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Table des matières

Introduction 1
L’entreprise est un animal économique 1
L’entreprise ne sera jamais une personne 2
Des droits et des devoirs 2
Un livre dérangeant 2

Un mal récurrent 3
Avant toute chose, une question de coûts 4
Un cadre légal 6
Une crainte et une inertie 8
Savoir mettre des mots sur un déséquilibre 10

Guérir les symptômes 23


La maladie et les retards 24
La qualité 25
La motivation 26
Le stress 28
La dénaturation et les tensions internes 29
Le branding 34
L’argent 35

S’attaquer aux origines 41


Santé et sécurité 42
L’individu 50
Le climat socio-économique 61
L’équipe 62
La collaboration des syndicats 67
Le management 70

Stabiliser et assurer la prévention 87


Une stratégie de l’évaluation,
du contrôle et de la sanction 89

Table des matières III

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Un bien-être bien rentable 90
Le recrutement en question 92
La solution efficace, simple et peu coûteuse :
la formation d’induction 94
Un partenariat durable avec les syndicats 95
Une question de culture 96

Bâtir son plan Absence 101


Des étapes longues et certains résultats rapides 102
Des actions ponctuelles ou un vaste plan ? 103
Les phases du plan Absence 104

Conclusion : l’ absentéisme
n’est pas un message adressé à l’entreprise 135

Annexes : La législation face à l’absentéisme 137

La législation française 139


Les absences reconnues par le droit 140
Les effets d’une absence sur le contrat de travail 146

La législation belge 159


Rappel des principes 160
Les différents types d’absence 160

Les aspects juridiques de l’absentéisme


en droit luxembourgeois 173
L’obligation de travailler en vertu du contrat de travail 174
Les absences reconnues par la loi 175
L’absentéisme et ses conséquences 181
Conclusions 187

IV Vaincre l’absentéisme

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Introduction

Si certains travaillent le week-end, la tendance est plutôt l’inverse.


Dès 17  heures, on change de monde. «  Il faut savoir se couper
du monde du travail ». S’extraire de ses préoccupations… Et ceux qui
travaillent le samedi ou le dimanche sont fustigés.

L’entreprise est un animal économique

Trop longtemps les discours des médias, des psychologues et même


des responsables ont été teintés d’anthropomorphisme. L’entreprise
n’est pas une personne : elle est un instrument économique dont
l’unique objectif est la survie.
Cette notion de survie est exacerbée par la crise : l’entreprise doit
se battre, se défendre, conquérir pour ne pas mourir. Ce jour-là, le
jour de sa mort, certains même pleureront l’entreprise… Ils n’ont rien
compris.

Introduction 1

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L’entreprise ne sera jamais une personne

Que ce soit le licencié qui vit une séparation, le pensionné qui se


présente comme un veuf ou celui qui souffre de ne pas être mieux
remercié, tous ont tort. L’entreprise ne se soucie que d’elle-même,
c’est un outil de notre système économique : ni sentiment, ni remord.
L’entreprise ne sera jamais attentive, ni coupable.
La base du contrat qui lie l’entreprise et ses salariés est fixée par un
double lien : l’entreprise utilise le recruté comme une ressource et, en
échange, elle le rétribue.

Des droits et des devoirs

Le salarié est, dès lors, soumis à un ensemble de devoirs. Sa présence


et son travail sont les deux devoirs emblématiques de la personne
engagée. L’absentéisme est par essence une rupture de ce contrat.
L’accepter, c’est mettre en péril la notion même de travail salarié.

Un livre dérangeant

Cet ouvrage est conçu comme une réponse pratique sans tabou pour
les responsables désireux de s’attaquer au problème de l’absentéisme.
Sans tabou, car les causes sont souvent plus dérangeantes pour l’en-
treprise que pour les salariés.

2 Vaincre l’absentéisme

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1
Un mal récurrent

Lundi : on se réveille en retard, on récupère du week-end, on se raconte,


on se montre des photos…

Se poser les bonnes questions


Parler de l’absentéisme se cantonne trop souvent à des constats. Il
s’agit de dépasser ce stade de l’analyse1 et d’avancer des solutions.
L’absentéisme a en effet des conséquences non seulement sur l’en-
treprise mais également sur les personnes y qui travaillent.
Trop longtemps considéré comme inhérent au monde du travail, il est
impératif de le ramener à sa juste valeur : un effet pervers de mau-
vaises organisations qui trouve écho chez des personnes faibles.
Les questions qui doivent être posées sont pourtant simples :
■■ Quels coûts pour mon entreprise ?
■■ Qui est responsable de quoi ?
■■ Où se cachent les freins ?
■■ Suis-je protégé ou affaibli par la législation ?
1. Actuellement trois modèles d’explication coexistent : l’approche individuelle, l’approche psycho-
sociale et l’approche économique. Ces approches s’affrontent souvent alors que, nous le verrons,
elles sont complémentaires.

