Explorer les Livres électroniques
Catégories
Explorer les Livres audio
Catégories
Explorer les Magazines
Catégories
Explorer les Documents
Catégories
Du même auteur :
Guides des analyses en immunologie : indications, critères de réalisation et limites, 284 pages, 2014.
Immunologie fondamentale et immunopathologie. Enseignements thématique et intégré - Tissu lym-
phoïde et sanguin/Immunopathologie et immuno-intervention, 280 pages, 2013.
Autres ouvrages :
Bactériologie médicale, 2è édition, par François Denis, Marie-Cécile Ploy, Christian Martin, Edouard
Bingen, Roland Quentin, 640 pages, 2011.
Gaz du sang facile, par Iain A M Hennessey, Alan G Japp, Éric Raynaud de Mauverger, 152 pages, 2010.
Le bilan biochimique facile, Jeremy Hughes, Ashley Jefferson, Éric Raynaud de Mauverger, 248 pages,
2009.
Guide thérapeutique 2014, 7è édition, par Léon Perlemuter et Gabriel Perlemuter, 2 368 pages, à paraître.
Dictionnaire médical, 6è édition, version électronique et atlas anatomique inclus, par Jacques
Quevauvilliers, 1 608 pages, 2009.
Méthodes en immunologie
Des principes aux bonnes applications
Christian Drouet
Sylvain Fisson
Estelle Seillès
Ce logo a pour objet d'alerter le lecteur sur la menace que représente pour l'avenir de l'écrit, tout
DANGER particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copillage ».
Cette pratique qui s'est généralisée, notamment dans les établissements d'enseignement, pro-
voque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de
créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd'hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont pas-
sibles de poursuites. Les demandes d'autorisation de photocopier doivent être adressées à l'éditeur
LE ou au Centre français d'exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006
PHOTOCOPILLAGE Paris. Tél. 01 44 07 47 70.
TUE LE LIVRE
Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays.
Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans
le présent ouvrage, faite sans l'autorisation de l'éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées,
d'une part, les reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation col-
lective et, d'autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d'information de l'œuvre dans
laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).
Ce livre a été rédigé sous l'égide de l'ASSIM, Association Jean-Luc Aymeric, Université de Montpellier 2
des Collèges des Enseignants d'Immunologie. Faculté des Sciences.
L'ensemble de l'ouvrage a été coordonné par : Marie Christine Béné, l'UNAM Nantes Faculté
Marie Christine Béné, PU-PH en Hématologie, de Médecine et CHU de Nantes.
CHU de Nantes & Faculté de Médecine, Uni- Sandrine Billaud, l'UNAM Angers Faculté de
versité de Nantes. Pharmacie.
Christian Drouet, PU-PH en Immunologie,
Stéphane Birklé, l'UNAM Nantes Faculté de
Université Joseph-Fourier FRE CNRS 3405,
Faculté de Pharmacie & CHU de Grenoble.
Pharmacie.
Sylvain Fisson, Professeur des Universités en Philippe Bulet, Université Joseph-Fourier FRE
Immunologie, Faculté des Sciences Fonda- CNRS 3405, Grenoble.
mentales Appliquées, Université d'Évry Val Claude Capron, Université de Versailles St Quen-
d'Essonne (UEVE). tin en Yvelines Faculté de Médecine et Hôpital
Estelle Seillès, PU-PH en Immunologie, CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt.
de Besançon & Faculté de Médecine et de Phar-
Guislaine Carcelain, Université Pierre et Marie
macie, Université de Franche-Comté.
Curie Faculté de Médecine et Groupe Hospita-
La rédaction de chaque chapitre a été pilotée par lier Pitié Salpêtrière, Paris.
un ou plusieurs coordonnateurs et sa rédaction réa-
Alain Chevailler, l'UNAM Angers Faculté de
lisée par un groupe d'auteurs.
Médecine & CHU d'Angers.
Introduction générale Sylvie Chollet-Martin, Université Paris Sud
Marie Christine Béné, Christian Drouet, Sylvain Faculté de Pharmacie et Hôpital Bichat,
Fisson et Estelle Seillès. Paris.
Cécile Contin-Bordes, Université Bordeaux Sega-
Partie I – Techniques immunologiques
len Faculté de Médecine et CHU de Bordeaux.
Coordonnateurs : Sandrine Billaud, Stéphane Marie-Hélène Delfau-Larue, Université Paris-
Birklé, Sylvie Chollet-Martin, Cécile Contin- Est Créteil Faculté de Médecine et Hôpital
Bordes, Ludovic Freyburger, Brigitte Gubler, Henri Mondor, Créteil.
Gilles Thibault
Olivier Diaz, Université Claude Bernard Lyon 1
Auteurs : INSERM U1111.
Patricia Amé-Thomas, Université de Rennes 1 Christian Drouet, Université Joseph-Fourier
Faculté de Médecine et CHU de Rennes FRE CNRS 3405 Faculté de Pharmacie et
Pontchaillou. CHU de Grenoble.
Karim Arafah, Université Joseph-Fourier, Plate- Sylvain Dubucquoi, Université de Lille 2 Faculté
forme BioPark d'Archamps, Archamps. de Médecine et CHU de Lille.
Jacques Aubry, l'UNAM Nantes Faculté de Sylvie Chollet-Martin, Université Paris Sud
Pharmacie. Faculté de Pharmacie et Hôpital Bichat, Paris.
VI Liste des collaborateurs
Sylvain Fisson, Université d'Évry Val d'Essonne Ghislaine Sterkers, Université Denis Diderot
(UEVE), Faculté des Sciences Fondamentales Faculté de Médecine et Hôpital Robert Debré,
Appliquées. Paris.
Bertrand Favier, Université Joseph-Fourier Gre-
Gilles Thibault, Université François Rabelais
noble FRE CNRS 3405.
Faculté de Pharmacie et CHU Bretonneau,
Ludovic Freyburger, VetAgro Sup Campus vété- Tours.
rinaire de Lyon.
Jean-Pol Frippiat, Université de Lorraine Faculté Arlette Tridon, Université d'Auvergne Faculté
des sciences Nancy. de Pharmacie et CHU de Clermont-Ferrand.
Marie-Anne Gougerot-Pocidalo, Université Florence Velge-Roussel, Université François
Denis-Diderot Faculté de Médecine et Hôpital Rabelais Faculté de Pharmacie, Tours.
Bichat, Paris.
Brigitte Gubler, Université de Picardie Jules Joana Vitte, Université de la Méditerranée Aix-
Verne Faculté de Médecine et CHU d'Amiens. Marseille Faculté de Médecine et Hôpital de la
Conception, Marseille.
Christine Legrand-Frossi, Université de Lor-
raine Faculté des Sciences et technologies. Partie II – Exemples d'applications
Brigitte Le Mauff, Université de Caen Basse-
Coordonnateurs : Patricia Amé-Thomas, Jacques
Normandie Faculté de Médecine et CHU de Caen. Bienvenu, Alain Chevailler, Marie-Agnès Dragon-
François Lemoine, Université Pierre et Marie Duret, Christian Drouet, Myriam Labalette,
Curie Faculté de Médecine et Groupe Hospita- Marie-Paule Lefranc, Brigitte Le Mauff, Jean-
lier Pitié Salpêtrière, Paris. Yves Muller, Estelle Seillès.
Damien Masson, l'UNAM Nantes Faculté de Auteurs :
Médecine et CHU de Nantes.
Eltaf Alamyar, Université de Montpellier 2
Jeanne Moreau, Université de Limoges, Faculté
Faculté des Sciences et Techniques.
de Pharmacie.
Patricia Amé-Thomas, Université de Rennes 1
Jean-François Nicolas, Université Claude Ber-
Faculté de Médecine et CHU de Rennes
nard Lyon 1 Faculté de Médecine et Hospices
Pontchaillou.
Civils de Lyon.
Jacques Bienvenu, Université Claude Bernard
Olivier Nüsse, Université Paris Sud.
Lyon 2 Faculté de Pharmacie et Hospices Civils
Franck Pagès, Université René Descartes Faculté de Lyon.
de Médecine et Hôpital Européen Georges
Marie-Laure Boulland, CHU de Rennes Pont-
Pompidou, Paris.
chaillou et Faculté de Médecine, Université de
Denise Ponard, Université Joseph-Fourier et Rennes 1.
CHU de Grenoble.
Delphine Charignon, Université Joseph-Fourier
Philippe Robert, Bioprojet Biotech. FRE CNRS 3405 et CHU de Grenoble.
Paul Rouzaire, Université d'Auvergne Faculté de Alain Chevailler, l'UNAM Faculté de Médecine
Pharmacie et CHU de Clermont-Ferrand. et CHU d'Angers.
Géraldine Schlecht-Louf, Jacques Chiaroni, Université de la Méditerra-
Université Paris Sud. née Aix-Marseille Faculté de Médecine et EFS
Nabila Seddiki, Université Paris-Est Créteil
Alpes-Méditerranée.
Faculté de Médecine et Hôpital Henri-Mondor, Federica Defendi, Université Joseph-Fourier
Créteil. FRE CNRS 3405 et CHU de Grenoble.
Liste des collaborateurs VII
Le terme d'antigène désigne une espèce molécu- le plus souvent des antigènes peptidiques, associés
laire biologique ou synthétique reconnue par un aux molécules du complexe majeur d'histocompa-
récepteur spécifique du système immunitaire tibilité (CMH) ou human leucocyte antigens
(e.g. immunoglobulines, récepteurs des lympho- (HLA) chez l'homme.
cytes B ou T). L'antigénicité désigne la capacité de Un épitope correspond à la structure minimale
la molécule à être reconnue spécifiquement par un d'un antigène reconnue par une partie limitée pour
récepteur. L'immunogénicité traduit la capacité le récepteur de l'antigène, appelée paratope. Un
d'un antigène à induire une réponse immunitaire. antigène peut être constitué d'une mosaïque d'épi-
Un antigène peut être tolérogène lorsque sa recon- topes. La structure d'un épitope dans l'espace (ou
naissance n'induit pas de réponse immunitaire. structure stéréochimique) peut être séquentielle
(ou linéaire) ou conformationnelle (structures
secondaire, tertiaire ou quaternaire). Des modifica-
Caractéristiques tions post-traductionnelles (e.g. glycosylation,
des antigènes phosphorylation, méthylation) peuvent changer la
structure des épitopes. La structure native d'une
Leur définition sous-entend une interaction spé- protéine est généralement conformationnelle et
cifique avec le système immunitaire adaptatif et comprend des modifications post-traductionnelles.
plusieurs critères permettent de caractériser les Un antigène mimétique possède un épitope sté-
antigènes. réochimique (mimotope) dont la structure peut être
Les récepteurs pour l'antigène des lympho- proche de ou identique à celle d'un autre épitope
cytes B (BCR) peuvent reconnaître des molécules porté par une molécule différente. Ce type d'anti-
natives, en solution ou particulaires. La plupart gènes peut être à l'origine de réactions croisées.
des antigènes induisent une réponse lymphocy-
taire B faisant appel aux lymphocytes T auxiliaires
(ou helper) et sont appelés antigènes thymo-
dépendants. Certaines structures répétitives Nature chimique, origine
peuvent induire des réponses lymphocytaires B et localisation des antigènes
sans l'intervention (help) des lymphocytes T et
sont appelées antigènes thymo-indépendants Les antigènes peuvent être des protéines, des poly-
(e.g. antigènes polyosidiques). saccharides, des lipides, des acides nucléiques, des
Les récepteurs pour l'antigène des lymphocytes métaux, des molécules de synthèse ou des molé-
T (TCR) reconnaissent des fragments d'antigènes, cules complexes (e.g. glycolipides, glycoprotéines).
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
10 Techniques immunologiques
Selon leur origine, on distingue les antigènes possède une constante proche de 10−4 L.mol−1 et
non immunogènes ou haptènes, les antigènes un anticorps de haute affinité, une Ka proche de
propres à une espèce différente ou xéno-antigènes, 10−12 L.mol−1. Une autre façon d'exprimer l'affi-
propres à des individus différents dans la même nité d'un complexe épitope/paratope est de défi-
espèce ou allo-antigènes, propres à un individu nir la concentration molaire permettant de saturer
donné ou auto-antigènes et les néo-antigènes, for- 50 % des récepteurs présents. On considère qu'une
més de novo par transformation de l'antigène origi- faible affinité est de l'ordre de 10−4 mM et une
nel ou issus de la combinaison de plusieurs forte affinité de l'ordre de 10−9 mM. Cette affinité
molécules. Les auto-antigènes peuvent être à l'ori- dépend de la complémentarité entre l'épitope et le
gine de maladies auto-immunes lorsqu'ils sont paratope.
associés à un signal de danger. Les immunoglobulines portent au minimum
Les antigènes et épitopes cryptiques ont pour parti- deux paratopes semblables, capables de r econnaître
cularité d'être inaccessibles aux récepteurs spécifiques les mêmes épitopes, si ceux-ci sont répétés au sein
du système immunitaire parce qu'ils sont enfouis au du même antigène ou présents sur deux antigènes
sein d'une molécule, d'une cellule ou d'un tissu. proches. La valence antigénique correspond au
Les super-antigènes présentent une structure nombre de molécules d'un épitope donné pouvant
moléculaire créant une liaison non spécifique être reconnues simultanément par des anticorps
entre des TCR (en dehors des régions de recon- qui lui sont spécifiques. L'accès des paratopes aux
naissance ou CDR) et les molécules du CMH. Ils épitopes est par ailleurs contraint par la notion
conduisent ainsi à une réponse immunitaire dis- d'encombrement stérique. La valence antigénique
proportionnée et secondairement à la mort des est ainsi toujours inférieure ou égale au nombre
cellules qui sont entrées en contact avec cette d'épitopes.
molécule. Ce sont souvent des toxines produites L'avidité représente la résultante des différentes
par des agents pathogènes qui sont considérées forces d'interaction engagées entre les anticorps et les
comme des facteurs de virulence. épitopes. La force d'interaction globale d'un anti-
Les allergènes sont des antigènes de l'environ- corps avec sa cible dépend alors du nombre de para-
nement qui ne déclenchent normalement pas de topes qu'il peut engager. Ainsi, une IgM,
réaction inflammatoire, sauf chez des sujets aller- pentamérique, qui peut engager ses dix paratopes lors
giques ou atopiques où ils sont à l'origine de de l'interaction avec un antigène, a une force d'inter
manifestations cliniques. action (avidité) plus importante que celle d'une IgG
qui ne peut engager que deux paratopes identiques.
Thermodynamique de la
réaction antigène–anticorps
Qualité de l'antigène
Les caractéristiques physiques des réactions anti- et interactions
gène–anticorps sont très importantes à connaître antigène–récepteur
pour le développement de techniques qui les uti-
lisent car elles conditionnent de nombreux para- Une modification infime de l'épitope peut avoir
mètres de l'expérimentation souhaitée. des conséquences majeures sur la qualité des
Épitopes et paratopes engagent des interactions récepteurs engagés, avec des retentissements par-
non covalentes, instables et réversibles, de type liai- fois importants sur la qualité de la réponse immu-
sons de van der Waals, liaisons hydrophiles/hydro- nitaire qui en découle. Dans le cas des épitopes
phobes, liaisons électrostatiques et liaisons peptidiques, on peut ainsi définir des motifs :
hydrogène. La somme de ces liaisons définit la force • agonistes, qui présentent une structure proche
d'interaction entre l'antigène et son récepteur. ou dans lesquels le remplacement d'acides ami-
L'affinité de l'anticorps est évaluée par une nés n'affecte en rien la qualité de la reconnais-
constante d'affinité (Ka) qui s'exprime en L/mol sance par le récepteur et la réponse immunitaire
(L.mol−1). Ainsi, un anticorps de faible affinité qui en découle ;
Chapitre 1. L'antigène comme réactif : définition et propriétés 11
Tableau 1.1 Impacts des propriétés de l'antigène dans les réponses immunitaires et en immuno-analyse
Antigènes/propriétés Implications pratiques Conséquences en cas de non-respect de la propriété
Épitopes B
Natifs In vivo, les antigènes ont conservé leur – Dans le cas où les modifications post-traductionnelles sont
Par opposition à conformation structurale qui peut subir des essentielles à la reconnaissance par le récepteur, produire un
dénaturés ou dégradés modifications post-traductionnelles (glycosylation, épitope recombinant non modifié chez un procaryote peut
phosphorylation, méthylation, ubiquitinylation…). conduire à perturber la reconnaissance par les anticorps
Un antigène est donc natif s'il a conservé – La dénaturation ou la dégradation d'un antigène peut conduire
l'ensemble de ses propriétés, c'est-à-dire sa à une perte de reconnaissance par les récepteurs spécifiques. La
conformation et ses modifications dénaturation peut aussi conduire à la formation de néo-antigènes
Répétés (multivalents) Facilitent la formation de complexes immuns Impact sur les méthodes de dosage biologique :
Par opposition à – deux sites antigéniques sont nécessaires (au minimum) pour
monovalents les tests ELISA de type sandwich. Pour les méthodes
compétitives, un épitope monovalent peut être utilisé
– la multivalence est indispensable pour les méthodes
d'agglutination et de précipitation
Épitopes T
Doivent être présentés – Vaccins Inefficacité d'un vaccin si l'épitope sélectionné n'est pas
par les molécules CMH – Évaluation de la réponse lymphocytaire T in vitro présenté par le CMH de la population vaccinée
de l'individu
Épitopes B ou T
Spécificité Pour les immunodosages :
Accessibilité – manque de spécificité → faux positifs
Stabilité – manque d'accessibilité → faux négatifs
– manque de stabilité → faux négatifs
Réintroduction Impact en vaccination : rappels – Le tarissement de la source de présentation antigénique
conduit à faire disparaître la réponse immunitaire
– Perte de la protection vaccinale
Respect de la voie Impact en vaccination : vaccins systémiques ou – Inefficacité
d'introduction muqueux – Les antigènes vaccinaux administrés par voie muqueuse
doivent résister à la dégradation par les sucs digestifs, passer
les barrières de la flore, du mucus et des épithéliums
– Les propriétés des cellules présentatrices d'antigène peuvent
orienter la réponse immunitaire vers la tolérance, plutôt que
l'immunisation
Innocuité Vaccins, biothérapies Effets secondaires
Faciles à produire Coût, performances, reproductibilité interlots
12 Techniques immunologiques
Tableau 1.2 Impact de la propriété des antigènes sur le choix des méthodes immunologiques
Technique Propriétés des Ag Remarques (avantages/contraintes)
Immunofluorescence indirecte (IFI) – Natifs – Les plus proches du vivant
– In situ – Structures parfois complexes
Immunoprécipitation ou immunodiffusion – Natifs – Les antigènes ont souvent conservé leurs
– Solubles propriétés originelles
– Les antigènes insolubles ne peuvent être utilisés
– La méthode de dosage est souvent spécifique
(peu de faux positifs), mais aussi, souvent peu
sensible (faux négatifs)
Immunodosages Radio-Immuno-Assay (RIA) – Natifs purifiés Utilisation réglementée des radio-isotopes
à réactifs marqués – Recombinants
Enzyme-Linked – Faciles à mettre en œuvre, automatisables,
– Synthétiques (peptides)
Immunosorbent Assay (ELISA) économiques
classique ou à traceurs – Quantitatifs
fluorescents (FLISA, FIA, FPIA) – Larges gammes de mesure
ou phosphorescents (MPIA)
Fluorimétrie en flux – Multiparamétrique
(multiplex) – Interférences possibles
Tableau 1.3 Influence des conditions réactionnelles sur la mise en œuvre d'un immunodosage
Contraintes Exemples Impact
Préservation de la L'épitope reconnu a-t-il :
structure stéréochimique – une structure linéaire (séquence peptidique) ?
– une structure secondaire, tertiaire (repliements dans La perte d'épitopes conformationnels altère la qualité
l'espace) ? de l'interaction antigène–anticorps
– une structure quaternaire (formée de la combinaison
de différentes molécules) ?
– subi des modifications post-traductionnelles ? Quand l'interaction antigène–anticorps fait appel à la
reconnaissance d'un motif additionnel (modifications
post-traductionnelles), l'utilisation d'antigènes
recombinants (issus d'un procaryote) peut être une
source de faux négatifs
L'utilisation de méthodes de dosage en phase Importance de la force ionique et de la température
solide apporte des contraintes supplémentaires : Un dosage adapté dans un milieu biologique (sérum)
– conformation de l'antigène (i.e. perte de la ne l'est pas nécessairement dans un autre (urine ou
conformation originelle au profit d'une autre) LCR, e.g.)
– « effet matrice » : l'environnement moléculaire est
important afin que l'anticorps lui-même conserve sa
conformation et, en conséquence, sa spécificité
Spécificité de la réaction Pureté de l'antigène :
Antigènes purifiés et recombinants (élimination de Risque de faux positifs. Il faut connaître les substances
toutes les protéines du vecteur) interférentes
Utilisation d'un agent de saturation L'objectif principal de l'agent de saturation est de
limiter les faux positifs. Il ne faut pas qu'il soit lui-
même une source d'interférences
Prélèvement adéquat : Interférences, imprécision
Sérum et non pas plasma hépariné par exemple
Facteurs rhumatoïdes, cryoglobulines, anticorps
Prise en compte des interférences : hétérophiles, immunoglobulines monoclonales
Chapitre 1. L'antigène comme réactif : définition et propriétés 13
comprennent en effet de nombreux composants espèces animales ou végétales variées, donnant lieu
dont chaque épitope peut être à l'origine d'une à des réactions croisées. Enfin, la stabilité des aller-
réponse immunitaire. Plus encore, des protéines de gènes, en particulier à la chaleur ou à la digestion,
structure similaire sont souvent présentes dans des est à prendre en considération.
Chapitre 2
Les anticorps comme réactifs
Les anticorps sont devenus des outils indispen- par plusieurs clones de lymphocytes B, chacun
sables dans les activités de recherche, de diagnos- exprimant à sa surface une immunoglobuline dont
tic et de thérapie. En plus de leur capacité à le paratope est complémentaire d'un épitope
reconnaître très précisément une molécule, de s'y donné. L'ensemble des anticorps, sécrétés par les
fixer avec une affinité variable et de façon réver- différents plasmocytes issus de l'activation des
sible, les anticorps peuvent distinguer des diffé- clones B ayant chacun fixé l'antigène par une
rences subtiles entre les molécules d'antigène. Ces région précise, est déversé dans la circulation san-
propriétés en font de remarquables réactifs d'utili- guine pour rejoindre les antigènes restés libres, s'y
sation aisée. fixer puis entraîner leur élimination de l'orga-
nisme. Ces anticorps sont dits polyclonaux et
représentent une population hétérogène d'immu-
Rappels sur les anticorps noglobulines, leur spécificité épitopique et leur
affinité pour l'antigène étant différentes bien
Afin d'assurer la protection de l'organisme contre qu'elles soient toutes dirigées contre le même
toute substance étrangère potentiellement dange- antigène. À l'inverse, les anticorps monoclonaux
reuse, le système immunitaire est composé d'un sont issus de l'activation d'un seul clone cellu-
grand nombre de lymphocytes B. Chaque clone laire B exprimant le même récepteur pour l'anti-
cellulaire B exprime à sa surface de multiples gène et constituent une population homogène
copies d'un unique récepteur pour l'antigène d'immunoglobulines dont la spécificité épitopique
(BCR), qui est une glycoprotéine membranaire de et l'affinité sont rigoureusement identiques.
la famille des immunoglobulines appelée anti- Afin d'assurer d'une part, la reconnaissance
corps, dont l'extrémité N-terminale ou paratope spécifique d'antigènes et d'autre part, leur élimi-
définit la spécificité antigénique. La diversité des nation de l'organisme, les immunoglobulines ou
récepteurs pour l'antigène est assurée par une anticorps possèdent une dualité fonctionnelle
extrême variabilité de la séquence en acides ami- assurée par la structure particulière de ces molé-
nés de cette région de l'immunoglobuline. cules. En effet, ces glycoprotéines sont consti-
Lorsqu'un antigène se fixe par complémentarité tuées d'une région variable (fragment Fab,
spatiale entre une région précise de celui-ci, appe- antibody binding) en N-terminal portant le site de
lée épitope ou déterminant antigénique, et le reconnaissance et de fixation de l'antigène et
paratope de l'immunoglobuline membranaire d'une région constante (fragment Fc, cristalli-
d'un lymphocyte B donné, ce dernier est activé, se sable) en C-terminal, portant les fonctions effec-
multiplie et se différencie en plasmocytes. Les trices assurant l'élimination de l'antigène. Chaque
antigènes étant souvent constitués d'une mosaïque monomère d'immunoglobuline est constitué de
d'épitopes, un même antigène peut être reconnu deux chaînes légères identiques associées de façon
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
16 Techniques Immunologiques
covalente à deux chaînes lourdes identiques. B spécifiques de cet antigène. D'autres isotypes
Chacune de ces chaînes polypeptidiques com- sont ensuite produits par commutation de classe,
porte un domaine variable et un ou plusieurs conservant la spécificité de l'immunoglobuline.
domaines constants. La séquence peptidique des De plus, des hypermutations somatiques s'opèrent
domaines constants des chaînes lourdes définit au niveau des gènes codant les parties variables des
l'isotype de l'immunoglobuline. Chez les mammi- chaînes lourdes et légères des immunoglobulines,
fères, il y a cinq classes d'immunoglobulines (Ig) : qui améliorent l'affinité du paratope pour l'épi-
IgG, IgA, IgM, IgD et IgE. Certaines classes sont tope de l'antigène. Ces mécanismes ont pour but
divisées en sous-classes (e.g. IgG1 à IgG4) d'adapter la réponse de l'organisme à la nature de
(fig. 2.1). Chacune de ces classes et sous-classes l'antigène afin d'améliorer l'efficacité de la réponse
possède des propriétés différentes. Ces propriétés immunitaire. De plus, des lymphocytes B mémoire
sont importantes à prendre en considération pour persistent dans l'organisme et répondent plus effi-
l'utilisation des anticorps en tant que réactifs ; en cacement à une seconde rencontre avec le même
effet, elles peuvent être avantageuses ou au antigène. Cette maturation de la réponse humo-
contraire constituer des handicaps majeurs à leur rale est particulièrement intéressante pour la pro-
utilisation. duction d'anticorps performants en tant que
Lors du premier contact avec un antigène, ce réactifs.
sont d'abord des IgM qui sont sécrétées par les En résumé, la spécificité et l'affinité des anti-
plasmocytes issus de l'activation des lymphocytes corps pour leur antigène sont les deux propriétés
IgD IgM
IgE
IgA1 IgA2
essentielles qui en font d'excellents outils pour espèces de taille intermédiaire, comme le lapin,
leur utilisation en tant que réactifs in vitro. Ils sont souvent employées. Il est également impor-
peuvent ainsi contribuer à déceler toute une tant de choisir une espèce animale qui soit phylogé-
palette d'agents pathogènes ainsi que la présence nétiquement la plus éloignée possible de la source
de substances d'origine virologique, bactériolo- de l'antigène avec lequel l'immunisation sera effec-
gique, fongique ou parasitaire, de drogues et tuée. En effet, un antigène est d'autant plus immu-
d'autres molécules inhabituelles ou anormales nogène qu'il diffère de structures normalement
dans l'organisme. Leur simplicité d'utilisation présentes dans l'espèce à immuniser. Ainsi, pour
ne se limite pas au diagnostic en santé humaine préparer des anticorps contre l'albumine de souris,
et animale. Ils sont également utilisés pour la il est préférable d'immuniser une chèvre plutôt que
purification, la détection et l'analyse de molé- des rats. Enfin, il faut également tenir compte des
cules et, depuis quelques années, comme outils propriétés des chaînes lourdes recherchées qui dif-
thérapeutiques. fèrent suivant les espèces, par exemple les IgG des
rats sont plus faciles à purifier que celles des souris.
Enfin, l'activation du complément, parfois recher-
Préparation d'anticorps chée dans les tests ultérieurs, varie en fonction de
polyclonaux l'espèce ayant produit les anticorps.
La deuxième décision concerne la taille et le
Les premiers types d'anticorps qui ont été pro- degré de pureté de l'antigène nécessaire. Ce choix
duits en tant qu'outils sont les anticorps polyclo- dépend de l'utilisation future des anticorps. Les
naux. La méthode la plus simple pour obtenir des antigènes peuvent se présenter sous la forme de
anticorps spécifiques d'un antigène consiste à micro-organismes inactivés (e.g. bactéries, virus,
injecter cet antigène à un animal à plusieurs levures) qui sont d'excellents immunogènes en
reprises, puis à recueillir le sérum contenant les raison de leur caractère particulaire. Il peut s'agir
anticorps après prélèvement sanguin. Les anti- également de protéines en solution, lyophilisées
corps spécifiques de l'antigène présents dans cet ou encore intégrées dans un gel de polyacryla-
immunsérum peuvent être ensuite purifiés en mide. Les protéines peuvent être artificiellement
fonction de leur isotype et/ou de leur spécificité converties en antigènes particulaires en les cou-
antigénique. De manière générale, les IgG étant plant à des substrats solides comme des billes
les plus affines, elles représentent la classe d'anti- d'agarose. Les antigènes peuvent enfin se présen-
corps la plus utilisée dans les méthodes de dosage ter sous forme de petites molécules ou haptènes
immunologiques. (e.g. molécules chimiques, peptides, acides
L'objectif est ici d'administrer l'antigène à l'ani- nucléiques). Ces derniers sont très peu immuno-
mal sous une forme qui induit la réponse la plus gènes et il est nécessaire de les conjuguer à des
forte et la plus appropriée en termes d'isotype, molécules protéiques de grande taille comme la
garantissant la production d'immunsérum forte- sérum-albumine bovine ou l'hémocyanine de
ment concentré en anticorps spécifiques. limule pour induire la production d'anticorps. Ce
La première décision concerne le choix de l'es- couplage chimique est effectué à l'aide de réactifs
pèce animale. Si l'on souhaite produire de grandes bifonctionnels. Ce complexe, une fois injecté chez
quantités d'antisérum, il convient de retenir un ani- l'animal, induit la formation d'anticorps contre
mal de grande taille (cheval, âne, chèvre ou mou- l'haptène et contre la protéine porteuse, qu'il faut
ton). Cependant, ces espèces sont plus coûteuses à ensuite purifier pour disposer d'un réactif spéci-
l'achat et à l'entretien et sont moins faciles à mani- fique de l'haptène. C'est de cette façon que sont
puler que des animaux de plus petite taille comme obtenus des anticorps contre des hormones, des
les rongeurs qui nécessitent des installations moins médicaments ou encore contre des peptides syn-
coûteuses. Cependant, le volume des prélèvements thétiques ou issus de protéines. Ils permettent
sanguins est plus limité chez ces derniers. Des aussi la production d'anticorps spécifiques ayant
18 Techniques Immunologiques
des applications directes dans des études fonction- La voie sous-cutanée est la plus facile d'accès,
nelles (e.g. neutralisation, agonistes). Toutefois, quelle que soit l'espèce animale choisie. La voie
l'inconvénient majeur, parfois rencontré lors de la intramusculaire permet une libération lente de
préparation de tels anticorps dirigés contre des l'antigène mais n'est pas adaptée aux petits ani-
épitopes linéaires, est leur incapacité à reconnaître maux et est plus douloureuse. La voie intrader-
la protéine sous forme native. La séquence et la mique est la plus immunogène mais limite le
longueur du peptide, la méthode de couplage et le volume à injecter qui doit être faible. Elle n'est
choix de la protéine porteuse sont à prendre en mise en pratique que chez les animaux de grande
considération pour la mise en place du schéma taille. Les injections par voie intraveineuse et
d'immunisation. Néanmoins, ceci reste une straté- intrapéritonéale ne sont employées que dans des
gie de choix pour des protéines difficiles à purifier cas particuliers. La voie intraveineuse permet,
ou à synthétiser. par une exposition rapide de l'antigène aux
L'immunisation peut se dérouler de plusieurs cellules immunocompétentes, d'induire une
façons. La dose, la nature de l'antigène, l'utilisa- réponse rapide et forte en minimisant la quantité
tion d'adjuvants, la voie d'administration, le d'antigène à injecter. Toutefois elle demeure
nombre d'injections et l'intervalle entre ces der- délicate et dangereuse car elle peut être à l'ori-
nières sont autant de paramètres qui influencent gine d'effets secondaires graves comme l'induc-
la qualité de la réponse anticorps. Il n'existe pas tion d'un choc anaphylactique. Elle ne peut pas
de règle générale. Le protocole doit être testé être utilisée pour des antigènes particulaires. La
empiriquement de manière à s'assurer que la voie intrapéritonéale est réservée aux petits ani-
réponse anticorps produite est de bonne qualité. maux. Enfin, l'injection de l'antigène directe-
La dose d'antigène à administrer pour induire ment au sein des organes lymphoïdes est possible
une réponse anticorps de qualité dépend large- et minimise grandement la quantité d'antigène à
ment de la nature même de l'antigène et de l'es- injecter, mais requiert une grande expertise du
pèce animale choisie. L'utilisation d'adjuvants manipulateur.
retardant la libération de l'antigène qui est alors Plusieurs injections séparées d'environ 1 mois
sous forme d'une émulsion huile–eau est néces- sont classiquement pratiquées. L'objectif de cette
saire dans le cas d'antigènes solubles afin d'induire hyperimmunisation est d'induire la production
une forte réponse anticorps. Le plus connu est d'anticorps de haute affinité et de l'isotype le plus
l'adjuvant incomplet de Freund, qui est une émul- approprié, IgG le plus fréquemment. L'affinité
sion de la solution d'antigène dans de l'huile des anticorps conditionne la sensibilité des tech-
minérale. Son utilisation ralentit la libération de niques immunologiques. Des prélèvements de
l'antigène et son élimination, tout en le concen- sang sont réalisés avant chaque immunisation et
trant au niveau du site de l'injection. L'adjuvant environ 8 jours après. Il n'existe pas de méthode
complet de Freund contient en plus des extraits de universelle pour analyser la production d'anti-
mycobactéries tuées. Celles-ci stimulent la réponse corps spécifiques. Toutefois, le test utilisé doit
immunitaire innée en induisant une réponse être facile à réaliser et d'interprétation aussi évi-
inflammatoire locale au site de l'injection, qui sti- dente que possible, il doit permettre d'évaluer la
mule les cellules prenant en charge l'antigène. quantité (titration) et l'affinité des anticorps pro-
Cependant, l'injection de ce dernier est doulou- duits ainsi que leur spécificité. Les animaux ayant
reuse et déconseillée par les comités d'éthique de produit les meilleurs anticorps sont ensuite
protection des animaux. D'autres produits sont sélectionnés.
plus rarement employés comme des sels d'alumi- La ponction de sang en vue de la préparation des
nium ou des squalènes. L'utilisation d'adjuvants lots d'anticorps est généralement effectuée sous
est réservée aux voies d'injection intradermique, anesthésie locale, selon les recommandations des
sous-cutanée et intramusculaire. Elle n'est pas comités d'éthique d'expérimentation animale, de
nécessaire en cas d'antigènes particulaires comme façon stérile à l'animalerie. Le sang est recueilli sans
les micro-organismes. anticoagulant pour obtenir du sérum. Le volume
Chapitre 2. Les anticorps comme réactifs 19
prélevé dépend du poids et des données hématolo- de réaction croisée avec d'autres molécules pré-
giques de l'animal. Le traitement du matériel se sentes dans les échantillons à analyser. De plus,
poursuit au laboratoire par centrifugation du sang du fait de la variabilité de la réponse immunitaire
coagulé. Les protéines sériques sont dosées et une de chaque individu, la qualité des sérums varie
électrophorèse permet de déterminer la masse d'un lot à l'autre, ce qui nécessite des ajuste-
d'immunoglobulines afin de la normaliser. ments et des calibrations avant l'utilisation d'un
Le sérum recueilli contient de nombreuses pro- nouveau lot.
téines pouvant interférer dans les immuno-analyses
prévues, notamment des immunoglobulines non
spécifiques de l'antigène produites avant l'immu- Préparation d'anticorps
nisation de l'animal. Il est donc très souvent néces- monoclonaux
saire de purifier les anticorps polyclonaux. La
stratégie choisie dépend de l'isotype ainsi que du En 1975, Georges Köhler et Cesar Milstein (prix
degré de pureté désiré. Plusieurs techniques Nobel 1984) ont mis au point une technique qui
peuvent être utilisées. La première étape de purifi- permet d'isoler in vitro des clones plasmocytaires
cation consiste à séparer les immunoglobulines des produits à l'issue de l'hyperimmunisation d'un
autres protéines du sérum soit par précipitation par animal. L'avantage majeur de cette technique est
des sels d'ammonium ou de l'éthanol, soit par de pouvoir caractériser précisément chacun des
chromatographie d'affinité sur protéine A ou pro- anticorps monoclonaux produits in vitro, pour ne
téine G, ou bien encore par chromatographie conserver que ceux dont les propriétés (spécificité,
échangeuse d'anions. La protéine A est un compo- affinité et isotype) sont les plus adaptées aux appli-
sant de la paroi cellulaire de Staphylococcus aureus cations prévues. De plus, les anticorps monoclo-
et la protéine G est une protéine de la paroi bacté- naux retenus peuvent être produits de façon
rienne des streptocoques du groupe B. Elles se constante, en quantité indéfinie, reproductible et
lient toutes les deux à la région Fc des IgG. de façon illimitée dans le temps. Toutes les immu-
Toutefois, cette interaction varie selon les espèces, noglobulines issues du clone ont les mêmes carac-
et même au sein d'une espèce en fonction de la téristiques physico-chimiques et biologiques, ce
sous-classe d'IgG. Les IgM sont généralement qui permet de standardiser les analyses. Les clones
purifiées par une combinaison de techniques, du producteurs d'anticorps monoclonaux peuvent
fait de leur taille et de leur point isoélectrique être cultivés in vitro et stockés sous forme
élevé, y compris précipitation au sulfate d'ammo- congelée.
nium suivie d'une filtration sur gel, chromatogra- Le principe général repose sur la fusion d'un
phie échangeuse d'anions, électrophorèse de zone lymphocyte B ou d'un plasmocyte avec des cel-
ou électrofocalisation. lules de myélome conférant à l'hybridome ainsi
Il est parfois nécessaire de purifier uniquement les formé une capacité proliférative illimitée. Seules
immunoglobulines spécifiques de l'antigène, afin les cellules hybrides sécrétrices d'un anticorps spé-
d'éliminer les interférences dues aux autres immuno- cifique de l'antigène sont sélectionnées, puis iso-
globulines. Ceci est réalisé soit par immunoprécipi- lées les unes des autres afin de cultiver séparément
tation, soit par chromatographie d'immuno-affinité. chacun des clones producteurs d'un anticorps
La phase solide est alors constituée de l'antigène monoclonal. Une fois les propriétés de chaque
cible couplé à une résine. Le passage de l'immunsé- anticorps monoclonal définies, seuls les hybrido-
rum dans la colonne permet la liaison des anticorps mes d'intérêt sont conservés en vue d'une produc-
et leur élution différentielle. Cette technique garan- tion en masse. Cette technique d'obtention
tit la spécificité du réactif. d'hybridomes se déroule en trois étapes sur envi-
Cependant, même si les anticorps polyclonaux ron 6 mois :
sont purifiés, ces réactifs restent hétérogènes, • immunisation ;
chaque anticorps étant dirigé contre un épitope • fusion cellulaire ;
donné de l'antigène, ce qui augmente les risques • sélection et séparation des clones.
