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Sujet 3

Quel est le fondement de la distinction des sens dans le De Anima d'Aristote ?

Le chapitre II de De Anima a ceci de particulier qu’il livre un discours axé sur une notion
essentielle (perception) et ses corollaires (sens, sensation et sensible) afin de saisir l’expérience
sensoriel de l’âme (végétative et sensitive), mieux d’établir une catégorisation des sens en
fonction du rapport qu’ils entretiennent avec leur milieu extérieur (objet sensoriels). La
perception est souvent conçue comme le fait de sentir, d’agir. C’est pourquoi, lorsque l’on tente
d’appréhender l’acte de la perception, on en recherche les différentes sens ainsi les modalités
sensorielles qui leur sont associées. L’on range les couleurs à la même enseigne, les saveurs
dans d’autre, le son, l’odeurs, le toucher dans des classes distinctes ; on distingue aussi les
couleurs des saveurs, le son du toucher tout comme le blanc du noir, l’aigu du grave, etc. cela
étant, cette distinction si elle semble naturellement aisée, il se peut qu’il ne soit pas sans raison,
et parallèlement il se peut qu’elle procède de la question du nombre de sens: En récusant le
critère traditionnel de distinction des sens (la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher) en la
dualité (contact directe et contact intermédiaire), Aristote tente de justifier sa classification à
partir d’un cadre général assez représentatif au sein duquel il s’efforce de conjuguer trois termes
tels les sens, le sensible et le milieu intermédiaire autour du principe de causalité, paradigme
philosophique de la Grèce antique.
Demander quelle est le « fondement de cette distinction », c’est aussi interroger les
conditions, le point de départ logique, voire les dispositifs théoriques qu’Aristote à mobiliser
pour parvenir à une fin ou à une justification : distinction des sens. Or, les approches attendues
sont loin d’être satisfaisante, ou presqu’inexistante, C’est donc une problématique. C’est dire
qu’une fois mise en avant le principe leibnizien de raison on s’aperçoit qu’il n’y a pas
d’arguments convaincants pour justifier cette propension naturelle à distinguer le sens. A
l’hypothèse d’un trait commun, posé comme un arrière-plan philosophique, qui expliquerait
cette classification envisagée, aucune réponse ne se trouve être déterminante puisqu’il y a des
critères qui sont à la limite insuffisante. A toute action humaine, même la plus énigmatique, il
faut bien un « pourquoi ». On peut alors comprendre le problème philosophique comme une
détermination des critères, des conditions de possibilité (théorie transcendantale) de la
distinction des sens, question kantienne qu’il conviendrait d’employer. Comment on y
parvient ? la distinction des sens devient urgente et problématique des lors qu’il faudra
découvrir sa nature, son fondement. Pour aborder ces questions on donnera d’emblée une
précision terminologique du concept de sens ; de sensation et de sensibilité ; ensuite on
examinera l’interprétation traditionnelle da la distinction des sens, formulation de Maudlin pour
schématiser les tenants de la distinction bicéphale des sens), lequel sert de propédeutique au
deuxième point : On exposera, ici, la déconstruction aristotélicienne de cette interprétation. Ce
qui permettra d’appréhender l’explication qui structure la distinction des sens (dimension
philosophique et psycho-neurologique). Et enfin on mettra en exergue les limites de la
classification et de la distinction des sens aristotélicienne à partir des travaux Brian Keeley et
sa nouvelle théorie de différenciation des sens.
Que signifie sens le concept de sens ? Il est partant que ce concept ne peut être
dédouaner d’imprécision car il se dit en de multiples façons : tantôt une manière collective
d’agir et de juger (sens commun), tantôt la signification d’un terme, son intention ou idée, tantôt
faculté de juger (raison), tantôt un appareil récepteur sensible aux corps (organes sensoriels),
tantôt de direction ou mouvement (physique). La terminologie qui est la nôtre est celle qui
désigne le sens comme un appareil récepteur qui pâtit sous l’action du sensible à l’image de la
vue qui est sensible à la couleur, le goût sensible à la saveur, l’ouïe sensible aux ondes sonores,
le toucher sensible au contact. A la différence, la sensation désigne une sorte d’impression
sensible d’origine externe susceptible de modifier le corps du sentant, admis est hors de la
juridiction de l’intellect (nous) ; Aristote la définit comme ce qui « résulte d’un mouvement
subi et d’une passion » ; « elle est une sorte d’altération » (De Anima, chap. 15). Si les
sensations viennent de l’extérieur, le (s) sens, tels la vue, l’ouïe, l’odorat, le gout et le toucher
sont incorporés à l’organisme des êtres vivants. Contrairement au sens qui est un organe dont
la fonction consiste à percevoir, sentir les choses sensibles, et la sensation dont le rôle réside
dans la modification des organismes, la sensibilité est une « faculté de sentir » qui fait
l’expérience des sensations en réaction au stimulus. On voit donc apparaitre le sens comme un
concept complexe dans sa nature, qu’il fallait bien préciser la conception qui sied à celui
d’Aristote.