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Ce chapitre résume quelques-uns des lieux communs et propose une
approche différente : plus directe, moins compréhensive des lacunes,
des dysfonctionnements et des attitudes, elle paraît parfois brutale
envers les personnes et surtout envers les organisations. Cette bru-
talité-là est nécessaire car elle guérit d’un mal qui gangrène nos
sociétés, le silence.

Un mauvais lieu commun : certains travaillent mieux !


■■ On dit les PME moins atteintes. On dit les gens des régions

l’Est (proche des germanophones) plus travailleurs : faux.


■■ Cette année, le secteur des services, les PME et l’Est de la

France affichent les taux d’absentéisme les plus forts1.

Avant toute chose, une question de coûts

En France, le coût annuel pour la collectivité s’élève à 25  milliards


d’euros. En Belgique, 5,2 milliards2.
Depuis l’avènement de la crise, l’absentéisme a explosé. Les experts
parlent d’une augmentation de 30 %3. Les entreprises, déjà affaiblies
par un marché en crise et une concurrence agressive, sont confron-
tées à ce problème interne.
Les coûts engendrés sont exorbitants : outre l’impact financier, l’ab-
sentéisme a pour effet une chute de l’efficience, de la qualité, de la

1. Baromètre de l’absentéisme, Alma Consulting Group, 2010.


2. Les Français se voient comme champion de l’absentéisme. Une récente étude relativise cette
idée : « Un travailleur belge est en arrêt maladie en moyenne 2,3 fois par an. C’est moins qu’en
Allemagne (2,4 fois), mais plus qu’aux Pays-Bas (2 fois) et qu’en France (1,8 fois) », enquête AON
Consulting, 2010.
3. Étude SECUREX, 2010.

4 Vaincre l’absentéisme

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sécurité et des compétences. Il est également synonyme de démotiva-
tion, de dépression, voire de suicide.
Certains experts vont plus loin en parlant de lutte contre l’iniquité des
entreprises : « L’absentéisme est un moyen de prendre d’une main ce
qu’on n’a pas eu de l’autre1. »

Savoir  identifier les coûts cachés

De façon non exhaustive, listons les principaux coûts pour l’entre-


prise et pour le salarié.
■■ Les principaux coûts pour l’entreprise :
>> Un coût financier inhérent aux salaires versés aux absents2 et
ceux liés aux éventuels remplacements (heures supplémentaires,
intérim ou sous-traitances) ;
>> Un affaiblissement de son knowledge management ;
>> Une désorganisation des équipes ;
>> Une chute de l’efficacité et de l’efficience des équipes ;
>> Une capacité réduite de réaction et d’adaptation ;
>> Un risque de contagion, voire de culture d’absentéisme ;
>> Une démotivation générale et des tensions visibles ;
>> Le coût du traitement administratif ;
>> Un déficit de crédibilité de sa ligne hiérarchique ;
>> Une altération de son image auprès de ses clients et de ses
partenaires ;
>> Des pertes de clients au profit des concurrents.

1. Denis Monneuse, http ://labsenteisme.blogspot.com/, 2009.


2. Les jours légaux de carences, les frais d’assurances et les éventuels compléments de salaires.

1 – Un mal récurrent 5

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Pour l’entreprise, on estime le coût global à 1,75 à 2,25 fois le
salaire de l’absent.
■■ Les principaux coûts pour les salariés :
>> Un sentiment d’injustice ou d’iniquité ;
>> Une démotivation croissante ;
>> Des passages à l’acte divers : agressivité, refus de travailler, vol
ou casse ;
>> Une perte de solidarité au sein des équipes ;
>> Une dévalorisation des tâches effectuées ;
>> Une perte des repères sociaux usuels et de la logique de travail.
■■ Pour être complet, il faudrait adjoindre à ceux-ci les coûts occa-
sionnés à l’image de certains secteurs d’activités, voire même à
celle de certaines villes ou régions.