20 Techniques Immunologiques
Ces étapes sont suivies de la production des tir de la rate, mais parfois elles peuvent provenir
anticorps monoclonaux (fig. 2.2). de ganglions lymphatiques ou de plaques de
La première étape, l'immunisation, est sensi- Peyer. Ce choix dépend de la nature et de la dose
blement la même que celle décrite précédemment de l'antigène utilisé pour les immunisations et de
pour l'obtention d'anticorps polyclonaux, mais l'isotype recherché.
fait appel préférentiellement à des souris La deuxième étape consiste à fusionner en
(BALB/c), voire des rats ou des lapins. En raison condition stérile les cellules immunocompétentes
des facteurs génétiques individuels, plusieurs de l'animal avec des cellules de myélome générale-
individus doivent être immunisés simultanément ment issues de la même espèce. La fusion cellu-
par injections répétées de l'antigène environ laire se fait à l'aide d'un agent chimique, le
toutes les 3 semaines. La réponse anticorps est polyéthylène glycol (PEG), qui permet de fluidi-
suivie tout au long de cette période. Lorsqu'un fier les membranes plasmiques des cellules. Lors
animal bon répondeur a été identifié, un dernier de la reconstitution des membranes grâce à l'addi-
rappel est effectué par voie intraveineuse avant de tion de milieu de culture riche en sérum de veau
le sacrifier 4 jours plus tard. Il s'agit ici d'induire fœtal (SVF), les cellules en contact étroit peuvent
l'activation de cellules B mémoire spécifiques de fusionner pour former des hétérocaryons. Le ren-
l'antigène à un stade qui permette leur fusion dement de fusion est faible, moins de 1 % des cel-
avec les cellules de myélome. Généralement, les lules fusionnent et une cellule sur cent cinq génère
cellules immunocompétentes sont extraites à par- un hybride viable. Les lymphocytes n'ayant pas
Antigène
Déterminants
antigéniques
Fusion
Hybridomes
Anticorps monoclonaux
Fig. 2.2 Schéma récapitulatif de la production des anticorps monoclonaux.
Chapitre 2. Les anticorps comme réactifs 21
fusionné avec une cellule de myélome meurent de culture, permettant ainsi la synthèse d'ADN
progressivement dans les jours qui suivent la par la voie de sauvetage. Après la fusion, l'en-
fusion. Les cellules de myélome étant des cellules semble des cellules est ainsi distribué dans des
tumorales, il est par contre nécessaire d'éliminer puits de plaques de culture à raison d'une cellule
celles qui n'ont pas fusionné avec des lympho- par puits au maximum (principe de la dilution
cytes, afin de permettre aux hybridomes néofor- limite) et cultivé en milieu sélectif HAT (hypoxan-
més de se développer dans le milieu de culture. La thine, aminoptérine, thymidine) (fig. 2.3). Les
caractéristique mise à profit est que la lignée de hybridomes néoformés, seuls capables de se multi-
myélome utilisée est déficiente en hypoxanthine– plier, sont très instables génétiquement et seule-
guanine–phosphoribosyl–transférase (HGPRT). ment un sur cent cinq donne une cellule viable. Le
Cette enzyme intervient dans la voie de sauvetage milieu de culture sélectif est enrichi en facteurs de
de la synthèse des bases nucléotidiques. Les cel- croissance apportés par le SVF (20 %), des cock-
lules de myélome ne peuvent donc pas utiliser tails de cytokines contenant notamment de l'IL-6
cette voie pour répliquer leur ADN, surtout si et/ou des macrophages ou des splénocytes de
l'addition d'aminoptérine (A) dans le milieu de souris préalablement déposés dans les puits de
culture bloque la voie principale de synthèse des culture (cellules feeder).
nucléotides. Dans ces conditions, les cellules de La troisième étape consiste à sélectionner,
myélome qui n'expriment pas d'HGPRT fonc- après 15 à 20 jours environ, les hybridomes dont
tionnelle sont incapables de se diviser. Seules les le taux de croissance est optimal et qui sécrètent
cellules hybrides qui expriment une HGPRT fonc- un anticorps spécifique de l'antigène d'intérêt.
tionnelle provenant du génome du lymphocyte Lorsque les cellules arrivent à confluence, le sur-
peuvent alors se multiplier grâce à l'addition d'hy- nageant de chaque puits est analysé pour l'anti-
poxanthine (H) et de thymidine (T) dans le milieu corps et ses propriétés. Les cellules sont ensuite
AMP
HGPRT
Hypoxanthine IMP
Azasérine GMP
Aminoptérine
Synthèse
endogène
Aminoptérine
Thymidine TMP
Thymidine Kinase
sous-clonées par dilution limite, car elles peuvent d'ADN codant pour les séquences de reconnais-
être encore hétérogènes et génétiquement ins- sance des antigènes, associées aux régions
tables. Le but final est d'obtenir des populations constantes d'une immunoglobuline humaine. Ce
d'hybridomes homogènes, stables génétiquement vecteur est ensuite introduit par transfection
et fortes productrices d'anticorps. Généralement dans des cellules de mammifère. Les anticorps
une série de trois clonages successifs est nécessaire humanisés ainsi obtenus ont été développés pour
à l'obtention de clones à fort taux de croissance et leur usage maintenant largement répandu en thé-
de sécrétion. Après 3 mois environ, les hybrido- rapeutique humaine.
mes obtenus pourront être soit conservés conge- La purification des anticorps monoclonaux est
lés dans l'azote liquide, soit cultivés en plus plus facile que celle des anticorps polyclonaux, car
grands volumes afin de caractériser précisément le milieu de culture est beaucoup moins complexe
les anticorps qu'ils sécrètent (spécificité, affinité, que le sérum. Malgré tout, de nombreux efforts
isotype). Il n'est pas rare de perdre beaucoup de visent à augmenter les rendements de production
clones à l'issue de cette troisième étape, soit par et de purification des anticorps monoclonaux en
défaut de croissance, soit par défaut de produc- travaillant sur la qualité des milieux de culture et
tion d'anticorps consécutifs aux réarrangements des cellules productrices.
chromosomiques. C'est pourquoi le milieu doit
être très riche en facteurs de croissance (20 %
SVF). L'étape de sélection étant particulièrement Conservation des anticorps
longue et coûteuse, il convient d'adapter la straté-
gie à l'application attendue des anticorps mono- La stabilité des anticorps polyclonaux purifiés est
clonaux à produire. Si, par exemple, il s'agit de diminuée par rapport à ceux qui sont présents
produire des anticorps contre une petite molécule dans un immunsérum. Elle dépend largement de
type haptène, le nombre de cellules à cloner leur concentration (idéalement 5 à 10 mg/mL) et
pourra être réduit, car il est probable que peu de de leur méthode de purification et de conserva-
clones B différents seront produits à l'issue de tion. L'exposition à des pH extrêmes et à des solu-
l'immunisation de l'animal. De plus, il est pos- tions de force ionique forte ou faible durant les
sible de sélectionner très tôt seulement les cellules étapes de purification tend à réduire leurs capaci-
qui sécrètent un anticorps d'isotype particulier ou tés d'interaction avec l'antigène et à favoriser leur
encore de contre-sélectionner certains anticorps agrégation et leur précipitation au cours du temps.
présentant de fortes réactions croisées, donc peu La purification par chromatographie échangeuse
spécifiques. d'anions est la méthode la moins dénaturante. Les
La production des anticorps monoclonaux agrégats sont à l'origine de réactions non spéci-
dépend de la quantité désirée, de la capacité de fiques générant un bruit de fond lors des réactions
culture du laboratoire et des bioréacteurs dispo- immunologiques en raison de leur caractère
nibles. La productivité cellulaire peut aller hydrophobe. Il faut s'assurer de l'élimination de
jusqu'à 4 g/L grâce à l'utilisation de lignées tels agrégats avant utilisation, par une centrifuga-
murines ou de hamster chinois (Chinese hamster tion (1000 g, 20 minutes, 20 °C).
ovary, CHO). À noter qu'il est possible d'obtenir Les techniques de purification et de conserva-
par génie génétique des hybridomes interespèces tion des anticorps monoclonaux influencent
(rat–souris, souris–rat, souris–homme) bien que également leur stabilité, ce qui peut conduire à
ceux-ci soient plus instables génétiquement. Les des modifications de leur spécificité, de leur affi-
hybridomes souris–homme sont particulière- nité ou encore être à l'origine d'une réactivité
ment intéressants dans les applications thérapeu- croisée. Les anticorps monoclonaux de souris de
tiques car ils entraînent peu de réactions immunes classes IgM, IgG2b et IgG3 sont à cet égard les
chez le receveur. Des stratégies d'ingénierie plus sensibles.
moléculaire ont été développées afin de cloner Au-delà des recommandations du fournisseur, il
dans un vecteur d'expression les séquences est conseillé de vérifier régulièrement l'activité des
Chapitre 2. Les anticorps comme réactifs 23
anticorps. Pour un archivage de longue durée, les gène et une meilleure capacité de détection des
solutions d'anticorps peuvent être congelées à protéines d'intérêt (tableau 2.1).
−80 °C, préférentiellement en présence de 10 à
25 % de glycérol, sous forme d'aliquotes afin
d'éviter de répéter des cycles de congélation– Tableau 2.1 Intérêts respectifs des anticorps
décongélation. Après décongélation, l'activité des polyclonaux et monoclonaux
anticorps doit être contrôlée de nouveau. Les Propriétés Anticorps Anticorps
solutions diluées doivent être conservées dans des polyclonaux monoclonaux
récipients présentant de faibles capacités d'adsorp- Affinité + ++
tion des protéines. Avidité ++ +
Réseau de com- ++ ±
plexes immuns
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
26 Techniques immunologiques
Surnageant
Précipité
Antigène multivalent
Anticorps libres Absence d’anticorps Antigènes libres
en excès et d’antigènes en excès
dans le surnageant
Anticorps polyclonal
Piège de dosage :
Quantité de précipité
la quantité de
précipité est la
même pour ces
deux quantités très
différentes
d’antigène
Quantité d’antigène
des complexes immuns insolubles. La néphélémé- tie de la réaction est une agglutination (e.g. l'anti-
trie, par contre, mesure à côté du faisceau laser, corps fixé sur la particule capte l'antigène,
avec un angle précis, la lumière dispersée par les entraînant la formation d'un agglutinat) et les
complexes immuns insolubles, qui se comportent agglutinats formés se comportent comme des
comme des particules. La dispersion de la lumière particules de précipité.
par des particules en suspension est fonction de
leur taille. Les mesures se font dans la partie de la
Recommandations de mise en œuvre
courbe en excès d'anticorps et quantifient, selon
la loi de Rayleigh, la très forte amplification de la Les échantillons à doser ainsi que les antisérums
lumière dispersée vers l'avant aux petits angles doivent être rigoureusement limpides. Les mesures
lorsque le volume des particules augmente. se font dans la partie de la courbe en excès d'anti-
Actuellement, des techniques cinétiques réalisées corps pour réaliser une proportionnalité entre la
sur chaque échantillon permettent d'obtenir deux concentration d'immuncomplexes et la concentra-
mesures très rapprochées pour évaluer la forma- tion d'antigène. Malgré cette précaution, le piège
tion du précipité. Les techniques de néphélémé- majeur est la redissolution des précipités en large
trie et turbidimétrie particulaires, utilisant des excès d'antigène. Les automates déclenchent en
particules de latex sensibilisées de très petit dia- principe des redilutions, en se basant sur les varia-
mètre (entre 100 et 300 nm), permettent de se tions des résultats des mesures en cinétique.
rapprocher de la sensibilité d'une technique avec Toutefois, il faut parfois déclencher manuellement
marqueur (inférieure au mg/L). La première par- des dilutions supplémentaires.
Chapitre 3. Techniques sans traceur 27
Complexes antigène-anticorps
Source lumineuse
Détecteur
monochromatique
Complexes antigène-anticorps
Source lumineuse
monochromatique
70°
Lentille
optique
Dé
te
cte
ur
mettent le dosage des facteurs rhumatoïdes, de sont partagés entre les deux antigènes, il y a forma-
certaines sous-classes d'IgG et des chaînes tion d'un éperon entre les deux arcs de précipita-
légères libres. tion, traduisant une identité partielle (fig. 3.3).
L'électrosynérèse, encore appelée contre-
immuno-électrophorèse, est une variante de l'im-
munodiffusion double dans laquelle la migration
Immunodiffusion de l'antigène vers l'anticorps est focalisée dans un
Méthodologie champ électrique, dans un tampon de pH adapté.
L'anticorps migre vers la cathode (pôle négatif) en
Les méthodes de précipitation en milieu gélifié raison du courant d'électro-endosmose, alors que
permettent soit l'analyse qualitative d'un mélange le pH est choisi de telle sorte que l'antigène migre
d'antigènes, soit le dosage immunochimique d'un vers l'anode (pôle positif) : il rencontre donc l'an-
antigène donné. Cela suppose de disposer d'une ticorps et forme un arc de précipitation au niveau
part d'antigènes au moins divalents, ce qui exclut de la zone d'équivalence.
les haptènes, et d'autre part d'anticorps précipi- La technique d'immuno-électrophorèse a été
tants, le plus souvent de nature polyclonale. Le mise au point par Grabar et Williams. Le premier
milieu gélifié permet la visualisation du précipité temps consiste en une migration électrophoré-
antigène–anticorps. La densité du gel dicte la tique en gel d'agarose après dépôt de la solution à
dimension des mailles du gel devant permettre la analyser dans un puits, permettant de séparer les
libre diffusion des molécules à analyser mais pié- protéines antigéniques en différentes fractions
ger le précipité. selon leur charge. À la fin de la migration, une
rigole transversale est creusée dans la gélose et un
antisérum y est déposé. Ce deuxième temps
Recommandations de mise en œuvre
immunologique consiste donc en une double dif-
L'immunodiffusion double d'Ouchterlony est une fusion dans un plan perpendiculaire à l'axe de
analyse qualitative qui consiste à déposer des solu- migration électrophorétique. Aux zones d'équiva-
tions d'antigène et d'anticorps dans des puits creu- lence respectives, il se forme autant d'arcs de pré-
sés en regard dans un gel d'agarose. Les molécules cipitation qu'il y a de systèmes antigène–anticorps.
diffusent uniquement en fonction de leur masse L'immunofixation est une variante méthodo
moléculaire et il se forme des lignes de précipita- logique qui a l'avantage d'être plus rapide, un peu
tion pour chaque système antigène–anticorps aux plus sensible et en partie automatisable.
zones d'équivalence respectives. Cette méthode L'immunodiffusion radiale selon Mancini est
permet, en déposant plusieurs solutions antigé- une immunodiffusion simple bidimensionnelle
niques différentes en regard d'un antisérum quantitative. Un antigène soluble, déposé dans un
monospécifique au sein d'une rosace de six puits puits, diffuse radialement au sein d'un gel conte-
périphériques disposés autour d'un puits central, nant l'anticorps correspondant, qui doit donc être
d'analyser les identités entre les différents consti- précipitant et le plus souvent de nature polyclonale.
tuants. Lorsque deux antigènes identiques sont La réaction antigène–anticorps aboutit à la forma-
déposés dans des puits adjacents, ils sont reconnus tion de complexes insolubles visualisés sous forme
par les mêmes anticorps de l'antisérum, et les arcs d'un cercle autour du puits où a été déposé l'anti-
de précipitation sont continus, car il s'agit du gène. Cette réaction est caractérisée pour chaque
même système antigène–anticorps : on parle système par un rapport optimal entre les concentra-
d'identité. Au contraire, lorsque les deux antigènes tions respectives d'antigène et d'anticorps donnant
sont différents, ils sont reconnus par deux groupes une précipitation maximale (zone d'équivalence).
d'anticorps différents, et les deux arcs de précipita- La surface de l'anneau de précipitation au point
tion se croisent. On parle de non-identité, liée à final de diffusion, donc le carré de son diamètre, est
l'existence de deux systèmes antigène–anticorps proportionnelle à la concentration en antigène. La
totalement distincts. Enfin, si certains des épitopes réaction se fait dans des plaques dans lesquelles est
Chapitre 3. Techniques sans traceur 29
Dépôt 1 Dépôt 2
A A A B
Anti-A
Anti-A Anti-B
Précipité
B B A A’
Anti-B Anti-
A’
incorporé un étalonnage en trois points. Après dif- tillons à doser sont placés dans des puits pratiqués
fusion totale (24 à 72 heures), les diamètres des dans un gel contenant l'antisérum spécifique, puis
anneaux de diffusion sont mesurés et une droite soumis à une migration accélérée par électropho-
d'étalonnage est établie avec les valeurs de la rèse. À l'équivalence, les complexes antigène–anti-
gamme d'étalonnage (fig. 3.4). corps précipitent sous forme de fusées (rockets)
L'électro-immunodiffusion selon Laurell est dont la hauteur est proportionnelle à la concentra-
une méthode simple, rapide, reproductible et plus tion d'antigène à doser et est calculée par rapport
sensible que l'immunodiffusion radiale. C'est une à une gamme d'étalonnage incorporée dans la
immunodiffusion simple dans laquelle les échan- plaque.
30 Techniques immunologiques
mg/mL d’antigène X
1 2 3 4
Anneau de précipitation
Gélose
contenant
l’anticorps
anti-X
Fixation de l’antigène
recherché sur l’anticorps des
particules d’or
et sur un anticorps spécifique
présent sur la membrane
ou
d'hormone chorionique gonadotrope (HCG) attaché à la feuille d'or et l'analyte est apporté
dans les urines ; par la microfluidique (flux continu). Si l'analyte
– ces tests sont également utilisés pour l'orien- interagit avec le ligand, la concentration locale
tation diagnostique de maladies infectieuses moléculaire augmente dans la région immédiate
comme la peste, la dengue, le paludisme, les du ligand, ce qui modifie l'indice de réfraction
infections à streptocoques ou la grippe (écou- locale. Le changement d'indice de réfraction a
villonnage nasal). pour effet de changer l'angle suite à la perte de
l'énergie par résonance, ce qui est enregistré par
le système. La cinétique de l'interaction dépend
Mesure d'affinité par du nombre des interactions analyte–ligand
résonance plasmonique (fig. 3.8). Une unité de résonance (RU) corres-
de surface pond à un changement de 0,0001° de l'angle
donnant une intensité minimale de lumière
réfléchie. Cette modification correspond à un
Le phénomène de résonance plasmonique de
changement de concentration de l'ordre de 1
surface (surface plasmonic resonance ou SPR) se
pg/mm2 pour la plupart des protéines. Le
produit à la réflexion d'un rayon lumineux pola-
BIAcore® constitue une technique sensible de
risé à l'interface entre deux milieux d'indices de
mesure des interactions ligand–récepteur.
réfraction différents (fig. 3.6). Une infime
variation de l'indice de réfraction (changement
de masse sur la surface) se traduit par un chan- Méthodologie
gement d'angle de réflexion totale de l'onde Les ligands sont fixés par liaison covalente sur
réfléchie. La technologie BIAcore® exploite la une cellule (chip) selon leur nature : protéines,
SPR pour objectiver la cinétique d'interaction acides nucléiques, lipides, polysaccharides. Les
analyte–ligand par la modification de l'angle de analytes (récepteurs) en solution sont appliqués à
la lumière réfléchie sur la surface où se trouve
fixé le ligand.
sans protéine avec protéine
Dans le système BIAcore®, les milieux sont
Intensité
Lame de verre
Film d’or
Saturation
Dissociation
résonance
Signal de
Association
Régénération
Avantages/inconvénients
Avantages Inconvénients Agglutination immunologique
Pas de nécessité de marquer Appareillage coûteux
les molécules (ligand 1 comme ligand 2) réservé à des plate- Les réactions d'agglutination mettent en jeu le
Calculs de valeurs de Ka (constante formes mutualisées plus souvent un antigène présent à la surface
d'association)
d'une particule d'une taille comprise entre 0,1 et
36 Techniques immunologiques
L'agglutination directe (fig. 3.9) résulte de l'as- de réaliser une protéolyse des glycoprotéines de
sociation entre un anticorps agglutinant, d'isotype la surface cellulaire (papaïne, fucine, broméline,
IgG ou IgM, et un antigène à la surface de la par- trypsine) pour réduire le potentiel Zeta, ce qui
ticule. Elle se développe en tube, en microplaque, permet ainsi une meilleure accessibilité des anti-
sur lame ou sur une plaque cartonnée plastifiée. gènes en les démasquant.
Elle peut être qualitative ou quantitative, si une L'agglutination indirecte consiste à réticuler des
titration est effectuée, le titre étant l'inverse de la anticorps spécifiques non agglutinants fixés à la par-
dernière dilution de sérum à laquelle s'observe ticule par l'intermédiaire d'un anticorps secondaire
l'agglutination. anti-immunoglobuline (on parle d'antiglobuline).
On peut faciliter l'agglutination entre un anti-
gène particulaire et un anticorps non aggluti-
Recommandations de mise en œuvre
nant en diminuant la charge électrique, en
augmentant la constante diélectrique, ou en La technique d'agglutination sur lame ou sur
augmentant la force ionique du milieu. Ceci plaque se développe en mélangeant une goutte de
peut être obtenu en ajoutant des macromolé- sérum à une goutte de suspension de particules
cules (albumine bovine, dextran, Ficoll®) au sensibilisées, par agitation circulaire (3 à 5 minutes).
milieu réactionnel, pour favoriser les liaisons des La réaction est lue par la formation d'agrégats à
anticorps aux particules. Une autre solution est l'œil nu.
IgG
Particule
recouverte
d’antigène
IgM
Fig. 3.9 Exemple d'agglutination directe avec des anticorps agglutinants d'isotype IgG (en haut) ou IgM (en bas)
reconnaissant un antigène (en bleu) présent à la surface des particules agglutinées.
Dans l'agglutination passive, cet antigène n'appartient pas à la particule (en jaune) et y a été fixé pour utiliser la particule
comme support.
38 Techniques immunologiques
tion avec les anticorps pour la destruction de cel- peut être mise à profit in vivo pour la destruction
lules étrangères. Les tests diagnostiques exploitent de cibles cellulaires. Ceci a été à l'origine du déve-
cette réponse. loppement de nombreux anticorps monoclonaux
thérapeutiques. Actuellement, la majorité des
Méthodologie cibles antigéniques sont des récepteurs de surface
cellulaire.
Dans les tests utilisant le complément comme
Enfin, l'hémolyse est largement utilisée en bio-
révélateur (fixation du complément), le but est de
logie clinique pour explorer la fonctionnalité de
détecter et éventuellement de titrer des anticorps.
l'activation du complément.
Le sérum à tester doit d'abord être décomplé-
menté par incubation 30 minutes à 56 °C. Il est
ensuite mis en présence de l'antigène microbien, Recommandations de mise en œuvre
le plus souvent sous forme soluble et de complé- Comme mentionné précédemment, les sérums à
ment de cobaye. Si le sérum testé contient des tester doivent être décomplémentés afin de ne pas
anticorps, leur combinaison à l'antigène forme un interférer avec le système de révélation. Par ail-
complexe immun qui active et consomme le com- leurs, les sources animales de complément doivent
plément. La révélation de cette réaction se fait de être soigneusement titrées. Le tampon de faible
manière indirecte en ajoutant au test des hématies force ionique (i.e. Dextrose Gelatin Veronal Buffer
de mouton recouvertes d'anticorps anti-hématies ou DGVB) doit être ajusté pour son contenu en
de mouton (en conditions non hémaggluti- calcium (2,5 mM) et en magnésium (0,5 mM).
nantes). Si le complément n'a pas été consommé
(absence d'anticorps spécifiques), les anticorps Avantages/inconvénients
fixés sur les hématies l'activeront et une hémolyse
sera observée. L'absence d'hémolyse signe donc Avantages Inconvénients
un test positif. Faible coût Interférence des facteurs
Screening haut débit rhumatoïdes
L'activation du complément peut aussi être
Possibles réactions croisées
appliquée dans le typage HLA. Il s'agit de la tech- Faible sensibilité
nique sérologique en microplaque initialement
décrite par Terasaki. Les lymphocytes à tester sont
mis en contact avec des panels d'anticorps anti- Exemples d'applications
HLA de spécificité connue, prédéposés dans les La réaction de fixation du complément pour le
puits d'une plaque de microtitration. Après incu- dosage des anticorps sériques a longtemps été
bation, du sérum de lapin titré est ajouté comme appliquée aux sérodiagnostics d'infections bacté-
source de complément. Les lymphocytes sont riennes, virales ou parasitaires. Elle est à l'heure
lysés dans les puits où les anticorps se sont fixés sur actuelle de moins en moins utilisée du fait de ses
les antigènes HLA. Ceci est objectivé par la per- difficultés de réalisation et sa faible sensibilité. Elle
méabilité à un colorant normalement exclu des reste indispensable à certaines sérologies virales
cellules vivantes. (e.g. anticorps anti-adénovirus, anti-orthomyxovi-
La cytotoxicité dépendante du complément rus, antiparamyxovirus) ou bactériennes (e.g. anti-
(Complement Dependent Cytotoxicity ou CDC) corps antimycoplasmes).
Chapitre 4
Techniques avec traceurs
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
42 Techniques immunologiques
L'anticorps (ou l'antigène) est couplé à une peuvent se lier à une molécule de streptavidine.
enzyme soit de façon covalente, soit par des liaisons L'addition à la réaction finale de molécules de bio-
non covalentes biospécifiques. Pour le couplage tine bivalentes (liées à l'aide d'un agent réticulant
covalent, les méthodes les plus courantes utilisent le ou linker) couplées à l'enzyme et de streptavidine
glutaraldéhyde, le m-periodate ou des déri- permet la formation de volumineux complexes
vés de maléimide. L'utilisation d'esters de dans lesquels les sites restés libres de la streptavidine
N-hydroxysuccinimide (NHS) permet d'établir un reconnaissent la biotine de l'anticorps conjugué.
pontage entre l'enzyme et l'anticorps. Le système C'est le système streptavidine–biotine ou avidine–
biospécifique de conjugaison non covalente est biotine (Avidin–Biotin Complex ou ABC) (fig. 4.1).
basé sur l'interaction entre la biotine (vitamine Les enzymes les plus utilisées sont la peroxydase
soluble, appelée selon les pays vitamine B8, B7 ou et la phosphatase alcaline en raison de leur simplicité
H) et la streptavidine (purifiée à partir de d'utilisation et de leur sensibilité (tableau 4.1).
Streptomyces avidinii) ou l'avidine (isolée des blancs La peroxydase de raifort (horseradish peroxidase
d'œufs). Cette interaction a une affinité extrême- ou HRP), présente dans des racines de végétaux
ment forte de l'ordre de 10−14 M. Deux systèmes telles que les radis noirs, est une petite glycopro-
peuvent être utilisés. Dans le plus simple, la biotine téine de 40 kDa, ce qui lui permet de diffuser faci-
est conjuguée à l'anticorps et la streptavidine à l'en- lement dans les tissus ou les cellules lors des
zyme, toutes deux de façon covalente. Une alterna- marquages, tout en limitant les interférences avec
tive permet de développer un système la protéine conjuguée. Elle catalyse la réaction
d'amplification de la réaction antigène–anticorps. d'oxydoréduction suivante qui aboutit à former
En effet, jusqu'à quatre molécules de biotine un chromogène oxydé et de l'eau :
Techniques immunologiques
HRP TMB 3,3′,5,5′-tétramé- ELISA, IHC, ICC Soluble ou Bleu et devient 370 ou entre 620 +++ Non cancérigène Photosensible
thylbenzidine précipité jaune en présence et 650 nm
d'acide sulfurique 450 nm si stoppé
(pour arrêter la par H2SO4
réaction)
HRP OPD orthophénylène ELISA Soluble Orangé 450 nm ou 492 si ++ Disponible en Photosensible
diamine stoppé par HCl ou tablettes Toxique
H2SO4
HRP ABTS 2,2′-azino-di- ELISA Soluble Bleu–vert. La 405/450 nm +++ Stable Pas utilisable en
(3-éthylbenzthiazoline réaction peut être western-blot
sulphonate) stoppée par du
dodécylsulfate de
sodium
HRP AEC IHC Précipité Rouge NA ++ Moins toxique que
3-amino-9-éthylcarbazole la DAB
bon contraste
en hématoxyline
eosine
HRP 5-ASA acide 5-aminosa- ELISA Soluble Arrêt de la réac- 450 nm ++ Non toxique Préparation longue
licylique ou mésalazine tion par NaOH (médicament)
HRP 4CN 4-chloro-1-naphtol IHC Précipité Bleu noir NA + Peu de bruit de Peu sensible
fond
HRP DAB diaminobenzidine IHC, ICC, IB Précipité Marron foncé NA +++ Localisation Cancérigène
précise des
antigènes
HRP Orthotolidine ELISA Soluble Bleu 630 nm +++ Préparation
simple
HRP Luminol ELISA, IB (CS) Soluble Bleu. Émission à NA +++ Réutilisation Photosensible
413 nm, excita- plus facile des
tion à 355 nm membranes
Tableau 4.1 Suite
Enzyme Substrat/chromogène/ Technique État du Couleur Longueur Sensibilité Avantage Inconvénient
fluorigène produit final d'onde,
absorption
PAL pNPP paranitrophénol ELISA Soluble Jaune 405 nm +++ Substrat très Non recommandé pour
phosphate stable à tempé- les études en cinétique
rature ambiante Couleur pâle
(< 30 °C)
Révélation lente
PAL BCIP/NBT ELISA sans NBT Soluble ou Bleu–violet 670 nm en ELISA +++ Non photosensible
5-bromo-4-chloro- IB, IHC avec NBT précipité Soluble dans
3′-indolyphosphate/ l'alcool
nitro-bleu de tétrazolium
PAL FDP fluorescein ELISA Soluble Vert. Émission à NA +++ Très sensible, Photosensible
diphosphate 528 nm, excita- génération de
tion à 485 nm fluorescéine très
fluorescente
PAL DDAO ELISA, IB (CS) Soluble Rouge. Émission NA +++ Marquage stable Photosensible
Tableau 4.2 Caractéristiques des différents fluorochromes et tandems les plus utilisés en immunofluorescence
Fluorochrome Tandem Couleur Laser Longueur Longueur Sensibilité
d'excitation d'onde d'excita- d'onde d'émis-
tion (nm) sion (nm)
FITC : Non Vert Bleu 495 519 Moyenne
isothiocyanate de
fluorescéine
PE : Non Jaune Bleu 480/565 578 Forte
phycoérythrine
PE-Cy5 : Oui Rouge Bleu 480/565/650 670 Bonne
phycoérythriine-
cyanine 5
PE-Cy7 : Oui Rouge Bleu 480/565/743 767 Bonne
phycoérythriine-
cyanine 7
PerCP-Cy5.5 : Oui Rouge Bleu 490 675 Moyenne
peridinin-chlo-
rophylle/cyanine
5.5
ECD : phycoery- Oui Orange Bleu 486 620 Forte
thrine-Texas red
Cy5 : Cyanine 5 Non Rouge Rouge 650 670 Moyenne
Cy5.5 : Cyanine Non Rouge Rouge 675 694 Moyenne
5.5
APC : Non Rouge Rouge 650 660 Forrte
allophycocyanine
APC-Cy7 : Oui Rouge Rouge 650/755 767 Faible
allophycocya-
nine-cyanine 7
Pacific blue Non Bleu UV/violet 403 455 Faible
Krome Orange ®
Non Orange UV/violet 398 528 Forte
Horizon V500 Non Bleu-vert UV/violet 415 500 Forte
Le tritium présente une période radioactive de stabilité du marquage peut être très variable
12,3 ans et est un émetteur β de faible énergie. Sa d'un traceur à l'autre. Par ailleurs, il convient
détection dans des échantillons biologiques néces- de noter la production de nouveaux radio-élé-
site d'y ajouter un réactif scintillant dont l'émis- ments ou radiopharmaceutiques adaptés à l'em-
sion finale de photons est détectée par un ploi diagnostique et thérapeutique d'anticorps
compteur à scintillation. monoclonaux.
Comme pour les autres traceurs, il faut que le
marquage radioactif ne modifie pas la structure
moléculaire, en particulier l'immunoréactivité. Dosages immuno-
Après couplage, le traceur doit être utilisé rapi- enzymatiques (ELISA) ou
dement afin d'obtenir le signal optimal corrélé à immuno-fluorescents (FLISA)
son activité spécifique2. Il est à noter que la
La technique d'ELISA (Enzyme-Linked
2
L'activité spécifique correspond au nombre de désinté-
grations d'une substance radioactive par unité de temps et de
ImmunoSorbent Assay) aussi appelée EIA (Enzyme
masse. Immuno Assay) a été mise au point au début des
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 47
Tableau 4.3 Fluorochromes colorant les noyaux et utiles pour la mesure du cycle cellulaire, de la viabilité ou pour
identifier les cellules nucléées
Fluorochrome Propriétés Couleur Laser d'excitation Longueur d'onde Longueur d'onde
d'excitation (nm) d'émission (nm)
DAPI : diamidino Se lie aux régions Bleu UV 351 647
phénylindole riches en A-T
Peut pénétrer dans
les cellules intactes
IP : iodure de Intercalant marquant Rouge Bleu 505/540 620
propidium les cellules non
viables
Bet : bromure Intercalant marquant Bleu Bleu 320/518 605
d'éthidium les cellules non
viables
7-AAD : 7-amino- Intercalant marquant Bleu Bleu 546 647
actinomycine les cellules non
viables
Draq5 : 1,5-bis{[2- Marquage nucléaire Bleu ou Rouge Rouge 646 697
(dimethylamino) des cellules vivantes
ethyl]amino}-4,
8-dihydroxyan-
thracene-9,10-dione
Syto 16® Marquage nucléaire Vert Bleu 488 518
des cellules vivantes
CyTRAK Orange® Marquage nucléaire Orange Bleu 488 615
des cellules vivantes
années 1970 par deux chercheurs de l'université le type d'ELISA utilisé. On distingue plusieurs
de Stockholm, Eva Engvall et Peter Perlmann. types d'ELISA en fonction de la nature de la
Comme son nom l'indique, la technique ELISA molécule à doser et de la technique de révélation :
repose sur une réaction immunologique se dérou- ELISA direct, indirect, sandwich ou compétitif
lant sur un support solide et révélée par une réac- (tableau 4.4 et fig. 4.2).
tion enzymatique en phase liquide. La mesure de
la réaction colorée finale se fait à l'aide d'un spec-
Méthodologie
trophotomètre. Un fluorochrome est utilisé pour
révéler la réaction dans la variante FLISA Les techniques ELISA comportent différentes
(Fluorescence-Linked ImmunoSorbent Assay). étapes (fig. 4.3).
L'ELISA peut être réalisé à visée qualitative ou
quantitative selon que l'on utilise ou non une Adsorption des molécules (fig. 4.3 : ①)
courbe d'étalonnage (ou gamme étalon). Cette der- La première étape clé de l'ELISA repose sur l'im-
nière doit être réalisée avec une solution de concen- mobilisation de la molécule à adsorber sur un sup-
tration connue de la molécule que l'on cherche à port solide, le plus généralement des microplaques
doser. Le seuil de détection des ELISA quantitatifs (de 96 ou 384 puits) de polystyrène à fond plat à
est de l'ordre du pmol/L ou du ng/mL. Des haute capacité d'adsorption. Il s'agit principalement
dosages semi-quantitatifs peuvent être réalisés en d'une adsorption passive directe réalisée grâce à
comparant la densité optique obtenue avec l'échan- l'établissement de liaisons non covalentes de type
tillon à celle d'une série de calibrateurs. hydrophobe et ionique entre le plastique et les rési-
Les antigènes d'intérêt ou les anticorps spéci- dus non polaires ou ioniques des protéines. Cette
fiques sont immobilisés sur le support solide selon étape s'effectue classiquement en tampon alcalin
48 Techniques immunologiques
Tableau 4.4 Différents types d'ELISA utilisables selon l'analyte recherché : antigène ou anticorps
Analyte recherché Type de technique Analyte adsorbé Premier réactif Deuxième réactif Réactif soluble de
ELISA soluble soluble révélation
Antigène Antigène Anticorps de / Substrat/
détection marqué chromogène
Direct
Anticorps Anticorps Antigène marqué / Substrat/
chromogène
Anticorps Indirect Antigène Anticorps primaire Anticorps secondaire Substrat/
marqué chromogène
Antigène Sandwich Anticorps de capture Antigène Anticorps de Substrat/
détection marqué chromogène
Anticorps Antigène Anticorps Anticorps marqué Substrat/
chromogène
Compétitif
Antigène Anticorps Antigène Antigène marqué Substrat/
chromogène
ELISA sandwich
Gamme
blanc
Densité optique
Densité optique
négatif
Concentration Concentration
type Phosphate-Buffered Saline (PBS) pH 7,4 ou plusieurs molécules peuvent se fixer à l'anticorps
carbonate–bicarbonate pH 9,6 afin d'ioniser les primaire, ce qui amplifie le signal. Par ailleurs, cette
molécules en solution lors de cette étape. Toutefois, alternative évite les risques de perte de réactivité de
l'adsorption passive directe peut avoir des limites l'anticorps primaire suite à son couplage chimique
(faible capacité d'absorption, mauvaise orientation direct avec une enzyme ou la biotine. Dans l'ELISA
de la protéine adsorbée, dénaturation, contamina- sandwich, en règle générale, l'anticorps de capture
tion par d'autres protéines…) et des alternatives ont est un anticorps polyclonal, alors que l'anticorps de
dû être développées. Il s'agit par exemple de l'utili- détection est un monoclonal.
sation de plaques pré-adsorbées avec des protéines A
ou G du staphylocoque très affines pour les frag- Révélation (fig. 4.3 : ⑤)
ments Fc des immunoglobulines, ou recouvertes de Après lavages, l'étape ultime de l'ELISA est la révé-
streptavidine permettant la fixation d'antigènes bio- lation consistant en l'ajout du substrat et du chro-
tinylés. Il est possible également d'utiliser un sup- mogène spécifiques de l'enzyme. Cette étape est
port chimiquement activé présentant des réalisée dans un tampon adapté à l'activité enzyma-
groupements hautement réactifs permettant d'éta- tique du système de révélation. La mesure de la den-
blir des liaisons covalentes entre la microplaque et sité optique peut être réalisée en cinétique ou en
l'antigène ou l'anticorps de capture. Il est nécessaire point fixe après arrêt de la réaction par ajout d'un
de procéder à un lavage en tampon type PBS ou tampon acide ou basique détruisant l'activité enzy-
TBS (Tris-Buffered Saline) afin d'éliminer le maté- matique. À ce stade, la quantité de signal émis est
riel non adsorbé. Des détergents doux (comme le proportionnelle à la quantité de la molécule à doser.
Tween-20®) sont classiquement ajoutés à faible Il est à noter que d'autres systèmes de révéla-
concentration (0,05 %) pour faciliter les lavages. tion peuvent être employés, notamment de type
fluorométrique ou chimioluminescent en fonc-
Saturation du support adsorbant (fig. 4.3 : ②) tion du type de substrat utilisé. Dans ces cas, le
Après l'étape de liaison au support, il est néces- support d'immobilisation doit être compatible
saire de neutraliser les zones du support restées avec le moyen de détection, notamment un
libres. Il s'agit de l'étape de saturation qui permet support opaque pour une révélation en
d'éviter toute adsorption ultérieure de matériel chimioluminescence.
présent dans l'échantillon à doser ou lors de l'ajout
des autres réactifs. Elle s'effectue par ajout de Expression des résultats (fig. 4.3 : ⑥)
tampon riche en protéines (type PBS + albumine Selon le type d'ELISA utilisé, différentes courbes
bovine sérique) suivi d'une étape de lavage. de titration peuvent être obtenues.
