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Le romantique (de la fin des qui commence à utiliser le

guerres de religion à la mot (Racine et


classicisme Révolution) empruntent Shakespeare, 1823) : il
leurs modèles d’écriture à oppose classicisme au
la littérature classique de « romanticisme » pour
l’Antiquité ; en un sens définir les écrivains qui
I Définition plus restreint, le terme défendent la tradition
s’applique, en France, aux antérieure ; les écrivains
Termes œuvres produites au cours romantiques veulent
« classique » et du classicisme. plaire au public de leur
« classicisme ». L’adjectif En un sens temps, alors que les
« classique » a plusieurs anhistorique, le terme écrivains classiques
significations. Il vient du « classicisme » désigne, veulent plaire à leurs
latin classicus, « de relativement aux arts et à arrière-grands-pères.
première classe » (à la littérature, l’imitation Cependant, selon ses
l’origine « appartenant de l’Antiquité gréco- défenseurs, le classicisme
aux classes supérieures », latine, mais il peut serait un âge de maturité
d’où les sens dérivés : renvoyer aussi à un idéal et d’équilibre, qui ne
« de rang élevé, intemporel fait pourrait être suivi que par
exemplaire, excellent »). d’équilibre, de mesure, une décadence.
En littérature, le terme fait d’harmonie (pour cette
référence aux chefs- raison, il qualifie
d’œuvre anciens également aujourd’hui un II Poétique
consacrés par les style sobre et classique
institutions (académies, harmonieux). Au sens
critique littéraire, restreint, le classicisme
enseignement). Au XVIIe L’Antiquité
est un mouvement
siècle, il est employé pour comme modèle. La
esthétique et littéraire qui
désigner « ce qui est référence à l’Antiquité est
s’inspire de l’Antiquité et
digne d’être enseigné constante dans l’art
de l’humanisme, et
dans les classes » (à classique. Alors que
s’oppose au baroque qui
l’époque, les auteurs de l’époque baroque
le précède. Il atteint son
l’Antiquité, et, plus tard, s’inspirait des œuvres
apogée en France entre
ceux qui appartiennent au italiennes et espagnoles,
1661 (début du règne
patrimoine national et le classicisme se tourne
personnel de Louis XIV)
universel). C’est au XIXe vers les Anciens,
et 1685 (révocation de
siècle qu’il commence à considérés comme un
l’édit de Nantes). (Mais
désigner plus modèle qu’il convient
les règles qui fondent
spécifiquement d’imiter. Pourtant, cette
l’esthétique classique sont
l’esthétique de la 2e imitation est conçue sur le
élaborées dès les années
moitié du XVIIe siècle. mode de l’émulation, et
1630 et dominent encore,
L’expression non comme une simple
au théâtre par exemple, le
« littérature classique » copie. L’émulation
XVIIIe siècle.)
couvre donc les trois consiste à concurrencer le
En réalité, l’usage
acceptions suivantes : modèle ancien en le
du substantif est tardif ; il
l’ensemble des œuvres de réexprimant autrement,
s’est développé au XIXe
l’Antiquité classique ; les c’est-à-dire mieux. La
siècle avec l’avènement
lettres européennes qui, conscience grandissante
du romantisme, à
de la fin de la d’une littérature nationale
l’occasion des querelles
Renaissance, jusqu’à l’âge qui serait digne de
littéraires. C’est Stendhal
rivaliser avec les grands

