Résumé
e
À l’aube du XX siècle, s’instaure le concept compositionnel d’objet sonore, structure
musicale complexe produite par la combinaison d’un nombre varié de composants de
l’écriture. Parmi ceux-ci, les composants dits secondaires (les densités, les intensités,
les ressources instrumentales, etc) en viennent souvent à passer au premier plan de
l’articulation formelle. La mise en évidence des conditions d’absorption, par le langage
musical, de cette articulation de la forme à partir de ces niveaux secondaires devient du
même coup un des principaux enjeux de l’analyse. Un examen de la littérature de
référence induit qu’une définition fonctionnelle, plutôt que concrète, de la notion
d’objet sonore, est susceptible de permettre une analyse pertinente de son rôle dans la
structuration de la forme. Deux exemples d’analyses illustrent notre approche
personnelle de ce problème.
Abstract
The compositional concept of Sonic Object, a key topic since the beginning of the 20th
Century, can be defined as a complex musical structure, produced by the combination
of a number of components. Among them, the so-called secundary ones (densities,
instrumental resources, e.g.) frequently assume a top hierarchical level in the structure.
It turns a crucial goal to account for this way of structuring in 20th Century Music. A
survey of reference works induce that a functional, not a concrete, definition of the
notion of sonic object, may allow a pertinent analysis of its role in the form building.
Two analytic examples show the author’s own approach of the problem.
L’objet sonore : une abstraction pour la
composition, un défi pour l’analyse
Didier GUIGUE
« Quels que soient les détours par lesquels on essaie d’aborder la création
musicale, c’est toujours à la sonorité que finalement on aboutit […]. La
matière sonore […] n’est pas seulement une réponse au désir du musicien,
mais elle est en même temps la cause de ce désir » [Souris 1976 : 96].
Comme le relève Halbreich [1980 : 543], son écriture, définissant plutôt des «
champs » sonores qu’une discursivité mélodico-harmonique, annonce « les “groupes” de
Stockhausen et les “constellations” de Boulez ». Une des constantes de l’expression
musicale française, cette esthétique constitue également un des engagements de la
deuxième École de Vienne, et il n’est pas de courant musical ultérieur qui ne se soit
confronté à la question de la formalisation de la dimension “sonorité” comme élément de
1
structuration .
Dans cette optique, on peut introduire le terme objet sonore pour désigner, non
plus une entité relevant des stratégies de la perception des sons [Schaeffer 1966], mais
une structure conceptuelle complexe, produit de la combinaison et interaction d’un
nombre varié de composants secondaires de l’écriture musicale. Nous les qualifions de
secondaires parce que composites, résultant en partie de la combinaison et de
2
l’interaction de composants primaires (chromes , durées) et de dimensions plus
globales ou statistiques, lesquelles font appel, pour leur représentation abstraite, à une
combinaison de catégories hétérogènes de l’écriture (valeurs absolues, relatives,
notations symboliques, textuelles, graphiques…). Nous identifions comme composants
secondaires des éléments de la configuration des structures tels que les densités, les
modalités de distribution des sons dans l’ “espace” (domaine achronique des hauteurs
absolues) et le “temps” (domaine diachronique des durées), les intensités, les ressources
3
instrumentales…
André Souris nous avait déjà alerté : « Si le mouvement en soi constitue bien le
thème fondamental de la musique de Debussy, il faut en déduire que tous les autres
éléments n’en sont que les supports. Et plus spécialement l’appareil mélodico-
harmonique, dont les éléments ne peuvent être séparés de leur contexte sans perdre leur
véritable propriété. C’est pourquoi l’analyse traditionnelle, consistant à valoriser de soi-
disant “thèmes” ou de soi-disant schémas tonaux n’aboutit ici qu’à de médiocres
résultats » [1965 : 137]. D’autres auteurs reprendront à leur compte ce concept
4
dynamique de “mouvement” pour approcher la forme . Parmi eux, Charru situe le
problème de manière très juste : « La révolution debussyste [entraîne] un déplacement
de point de vue […] qui suggère un mode de questionnement nouveau et pose l’exigence
de techniques d’analyse musicale nouvelles. Il s’agit moins en effet de reconnaître et
d’étiqueter les divers éléments qui composent une œuvre, au risque de ne récolter qu’une
collection d’objets inertes, que d’aller jusqu’à rendre compte de la qualité du mouvement
5
qui la fonde » [1988 : 64-65] .