Première réaction antigène–
anticorps (fig. 4.3 : ③) Recommandations de mise en œuvre
Après la saturation de la plaque et des lavages, le Pour des résultats exploitables en ELISA et éviter
premier réactif soluble est déposé dans les puits et la perte de sensibilité, il est nécessaire de trouver
la plaque est incubée. Pendant cette étape, les un bon équilibre entre le signal spécifique émis et
antigènes ou les anticorps en solution vont se lier le bruit de fond non spécifique. Ce bruit de fond
à la molécule adsorbée. Dans les ELISA directs, ce résulte de l'adsorption de protéines contaminantes
premier réactif est couplé à l'enzyme. non éliminées lors des lavages et capables de fixer
de manière non spécifique les réactifs de révéla-
Deuxième réaction antigène– tion. L'obtention d'un rapport signal/bruit accep-
anticorps (fig. 4.3 : ④) table nécessite d'optimiser l'étape de saturation,
Après plusieurs lavages, sauf dans les ELISA directs, d'adapter les concentrations des réactifs de capture
le deuxième réactif soluble, couplé à l'enzyme, est et de révélation et de prêter un soin particulier aux
déposé et la plaque est incubée. Dans les ELISA lavages. Le bruit de fond résultant des différentes
indirects, ce réactif est un anticorps secondaire dont étapes de manipulation est contrôlé par la réalisa-
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 51
tion de puits dits blancs pour lesquels l'ensemble • En recherche : le dosage de protéines d'intérêt
des étapes réactionnelles sont effectuées en l'ab- dans des surnageants ou lysats cellulaires est réa-
sence de la molécule à doser remplacée par une lisé fréquemment en ELISA.
solution tampon de type PBS. La densité optique • Applications industrielles et vétérinaires : ces
des puits blancs est soustraite de la valeur obtenue techniques sont également appliquées dans le
pour les puits de dosage. La densité optique des contrôle qualité des produits finis ou en cours
puits blancs doit être inférieure à 0,1. Si la densité de production, ainsi qu'en épidémiologie et
optique des échantillons à doser dépasse la valeur contrôle vétérinaire.
de 2, les résultats ne sont plus interprétables car • En clinique : l'ELISA est très utilisée pour le
l'absorbance n'est plus proportionnelle à la sérodiagnostic des maladies infectieuses et
concentration (domaine de validité de la loi de pour le diagnostic et le suivi de maladies
Beer-Lambert). Il est alors nécessaire de diluer les auto-immunes.
échantillons et d'effectuer un nouveau dosage.
réalisation des immunodosages de substances pré- est marqué à l'iode-125 et utilisé comme traceur.
sentes à des concentrations très faibles dans les L'antigène de l'étalonnage ou de l'échantillon est
liquides biologiques et les tissus. Il a été progressive- pris en sandwich entre les deux anticorps. L'excès
ment supplanté par l'emploi de marqueurs non isoto- de traceur est éliminé par une étape de lavage. La
piques (enzymatiques et luminescents) offrant une radioactivité mesurée est proportionnelle à la quan-
plus grande facilité d'emploi sans les restrictions tité d'antigène présente dans l'échantillon.
réglementaires liées à la manipulation des produits
radioactifs. La sensibilité des techniques radio-
immunologiques est de l'ordre du pmol/L ou du Méthode par immunoprécipitation en phase
ng/mL. Cette sensibilité permet le dosage de cer- liquide (e.g. test de Farr pour le dosage des
taines hormones stéroïdes, de vitamines, de médica- auto-anticorps anti-ADN double brin)
ments, de marqueurs tumoraux ou d'auto-anticorps. Cette méthode permet de rechercher des anticorps à
l'aide d'antigènes purifiés marqués à l'iode-125. Les
Méthodologie complexes immuns (Ag*-Ac) formés dans le milieu
réactionnel sont précipités par l'addition de polyé-
L'utilisation des trousses d'immuno-analyse relève thylène glycol (PEG) ou de particules recouvertes
d'une décision administrative autorisant la mani- de protéine A (spécifiques des immunoglobulines
pulation des substances radioactives. Elles com- humaines et des anticorps de souris). Après centrifu-
portent des protéines ou des anticorps couplés à gation et élimination du surnageant, la quantité de
un radio-isotope tels que l'iode-125 (125I) ou le radioactivité dans le précipité est proportionnelle à
tritium (3H). L'activité radioactive manipulée est la concentration en anticorps de l'échantillon.
de l'ordre de 10 à 100 kilo-becquerels (kBq). La Cette technique peut être appliquée au dosage
détection radiométrique des échantillons biolo- de petits antigènes ne présentant qu'un épitope,
giques est réalisée dans des compteurs gamma comme les haptènes, des peptides ou certains médi-
équipés de détecteurs associés à des logiciels de caments. On applique alors le principe de la compé-
traitement des données appropriés. tition entre cet antigène recherché et le même
On distingue plusieurs types de RIA. marqué à l'iode-125 ajouté au milieu réactionnel
en même temps que des anticorps spécifiques. La
Méthode par compétition quantité de radioactivité mesurée dans les com-
(ou par défaut d'anticorps) plexes immuns précipités est inversement propor-
Le principe repose sur la compétition entre des molé- tionnelle à la quantité de l'antigène recherché.
cules d'antigène marquées (Ag*) et non marquées
(Ag) d'une même espèce vis-à-vis d'un nombre donné Recommandations de mise en œuvre
et limité de sites de liaison anticorps. L'anticorps (Ac)
est fixé sur une phase solide, paroi de tube ou billes de Une gamme d'étalonnage est indispensable pour
polystyrène. L'excès de traceur est éliminé après incu- tout dosage radio-immunologique pour convertir
bation par une étape de lavage. La quantité des formes les mesures de radioactivité (coups par minute ou
liées (Ag*-Ac) est inversement proportionnelle à la cpm) en concentration. Elle repose sur la mesure
quantité de l'analyte non marqué (Ag) présent dans de la radioactivité du bruit de fond (liaison non
l'échantillon. Les trousses de dosage fournissent le spécifique), de celle des échantillons (Bo) et de
support solide (tubes, billes), l'analyte marqué et une celle des points de gamme (B) permettant de cal-
gamme étalon couvrant le domaine de mesure. culer la capacité de liaison de l'analyte selon la for-
mule suivante :
Méthode sandwich
Le principe du dosage s'appuie sur la reconnais- [cpm (étalon ou échantillon) -
sance de l'antigène dosé par deux anticorps spéci-
B cpm (liaison non spécifique)]
fiques de deux sites antigéniques distincts et = ´ 100
accessibles. Un premier anticorps est adsorbé sur un Bo ( % ) [cpm (étalon zéro) -
support solide (tube ou bille). Le second anticorps cpm (liaison non spécifique)]
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 53
Avantages/inconvénients Immunodosages
multiplex sur billes
Avantages Inconvénients
Faible encombrement Utilisation réglementée des
stérique du tritium radio-isotopes (e.g. précaution
La technologie d'immunodosages multiplex
Grande spécificité d'utilisation, habilitation des personnels utilise des microbilles de polystyrène de 5 à
Grande sensibilité de la et des locaux, gestion des déchets) 8 μm (selon les fournisseurs), recouvertes de
détection Demi-vie courte de l'iode-125 molécules (e.g. peptides, anticorps, acides
Grande stabilité du signal Variation des contrôles de qualité
émis par le tritium internes des trousses de RIA nucléiques) fixées de manière covalente par une
Interférence de la bilirubine, de liaison entre le groupement amine de la molé-
l'hémoglobine, voire des lipoprotéines cule et les fonctions carboxyliques des micro-
billes. L'originalité de cette technique repose
Exemples d'applications sur la détection simultanée de plusieurs analytes
Les techniques RIA ont été supplantées par les (jusqu'à 100) à partir d'un faible volume
techniques ELISA. Il subsiste quelques domaines d'échantillon, d'où le terme de multiplexage.
d'application en hormonologie, cancérologie Le principe est de capturer l'analyte avec les
(marqueurs tumoraux), auto-immunité (anticorps billes et de révéler cette capture avec un traceur
anti-ADN natif) ou pharmacologie (dosage de fluorescent, selon une technique de type sand-
médicaments et de toxiques). wich (fig. 4.4).
Le colorant
fluorescent
est dans la
masse de
chaque bille
Immunodosage :
anticorps de capture sur
la bille puis révélation par
un anticorps fluorescent
Transfert (fig. 4.5 : ➁)
3
Cette dénomination est un clin d'œil en référence à la
Après séparation, les protéines sont transférées
technique de séparation et d'identification des ADN déve-
loppée par Sir Edwin Mellor Southern. Par extension amu- sur une membrane de nitrocellulose ou de
sante, la détection des ARN a été appelée northern-blot et polyvinylidene difluorure (PVDF) placée en
celle des protéines western-blot. Il n'y a pas d'eastern-blot ! contact direct avec le gel. Ce transfert est réalisé
56 Techniques immunologiques
1
2 3 4
Protéines contrôle Extrait protéique
(PM connu) à analyser Transfert Saturation Marquage
Enzyme
Substrat
Produit coloré ou fluorescent
Anticorps primaire
5
Anticorps secondaire
par l'application d'un champ électrique permet- Saline (PBS) ou Tris-Buffered Saline (TBS) sup-
tant la migration électrophorétique des protéines plémenté d'un détergent doux comme le Tween-
depuis le gel vers la membrane ou par transfert 20® ou le NP-40 à faible concentration (0,05 %).
passif (plus long et rendement plus faible). Les Les étapes de lavages sont primordiales pour assu-
protéines fixées sur la membrane sont l'empreinte rer un rapport signal/bruit de fond optimal.
en miroir des protéines ayant migré dans le gel.
Révélation et analyse
Saturation et lavages (fig. 4.5 : ➂) des résultats (fig. 4.5 : ➃ et ➄)
Les divers types de membranes utilisées ont une La révélation de la(des) protéine(s) d'intérêt
forte affinité pour les protéines et une étape de fixée(s) sur la membrane est effectuée par incuba-
saturation des surfaces non occupées est indispen- tion dans un bain d'anticorps, soit directement en
sable afin d'éviter la fixation non spécifique des utilisant un anticorps spécifique couplé à un tra-
anticorps de révélation. Cette étape est cruciale ceur, soit indirectement en utilisant un anticorps
pour obtenir un bon rapport signal/bruit de fond secondaire reconnaissant le domaine Fc de l'anti-
et une bonne sensibilité de la technique. Les tam- corps primaire. Plusieurs lavages sont nécessaires
pons de saturation sont réalisés généralement à entre chaque incubation de la membrane avec les
base de lait (riche en caséine) ou de sérum (riche anticorps. Le traceur couplé à l'anticorps est une
en albumine). À l'issue de l'étape de saturation, la enzyme (peroxydase ou phosphatase alcaline) ou
membrane est lavée pour éliminer tout matériel un marqueur luminescent ou fluorescent. Les
non fixé. Comme pour la technique ELISA, les réactions chromogéniques sont révélées directe-
tampons de lavage sont de type Phosphate-Buffered ment par observation immédiate de la membrane.
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 57
Les substrats chimioluminescents nécessitent l'uti- sible d'intégrer et ainsi de quantifier les bandes
lisation d'un film sensible aux photons ou d'un obtenues après révélation grâce à un scanner ou
appareillage comportant une chambre noire et une caméra et de comparer les quantités relatives
une caméra haute sensibilité (CCD ou CMOS). de protéines dans plusieurs conditions analytiques.
La lumière émise est détectée grâce à un appareil- Il faut prendre soin d'utiliser un contrôle de
lage dédié. La révélation chromogénique est la charge protéique, représenté par une protéine,
moins coûteuse mais présente les désavantages l'actine par exemple pour des extraits cellulaires,
d'être peu sensible et d'une perte de signal sur le dont le taux ne varie pas quelles que soient les
long terme. L'alternative de la révélation chimio- conditions analytiques. La détermination de la
luminescente offre l'avantage d'une meilleure sen- masse moléculaire4 en SDS–PAGE de protéines
sibilité par l'utilisation de films recouverts de contenues dans un échantillon nécessite la sépara-
molécules photoréactives. Cette technique de tion sur le même gel et le transfert sur la même
révélation est très largement employée. Plus membrane de protéines de masse moléculaire
récemment, des techniques de révélation avec tra- connue (standard de migration). Ces protéines
ceurs fluorescents ont été développées mais elles peuvent être pré-colorées pour permettre leur
nécessitent un appareillage de détection dédié. visualisation directe sur le gel et la membrane
Elles offrent cependant l'avantage de permettre après transfert. Le temps de migration électropho-
l'utilisation de plusieurs fluorophores pour la rétique des protéines est inversement proportion-
détection simultanée de plusieurs protéines sur la nel au logarithme de leur masse moléculaire.
même membrane plutôt que des révélations suc- L'établissement d'une courbe d'étalonnage à par-
cessives qui peuvent être effectuées avec les autres tir de ces standards permet de mesurer la masse
techniques. moléculaire de la protéine d'intérêt après évalua-
tion de sa mobilité relative (Rf).
Recommandations de mise en œuvre
Avantages/inconvénients
De nombreux paramètres entrent en jeu pour le
bon déroulement d'un western-blot. Le pH des
Avantages Inconvénients
tampons et la composition du gel influencent la
mobilité des protéines, tandis que l'efficacité du Analyse de complexes Risque de perte de réactivité
protéiques, de plusieurs vis-à-vis des anticorps de
transfert dépend de la nature des protéines, des protéines simultanément, des révélation. Lors de séparations
tampons assurant la conduction, de la force du modifications post- électrophorétiques en conditions
courant électrique (généralement faible force traductionnelles des protéines dénaturantes, seuls les épitopes
(e.g. phosphorylation) linéaires séquentiels persistent
ionique et faible courant) et de la durée du
Détermination de la masse Conditions optimales de
transfert. moléculaire, de l'état de migration et de transfert à
La composition des tampons de lavage, la déter- glycosylation des protéines déterminer pour chaque type de
mination des concentrations optimales des anti- Large application analytique protéines à analyser
dépendant du vaste choix Risque de réactivité non
corps primaires et/ou secondaires sont également d'anticorps spécifiques spécifique des anticorps
critiques pour un bon rapport signal/bruit de Mesure quantitative possible secondaires en technique de
fond et une sensibilité adéquate. Le seuil de sensi- révélation indirecte
bilité du western-blot est de l'ordre du nano- Durée technique beaucoup plus
longue qu'un ELISA et moins
gramme (ng) de protéines. L'optimisation des standardisable
méthodes de détection, notamment à l'aide de
fluorophores infrarouge, permet de descendre
jusqu'au picogramme (pg). L'intensité des bandes
spécifiquement révélées est directement propor- 4
La masse moléculaire (MM) ou poids moléculaire
tionnelle à la quantité d'anticorps ayant reconnu (PM), pour Molecular Weight (MW), est ici mesurée de
l'antigène à la surface de la membrane, et donc à façon relative par rapport à la migration des peptides dans
la quantité de protéines d'intérêt fixées. Il est pos- le gel (Mr, relative molecular mass).
58 Techniques immunologiques
Méthodologie
La technique d'immunofixation se déroule en plu- Puces à protéines/protein
sieurs étapes. La première étape consiste à déposer arrays
l'échantillon à analyser dans les puits d'un gel
d'agarose et à y faire migrer les protéines sous l'effet Les puces à protéines ou biopuces correspondent à
d'un champ électrique. La mobilité des protéines l'assemblage organisé de quelques dizaines à
est fonction de leur charge globale et dans une quelques centaines de peptides ou d'anticorps sur
moindre mesure de leur taille. À l'issue de la migra- une surface miniaturisée, de quelques centimètres
tion, un antisérum polyclonal dirigé contre les anti- carrés en général. Dans sa version la plus courante,
gènes protéiques à caractériser est appliqué sur le une puce à protéines est utilisée pour détecter et
gel. Les anticorps diffusent dans le gel et entraînent quantifier les ligands de ces protéines dans un
la formation de complexes immuns précipitant avec échantillon biologique. Les applications médicales
les protéines reconnues. Ces complexes immuns en développement de cette technologie concernent
sont retenus dans le gel après lavage pour éliminer le diagnostic et le suivi de maladies auto-immunes,
les protéines non fixées ou non précipitées et leur allergiques, infectieuses et malignes. En recherche
fixation est assurée par un tampon acide. Les bandes fondamentale, les puces à protéines permettent
de précipité sont révélées par un colorant des pro- l'identification de spectres d'activité enzymatique,
téines, tel que l'amidoschwarz ou le violet acide. Au d'épitopes et d'inhibiteurs biologiques. Les deux
chapitre 9, la figure 9.2 illustre cette méthode. intérêts majeurs des puces à protéines sont :
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 59
• l'obtention simultanée d'un grand nombre de L'échantillon (e.g. sérum, urine, surnageant de
données biologiques pour un échantillon culture) est déposé à la surface de la biopuce.
donné ; Après incubation et lavage, la présence dans
• le faible volume d'échantillon et d'analyte l'échantillon de ligands pour les protéines de la
nécessaire. puce est révélée par des anticorps spécifiques liés à
Chaque peptide testé correspond à un para- un traceur (e.g. enzymes, fluorogènes). Il existe
mètre distinct, d'où le nom de technique de bio- également des méthodes de détection sans tra-
puces ou multiplex, à ne pas confondre avec les ceur, associées à des logiciels de biomathématique,
multiplexes sur billes. Lorsque le support est basées sur la mesure de l'impédance optique ou la
recouvert d'anticorps on parle de puce à anticorps spectrométrie de masse.
ou antibody array (fig. 4.6).
Recommandations de mise en œuvre
Méthodologie
Les conditions techniques doivent tenir compte de
Le support le plus courant est le verre. Les pep- la stabilité des ligands de la puce. En immunologie
tides sont généralement produits individuellement médicale, le sérum destiné à rechercher des immu-
et immobilisés secondairement par une suite noglobulines avec une méthode de biopuce doit
d'étapes chimiques de fonctionnalisation de la être conservé à + 4 °C pendant 48 h ou congelé
surface de verre, pulvérisation et séchage des pep- au-delà.
tides aux emplacements attribués et formation de Chaque peptide présent sur la puce est généra-
liaisons covalentes entre le peptide et le support. lement fixé en duplicat ou en triplicat. Le signal
Une méthodologie alternative consiste à synthéti- de chaque spot est analysé séparément, accepté
ser les molécules d'intérêt directement sur le sup- ou rejeté. Le résultat de chaque peptide corres-
port. D'autres types de supports existent comme pond à la moyenne des résultats du duplicat ou
les gels de polyéthylène glycol, des surfaces recou- du triplicat. L'intensité de fixation des ligands est
vertes d'or ou des membranes de nitrocellulose. mesurée de manière semi-quantitative, ou quan-
titative si une courbe de calibration est dispo-
nible pour l'analyte considéré. Compte tenu du
nombre important de peptides analysés simulta-
nément et de l'intérêt de décrire un profil de
réponse, l'intensité mesurée est souvent visuali-
sée par un code couleur. Dans certains cas, des
algorithmes prenant en compte les réponses à
plusieurs marqueurs peuvent être développés.
Pour chaque support, il faut réaliser des contrôles
négatifs et positifs.
Avantages/inconvénients
Avantages Inconvénients
Témoin Témoin Quantité d'échantillon biologique Mise au point et interprétations
négatif positif de 50 μL à 10 mL nécessitant une expertise
Rapidité d'obtention des importante
Fig. 4.6 Exemple de puce à anticorps détectant des résultats Panel de peptides fixe et captif
phosphoprotéines. Tests multiplex rendant compte du fabricant
Les témoins positif et négatif indiquent le bon de la complexité des systèmes Sensibilité et spécificité à définir
fonctionnement de la technique. Chaque couple de spots étudiés Appareillage spécifique en
correspond à une phosphoprotéine particulière, contenue Adaptables à de nombreux fluorimétrie
dans l'échantillon testé et reconnue par les anticorps de la domaines
membrane.
60 Techniques immunologiques
Hydrofocalisation du flux cellulaire Lentille Masque bloquant le faisceau laser en l’absence de cellules
dans le liquide de gaine
Si les cellules à étudier sont adhérentes à un FSC) est proportionnelle à la taille de la cellule. La
support ou constituent un tissu, il est indispen- lumière mesurée perpendiculairement à l'axe de la
sable de les détacher de leur support par traite- lumière incidente (side scatter ou SSC) dépend de
ment mécanique (grattage), chimique (EDTA) la structure (granularité, rapport nucléocytoplas-
ou enzymatique (trypsine), ou de dissocier le mique) de la cellule.
tissu (par dilacération mécanique ou par la Après excitation par le faisceau laser, indépen-
trypsine ou la collagénase). Ces traitements damment de cette diffraction, les cellules
peuvent plus ou moins endommager la surface émettent une fluorescence naturelle (autofluo-
cellulaire. rescence) et surtout un signal correspondant à
Le système optique est composé de la source leur marquage éventuel par un fluorochrome.
lumineuse, d'un système de filtres et de miroirs Les lasers argon qui ont une longueur d'onde
conduisant la lumière émise et diffractée indivi- d'émission de 488 nm sont fréquemment instal-
duellement par chaque cellule vers des photomul- lés sur les cytomètres. Aux instruments reposant
tiplicateurs transformant les signaux lumineux en sur la longueur d'onde d'excitation d'un seul
signaux électriques. Dans la chambre d'analyse, la laser (argon le plus souvent) ont succédé des
veine fluidique est traversée par le faisceau lumi- cytomètres disposant de deux ou trois lasers,
neux d'un ou plusieurs lasers. La technologie laser voire plus. Ceci a permis d'élargir la gamme des
est utilisée pour sa puissance, sa focalisation et sur- fluorochromes utilisables, excitables à des lon-
tout son monochromatisme. gueurs d'onde différentes et a conduit au déve-
Dans tous les cas, la lumière incidente est diffu- loppement de solutions innovantes pour les
sée en fonction de la morphologie et de la struc- bancs optiques (fig. 4.8).
ture de chaque cellule. La lumière diffusée dans L'autofluorescence des cellules sert à régler le
l'axe de la lumière incidente (forward scatter ou voltage des photomultiplicateurs qui recueillent
Représentation schématique
de deux systèmes de bancs
optiques de cytomètres à trois
lasers ( ) pour de la
cytométrie en huit couleurs (en
haut) ou dix couleurs (en bas)
Fig. 4.8 Schémas simplifiés des solutions développées par les industriels de la cytométrie en flux pour gérer le recueil
des fluorescences.
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 63
ensuite les signaux émis par les cellules marquées. du paramètre étudié (en canaux) et en ordon-
Idéalement, plus de 90 % des cellules non mar- née le nombre de cellules par canal. Comme
quées doivent pouvoir être détectées, au plus près chaque cellule peut émettre plusieurs signaux
du premier canal de mesure de la lumière émise, différents, il est possible de combiner, sur un
pour chaque longueur d'onde mesurable par l'ins- même graphique, deux paramètres indépen-
trument utilisé, donc selon toutes les sources dants. Dans un graphique en nuage de points
d'excitation disponibles. ou histogramme biparamétrique, chaque cel-
Les signaux lumineux émis par les cellules lule est placée en fonction de la valeur des deux
fluorescentes sont focalisés et séparés en fonc- paramètres mesurés et représentée par un point.
tion de leur direction et de leur longueur d'onde, Le nombre de cellules présentant les mêmes
au moyen de miroirs dichroïques et de filtres, valeurs peut être visualisé dans une troisième
pour être acheminés vers des photodétecteurs dimension par des courbes de niveaux ou des
(photomultiplicateurs ou PMT) qui transfor- intensités de couleur. Pour chaque type de
ment les signaux lumineux en signaux élec- représentation, on peut utiliser une échelle
triques et les amplifient. Chaque photodétecteur linéaire ou logarithmique (4 à 7 décades). Il est
est désigné par un code (e.g. FL1, FL2) corres- surtout possible de conditionner l'acquisition
pondant à un intervalle de longueur d'onde pré- d'un paramètre à celle d'autres paramètres au
cis. Les miroirs dichroïques réfléchissent moyen, en particulier, de zones d'intérêt
sélectivement une partie de la lumière qu'ils (fenêtres ou gates) définies par l'utilisateur ou
reçoivent. Ainsi, un miroir dichroïque 488 réflé- par des logiciels dédiés et générées en cascade.
chit les lumières de longueur d'onde inférieure Ainsi, au sein d'une population hétérogène, il
ou égale à 488 nm et transmet les émissions de est possible de cibler les informations prove-
longueur d'onde supérieure vers les miroirs nant de plusieurs populations spécifiques. Il est
dichroïques suivants. Après ce tri, le signal lumi- également possible, pour une définition opti-
neux passe dans un filtre passe-bande (band-pass male multiparamétrique des composants d'une
filter). Par exemple, un filtre passe-bande 488 suspension cellulaire donnée, de développer
de 50 nm focalise la lumière dans un intervalle des analyses mathématiques en composantes
de longueur d'onde de 488 ± 25 nm (463 à principales (ACP ou PCA)5.
513 nm). Différents filtres passe-bande, éven-
tuellement interchangeables, sont utilisés en Recommandations de mise en œuvre
fonction du modèle de cytomètre. Les photodé- Le bon fonctionnement du cytomètre est vérifié
tecteurs transforment enfin la lumière collectée chaque jour à l'aide de billes fluorescentes cali-
en une impulsion électrique dont l'intensité est brées qui permettent de détecter des anomalies
proportionnelle à l'énergie lumineuse reçue. Ces liées à l'instrument comme la baisse de puissance
signaux sont amplifiés avant d'être digitalisés par du faisceau laser ou une variation de son aligne-
un convertisseur analogique/digital qui asso- ment. En pratique, ces anomalies sont maintenant
cie à l'amplitude de chaque signal un numéro rares et leur correction éventuelle revient au
de canal, dont la valeur codée en bits est utili- fabricant.
sable par le système informatique qui stocke et
traite les données.
Lors de l'acquisition, les nombreux signaux
reçus pour chaque événement détecté par le
5
Analyses mathématiques en composantes principales
(ACP) ou, en anglais, Principal Component Analysis
faisceau laser sont classés au fur et à mesure de
(PCA). L'analyse en composante principale permet de clas-
leur apparition et participent ainsi à la constitu- ser les paramètres d'une série de signaux recueillis au sein
tion de graphiques de répartition des cellules d'une population hétérogène en fonction de leur valeur
(fig. 4.9). Les données reçues peuvent être pré- représentative de chaque sous-population et de déterminer
sentées sous forme d'histogramme de distribu- les critères séparant au mieux les différents sous-ensembles
tion de fréquence avec en abscisse l'amplitude de la population.
64
Techniques immunologiques
Fig. 4.9 Exemples de représentation de l'analyse de résultats de cytométrie en flux.
Ligne du haut, graphe de gauche, représentation des cellules d'un échantillon de moelle osseuse en fonction de leur taille (FSC) et de leur granularité (SSC) et dessin d'une
fenêtre (A) d'élimination des débris. Les trois graphes suivants montrent les mêmes cellules (fenêtrage sur A) en fonction de l'expression de CD45 (marqueur panleucocytaire) et
de leur granularité (SSC) avec trois représentations différentes : simple biparamétrique, densité cellulaire et contours.
Ligne du milieu, au centre, graphe CD45/SSC dans lequel les trois populations majoritaires sont colorisées. À gauche, représentation monoparamétrique de l'expression de CD15
sur l'ensemble des cellules (fenêtre A). À droite, représentation monoparamétrique de l'expression de CD3 sur les lymphocytes (fenêtre magenta).
Ligne du bas, expression de CD19 et CD3 en fonction de la granularité des cellules (SSC) avec le code couleur de l'histogramme central. Les marqueurs sont exprimés sur des
lymphocytes (magenta). Le troisième histogramme est une représentation biparamétrique des lymphocytes (fenêtre magenta) CD4 et CD8. Les lymphocytes doublement négatifs
(--) sont des lymphocytes B et des cellules NK. L'histogramme de droite montre l'expression de CD15 et CD10 sur les granuleux mais pas sur les monocytes, avec un fenêtrage
booléen prenant en compte les granuleux et les monocytes (G + M).
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 65
La responsabilité du cytométriste réside plus dans • la déviation par un champ électrique des goutte-
la maîtrise des conditions pré-analytiques et analy- lettes chargées et leur recueil dans un récipient
tiques. Les mesures de fluorescence faites par un différent de celui destiné au recueil des déchets.
cytomètre sont relatives et dépendent de nombreux Les cellules ainsi triées peuvent faire l'objet
facteurs comme le pH, la température, le milieu d'analyses complémentaires morphologiques ou
dans lequel les cellules sont en suspension, la vitesse moléculaires. Si elles sont encore vivantes, elles
de passage, la combinaison des fluorochromes utili- peuvent également être mises en culture.
sés, la qualité et la préservation des fluorochromes.
Le choix des fluorochromes, une fois établie la Imageur en flux
sensibilité minimale des photomultiplicateurs à L'inconvénient principal de la cytométrie en flux
l'aide de cellules non marquées, doit être réalisé est de limiter l'analyse morphologique à deux
avec soin. Il faut tenir compte à la fois de la puis- mesures de lumière diffusée. L'utilisation du mar-
sance d'émission du fluorochrome sélectionné et queur panleucocytaire CD45 a apporté une
de l'intensité d'expression attendue pour le mar- dimension supplémentaire qui ne compense
queur choisi. De plus, en raison de la superposition cependant pas totalement l'absence d'observation
plus ou moins importante des spectres d'émission directe. Les imageurs en flux de type ImageStream
des fluorochromes disponibles, il est nécessaire de Amnis® combinent l'étude quantitative de la cyto-
réaliser une compensation électronique des fuites métrie en flux multilasers à l'étude morpholo-
de fluorescence d'un fluorochrome donné dans le gique. Les cellules (e.g. leucocytes, levures,
canal d'émission d'un autre. Cette opération est micro-organismes) passent devant un objectif de
devenue extrêmement complexe avec la sophistica- microscope et des images en fluorescence sont
tion des instruments. Des outils de réglage automa- produites pour chaque cellule par une caméra
tique de ces compensations sont disponibles mais (fig. 4.10). Il est ainsi possible de visualiser directe-
ne dispensent pas d'un choix éclairé des combinai- ment toutes les caractéristiques de chaque cellule.
sons marqueur/fluorochrome dans les panels La vitesse de passage et le nombre de cellules ana-
actuels de huit ou dix couleurs. L'effet trompette, lysées sont toutefois moindres que pour un cyto-
ou de spreading, qui n'est pas compensable, doit mètre standard, ce qui fait des deux instruments
également être pris en compte. D'une manière des outils complémentaires. Le puissant logiciel
générale, pour l'étude de sous-populations cellu- d'analyse associé à ces nouveaux outils permet des
laires au sein d'un groupe de cellules présentant un applications multiples en termes de morphologie,
marqueur commun, il faut éviter les fuites de la signalisation cellulaire, localisation intracellulaire
population mère vers les populations filles alors que (e.g. visualisation de translocations moléculaires ou
l'inverse est plus véniel (par exemple, on peut tolé- de colocalisations) ou interactions cellulaires.
rer des fuites vers CD45 mais pas de fuites depuis
CD45 pour des sous-populations leucocytaires). Avantages/inconvénients
Marquages cellulaires et
Imagerie en flux
tissulaires, immunocytologie
Fig. 4.10 Exemple d'image obtenue avec l'ImageStream
Amnis®.
et immunohistologie
Les techniques d'immunofluorescence tissulaire
Exemples d'applications ou d'immunohistochimie sont utilisées pour
• En recherche : la cytométrie en flux est un outil détecter, localiser, voire estimer le niveau d'ex-
indispensable à une grande partie des travaux pression de protéines d'intérêt sur un matériel
expérimentaux chez l'animal ou avec des lignées cytologique ou des coupes tissulaires. Cette tech-
cellulaires. D'autres développements intéressent le nique se décompose en trois étapes principales qui
champ de la microbiologie ou l'océanographie. sont (i) la préparation de l'échantillon contenant
• En clinique : l'antigène à étudier, (ii) l'utilisation d'un anticorps
– la cytométrie en flux est utilisée régulièrement dirigé contre l'antigène recherché et (iii) l'apport
en immunologie et en hématologie pour le dia- d'un système révélateur pour visualiser
gnostic ou le suivi thérapeutique de différentes l'immunoréaction.
affections. Ces applications peuvent concerner :
– l'identification (immunophénotypage) des Méthodologie
populations et sous-populations cellulaires Les tissus sont analysés après fixation chimique,
en fonction de leurs marqueurs de diffé- inclusion et coupe en paraffine, ou après congéla-
renciation (e.g. évaluation des sous-popula- tion et coupe au cryostat.
tions lymphocytaires sanguines, diagnostic La fixation avec inclusion en paraffine ou la
des hémopathies), congélation préviennent de toute dégradation
– des études fonctionnelles évaluant notam- secondaire à une prolifération bactérienne ou à
ment la prolifération, la cytotoxicité, la l'action des enzymes libérées lors de la mort cellu-
production de cytokines, l'apoptose, la dégra- laire, et confèrent au tissu une rigidité indispen-
nulation des basophiles, la phagocytose ; sable à sa découpe.
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 67
Le fixateur chimique le plus utilisé est le formal- Les blocs inclus en paraffine sont découpés avec
déhyde. Ce produit réalise des pontages intermo- un microtome en coupes d'une épaisseur de 4 à 5
léculaires qui préservent bien la morphologie μm. Un cryomicrotome (ou cryostat) permet de
cellulaire et tissulaire. Cependant, il induit une réaliser des coupes de tissus congelés à une tempéra-
importante dénaturation des antigènes dont les ture de −30 à −20° C, d'une épaisseur de 5 à 10 μm.
épitopes peuvent être altérés. L'éthanol et l'acé- Pour les tissus fixés, un démasquage antigé-
tone sont des fixateurs précipitants qui préservent nique est nécessaire pour rompre les liaisons molé-
mieux l'antigénicité des protéines mais qui ont un culaires créées par le fixateur, modifier la
effet dénaturant sur la morphologie cellulaire et configuration spatiale des épitopes et améliorer
tissulaire. leur accessibilité aux anticorps. Ce démasquage
L'inclusion d'un tissu dans la paraffine ou dans peut être enzymatique, avec de la pronase (0,1 % à
une résine génère des variations thermiques qui 37 °C) ou physique par chauffage au micro-ondes
peuvent également être délétères pour certains ou en autocuiseur en tampon citrate ou EDTA.
épitopes. Des anticorps monoclonaux ou polyclonaux
La fixation en congélation est obtenue par l'im- peuvent être utilisés pour rechercher l'expression
mersion du tissu dans un liquide refroidissant de la protéine d'intérêt dans le tissu. Les anticorps
(isopentane à −130 °C) ou directement dans l'azote monoclonaux sont plus sensibles à la qualité de la
liquide (snap-freezing, −196 °C) puis son maintien fixation en raison de leur spécificité plus étroite.
en vapeur d'azote liquide ou au moins à −80 °C. Les anticorps polyclonaux de spécificité plus large
Avant la coupe, le tissu congelé est enrobé dans une ont l'avantage de reconnaître différents épitopes
substance protectrice (cryoprotecteur OCT) qui se de l'antigène. Leur avidité et leur spécificité sont
solidifie rapidement au froid et permet de consti- variables suivant les lots.
tuer un bloc plus facile à manipuler au cryomicro- Pour révéler la fixation de l'anticorps au tissu, une
tome. Le maintien de l'intégrité des antigènes est méthode directe ou indirecte peut être employée. La
préservé dans les tissus congelés car les protéines se méthode directe utilise directement des anticorps
trouvent dans un état structurel moins dénaturé. marqués (ou conjugués), appelés anticorps de révéla-
Cependant, la préservation de la morphologie du tion. Cette technique est simple et rapide, de locali-
tissu est moins bonne qu'avec un fixateur chimique. sation précise mais de sensibilité médiocre (fig. 4.11).
Fluorochrome
Anticorps primaire
Anticorps secondaire
Antigène
Immunofluorescence Immunofluorescence
directe indirecte
Fig. 4.11 Principe d'un marquage immunocytologique par immunofluorescence directe ou indirecte.
68 Techniques immunologiques
La méthode indirecte utilise un anticorps pri- Une étape de mise au point est nécessaire pour
maire non marqué spécifique de l'antigène, dont déterminer les conditions d'un marquage optimal :
sa fixation est révélée par un anticorps secondaire conditions de démasquage, concentration des
marqué. Cette méthode est privilégiée lorsque le anticorps primaire et secondaire, concentration
niveau d'expression de l'antigène à analyser est des chromogènes, temps de révélation.
faible. Une amplification supplémentaire du signal Il faut souligner qu'un anticorps performant en
initial peut être obtenue par l'utilisation d'un sys- western-blot n'est pas nécessairement adapté à
tème streptavidine–biotine ou avidine–biotine l'immunohistochimie. Les fournisseurs d'anti-
(e.g. ABC) décrit dans le chapitre sur les traceurs corps précisent généralement si l'anticorps a été
enzymatiques. Il est également possible de réticu- testé sur coupes de tissus congelés ou inclus en
ler un anticorps tertiaire marqué par la protéine A paraffine.
ou la protéine G. Des contrôles négatifs et positifs doivent être
Les traceurs fluorescents tels que l'isothiocya- réalisés. Les contrôles négatifs peuvent être
nate de fluorescéine (FITC) ou la phycoéry- (i) un immunomarquage sans incubation avec
thrine (PE) sont surtout utilisés sur coupes l'anticorps primaire, (ii) une incubation avec un
congelées. Ils confèrent une grande sensibilité à anticorps de même isotype à la même concentra-
la technique et permettent des analyses confo- tion que l'anticorps primaire, dirigé contre un
cales, autorisant l'examen de colocalisations cel- antigène absent du tissu, (iii) une incubation de
lulaires. Ils nécessitent un montage en milieu l'anticorps sur un tissu ne renfermant pas l'anti-
aqueux labile et la lumière émise disparaît au gène ou (iv) une incubation avec l'anticorps pri-
cours du temps. maire spécifique préalablement saturé par
Les traceurs enzymatiques, tels que la peroxy- l'antigène purifié.
dase de raifort (HRP) associée pour chromogène Les contrôles positifs sont réalisés en utilisant
à la diaminobenzidine (DAB), donnent une colo- des témoins externes et internes.
ration stable brune. La phosphatase alcaline est L'analyse de l'immunomarquage est le plus sou-
également utilisée avec le chromogène Fast blue vent qualitative et tente de définir quelles cellules
pour une coloration bleue ou avec le Fast red pour sont positives et quelle est la localisation cellulaire
une coloration rouge. Ces traceurs permettent du marquage (membranaire, cytoplasmique ou
une visualisation en microscopie optique. Les nucléaire). Une analyse visuelle semi-quantitative
marquages sont stables, des doubles marquages peut être réalisée en prenant en compte le comp-
peuvent être réalisés sans pour autant permettre tage des structures ou cellules immunomarquées
de visualiser de colocalisation. La précision du par unité de surface ou champ microscopique.
marquage est moyenne en raison d'une diffusion Des outils spécifiques ont été développés pour
du précipité. permettre une analyse quantitative des immuno-
marquages. La première étape consiste le plus
souvent en une numérisation de l'immunomar-
Recommandations de mise en œuvre quage par un scanner haute résolution. Une ana-
Il est nécessaire de s'assurer de la spécificité du lyse quantifiée de l'immunomarquage est ensuite
marquage et de l'absence de bruit de fond. Des réalisée par un programme d'analyse d'image
marquages non immuns peuvent se produire, dédié.
secondaires à des interactions ioniques, hydro- Un exemple récent d'utilisation des immuno-
philes ou hydrophobes entre l'anticorps et des marquages à des fins pronostiques en pathologie
protéines du tissu ou encore secondaires à une tumorale colorectale est fourni dans la figure 4.12.
activité biotine endogène du tissu ou une mau- Un score immunitaire basé sur la quantification
vaise inhibition des peroxydases endogènes tissu- des populations immunitaires CD3 et CD8 res-
laires. Des marquages immuns non spécifiques pectivement dans la tumeur et au niveau du front
peuvent être la conséquence de réactions d'invasion est calculé. Ce score immunitaire amé-
croisées. liore la prédiction de récidive des patients.