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modèles antiques fait classicisme cherche dépasse les limites de la
qu’elle se substitue au derrière les apparences littérature ou de l’art : son
principe d’imitation. une vérité unique. Il idéal de rigueur et de
s’appuie sur la raison pour perfection est associé à
Les valeurs dégager la vérité une morale.
classiques. À l’opposé de universelle commune à L’idéal classique
l’esthétique baroque, qui tous. Se concentrant sur est avant tout social. Avec
prône la démesure et l’essentiel, la littérature le développement de la
l’exubérance, le classique étudie la nature cour et des salons se
classicisme aime l’ordre, humaine, intemporelle et définit l’idéal de
l’équilibre, l’unité. La immuable, dont la raison l’« honnête homme », qui
raison est la valeur a retrouvé les lois. incarne les valeurs du
principale du classicisme. La clarté. On classicisme. L’« honnête
La raison. Le recherche toujours la homme » est intelligent et
classicisme revendique clarté, le mot juste (la cultivé, mais sans
avant tout la raison, dont clarté est avant tout un pédanterie ni affectation.
la philosophie de critère linguistique). Ce Il est parfaitement
Descartes a montré souci de clarté rejoint une sociable (aimable, ouvert,
l’universalité. Pour exigence de pureté de la discret) ; il sait s’adapter à
Descartes, dans le langue (cela entraîne une son interlocuteur grâce à
Discours de la méthode réduction du lexique : on sa « politesse » et son
(1637), le scepticisme doit condamne les termes « goût », il cherche à
être la base de toute techniques, populaires, le plaire, mais avec
compréhension. Remettre vocabulaire des métiers) modestie. Alliant élégance
tout en cause suppose de et des genres (la et vertus chrétiennes, il
penser (cogito ergo sum, tragicomédie, genre fait preuve de sensibilité
« je pense donc je suis ») ; mixte, est abandonnée au et de délicatesse. Il est un
Descartes affirme que la profit de la comédie et de homme mesuré, dont la
raison, cette faculté qui la tragédie). sagesse fuit les extrêmes ;
nous permet de penser, est Le goût de il fonde ses choix sur la
commune a tous. La l’équilibre. La littérature raison qui le préserve des
méthode de Descartes classique reflète la excès liés à la passion.
engendre une nouvelle grandeur et l’équilibre du
conception de la règne de Louis XIV. L’ordre
connaissance où le L’idéal classique repose classique. On pourrait le
raisonnement logique a sur l’harmonie : le résumer à trois
toute la place. « Un esprit sentiment, l’imagination exigences :
cartésien » est devenu et l’intellect convergent Plaire et instruire.
synonyme d’un esprit vers un équilibre Dans l’esprit des
français classique qui a le gouverné par la raison. recommandations
goût de la raison et de la Ordre et clarté, recherche d’Aristote ou d’Horace,
vérité. de perfection à la fois les théoriciens assignent à
Le sens de dans les sujets traités et la littérature une fonction
l’universel. À la dans les formes adoptées : à la fois esthétique et
différence du baroque, qui ainsi naît l’équilibre morale. Le premier
est fasciné par le intérieur des œuvres objectif – plaire – est
mouvement et la classiques. souvent considéré comme
complexité du monde prioritaire, mais la valeur
avec toutes ses Morale et idéal d’édification n’est jamais
contradictions, le social. Le classicisme éloignée de celle de

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plaisir. Tous les genres noble, moyen, bas – et des sur scène (tout ce qui
doivent viser le même but genres. Boileau, le concerne le corps est
double. théoricien principal du banni de la scène et du
Suivre la nature. classicisme, s’inspirant discours ; les actes de
En s’inspirant encore des des Anciens, définit les violence ne sont pas
Anciens, le classicisme grands principes de représentés sur scène,
affirme que l’art doit l’écriture dans l’Art mais rapportés par des
imiter la nature : poétique (1674). récits). La bienséance
expression à prendre avec Parmi les règles interne répond à une
prudence, car elle ne les plus importantes, la exigence de cohérence :
signifie pas chercher le doctrine classique impose par exemple, les
réalisme, mais surtout les unités de lieu, de personnages doivent se
respecter dans le style et temps et d’action au développer conformément
dans les sujets une juste théâtre, ainsi que le souci au caractère qui leur est
mesure conforme à la de vraisemblance et de donné au départ (un
qualité suprême du bienséance. prince ne parle pas
« naturel1 ». La vraisemblance. comme un bourgeois, un
Respecter le bon Au XVIIe siècle, les guerrier ne doit pas être
goût. En réunissant les doctes se recommandent lâche…).
qualités précédentes, le de la Poétique d’Aristote La règle des trois
bon écrivain atteint cette pour imposer la règle de unités. Cette règle du
grâce particulière, la vraisemblance, théâtre classique formulée
mélange de naturel et de fondement de la dans les années 1630
perfection, que le siècle dramaturgie classique, qui s’appuie sur l’impératif de
appelle « goût », et que fait primer l’impression vraisemblance et impose
nous appelons « bon de la vérité sur la vérité que l’action évite les
goût ». même. Peu importe que intrigues secondaires
Les règles l’action dramatique soit (unité d’action), qu’elle
classiques. C’est au nom vraie ou non, il suffit soit restreinte à vingt-
de la raison que sont qu’elle soit crédible : quatre heures (unité de
établies les règles « Jamais au spectateur temps) et qu’elle se
classiques. Par leur souci n’offrez rien déroule en un seul lieu :
de mesure et d’équilibre, d’incroyable :/Le vrai « Qu’en un lieu, en un
elles doivent permettre peut quelquefois n’être jour, un seul fait
d’atteindre la beauté des pas vraisemblable. » accompli/Tienne jusqu’à
œuvres antiques. Le (Boileau, Art poétique). la fin le théâtre rempli. »
classicisme emprunte à la La bienséance. (Boileau, Art poétique).
Poétique d’Aristote un Emprunté à l’Art poétique Malgré
effort constant de d’Horace, et théorisé dans l’omniprésence des
classification, de les années 1630, le règles, le classicisme n’est
hiérarchisation de styles – principe du respect des pas un simple ensemble
bienséances est à la fois de règles strictes et
1
Opposé à l’effort stylistique moral et esthétique. La stériles, il est aussi riche
trop visible, le naturel, sans bienséance externe répond que divers.
nier cet effort, cherche à le à une exigence de
dissimuler. Le bon style est convenance morale, qui
alors celui qui semble jaillir de
lui-même. C’est l’idéal que
vise à ne pas choquer le III Genres,
l’on trouve partout, même si on public : elle interdit de auteurs et œuvres
insiste sur le caractère représenter et de
insaisissable de cette qualité. mentionner certains actes

