Introduction
par Jacques DERUELLE
Docteur-Ingénieur en Technologie des Matériaux
Ingénieur d’Étude au Laboratoire d’Électrochimie Industrielle
du Conservatoire National des Arts et Métiers
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TRAITEMENTS PAR VOIE CHIMIQUE _______________________________________________________________________________________________________
Conversion, activation ............................... Titane Base de dépôt électrochimique ou lubrifié pour antigrippage
Phosphatations :
Au fer (amorphe, alcaline) ......................... Sans finition en base d’adhérence et isolement électrique
Fer, zinc, aluminium
Au zinc, Zn/Mn, Zn/Ca, Zn/Ni .................... Huilé, verni, peint en anticorrosion
Lubrifié pour frottement et déformation à froid
Au manganèse............................................ Fer Lubrifié pour frottement
Au calcium .................................................. Fer Isolement électrique
Au chrome................................................... Aluminium Décoration, base de peinture
Oxalatation ..................................................... Acier inoxydable Lubrifié pour frottement et déformation à froid
Dépôts par déplacement :
Cuivrage ...................................................... Cu(II)/Fe Sans finition en tréfilage, base de traçage en chaudronnerie
Nickel DIP .................................................... Ni(II)/Fe Sans finition, base d’émaillage
Duclanisation .............................................. Sn(II)/Cu Décoration
Dépôts autocatalytiques :
Kanigen, Nibodur ....................................... Ni(II)/Fe Anticorrosion
Cu(II)/plastique Création de conductivité
Au(II)/Au/Ag/ Pd/Pt ou Cu
Pd(II)/ [idem Au(II) ou autre] Décoration
(1) Les procédés sont pour la plupart brevetés et propriétés de fournisseurs. Les noms de procédés sont des marques déposées.
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_______________________________________________________________________________________________________ TRAITEMENTS PAR VOIE CHIMIQUE
2. Chimie des traitements Exemple : cuivrage du fer immergé dans du sulfate de cuivre :
Tableau 1 – Vue d’ensemble des traitements chimiques. Classement d’après les réactions chimiques
RED2 + OX1 → OX2 + RED1 Nature de la couche Procédé
La réaction est assez
rapide pour atteindre
le potentiel de passiva-
tion .................................. Le métal à traiter (RED2) est
très légèrement oxydé en
surface........................................ Passivations
H , l ’ o x y g è n e
+
OX1 est ou un autre
oxydant
Au pH de la solution,
le cation OX2 est insolu-
ble.................................... La couche est un sel du métal à
traiter (oxyde, sulfure, chro- Oxydations alcalines
mate) ..........................................
Patinages (sulfures)
RED2 est le
métal à traiter La réduction de OX1 sur La précipitation d’un oxyde,
l e m é t a l a l c a l i n i s e l a phosphate, chromate, oxa-
phosphatation
surface et provoque....... late, molybdate ou autre ........ Conversions
chromatation
La coagulation d’une résine... Autophorèse
OX1 est un cation métallique ......................................... Le métal (RED1) du cation en
solution constitue la couche..... Métallisation par déplacement
RED2 est un
ion en solution OX1 est un cation métallique ......................................... Le métal (RED1) du cation en
solution constitue la couche..... Dépôt chimique autocatalytique
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Le fer, les aciers inoxydables, les alliages de cuivre et l’argent Le réducteur participe à plusieurs réactions, ainsi l’emploi d’hypo-
sont passivables. phosphite conduira à la formation d’un dépôt d’alliage nickel-
Les oxydations se pratiquent le plus souvent à chaud en milieu phosphore.
alcalin en présence d’un oxydant.
Les métaux ferreux (noir alcalin ), le cuivre, l’étain, l’aluminium,
le magnésium sont oxydables. 2.3 Procédés apparentés
La plupart des patines (dépôts colorés décoratifs) utilisent l’inso-
lubilité des sulfures, du sulfure de cuivre en particulier. ■ La phosphatation peut se pratiquer en milieu solvant ou à des pH
moyennement acides ; dans ces conditions, le bain de traitement
Trois procédés de coloration sont également à joindre à cette possède en plus des capacités de dégraissage (dégraissant-
catégorie : le noircissement du fer dans la vapeur d’eau surchauffée phosphatant).