Chapitre 4. Techniques avec traceurs 69
a b
IHC Scanner
automate haute résolution
c d
Microscopie virtuelle et
programme d’ analyse d’image
Fig. 4.12 Exemple d'immunomarquage de tumeur colorectale pour le calcul informatisé du score immunitaire prédictif.
a. Détection automatique du tissu.
b. Identification de la région tumorale et du front d'invasion.
c. Quantification des populations immunomarquées (CD8+) et représentation des résultats selon une cartographie de
densité.
d. Illustration de la détection des cellules immunomarquées CD8+.
Méthodologie
La technique des puces tissulaires ou Tissue
MicroArrays (TMA) est une technologie à haut Différentes étapes d'une puce tissulaire
débit permettant d'obtenir des profils d'expression Construction de la puce
de protéines d'intérêt par immunohistochimie ou Pour la construction de la puce tissulaire (bloc
hybridation in situ en fluorescence (FISH) à partir TMA), un plan de fabrication est tout d'abord
de tissus fixés inclus en paraffine. Des carottes de défini. Une carte de la puce est élaborée, décrivant
tissus sont prélevées au moyen d'un carotteur tissu- les échantillons à positionner dans chaque emplace-
laire (tissue arrayer ou microarrayer) dans des ment de la matrice lignes/colonnes du bloc. La
zones sélectionnées du bloc tissulaire donneur, puis zone tissulaire prélevée sur le bloc donneur est
sont incluses selon un plan préétabli dans un bloc sélectionnée d'après l'examen microscopique de la
receveur. Une puce tissulaire peut réunir d'une coupe histologique colorée à étudier (fig. 4.13).
centaine à un millier de carottes tissulaires dans un Selon les instructions du plan de fabrication, chaque
seul bloc. Ainsi, une seule coupe histologique carotte de tissu de 0,6 à 2 mm de diamètre est pré-
d'une puce tissulaire permet d'analyser simultané- levée dans le bloc donneur à l'aide du carotteur tis-
ment plusieurs centaines d'échantillons tissulaires sulaire. Un trou correspondant, de même diamètre,
formant des spots. Cette analyse assure une grande est préparé dans le bloc receveur. La carotte tissu-
homogénéité de la technique sur l'ensemble des laire est alors incluse à son emplacement dans le
spots analysés et constitue une économie de temps, bloc TMA. Pour éviter des variations de hauteur
de réactifs et de matériel biologique. des carottes qui pourraient provoquer des pertes de
Les techniques des puces tissulaires permettent spots lors de la coupe, la totalité du trou receveur
de constituer des archives de tissus tumoraux. Une doit être remplie au besoin par plusieurs fragments
fois le bloc constitué, l'expression de protéines du même tissu. La réalisation de blocs contenant
d'intérêt sur une large cohorte de patients peut des centaines de carottes tissulaires est une tâche
70 Techniques immunologiques
Spot contrôle: amygdale TMA cancer du rein; marquage CD8 Spot marquage CD8 Agrandissement
Cellules mononucléées
Antigène
Anticorps de capture
Membrane
Cytokine sécrétée
Anticorps de révélation
bioltinylé
Streptavidine/phosphatase
alcaline et chromogène
15 minutes avec un substrat de l'enzyme (e.g. loupe ou d'un microscope, éventuellement équipé
BCIP/NBT, 5-bromo-4-chloro-3′-indolyl phos- d'une caméra assistée par ordinateur. Les résultats
phate et chlorure de nitro-bleu de tétrazolium) sont exprimés en nombre de cellules formant des
qui, catabolisé par l'enzyme, se colore, précipite et spots (Spot Forming Cells ou SFC) par million de
identifie les zones de production de la cytokine. cellules mononucléées (SFC/106 cellules) pour
La réaction colorimétrique est arrêtée par de l'eau chaque condition de stimulation après soustrac-
distillée. Après séchage à température ambiante et tion du bruit de fond obtenu dans les puits corres-
à l'abri de la lumière, les points colorés (spots) qui pondant aux cellules seules (témoin négatif).
apparaissent sur la membrane correspondent aux
cellules spécifiques de l'antigène ayant produit la Recommandations de mise en œuvre
cytokine en réponse à la stimulation. Les spots L'intérêt de cette technique repose sur l'identifi-
sont comptés dans chaque puits à l'aide d'une cation individuelle de cellules productrices de la
74 Techniques immunologiques
protéine d'intérêt. Elle nécessite donc de travailler lysent cette dernière. Parallèlement à leur
à partir de cellules fraîchement prélevées, séparées activité cytolytique, les lymphocytes T CD8+
et mises en culture quelques heures après le cytotoxiques produisent des cytokines telles
recueil. La période de culture impose également que l'IFN-γ ou le TNF-α. Les deux fonctions
des conditions stériles. Enfin, la quantification (cytotoxicité et production de cytokines) sont
nécessite de disposer d'un comptage le plus précis globalement corrélées et induites par les
possible des cellules pour lesquelles la production mêmes signaux. La technique ELISpot IFN-γ
de la protéine d'intérêt est recherchée. Les sus- est maintenant reconnue comme étant la
pensions de cellules mononucléées obtenues après méthode de référence pour quantifier rapide-
centrifugation sur gradient de densité (Ficoll®) ment, à partir d'une faible quantité de cellules
contiennent plusieurs types cellulaires, et une mononucléées, le nombre de cellules CD8+
quantification spécifique de la population cellu- spécifiques d'antigènes viraux ou tumoraux.
laire testée, avant l'ajustement de la suspension Elle permet aussi d'identifier les peptides
cellulaire, peut nécessiter une analyse en cytomé- immunodominants et d'analyser la diversité
trie en flux. Ceci permet par exemple un décompte du répertoire des réponses lymphocytaires
précis des lymphocytes T CD8+, producteurs de T CD8+ ;
cytokines, ou des lymphocytes B producteurs – les cytokines Th2 (IL-4 notamment) sont
d'immunoglobulines. particulièrement intéressantes pour analyser
les réponses allergiques de faible intensité qui
Avantages/inconvénients peuvent être détectées plus facilement par
cette technique sensible ;
Avantages Inconvénients – la technique ELISpot B est utilisée pour
Bonne sensibilité Nécessite de travailler avec des caractériser les réponses humorales. Elle per-
Test fonctionnel cellules isolées, fraîchement met de déterminer le nombre de lympho-
Quantification du nombre de mises en culture en conditions cytes B sécrétant des immunoglobulines, ou
cellules productrices d'une stériles le nombre de lymphocytes B spécifiques d'un
cytokine Sécrétion cytokinique spontanée
Applicable aux biothérapies pouvant induire un bruit de fond antigène. Dans le premier cas, un anticorps
Technique simple au regard des au regard d'une stimulation anti-isotype est fixé sur la membrane, permet-
informations obtenues antigénique spécifique tant de détecter la production d'immunoglo-
Permet l'identification Technique sensible aux
bulines (e.g. IgM, IgG, IgA). Dans le second
simultanée de plusieurs vibrations lors de l'incubation
cytokines sécrétées (ELISpot sur la nuit cas, c'est l'antigène fixé sur la membrane qui
fluorescent) Ne permet pas de doser les capture l'immunoglobuline spécifique pro-
molécules sécrétées duite. Dans les deux cas, les immunoglobu-
L'ELISpot fluorescent nécessite
un appareillage spécifique pour
lines sécrétées sont révélées par un anticorps
la lecture du résultat biotinylé anti-immunoglobuline, puis une
réaction colorimétrique.
• En clinique : la technique d'ELISpot basée sur
Exemples d'applications la détection de cytokines, grâce à sa sensibilité et
• En recherche : sa reproductibilité, est largement utilisée pour
– dans le cas de l'analyse des réponses lympho- analyser les réponses immunes spécifiques T ou
cytaires T CD8+, la détection de la sécrétion B au cours de pathologies comme les infections
d'IFN-γ est généralement utilisée. En effet, virales chroniques, les cancers et les allergies.
les lymphocytes T CD8+ reconnaissent leur Elle permet aussi l'évaluation des protocoles
épitope à la surface d'une cellule cible et vaccinaux.
Chapitre 5
Techniques de biologie moléculaire
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
76 Techniques immunologiques
5’ 3’
Brin sens ou codant
Brin anti-sens
ADN à amplifier ou complémentaire
3’ 5’
Premier cycle
de PCR
Deuxième cycle
Xn = X0 x 2n de PCR
0.15
0.125 Zone où
les
courbes
0.1
diffèrent
Fluorescence
0.075
0.05
0
5 10 15 20 25 30 35 40
Nombre de cycles
Fig. 5.2 Courbes de fluorescence obtenues lors d'une PCR en temps réel quantitative (qPCR, triplicata).
Le cycle seuil (Ct) représente le nombre de cycles requis pour que le signal de fluorescence soit significativement supérieur
au bruit de fond. Cycle seuil déterminé au cours de la phase exponentielle, phase la plus reproductible de la réaction
de PCR (cf. courbe verte).
est d'autant plus petit que la matrice initiale à bridation aux caractéristiques des amorces et à
amplifier est abondante. La valeur du Ct est tou- leur concentration. Le programme type pour
jours définie au cours de la phase exponentielle une qRT-PCR est le suivant : (1) dénaturation
d'amplification, phase la plus reproductible de la de l'ADNc (e.g. 94 °C, 5 min) ; (2) dénatura-
réaction. Cette valeur de Ct peut ensuite être tra- tion rapide du double brin (e.g. 94 °C, 15 sec) ;
duite en un résultat quantitatif en la comparant (3) hybridation à la température d'hybridation
avec les valeurs de Ct générées lorsque des trans- optimale des amorces (e.g. 45 sec) ; (4) élonga-
crits de gènes de ménage (housekeeping genes, tion (e.g. 72 °C, 30 sec) ; (5) répétition 40 fois
e.g. β-actine, β2-microglobuline), dont l'expres- des étapes 2 à 4 ; (6) élongation finale à 72 °C.
sion est constante, sont amplifiés. La quantifica-
tion ne requiert aucune manipulation post-PCR. Recommandations de mise en œuvre
La qRT-PCR est encore plus sensible aux conta-
Méthodologie minations que la PCR classique. Il faut donc res-
Les étapes de la qRT-PCR sont les mêmes que pecter les mêmes règles à ce sujet et extraire les
celles d'une PCR classique, excepté la révélation ARN dans une pièce spécifique lorsqu'elle est réa-
des amplicons qui est analysée en temps réel. lisée sur des ADNc.
Les amorces pour la qRT-PCR répondent aux Il est recommandé de déterminer l'efficacité de
mêmes critères de spécificité que celles de la la qRT-PCR pour chaque couple d'amorces afin
PCR classique pour un fragment de 100 à 200 de s'assurer que la modification d'expression d'un
paires de bases (pb). Comme pour une PCR gène n'est pas due à une différence d'efficacité
classique, il faut appliquer la température d'hy- d'amplification. Pour cela, il faut appliquer la qRT-
Chapitre 5. Techniques de biologie moléculaire 79
Techniques immunologiques
Amplification avec des Amplification de régions codantes Amplification de l’ADN avec
amorces génériques spécifiques de gènes des amorces spécifiques
Contrôles
positifs
Anticorps de capture
Fig. 5.4 Systèmes de détection des antigènes par test immuno-enzymatique (ELISA) et par l'immuno-PCR.
Ses principales applications actuelles sont dans protéines d'agents infectieux (bactéries, virus,
le champ de la microbiologie, avec la détection de moisissures, polypeptides des maladies à prions).
Avantages/inconvénients
PCR RT-PCR qRT-PCR Immuno-PCR
Avantages Étude qualitative et Étude qualitative et Étude quantitative des ADN et Détection d'antigènes
semi-quantitative de l'ADN semi-quantitative des ARN ARN Rapidité
Coût faible Coût faible Rapidité Grand nombre
Rapidité Rapidité Grand nombre d'échantillons d'échantillons
Grand nombre Grand nombre d'échantillons Sensibilité plus élevée que la Faible volume
d'échantillons Nombreux couples d'amorces PCR et la RT-PCR Sensibilité élevée (pico- à
Nombreux couples disponibles dont les conditions Suivi en direct de la réaction femtogramme)
d'amorces disponibles d'utilisation ont été optimisées Analyse immédiate de la Suivi en direct de la
dont les conditions qualité de l'amplification réaction
d'utilisation ont été Applications en système
optimisées multiplexé
Stabilité des matrices ADN
Inconvénients Sensibilité plus faible que Sensibilité plus faible que la Coût du thermocycleur plus Nécessite un
la qRT-PCR qRT-PCR élevé thermocycleur en temps
Attention aux ARN sensible aux nucléases Mise au point plus longue réel (qRT-PCR)
contaminations Attention aux contaminations mais de plus en plus de Contaminations possibles
Pas de suivi en direct de la Pas de suivi direct de la couples d'amorces avec des par l'échantillon
réaction réaction conditions d'utilisation
Qualité de l'amplification Qualité de l'amplification optimisées sont disponibles
examinée obligatoirement examinée obligatoirement sur ARN sensible aux nucléases
sur la migration la migration Attention aux contaminations
82 Techniques immunologiques
VH N DH N JH ADN
FR3 JH
FR2 JH PCR
FR1 JH
PCR Vb1 - Cb
PCR Vb2 - Cb
PCR Vb23 - Cb
Mélange
1 2
équimolaire
Digestion Marquage
enzymatique (Cy5, rouge)
ADN
génomique
à explorer
Hybridation
4
Spot identifiable de compétitive
sondes identiques
Fig. 5.9 Schématisation des différentes étapes de l'hybridation génomique comparative sur puce.
ADNg = ADN génomique.
88 Techniques immunologiques
précipitation de l'ADN dans l'éthanol. Il convient quage et de calculer l'activité spécifique en pmol
cependant d'obtenir une quantification précise et de cyanine/μg d'ADN. Les fragments d'ADN
une évaluation fiable de la qualité de l'ADN extrait. marqués sont purifiés par centrifugation sur mem-
La seconde étape consiste à procéder à une brane filtrante de 30 kDa, qui permet d'éliminer
digestion enzymatique de l'ADN génomique à l'excédent d'enzyme, de cyanines et de nucléo-
l'aide des enzymes RsaI et AluI (5 U/500 ng tides susceptibles d'interférer avec l'étape
d'ADN pendant 2 h à 37 °C), suivie d'une inacti- d'hybridation.
vation de ces dernières par dénaturation ther- L'échantillon d'ADN cible marqué à la Cy5
mique (20 minutes à 65 °C). La digestion permet (rouge) et l'ADN de référence marqué à la Cy3
l'obtention de fragments d'ADN génomique de (vert) sont mélangés de façon équimolaire, déna-
petite taille (200–500 paires de bases) adaptés à turés à 95°C pour l'obtention de fragments
l'hybridation. Il est essentiel de contrôler l'effica- simple brin et déposés sur la puce à ADN pour
cité de la digestion par électrophorèse microcapil- l'étape d'hybridation sur les sondes (24 heures à
laire afin de s'assurer de la digestion complète des 65°C).
échantillons, de l'absence de fragments d'ADN de Lorsque la période d'hybridation est écoulée,
haut poids moléculaire et d'une quantité d'ADN plusieurs lavages successifs dans des tampons dif-
homogène entre échantillons. férents sont nécessaires avant de pouvoir obtenir
Le marquage à la cyanine est réalisé par incor- une image digitalisée de la puce. Lors de la lecture
poration aux fragments d'ADN digérés, de déoxy- par le scanner, chaque spot est excité par un laser
nucléotides (dUTP) marqués à la cyanine (Cy3 ou et l'intensité de fluorescence est mesurée pour les
Cy5) en utilisant l'enzyme Exo(-)Klenow deux longueurs d'ondes d'excitation, 550 (Cy3)
(2 heures à 37 °C). Une étape d'inactivation ther- et 647 nm (Cy5).
mique de l'enzyme (10 minutes à 65 °C) est éga- L'intégration des signaux de fluorescence, l'ex-
lement nécessaire. L'incorporation des cyanines traction des données et leur traduction graphique
est mesurée par spectrophotométrie à micro (fig. 5.10) sont réalisées à l'aide de logiciels dédiés.
volume qui permet d'évaluer l'efficacité du mar- Une différence dans le nombre de copies entre
Fig. 5.10 Représentation graphique d'une aberration chromosomique (amplification du bras long du chromosome 1)
retrouvée dans les cellules CD38+/CD138+ de myélome multiple d'un patient.
Chapitre 5. Techniques de biologie moléculaire 89
l'ADN cible étudié et l'ADN de référence, pour Enfin, il est important de considérer le choix de
un locus donné, modifie le rapport d'intensité des la résolution des puces (15 K, 44 K, 60 K, 105 K,
deux fluorochromes. Les ratios de fluorescence 180 K, 244 K, 400 K ou 1 M) qui permet d'opti-
(Log2[intensité Cy5/intensité Cy3]) permettent miser le coût et les besoins analytiques.
de déterminer l'amplification ou la délétion d'une
région génique, en se basant sur la fluorescence de Avantages/inconvénients
l'ADN de référence.
Avantages Inconvénients
Contrairement au caryotype Compte tenu du principe de
Recommandations de mise en œuvre traditionnel ou à la FISH, le CGH compétition de la technique,
Le CGH array permet d'analyser des déséqui- array ne nécessite pas de notamment pour l'exploration
matériel frais ex vivo ni d'étape d'anomalies au sein de
libres quantitatifs du génome en termes de perte de culture cellulaire ni populations tumorales, il est
ou de gain. Cette technologie constitue un outil l'obtention de mitoses en essentiel de s'assurer que la
de choix pour rechercher et caractériser en une nombre suffisant population étudiée représente
Cette analyse peut être réalisée au moins 40 % de l'échantillon
seule expérience des anomalies chromosomiques
à distance du prélèvement analysé. Il ne faut pas négliger
sur l'ensemble du génome d'un individu. (plusieurs années) à partir du le recours à un tri cellulaire afin
Cependant, de nombreux paramètres peuvent moment où les ADN ont été d'obtenir un enrichissement de
interférer avec le succès du résultat de l'hybrida- correctement conservés. Elle la population cible
permet donc de procéder à des Les translocations équilibrées
tion. Les étapes de contrôle, de quantification, de études rétrospectives et des correspondant à un échange
marquage et de lavage sont essentielles et critiques échanges de matériel parfaitement conservé de
pour la validation du résultat. Un défaut de diges- interlaboratoire matériel génétique (sans perte
tion de l'un ou des deux ADN en compétition Des protocoles dédiés à ni gain) ne peuvent pas être
l'analyse de tissus fixés (FFPE) détectées par cette technologie
pour l'hybridation sur les sondes a pour effet la se développent. Du fait d'une Le coût reste actuellement élevé
génération de fragments d'ADN de trop grande fragmentation de l'ADN par le
taille, inappropriés pour l'hybridation, et fausse le processus de fixation, la
résultat. Un défaut de marquage de l'un des deux technique reste pour le moment
moins robuste que lorsqu'elle
ADN a pour conséquence une sous-estimation du est appliquée à des ADN extraits
signal. Le pH des tampons et la stringence des de tissus frais
lavages sont également critiques pour limiter le
bruit de fond lié à des hybridations inadéquates et
assurer une plus grande sensibilité. Exemples d'applications
Plusieurs jours sont nécessaires pour l'obten- • En recherche : permettant une exploration
tion d'une hybridation sur puce, cependant en complète du génome, ces techniques ont de
dehors d'une hotte chimique (ou sorbonne) et multiples applications pour la compréhension
d'un four à hybridation, les différentes étapes du fonctionnement cellulaire.
décrites ne nécessitent pas d'équipement spécia- • En clinique : dans les syndromes lymphoprolifé-
lisé et/ou coûteux. Il est donc possible de procé- ratifs, la présence ou l'absence d'anomalies
der à l'essentiel de la réalisation de la technique génomiques ont souvent une valeur pronos-
dans un laboratoire habitué à manipuler les tique importante. Dans la leucémie lymphoïde
acides nucléiques. Le passage sur le scanner pour chronique par exemple, la délétion des chromo-
l'obtention d'une image digitalisée de la puce et somes 11 ou 17 (17p avec perte du gène sup-
l'acquisition des données ne durent que quelques presseur de tumeur p53) ou des anomalies du
minutes. Le temps d'occupation du scanner étant bras long du chromosome 11 (11q23) sont de
très court, il est possible de mettre en œuvre mauvais pronostics. L'identification des gènes
cette technique dans un laboratoire indépendant présents dans les régions ciblées par ces micro-
mais pouvant bénéficier d'un accès à un parc anomalies peut également permettre une
technologique, dans le cadre de mutualisation meilleure compréhension du processus physio-
d'équipements. pathologique de ces proliférations.
90 Techniques immunologiques
(single cell Q-PCR), amenant à la révélation de géniques, est un apport important dans la com-
sous-populations cellulaires non encore identifiées. préhension des mécanismes de cancérogenèse.
Il n'y a cependant pas de corrélation systéma-
tique entre les niveaux d'expression génique
apportés par les analyses transcriptomiques et la Polymorphismes géniques
production des protéines correspondantes. En
effet, les modifications post-transcriptionnelles Le polymorphisme est défini au niveau d'une popu-
contribuent à des variations importantes de lation par le nombre et les fréquences des allèles à
l'abondance et des caractéristiques des protéines un locus donné. Un gène polymorphe est un gène
traduites. L'analyse du transcriptome fournit ainsi présentant au moins deux formes alléliques de fré-
des informations qui nécessitent une validation, à quence supérieure ou égale à 1%, et le degré de
l'échelle protéique ou fonctionnelle. polymorphisme d'une population est défini par son
pourcentage de gènes polymorphes. Pour des
Avantages/inconvénients formes alléliques de fréquence inférieure ou égale à
Technique Q-PCR Array Puces SAGE RNA- 1%, c'est-à-dire dans la majorité des maladies géné-
cards d'expression Seq tiques humaines, on parle de cryptopolymorphisme
Analyse Oui Oui Non Non Non ou, s'agissant de pathologie, de mutation causale.
supervisée La mesure du polymorphisme fournit une estima-
Identification Non Non Non Oui Oui tion de la diversité globale entre individus d'une
de transcrits même population ou entre populations. L'analyse
alternatifs
de la diversité génétique entre populations résout
Débit Très faible Faible Haut Moyen Haut les questions phylogénétiques. Des marqueurs du
d'analyse
polymorphisme génétique sont examinés pour
Quantité de Moyenne Moyenne Faible Faible Faible
leurs associations à des pathologies.
matériel
nécessaire
Les polymorphismes et leur
Exemples d'applications utilité en immunogénétique
• En recherche : la comparaison de profils trans- Les mutations géniques qui affectent un gène dans
criptomiques est un puissant outil d'analyse l'une de ses séquences peuvent influer sur sa fonc-
pour comprendre les modifications induites par tion et retentir sur le phénotype associé. Sur le plan
des conditions expérimentales contrôlées, qu'il fonctionnel, une mutation peut s'associer à une
s'agisse de cellules en culture ou de variations à perte ou à un gain de fonction. Les marqueurs poly-
l'échelle d'un ou plusieurs organes dans des morphes de l'ADN sont des polymorphismes d'un
organismes entiers. seul nucléotide (Single Nucleotide Polymorphism ou
• En clinique : l'apport de la transcriptomique, et SNP), des polymorphismes de longueur de frag-
plus particulièrement l'analyse par puces d'ex- ments de restriction (Restriction Fragment Length
pression réalisée à partir de prélèvements tumo- Polymorphism ou RFLP) ou des polymorphismes de
raux dans les années 2000, a eu un impact fort courtes séquences répétées en tandem (microsatel-
sur la définition de sous-types de pathologies lites ou STR, pour Short Tandem Repeat), parfois
tumorales. En effet, des valeurs pronostiques des insertions/délétions.
ont pu être attribuées à des groupes de patients Les polymorphismes sont examinés pour :
de profils d'expression génique différents. C'est • mesurer la diversité génétique afin de définir
le cas par exemple pour les lymphoproliférations la composition génétique d'une population
B matures, comme les lymphomes B diffus à (notion de fréquence allélique) ;
grandes cellules ou les lymphomes folliculaires. • rechercher l'émergence d'une mutation patho-
La technique de RNA-Seq, permettant la détec- logique (notion d'ancêtre commun dans les
tion de transcrits résultant de mutations études génétiques des populations) ;
92 Techniques immunologiques
impliqués dans la régulation de presque toutes les des compartiments cellulaires précis comme des
voies biologiques et que leurs changements d'ex- axones ou des dendrites, ou dans des organelles
pression sont associés à plusieurs pathologies comme les mitochondries, l'appareil de Golgi,
humaines, dont les cancers et les maladies auto- ou le noyau. La transfection, de façon sûre et
immunes. En ciblant les oncogènes et les gènes fiable, dans un organisme entier ouvre des pers-
suppresseurs de tumeurs, les miARN ont la capa- pectives thérapeutiques importantes dont les
cité de moduler les processus cellulaires clés qui premières applications commencent à se faire
définissent le phénotype de la cellule, ce qui en fait jour.
des outils thérapeutiques très prometteurs. • En clinique : plusieurs essais thérapeutiques ont
été développés en utilisant l'interférence ARN
Méthodologie pour traiter des cancers, des infections virales ou
L'interférence d'ARN (ARNi ou RNAi) est un des anomalies génétiques.
outil puissant pour induire l'inactivation spéci-
fique d'un gène et en observer les conséquences
phénotypiques. Deux voies peuvent être utilisées Protéomique
pour obtenir des ARNi dans une cellule. La pre-
mière consiste à introduire directement de l'ARN Sont rapportées ici les grandes lignes méthodo
synthétique dans le cytoplasme sous forme de logiques nécessaires aux études des protéomes, à
duplex, le plus souvent à l'aide de polymères lipi- savoir les électrophorèses mono- ou bidimension-
diques. On parle de petits ARN interférents nelles, la digestion sur gel et l'identification et
(siARN ou siRNA, pour small interference RNA). caractérisation des protéines par spectrométrie de
La seconde consiste à construire une cassette d'ex- masse (mass spectrometry ou MS).
pression dans le noyau, le plus souvent par infec- Il est reconnu qu'il n'existe pas toujours, dans
tion virale. Ses produits sont ensuite exportés dans une cellule, une corrélation exacte entre la quan-
le cytoplasme sous forme d'ARN en épingle à che- tité d'ARNm et l'abondance des protéines corres-
veux (shARN ou shRNA, pour short hairpin pondantes. À la simple traduction de l'ARNm
RNA) ou de pré-miARN. Les ARN interférents s'ajoutent des mécanismes de modification post-
forment des complexes capables d'inhiber la for- traductionnelle susceptibles de contrôler le taux
mation des produits d'expression des gènes (pro- de synthèse, la demi-vie et la fonctionnalité des
téines), on parle de RISC pour RNA-Induced protéines. Il est donc important de pouvoir com-
Silencing Complex. pléter les données de génomique et de transcrip-
tomique par une étude de l'ensemble des protéines
Avantages/inconvénients ou protéome.
Ce concept de protéome a été introduit par
Avantages Inconvénients Wilkins en 1994 lors de la première édition de la
Pas d'intégration au génome Fragilité des ARN conférence sur l'électrophorèse bidimensionnelle
Transfection indépendante du Sensibilité aux RNAses (2D). Le premier rapport faisant référence à la
cycle cellulaire Interférence avec les réseaux de
Pas de vecteur immunogène régulation des ARN protéomique est apparu en 1995. La protéo-
Expression rapide mique désigne l'étude du protéome comme l'en-
semble des protéines présentes dans une cellule,
un tissu, un organe ou un organisme. La protéo-
Exemples d'applications mique est une étude dynamique, car un génome
• En recherche : les technologies de transfection peut conduire à différents protéomes en fonction
se sont beaucoup développées et sont à l'origine des étapes du cycle cellulaire, de la réponse à dif-
de multiples travaux ayant permis d'élucider le férents signaux biologiques ou d'états physiolo-
fonctionnement cellulaire. Dans le futur, il est giques/pathologiques variés. En pratique, la
envisagé de pouvoir délivrer des acides protéomique s'attache à identifier et caractériser
nucléiques étrangers (surtout des ARN) dans les protéines extraites d'un organe, d'un tissu,
96 Techniques immunologiques
d'une cellule ou d'un fluide biologique. Elle vise comme le CHAPS (3-[(3-Cholamidopropyl)
aussi à définir leur localisation subcellulaire et leur dimethylammonio]-1-propanesulfonate) et/ou
rôle biologique, ainsi que les interactions pro- non ioniques (Triton® X100), afin d'aider à la
téines–protéines, protéines–ADN ou protéines– solubilisation et de prévenir la précipitation des
ARN. La spectrométrie de masse est devenue la protéines extraites. Des inhibiteurs de protéases
méthode de choix pour les études protéomiques sont également ajoutés ainsi que des inhibiteurs
grâce au développement des méthodes d'ionisa- de phosphatases. L'extrait protéique est concentré
tion douce telles que la désorption laser assistée par précipitation à l'acétone ou à l'acide trichlo-
par matrice6 (Matrix Assisted Laser Desorption/ roacétique glacial. Après centrifugation, le culot
Ionization ou MALDI) et l'électronébulisation protéique est solubilisé et les protéines quanti-
(Electrospray Ionization ou ESI). fiées. Pour une analyse par électrophorèse 1D- ou
2D-SDS-PAGE, environ 40 à 50 μg de protéines
sont mélangées avec du glycérol (10 %) dans le
Protéomique conventionnelle tampon d'électrophorèse. La séparation des pro-
Méthodologie téines par électrophorèse 1D se fait en conditions
dénaturantes, l'ouverture des ponts disulfures
Une analyse protéomique par spectrométrie de étant réalisée par les conditions réductrices et le
masse, réalisée par une approche bottom-up ou par SDS qui se fixe sur les protéines, les dénature et
une approche top-down, est composée des princi- leur confère des charges négatives masquant les
pales étapes suivantes : charges de la protéine native. La séparation se fait
• préparation des échantillons par extraction des alors uniquement en fonction de la masse molécu-
protéines à partir de la matrice biologique et laire. La résolution de la migration est obtenue en
décomplexification des extraits par séparation modifiant la taille des pores du gel par la concen-
des protéines sur gels d'électrophorèse tration en acrylamide (10 à 15 %) ou le pH du
(1D-/2D-SDS-PAGE pour 1 Dimension/2 tampon d'électrophorèse. L'analyse sur un gel 2D
Dimensions Sodium Dodecyl Sulfate- combine une isoélectrofocalisation (IEF) dénatu-
PolyAcrylamide Gel Electrophoresis) ou par chro- rante et une électrophorèse SDS-PAGE. La pre-
matographie liquide (LC) ; mière dimension est une migration horizontale en
• incorporation des protéines à une matrice pour fonction du point isoélectrique (pI) des protéines.
analyse par MALDI ou séparation par chroma- Cette séparation se fait sur des bandelettes de gel
tographie liquide, couplée ou non à une source présentant des gradients de pH immobilisés (pH
ESI, puis spectrométrie de masse simple ou 3–10). Après cette migration, les protéines sont
combinée (MS et MS/MS pour Tandem Mass regroupées en fonction de leur pI. Elles sont sépa-
Spectrometry) ; rées une seconde fois orthogonalement en fonc-
• interprétation des données : identification, tion de leur masse moléculaire par un SDS-PAGE.
caractérisation ou quantification (fig. 5.11). Les gels sont colorés (e.g. bleu de Coomassie, bleu
La première étape consiste à enrichir l'extrait colloïdal, nitrate d'argent, fluorophore).
en protéines par l'intermédiaire d'une solution de Pour la deuxième étape, après excision des
solubilisation (tampon de lyse) adaptée à l'électro- bandes de gel 1D ou des spots de gels 2D,
phorèse sur gel ou à la séparation par chromato- la(les) protéine(s) est(sont) hydrolysée(s) en
graphie liquide. Ce tampon de lyse est composé fragments peptidiques par la trypsine. Après
d'un agent dénaturant/chaotropique (e.g. urée réduction par le dithiothréitol (DTT) et alkyla-
et/ou thiourée), de détergents zwitterioniques tion des résidus cystéine par l'iodoacétamide, la
trypsine est insérée dans les morceaux de gel par
déshydratation avec de l'acétonitrile et réhydra-
6
Les trois principales matrices pour les protéines sont
l'acide alpha-cyano-4-hydroxycinnamique (4HCCA), tation dans le tampon de trypsinolyse : 25 mM
l'acide sinapinique (SA) et l'acide 2,5-dihydroxybenzoïque (NH4)2CO3. Après une nuit à 37°C, les frag-
(DHB). ments trypsiques sont extraits du gel (e.g. 50 à
Échantillon Extraction Extrait protéique
PROTÉOMIQUE BOTTOM - UP
Séparation des protéines 1D-SDS-PAGE 2D-SDS-PAGE Bandes de gels 1D Spots de gels 2D
Séparation des peptides 1D-, 2D-nano-LC & MS - MS/MS Spectres de masse (MS et MS/MS)
TOP-DOWN
protéine
Lavage
± digestion
Fig. 5.13 Déroulé expérimental de l'approche d'histoprotéomie moléculaire par imagerie MALDI (six étapes fondamentales).
Étape 1 : collecte de l'échantillon et cryoconservation. Étape 2 : préparation au cryomicrotome de la coupe histologique déposée sur une lame conductrice ITO (oxyde
d'indium étain). Étape 3 : digestion enzymatique optionnelle, puis lavage de la coupe en particulier pour éliminer les lipides. Étape 4 : application de la matrice
(nébulisation ou goutte). Étape 5 : analyses par MALDI en mode linéaire positif ou négatif. Étape 6 : traitement des données (cartographie et statistiques) et rendu des
images.
102 Techniques immunologiques
conducteur puis délipidée par passage dans des support compatible avec les sources MALDI uti-
bains successifs de solvants organiques (e.g. étha- lisées. Il est préférable que le support soit
nol, chloroforme, hexane, isopropanol) avec ou conducteur pour ne pas altérer les champs élec-
sans digestion enzymatique préalable par la tryp- triques en source. Les conditions de dépôt de la
sine. Après déshydratation et séchage sous vide (20 matrice doivent être adaptées en fonction de
min), l'extraction sans délocalisation peut être réa- l'échantillon. Dans le cas d'une analyse directe de
lisée directement à cette étape en déposant la tissus, des spots discrets de matrice peuvent être
matrice sur la coupe sous atmosphère contrôlée, réalisés soit par l'intermédiaire d'une micropi-
afin de permettre l'ionisation et l'acquisition des pette, soit par l'utilisation d'un appareil de
spectres de masse (> 500 Da). Les données sont microdépôt automatisé. Pour la réalisation d'une
acquises en mode linéaire positif/négatif pour image entière, la coupe de tissu doit être entière-
l'identification du peptidome/protéome. En cas ment recouverte de matrice soit à l'aide d'une
de caractérisation structurale, des analyses complé- micropipette, soit par vaporisation par un spray
mentaires en mode réflectron positif sont effec- pneumatique. La méthode de microdépôt est de
tuées. Suite à l'acquisition des données par plus en plus utilisée pour minimiser la délocalisa-
MALDI-MSI (Mass Spectrometry Imaging), la tion des molécules pouvant être entraînées par
matrice est lavée de la surface de la coupe afin d'ef- les solvants. Le choix de la matrice (tableau 5.3)
fectuer une coloration histologique. Dans les est important pour optimiser l'analyse des com-
spectres acquis par imagerie MALDI, l'intensité posés en termes de nombre de molécules détec-
des signaux est matérialisée par une échelle de cou- tées, de résolution des pics, d'intensité du signal
leur superposée à la coupe histologique numérisée. et de la gamme de masse accessible. Dans le cas
Ces spectres sont analysés par des logiciels spéciale- d'une identification, les analyses sont effectuées
ment développés pour l'imagerie afin de fournir en mode automatique linéaire positif. Le mode
une étude statistique des données acquises par ana- négatif peut être envisagé dans des cas très parti-
lyse en composantes principales (APC) ou culiers de recherche de phosphopeptides. Le
Principal Component Analysis (PCA). L'analyse est mode réflectron positif est utilisé lorsque la
effectuée en mode non supervisé afin de créer des coupe de tissu a subi un traitement par digestion
groupes de spectres représentatifs des ions molécu- trypsique afin d'obtenir la caractérisation des
laires dans la région choisie de la coupe. Dans le cas peptides/protéines. Le temps d'analyse est un
où des régions histologiques distinctes sont carac- facteur limitant pour l'acquisition des spectres.
térisées sur une coupe, une analyse supervisée peut Ce temps dépend de la fréquence des tirs laser,
être réalisée dans les différentes zones d'intérêt. de la rapidité de déplacement du support pen-
Une classification (hierarchical clustering) de l'en- dant l'analyse et du temps d'acquisition de l'élec-
semble des ions détectés sur une coupe histolo- tronique. L'utilisation de lasers pouvant atteindre
gique par imagerie MALDI permet de détecter des de grandes fréquences de répétition est particu-
peptides/protéines partageant une localisation lièrement souhaitable (200–1000 Hz) et permet
commune au sein d'une coupe histologique. La de prévenir la dégradation de l'échantillon. La
corrélation entre les images MALDI et les colora- reproductibilité du déplacement de la cible sup-
tions histologiques permet la reconstitution de port des lames est un paramètre important pour
cartes peptidiques/protéiques tridimensionnelles. la qualité des images. La résolution spatiale de
l'image reconstruite est dépendante du nombre
Recommandations de mise en œuvre de points d'acquisition. La distance entre deux
La congélation des pièces histologiques à analy- points doit être au minimum égale au diamètre
ser se fait suivant une procédure adaptée à l'ima- du faisceau laser. De nombreux paramètres
gerie MALDI avec un contrôle précis peuvent affecter la reconstruction de l'image,
(température et durée) de la congélation et de la notamment le traitement des données avant
conservation des pièces étudiées. Les coupes de extraction (e.g. lissage, soustraction du bruit de
5 à 20 μm d'épaisseur sont transférées sur un fond, filtrage).
Chapitre 5. Techniques de biologie moléculaire 103
Techniques immunologiques
m/z 2101
Coupe de foie
m/z
1005 Fusion des
deux données
m/z 5135
0% 100 %
Échelle d’intensité des ions par imagerie MALDI
Fig. 5.14 Exemple d'analyse par imagerie MALDI.
Des coupes histologiques de foie de souris, avec un intérêt particulier sur les zones d'infiltration lymphoïde, sont analysées en MALDI-MSI afin d'effectuer
un regroupement (clusterisation) des peptides et protéines exprimés. Une échelle d'intensité des abondances relatives de chacun des ions moléculaires des peptides
et protéines (m/z) est exprimée par un gradient de couleur à travers la zone d'analyse afin de générer une image moléculaire.
Chapitre 6
Tests cellulaires
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
106
Techniques immunologiques
Hématimètre
Lamelle
Cellule de Malassez.
Dimensions : L : 2,5 mm, l : 2 mm,
profondeur 0,20 mm. Constituée
de 100 rectangles d’égales surfaces.
Le quadrillage total a un volume
de 1 µL. Comptage dans 10 carrés
et résultat multiplié par 10.
Cellule de Thoma.
Le quadrillage total a un volume de
0,1 µL, côté : 1 mm, hauteur : 0,1 mm.