À retenir : des petits frères bruyants


L’absentéisme ne se limite pas à l’absence : il est également retard,
mauvaise gestion du temps, manque d’efficience, gaspillage et faute1.

Un cadre légal

L’absence est liée à l’obligation de présence. Sans cette obligation, il


ne peut légalement être fait état d’absentéisme.
Il convient de fixer le plus rigoureusement possible, le cadre de cette
obligation : la présence n’est pas un concept, c’est un ensemble de
règles.

1. La faute se distingue de l’erreur par son aspect intentionnel et donc punissable.

6 Vaincre l’absentéisme

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En pratique
■■ Chaque salarié doit être informé des règles édictées soit par la
loi, soit par l’entreprise :
>> octroi des congés ;
>> horaire et nombre d’heures de travail par semaine ;
>> autorisation d’absence ;
>> droit de grève ;
>> obligations de résultats et obligations de moyens1.
■■ L’entreprise doit communiquer régulièrement sur les sanctions
prévues en cas de transgression de ces règles et sur leurs
modalités d’application.
■■ Cette communication sera d’autant plus efficace si elle est
relayée par un responsable hiérarchique proche. Idéalement
c’est également à lui que revient la responsabilité du suivi, du
contrôle et de la sanction.
■■ Rien ne doit être secret ou non-dit. Les salariés, les syndicats et
l’ensemble de la ligne hiérarchique doivent connaître leurs droits
et leurs devoirs. Chacun doit pouvoir à tout moment avoir accès
à ces informations.
■■ Une fois les règles connues, la capacité non seulement à les faire
respecter mais plus encore à savoir sanctionner le contrevenant a
un effet direct sur les chiffres de l’absentéisme.

On devine ici les difficultés inhérentes au fonctionnement même de


l’entreprise : manque de formation des responsables des ressources
humaines, manque d’investissement du middle management, refus de

1. Ces deux notions sont issues du monde du droit :


– l’obligation de résultats impose un résultat concret et mesurable à la tâche ou la mission exécutée ;
– l’obligation de moyen n’exige pas de résultats, mais elle impose que le salarié mette tout en œuvre
pour parvenir à ce résultat.
L’avocat, par exemple, ne peut promettre à son client de gagner sa cause. À l’instar du médecin,
il doit mettre tout en œuvre pour atteindre un résultat positif. Ils sont tous deux dans le cadre d’une
obligation de moyen. A contrario, l’architecte qui bâtit un pont doit s’engager sur sa solidité. Il relève
de l’obligation de résultat. Chaque collaborateur doit pouvoir, pour toute tâche prestée, se situer :
soit il est dans le résultat, soit dans le moyen. Trop d’entreprises jouent encore sur ces nuances pour
mettre leurs salariés sous pression.

1 – Un mal récurrent 7

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prise de responsabilité, peur de sanctionner, et collusion affective
entre les collaborateurs et leur hiérarchie directe.
À ceci, il faut ajouter la désinformation des politiques, des organi-
sations syndicales et des médias. Une étude confidentielle a ainsi
mis récemment en évidence le rôle des séries américaines dans la
perception des droits des individus.

À retenir : quand le berger allemand dort,


le chat se sauve et les souris dansent…
■■ Aucun individu n’est ni bon ni honnête : il est dans la nature

humaine de chercher son profit. Celui-ci se traduit par une loi


simple : celle du moindre effort ou, pour être plus exact, celle
qui cherche à maximiser tout investissement. Travailler moins
pour le même salaire reste trop souvent l’axiome caché du
contrat de travail.
■■ En 2008, une étude de Monster a révélé qu’en Belgique, 47 %

des personnes interrogées ont déjà prétendu être malades


sans raison. En Europe, la moyenne est de 26 %.

La seconde partie de cet ouvrage repend les droits et obligations


fixées par la législation.

Une crainte et une inertie

Tous s’accordent pour définir l’absentéisme comme un mal récurrent.


