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LE MERVEILLEUX

SURRÉALISTE DE MICHEL LEIRIS


ET LA CONCILIATION AVEC LA MODERNITÉ

TANIA COLLANI

22 ! 23

Leiris & moi. ..

pr~mière fois Leiris dans les années V.ingt. lorsqu'il

J
' a i rencontré pour la
fréquentait activement 1atelier de la TIle Blomet. En compagnie de Robert
Desnos. Antonin Artaud. André 1\lasson et Limbour, il commençait
son interprétation personnelle du surrealisme. tOute fondée sur
l'investigation subjective des profondeurs magiques de j'homme, il la recherche dcs potentiels
poetiques et des racines du merveilleux, Dans les mOlS de Lelfis. les amis fréquentaient
r atelier étaient liés par «un furieux appétit de mennllen.\ » «< 45. rue BIomet », Z. : :426).
Ln appétit qui. étant totalement dépourvu de tout dogmatisme. n'excluait pas le recours à
l' irOllle désinvolte et au jeu - n'oubl ions pas que Leins et Dfsnos ont été des maîtres des jeux
de mots et des calembours,
Si c'est grâce il l'étude du mouvement surréaliste que Jf suis arrivéf à Leiris. il faut aussi
avouer que ce que j'ai aimé le plus en lui c'était surtout sa faculté de prcndre distance par
rapport à des choix dictés principalement par l'histoire el l'idéologie, Leiris aurait peut- étre
dit qu'il ne faut pas chercher loin, jusque dansla politique: c'est le qui t'engage", Dans
son journal il prend soigneusement note et il approuve le discours que Breton prononce en
octobre 19:45, lorsqu 11 soutient que le surréalisme excelle dans domaine artistique et qu'« il
s'agit de mener parallèlement (c'est~à -dire dans le même sens. mais séparément) » (JRL : 1I3)
l'action artistique et l'action politique du groupe', Mais bientôt Leiris ne comprend plus le
sens de cette conciliation; surtout il ne comprend pas cene pr&pondérance du dogmatisme
qui est en train de prendre pied au sein du groupe, lui qmIle salt pas ce qu 11 peut apponer au
parti communiste, lui qui se défmit « rebuté par certa:nes matériellcs» (Archives
du sumialisrne : 47)' Que signifie l'accusation qu'Eluard fait Artaud d'exercer la pensée pour
lui-même et. donc, d'être anti~rêvolutionnaire (novembre 1926)? BreL quelques années
plus tard tous les amis de la rue Blomet sont excommunies du mainstream surréaliste à se
demander qui fut le vrai perdant dans cette séparation
Le sens sacré de l'amitié, la charge d'lm mdiYidualismc sincère, véritable source de
la : voilà ce qui m'a fasciné ehez Leins dès le debur. "fais aussi sa perception fébrile
de l'érotisme, telle qu'elle est exprimée dans Le Point cardInal, mais surtout dansAlLrora,1e
trouve que la scène qui raconte la mort violente d'Aurora, en proie à une volupté sadique, est
presque unique dans l'histoire de la littérature la giroueTte infernale et sadique de la femme
sur une pyramide qui la transforme en un «sphynx nou\eau» VWR : 74) me laisse dans un
état eonfusionnel chaque fois que je la relis,
En empruntant deux mots chers à Desnos, je dirai que ma première rencontre avec
Leiris a été fulgurée par le sens profond de liberté et d'amour qui anime son œuvre, ses actes
"h choix,
)rsqu'il
Robert
nençait
0e sur
[emiels «Le merveilleux surréaliste de Michel Leiris et la conciliation avec la
ntaient modernité »
: 226). Michel Leiris joue un rôle fondamental dans les activités surréalistes des
cours à o :mées 1920 grâce à ses recherches sur le merveilleux, réunies dans son Essai sur le
les jeux -:aveilleux Ü925-1926). Dans la tendance holistique de sa défmition, Leiris avance
;ne théorisation originale du «merveilleux moderne», une sorte de nouvelle
ur aussi ~,hilosophie de la vie contemporaine qui dirige les actes et l'imagination des hommes
cce par ., nouveaux»,
ut-être
, Dans
'mee en
: qu'« il
"The surrealist supernatural in Michel Leiris' works and the conciliation
iL 113)
with modernity"
le
Michel Leiris plays a fundamental role in the surreahst activities of the 1920S
:atisme
because of his research on the supernatural collected in his Essai sur le merveilleux
,ner au
[Essay on the supemat!Lml] (1925-1926), In keeping with the holistic approach to its
~rchives
defmition, Leiris puts forth an original theorization of the modern supernatural",
H

~t' pour
ci kind of new philosophy of contemporary life that directs the actions and the
dnnées
imagination orthe "new" man.
à se

;rct" de
fébrile
. Je
}ue. est
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,:.H18 un

',e avec
~, actes
24 1 25

Merveilleux - vieux rêve de vielleux,


éveil vermeil, le vrai lièvre à lever
et le meilleur à mes yeux!

Réalisme - miser ras et aller à l'âme


(l'art même, ici même).

Michel Leiris. «Souple mantique et simples tics de glotte en supplément ».


Langage tangage ou ce que les mots me disent
\1,

SURRÉALISME
Le merveilleux est une thématique qui revient tout au long de la vie poétique:- r·
. =,éorique du surréalisme français et européen. De nombreuses études ont été déd1éb
:.; sujet mais très rares restent les contributions consacré cs au rôle de Micbe 1
l
;

~~lris. qui. pourtant. rédige dans les années vingt un court essai sur la question:
, ::SSOL sur le merveilleux. On doit à Catherine Maubon l'édition de ce texte restr inédit
':squ'en l'année 2000, lorsqu'elle parvient à fournir au chercheur une publication
':-é'S précieuse. capable de remettre l'auteur au centre des préoccupations poétiques

~ r philosophiques des surréalistes, à r époque où Leiris en faisait encore partie.

