypothétique suspicion de nourriture avariée, quand
bien même cela ne lui arriverait pas. C’est donc bien souvent l’environnement qui
génère une crise, et les maladresses des entreprises dans leurs réponses qui créent des
bad buzz.
Chaque crise nécessite une communication cohérente et adaptée qui doit répondre aux
critiques et aux demandes des consommateurs. Face à un environnement Web qui
facilite la propagation d’une crise, l’entreprise va donc devoir adopter en amont une
stratégie globale et cohérente qui pourra être mise en application rapidement. Globale,
car il sera difficile d’appréhender tous les paramètres en avance (lieu de la propagation,
typologie des acteurs) et cohérente car pouvant s’adapter à toute situation dès lors que
celle-ci est observable. Les crises étant soudaines, aucune société ne pourra prévoir avec
exactitude jour où des événements se déclencheront. Elle doit donc avoir mis en place
un ensemble de processus facilitant la mise en application d’actions de communication
adaptées et adaptables selon un contexte.
Ces types d’événements se distinguent par leur impact sur la perception dans le temps
des internautes vis-à-vis de l’entreprise, donc de leur gravité, et par la réponse à y
BY
apporter. Une crise peut correspondre par ailleurs à plusieurs types. Elle peut donc être
structurelle et communicationnelle, structurelle et émotionnelle.
La crise communicationnelle
Étude de cas :
M
SI
AS
BY
M
à ce désamour prononcé et revendiqué, la marque n’a eu d’autre
choix que de faire machine arrière (http://bit.ly/R44r7R) pour
SI
éviter le prolongement du bad buzz.
AS
La crise structurelle
BY
Ici la crise touche directement le métier de l’entreprise. Dans la plupart des cas, ce
format de crise témoigne de défectuosités plus ou moins graves des produits ou des
prestations proposées, comme une vidéo montrant des employés d’un restaurant
cuisiner des aliments périmés ou un livreur qui balance un colis. Elle peut avoir pour
origine une information sensible, véridique ou supposée. Le risque principal est ici
d’ordre financier car les ventes peuvent chuter, la pérennité de l’organisation étant de ce
fait en péril.
Étude de cas :
La crise émotionnelle
La crise émotionnelle touche souvent l’inconscient collectif pour renvoyer à des notions
d’étiques et de déontologie. Cette réaction affective fait écho à des règles explicites ou
implicites et à leur respect. Quand les individus sont émus par un événement, ils
peuvent protester vigoureusement voire boycotter une marque. Les crises
émotionnelles peuvent en ce sens être le reflet du contexte social. Les consommateurs
sont toujours plus émotifs face à des dérives liées à une actualité sensible. Dans ce cas
de figure, les acteurs de la crise sont souvent des associations, des communautés de
consommateurs ou des journaux...
L’entreprise doit donc faire attention à ne pas refléter des valeurs qui vont nourrir des
suspicions ou des indignations. Des étiquettes peuvent coller à la société et donner
naissance à une crise comme :
– une gestion salariale désastreuse (fermeture usine, plan social, affaire judiciaire),
– le manquement à des promesses, à des valeurs.
BY
Avec les crises émotionnelles, les internautes se sentent investis d’une mission, celle de
rétablir l’ordre et d’obtenir la justice. Les excuses ici ne suffisent pas forcément, il faut
généralement des actes forts. L’entreprise doit apporter la preuve observable de sa
bonne foi tout en éclaircissant les zones d’ombres. Là encore, des rumeurs peuvent très
bien donner les mêmes résultats. L’enseigne Nature et découvertes a longtemps traîné
l’idée selon laquelle elle était associée à une secte (la scientologie)
(http://bit.ly/RmHvCK).
Étude de cas :
M
retrait de sa procédure de licenciement. De nombreux journaux
souligneront le rôle majeur joué par les internautes, là où d’autres
SI
évoqueront l’intervention d’une personnalité locale, en l’occurrence
un élu.
AS
M
Au-delà du simple transport de marchandises et de personnes, c’est la circulation des
informations politiques, sociales et technologiques qui entrait dans ce qu’on appelle la
SI
modernité. Et cela évolue dans un cadre bien particulier : l’individualisation des
AS
populations occidentales.
contrôle pas forcement le flux qu’interviennent les médias sociaux. Ils sont autant une
conséquence directe de ces grandes tendances qu’une partie d’elles. Ils restent un
ensemble d’outils et de techniques qui répondent ou trouvent des usages. Et de
manière inédite dans l’histoire de la communication, les médias sociaux cristallisent
les logiques individualistes en ouvrant, potentiellement, à l’individu des leviers de
communication stratégiques, politiques et idéologiques.
Car la possibilité pour le particulier d’écrire et de générer du contenu se fait dans un
contexte singulier. C’est l’émancipation de l’individu face aux logiques de production et
de diffusion de l’information jusque alors maîtrisées par les entreprises et les
institutions. Cette émancipation est pratique ; c’est-à-dire que de nouveaux usages et
de nouvelles méthodes émergent. Cela on le voit bien, particulièrement en France,
quand on constate le retard ou l’imprudence de certains annonceurs lorsqu’ils tentent
de pénétrer les communautés Web.
Pourtant, chacun y revendique, implicitement ou explicitement, son appartenance à
tels mouvements ou ses affinités avec telles choses. Les médias sociaux sont l’outil qui
répond le mieux aux nouveaux besoins en connaissance de l’individu. Ils répondent à
un souci local (la possibilité d’échanger avec ses proches) et global (la possibilité de
suivre les actualités de marques ou d’autres organisations) comme aucun autre moyen
de communication auparavant.
Il faut pourtant garder en tête que l’individualisation n’est pas synonyme de liberté.
Elle s’accompagne d’effets vicieux et vertueux dans les logiques de l’individu. Dans les
principaux effets vicieux, l’isolement de l’individu face à des cadres sociaux. Cela
suscite un besoin de créer et de donner du sens à l’ensemble des choses… même les
plus futiles. Ensuite, la prise de conscience de l’individu par lui-même s’accompagne de
logiques ludiques et émotionnelles comme fin en soi. L’information va être
consommée de manière émotionnelle au détriment de l’analyse (nécessaire ?) des faits.
On peut ainsi s’interroger sur le fait qu’une dizaine d’années seulement après les faits,
chacun s’accorde à dire que l’effondrement des tours jumelles est un fait historique…
Rejoignant ainsi des événements vieux de plusieurs siècles. Mais plus que n’importe
quel outil, ce sont bien les médias sociaux qui vont répondre à cette demande.
On ne peut pas céder aux mythes de médias sociaux également et mondialement
perçus par les individus sous prétexte que chacun peut, potentiellement, y avoir accès.
Ils n’essaient pas de s’adapter à chacune des cultures, ils se pratiquent de manière
identique pour chaque individu quelque soit sa culture.
M
Ils constituent des non-lieux au sens de Marc Augé : des espaces dédiés à la circulation
des informations et des idées où l’identité, l’histoire et les relations de l’individu ne
SI
constituent pas des moyens d’accès. Ils sont des objets résolument neutres
AS
idéologiquement, c’est ce que l’individu ou l’organisation y impulse qui fera sens dans
une communauté ciblée.
BY
Les médias sociaux sont aujourd’hui un indicateur fort des tendances populaires et un
carrefour d’audience certain. Massivement utilisés dans les pays occidentaux, ils
restent, dans les imaginaires, liés au fait qu’enfin, les individus puissent communiquer
BY
entre eux en dehors des contraintes liées aux autres méthodes de communication. Et
c’est là une contrainte forte que les marques n’appréhendent pas toujours bien. Elles
n’y sont pourtant pas malvenues puisque les individus sont les premiers à s’auto-
déclarer « amis » avec telles marques ou tels produits ou à se vanter d’acquérir tel ou
tel nouveau produit.
M
SI
AS
BY
2.2 La socialisation
À première vue, il serait logique de penser que l’internaute partage des informations
qu’il juge pertinentes pour créer un lien qualitatif avec son réseau. Pourtant, en y
regardant de près, le message qui est diffusé n’est que secondaire par rapport à la
nécessité de créer des interactions. Ce qui compte, c’est l’illusion de garder contact avec
ses pairs. L’internaute va donc partager des informations qui vont atteindre ces objectifs
de socialisation, sans forcément prêter vraiment attention au contenu : il cherche avant
tout des échanges.
Il faut prendre en considération ce que les spécialistes du comportement appellent
« renforcement intermittent » pour comprendre ce phénomène. Prenons un rat de
laboratoire. Si le scientifique lui fournit un levier qui produit une boulette de nourriture
sur demande, le rongeur va seulement appuyer quand il aura faim. S’il lui met un levier
qui produit de la nourriture à des intervalles aléatoires, le rat va appuyer dessus tout le
temps. L’internaute publie donc des contenus divers et variés dans la simple optique de
susciter un engouement, un lien social.
Certaines informations qu’il va juger comme susceptibles de générer des interactions
sociales, comme « je suis maintenant célibataire », peuvent ne produire aucun effet là
où un simple « j’ai mangé une pomme » peut engendrer de nombreux échanges.
Comme de lors l’expérience sur le rat, ce phénomène aléatoire favorise le partage d’un
contenu, dont le fond importe peu, dans le but de susciter des commentaires, des
approbations (« likes », commentaires).
Les internautes vont instinctivement chercher à partager les émotions fortes ressenties,
dans l’espoir de favoriser et de consolider leurs relations numériques. Et quoi de mieux
que les crises pour susciter l’intérêt de son réseau de contacts ? Les contenus
émotionnels comme les crises proposent donc, à travers leur partage, l’espoir de trouver
chez autrui un parallélisme affectif, un point commun qui arbore un sens relationnel
pour les deux partis.
M
Le chercheur anglo-saxon Jonah Berger (http://bit.ly/RmIjHX) explique ainsi que
« nous partageons prioritairement des contenus « futiles ou émotionnels » non comme
SI
fin mais comme moyen de créer du lien à distance. Puisqu’il est difficile de partager des
AS
partagent dans le but d’intéresser sur le fond leurs amis, et non pour les garder près de
soi. Cependant, très peu d’internautes créés des listes pour informer une partie de leur
réseau (famille ou contacts professionnels par exemple) de leurs découvertes. Par
facilité et gain de temps, presque tous les internautes partagent leurs publications avec
l’intégralité de leur réseau direct, mêlant le personnel au professionnel.
L’internaute se rassure donc en conservant l’illusion qu’il reste en contact avec ses
« amis ». L’acte de partage est donc plus un outil de socialisation qu’une pure action de
divertissement anodine. Au-delà des bad buzz qui constituent des contenus attractifs,
l’internaute partage surtout pour se voir dans le regard de ses pairs. Ils sont des
ustensiles puissants pour conserver un lien et une appartenance sociale. Les internautes
souhaitent partager des sentiments.
« C’est pourquoi le web est souvent peuplé de choses excitantes. Les choses les plus
populaires ne sont pas généralement très instructives, mais très émotives. Il y aura
toujours une demande insatiable pour les vidéos drôles, les chansons de Justin Bieber
ou les colères d’hommes politiques. Des contenus futiles et superficiels, certes, mais qui
sont plus un moyen qu’une fin, pour dire aux autres que nous aimerions ressentir la
même chose qu’eux », conclut Jonah Lehrer (http://bit.ly/QVWDXd).
2.3 L’influence majoritaire
La participation active autour d’une crise dépend également du phénomène de
conformisme.
Le conformisme est tout simplement l’effet de l’influence majoritaire. Dans tout groupe,
social ou non, il existe des normes internes qui régissent son bon équilibre et
fonctionnement. Ce maintien induit ainsi des effets d’influences interpersonnelles qui
supposent que les individus doivent se conformer à la majorité pour pérenniser son
existence. Ce sont ces pressions sociales, internes aux groupes sociaux qui modifient les
opinions et surtout les actes de ses membres.
On distingue 3 formes de conformisme :
S’il ne s’agit pas d’une crise fonctionnelle qui remet en cause le produit de l’entreprise,
la plupart des répercussions renvoient à une défiance paradoxale. L’attitude et les
propos peuvent apparaître défavorables envers la marque pendant la crise, mais le
comportement d’achat de l’internaute ne changera pas, le pourcentage de vente étant en
effet assez rarement impacté. Il peut s’engager publiquement, mais ne pas le faire hors
connexion pour tout un ensemble de raisons.
Sur Internet, les avis des internautes allant à l’encontre de ce que la marque escompte
peuvent représenter une forme d’influence minoritaire. Cette forme d’influence n’a pas
M
nécessairement pour finalité de forcer la marque ou ses consommateurs à se conformer
à de nouvelles idées, mais surtout à servir de levier en vue d’une redéfinition des
SI
normes, des produits, etc.
AS
Ces avis divergents représentent une formidable opportunité pour l’enseigne qui peut
connaître les points faibles de ses prestations, identifier les failles et les points
perfectibles, mais également se préparer à trouver des solutions en cas de plaintes
BY
Malgré tout, la narration demeure un facteur clé important dans la mémorisation d’un
événement. Ce constat se confirme par le storytelling, un axe de communication qui
BY
tend a se populariser avec l’avènement des médias sociaux. Bertrand Bathelot, agrégé
d’économie gestion option marketing, le définit (http://bit.ly/X14J1X) comme tel :
« Le storytelling consiste à utiliser une histoire plutôt qu’à mettre classiquement en
avant des arguments marque ou produit. La technique du storytelling doit
normalement permettre de capter l’attention et de susciter l’émotion. Elle peut
également être utilisée pour élever la marque à un rang de mythe. »
Cette méthode a pour objectif d’injecter une structure narrative dans le discours, proche
de récits ou de contes. C’est l’art de faire de faits marketing de vraies histoires. La
mutation fin 2011 du profil Facebook sous forme d’une chronologie, appelée Timeline,
confirme d’ailleurs cette tendance, en incitant les marques à raconter leur histoire au
travers d’une frise chronologie.
En outre, les internautes ont également tendance à se rapporter les uns et les autres des
histoires autour des produits et des sociétés. L’entreprise est donc un accessoire, un
acteur anthropomorphique. Il faut bien comprendre que les individus pensent de
manière narrative, plutôt que de façon argumentative. Nous pouvons l’observer dans les
recommandations sociales : les internautes prennent davantage à cœur les témoignages
de vécu que des argumentaires, car cela leur renvoi à des projections auxquelles ils
accordent de l’importance. Les crises peuvent ainsi représenter des jeux de rôles
interactifs où l’internaute peut prendre directement part à l’histoire.
La notion de pensée sociale permet également de comprendre comment les sujets
sociaux sont capables d’appréhender les événements de la vie quotidienne,
l’environnement et l’ensemble des informations qui circulent autour d’eux. Cette
pensée collective est largement déterminée par le contexte dans lequel elle s’inscrit et
peut s’exprimer lorsque les individus évoquent des souvenirs ou conversent ensemble.
Flament et Rouquette (2003) la définissent ainsi : « informée par des facteurs sociaux,
socialement matérialisée dans les institutions (les rites et les symboles par exemple),
prenant enfin pour objets récurrents les phénomènes sociaux, la pensée commune est
sociale, non par hasard ou par occasion, mais par nature. Ce qui se pense, la manière
même dont cela est pensé, ce qui se transmet et les positions relatives des acteurs
sociaux entretiennent des rapports de complémentarité tels que ces différents aspects
constituent autant de facettes indissociables ». (“Manuel Visuel de Psychologie Sociale
– Sylvain Delourée – Editions Dunod – 2010”).
Rouquette matérialise cette pensée sociale en lui désignant un modèle architectural.
Cette schématisation s’organise autour de quatre concepts majeurs et hiérarchisés :
M
– L’idéologie (croyances, valeurs et normes génériques).
SI
– Les représentations sociales (de notre pays, des citoyens, des étrangers, des
AS
autres pays).
– Les attitudes (bienveillance ou animosité, acceptation ou rejet).
BY
Nous pouvons penser qu’une entreprise possède cette arborescence identitaire. Elle
tend à développer une idéologie (positionnement) et des attitudes (j’aime, je déteste les
produits de cette marque), mais les internautes disposent de représentations sociales
(stéréotypes, historique ou vécu autour de la marque) qui forment des opinions (« je ne
conseille pas d’acheter chez eux » ; « ce sont les meilleurs »). Tel pourrait être la
représentation de l’image de marque selon la pensée sociale, et donc indirectement les
canaux d’encodage et de mémorisation pour les internautes.
Ces réflexes mémoriels instaurent un historique de la marque dans l’esprit des
consommateurs. Les individus intègrent donc rapidement les événements et peuvent
s’en souvenir. Ces crises sont des signes distinctifs, voire ostentatoires, qui s’incrustent
auprès de la marque dans l’inconscient. Ils font parti intégrant de l’ADN de l’entreprise
aux yeux des consommateurs, même si certains sont moins prégnants que d’autres.
Il ne faut donc pas compter sur les internautes pour fermer les yeux ou faire la sourde
oreille, il est de dans leur nature de se souvenir. Nietzsche disait d’ailleurs de l’homme :
« Il est possible de vivre sans se souvenir et de vivre heureux, mais il est impossible de
vivre sans oublier ».
M
fait de ne pas avoir été consulté pour le choix de la nouvelle mascotte. En y regardant de
plus près, ce rejet témoigne de l’intégration de la marque dans le quotidien des
SI
consommateurs, qui défendent leurs souvenirs et leurs expériences avec le produit.
AS
à proposer une plateforme intégrant des éléments sociaux, le site Désir d’Avenir.
Cependant, elle a défrayé la chronique en 2009 lorsqu’elle a dévoilé un nouveau site
internet, aux graphismes et fonctionnalités rappelant les premiers jours du Web. Dès
lors, les professionnels s’interrogèrent sur les intentions, à savoir si le bad buzz n’avait
pas été orchestré pour faire parler de la politicienne : comment une personne avant-
gardiste peut-elle prendre un tel virage ?
Le travail autour de l’e-reputation a souvent été appréhendé sous l’angle de la gestion de
crise. Pourtant, les situations de crises majeures restent relativement rares. Un
consommateur sera souvent plus indulgent avec une marque qui fait une erreur dans le
but de lui donner satisfaction. La bonne volonté n’est pas invisible et prodigue ses effets
bienfaiteurs pour protéger les marques maladroites lorsque les événements ne sont pas
graves. Ne pas entendre les réclamations de ses clients peut cependant empêcher
d’identifier des points à améliorer dans sa stratégie.
De là à dire qu’une crise est un mal pour un bien, il y a un gouffre. Le seul bénéfice
apparent réside dans la leçon qu’elle apporte. L’entreprise sait d’où provient l’erreur, ce
qui est mis en cause et les éléments qui posent problèmes. Ceci s’avère utile pour savoir
quelles directions prendre et quelles corrections apporter dans le futur. Beaucoup rêvent
de succès immédiats, or nous n’apprenons jamais autant que lorsque nous faisons des
erreurs. Comme aimait à le dire Soichiro Honda, le fondateur de la marque automobile :
« À mon sens, le succès ne peut être atteint qu’après une succession d’échecs et
d’introspections. En fait, le succès représente 1% de votre travail qui comporte lui, 99%
de ce qu’on peut appeler échec ».
M
SI
AS
BY
Chapitre 2
La place de l’entreprise dans la prévention et
la gestion de crise
Si les médias sociaux peuvent générer de la crainte ou de l’engouement, ils ne laissent
jamais indifférents. D’un côté, les entreprises redoutent de manquer de temps et de
ressources, de l’autre les « success-stories » et les chiffres vertigineux accolés à ces
plateformes (Facebook, un milliard d’utilisateurs actifs en octobre 2012) donnent envie
d’ouvrir des profils partout et tout de suite.
Se lancer sur les médias sociaux représente le fruit d’une réflexion. Une préparation qui
se décline sous la forme d’une introspection et d’une définition des objectifs. Un
investissement en temps qui nécessite une prise de recul pour démarrer sereinement.
Une entreprise ne doit pas attendre l’arrivée d’événements négatifs pour mettre en place
des actions pertinentes. Comme dans toute communication de crise, elle doit identifier
M
des risques afin d’établir des scénarios adaptés à un environnement spécifique. Elle va
par la suite déployer un ensemble d’outils de veille afin d’anticiper les signes avant-
SI
coureurs, ce qui lui permettra d’appliquer rapidement une réponse cohérente et d’éviter
l’apparition d’éléments déclencheurs.
AS
Cependant, les médias sociaux ont modifié les règles de la communication, plaçant
l’internaute au centre du message. L’entreprise doit intégrer cette mutation au risque de
BY
rester prostré dans des mécanismes dits traditionnels qui seraient sans effets. Les
logiques d’audiences, sans interactions avec le public cible, n’ont de sens sur des espaces
où ce public s’exprime et souhaite être écouté. L’entreprise doit de ce fait intégrer cette
dimension relationnelle dans la structuration de son plan de réponse.
Pour respecter son ADN et de son positionnement, l’entreprise doit également
sensibiliser ses salariés à ces thématiques pour que toutes les précautions et les efforts
avancent conjointement vers un objectif commun.
Cette approche sous-entend donc une adaptabilité à un nouvel environnement, qui
passera par une mutation à l’interne afin d’établir, d’encadrer et d’appliquer un message
pertinent dans le temps et l’espace.
notamment de crise, dépend d’un ensemble de facteurs qui devront être pris en compte
afin d’identifier la plateforme la plus adaptée pour y apporter une réponse cohérente.
BY
Il y a donc travail d’apprentissage pour les marques, ce qui peut les effrayer car ce
balbutiement induit inéluctablement des erreurs. Pourtant, les internautes sont plus
indulgents avec les marques qui tentent de nouvelles approches qu’avec celles qui
refusent de s’y soustraire. Les études montrent que 75% des internautes accueillent
favorablement l’idée qu’une entreprise se positionne sur les médias sociaux.
Il est important que la société appréhende les nouveaux mécanismes, qu’elle puisse
muter pour les inclure dans ses processus de communication. Il ne s’agit pas ici de
remplacer l’existant, mais d’y intégrer une dimension propre aux médias sociaux. Il y a
de ce fait avant toute chose un travail sur elle-même à réaliser si elle veut communiquer
efficacement, notamment lors d’une crise.
plusieurs reprises sur la page Facebook de l’enseigne qu’on lui rembourse son achat. La
réponse est rapide et claire : « Vous ne serez pas remboursée, votre dossier est bloqué
car vous mettez des messages sur Facebook ». La plaignante décide alors de faire appel
à son réseau pour la soutenir dans sa discussion avec l’entreprise. Face à cet
engouement soudain, la marque va alors supprimer les messages postés sur la page
Facebook. La réaction ne se fait pas attendre, et cette maladresse ne tarde pas à attirer
l’attention d’autres internautes. Alors que le bon sens voudrait que la marque ouvre un
dialogue pour atténuer la crise, elle va au contraire tenter un bras de fer avec ses
détracteurs. Un post officiel va annoncer que le litige est réglé et mentionner que la page
Facebook n’est pas un « défouloir ».
Il n’en fallait pas moins pour offusquer les internautes qui vont massivement investir la
page Facebook. Il s’avère rapidement que la cliente n’a pas été remboursée comme il
avait été annoncé. Cette dernière, bannie de la page Facebook, a en effet continué à
converser avec d’autres internautes sur Twitter.
Face à une situation qui s’annonce délicate, l’entreprise revoit sa position et décide de
réintégrer la cliente en annonçant que la marque s’engage à la rembourser.
Il s’agit là d’un exemple significatif qui souligne bien la nuisance de mauvais réflexes
qu’une marque adopte face à des requêtes sensibles. En somme, ce n’est pas parce que
les clients d’une société ne sont pas physiquement présents lors des échanges sur
Internet qu’il faut les traiter différemment.
M
Auparavant, lors d’une crise relayée par les médias traditionnels, il était presque
impossible pour les consommateurs de comprendre la réalité des actions inhérentes à
SI
l’engagement de la marque. Aujourd’hui, les internautes exerceront une forte pression
pour apprécier l’évolution d’une situation donnée. L’entreprise ne pourra plus dire
AS
« nous nous engageons à » sans mettre application ses engagements ou même sans
communiquer sur leur évolution.
BY
De plus, les internautes attendent des résultats concrets sur le court terme ou dans le
temps imparti. Ils souhaitent qu’une situation se règle, que leur mobilisation ait un
sens. Ils ne veulent plus être confronté à des promesses s’éternisant dans le temps et
qui augurent qu’elles ne seront probablement pas appliquées.
Les engagements tenus doivent donc être considérés comme des objectifs, sur le modèle
SMART :
– Spécifiques (les mesures énoncées doivent être limpides pour répondre à des
critiques précises).
– Mesurables (mettre en place des indicateurs pour prouver ses efforts).
– Ambitieux (montrer son engagement pour réajuster sa stratégie en faisant des
concessions).
– Réalistes (prendre en compte les moyens, ressources, compétences disponibles).
– Temporels (définir ses actions dans le temps avec des étapes, paliers, deadlines,
etc.).
La société doit éviter de faire des promesses qu’elle ne pourrait tenir dans l’espoir de
calmer les foules. Le calme ainsi obtenu ne serait que de courte durée et n’aurait pour
effet que de dissimuler une crise à venir.
Faux avis
Preuve de l’importance du phénomène des faux avis, une étude de l’institut Gartner
(http://bit.ly/W01ium) parue en septembre 2012 estimait que d’ici 2014, 10 à 15% des
commentaires sur le Web Social seront factices. L’étude souligne que cette
problématique devrait forcer les institutions juridiques à se pencher de plus en plus sur
le phénomène. Gartner prévoit en conséquence que dans les prochaines années,
M
plusieurs entreprises du Fortune 500 (500 plus grosses entreprises américaines)
SI
devront faire face à la justice.
AS
leur marque sur les médias sociaux doivent se méfier des conséquences potentiellement
négatives sur la réputation de leur entreprise et sur leur rentabilité ».
Généralement, nous pouvons distinguer deux types de faux avis :
Si cette tendance à produire du faux va prendre de plus en plus d’importance, elle risque
finalement de se retourner contre les entreprises, auprès de ses consommateurs qui
s’estimeront trompés mais également de manière juridique.
Par exemple, en France, la loi sur les pratiques du marché contient des éléments
pouvant servir de base à des actions judiciaires. (“Loi du 6 avril 2010 relative aux
pratiques du marché et à la protection du consommateur, M.B., 12 avril 2010”).
L’article 91, 11°, interdit une entreprise d’utiliser un contenu rédactionnel dans les
médias pour faire la promotion d’un ou de plusieurs de ses produits sans l’indiquer
clairement dans le contenu, à l’aide d’images ou de sons clairement identifiables par le
consommateur. L’article 91, 22°, interdit d’affirmer faussement ou donner l’impression
que l’entreprise n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité
professionnelle, ou se présenter faussement comme un consommateur.
Les entreprises risquent ainsi des sanctions monétaires par l’intermédiaire d’amendes
pouvant aller jusqu’à 60.000 euros. Il est à noter que les condamnations pénales
peuvent être prononcées non seulement à l’encontre de la société mais également de ses
dirigeants.
Les faux avis de consommateurs sont devenus un tel enjeu sur le Web qu’ils suscitent
une réflexion globale de la part des États et de certaines institutions.
En France, l’Association française de normalisation (AFNOR), a évoqué en décembre
2011 l’éventualité de créer une norme dont l’objectif sera de définir « les pratiques
garantissant la fiabilité de la collecte des avis des consommateurs » ainsi que de
« permettre de mieux identifier les auteurs des messages en croisant les avis laissés par
un même internaute afin de vérifier leur pertinence » (http://bit.ly/Wc8F0m).
