Vous êtes sur la page 1sur 5

Je ne suis pas peu er.

Je suis comme un capitaine au long cours qui contemple son bâtiment ambant neuf, comme un
banquier qui regarde son livre de compte après un héritage ou comme un noble Estalien qui
regarde son nouvel arrivage d’esclaves.

Plein d’amour et de satisfaction dans le regard.

Le Temple a de la gueule.

Par ce que les autres vont faire du tourisme, vont regarder une exécution et acheter des
coli chets mais moi, Thadeus Rigweilzeit, je sais que j’ai du travail à faire. Quand Lazarus
ordonne un truc, je suis de l’avis qu’il vaut mieux le faire vite et bien. Et puis quand c’est la caisse
commune qui paye, on va pas se gêner.

Le Temple est désormais un établissement avenant et unique ! Des fenêtres aux carreaux
bicolores et symétriques annoncent la couleur, on a commencé à aménager l’entrée des
souterrains, Hans nous a apporté une nouvelle peau de bête et on a rénové le grenier pour en
faire un dortoir pour libérer les chambres en dessous. Et ça c’est le début des belles choses. J’ai
recruté nos “artisans des plaisirs”, deux femmes et deux hommes et sur l’insistance de Lazarus
j’ai ramené Eda, la prunelle des mes yeux et femme adorée, et sa diable de mère grabataire qui
ne veut toujours pas crever.

Tout me semblait donc aller pour le mieux, on avait un business si ce n’est orissant mais qui tout
du moins pourrait nous servir de belle façade pour camou er le reste de nos activités. La bonne
odeur de respectabilité et d’entreprise a toujours été le meilleur des déguisements.

Sauf que Cyrasse et Hans sont revenus. Et qu’ils avaient l’air de dire qu’il allait y avoir du
grabuge. Lazarus est parti seul dans les souterrains. Astrid nous a ramené deux gugus de
Finsterbad. Un comte et son assistant si j’ai bien compris. Lamprecht Von Bertren et Malte Von
Meyer. Fimnir me glisse à l’oreille que Malte Von Meyer est le cousin du noble qu’on a abandonné,
il y a de cela une éternité, dans les souterrains. Je ne sais pas pourquoi on persiste à se souvenir
de ces évènements sordides ! Quand nous sommes descendus pour essayer de le retrouver, on a
bien vu que ce brave homme avait disparu, il est peut-être temps de tirer une croix sur son
existence !

Nous avons donc deux “invités” à l’étage qui se remettent de leurs émotions même si j’attends
avec impatience que ce soit en route qu’ils se remettent. Mais ne nous concentrons pas sur ces
fâcheux, concentrons nous sur la future réussite du Temple, lieu de boissons, de cul et de culte !

Bertram, un des sympathiques personnages qui nous a transmis l’auberge, est repassé, il veut
que nous organisions une soirée pour “rencontrer des gens biens et discuter des opportunités
d’avenir dans la belle région du Reikland”. Bon, il ne l’a peut être pas formuler comme ça, mais
c’est l’esprit.

Moi on me dit soirée, j’imagine une trentaine de personnes, autant de rencontres, d’histoires et le
triple en boissons préparées par notre expert derrière le comptoir ! Je convoque mes artisans
pour leur première épreuve du feu, la petite brunette enragée et la rousse sulfureuse, le bel
éphèbe et le chauve aux muscles saillants, c’est Eda qui les supervisera, on demande au comte
déchu Von Bertren de rester dans sa chambre avec son ami.

On se réunit donc au sous-sol, on commence à verser des verres et à attendre Bertram. Les
artisans prennent leurs aises et la petite brune dévisage Hans de manière insistante. On ne
m’ôtera pas de la tête qu’elle s’est un peu entichée de lui, on croirait deux animaux qui se
dévisagent et se courtisent en grognant. Le beau visage du bretonnien ne semble pas laisser
d’autres indi érents. Bertram arrive en n, rejoint par deux de ses amis : Hieronimous, savant de la
chose médicale et Corvin, bon vivant et commerçant d’informations. C’est donc une compagnie
plus réduite que ce que j’attendais mais tout le monde semble passer un bon moment.

fi
ff
fi
fi
fl
fl
fl
Astrid discute longuement avec eux et il en ressort que le Reikland traverse une période troublée,
une période de violence, d’incertitudes, de morts et de sou rances. Une opportunité en or pour
ceux qui ont de la suite dans les idées.