Aussi le sens d’après La Grande Encyclopedie (M. Berthelot, éditeur) a une certaine
relation entre une sensation et un organe de sens. Ici il ne faudrait pas confondre le sens dans
sa version idéelle au cinq organes de sens. On peut illustrer cela par l’idée que de tous les
organes de sens seuls le toucher enveloppe tout le corps, le reste des sens sont localisés dans
des parties spécifique du corps. De la localisation des sens sur le corps naît une catégorisation
binaire des sens : il y a ceux qui ont une « fonction organique » et des « sensation affectives »
comme le goût et l’odorat, et ceux qui éprouvent des « sensations représentatives » tels la vue
et l’ouïe car ils sont connectés à la pensée. Le sens du toucher, quant à lui, est hybride : soit il
intègre le premier groupe car il éprouve aussi des sensations affectives à l’image de la peau,
soit dans le second, à travers la main. (E. Boirac in « Sens, sensation, sensibilité », 1898 ;
Bernard Valade, « les cinq sens : diversité et divergences de savoirs désunis » 2016, p. 32).
Une fois la terminologie du concept de sens fixée, examinons à présent la thèse
traditionnelle da la distinction des sens. En cette partie nous nous sommes appuyés sur l’article
de Tim Maudlin, De Anima III 1: Is Any Sense Missing?, Phronesis, Vol. 31, No. 1 (1986), pp.
51-67.
L’interprétation de la distinction des sens, qu’est-ce ? Il s’agit une approche historique
de l’analyse des sens élaborée par physiologues grecs et certains commentateurs d’Aristote qui
estiment que les hommes tout comme les animaux non rationnels ne possèdent que cinq sens ni
plus ni moins. Qu’est-ce qui légitime une telle assertion ? Une première explication semble bien
résidée dans le fait que la quantité de sens est fonction de celle d’éléments, substrat des organes
de sens. Avec Frege on dira qu’ils sont equinumériques. Bien que nécessaire, cette position a
besoin d’être profondément exploité pour être suffisante. Les partisans de cette pensée livrent
trois arguments qui se présentent comme une grille d’explication à la théorie des cinq sens,
laquelle est régulée par des contraintes drastiques (Some severe constraints) qui lui sont
intimement annexées ; et contrarie ainsi toute possibilité d’étendre – peut-être réduire - le
nombre de sens canonisé. Voici les trois arguments : i) La différenciation des sens à partir d’une
Classification binaire : sens par contact directe et sens par contact indirecte, milieu
intermédiaire (by direct contact and instead employ a medium) et l’exclusion du sens du goût
de la classe des sens éprouvant des sensations à distance, ii) l’impossibilité d’élargir le nombre
de sens qui se trouve sa raison d’être dans son rapport aux éléments, substrat des organes
sensoriels lesquels sont des milieux intermédiaires, iii) il n’existe que deux milieux
intermédiaires tels l’air et l’eau. On s’aperçoit que les partisans de la thèse traditionnelle dans
l’objectif de justifier la théorie des cinq sens établit une première distinction des sens en deux
classes différentes : l’une correspond au sens par contact directe (le toucher et le goût) et l’autre
représente des sens par contact intermédiaire (la vue, l’ouïe et l’odorat).