Aux États-Unis, le gouvernement fédéral a publié en avril 2011 un rapport, le « National
Strategy For Trusted Identities In Cyberspace » (http://1.usa.gov/TlQzE8), dans lequel
M
il s’engage « à collaborer avec le secteur privé, les gouvernements d’État, locales,
SI
tribales et territoriales, et les gouvernements internationaux à fournir l’appui et l’action
nécessaire pour rendre l’écosystème de l’identité une réalité. Avec un effort concerté de
AS
coopération de toutes ces parties, les individus se rendront compte des avantages de
l’écosystème de l’identité à travers la conduite de leurs opérations quotidiennes dans le
cyberespace ».
BY
– emprunter un langage qui est davantage axé sur les sens ou sur le concret,
– contenir des détails sur les lieux physiques avec des termes comme
« petit », « salle de bain plancher », etc. (difficile d’avoir ces détails lorsque la
personne n’est jamais venue dans les lieux).
M
SI
AS
BY
Réponse : 1. Vrai – Les vraies critiques décrivent souvent l’espace physique. 2. Faux –
Les fausses critiques utilisent plus de pronoms et d’adverbes. 3. Faux – Les fausses
critiques mentionnent souvent le nom complet de l’hôtel, contrairement aux vraies
critiques.
Les faux avis sont de ce fait de plus en plus soumis à l’expérience des internautes ou des
professionnels qui seront susceptibles de les identifier. Ces derniers ont évolué avec
leur milieu, ils se sont adaptés en développant au fur et à mesure des réflexes cognitifs.
Une entreprise démasquée, au-delà des risques juridiques, peut de ce fait provoquer une
crise.
Faux profils
Mais certains de ces commentaires apparurent très vite suspects tant ils défendaient la
marque avec ardeur. Après vérification des auteurs, et aveux de l’agence de
BY
Comme l’explique Cédric Deniaud, consultant en médias sociaux, « sur les médias
sociaux, il faut être agile au risque de devenir fragile ». L’agilité sous-entend pour
l’entreprise une propension à pouvoir muter selon les événements spécifiques, et
BY
mais il s’agit d’une démarche nécessaire pour s’adapter aux médias sociaux.
Les employés font partie du prisme identitaire d’une entreprise, au même titre que les
consommateurs : leurs paroles ou leurs actes représentent souvent un autre aspect de la
société, que cela soit positif ou négatif. Cela peut concerner par exemple une altercation
avec un supérieur ouvrant à des critiques sur Twitter. L’actualité des médias sociaux est
coutumière de licenciements pour cause de mauvaise conduite des salariés vis-à-vis de
leur société ou de certains membres hiérarchiques.
L’entreprise n’est pas à visage unique, elle est constituée d’un ensemble d’acteurs qui
forme un grand tout. Pour que la société avance de manière coordonnée, il est fortement
conseillé d’inculquer une « culture des médias sociaux », à savoir initier les employés
aux enjeux qui y sont inhérents. Par exemple, cela n’a de sens de brider les médias
sociaux en interne, pour éviter certaines indiscrétions, alors que nombre d’employés ont
probablement internet à la maison et s’expriment tout autant. Il faut au contraire que
ces derniers appréhendent les risques, afin qu’ils comprennent le poids de leurs propos
dans le prisme qui façonne l’identité numérique de leur entreprise.
En cas de crise, même les employés avec toutes les meilleures pensées du monde
peuvent parasiter les processus de communication : le poids de leurs paroles peut être
sujet à interprétation. Par exemple il se pourrait que certains prennent fait et cause
spontanément pour leur direction. Les internautes pourraient y voir une forme de
pression interne déguisée ce qui renforcerait l’image négative de la marque.
Quelle que soit la teneur ou l’intention de leurs propos, les salariés sont par conséquent
une menace potentielle. Ils peuvent ainsi être à l’origine d’une crise, ou l’amplifier alors
même qu’ils cherchaient à provoquer l’effet inverse. Il faut que l’ensemble de
l’entreprise avance dans une direction unique si elle veut être à même d’éviter ou de
gérer certains événements. Il n’est pas ici question de créer une dictature de la parole,
mais bien d’encadrer les pratiques liées aux médias sociaux par une initiation aux
enjeux et une formation aux usages. Ceci s’applique d’autant plus en situation de crise.
Il est souvent recommandé de mettre à disposition de ses salariés une charte
d’utilisation des médias sociaux, dont certaines parties pourront être imposées à
condition que d’autres soient liées à des conseils. Dans une interview accordée au
Journal du Net, Paul Hebert de la Commission Nationale de l’Informatique et des
Libertés (CNIL) déclare :
« La charte informatique ne doit pas se contenter d’interdire toute une série d’actions
aux salariés. Elle doit être accompagnée de mesures techniques et organisationnelles
efficaces pour garantir son application. De même, la sensibilisation et la formation des
M
salariés sont nécessaires : il faut aussi savoir faire preuve de pédagogie »
(http://bit.ly/QhEWjn).
SI
Il est essentiel de ne pas agir en terme de privation mais de prévention, par la mise en
AS
Généralement une charte sur les médias sociaux aborde plusieurs points tels que :
Attention cependant, une charte sur les médias sociaux ne saurait être efficace si elle se
présente sous la forme d’un texte qui serait trop long à lire. Elle devra être concise, mais
précise, en abordant principalement des règles élémentaires. L’objectif est de faciliter sa
lecture et donc son acceptation par les salariés. A vouloir trop entrer dans les moindres
détails, l’entreprise se risque à ce que ses employés ne fassent que survoler le document
sans prendre en considération les contenus élémentaires.
Un exemple intéressant est la charte sur les médias sociaux d’Intel qui se divise en
plusieurs parties : la conduite en ligne, la protection de la marque et le bon sens
(http://intel.ly/QhF4za).
M
SI
AS
BY
Le premier volet est lié à la présence en ligne, qui est plus du domaine des bonnes
pratiques à adopter. Il se décline sous le terme « diffusion », et aborde des thématiques
comme l’intégrité, la transparence et l’honnêteté, qui sont souvent des leitmotive en ce
qui concerne toute présence en ligne. La charte rappelle à ses employés que leur « Votre
honnêteté (ou votre mauvaise foi) sera rapidement remarquée dans l’environnement
des médias sociaux. Faites preuve d’éthique et d’intégrité dans votre façon de
représenter Intel. ». Lorsqu’ils s’expriment au nom de l’entreprise, cette dernière leur
conseil d’utiliser leur vrai nom et leur vraie fonction dans leur présentation
(transparence), de signaler s’ils ont un quelconque intérêt à défendre un point de vue
(honnêteté) et lorsqu’ils donnent une opinion en dehors de leur sphère professionnelle,
de signaler qu’ils le font de manière personnelle.
Le second volet concerne la divulgation d’information, et tombe indubitablement dans
le côté répressif. À juste titre, il se nomme « protection », ce qui implique une certaine
responsabilité de la part de l’employé. Intel indique que la transparence évoquée dans le
volet précédent ne doit pas mettre en péril la confidentialité de la société ou aller à
l’encontre des lois, et ce, même dans la sphère privée. En ce sens, il est interdit de
dévoiler ou d’aborder certains sujets secrets comme les litiges, les états financiers non
publiés ou des informations produits. De même, Intel met en garde en ce qui concerne
des attaques contre des concurrents (et Intel évidemment) et les conséquences
inhérentes. Enfin, tout ce qui est publié doit être véridique et non trompeur, les
réclamations devant être justifiées et approuvées. Intel rappelle qu’une fois publié, un
contenu peut facilement échapper à la marque, et qu’il faut donc faire état de prudence.
Le troisième volet concerne le bon sens. L’entreprise rappelle à ses employés que les
médias sociaux créent une barrière floue entre la sphère professionnelle et personnelle,
mais également entre ce qui est privé et public. Il faut donc faire preuve de
discernement et agir en prenant en considération ces problématiques. Intel rappelle
qu’en s’identifiant en tant que salarié de l’entreprise, l’employé sème un doute dans la
tête de ses interlocuteurs qui peuvent prendre ses propos comme une réflexion de la
société. Elle rappelle les règles inhérentes aux médias sociaux, comme le fait qu’ils sont
avant tout une discussion entre l’entreprise et ses consommateurs, que les propos ne
doivent pas déraper et qu’en cas d’erreur il est important de la reconnaître.
Étude de cas :
M
Historiquement, en France, il n’y avait, jusqu’en 2012, que trois
SI
opérateurs de téléphonie mobile : Orange, SFR et Bouygues.
Reposant sur un principe de licences accordées par l’état, le marché
AS
M
– Pour passer au Carré mini à 10 €, bim 150 € de frais de
migration »
SI
– Le plus petit forfait proposé sans réengagement ni frais : 4h + 40
AS
M
les événements. Parmi les outils suggérés, l’entreprise peut déployer en interne un
réseau social afin d’améliorer les échanges et d’identifier des personnes ressources. Il
SI
faut être vigilant à ce que la circulation de l’information favorise des communications
AS
suivent certaines actualités ou certains contenus en ligne. Leur expérience sur les
médias sociaux peut les confronter à des signes augurant une potentielle crise. Il faut
donc développer les réflexes pour qu’une fois une information jugée importante soit
identifiée, les salariés puissent la transmettre au service ou à la personne appropriée.
Ces derniers viennent donc compléter les outils de veille mis en place par l’entreprise,
car ils sont observateurs de secteurs qui peuvent ne pas avoir été jugés comme risqués.
Il faut prendre en considération que les employés ont accès à des contenus circulant
dans des cercles privés (amis, famille), qui ne sont de ce fait pas dans la sphère publique
et peuvent échapper à la vigilance.
Par exemple, une personne du service des ressources humaines identifie sur les médias
sociaux un événement qui pourrait donner lieu à une hypothétique crise (comme une
controverse nationale sur des méthodes de recrutement). Il doit pouvoir remonter
l’information rapidement à la personne ayant compétence, qu’il aura identifiée aisément
à l’aide d’outils adaptés. Améliorer les processus informationnels est donc vital pour
une entreprise.
M
Repenser l’entreprise en interne, c’est donc revoir les processus de validation
communicationnels afin qu’ils répondent aux nouveaux mécanismes. L’entreprise ne
SI
doit pas oublier que les médias sociaux reposent sur des logiques d’interactions : les
AS
échanges doivent être fluides. Cette nécessité de réduire la chaine de validation ne doit
pas uniquement s’appliquer pendant la crise, mais dès lors que l’entreprise va
communiquer sur le Web social. L’animateur de communauté ne saurait devoir attendre
BY
une validation hiérarchique lourde pour pouvoir converser avec des internautes
mécontents. Ces derniers cherchent à apprécier une situation précise, ils n’auront pas la
patience d’attendre éternellement des réponses à leurs questions.
2.6 Identifier les personnes ressources pour créer une cellule de crise
Lors de toute communication de crise, une équipe forme la cellule de crise, également
appelée « war room ». Cette cellule de crise est pensée en amont dans le but d’être
activée dès lors que l’entreprise fera face aux événements. Il est important d’intégrer un
volet propre aux médias sociaux et d’identifier des personnes ressources à des
problématiques identifiées. Il ne faut pas créer des cellules de crises différentes selon
les supports, mais bien inclure une nouvelle dimension à celle existante afin de
coordonner l’ensemble des efforts, qu’ils soient en ligne ou hors-ligne.
L’entreprise devra de ce fait identifier des personnes qui seront en charge de gérer la
crise sur les médias sociaux et qui vont mettre en applications des actions de
communication adaptées. Il faut de ce fait prendre en considération les spécificités de
ces nouveaux supports afin de faire appel à des employés ayant des compétences
pertinentes, comme l’animateur de communauté.
L’ensemble des membres doit avoir appréhendé les différents mécanismes et enjeux liés
aux médias sociaux dans le but de contribuer à la bonne tenue des opérations dans
l’espace et le temps. Il est donc essentiel que chacun soit conscient de son rôle et des
processus en vigueur, afin qu’aucun ne vienne parasiter les efforts de communication.
Par exemple, une entreprise ne pourrait nommer un expert et que ce dernier pense
pouvoir se substituer à l’animateur de communauté pour échanger directement avec les
consommateurs. Des règles de communication et d’expression publiques doivent être
établies afin de faciliter la bonne coordination des opérations. La culture des médias
sociaux doit être forte dans la cellule de crise, les opérations hors ligne pouvant avoir
une incidence sur les perceptions en ligne, et inversement.
Par exemple, lors d’une crise uniquement sur les médias sociaux, il peut être évoqué la
présence :
– D’un responsable, ainsi qu’un assistant pour l’accompagner dans ses tâches. Cette
personne devra avoir une situation hiérarchique suffisante permettant d’affirmer
une autorité « naturelle ». La légitimité sera un facteur clé déterminant pour
encadrer les différents acteurs, tant internes qu’externes.
– De personnalités propres à l’entreprise pouvant être les plus hauts représentants,
M
comme le directeur présentant ses excuses publiques. Ces personnes
SI
n’influenceront que peu l’orientation de la communication, mais par leur position
délivreront un message important.
AS
– Des experts tant à l’interne qu’à l’externe. L’expert va apporter une réponse que
sera et sera jugée comme crédible à une problématique soulevée par sa qualité.
BY
M
d’anticipation et de gestion de crise s’est structurée autour de 2007 et 2008. Si une
seule personne était allouée à ces missions aux débuts, un pôle pérenne regroupant 5
SI
personnes a été constitué en 2009. Depuis 2011, une nouvelle agence suit la SNCF sur
AS
constamment évolué. Notre analyse s’est affinée et améliorée avec le temps et avec
l’intégration des nouvelles plateformes de communication. Aujourd’hui, cette veille
Web n’a pas vocation à dénicher des informations isolées et peu visibles, mais à faire
remonter ce que voient et ce que veulent les clients en fonction de la nature du sujet.
En plus d’une surveillance continue, une veille est dorénavant effectuée à chaud au
moment de la crise par l’astreinte Web SNCF, qui se base principalement sur Twitter,
Google Actu, ou Google blogs, et dont l’objectif est de faire remonter en temps réel ce
que voit les internautes sur le sujet.
Pour ne pas rester cantonnés à une stratégie de défense, nous avons créé un site
internet « Opinions & Débats » (http://debats.sncf.com/) en 2007 pour centraliser les
plaintes et les interrogations, tout en assurant une prise de parole officielle en réponse
aux sujets postés par les utilisateurs. N’importe quel internaute pouvait de ce fait poser
ses questions et proposer un débat sur ce site, ce qui nous permettait de toucher une
large audience sur une plateforme que nous maîtrisions. Quatre ans plus tard, le site
contenait 21000 pages de texte, soit un contenu extrêmement bien référencé en ligne
sur tous les sujets SNCF. Au départ dédié au débat autour de sujets de fond liés à
l’entreprise, les internautes ont graduellement fait dévier la plateforme vers de la
relation client. La relation client étant la première demande en ligne, il s’agissait de la
première chose à laquelle il fallait répondre. Nous avons donc axés nos efforts pour
répondre à ces attentes.
Mais au bout d’un moment, nous avons constaté qu’il y avait peu de débats productifs
qui émergeaient vraiment à travers cette interface, chacun créant son propre débat et
essayant de le faire vivre. En analysant ce phénomène de plus près, nous avons compris
qu’au-delà de la relation client, les usagers étaient principalement guidés par
l’actualité, c’est ce qui finalement se retrouvait au cœur des posts. De ce fait, la SNCF
opère actuellement une réorientation du site pour restituer l’actualité de la société et la
mettre au centre des échanges. Ces informations sont principalement issues des
médias en lignes, des blogs, de certains forums et de Twitter. L’idée est de rester à la
source de cette actualité pour faire baisser la pression et dégonfler les contrariétés.
La SNCF a donc créé un réseau d’experts en interne pour intervenir sur ce site internet
et créer du contenu qualitatif, factuel et pédagogique. Ils ont également pour vocation
de répondre aux interrogations des internautes, dans le but d’informer et de rassurer,
en renvoyant le client vers les contenus appropriés. Les contenus uniques créés sont
par la suite partagés sur Twitter pour toucher une large audience. Ce site nous a permis
de gagner en réactivité pour repérer des problèmes et y répondre.
M
La nouvelle version du site « Opinions & Débats » permettra à l’entreprise de créer des
sujets de discussion de manière pro-active. En fonction de la veille servant à écouter ce
SI
qu’il se dit et à dégager des problématiques, la SNCF recensera les informations qui
AS
intéressent les clients et orientera son discours en alimentant des conversations autour
des sujets sélectionnés de manière pédagogique.
La SNCF dispose de 3 axes principaux où les médias sociaux jouent un rôle
BY
prédominants :
– La relation client : Tout l’écosystème digital de la SNCF est basé sur la relation
client. Les études internes et autres cartographies ont donc révélé que cette
thématique représente le 1er sujet (en volume) de requêtes des internautes
évoquant l’entreprise. Dans notre organisation, nos prises de paroles via des
plateformes sociales se font principalement par des community managers, eux-
mêmes affiliés à des régions et des branches précises des secteurs d’activité de la
société. L’ensemble de ces démarches nous permet aujourd’hui de ne pas être
démunis lorsqu’une crise surgit. Notre maîtrise de la relation client permet de ne
pas parasiter nos initiatives de gestion de crise, et surtout de faire baisser la
pression.
– L’actualité et la réputation de l’entreprise : Les débats de fonds et les messages
sensibles pouvant provoquer une crise existent depuis longtemps. Nos études ont
confirmé que l’actualité SNCF était le premier sujet (en volume) de conversations
en ligne. Une communauté plus restreinte (même si elle reste large) qui débat
autour des derniers événements et qui commente beaucoup les sujets liés à
l’enseigne. Parmi ses membres, beaucoup de blogueurs, journalistes ou
associations d’usagers en lien avec les thématiques de la SNCF, qu’il faut écouter
pour orienter son discours.
– L’influence positive : Créer des contenus enrichissants et valorisants peut
contribuer à générer du positif autour de la marque, mais toujours en répondant à
des besoins ou des envies des internautes. Les principaux sujets potentiellement
positifs sont le recrutement, les bons plans promos, la marque en elle-même
(passionnées du train et de la marque SNCF au sens large) et les technophiles sur
des sujets comme l’open data et l’innovation.
Les médias sociaux se sont ainsi imposés d’eux-mêmes pour répondre à l’ensemble ces
problématiques. En ce sens, nous pouvons dire que les crises nous ont fait clairement
avancer, que ce soit en terme de positionnement ou de présence. En outre, chaque
perturbation nous a permis de mieux comprendre le fonctionnement de ces interfaces
et de savoir les maîtriser pour améliorer notre communication. Twitter a pris une place
très importante dans la gestion de crise. Un fil Twitter dédié à la rubrique « questions
et réponses » (@SNCF_QR) est par exemple très actif. Nous disposons à présent d’une
multitude de comptes sur ce média pour répondre aux différentes problématiques
auxquelles nous devons faire face, comme @SNCF_infopresse pour les informations
M
presse, @SNCF_la_radio pour les grandes lignes ou @clt_VoyagesSncf pour la relation
client du site commercial voyages-sncf.com.
SI
L’exemple des campagnes présidentielles de 2012 est une bonne illustration de
AS
l’efficacité de ce système. La SNCF avait une actualité très chaude en tant qu’entreprise
publique. Une polémique a émergé sur les tarifs des billets vendus aux organisations
politiques pour gérer leurs déplacements. Le front de gauche a ainsi reproché à la SNCF
BY
de faire payer plus cher les billets aux militants de gauche qu’aux militants de l’UMP.
La veille mise en place a rapidement fait remonter le fait que certains militants étaient
très actifs sur le sujet. Face à cette attaque frontale, la SNCF a répondu de manière
factuelle sur « Opinions & Débats » en expliquant comment une organisation peut
affréter des trains et à quels tarifs, en précisant les différentes modalités pour payer les
trajets. Un éclaircissement transparent qui a montré qu’il n’y avait aucune différence
entre les différents partis. Le post a été relayé sur Twitter, ce qui a immédiatement
calmé le jeu. Deux ou trois ans auparavant, la SNCF aurai pu ne pas être en mesure de
désamorcer cette situation, car elle n’était pas vraiment préparée à ces modalités de
réponses. Les outils actuels n’étaient pas en ce temps utilisés et maîtrisés comme
aujourd’hui. Ces outils sont dorénavant pérennes dans l’entreprise, mais également
connus des utilisateurs et des clients.
ajoutés de manière pérenne sur le site pour être bien référencés. L’idée est que nous
puissions répondre indirectement aux internautes cherchant des informations à ce
sujet.
Cette politique de prévention permet de faire baisser la pression pour être la source de
l’actualité et ne pas la subir.
Avez-vous mis en place des mécanismes à l’interne pour encadrer l’usage des
médias sociaux, comme des chartes ou des formations ?
La SNCF dispose de 240.000 salariés. Il est donc logique que beaucoup d’agents
s’expriment en ligne, et aisément concevable qu’il nous soit difficile de tous les
toucher. L’idée n’est évidemment pas de contrôler tout ce qu’ils disent, mais de repérer
ce qu’ils font et essayer de leurs donner les bonnes infirmations. Nous n’avons surtout
pas une volonté de les formater, ils sont libres de leurs réponses. D’après les études
menées, nous observons que dans les faits, ils prennent la parole pour parler de
l’entreprise surtout pour défendre leur métier. Ceci implique qu’ils ne défendent pas
nécessairement l’enseigne, mais leurs compétences. Globalement, le rendu est très
positif, nous estimons qu’environ 75% des interventions salariales contribuent à
procurer une bonne image de la SNCF. Au lieu de rester rigides sur l’anticipation des
crises, nous nous sommes rendu compte que ces témoignages représentaient une
opportunité. Il ne fallait donc pas leur interdire de parler et de défendre leurs idées.
Prenons l’exemple des récentes mutations du réseau ferroviaire français. Une stratégie
de rénovation des lignes a récemment nécessité d’importants travaux, ce qui a
forcément eu un impact sur la circulation et sur les horaires. Il a donc fallu réaménager
tous les horaires. Beaucoup de questions ont naturellement été posées, environ 2.000
sur le premier mois. Sur ces 2.000 questions, 1.200 ont été traitées directement par des
agents et des experts SNCF (chiffres certifiés), sans que l’on leur en donne ai donné la
directive. Nous ne sommes pas passés en interne pour demander aux salariés de
répondre aux clients. Ils ont répondu via notre site « Questions & Réponses »
(http://questions.sncf.com), et d’autres supports communicationnels à notre
disposition. Un chef de bord a même avoué avoir été à la rencontre des voyageurs ayant
des soucis à bord du train, pour leur donner son adresse mail et échanger avec eux pour
les rediriger vers les contenus expliquant les raisons de l’incident. Une modération de
terrain efficace, solidaire et collaborative.
Notre objectif consiste de ce fait à repérer ces forces vives pour leur dire qu’ils ne sont
pas seuls, et tenter de les fédérer. Toutefois, nous ne souhaitons pas en faire des
communicants, car leur légitimé tient avant tout au fait qu’ils soient contrôleurs, à la
M
vente ou à l’aiguillage. Par contre, il est de notre devoir de prendre contact avec eux
SI
pour les informer des canaux communicationnels sur lesquels ils peuvent prendre la
parole et créer des contenus s’ils le souhaitent.
AS
Néanmoins, des guidelines circulent en interne pour sensibiliser les services RH,
presse et autres sur ces thématiques online. Une charte numérique est même envoyée
BY
aux principaux intéressés, en plus de la charte éthique, davantage pour les informer sur
les enjeux digitaux que pour les restreindre dans leurs champs d’action. Une formation
digitale est également régulièrement dispensée aux équipes en charge de la
communication pour faire le point sur les évolutions des plateformes.
M
a à dire puissent être également intéressées par les solutions que l’on peut lui apporter.
L’essentiel est de rester visible à tous ces individus gravitant autour de ces cas isolés,
SI
pour les influencer positivement.
AS
L’idée de ce schéma organisationnel est de dépasser les médias pour ne pas dépendre
de leur vision des choses. Nous cherchons à divulguer la réalité et montrer nos efforts
pour que les clients en prennent conscience.
M
La SNCF a énormément avancé dans l’organisation de ses équipes. Car ce qui est le
SI
plus compliqué à mettre en place derrière ces outils et ces actions chronophages, c’est
l’organisation et les gens qui les gèrent. Les équipes sont aujourd’hui pérennisées avec
AS
des fiches de postes claires. Elles savent ce qu’elles doivent faire et comment utiliser
ces outils communicationnels. Nous rassemblons les gens qui travaillent sur ces
thématiques pour leur proposer des formations digitales et leur enseigner les bonnes et
BY
Une prise en charge humaine et individualisée sur le digitale via Twitter, qui a
largement contribué à atténuer le bruit autour de l’événement. Cette solution complète
BY
en effet le dispositif info trafic existant (que ce soit par l’application pour les
smartphones et par le site info-ligne). Twitter permet ainsi de toucher beaucoup
d’utilisateurs instantanément et de manière exhaustive sur le sujet. Un vrai bénéfice
pour la prise en charge client.
D’autre part, nous avons posté sur le compte Twitter presse de la SNCF, 1 heure après
le début de la crise, les photos du câble sectionné et des agents qui travaillaient autour.
Cette publication a généré une prise de conscience collective du problème, et la
reconnaissance d’un acte de malveillance et non de négligence. Ce contenu a été repris
et retweeté par beaucoup d’internautes, ce qui a propulsé ce message dans les tops
tweets, devant les médias en ligne (ce qui nous permettait d’être nous-mêmes à la
source de notre actualité). Le post incluait également un lien vers le site pour avoir
plus de détails sur les spécificités de la situation.
Au final la crise a duré toute la journée, mais par le canal Twitter, nous avons pu
prendre en charge la communication autour du sujet pour faire baisser la pression vis-
à-vis des médias, mais également vis-à-vis des clients.
Parce que les médias sociaux ne sont pas que l’affaire des marketeurs et des
communicants, nous avons lancé en avril 2012 un dispositif interne pour acculturer,
responsabiliser et encourager les postiers à nous rejoindre dans cette aventure des
médias sociaux. Dans une entreprise importante comme l’est le groupe Le Poste, le
travail d’ « évangilisation » peut prendre du temps. Mais faire des postiers nos
premiers ambassadeurs est un objectif important pour nous.
Concrètement chaque postier a reçu un guide des bonnes pratiques des médias sociaux
qui donne très simplement les grands principes d’utilisation des médias sociaux. Une
vidéo au ton décalé a également été créée « Julien et la Thompagnie », que nous avons
également déposé sur YouTube. Enfin, pour les postiers qui dans leur fonction
prennent la parole au nom de La Poste, une charte des médias sociaux spécifique
explique la stratégie de présence du Groupe sur les médias sociaux et les objectifs
recherchés. Elle détaille les règles d’expression et modes de gouvernance pour les
collaborateurs qui seraient amenés à prendre la parole au nom du Groupe La Poste.
Elle vise à renforcer la cohérence des prises de paroles.
créer les moyens de nouveaux échanges et engagements avec nos clients, pour la faire
évoluer.
Partie 3 Le risque
3.1 Qu’est ce qu’un risque
Avant d’établir une stratégie de communication de crise, l’entreprise doit apprécier des
risques afin de scénariser des réponses cohérentes. Le dictionnaire Larousse définit le
risque comme étant la « possibilité, probabilité d’un fait, d’un événement considéré
comme un mal ou un dommage ».
Dans un premier temps, l’entreprise doit percevoir et identifier les risques selon un
contexte et un environnement donné. Il est impératif d’intégrer dans le processus des
outils, des expertises ou des personnes qui pourront agir à la mise en place d’un
scénario de réponses. Par exemple la perception des risques pouvant varier d’un
employé à un autre, il est important de prendre en considération l’ensemble des
perceptions.
Une fois les risques déterminés, l’entreprise va devoir :
– les catégoriser afin d’évaluer les secteurs les plus susceptibles d’être touchés,
– mesurer leur probabilité et les fréquences qui y seraient inhérentes,
– les classer par ordre de priorité selon leur niveau d’importance.
