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Bref, le Maroc aura fait un pas de géant pour plus de démocratie. Pour d’autres,
ce n’est qu’un début, appréciable certes, mais c’est un édifice qui se construit sur
le long terme. Une chose est sûre, la régionalisation avancée aura un coût. La
commission chargée par le Roi de réfléchir sur le projet estime à entre 128 et
215 milliards de DH l’enveloppe financière à débloquer, sur deux mandatures,
par l’Etat pour la mise à niveau des régions. Car, après une année de réflexion et
des concertations tous azimuts, engagées par la commission, celle-ci est arrivée
à un constat sans appel. Malgré les efforts consentis pour imaginer des «régions
viables», il subsistera deux types de régions. Il y aura des régions «définies à
partir de grands pôles ou même de bi-pôles urbains rayonnant sur des espaces
de croissance économique» et des régions non polarisées, «qui couvrent les
montagnes atlasiques ainsi que les zones des steppes et déserts plus ou moins
oasiens et qui nécessitent un appui fort en termes de solidarité nationale».
Cette disparité va influencer, en premier lieu, le transfert des compétences de
l’Etat vers les régions. Le processus sera plus rapide pour les régions aisées et
prendra plus de temps pour les autres, le temps qu’elles se mettent à niveau.
Pour atténuer ces disparités, les auteurs du projet ont proposé la mise en œuvre
du levier de la solidarité régionale selon un schéma financier prédéterminé (voir
encadré).
Walis et gouverneurs maintenus, leurs pouvoirs précisés
Bien que n’étant pas un Parlement régional, comme l’auraient souhaité certains
acteurs politiques, le Conseil régional donne néanmoins son avis sur les
politiques publiques déployées par l’Etat au niveau régional. Le conseil est ainsi
consulté par le gouvernement pour l’élaboration de la stratégie nationale en
matière de développement économique et social, des plans sectoriels nationaux
et ceux d’aménagement du territoire. La région aura également son mot à dire à
propos des stratégies nationales et régionales dans les domaines de la promotion
des investissements et de l’emploi, de l’eau, de l’énergie, de l’environnement, de
l’éducation, de la formation, de la culture et de la santé. Il sera également
consulté sur tout projet l’envergure que l’Etat envisage de réaliser dans la région,
précise le texte remis au Roi.
Le gouvernement peut accepter ou rejeter les avis du Conseil régional.
Seulement, comme spécifié dans le texte, «le gouvernement motivera tout rejet
total ou partiel des avis du Conseil régional lorsqu’ils concernent sa propre
région».
D’autres domaines comme les infrastructures, l’équipement, l’habitat social, la
mise à niveau économique relèvent exclusivement de l’Etat, comme le laisse
entendre le projet de la régionalisation avancée. Les walis et gouverneurs ne
disparaîtront pas. Leurs prérogatives vont toutefois être clarifiées et précisées.
Ainsi, ils continueront de veiller à l’application des lois, des règlements et des
décisions du gouvernement, et de représenter l’Etat dans les régions. «Les walis
et gouverneurs devront disposer de prérogatives claires et effectives pour
assurer la coordination des services déconcentrés du territoire de leur ressort,
veiller à leur bon fonctionnement et s’assurer de la bonne conduite de leurs
projets et programmes», précise le texte.
Pour l’heure, tiennent à préciser de nombreux acteurs politiques, le texte n’est
pour le moment qu’un avis. Les partis politiques s’apprêtent d’ailleurs à en
débattre le contenu dès l’ouverture de la prochaine session parlementaire.
Certaines formations ont déjà mis sur place des groupes de travail qui
plancheront sur le texte. Texte qui, il faut le reconnaître, reprend plusieurs
propositions présentées à la commission par ces mêmes partis politiques.
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Le gouvernement doit gouverner et le Roi doit agir quand l’intérêt de la nation l’exige
La régionalisation remplit son rôle. Certes, un petit rôle mais c’est celui qu’on a
prévu pour elle, jusqu’à présent. Toutefois, même avec ce petit rôle, la
personnalité du président peut jouer dans le système actuel un rôle plus
important. Certains présidents de régions nous en ont donné l’exemple. La
question qui se pose aujourd’hui est qu’est-ce qu’on veut de la région ? Dans le
nouveau système, on veut lui donner un très grand rôle. Il serait inutile de se
demander quels sont les facteurs de blocage dans l’ancien système, mais quels
seront les points susceptibles de freiner le processus. A mon avis, le plus
important de ces points reste les ressources humaines. Passer à la région comme
on le prévoit doit s’accompagner d’un grand effort en la matière. Cela fera,
d’ailleurs, l’objet des débats qui vont être initiés prochainement. Il faut
reconnaître que sur beaucoup de points, le projet proposé est ambitieux.
Le projet reste néanmoins flou sur certains aspects, le transfert de compétences,
par exemple. On ne sait pas quelles sont exactement les compétences qui seront
transférées aux régions. Il ne faut pas, non plus, mentir aux gens. On ne va
certainement pas mettre en exécution tout ce qui est prévu d’un seul coup en
juin prochain. Il faut y aller par étapes. Il faut du temps et un accompagnement,
notamment en ressources humaines, que ce soit les cadres administratifs ou les
élus.
Déjà avec la loi actuelle, en tant que président, je ne trouve pas assez de
compétences pour donner à la région l’élan que je veux. Et si demain les
compétences du président sont renforcées, ce problème de ressources humaines
se posera avec une plus grande acuité. Je suis de l’avis qu’il faut prévoir une
certaine flexibilité pour embaucher des équipes compétentes. Il faut prévoir pour
cela un cadre contractuel hors du cadre administratif.
La tutelle sera levée, certes, mais même si, dans le passé, on l’a présentée
comme un facteur de blocage, ce facteur a été surdimensionné. Le conseil prend
des décisions et les représentants de l’Etat sont tenus de les exécuter. S’ils
refusent, il y a des mécanismes de contraintes, la saisine du ministère de
l’intérieur dans un premier lieu ou carrément de la justice. Toutefois, la levée de
la tutelle est un acte très important de point de vue symbolique. Cela va donner
au président encore plus de compétences. Il est clair que c’est une grande
transformation au niveau de la gouvernance locale. La région va être un facteur
de nivellement par le haut pour les communes.