Pourquoi tant de sociétés, d’organisations et d’associations peinent à
affronter ce problème ?
Il y a avant toute chose la peur de leurs responsables : toucher à
l’absentéisme, c’est mettre en cause le cœur de leur organisation,
c’est émettre un jugement sur leurs collaborateurs, c’est envisager que

8 Vaincre l’absentéisme

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certains fraudent, et surtout c’est oser remettre en question la culture
de l’entreprise et son fonctionnement.
Le premier coupable est en effet l’organisation : gestion des congés,
répartition de la charge de travail, valorisation de ses collaborateurs,
type de management… chaque dysfonctionnement se traduit en jour-
nées d’absence.
Il y a aussi cette inertie : tout être humain, et donc toute organisation
humaine, a en elle un bloc de granit, une volonté de s’opposer à tout
changement. Une sorte de noyau psychotique qui surréagit à l’an-
nonce de toute modification, fût-elle porteuse de progrès.
Malheureusement, force est de constater qu’en entreprise, trop sou-
vent, on préfère un mauvais équilibre à un bon changement.
Tout changement en effet oblige le responsable à produire des efforts
financiers et organisationnels. Il lui impose également une phase de
désordre.

La citation à ne prononcer qu’en présence de cadres :


«  L’important n’est pas dans la qualité du bâton ou de la carotte ;
l’important est de frapper quand on menace et d’offrir quand on
promet. »

Savoir identifier les freins

L’inertie organisationnelle des entreprises (et donc comportementale


de ses responsables) face aux absences est corrélée à des facteurs
clairement identifiés :
■■ Les relations de dépendance des salariés à leur entreprise : plus je
l’aime, moins je veux qu’elle change.
■■ L’efficience d’une équipe : il est difficile de changer une équipe qui
fonctionne.

1 – Un mal récurrent 9

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■■ La perception de chacun de la gravité de son état de santé : quand
est-on incapable de travailler ?
■■ Le comportement d’absentéisme présent dans l’entreprise : ce qui
se fait.
■■ La culture organisationnelle : sommes-nous habitués au changement ?
■■ La mesure des absences : mesurer, c’est accepter un phénomène ;
l’accepter, c’est commencer à le combattre.
■■ La tolérance de l’entreprise envers les absences familiales : la
maman qui vole au secours de son enfant fait jurisprudence..

À retenir
Toute absence est une combinaison de facteurs propres à l’individu
avec des facteurs de son environnement : comprendre l’un pour
délaisser l’autre est toujours une erreur.

Savoir mettre des mots sur un déséquilibre

L’absentéisme n’est pas une pièce nécessaire au bon fonctionnement


de l’entreprise. L’idée que s’attaquer à l’absentéisme remet en ques-
tion l’équilibre social de l’entreprise est dangereuse.
L’absentéisme est toujours vecteur de déséquilibres. Il est également
le symptôme, la partie visible d’une maladie, d’un dysfonctionnement
plus profond.

À retenir : le syndicaliste véreux


■■ C’est l’exception mais cela existe : un syndicaliste qui profite

de son statut pour s’absenter est un mauvais syndicaliste.


■■ Si s’attaquer à l’absentéisme nécessite de s’attaquer à cer-

tains syndicalistes, il ne faut pas redouter cet affrontement car


ceux-là sont de piètres exemples.

10 Vaincre l’absentéisme

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■■ Ils sont néfastes non seulement pour l’image de leur syndicat
mais également pour l’entreprise. Par leurs comportements, ils
induisent de fait un sentiment de protection pour les salariés
qui adopteraient le même comportement.
Il est à noter que généralement ils sont peu défendus par leur struc-
ture syndicale.

Définition
Chaque auteur, chaque consultant et chaque professeur d’université
a sa propre série de définitions.
Nous proposons ici une synthèse des principaux types d’absen-
téisme et leur définition.

L’absentéisme structurel

Tout groupe humain a son pourcentage de malades et d’individus


psycho-fragilisés. La maladie, l’âge et le sexe (maternité, charge
familiale…) imposent un seuil minimal d’absentéisme.

À surveiller : des absents à accepter


■■ L’entreprise doit accepter cet absentéisme structurel. Il est inhé-

rent à la fragilité de l’être humain.


■■ L’entreprise accepte un taux de rebus pour ses matières pre-

mières, l’absentéisme structurel en est le pendant humain.


■■ Il convient donc de soutenir ces salariés lors de leur absence et

de les aider lors de leur réinsertion en entreprise.

L’absentéisme chronique

Il regroupe les habitués des retards volontaires, des pauses cigarettes


ou des temps de midi de longue durée.