Elle va pouvoir placer ces risques sur une matrice de criticité selon deux facteurs, la
gravité et la fréquence, déclinés chacun en quatre niveaux.
M
– « Gravité de niveau 1 : des difficultés surviennent dans l’organisation et/ ou les
relations, mais leur résolution se fera naturellement dans le cours de l’action.
SI
– Gravité de niveau 2 : des problèmes organisationnels et relationnels créent des
AS
Une fois les risques segmentés, l’entreprise va alors pouvoir anticiper un plan de
réponse. Elle doit en premier lieu déterminer les objectifs à atteindre à court et long
terme pour chaque risque. Puis, elle va élaborer des options de réponses en prenant en
considération le travail établi en amont afin d’identifier une stratégie cohérente. Enfin,
elle va mettre en action sa stratégie, qu’elle va surveiller, évaluer et améliorer en
conséquence.
ouragan est un aléa majeur. S’il se déroule dans l’océan, il est moins vulnérable.
Un risque, et son importance, s’identifient donc au travers au travers de ces deux
variables que sont les aléas et le facteur vulnérabilité. (Re : thèse doctorale Bérubé,
2012).
M
SI
AS
BY
1. Contenu du commentaire.
2. Réponse : Est-ce qu’on offre une réponse au commentaire? Oui ou non. Si neutre
ou positif, une réponse n’est pas essentielle, lorsqu’il est impossible d’y offrir une
valeur ajoutée ou lorsque le délai de réponse est dépassé. Dans ces cas
uniquement, laisser filer sans offrir de réponse.
3. Délai : Délai d’intervention maximal suggéré. Dans une perspective 2.0, les délais
sont beaucoup plus courts et il n’est pas recommandé de suivre uniquement les
heures ouvrables pour traiter les demandes.
4. Contenu de la réponse ou action à prendre.
5. Exemples : les exemples de réponses proposés font parfois référence au document
« question-réponse » de la compagnie, présentant les réponses détaillées pour
chaque question précise. Il sera important d’effectuer une mise à jour de ce
document afin d’adapter le contenu des réponses à la logique des médias sociaux :
texte court et ton conversationnel. Pour illustrer l’adaptation des contenus aux
plateformes, un exemple de réponse est présenté pour les plateformes Facebook,
YouTube et les blogues, et un autre exemple est proposé pour Twitter.
M
– Respect : Respecter les opinions des internautes.
SI
– Transparence : S’identifier en tant qu’employé de la compagnie et inscrire ses
initiales lorsqu’une réponse est offerte à un internaute.
AS
devra donc évaluer l’impact des signaux déclencheurs, des signaux d’alerte, et définir
les règles de conduite ainsi que des prescriptions particulières.
Ce sont des processus toujours continus. On ne peut prévoir tous les risques mais on
peut généralement connaître leur nature, comment se prémunir et à partir de là,
élaborer des scénarios généraux adaptables à la situation.
Sur les médias sociaux, 90% des crises sont prévisibles, il y a donc une opportunité
d’établir des scénarios à l’avance, en étant pro actif. Les 10% restant sont improbables,
car ils correspondent à des variables qui seront spécifiques à la crise. Par exemple, lors
des scénarios, il est établi que l’entreprise peut être confrontée à une personne
mécontente. Cependant, la nature de son mécontentement ne peut être anticipée. C’est
elle qu’il faut documenter et analyser pour pouvoir le gérer.
veille devra s’effectuer avant, pendant et continuera après une crise afin de surveiller
dans le temps et l’espace l’évolution des efforts de communication. Ce n’est pas parce
qu’une crise est terminée qu’elle ne pourrait pas impacter sur l’image de l’entreprise. Il
BY
faut donc faire preuve de vigilance, quand bien même les événements seraient passés.
Une étude publiée par Satmetrix (http://bit.ly/OWpI6k) en mai 2012 portant sur les
entreprises américaines a mis en évidence que seulement 49% des répondants traquent
et effectuent un suivi des commentaires des consommateurs sur les médias sociaux, et
que 28% ne font rien. Pourtant, dans de nombreux de cas, une simple veille permet
d’éviter de subir une crise simplement par l’appréciation des réactions et par une
réponse adaptée. Il ne faut pas croire au mythe de l’inévitabilité : en fonction de la
typologie des événements (communicationnels et émotionnels surtout), il est possible,
la plus part du temps, d’apporter une réponse crédible qui va permettre d’enrayer le flot
de critiques. Mais pour cela, il faut identifier les conversations à leurs prémices,
lorsqu’elles n’ont pas fédéré suffisamment d’internautes, qu’elles n’ont pas encore de
visibilité et de viralité.
Cependant, l’entreprise ne pourra effectuer ce travail que sur des échanges publics. Elle
ne saurait, par leur nature, observer des conversations privées. Il faut donc prendre en
considération qu’en dépit de tous les efforts déployés, des éléments vont
inéluctablement échapper à la vigilance. Il est important de bien différencier ces
notions :
L’information publique est généralement catalysée dans les différents moteurs de
recherche et accessible facilement à tout un chacun. Elle correspond à des centaines de
milliards de pages dynamiques et statiques auxquelles il faut ajouter, selon les
technologies, des contenus sur les médias sociaux, comme Twitter ou Youtube par
exemple.
L’information semi-publique est présente sur des plateformes technologiquement
hermétiques. Elle n’est pas indexée dans les moteurs de recherche classique mais peut
être identifiée par un utilisateur enregistré ou au travers d’outils spécifiques. Par
exemple, les contenus publics Facebook ne sont pas indexés, mais accessibles aux
utilisateurs.
L’information privée peut se définir comme tous les échanges privés auxquels
l’entreprise ne pourra jamais avoir accès, comme des profils privés, des messageries
internes ou des tchats.
4.2 Rechercher
Une entreprise dispose aujourd’hui d’un ensemble d’outils gratuits ou payants lui
permettant d’identifier des discussions augurant une crise. Avant de mettre en place des
M
outils adaptés, la société doit dans un premier temps prendre en considération la
typologie des plateformes qu’elle va souhaiter surveiller. Si aujourd’hui les médias
SI
sociaux sont le premier réflexe lorsqu’il est évoqué des discussions consommateurs, il
AS
faut prendre en considération l’ensemble du Web social, comme les forums, les blogs ou
les Q&A par exemple, mais également des sites plus traditionnels comme les
plateformes d’actualités ou les moteurs de recherche. Il est important ne pas se focaliser
BY
uniquement sur les éléments les plus visibles, les plus citées, comme Twitter ou
Facebook, mais bien prendre en considération le panorama global du Web. Par exemple,
les entreprises voient souvent les forums comme des éléments désuets au motif que la
presse spécialisée ou les blogueurs n’en parlent plus. Pourtant, ce sont des plateformes
encore très actives et populaires, notamment chez les consommateurs.
De nombreuses entreprises ne se limitent qu’à une veille sur leur nom, produits ou
services, pensant que cette vigilance leur permettra d’identifier à temps des
informations à risque. Attention, ne se limiter qu’à sa réputation numérique est une
erreur. Il faut prendre en considération l’environnement global dans lequel la société
évolue, comme se tenir informé sur les actualités de domaines précis ou prendre en
considération les actions de certains concurrents. Ainsi, l’entreprise va pouvoir se placer
dans un contexte et anticiper que son nom puisse être associé à certains événements.
Par exemple, cela peut être le cas de processus de fabrications suscitant une polémique
dans les médias. En identifiant cette actualité en amont, l’entreprise pourra engager des
processus en interne afin de mettre un terme à ces pratiques. Elle pourra de ce fait, soit
ne plus être concernée, soit annoncer qu’elle a effectué des changements à la lumière de
faits.
L’entreprise va donc devoir veiller, sur le nom de l’entreprise, de ses produits ou de ses
services, sur des mots clés liés aux risques identifiés, et par l’identification de sources
d’informations, comme des blogs, des sites concurrents ou des plateformes d’actualité.
Au fur et à mesure de sa veille, la société va pouvoir compléter sa base de données, en
découvrant de nouvelles plateformes ou en appréhendant de nouveaux mots clés.
M
pouvant être lu que par un lecteur adapté, et qui peut contenir des informations
textuelles, vidéos ou photographiques. Il est généralement représenté par une icône
SI
orange.
AS
BY
Google propose également un autre agrégateur, appelé Google Reader, qui est lui aussi
très pertinent car connecté au réseau social Google + (qui tend de plus en plus à devenir
une plateforme sociale d’entreprise). Ainsi, une veille pourra être réalisée et partagée
auprès d’une liste de contacts établis (pouvant être des personnes de la war room par
exemple).
M
SI
AS
BY
M
SI
AS
médias sociaux. Manuelle, à savoir en utilisant les moteurs de recherches intégrés à ces
plateformes, ce qui prend un certain temps, ou par l’automatisation au travers de
services dédiés. Un outil que nous recommandons est Hootsuite, qui offre la possibilité
de réaliser une veille en temps réel sur des sites comme Twitter ou Google+ et de
pouvoir répondre aux commentaires. En spécifiant des mots clés, Hootsuite va effectuer
une recherche sur les volumes conversationnels sur les médias sociaux sélectionnés.
Plus les mots clés spécifiés seront pertinents, plus la veille sera efficace.
Il y a beau avoir un ensemble d’outils gratuits ou payants, il faut comprendre qu’ils ne
sont pas les plus imperméables : certaines informations peuvent inéluctablement
échapper à la surveillance. Il est recommandé de varier les solutions afin d’obtenir un
spectre large et d’effectuer de temps à autre une veille de manière manuelle et non
automatisée.
Boite à outil
Un outil gratuit, mais disposant d’une solution « premium », que nous recommandons
est le site en ligne Diigo. Ce dernier propose un ensemble de fonctionnalités simplifiant
le stockage, l’organisation, la diffusion et la collaboration autour d’informations
sauvegardées.
Diigo répond parfaitement aux points capitaux exprimés par Christophe Deschamps.
Parmi les diverses fonctionnalités, nous noterons la possibilité de :
Diigo offre également une barre d’outils intégrable sur les navigateurs Web (Firefox,
Chrome, Explorer) qui permet notamment :
BY
M
– la veille peut nous être d’aucun secours (ce qui ne nous exonère pas de la mettre
en place) ;
SI
– la crise peut parfois être transformée en opportunité.
AS
comptes), Yahoo Pipes (comme outil de filtrage), Diphur (comme outil de surveillance
d’un site ou d’une page web), Google Translate (comme outil de traduction) et
BY
Scrapbook (add-on Mozilla qui permet de capturer des sites ou des pages Web afin de
les mettre en mémoire).
La liste pourrait être bien plus longue mais au risque de me répéter, l’outil n’est rien
sans l’humain (expertise, méthode et management) et il doit s’insérer parfaitement
dans l’ensemble du cycle de l’information.
Chapitre 3
Stratégie d’un plan de communication
Les médias sociaux ont profondément modifié la communication de crise en incluant
une couche sociale, et par là même virale. Le facteur temps est encore plus déterminant,
auquel il faut dorénavant ajouter les nouveaux mécanismes inhérents au Web tel qu’il
est aujourd’hui, notamment le rôle central des internautes. Ces derniers vont avoir
autant de poids, si ce n’est plus, que la presse traditionnelle : commentaires en temps
réels, partages, actions communes…
Toute personne morale ou physique a dorénavant potentiellement autant d’outils
d’expressions à sa disposition que les plus grandes entreprises. De plus, les
consommateurs se fédèrent autour d’espaces publics ayant une forte visibilité (comme
un blog ou une page Facebook), constituant une masse hétéroclite pouvant influencer
les processus décisionnels de puissantes multi-nationales.
L’entreprise ne devra pas attendre que des événements se produisent pour agir, elle doit
M
avoir mis en place un ensemble de processus en amont afin de faciliter la bonne
conduite d’actions efficientes en aval. Il est de ce fait stratégique de réfléchir à un plan
SI
de gestion de crise, ce dernier ayant pour objectif de faciliter la mise en application
AS
pourrait être le fait de facteurs qui n’auront été, ou ne pouvaient être, pris en
considération. Il y a de ce fait une nécessité de penser sa stratégie comme adaptable à
un ensemble de situations possibles.
Convenons-en, il n’existe pas de solution miracle à mettre en place lors d’une
communication de crise tant celle-ci est dépendante d’un ensemble de facteurs propre à
une situation donnée. Il faut savoir identifier les risques, réaliser une médiation, et
lorsque la crise se déclenche de manière exponentielle, ne pas agir trop hâtivement afin
d’observer les faits et adapter ses actions en conséquence.
En juin 2011, une fausse photographie a circulé sur Twitter (pourtant datée de 2010)
montrant une affichette signée McDonald indiquant « suite à des problèmes de vols, les
clients afro-américains doivent désormais payer un supplé-ment de 1,50 dollars à
chaque achat ». Cela a provoqué un profond émoi chez les internautes, poursuivit par le
succès d’un hashtag #SeriouslyMcDonald’s fortement utilisé par des consommateurs
mécontents. McDonald a simplement réagi rapidement en indiquant sur ce média en
précisant qu’il s’agissait d’un faux document. Le restaurateur n’a pas eu besoin de
M
mettre en place un long dispositif car il a réagi rapidement en apportant une réponse
SI
crédible dans le temps et l’espace adéquat.
Lors de la construction d’une stratégie de communication de crise, il faut prendre en
AS
perdent en excuses alors que l’entreprise n’est en aucun cas responsable des
événements.
Il faut de ce fait prendre en considération les personnalités ayant autorité pour
s’exprimer au nom de l’entreprise (directeur, ingénieur) ainsi que les moyens qui
peuvent être mis en œuvre rapidement (réalisation de visuels nécessitant la présence
d’un graphiste).
L’US Air Force a par exemple réalisé un schéma de réponse afin d’anticiper une crise,
agissant ainsi lors de la phase de médiation. Dans ce schéma, l’armée préconise trois
étapes fondamentales dans la prise de décisions :
– L’analyse : L’analyse vise à appréhender des éléments relatifs à l’US Air Force
(voir chapitre 2).
– L’évaluation : L’évaluation passe par l’appréciation du message, qu’il soit négatif,
positif ou neutre et de l’émetteur.
– La réponse : La réponse est la phase finale qui doit apporter une réponse
cohérente.
Pour l’US Air Force, afin que la réponse soit jugée comme crédible, elle doit reposer sur :
La transparence : La personne ressource doit s’identifier comme appartenant à
l’entreprise et ne doit pas chercher à tromper sur sa nature.
La citation : Les sources doivent être citées en y incluant des liens, des vidéos, des
images ou d’autres références
Le recul : La personne en charge de la réponse doit prendre son temps pour répondre
de manière la plus juste possible.
Le ton : Le ton doit être reflet de la société et non celui de la plateforme
L’influence : La personne doit s’appuyer sur des blogs référents ayant de forts liens
avec l’US Air Force.
L’intérêt d’une veille trouve ici tout son sens. Observer les mouvements sur les médias
sociaux peut minimiser les impacts inhérents à cette phase et éviter une trop grande
propagation des messages, à condition d’avoir préparé en amont la publication de
contenus pouvant s’adapter à la situation observée (en l’occurrence un message
d’excuse par exemple). En tentant de mettre en application des actions de
communicationn dénuées d’un contexte, l’entreprise risque de trop se précipiter et
M
d’apporter une réponse inadaptée aux attentes et à la situation. Il faut donc envoyer un
SI
premier message simple et analyser les conséquences ainsi que les réactions afin
d’apprécier la nécessité de poursuivre les efforts.
AS
finalement embraser la toile et créer un effet inverse qu’à celui recherché. Il faut
évidemment écouter, observer ce qu’attendent les internautes pour pouvoir y répondre
de manière pertinente. La phase de médiation est une période charnière dans toute
communication de crise, celle qui est la plus assujettie au temps. L’entreprise ne devra
pas se précipiter, et à l’inverse, ne devra pas trop prendre son temps au risque de voir la
situation empirer (ce qui n’est évidemment pas toujours le cas).
Certaines entreprises passent directement à la phase suivante, la phase d’organisation,
préférant attendre de voir comme les événements se déroulent plutôt que de prendre le
risque d’envenimer la situation. Il y a cependant un réel danger autour de ce choix.
D’une part dans le fait de laisser une situation échapper là où une prise en considération
et une simple réponse auraient pu atténuer le bruit et d’autre part par le fait que cela
puisse dégager une mauvaise image auprès de ses consommateurs.
l’ensemble des membres de la « war room » doit travailler de concert à la bonne tenue
des opérations.
BY
L’entreprise doit tirer un enseignement des crises qu’elle subit au risque d’être
confronté un jour à de nouveaux événements qui lui échapperaient. Les crises sont en
effet une formidable opportunité d’apprendre de ses erreurs et de rectifier ses processus
en conséquence. Par exemple, Total a beaucoup appris de ses erreurs lors de la crise de
l’Erika, une marée noire survenue en 1999. Cet apprentissage lui a permis d’être plus
réactif lors d’explosion de l’usine AZF en 2001 qui cause de nombreuses victimes. Par
exemple, si lors de l’Erika, le président Thierry Desmarest n’était venu sur les lieux de
l’accident qu’après les pressions exercées par le gouvernement, il est arrivé le jour
même lors de la catastrophe suivante.
1.6 L’espace
Si réagir dans le temps est un impératif, il faut également prendre en considération
l’espace, à savoir la plateforme la mieux adaptée pour diffuser une réponse cohérente et
efficace. Quand bien même l’entreprise peut avoir mis en place des actions de
communication adaptées à une situation donnée, son discours risque de résonner dans
le vide si elle venait à l’appliquer au mauvais endroit.
Les médias sociaux ne doivent pas être un réflexe mais bien une réflexion. Il n’est pas
rare de voir des entreprises faisant face à un certain mécontentement ouvrir des espaces
de discussion sur des plateformes en fonction du nombre d’utilisateurs sans se soucier
si leur cible y sera présente ou active.
Ces réflexes de ne voir que par les sites ayant de fortes communautés d’utilisateurs
reposent en partie sur des processus de communication liés à l’audience, comme la
M
télévision, les journaux ou encore la radio. Sur les médias sociaux, il faut penser par la
relation pour pouvoir influencer la perception des internautes par des réponses
SI
adaptées. Il y a donc un risque important d’appliquer une stratégie qui ne saurait
AS
prouver sa pleine efficacité, soit parce que l’espace n’est pas adapté technologiquement
ou tout simplement parce que la cible ne s’y trouve pas.
Avant même de lancer les processus de communication sur Internet, l’entreprise doit
BY
par conséquent analyser l’origine du bruit et localiser les lieux de sa propagation. Pour
cela, elle devra agir avec célérité en utilisant des outils de veille pour espérer identifier
des foyers conversationnels (qu’ils soient positifs, négatifs ou neutres) traitant de la
crise. Cette phase est essentielle pour déterminer les espaces qui seront les plus à même
pour mettre en place des actions de communication.
Ces espaces peuvent être aussi bien les médias sociaux que les forums, les journaux
d’information en ligne ou les blogs. Le fait est qu’il existe quantité d’espaces où une
crise peut prendre de l’ampleur. Pour faire une analogie, les pompiers s’évertuent
d’abord à éteindre le foyer principal, ils ne s’intéressent pas en premier lieu à des
bâtiments annexes au motif qu’ils sont plus visibles du grand public. Si l’entreprise se
positionne sur un espace vide où elle ne sera pas entendue, elle risque de laisser la crise
se propager au travers d’autres médias moins importants en terme de nombre
d’utilisateurs mais au potentiel viral certain.
Étude de cas :
– Être à l’origine.
– Influencer les actions de communication, positivement ou négativement.
– Entretenir une certaine image dans le temps.
deviennent naturellement majoritaires. Cela peut s’expliquer par le fait que la crise peut
les toucher sur certains aspects (exemple de l’environnement) ou parce que le discours
BY
les dérange. Il existe de nombreuses raisons pouvant pousser des internautes n’ayant
jamais consommé de produits à venir se joindre aux consommateurs. Cependant, leurs
revendications vont généralement dans le sens commun : répondre aux attentes des
consommateurs, c’est répondre aux attentes des internautes.
Selon Dawar et Pillutla, il existe plusieurs variables qui vont avoir un impact sur la
réaction des consommateurs, mais également applicable aux internautes en général :
Distance temporelle avec la crise : Un internaute ne va pas réagir de la même façon s’il
prend connaissance d’une crise le jour même de sa naissance, une semaine après ou un
mois après. Son désir de participer ou d’apporter son point de vue en sera directement
influencé.
Sensibilité du consommateur : Un consommateur peut être indifférent ou choqué par
une crise, selon si cette dernière se rapporte à des valeurs, croyances ou passions qui le
concernent. De même, un individu très investi dans une communauté pourra être
beaucoup plus vindicatif si la marque qu’il affectionne s’avère être un imposteur, ou
manque à ses promesses.
La réaction de l’entreprise : C’est ce qui va aiguiller le plus la perception des
internautes. Ils attendent de voir comment la marque va réagir. Cette réponse peut
apaiser ou au contraire accentuer davantage la crise.
L’historique de la relation marque/client : Si une entreprise a déjà connu des crises
auparavant, il y a fort à parier que les internautes seront moins indulgents avec la
société. Les événements du passé peuvent s’harnacher à l’image de l’entreprise et
revenir d’actualité beaucoup plus tard, pour refaire du bruit.
Contexte social : Le contexte joue énormément sur la susceptibilité et l’émotion des
individus. Si les journaux télévisés ne parlent que du chômage, l’entreprise devait éviter
de communiquer sur un plan de licenciement par exemple.
Les internautes réagissent différemment face à une crise, mais ils ne vont pas agir de la
même manière, au même niveau. Ainsi, certains internautes vont être plus actifs, là où
certains seront dans des logiques de relais.
Le cabinet Forester dresse une échelle d’engagement des internautes sur la toile, qu’il
met à jour régulièrement. L’édition 2012, qui porte sur le troisième trimestre 2011
dresse ainsi un portrait intéressant des acteurs du web social :
– Les créateurs (24% aux USA et 23% en Europe) : corresponds aux internautes qui
créent et publient des contenus, qu’ils soient textuels, vidéo, musicaux ou
photographiques. M
SI
– Les conversationnels (36% aux USA et 26% en Europe): ils ne font que mettre à
jour des statuts, que ce soit sur des réseaux sociaux (Facebook) ou des micros blogs
AS
(Twitter).
– Les critiques (36% aux USA et 33% en Europe): ils publient des avis sur des
BY
produits, des commentaires sur des blogs, des mises à jour sur des wiki ou
participent aux forums.
– Les collectionneurs (23% aux USA et 22% en Europe) : ils utilisent les flux RSS,
ajoutent des tags à des photos.
– Les sociables (68% aux USA et 50% en Europe): Ils maintiennent les profils à
jour et visitent les réseaux sociaux.
– Les spectateurs (73% aux USA et 69% en Europe) : ils lisent des blogs, écoutent
des podcasts, regardent des vidéos, lisent des forums ou autres types de contenus.
– Les inactifs (14% aux USA et 69% en Europe) : ne font rien de ce qui est évoqué
plus haut.
Il faut bien comprendre que la relation d’un consommateur avec une entreprise varie
selon les individus, de même que la relation d’un individu à un autre. Tous ne réagissent
pas nécessairement de la même manière, certains se positionnant comme acteur
principal, d’autres comme figurant venu grossir les rangs et enfin, pour beaucoup, des
spectateurs. Plusieurs variables sont à prendre en considération, on ne saurait définir
un comportement global aux internautes. Par exemple, plus l’entreprise aura créé une
relation de confiance, plus son discours sera inexorablement jugé comme crédible.
Fasse à une crise, nous pouvons voir émerger trois types de comportements :
La passivité
La plupart des internautes demeurent passifs, au sens où ils ne chercheront pas à
s’exprimer, mais plus à apprécier une situation donnée, de manière plus ou moins
assidue. Cela dépendra évidemment de la nature de la crise, de la façon dont ils se
sentiront proches des problématiques. Ce n’est pas parce qu’ils ne prennent pas la
parole qu’ils ne sont pas juges ou qu’ils n’ont pas de volonté de boycotter une marque
dans le réel. Au contraire, ils vont se forger une opinion qu’ils ne confronteront pas, ou
n’étaleront pas sur la place publique pour tout un tas de raisons qui leur sont propres,
mais qui sera probablement influencée en partie par ce qu’ils liront. Il faudra donc
prendre en considération dans l’application de sa stratégie de communication cette cible
tacite, notamment par la diffusion d’informations claires, transparentes et ludiques. Le
message va s’adresser principalement à cette catégorie. Sur Internet, nous parlons de la
règle des 1% : 90% d’internautes passifs, 9% de relais et 1% d’actifs.
Les « bourreaux » de la marque
M
« L’origine du terme [Boycott] vient du nom de Charles Cunningham Boycott (1832-
1897), intendant d’un riche propriétaire terrien de l’Irlande de l’Ouest (comté de Mayo)
SI
durant le XIXe siècle qui traitait mal ses fermiers et subit un blocus de leur part » -
AS
Wikipédia.
Lors d’une crise, certains internautes seront plus actifs que d’autres, voire plus
vindicatifs. Ces internautes, que l’on pourrait appeler « bourreaux », vont être très
BY
présents dans les discussions générales. Ils peuvent critiquer les actions de
communication, mais également toute autre forme de contenus relatifs aux
événements. Ainsi, il n’est pas rare de voir ces internautes venir commenter un média
en ligne ou un blog traitant de la crise pour faire état de leur émotivité.
S’ils agissent de cette manière, c’est avant tout parce qu’ils ont été affectés par les
événements et qu’ils pensent que leur acharnement participera à faire plier la marque.
Ce peut être un sentiment de colère par rapport à une défaillance de produit (crise
structurelle), une émotivité face à une idéologie affichée (crise émotionnelle) ou un
malaise par rapport à une communication avortée (crise communicationnelle).
Contrairement aux Trolls, que nous abordons plus loin dans ce chapitre, ils ne sont pas
dans des logiques destructrices mais constructives : ils souhaitent ardemment que la
situation se règle. C’est pour cette raison qu’ils vont user de tout leur poids pour faire
entendre leur voix, relançant la marque ou soutenant d’autres acteurs de la crise.
L’appel au boycott est probablement la remarque qui sera la plus vue dans leurs
commentaires. Afin d’appuyer leurs propos, certains n’hésiteront pas à se revendiquer
comme des consommateurs fidèles ou des prospects. Cependant, force est d’admettre
que peu iront jusqu’au bout de leurs paroles.
Généralement, ces internautes cessent d’être vindicatifs à partir du moment où leurs
revendications ont été prises en considération et qu’ils observent un changement allant
en ce sens. En somme, ils sont probablement les acteurs plus oppressants, mais leurs
demandes ne sont pas dénuées de fondements.
Les avocats de marque
Généralement, nous parlons d’avocats de la marque pour définir des internautes actifs,
qui participent aux efforts de communication. Ils se retrouvent dans les valeurs de
l’entreprise et en parlent positivement autour d’eux, voir agissent sur certains espaces
pour la promouvoir.
Par exemple, lorsque la magazine satirique Charlie Hebdo a publié un numéro spécial
sur l’Islam en 2011, une crise apparue, que ce soit du côté des musulmans qui se
sentaient attaqués dans leur foi que de ceux qui jugeaient comme provoquant de telles
attaques sur un sujet aussi sensible (pour exemple les caricatures de Mahomet en Suède
valent aujourd’hui à certains dessinateurs d’être placés encore aujourd’hui sous
protection policière).