16 grands carrés contenant chacun
16 petits carrés + 4 groupes de 3 lignes
horizontales + 4 groupes de 3 lignes
verticales. Côté de chaque petit carré : Par convention, les cellules
0,05 mm. Volume délimité par à cheval sur un trait ne sont
1 petit carré : 0,00025 µL. Volume comptées que sur deux des
délimité par 16 petits carrés : 0,004 µL. côtés de chaque carré.
Ici on comptera 6 cellules.
Les cellules plus foncées seront
comptées dans les carrés
adjacents.
Fig. 6.1 Schéma d'une cellule de comptage cellulaire ou hématimètre.
Chapitre 6. Tests cellulaires 107
– l'étude des sous-populations lymphocytaires 1,077. Il est très utilisé pour isoler les lymphocytes
est appliquée au diagnostic des déficits immu- sanguins qui ont précisément cette densité. Dans
nitaires congénitaux et au suivi des patients ce cas, le sang dilué est déposé au-dessus d'une
infectés par le VIH, ayant reçu une greffe phase de Ficoll®. Après centrifugation entre 400 et
d'organe ou de cellules hématopoïétiques. 600 g à température ambiante pendant 20 à
L'immunophénotypage permet de : numérer 30 minutes, les globules rouges et les granulocytes
les sous-populations lymphocytaires ; suivre (ou « polynucléaires ») se trouvent dans le fond du
l'état d'immunodépression et/ou apprécier la tube, en dessous du Ficoll®, tandis que les lym-
reconstitution immunitaire ; phocytes forment un tapis (ou anneau) à la surface
– l'immunophénotypage des hémopathies du Ficoll®. Les monocytes restent dans la phase
malignes permet de définir la lignée impli- supérieure (plasma + diluant). Le recueil de cette
quée, le stade de différenciation, le suivi de phase et du tapis de lymphocytes permet d'obtenir
l'efficacité des thérapeutiques ; une suspension de cellules mononucléées dites
– l'exploration fonctionnelle des cellules circu- communément PBMC (Peripheral Blood
lantes en cytométrie en flux concerne l'étude Mononuclear Cells). Celles-ci sont lavées dans un
des capacités de prolifération cellulaire ou de tampon salin phosphaté (e.g. PBS pour Phosphate-
cytotoxicité, la mesure de l'apoptose, l'appré- Buffered Saline) de façon à éliminer toute trace de
ciation des capacités de phagocytose, la détec- Ficoll®, qui peut être toxique pour les cellules si
tion de l'activation des basophiles… elles y sont exposées trop longtemps.
D'autres gradients tels que le dextran per-
mettent de séparer les granulocytes (ou « polynu-
Séparation et tri cellulaire cléaires ») par simple sédimentation. La densité du
Percoll® peut être adaptée à la population que l'on
Les méthodes classiques de centrifugation simple souhaite enrichir (i.e. densité de 1,03 à 1,08).
ou en gradients de densité sont largement utili- La technique d'élutriation permet de séparer de
sées pour séparer différentes populations cellu- grandes quantités de cellules dans de bonnes
laires présentes notamment dans le sang comme conditions de stérilité. Elle se réalise dans un élu-
les hématies, les leucocytes et les plaquettes. Le triateur qui centrifuge les cellules en gradient de
développement de nouvelles technologies utili- densité avec un prélèvement automatique au
sant des anticorps monoclonaux permet niveau des interphases. Cette technique est princi-
aujourd'hui d'enrichir par sélection positive ou palement limitée à des applications cliniques, telles
négative une population cellulaire donnée, voire que la séparation de monocytes.
de la purifier à haut niveau grâce aux trieurs de
cellules. Recommandations de mise en œuvre
Il faut connaître la densité des cellules à séparer
pour effectuer cette sélection correctement en
Techniques de séparation gradient discontinu. Il est particulièrement impor-
par densité tant de travailler à la bonne température, car la
densité varie en fonction de ce paramètre. Ainsi les
Méthodologie séparations de lymphocytes sur gradient de Ficoll®
doivent s'effectuer à 20 °C et non dans une centri-
Certaines populations cellulaires ont des densités
fugeuse réfrigérée.
suffisamment différentes pour permettre leur
séparation à l'aide de gradients de densité
(fig. 6.2). On distingue essentiellement des gra- Exemples d'applications
dients de densité discontinue dont le plus clas- • En recherche : la séparation de cellules sur gra-
sique est le Ficoll®. Ce dernier est un glucide dient de densité est un préalable à de nom-
ramifié artificiel dont la densité à 20 °C est de breuses techniques d'analyse fonctionnelle des
Chapitre 6. Tests cellulaires 111
Plasma, plaquettes,
monocytes
Sang dilué
Lymphocytes
Ficoll®
Ficoll® Granulocytes (ou « polynucléaires »)
Hématies
Densité
1,000
1,050
1,077
bées dans la boîte de Petri durant 1 h 30 à tempé- dans la colonne. Les cellules non retenues sont
rature ambiante, permettant la fixation des cellules tout d'abord éluées en milieu PBS et recueillies,
au fond de la boîte par interaction entre les anti- c'est la fraction négative. Les cellules retenues par
gènes membranaires et les anticorps, ou entre la l'aimant (fraction positive) sont ensuite recueillies
lectine et ses ligands cellulaires. Les cellules non par rinçage après avoir enlevé le champ magné-
fixées sont ensuite recueillies par aspiration du sur- tique. Cette technique est très utilisée soit pour
nageant et lavages en PBS froid. Il s'agit de la frac- enrichir directement une population cellulaire
tion dite négative. Les cellules (fraction positive) (sélection positive), soit pour obtenir cette popu-
ayant adhéré au fond de la boîte peuvent être lation par élimination des autres populations
recueillies par grattage mécanique. Cette tech- (sélection négative). La pureté de la suspension
nique simple et relativement peu coûteuse permet obtenue peut atteindre 90 à 95 % selon la fré-
de pré-enrichir une population cellulaire d'intérêt quence de la population de départ. Toutefois une
de façon très spécifique, notamment si des anti- des limites de cette technique est qu'il n'est géné-
corps monoclonaux sont utilisés. ralement possible d'enrichir les cellules par sélec-
Le principe des rosettes est d'entourer les cel- tion positive qu'à l'aide d'un seul marqueur, car la
lules d'intérêt avec des globules rouges et de sépa- persistance de billes magnétiques à la surface des
rer les rosettes ainsi formées sur un gradient de cellules empêche de réaliser une deuxième sélec-
Ficoll®. Les rosettes se trouvent alors au fond du tion positive. Cette difficulté peut être contour-
tube, entraînées par le poids des hématies. Après née en utilisant des billes liées à l'anticorps par un
élimination des autres cellules, les globules rouges pontage clivable par une enzyme. En revanche, il
peuvent être lysés, et les cellules d'intérêt (enro- est possible de pré-enrichir une population cellu-
bées) peuvent être recueillies. Cette technique laire d'intérêt par sélection négative puis d'utiliser,
relativement ancienne a été utilisée pendant long- dans un deuxième temps, une sélection positive.
temps pour enrichir les lymphocytes T humains
qui reconnaissent spécifiquement les globules Recommandations de mise en œuvre
rouges de mouton.
Des billes peuvent aussi être utilisées pour sépa- Il est nécessaire de bien choisir sa stratégie de
rer les cellules. Ce sont le plus souvent des billes sélection, positive ou négative, en fonction de
paramagnétiques couplées à des anticorps mono- l'usage ultérieur des cellules, en particulier s'il est
clonaux. Ces billes de taille variable (quelques souhaité effectuer ensuite des tests fonctionnels
nanomètres à 3 μm selon le fabricant) sont géné- qui peuvent être perturbés par la rémanence des
ralement formées soit de polysaccharide recouvert billes. La viabilité cellulaire reste en général très
de ferritine, soit de dextran ou d'époxy recouvert bonne.
de fer. Le principe repose sur le marquage des cel-
lules avec soit des anticorps monoclonaux directe- Exemples d'applications
ment couplés aux billes (marquage direct), soit • En recherche : le tri cellulaire est très utilisé en
des anticorps primaires fixés sur les cellules d'inté- recherche fondamentale en préalable à la mise
rêt qui sont ensuite mises en présence d'anticorps en culture ou pour les tests fonctionnels. Par
secondaires couplés aux billes paramagnétiques exemple, un tri des monocytes est nécessaire
(marquage indirect). La séparation des cellules avant de déclencher leur différenciation en cel-
couplées aux billes paramagnétiques s'effectue lules dendritiques par l'addition de facteurs de
dans le champ magnétique généré par un aimant. croissance et de cytokines.
La population spécifiquement reconnue par la • En clinique : dans le diagnostic de certaines
réaction antigène–anticorps peut être mélangée hémopathies où la population pathologique
aux billes ou déposée sur une colonne remplie est peu représentée, il peut être utile de la
d'une matrice de sphères magnétiques. Un champ trier au préalable. C'est le cas pour les tech-
magnétique est ensuite appliqué et les cellules niques de FISH (Fluorescence In Situ
marquées sont retenues sur la paroi du tube ou Hybridization) recherchant la translocation
Chapitre 6. Tests cellulaires 113
t(4 ;14) du myélome au sein des plasmocytes fonction du signal recueilli au moment de leur
triés sur une colonne CD138. Le chimérisme passage et généré par les propriétés de la cellule
donneur–receveur dans les suites de greffe de qu'elles contiennent.
cellules souches hématopoïétiques est égale- La première phase du tri cellulaire repose ainsi
ment réalisé de façon différentielle après avoir sur une analyse fine et multiparamétrique par
trié les lymphocytes T CD3+ et les monocytes cytométrie en flux des populations à séparer. Elle
CD14+. prend en compte, comme la cytométrie en flux
classique, la diffraction de la lumière aux petits et
aux grands angles, ainsi que des paramètres immu-
Tri cellulaire par cytométrie en flux nologiques d'expression ou non d'antigènes
reconnus par des anticorps fluorescents.
Méthodologie (tableau 6.1) La deuxième phase du tri vise à déterminer, à
Le trieur de cellules est un cytomètre en flux (voir l'issue de cette analyse, les paramètres permettant
chapitre 4). La différence consiste en la présence de décider quelle(s) est(sont) la(les) population(s)
d'un cristal piézo-électrique qui fractionne le jet à enrichir ou à éliminer. Les nouvelles générations
liquidien contenant les cellules en suspension en de trieurs permettent de purifier, à des degrés de
gouttelettes individuelles grâce à une vibration à pureté supérieure à 99 %, simultanément jusqu'à
haute fréquence. Les gouttelettes qui passent six populations cellulaires d'intérêt à des vitesses
devant le faisceau laser contiennent ainsi chacune allant jusqu'à 50 000 cellules par seconde, tout en
de façon optimale une seule cellule. Ces goutte- conservant une bonne viabilité cellulaire.
lettes peuvent être chargées électriquement et Chaque population cellulaire peut être recueillie
ainsi être déviées dans un champ électrique en stérilement, à condition que la préparation initiale
le soit, dans des tubes contenant soit un milieu de Culture cellulaire et co-cultures
culture qui permettra de cultiver les cellules après
le tri, soit dans un milieu permettant l'extraction
La culture cellulaire permet de maintenir en vie
d'ARN ou d'ADN. La plupart des trieurs de cel-
des cellules séparées de leur environnement d'ori-
lules sont également équipés d'un cloneur per-
gine. Le terme « culture in vitro » est générale-
mettant le recueil des cellules dans des plaques
ment associé à cette technologie. Deux catégories
multipuits (clonage).
principales de cellules sont utilisées, des cellules
Le tri cellulaire par cytométrie en flux est surtout
dites primaires directement recueillies depuis
utilisé en recherche. Cette technique extrêmement
l'animal ou l'être humain et dont la durée de vie
performante nécessite un appareillage spécifique et
en culture est limitée, et des lignées cellulaires
coûteux dont le maniement ne peut être fait que
immortalisées ou tumorales qui peuvent être
par des utilisateurs ayant une formation et une
maintenues en culture indéfiniment. La culture
expertise adéquates. Il est important de souligner
cellulaire exige de recréer des conditions nutri-
que la qualité d'un tri cellulaire dépend aussi de la
tives, biochimiques et biophysiques contrôlées,
préparation cellulaire de départ quant à son homo-
proches de celles dans lesquelles les cellules évo-
généité, sa viabilité et sa stérilité.
luent naturellement, et de travailler en conditions
stériles. Les co-cultures reposent sur la culture
Recommandations de mise en œuvre conjointe de différents types cellulaires dans le but
Il est important en amont de maîtriser la prépara- d'étudier leurs interactions. Les cultures et co-
tion cellulaire, surtout si des conditions de stérilité cultures cellulaires sont à la base de nombreux
sont nécessaires en aval. La définition des fenê- tests classiquement utilisés en laboratoire.
trages d'analyse cytométrique est cruciale, car
seules les cellules identifiées comme répondant aux Méthodologie
critères du tri peuvent recevoir la charge électrique
La culture cellulaire requiert la manipulation des
permettant de les déflecter quelques microsecondes
cellules en condition stérile (poste de sécurité
après leur passage devant le système optique.
microbiologique ou PSM) afin d'éviter les conta-
La viabilité des cellules a longtemps été un pro-
minations par des bactéries, champignons, levures
blème majeur avec des tris de plusieurs heures. Les
ou virus. De manière générale, les cellules sont
nouveaux instruments ont grandement amélioré
mises en culture dans des boîtes, flacons ou plaques
cet aspect.
en polystyrène dont les surfaces sont éventuelle-
ment traitées pour favoriser ou éviter une adhé-
Exemples d'applications rence des cellules au support. Cette mise en culture
• En recherche : se fait dans un milieu nutritif salin, tamponné (pH
– de nombreuses stratégies de recherche 7,4) et stérile, dont la composition varie selon le
peuvent être mises en place après un tel tri. type cellulaire et l'espèce dont proviennent les cel-
C'est le cas par exemple de l'enrichissement lules. Ce milieu est complété par des additifs per-
en lymphocytes T régulateurs (Treg) difficiles mettant des apports en nutriments et facteurs de
à isoler par tri magnétique, mais dont les croissance (e.g. sérum de veau fœtal décomplé-
fonctions peuvent être étudiées après sépara- menté, glutamine) et par des antibiotiques pour la
tion en cytométrie (lymphocytes T CD3+, protection vis-à-vis d'éventuels contaminants.
CD4+, CD25bright, CD127low) ; Certaines cellules primaires ou lignées exigent éga-
– un autre exemple est celui de l'isolement de lement des facteurs de croissance spécifiques (e.g.
cellules dendritiques plasmacytoïdes CD4+, cytokines) pour se maintenir ou se différencier en
CD56+, CD123+, DR+. culture. Les boîtes, flacons ou plaques multipuits
• En clinique : comme mentionné plus haut, le tri contenant les cellules sont placés dans des incuba-
cellulaire en cytométrie est peu utilisé pour le teurs pour lesquels sont définis la température
diagnostic. (37 °C en général), l'hygrométrie (saturation)
Chapitre 6. Tests cellulaires 115
et le taux en CO2 (5 % pour les cellules de mammi- considérée et des conditions de culture. La
fère). Les contenants ne doivent pas être étanches culture de ces lignées impose une dilution régu-
de manière à assurer les échanges gazeux avec l'at- lière, visant à maintenir une concentration cellu-
mosphère de l'étuve ; ceci est assuré par différents laire compatible avec la croissance des cellules et
systèmes de circulation des gaz. leur utilisation.
Les cellules en croissance prolifèrent soit en sus- Les co-cultures consistent en la mise en culture
pension, soit en adhérant au support. Au bout conjointe de plusieurs types cellulaires. Elles
d'un temps variable selon le type cellulaire et la peuvent avoir pour objectif d'analyser la réponse
densité initiale, les cellules peuvent atteindre une de cellules dites répondeuses suite à leur interac-
densité maximale au-delà de laquelle elles ne tion avec un ou plusieurs autres types de cellules
peuvent plus survivre. Il est nécessaire de collecter dites stimulantes. Plusieurs types de réponses
les cellules pour les utiliser ou de les diluer pour peuvent être recherchés comme la prolifération
une nouvelle mise en culture (on parle de passage cellulaire, la sécrétion de cytokines, la cytotoxi-
cellulaire ou repiquage) avant que cette densité cité ou encore la suppression d'une réponse. Une
maximale ne soit atteinte. Lorsque des cellules telle analyse suppose d'avoir établi le nombre de
adhérentes recouvrent l'ensemble de la surface du cellules à utiliser dans le test, le rapport entre les
support, on dit qu'elles arrivent à confluence. Par cellules répondeuses et les cellules stimulantes,
ailleurs, l'étape de dilution des cellules adhérentes ainsi que la technique de mesure de la réponse.
nécessite de décoller celles-ci du support. Ceci Dans certains cas, les co-cultures ont également
peut être fait soit par décollement mécanique avec pour objectif de favoriser la prolifération et/ou la
un grattoir (cell scraper ou rubber policeman), soit différenciation de cellules difficiles à maintenir,
par action d'un agent de chélation des ions diva- comme les kératinocytes primaires qui se
lents (e.g. EDTA) et/ou d'une enzyme (e.g. tryp- cultivent de façon optimale sur un tapis de fibro-
sine), permettant de rompre les liaisons établies blastes produisant des facteurs de croissance.
par les cellules avec le support. Dans certains cas, il est ainsi possible de réaliser
Si les cellules d'une culture primaire sont repi- des cultures organotypiques tridimensionnelles,
quées pour une seconde culture, on parle de permettant de reconstituer des épithéliums plu-
culture secondaire. La durée de vie des cellules ristratifiés comme la peau.
primaires en culture varie de quelques jours à
quelques semaines, à l'exception notable des cel-
lules souches qui peuvent être maintenues pen-
dant des périodes plus longues. La mise en culture
des cellules primaires suppose une phase préalable
d'isolement et, dans certains cas, de purification.
À titre d'exemple, les cellules mononucléées du
sang humain peuvent être isolées à partir d'une
poche de sang après lyse des globules rouges et/
ou centrifugation en gradient de Ficoll®. Une
étape de purification peut être utilisée pour sélec-
tionner une population parmi ces cellules (e.g.
monocytes CD14+) par tri magnétique ou cyto-
métrie en flux.
Les lignées cellulaires peuvent dériver de cel-
lules cancéreuses, de cellules embryonnaires Fig. 6.3 Photographie en microscopie optique
(fig. 6.3) ou de cellules immortalisées ex vivo, par à contraste de phase d'une lignée adhérente
de fibroblastes de souris (lignée 3 T3–L1) à 70 %
infection avec un virus par exemple. Elles se de confluence.
maintiennent en culture indéfiniment en se divi- Ces cellules ont été obtenues à partir de fibroblastes
sant selon un rythme qui dépend de la lignée embryonnaires de souris.
116 Techniques immunologiques
Les cellules peuvent être archivées par congéla- mycoplasmes dans les lignées cellulaires (par colo-
tion en présence d'un cryoprotecteur (e.g. DMSO ration des cellules, test enzymatique ou PCR),
5–10 %) dans des ampoules conservées dans afin de pouvoir les traiter si nécessaire avec des
l'azote liquide. Elles prolifèrent de nouveau après antibiotiques spécifiques des mycoplasmes.
décongélation, élimination du cryoprotecteur et Le changement de couleur du milieu de culture
remise en culture. peut aussi traduire la souffrance cellulaire induite
par un simple épuisement des nutriments.
Recommandations de mise en œuvre
Il est nécessaire d'observer régulièrement les cel- Avantages/inconvénients
lules au microscope afin d'apprécier leur état et
leur densité. Dans tous les cas, la mise en culture Avantages Inconvénients
requiert un comptage préalable des cellules, qui Maintien indéfini des lignées Manipulations en conditions
permet de les diluer à la concentration adéquate et cellulaires stériles
Stocks de cellules relativement Contrôle des conditions de
de vérifier la viabilité des cellules si nécessaire. stables permettant des études culture : température, CO2,
Cette numération peut se faire soit au microscope comparatives à grande échelle hygrométrie
dans des chambres de comptage, soit à l'aide de Co-cultures permettant l'étude Repiquages/passages fréquents
fine d'interactions cellulaires si prolifération rapide
compteurs automatisés.
Grande variété de tests Entretien des lignées
Pour éviter que les cellules cultivées et utilisées applicables aux cellules en Contaminations par les
dans les laboratoires ne dérivent trop par rapport à culture mycoplasmes
la lignée d'origine, il est recommandé de relancer Viabilité parfois faible des
cultures primaires
régulièrement une culture à partir d'une ampoule Modifications des caractères de
du stock initial. Un grand nombre de lignées cel- certaines lignées cellulaires
lulaires sont référencées et commercialisées par les
centres internationaux de référence et de conser-
vation des lignées cellulaires : l'European Collection Exemples d'applications
of Cell Cultures (ECACC) et l'American Type • En recherche : des cellules de mammifères sont
Culture Collection (ATCC). cultivées dans la grande majorité des laboratoires
Les cultures cellulaires peuvent être accidentel- de recherche en immunologie. En effet, la culture
lement contaminées par des bactéries extracellu- de lignées est couramment utilisée pour préparer
laires ou intracellulaires (e.g. mycoplasmes), des des cellules qui seront utilisées dans de multiples
levures ou des champignons. Certaines de ces tests (e.g. transfection, transduction, cytotoxi-
contaminations sont suspectées lors d'un change- cité), mais aussi pour produire des anticorps
ment de couleur du milieu, lorsque celui-ci (hybridomes) ou encore des particules virales. Les
contient un indicateur de pH, révélateur d'une cellules primaires, isolées de modèles animaux ou
acidification (e.g. couleur jaune, bactéries) ou à partir de donneurs ou de patients, sont utilisées
d'une alcalinisation (e.g couleur rose, levures), et comme modèles ex vivo pour comprendre les pro-
confirmées par simple observation au microscope. priétés des différents types cellulaires, leurs inter
D'autres contaminations (e.g. mycoplasmes, virus) actions et les éventuelles modifications qui
peuvent en revanche ne pas être aisément détec- peuvent être impliquées en pathologie.
tées. Le plus souvent, des antibiotiques à large • En clinique :
spectre sont utilisés pour prévenir les infections – les cultures cellulaires sont utilisées pour éva-
bactériennes. Toutefois, les mycoplasmes ne sont luer la capacité de prolifération des lympho-
pas sensibles à ces antibiotiques et peuvent infec- cytes en présence d'un mitogène (recherche
ter les cellules en culture, ce qui peut induire une de déficit immunitaire fonctionnel) ou d'un
modification du cycle réplicatif ou des voies de antigène (recherche de sensibilisation de l'im-
transduction, ou modifier la sensibilité de certains munité cellulaire). Les réponses allogéniques
tests. Il est commun de rechercher la présence de peuvent être évaluées dans des cultures mixtes
Chapitre 6. Tests cellulaires 117
118
Techniques immunologiques
Co-culture 3 jours
Cytométrie en flux
1 2
Cellules non activées Cellules activées Lymphocytes T + CD Lymphocytes T + CD-OVA
Canal contrôle sans marquage
(intensité de fluorescence)
Nombre de cellules
Nombre de cellules
CFSE (intensité de fluorescence) CFSE (intensité de fluorescence) CFSE (intensité de fluorescence)
Fig. 6.4 Mesure de la prolifération de lymphocytes T par dilution du CFSE.
Des lymphocytes T CD4 OT-II, spécifiques d'un peptide de l'ovalbumine de poule (OVA), ont été isolés et marqués avec 5 μM de CFSE pendant 15 minutes.
Après lavage, les lymphocytes ont été mis en culture en présence de cellules dendritiques préalablement chargées ou non en OVA (CD-OVA et CD respectivement), à un rapport
de dix lymphocytes pour une cellule dendritique.
➀ Trois jours plus tard, la prolifération des lymphocytes est visualisée par cytométrie en flux. Pour les lymphocytes cultivés avec des cellules dendritiques ne présentant pas
l'OVA (LT + CD), on observe une seule population de lymphocytes intensément fluorescents : ces lymphocytes ne se sont pas divisés. Pour les lymphocytes cultivés avec des
cellules dendritiques chargées en OVA (LT + CD-OVA), on détecte huit populations correspondant à des lymphocytes présentant des intensités de fluorescence distinctes.
➁ Les histogrammes correspondants sont numérotés de 0 (lymphocytes non divisés) à 7 (cellules filles obtenues après sept divisions) en orange. Les logiciels d'analyses
permettent de connaître le pourcentage de cellules dans chaque pic et de calculer des index de prolifération.
Il est à noter qu'ici les représentations ➀ et ➁ proviennent de deux expériences différentes.
Chapitre 6. Tests cellulaires 119
Sel de
tétrazolium
Absorbance (A492)
Succinate
déshydrogénase
cellulaire (CTLL-2)
Formazan
Fas-L
V
Annexine V
Récepteur de
mort
Perforine
FADD Bourgeonnement
de la membrane
Procaspase 8
plasmique
Caspase 8
Lésions de l’ADN Flip flop des
Phosphatidyl-
Granzyme B sérines
BH3 BH3
IV
APOPTOSE
I
III Condensation
Y
du noyau
PARP1
Cascade des PARP1
APAF1
Caspase 3
Procaspase 9 Caspase 9
II
l'apoptose, sont disponibles. Leur combinaison de DiOC6(3) pour une quantité de cellules don-
permet une approche complète du phénomène. née. Il est impératif d'incuber les cellules le temps
indiqué pour éviter les marquages non
spécifiques.
Mesure des modifications L'utilisation de découplants respiratoires
mitochondriales liées à l'apoptose comme le FCCP (carbonyl cyanide p-trifluoro-
methoxyphenylhydrazone) est indispensable
Les modifications mitochondriales au cours de pour évaluer l'existence d'une chute de
l'apoptose sont caractérisées par une perméabili- potentiel mitochondrial (contrôle positif de
sation de la membrane externe via l'action de dépolarisation).
protéines pro-apoptotiques de la famille BCL2
induisant le relargage du cytochrome c et
d'autres protéines toxiques dans le cytosol. On Évaluation de l'altération
observe par ailleurs une chute du potentiel mito- des membranes plasmiques
chondrial transmembranaire qui peut être liée à l'apoptose
mesuré par des sondes potentiométriques en
cytométrie en flux. Après un signal pro-apoptotique, les phospholi-
pides et en particulier la phosphatidylsérine (PS)
basculent de la face interne à la face externe de la
Méthodologie membrane cellulaire et peuvent se lier à l'annexine
Le 3,3′-dihexyloxacarbocyanine iodide, ou V. In vivo, l'exposition des phosphatidylsérines
DiOC6(3), est un colorant qui s'accumule dans les représente un signal « eat me » qui facilite la pha-
membranes des mitochondries mais aussi au gocytose des cellules apoptotiques par les
niveau du réticulum endoplasmique et de la mem- macrophages.
brane plasmique.
Les cellules en suspension à étudier sont trai- Méthodologie
tées ou non par des inducteurs d'apoptose. Les
cellules sont comptées et incubées 20 minutes à Les cellules (adhérentes ou en suspension) sont
température ambiante en présence d'une incubées ou non en présence d'inducteurs d'apop-
concentration connue de DiOC6(3) dans du tose, lavées et centrifugées. Le culot est remis en
tampon salin phosphate (PBS). Le marquage suspension dans un tampon contenant de l'an-
mitochondrial est associé à l'utilisation d'un nexine V pendant 30 minutes à température
marqueur d'exclusion pour vérifier l'intégrité de ambiante, puis avec de l'IP ou du 7-AAD,
la membrane plasmique et les cellules sont donc 10 minutes avant l'analyse. Les cellules peuvent
incubées également 10 minutes avec de l'iodure être immunophénotypées simultanément en les
de propidium (IP), ou du 7-aminoactinomycine marquant par des anticorps monoclonaux.
D (7-AAD). Les cellules peuvent être immuno- L'annexine V se comporte comme une sonde
phénotypées simultanément en les marquant par fluorescente qui marque uniquement les cellules
des anticorps monoclonaux. L'analyse est réali- en apoptose, elle ne se lie pas aux cellules vivantes
sée par cytométrie en flux (fig. 6.7). Les cellules et ne traverse pas la membrane plasmique. Les
vivantes ont une fluorescence mitochondriale molécules d'annexine V peuvent être couplées à
forte qui diminue dans les cellules différents fluorochromes pour être détectées en
apoptotiques. cytométrie en flux ou en microscopie à fluores-
cence. Les cellules vivantes sont double négatives
pour l'annexine V et l'IP ou le le 7-AAD ; les cel-
Recommandations de mise en œuvre lules en apoptose précoce sont annexine V+ et
Pour avoir des résultats reproductibles, il est indis- IP/7AAD− et les cellules en apoptose tardive sont
pensable d'utiliser une concentration déterminée annexine V+ IP/7-AAD+ (voir fig. 6.7).
Non traitées Traitées
Cellules
I Cellules mortes Analyse du potentiel respiratoire mitochondrial par cytométrie en flux
vivantes
Cellules Les cellules en culture sont traitées ou non par des inducteurs d’apoptose. Les
7 -AAD
Cellules vivantes
apoptotiques cellules sont lavées, centrifugées et le culot cellulaire est incubé dans le tampon
Diminution du
potentiel phosphate (PBS) contenant le DiOC6(3) et du 7-AAD. Les cellules vivantes ont
respiratoire une intensité de fluorescence du colorant forte (à gauche), qui diminue dans les
mitochondrial cellules en apoptose (à droite), les cellules mortes ont perdu leur potentiel
membranaire mitochondrial et effluent le 7-AAD (à droite).
DiOC6(3)
Clivage de PARP visualisé par western-blot
III 1 2 Les protéines des extraits cellulaires sont séparées sur gel de polyacrilamide puis
113 kD transférées sur une membrane incubée avec un anti-PARP-1 puis un anticorps
PARP
Clivage de 89 kD secondaire couplé à la peroxydase. L’anti-PARP met en évidence les formes
PARP intacte (113kD) et clivée (89 kD) de PARP dans les cellules apoptotiques(2).
M 1 2
Mesure de la fragmentation de l’ADN sur gel d’agarose
Mesure sur gel
IV Les cellules sont lysées et l’ADN isolé est déposé sur un gel d’agarose contenant
1,5 kb du bromure d’éthidium. La visualisation de l’ADN se fait en lumière UV.
1 kb
M : témoin de masse moléculaire. 1 : échantillon non traité. 2 : échantillon traité
0,5 kb par un inducteur d’apoptose : l’ADN est clivé au niveau des liens
Fragmentation de l’ADN
Apoptose
a : Détection des cellules apoptotiques par cytométrie en flux.
TUNEL
Annexine V
immunitaires. Les cellules suppressives peuvent un colorant cellulaire, par exemple du CFSE
être de différentes origines comme des lympho- (CarboxyFluorescein Diacetate Succinimidyl Ester)
cytes régulateurs (e.g. Treg, Breg), des cellules dont la quantité initiale est répartie également
présentatrices d'antigènes ou des cellules mésen- dans les cellules filles à chaque division, ce qui per-
chymateuses. Ces cellules agissent par contact met de suivre la prolifération cellulaire par cyto-
direct et/ou par l'intermédiaire de médiateurs métrie en flux. À cette co-culture sont ajoutées
solubles (e.g. cytokines) pour inhiber, spécifique- des cellules présentatrices d'antigènes préalable-
ment ou non, l'activité de cellules cibles. L'effet ment irradiées ou dont la prolifération est bloquée
de la suppression peut se traduire par une diminu- chimiquement (e.g. actinomycine D), ainsi que
tion de la capacité effectrice des cellules ciblées, l'antigène d'intérêt destiné à stimuler les lympho-
une inhibition de leur prolifération, leur élimina- cytes T conventionnels et/ou régulateurs. Ces
tion et éventuellement la disparition de symp- cellules présentatrices d'antigènes sont idéalement
tômes cliniques in vivo. purifiées à partir du même échantillon biologique,
voire lors du même tri cellulaire si l'appareillage
disponible le permet, en recueillant les cellules
Méthodologie
mononucléées n'exprimant pas le marqueur CD3
À la suite des travaux de Shimon Sakaguchi ayant (e.g. lymphocytes B, monocytes et cellules dendri-
décrit les cellules T régulatrices CD4+CD25+ en tiques, qui sont toutes les trois susceptibles de
1995, Angela Thornton et Ethan Shevach ont été présenter des antigènes).
les premiers à décrire le test de suppression in vitro Après culture à 37 °C pendant 72 à 96 heures
qui sert toujours de référence. Le principe de ce de ce mélange cellulaire test et des témoins adé-
test consiste à mettre en co-culture les cellules quats (en particulier sans Treg), la suspension cel-
dont on recherche la fonction suppressive, comme lulaire est lavée et marquée de nouveau par un
des cellules Tregs (CD3+CD4+CD25+), avec les anticorps anti-CD4 afin de repérer par cytométrie
lymphocytes T conventionnels (e.g. en flux la prolifération des cellules T répondeuses
CD3+CD4+CD25−, CD3+CD4+CD127+) dont (en excluant les cellules présentatrices d'antigène
on cherche à inhiber la prolifération et les fonc- de l'analyse). Si les Tregs sont bien suppresseurs,
tions effectrices (fig. 6.8). Cette co-culture peut cette prolifération est moindre en leur présence
aussi contenir des cellules présentatrices d'anti- (fig. 6.9). L'effet inhibiteur des cellules régula-
gène afin de stimuler les lymphocytes spécifiques trices sur les lymphocytes conventionnels peut
d'un antigène précis. aussi être visualisé par un test d'incorporation de
Les cellules mononucléées sanguines totales thymidine tritiée (3H-TdR). Le dosage des cyto-
sont tout d'abord isolées par gradient de densité. kines (e.g. IL-2) dans le surnageant de co-culture
Les populations lymphocytaires CD3+CD4+ sont ou la recherche des cytokines intracytoplasmiques
ensuite purifiées séparément sur un cytomètre en dans les cellules répondeuses sont des alternatives
flux disposant d'une fonction de trieur à la mesure de la prolifération.
(Fluorescence Activated Cell Sorter ou FACS), en Il est également possible de réaliser ces tests
se basant sur l'immunophénotype différentiel in vivo en injectant des Tregs purifiés à des ani-
CD25high/CD127low des Tregs humains et maux immunisés ou greffés. Si ces cellules sont
CD25low/CD127high des cellules T convention- efficaces, elles inhibent les réponses spécifiques
nelles naïves, révélé à l'aide d'un cocktail d'anti- humorales et cellulaires ou la réaction du greffon
corps monoclonaux. Après ce tri, les cellules sont contre l'hôte.
lavées pour éliminer toute trace de chélateur de Cette méthode peut aussi être utilisée pour
calcium (e.g. EDTA) et mises en co-culture dans mesurer la capacité des Tregs à supprimer une
des plaques à 96 puits en proportions équivalentes réaction allogénique au cours d'une culture mixte
(1:1) ou non (e.g. 1:2 ; 1:10). Pour apprécier la entre des lymphocytes T du receveur et des lym-
prolifération des cellules T naïves, ces dernières phocytes T irradiés du donneur, sans utiliser de
subissent une étape préalable de marquage avec cellules présentatrices d'antigène ni d'antigène.
Tri cellulaire
Antigène
2 x 104 CD4+CD25+CD127lowTreg +
5 x 104
cellules
CD25
+ présentatrices
irradiées
2 x 104 CD4+CD25–CD127+
Marquage CFSE
Cellules en
RPMI + 5 % sérum
CD127
72–96 h à 37 oC
Lymphocytes Lymphocytes + Antigène
+ Antigène + Tregs
CFSE
Fig. 6.8 Illustration d'une suppression in vitro.
130 Techniques immunologiques
100 100
80 80
% Suppression
% Prolifération
60 60
40 40
20 20
R = cellules répondeuses
0 S = cellules suppressives 0
5)
)
)
R
)
5)
)
.5
R
:1
.5
:1
.2
:0
(1
.2
:0
(1
:0
(1
:0
(1
+S
(1
+S
(1
+S
+S
+S
R
+S
R
R
R
R
Fig. 6.9 Résultats d'inhibition de prolifération des lymphocytes CD4+CD25− par des Tregs CD4+CD25+CD127low
spécifiques du même antigène cible.
1000 1000
Gate: R1
800 RN1
100
600
counts
SSC
400
10
200
A 1 B 0
1 10 100 1000 0.1 1 10 100 1000
FSC FL1
500 1200
Gate: R1 Gate: R2
44,6 %
counts
counts
300 720
200 480
100 240
C D
0 0
0.1 1 10 100 1000 0.1 1 10 100 1000
FL1 FL1
Fig. 6.10 Des particules de zymosan (préparation de parois de levure S. cerevisiae) ont été marquées à la fluorescéine
et opsonisées avec un sérum humain.
Les phagocytes (lignée PLB-985 différenciée) ont été incubés avec le zymosan pendant 45 min à 37 °C et ensuite analysés
par cytométrie en flux. Phagocytes (R1) et zymosan (R2) se distinguent sur les paramètres morphologiques (FSC et SSC,
A). L'autofluorescence (FL1) des phagocytes définit le seuil de détection de cellules ayant phagocyté au moins une
particule (RN1, B). L'analyse de la fluorescence (FL1) des particules se fait sur la fenêtre des phagocytes (R1, C).
On observe que 44,6 % des phagocytes ont une fluorescence au-dessus du seuil d'autofluorescence et ont donc
internalisé au moins une particule de zymosan. La fluorescence du zymosan est analysée sur la fenêtre R2. La fluorescence
moyenne des phagocytes est de 10,2 (en RN1, C) et la fluorescence moyenne du zymosan est de 2 (RN2, D). Donc les 44,6 %
de phagocytes au-dessus du seuil ont en moyenne internalisé cinq particules chacun.
phagocytes, l'adhérence aux particules (opsoni- peuvent altérer les fluorophores et ainsi modifier
sation, récepteurs du phagocyte), l 'internalisation le résultat indépendamment du niveau de phago-
et la digestion des particules. Une différence cytose. Ceci est particulièrement important pour
d'indice de phagocytose entre deux échantillons les granulocytes (ou « polynucléaires ») neutro-
peut être liée à un ou plusieurs de ces philes. Des contrôles supplémentaires tels que la
paramètres. neutralisation du phagosome avec un ionophore à
Les conditions drastiques à l'intérieur du pha- la fin de la phagocytose sont parfois nécessaires
gosome (e.g. pH, enzymes, radicaux oxygénés) pour interpréter les résultats.
Chapitre 6. Tests cellulaires 133
Legionella pneumophilia
Pathogènes 1 2 3
RavZ
TLR a
Listeria
Shigella
CMH-II
Autophagosome + peptide
Inlk b
lscA
NF-kB
Lysosome Inflammation
Phagophore
L'autophagosome délivre des PAMPs et des de l'autophagie. Ainsi, la protéine IcsB de Shigella
épitopes antigéniques lors de sa fusion avec le masque les déterminants VirG reconnus par la pro-
lysosome, permettant aux TLR des endosomes et téine ATG-5, tandis que la protéine InlK de
aux molécules CMH de classe II d'interagir avec Listeria décore la bactérie de protéines cellulaires.
leur ligand. Le chargement des peptides dans ces Les virus VIH, HHV-1 et Influenza codent des
molécules de classe II concerne également des protéines se complexant à la Bécline 1, empêchant
exopeptides, ce qui augmente et diversifie l'activa- son activation. Enfin, la polymérisation de l'actine
tion des lymphocytes T CD4+. par Shigella et Listeria éloigne les bactéries du site
Dans le cas du virus Coxsackie B, l'activation de d'autophagie. Dans le cas de Legionella pneumo-
TLR3, qui engendre la production d'interféron de phila, l'autophagosome constitue même la niche
type 1, est dépendante du processus d'autophagie. réplicative de la bactérie qui est capable de bloquer
En effet, l'ARN viral est peu accessible dans les la fusion avec le lysosome en décomplexant les pro-
endosomes, car il est protégé par la capside virale. téines LC3 des membranes de l'autophagosome.