Au sein du groupe surréaliste. deux figures se livrent à une étude approfondie


::-.1 merveilleux: Michel Leiris et Pierre Mabille, Leurs activités théoriques sur le
:':lerveilleux s'avèrent presque complémentaires dans le mouvement fondé par
'uldré Breton. et cela à un niveau chronologique et critique. En effet, quand Leiris
",Boigne du mouvement en 1929, Mabille s'en rapproche: et alors que Leiris est
-rès attaché à une rhétorique de la modernité: l , Mabille se révèle plus proche des
:lOuveaux intérêts du surréalisme concernant l'ethnologie et la magie, comme il le
iémontre dans son ouvrage de 1940, Le AHroir du merveillela;4, Sans nous pencher
~ux, sur le travail de Mabille. nous nous focaliserons sur l'effort philosophique de Leiris
dans la définition d'une nouvelle catégorie faite sur mesure pour le surréalisme. le
~r- « merveilleux moderne», Ce type de définition contribuera à la spécificité théorique
du «merveilleux surréaliste», tandis que les défmitions successives. dont celle de
LlXf. \Iabille. paraissent ancrées dans une base assez plutôt que surréaliste .
Michel Leiris est chargé de la rédaction d'un Glossaire complet du merveilleux à
la fin de 1925 par le Bureau de Recherches surréalistes. Le projet n'aboutit. en fait.
jamais à un véritable glossaire; il prend bientôt la forme d'un Essai sur le merveilletLx
.me
divisé en trois parties (correspondant à trois dossiers conservés à la Bibliothèque
littéraire Jacques Doucet, à Paris) que Leiris décida de ne pas publier; le texte est
le).
resté. en conséquence, à l'état d'ébauche. Le projet avait été pris en considération
par Leiris surtout à cause d'un besoin d'argent cc qui explique la qualité
théorique et littéraire approximative de l'étude. qui n'arrive jamais à des conclusions
particulièrement notables, La documentation recueillie pour l'Essai ... ne demeure
pas, toutefois, complètement inutilisée, car, en 1929, pour l'article «À propos du
,\fusée des sorciers »6. Leiris en reprend de nombreuses parties. Et, à la fin des années
60, lorsqu'il commence la rédaction de Frèle bruie, l'auteur reprend la thématique du
merveilleux, même s' il le fait dans une perspective post - surréaliste, II ne cinquantaine

26 1 27

de pages de Frêle bnnt sont consacrées à la «longue dérive »8 de la défmition du


merveilleux qui porte la marque des nouveaux intérêts de l'auteur. Le merveilleux
est, en effeL \11 à traYers la perspective de l'imaginaire celtique, ce qui s'explique
vraisemblablement par ses voyages en Irlande et Grande- Bretagne: dans Frêle bnât.
on trouve en effet des références à Arthur, Perceval, Lancelot. Merlin. Tristan et
Iseult. les tumulus mégalithiques de Knmvth. le mont Patrick, etc. Il devient alors
très intéressant d·observer. comme Denis Hollier le fait remarquer dans la notice
du texte'. l' é\olution du merveilleux chez Leiris en partant de l'Essai sur le m"!rveilleux
de jusqu' à la séquence du merveilleux dans Frêle bnât de 1976 : dans ce dernier
ouvrage. Leiris n'apporte jamais d'exemples tirés de ses expériences de lecture. ce
qui conduit à une défmition du merveilleux presque totalement indépendante de la
littérature, Ensuite. toujours en comparant les deux ouvrages de Leiris, le merveilleux
de Frêle bruit ne tend plus vers une conciliation avec la modernité. car il se réfère,
principalement, au folklore ct aux légendes populaires'''.
En ce qui concerne la défmition du merveilleux spécifIquement surréaliste,
l'Essai sur le merveilleux de 192,6 représente un document plus pertinent par rapport
à Frêle bruit, et cc pour deux raisons: premièrement. il a été rédigé dans la période
surréaliste de Leiris; et, deuxièmement, parce qu'il cherche à concilier le merveilleux
avec la modernité, ce qui représente le trait le plus caractéristique de l'ouvrage de
Leiris et de rapproche du merveilleux des surréalistes pendant les années vingt. Le
projet du Glossaire ne s'inscrit pas seulement dans les activités surréalistes de l'époquc
au niveau chronologique, mais aussi sur le plan des intérêts poétiques et esthétiques
du mouvement. En effet, Leiris fait des références explicites aux rapports qui existent
entre merveilleux et surréalisme lorsqu'il écrit. par exemple. que le merveilleux est
« la partie la plus actuelle du surréalisme »", ou lorsqu 11 évoque la « surréalité »'~.
De plus, Leiris se rapporte souvent à un « nous » qui, en maintes occasions, laisse
entre\oir ses rapports avec le groupe et les activités collectives'l.
Le merveilleux constitue, en effet. au début de 192.5, la clé pour la «révolution
surréaliste » au niveau poétique et artistique. Une importance qui est aussi soulignée
par les fréquentes références dans la correspondance privée des membres du
mouvement guidé par André Breton'4. Mais pourquoi les surréalistes choisissent-ils
Leiris. et non pas Aragon. Desnos ou Artaud? Le choix de Leiris pour la rédaction
d'un ouvrage sur le merveilleux se justifIe par l'intérêt que l'auteur a toujours
montré pour le sujet, depuis les années où il fréquentait le 45, rue BIomet (l'atelier
de Masson) avec Tua!. Limbour, Salacrou et d'autres. Dans son journaL à la date du
17 décembre 1922 - Leiris n'a pas encore rencontré Breton, même s'il suit de près
ses publications et son activité littéraire'" on peut lire une longue ré±1exion sur une
nition du :!3: - "'ncore très aléatoire de merveilleux:
~rveilleux
La est essentiellement le merveilleux, nous aurons
'explique
trouvé le moyen d'aller dans les étoiles. de savoir si elles sont habitées
'rêle bruit,
ou non, la poésie étoilée deviendra aussi l'idieule que l'exotisme. Il Faire
'ristan et
\'oir les objets familiers sous un aspect mervei.Lleux. 1 {Ventilateur 0