La page Facebook du journal a donc été envahie pour exprimer une certaine colère et de
vifs échanges éclatèrent contre ceux qui invoquaient la liberté d’expression. Finalement,
M
le réseau social a tout simplement retiré les droits d’administration au journal, laissant
SI
l’espace à l’abandon, sans modération, sur une certaine période. Il y avait deux
positions, trois si l’on compte la neutralité, et la condamnation des actes de Charlie
AS
Hebdo n’était pas unanime. Si de prime abord nous pourrions penser que des avocats de
la marque ont été présents lors des échanges, il faut se concentrer sur le cœur du débat
pour comprendre que c’était la notion de liberté d’expression qui était avant tout
BY
défendue.
Il faut le prendre en considération, très souvent ces avocats de la marque se taisent lors
d’une crise.
Selon le niveau de la crise, une entreprise déjà présente sur les médias sociaux qui a
réussi à créer une vraie relation avec les internautes aura plus de possibilités de voir des
« avocats de la marque » se distinguer. Cependant, il ne faut pas se leurrer, ce ne seront
jamais l’ensemble des membres de la communauté qui vont agir en héros salvateurs,
loin de là. Parmi eux, très peu seront de réels avocats de la marque et le poids de leurs
actions sera, généralement, assez relatif. Ils peuvent cependant s’avérer une aide utile
après les événements, un soutien intéressant dans l’amélioration de la réputation
numérique après crise.
Dans un rapport d’Altimeter « The Rise of Digital Influence », l’auteur Brian Solis
évoque très clairement la problématique pour les scores d’influence d’identifier des
influenceurs :
M
« Bien que ces outils utilisent des algorithmes sophistiqués pour calculer un score, ils ne
prennent pas en compte toutes les complexités de l’influence et la nature des relations
SI
entre les gens au sein des réseaux sociaux ».
AS
La société qui se trouve confrontée à une crise doit de ce fait identifier, parmi ses
détracteurs, les individus ayant une réelle influence afin d’établir d’ouvrir des
discussions privées. Il est possible que certains aient été identifiés en amont, lors de la
BY
phase de scénarisation. Cependant, il y a de fortes chances que les plus virulents et ceux
posant le plus de problèmes soient inconnus. Car l’influence peut être éphémère et
naître lors d’un événement pour différents motifs. Lors de la campagne américaine en
2008, un citoyen ordinaire, Samuel Joseph Wurzelbache, alpague devant les caméras le
candidat Barack Obama sur des questions liées à l’imposition. Il devient alors « Joe Le
Plombier », qui sera réutilisé par le camp adverse des républicains, devenant de ce fait
un influenceur.
Toujours dans son rapport Brian Solis pointe du doigt la facilité, et par la même la
fainéantise, des entreprises qui utilisent ces indicateurs sans chercher à appréhender la
réalité de l’influence ainsi établie. Il n’y a pas de recette miracle pour identifier des
influenceurs, il faut rechercher et observer les comportements.
Par exemple, la société peut appréhender les volumes conversationnels inhérents à la
crise sur des espaces publics ou semi-publics afin d’identifier les internautes suscitant le
plus d’interactions et de commentaires. Il peut également être possible d’identifier un
internaute sur la page Facebook de la marque, qui posterait régulièrement et recevrait
des approbations d’autres internautes.
Lors de la phase de scénarisation, il est fortement envisageable que l’entreprise n’ait pas
réussi à identifier certains influenceurs pour quelque raison qu’il soit (il peut être à
l’origine dans un autre environnement, ou n’être influent que sur l’instant pour la
qualité de ses propos ou son autorité professionnelle). L’objectif est alors de les intégrer
au processus de communication, soit en leur apportant une réponse crédible, soit en les
faisant porte-parole de la marque.
Nous recommandons fortement de prendre en considération les deux types
d’influenceurs :
Pour identifier les personnalités à forte audience, nous ne pouvons que recommander le
classement ebuzzing. Ce dernier offre un classement de blogs jugés comme les plus
influents (basés principalement sur le nombre de rétro-liens) selon différentes
catégories. Cependant, les blogueurs donnant une opinion, à la différence des
journalistes qui publient une information, il est possible que certains se refusent à
diffuser un simple communiqué de presse. L’entreprise devra de ce fait identifier une
M
manière adaptée pour diffuser son message (vidéo humoristique par exemple).
SI
Pour identifier des influenceurs, la meilleure méthode est de se focaliser sur les
indicateurs clés de succès (KPI), comme par exemple :
AS
– nombre de retweets : identifiez sur les mots clés de la crise les internautes ayant
BY
Étude de cas :
M
blogueurs en leur envoyant un mail. Cette stratégie a plutôt été
appréciée ces derniers.
SI
« Monsieur,
AS
Étude de cas :
M
critiques relatives à des problèmes techniques. En effet, selon la
manière dont l’utilisateur tenait son téléphone intelligent, il pouvait
SI
être observé une baisse du signal de réception. Steve Jobs, l’ancien
AS
PDG d’Apple, dans une conférence pour faire taire les critiques,
après avoir admis et minimisé le problème, s’attaque à la
concurrence pour démontrer que ses concurrents sont également
BY
perfectibles.
Surfant sur la crise, son concurrent, Samsung, décide d’utiliser les
médias sociaux pour attaquer Apple. S’estimant dénigrée, la marque
envisage donc de récupérer les utilisateurs mécontents de leur
iPhone 4 en organisant une contre offensive.
Samsung va alors identifier les internautes influents sur Twitter se
plaignant des problèmes de réceptions en leur répondant
publiquement que la marque va leur offrir un téléphone de sa
gamme, le Galaxy S. En 4 jours, l’opération va être reprise dans plus
de 65 journaux en ligne, dont CNN, le Guardian ou encore Wired.
Elle a généré plus de 65.000 mentions sur Twitter.
volontairement faussée.
Identifier des associations susceptibles de porter préjudice pourra permettre d’établir un
contact aux premiers signes.
BY
Étude de cas :
Étude de cas :
En 2010, Twitter est victime d’un ver de réseau (sorte de virus pour
vulgariser) qui se propage avec rapidité à de nombreux comptes,
rendant impossible l’utilisation du site de microblogging. Très vite,
les internautes lancent des messages d’avertissement pour prévenir
M
leurs communautés et les médias s’emparent de l’affaire. Ainsi, le
SI
journal l’Express décrit le phénomène comme des :
AS
« Des bandes noires ou des lettres géantes ont déjà envahi les
écrans des internautes. Impossible de cliquer sur quoi que ce soit :
plus d’accès au profil, par exemple. Pour peu que l’internaute
BY
M
anthropologique du trickster. Ce terme anglais désigne le dieu qui joue des tours aux
êtres humains. C’est un personnage qui est capable de bouleverser certains équilibres –
SI
que l’on connaissait même dans des mythologies très anciennes. » (Extrait de Jean-
Olivier Pain (2011) On en parle : interview avec Antonio Casilli, Radio Suisse Romande
AS
[RSR]).
On rencontre ainsi cette figure de « fripon », d’être divin ou semi-divin dans plusieurs
BY
traditions religieuses. Un acteur inatteignable qui s’amuse en jouant des tours aux
hommes et bouleverse les codes socio-culturels. Dans le panthéon grec c’est Hermès,
dans la mythologie scandinave c’est Loki, dans le candomblé brésilien c’est Exu, pour les
Indiens d’Amérique c’est le Coyote, etc.
Selon l’anthropologue Biella Coleman : « les trolls seraient l’incarnation Web du
trickster. Il s’agit de figures ambivalentes, porteuses de bruit, de désordre, de
mouvement. Dieux de la communication et de l’éternel malentendu, les trickster trollent
les êtres humains et – ainsi faisant – ils ont un pouvoir démiurgique sur la réalité qu’ils
transforment et reconfigurent. » (Article “Hacker and Troller as Trickster”, paru sur
Social Text en 2010).
Sur la toile, les professionnels de l’internet s’accordent à définir plusieurs typologies du
troll. Mais pour schématiser, nous distinguons plusieurs caractéristiques récurrentes
pour les hiérarchiser :
Le troll néophyte
Le troll néophyte est un troll qui s’ignore. Ses interventions mettent en lumière un non-
respect de la nétiquette (règle informelle définissant un code de conduites, de règles et
de politesse) et du bon déroulement de la discussion, sans véritable intention de nuire.
Ces trolls peuvent être de simples internautes qui, pour répondre avec humour à un
premier troll, parasitent la conversation par des informations disruptives. On peut ainsi
désigner comme troll néophyte tout individu qui rentre dans le jeu d’un vrai troll. Ils
sont en quelque sorte les victimes et les coupables collatéraux du désordre qui règne.
Malgré sa bonne foi apparente, il refusera qu’on le traite de troll car il pense avoir
raison. Il peut s’en suivre un effet domino qui va venir gangrener le débat.
Le troll rancunier / revendicatif
Ici, le troll à un message à faire passer. Il ne parle pas pour rien dire, mais vient polluer
des discussions annexes inappropriées pour plaider sa cause. Il veut faire prendre
conscience à l’internaute lambda qu’un problème lui déplait, et se défoule sur les
forums et sur les supports de l’entreprise pour se faire entendre.
Dans la plupart des cas, il s’agit d’un usager mécontent concernant le produit ou le
service d’une entreprise. Il veut déverser sa frustration en communiquant de façon
abusive et vindicative sur les supports virtuels de la société. L’humour et l’ironie
peuvent être ses modes de communication préférés.
M
Certaines entreprises sont ainsi plus exposées à des frustrations récurrentes comme les
SI
institutions célèbres (la poste...). Pour traiter ces petits pics, il faut rester vigilant et
réactif afin que leurs interventions bénignes ne constituent pas un malaise général.
AS
Le troll engagé
Ce troll a un but précis et compte bien le faire savoir. Il cherche à créer la polémique
BY
pour instaurer un désordre et profiter de cette confusion pour enfoncer la marque. Par
déception, rejet, vexation, ou simple amusement, il va s’adonner à un travail de sape
pour anéantir un forum ou tout débat productif. Sa technique est de déclencher des
« flamewars » pour enclencher un effet papillon néfaste et nauséabond.
Quelques récurrences chez ces énergumènes :
M
Malheureusement, raisonner un troll peut souvent être une cause perdue d’avance. Et il
est du devoir de l’entreprise et des gestionnaires de communautés d’identifier le profil
SI
des internautes menaçants. Si la raison veut que chaque commentaire intempestif mais
AS
constructif soit appréhendé et traité, la logique impose que les messages purement
agressifs et violents doivent être laissés pour compte, voire supprimés.
Voici quelques règles d’or à respecter avec les trolls :
BY
– Ignorer les messages des trolls est la meilleure contre-attaque. Comme le dit
l’adage : « ne nourrissez pas le troll ».
– Éviter à tout prix de donner raison au troll. Les messages du type « sur ce point tu
as raison mais... », sont à proscrire car ils s’en servent de point d’ancrage pour
d’autres interventions.
– Ne pas revenir en arrière sur ces propos et garder un discours cohérent. Le troll
cherche à éclater l’unanimité qui peut régner autour du discours de l’entreprise. Ce
que les trolls préfèrent, ce sont les contradictions entre administrateurs, qui
renforcent leur position.
– Bannir les discussions autour de la liberté d’expression. Le troll va toujours finir
par se réfugier autour d’une plainte de censure de la part de la société et se
positionner en victime. En rentrant dans son jeu, le modérateur repart à la case
départ et débute un nouveau tour de piste pénible et fastidieux.
Mais en parallèle des trolls, d’autres acteurs plus inattendus peuvent tout aussi bien
s’approprier le rôle de troll. C’est le cas des internautes émotionnels. Les émotionnels
régissent à des propos de seconds degrés et se sentent investit d’une cause pour
défendre les plus faibles et les opprimés. Ce peut-être également les gardiens de causes
humanitaires ou associatives qui visent à maintenir la justice et l’équité. Au-delà des
considérations morales, ce rejet peut également avoir un lien évident avec le domaine de
la santé.
On peut citer en exemple la marque H&M qui en 2012 a lancé une campagne
promotionnelle pour les maillots de bain, avec des mannequins beaucoup trop bronzés.
L’association de lutte contre le cancer de la peau a alors fait entendre sa voix pour
dénoncer les risques d’exposition au soleil. Les mannequins qui visiblement avaient
passé 3 ans de vacances au soleil ont donc été en partie retirés de la circulation, que ce
soit à la télévision ou sur les affiches publicitaires.
La santé est un domaine ou il n’y a pas le droit à l’erreur. Si dans le domaine judiciaire,
le doute va en faveur de l’accusé, pour la santé, il n’est pas louable et des produits sont
retirés de la vente à la moindre suspicion. Certains fabricants de jouets ont ainsi dû
détruire des stocks entiers de belles poupées à cause d’un élément chimique, ou de
pièces pouvant être avalées. C’est pourquoi dans certains domaines il faut penser à tout.
Dans cet ordre d’idée, avez-vous déjà remarqué que les bouchons des stylos bic avaient
un trou à leur extrémité ? La société a en effet pensé à créer une poche d’air si par
malheur un enfant venait à ingérer le bouchon. M
SI
2.8 Médias d’Actualités
AS
Dans toute crise, l’influence des médias est importante car ce sont eux qui vont être les
premiers à diffuser une information. Sur Internet, ils ne seront pas nécessairement dans
BY
ce rôle, s’imposant parfois en tant que simple relayeur. Si une crise débute par des
internautes, l’entreprise ne devra pas se focaliser uniquement sur ces derniers mais bien
prendre en considération l’impact des journaux en ligne.
La masse d’information produite par les internautes contenant inexorablement des
erreurs, les médias en ligne apparaissent comme « certificateurs ». Ils ont le rôle de
rendre officiels des faits supposés lorsque ceux-ci le nécessitent. Par exemple, à la mort
de Michael Jackson, les internautes avisés par les médias sociaux, notamment Twitter,
attendaient un article d’une source crédible pour prendre acte du décès de l’artiste. En
cas de crise, il est donc important d’identifier si elle a été relayée par ces canaux car ils
vont donner un caractère officiel.
Attention cependant, les journaux en ligne étant dans une logique de scoop, et le web
étant en temps réel, il est possible qu’ils soient également à l’origine de crises là où il n’y
a rien. Par exemple, en septembre 2012, le journal en ligne Metro France diffuse une
information quant à une probable erreur technique sur Facebook qui diffuserait sur le
profil de certains utilisateurs (donc accessible à leur réseau) des messages censés se
trouver dans la boite courriel (donc privés). L’actualité a été immédiatement reprise par
les plus grands journaux nationaux, comme Le Monde ou Le Figaro. Cependant, il
s’agissait d’une erreur d’appréciation, les messages incriminés étant antérieurs à 2009,
il s’agissait juste d’une mauvaise perception due au fait que la plateforme a beaucoup
changée en trois ans. Il n’y avait pas de faute à proprement parlé de Facebook, les
journaux ont donc fauté. Qui plus est, comme l’expliquent les ingénieurs, la messagerie
et le profil sont deux systèmes indépendants, un bug n’aurait donc pas pu les connecter
aussi facilement. Les journaux, dans leur précipitation, ont donc créé une crise qui a eu
de sérieuses conséquences. D’une part, elle a rendu sceptiques les internautes sur les
intentions de Facebook, qui a de ce fait perdu une partie de leur confiance, et d’autre
part d’amener le gouvernement à agir.
La diffusion, et donc la portée d’un article, est à l’appréciation des internautes qui le
partageront à leur communauté. Certaines fois, quelques lignes peuvent avoir des
conséquences dramatiques dès lors qu’il y a un phénomène de viralité qui s’enclenche.
Le problème est que ces médias privilégient l’affirmatif au conditionnel. Les internautes
prennent de ce fait les informations comme des vérités générales.
S’ils sont diffuseurs d’une information, la neutralité peut ne pas être l’apanage de
certains. Les journaux d’actualités peuvent prendre parti, ou jouer la corde sensible pour
favoriser le partage d’informations. L’objectif de tout média est l’audience, et sur les
médias sociaux, elle se traduit par la faculté à favoriser l’émotionnel pour chercher la
viralité. Certains n’hésiteront pas à susciter l’émotion chez son lectorat en relayant une
M
crise sous un angle qui ne serait pas objectif, mais critique.
SI
Il peut donc arriver que certains médias en ligne soient à l’origine d’événements, que ce
AS
crédible.
Étude de cas :
M
Ceux que l’on pourrait qualifier « d’humoristes » ont un profil atypique car ils sont
représentatifs d’une contre-culture que nous abordons au chapitre 5, la culture du lol,
SI
soit l’utilisation de codes socioculturels propre à une certaine communauté dont la
AS
détourner un message pour le rendre drôle. Mais si l’humour peut dans certains cas
dédramatiser une situation, il peut également s’avérer particulièrement corrosif.
Par exemple, dans le cas de KitKat évoqué dans ce chapitre, de nombreux internautes
avaient détourné le logo pour le transformer en Killer. Il existe de ce fait de nombreuses
formes de guérillas dont l’objectif est de susciter un engouement afin de favoriser
l’adhésion au message et son partage.
Deux plateformes sont particulièrement utilisées pour détourner un message, Youtube
et Tumblr. Le premier, une plateforme de partage de séquences animées s’il est bon de
le rappeler, est l’un des sites internet fortement utilisés pour les parodies vidéo. Le
second, qui s’apparente à un blog, va quant à lui servir à référencer, stocker et
cataloguer les différentes parodies graphiques existantes.
L’entreprise devra de ce fait être vigilante sur ces supports et prendre en considération
la tournure, la forme et le fond du message. Dans certains cas négatifs, ces parodies
permettront d’apprécier des éléments qui nécessitent d’être intégrés dans la
communication. Par exemple, dans le cas de la marée noire de BP, une vidéo parodiait
l’équipe de la direction qui venait de renverser une tasse de café et n’arrivait pas à
endiguer la tâche, créant une situation absurde. Cela soulevait l’incompétence des
dirigeants, sentiment fortement partagé par bon nombre d’internautes, et donc un point
probablement à améliorer.
Un autre exemple pourrait être celui du lieutenant John Pike qui s’est fait connaître lors
d’une manifestation des indignés, à savoir le collectif « Occupy Wall Street », à
l’université de Californie, à Davis. Alors que les manifestants ont été arrêtés, et son
sagement assis, le policier les a aspergés de gaz lacrymogène (http://bit.ly/Q6LK11).
La vidéo, vue plus de 1,7 million de fois, a suscité la colère des internautes qui ont
détourné le geste pour le tourner en ridicule. John Pike est devenu alors un même, cible
de toutes sortes de créations humoristiques centralisées sur un Tumblr
(http://peppersprayingcop.tumblr.com/). Il est devenu le symbole de l’oppression subie
par le mouvement Occupy Wall Street.
M
SI
AS
BY
L’humour passe également par le détournement de comptes officiels. Dans le cas de BP,
un faux compte lié aux relations presse a rassemblé, au final, sur Twitter plus de monde
que le compte officiel. Il a même été par moment confondu par les journalistes
tellement il arborait l’identité visuelle de la marque.
Ces détournements sont donc intéressants car ils permettent également de prendre la
température, prendre en considération rapidement une vision globale afin d’affiner son
message et son ton. Si l’humour potache ou bon enfant domine, alors peut-être faudra-t-
il surfer sur la tendance. Si à l’inverse, il s’agit de revendications claires, d’une mauvaise
image de l’entreprise, alors il faudra prendre en considération les aspects négatifs
comme des points à améliorer.
Les mémoristes - les spécialistes de la recherche
Internet a beau être une mémoire collective, Wikipédia n’a pas la science infuse et
Google n’offre pas toujours l’information la plus pertinente. Il existe cependant une
catégorie d’internautes qui ont acquis un savoir dans la recherche d’antécédents en
maximisant leurs recherches. Cette dernière va attaquer l’entreprise directement sur
son histoire, en la confrontant avec son présent. Cela peut concerner des crises passées
ou des périodes sombres de son histoire.
Toute entreprise a des squelettes dans son placard, à plusieurs niveaux. Il est par
exemple possible, pour qui connaît bien les mécanismes de Google, d’utiliser certaines
formules pour chercher directement des documents secrets sur certains serveurs.
Ces internautes savent trouver de l’information, et ils n’hésiteront pas à rappeler à la
marque ses antécédents, à mettre sa sombre histoire sur la place publique. Il est
toujours important d’identifier des recoins guère reluisants dans l’ADN de la marque
afin de définir en amont des réponses à y apporter.
Les hacktivistes - les spécialistes des supports officiels
Il existe tout un ensemble de hackers qui disposent de compétences leur permettant de
faire tomber des plateformes hébergées par l’entreprise, comme les sites internet
institutionnels, les blogs ou des solutions sur lesquels étaient placées des informations.
Certains collectifs se sont même formés, comme Anonymous pour ne citer que le plus
célèbre. M
SI
Différentes méthodes peuvent exister dans leur croisade. Très généralement, ils
AS
utiliseront des outils simples de type déni de service. L’objectif ici est de surcharger les
serveurs hébergeant les plateformes en simulant un grand nombre de visites afin de
rendre inaccessible les informations. Cette méthode est la plus simple, la plus rapide à
BY
mettre en place mais également la plus accessible à tout un chacun. Pour participer à
l’opération collective, tout internaute ne doit disposer que d’une connexion internet et
d’un logiciel fourni gratuitement.
Mais il existe d’autres méthodes, comme l’injection SQL, qui permettent au hacker de
prendre le contrôle de tout site internet (et par conséquent d’afficher ce qu’il souhaite),
voir de « déphaser » ou plus vulgairement détruire la plateforme pour la remplacer par
un message de son choix.
Lors d’une communication de crise, l’entreprise devra par conséquent s’attendre à voir
également certains internautes tenter de briser les solutions mises en place. Attention,
même si cela est très rare, il ne faut rien négliger, s’assurer qu’aucune faille ne soit
présente, et surveiller de près le comportement de ses espaces.
Il vaut mieux, de ce fait, prévenir les personnes déléguées à l’hébergement (prestataire
externe, direction des services informatiques à l’interne) de possibles mouvements. Ils
devront être particulièrement vigilants durant cette période.
Les mécanistes – les spécialistes des plateformes
Certains internautes disposent d’un bagage technique, voire de compétences, leur
permettant d’aller bien au-delà de la simple expression. Ils connaissent parfaitement les
mécanismes sous-jacents aux médias sociaux leur permettant de causer des dégâts
considérables.
Avec une facilité déconcertante, ils peuvent ainsi faire supprimer temporairement des
pages Facebook ou des comptes Twitter par des actions combinées. Ils connaissent bien
les rouages de ces plateformes et n’hésiteront pas à user de leurs connaissances pour
infliger de sérieux dégâts.
De même, ils connaissent les mécanismes leur permettant d’influencer sur les résultats
de recherche, pouvant créer de ce fait de sérieux dégâts d’images. Nous évoquons dans
le chapitre 6 ces problématiques.
Étude de cas :
M
Cependant, quand bien même il provoquait l’hilarité, ses propos
SI
pouvaient semer le doute et il constituait une certaine menace.
Lorsqu’il arriva sur Twitter ses premiers mots furent à l’encontre
AS
journalistes tentent de donner une définition crédible aux « médias sociaux ». Il faut
comprendre qu’à l’origine, cette expression, au même titre que « réseaux sociaux »,
avait pour objectif de coller une étiquette sur un phénomène identifiable. Cependant,
avec un nombre de plus en plus croissant de plateformes, ainsi qu’une popularisation du
terme, il devient de plus en plus compliqué de leur donner une définition générale. Le
consultant Frédéric Cavazza dresse chaque année un panorama des solutions existantes
qu’il s’évertue à classer selon un ensemble de paramètres, ce qui permet d’apprécier leur
évolution dans le temps.
Nous pourrions présenter les médias sociaux comme un type de plateformes
appartenant au Web Social permettant aux internautes de se constituer un profil autour
duquel seront articulés un ensemble de médias. Une approche intéressante est celle
d’Andreas Kaplan « un groupe d’applications basées sur Internet qui s’appuient sur les
fondements idéologiques et technologiques du Web 2.0, et qui permettent la création et
l’échange de contenu généré par l’utilisateur ».
Une entreprise qui ne dispose pas encore de profil devra prendre en considération,
comme nous l’évoquions en premier point, le meilleur canal pour s’exprimer.
Cependant, les comptes ne doivent pas se limiter à la crise, ils doivent être pensés dans
le temps. Dès lors que l’entreprise va ouvrir un compte, elle devra le faire dans le temps
et s’investir afin qu’en cas de nouveaux énervements impromptus, elle dispose d’une
page lui permettant de centraliser les discussions.
Par leur visibilité, Facebook et Twitter apparaissent souvent comme la solution la plus
pertinente alors qu’ils peuvent s’avérer au contraire peu adaptés à une situation précise.
L’entreprise devra prendre en considération un ensemble de facteurs, quant à la cible
par exemple, mais également quant à leur pertinence technologique.
Par exemple, si l’objectif est de diffuser une vidéo présentant des excuses publiques,
Twitter n’apparaît pas comme la solution par excellence car il fera vite disparaître dans
le flux d’information cette dernière. Les internautes s’abonnant donc au profil ne
verront pas nécessairement le média. À l’inverse, la nouvelle Timeline de Facebook
permet de mettre en avant, mais pour une durée limitée, un contenu particulier.
Si les médias sociaux sont devenus un passage obligatoire à l’expression émotionnelle
des internautes, ils ne seront pas la solution à tout événement. Il ne faut pas voir les
médias sociaux comme l’élément salvateur pour chaque communication de crise.
Beaucoup d’entreprises font l’amalgame sans prendre en considération leur utilité.
D’autres solutions plus adaptées peuvent exister, ces dernières pouvant même s’intégrer
en complémentarité.
sont bâtis afin de répondre à des besoins spécifiques que les technologies des sites
généralistes, comme Facebook, ne peuvent permettre. Ils permettent à l’entreprise de
répondre à un besoin précis qui s’étale dans le temps. Ils sont généralement adaptés à
BY
Étude de cas :
En 2005 Jeff Jarvis, blogueur influent, écrit une note sur son blog
pour se plaindre du service consommateur de Dell.
Au-delà du simple billet, ce sont des centaines de commentaires ou
autres récits qui viennent agrémenter ou faire écho a ce billet. Une
véritable révolte s’instaure sous le terme de « Dell Hell » et embrase
la toile : les consommateurs expriment leur agacement. Cette fronde
sera reprise par de nombreux médias en ligne, comme FastCompany
ou Zdnet.
M
SI
Face à ce flot de commentaires, Dell amorce de profondes
mutations, en interne, mais décide de mettre en place un espace
AS
En outre, il est amusant de constater que les meilleurs succès s’opèrent avec les vieux
outils. Les blogs peuvent être particulièrement adaptés aux solutions de crise lourde car
ils permettent de tenir un « journal » des dispositions prises et de leur évolution.
BY
En ce sens, les blogs peuvent être une solution mais ne sauraient être la solution.
Lorsque l’on observe bien leur évolution sur le sujet, il est clair qu’un dirigeant ne
s’épanchera pas des années sur un événement, et qu’il y mettra probablement fin
quelques semaines ou mois après la résolution des problèmes.
Sur le long terme, il est de ce fait préférable de faire venir l’information de la base vers
le haut, plutôt que l’inverse.
En communication de crise, ils permettent d’affranchir les barrières hiérarchiques en
confrontant une personne faisant autorité avec les consommateurs. Ces derniers
pouvant exprimer pleinement leur point de vue au travers des commentaires.
Les blogs vont crée des contenus sur des mots clés spécifiques qui pourraient faire
ressortir de vieilles affaires. Nous conseillons donc de mettre un blog en place afin
d’accompagner la crise, si cette dernière dure, mais d’y mettre un terme une fois tout
ceci terminer. D’une part, il y a peu de chance que le lectorat suive, ce seront par
conséquent des efforts mis en place qui ne serviraient pas à grand-chose. D’autre part,
un site internet dédié aux nouveaux processus nous apparaît comme plus pertinents car
cela sort du cadre de la crise.