Dufourt [1988] suggère que les origines de cette impuissance à renoncer, au moins
partiellement, au postulat d’une prédominance du chrome, remontent aux fondements
même de « la théorie musicale antique, qui est exclusivement une théorie des hauteurs »
6
. Il est légitime d’avancer l’hypothèse d’une relation de cause à effet avec l’histoire
organologique : « Qu’il s’agisse de cordes, de membranes, de lames, de tuyaux […], il est
[…] évident que c’est la variation des hauteurs qui a occupé presque exclusivement
l’expérimentation instrumentale » [Schaeffer 1966 : 48]. Effectivement, si elle domine
comme relation ordinale, par sa capacité privilégiée de pouvoir être mise en échelles
organisées selon une relation d’ordre, la hauteur possède en outre une particularité
qu’elle ne partage avec aucun des autres attributs du son : celle de pouvoir être appréciée
en valeur absolue. Enfin, l’hétérogénéité de la codification écrite des dimensions
secondaires, que nous avons évoquée plus haut, peut être vue également comme un
obstacle à une synthèse analytique [Mesnage 1991 : 37].
Bien qu’il se prévale de la Set-Theory [Forte 1973] pour rendre apparentes les
quatre espèces d’organisation des classes de hauteurs qui semblent fonder le matériau
scalaire de Debussy — organisations diatonique, chromatique, hexa- et octatoniques —,
Parks consacre l’essentiel de son ouvrage à la formalisation des niveaux secondaires, au
moyen de méthodes originales : il analyse en particulier la cinétique debussyste et ses
rapports à la morphologie, par l’étude du comportement de certaines variables de
l’écriture ; il explicite les fonctions formelles de l’orchestration et du mètre, en les
nourrissant de relevés statistiques et les illustrant par des représentations spatiales, et
modélise les registrations. Il établit enfin une liste des paramètres morphophoriques
(form-defining parameters) qu’il tient pour essentiels chez Debussy, et l’on est presque
étonné de constater que ce disciple et admirateur assumé de Forte en exclue les pitch-
classes [op. cit. : 205 et sq].
L’approche analytique de Parks est une des rares à formaliser rigoureusement les
niveaux secondaires d’organisation chez Debussy, mais n’est pas la première dans
l’histoire de la musicologie moderne. Lui-même assume pleinement sa dette envers le
travail fondamental de Wallace Berry.
Bien qu’il ne soit pas explicitement destiné à la musique du XXe siècle, il faut faire
mention de l’appareil conceptuel et terminologique développé par Boucourechliev pour
l’analyse de l’œuvre de Beethoven, au moyen duquel il a pu mettre en évidence cette
conscience qu’a eu le compositeur des capacités fonctionnelles que pouvaient absorber
les dimensions secondaires de l’écriture, en particulier les timbres et les textures, au
13
piano. Dans l’Essai publié en 1991 , Boucourechliev introduit les notions de masse,
en montrant comment le compositeur en fait un paramètre actif, et de synergie comme
technique beethovenienne de combinatoire des paramètres. Surtout, son étude de
l’écriture des sonorités au piano constitue une contribution capitale. On se contentera de
rappeler ici son analyse de l’op. 53 [1991 : 39 et sq.] dans laquelle il démontre comment
14
la sonorité est passée au sommet de la hiérarchie des éléments du langage .
Il est possible que la difficulté d’une approche “au niveau neutre” de l’objet
sonore, soit due à un malentendu quant à sa nature. Si l’on se penche sur les
formalisations auxquelles nous venons de nous référer, on s’aperçoit que sa définition
comme concept abstrait pour la composition s’avère indissociablement liée à la forme
par laquelle il participe du processus constructurel de l’œuvre. En effet, ce ne sont pas
les objets isolés, mais le « dynamisme et l’évolution de leurs rapports » dans le temps
[Boulez 1989 : 411] qui intéressent ce processus et qui sont susceptibles de générer des
structures formelles.
Aristotélicien, Boris de Schloezer [1947 : 75] avait déjà défini l’œuvre musicale «
comme une hiérarchie de systèmes (organiques et aussi composés) imbriqués les uns
dans les autres, chacun d’eux étant forme à l’égard de ceux qu’il étreint et matière à
l’égard de ceux qui l’étreignent [souligné par nous] », ce que Ballif appellerait plus tard «
forme formée » et « forme formante » [1968].
Cette définition trouve résonance dans nombre de conceptions théoriques. La
Momentform de Stockhausen est générée par l’imbrication dynamique de Momente de
différentes durées. Un Momente est une « unité de forme possédant […] une
caractéristique personnelle et strictement assignable » [1960 (1988 : 111-112)].
Stockhausen visait par ce moyen à l’unification entre matériau et forme : « Je voulais
alors introduire la structure à développer […] déjà dans les micro-dimensions d’un son
isolé, afin qu’à chaque instant, si infime qu’il fût, le principe global de mon idée fût
présent » [lettre à Karel Goeyvaerts citée in Wilson 1989 : 69].