ent alors
Rosedes·vents-artiftciels} 1 L'archaïsme, c'est l'exotisme dans le
la notice
temps. 1/ L'archaïsme est un académisme indirect: il e;;t par suite encore
erveilleu:x
plus ridieule- que le « modernisme» volontaire'''­
~ dernier
cture, ce 3u"n que très vague «< la poesIe est essentiellement le merveilleux»), ce
nte de la ;ment de 1922 qui témoigne de rapproche du merveilleux chez présente
rveilleux - .,:les éléments fondamentaux pour la déflIlition d'un «merveilleux moderne » : le
e ~~,eIlleux est lyrique et utilise une poétique de l'analogie arbitraire (le ventilateur
me «Rose-des-vents-artinciels ; le merveilleux est quotidien et il surgit
réaliste, .lsément au contact des objets les plus fami] iers «< faire voir les objets familiers
rapport - un aspect merveilleux le merveilleux est moderne, gratuit et spontané
.. 'S que «l'archaïsme est un académisme indirect» et que dans sa construction il
période
"Veilleux : ~ draÎt encore plus « ridicule que le .. modernisme" volontaire »),
.Tage de Ces éléments, bien esquissés en 1922, constitueront la base du
'ingL Le approximatif en trois parties. intitulé Essai sur le meneilleux dan, la lltterature
'époque âpntale, qui sera soumis en 1926 à Jacques Doucet. A ce plan provisOIre. fom
létiques -.::~e les Fragments d'un Essai sur le meryeilleux. une rentatlve ambitieuse de définir

existent merveilleux en envisageant, d'une part. la théorie surréaliste existante et. d'autre
leux est ..in. le plan littéraire et la théorie du genre merveilleux, qui SIgnifie concilier
!lité» , TOn avant-gardiste avec les écrits théoriques de Nodier, de Scott et des autres
s, laisse .<Teurs ayant affronté le problème avant Leiris'~, Et. au -delà de ce premier effort de
"nciliation, Michel Leiris doit aussi intégrer deux autres voies: l'une concernant
'olution -mout la littéraire, voie ouverte par Breton lorsque, dans le ;1;[anij'este
:/ surréalisme, il fait allusion au merveilleux des fables et du lHaine de Lewis'ü ; l'autre
lres du uneernant la recherche du merveilleux «dans son" extension maxima" tel quIl
lent ·ils -air irruption dans les diverses manifestations der existence »"!. Les Fragments,,,
laction -e terminent, en effet, par une invitation, qui touche presque à l'invocation, à unc
JUJours " étude complète du Merveilleux lqui devrait toucher à presque toutes les branehes
1

.atelier ie l'activité humaine» ". Une tout à fait ambitieuse et qui aurait peut être
:late du lemandé le travail de toute une vie,
le Or. même si l'approximation de l'étude demeurée à l'état d'ébauche ne satisfait
mrune Das les auspiees de l'auteur, le moment eritique de l'évolution surréaliste dans lequel

l
28 1 29

le proj et a été conçu -1' engagement dans le communisme - et l'essai de conciliation


de deux dimcnsions si divergentes « extension maxima » du merveilleux et de sa
focalisation littéraire confèrent au travail de Leiris une importance particulière.
surtout en raison de sa relative ingénuité. L'essai nous révèle, cn effet, non seulement
les nombreuses nuances que le concept adopte au sein du surréalisme au milieu
des années vingt, mais aussi, et surtout, l'importance attribuée à la dimension du
merveilleux par le groupe surréaliste: le merveilleux est tout ce qui n'est pas. dans les
dynamiques du groupe. engagement politique et moral, action vouée à la révolution
sociale"'. On revient à ce que Leiris lui-même dit dans son journal de 19 22 : <<la
poésie est essentiellement le merveilleux ».
Si nous envisageons J'introduction à l'Essai sur le mervei/leu:r dans la littérature
occidentale. parexemple, e'est 1'« extension maxima » du projet qui sefait jour: Leiris
assigne en effet des «limites non-frontières »,j au merveilleux. D'une part, r auteur
veut distinguer le «merveilleux proprement dit de ee qui touehe», e' est à -dire
«les religions, la mythologie, l'oecultisme, les anciennes conceptions seientifIques
aujourd'hui reconnues fausses etc. les romans d'antieipation, les fables» ; et.
d'un autre eôté, il se propose d'aborder différentes manifestations du merveilleux,
telles que «le merveilleux légendaire. les romans de chevalerie, les contes de fées,
la Bibliothèque Bleue et le Cabinet de Fées, les grands thèmes légendaires (Faust.
Don Juan) ». Or. la difTIeulté de eoneilier les perspectives du groupe surréaliste et les
résultats des études publiées précédemment sur le merveilleux est évidente à partir
de ces premières pages.
En effet, Leiris se réfère à de nombreuses défmitions et à de nombreux
attributs du merveilleux déjà acquis à l'époque où il écrit. Par exemple, il parle du
merveilleux scientinque «< les anciennes coneeptions scientifIques aujourd'hui
reconnues fausses ») qui a été traité extensive ment à la fm du XIX" et au début du xx'·
siècle"". Leiris aborde aussi le sujet du merveilleux chrétien et mythologique «< les
religions, la mythologie»), ayant en ce domaine un illustre devancier en la personne
de Chateaubriand et dans deux eontributions en particulier; Du, merveilleu.:r:. ou de
la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels") et «Vue générale des épopées
chrétiennes »"\ sa préface aux Nntchez"6. Dans ces premières lignes, Leiris touche
aussi au merveilleux légendaire «< les romans de chevalerie. les contes de fée»)
et aux tons métaphysiques qui caractérisent la théorisation romantique et qui ont
été utilisés surtout comme base de la théorie sur le fantastique:. Dans ce dernier
cas, Leiris traite le matériel critique existant de façon originale. car il dénnit
comme «merveilleux» une manifestation littéraire qui, jusque-là, ne rentrait pas
hiSTOriquement dans le genre du merveilleux. car l'aspect métaphysique connotait
liation · "rôt le genre fantastique. alors que le merveilleux se rangeait du côté des cOUes
t de sa '~~.des romans de chevalerie. des allégories religieuses.
ulière.
Au -delàde cette dernière approche novatrice, la stmcturationde l'argumentarlOll
,ement
-' Leiris et la présence dans le corpus de nombreux auteurs généralement rang&s
milieu
_"IlS la catégorie du fantastique, sont sûrement influencées par l'article de Nodier
ion du
Du fantastique en littérature» (,830). qui figure d'ailleurs dans la bibliographie
ans les
:. c l'Essai., .. Dans cette bibliographie nous trouvons aussi les classiques du roman