Les blogs permettent également d’échanger en commentaire avec des internautes, de
leur répondre sur des thématiques nébuleuses ou sulfureuses.
Exemple : en avril 2008, Lessieur essuie une grave crise. Le Canard Enchaîné,
hebdomadaire français, révèle qu’une part importe d’huile végétale achetée à un
fournisseur Urkrainien est en fait de l’huile minérale fabriquée à partir d’hydro carbure.
Les blogs et les forums reprennent l’affaire, et Lessieur lance un blog de crise
www.lesieur-info.fr dont les publications se sont terminées en 2010, soit deux ans après
la crise mais faisant suite à une très faible publication (deux à trois posts par an à partir
de 2009).
malléables, elles offrent en outre une meilleure marche de manœuvre que les médias
sociaux.
BY
L’entreprise pourra, si elle le juge nécessaire, ouvrir un espace particulier sur on site
corporatif afin d’entrer en contact et de communiquer auprès d’un large public. Cela est
d’autant plus vrai lorsque la crise a débuté dans le réel et s’est propagé sur le virtuel.
Comme nous l’évoquions dans ce chapitre, une majorité d’internautes sont passifs sur
le web. Ils demeurent silencieux et se posent en observateurs cherchant à se faire une
opinion. Ils ne souhaitent que s’informer des événements et vont naturellement aller
sur les moteurs de recherche pour identifier des sources pouvant les leur expliquer. Le
fait que ces acteurs puissent rester muets ne légitime pas le fait que de nombreuses
entreprises ne pensent pas à communiquer auprès de ces derniers.
Néanmoins, dans le cadre d’une erreur de communication, il ne sera évidemment pas
nécessaire de publier une longue note sur son site. À l’inverse, s’il s’agit de quelque
chose de structurel amené à perdurer dans une certaine longueur, l’utilisation du site
vitrine peut s’avérer somme tout important.
Pour l’heure, de nombreuses entreprises oublient, en cas de communication de crise,
d’ouvrir un espace sur cette vitrine, ce qui peut s’avérer préjudiciable.
Partie 4 Quoi ? Typologie des réponses
4.1 Typologie des réponses
À partir des différentes crises que nous avons étudié pour réaliser cet ouvrage, nous
avons déterminé qu’il existe quatre grands types de réponses à une crise sur les médias
sociaux : le dialogue, la modération, le silence et le bruit. Ces réponses interviennent dés
le début des événements, lors de la phase de médiation, et peuvent de ce fait évoluer
selon l’appréciation de la situation lors de l’étape d’analyse.
Par conséquent, nous pouvons observer que les entreprises n’émettent pas qu’un type
de réponse, dans la mesure où une stratégie nécessite souvent des ajustements. Il y a
donc une combinaison de différentes réponses face aux événements, comme par
exemple un silence suivi d’un dialogue.
Ces types de réponses vont déterminer le rapport de force entre l’entreprise et les
internautes. Si lors de la phase de médiation la société peut influencer les événements
car ils sont naissants et ont peu de visibilité, il lui est difficile d’agir lors de la phase
d’organisation.
La transparence et le bruit sont des communications maîtrisées qui s’adaptent
M
fortement à des crises structurelles ou émotionnelles. Il est important ici de ne pas
SI
laisser le bruit s’échapper et de bien démontrer une volonté de changement.
La modération et le silence sont des communications subies, qui peuvent être utilisées
AS
elle comporte un risque d’alimenter encore plus la crise et de servir les détracteurs.
Dans ce cas-ci, le bruit vise avant tout à mettre un terme rapide à un bad buzz, de le
modifier par la force en utilisant des leviers émotionnels.
BY
Il y a de ce fait deux utilisations du bruit qui n’ont pas la même finalité. Sur le court
terme, en matière de première réponse, le bruit a pour vocation d’éteindre rapidement
l’incendie en créant un « contre buzz », à savoir en détournant les regards. Sur le long
terme, en deuxième réponse, il a pour objectif d’attirer l’attention et de se réapproprier
la crise afin d’en tirer des éléments positifs pour son image.
Le silence :
Le silence est le fait d’ignorer les événements naissant en attendant qu’ils se tassent,
d’éviter toute confrontation directe. Cependant, face à une crise naissante, de
nombreuses entreprises sortent de leur silence dès lors qu’elle prend une tout autre
ampleur.
Le silence sur du long terme n’est pas très courant pour deux raisons. De nombreuses
entreprises disposent d’espaces sur les médias sociaux et les internautes ont une forte
propension à envahir les espaces des marques pour s’exprimer. Il devient difficile alors
de les ignorer et de continuer à diffuser des informations qui seraient prises à parti, les
commentaires négatifs apparaissant sur des contenus entrant dans le contexte.
Une des autres raisons du silence peut être liée à l’apparition d’une crise plus
conséquente qui viendrait vampiriser l’impact négatif en détournant les conversations.
La marque n’a pas eu ou n’a pas souhaité réagir et les événements se sont très
rapidement éteints.
Étude de cas :
M
Il faut comprendre que Fred&Farid a toujours entretenu une image
de « mauvais garçon », et que ce doigt d’honneur adressé à ses
SI
détracteurs correspondait à leur image de marque. Ce fut donc une
AS
qu’il vaut mieux attendre avant de prendre la parole. Ainsi, chaque mot prononcé par
l’entreprise pourra être un tremplin pour justifier des plaintes et relancer des critiques.
Dans de rares occasions, il est ainsi préférable de ne pas chercher à se mettre à
découvert. La devise de l’architecte Ludwig Mies van der Rohe « The less is more » (le
moins est plus) peut de ce fait être une stratégie payante. En attendant que le temps soit
plus clément, l’organisation doit rassembler ses forces vives et élaborer un plan de
communication pour répondre efficacement. La préparation est primordiale pour éviter
d’envenimer les choses. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut rester les bras croisés
en attendant que sa page Facebook se transforme en « no Man’s land ».
Ce que nous préconisons est d’ouvrir un dialogue. Cela va s’avérer salvateur car il
permet à l’entreprise de maîtriser son discours, de garder une certaine influence.
Cependant, un dialogue doit être transparent, il ne doit pas occulter certains faits ni
même chercher à les manipuler à son avantage.
Sur les médias sociaux, une société pourra difficilement tromper les internautes. Il ne
faut pas oublier que les faits sont toujours vérifiables ou que le détournement d’une
réalité (truquer des photos par exemple) serait un trop grand risque au motif que des
professionnels pourraient faire partie des individus mécontents. Face à un fait évoqué,
l’entreprise va soit démontrer son caractère faux, si c’est le cas, en apportant des
preuves, soit reconnaître ses erreurs et s’engager à mettre en place des actions
vérifiables.
L’objectif sur les médias sociaux n’est pas d’imposer sa propre vision des événements,
mais bien de répondre aux interrogations des internautes. Ainsi, le dialogue s’inscrit
dans une logique d’échanges, c’est pourquoi il est souvent la solution la plus
recommandée car il a pour but d’asseoir des faits vérifiés et vérifiables. Il doit prendre
en considération les commentaires exprimés afin de répondre de manière cohérente.
Les internautes doivent être mis en avant, il ne faut pas les dénigrer mais au contraire
les solliciter.
En 2009, des employés de Domino’s Pizza se filment en train de jouer avec la nourriture
qu’ils vont servir aux clients. La marque a immédiatement réagi, d’abord en licenciant
les fautifs et en portant plainte, ceci accompagné d’un communiqué expliquant qu’ils
n’étaient pas représentatifs des autres salariés.
Puis dans un second temps, le directeur général, Patrick Doyle, dans une vidéo sur
Youtube, a présenté non seulement des excuses, mais il a également remercié les
internautes pour leur vigilance, jouant implicitement sur leur égo.
M
SI
4.3 Interview de Stéphane Puchois
Co-fondateur associé du cabinet conseil The Persuaders
AS
Existe t-il des signaux indiquant que les critiques sont susceptibles de se
transformer en une crise ? Comment les repérer ?
BY
Une crise pour une entreprise n’est pas forcément une crise pour une autre, une
centaine de citations négatives pour un opérateur téléphonique n’ont pas le même
poids qu’une centaine de citations négatives pour une entreprise de l’industrie
pharmaceutique par exemple. Là aussi il faut définir ce qui est une crise et définir des
seuils et des indicateurs en fonction du risque pour l’entreprise. C’est en écoutant la
teneur des citations autour des univers de la marque que l’on a la possibilité d’activer
une cellule interne de gestion de crise. Mais sur les médias sociaux, très souvent c’est
une crise qui est déjà engagé dans le monde réel qui se répand, l’anticipation de la
propagation sur ce support devrait déclencher une annonce proactive par les marques
mais c’est très rarement le cas, les communicants ayant horreur du négatif.
Quelle attitude est selon vous la plus adaptée pour répondre à une crise ?
Il faut assumer, si c’est une erreur de la marque elle sortira grandit si elle s’explique ou
s’excuse, si c’est une cause exogène (conjoncturelle, concurrentielle ou autres) et/ou
que ce n’est pas du fait de la marque, il est utile de le faire savoir et d’assumer ses
positions. Dans tous les cas il faut expliquer le « pourquoi » et si c’est du fait de
l’entreprise, annoncer des actions correctives. Les marques ont un droit de réponse, les
internautes veulent l’entendre et il faut l’utiliser. Il est extrêmement compliqué de ne
pas répondre et de vouloir continuer à communiquer avec la même posture que celle
adoptée avant la crise, les internautes continueront à demander des réponses. Winston
Churchill a dit « la responsabilité est le prix à payer du succès ». Si vous êtes mis en
cause il faut assumer ses responsabilités et entrer dans la conversation.
M
SI
AS
BY
Chapitre 4
Place et rôle du community manager
Depuis quelques années, nous assistons à une effervescence des médias pour la
fonction de « community manager » (ou animateur de communauté), qui est une
mutation du rôle de « modérateur » apparu aux débuts de l’Internet sur les forums. Ce
métier est plébiscité par de plus en plus d’entreprises car il est devenu un élément
essentiel à la bonne conduite d’actions de communications sur les médias sociaux,
notamment en période de crise.
En 2010, l’APEC a reconnu officiellement le métier de community manager et a tenté de
délimiter ses champs d’action : « Le community manager (animateur de communautés
web) a pour mission de fédérer les internautes via les plateformes Internet autour de
pôles d’intérêts communs (marque, produits, valeurs...), d’animer et de faire respecter
les règles éthiques de la communauté. Il apporte de l’information aux membres de la
communauté et fait produire du contenu par les internautes de manière à développer la
M
présence de la marque de l’entreprise sur Internet » (http://bit.ly/OYzy7V).
Malgré cette tentative de délimitation, les missions des animateurs de communauté
SI
sont très variées. Il s’agit encore d’un métier qui peine à se délimiter car nouveau. Il
AS
persiste donc un flou quant à aux véritables fonctions de cette profession : comme le
soulignent les experts, il y a autant de community managers que de formes de
community management. Idéalement, le profil de ce professionnel implique d’être
BY
M
SI
AS
BY
Au final quand le community manager sait répondre aux demandes et combler les
attentes, il reçoit souvent une forme de compensation, voire de récompense. Dans ce
cas, Tanguy a eu des pages Facebook à son effigie suite aux événements. Une sorte de
remerciement pour avoir géré avec succès une étape difficile. Le fait est que les gens ont
beaucoup plus d’estime pour un community manager qui sort la marque d’une situation
délicate que pour un de ses pairs qui ne rencontre aucune difficulté. « La véritable
grandeur d’un homme ne se mesure pas à des moments où il est à son aise, mais
lorsqu’il traverse une période de controverses et de défis » disait Martin Luther King.
Cette épreuve qu’il a traversée avec et contre certains internautes représente ainsi un
gage de respect et de crédibilité.
Dans l’interview accordée à Gregory Pouy (http://bit.ly/OGVvGZ), Tanguy analyse ce
M
qui a été la force de la stratégie de réponse, à savoir la réactivité. Pour lui, le community
SI
manager doit très bien connaître son sujet, savoir de quoi il parle, connaître son
entreprise par cœur, et avoir accès à des niveaux de validation très élevés quand il se
AS
M
fait donc partie de ceux qui doivent, au besoin, remonter des conversations négatives
entourant la marque, ses services ou ses produits, sa gestion RH, etc.
SI
Dans un second temps, le Community Manager a un rôle clef, puisque c’est lui qui va
AS
devoir apporter une réponse aux attaques que subit la marque : une réponse qui devra
être drivée par les équipes les plus à même de l’apporter côté marque (juridique ? RH ?
Conformité produit ?), mais qui devra obligatoirement être retravaillée, modelée par le
BY
« CM » afin que la manière d’apporter cette réponse ne soit pas en totale rupture avec
la ligne éditoriale observée d’habitude, ce qui pourrait provoquer des retours négatifs.
Un rôle de monitoring, enfin, pour remonter, classifier, et identifier les verbatims clefs
qui feront suite à cette prise de parole, afin de nourrir l’équipe gérant la crise.
assez ancienne, afin de bien comprendre la manière dont cette communauté vit, réagit,
échange. C’est à ce prix qu’il trouvera les bons mots, les bonnes tournures de phrases,
BY
Quel cas de gestion de crise vous a-t-il le plus marqué ? Quel rôle le
community manager y a-t-il joué ?
La plus belle gestion de crise qui ait existé est pour moi celle de Domino’s Pizza.
L’entreprise était attaquée de toutes parts sur le Web, tous les internautes
s’accordaient à dire que leurs produits étaient immangeables. Les patrons de la firme
ont fait amende honorable, ont reconnu leurs lacunes dans une vidéo publiée sur
YouTube, ont appelé les internautes (qui s’étaient tant déchaînés à les attaquer) à les
aider à refaire de leur marque une référence en terme de pizza. Ils ont réussi à
transformer un engagement destructeur en un engagement utile pour la marque.
Partie 2 Éviter certains pièges
2.1 Le community manager est avant tout humain
Face à la déferlante de questions, urgences, insultes ou félicitations, il n’est pas toujours
évident de répondre à toutes les sollicitations en temps de crise. Toutefois, les
internautes associent indubitablement l’entreprise au community manager, peut
importe s’il est responsable de la faute qui a tout déclenché. Il ne doit pas prendre pour
soit les critiques, quand bien même les internautes s’adressent directement à lui : il
n’est qu’un avatar de la marque.
Durant ces moments de stress, la pression peut jouer des tours et la patience peut
parfois faire défaut. Le community manager est alors susceptible de se sentir acculé et
de succomber à ses sentiments.
C’est là tout le paradoxe : il doit sans cesse chercher à provoquer l’émotion chez les
internautes mais ne pas se laisser provoquer par elle. Ce constat met en lumière une
ambivalence constante entre le contrôle et l’ouverture aux autres. L’idée est donc de ne
M
jamais répondre sur le coup d’une émotion, de prendre du recul afin de se détacher
d’une situation. Les maladresses ou faux pas peuvent très vite arriver, et il est souvent
SI
trop tard pour faire machine arrière. Il est de ce fait généralement recommandé
AS
Afin de se protéger lors d’événements impromptus, il peut en amont rédiger une charte
à l’intention des membres de sa communauté afin d’établir des règles de bonne
conduite. Ces indications peuvent constituer un allié de poids lors d’échanges
tumultueux, car le community manager pourra ainsi légitimer ses actions. Car plus les
raisons de ses actes sont obscures et plus les internautes auront de raisons de se
montrer incisifs. Attention cependant à ne pas rédiger un document qui pourrait
apparaître comme de la censure. Son écriture ne doit pas se borner à une liste
d’interdits, mais bien initier, en abordant par exemple la thématique du respect d’autrui,
à savoir de l’entreprise mais également des autres membres de la communauté.
doivent appeler des inconnus. Nous leur montrons une photo de la personne qu’ils vont
contacter juste avant l’appel. Si la photo présente une belle femme, les hommes
prennent une voix suave et adoptent une attitude agréable, disponible et reçoivent des
BY
feedbacks positifs. Même constant avec les femmes qui contactent un bel homme. Les
sujets pensent « non seulement cette personne est belle, mais en plus elle est
sympathique ». À contrario, avec la photo d’une personne disgracieuse, les sujets vont
adopter un ton distant et nonchalant qui va générer des retours plutôt négatifs. Ils
penseront alors « non seulement cette personne est laide, mais en plus elle n’est pas
sympathique ». Cette expérience démontre clairement sue nous agissons couramment
de manière à valider nos hypothèses.
Les internautes peuvent parfois fonctionner de cette façon sur Internet. L’expérience
avec l’entreprise, l’avis de tiers ou même une rumeur impliquant la marque constituent
un postulat de base sur lequel va se greffer tout un tas d’hypothèses. Qu’elles soient
fondées sur des stéréotypes, des retours de proches ou par une expérience vécue, les
internautes vont tenter inconsciemment de vérifier ces suppositions pour en avoir le
cœur net.
Nous pouvons également supposer que certains internautes fonctionnent selon le
principe du « rasoir d’Ockham » (http://bit.ly/RmMW4F). Ce terme scientifique
inventé par Guillaume d’Occam décrit un principe de parcimonie de la pensée : « quand
on dispose de plusieurs thèses en compétition qui permettent de prédire exactement les
mêmes choses et qu’on ne peut les départager, la plus simple est la meilleure... Jusqu’à
preuve du contraire ». En d’autres termes, les individus choisissent généralement
l’explication la plus simple pour décrire la réalité qu’ils perçoivent, ce qui implique
l’usage de bon nombre de raccourcis sournois et trompeurs envers l’entreprise.
Savoir ? Toujours. ». Si dans la plupart de ces cas, les plaintes sont isolées et
individuelles, une réponse personnalisée au ton adapté peut très souvent adoucir les
BY
mœurs.
M
Hormis le nazisme, cette loi désigne surtout le fait que des causes universelles comme
le racisme ou la politique peuvent converger dans des discussions animées et devenir un
SI
lieu de débat sensible. L’autre difficulté réside dans le fait que bon nombre de ces
AS
thèmes sont abordés dans un rapport défensif, souvent associé à une illusion de
stigmatisation : « vous n’avez pas traité ma demande car je suis noir ». Mieux vaut
couper court en répondant aux individus sur le fond et pas sur la forme. Un
BY
désamorçage qui peut être périlleux, mais qui prévient de bien des dangers. Comme le
disait si bien le philosophe Friedrich Hölderlin « C’est quand le danger est le plus grand
que le salut est le plus proche ».
Savoir répondre aux sollicitations permet en effet de faire comprendre que l’entreprise
prend ses responsabilités et qu’elle est ouverte au dialogue. Savoir écarter les discours
haineux ou insultants conduit à un rejet d’un débat endémique. Ici, le tri des demandes
BY
nommée Rebecca Black a sorti en 2011 un single « Friday » qui a rapidement été
qualifié de « pire chanson jamais écrite ». Il est vrai les paroles sont légères, la mélodie
BY
douteuse, les performances vocales discutables et que le clip n’arrange rien. Mais
l’adolescente de 13 ans a dû faire face à un persiflage généralisé. Son nom est même
devenu entre 2011 et 2012 le terme le plus recherché sur Google. En quelques mois, son
clip est visionné plus de 150 millions de fois et 70% des appréciations sur Youtube sont
négatives. Après quelques 2.5 millions de commentaires dégradants autour du clip, ils
sont finalement désactivés. Des parodies en tous genres ont logiquement vu le jour pour
surfer sur ce « bad buzz ». Un phénomène planétaire donc, qui prend plaisir à se
moquer ouvertement d’une enfant jusqu’ici encore inconnue de tous. Peut-on dire que
cet effet est un réflexe incontrôlable sur Internet ?
Il semblerait que oui. La culture Web se délecte de ces souffre-douleurs qui
représentent des cibles faciles à la merci de tous. Un sentiment profond de rabaissement
qui peut chercher à équilibrer les rapports de force entre des célébrités et de parfaits
inconnus.
Pour les entreprises, le phénomène est sensiblement le même. Lors d’événements
difficiles, si les déboires ou les polémiques gravitant autour d’une société sont
médiatisés, il y a fort à parier que les internautes vont tous regarder dans sa direction.
Et ils ne vont pas nécessairement chercher à la congratuler, bien au contraire.
Cette réaction s’explique par un phénomène de « conformisme implicite », soulignant
qu’il est souvent plus facile de se moquer avec les autres que de se dresser contre ses
pairs pour défendre l’entité en cause. Un effet témoin de déresponsabilisation qui
privilégie ordinairement l’accablement à la rescousse (http://bit.ly/OtJfJW).
Les communautés numériques peuvent de ce fait s’amuser à proposer d’elles-mêmes
des contenus viraux pour rebondir autour de ces manifestations sociales. Une manière
de s’approprier le succès d’une actualité par l’humour et la dérision. Cette initiative se
trouve renforcée par le fait que le pseudonymat peut dissiper les limites du raisonnable.
M
Si nous imaginons souvent que l’erreur vient de l’entreprise, il ne faut pas oublier que le
Web regorge de communautés d’internautes friands de « sensationnalisme » et de
SI
distraction. Des émulations souterraines qui vont vite faire surface dès lors qu’elles
AS
M
– Les photos et vidéos de chats (lolcats).
SI
– Les Rick Roll (http://bit.ly/TlTtZP) (redirection vers une chanson précise).
AS
– Les Chuck Norris Facts : « Chuck Norris a réussi à compter jusqu’à l’infini. Deux
fois ».
– This is sparta (du film 300).
Quelques espaces communautaires sont connus pour leur forte production de mêmes,
comme le forum d’images non modéré 4chan (et plus particulièrement son sous-forum
/b/), mais aussi des agrégateurs sociaux comme Reddit. Les mêmes ont également leurs
propres encyclopédies en ligne, comme le site Know your Meme, qui retrace l’histoire
des mêmes les plus populaires.
Des sites de partages comme Tumblr ou 4chan accueillent ainsi des communautés
d’internautes friands de ces déclinaisons. Certains utilisateurs peuvent s’amuser à
constituer une galerie d’images cocasses ou parodiant une communication désastreuse
d’une entreprise sur le Web.
Les mêmes font partie de la culture Web, certains devenant même des références. Il
n’est pas rare de voir des parodies s’appuyer sur ces mêmes pour faire tourner en
dérision une entreprise suite à un bad buzz. Une manière de générer des représentations
codifiées à fort pouvoir viral.
La publicité a bien compris le rôle fédérateur des mêmes et autres symboles de la
communauté Web, et les utilise comme des codes de ralliement pour jouer sur le
marketing viral. Wolkswagen a par exemple créé une publicité faisant directement
référence à la saga Star-Wars, une référence dans la culture Geek. Un pari affectif qui a
porté ses fruits (des millions de vues sur Youtube) mais qui peut également comporter
certains revers. C’est pourquoi ses détracteurs ont pu se rapproprier ces codes sociaux et
rentrant dans le jeu de l’enseigne. Greenpeace a ainsi largement repris la campagne de
Wolkswagen en y intégrant toute la mythologie de Star Wars pour rassembler et
sensibiliser encore davantage la communauté sous-jacente.
Mais toucher sentimentalement les internautes n’est pas aussi simple que cela. Car s’ils
apprécient autant ces références, ils sont intransigeants si une marque commet un
impair dans ces déclinaisons marketing. Certaines maladresses démontrent une volonté
marketing de s’inspirer des succès d’Internet sans forcément s’attarder sur les détails.
L’utilisation de mêmes peut donc constituer des déclencheurs de buzz, mais également
des bad buzz si l’entreprise n’a pas appréhendé la mythologie qui y est liée.
tromper, pour un détail ou pour un point crucial reste un « fail ». Cette notion s’est
donc imposée comme une norme pour désigner un clin d’œil moqueur. Le « fail » est de
ce fait une déclinaison de la crise, au même titre que le bad buzz.
BY
Plus généralement, cette tendance souligne une culture de la raillerie voire du sarcasme
qui apparaît distrayante. Ceci étant dit, cette nonchalance sans véritable arrière pensée
peut constituer les prémices d’une crise. Car l’ironie et le second degré peuvent parfois
laisser place à de l’humour noir, et à des articles sur le vrai problème soulevé au travers
de la plaisanterie. Le « fail » comporte ainsi plusieurs réalités en fonction de
l’interprétation qui en est faite. En ce sens, nous observons une distinction entre un
simple « fail » et un « epic fail » qui renvoie à la hiérarchisation par « degré de bêtise ».
Les représentants de l’entreprise ne doivent pas négliger cette culture, convoitant des
sensations fortes et désireuses de trouver de nouvelles histoires croustillantes. Car
même si une entreprise peut oser se dénoncer subtilement pour une petite faute
anodine en la caractérisant par un « fail », certains internautes peuvent provoquer une
crise autour de la marque avec certaines productions hilarantes.
Ce fut le cas de la société de prêt-à-porter Célio, qui en 2011, a voulu surfer sur un
succès populaire pour faire parler d’elle. En élaborant une vidéo de science-fiction sur la
thématique Star Wars, l’enseigne était certaine de provoquer le buzz tant attendu. Ce fut
une erreur, car une multitude d’internautes ont remarqué une anomalie. Un des
vaisseaux présents dans la vidéo appartenait à une autre saga (Battlestar Galactica en
l’occurrence). Un détail pour certain, un scandale pour les puristes. Les fans se sont
alors empressés de diffuser la nouvelle sur les médias sociaux, et l’information est
rapidement devenue incontrôlable. Cette négligence a laissé place à une accumulation
d’images et d’écrits pour se moquer de cet amalgame fait par la marque. Cette
maladresse toute simple montre bien que certaines sociétés cherchent souvent à utiliser
des thèmes fédérateurs en omettant de se documenter. Une indolence face à la réflexion
qui leur a valu un beau « Célio Fail » (http://bit.ly/TGWw41), terme qui subsiste encore
sur les moteurs de recherche.
opportunité pour s’inviter dans la crise médiatique que connaît la marque. Nous
pouvons même penser que ces illustrations font partie intégrante de l’ADN des bad
buzz. Car dans les faits, une crise est fréquemment accompagnée d’un florilège de
BY
M
Lors d’une crise, la vidéo peut avoir deux objectifs : soit pour attaquer une marque, soit
SI
pour qu’elle se défende. L’enjeu est de se servir de la viralité offerte par ce format pour
faire entendre sa voix, que ce soit la critique des internautes ou la réponse de
AS
l’entreprise.
Dans le cas d’une crise, les amateurs de détournement vidéo surfent sur cette
BY
sociaux. Les outils de veille dénichent ces informations et donnent plus de chance à la
propagation de la rumeur. Ici, il ne s’agit pas de spams envoyés automatiquement, mais
bien de messages transmis manuellement par des internautes. Les individus pensent
BY
avoir trouvé un scoop et relaient les informations sans s’attarder sur leur véracité.
Au-delà des appels à l’aide fictifs ou des astuces pour se partager 500.000 b avec un
étranger, les hoax peuvent également atteindre une marque. Car certains hoax peuvent
avoir été élaborés volontairement dans le but de causer du tort à une entreprise.
Par exemple en 2011, une information selon laquelle les e-mails seront taxés est
parvenue à beaucoup d’oreilles, notamment sur le Web. Un PDF (soi-disant
confidentiel) de la société La Poste a été publié sur Internet, présentant le projet de
taxation des courriels. Se reposant sur le véritable projet d’un député qui avait présenté
cette idée en 2006, ce document inclut également la mention d’une taxe Google. Paru
un certain 1er avril, l’information a pourtant été prise très au sérieux par les internautes,
qui se sont indignés massivement contre cette nouvelle. En réalité l’auteur du PDF,
avait simplement repris la proposition de loi de 2006 du député, en modifiant les dates
pour la réactualiser et en collant le logo de La Poste.