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Le théâtre original et puise dans le Au milieu du
classique. Le XVIIe siècle répertoire de ces siècle, l’esprit classique
est souvent considéré prédécesseurs (Plaute, développe la tragédie, et
comme l’âge d’or du Jean Rotrou, Paul peu à peu s’imposent les
théâtre ; c’est aussi une Scarron). En revanche, il sujets de l’histoire
période de réflexion sur concentre toute son romaine et de la
les formes de l’art attention sur les travers et mythologie grecque.
dramatique. Enfin, de les ridicules de son temps
grands noms, tous voués à qui manifestent les Pierre Corneille
la postérité, y sont défauts permanents des (1606-1684). L'héroïsme,
rattachés : Corneille, hommes. chez Corneille, consiste à
Molière, Racine. Le comique de choisir la grandeur morale
Molière joue sur : le (fidélité, générosité,
La comédie évolue comique de geste honneur) ou le bien de la
considérablement dans les (procédés farcesques : nation (patriotisme) plutôt
années 1630 ; elle devient coups de bâton, que l'intérêt personnel. Au
un grand genre, digne grimaces) ; le comique de service de son idéal, le
d’être présenté aux mots (calembours, héros accepte le risque de
honnêtes gens. La voie est répétitions systématiques, mourir. La récompense en
ouverte à Molière. interruptions régulières) ; est la gloire, et parfois la
le comique de situation satisfaction de retrouver
Molière (1622- (déguisement, accru ce à quoi il avait
1673). Molière commence personnages cachés) ; le d'abord renoncé (le
par écrire des farces, comique de caractère mariage avec Chimène
inspirées des Italiens et de (personnages dirigés par pour Rodrigue).
la commedia dell'arte, une obsession – argent, Le héros est animé
avec des personnages maladie, etc.). par deux mobiles. L'un,
types et des situations Molière a écrit noble, relève de la raison
stéréotypées. Par la suite, plus de trente comédies : et de l'esprit. L'autre,
la farce prend de farces (Les Fourberies de irrationnel et instinctif, est
l'ampleur (d'un acte, elle Scapin) ; divertissement lié au cœur : c'est la
passe à trois puis à cinq) ; royaux (Le Malade passion amoureuse. Le
elle devient une comédie, imaginaire, Le Bourgeois dilemme cornélien est le
souvent écrite en vers. Ses gentilhomme) ; comédies cas de conscience qui se
personnages sont tirés de (L’École des femmes, pose lorsque l'honneur et
la société d'alors et visent Dom Juan, Le la passion s'opposent. Le
particulièrement les vieux Misanthrope, L’Avare, choix est néanmoins
(bigots, avares, Tartuffe). Dans L’Avare toujours le même, car
maniaques) qui (1668), Harpagon, un père pour vivre un amour
tyrannisent la jeunesse. avare et égoïste, veut noble, seul digne d'un
Pour Molière, la comédie marier ses enfants contre héros, il faut d'abord
doit s'attacher à la leur gré. Dans Le garder son honneur intact
représentation exacte de la Bourgeois gentilhomme (Rodrigue doit perdre
nature. Avec le temps, il (1670), monsieur Chimène qu'il aime pour
accorde de plus en plus Jourdain, marchand venger son père). Le
d'importance à la peinture enrichi, se rend ridicule héros cornélien assume
des mœurs et des par ses prétentions complètement la décision
caractères. Il juge donc nobiliaires. qu’il prend ; il accepte de
inutile de s’appesantir sur maîtriser ses impulsions
la recherche d’un sujet selon son libre