C’est une interrelation semblable qui relie les objets et les structures tels que
définis dans le Traité des Objets Musicaux : en effet, tout objet « est en même temps, un
objet en tant qu’il est perçu comme unité repérable dans un contexte, et une structure en
tant qu’il est lui-même composé de plusieurs objets » [Chion 1983 : 56]. Il n’y a, entre
les deux, « qu’une différence de complexité » [Schaeffer 1966 : 275-276].
Par conséquent, une approche analytique “par le haut”, que l’on pourrait, pour
emprunter au langage informatique, définir comme étant orientée objets [Guigue 1997a,
b], ne semble pouvoir être conçue sans ambiguïté qu’à partir d’une appréhension
exclusivement fonctionnelle. « Plus que de donner une carte de visite aux éléments du
discours, il importe de saisir leur situation relative dans le trajet instrumental » [Biget
1989 : 86]. Ne pas essayer de décrire ou définir intrinsèquement des objets, mais tenter
de mettre à jour une stratégie d’évaluation de leurs qualités structurelles relatives,
dynamiques.
Si l’on oublie pas de bien cerner les limites de son champ de pertinence, une
approche analytique “de niveau neutre” fondée sur la notion d’objet sonore semble en
mesure de produire des réponses aux questions méthodologiques que nous nous posons.
Parce que l’ « abstraction constructive » que représente la configuration écrite des objets
reste absolument liée aux conditions concrètes de leur production [Duchez 1989 : 286],
l’ancrage d’une telle démarche analytique à ce niveau doit être vu comme une possibilité
privilégiée de documenter les modalités d’articulation formelle d’une dimension de la
structuration musicale, dont l’importance déclarée s’accommode mal d’une approche
jusqu’à présent plutôt informelle.
L’observation des graphes montre que plusieurs vecteurs de l’écriture tendent vers
une simplification structurelle entre les deux objets/séquences, sensible en particulier
dans les densités et les modalités d’occupation du temps (durée relative, enveloppes
temporelles des intensités et autres). Cette tendance est toutefois contrebalancée par une
augmentation de l’espace utilisé (ambitus) et surtout un grand contraste sonore
provoqué par l’échange entre une ambiance una corda dans l’objet 4 et Pédale dans
20
l’objet 10 . Nous considérons ce facteur instrumental comme dominant, car il agit au
plus haut niveau de globalité sonore. Du point de vue de la dynamique formelle de cette
section, ces qualités structurelles combinées confèrent en synthèse un poids plus
important à la deuxième séquence qu’à la première, ce que l’étude de la seule infra-
structure sérielle ne pouvait expliciter.
Ici, ce n’est pas la constatation de l’identité absolue des deux objets sonores a2 et
b2 qui nous aidera à évaluer leur rôle respectif dans la dynamique de chacune des deux
séquences, mais l’analyse des oppositions structurelles adjacentes. Dans cet exemple, il
est intéressant d’évaluer, entre autres, l’évolution des densités relatives d’occupation du
temps (T) et de l’espace (S), de l’occupation de la tessiture instrumentale (ambitus), de
la directionnalité statistique de la suite des hauteurs. La lecture comparée du profil des
courbes entre la séquence a et b permet de mesurer, simultanément, les similarités et
différences contextuelles dans lesquelles s’insère l’objet 2, et, par conséquent, la façon
dont il suscite une énergie formelle différente dans les deux cas.
6. Conclusion
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1
On peut situer chez Beethoven l’origine de la prise de conscience de la nécessité
historique de dé-réaliser la sonorité pour l’incorporer aux problématiques abstraites de
la composition [Scherchen 1950, Boucourechliev 1991], et la rattacher à la mutation du
concept d’écriture qu’a provoqué l’avènement du pianoforte [Biget 1986, Guigue 1994].
2
À la suite de Mesnage [1994], nous utilisons le terme chrome comme équivalent de
l’anglais pitch-class (classe de hauteurs, ou hauteur nominale, par opposition à hauteur
absolue).
3
Sur la métaphore spatio-temporelle en musique, vide Duchez 1979 ; sur le concept de
domaine, vide Mesnage 1991 et passim.
4
cf ici-même Dalbavie, cité plus loin.
5
Malgré ce positionnement perspicace, Charru ne parvient pas à déplacer le focus de
ses investigations personnelles hors du champ du traitement tonal de l’harmonie
debussyste : la mise en évidence promise de la dynamique formelle des « plans sonores
» se trouve malheureusement réduite à la description des régions tonales et des pôles
mélodiques. Cette étude constitue une bonne illustration de la dichotomie historique que
nous relevons entre méthode et objet analytiques et éléments réellement générateurs de
forme.