Du fait de sa propriété d'éliminer les altérations Les Picornavirus utilisent les autophagosomes
cellulaires et les pathogènes, l'autophagie contri- comme plate-forme réplicative et comme système
bue à réduire l'inflammation. de libération de nouveaux virions et le virus de la
La plupart des pathogènes ont développé des dengue induit l'autophagie des gouttelettes lipi-
mécanismes d'échappement, voire de subversion diques afin de produire l'énergie nécessaire à sa
Chapitre 6. Tests cellulaires 135
réplication. Enfin, le virus de l'hépatite C (VHC) 37 °C dans un tube en verre, sous agitation douce.
utilise l'autophagie pour inhiber la réponse inflam- Les bactéries opsonisées doivent être utilisées
matoire et la production d'interférons de type 1. immédiatement ou congelées à −80 °C.
L'autophagie est vraisemblablement un des pre- Pour la co-culture, il est nécessaire de respecter un
miers mécanismes d'immunité apparu chez les ratio bactéries : phagocytes de 10:1 et de prévoir un
eucaryotes. Sa pérennité au cours de l'évolution contrôle avec des bactéries seules afin de connaître
témoigne de son efficacité pour combattre les leur taux de croissance durant la manipulation, ainsi
pathogènes intracellulaires qui ont développé de que l'effet négatif des tampons utilisés. Les tubes
nombreux mécanismes d'échappement à l'auto- sont incubés à 37 °C sous agitation douce et des
phagie, tandis que les cellules ont multiplié et diver- échantillons sont prélevés à différents temps pour
sifié les modalités d'initiation de ce processus, établir une courbe de perte de viabilité bactérienne.
notamment en ciblant les différentes étapes du Une centrifugation différentielle permet de
développement du pathogène (e.g. adhésion, endo- séparer les bactéries non phagocytées, qui restent
cytose, libération cytosolique, multiplication). dans le surnageant des phagocytes ayant interna-
lisé des bactéries.
L'étape de quantification des bactéries est réalisée
Bactéricidie par un comptage des Colony Forming Units (CFU).
Après lyse hypotonique, les culots cellulaires sont
L'activité bactéricide permet aux phagocytes d'éli- étalés sur un gel d'agarose et incubés à 37 °C pen-
miner les micro-organismes après les avoir internali- dant une nuit. Les colonies sont comptées afin
sés dans les vacuoles de phagocytose. Cette activité d'établir la perte de viabilité des bactéries en fonc-
comprend deux mécanismes principaux, la produc- tion du temps d'incubation avec les phagocytes.
tion de formes réactives de l'oxygène et la libération
de peptides antimicrobiens et protéolytiques dans la
Recommandations de mise en œuvre
vacuole de phagocytose. L'activité bactéricide peut
être quantifiée en mesurant la perte de viabilité de Afin d'éviter une trop grande variabilité dans les
bactéries après leur mise en culture avec des phago- résultats, il est nécessaire de travailler en milieu
cytes. Si les bactéries non phagocytées ne sont pas stérile avec des tubes en verre. L'agitation pendant
séparées des phagocytes, on obtient à la fois une la co-culture est importante afin d'éviter la forma-
quantification de la phagocytose et de la bactérici- tion d'agrégats de phagocytes et d'assurer un bon
die. Pour quantifier uniquement la bactéricidie, il contact entre phagocytes et bactéries.
est nécessaire d'éliminer par centrifugation les bac- Les résultats sont présentés sous forme d'une
téries non phagocytées. Afin de faciliter la lecture de courbe de viabilité des bactéries en fonction du
la viabilité bactérienne, des techniques utilisant de la temps d'incubation avec les phagocytes. Il est pos-
thymidine radiomarquée ou de l'acridine orange sible aussi d'établir des constantes de phagocytose
ont été proposées, mais sont peu utilisées. et de bactéricidie. Il existe différentes formules de
calcul spécifiques.
Méthodologie
Avantages/inconvénients
Les phagocytes peuvent être issus de lignées cellu-
laires, de cultures primaires ou être isolés à partir
de sang frais. Dans ce cas, ils doivent être mainte- Avantages Inconvénients
nus à température ambiante et utilisés dans Différenciation entre L'étalement des bactéries et le
l'heure. phagocytose et bactéricidie comptage des CFU exigent un
De nombreuses bactéries sont utilisables, dont Techniques de microbiologie travail manuel long et délicat
simples et peu onéreuses La réalisation des courbes
Staphylococcus aureus. Il est indispensable d'opso- nécessite des manipulations
niser les bactéries avant le test de bactéricidie en multiples (dilutions et cinétique)
les mettant en contact avec du PBS contenant Les calculs sont longs
et complexes
10 % de sérum autologue, pendant 30 à 60 min à
136 Techniques immunologiques
et des DUOX fait l'objet de multiples études, produit par les phagocytes stimulés réduit le
notamment dans le domaine des maladies NBT, jaune à l'état basal, alors transformé en
inflammatoires. précipité bleu nuit/noir de formazan à l'intérieur
de la cellule. Le pourcentage de cellules rédui-
sant le NBT est décompté au microscope. Cette
Méthodologie
technique peut être transformée en mesure
Le principe général des tests utilisés repose sur la quantitative après extraction du bleu de forma-
réduction ou l'oxydation d'une molécule par les zan intracellulaire.
FRO produites par les NADPH oxydases activées. Certaines méthodes permettent de mesurer à la
Certaines techniques mesurent la quantité totale fois la production totale et le pourcentage de cel-
de FRO produite par les cellules, d'autres évaluent lules productrices de FRO, à l'aide de molécules
le pourcentage de cellules les produisant. Ceci est fluorogènes – dichlorofluorescéine-diacétate
particulièrement intéressant dans la recherche (DCFH-DA), dihydrorhodamine 123 (DHR123),
d'une mosaïque fonctionnelle caractérisée par une hydroéthidine (HE) – qui pénètrent dans la cel-
double population de neutrophiles chez les vec- lule. Elles n'émettent pas de fluorescence à l'état
trices de la CGD liée au chromosome X. Selon la basal mais, après oxydation par les FRO, donnent
méthode utilisée, une production extra- et/ou naissance à un dérivé émettant une fluorescence
intracellulaire de FRO est mesurée. après excitation à une longueur d'onde appro-
Parmi les techniques évaluant la quantité totale priée. Ces molécules sont peu spécifiques des dif-
produite, la technique de référence spécifique de férentes espèces de FRO produites.
la production de l'anion superoxyde (O2•−) La transfection de vecteurs codant pour des
repose sur la réduction du cytochrome c mesurée molécules oxydées spécifiquement par certaines
par spectrophotométrie à 550 nm et inhibée par la FRO conduisant ainsi à la formation d'un fluoro-
superoxyde dismutase, reflétant l'O2•− libéré dans gène a également été développée (sonde HyPer et
le milieu extracellulaire par la cellule stimulée. Il H2O2). Grâce à des molécules d'adressage, cette
s'agit d'une technique quantitative dont les résul- transfection permet également de déterminer le
tats sont exprimés en nanomoles d'O2•−/unité de compartiment cellulaire où sont produites les
temps/nombre de cellules. FRO. La fluorescence peut être mesurée globale-
La chimioluminescence évalue l'oxydation de ment dans un fluorimètre ou évaluée par cyto
certaines molécules (luminol, lucigénine…) métrie en flux. Dans ce cas, on mesure à la fois la
conduisant à une émission de photons corrélée quantité de fluorescence, le pourcentage et les
à la quantité de FRO les ayant oxydées. Les caractéristiques des cellules produisant cette fluo-
résultats, mesurés par un luminomètre, sont rescence. Cette technique permet ainsi de détecter
exprimés en unité arbitraire/nombre de cel- l'existence de sous-populations cellulaires produi-
lules. Il existe différentes sondes pénétrant ou sant plus ou moins de FRO. L'intensité de fluo-
non à l'intérieur de la cellule. La production rescence émise est proportionnelle à l'intensité de
extracellulaire peut être amplifiée par l'addition production de FRO. Ces sondes sont également
de peroxydase. Il s'agit d'une technique quanti- utilisées en microscopie confocale pour identifier
tative très sensible mais peu spécifique des les cellules productrices et éventuellement le com-
espèces de FRO produites. partiment cellulaire impliqué.
Une autre technique utilise une sonde fluoro- Les différents composants des NADPH oxy-
gène, l'amplex red, oxydée en présence de peroxy- dases peuvent être étudiés par western-blot avec
dase et d'H2O2. La production totale d'H2O2 dans des anticorps spécifiques. En ce qui concerne la
le milieu extracellulaire est ainsi évaluée. NADPH oxydase phagocytaire, l'absence d'un
Parmi les techniques appréciant le pourcentage des composants oriente le diagnostic génétique
de cellules produisant des FRO, la technique de la granulomatose septique chronique. Des
cytologique classique est la réduction du nitro- anticorps spécifiques des différentes sous-unités
bleu de tétrazolium (NBT). L'anion superoxyde des NOX et de leurs sites phosphorylés après
138 Techniques immunologiques
des mastocytes, des basophiles, des lymphocytes de la famille LAMP (LAMP-1 et LAMP-2). La
cytotoxiques), et des vésicules de plus petite dégranulation peut être initiée pour les cellules
taille, contenant des cytokines et des chimio- NK par une co-culture avec la lignée K562, et
kines, dont l'exocytose est régulée par des voies pour les lymphocytes T par le mélange PMA–
moléculaires distinctes. ionomycine, par des anticorps dirigés contre CD3,
par des cytokines activatrices, ou encore par des
Méthodologie antigènes.
Le marqueur de dégranulation des basophiles le
plus fréquemment utilisé est CD63 ou LAMP-3 Recommandations de mise en œuvre
(Lysosomal-Associated Membrane GlycoProtein 3), La dégranulation étant un phénomène pouvant
situé sur la membrane des granules sécrétoires, qui se déclencher rapidement, des précautions expé-
apparaît transitoirement sur la membrane plas- rimentales sont à respecter. Il faut éviter les chocs
mique des basophiles lors de leur dégranulation. thermiques des lignées ou des cultures primaires
Cette dernière peut être provoquée par des frac- et tester rapidement les prélèvements frais.
tions du complément (C5a), des peptides bacté- L'expression des résultats rend compte généra-
riens (fMLP) ou des allergènes vis-à-vis desquels le lement de l'intensité d'expression du ou des mar-
patient est sensibilisé (fig. 6.12). queurs considérés et de la proportion de cellules
Les tests d'activation des lymphocytes T et NK activées par un stimulus donné, à une concentra-
sont relativement similaires. Dans la majorité des tion donnée. Dans certains cas, des algorithmes
cas, le marqueur de dégranulation utilisé est prenant en compte plusieurs marqueurs peuvent
CD107a et/ou CD107b, deux autres molécules être développés.
3. Libération
des médiateurs
et modifications
1. Incubation du phénotype
des basophiles du basophile
sensibilisés
avec l’allergène
ayant provoqué
la réaction
Expression de
CD63 à la surface
Relargage de
médiateurs
solubles
Fig. 6.12 Dégranulation des basophiles par contact avec l'allergène dont les IgE fixées sur les récepteurs FcεRI de
ces cellules sont spécifiques.
140 Techniques immunologiques
Chaque évaluation est à encadrer par un leucocytes dans les ganglions ou les tissus inflam-
contrôle négatif correspondant à la dégranulation matoires, d'autre part les communications inter
spontanée et un contrôle positif correspondant à cellulaires.
la dégranulation maximale.
Méthodologie
Avantages/inconvénients Le test d'adhésion classique est une technique
statique en plaque à puits. Elle consiste à déposer
Avantages Inconvénients un nombre connu de cellules au fond d'une
Pour les mastocytes et les Nécessité de travailler sur des plaque recouverte d'une culture de cellules
lymphocytes T, confirmation de cellules vivantes endothéliales ou de molécules d'adhésion d'inté-
sensibilisations spécifiques Difficultés d'acheminement du rêt. Après lavage, le nombre de cellules ayant
Tests spécifiques de chaque prélèvement au laboratoire
type cellulaire Dégranulation spontanée adhéré est compté en microscopie inversée. Cette
Réalisation rapide possible technique ne permet pas de quantifier les aspects
Variabilité interindividuelle dynamiques de l'adhésion cellulaire, car ni la
Technologie complexe (gammes durée pendant laquelle la cellule mobile interagit
de stimuli) et interprétation
spécialisée avec le substrat ni la durée pendant laquelle la
cellule adhère ne sont mesurées. Enfin, la force
appliquée au moment du lavage est mal contrô-
Exemples d'applications lée, ce qui ne permet pas de tester la résistance
des liaisons.
• En recherche : les travaux fondamentaux sur
L'utilisation d'une chambre à flux laminaire
l'activation cellulaire sont amenés à explorer les
permet de mimer un écoulement à proximité
mécanismes de dégranulation.
d'une surface (fig. 6.13). La chambre elle-
• En clinique :
même est creusée dans un matériau transparent,
– le test de dégranulation des basophiles est uti-
dont la face inférieure est une lamelle amovible,
lisé en pratique courante pour le diagnostic
sur laquelle on peut cultiver un endothélium ou
d'hypersensibilité allergique immédiate, en
fixer des molécules d'adhésion. La chambre est
complément des tests cutanés et de la mise en
perfusée grâce à un canal d'entrée et un canal de
évidence d'IgE spécifiques sériques. Il pré-
sortie (en général à l'aide d'un pousse-seringue),
sente un intérêt majeur dans le diagnostic des
ce qui induit un cisaillement près de la surface.
hypersensibilités médicamenteuses pour les-
Les cellules circulantes d'intérêt sont injectées
quelles peu de tests de détection des IgE spé-
dans la chambre et se déplacent dans le flux.
cifiques de médicaments sont disponibles ;
Elles sédimentent et peuvent interagir avec la
– les tests de dégranulation des lymphocytes
paroi inférieure et s'arrêter. La chambre est pla-
cytotoxiques sont utiles dans le diagnostic des
cée sur un microscope inversé, une caméra CCD
lymphohistiocytoses hémophagocytaires
filme les déplacements des cellules. L'utilisation
familiales, dans lesquels des déficits de molé-
classique consiste à mimer un écoulement vas-
cules impliquées dans la dégranulation ont
culaire en utilisant des cellules endothéliales sur
été rapportés.
la surface inférieure de la chambre. Les cellules
endothéliales et circulantes peuvent être stimu-
lées à volonté. Une seconde application de cette
Migration cellulaire/ chambre consiste à utiliser une surface recou-
adhérence verte de molécules d'adhésion, pour quantifier
spécifiquement les interactions entre des molé-
L'adhésion cellulaire est un phénomène ubiqui- cules particulières et leurs récepteurs sur la cel-
taire qui présente deux fonctions différentes en lule circulante. Si la densité de molécules sur la
immunologie, d'une part le recrutement des surface est suffisamment faible, il est possible
a b
d'observer des liaisons individuelles, dans les- interférence (fig. 6.14). Ces interférences
quelles une seule liaison entre une molécule de dépendent de la différence de marche des deux
la cellule circulante et une molécule de la sur- rayons réfléchis, liée à la distance entre la mem-
face arrête la cellule. La durée de l'arrêt est alors brane et la lamelle (modulo ½ longueur d'onde,
une mesure directe de la durée de vie de cette soit environ 200 nm). L'interférence est des-
liaison. Deux types de débits peuvent être envi- tructrice lorsque la membrane est très proche de
sagés, soit mimant les cisaillements physio la surface (environ 20 nm). Cette technique
logiques des écoulements artériels, veineux ou permet donc de quantifier l'aire de contact
capillaires, soit réalisant des cisaillements très étroit entre la cellule et la surface sous-jacente,
faibles permettant de gagner en sensibilité. Ces qui apparaît sombre (voir fig. 6.14). Cette aire
débits faibles sont quasi indispensables pour de contact semble être un bon témoin de l'acti-
détecter des liaisons individuelles. Le cisaille- vation cellulaire en réponse à un substrat, en
ment exerce une force calculable sur une liaison particulier lors de la réponse d'un lymphocyte T
et l'utilisation de différents taux de cisaillement à la présence de ligands du TCR.
permet de tester l'effet de forces différentes sur
les liaisons. Des logiciels dédiés détectent les Recommandations de mise en œuvre
trajectoires des cellules à partir des enregistre- Ces techniques très spécialisées nécessitent un
ments vidéo et mesurent le nombre et la durée équipement et un environnement spécifiques. Les
des arrêts. conditions de maintien de la viabilité des cellules
La migration cellulaire en vidéomicroscopie pendant l'observation sont cruciales.
peut être utilisée avec un dispositif proche des flux
laminaires mais sans flux liquidien. Une applica- Avantages/inconvénients
tion est l'étude du chimiotactisme, en ajoutant
une source de molécules chémo-attractantes.
Cette source peut être une micropipette injectant Avantages Inconvénients
le chémo-attractant dans la chambre. Les cellules Mesures très fines et très Appareillage sophistiqué
se dirigent alors vers la pointe de la micropipette. spécifiques d'interactions et dédié
moléculaires à l'échelon
Par comparaison avec les chambres de Boyden, la cellulaire
migration se fait ici sur un substrat contrôlé cellu-
laire ou moléculaire. Il est également possible de
mesurer la migration chimiotactique en ajoutant Exemples d'applications
un flux, le système expérimental étant alors iden-
tique à une chambre à flux laminaire, afin de Ces tests n'ont pas d'applications en routine cli-
mimer l'étape de migration sur l'endothélium sui- nique. Ils offrent par contre beaucoup d'applica-
vant l'étape d'arrêt des leucocytes. tions potentielles en recherche fondamentale.
Le contraste interférentiel en réflexion per- Par exemple, il a été montré que la stimulation
met de quantifier l'aire d'une cellule sur la sur- d'un endothélium par le TNF-α provoque l'ap-
face d'adhésion. La cellule est filmée alors parition d'arrêts nombreux et de longue durée,
qu'elle sédimente sur une lamelle de verre voire définitifs, de leucocytes, du fait de l'expres-
recouverte des molécules d'adhésion étudiées. sion de molécules d'adhésion. La figure 6.14
À l'aide d'un objectif spécial, la cellule est illu- montre les étapes de l'étalement d'un lympho-
minée, et les rayons lumineux réfléchis à l'inter- cyte T sur une surface recouverte d'anticorps
face verre–milieu et milieu–cellule entrent en anti-CD3.
Chapitre 6. Tests cellulaires 143
1 2 3
a b 4 5 6
c
Fig. 6.14 Illustration des étapes et de la mesure de l'adhésion d'un lymphocyte T par microscopie de contraste
interférentiel en réflexion.
a. Schéma de principe de la microscopie de contraste interférentiel en réflexion : un rayon incident I1 illumine la cellule ; un
rayon I2 est réfléchi à l'interface verre–milieu ; un rayon I3 est réfléchi à l'interface milieu–cellule. Les rayons I2 et I3 entrent
en interférence lorsqu'ils forment l'image. Cette interférence dépend de la différence de marche des deux rayons, donc de
la distance membrane–verre H.
b. Séquence d'images d'un lymphocyte T s'étalant sur une surface de verre couverte de CD3. L'aire de contact correspond
aux zones les plus sombres ; le diamètre réel de la cellule est sensiblement égal au diamètre de l'aire de contact visible à
l'image 6 (d'après A. Pierres).
c. Représentation de trajectoires détectées automatiquement de lymphocytes T activés migrant sur une surface de verre
couvert d'ICAM-1 migrant spontanément (le fond de l'image est une image en microscopie en transmission).
Chaque serpentin coloré est la trajectoire d'une cellule (d'après M.P. Valignat et O. Theodoly).
Chapitre 7
Tests in vivo
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
146 Techniques immunologiques
Tableau 7.1 Quelques chiffres clés sur la biologie de la gènes spécifiques (EOPS). Il est également pos-
souris (Mus musculus) sible d'élever des animaux axéniques (dépourvus
Durée de vie 1–3 ans de micro-organismes) ou gnotoxéniques (dont
Duré de gestation 19–21 jours l'inventaire de la flore est connu).
Sevrage 3 semaines L'histoire individuelle et les modifications
Maturité sexuelle 4 (F) ou 6 (M) semaines
acquises au cours de la vie de chaque individu sont
identiques, ou presque, et peuvent même être com-
Durée cycle œstral 4–5 jours
parées entre laboratoires. Cette reproductibilité
Poids adulte 18–35 g (F), 20–30 g (M) ainsi que la possibilité de contrôler les paramètres
Poids naissance 1–2 g environnementaux et individuels ont fait le succès
Poids sevrage 10–12 g de la souris comme modèle animal. Indépendamment
Rythme cardiaque 310–840 par minute des considérations éthiques à prendre en compte en
Rythme respiratoire 80–230 par minute expérimentation humaine, de telles conditions de
Température 36,8–38 °C
reproductibilité seraient impossibles à obtenir,
chaque être humain restant unique par son patri-
Volume sanguin 1,5–2,5 mL, 7–8 % poids
moine génétique, son environnement et son vécu.
Avantages
Différents types
Le recours à la souris permet d'étudier un système
immunitaire complet, ce qui n'est pas possible
de lignées de souris
in vitro. La variabilité génétique entre individus La diversité génétique de la souris d'expérimenta-
peut être maîtrisée, elle est quasiment nulle dans tion constitue la variable biologique majeure qui
les lignées consanguines et reste faible dans les justifie l'utilisation de cette espèce dans le domaine
autres lignées. Elle peut être mise à profit entre de la recherche. Les lignées de souris choisies le
différentes lignées. sont en fonction de leurs caractéristiques immuni-
Par ailleurs, les conditions d'élevage permettent taires ou génétiques.
de contrôler de nombreux paramètres environne-
mentaux tels que la température, l'hygrométrie,
l'éclairage et le cycle nycthéméral, l'approvision- Souris non consanguines
nement en eau et en nourriture. De plus, le micro- Une colonie non consanguine (outbred) est une
biome ambiant peut être maîtrisé, ce qui constitue population dans laquelle on cherche à maintenir
un élément clé pour les études immunologiques. une hétérogénéité constante et maîtrisée. Cette
En appliquant des contrôles réguliers et des hétérogénéité génétique implique l'utilisation
mesures de confinement précises, il est possible de d'un grand nombre d'animaux et de nombreux
réaliser des zones exemptes d'organismes patho- contrôles. Les colonies outbred sont généralement
Chapitre 7. Tests in vivo 147
1. Transgenèse additionnelle
Transgène : allèle
transgénique ; noté « tg »
promoteur ADNc
Transgène : allèle
sauvage indétectable
Ce promoteur permet car locus d’insertion
l’expression de l’ADNc dans un inconnu
Deux prélèvements, mêmes résultats
organe et un seul, noté en vert pour l’analyse de l’ADN
(thymus, lignée de thymocyte,
Transgène : tg / ?
ou autre…)
2. KO ou KI
Exon muté Gène X : allèle muté
noté « - »
3. cKO
Cre recombinase :
présence de l’ADNc,
promoteur Cre noté « Cre+ »
Allèle sauvage du
locus correspondant
indétectable car locus
d’insertion inconnu
Exon cKO Gène X : allèle cKO ou Prélèvement dans l’organe ciblé, après
conditionnel ou « floxé », induction si la Cre était inductible :
fonctionnel, noté fl Recombinase : Cre+ / ? ; Gène X : -/-
Gène X : allèle KO ou « - »
nées bibliographiques sur leur comportement. Il niveau du gène ciblé. Ce minigène est maintenant
peut être nécessaire d'avoir le transgène sur un éliminé en utilisant des recombinases.
fonds génétique pur (lignée syngénique), ce qui Les cellules ES sont souvent de fonds génétique
implique que les fondateurs soient croisés en 129/Sv, non syngéniques, peu utilisées en immu-
retour sur six à dix générations avec une des nologie. Il est parfois nécessaire d'effectuer des
lignées pures parentales. croisements en retour sur une lignée plus utilisée
comme les C57BL/6 afin d'avoir des lignées
Exemples syngéniques.
La lignée de souris DO11.10 qui exprime les Il faut comprendre que le phénotype d'une sou-
chaînes α et β du récepteur TCR d'un hybridome ris mutée pour un gène donné ne se résume pas à
reconnaissant l'ovalbumine a été utilisée pour étu- la situation sauvage plus ou moins le produit du
dier la différenciation des lymphocytes T. gène muté. Ces animaux sont des organismes qui
se sont adaptés, au cours de leur développement
et/ou de leur vie adulte, aux conséquences parfois
Le KO ou KI multiples de la mutation du gène.
Les souris KO (knock-out) ou KI (knock-in) ont un Exemples
de leurs gènes inactivé (KO) ou remplacé par une
version fonctionnelle portant une mutation à étu- Les souris KO pour la chaîne alpha du TCR pré-
dier, voire la version humaine du gène (KI) (voir sentent plus de lymphocytes TCRγδ que les souris
fig. 7.1). La substitution des allèles a été faite dans sauvages. Les souris KO pour le gène TCF-1, cru-
des cellules en culture dans lesquelles a été électro- cial dans le développement de la lignée T, pos-
porée une construction d'ADN comprenant la sèdent néanmoins des lymphocytes T car le facteur
mutation. Les clones de cellules porteuses de la LEF-1 est surexprimé et compense dans une cer-
mutation d'intérêt sont sélectionnés ultérieure- taine mesure le déficit chez les souris mutantes.
ment. Si les cellules utilisées sont des cellules ES
(embryonic stem cells) de souris, elles peuvent Les cKO
ensuite être injectées dans des blastocystes rece-
veurs, pour donner des animaux chimériques per- Les souris KO conditionnelles (cKO) sont basées
mettant d'établir une colonie porteuse de la sur l'utilisation de recombinases d'ADN, Cre ou
mutation. Si d'autres cellules sont transfectées, la FLP, issues respectivement du bactériophage P1
technique de transfert nucléaire permet d'isoler les ou de levures, reconnaissant des séquences spéci-
noyaux de ces cellules et de les injecter dans un fiques (LoxP ou FRT respectivement), naturelle-
ovocyte receveur permettant de nouveau d'obtenir ment absentes dans le génome de la souris. En
des animaux porteurs de la mutation voulue. Le utilisant la même technologie que pour les KO ou
délai d'obtention est de l'ordre de 6 mois à 2 ans. les KI, une lignée de souris est créée dont l'allèle
fonctionnel (sauvage ou muté) est encadré par
Points techniques deux séquences LoxP. Les séquences FRT sont
utilisées pour exciser le minigène de sélection. Ces
La mutation est ponctuelle. Certains transcrits
souris sont ensuite croisées avec des lignées trans-
issus d'épissage alternatif peuvent ne pas porter la
géniques (transgenèse additionnelle) qui expri-
mutation si un exon clé de la fonctionnalité du
ment la Cre recombinase dans le tissu voulu et/ou
gène n'a pas été ciblé. L'absence de la protéine
au moment voulu (voir fig. 7.1).
d'intérêt, ou son remplacement par la version
mutée pour les KI, doit être vérifiée avant la pour-
Points techniques
suite de l'étude du phénotype. Sur les premières
versions des KO, il subsistait dans le génome un Le point clé est la lignée de souris transgéniques
minigène de sélection, qui pouvait éventuellement qui expriment la Cre recombinase dans le tissu ou
perturber la régulation de la transcription au la lignée cellulaire ciblée, avec un taux suffisant
Chapitre 7. Tests in vivo 151
pour recombiner tous les sites présents dans topes antigéniques aux lymphocytes T. L'activation
l'ADN de ces cellules, mais sans « fuite » d'expres- et la prolifération cellulaire qui en résulte abou-
sion dans d'autres lignages cellulaires. Une bonne tissent à la formation d'une réaction inflammatoire
recherche bibliographique et une discussion avec localisée, visible au bout de 48 heures. Ces tests
les auteurs des précédentes études sont requises. permettent de mettre en évidence une sensibilisa-
Certaines lignées de souris expriment dans un tion cellulaire, de type hypersensibilité retardée,
tissu choisi une Cre inductible par le tamoxifen, ce c'est-à-dire la présence de lymphocytes T spéci-
qui permet de contrôler à la fois le lieu et le fiques d'antigène, à activité pro-inflammatoire.
moment de l'expression de la recombinase. Les prick-tests comportent une petite piqûre de
Pour contrôler l'efficacité de l'excision du cKO, la peau permettant à la substance testée de péné-
il existe des transgènes rapporteurs, où l'expres- trer sous l'épiderme. Son contact avec les masto-
sion de la β-galactosidase (ou d'une protéine fluo- cytes de la peau permet de détecter rapidement
rescente) nécessite une excision par la Cre. Cela une hypersensibilité immédiate dépendante des
implique une troisième souris transgénique, donc IgE spécifiques fixées sur ces cellules. La réaction
encore plus de temps pour les croisements. cutanée se développe très rapidement, dans les
Le point pratique est le temps pour ces croise- 20 minutes suivant le test.
ments : outre le délai pour obtenir les lignées à Les intradermoréactions consistent à introduire
croiser, il y a le temps de franchir les barrières sani- une petite quantité d'antigène directement dans le
taires propres à chaque animalerie, et celui des derme. Elles sont utilisées aussi bien pour la détection
croisements pour obtenir des animaux homo- des hypersensibilités immédiates, en complément des
zygotes pour le cKO et hétérozygotes pour le prick-tests, que pour la détection des hypersensibili-
transgène d'expression de la Cre. tés retardées, en complément des patch-tests.
Exemple Méthodologie
La lignée Mx1-Cre, où l'expression de la Cre peut Les patch-tests sont généralement effectués à
être induite par l'IFN-α, l'IFN-β, ou l'ARN l'aide de cupules en aluminium, de 8 à 12 mm de
double brin, a été utilisée pour étudier la différen- diamètre, dans lesquelles la substance à tester est
ciation T. déposée, soit directement, soit après imbibition
d'un disque de papier. Ces cupules permettent
d'isoler les différents antigènes testés. L'ensemble
Tests cutanés des tests réalisés, en général sur la partie haute du
dos, est recouvert d'un adhésif maintenu en place
Les réponses immunitaires induisent une mémoire jusqu'à la lecture du test. La position de chaque
qui est aussi désignée sous le terme de sensibilisa- substance, ainsi que d'un témoin négatif sans anti-
tion. La mise en évidence d'une sensibilisation à gène, doit être soigneusement notée, le plus sou-
un antigène ou à un allergène est le plus souvent vent directement à même la peau du sujet. Chez
recherchée in vitro, mais elle peut également être l'animal, ce type de test est classiquement réalisé
détectée par des tests cutanés réalisés in vivo, chez sur l'oreille.
l'animal ou chez l'homme. Selon le type de test Les prick-tests sont réservés à l'exploration de
réalisé, différents compartiments de l'immunité l'allergie immédiate chez l'homme. Ils sont réalisés
de l'individu testé sont explorés. en consultation ou en hôpital de jour. La réaction
Les tests cutanés les moins invasifs sont les patch- se résout spontanément en quelques heures. Là
tests (tests épicutanés) qui consistent à déposer une encore, une identification précise des substances
petite quantité d'antigène ou d'allergène sur la testées est nécessaire. Un témoin positif de la dégra-
peau, sans effraction. Les cellules dendritiques nulation des mastocytes est réalisé par un prick-test
cutanées de l'épiderme (cellules de Langerhans) et à la codéine, un témoin positif de vasodilatation et
du derme captent, apprêtent et présentent les épi- vasoperméation est réalisé par un prick-test à
152 Techniques immunologiques
l'histamine. De l'eau distillée ou du sérum physio- Les tests cutanés, et en particulier les intradermo-
logique sont utilisés pour le témoin négatif, qui ne réactions, doivent donc être réalisés chez l'homme
doit montrer aucune réaction et permet de détecter dans un environnement médical approprié, apte à
les sujets présentant un dermographisme caracté- gérer les situations d'urgence allergologique.
risé par une dégranulation spontanée des masto-
cytes. Une réaction observée sur le témoin négatif
Avantages/inconvénients
complique l'interprétation des tests spécifiques.
Les intradermoréactions nécessitent de bien
Test Avantages Inconvénients
connaître la technique d'injection, qui ne doit pas
Patch-tests Hypersensibilité Réponses
franchir le derme. Elle s'effectue en plaçant l'ai-
retardée différentes aux
guille de la seringue à un angle d'environ 15° par Réponses substances pures ou
rapport à la surface de la peau tendue. L'apparition cellulaires T sous leur forme
d'une tuméfaction (en peau d'orange), correspon- Multiples antigènes galénique
testés Lipo/hydrosolubilité
dant à l'accumulation de la substance injectée simultanément Délai de lecture :
dans le derme, témoigne d'une intradermoréac- Simple contact 48 à 72 h
tion bien conduite. Si aucune tuméfaction n'appa- cutané Risque de
raît, c'est que l'injection a été sous-cutanée et sera réactivation de
l'hypersensibilité
ininterprétable. À l'inverse des patch-tests, aucune
protection de la zone d'injection n'est nécessaire. Prick-tests Hypersensibilité Sensibilité modérée
immédiate à cause des très
Pour l'ensemble de ces tests, il est classique Multiples allergènes faibles doses
d'utiliser plusieurs dilutions des substances exami- testés d'antigène
nées. La concentration la plus forte possible doit simultanément administrées
Spécificité extrême,
être employée, tout en évitant les réactions pure-
même à des traces
ment toxiques, irritantes et non immunologiques. d'allergène
Intradermoréactions Hypersensibilité Difficultés de
(IDR) immédiate et réalisation
Recommandations de mise en œuvre retardée Délai de lecture pour
En dehors de la série de dilutions mentionnée ci- Réponses l'hypersensibilité
cellulaires T retardée
dessus, il convient d'utiliser le bon excipient pour Risque de réactivation
les substances testées. Pour les patch-tests, un vec- de l'hypersensibilité
teur liposoluble comme la vaseline est souvent pré- immédiate ou
retardée
férable car la majorité des allergènes testés sont
lipophiles. De plus, l'épiderme constitue une bar-
rière efficace empêchant le passage des antigènes Exemples d'applications
hydrosolubles. Des solutions alcooliques peuvent • En recherche : les tests cutanés sont très pré-
également être employées. Les réactions d'hyper- cieux pour étudier les réponses cellulaires d'un
sensibilité peuvent dépendre du principe actif d'une animal. L'application de l'antigène sur l'oreille
drogue ou d'un allergène majeur, mais peuvent éga- d'une souris ou d'un cobaye est un excellent
lement être liées à sa combinaison avec un excipient moyen de mesurer la réponse cellulaire générée
ou ses conditions de préparation. Il est donc utile de ou modulée expérimentalement.
tester les produits suspectés à la fois dans des condi- • En clinique :
tions de pureté optimale et dans leur forme usuelle. – les tests cutanés font partie de l'arsenal dia-
Un des problèmes majeurs de l'utilisation des tests gnostique des allergologues. Leur mise en
cutanés est le risque de réactivation d'une réponse œuvre est guidée par les éléments cliniques
systémique. C'est en particulier le cas des réponses observés par le médecin et rapportés par le
d'hypersensibilité immédiate, pour lesquelles un patient. L'interrogatoire est un élément
choc anaphylactique peut être induit suite à la réin- majeur pour décider des tests à réaliser, au
troduction d'une très petite quantité d'allergène. cours d'une enquête détaillée ;
Chapitre 7. Tests in vivo 153
– les patch-tests sont très utilisés pour le dia- Ils sont employés pour le diagnostic en aller-
gnostic des eczémas de contact et des toxider- gologie respiratoire (asthme, rhinite, conjonc-
mies (hypersensibilités retardées aux tivite), alimentaire, médicamenteuse et aux
médicaments). Ces affections peuvent cepen- venins d'hyménoptères (anaphylaxie). Là
dant concerner toutes sortes de produits encore, le produit natif est privilégié par rap-
comme le nickel des bijoux ou d'objets usuels port à des antigènes purifiés ou recombinants.
ou encore les colorants capillaires (paraphé- L'existence de réactions croisées (e.g. kiwi et
nylènediamine) utilisés par les coiffeurs et les latex) doit être prise en considération ;
conservateurs (méthylisothiazolinone). Dans – les intradermoréactions ont surtout été utili-
le cas des toxidermies, l'utilisation de la forme sées pour mettre en évidence l'efficacité d'une
galénique de la drogue est importante car la vaccination antituberculeuse ou un contact
sensibilisation cellulaire peut être liée à la for- avec Mycobacterium bovis. Elles tendent à être
mation de néo-épitopes entre la substance remplacées par les IGRA8. Leur utilisation
active et son excipient. Les patch-tests ont pour le diagnostic d'hypersensibilité retardée
également été longtemps utilisés pour vérifier à un autre antigène, en particulier médica-
l'efficacité d'une vaccination contre la tuber- ment, est plus dangereuse que la réalisation
culose, sous forme de « cuti-réaction » ; de patch-tests, qui leur sont préférés.
– les prick-tests sont préférentiellement utilisés
pour le diagnostic des allergies immédiates.
8
IGRA (interferon gamma release assay) testé en mesu-
rant la production plasmatique d'interféron ou en recher-
chant les cellules productrices d'interféron en ELISpot.
Chapitre 8
Exploration du complément
sérique et plasmatique, estimée par les tests CH50 tions récidivantes. Ainsi, chez les patients dévelop-
et VA50. pant des infections récurrentes à Neisseria
L'hypocomplémentémie par activation est le (sérotypes rares W135 et Y), l'incidence des défi-
fait de la mise en jeu intensive d'une convertase. cits en complément est estimée à 20 %.
Ce phénomène pathologique est contrôlé et tran- Les stratégies d'exploitation des tests hémolytiques
sitoire ; la disparition du processus activateur sont illustrées sur la figure 8.2.
pathologique s'accompagne d'un retour à la nor-
male. Une diminution du CH50 est associée à la
baisse fonctionnelle des composants de la conver- Dosage des fractions,
tase classique, par exemple C2 ou C4. Dans la expression des récepteurs
situation particulière des cryoglobulinémies de
type II, l'hypocomplémentémie est associée à la Les évaluations quantitatives des protéines du
baisse de C4 par fixation de C4b à la cryoglobu- complément sont basées sur le principe de la réac-
line, sans engagement associé de la convertase tion antigène–anticorps. Pour que cette réaction
classique. Le plus souvent, l'antigénémie de C3 soit mesurable, il suffit donc de disposer de la pro-
reste subnormale, exceptionnellement effondrée. téine antigène cible en quantité suffisante (e.g.