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consentement. Ainsi force destructrice. Les le devoir, auquel s'ajoute
acquiert-il une liberté héros raciniens sont à la presque toujours un enjeu
totale : il ne dépend de fois faibles et lucides : ils politique ; chez Racine, il
personne et refuse toute sont incapables de se naît d'un déchirement
fatalité. dominer, mais capables de intérieur insoluble. Le
Le théâtre de développer une analyse théâtre de Corneille,
Corneille est varié. Il lucide de leur malheur. marqué par
comprend des comédies L'envahissement de la l'enseignement des
(L’Illusion comique), des passion dépasse le drame jésuites, est un théâtre
tragi-comédies (Le Cid), sentimental : il signe la optimiste, qui affirme la
des tragédies (Médée, faiblesse de la nature liberté humaine et la
Horace, Cinna, humaine. grandeur du héros. Les
Polyeucte). Dans Le Cid Racine choisit des héros de Racine sont mus
(1637), Rodrigue (Le Cid) mots d'un registre de par le destin et n'ont
se trouve face à un langue soutenu, et aucune liberté : c'est une
dilemme : doit-il, pour recherche la sobriété (le vision janséniste,
venger son père, tuer le vocabulaire se limite à profondément pessimiste.
père de sa fiancée 2000 mots). La pureté de Le thème dominant de son
Chimène ? Il choisit de la langue s'oppose théâtre est le tragique de
défendre l’honneur de sa pourtant aux passions la condition humaine.
famille, car ce n’est qu’en violentes et monstrueuses
accomplissant son devoir qu'elle exprime ; Les Complément : les
qu’il sera digne de passions apparaissent à jansénistes et les jésuites. La
seconde moitié du XVIIe siècle
l’amour de Chimène. travers des périphrases, est marquée par l’opposition,
des allusions, des interne au catholicisme, des
Jean Racine métaphores ; elles sont jésuites et des jansénistes.
(1639-1699). Avec toujours contenues. Fondée en 1540 par l’Espagnol
Racine naît une tragédie Racine est auteur Ignace de Loyola, la
Compagnie de Jésus exerce une
nouvelle, médiation sur la de 11 tragédies, parmi forte influence. Grâce à leurs
condition humaine. Le lesquelles Andromaque, collèges, réputés pour leur
théâtre racinien a un Iphigénie, Phèdre qualité, ils contrôlent la
thème unique : la passion (tragédies grecques), formation intellectuelle et
fatale. Au siècle de Britannicus, Bérénice idéologique des élites de la
nation. Le jansénisme est une
l'ordre, la violence (tragédies romaines), doctrine religieuse prêchée par
irrationnelle de la passion Esther, Athalie (tragédies l’évêque flamand Cornelius
exerce une véritable tirées de l’Écriture Jansen, dit Jansénius (1585-
fascination. Chez sainte). Dans Phèdre 1638) ; elle ne se répand
Corneille, comme chez (1677), Phèdre, l’épouse qu’après sa mort. Pour
concurrencer les jésuites, les
Racine, la passion entre de Thésée, égarée par une
jansénistes créent les Petites
en conflit avec la raison ; passion coupable pour son Écoles du Port-Royal.
mais chez Racine, la beau-fils Hippolyte, le Jésuites et jansénistes
raison est vaincue. livre par jalousie à la s’opposent sur la question du
Le héros racinien vengeance injuste de son salut. Depuis le péché originel,
l’homme, séparé de Dieu, ne
est souvent le jouet d'un père.
peut être sauvé que par la grâce
amour passionnel   obtenue par les mérites de
irrésistible, vécu dans la Différences entre Jésus-Christ. Pour les jésuites,
jalousie et voué à l'échec. Corneille et Racine. chacun est libre d’orienter sa
Chez Racine, l'amour est Chez Corneille, le conflit vie, et le salut sanctionne le
une force irrationnelle et tragique naît d'un choix de bonnes ou mauvaises
actions. Dieu donne sa grâce à
irrésistible, mais aussi une dilemme entre l'amour et tous, chacun est libre de la