Après avoir fait descendre nos deux nobles et continué la conversation, nous arrivons à ces
conclusions :

- L’Empire a rouvert de nombreuses mines d’argent pour faire face aux dépenses induites par
ces soulèvements locaux.

- Pour faire fonctionner ces mines, on a recruté de force de nombreux locaux, il y a des
désertions et des disparitions.

- Finsterbad a besoin d’un nouveau comte. Il serait potentiellement sage de retrouver le Von
Walgert perdu dans l’obscurité.

- Il serait de bon ton de se débarrasser de Lamprecht Von Bertren, l’ancien comte qui ne sert
plus à rien. Mon bon Léo sera ravi de s’en occuper.

- On peut sans doutes soulever les foules et attiser les feux de la colère populaire pour notre
intérêt personnel.

- Une bonne partie de notre troupe s’est battue contre un représentant impérial et sont donc
potentiellement recherchés et bons pour la potence.

- Nos artisans font remarquablement bien leur travail et certains passèrent un très bon moment,
ce que leur reprochera peut-être plus tard le Destin et la Morale. Mais ceci est une autre
histoire.

Après une réunion exécutive menée par Astrid, nous décidons collectivement de redescendre
dans notre sous-sol pour inspecter la mine, un territoire encore inexploré, à la recherche de notre
nobliau. Si avec de la chance on débouche dans une mine d’argent rouverte par l’empire, on
pourra au passage fomenter une petite révolte mais n’allons pas plus vite que la partition. Et puis
Eda a fait les comptes, cette soirée nous a rapporté de l’argent !

Fimnir nous donne des rations et Hans nous guide dans ces tunnels qui commencent à me
paraitre familiers. Ces idiots ont accepté de se recouvrir les paupières d’un onguent fabriqué par
les blanches mains d’Astrid et malgré la pâleur de cette dernière, je suis bien obligé d’admettre
que j’ai peut-être été trop prudent : ils voient tous désormais dans l’obscurité tandis que je suis
limité à la lumière tremblotante de ma lanterne que mes compagnons me demandent d’éteindre
de manière régulière.

Fichtre. C’est chiant de se sentir aveugle aux royaumes des borgnes.

On se rend compte rapidement que le brave Cyrasse se repère bien dans l’enchevêtrement de
couloirs mais Hans le “pisteur des ombres” continue d’ouvrir la marche à la recherches de traces
éventuelles.

Nous nous enfonçons encore d’avantage dans les ombres. Et nous aurions du comprendre que
ce serait notre perte.

Après plusieurs heures de marche de boyaux en boyaux, nous arrivons près d’une intersection où
attend un chariot de mine des plus banals. Ce qui l’est moins ce sont les bruits que nous
entendons. Des vibrations régulières. Le pas lourd et rapide sur la roche de plusieurs personnes.
On me force une fois de plus à me priver de ma source de lumière et on se cache derrière un
rocher ou derrière le chariot.

Je ne sais si à force de s’enfoncer nous étions arrivés au royaume des rêves mais le cauchemar
venait de reprendre. Devant nous venaient de se présenter les même créatures que celles que la
nuit de Morslieb nous avait apporté ! Se tenant sur leur deux pattes arrières, haute de presque
trois mètres, couvertes d’une fourrure chiche et puante, un seul oeil globuleux et une queue
presque chitineuse. Les horreurs de la nuit. Celles que j’espérais ne jamais recroiser.

Cependant nous ne sommes pas des servants de messe et on n’est pas là pour chanter des
cantiques ou tailler des cierges. Mais pour célébrer la vie et tailler des orteils.

ff
Ce que nous fîmes sans plus tarder.

Les créatures nous avaient repérés et Hans n’avait pas pour habitude d’être une proie. Dès que je
les entendis je rallumais ma lampe avant de foncer, bouclier et Morgenstern à la main tandis
qu’Hans commençait à les cribler de èches et …

À ma grande surprise, c’était déjà ni. Personne n’avait été blessé et déjà les deux corps encore
chaud répandaient leur sang et ux internes sur le sol caverneux.