Cette théorie, en outre, cherche à montrer que tout ce qui peut être senti par contact
directe ou par contact intermédiaire peut être singulièrement partagé (senti) par les autres sens
des différentes classes. Significativement, on considérant la classe des sens par contact directe,
il affirme que les caresses, les accolades, la pression des mains,…, en un mot toute action
susceptible d’un contact tactile est en relation immédiate avec la faculté de toucher. Cet organe
est le point central de cette classe de sens. Une telle position est discutable nous y reviendrons
plus tard dans la partie 3. En considérons maintenant la classe des sens par contact
intermédiaire, l’interprétation traditionnelle stipule que les sens de ce genre sont en relation
avec leur organe respectif et le milieu intermédiaire correspondant. Aussi, la quantité
d’éléments circonscrit celle des organes de sens, cette dernière circonscrit également la quantité
de sens possible, celle-ci circonscrit la possibilité des sens par contact intermédiaire. On est
alors à même de penser que l’interprétation traditionnelle se construit autour d’une analyse des
sens fondée sur deux ensembles distincts : d’une part les sensations directes et les sensations
intermédiaires ; d’autre part de l’impossibilité autre que les cinq sens et leurs contraintes. A la
question quel est le fondement de la distinction des sens, comme tentative de réponses, on dira
avec l’interprétation tradition que le nombre de sens des vivants en fonction des éléments
intermédiaires, et des modalités sensorielles. Qu’implique une telle interprétation chez
Aristote ? Comment déconstruit-il l’analyse des sens ? Quelles sont les conditions de possibilité
de cette distinction ?
Aristote prend ses distances à l’égard de l’approche traditionnelle de l’analyse des sens
en deux classes distinctes selon leur modalité sensorielle. Pour rappel nous avions signifié que
dans la deuxième partie que le sens selon la relation qu’il entretient avec son milieu
intermédiaire et le sensible est vraisemblablement reparti en deux groupes : le toucher et le goût
sont sensibles au contact tactile (sensation directe), la vue, l’ouïe et l’odorat sensibles au contact
par médiation. Aristote estime que la distinction binaire ou bipolaire des sens en classe
strictement distinct est non pertinente. Comment s’y prend-il ? Le stagirite pose le cadre général
de la distinction des sens perçu comme leur condition de possibilité : organe de sens,
intermédiaire et le sensible.
Première prémisse : l’organe de sens et son utilité. L’identification de l’organe apparaît
nécessaire dans la perspective de la perception (sensation). Et cela Aristote semble le poser
comme un préalable, le « d’abord », disons-nous, à toute sensation En effet, Connaître ou
identifier le capteur sensoriel est une pratique heuristique : une entreprise qui permet de
découvrir sur l’étendu de l’organisme les organes sensoriels actifs, leurs objets et modalités
sensorielles. Par ailleurs Il serait impossible de sentir sans la présence d’une faculté de sentir
(la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher). Le cas de l’œil est probant. La vue pâtit sous
l’action de la couleur et du visible pour la simple raison qu’elle est en relation avec la couleur
par le biais de l’œil (le diaphane). Mais imaginons que l’œil est défectueux (malade) ou bien
voilé, il n’y aurait pas de perception car le principe de la vue est inopérant. On comprend dès
lors pourquoi il est indispensable d’identifier l’organe avant d’espérer percevoir quelque chose.
Car les organes de sens sont une puissance de qualités (couleur pour la vue, saveur pour le gout)
Deuxième prémisse : le sensible ou le tangible propre. Il est l’un des éléments du cadre
général de la distinction des sens qui doit impérativement correspondre à son organe de sens.
C’est un être situé hors de la pensée de l’âme intellectuelle, au-delà de toute considération
psychologique. Par définition :
Le sensible" désigne trois espèces d’objets : deux de ces espèces sont, disons-nous, perceptibles par soi,
tandis que la troisième l’est par accident. Des deux premières espèces, l’une est le sensible propre à chaque
sens, et l’autre, le sensible commun à tous. J’entends par sensible propre celui qui ne peut être senti par un
autre sens et au sujet duquel il est impossible de se tromper : par exemple, la vue est sens de la couleur,
l’ouïe, du son, et le goût, de la saveur. (Aristote, Traité de l’âme)

C’est ainsi que l’on aborde le sensible que met en œuvre la seconde prémisse annoncée
plus haut. Il s’agit en effet de définir les propriétés du sensible, objets des organes sensoriels.
Ce passage révèle que le sensible, d’un côté, se dit de ce qui appartient à un et un seul sens et
non autrement, se dit de ce qui est commun d’un autre côté. Le premier aspect renvoie aux
deux premières définitions du sensible traduit par « perceptible par soi » ; la troisième est sentis
par « accident ». Il faut dire que pour Aristote est sensible par accident ce dont l’âme
intellectuelle ne peut sentir tel que le blanc. C’est une sorte de sentir contingent dont la présence
n’implique pas forcement une modification de l’être sensible. Par ailleurs, précisant que la vue
pâtit sous action de la couleur, l’ouïe des ondes sonores, le gout des saveurs, Aristote pointe du
doigts le fait que le sensible à un usage spécifique lié à la nature du sens auquel il se rapporte.