)lution
: Thique anglais - Radcliffe, Walpole. Maturin, Lewis, Mary Shelley, Beckford ce
2: «la
;- est un choix usuel pour le traitement de la thématique du merveilleux. car Hubert
'.:a.rthey aussi se réfère aux mêmes ouvrages dans son Essai. sur le merveilleu:'C de
eratu,re . et le même André Breton exaltera lïnvraisemblance et la description non
: Leiris -:',métique des romans gothiques en tant que source inépuisable de possibilités pour
'auteur ~:l:aginaire humain''',
à - dire
Les références que Leiris fait à toutes les approches du merveilleux qui l'ont
inques
,::-.'cédé (scientinque, légendaire, religieux, métaphysique) et à ses contacts avec
» et,
,:-s genres voisins ou émanant de lui (le gothique et le fantastique), ne constituent
,llleux,
· ".:.. par conséquent. un traitement original du sujet. Le cas est différent lorsque
ie
,':'deur surréaliste se réfère extensivement à tout l'apparat de la théorisation sur
(faust,
,.0 modernité. qui se concentre essentiellement dans le troisième dossier de son
e et les
sur le merveilleux, consacré au « merveilleux moderne », Le rapprochement du
! partir
',~r;eilleux et de la sphère de la modernité constitue un sujet de discussion et de
.:-rmition aussi chez les contemporains de Leiris: Aragon parle d'une «mythologie
nbreux ", :,derne » dans Le Pa.rsan de Paris et Desnos envisage un « merveilleux propre au xx"
arle du 'fcle» dans son article «Imagerie Moderne» . Cest seulement en considérant
!l'dlmi , ,mportance de la déflllition de la modernité que nous pouvons justiher la présence
l du XX' :_,:lS la bibliographie d'auteurs qui ont marquéle passage d'époques différentes, mais
( ~< les n'ont pas de lien évident avec la notion de merveilleux: entre autres. Leiris cite
l'sonne _é'rnntès. Sade, Coleridge, Hugo, Ibsen, Dostoïevski, Poe, Baudelaire. Mallarmé,
" ou de ·"l'n', Apollinaire et Roussel. Prenons par exemple la citation que Leiris emprunte
popées ~ \ictor Hugo dans sa Préface de Cromwell (1827) : dans ce texte fondateur de la
lOuche ~:'dmaturgie romantique. il n'y a pas, en effet, de référence directe au merveilleux et
fée ») '. ne pourra certainement pas affIrmer qu'il constitue en soi un exemple de hction
ont .maturelle, Or, ce qui a fasciné Leiris dans ce texte est évidemment la rupture
le l'nier ',pc le passé pour le moderne, et les réinterprétations fertiles auxquelles le texte
dénnit - "UT donner naissance dans le contexte surréaliste, voirc dans le contexte d'une'
ait pas ,dernité plus moderne d'une centaine d'années:
motait
Aux temps primitifs. quand l'homme s'éveille dans un monde qui
30 i 31

vient de naître, la poésie s'éveille avee lui. En présence des merveilles


qui l'éblouissent et qui l'enivrent, sa première parole n'est qu'tmhymne.
Il touche encore de si près à Dieu que toutes ses méditations sont des
extases. tous ses rêves des visions ... 'je