5
mériter ou non. Pour rassurer l’imagination et prennent mondaine, comme dans le
les fidèles, les jésuites la réalité pour modèle. madrigal, l’ode ou l’épître
minimisent les aspects négatifs
des actions humaines : il n’y a
Mais l’Histoire n’est où s’illustre Boileau, à
péché que lorsqu’il y a qu’un moyen, le but est moins qu’elle soit
conscience du péché ; on peut d’instruire, par une allégorique avec le cas
excuser parfois les pires actions analyse des hommes et de particulier de la fable, et
accomplies avec de bonnes la société. L’analyse de son génial
intentions. Pour les jansénistes,
au contraire, Dieu n’accorde sa
psychologique se représentant, La Fontaine.
me
grâce qu’à un petit nombre développe ; M de
d’élus. Il ne l’accorde pas à Lafayette décrit Les genres
tous les hommes selon leurs abondamment la vie mondains. À côté des
mérites (cela limiterait la intérieure de ses grands genres de l’époque
puissance divine), mais
seulement à certains qu’il a
personnages. Son œuvre classique, se développent
choisis et dont il sait par la plus célèbre est un des genres nouveaux nés
avance qu’ils seront justes ; les court roman, La de la vie mondaine :
autres sont voués à la Princesse de Clèves maximes, lettres,
damnation. L’esprit du (1678), où se mêlent mémoires. Le but de ces
jansénisme est pessimiste et
personnages historiques et genres est de briller, mais
austère ; ils dénoncent
l’indulgence excessive des fictifs. Mlle de Chartres l’esprit classique domine
jésuites. Mais les jésuites, épouse M. de Clèves et, l’ensemble : expression
mieux placés, et proposant une lors d’un bal, rencontre concise, formulations
vision plus séduisante de la M. de Nemours dont elle générales, sentiments
condition humaine, emportent
devient amoureuse ; elle lyriques contenus.
la lutte. Le jansénisme est
combattu et éradiqué. lutte contre sa passion Maximes. À
pour rester fidèle, mais l’origine, la maxime est
Le genre narratif bientôt, ayant peur de un jeu mondain par lequel
voit s’établir une ligne de succomber, elle avoue son on se divertit en inventant
partage entre l’épopée, amour pour un autre à son de belles « sentences » ou
qui conserve son prestige, mari qui en meurt de « réflexions morales ». La
et le roman, forme chagrin. En mémoire de Rochefoucauld prend goût
dépréciée et critiquée par son mari et par peur d’être au jeu et écrit pendant
les doctes, qui n’accède déçue, Mme de Clèves vingt ans les maximes.
pas encore au statut de repousse définitivement Ses Maximes
« genre ». M. de Nemours. Le roman appartiennent à la
est classique par le littérature morale. Les
Le roman traitement des conflits moralistes se définissent
classique. À partir de entre la passion et la comme des écrivains qui
1660, le goût classique est raison, la vérité des traitent des mœurs, non
lassé du roman baroque sentiments et la sobriété comme des
aux actions compliquées de l’expression ; il moralisateurs : La
et aux rebondissements reprend pourtant plusieurs Rochefoucauld est
multiples. Comme dans le éléments baroques ou moraliste parce qu’il
théâtre, le roman précieux (intrigues décrit les comportements
classique recherche secondaires, psychologie humains.
l’unité d’action : les amoureuse subtile). Lettres. C’est vers
intrigues secondaires 1620 que la lettre accède
disparaissent, et le La poésie. La au statut d’objet littéraire.
nombre de personnages poésie occupe une place Mais les correspondances,
est limité. Les romans mineure. Elle se fait pourtant lues
classiques rejettent souvent légère ou publiquement dans les

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salons, sont rarement littéraires, Paris, Librio,
éditées. La 2010, pp. 136-137.
me
correspondance de M de Potelet Hélène, Mémento
Sévigné (Lettres), de la littérature
adressée à sa fille partie française : du Moyen Âge
vivre en Provence, tente au XXe siècle, Paris,
de combler l’absence de Hatier, 1990, pp. 41-47.
l’être cher. En tenant sa Stalloni Yves, Écoles et
fille au courant des courants littéraires, Paris,
événements de la cour, la Nathan, 2011, pp. 56-69.
marquise fournit au
lecteur une chronique de
la vie parisienne et de
l’actualité, d’autant plus
attachante que l’auteure
cède au plaisir de conter.

Sources :
Dictionnaire des termes
littéraires, sous la dir. de
Hendrik van Gorp, Paris,
Honoré Champion, 2005,
pp. 97-99.
La littérature française de
A à Z, sous la dir. de
Claude Eterstein, Paris,
Hatier, 2011, pp. 61-62,
99, 449-450, 469.
Lexique des termes
littéraires, sous la dir. de
Michel Jarrety, Paris,
Librairie générale
française, 2001, pp. 80-
83.
Ligny Cécile de,
Rousselot Manuela, La
littérature française,
Paris, Nathan, 2006, pp.
36-51.
Marin Fanny, Les
mouvements littéraires du
XVIe au XVIIIe siècle,
Paris, Hatier, 2001, pp.
66, 74-103, 108-112.
Narteau, Carole,
Nouailhac, Irène, La
littérature française  : les
grands mouvements

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