Après avoir informé Astrid et Cyrasse de notre précédente rencontre avec ces créatures, et au vu
de la facilité avec laquelle nous avons aplati le museau, nous décidons de poursuivre notre
expédition sans plus tarder et en redoublant de discrétion. En e et, si ces deux créatures se
baladaient en patrouille, nous n’étions sans doutes pas au bout de nos peines. Hans semble dire
que ces créatures ne ressemblent toutefois pas vraiment à celles qu’il avait entraperçu lors de
notre premier soir. Qu’il ait raison ou tort, il nous faut continuer à avancer.

Nous sommes là de nos explorations quand au bout d’un tunnel, ceux disposant d’une vision
correcte sont témoins d’une scène étrange et inquiétante, une procession de créatures portant
deux cages contenant chacune un homme, descendant encore d’avantage vers les ténèbres.
Elles sont au moins quinze et ça a l’air de puer la merde de manière insistante. Nous
commençons à ressentir ce bourdonnement sinistre dans le fond de nos crânes que nous avaient
perturbés lors de l’attaque du Temple. Silencieusement nous faisons demi-tour, de retour à une
intersection précédente.

Nous n’avons pas pu reconnaitre leurs visages, mais nous sommes désormais témoins : ces
créatures gardent bien des prisonniers humains en vie ! Notre objectif est donc peut-être encore
vivant dans une de ces salles. Forts de cette information et malgré la vibration magique, nous
examinons de nouveaux couloirs et débouchons dans une réserve de crânes et d’ossements
humains.

Cette caverne n’est pas du meilleur goût.

Nous avancions discrètement, mais Astrid trébuche alors à coté de moi, poussant un cri perçant
qui semble raisonner contre les parois pendant de longues secondes. Nous sommes gés. Alors
que nous reprenons notre marche, Hans se fait sauter dessus par une nouvelle créature
innommable ! Celle-ci fait à peu près notre taille et son assaut bien que surprenant est rapidement
interrompue par sa rencontre avec la mort. Ces créatures manquent décidément aussi bien de
diplomatie que d’e cacité.

Parmi les cadavres, certains ont l’air plus frais que d’autres. Je n’ai aucune envie de rejoindre
cette macabre collection, nous poursuivons donc et en se ant à nos oreilles nous arrivons à une
ouverture des plus interessantes. Dans cette anfractuosité, nous découvrons trois cages où se
trouvent trois hommes ! Deux ont l’air de mineurs apeurés et le troisième est une gure connue,
Gottschlag le savant/magicien ! Les premiers nous supplient de les libérer tandis que notre bon
ami semble dans un état pitoyable, quelque part entre l’apitoiement extrême et le cerveau grillé.
Nous libérons les trois compères en soulevant les lourdes cages et j’essaye de tirer une
explication du Gottgott à l’aide d’une technique ancestrale et familiale : une bonne mandale dans
la gueule.

Ceci semble le tirer de sa torpeur et Gottschlag nous explique qu’ils sont emprisonnés ici puisque
les monstres tentent de réaliser un rituel incluant des sacri ces humains pour ramener dans notre
réalité quelque chose qui ne devrait pas y être. J’essaye de glisser à Astrid qu’il faudrait peut-être
trancher la gorge des pleutres mineurs qui ne pourront que nous ralentir mais nous n’avons pas
vraiment le temps de prendre une décision. Alors que les mineurs nous informent que des
femmes sont retenues plus loin et nous supplient de partir pour sauver nos vies, des
glapissements proches nous préviennent que nous avons été repérés.

Un des mineurs est blessé, il se terre contre un mur, on le un poignard à l’autre et nous nous
préparons au combat. Rapidement nous sommes entourés par plusieurs de petites tailles, un
gros moche et un de leur cousin de taille impressionnante mais à la queue tranchante ! Cyrasse
ffi
fl
fi
fl
fi
fi
fi
ff
fi
fi
se bat vaillamment à l’aide de sa dague après avoir en ammé une créature à l’aide d’une lanterne
pleine d’huile, tandis qu’après quelques èches Hans, le visage rigide, de jette dans la mêlée. Il
pousse alors un cri bestial qui ne semblerait normalement pas pouvoir sortir de poumons
humains, pétri ant un instant de surprises les horreurs qui nous entourent, c’est le moment que
choisit Astrid pour se concentrer, semblant trouver en elle-même une détermination presque
légendaire, lui permettant de murmurer quelques paroles déchainant un mur de ammes qui
embrase quatre créatures ! De mon coté je n’ai pas le temps de m’émerveiller de ces diableries et
je continue à broyer les chairs et les os à l’aide ma Morgenstern. Gottschlag quant à lui semble à
nouveau paralysé.