Difficile de connaître les motivations intrinsèques des instigateurs de ces hoax tant les
cas sont différents. Le fait est que leurs efforts se voient récompensés par la naïveté des
internautes, qui ne prennent que rarement en considération la véracité de l’information.
De ce fait, la difficulté majeure est que très rapidement, les sources originelles de ce
hoax sont ensevelies sous le flux des relais, ce qui créer une vérité parallèle
consensuelle. Sans compter que le contenu du message devient rapidement un prétexte
pour s’inscrire dans la réalisation d’un acte social de partage. La mécanique virale est
donc rapidement mise en marche.
Le hoax repose sur des mécanismes cognitifs qui ne sont pas simplement inhérents au
Web car on les retrouve également dans la vie réelle. Par exemple, sur Twitter, il est
fréquent de voir annoncer et relayer en abondance la mort de célébrités alors que ces
dernières vont bien. Avant même l’avènement des médias sociaux, ces pratiques
existaient déjà. Ainsi, à la fin des années 1960, une rumeur se diffuse dans certains
cercles selon laquelle le chanteur des Beatles Paul McCartney serait mort dans un
accident et aurait été remplacé par un sosie. Le poids des images est encore une fois
important dans la transmission de ce mythe, car les pochettes des albums du groupe
furent une grande source d’inspiration pour crédibiliser cette information. Des signes
ont ainsi été sortis de leur contexte, comme la fameuse plaque d’immatriculation sur
l’album Abbey Road « LMW 28 IF », censé signifié « Living McCartney Would be 28
IF ». À ce sujet, Paul McCartney répondra simplement : « Qu’est-ce que j’apprends ? Je
suis mort ? Pourquoi suis-je toujours le dernier à être mis au courant de tout ? ».
Les hoax reposent sur des mythes qui vont obtenir une plus grande portée grâce à la
M
viralité offerte par les nouvelles technologies : gagner de l’argent facilement, aider la
SI
veuve et l’orphelin, découvrir la mort d’une célébrité avant les autres…
AS
Nous pourrions penser que les hoax sont sans conséquence pour les entreprises
impliquées malgré elles. Quand bien même ces épisodes affabulatoires n’ont rien de
dramatique en l’état, il ne faut pas sous-estimer la réaction des internautes face à un
BY
éventuel démenti de la marque. Si le hoax porte sur une nouvelle que ses clients
attendent depuis longtemps, la société n’a peut-être pas envie de leur annoncer qu’ils
ont eu tort de se fourvoyer.
Cette technique de divertissement ou de pression témoigne en tout cas de la
prédominance d’une culture du second degré sur la toile. L’improbable et l’attendu
égayent la curiosité. Ce constat dépeint une toile qui ne se prend pas au sérieux, mais
qui ne réalise pas toujours les risques potentiels que ces informations représentent.
Il n’est donc pas toujours évident de démêler le vrai du faux, l’entreprise devant faire
preuve de vigilance si elle était victime de telles pratiques. Pour initier les internautes,
des plateformes comme « Hoaxbusters » proposent de répertorier et de signaler ces
canulars qui défilent sur la toile. Un moyen de prévention et d’entraide dont l’entreprise
pourra se saisir pour démentir une information nuisible et non fondée.
Les hacks représentent une modification volontaire du contenu d’un site ou d’une
plateforme Web, voire même sa fermeture momentanée. Qu’il s’agisse d’une attaque
directe contre l’enseigne ou juste d’une facétie de mauvais goût, ce détournement n’est
pas à sous-estimer, car la marque doit réagir rapidement et rendre des comptes.
Si le hack peut être conséquent à une crise pour appuyer la gronde des internautes, il
peut également en être à l’origine. La difficulté pour les entreprises est que les individus
ne cherchent pas à connaître les causes ou l’origine du problème, ils veulent une
réponse. Ils attendent surtout une communication irréprochable et transparente dans
ces moments de flottement. Délicat en effet de prouver qu’il s’agit bien d’un hack, alors
que s’acheminer vers des réponses de déresponsabilisation ne satisfait que très
rarement la communauté. Fuir ses responsabilités (même si le blâme n’émane pas de
l’entreprise), c’est donc condamner la société. Dans ces cas de figure, assumer et gérer
les embarras s’avère être la meilleure solution.
Parfois, ces hacks peuvent être des assauts organisés par des groupuscules de
professionnels de l’informatique (même s’ils sont rares), vis-à-vis d’entreprises. Nous
pensons naturellement au groupe très médiatisé qui se fait appeler « Anonymous », une
alliance virtuelle pour protéger les droits des internautes. Pour se faire entendre et
respecter, ils n’hésitent pas à modifier le contenu de sites Web gouvernementaux ou
privés selon leurs revendications. En règle général, leurs actes sont toujours motivés par
une faute d’une entreprise ou par une responsabilité non assumée. Le groupe
Anonymous a su s’imposer comme un courant médiatique et leurs attaques, menaces, et
éclairages sur les défauts des entreprises sont extrêmement partagés sur la toile. Cette
alchimie s’avère être un cocktail dangereux pour les sociétés visées.
Alors, pourquoi réaliser une telle action ?
En étudiant la question, nous découvrons qu’il existe plusieurs motivations pouvant
expliquer ces hacks :
jours pour réactiver son service. Cela a donc été problématique pour les joueurs, mais
surtout pour la confiance qu’ils attribuent à la marque. Sony a donc dû faire face à la
remise en cause de son service et aux désabonnements d’un grand nombre
d’utilisateurs. Car lorsque les notions de sécurité ne sont plus assurées (issues du
deuxième palier de la pyramide de Maslow après la santé), c’est tout les autres besoins
qui sont remis en questions à leur tour. Au final, Sony avoue avoir subi une perte nette
de 2,3 milliards d’euros suite à ce piratage.
L’année 2012 a été particulièrement propice à cette forme de piratage, notamment pour
les médias sociaux. LinkedIn a ainsi été touchée par des hacks en 2012, dans le but de
récolter les mots de passe des utilisateurs. L’entreprise a très bien réagi en annonçant
promptement le problème, en assurant qu’ils concentreraient leurs efforts dans le
renforcement de la sécurité des comptes, mais également en informant tous les
utilisateurs du problème par l’intermédiaire d’un message directement sur leur site
internet. Fait intéressant, les internautes sont devenus solidaires et des outils ont
rapidement été confectionnés pour savoir si son mot de passe avait bien été dérobé.
Il peut s’agir d’un blogueur sulfureux qui passe son temps à critiquer ouvertement une
marque et à démontrer qu’il a raison, ou bien d’un membre de Youtube qui poste des
vidéos « clash » et des articles salés en pointant directement des acteurs reconnus.
M
Le point commun réside dans la recherche du conflit avec une entité populaire. La
SI
recherche d’une confrontation avec cette personne ou entreprise permet de s’attirer
AS
l’attention. Ici, le débat est invectif mais rarement constructif, la notion de troll n’est pas
si éloignée. À la différence près que la personne n’hésite pas à montrer son visage et à
utiliser son vrai nom, car elle cherche la reconnaissance. Il s’agit souvent de personnes
BY
en mal de reconnaissance, qui tentent par ces initiatives de se faire connaître par tous
les moyens, quitte à ce que ce soit en de mauvais termes.
Nous pouvons ainsi penser que la plupart d’entre elles n’ont aucune raison fondée pour
attaquer l’enseigne. Ces internautes voient en la marque un trem-plin, un moyen de
s’afficher en profitant de la visibilité de l’entreprise. Mais ce genre d’attaques
constituent de très faibles risques de crise pour les marques. Car si les communautés
virtuelles se divertissent de ces ébats conflictuels à ciel ouvert, elles savent
pertinemment que ce genre d’internaute n’est pas toujours crédible.
savoir ce que l’on cherche : le consensus mou, qui ne choquera pas la ménagère de
moins de 50 ans, ou une reproduction plus fidèle des modèles qui fonctionnent en
ligne. La première solution est bien sûr celle qui ressort le plus souvent. Mais passer
BY
l’esprit des mêmes au Prozac pour les besoins d’une publicité est le meilleur moyen de
se mettre toute une communauté à dos sans pour autant atteindre le reste de sa cible.
– Les lipdubs : le lip dub a été à la mode une quinzaine de jours il y a 5 ans.
Pourtant, chaque semaine une entreprise remet en ligne une vidéo reprenant le
concept plus ou moins fidèlement (rappelons qu’un vrai lip dub doit se tourner en
un plan-séquence, ce qui est rare dans les faits). Cela suscite au mieux
l’indifférence, au pire les quolibets.
M
– Les happenings : la troupe ImprovEverywhere a fait grand bruit en multipliant
SI
les happenings. Une action avait fait grand bruit : Freeze Grand Central, où des
centaines de personnes se figeaient à la gare de New York en même temps,
AS
suscitant une surprise incroyable pour les personnes présentes et non informées.
Ils avaient également réalisé une excellente vidéo de comédie musicale improvisée
dans l’espace de restauration d’un centre commercial. De nombreuses publicités
BY
Dans tous les cas, mieux vaut connaître parfaitement son sujet quand on cherche à
reprendre des codes si particuliers. D’autant que parmi leurs autres caractéristiques, on
retrouve la gratuité. Une valeur peu compatible avec la reprise d’un phénomène Web
par une marque… L’apriori négatif de la récupération sera réel, l’entreprise venant
empiéter sur un terrain de jeu qui n’est pas le sien et sur lequel elle n’est pas
nécessairement la bienvenue.
les risques inhérents à ce type de communication qu’il faut savoir assumer… Cela ne
fonctionne pas à chaque fois, et les succès critiques ne sont pas les succès
commerciaux ou viraux. Et inversement.
BY
M
SI
AS
Veet :
La marque de produits dépilatoires Veet a confondu originalité avec mauvais goût en
BY
2011 lorsqu’elle lance la vidéo virale « Mon Minou tout doux ». S’adressant à la base à
des cibles adultes, la campagne se présente pourtant comme un hymne aux très jeunes.
En mettant en scène une chatte chantant « quand mon minou est tout doux, il aime être
caressé partout », l’entreprise oublie que le second degré n’est pas le propre des jeunes
enfants, et que les sous entendus sont déplacés. Scandale sur le Web, les adultes
s’insurgent contre l’ambivalence de la campagne. Ceci démontre bien que les sujets
tendancieux et déplacés ne font pas toujours bon ménage (même si c’est un fait, le sexe
fait vendre). En mêlant des jeux de mots contestables avec un écrin trop enfantin, Veet a
donc subi les foudres des internautes, et a rapidement dû supprimer cette vidéo et revoir
leur stratégie de communication. Le site « mon Minou tout doux » n’est bien
évidemment plus en ligne, mais la vidéo a évidemment été largement reprise et circule
encore sur la toile. Voici la réponse du communiqué officiel de Veet après la suppression
de la vidéo : « les gens trouvaient cette pub trop ambigüe alors on a préféré arrêter pour
ne pas créer des incompréhensions. Cette campagne visait un public assez jeune, les
moins de 30 ans ».
Kit Kat :
Dernier exemple en date, Kit kat qui a dû supprimer l’image promotionnelle de son
compte Instagram en 2012. Certains internautes ont rapidement repéré que le
déguisement arboré sur l’image ressemblait étrangement à un Ours prénommé
« Pedobear ». Cet ours est un même qui a été imaginé en 2005 pour représenter
M
ironiquement les pédophiles sur Internet. Parmi les reproches qui circulèrent sur la
toile, un internaute, Aaron Howland, énonça ce principe : « Écoutez, Nestlé, si vous
SI
voulez utiliser internet, embauchez des gens qui comprennent internet ».
AS
BY
son site. Face à cet ultimatum, la femme a décidé de rendre publiques les menaces et de
modifier le nom de son blog : « je n’ai pas la carrure ni les moyens d’affronter ces gens
en justice, j’ai donc pris la décision de modifier le nom de mon blog ». Toutefois, son
BY
témoignage a touché les individus. Après avoir obtenu gain de cause, le Figaro n’avait
pourtant pas entrevu la controverse qui avait germé sur les réseaux sociaux, notamment
par l’intermédiaire d’un article du site Rue89. La page Facebook du magazine est alors
envahie par des messages virulents de personnes outrées face à la proportion
démesurée de leur démarche. Les soutiens à l’enseignante sont légion et le magazine n’a
d’autres choix que d’esquisser une explication sur les médias sociaux. Ils finissent par
publier un communiqué de presse devant la pression où ils déclarent « regretter le
malentendu ». Là encore, des articles, photos et autres détournements d’internautes ont
participé à ce rassemblement. Une autre preuve que le ressenti peut peser
irrémédiablement dans la balance pour amener une situation de crise.
monde pense tout bas. Ces « porte-paroles autoproclamés » peuvent ainsi représenter
des symboles de contestation et faire écho à un désir de contestation. C’est pour cette
raison que les protestations de blogueurs contre certaines marques sont régulièrement
BY
dans un secteur d’activité donné. Une vision sélective qui peut nous faire prendre les
propos d’inconnus comme argent comptant.
BY
Les communautés virtuelles sont ainsi régies comme des foules, des masses compactes
composées d’individualités, mais qui avancent souvent à l’unisson par une âme
collective, dotée de ses propres règles. Des normes que nous pourrions juger
impensables individuellement sont ainsi banalisées au sein du groupe social, par un
effet de normalisation.
M
Dans le cas de crise et de bad buzz, le pouvoir des foules peut se traduire par une
volonté de désigner des coupables et de les sanctionner. « L’homme est un loup pour
SI
l’homme » affirmait le philosophe Thomas Hobbes. S’il n’y a pas de coupable désigné, il
AS
faut généralement en trouver un. C’est pourquoi les scandales médiatiques portent
rarement le nom d’une enseigne. Ordinairement, il s’agit du nom d’une personne
désignée comme responsable ou d’un lieu étiqueté comme le théâtre d’une catastrophe.
BY
M
SI
AS
BY
Chapitre 6
L’image de l’entreprise après la crise
Le volume conversationnel produit durant une crise va laisser des traces numériques
qui resteront présentes sur le Web pendant un certain temps et pourront impacter sur
l’image de l’entreprise, sur sa e-réputation. Si les consommateurs « pardonnent »
généralement rapidement aux marques, les résultats sur les moteurs de recherche
peuvent être lourds de conséquences, notamment auprès des prospects, des
fournisseurs et autres acteurs gravitant autour de la structure. Une communication de
crise doit de ce fait prendre en considération l’impact des événements dans le temps et
ne pas se limiter à l’instant présent.
L’entreprise ne doit pas se limiter à améliorer son identité numérique, la manière dont
elle se présente, mais prendre en considération sa réputation numérique, la manière
dont elle est perçue. Elle doit comprendre que sur le Web, une crise ne se limite pas à
une période précise, mais s’étale dans le temps de manière presque imperceptible,
M
certains éléments demeurant visibles et nuisibles si rien n’est mis en place.
Il est stratégique que l’entreprise concentre ses efforts afin d’identifier et d’apprécier la
SI
persistance de traces négatives, afin d’apporter une réponse cohérente qui ne parasitera
AS
pas les actions de communication mises en place durant les événements. Un ensemble
de règles technologiques et tacites vont forcer l’entreprise à penser une stratégie sur le
long terme, mais également sur le court terme.
BY
L’objectif après une crise ou un bad buzz est donc d’identifier les traces numériques non
maîtrisées et non maîtrisables, d’agir en conséquence en prenant en considération un
ensemble de paramètres et d’agir selon les outils à disposition.
M
– Le SEA (Search Engine Advertising) qui correspond à la communication payante,
à savoir l’achat de liens sponsorisés, sur les moteurs de recherche, comme le
SI
programme Google Adwords.
AS
Malgré l’avènement des médias sociaux, les moteurs de recherche restent le premier
réflexe des internautes pour s’informer sur une société. Ils sont ainsi de plus en plus à
BY
pratiquer le « Name Googling », qu’ils soient des concurrents, des journalistes, des
candidats, des consommateurs ou des prospects. Le Name Googling, qui doit son nom à
Google, est le fait de réaliser une recherche sur un nom de personnalité morale ou
physique, les résultats offrant un panorama émotionnel que l’on qualifie de réputation
numérique. Une crise, par le volume conversationnel généré et indexé, va donc avoir un
impact conséquent sur l’image de la société.
Mais les résultats ne sont qu’une partie du prisme identitaire. Il est important de
prendre en considération l’ensemble des fonctionnalités offertes aux internautes. Ainsi,
afin d’aider ses utilisateurs, Google propose de nombreux outils ayant pour objectif
d’affiner la recherche. Ici, ce ne sont pas les résultats qui comptent, mais les requêtes.
Par exemple, Google a mis en place Google Suggest afin de proposer des mots clés
complémentaires, dont le fonctionnement est présenté comme suit :
« Ces recherches sont déterminées, par le biais d’un algorithme, en fonction d’un
certain nombre de facteurs purement objectifs (dont la popularité des termes de
recherche), sans intervention humaine. Toutes les requêtes de prédiction affichées ont
déjà été saisies par des utilisateurs de Google. La base de données de la saisie semi-
automatique Google est régulièrement mise à jour afin de proposer les dernières
requêtes du moment » (http://bit.ly/RmOKL1).
Google Suggest s’appuie donc sur les requêtes globales pour aider l’internaute à affiner
ses champs de recherche. Une crise soulève de nombreux commentaires, mais
également des requêtes sur les moteurs pour en savoir plus. Par exemple, dans le cas de
la crise de « l’homme nu » ayant touché La Redoute (que nous étudions en chapitre 7),
des traces numériques perduraient plusieurs mois après les événements au travers de
cet outil.
M
SI
AS
BY
Autre exemple parmi les options de Google, les recherches associées, qui permettent
d’identifier des mots clés associés à l’entreprise pouvant lui nuire. Ces dernières, tout
comme les propositions de Google Suggest, étant automatiques, elles ont par ailleurs
souvent été traduites en justice pour diffamation à cause de termes qui étaient corrélés
à certaines entreprises.
Lorsque l’entreprise subit une crise, il faut donc prendre en considération l’impact des
conversations dans les moteurs de recherche ainsi que les requêtes effectuées. Les
actions de communication ne devront pas se limiter uniquement aux résultats, mais
bien influencer sur le comportement des internautes.
d’outils lui permettant de se présenter sur le Web social au travers d’un contenu
maîtrisé, comme un profil, elle ne dispose d’aucune solution pour empêcher la
publication de commentaires acerbes.
Avant même de songer à agir sur sa réputation numérique, il est important de penser sa
présence en ligne de manière cohérente. Dans le livre « E-reputation : stratégies
d’influences », les auteurs Edouard Fillas et Alexandre Villeneuve identifient quatre
grandes forces de l’identité numérique :
Des traces liées à la crise peuvent également entrer en résonance avec l’actualité et
resurgir inopinément, d’où l’importance d’avoir mis en place un dispositif de veille. Par
exemple, les événements peuvent très bien être devenus des « cas d’écoles », à savoir
érigés comme un modèle, que cela soit négativement ou positivement. Par exemple en
mars 2012, Total a subi une avarie sur une de ses plateformes pétrolières. Les médias
traditionnels firent alors référence à la catastrophe de BP (étudié dans le chapitre 7),
faisant ainsi ressurgir des traces liées à une crise pourtant terminée.
L’entreprise doit donc apprécier les conséquences d’une crise sur sa réputation
M
numérique en utilisant le cheminement naturel des internautes : les moteurs de
recherche. Ainsi, elle sera à même de définir une stratégie de communication dont
SI
l’objectif, à terme, sera de créer un ensemble cohérent au service de son image entre son
AS
est nécessaire.
Enfin, une crise (d’un point de vue de la réputation) est un changement net de la
BY
perception qu’un groupe aura de l’entreprise. Il est donc nécessaire d’une part
d’identifier les différents groupes et la façon dont ils perçoivent ce qui est critique dans
les actions ou les discours de l’entreprise. Et d’autre part de prendre en compte après la
crise et la communication qui l’accompagne que le jugement que porteront ces groupes
soient empreint de l’expérience qu’ils viennent de vivre ou dont ils ont eu l’écho.
Quels peuvent être les effets secondaires d’une communication de crise sur
la réputation numérique d’une entreprise ?
Les effets secondaires peuvent donc être une non-compréhension du message véhiculé
par l’entreprise pour endiguer la crise par une partie de son public. Ainsi que la
nécessité de réadapter son discours, de redéfinir les connaissances à partir desquelles
les internautes vont juger les actions futures de l’entreprise, leurs points de repère. Car
c’est là que le Web joue un rôle intéressant : il mémorise et rend visible certains faits
« historiques ». Ne pas prendre en compte ces faits par la suite, ne pas prendre
conscience qu’au-delà de la mémoire des individus celle du Web est existante, amène le
risque d’être en décalage avec les attentes des internautes.
présence sur le Web (quel message, sur quelle plate-forme, avec quelle régularité,
quel public, etc.) est ensuite l’étape essentielle. Cela passe par une communication
choisie en fonction des publics, la diffusion de contenus avec une réelle valeur
BY
ajoutée (ne pas faire une vidéo pour faire une vidéo par exemple), la mise en place
d’espaces pour interagir avec le public si cela est nécessaire. Bref, le
développement et la mise en place d’une réelle stratégie de communication
prenant en compte les spécificités du Web.
– Niveaux 4 : le CRM. Enfin, si la réputation émerge des relations que l’on a avec
son public, il parait nécessaire de définir la manière dont l’on va interagir avec ce
public : de manière directe ? Sur un support développé par l’entreprise ? Par le
biais d’un community manager ou directement avec les services de l’entreprise ?
Une approche qui ne doit pas être une priorité, mais une conséquence de
l’observation de l’environnement aussi bien qu’une partie intégrante de la stratégie
de communication.
Au final, chaque niveau doit ensuite interagir pour enrichir l’autre : le CRM doit
impacter le fonctionnement de l’entreprise, l’environnement la communication, la
communication le CRM, etc.
L’e-réputation se constitue au fil du temps, des échanges, des discours et des actions de
l’entreprise. L’e-réputation est un état de fait : à tel moment, dans tel contexte, pour tel
public, pour tel produit/service/action de l’entreprise, les opinions et évaluations qui
en sont faites sont celles-ci. C’est donc un ensemble historique qui prend du sens dans
un contexte. Plus clairement : l’expérience que j’ai vécue avec cette entreprise prendra
du sens lorsqu’un internaute se trouvera confronté à une expérience similaire. Le fait
de partager mon expérience (ou la connaissance que j’ai en provenance d’un proche par
exemple) pour répondre à une attente clairement identifiée n’aura pas le même impact
que si je la partage hors contexte.
L’e-réputation est un marqueur prescriptif jouant fortement dans l’établissement d’une
relation (entre une entreprise et un client dans notre cas). Savoir mettre en avant tel ou
tel marqueur au bon moment (ou essayer de le générer) est donc à définir en fonction
des stratégies des entreprises.
Pensez-vous que les entreprises ont suffisamment intégré cette phase dans
leurs plans de crise ?
Les entreprises semblent aujourd’hui chercher à identifier une e-réputation globale,
qui appuierait leurs stratégies à tout moment, dans tous les contextes possibles, pour
tous les publics. Encore une fois, définir le contexte dans lequel l’entreprise va
s’exprimer ou agir, et dans lequel elle va être ensuite évaluée est essentiel. Cela est plus
long, plus complexe, mais in fine beaucoup plus efficace sur le long terme. Car il serait
illusoire de croire que le Web va disparaître comme il est apparu. Au-delà des effets de
mode, des discours et recettes toutes faites, une approche plus artisanale me semble
nécessaire.
Après une crise, l’entreprise devra déployer un ensemble d’actions dont l’objectif sera
d’atténuer l’impact négatif des traces numériques dans les moteurs de recherche. Pour
cela, elle va devoir mettre en place une stratégie sur le court terme et sur le long terme
afin de faire émerger dans les résultats et dans les fonctionnalités des éléments positifs.
Comme évoqué en début de ce chapitre, Google a toujours refusé de modifier
manuellement ses résultats de recherche, préférant aller en justice plutôt que d’agir sur
son index, ce quelle que soit la nature de la crise. Par exemple, ces dernières années, les
présidents français ont été associés à des termes péjoratifs à plusieurs reprises. La
réaction de Google face à ce Name Bombing permet de comprendre la politique du
moteur de recherche par rapport à des contenus dégradants :
« nous ne sommes pas plus enthousiasmés par l’idée de modifier manuellement nos
résultats pour empêcher de telles informations d’apparaître ».
Si une société subit une crise, il y a donc de fortes chances que Google se refuse à
modifier manuellement ses résultats au motif que son image est ternie par des contenus
nuisibles. L’entreprise va donc devoir user de leviers légaux pour faire disparaître les
traces indésirables.
2.2 Droit contre règles tacites
L’appel au droit peut paraître comme une solution évidente, mais l’entreprise devra agir
avec déontologie si elle veut échapper à une nouvelle crise. Certaines actions, même si
elles sont légales, paraîtront comme allant à l’encontre de règles morales tacites. Les
internautes pourraient alors se fédérer contre de tels procédés et enclencher de
nouveaux événements.
Face au flot de traces numériques, de nombreuses entreprises décident d’en appeler à la
loi afin de faire effacer des contenus compromettants. Contrairement à une idée
répandue, le Web n’est pas une zone de non-droit : un internaute proférant des insultes
à l’encontre de tiers est tout autant condamnable que dans le réel. Cependant, lorsque
les commentaires semblent justifiés, et qu’importe le ton employé tant qu’il ne tombe
pas dans l’injure, faire appel à la justice n’est pas la meilleure des solutions dans la
mesure où il risque de se produire l’effet inverse de celui escompté. Si porter plainte ou
menacer de le faire est légal, ces actions ne sont en aucun cas perçues comme éthiques
par les internautes, Internet étant associé dans la culture populaire à la notion de liberté
d’expression. Il y a donc d’un côté la loi et de l’autre certains codes implicites imposés
naturellement depuis les débuts du Web.
M
Par exemple, le terme « nétiquette » apparaît dans les années 90, aux débuts d’Internet
tel que nous le connaissons aujourd’hui. Il s’agissait alors d’un code de conduite
SI
implicite définissant les règles de présence sur les premiers supports « sociaux », d’un
AS
utilisateur vis-à-vis d’autres utilisateurs. Parmi ces règles, il est à noter des exemples
comme la proscription des majuscules, signifiant implicitement qu’une personne crie,
ou encore l’interdiction d’user du langage SMS de type « bjr » (signification de
BY
« bonjour »).
D’autre part, effacer des traces en allant à l’encontre des codes de bonne conduite peut
avoir des conséquences dramatiques qui vont amplifier leur visibilité.
Il existe deux analogies pour dépeindre les phénomènes inhérents à cette « censure
légale » :
L’effet Barbara Streisand
L’encyclopédie en ligne Wikipédia donne une définition de l’effet Streisand : « l’effet
Streisand est un phénomène internet qui se manifeste par l’augmentation considérable
de la diffusion d’information ou de documents faisant l’objet d’une tentative de retrait
ou de censure » (http://bit.ly/RlQVvc).
Les faits qui ont donné lieu à cette dénomination remontent à 2003. À l’époque, le
photographe Kenneth Adelman prend des photographies de la côte de Malibu pour le
compte du « California Coastal Records Project », dont la mission est la surveillance de
l’érosion des côtes Californienne. Il n’y avait aucune démarche de type paparazzi, mais
l’un des clichés apparaît être la maison d’une célèbre chanteuse, Barbara Streisand. Elle
attaque en justice le photographe, l’hébergeur du site et l’hébergeur de la photographie
afin d’empêcher sa diffusion.
Ces derniers décident de diffuser le contenu de l’assignation, et contactent blogueurs et
médias pour faire connaître l’affaire. Des centaines d’articles sont alors publiés ce qui
participe à la large diffusion de la photographie, soit l’effet inverse à celui escompté.