1 – Un mal récurrent 11

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À surveiller : toujours tout noter !
■■ Trop de responsables se limitent à des remarques orales. Il faut

avertir et sanctionner. Et pour sanctionner, il faut des heures,


des dates… et des faits.
■■ Les petits retards, s’ils paraissent inoffensifs en termes finan-
ciers, provoquent des désorganisations importantes.

L’absentéisme latent
Le salarié utilise son temps de travail pour d’autres tâches. Il s’agit principa-
lement de jeux ou de réseau sociaux, mais cela peut aussi consister en des
tâches rémunérées. L’informatisation en général, et Internet en particulier,
ont facilité le surdéveloppement de cette forme d’« absentéisme ». Les entre-
prises n’ont pas encore les outils pour combattre ce cyber-absentéisme.

À surveiller : le Facebook addict


■■ Si une entreprise n’a pas le droit de lire les mails, elle peut

interdire l’utilisation de la messagerie électronique pour ceux


qui n’en ont pas besoin ou la limiter.
■■ Une entreprise peut facilement, à partir de filtres, interdire

l’accès à des sites de loisirs ou à des réseaux sociaux.

Des chiffres alarmants


■■ Les réseaux sociaux captent leurs utilisateurs. Ils exercent une

fascination de l’ordre de l’addiction. À titre d’exemple, aux


États-Unis le temps moyen de connexion sur Facebook est de
5 h 351. Soit près de 6 heures par jour, il est clair que cela
impacte le temps effectif de travail du salarié2.

1. Chiffres de décembre 2009 disponible sur le blog : http ://blog.nielsen.com/nielsenwire/.


2. La connexion n’est toujours pas synonyme de lecture ou d’écriture : elle peut être passive. Le
réseau social est souvent présent sur une page Web ouverte en arrière-plan. Le salarié est averti par
mail quand il reçoit un commentaire ou quand est publiée une information. Il consulte alors sa page
sociale. Ce principe de veille continuel est tout autant envahissant : il place le travailleur à un niveau
constant de travail cognitif. Il est donc moins disponible pour ses tâches rémunérées.

12 Vaincre l’absentéisme

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Attention : la ligne hiérarchique est souvent un mauvais exemple.
Sous couvert d’excuses diverses (contacts clients, création de buzz,
veille…), une grande part des managers « twittent » ou alimentent
leurs réseaux sociaux pendant leur temps de travail. Ils exercent ainsi
un rôle d’entraînement sur leurs collaborateurs.

L’absentéisme blanc1

La personne absente est supposée être présente.

À surveiller : le présent-absent
■■ Le salarié simule sa présence par un objet (mallette, sac, por-

tefeuille, veste…), par un mot ou un post-It (« je reviens » ou


«  en réunion  »), ou un message sur son répondeur. Il peut
également être couvert par un collègue, voire même parfois
par son supérieur.
■■ Il peut s’agir de missions, de déplacements ou de réunions

factices.

exemple

Lors d’une de nos missions pour un important ministère, nous avons


ainsi été surpris de l’attachement quasi «  hystérique  » de certains
employés à leur bureau. Leur emplacement leur permettait en effet
de s’absenter aisément : soit ils étaient près des ascenseurs, soit près
des escaliers, soit ils étaient détachés physiquement du service (autre
bâtiment ou autre étage par exemple).

1. Le terme est de Pierre Jardillier (1979).

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Le para-absentéisme

Le fait d’être présent ne peut être considéré comme suffisant. Le col-


laborateur doit se soumettre à sa charge de travail et l’effectuer effi-
cacement. Il existe quantité de méthodes pour se soustraire à ces
obligations.

À surveiller : l’hyperkinétique
■■ Un des trucs les plus utilisés pour masquer son oisiveté, c’est le

mouvement : marcher d’un pas rapide dans les couloirs, arriver


en retard (mais pressé) aux réunions, traiter plusieurs dossiers
en parallèle (chaque dossier sert d’excuse aux autres), finir
plus tard ou commencer plus tôt…
■■ Toutes ces activités font paravent : elles procurent sans effort

l’image de celui qui est débordé. Trop souvent cette fausse


énergie est considérée comme un trait professionnel valorisant.
■■ Il en est de même pour le désordre dans les bureaux. Il est

encore dans l’esprit de beaucoup synonyme de travail. Dans


les faits, le désordre est davantage une excuse aux erreurs,
aux manques d’efficience ou une protection contre toutes
tâches supplémentaires.