Plus loin, Aristote identifier le sensible par soi à la notion de substance.
Puisque le sens du toucher se dit de plusieurs façons : tantôt chaud/froid, mou/dur,
intensité/basse, le philosophe empiriste, Aristote entreprend une expérience afin d’identifier
l’organe de sens qui se rapprocherait du toucher. Il s’agit ici de recouvrir la chair, voire la peau
d’une membrane et de vérifier s’il y a toujours sensation. Le résultat est positif dans la mesure
où en dépit que cette membrane soit posée comme un obstacle, la sensation c’est d’une certaine
manière réalisée. La membrane, à l’instar de la chair, est alors apparue comme constitutif du
corps. Elle agit sous la forme d’un transparent qui favorise le transfert de la sensation. Par
analogie, la chair, la peau, étendu couvrant tout l’organisme est comparable à un transparent,
un médiat, un milieu intermédiaire. Ici l’élucidation du sens du toucher une pièce est maitresse
dans l’analyse de sens et de leur catégorisation.
Troisième prémisse : le milieu intermédiaire. Celui-ci doit se trouver dans une disposition
convenable afin de permettre l’interaction de l’organe de sens et du sensible. L’air et l’eau par
exemple représentent le milieu intermédiaire de la classe des sens sensibles à distance. Qu’est-
ce qu’il en est du toucher et du goût puisque le sens du toucher reste encore imprécis ? Revenons
à l’exemple de la membrane couvrant la chair. L’idée est que, que la peau reste telle, c’est-à-
dire sans rien sur sa surface, ou qu'elle soit couverte d'une membrane, il existe toujours des
sensations (transmises) qui se font sentir. Quoique l'on aurait du mal à croire que l'organe de
sens (récepteur sensoriel) serait présent dans la membrane en question. Ce qui en vrai était
présupposé dans l'exemple de la membrane est du moment où elle est appliquée sur la peau,
elle devenait un écran, un obstacle à la transmission, à la réception de tous stimulus (sensation).
L’hypothèse se trouve en fait infirmée par le fait que la membrane comme un obstacle jeté sur
la peau, ou incorporée n'inhibe aucunement la sensation. Quel est l’intérêt de cette l’expérience
de membrane pour le recherche de l’organe du toucher ?
Le toucher par le biais de la chair – comme transparent - n’est pas susceptible d’être un
organe, se mue désormais en un milieu intermédiaire à l’instar l’eau et l’air pour la vue. Il y a
une double conséquence qui en découle : l’une, les stimulus accèdent au cerveau par un seul
canal, un seul organe récepteur et l’autre, les cinq sens se réduisent à un seul sens. En un mot
Il n’y aurait plus de distinction entre les classes. Il n’en est rien pour Aristote. On pourrait
penser qu’il rejoint l’interprétation traditionnelle de la distinction des sens à ce niveau, car il
semble être favorable à une division et distinction des sens, chose que la thèse traditionnelle
s’en fait l’écho. Si le stagirite est davantage tourné vers cette division distincte : non seu1ement
il ne distingue pas les sens à partir des qualités communes, mais il soutient l’idée selon laquelle
tous les sens fonctionnent comme des milieux intermédiaires. L’ambigüité de la langue est très
significative à ce propos. Il est considéré que le sens toucher et celui du goût, composant de la
classe des sens par contact directe sont presque similaire par le toucher. Pour le dit autrement,
la langue fonctionnement comme un organe gustatif et un organe tactile. Pour apprécier le goût,
il faut nécessairement que la substance matière ou liquide soit en contact avec la langue. C’est
dire qu’il y a un trait commun entre le sens du goût et celui du toucher : le milieu intermédiaire.