Si nous considérons la Préface de Cromwell dans J'opposition/confrontation


entre homme atavique et homme moderne. Hugo met en évidence ce eontraste
entre la pureté et le primitif de l'homme, d'une part. et l'exigence de la modernité,
de l'autre, Un peu plus loin, en parlant de la «marche du moderne dans l'ère
eontemporaine >,l2, j'auteur cite Pétrone et Apulée, «Arioste. en Italie; Cervantès, en
Espagne; Rabelais. en France »11, des noms qui apparaissent aussi dans les brouillons
de l'essai de Leiris. L'appréhension du merveilleux par Leiris reprend donc ce texte­
manifeste du romantisme, en soulignant toute la difficulté de la eoneiliation d'une
approche synehronique de l'idée de modernité et d'une approehe diaehronique de la
perspeetive de révolution historique, en donnant l'idée des changements d'époque
de cette sensation (du merveilleux) qui. eomme l'afftrme Breton dans le premier
Manifeste du surréalisme, « n'est pas le même à toutes les époques »14. C'est de cette
volonté de concilier. d\m côté, les résultats des études préeédentes sur le sujet et. de
l'autre, les tendanees de la littérature moderne et des auteurs fondamentaux pour le
groupe surréaliste, que Leiris tire son inspiration.
L'approehe contrastive des positions de Leiris et de Hugo nous fournit un
dernier point de réHexion. Victor Hugo dans sa Préface exalte le pouvoir du
moderne en tant que clé de lecture du passé, ce qui permet de retrouver au sein du
passé des dynamiques nouvelles. de réinterpréter le message du passé avec une clé
contemporaine: « [Le moderne] imprime surtout son caractère à cette merveilleuse
architeeture. qui. dans le moyen âge, tient la place de tous les arts Si Hugo se fait
le porte-voix de la redécouverte du MoyenAge. Leiris se fait. pour sa part, porte-voix
d'une tendance répandue au sein du surréalisme, qui fait des «ruines romantiques
et du «mannequin moderne». des symboles propres «à remuer la sensibilité
humaine durant un temps »ll'. Lorsque Leiris cite les principaux auteurs des romans
noirs/gothiques de la fm du XVIf!' siècle Radcliffe. \Valpole. Maturin, Lewis,
Beckford il rend compte de la tendance surréaliste \Crs la réinterprétation de ces
ouvrages symbolisant de façon flamboyante l'inconscient de toute une époque.
Une fois considérées les sourees de Leiris. il est cependant nécessaire de nous
confronter aux défmitions que l'auteur lui -même livre du merveilleux. Pour ce faire,
il faut se concentrer surtout sur le deuxième dossier. intitulé Fragments d'un essa,i sur
le merveillwx, qui s'ouvre ainsi:
C'est aux dernières limites du possible. sur les connns les plus
lointains dcs apparences. à J'extrême pointe vers laquelle convergent
toutes les directions confondues [. .. J que s'effectue la plus profonde
ct la plus énigmatique peut-être des démarches que tente J'esprit de
j'homme, celle par qui s'élabore secrètement le Merveilleux3:.
ontation
ontraste
Dans le déhatthéorique qui occupe Leiris, préoccupé par la volonté de développer
,dernité,
iefmition du merveilleux dans son « extension maxima» et une définition qui
ms l'ère
. _~'.:,e compte du merveilleux en tant que genre littéraire, l'auteur touche il une autre
mtès, en
-: :.~re confinant à la définition, celle de la religion et de la transcendance. En effet,
ouillons
:..~ .~lS cherche à écarter son sujet de la généralité la plus absolue 3B (une définition
~e texte­
. "'cnve du merveilleux «tendrait par exemple il le confondre avec le surnaturel
ln d'une
:-_:'1 que du « merveilleux religieux» ou « myihologique » tel que Chateauhriand le
iue de la ~ ~:-.nit. c'est-à -dire d'un merveilleux il caractère transcendant «< depuis longtemps
l' •
,epoque
-,~ savons que les miracles sont miracles grâce à l'imagination des hommes »4").
premier
-~l>i. il ramène toute la réf1exion il l'homme et à son pouvoir imaginatif en niant
de cette
intervention extérieure à l'être humain même: c'est l'homme en chair et en os
jet et. de aspire à une transcendance «laïque», qui trouve sa voie pour l'infini au sein de
~ pour le
,,"'alité concrète qui l'entoure.
Le procédé qui conduit il la négation de la transcendance (dans son acception
Ifnit un
plus religieuse, qui définit l'indépendance parfaite de Dieu par rapport au
noir du ::·.,)nde créé et dans sa référence à quelque chose qui est au-dessus ou d'une «autre
sein du
_"ture »4') débute en portant la réalité et l'irréalité à un même niveau: «il n'y a
. une clé
.'.s de délimitation exacte entre surnaturel et naturel. L'ensemble de tous les faits
eil1euse
~ ,out être rangé à volonté dans rune ou r autre de ces catégories »12. Le merveilleux
se fait
oJrréaliste réfute le transcendant en tant que mouvement de «traverser en
fTe~voix
::1Ontant» ou «s'élever en montant» (du latin transcendere, qui veut dire aller au
llques»
::t là. dépasser en montant) et lui oppose un mouvement plus horizontal qui consiste
'1-ibilité «tendre au» mythe collectif surréaliste et il J'imaginaire de la modernité 4J • Les
romans
~Jrréalistes, et Michel Leiris avec eux, s'adressent à l'homme moderne l'homme
Lewis.
~l!i ne croit plus en Dieu, qui ne croit plus aveuglément au progrès technologique
:: de ces C[ social. qui sait que l'histoire présente des côtés obscurs (voir l'expérience de la
.le.
:;rande Guerre) -, et ils lui disent qu'il existe un merveilleux qui surgit directement
de nous :le lui-même, sans besoin d'aucune intervention venant du haut. C'est en pensant à
ce faire. type d'homme, créateur et récepteur d'images, que Leiris écrit: «je ne crois donc
,oSSa.! su r pas qu'il soit possihle d'attribuer au Merveilleux une réalité extérieure, générale,
,'n quelque sorte indépendante de l'homme »44. Plus explicitement encore, l'auteur
~crit que «le Merveilleux n'existe qu'intérieurement à l'homme »4S. Il n'existe pas
32 1 33