Les présences inutiles

Pour se distraire de leurs tâches, ou parce qu’ils estiment cela moins


contraignant, certains salariés aiment se rendre nécessaires à des
réunions où ils n’apportent pas de valeur ajoutée. D’autres préfèrent,
pour des raisons évidentes d’avantages financiers, travailler le week-
end ou en soirée.

14 Vaincre l’absentéisme

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À surveiller : l’indispensable contrôle des horaires
La gestion des horaires doit toujours répondre à quelques règles simples1 :
■■ Leur gestion est centralisée ;

■■ Idéalement elle est informatisée (des logiciels spécifiques exis-

tent) ;
■■ Tout horaire doit être validé par le responsable ;

■■ Toute décision est manuscrite (jamais verbale) ;

■■ Il doit exister un process parallèle pour permettre à la hié-

rarchie proche (opérationnelle) d’ajuster en fonction des pics


de travail, d’absence ou d’urgence ;
■■ Les temps partiels seront traités différemment : la gestion de

leur présence (et de leur absence) est plus délicate.


Attention : un système de récupération (week-end, heures supplé-
mentaires, RTT…) peut déséquilibrer une équipe ou un poste.

Les absentéismes saisonniers

Ils sont liés aux fêtes locales, aux périodes d’examens, aux contraintes
climatiques ou aux obligations familiales.

À surveiller : l’excuse sociale


■■ Les organisations, à l’instar des écoles, sont trop enclines à

excuser les absences socioculturelles : carnavals, bals, exposi-


tions, engagements politiques ou associatifs.
■■ Ces absences doivent être assimilées à des congés. Les

admettre comme maladie constitue une faute professionnelle


grave de la part de leur responsable et être sanctionné comme
tel.

1. Référence : la grille de J. Poupé (2010) principalement utilisée dans le secteur social.

1 – Un mal récurrent 15

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Le micro-absentéisme

Les absences se limitent à un ou deux jours.


Elles peuvent être médicales ou liées à l’âge. Elles peuvent aussi
refléter une stratégie de refus de travail, de pré-dépression, ou de
protestation (refus par la hiérarchie d’une demande du salarié ou
protestation contre une décision)1.

À surveiller : celui qui récupère


■■ Certains statuts permettent ces micro-absences sans justi-

fication ou sans contrôle médical. Elles permettent donc de


s’absenter pour des obligations subites (rendez-vous chez le
notaire, à la banque ou auprès du garage). Elles servent éga-
lement d’outil de récupération pour ceux qui ont presté des
heures supplémentaires, ou qui estiment les avoir prestées.

Absentéisme pathologique

L’absentéisme est dit pathologique si le salarié s’absente plus de trois


fois le même mois ou plus de 63 jours par an.

À retenir : des symptômes


■■ Le freinage et le gaspillage sont des précurseurs de l’absence

ou de la grève : ils ne doivent donc jamais être sous-estimés


ou banalisés.

1. Les systèmes légaux de défense sociale dans de nombreux pays favorisent le micro-absentéisme.
En France, la jurisprudence relaie ce que beaucoup de conventions collectives ont fixé : le malade
dispose de 48 heures pour informer son entreprise. Aucun gouvernement n’a jamais statué sur ce
sujet (il est sensible). La seule référence légale reste le concept « d’obligation générale de loyauté »
envers son employeur. Pour les accidents de travail, par contre, le Code de la Sécurité sociale
impose un délai maximum de 24 heures.

16 Vaincre l’absentéisme

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À VOUS DE JOUER : GÉRER LES RETOURS D’ABSENCE
Tout salarié absent doit être « accueilli » à sa rentrée : l’entretien de
retour doit permettre de cadrer sa réintégration. Cet entretien doit
idéalement être effectué par sa hiérarchie proche.
Chaque entreprise doit concevoir un canevas d’entretien et former
ses responsables à la tenue de cet entretien. C’est pour l’organisation
un investissement important mais indispensable : cet entretien reste un
des outils les plus adaptés de régulation des absences.
Il existe des fiches et des schémas types d’entretien. Certains propo-
sent des entretiens différents selon les personnes ou en fonction de
soupçons précis (et de leur « historique absence »). C’est à décon-
seiller car le salarié n’est pas dupe : il est d’emblée placé en coupable
et l’entretien se cantonne à des échanges purement administratifs ou
devient agressif. Les conséquences sont à craindre car cela conforte
le comportement du salarié.
Dans tous les cas, il est préférable que l’entreprise rédige une fiche et
un plan d’entretien qui lui soient propres. Cette tâche est réalisée en
partenariat avec les organisations syndicales, avec le soutien de la
direction et le concours des managers.