L'hypocomplémentémie par activation de la voie sérum à tester contenant la fraction recherchée) et
classique est retrouvée dans des vascularites, le d'un anticorps d'affinité élevée pour sa cible pour
lupus érythémateux systémique, les cryoglobuli- former un complexe stable capable de précipiter à
némies mixtes et les glomérulonéphrites post- l'équivalence.
infectieuses. Une diminution du VA50 est associée
à une baisse de C3, rarement du facteur B. Méthodologies
L'activation de la seule convertase alterne est un
Techniques quantitatives
événement rare, observé dans des chocs septiques
et les glomérulonéphrites avec présence de facteur La précipitation en milieu liquide investiguée par
néphritique (C3nef). néphélémétrie mesure la dispersion de la lumière
Une forte mise en jeu de la convertase classique qu'entraîne la formation de complexes immuns.
peut être conjointe au ou entraîner le développe- Une gamme permet de tracer et de mémoriser la
ment de la convertase alterne, avec consommation courbe du signal électrique en fonction de la
de facteur B. Cette situation est retrouvée au concentration d'antigène. Le suivi du résultat
cours des glomérulonéphrites, des infections d'un contrôle journalier permet de valider la stabi-
sévères, de la vascularite urticarienne hypocom- lité de cet étalonnage. On peut également utiliser
plémentémique de Mac Duffie (inconstant) ou la turbidimétrie, toujours en présence d'un stan-
des connectivites en période active, notamment le dard en plusieurs dilutions pour tracer une courbe
lupus érythémateux systémique. d'étalonnage. La précipitation en milieu gélifié par
Il existe également des hypocomplémentémies immunodiffusion radiale peut être employée pour
par déficit héréditaire. La forte baisse d'un com- les protéines du complément ne pouvant pas être
posant évoque une anomalie ou un polymor- examinées sur un automate. Dans ce cas, la frac-
phisme génétique. Il est estimé que 0,05 % de la tion recherchée contenue dans le sérum testé dif-
population occidentale est affectée par un déficit fuse au sein d'un gel d'agarose contenant un
primaire complet du complément porté par l'hé- anticorps précipitant polyclonal qui lui est spéci-
rédité (affectant les deux allèles). Les hypocom- fique. La concentration d'antigène est propor-
plémentémies par déficit s'associent, pour les tionnelle au diamètre au carré de l'anneau de
composants de la convertase classique, à des mala- précipitation. Cette technique est longue, de sen-
dies à complexes immuns et à des connectivites. sibilité moyenne et nécessite des quantités impor-
Les déficits en composants de la convertase tantes d'antisérum.
alterne, de la voie des lectines et du complexe Des ELISA sont disponibles pour doser les pro-
d'attaque membranaire se traduisent par des infec- téines du complexe d'attaque membranaire, les
CH 50 , C3 N ou , C4 N ou
• Syndrome inflammatoire
• Cancers et hémopathies malignes
Hypercomplémentémies • Hépatites aiguës
• Infarctus du myocarde à la phase
aiguë
CH 50 - C3 - C4
Hypocomplémentémies
CH 50 C3 C4
CH 50 C4 CH 50 C4 N
Techniques semi-quantitatives
Exemples d'applications (tableau 8.1)
La détection de fragments de clivage, de chaînes
polypeptidiques issues d'une protéine ou d'associa- La néphélémétrie est couramment utilisée pour
tion de protéines du complément sous forme de doser les fractions C3, C4, C1q, C1Inh, le facteur
complexes peut être réalisée par séparation électro- B et C5. L'immunodiffusion radiale est réservée
phorétique et révélation immunologique par un aux protéines de concentration supérieure à
anticorps spécifique. Des techniques d'immuno- 20 mg/L avec un anticorps polyclonal d'affinité
électrophorèse en agarose permettent de mettre en suffisante. Cette technique n'est pas applicable
évidence des fragments de C3, le facteur néphritique pour C2 et le facteur D. Des ELISA sont appli-
C3nef et les polymorphismes de C4. Des espèces cables pour toutes les protéines à condition de
moléculaires circulantes (e.g. C1Inh, C8) peuvent disposer d'au moins deux types d'anticorps pour
être détectées par une technique de western-blot. mettre en œuvre la technique sandwich.
Les gros fragments présentent après clivage un après électrophorèse bidimensionnelle (fig. 8.3b)
site leur permettant de se fixer à un groupement ou par un test hémolytique.
hydroxyle (ou aminé pour C4) de l'accepteur par Le tableau 8.3 récapitule les récepteurs et les
liaison ester covalente. Ces ligands bifonction- fonctions des différentes fractions du complément
nels, C3b, C3bi, C3dg/C3d et C4b, interagissent et de leurs fragments.
ainsi à la fois avec la cible de l'activation du com-
plément et avec des récepteurs cellulaires spéci-
fiques des cellules effectrices du système Exploration de l'angiœdème
immunitaire. La détection de ces ligands dans les
liquides biologiques est possible par immunoblot L'angiœdème à kinines se traduit cliniquement
(C3, C3bi et C4b, fig. 8.3a) ou par ELISA (C3b, par des œdèmes blancs, généralement non pruri-
C3bi et C3d). gineux et sans urticaire, spontanés et récurrents
La recherche des fragments de coupure de C3 affectant les tissus sous-muqueux et sous-cutanés.
concerne aussi l'activité du facteur néphritique Ils sont la conséquence de l'accumulation des
(C3nef), auto-anticorps stabilisant la C3 conver- kinines, bradykinine et desArg9-bradykinine sur les
tase, retrouvé chez environ 10 % des patients récepteurs endothéliaux. La figure 8.4 décrit le
atteints de glomérulonéphrite membrano-prolifé- processus de production et de catabolisme de ces
rative. C3nef est recherché par immunofixation deux ligands.
1 2 3
C3 C3b iC3b C3 C3b iC3b C3d
α
chaîne α 100 α’ chaîne α
chaîne α’ 98
75 chaîne β
α’1
50
chaîne β
chaîne α1 71
C3dg
37 chaîne γ
C3d
C3 natif C3 converti
Sérum témoin
Sérum patient
Endothélium
HK FXII
pKK
FXIIa
KK
Sang C1Inh
HK
Bradykinine Arg1 Pro2 Pro3 Gly4 Phe5 Ser6 Pro7 Phe8 Arg9 COOH
APP ECA
desArg9-bradykinine Arg1 Pro2 Pro3 Gly4 Phe5 Ser6 Pro7 Phe8 COOH
Tableau 8.4 Suite
moléculaire s'examinent par électrophorèse suivie F12 a été identifiée comme causale, elle est retrouvée
d'une révélation par immunoblot (tableau 8.5). à l'état hétérozygote chez moins de 10 % des patients.
Les quantités de bradykinine et de desArg9-bra- La baisse de l'activité aminopeptidase P s'associe fré-
dykinine produites lors d'une crise ne sont pas quemment au polymorphisme -2399A dans le gène
accessibles directement en raison de leur demi-vie XPNPEP2, porté par le chromosome X.
très courte. Par contre, il est possible d'activer
in vitro le plasma par le sulfate de dextran et de
Recommandations de mise en œuvre
suivre la cinétique de production des kinines pro-
duites, proportionnelle à la quantité résiduelle de La fonction de C1Inh est peu soumise à variabilité
kininogène natif, accédant par défaut à la part dans le temps ; on note seulement une discrète
ayant donné lieu à production des kinines. Cette consommation par la forte activité protéolytique en
estimation est aussi possible par l'appréciation cas de crise, cet examen est possible à distance d'un
relative des espèces moléculaires du kininogène événement clinique, sauf dans les conditions d'an-
par immunoblot. giœdème avec fonction de C1Inh normale si la
Dans le cadre des angiœdèmes avec déficit en coupure protéolytique de C1Inh est recherchée.
C1Inh, plus de 400 anomalies du gène SERPING1 L'activité kininogénase spontanée est augmen-
ont été inventoriées. La mutation familiale est tée de façon constante dans les angiœdèmes asso-
portée à l'état hétérozygote chez les patients, elle ciés à un déficit en C1Inh. Elle augmente
est identifiée par séquençage des exons et des périodiquement lors des phases actives de la
séquences 5′ et 3′ bordantes, exceptionnellement pathologie dans les angiœdèmes avec fonction
par MLPA (Multiplex Ligation-dependent Probe normale de C1Inh. Dans cette seconde situation,
Amplification). le moment du recueil de l'échantillon est critique,
Dans les angiœdèmes avec fonction de C1Inh nor- au plus proche de la crise, idéalement moins de
male, seule la mutation faux-sens 983A/G du gène 24 heures après le début des symptômes et en
166 Exemples d'applications
l'absence de traitement interférant avec les Les activités du catabolisme des kinines sont
mesures enzymatiques (e.g. acide tranexamique). stables au cours du temps, sauf dans les situations
La conversion proenzymes–enzymes est un para- d'angiœdèmes iatrogènes déclenchés par un inhi-
mètre critique et sensible, et les conditions de biteur de l'enzyme de conversion de l'angioten-
transport de l'échantillon sanguin doivent égale- sine (IEC), ou un inhibiteur de la dipeptidyl
ment être respectées, avec température contrôlée peptidase IV (gliptine). Dans ce cas, il est préfé-
comprise entre 20 et 25 °C, dans un délai inférieur rable d'investiguer l'échantillon au moins
à 48 h. 2 semaines après l'arrêt du traitement.
Chapitre 9
Exploration des immunoglobulines
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
168 Exemples d’applications
Dépôt de l’échantillon à
analyser
urines, sérum Migration anodique
Pistes n° 1 2 3 4 5 6
Gel d’agarose
3 4 Sérum normal
Application sur le
Lavage et
gel des antisérums
coloration des
Précipitation des protéines totales
complexes immuns (piste 1) ou des IgG IgA IgM κ λ
complexes immuns
précipités
Tampon IgG IgA IgM κ λ (pistes 2 à 6) Sérum
acide pathologique :
de Antisérums
précipitation présence d’une
des protéines IgG λ
monoclonale
p récipitation. L'analyse peut être poursuivie, si un deuxième étape, immunologique, est différente.
pic a été détecté à l'électrophorèse, en appliquant L'anticorps spécifique (anti-chaîne légère ou anti-
des antisérums spécifiques des chaînes lourdes (G, chaîne lourde) est déposé à la surface du gel, y
A, M) et des chaînes légères des immunoglobu diffuse et forme un précipité avec son antigène.
lines (kappa et lambda), affirmant ainsi la nature Les complexes antigène–anticorps sont piégés
monoclonale de l'immunoglobuline produite en directement dans le gel. Après lavage, le précipité
quantité telle qu'elle est responsable du pic. S'il est coloré par un colorant spécifique des protéines.
s'agit d'un premier diagnostic, le sérum du patient Il n'y a pas, comme dans l'immuno-électrophorèse,
est comparé à un sérum humain normal. S'il s'agit d'effet « parapluie » (masquage des arcs de précipi
d'une gammapathie monoclonale connue, le tation par les immunoglobulines polyclonales), ce
sérum du patient est analysé en comparaison avec qui peut faciliter le typage des IgM. Les dilutions
sa dernière antériorité. de l'échantillon peuvent être adaptées pour
L'immunofixation est une variante méthodo atteindre la gamme de 0,5 à 2 g/L d'immunoglo
logique de l'immuno-électrophorèse qui a l'avan buline monoclonale suspectée. Il est aussi possible
tage d'être plus rapide en permettant une réponse de modifier la dilution des antisérums afin d'être
en 3 heures. Elle est également un peu plus sen dans la zone d'équivalence. Ceci évite les phéno
sible avec un seuil de 0,5 à 1 g/L. Surtout, elle est mènes de zone en condition d'excès d'antigène,
en partie automatisable. La première étape ou au contraire de typer un faible renforcement au
consiste toujours en une migration électrophoré sein d'une hypogammaglobulinémie. La pré-incu
tique du sérum dans un gel d'agarose, mais la bation de l'échantillon avec un volume adapté
Chapitre 9. Exploration des immunoglobulines 169
Électrophorèse
Albumine Pic de
gammaglobulines
Immuno-électrophorèse
Sérum
pathologique
Sérum
normal
Immunofixation
Antisérum G A M K L
pentavalent Antisérums spécifiques
Fig. 9.2 Analyse combinée immuno-électrophorèse/immunofixation.
L'existence d'un pic à l'électrophorèse se traduit par la déformation sur l'arc des IgG à l'immuno-électrophorèse avec un
antisérum polyvalent anti-protéines humaines (flèche). L'immunofixation à l'aide d'un antisérum pentavalent (mélange de
cinq antisérums spécifiques dirigés contre les trois isotypes de chaîne lourde [α, γ et μ] et les deux isotypes de chaînes
légères [κ et λ]) ou d'antisérums spécifiques séparément affirme l'existence d'une immunoglobuline de classe G et de type λ.
d'antisérum anti-chaîne légère permet, dans cer d'être peu discriminante sur des sérums totaux où
tains cas de gammapathies biclonales de migration les bandes sont difficiles à distinguer sur le fond
identique, d'affirmer l'existence de deux immuno polyclonal.
globulines monoclonales de même classe si les iso L'électrophorèse capillaire de zone est une
types de chaînes légères diffèrent (fig. 9.2). microméthode automatisée qui permet d'analy
La technique d'immuno-empreinte nécessite la ser jusqu'à cinquante échantillons de sérum à
parfaite maîtrise du western-blot. Elle est plus sen l'heure. Il s'agit d'une séparation électrociné
sible que l'immuno-électrophorèse et que l'immu tique effectuée dans un tube de diamètre interne
nofixation grâce à la révélation immuno-enzymatique inférieur à 100 microns et rempli d'un milieu et
des immunoglobulines, condition adaptée à l'étude d'électrolytes. Elle assure la séparation rapide de
des urines ou du liquide céphalo-rachidien sans très faibles quantités de protéines avec une haute
concentration préalable. Elle présente également résolution. La lecture de l'absorbance à une lon
l'avantage d'appliquer l'utilisation d'anticorps gueur d'onde proche de l'ultraviolet (206 ou
non précipitants, tels que les anticorps monoclo 214 nm) mesure les liaisons peptidiques et per
naux, d'éviter les phénomènes de zone, d'être met d'intégrer directement l'abondance de
réversible et ainsi de permettre plusieurs typages chaque fraction protéique. En raison de la charge
sur une même membrane. Son inconvénient est négative des parois du tube capillaire, généralement
170 Exemples d’applications
à base de silice, et des propriétés des tampons de lourdes monoclonales, il faut penser à éliminer
migration, les protéines se déplacent sous l'effet l'existence d'une IgD ou d'exceptionnelles IgE
du courant d'électro-endosmose et non plus monoclonales avant d'affirmer qu'il s'agit d'un
sous l'effet de leur charge comme dans les élec myélome à chaînes légères.
trophorèses en gel. En conséquence, le déplace Le typage de la chaîne légère d'une IgA mono
ment des fractions protéiques se fait dans l'ordre clonale est parfois difficile en raison de l'accès
inverse, la fraction des gammaglobulines étant la des antisérums aux épitopes de chaîne légère
plus rapide. Le phénotypage d'une immunoglo dans la molécule entière d'immunoglobuline. Il
buline monoclonale est possible par immuno peut être nécessaire d'utiliser une méthode plus
soustraction en développant l'électrophorèse sensible, comme l'immunofixation adaptée pour
capillaire avant et après incubation du sérum à les urines.
tester avec des billes de sépharose couplées à des Les immunoglobulines monoclonales cryopré
antisérums anti-chaînes lourdes ou anti-chaînes cipitantes imposent de respecter des conditions
légères d'immunoglobuline. La disparition du pré-analytiques particulières, notamment un
pic après incubation affirme la monotypie par maintien à 37 °C tout au long de la manipulation.
comparaison au sérum initial uniquement incubé L'immunofixation a comme principal inconvé
avec des billes non couplées. Le prérequis est la nient, par rapport à l'immuno-électrophorèse,
capacité de l'électrophorèse capillaire à mettre d'ignorer totalement l'exploration des autres pro
en évidence le pic en cas de gammapathie téines sériques.
monoclonale. L'immuno-empreinte, du fait de sa plus grande
sensibilité, détecte de petits pics chez des sujets
Recommandations de mise en œuvre sains âgés de plus de 70 ans avec une fréquence
Pour l'immuno-électrophorèse et l'immunofixa proche de 60 %, dont la pertinence clinique reste
tion, il est nécessaire d'utiliser des antisérums poly à établir.
clonaux précipitants. Il convient de s'assurer de la Les limites de l'électrophorèse capillaire sont
spécificité des antisérums à chaque changement de inscrites dans son principe. La lecture dynamique
lot par typage vis-à-vis d'immunoglobulines mono du passage des protéines devant la fenêtre de
clonales connues et de déterminer la dilution opti détection n'explore plus exhaustivement la migra
male d'utilisation. Il faut respecter, voire modifier tion des protéines anormales et supprime le
les dilutions standard de l'échantillon et des antisé contrôle visuel de la lecture du gel en générant un
rums pour rester dans la zone d'équivalence. électrophorégramme reconstruit. Certaines pro
Dans le cadre d'un myélome à chaînes téines peuvent ainsi ne pas être détectées, soit
légères, une chaîne légère libre monoclonale parce qu'elles migrent avant le début du signal,
sérique, appelée autrefois protéine de Bence- soit parce qu'elles restent immobiles dans le tube
Jones, peut être indétectable par électropho capillaire. Certaines substances adsorbant dans les
rèse, voire même par les techniques spécifiques ultraviolets proches, comme le fibrinogène et cer
mentionnées ci-dessus, et prendre en défaut les tains produits de contraste, sont par ailleurs sus
dosages néphélémétriques. Dans ce cas, c'est ceptibles de générer de faux pics. Il existe un
l'analyse des urines qui permet de poser le dia consensus pour admettre la moindre sensibilité de
gnostic. L'analyse des urines non concentrées l'électrophorèse capillaire pour identifier certaines
par immunofixation est désormais réalisée sur gammapathies monoclonales, notamment les
des gels commerciaux, mais il peut être néces petites immunoglobulines monoclonales noyées
saire d'avoir recours à l'immuno-électropho dans une importante hypergammaglobulinémie.
rèse après concentration. À noter que les Les gammapathies monoclonales non détectées
chaînes légères peuvent être quantifiables dans par l'électrophorèse capillaire sont typiquement
le sérum en néphélémétrie ou turbidimétrie. Si de faible quantité, ont souvent un point isoélec
les méthodes classiques détectent des chaînes trique élevé et migrent en position gamma lente.
légères monoclonales en l'absence de chaînes Le seuil de détection par électrophorèse capillaire
Chapitre 9. Exploration des immunoglobulines 171
Electrophorèse
Albumine Gammaglobulines
Immunoélectrophorèse
Sérum
pathologique
Sérum
normal
Immunofixation
Ig G A M K L
totales Antisérums spécifiques
Immunoprécipitation
K M L K M L Fig. 9.3 Gammapathie biclonale de migration
unique.
L'électrophorèse et l'immuno-électrophorèse mettent
en évidence un pic de gammaglobulines.
L'observation d'une bande de même migration
avec les deux antisérums antichaînes légères
conduit à renouveler l'immunofixation après
immunoprécipitation du sérum par chaque
antisérum. Après précipitation par l'antisérum anti-κ,
on individualise une immunoglobuline de classe M
et de type λ, et après précipitation par l'antisérum
Précipitation Précipitation anti-λ, on individualise une immunoglobuline
anti-kappa anti-lambda de classe M et de type κ.
dosages issus de l'intégration de la courbe d'élec d'apprécier une gammapathie monoclonale. Les
trophorèse pour suivre l'évolution d'un pic et de chaînes légères libres monoclonales sont produites
réserver les dosages pondéraux à l'évaluation des en très grandes quantités dans les myélomes à
immunoglobulines résiduelles. À l'inverse, l'exis chaînes légères. De plus, il y a très souvent un
tence d'une immunoglobuline monoclonale, le excès, même faible, de chaînes légères libres en
plus souvent de classe IgM, peut perturber le présence d'une immunoglobuline monoclonale
dosage néphélémétrique d'autres protéines telles complète. Deux industriels (Binding Site et
que les IgA, la ferritine ou la protéine C réactive. Siemens) ont initialement développé des antisé
Le dosage des chaînes légères libres d'immuno rums polyclonaux spécifiques capables de quanti
globulines est une autre manière quantitative fier les chaînes légères libres d'immunoglobulines.
Chapitre 9. Exploration des immunoglobulines 173
Ces dosages reposent sur des anticorps reconnais suivi de la réponse au traitement, le groupe n'a
sant des épitopes habituellement masqués par validé l'intérêt du dosage des chaînes légères libres
l'association des chaînes légères aux chaînes que pour les proliférations lymphoïdes pauci-
lourdes dans les immunoglobulines entières. Ces sécrétantes : amylose, myélome non sécrétant et
dosages restent toutefois imprécis, car les antisé maladie de dépôt de chaînes légères. Le même
rums polyclonaux ont des spécificités variables groupe a validé plus tard ces algorithmes de strati
d'un lot à l'autre pour la distinction entre les fication pronostique au diagnostic pour les MGUS
chaînes légères libres et liées et mesurent parfois et les myélomes asymptomatiques (Smoldering
une partie des immunoglobulines entières. De Multiple Myeloma ou SMM), recommandant de
plus, le taux de chaînes légères excédentaires varie ne pas pratiquer de dosages systématiques de
d'un clone plasmocytaire à l'autre et la fonction chaînes légères libres dans le suivi des MGUS.
rénale du patient peut influencer le dosage et alté
rer le rapport kappa/lambda conduisant aussi bien Cryoglobulines
à des faux négatifs qu'à des faux positifs. Le dosage Le froid entraîne des signes cliniques chez certains
des chaînes légères libres doit être couplé à sujets du fait de la précipitation de protéines
l'immuno-électrophorèse ou à l'immunofixation sériques ou plasmatiques dans les vaisseaux de petit
des urines. L'apport diagnostique du dosage des et moyen calibre, telles que les cryoglobulines et le
chaînes légères libres est patent dans les situations cryofibrinogène. Les cryoglobulines sont secon
cliniques où l'absence de marqueur monoclonal daires à des pathologies immunoprolifératives,
peut être un handicap (myélomes à chaîne légère, auto-immunes ou infectieuses. Les signes cliniques
myélomes apparemment non sécrétants, amyloses associés sont des vascularites, se traduisant par des
et maladie de dépôt de chaînes légères d'immuno signes cutanés (purpura, phénomène de Raynaud),
globulines). Dans les myélomes à immunoglobu des arthralgies, une insuffisance rénale et des
lines intactes et les MGUS, l'apport du dosage des neuro pathies périphériques. Le cryofibrinogène
chaînes légères libres comme marqueur diagnos est impliqué dans des phénomènes thrombotiques
tique ou comme indicateur de pronostic ou de liés au froid (purpura, livedo, ulcération, nécrose).
suivi thérapeutique reste à prouver. Les demandes doivent être initiées dans un
En février 2009, le groupe de consensus inter contexte clinique évocateur, cependant les cryoglo
national sur le myélome a publié une mise au bulines sont parfois présentes chez des sujets asymp
point reprenant les acquis sur les avantages et les tomatiques. La concentration des cryoglobulines
inconvénients de ces nouveaux réactifs ainsi que n'est par ailleurs pas toujours proportionnelle à la
sur les indications validées et rappelant les biais sévérité des signes cliniques. La quantification des
méthodologiques mentionnés ci-dessus. Suite à cryoglobulines est importante pour le suivi et les
l'absence de corrélation entre les dosages sériques décisions thérapeutiques chez les patients sympto
et urinaires de chaînes légères libres, ce groupe a matiques. Les cryoglobulines sont classées en trois
recommandé de ne pas pratiquer les dosages de types. Les cryoglobulines de type I sont constituées
chaînes légères libres dans les urines. Pour le par une immunoglobuline monoclonale, de type
dépistage des syndromes lymphoprolifératifs B, la IgM ou IgG, plus rarement IgA. Les cryoglobulines
réalisation concomitante, sur le sérum de l'élec de type II associent des immunoglobulines poly
trophorèse, de l'immunofixation et des dosages de clonales à une immunoglobuline monoclonale
chaînes légères libres apparaît suffisante. Seule (sous-type IIa), ou à des immunoglobulines oligo
l'amylose nécessite encore l'analyse des urines. clonales (sous-type IIb). Les cryoglobulines de type
Une fois le diagnostic de syndrome lymphoproli III sont constituées d'immunoglobulines polyclo
fératif établi, le groupe estime que l'analyse des nales. Les plus fréquentes, cryoglobulines de type II
urines par immunofixation est indispensable. et III, dites mixtes, contiennent des anticorps
Différents algorithmes de stratification pronos monoclonaux ou polyclonaux de spécificité anti-
tique ont été validés, incluant, au diagnostic, le IgG et correspondent en pratique à la présence de
dosage des chaînes légères libres sériques. Pour le complexes immuns. Elles sont observées dans des
174 Exemples d’applications
atteintes infectieuses, dont l'hépatite C, où elles Lors de la recherche des auto-anticorps par
sont responsables des cryoglobulinémies dites immunofluorescence indirecte avec un antisérum
essentielles et dans des maladies auto-immunes dont dirigé contre les chaînes lourdes G, A et M, un titre
le lupus érythémateux systémique. Dans cette der élevé, conséquence de l'importance du pic, mais
nière pathologie, il y a fréquemment un parallèle surtout l'aspect restreint de la fluorescence, consé
entre concentration, expression clinique et consom quence de sa nature monoclonale, doit faire suspec
mation du complément. Le suivi des cryoglobulines ter l'existence d'une gammapathie monoclonale à
de type I est une façon très satisfaisante d'évaluer activité auto-anticorps. La confrontation des résul
l'évolution d'une immunoglobuline monoclonale. tats d'immunofluorescence avec ceux de l'immuno-
La recherche des cryoglobulines exige des électrophorèse/immunofixation identifie trois
conditions pré-analytiques très strictes, prélève situations possibles qui s'expliquent par le seuil de
ment, transport et coagulation à 37 °C. Le sérum sensibilité de l'immunofluorescence, inférieur d'un
est décanté et conservé 7 jours à + 4 °C. La détec facteur cent à celui de l'immunoprécipitation en
tion d'une cryoglobuline peut être réalisée par milieu gélifié. Un auto-anticorps monoclonal donne
observation visuelle d'un cryoprécipité dans le une cohérence d'isotype en immunofluorescence et
sérum. Un aliquote de sérum permet de tester la en immuno-électrophorèse/immunofixation. Un
redissolution de ce précipité à 37 °C. Le cryopré auto-anticorps monotypique isolé est seulement
cipité est ensuite isolé et lavé à froid puis remis à détectable en immunofluorescence. Enfin, un auto-
37 °C pour quantification et typage. La quantifi anticorps monotypique associé à une gammapathie
cation historique est la mesure du cryocrite monoclonale d'isotype différent en immuno-élec
(volume du cryoprécipité dans le sérum après cen trophorèse/immunofixation caractérise l'existence
trifugation) et manque de sensibilité. Il est préfé de deux clones plasmocytaires. Ces auto-anticorps
rable de doser dans le cryoprécipité redissous à monotypiques ou monoclonaux sont relativement
37 °C les protéines, les immunoglobulines totales fréquents, ce qui souligne l'intérêt de l'immuno
ou encore l'isotype préalablement identifié par fluorescence indirecte comme technique de pre
immunofixation (fig. 9.4). mière intention pour le dépistage des auto-anticorps,
à condition d'utiliser comme conjugué un antisé
rum polyvalent capable d'identifier les trois classes
Gammapathies monoclonales majeures d'immunoglobulines. Ceci permet de
à activité auto-anticorps dépister plus précocement des MGUS.
Le plus souvent, la cible antigénique des gammapa
thies monoclonales est inconnue. Ces anticorps
peuvent aussi bien reconnaître des exo-antigènes Recherche d'anticorps
que des endo-antigènes (allogéniques ou auto spécifiques
logues). Plusieurs types d'activités auto-anticorps
sont fréquemment rapportés pour des immunoglo La détection d'anticorps spécifiques d'un antigène
bulines monoclonales. Lorsqu'elles sont dirigées particulier dans un but diagnostique peut utiliser
contre des antigènes érythrocytaires, elles sont res de nombreuses méthodes immunologiques. La
ponsables de maladie des agglutinines froides. Elles technique ELISA indirecte est la plus couram
reconnaissent le fragment Fc des IgG dans les cryo ment employée. Les champs d'application les plus
globulines mixtes de type II. Des neuropathies larges sont représentés par l'auto-immunité et les
périphériques sont associées à la présence d'immu sérologies anti-infectieuses. Ces dosages sont
noglobulines monoclonales dirigées contre une d'abord à visée qualitative pour identifier une spé
protéine associée à la myéline (MAG), contre des cificité. Ils peuvent être rendus quantitatifs, par
gangliosides ou contre des sulfatides. Dans la majo titration ou par comparaison à une gamme d'éta
rité des cas, ces immunoglobulines monoclonales lonnage. À noter qu'en pathologie infectieuse, le
sont des IgM, fréquemment associées à la maladie diagnostic peut également comporter l'identifica
de Waldenström. tion de l'antigène chez le malade, qui peut égale
Chapitre 9. Exploration des immunoglobulines 175
II
III
ment faire appel à des méthodes immunologiques. lui-même, mais la réaction immunitaire qu'il a
L'ELISA est la méthode de référence du dépistage induite. Ainsi, il existe une fenêtre sérologique
de l'infection par le virus de l'immunodéficience d'environ 3 semaines correspondant à la période
humaine (VIH), exemple développé ici, mais elle comprise entre le début de l'infection par le VIH et
s'inscrit dans une stratégie diagnostique faisant l'apparition d'anticorps spécifiques détectables
intervenir d'autres tests. (séroconversion). De nombreuses variantes de tests
Le sérodiagnostic de l'infection à VIH est fondé ELISA sont utilisées dans le dépistage de l'infection
sur un dépistage des anticorps anti-VIH produits VIH, comme les tests de capture et les tests compé
par l'individu infecté. Il ne détecte donc pas le virus titifs qui possèdent une meilleure sensibilité. La
176 Exemples d’applications
méthode la plus courante est un ELISA de capture VIH-1 et anti-VIH-2, dont au moins une tech
des anticorps du patient, fixés sur des antigènes des nique ELISA (arrêté du 28 avril 2003). Depuis
virus VIH-1 et VIH-2 fixés au fond de plaques de 2010 (arrêté du 28 mai 2010), la législation fran
microtitration, et révélés par une anti-globuline çaise impose le recours aux tests ELISA combinés
conjuguée à une enzyme. L'intensité de la colora détectant les IgG et IgM anti-VIH-1 et anti-
tion développée est mesurée par spectrophotomé VIH-2, ainsi que l'antigène p24 du VIH-1 pré
trie. La densité optique des échantillons testés est sent dans le sérum de l'individu testé. Ces tests
proportionnelle à la quantité d'anticorps anti-VIH combinés (anticorps et antigène) réduisent la
recherchée et permet d'objectiver la séronégativité fenêtre sérologique et permettent de déceler une
ou la séropositivité du patient. La positivité est éva infection dès le 15e jour post-contage (fig. 9.5).
luée relativement à une valeur seuil de densité En cas de dépistage négatif, un deuxième test
optique correspondant généralement à la moyenne ELISA est réalisé 6 semaines après l'exposition au
de valeurs obtenues avec des sérums de sujets sains, virus afin d'attester de l'absence de contamination.
plus deux déviations standard. Pour un dosage De même, afin d'éliminer tout risque de résultat
quantitatif, une courbe d'étalonnage est établie à faussement positif lié à des interférences possibles
partir de dilutions d'un sérum standard. Le résultat avec les facteurs rhumatoïdes ou certains auto-
est exprimé en unités internationales (UI). anticorps, tout résultat positif ou indéterminé
Des tests rapides à orientation diagnostique nécessite une confirmation par une autre technique,
(TROD) permettent d'obtenir un résultat en western-blot ou un immunoblot. Le western-blot
quelques minutes (inférieur à 1 h). Ils sont généra utilise des protéines virales natives purifiées, séparées
lement basés sur des principes d'immunochroma par électrophorèse puis transférées sur membrane
tographie ou d'immunofiltration sur membrane. de nitrocellulose, alors que l'immunoblot est com
La sensibilité de ces tests reste cependant inférieure posé de protéines recombinantes spécifiques de
à celle des tests ELISA notamment lors d'une VIH-1 et VIH-2 et/ou de peptides synthétiques
primo-infection. Ils sont réservés aux situations déposés en ligne sur une bandelette. Un test est
d'urgence et le résultat, négatif ou positif, doit déclaré positif pour le VIH-1 s'il détecte des anti
être confirmé sur un échantillon indépendant corps contre au moins deux des trois glycoprotéines
obtenu lors d'un prélèvement ultérieur. virales du VIH-1 (gp160, gp120 ou gp41). La sen
Le dépistage a évolué avec les générations successives sibilité de ces deux techniques est comparable mais
des tests ELISA commerciaux. Les tests de 1re et de bien inférieure à celle des tests ELISA. Une discor
2e génération ne détectent que des anticorps de classe dance entre les résultats obtenus par ELISA et par
IgG, alors que les tests de 3e et de 4e génération ces tests peut donc exister lorsque la séroconversion
détectent à la fois des IgG et des IgM. Les antigènes est trop récente. Ces tests permettent néanmoins de
viraux déposés dans les plaques sont issus du VIH-1 et valider la positivité du résultat obtenu en ELISA et
également du VIH-2. La sensibilité de ces techniques également de préciser la spécificité des anticorps
est élevée, de l'ordre de 99,2 à 99,8 %. présents dans l'échantillon.
Jusqu'en 2009, le dépistage de l'infection à Des logigrammes illustrent la stratégie du dia
VIH en France reposait sur l'utilisation de deux gnostic biologique et les recommandations émises
techniques mixtes détectant les anticorps anti- par la Haute Autorité de santé (fig. 9.6).
Anticorps détectés en ELISA
2e génération
4e génération
Antigène p24
Fenêtre virologique
Antigénémie p24
Anticorps anti-VIH en
western-blot
Fig. 9.5 Cinétique des marqueurs de l'infection à VIH et place des différents tests de sérodiagnostic.
Test ELISA combiné*
178
(anticorps antigène)
- de 4e génération +
Notion CONFIRMATION
Exemples d’applications
d’exposition au western-blot ou
VIH < 6 semaines immunoblot
non oui
ABSENCE
D’INFECTION 2e PRÉLÈVEMENT à 6 +
semaines Spécificité anti-VIH-1 anti-VIH-2
Test ELISA combiné
de 4e génération -
+ ou
indéterminé
-
Erreur INFECTION VIH DIAGNOSTIC DIRECT
d’identification ? CONFIRMÉE ARN-VIH
Nouveau test plasmatique
Absence d’infection ou antigène p24
+ -
PRIMO-INFECTION ABSENCE
PROBABLE D’INFECTION
Réaction non spécifique
CONTRÔLE
CONTRÔLE
SÉROLOGIQUE
SÉROLOGIQUE 1 à 2 semaines plus tard
1 à 2 semaines plus tard
*Recherche d’anticorps anti-VIH1 et VIH-2 et de l’antigène p24 Explorations complémentaires
si suspicion de variants
Les cytokines sont impliquées dans la régulation de cellules cibles. Leur périmètre d'action est très
des réponses immunitaires innées et adaptatives. Il variable. La majorité d'entre elles agissent dans le
est nécessaire de bien connaître leur physiologie micro-environnement où elles sont produites,
avant d'entreprendre leur exploration. Ce sont des selon un mode dit paracrine (environnement
protéines ou des glycoprotéines essentiellement direct) ou juxtacrine (cellule adjacente à la cellule
sécrétées, mais parfois membranaires, de faible productrice). L'action d'une cytokine sur la cel-
masse moléculaire. Elles peuvent être monomé- lule qui la produit constitue l'autocrinie qui peut
riques, homodimériques (e.g. IL-5, IL-8, IL-10), même aller jusqu'à l'intracrinie, en l'absence de
hétérodimériques (e.g. IL-12), voire trimériques sécrétion de la cytokine et en cas de fixation
(e.g. TNF-α). Elles peuvent présenter des degrés immédiate à son récepteur. À l'opposé, certaines
divers de glycosylation conduisant parfois à une cytokines ont des effets de type endocrine, c'est-à-
grande hétérogénéité moléculaire (e.g. IL-6 qui dire qu'elles agissent à distance de leur lieu de
varie de 19 à 26 kDa). La phase d'expression production. Les concentrations circulantes de
membranaire de certaines d'entre elles (e.g. IL-1, cytokines sont dans la majorité des cas extrême-
TNF-α) leur permet d'agir par contact direct ment faibles (< 5 pg/mL) et leur dosage dans le
intercellulaire. Les cytokines sont parfois pro- sang périphérique est peu informatif sur les pro-
duites sous forme de précurseurs (e.g. IL-1, IL-18) ductions locales.
qui ne deviennent actifs biologiquement qu'après La production des cytokines est en règle géné-
action d'une enzyme (e.g. caspase 1). D'autres rale dépendante de l'activation cellulaire, soit
(e.g. TGF-β) subissent des étapes de maturation directement en réponse à un facteur déclenchant
extracellulaire, au cours desquelles leur fixation à (e.g. activation par le récepteur d'antigène ou un
des molécules de la matrice extracellulaire module ligand de Toll-like receptor ou TLR), soit secondai-
leur état fonctionnel ou leur catabolisme. Enfin, rement en réponse à une autre cytokine. Les inter
les cytokines sont susceptibles d'être dégradées actions entre cytokines modulent ces réponses via
par des protéases, en particulier lors des processus des effets synergiques ou, au contraire, antago-
inflammatoires. nistes. Les cytokines pro-inflammatoires (e.g. IL-1,
Les cytokines sont capables de stimuler ou d'in- TNF-α, IL-6, chimiokines) se distinguent des
hiber la prolifération ou la survie cellulaire, cytokines immunorégulatrices parmi lesquelles on
d'orienter la différenciation cellulaire, plus spécia- retrouve les interleukines, les interférons, le TGF-
lement celle des lymphocytes T (fig. 10.1), ou β et les cytokines de l'hématopoïèse ou facteurs de
d'activer les fonctions ou les capacités migratoires croissance (e.g. GM-CSF, IL-3, M-CSF). Les
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
180
Immunité cellulaire
Inflammation
STAT1 T-bet IFN
Lutte contre les
Th1 TNF
pathogènes
Exemples d'applications
IL-2
intracellulaires
IL-1R
CXCR3
IL-4 Immunité humorale
STAT6 GATA3 IL-5 Allergie
Th2 IL-10 Défense
IL-13 antiparasitaire
IL-17Rβ
IL-6+ IL-17(A)
TGF STAT3 RORs IL-17F Auto-immunité
Th17
IL-21 Lutte anti-infectieuse
IL-23 IL-22
IL-23R
Lymphocyte CCR6
T naïf
CCR7+
Foxp3
Treg TGF Immunosuppression
CD4+CD25hi
Maturation des
STAT3 Bcl6 lymphocytes B
Tfh IL-21 Auto-immunité
Opsonisation par
anticorps
CXCR5
Fig. 10.1 Cytokines et lymphocytes T.