de conciliation entre la religion et le merveilleux dans l' œuvre de Leiris, parce que le
mervcillelLX (moderne et concret) est l'idéal vers lequel l'homme doit aspirer: «le
Merveilleux est j'Inconnu dans l'homme, la lueur d'absolu qu'il tire de son essence
et projette sur les ternes relations qui se font jour jusqu'à l'esprit »4 6 • De plus, le
merveillE'\lx de-- surrealistes ne pourrait pas incarner le frisson de lïnattendu et
de pour des explications qui ramènent la raison ultime à Dieu,
car lE' mE'rwJllelL'l: «E'st l'attrait qui exerce l'inexplicable, l'obscur désir d'une
connaissancE' ct directe qui fait que l'homme peut préférer la gratuité
à roUle d·explication»4:. L'homme doit se soumettre, donc, à une sorte
de pratique intellectuelle destinée à la création d'énigmes au sein de l'existence
quotidienne: l'nomme est envisagé comme un être hermétique. qui ne peut pas se
a unE' réalité purement rétinienne, La réalité envisagée dans r essai de Leiris
cache en "oi d'autres dimensions, plusieurs niveaux de savoir qui trouvent aussi une
dans les manifestations phénoménologiques du monde.
La \olonte d'éloigner la défmition du merveilleux de toute implication
transceEdantE pour la rapprocher d'une philosophie de la modernité passe aussi
par unp de ravant~garde qui rappelle en maintes occasions le Manifeste
du surreol et. même de façon moins éclatante, le Manifeste du futurisme de
\'farinerrr • Leiris parle du merveilleux comme de «la grande foudre de l'absolu­
jailli COllllllE une étincelle de cette espèce de catastrophe logique, »4'1
Le.~ ,. de Leiris contiennent de nombreux aspects essentiels pour la
dénmtwll d'tm merveilleux caractérisé par une esthétique propre au surréalisme:
le mer\f'illeus est «l'attrait qu'exerce l'inexplicable» et le reflet de la prédilection
de rh ommê pour la « gratuité» (contre « toute espèce d'explication » et toute sorte
de hêl1 aHC la transcendance religieuse). Le merveilleux est une « étincelle », une
« foudrê » du hasard qui fait se rencontrer. sur la base de rapports justes et
inédits, réalités distantes (en produisant des «catastrophes logiques »), Enfm,
le mer\'(' illfUX de Leiris se situe loin de l'empirisme de la raison, trouvant son origine
« dans les de l'inconscience» (si l'on considère l'homme moderne) ou
«dam; la nuit des temps» (si l'on considère l'Homme dans son immanence).
Il faut recollnaître à Leiris le mérite d'avoir aussi touché un problème fondamental
dans la dénnition du merveilleux, la conciliation d'un mythe qui accompagne
l'Homme quels que soient le temps et le lieu avec le mythe qui caractérise l'homme
moderne, L'auteur constate que le mythe entretient des liens forts avec l'histoire
des peuples et qu'il est aussi aux origines des allégories des fables pour les enfants,
Mais, tout en essayant de tisser un lien avec les phénomènes paranormaux, tels les
hommes capables de marcher sur les pierres chauffées, il revient toujours au « mythe
l'ce que le ~ -: " surréaliste qui l'empêche d' envisager une défmition contrastive efnc<icP
irer: «le ~:-,pmeux 1",1 se retrouvera toujours au centre de tous les paroxysmes, dan,

3. essence .. :'''". dans le crime, dans l'amour, ou dans lïntense exaltation morale
e plus, le _~, ;:enodes révolutionnaires »:'0,
ttendu et ~~~a: de Leiris se présente en conséquence comme un édince de différents
le à Dieu, ~~- :clPDriques qui, s'ils n'ont pas mené directement à une dénnition claire et
sir d'une :.'" du merveilleux, ont au moins le mérite de présenter une fresque du contexte
l gratuité ,~ pt de poser les bases pour Jes critiques à venir. Il faut aussi tenir compte du
tne sorte ,~, ]'J:'!3quïl son ouvrage, Leiris est avant tout un homme d'avant-garde,
~xistence .~ ;:,;-emier souci est la défmition des moyens utilisables pour le mouvement
out pas se -<.:~te même d'où la tâche ardue et originelle de concilier le merveilleux avee
de Leiris ;.orne, Chaque fois que l'auteur essaie d'aborder et d'articuler une dénnition
aussi une : _,', Il parvient à la conclusion que la dénnition du merveilleux est impossiblê :
,':t qUê décidément il n'est guère possible d'enfermer le Merveilleux dans des

plication - ~- :,,'écises»:,', Dans la tendance holistique de la dénnition du merveilleux que


'J' Lêiris, nous retrouvons la tendance dominante à l'intérieur du surréalisme,
sse aussi
Manifeste -- "rupose comme une nouvelle philosophiê de la vie moderne: le merveilleux
.risme de -. - '- ~"'me, dans ce contexte, le but auquel l'art et la littérature surréaliste doivent
'absolu

~-')tb, entre autres, lvlervei.lleu:r et SurTea,!l.une (lvfe/tisine, nO '2e), Henri Béhar. ", dl,
s pour la
,> (Les Pensees d Andre Breton),
éalisme: Le ,\ferveilleu;r.
dilection n Lwi .sur ie meri'eiÎÎeli.1, le troi;;ième dos8ler eBt entièrement au me rn:l lit' IL\
ute sorte
le», une \1ahille, Le ;\!/irOlrdl1 rnt'rVeiUeu,r,
"p,'('! a l'té hien analysé par Calherirw Maubon dans son introduction il J'édition des trois
justes et
,,,ce mOI sllLmlll1eUX qu'il m'avl"ugle, (M, l "I,e Merveilleux), JacqueB DouceL le méc'fnt,
), Enfll1. , ,rler varisien, fmanc(' le proJet et juge, dans sa correspondance. J'avancemcnt du travail de
tlorigine
erne) ou _ "A propos du Musce de,' sorcieTS», DoclLment", n Q
2,

lC)'76, ;';ous nous référerons à rèdltion contenue dans RDr


notice il FB Deni, Hollier (RD!: 1.S71).
lamentaI
=Iems Hollier. op, , 15;'2.
)mpagne r,pe de recherche sur le rnelyeilleux rapproche du travail de Mahlllt' et
'homme . ;~ par la que Leiris pratique partir de 1929, lorsqu'il <"st recrUTé pour la
'histoire --~:,)j Dakar·

enfants, L" LP Merveilleux: 61.