6
Pour les Pythagoriciens, « l’ordre musical s’articule désormais en une série de hauteurs
distinctes dont les intervalles se divisent selon des proportions […] [Ils] associent donc
le son au nombre et à la proportion au point de voir dans les conditions logiques de la
combinaison les conditions causales de la détermination des hauteurs. Le son musical est
considéré comme un produit de la mesure […] [Ce faisant,] la pensée grecque fondait la
science musicale comme une arithmétique » [op. cit. : 46 et sq. ; voir aussi Duchez
1989].
7
Au cours du Premier Congrès Européen d’Analyse Musicale, dont une partie des
travaux portait sur le Prélude La Terrasse des audiences au clair de lune de Debussy,
plusieurs participants ont pu déplorer que les analyses de niveau neutre proposées aient
porté exclusivement sur les hauteurs, alors que, dans cette œuvre et chez Debussy d’une
manière générale, d’autres dimensions (registrations, articulations, intensités…), étaient,
à leur sens, au moins aussi importantes [cf les interventions de Rosen, Mesnage, Riotte,
Delalande, rapportées par Nattiez 1991 : 8 et sq.]. La musicographie boulézienne, pour
sa part, est également paradigmatique de cette hégémonie du chrome comme objet
exclusif de l’attention des analystes.
8
Mâche 1959, Schnebel 1964, Tremblay 1985, Bonnet 1988 sont des exemples. Riotte
1989 ébauche les principes d’une étude formalisée du style de Debussy qui
incorporerait « les attaques, les timbres et la dynamique ».
9
Dans un texte déjà ancien, Jarocinski fait allusion aux recherches d’un groupe de
musicologues polonais, en tête desquels Józef M. Chominsky, sur une « nouvelle
discipline » appelée « sonoristique », laquelle examinerait les œuvres du point de vue de
ses « valeurs sonores qui, étant indépendantes de la mélodie et de l’harmonie au sens
traditionnel, sont le résultat d’un choix des moyens d’exécution et d’une certaine façon
de traiter les sons à l’aide du rythme, de la dynamique, de l’agogique et de l’articulation
», en abordant des questions comme « la technologie du timbre, la rationalisation du
temps, la formation des structures horizontales et verticales, la transmutation des
éléments, les problèmes de formes » [1965 : 169]. Il ne semble pas que ces recherches
aient fait l’objet d’une diffusion en Europe Occidentale.
10
Nous sommes responsables de cette traduction et des suivantes.
11
cf aussi la note, plus nuancée, de la p. 294.
12
Une juste remarque de Dalhaus [1985].
13
Version remaniée et développée d’une première édition de 1963.
14
Dans le même domaine musicologique, on peut citer également les travaux de Robert
S. Hatten [par ex. 1993 sur Schubert].
15
Les ouvrages collectifs édités par McAdams & Deliege 1989 et McAdams & Bigand
1994, constituent à notre connaissance la documentation la plus complète sur le sujet,
en français.
16
Cette “neutralité” par rapport à l’histoire a constitué le point central des critiques à
la méthode.
17
voir par exemple l’analyse de Densité 21.5 de Varese, par Nattiez [1975]. Chiarucci
1973, puis Cogan 1984, ont développé des théories analytiques esthésiques basées sur
le paradigme d’opposition binaire.
18
Ce qui n’empêche pas la coïncidence des segmentations, surtout aux niveaux
supérieurs de la structure. Sur la segmentation, voir récemment Mesnage 1994, Meeùs
1994.
19
Elles ont fait l’objet d’une thèse de Doctorat [Guigue 1997a]. Nous ne pourrions en
reprendre ici la description sans grossir démesurément cet article. Pour plus
d’informations on peut consulter un dossier complet sur Internet, à l’adresse suivante:
http://terra.npd.ufpb.br/~guigue.
20
Une autre information d’intérêt pour la comparaison des deux séquences est la
directionnalité statistique des hauteurs (courbe “directionnalité” dans le graphique) :
globalement ascendante pour 4, descendante pour 10.
21
Nous demandons au lecteur d’accepter, par hypothèse et le temps de cette
démonstration, la segmentation que nous proposons. On observera que dans la deuxième
séquence, l’écriture des durées indique clairement que la résonance de l’objet b1 se
prolonge sur b2, suggérant ainsi l’utilisation de la pédale sostenuto.
22
Cet article s’insère dans le cadre de la thèse de Doctorat déjà mentionnée [Guigue
1997a], et d'un programme de recherche subséquent, lesquels bénéficient du soutien de
deux institutions brésiliennes, le CNPQ e l’UFPB, et de l’appui logistique de l’Ircam,
que nous remercions.