C’est l’a aire de quelques minutes mais contre toute attente, Hans sera le seul à s’en tirer avec
quelques blessures. Commence alors la récolte sordide d’Astrid qui récupère des entrailles, sang
et yeux sur ces abominations. Les mineurs continuent de nous supplier de partir, cependant je ne
compte pas m’arrêter en si bon chemin.

Astrid eut aimé qu’on s’arrête là mais le destin semblant nous sourire, Hans et moi arrivons à la
convaincre. Il nous su t alors de rappeler aux mineurs que leurs femmes attendent leur secours
héroïque et que nous les protégerions pour les faire passer en première ligne, faisant d’eux des
boucliers humains e caces et intègres. Astrid en pro te pour donner une potion de soin à
Cyrasse pour qu’il puisse avec moi faire un front solide pour qu’Hans et Astrid puissent user de
leurs talents respectifs.

Nous reprenons notre avancée, armés de nos mineurs, d’un mage tremblant et de la conviction
que nous ne nous dirigions pas à grands pas vers la Geste du preux Cyrasse.

La Geste du preux Cyrasse

(https://www.youtube.com/watch?v=WFeopMIp2jQ)

Quand on ne croit à rien, si ce n’est en soi même,

Et le visage beau, mais le visage blême,

On rejoint des faquins et un prêtre corrompu

C’est qu’on aime le Destin et l’odeur des écus.

Quand on descend profond, où la lumière faiblit,

Et où les créatures ne créent pas mais triturent

Les restes purulents, squelettes aux dents jaunis,

C’est qu’on aime le danger et cette pourriture.

L’obscurité n’étant pour lui pas un obstacle

Cyrasse vit se peindre un horrible spectacle

Folie, piètre maitresse, est la pire des guides

Devant eux, ironie, une foule bizarroïde.

On dit sans y penser que les meilleurs nous quittent,

Occultant les massues qui broyèrent les mineurs,

On dit sans y penser que la mort vient très vite

Occultant les plaies laides et l’in ni terreur.

C’est qu’ils sont descendus, oubliant la raison,

Au coeur de la tanière, au plus près du poison,

Pour arrêter l’horreur, stopper le sacri ce

Et voilà qu’ils sont là sur l’autel du supplice.

Cyrasse, clairvoyant, compris que le chasseur,

Était bien résolu, à force de furie,

À sacri er sa vie et être leur sauveur

Mais étant bretonnien ce serait interdit !

En e et la noblesse n’a pas le monopole,

ff
fi
ff
fi
ffi
ffi
fi
fi
fl
fl
fi
fl
À renfort d’hardiesse, d’acheter l’auréole !

Il se jette dans l’enfer, invoque des noms maudits,

Mais c’est insu sant, cela n’est qu’un répit.

Le mage tremblotant ne peut jeter un sort

Et d’un coup démoniaque, nous le retrouvons mort.

Rationnels et défaits, il faut sonner retraite,

Ainsi laisser Cyrasse mourir avec ces bêtes.

Ce dernier a le temps de lever une gri e

Et de leur dire à tous avec une voix uette :

“Amis, courrez rejoindre, le seigneur Lazarus,

Plutôt qu’une virgule d’un récit apocryphe,

Je deviendrais ainsi, un chapitre, une tête,

Digne de trois cantiques ou d’un simple laïus.”

Hans, Astrid, Thadeus, laissèrent donc le héros

Crever seul sans personne et surtout sans un mot.

Ils purent sauver leurs miches, ce sera une leçon,

Et toujours au sous-sol, tu ne feras pas le con.


ffi
fl
ff

Vous aimerez peut-être aussi