« ,tout ce qui libère l'homme de honlf'UX de la logiqlw et le ramène- Ull lant
, tels les
sun pôle véritable. tout ce qui est révolte contre
',2)'" des conwnlWflS inlellectuelle,
<, ,'2rturc('Ilt de maintenir NatlU',· eT SociéTé enordrf', toui ce qLlÎ esi capable d'humilier si peu que
34 J::

cadavt'rt'use oppression rationnelle, bref tout ce que peut résumer ce terme encore mystérieux
t' J ~,prècjs : la SL'fIKEALiTE» C 48~ 49). Dans ce cas, la déflllition de « surrt'alité» pourrait très bien
{'o;"I't'spondre à celle de « merveille ».
13 CL par exemple, « ... et puisque pour nous 1(> Merveilleux est bien plus une dinction dans l'esprit
de !'homme qu'un groupe de faits ou de perceptions il caractères nettement déterminés, nous sommes
naturellement amenés il J'envisager de préférence dans ses manifestations écrites» (ibid. : 4.6).
'+ André Breton parle ouvel1emenT du projet qui a été confIé il Leiris. Dans une lettre du :.>.6 Janvier
1925 à sa femme Simone. il témoigne de son enthousiasme pour le projet d'établissement d'un
Classai.re complet du merveilleux que le Bureau de Recherches sllrréalistl's avait décidé d'entreprendre.
il Iïnitiative d'Artaud: «r '". lIa constitution (fun dossier très important de notes relatives à tous les
ouvrages l. .. 1 dans la composition desquels il entre une trace de merveilleux : ma note sur le
Moine dans le Ce travail pourra donner lieu bien plus tard il la publication d'un glossaire
du merveilleux» (<< Notes et variantes », Œnvrrs Le méme enthousiasme se
retrouve dans la correspondance entre Breton et Denise Lév} et. plus précisément, dans la letlre du 28
Janvier 19~5' «Nous allons constituer aussi un répertoire des idées surréalistes et mettre sur pied un
glossaire du merveilleux, destiné il être publié Tard et qui réunira. sous forme bibliographique el
critique, tout ce qui pourra contribuer il la documentation humaine en matiére d'ouvrages fantastiques.
de quelque ordre soient· ils. parus dans tous les pays jusqu'à Cf' jour» (cité par Pierre Naville. Le Temps
du surréeL L. r,SfWnUJ.i':p
15 Intérêt attesté par les notes duJoumo.l écrites il propos des livres de Breton; cf. M. L.. JRL.
16lbid. : 29'
17 Ces auteurs sont d'ailleurs présents dans la bihliographie hnalt" des tragments.
18 Breton dresse l'éloge du merveilleux dans le premier dtl surréalisme et donne en exemple
le roman de Lewis. Th.e Monk. C'est à ce propos qu'il écrit: «Les apparitions y jouent un rôle logique.
puisque l'esprit critique ne s'en empare pas pour le contester. De même le châtiment d'Ambrosio est
traité de puisqu'Il est fInalement acceptè par l'esprit critique comme dénouement
naturel
19 Catherine Maubon. op. cit. ; 24.
20 M. 1., Le l"fervellieux; 47.
21 Prenons comme exemple la réunion du groupe surréaliste au café: Clarté. le mercredi 7 octobr!" 19~5. Il
en existe Dans le journal de Leiris. par exemple, que l'auteur a certainement
emponé avee lui lors de la réunion. se trouve un compte-rendu complet de la rencontre. En fait. dans
l'archive d';\ndré Breton (en à http://www.ateherandrehreton.com). la même l't'union. avec les
mêmes contenus enregistrés par Leiris est notée pour le lundi 5 octobre 1925' En tout cas. mise il pan la
référence les contenus sont les mêmes; les surréalistt's pr&\'()Jent une activité politique et
morale active. vis -il - vis des condItions« du français el de r eeonomie européenne», mais ils
veulent rester absolument indépendants du peF e1. surtout. ils \eulenl continuer leur activité artistique
cllittèraire, qui est leur pomt de force. Dans le Journal de Leiris on peut hre; «C'est dans ce domaine
où nous'" excellons" 1... 1 C" est dans ce domaine que nous jOlllSSOns cl' un certain prestige, Il s' agit de
mener parallèlement (r 'est -il - dire dans le mhne sens. notre action artistlque el notre
action , ne pas nous laisser aller il introduire la poèslt: dans les questions d'ordre politique.
ni la politique dans les quesiions d'ordre poétique (fRL, 113l. Le owrveilleux, donc, si l'on tient en
considération ces positions. ne relève pas du domaine polnique. comme toul ce qui se prète à la sphère
« artistique».

22 '\ICJUS renvoyons par exemple au volume


du monde savant en France '918. Ou il l'ouvrage de Joseph Grasset.
mystérieux .•.• ~t'de ["article d'André Breton. «Limites llonfrontières du surréalisme'> (t93~).
très bien
11 ... --:ert'nce par la suite.
::dreaubriand. Le du. chnsti.amsme. deuxième partie (Poeti.que dIt Ol,ri,stiamsme). hEe 1

'ans
.us sommes ·,·",rcaubnand. Les Natt:hez: lOI"] 06.
4 6 ).
types de merveilleux: AInsi done.
1 26
janvier des Natchez. on trouvera le me/'veLll.wx. et le merveilleux de toutes If's le
,ment d'un If: merveilleux le merveilleux indien: on rencontrera des muses. des
1':''' demons. des des combats, des personnages : la renommée. le temps. la
:'10n, l'amitié, Ce volume offre des invocations, des sacrihces, des des comjJ3raisons
note sur le 'es unes courtes. les autres longues. à la d'Homère, et formant de petits tableaux.
ng ,econd volume. le llJerveillenx disparaît, mais se complique, et personnages se
usiasme se : quelques-uns d'entre eux sont pris .jusque dans les rangs inférieurs de la société, Enfll1
eTTre du 28 le poème, sans néanmoins descendre au-dessous du de Rene et dAtala, et en
;ur pied un par la nature du par celle des caractère,; et par la description des lieux, au
'aphique et disponible sur
dans fa ReilLe de d.eux llJondes le 1'" décembre
Goethe. Byron, Mickiew]cz», Oll J'auteur utilise fréquemment
.:',rlltation de la pour analyser les ouvrages théâtraux.
Huhen Matthey. Essai wr merveilleux dans la hnératluf française depu.rs 18cc. Contri,btitwn a