Chapitre 10. Détection/dosage des cytokines et de leurs récepteurs 181
cytokines ont, en fait, de multiples cibles et, par génicité et à leur échappement à la réponse
conséquent, des effets pléiotropes. Les propriétés immune (e.g. IL-10, TNF-α).
biologiques sont, par ailleurs, souvent partagées
par plusieurs cytokines et cette redondance limite Méthodologie
les risques de défaillance. Enfin, certaines cyto-
kines présentent des homologues se comportant Dosages de cytokines ou de leurs récepteurs
comme des antagonistes spécifiques (e.g. IL-1ra, solubles
IL-36ra) qui entrent en compétition avec la cyto- Les conditions de prélèvement et de conservation
kine correspondante en se liant au même récep- des échantillons biologiques sont très importantes
teur, mais sans transduire de signal d'activation. pour le dosage des cytokines et doivent prendre
Les chimiokines sont impliquées dans les phéno- en compte ce qui peut se passer après le prélève-
mènes d'adressage pour le recrutement cellulaire ment. Ainsi, une surestimation de la concentra-
lors de processus inflammatoires. Elles peuvent tion in vivo peut résulter d'une production
aussi intervenir dans la différenciation cellulaire. cellulaire liée à la présence d'endotoxines ou du
L'action des cytokines sur leurs cellules cibles relargage de cytokines intracytoplasmiques. À l'in-
se fait par fixation à des récepteurs constitués de verse, la liaison de cytokines à leurs récepteurs
deux ou trois sous-unités. Dans ces complexes membranaires ou leur dégradation sous l'action
multimériques, la chaîne α assure la spécificité de protéases ou de la température peuvent
de la fixation, tandis que la chaîne β est respon- conduire à une sous-estimation.
sable de la transmission du signal. Cette dernière Le prélèvement de sang sur tube EDTA stérile
est souvent partagée par plusieurs cytokines (e.g. permet d'éviter la production potentielle de cyto-
gp130 pour les cytokines de la famille de l'IL-6). kines par les cellules sanguines grâce au pouvoir
Pour la famille des récepteurs de l'IL-2, une chélateur de l'EDTA. L'héparine, souvent conta-
chaîne γ assure la signalisation. La fixation de la minée par des endotoxines, est à éviter. Des inhi-
cytokine permet l'assemblage des sous-unités et biteurs de protéases (trasylol) ou de l'agrégation
l'organisation optimale des domaines partici- plaquettaire (indométacine) peuvent être ajoutés
pant à la transduction du signal. Les chimiokines dans les tubes. Le plasma doit être décanté très
se fixent sur des récepteurs particuliers, couplés rapidement pour éviter toute dégradation ou
aux protéines G et possédant sept domaines adsorption des cytokines. Pour les méthodes bio-
transmembranaires, capables de reconnaître plu- logiques cellulaires9, le sérum est utilisé, mais il
sieurs chimiokines. doit être recueilli dans des conditions assurant
Des récepteurs solubles des cytokines sont l'absence d'endotoxines. Il est préférable de
générés par l'action de protéases libérant la par- congeler les échantillons à très basse température
tie extramembranaire des récepteurs cellulaires (−80 °C) et sous forme d'aliquotes pour éviter les
ou par épissage alternatif et sécrétion directe. cycles de congélation/décongélation si plusieurs
Ces récepteurs solubles conservent la capacité cytokines sont dosées sur un même prélèvement.
de fixer leur ligand et possèdent ainsi une action À noter que pour certaines cytokines (e.g. TGF-β),
inhibitrice sur l'activité biologique des cyto- un prétraitement peut être nécessaire.
kines (e.g. IL-1, TNF-α). Certains récepteurs Les méthodes biologiques testant la fonction
solubles restent, à l'inverse, capables de déclen- d'une cytokine vis-à-vis d'une lignée cellulaire ne
cher un signal d'activation avec des cytokines gardent qu'une valeur historique (e.g. prolifération
membranaires (e.g. IL-6). Des protéines de liai- de thymocytes murins mesurant l'activité IL-1),
son différentes des récepteurs peuvent égale- notamment eu égard à la complexité des interac-
ment se fixer spécifiquement à certaines tions et redondances des systèmes cytokiniques.
cytokines et les neutraliser (e.g. IL-18). Enfin, il
faut tenir compte de multiples homologues tant
des cytokines que de leurs récepteurs, exprimés 9
Des ions divalents sont nécessaires pour ces méthodes et
par certains virus, qui concourent à leur patho- le pouvoir chélateur de l'EDTA peut interférer.
182 Exemples d'applications
Les méthodes immunologiques ont, en tats est liée aux différents modes d'expression pour
revanche, toute leur valeur, car il est relativement une même cytokine (e.g. pg/mL, UI/mL, pM).
aisé de produire des anticorps de grande spécificité Une approche quantitative du nombre de molé-
dirigés contre des cytokines recombinantes, per- cules de récepteurs de cytokine exprimées par cel-
mettant de distinguer des cytokines ayant une lule peut être réalisée en utilisant des billes de
même activité biologique (e.g. IL-1α et IL-1β). calibration de fluorescence en cytométrie en flux,
Les anticorps utilisés sont le plus souvent mono- mais la méthode de référence reste celle de
clonaux. Les méthodes commerciales les plus Scatchard qui utilise des anticorps radiomarqués
répandues pour le dosage des cytokines dans les accédant à la mesure des constantes d'affinité.
milieux biologiques sont des ELISA sandwich. Les
techniques multiplex utilisant la fluorescence ou la
chimiluminescence, en microarray ou en cytomé- Détection in situ ou au niveau cellulaire
trie en flux, sont mieux adaptées aux dosages Il est possible de mettre en évidence la présence de
ponctuels et permettent la mesure simultanée de cytokines ou de leurs récepteurs dans les tissus par
plusieurs cytokines afin d'obtenir un profil cytoki- des techniques d'immunohistochimie ou d'immu-
nique (e.g. profil pro-inflammatoire, réponse Th1/ nofluorescence directe ou amplifiée.
Th2/Th17), parfois même avec un système auto- L'utilisation de coupes à la congélation pose
matisé. Ceci peut être particulièrement intéressant peu de problèmes, mais pour les tissus fixés la fixa-
pour des dosages réalisés dans le surnageant de tion peut altérer les molécules à détecter et néces-
cultures cellulaires, reflétant bien les réponses site de sélectionner des réactifs capables de
induites par les conditions expérimentales. reconnaître ces épitopes modifiés. Ces méthodes
La plupart des trousses commercialisées sont permettent d'identifier qualitativement une
adaptées au dosage des cytokines dans le plasma concentration localisée au niveau de la cellule pro-
ou le sérum et la méthodologie doit être validée, ductrice. Les méthodes d'analyse d'image peuvent
notamment par des tests de surcharge mesurant le donner une idée semi-quantitative de l'intensité
rendement du dosage, lors de l'utilisation d'autres de la réponse cytokinique. L'utilisation de co-
liquides biologiques. Pour le liquide synovial, qui marquages, voire de microscopie confocale, per-
peut présenter une forte viscosité, l'ajout de hya- met une approche affinée.
luronidase est parfois nécessaire pour fluidifier La sécrétion des cytokines par les lymphocytes
l'échantillon. Enfin, du fait des faibles dilutions peut être mise en évidence après réactivation des
effectuées sur les échantillons à analyser, il faut cellules in vitro, de façon non spécifique (e.g.
être très vigilant sur les interférences classiques des mitogène) ou spécifique (e.g. antigène). La détec-
immunodosages : hémolyse, anticorps hétéro- tion intracellulaire en cytométrie en flux implique
philes, facteurs rhumatoïdes. Actuellement, appa- de bloquer le transport et la sécrétion de la cyto-
raissent sur le marché des techniques (e.g. Erenna® kine d'intérêt (e.g. brefeldine A), puis de fixer et
ou Simoa®) qui améliorent la limite de détection perméabiliser les cellules pour que l'anticorps ait
de manière considérable (gain de deux à trois logs accès au compartiment intracellulaire. Le dévelop-
de concentration). pement des marquages multi-couleurs permet
La standardisation des immunodosages de cyto- d'analyser simultanément de nombreux para-
kines n'est pas encore acquise et il existe parfois de mètres immunophénotypiques et/ou la produc-
fortes discordances entre différentes trousses com- tion de plusieurs cytokines par la même cellule. Il
merciales. Des préparations internationales de est ainsi possible de mettre en évidence des lym-
cytokines sont disponibles auprès du National phocytes spécifiques de type Th1, Th2 ou Th17,
Institute for Biological Standards and Control 10. mais aussi de lymphocytes dits polyfonctionnels
Une autre source de discordances entre les résul- qui produisent plusieurs cytokines (e.g. IFN-γ/
IL-2 et TNF-α). Ces derniers sont notamment
10
www.nibsc.org associés à une meilleure protection dans diverses
Chapitre 10. Détection/dosage des cytokines et de leurs récepteurs 183
pathologies infectieuses (e.g. tuberculose, Sida, La variabilité de production des cytokines chez
hépatites). La détection par ELISpot, particulière- des sujets normaux peut être élevée. Pour un indi-
ment développée pour l'interféron γ, permet de vidu donné, l'effet principal est celui des rythmes
quantifier la fréquence des cellules répondeuses et circadiens liés aux variations des corticostéroïdes
peut être plus sensible que la détection intracellu- et de la mélatonine.
laire. Les cytokines étant des substrats pour les pro-
téases générées lors des processus inflamma-
Étude des ARNm toires, certains produits de dégradation sans
activité biologique peuvent être détectés en
Alternativement à la détection des protéines, la
immuno-analyse.
production de cytokines peut être étudiée au
Leur action locale paracrine, voire autocrine, est
niveau des ARNm, in vitro dans des cultures cel-
un élément essentiel à considérer dans l'explora-
lulaires ou ex vivo sur des biopsies, en prenant les
tion des cytokines. Aussi, le résultat normal du
précautions nécessaires pour assurer la stabilité
dosage d'une cytokine circulante ne permet pas
des ARNm. Dans les tissus, la technique d'hybri-
d'exclure un foyer d'inflammation ou de stimula-
dation in situ par riboprobes détecte les cellules
tion immune locale.
contenant des transcrits de cytokines à l'aide de
Les cytokines se lient fréquemment à des protéines
traceurs enzymatiques ou fluorescents ou dans
plasmatiques (e.g. IL-6 et α2-macroglobuline), mais
des suspensions cellulaires en cytométrie en flux.
ces liaisons de faible affinité perturbent peu les
Une analyse plus large du transcriptome par RT-
dosages. À l'inverse, les récepteurs antagonistes inter-
PCR après extraction des ARN peut donner une
fèrent dans les effets fonctionnels et les dosages bio-
image plus globale. En tout état de cause, si
logiques des cytokines. Des anticorps très spécifiques
l'analyse des ARNm permet une détection de
permettent, en revanche, de distinguer les cytokines
différences rapidement induites par un stimulus,
de leurs homologues. La présence de récepteurs
elle doit être pondérée par le fait que les méca-
solubles représente une cause d'interférence dans les
nismes de régulation post-transcriptionnelle
tests biologiques et certains immunodosages si l'anti-
peuvent ensuite modifier l'expression protéique.
corps utilisé reconnaît un épitope de la cytokine
impliqué dans sa liaison à son récepteur. Il faut sélec-
Étude de l'ADN, polymorphismes tionner des anticorps se fixant sur des sites indépen-
Les gènes des cytokines et de leurs récepteurs sont dants des interactions cytokine/récepteur pour doser
concernés par des variations au niveau de l'ADN, toutes les formes de la cytokine. De manière géné-
qui peuvent être limitées à un nucléotide dans les rale, l'influence de nombreux inhibiteurs disparaît
SNP (Single Nucleotide Polymorphism), ou s'asso- après dilution d'un échantillon biologique fournis-
cier à des modifications plus importantes (e.g. sant des résultats paradoxaux (e.g. effet matrice). Les
délétions, insertions, substitutions), voire des principaux facteurs pouvant influencer le dosage des
variations dans le nombre de copies des gènes cytokines sont résumés dans la figure 10.2.
(Copy Number Variation ou CNV). Des auto-anticorps dirigés contre des cytokines
(e.g. contre le TNF-α, l'IL-6, l'IL-1) apparaissent
avec l'âge. Leur affinité peut atteindre des valeurs
Recommandations de mise en œuvre
comparables à celles des anticorps utilisés dans les
La demi-vie des cytokines est très courte (habi- immunodosages (e.g. 10−11 M). Ces auto-anti-
tuellement inférieure à une heure) et leur produc- corps peuvent constituer un élément diagnostique
tion pulsatile conduit à des pics fugaces dans la (e.g. anti-IFN-γ dans des syndromes d'immuno-
circulation impliquant la réalisation de prélève- déficience acquise non virale) ou expliquant la
ments rapprochés et multiples pour suivre ces physiopathologie (e.g. anti-IL-17 ou IL-22 et can-
variations rapides. Ceci est surtout applicable à la didoses cutanéomuqueuses dans les polyendocri-
recherche expérimentale. nopathies auto-immunes).
184
Protéines de liaison Auto-anticorps
(par ex. α2-macroglobuline) (par ex. anti-TNF-α, anti-IL-6)
Exemples d'applications
CYTOKINE
Demi-vie courte
Rythmes circadiens
Précurseurs
Cytokines membranaires
Polymères
Glycosylation
Produits de dégradation
Compartimentalisation
Fig. 10.2 Éléments de la physiologie des cytokines et de leurs récepteurs à prendre en compte pour la réalisation de leurs dosages.
Chapitre 10. Détection/dosage des cytokines et de leurs récepteurs 185
Avantages/inconvénients
Avantages Inconvénients
Cytokines ou récepteurs solubles
Dosage par ELISA Méthode quantitative Une cytokine à la fois
Grandes séries possibles Mesure globale
Attention aux formes dégradées et aux effets
de matrice
Dosage multiplex Dosages ponctuels, petites séries ou grandes Dosage global
séries Tests de surcharge nécessaires pour certains
Mesure simultanée de plusieurs cytokines : fluides biologiques
profils cytokiniques sur de faibles quantités Attention à l'effet matrice et aux interférences
d'échantillon Difficulté de standardisation
Automatisation possible
Cytokines ou récepteurs cellulaires
Immunohistochimie Identification des cellules productrices dans Épitopes altérés par la fixation
les tissus Appréciation qualitative ou semi-quantitative
Production individuelle
Cytométrie intracytoplasmique Identification concomitante de Culture cellulaire et stimulation en présence
l'immunophénotype des cellules productrices de molécules bloquant la sécrétion
Caractérisation de signatures fonctionnelles Interprétation des résultats en clinique parfois
Grande sensibilité difficile (stimulation à la PHA, par exemple)
Réponses spécifiques en fonction de la
stimulation
Mesure quantitative
ELISpot Grande sensibilité Culture cellulaire en système approprié
Réponses spécifiques en fonction de la
stimulation
Mesure quantitative
Acides nucléiques
ARN, riboprobes in situ ou intracytoplasmiques Détection plus rapide de l'activation Protection des ARN
Analyse large du transcriptome Pas forcément de correspondance protéique
Identification concomitante de
l'immunophénotype des cellules productrices
ADN Détection des polymorphismes Pas de relation systématique avec les
capacités de réponse
dation de la Haute Autorité de Santé chez les (T-Spot TB®) ou dosage ELISA (Quantiféron®).
186 Exemples d'applications
actuellement dans la mise en œuvre d'une toires liées à des mutations de récepteurs de
bithérapie interféron–ribaravine dans le trai- cytokines (e.g. TNFRSF1A) ou à des déficits
tement de l'hépatite C ; (IL-1ra ou IL-36ra), ainsi que de pathologies
– en recherche clinique, un orage cytokinique auto-immunes comme la polyarthrite rhuma-
est caractéristique du choc septique, générant toïde ou le lupus érythémateux. Cependant,
une immunosuppression secondaire poten- ces explorations restent encore du domaine
tiellement mortelle. L'exploration de l'in- de la recherche et n'ont pas encore de retom-
flammasome peut contribuer à une meilleure bées thérapeutiques.
compréhension de maladies auto-inflamma-
Chapitre 11
Exploration du complexe majeur
d'histocompatibilité
Le premier produit du complexe immunogéné- exprimées sur toutes les cellules nucléées de
tique HLA (Human Leucocyte Antigens), HLA- l'organisme. Ces peptides provenant de la
A2, a été individualisé en 1958 par Jean Dausset dégradation de molécules du soi dans les condi-
qui a reçu le prix Nobel en 1980 pour cette tions physiologiques correspondent à des pep-
découverte. En raison de l'importance de ce tides viraux ou tumoraux en pathologie.
complexe dans la greffe d'organe, le système Ce système de reconnaissance des vertébrés
HLA a été initialement perçu comme le com- supérieurs a été progressivement identifié. Chez
plexe majeur d'histocompatibilité (CMH) de la souris, le CMH est le système H-2. Les molé-
l'homme. Il s'agit d'un système multigénique, cules de classe I sont codées par les gènes H-2K,
multi-allélique et d'expression codominante. H-2D et H-2L (e.g. H2k, H2d) et les molécules
En dehors du contexte de la greffe d'organes de classe II par les gènes I-E et I-A. Il existe éga-
ou de tissus entre individus différents, la fonc- lement un CMH chez le chien (DL-A) ou le
tion majeure des produits du CMH, décou- cheval (EL-A), par exemple. La compatibilité ou
verte partagée entre deux autres lauréats Nobel, l'incompatibilité du CMH doit être prise en
Ralf Zinkernagel et Peter Doherty (1986), est compte dans les expérimentations impliquant
de permettre des interactions cellulaires, en des animaux de fonds génétiques différents.
tout premier lieu la reconnaissance des anti- Les produits du CMH sont des glycoprotéines
gènes par les lymphocytes T. En effet, ces cel- membranaires qui peuvent donc être identifiées à
lules reconnaissent, de manière spécifique par la surface des cellules. Elles présentent des épi-
leur récepteur T (TCR), l'association d'un pep- topes spécifiques reconnaissables par des anticorps
tide et de la molécule CMH qui le présente. qui permettent de les typer de manière générique.
Les lymphocytes T CD4+ ne reconnaissent que Du fait de leur extrême variabilité au sein d'une
des peptides, en majorité exogènes, présentés même espèce, et en particulier chez l'homme, la
par des molécules CMH de classe II exprimées caractérisation des allèles codant pour ces molé-
de façon constitutive sur les cellules présenta- cules ne peut être réalisée que par biologie
trices d'antigènes (e.g. cellules dendritiques, moléculaire.
monocytes/macrophages, lymphocytes B). Les En raison de leur implication majeure dans la
lymphocytes T CD8+ ne reconnaissent que les tolérance ou le rejet de greffe, les molécules HLA
peptides, majoritairement d'origine endogène, de l'homme sont principalement caractérisées
présentés par les molécules CMH de classe I dans le domaine de la transplantation d'organes.
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
188 Exemples d’applications
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
b. Migration sur Gel ou sur Analyseur de fragment
192
a. Amplification par PCR du réarrangement VDJ
(amorce couplée à un fluorochrome)
Exemples d’applications
ADN
L CH
ADN réarrangé
FR1 JH*
ARNm
L CH*
Fig. 12.1 Exploration à visée pronostique du statut mutationnel de la partie variable de la chaîne lourde de l'immunoglobuline d'un clone de lymphocytes B issus d'un
patient atteint de leucémie lymphoïde chronique.
a. Le réarrangement VDJ est amplifié par PCR.
b à d. L'amplicon est ensuite contrôlé (b) et séquencé (c) afin de comparer la séquence obtenue à celles issues de bases de données internationales (d) et calculer le
pourcentage d'homologie.
* : amorce couplée à un fluorochrome.
Chapitre 12. Hypermutations somatiques et translocations chromosomiques 193
proche. Plusieurs outils accessibles sur des sites homologues ou non, pouvant modifier les condi-
Internet permettent cette analyse. tions d'activation et de survie des cellules et conduire
à des pathologies tumorales. Dans les hémopathies
Recommandations de mise en œuvre malignes B, les translocations retrouvées sont sou-
L'utilisation d'ARN pour la production d'ADNc vent issues d'erreurs lors du processus de recombi-
nécessite de prendre les précautions nécessaires naison VDJ des gènes codant pour la partie variable
pour préserver ces acides nucléiques fragiles : des gènes IGVH ou, plus rarement, lors des recom-
transport rapide des échantillons, utilisation d'in- binaisons VJ au niveau des chaînes légères κ ou λ.
hibiteurs d'ARNases ou de milieux spécifiques, Elles entraînent le plus souvent une surexpression
travail en conditions RNAse-free. des transcrits et de la protéine de fusion si la
La mise en évidence des séquences résultant séquence ne comporte pas de codon stop.
d'hypermutations caractéristiques d'un clone Méthodologie
pathologique peut permettre de suivre la maladie
résiduelle moléculaire dans les proliférations B. L'hybridation in situ en fluorescence (Fluorescence
Ceci nécessite pour chaque point de suivi une com- In Situ Hybridization ou FISH) sur cellules en
paraison avec le matériel de diagnostic et dépend métaphase ou interphase est la technique de réfé-
donc de sa quantité et de sa qualité, ainsi que de la rence permettant de détecter les translocations
production d'amorces spécifiques pour l'amplifica- chromosomiques.
tion du matériel nucléaire des cellules malignes. L'amplification de l'ADN par PCR à l'aide
d'amorces spécifiques des gènes impliqués dans la
Exemples d'applications fusion est également possible en utilisant pour
• En recherche : la recherche des hypermutations chaque gène une région d'hybridation des
somatiques après stimulation de cellules in vitro amorces localisée à proximité du point de cassure.
permet d'évaluer les réponses des cellules Les stratégies de PCR recherchant des transloca-
mémoire ou naïves. tions impliquant les gènes des chaînes lourdes des
• En clinique : immunoglobulines utilisent une amorce consen-
– la leucémie lymphoïde chronique (LLC) est sus sur le gène JH.
une pathologie tumorale caractérisée par la L'analyse des transcrits peut être réalisée sur du
prolifération d'un clone de lymphocytes B matériel de bonne qualité, frais ou congelé, pour
défini par des caractéristiques phénotypiques lequel les ARNm ont été bien conservés. Une surex-
et moléculaires propres. Le statut mutation- pression des transcrits peut être évaluée par RT-PCR
nel VH, défini par une homologie supérieure compétitive co-amplifiant différents ARNm.
ou inférieure à 98 % aux séquences germi- Les protéines de fusion, quand elles existent,
nales, est associé à l'évolution de cette affec- peuvent être détectées par immunohistochimie
tion, plus favorable pour les patients ayant sur coupes congelées ou fixées et incluses en paraf-
une LLC mutée (< 98 %) ; fine, en utilisant des anticorps monoclonaux spéci-
– la recherche des spécificités de séquence du fiques des deux protéines concernées. Les signaux
clone malin peut être utilisée pour détecter, pourront alors colocaliser ou, au contraire, dispa-
après traitement, la maladie résiduelle dans la raître si l'épitope reconnu est altéré ou éliminé par
LLC, les leucémies aiguës lymphoblastiques la translocation. Quelques techniques détectant
et les lymphomes. des protéines de fusion dans des lysats cellulaires
par ELISA ou par une technique voisine ont été
rapportées dans la littérature.
Translocations
chromosomiques Recommandations de mise en œuvre
La ou les techniques à utiliser dépendent du
Les translocations chromosomiques sont des type d'anomalie recherchée et du contexte
échanges de matériel génétique entre chromosomes pathologique.
194 Exemples d’applications
Les précautions habituelles doivent être prises cellulaire peuvent bénéficier de ces techniques.
pour la manipulation des ARN. Ainsi, l'inactivation ou au contraire la dé-répres-
La spécificité des anticorps et l'efficacité des sion de certains gènes, résultant de ces modifi-
techniques d'immunomarquage doivent être cations chromosomiques, permettent de mieux
vérifiées en s'entourant des témoins ad hoc, comprendre leur implication dans la physiologie
notamment de lignées présentant l'anomalie des réponses immunitaires.
recherchée. • En clinique : les réarrangements BCL1-IGH et
IGH-BCL2, résultant des translocations t(11;14)
Exemples d'applications (q13;q32) et t(14;18)(q32;q21), sont les plus
• En recherche : les recherches de mutations sont couramment retrouvés respectivement dans les
appliquées à des modèles particuliers utilisant lymphomes du manteau et de Burkitt. La translo-
des agents susceptibles d'induire des cassures de cation t(11;14)(q13;q32) place le gène de la
l'ADN et des recombinaisons anormales. Les cycline D1, CCND1, sous le contrôle de la
translocations ainsi générées et leur suivi au région enhancer IGH-Eμ induisant une activa-
cours de processus tumoraux ou d'activation tion transcriptionnelle de la cycline D1 (fig. 12.2).
B normaux
Patient LM
REC1
Cycline D1
Cycline D2
BCL1 JH Cycline D3
BCL1-JH de la cycline D1
(ADN) (ARNm)
Fig. 12.2 Recherche de l'hyperexpression de la cycline D1 consécutive à la translocation t(11 ; 14) dans les
lymphomes du manteau.
a. Sondes d'amplification BCL1 sur le chromosome 11, JH sur le chromosome 14.
b. Surexpression des transcrits de la cycline D1 dans les lymphocytes B pathologiques : analyse des transcrits ARNm dans
une lignée de lymphome du manteau (REC1), lymphocytes B normaux et ARNm d'un patient atteint de lymphome du
manteau (LM).
Chapitre 13
Immuno-hématologie
Tableau 13.1 Différents systèmes de groupes sanguins officiellement reconnus par la Société internationale de
transfusion sanguine (SITS), nomenclature et localisation chromosomique
Numérotation Nom du système Symbole Nombre Chromosome Locus
du système d'antigènes
A001 ABO ABO 4 9 ABO
A002 MNS MNS 46 4 GYPA/B/E
A003 P1PK P1 2 22 P1PK
A004 Rh RH 52 1 RHD/CE
A005 Lutheran LU 20 19 LU
A006 Kell KEL 32 7 KEL
A007 Lewis LE 6 19 FUT3
A008 Duffy FY 5 1 FY
A009 Kidd JK 3 18 SLC14A1
A010 Diego DI 22 17 SLC4A1
A011 Yt YT 2 7 ACHE
(Suite)
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
196 Exemples d’applications
Tableau 13.1 Suite
Numérotation Nom du système Symbole Nombre Chromosome Locus
du système d'antigènes
A012 Xg XG 2 X/Y XG/MIC2
A013 Scianna SC 7 1 ERMAP
A014 Dombrock DO 7 12 DO
A015 Colton CO 4 7 AQP1
A016 Landsteiner-Wiener LW 3 19 LW
A017 Chido/Rodgers CH/RG 9 6 C4A/B
A018 H H 1 19 FUT1
A019 Kx KX 1 X/Y XK
A020 Gerbich GE 11 2 GYPC
A021 Cromer CROM 16 1 DAF
A022 Knops KN 9 1 CR1
A023 Indian IN 4 11 CD44
A024 Ok OK 3 19 BSG
A025 Raph RAPH 1 11 MER2
A026 John Milton-Hagen JMH 6 15 SEMA7A
A027 Indian IN 1 6 CGNT2
A028 Globoside GLOB 1 3 B3GALNT1
A029 Gill GIL 1 9 AQP3
A030 RHAG RHAG 3 6 RHAG
A031 Forssman FORS 1 1 A3GALNT1
A032 Junior JR 1 4 ABCG2
A033 Langeris LAN 1 2 ABCB6
A034 Vel VEL 1 1 SMIM1
Les anticorps naturels réguliers ou irréguliers sont Le système ABO est le plus important car tout
présents respectivement de façon constante (e.g. sujet présente dans son sérum des anticorps natu-
anticorps du système ABO) ou inconstante (e.g. rels réguliers (anti-A et anti-B) dirigés contre les
système Lewis). Ils sont de classe IgM et/ou IgG. antigènes érythrocytaires qu'il ne possède pas. Les
La présence des anticorps naturels réguliers antigènes de ce système sont représentés par les
impose des règles de compatibilité ABO pour les sucres terminaux des chaînes latérales glucidiques
hématies et le plasma dès la première transfusion. des glycolipides ou glycoprotéines de la mem-
Les anticorps immuns liés à une stimulation brane du globule rouge (fig. 13.1). Les phéno-
interhumaine sont surtout de classe IgG, de surve- types A et B sont codominants et dominants par
nue inconstante et font par conséquent partie des rapport à O (tableau 13.2). Les anticorps naturels
anticorps irréguliers. Ils représentent un risque de ce système sont majoritairement des IgM diri-
transfusionnel et obstétrical. Ces anticorps peuvent gées contre les antigènes absents et seuls les sujets
être des allo-anticorps ou des auto-anticorps12. AB n'ont pas d'anticorps dans ce système.
Le système Rhésus (Rh) est un système com-
12
En fonction de la fréquence dans la population de
plexe comportant une cinquantaine d'antigènes
l'antigène reconnu, on parle d'antigènes privés (< 1 %) ou
publics (> 99 %). La majorité des allo-anticorps ont une
importants car très immunogènes. Pour la pra-
fréquence distribuée entre ces deux bornes. tique courante, cinq d'entre eux (D, C, E, c et e
Chapitre 13. Immuno-hématologie 197
Précurseur H
Reste en l’état Gal GlcNAc R
chez le sujet OO
Fuc
Antigène A
Ajout du sucre dominant
GalNAc Gal GlcNAc R
chez un sujet porteur
d’au moins un allèle A
Fuc
Antigène B
Ajout du sucre dominant
Gal Gal GlcNAc R
chez un sujet porteur
d’au moins un allèle B
Fuc
respectivement pour RH1, RH2, RH3, RH4, d'haplotype. Le locus RHD code l'antigène D qui
RH5) sont recherchés pour un phénotypage rhé- définit le phénotype RH1 positif. Chez les sujets
sus complet. Ils sont codés par deux loci étroite- européens, l'absence d'antigène D, c aractéristique
ment liés et transmis en bloc sous forme du phénotype RH1 négatif, correspond à une
198 Exemples d’applications
délétion et est désignée par la lettre d. Les sujets Kell (KEL) comporte 32 antigènes dont deux sont
RH1 négatif sont homozygotes dd pour cette recherchés en routine, K (KEL1 très immuno-
délétion. Par définition, le groupe Rh standard gène) et k (KEL2 beaucoup moins immunogène),
correspond à ces deux phénotypes13. La détermi- codés par deux allèles codominants14. Les anti-
nation de l'antigène D est indissociable du grou- corps anti-KEL1 sont des anticorps immuns irré-
page ABO. Il n'y a pas d'anticorps anti-rhésus guliers et il faut éviter l'immunisation anti-K en
naturels, ils sont tous des anticorps immuns irré- transfusion. Trois autres systèmes importants
guliers secondaires à une grossesse ou à une trans- peuvent être source d'anticorps immuns irrégu-
fusion incompatible. La compatibilité pour liers, les systèmes Kidd, Duffy et MNSs dans lequel
l'antigène D doit être impérativement respectée les antigènes S et s sont les plus immunogènes.
lors d'une transfusion d'érythrocytes. Le système Les anticorps naturels irréguliers anti-P1 et anti-
Lewis ne présentent en général aucun risque
13
En France, 85 % des sujets sont Rh positifs (RH:+1)
transfusionnel ou obstétrical. En revanche, cer-
et 15 % Rh négatifs (RH:−1). Sur un document de grou- tains anticorps naturels réguliers des systèmes P et
page, par convention et selon la nomenclature internatio- PK, présents exceptionnellement chez des sujets
nale, les antigènes présents sont représentés par le symbole dépourvus des antigènes correspondants, peuvent
du système auquel ils appartiennent, suivi du chiffre les être dangereux. Les principaux allo-anticorps anti-
désignant, précédé ou non du signe − selon qu'ils sont érythrocytes sont présentés dans le tableau 13.3.
absents ou présents. Ainsi, le phénotype Rh négatif clas-
sique, qui correspond au phénotype D−C−E−C+e+ en
nomenclature usuelle, est selon cette convention noté 14
Quatre-vingt-dix pour cent des individus sont Kell−
RH: −1,−2,−3,4,5. (kk), et 10 % sont K (KK ou Kk).
Chapitre 13. Immuno-hématologie 199
+ –
Hématies
Anticorps
Colonne
de filtration
Hématies, agglutinées
Hématies non agglutinées,
par les anticorps,
sédimentées en bas de la
stoppées par la
colonne de filtration
colonne de filtration
Fig. 13.2 Hémagglutination en tube.
Cette technique est utilisée pour réaliser les groupes sanguins et les tests de Coombs recherchant des anticorps
anti-hématies fixés sur les globules rouges in vivo (Coombs direct ou Test of Direct Agglutination, TDA) ou au laboratoire
(Coombs indirect ou Test of Indirect Agglutination, TIA) par incubation d'hématies de groupe O et du sérum testé.
Le tube de gauche représente la situation initiale au cours de laquelle les réactifs sont introduits dans la chambre
supérieure. Le gel de filtration est dit actif s'il contient un anticorps de groupage ou une anti-globuline. On peut réaliser le
test de Coombs en déposant dans la chambre supérieure seulement les hématies du malade sensibilisées in vivo ou un
mélange des hématies O et du sérum du sujet à tester. Le gel peut également être passif : l'anticorps de groupage se
trouve alors dans la chambre supérieure et les hématies à tester lui sont ajoutées.
Le tube du centre représente une réaction positive où les hématies agglutinées ont été bloquées par le gel.
Le tube de droite représente une réaction négative où les hématies non agglutinées ont traversé le gel.
200 Exemples d’applications
Antiglobuline
a b
Fig. 13.3 Immuno-adhérence à partir d'une cupule recouverte d'hématies (a) et d'une cupule recouverte d'antiglobuline (b).
non sensibilisées d'un test négatif donnent un loppent comme la spectrométrie de masse identi-
bouton cellulaire au centre du puits. Cette deu- fiant le nucléotide à chaque position polymorphe.
xième approche de l'immuno-adhérence évite les
lavages. Exemples d'applications
Le génotypage nécessite de disposer d'un Les alternatives à l'agglutination se développent
échantillon d'ADN représentatif du génome pour les typages érythrocytaires. En médecine trans-
(ADNg). Un fragment de l'ADNg est amplifié par fusionnelle et obstétricale, l'outil moléculaire per-
PCR. Les SNP sont recherchés dans les amplicons met d'envisager la détermination du génotype
par RFLP (Restriction Fragment Length érythrocytaire d'un individu et d'en déduire le phé-
Polymorphism) pour un SNP d'intérêt localisé notype lorsque l'immunohématologie fait défaut ou
dans le site de restriction d'une endonucléase, ou est confrontée à des situations complexes (e.g. trans-
par séquençage. Des techniques de PCR-AS fusions récentes, maladie hémolytique du nouveau-
(Allele-Specific) utilisent trois amorces, l'une com- né). En transfusion sanguine, la mise en œuvre de
mune et deux autres spécifiques de chacun des techniques à haut débit permettrait de résoudre le
deux allèles. La PCR en temps réel allèle spéci- problème de l'identification de génotypes délicats
fique peut être appliquée à haut débit. Les micro- ou rares. Ceci pourrait s'avérer utile pour la sécurité
puces à ADN avec une PCR multiplex permettent transfusionnelle ou pour la constitution de panels de
un génotypage à moyen débit éventuellement laboratoire. Les principales applications sont présen-
automatisable. D'autres techniques se déve- tées dans le tableau 13.4.
202 Exemples d’applications
Tableau 13.1 Différents systèmes de groupes sanguins officiellement reconnus par la Société internationale de
transfusion sanguine (SITS), nomenclature et localisation chromosomique
Numérotation Nom du système Symbole Nombre Chromosome Locus
du système d'antigènes
A001 ABO ABO 4 9 ABO
A002 MNS MNS 46 4 GYPA/B/E
A003 P1PK P1 2 22 P1PK
A004 Rh RH 52 1 RHD/CE
A005 Lutheran LU 20 19 LU
A006 Kell KEL 32 7 KEL
A007 Lewis LE 6 19 FUT3
A008 Duffy FY 5 1 FY
A009 Kidd JK 3 18 SLC14A1
A010 Diego DI 22 17 SLC4A1
A011 Yt YT 2 7 ACHE
(Suite)
Méthodes en immunologie
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reservés
196 Exemples d’applications
Tableau 13.1 Suite
Numérotation Nom du système Symbole Nombre Chromosome Locus
du système d'antigènes
A012 Xg XG 2 X/Y XG/MIC2
A013 Scianna SC 7 1 ERMAP
A014 Dombrock DO 7 12 DO
A015 Colton CO 4 7 AQP1
A016 Landsteiner-Wiener LW 3 19 LW
A017 Chido/Rodgers CH/RG 9 6 C4A/B
A018 H H 1 19 FUT1
A019 Kx KX 1 X/Y XK
A020 Gerbich GE 11 2 GYPC
A021 Cromer CROM 16 1 DAF
A022 Knops KN 9 1 CR1
A023 Indian IN 4 11 CD44
A024 Ok OK 3 19 BSG
A025 Raph RAPH 1 11 MER2
A026 John Milton-Hagen JMH 6 15 SEMA7A
A027 Indian IN 1 6 CGNT2
A028 Globoside GLOB 1 3 B3GALNT1
A029 Gill GIL 1 9 AQP3
A030 RHAG RHAG 3 6 RHAG
A031 Forssman FORS 1 1 A3GALNT1
A032 Junior JR 1 4 ABCG2
A033 Langeris LAN 1 2 ABCB6
A034 Vel VEL 1 1 SMIM1
Les anticorps naturels réguliers ou irréguliers sont Le système ABO est le plus important car tout
présents respectivement de façon constante (e.g. sujet présente dans son sérum des anticorps natu-
anticorps du système ABO) ou inconstante (e.g. rels réguliers (anti-A et anti-B) dirigés contre les
système Lewis). Ils sont de classe IgM et/ou IgG. antigènes érythrocytaires qu'il ne possède pas. Les
La présence des anticorps naturels réguliers antigènes de ce système sont représentés par les
impose des règles de compatibilité ABO pour les sucres terminaux des chaînes latérales glucidiques
hématies et le plasma dès la première transfusion. des glycolipides ou glycoprotéines de la mem-
Les anticorps immuns liés à une stimulation brane du globule rouge (fig. 13.1). Les phéno-
interhumaine sont surtout de classe IgG, de surve- types A et B sont codominants et dominants par
nue inconstante et font par conséquent partie des rapport à O (tableau 13.2). Les anticorps naturels
anticorps irréguliers. Ils représentent un risque de ce système sont majoritairement des IgM diri-
transfusionnel et obstétrical. Ces anticorps peuvent gées contre les antigènes absents et seuls les sujets
être des allo-anticorps ou des auto-anticorps12. AB n'ont pas d'anticorps dans ce système.
Le système Rhésus (Rh) est un système com-
12
En fonction de la fréquence dans la population de
plexe comportant une cinquantaine d'antigènes
l'antigène reconnu, on parle d'antigènes privés (< 1 %) ou
publics (> 99 %). La majorité des allo-anticorps ont une
importants car très immunogènes. Pour la pra-
fréquence distribuée entre ces deux bornes. tique courante, cinq d'entre eux (D, C, E, c et e
Chapitre 13. Immuno-hématologie 197
Précurseur H
Reste en l’état Gal GlcNAc R
chez le sujet OO
Fuc
Antigène A
Ajout du sucre dominant
GalNAc Gal GlcNAc R
chez un sujet porteur
d’au moins un allèle A
Fuc
Antigène B
Ajout du sucre dominant
Gal Gal GlcNAc R
chez un sujet porteur
d’au moins un allèle B
Fuc
respectivement pour RH1, RH2, RH3, RH4, d'haplotype. Le locus RHD code l'antigène D qui
RH5) sont recherchés pour un phénotypage rhé- définit le phénotype RH1 positif. Chez les sujets
sus complet. Ils sont codés par deux loci étroite- européens, l'absence d'antigène D, c aractéristique
ment liés et transmis en bloc sous forme du phénotype RH1 négatif, correspond à une
198 Exemples d’applications
délétion et est désignée par la lettre d. Les sujets Kell (KEL) comporte 32 antigènes dont deux sont
RH1 négatif sont homozygotes dd pour cette recherchés en routine, K (KEL1 très immuno-
délétion. Par définition, le groupe Rh standard gène) et k (KEL2 beaucoup moins immunogène),
correspond à ces deux phénotypes13. La détermi- codés par deux allèles codominants14. Les anti-
nation de l'antigène D est indissociable du grou- corps anti-KEL1 sont des anticorps immuns irré-
page ABO. Il n'y a pas d'anticorps anti-rhésus guliers et il faut éviter l'immunisation anti-K en
naturels, ils sont tous des anticorps immuns irré- transfusion. Trois autres systèmes importants
guliers secondaires à une grossesse ou à une trans- peuvent être source d'anticorps immuns irrégu-
fusion incompatible. La compatibilité pour liers, les systèmes Kidd, Duffy et MNSs dans lequel
l'antigène D doit être impérativement respectée les antigènes S et s sont les plus immunogènes.
lors d'une transfusion d'érythrocytes. Le système Les anticorps naturels irréguliers anti-P1 et anti-
Lewis ne présentent en général aucun risque
13
En France, 85 % des sujets sont Rh positifs (RH:+1)