(Bower-Barff ), la formation de couleurs d’interférence au four sec
(Temper colour ) et le noircissement du cuivre par les sulfures en ■ On augmente considérablement les domaines d’application des
pâte (Niellage ). traitements chimiques en ajoutant aux bains une partie inerte qui
Dans le cas des conversions en milieu acide, l’espèce qui se dépose s’incorporera au dépôt chimique :
est soluble au pH du bain. L’alcalinisation qui provoque la précipi- chromatation : additifs : colorants, filmogènes ;
tation, localisée sur le métal, est due aux réactions de réduction qui nickelage, cuivrage chimiques : additifs : poudres abrasives,
consomment des ions H+ ou produisent des ions OH –. poudres lubrifiantes, etc.
Exemples : phosphatations, chromatations, autophorèse ■ Certaines peintures contiennent des composés dont la réaction
(= coagulation d’une résine) (article Phosphatation [M 1 575] dans ce avec le métal est identifiable à une conversion (acide phosphorique,
traité). cétones).
Le métal à traiter n’est pas forcément un constituant de la couche de Si le bain est trop acide pour que la réaction de réduction puisse
conversion. alcaliniser suffisamment la surface, la précipitation ne se produit
Le fer, le zinc, l’aluminium sont phosphatables, le cuivre, le zinc, pas ; seul le métal se dissout ; brillantage, satinage, démétallisation,
l’aluminium sont chromatables. appartiennent à cette catégorie ; ils font l’objet d’articles spécifiques
dans ce traité, mais on remarquera qu’ils utilisent les mêmes réactifs
La métallisation par déplacement se produit spontanément quand que les traitements chimiques.
on immerge un métal dans une solution d’un cation métallique dont
Les traitements de surface portent souvent un nom qui ne reflète
le potentiel d’oxydoréduction est plus haut que celui du métal
pas leur identité chimique ; en fait, la plupart des solutions mises
immergé (article Nickelage chimique [M 1 565] dans ce traité). Le
en contact avec un métal laissent leur empreinte, et un décapage,
cation en solution se réduit et couvre la surface d’une couche
parfois, n’est utile qu’en créant une espèce superficielle insoup-
métallique (§ 2.1).
çonnée, c’est alors un vrai traitement chimique.
Les praticiens nomment souvent cémentations ces procédés :
Il ne faut pas confondre les cémentations par déplacement avec
attention aux confusions !
les cémentations des métallurgistes (traitements thermiques). En
Une réaction de déplacement est souvent cachée dans un traite- ce qui concerne les traitements chimiques à chaud (vapeur, gaz,
ment chimique, elle en est alors l’étape initiale ; celui-ci se poursuit sels fondus, etc.), la finalité fournit la frontière : seuls les traite-
ensuite sur une autre réaction. ments à buts décoratifs appartiennent aux traitements chimiques.
Exemples Il n’est pas toujours facile de connaître exactement la nature
— Une formulation de patinage de l’acier contenant du chlorure d’un dépôt ; par exemple, dans le domaine des patines, la nature
mercurique dépose, par déplacement, du mercure métallique ; la réduc- métallique de certains dépôts n’est pas évidente.
tion de l’hydrogène étant plus difficile sur le mercure que sur l’acier, une
autre réaction de réduction plus favorable, sans formation de gaz, se
produit, ce qui améliore l’adhérence.
— Une formulation de patinage du zinc contenant un sel de cuivre 3. Applications industrielles
produit, par déplacement, du cuivre métallique qui est ensuite oxydé
par les autres composés en solution ; le zinc, dont la plupart des sels Les applications industrielles des traitements chimiques sont
sont blancs, a été remplacé par du cuivre plus facilement colorable. nombreuses et, pour certaines, d’une grande importance écono-
— Une phosphatation au zinc contenant un sel de nickel produit, par mique. Elles interviennent soit en facilitant une fabrication, soit
déplacement, du nickel métallique ; ce dépôt initial agit sur la cinétique comme traitement de finition d’un objet manufacturé.
de germination des cristaux de phosphate produits ensuite.