·'l.ndré Breton: « À considérer aujourd'hm ce genrE' htteralre [le 1si décrié. si oubhé, on
Il . - .' manquer r... 1 de la très fascination que. durant un temps. il a
le -, ",;prits les difftciles. L'un des heros d'Anne Raddifft', Schedoni. paraît bien être le modèle
Ibrosio est chereha à se cumposer le personnage de : Thomas Moore ne avec
nouement les belles .Ielllws nUes qui passem sous les ombrages pleins (l'oiseaux du Roma.n
Les prcnllers romans de Victor Hugo Han d'Islande). ainsi que de Balzac
de le Centenaire ou le" deux etc.). ~ont directement inspirés du MOille de
, ct de .He/moth de Maturin. ('c même ;'vie/moth dont se souviendra Baudelaire qui
Ire t9~5.11 ,,,r,i' doute, avec les AII.its .. d'Young. ln plus vivihante des sources l'inspiratlOIl toute
,ainement .' 'dit(' de Lautréamont puioer. » (,< Limites frontières du surréalisme», La. Clé des
fait. dans - lq ~O)

avec lcs LOUiS Aragon. «PrèfaCF il unc mythologie moderne», Le Paris (: 9 "16) : Robert Desnos,
;e à part la Moderne », Œlivres (,
}litiquc et .. ~TUr Hugo. Préface de Cromwell Œu.vre.scompletes Dmme, vol. 1 (: 8-9).
'>. mais ils : 23.
artistiquf'
1. : 25­
, domaine
'I..ndre Breton, du. surrea.lisme : 21'>.

" lCTOr Hugo, Préface de CrumweH: 24.

Breton. du wrréalisme, '~6.

- \1. L., Le MerçeLlleu.r: 39.


Généraliré absolue dans laquelk il tomhe j pluslf'urs rcprises: 1. ... 1 il n'y a pas lieu de s'attendre"
'." défmition du !\1erveillt'ux 1 Übld. . La dlfneul1é de déhnitJon est claire aussi dan,
~ograph,es .utre passage: le merveillem. «reJette spontanémen1 toute lelllative
ou.rd·hw:
35

hllcL
,p Cf déhnition du hësor de la Française.
42,\L L" f,e Jferveiilell1: 40,
D'ailleurs la modernité ('ll('~méme peut être reprüentée avec la même horizontalité par rapport a
r existence dt' nlOmme. ConsiMrée da nB cette perspective. la théoriE" très at lachame de Bataille sur
<, l'ahsence du » dans le surréalisme perd une partie de sa pelilllcnce. Cf. Georges Bataille.
<, L'ahsence de mythe" (Le sWTealisme en '947: et « La surréaIiste '>, conférence du Club
de Maimenant du 24 février (Œuvres

44 M. L., Le Merveillenx: -F,


45, 41) Ibid.
4-:' fbid. : 43.
48 Filippo Tommaso Ivlarinerti: Sortons de la comme d'une gangue hideuse et entrons
comme des fnuts pimentés dans la houche immense et torse du vent' .. Donnons~nous il
mais simulemcnt pour enrichir les insondables reservoirs
de l'ahsurde : » (" i'vlanif('sto de! FuturisIl10 ». Tuons le Clair de !tille :,' :
4,') t.,1. L.. Merveilleux: 46.
Ibid. : 45. Cette descri Pllon de Leiris retlètc le roman de Desnos. La Liberte oui 'amour "
OÙ tous ces thèmes sont p1''''';('nI8 et earactérisE'nt le côté merveilleux de
51 Ibid. Leiris afn1'me aussi qut', si l'on voulait abordN une étude du merveilleux« dans son extension
t'n considerat ion «toutes les branches dE' J'activité humaine». ct il cite
le mysticisme. la magie. le satanisme. la les lraditions
l'e!lmographie. la divination. l'occultisme. le magnétisme
lct foliE'; l'érotisme: lrs : l'histoire d!"s
el médicales; le,5 ct sciences anciennes et les s-iur
les l'ont inents [ln',sumès disparus: les anciens n'cits de voyages et lES croyances fahuleuses quant à la
filUne. à la flore. il la sI ruetu n' même des régions loinlai nes. les recherches répmécs telles
celles de la pierre philoSOTlhale. dll mouvemenT perpetuel et de la Quadrature du ('l'l'cie: tout ce
'111l dans les sc:cnccs esl situé sur les eonfllls de pr~s
Jïmcnfwble » (:t-:~

ci -contre

SÉRIE DES RELECTURES MICHEL LEIRIS


Acrylique sur toile. 116 x 89 cm

FRANÇOIS LÉVÊQUE

La toik rt'produite dans le Cahier Leiris 1\°1 (: 386-387) était une réflexion sur
le métalangage. la rHure parlant de la littérature. Mais, comme le dit si jllstement
Roland Barthe:,; : «la 1 oUe est un paquet de signes. tout bruissant de codes, une
enveloppe qui va ut pou r ce quO elle cache. »
D'où l'idée. dans une démarche leirisienne. de retourner à la toile antérieure.
de revenir sur son écriture. de chiner dans ses esquisses. de prélevef des fragments
de sa construction. de jouer aveC' l'épitexte, pour une releeture de l'œuvre.

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