Selon le Mercury News (http://bit.ly/RTKlhX), presque 420.000 internautes ont donc
visité le site Web où cette photo était présente. Il est amusant de penser que sans cette
procédure judiciaire démesurée, personne n’aurait sans doute remarqué cette image
(http://bit.ly/RCHNmp).
L’effet flamby
Un terme qui pourrait faire sourire, si derrière cette apparente note humoristique, ne se
cachait pas un fait avéré qui peut nuire à l’entreprise. Il correspond à la reprise de
contenus menacés par la censure sur diverses plateformes pour en assurer la pérennité.
Pour illustrer cet effet, il est pris en exemple un Flamby qu’une personne écraserait avec
une batte de baseball et dont les morceaux se retrouveraient éparpillés sur les murs
(http://bit.ly/WchBTr). Les traces ne sont pas effacées, elles se sont multipliées.
Par exemple, un article sur une affaire est publié, mais la justice décide qu’il ne pourrait
en être ainsi et condamne l’hébergeur de retirer les contenus illégaux. Les internautes
M
décident donc de réaliser une sauvegarde des données en republiant ces contenus sur
SI
leurs propres espaces pour assurer leur survie et montrer à l’entreprise qu’elle ne
pourra jamais triompher : un contenu présent à l’origine sur une seule plate forme se
AS
revendicatif. Il y a ici une volonté des internautes de lutter contre une action jugée
comme allant à l’encontre des codes éthiques. L’effet Streisand repose quant à lui sur
une curiosité naturelle quant à des faits qui feraient l’objet d’un délit.
Il est important pour l’entreprise de comprendre que les traces négatives ne sauraient
disparaître au motif qu’elle a la loi avec elle. Par conséquent, c’est à elle de mettre en
place des actions pertinentes dans le temps afin de modifier sa réputation numérique.
Les AdWords permettent d’apporter rapidement une visibilité sur les prises de position
et de décision de l’entreprise face à la crise. Cependant, ces liens publicitaires ne
M
sauraient être la solution sur du long terme. Ils sont d’une part onéreux, et d’autre part,
ils n’empêchent pas les contenus négatifs d’apparaître en deuxième ou troisième
SI
position dans les résultats de recherche.
AS
Sur le long terme, il faut donc mettre en place une stratégie de contenu dont l’objectif
sera de créer des contenus originaux dans le temps (blogs, vidéos, livres blancs) qui vont
BY
être mieux référencés que certains éléments nuisibles. Pour cela, l’entreprise devra
mettre en place des plateformes qu’elle maîtrise, comme un blog ou un site corporatif
dédié, et utiliser tous les leviers de l’optimisation pour les moteurs de recherche, c’est-à-
dire du SEO (Search Engine Optimization).
Cependant, l’entreprise ne pourra pas mettre en place des centaines de sites Internet
optimisés afin de maîtriser la première page de résultat, car cela représenterait un trop
grand volume de production et ne sera pas « naturel ». Elle pourra néanmoins réaliser
des actions spécifiques, comme des partenariats avec des blogueurs ou des contenus
viraux comme un livre blanc, afin de diversifier les sources la mentionnant.
Si les techniques de référencement peuvent modifier les résultats de recherche, elles
n’auront qu’un impact limité sur les outils d’aide à la recherche de Google. Il peut donc
être intéressant pour une entreprise de mettre en place des actions ponctuelles afin
d’amener les internautes à créer des volumes de requêtes sur son nom qui seront prises
en considération, comme des jeux concours par exemple.
Enfin, ce n’est pas parce que les commentaires acerbes sont mal référencés qu’ils ont
disparu. L’entreprise devra avoir y apporter des éléments de réponses, témoins de sa
prise de conscience face aux événements et de sa dimension humaine. Un internaute
peut utiliser certaines combinaisons de mots clés et avoir pour résultat des critiques
négatives. Si aucune réponse n’a été apportée, alors sa perception sera que l’entreprise
ne prend en considération les avis de ses consommateurs. D’où l’utilité de repérer et de
réfléchir aux termes et aux expressions qui désignent l’entreprise qu’elle souhaite
améliorer.
Il est à noter que dans certains cas, l’entreprise pourra ne pas souhaiter s’exprimer
publiquement pour certaines raisons. Par exemple, dans le cadre d’un licenciement, la
société pourrait avoir des raisons légitimes, qui ne sauraient être rendues publiques
pour des motifs liés à la confidentialité, comme un salarié surpris en train de boire de
l’alcool sur son lieu de travail. Dans ces cas précis, l’entreprise répond généralement de
manière privée à ses détracteurs. Or, il est important de témoigner de cet échange, en le
mentionnant au travers d’un commentaire tel que « nous vous avons répondu de
manière privée ». Ainsi, les internautes qui seraient confrontés à cette discussion
comprendront que la situation a été traitée en privé. Il ne faut jamais laisser un dialogue
ouvert, mais toujours montrer qu’une réponse y a été apportée, qu’elle soit publique ou
privée.
pour créer ou favoriser le trafic sur son blog pour revendre de la publicité (liens
sponsorisés, affiliation ou bannières). Chacun de ses billets, du titre jusqu’au texte, va
donc être optimisé pour prendre le moins de temps possible à construire tout en
intéressant un public ciblé. Le blogueur indépendant a, quant à lui, des motivations
très personnelles (valorisation de son expertise professionnelle, besoin de
communiquer sur une cause, etc.).
Ces deux profils ne vont pas du tout agir de la même façon en cas de crise de marque.
Le blogueur SEO (spécialisé marketing) va propager très rapidement la crise sans
analyse ou alors très légère ; son objectif étant de faire venir des visiteurs sur son site
grâce à un titre racoleur, et un article réalisé à base de copier-coller ou de traduction
d’article américain. Le blogueur SEO étant souvent un spécialiste de la propagation
d’article (d’où l’appellation SEO), il va diffuser son billet sur toutes les plateformes
possibles (notamment les réseaux sociaux) pour tenter de se positionner rapidement
dans les moteurs de recherche et réussir à obtenir une de diffusion naturelle de
l’article : un buzz (et dans ce cas-là, un bad buzz pour la marque).
Le blogueur indépendant va, lui, chercher à comprendre un peu plus le problème, voire
à analyser la situation. Forcément, cette analyse va prendre du temps et son article
sortira quelques jours, voire quelques semaines après celui du blogueur SEO.
Néanmoins, l’article sera mieux apprécié par les professionnels et peut calmer ou
réactiver un bad buzz éventuel.
Ce blogueur indépendant est également susceptible d’être à l’origine d’une crise de
marque avec un article pertinent et bien construit. Dans ce cas, si la polémique qu’il
soulève peut intéresser le grand public, elle est en mesure d’être rapidement reprise par
des blogs SEO et engendrer un bad buzz de marque.
Pour une marque, suivre les blogs est donc devenu primordial, car ils sont le reflet de
dysfonctionnement réel de la marque ou de rumeurs sur Internet.
pour les blogueurs, c’est la même chose. Il n’y a pas qu’un seul type d’écriture de blog :
peut écrire n’importe quoi sans vérification, car il prétend à un rôle de simple
transmetteur d’information. Pourquoi pas ? Certains médias traditionnels le font
aussi.
– À l’opposé, d’autres blogueurs les indépendants vont chercher la vérité. Analyser,
disséquer un phénomène, une attitude. Ils sont rares, mais, par leur audience
pointue, sont capables d’influencer un bad buzz en le dégonflant ou au contraire en
le relançant.
– Et puis, entre les deux extrêmes, on trouve les blogueurs qui relaient
l’information en la passant au crible d’une analyse critique personnelle. On
retrouve ici l’attitude des journalistes traditionnels, qui vérifient l’information le
plus possible avant de la transmettre ; coincés entre leur envie d’être le plus
objectif possible, et leurs moyens et temps disponibles.
Quelles peuvent être les réclamations d’une marque après une attaque
directe ?
Il y a à peine quinze ans, la réaction des marques était assez classique devant une
attaque directe : elle lançait ses avocats pour attaquer en diffamation celui qui osait
faire ça. Dans ce cas, l’accusé avait soit les moyens de faire face au procès, soit il devait
se confronter au jugement (amende, obligation de réponse, etc.). On peut ajouter que
face à un particulier désargenté, les grandes marques et leurs nombreux juristes
avaient toujours l’avantage (on ne connait pas les class action en France). Le tout,
associé à un bon communiqué de presse, permettait aux grandes marques d’être
presque intouchables.
Et puis, au début des années 2000, Internet a montré aux marques que le réflexe
« juridique + communiqué de presse » ne fonctionnait pas toujours (on peut citer
l’exemple des antivols Kryptonite par exemple). Dans ce cas, à quoi peut servir
d’envoyer une équipe d’avocats pour gagner un procès, si la vérité finit par inonder
Internet, et finalement les consommateurs et donc les ventes ? Une question devenue
certitude après l’affaire Streisand de 2007, où la loi obligea un photographe à enlever
de son site Web une photo de la maison de Barbra Streisand, photo qui se retrouvera
sur tous les sites de blogueurs SEO le lendemain. Bilan de l’opération : un procès certes
gagné, mais une diffusée photo partout sur Internet (photo qui n’a d’ailleurs d’autre
intérêt qu’avoir voulu être dissimulée). M
SI
Depuis, les nombreux cas de bad buzz ont pu apprendre 2 principes aux marques :
AS
À partir de ces 2 principes, les marques peuvent avoir plusieurs réactions en cas
d’attaque :
chercher l’origine du problème (le blogueur a peut-être raison malgré tout), discuter
d’égal à égal avec le blogueur (vous êtes sur son terrain, l’insulter ou le menacer ne va
pas faire avancer votre cause), et pourquoi pas, répondre officiellement par un
communiqué de presse (et même légalement – vous avez peut-être raison et vos
consommateurs peuvent vous soutenir).
Mais comme dans toute situation de gestion de crise, il est évident que la qualité de
votre réponse dépendra de votre préparation. Les marques préparées, qui ont identifié
leurs faiblesses et anticipé ces problèmes, auront forcément un coup d’avance.
Ce faux bad buzz s’est donc assez rapidement tu car qui va prendre parti
pour de la presse people en ligne ?
À l’opposé, l’attaque (qui s’est transformé en menace d’attaque) en diffamation que
m’a envoyée une agence de publicité que j’avais pu critiquer sur mon blog, s’est
transformé en vrai bad buzz pour eux. Après seulement un tweet disant que j’étais
attaqué, l’article originel a été republié sur plusieurs gros sites (effet Streisand), un
sentiment d’injustice s’est propagé sur Twitter jusqu’à créer un trending topic mondial
(#teamcyroul, 3eme après Justin Bieber–hé !), et l’article incriminé s’est retrouvé en
deuxième position sur Google en tapant le nom de l’agence. Un vrai engouement de la
profession qui voulait absolument faire gagner David, le blogueur indépendant, contre
Goliath, la cruelle agence toute puissante. Le résultat : des avocats sympas m’ont
M
défendu, des journalistes ont pris mon parti, et l’agence a été forcée d’abandonner son
attaque sous peine de faire durer le bad buzz.
SI
Ces deux exemples montrent bien que tout dépend du type de blogueur attaqué,
AS
Sachant que, rémunéré par les marques, il va de toute manière très rarement les
critiquer.
Le blogueur indépendant, lui, va posséder d’autres armes face à la marque dans le cas
où il est de bonne foi. Notamment la transparence, en racontant ses malheurs sur son
blog ou sur ses réseaux sociaux.
On peut se souvenir de l’affaire Olivier Martinez contre le blogueur Eric Dupin qui
avait suscité une très mauvaise publicité pour l’acteur Martinez. Les blogueurs prenant
parti pour le sympathique Eric avaient en effet lancé une campagne de Google bombing
« J’aime pas Olivier Martinez ! ». À la fin, Eric Dupin s’est fait peut-être condamner
(une amende), mais Olivier Martinez a perdu sa crédibilité auprès des lecteurs des
blogs.
Donc face à une attaque illégitime de marque, le blogueur doit compter sur sa
transparence et sa réputation. À lui de faire en sorte qu’elle soit bonne, il a tout à y
gagner.
L’attaque des marques envers les personnes qui les ont « dénoncés » est-elle
une cause louable ?
Cela va dépendre de la légitimité de la cause. Certaines marques ont raison d’attaquer
des blogs ou des médias qui leur font du mal, dévoilent leur vie privée, ou répandent de
fausses rumeurs. Internet est un reflet de notre société. On trouve donc des bonnes et
des mauvaises personnes, de bons et de mauvais blogueurs. Les marques peuvent et
doivent manifester leurs droits sur Internet comme ailleurs.
Néanmoins, encore trop de marques appuient sur la gâchette juridique dès que la
moindre critique leur est adressée, sans même chercher à la vérifier. La faute en
incombe souvent aux services juridiques eux-mêmes qui vont reproduire sur Internet,
ce qu’ils faisaient avant depuis des dizaines d’années sans savoir qu’il s’agit d’un autre
monde qui a d’autres lois.
J’ai pu constater cet éloignement des ressources juridiques face à Internet lors d’une de
mes formations en gestion de crise. Après un des exemples de la dérive d’une
réputation de marque après un bad buzz, je posais la question classique du « et vous,
qu’auriez-vous fait ? ». La responsable juridique de ce groupe indiqua tout de suite
qu’elle aurait fait un procès à ceux qui avaient lancé la rumeur. Il a fallu lui dire que ça
n’aurait pas arrangé les choses à ce moment là, bien au contraire, que ça allait faire
empirer l’incompréhension des publics sur Internet, et le sentiment d’injustice
« grandes marques contre petits consommateurs » que ces histoires génèrent, elle n’en
M
démordit pas. Le travail de cette responsable juridique était de faire des procès contre
SI
ceux qui menaçaient sa marque, Internet ou pas. Dans cet exemple, la marque étant
dans son droit, le procès était évident et immédiat.
AS
Un moment très intéressant, où les autres responsables ont compris qu’en cas de
problème de réputation sur Internet, ils feraient d’abord un constat entre eux et ne
BY
M
avant-coureurs, prendre en considération les éléments déclencheurs et leurs
conséquences, et anticiper sa réputation numérique future.
SI
Afin de schématiser ces différentes étapes, nous avons voulu nous attarder sur trois
AS
épisodes sensibles, ces concepts procurent une réelle influence sur les opinions et les
attitudes, ainsi que sur les prises de décisions collectives.
Pour avoir une vision concrète du cycle de vie d’une crise, nous avons également voulu
nous attarder sur deux études de cas. Ces exemples permettront d’observer la
matérialisation des bonnes et des mauvaises pratiques en terme de gestion de crise.
À l’origine perçue comme un mode de transmission linéaire de vive voix, la rumeur est
BY
devenue un mode de communication à part entière sur la toile. Avec la technologie qui
évolue sans cesse, l’internaute lambda peut faire des pronostics et s’imaginer le futur
proche. C’est pourquoi il n’est pas rare de voir les prévisions d’experts ou des articles à
sensations décrivant les fonctionnalités d’un appareil attendu. Ce besoin de poser des
constatations comme des vérités générales témoigne d’une impatience et d’une crainte
face au changement. La rumeur devient en ce sens une représentation comblant une
absence, un manque. Les spécialistes imaginent comment sera Facebook en 2015, quels
seront les médias sociaux à la mode, etc.
Mais dans le cas de crise, des informations peuvent être véhiculées sous forme d’ironie,
de blagues ou de faux témoignages et être prises comme un fait avéré par bon nombre
d’internautes. La dynamique de partage peut alors s’enclencher sur des bases erronées.
Face à une attente précise, le moindre signe est guetté, et dès lors qu’un propos nuancé
est perçu comme une réponse à ce signe, les gens commencent à partager l’information
en présentant cette information comme véridique.
C’est le cas de Burger King, qui à partir d’un article anodin sur le blog nommé
FastandFood imaginant la possible installation de l’enseigne en France, a vu tous les
influenceurs relayer cette « fausse nouvelle » sans la moindre officialisation de
l’enseigne. À partir de l’article original (sans source ni référence) vient alors se greffer
une succession de billets et de papiers sur la blogosphère, qui supplantent totalement
l’article du premier blog et qui annoncent officiellement qu’un Burger King va ouvrir à
la gare Saint-Lazare à Paris. Des journalistes ont même repris l’information sans vérifier
les sources et ont exposé ces supputations comme des faits avérés. Face à l’émulation
qui s’opère autour de cette possible ouverture, aucun communiqué ne vient acquiescer
ou démentir, ce qui laisse les internautes dans le flou, et la voie libre aux esprits
fantaisistes. C’est pourquoi un utilisateur de Twitter a fait parler de lui en affirmant être
entré sur le chantier du futur Burger King. Là encore, le message est fortement relayé,
donnant naissance par la même occasion à des montages visuels (les « fakes »)
circulant sur le Web. Si bien que d’un œil extérieur, cette nouvelle était jugée crédible.
M
SI
AS
BY
Pour comprendre comment naît et évolue une rumeur, Allport Et Postman, deux
psychologues, ont décidé de mettre en lumière l’évolution de la transmission d’un
message. Dans une de leurs expériences, les sujets tests devaient simplement observer
un dessin et rapporter à une personne ce qu’il avait perçu. Ainsi de suite. Les résultats
démontrent que de relais en relais, l’information subit un certain nombre de
distorsions, elle se transforme en une rumeur. Ce qui est intéressant de noter, c’est que
l’information prend une forme définitive à partir du septième relais. À ce moment,
l’information est devenue suffisamment courte pour être répétée de façon mécanique.
La réduction maximale semble même être atteinte après seulement quatre relais. Ceci
démontre que plus l’information est courte et concise, plus elle a de chance d’être
reproduite à l’identique. Cette stabilisation s’explique aussi par le fait que la possibilité
de travail d’élaboration et de construction de l’imaginaire diminue du fait de la
disparition de la plupart des détails amenant à l’interprétation. Un savoir de sens
commun qui élimine progressivement les détails « accessoires » pour ne garder que les
éléments centraux.
Le message évolue donc progressivement selon un mécanisme de réduction pour aller
vers une structure plus simple, devenant ainsi plus facile à intégrer. Cette réduction
s’opère dans une logique de conservation des éléments jugés centraux et essentiels. La
prédominance et la mise en avant des informations générales mettent ainsi en lumière
un effet d’accentuation. Néanmoins, cette construction sociale est souvent le miroir
déformé de la réalité. L’information qui est transmise au plus grand nombre est alors
plus une rumeur qu’une information factuelle.
Il existe une troisième phase de la création d’une rumeur : l’effet d’assimilation. Les
ajouts, erreurs, oublis ou exagérations trouvent leur source dans le fait que les
individus, en se relayant successivement l’information, l’assimilent en la rendant
compatible avec leur système de valeurs, de normes et d’attitudes. Les influenceurs qui
relaient des informations relaient surtout leur perception de la chose. Et cette
perception engage souvent l’intégration de stéréotypes, de préjugés, de catégorisation
sociale et donc de subjectivité.
M
Ces aspects de réduction, d’accentuation et d’assimilation constituent la consolidation
de la rumeur. Ils la rendent plus solide, résistante et donc plus apte à être diffusée. Mais
SI
outre ces considérations d’ordres humaines, une rumeur ne va s’enraciner que si le
AS
rumeur représente un public qui partage des connaissances et des attentes communes à
un instant T. La sortie des nouveaux produits d’Apple par exemple déchaîne toujours les
passions. Même si le public est hétérogène (statuts sociaux, sexe, âge), ils partagent
l’espace d’un moment une histoire collective commune avec la marque. Ils regardent
tous la même chose et tentent de trouver des indices, parfois là où il n’en a pas, pour en
savoir plus sur ce qu’ils désirent.
Pour les marques, il convient donc en amont de :
– Imaginer et rédiger des scénarios de crise potentielle basés sur la rumeur pouvant
survenir dans un secteur d’activité.
– Mettre en place une surveillance continue des conversations de consommateurs
autour de la marque sur les réseaux sociaux.
– Ne pas hésiter à discréditer la rumeur si elle est totalement infondée en trouvant
sa source.
– Utiliser le canal approprié, là où est née et continue d’exister la rumeur, tout en
répondant individuellement aux questions des internautes.
– Contacter rapidement les journalistes spécialistes de son domaine pour nier
explicitement la rumeur et prouver qu’elle est infondée.
M
Étymologiquement, le mot nexus provient de l’association de deux mots latin :
SI
– « necto » signifiant lier, unir, entrelacer.
AS
Afin de créer des repères dans un mouvement de contestations, les individus ou les
BY
médias vont tendre à s’approprier des mots clés, des termes porteurs afin de créer des
référents linguistiques représentant un sens commun. Les nexus correspondent à des
« nœuds affectifs », inhérents à un grand nombre de personnes qui neutralisent
temporairement leurs différences inter-individuelles pour favoriser le rassemblement.
Servant à la base de marque-page historique, l’abondance de contenus issus du Web a
provoqué un besoin de marqueurs, pour surligner les passages de crise. L’infobésité
induite par la démultiplication des messages a ainsi créé un besoin de se repérer dans
ces manifestations sociales. Les bad buzz se sont ainsi trouvé de parfaites loupes avec
les nexus. Même si cette instauration de néologismes sociétaux n’est pas
systématiquement utilisée, nous observons qu’ils occupent une place de plus en plus
prédominante.
Lorsqu’une marque subit une crise, de nombreux écrits vont émerger pour analyser les
faits. Les nexus sont par conséquent des mots clés utiles pour les internautes qui
souhaitent avoir un synopsis de ce qui s’est passé.
Afin de mieux comprendre ce concept de nexus, voici quelques-unes de ses
caractéristiques :
– Un caractère collectif puisqu’ils sont intégrés par une population ou une société
donnée. D’après Rouquette, ce sont des « noyaux de sens irraisonnés qui ont
valeur de référentiels pour une communauté donnée à une époque donnée »
(http://bit.ly/TGZ3eE).
– Une mise à l’écart momentané des différences intra-groupales et / ou inter-
groupales s’effectue de manière temporaire pour faire face à une situation qui les
dépasse. On peut citer par exemple le fait que, lorsque le front national
(mouvement nationaliste) est passé au second tour aux élections présidentielles
françaises de 2002, les sympathisants de gauche comme de droite ont uni leurs
forces pour s’y opposer.
– Les nexus ont un impact maximal lorsque la situation est conflictuelle, car leurs
existences sont vouées à la désignation d’un événement précis. Dès lors que le
problème est résolu ou réglé, il perd irrémédiablement son impact. Plus tard, il
reste simplement dans les mémoires comme un symbole.
– Un nexus est une construction sociale qui tend à s’inscrire dans le réel. Ce
concept à la base imaginaire finit pat exister de lui-même. Il peut alors être utilisé
comme référence pour désigner un événement similaire.
M
– Les nexus sont désignés par un terme précis et unique. Il n’y a pas d’équivalent
SI
même si les mots désignent la même chose. Le drame des tours jumelles de
Manhattan est représenté par « le 11 septembre » et pas par « l’attaque terroriste
AS
d’Al-Quaida ».
Pour les marques subissant une crise, il est impératif de repérer l’émergence de termes
BY
rassembleurs et de tenter de les enrayer. La puissance des hashtags sur twitter constitue
d’ailleurs un moyen rapide et puissant de générer ces nexus pour informer les
internautes. De plus, les bad buzz et les crises portent souvent des appellations qui sont
largement reprises par les médias. On parle du « cas X », de « l’affaire X » etc. Il est
donc de l’intérêt des entreprises de s’y intéresser de près.
D’autre part, certains nexus ayant eu une sonorité médiatique puissante survivent
souvent à leur déroulement. Des appellations universelles comme le « 11 septembre »
deviennent alors des biens communs, des représentations sociales pouvant décrire de
nouveaux phénomènes (le terrorisme en l’occurrence). On observe d’ailleurs cette
mutation dans les journaux qui usent et abusent des formules types « le 11 septembre
de... ». Les entreprises doivent donc être extrêmement vigilantes à ce que les nexus qui
les concernent ne dépassent pas l’âge du dénouement de la crise, et que leur pérennité
ne soit pas remise en cause si le terme dénigre la société.
Dans le cas de BP, le Nexus est « Deep Water Horrizon ». Ainsi, si nous tapons ces mots
clés sur les moteurs de recherche, il y a fort à parier que nous y trouvions un article
traitant de ce bad buzz. Néanmoins, l’avantage de ce nexus est qu’il n’implique pas une
corrélation visible à ceux qui ne connaissent pas l’affaire. En effet, les nexus les plus
néfastes sont ceux qui comportent le nom de l’enseigne. Voilà pourquoi il est vital de ne
pas impliquer la dénomination de l’entreprise dans ce procédé sociétal. Il est toujours
préférable d’avoir subi une crise portant le nom d’une personne, d’un lieu ou d’une date
plutôt que le nom de la marque.
extérieures.
– Nous nous en souvenons avec un ou plusieurs éléments que nous avons nous-
mêmes intégrés ou supprimés sans le savoir.
Sur Internet, les crises en chassent souvent une autre. Si bien que pour la conscience
collective, il est généralement difficile de garder une perception objective de ce qui a pu
se dérouler. Comme le disent les historiens, l’objectivité en tant que telle n’existe pas,
puisque le fait de relater des faits induit obligatoirement l’intégration de la subjectivité
du conteur. Socialement, c’est la même chose, mais en pire, car nous sommes non
seulement influencé par notre mode de pensée, mais également par celui d’autrui (la
vision des médias, de nos proches, des internautes, etc.). Cette mémoire sociale fluctue
majoritairement entre les faits qui nous sont exposés, notre proximité envers la marque
et la personnalité de l’internaute. Si bien que pour faire la part des choses, il faut parfois
regarder au-delà des apparences.
La mémoire sociale ne fonctionne pas de la même manière que la mémoire individuelle
(court et long terme) [Haas, V. & Jodelet, D. (1999). Pensée et mémoire sociale. In J.P.
Pétard, Manuel de psychologie sociale (pp. 111-160), Paris : Edition Boréal]. Elle se
définit plus comme un confectionneur de significations, qui dépend directement d’un
contexte social. Karl Marx soutenait d’ailleurs : « Qu’est-ce que la société, quelle est sa
forme ? Le produit de l’action réciproque des hommes... Posez telle société civile, et vous
aurez tel État politique, qui n’est que l’expression officielle de la société civile ». En ce
sens, si les médias parlent d’accidents d’avion, nous prêterons à coup sûr plus
d’attention aux prochains accidents d’avion. Par essence, cette mémoire sociale se
tourne davantage vers les faits hors-norme puisque c’est que qui sort du lot qui se
mémorise le mieux aux yeux de la société.
Selon l’historien Pierre Nora, la mémoire sociale se définit comme « le souvenir ou
l’ensemble des souvenirs conscients ou non, d’une expérience vécue et/ou mythifiée par
une collectivité vivante de l’identité de laquelle le sentiment du passé fait partie
intégrante ».
Les mémoires collectives sont donc la matérialisation de ces significations et codes
(http://bit.ly/UVDLG8). Le 11 septembre par exemple est un bien sociétal qui
retranscrit ses représentations sociales à tous. Seulement en prenant du recul, nous
pouvons nous rendre compte que les faits retenus sont essentiellement des repères qui
nous ont été dictés pour aiguiller notre mémoire. Lors d’une crise, nous nous référons
naturellement aux écrits sur les causes, puis aux articles sur les répercussions, et enfin
aux messages transmis par la marque en question. Toutefois toutes ces sources sont-
M
elles vraiment fiables ? Connaissons-nous les vrais éléments de l’histoire ou avons-nous
SI
été influencés pour en avoir une vision altérée ?