Dans une métallisation chimique autocatalytique, la solution
contient un réducteur et un ion métallique, réductible en métal 3.1 Protection temporaire et anticorrosion
(articles Nickelage [M 1 610] et Dépôts chimiques autocatalytiques
de nickel pur [M 1 566] dans ce traité). L’anticorrosion est une des applications principales des traite-
ments chimiques (recueil de normes AFNOR-Cefracor : Corrosion et
Exemple : nickelage chimique sur acier :
protection des métaux).
++ – – Les passivations offrent une protection limitée destinée à
Ni + H 2 PO 2 + H 2 O + 2e → Ni + H 2 PO 3 + H 2
conserver un état de surface après un brillantage par exemple.
La surface métallique n’intervient plus dans la réaction, elle n’est Pour augmenter leurs performances, l’oxydation alcaline du fer
plus que le lieu privilégié où s’effectue de préférence la réduction. doit recevoir une finition huilée et l’oxydation de l’aluminium
La métallisation de matières non conductrices (ABS, etc.) est une (blanche ) doit être colmatée ou passivée au chromate (article Trai-
extension directe de ces procédés. tements anodiques de l’aluminium et de ses alliages [M 1 630] dans
La réaction ne s’arrête plus dès que le métal d’origine est masqué, ce traité).
les dépôts sont donc plus épais que lors d’une métallisation par Les chromatations sont utilisables brutes, vernies ou peintes.
déplacement.
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— aux rétentions de solution entraînant des pertes de produit, des La phosphatation au manganèse et la phosphatation au lance-
difficultés de rinçage, des pollutions de bains, des hétérogénéités vapeur se pratiquent autour de 100 oC.
de traitement si l’égouttage ne peut stopper la réaction Dans les cuves de traitement, les solutions sont relativement
uniformément ; diluées mais les réserves de régénération sont plus concentrées et
— aux autoséchages si la pièce chaude comporte des épaisseurs caustiques. On utilise presque tous les acides minéraux courants
de métal capables de transférer à la surface s’égouttant la chaleur (phosphorique, nitrique, chromique et fluorhydrique), et la soude.
suffisant à son séchage, ce qui peut inhiber aux endroits séchés la
poursuite normale du traitement dans les bains suivants. Il faut éviter les méthodes d’emploi des solvants présentant des
risques d’inhalation par l’opérateur (essuyage). Les enceintes closes
ou semi-closes de dégraissage et de dégraissage-phosphatant
solvantés sont sans risque.
4.2 Hygiène, sécurité, environnement Cr(VI) et nitrite sont les produits toxiques les plus répandus dans
les traitements chimiques.
Les traitements chimiques utilisent des produits chimiques dont
la manipulation demande un minimum de précaution. D’une Par exemple, la projection du Cr (VI) est interdite au lance-vapeur.
manière générale, les solutions employées sont moyennement Les normes de rejet prévoient différentes contraintes de pH et de
chaudes (ambiante ou 60 à 80 oC), relativement diluées (20 g/ L) donc concentration en sels de métaux lourds ; le traiteur de surface se
peu agressives et peu toxiques avec des exceptions notables. référera directement aux textes officiels de réglementation (arrêté
Les patines sont souvent réalisées dans des bains chauds (ébul- ministériel du 26 septembre 85 relatif aux ateliers de traitements
lition), caustiques (bases ou acides forts et concentrés, oxydants ou de surface).
réducteurs puissants), toxiques (arsenic, tellure, mercure) avec la Sur la base du droit à 8 L d’eau/m2 traité et par fonction de rinçage,
participation manuelle de l’opérateur. avec, en moyenne, 5 L de solution entraînés pour 100 m2 traités, le
Les oxydations alcalines se pratiquent en solutions concentrées respect des normes reste accessible, un rinçage à cuve unique per-
à 140 oC ou en autoclave à la vapeur surchauffée. mettant déjà un rapport de dilution de 50 à 100.
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Traitements par voie chimique R
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du Conservatoire National des Arts et Métiers
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Bibliographie A
Ouvrages généraux
LORIN (G.). – La phosphatation des métaux. Eyrolles
(1973).
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DUPRAT (J.J.). – Les couches protectrices de chroma-
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surface, no 595 (1989).
FISHLOCK (D.). – Metal colouring. Robert Draper
(1962).
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R
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bureaux d’études. CETIM (1987).
P
Organisme
Centre Français de la Corrosion (Cefracor).
L
U
S
1 - 1992
Doc. M 1 551