Aristote ne s’arrête pas là, il généralise la procédure. Rien ne de particulier distingue ceux-ci
des autres sens. Nous sommes tentés de dire que le fondement de la distinction des sens chez
Aristote est soit l’identification de l’organe de sens, soit du sensible, soit du milieu
intermédiaire. Ce sont des qualités communes qui fixent l’analyse des sens en un certain sens ;
mais ce n’est toujours le cas chez le stagirite car chaque sens est compris uniquement dans le
rapport qu’il noue entre le sensible et le milieu auquel il se rapporte. Nous voici donc au terme
de l’argumentation commencé au début de la troisième partie qui vise à exposer les raisons qui
déterminent la distinction des sens en déconstruisant l’interprétation traditionnelle de la
distinction des sens. Cependant, si Aristote et certains de ces commentateurs défendent
jalousement l’idée selon laquelle il n’y a que cinq sens ni plus ni moins, peut-on avec le
développement des sciences depuis le XVIIIe siècle - la neuroéthologie par exemple - souscrire
encore à une telle affirmation ? Si non, serait-il possible de réviser la liste à partir des recherches
en plus récentes ?
Dans cette partie, nous nous focaliserons sur l’article Making sens of the senses de B.
Keeley que nous considérons comme un texte important pour la discussion sur la distinction
des sens que menons dans le cadre de ce travail. Son but immédiat c’est de développer un
fondement de la distinction des sens en se passant des qualité internes (qualias) aux sensations.
Pour y arriver, il présente quatre critères de la modalité sensorielle qui pose les bases de la
distinction de sens : le premier c’est l’exigence du sens et son utilité : ici même si l’organe de
sens est relié au cerveau par des nerfs spécifiques, l’activité de celui doit être effective au sens
où il devrait pourvoir éprouver des sensations. En cas de passivité, l’organe est jugé inopérante
; le deuxième est un critère behavioriste : il est exigé que l’organe puisse réagir en présence
d’une stimulation spécifique afin de reconnaitre une modalité sensorielle. Le troisième est celui
des réactions de discriminations : pour tester une modalité sensorielle, l’organe doit réagir
activement à une énergie. Et le dernier est le critère de dédication : tous ces systèmes qui
réagissent à certaines énergies doivent être dédiés, consacrés à une discrimination qui a une
certaine importance évolutive pour l’organisme. Ces critères présentés sont fondamentale pour
les travaux de Keeley puisqu’ils inaugurent les bases d’une nouvelle divisions et classifications
des sens. En quel sens cela est-il remarquable ?
Les travaux de Keeley sont l’équivalent d’une nouvelle approche intuitive qui s’oppose à
celle d’Aristote et à celle fondée sur les qualités communes. Contre Aristote, d’une part qui
soutient que les vivant sont dotés de cinq sens – de même celle sur les qualias – le reproche de
Keeley est que ces deux approches forment une seule réalité. Car pour lui les qualités communes
sont loin d’être nécessaires pour la classification des sens. Toutefois elles peuvent être un
instrument d’analyse des sens exclusivement chez les humains. Aussi, est-il impossible de se
référer à ses propriétés communes dans l’univers des animaux. Or l’erreur d’Aristote est d’avoir
assimilé la classification des sens chez les hommes à celle des animaux. Keely montre
également qu’il est peut-être possible d’élargir la liste du nombre de sens. Une fois les critères
de base revisités, il n’y a plus de contraintes attachées au nombre de sens qui était classiquement
réservé à cinq. Désormais, on en trouve plus d’une dizaine chez l’homme ; mais deux nouveaux
sens émergent : le sens proprioception qui est une perception de la position relative des
membres ; et le sens vestibulaire renvoie à une perception de sa propre orientation par rapport
à la gravité. L’on remarque que l’enquête de Keeley sur les qualia est une sorte d’alternative
qui invite à mettre entre parenthèse les qualités communes des sens pour avoir une classification
objective.

***

On voit que la recherche du fondement de la distinction des sens est un point assez
discuté dans les milieux scientifiques. Ce qui pourrait expliquer la distinction des sens serait
soit le nombre de sens chez les vivants arrimés à des médiats (interprétation traditionnelle), soit
la conjugaison de trois éléments à savoir l’organe de sens, le milieu intermédiaire et le sensible,
et les qualia (Aristote), les quatre critères de modalités sensorielles (Keeley). On constate
surtout avec Keeley que le fondement de la distinction des sens fut renouvelé à partir d’enjeux
bien précis. Nous gardons aussi de la part d’Aristote, le fait qu’il assimile le nombre de sens
des humains ou à celui des animaux, et que nous distinguons nos sens qu’à partir du rapport
entre le sensible et le milieu intermédiaire.

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