AS
Au final, pour une même crise ou un même incident culturel, les différentes populations
peuvent ne pas avoir la même perception de ce qui s’est déroulé. Pourtant, il n’y a
qu’une vérité, les faits avérés. Les mémoires collectives peuvent en ce sens représenter
des trompes l’œil.
D’après la psychologue Française Valérie Haas, ces mémoires collectives ont quatre
grandes caractéristiques :
Dans cet ordre d’idée, les internautes peuvent se souvenir de quelque chose de faux et
l’intégrer dans leur rapport à la marque. Nous ne retenons ce qui nous a le plus marqués
ou ce qui a été le plus partagé, sans forcément chercher à savoir si ces informations sont
véridiques. Entre l’histoire et la réalité, il y a un pont. Lors de crises, l’émulation qui en
découle sur la toile constitue davantage des récits que des témoignages fidèles. La
marque elle-même peut essayer de dissimuler les vrais motifs de ces consternations,
pour peu qu’elles soient gênantes. L’inconscient collectif va alors ne garder qu’une
dimension de la vérité.
Toute cette dynamique peut de ce fait donner naissance à de faux souvenirs.
L’appropriation de faits erronés risque alors d’entacher la marque, même s’il pouvait ne
rien y avoir en amont. De plus, il peut subsister un effet de confusion lorsque deux
événements se produisent conjointement. Un internaute peut très bien intégrer un
élément de la crise A dans la crise B par exemple.
Néanmoins, un internaute peut faire confiance à ce que Brown et Kozin appellent « la
mémoire flash » (“Manuel Visuel de Psychologie Sociale – Sylvain Delourée -Editions
Dunod –2010”). Les études menées autour des mémoires collectives insistent sur le fait
M
que les événements traumatisants pour l’individu vont être parfaitement encodés et
SI
donc mémorisés. Selon Rubin et Kozin, il s’agit d’un souvenir qui survient à la suite
d’un événement surprenant, générant des émotions intenses et importantes
AS
dispose alors d’un souvenir précis et imagé. Bien entendu, une marque doit sûrement
avoir pris part aux événements pour provoquer une telle réaction émotionnelle.
Toutefois, la découverte d’une information peu glorieuse peut provoquer une
consternation générale qui peut simultanément graver les faits dans la mémoire de
nombreux internautes. Il s’agit alors de « mémoire flash de masse » d’après le
psychologue Rosa.
En résumé, la mémoire collective s’avère nettement sélective et trompeuse, puisqu’un
souvenir évoqué ou communiqué n’a pas pour but de garantir l’objectivité, mais de
partager une réalité commune (Haas, V. Approche psycho-sociale d’une reconstruction
historique. Cahiers internationaux de psychologie sociale). À partir du moment où la
mémoire est partagée, elle remodèle souvent le passé à son image. De plus, un souvenir
peut tout aussi bien perdre de sa signification quand il est assimilé au temps présent. Le
souvenir et l’actualité ne font pas toujours bon ménage. Les composantes d’une crise
sont de ce fait à relativiser dans le temps. Une « face cachée de la mémoire » selon
Valérie Haas, à prendre en considération par les marques, puisqu’elles écrivent leur
histoire dans l’esprit des consommateurs (http://bit.ly/Q6h681).
Partie 2 Études de cas
2.1 Réussi : La Redoute
Situation
La Redoute.fr est un site Internet marchand, leader en ligne dans les domaines de la
mode et de la décoration, avec plus de 7 millions de visites uniques en moyenne par
mois (http://bit.ly/Wcj0JJ). Il est une déclinaison du catalogue papier qui vit le jour en
1928.
Comme de nombreux sites marchands, chaque produit est associé à des photographies
les présentant afin que l’internaute puisse apprécier ce qu’il achète. La Redoute.fr
propose une technologie, au travers d’un outil « loupe », qui permet de zoomer sur un
produit pour en saisir les moindres détails. C’est ainsi qu’un ou plusieurs internautes
découvrirent un élément dissimulé en arrière-plan d’une des images accompagnant des
tee-shirts, ayant apparemment échappé aux équipes de La Redoute.
Déroulement des faits
À partir du 4 janvier est diffusée l’information sur les médias sociaux, et notamment
M
Twitter, qu’un homme nu apparaît sur une des photographies promotionnelles de La
Redoute.fr. Pour promouvoir des tee-shirts, l’image mettait en scène des enfants jouant
SI
sur une plage, à ceci près qu’un nudiste sort de l’eau en arrière-plan.
AS
Le jour même, La Redoute publie un communiqué d’excuses via son compte Twitter et
sa page Facebook. Ce dernier, trop informel et détaché des internautes, n’empêche pas
la crise de se propager massivement. Le volume des conversations sur les espaces
BY
M
Comme nous l’évoquions dans les chapitres précédents, de nombreux protagonistes
peuvent intervenir dans la crise à des niveaux différents et influencer le sentiment
SI
exprimé. Dans certains cas, ils peuvent avoir un impact négatif par des opérations de
dénigrement, mais dans d’autres cas, comme ici, ils peuvent participer à désamorcer une
AS
– Tippex, qui produit des correcteurs (ou efface-encre), est une société qui n’avait
rien à voir avec La Redoute, mais qui a profité de cet effet « projecteur » pour
diffuser une fausse publicité décalée.
– Les 3 Suisses, qui sont les concurrents directs, ont préféré jouer la carte de
l’humour en rappelant qu’ils vendaient des maillots de bain. Il n’y a pas eu
d’attaque, mais bien plus un clin d’œil astucieux.
Lorsque nous observons la courbe des sentiments, mise en relation avec l’arrivée des
différents acteurs et le ton finalement adopté par La Redoute, nous nous rendons
compte à quel point des personnes morales ou physiques extérieures peuvent
contribuer à atténuer une crise. Évidemment, tout dépend du niveau de gravité des
événements. Ainsi s’il devait y avoir des morts, l’humour noir ne ferait qu’alimenter les
foudres des consommateurs.
M
SI
AS
BY
stratégie, au même titre que les photographies absurdes postées ça et là sur le site
internet.
BY
Après le buzz
Au 25 janvier, quelques jours après la fin des événements, il a été calculé que 4 résultats
sur 10 présents sur la première page de résultats Google pour une recherche sur le
terme « La Redoute » évoquaient l’homme nu.
Plusieurs mois après la fin de la crise, des traces subsistaient toujours. Ainsi, en mai
2012, soit presque quatre mois après la campagne, Google Suggest proposait en termes
de recherche sur les mots clés « La Redoute », la terminologie « homme nu » en
complémentarité. En d’autres termes, un internaute cherchant des informations ou
simplement à accéder au site en ligne se retrouvait avec cette suggestion.
Interrogations
La question méritée d’être posée : un bad buzz peut-il être bénéfique ? Au final, il
permet d’augmenter le nombre de conversations autour de sa marque ou de ses produits
et donc de sortir de l’ombre. Lorsque les choses paraissent trop grosses pour être
crédibles, comme dans le cas présent, il arrive fréquemment qu’un doute s’immisce au
point de se demander si l’élément nuisible était souhaité.
De nombreuses interrogations subsistent quant à la réalité de la crise. En effet, nous
pourrions nous demander comment un tel élément a pu ne pas être perçu par les
équipes chargées de la mise en ligne. Sachant que cet homme nu n’apparaît pas dans le
catalogue papier. Certains ont affirmé, pour avoir eux-mêmes participé à des prises de
vues avec leurs enfants, que tout était fait en sorte pour que cela n’arrive pas. Enfin, le
fait de relancer l’affaire par un jeu-concours alors que les discussions s’étaient tassées
apparaissait pour beaucoup comme une preuve que La Redoute n’avait rien laissé au
hasard. Ainsi, nombreux sont ceux qui ont pensé que la crise a été orchestrée afin de
faire parler de la Redoute. Un bad buzz étant également et avant tout un buzz.
Attention tout de même, pour cela il aurait fallu que la marque de tee-shirts accepte de
s’exposer à une déferlante médiatique. De plus, la photographie n’est pas anodine, car,
comme évoqué précédemment, elle renvoie irrémédiablement à la notion de pédophilie.
Il aurait été plus prudent (et aurait eu le même impact) de placer cet homme nu derrière
des personnes adultes. Il paraît peu probable qu’une marque vendant des habits
d’enfants soit prête à laisser son image se ternir pour faire la propre promotion de son
revendeur.
Cette interrogation met cependant en évidence un fait : La Redoute a parfaitement
maîtrisé la situation, sa gestion de la crise est en soi un exemple à suivre.
Barack Obama qui interviendra quelques jours plus tard. Contrairement à d’autres
affaires du même type, comme l’Erika, la compagnie pétrolière n’a pas cherché à
remettre la faute sur un tiers, mais s’est placée comme seul responsable.
En se positionnant de cette manière, BP coupe court à toute critique. Toujours dans
cette logique de transparence, le président va également déclarer à Reuters : « nous
assumons l’entière responsabilité de la marée noire et nous nettoierons, et lorsque des
personnes présenteront des requêtes légitimes pour demander des indemnisations,
nous les honorerons. Nous allons être très, très énergiques là-dessus »
(http://bit.ly/RhGcBH).
Sur le terrain, Tony Hayward va à la rencontre des principaux acteurs touchés par le
drame, et BP diffuse en continu des communiqués pour faire état de la situation. Des
milliers de collaborateurs ainsi que de nombreux bénévoles sont formés et envoyés sur
place pour participer au nettoyage. Les pêcheurs du golfe du Mexique sont également au
centre du dispositif. Ils sont informés sur les avancés, bénéficient d’une aide juridique
et peuvent prétendre à une indemnisation dans l’un des nombreux bureaux ouverts
pour l’occasion. En occupant ainsi le terrain médiatique, BP souhaite devenir
l’interlocuteur privilégié et empêcher les associations de défense de l’environnement
venir parasiter ses efforts de communication. Comme l’explique Olivier Cimelière, la
stratégie est bien rodée : « ceci est d’autant plus frappant que les habitants de la région,
les premiers concernés font globalement preuve d’une passivité assez étonnante, voire
d’une attitude mutique » (http://bit.ly/R44Gjf).
Sur le Web social, BP lance une grande offensive. Sur son site institutionnel, l’entreprise
ouvre une section spéciale afin de traiter le sujet, de faire état des avancées. En
partenariat avec le gouvernement, la société met en place une plateforme dédiée à la
catastrophe afin de relayer de nombreuses informations, de les agréger et d’intégrer une
dimension « médias sociaux » : http://www.deepwaterhorizonresponse.com
Très vite, la société réactive sa page Facebook jusqu’ici peu utilisée, se lance à la
conquête de Twitter de Flickr et occupe Youtube. Des vidéos sont ainsi publiées pour
faire état des avancées, de la situation sur place. À cela s’ajoute une cartographie de la
catastrophe, des informations sur les techniques qui seront mises en place pour y
mettre un terme. Tout est fait pour publier la moindre information, dans un souci de
transparence, en intégrant toute la puissance du Web social.
Comme le souligne l’Observatoire des Crises : « tous ces outils permettent une fluidité
de la communication de la compagnie et donnent l’apparence d’une interactivité avec
les internautes, voire d’une certaine transparence dans l’information »
(http://bit.ly/RlSQ2P).
M
SI
De l’avis des communicants, les premières démarches de BP en terme de
communication de crise furent exemplaires, méritant d’entrer dans les meilleures
AS
« Dans une catastrophe écologique, ce qui reste dans les mémoires ce n’est pas tant
l’événement déclencheur, mais la façon dont la crise a été gérée : pour Tchernobyl, on se
souvient du nuage qui ne traversait pas les frontières, pour le sang contaminé du
« responsable mais pas coupable », pour l’Erika, de Total qui essayait de se défausser
sur l’armateur. Le naufrage du Ievoli Sun en 2000, affrété par Shell, avait amorcé un
tournant dans l’histoire des catastrophes pétrolières. Cette fois, la communication de
crise choisie par BP est ambitieuse, professionnalisée et offensive. Mais l’entreprise
pouvait-elle faire autrement ? »
Il ajoute également que BP a parfaitement appliqué les règles de communication :
La société a donc, dans un premier temps, parfaitement réagi, en occupant les différents
espaces (en ligne et hors ligne) au travers d’actions transparentes. Cependant, très vite
la situation va lui échapper, car la crise va durer, ce qui semble ne pas avoir été prévu.
Une crise qui dure, BP perd ses moyens
Comme l’explique l’Observatoire des Crises, si BP a au début parfaitement géré la crise
en appliquant des méthodes responsables, elle a malheureusement modifié sa
communication en associant un discours de réassurance. Elle a tenté de réduire l’impact
de la marée noire, spéculant de ce fait sur l’avenir. Ainsi, au fur et à mesure que les
efforts déployés pour boucher les brèches rencontraient des échecs, BP continuait
d’assurer que tout n’était qu’une question de temps, perdant inéluctablement sa
crédibilité, effritant un peu plus la patience du grand public. Comme l’explique
l’Observatoire des Crises :
« En situation de crise, l’entreprise ne peut pas se permettre de spéculer sur l’avenir.
M
Soit elle affirme que tout est maîtrisé parce que les informations qu’elle possède le
SI
démontrent, soit les informations et données qu’elle détient sont partielles (ce qui est
souvent le cas lors d’une crise) et elle doit opter pour une communication plus
AS
Le fait de comparer sa propre situation, malmené par une crise, à la détresse des
familles ayant perdu un proche a suscité la colère de ces dernières, mais également du
grand public. Le président de BP présentera ses excuses par la suite, sans pour autant
BY
M
SI
AS
BY
Chapitre 8
Ouverture et conclusion
Les médias sociaux ont sacralisé la parole des internautes, ces derniers ayant
dorénavant le pouvoir de s’exprimer, de commenter, de partager, de se fédérer,
d’analyser ou encore de détourner des événements. Même les puissantes multi-
nationales, malgré des budgets conséquents dédiés à la communication, sont bien
souvent obligées de plier sous la pression du grand public: Nestlé, Dell, Domino’s Pizza,
Apple… la liste est longue.
Comme nous l’évoquions en introduction, si le Web 2.0 n’est pas en soit une révolution,
la démocratisation d’outils permettant à tout à chacun de pouvoir exercer une pression
populaire forçant l’entreprise à se repenser à tous les niveaux. Afin de pouvoir faire face
aux nouvelles formes de crises, cette dernière va devoir inexorablement s’adapter, à
savoir opérer une réflexion de fond, tant dans sa manière de comprendre les nouvelles
règles de communication que de les appliquer.
M
L’intégration de nouveaux processus, tout comme l’appréciation d’une culture propre au
Web, avec ses codes implicites et ses communautés hétérogènes, sont des éléments qu’il
SI
est impossible d’ignorer à l’heure actuelle. Cependant, comme le conclut Thierry Libaert
AS
indique que les crises se développent dans leur fréquence et leur intensité, il est
inquiétant de constater le faible niveau de préparation aux crises et d’observer le
sentiment de sidération qui prévaut dans les organisations. »
Pour comprendre cette peur des médias sociaux, il faut prendre en considération une
célèbre énigme : « lorsqu’un arbre tombe dans une forêt et qu’il n’y a personne pour
l’entendre, fait-il du bruit ? ». Trop d’entreprises pensent qu’une absence sur les médias
sociaux va leur permettre d’échapper à la colère de leurs consommateurs, au bruit.
Cependant, ce n’est pas parce qu’elles ne l’entendent pas qu’il n’existe pas : l’ignorer
c’est finalement le laisser s’amplifier.
Il faut poser le problème à l’inverse. Les médias sociaux sont une opportunité pour qui
sait écouter et réagir en conséquence. Ils permettent aux internautes de faire remonter
des dysfonctionnements, que ce soit dans le produit, dans le service ou même dans la
philosophie de l’entreprise. Comprendre ces discussions, c’est indéniablement
s’améliorer pour peu que la société réagisse par un discours et des actions crédibles.
Cette propension à écouter et à prendre en considération les commentaires les plus
négatifs va rejaillirent sur l’image, augmentant de ce fait le capital de la marque définit
comme suit par le Mercator :
« Valeur de la marque due à sa capacité à générer des opinions, des attitudes et des
comportements spécifiques auprès de ses clients (tels que la notoriété, la fidélité,
l’affinité, la qualité perçue, l’image perçue, la différenciation…), qui lui permettent de
vendre à un prix supérieur, et d’obtenir des volumes plus importants ou de générer des
revenus de licence. Des tentatives sont faites pour évaluer la valeur monétaire de ce
capital de marque. »
Mais attention, l’environnement du Web n’est pas figé, il est en constante mutation : les
crises d’aujourd’hui ne sauraient prendre en considération les paramètres de demain. Il
est pourtant important d’anticiper l’avenir, d’identifier certaines grandes tendances qui
se dessinent pour ne pas être pris au dépourvu.
L’entreprise va donc devoir apprécier les évolutions cognitives et technologiques qui
vont influencer sur la morphologie des crises, afin d’ajuster sa présence en ligne et hors
ligne. Comme le disait le président français François Mitterrand, « il y a toujours un
avenir pour ceux qui pensent à l’avenir. »
M
Internet opère depuis quelques années une grande mutation, vers un Web sémantique
SI
que certains appellent Web 3.0. Cette notion de Web sémantique a été inventée par Tim
Berners-Lee, l’inventeur du World Wide Web et directeur du World Wide Web
AS
Consortium (« W3C »). Il définit ce terme comme : « un Web de données qui peuvent
être traitées directement et indirectement par des machines pour aider leurs utilisateurs
à créer de nouvelles connaissances ». En d’autres termes, il s’agit d’une assistance
BY
automatique pour aider l’internaute à enrichir les contenus et trouver des informations
complémentaires.
Par exemple, en mai 2012, Google annonce « Knowledg Graph », une base de
connaissances reliée à son moteur de recherche, intégrant ainsi la sémantique dans ses
résultats. Le principe est de relier des informations les unes aux autres afin d’aider
l’internaute à apprécier un ensemble. Google peut ainsi savoir quand est né Leonard De
Vinci mais il peut également le relier à ses œuvres d’arts. Il peut également répondre à
certaines questions, comme « qui est la femme de Barack Obama ? ».
Johanna Wright, chef de produit chez Google, déclara à propos de cette avancée : « nous
sommes au début d’une transformation qui va nous faire passer d’un moteur
d’information à un moteur de savoir ». D’après Google, ce serait pas moins de 500
millions d’objets (comme des personnes ou des lieux) et 3,5 milliards de faits qui
seraient connectés entre eux. Une mutation s’opère donc pour rendre le Web plus
complet, n’étant plus basée uniquement sur des liens entre différentes pages, mais bien
de concepts reliés entre eux.
Nous pourrions nous interroger sur le devenir des crises avec un « moteur de savoir ».
Google Knowledg Graph n’en est qu’a ses débuts mais déjà nous pouvons augurer que
des problématiques naîtront.
Par exemple, un internaute peut poser une question comme « quel est le plus gros
scandale de ces dernières années », ou s’informer simplement sur une entreprise pour
se voir proposer des informations sur un membre de la hiérarchie ayant été jugé
coupable de malversations. Les traces numériques inhérentes à une crise pourraient
ainsi être liées à l’entreprise dans l’encyclopédie Google.
Un autre risque peut résider dans l’histoire de la marque. Il faut comprendre que Google
ne maîtrise pas l’ensemble de son catalogue, il va le puiser dans des sites tiers, comme
Wikipédia, qui ont vocation à présenter des faits objectifs écris par des internautes.
Certaines marques ont une lourde histoire, qu’elles préféreraient cacher. Par exemple,
sur la fiche Wikipédia de l’entreprise Hugo Boss, nous pouvons lire « En 1931, Hugo
Ferdinand Boss adhère au Parti nazi. Il est le dessinateur-créateur des uniformes des
S.A. et des S.S. De 1933 à la fin de la Seconde Guerre mondiale en 1945, la société Hugo
Boss contribue à la confection des uniformes militaires du Troisième Reich, notamment
ceux des SS, des Jeunesses hitlériennes et de la Wehrmacht. Pour assurer sa production,
elle a recours à de la main-d’œuvre de travailleurs forcés, français et polonais pour la
plupart, ainsi qu’à des déportés en provenance de camps de concentration. »
M
SI
Partie 2 Les internautes sont en train de franchir une étape
AS
Les internautes commencent à avoir un tout autre rapport avec le Web, devenant de
plus en plus aguerris à la maîtrise des technologies et des mécanismes sous-jacents.
BY
M
crises encore plus nombreuses, soudaines et imprévisibles. La meilleure illustration
pour rendre compte de ce phénomène est la mobilité, à savoir l’équipement en
SI
smartphone et en tablettes. Par exemple, malgré des problèmes de livraison, il s’est
AS
vendu 5 millions d’iPhone 5 en trois jours, et l’analyste Charlie Wolf, de Needham & Co.
estime que près de 20 millions d’iPad ont été vendus au cours du deuxième trimestre
2012. La technologie mobile sous-entend des passerelles en temps réel entre deux
BY
Si la mobilité est déjà en marche, d’autres technologies ne sont pas encore arrivées
qu’elles peuvent déjà susciter un intérêt dans leur hypothétique rôle à jouer lors de
crises. Nous en avons sélectionnés trois qui nous apparaissaient comme les plus
pertinentes.
M
Dans un rapport de septembre 2012, la CNIL définit clairement les enjeux de la
télévision connectée :
SI
« Le terme de télévision connectée désigne la convergence entre la télévision
AS
Selon Médiamètrie (mai 2012), « au premier trimestre 2012, ce sont 10,7% des foyers
français soit près de 3 millions qui sont désormais équipés de ce nouvel écran. Une
augmentation significative en un trimestre : +40% » qui devrait continuer
(http://bit.ly/RTLTIH).
En regardant C’est dans l’air vous pouvez visionner : les 5 dernières émissions en
rattrapage, participer à la « Question du jour » et accéder aux résultats des votes des
téléspectateurs en temps réel, poser des questions en direct au journaliste et aux
invités, en savoir plus sur le thème de l’émission du jour, découvrir les biographies des
invités du jour, retrouver les livres associés à l’émission.
La nouvelle chaîne BeInsport et l’émission « Médias, le magazine » ont crée
spécifiquement des applications appelées « Second écran » pour proposer des contenus
additifs.
Père Fourras a même sa page Facebook et communique en amont et en aval avec les
télénautes.
Appuyée par la révolution du Web Social et l’explosion des médias sociaux (Twitter,
Facebook, etc), le téléspectateur multitasking (faire plusieurs choses en même temps)
devient un télénaute. Il choisit ses programmes en fonction de l’humeur de son réseau
(le programme papier est remplacé par la recommandation sociale) car il détecte les
programmes les plus commentés (l’influence remplace l’audience) grâce à des
applications (ex, TVCheck) ou bien par sites dédiés (ex, devantlatélé.com) ou encore
avec l’affichage en direct des commentaires twitter et facebook sur sa SmartTV.
Nikos Aliagas a marqué au fer rouge les grands débuts de la Sociale TV, en proposant
une véritable interaction avec les télénautes avec l’émission TheVoice (participation
aux votes, contenus web spécifiques, chat en ligne avec la communauté des fans, etc).
M
jeunes de 15 à 17 ans ont commencé à regarder une émission parce qu’ils ont lu ou vu
quelque chose sur Internet ou dans les médias sociaux.
SI
En somme, la Social TV se résume par trois révolutions : échanger en direct avec sa
AS
communauté, gagner des lots ou des invitations grâce à la Gamification (service de jeux
participatifs) et personnaliser son expérience télévisuelle en choisissant son
programme, ses heures d’écoute, etc.
BY
En début 2012, Google a présenté le projet Glass. Il s’agit de lunettes reliées aux services
de Google (Google+, Google Maps…) reposant sur le principe de réalité augmenté. Si ces
lunettes ne devraient pas être pour le grand public avant certaines années, elles
BY
Par exemple Plan UK, un groupe de charité pour les enfants, a lancé une publicité sur
les arrêts de bus dans le cadre de leur campagne « Parce que je suis une fille ». Le
logiciel de reconnaissance faciale déterminait le sexe des personnes pour délivrer un
BY
message ciblé. Les femmes voyaient un clip de 40 secondes, tandis pour les hommes, il
était affiché un message les invitant à visiter le site Web du groupe.
Mais selon de nombreux spécialistes, la prochaine génération de systèmes de détection
faciale pourrait aller beaucoup plus loin dans cette collecte de données. Un algorithme
pourrait juger si le passant semble heureux, triste, malade, en bonne santé, ou nerveux.
Imaginons maintenant que tous ces appareils puissent un jour faire appel, par la
reconnaissance faciale, à certaines données inhérentes aux médias sociaux. Cela n’est
pas nécessairement impossible dans la mesure où des logiciels existent déjà sur les
plateformes. Nous pouvons imaginer des communications de crise parfaitement
adaptées aux consommateurs faisant la liaison entre le virtuel et le réel. Le scénario
pourrait alors être le suivant :
Un événement suscite la colère des internautes, que ce soit une erreur de
communication ou un dysfonctionnement structurel. Pour améliorer son image,
l’entreprise se constitue une banque de données basée sur les médias sociaux où elle
identifie les individus qui ont été les plus critiques, leur localisation ou leurs intérêts. À
l’aide de panneaux publicitaires, dans le monde réel, pourvu de la technologie de
reconnaissance faciale, elle peut déployer des messages adaptés selon un certain
profilage. Un internaute ayant posté un commentaire négatif suite à la crise peut se
retrouver ajouté dans une base de données qui va l’identifier alors qu’il passe dans la
rue. Le message publicitaire, grand public, change alors pour prendre en considération
des informations personnelles et ainsi adapter la forme de la réponse en conséquence.
Non seulement l’entreprise adresse un message personnalisé hyper ciblé, mais elle peut
également l’adapter selon certaines données et la physionomie de l’internaute.
Pour l’heure, les autorités veillent à garantir la protection de la vie privée. En septembre
2012, Facebook, afin de répondre à l’agence irlandaise de protection des données, a
suspendu temporaire la reconnaissance faciale sur sa plateforme. Cependant, le réseau
social indique chercher, « une façon appropriée d’obtenir le consentement des
utilisateurs pour de type de technologie selon les règles européennes ». Ce qui est
technologiquement possible n’est pas toujours socialement et juridiquement
admissible. Il faut cependant s’attendre à ce que cette technologie revienne sur le devant
de la scène une fois ces barrières surmontées.
L’avenir des crises sur les médias sociaux sera probablement consécutif à des
internautes initiés aux outils, disposant de technologies abrogeant les frontières entre le
réel et le virtuel et naviguant sur un Web leur permettant de relier par la sémantique
l’entreprise à un ensemble de contenus. Nous avons là tous les enjeux d’une crise, la
M
nécessité de répondre rapidement de manière honnête et adaptée tout en veillant à sa
SI
réputation numérique dans le temps.
AS
BY
Le dernier mot
Nous avons souhaité orienter cet ouvrage d’une manière particulière : aborder la notion
de communication de crise sur les médias sociaux tout en offrant une vision globale de
l’environnement du Web social et de ses aspects cognitifs. Notre objectif est de
permettre à toute entreprise de disposer d’une vision suffisamment large pour adapter
ses actions en fonction d’un contexte qui lui est propre.
Nous espérons que vous avez pris autant d’intérêt à le lire que nous à l’écrire.
Comme le mentionnait l’éminent Confusius : « je ne cherche pas à connaître les
réponses, je cherche à comprendre les questions ».
M
SI
AS
BY
Directeur de publication : Xavier WARGNIER
Retrouvez moi sur :
www.facebook.com/xavierwargnier
http://twitter.com/xavierwargnier
http://fr.linkedin.com/in/xavierwargnier
M
ISBN : 978-2-918866-46-6
SI
Dépôt légal : Octobre 2012
AS
Editions Kawa
88, Chemin des Perrières - 74290 Bluffy - France
BY