1 – Un mal récurrent 17

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En pratique
■■ L’entretien doit se tenir dès le premier jour du retour (idéalement
au matin avant même son retour au travail).
■■ L’entretien se fait en face à face. Il est conseillé de ne pas refuser
une présence syndicale si elle est demandée par le salarié.
■■ Ne jamais faire d’exception : quels que soient le poste,
ou le grade du salarié, quels que soient la durée de l’absence ou
son motif, il faut procéder à l’entretien.
■■ Cet entretien doit être uniforme : il doit être identique dans sa
forme et son contenu pour tous afin de pas générer de sentiment
soit d’impunité soit d’injustice.
■■ Cet entretien doit être préparé. Le responsable révisera
l’historique des absences du salarié, le motif de son absence,
le niveau d’investissement actuel dans son travail et ses relations
avec ses collègues.
■■ Il doit aussi se fixer des objectifs de remotivation, de recadrage
et de réinsertion. Pour les cas de récidive, on ajoutera
des objectifs supplémentaires : expression de la vigilance
de l’entreprise et évitement de récidive.
■■ Cette rencontre doit être l’occasion de remotiver
le collaborateur : elle doit être positive et constructive.
■■ Le responsable doit informer le salarié de toute évolution
(équipe, engagement, nouveaux contrats, nouvelles tâches
ou modification des procédures) ou toute autre information
pertinente.
■■ Dans un objectif de responsabilisation, il exprime également
les effets organisationnels et humains induits par l’absence.

18 Vaincre l’absentéisme

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À retenir : le récidiviste
Il existe des critères simples pour les repérer : absences de courte
durée en début ou en fin de semaine, ou après des jours fériés,
absentéisme culturel, manque d’intérêt au travail, tendance à la
justification…
Ces entretiens doivent être particulièrement préparés. Le responsable
doit se fixer trois objectifs :
■■ un objectif de réintégration : il faut tenter de remobiliser le

collaborateur. Ceci s’effectue soit par la réintégration dans


l’équipe, soit par une tâche valorisante ;
■■ un objectif de recadrage : il faut que le collaborateur com-

prenne que son comportement est asocial. Pour cela, le res-


ponsable doit ostensiblement faire référence à l’historique de
ses absences et suggérer ses doutes sur leur aspect répétitif
(ceci sans remettre en cause leur justification : il n’est pas
médecin) ;
■■ un objectif organisationnel : toute absence fait écho à un dys-

fonctionnement organisationnel. Les absents pathologiques et


chroniques en sont souvent les signes : des signaux d’alarme
dont il faut tenir compte. L’entretien est le moment privilégié
pour le responsable pour identifier ces dysfonctionnements.

En cas de maladie réelle, le candidat doit être assuré du soutien de


son équipe et de son entreprise.
Attention, une empathie excessive pourrait être interprétée comme
un signe de faiblesse et serait une porte ouverte à d’autres absences
moins justifiées.
Si la maladie fut longue ou fort éprouvante, le responsable met sur
pied un programme de réintégration en partenariat avec l’équipe et
éventuellement le médecin traitant.

1 – Un mal récurrent 19

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Se tester vrai faux

1 Toute absence fait écho à un dysfonc-


tionnement organisationnel.

2 Il faut éviter d’imposer les entretiens de


retour d’absence au high management
afin d’éviter de les décrédibiliser.

3 L’entreprise n’a pas le droit d’interdire


les réseaux sociaux aux salariés qui
disposent d’un ordinateur.

4 Certaines études tendent à prouver


que près d’un salarié sur deux a déjà
pris des congés maladie injustifiés.

5 Toute entreprise ou association doit ad-


mettre un taux minimal d’absentéisme.

(Réponses page 22)

20 Vaincre l’absentéisme

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Faites le point
■■ Les coûts sont multiples et touchent autant les individus que l’en-
treprise.
■■ Pour l’entreprise, on estime le coût global à 1,75 à 2,25 fois le
salaire de l’absent.
■■ Avant toute action, il est impératif d’identifier les freins et les
contraintes.
■■ L’absentéisme est multiple. Chacun de ses types nécessite une
approche adaptée. Chaque type a également ses propres
causes.
■■ L’absentéisme est également un concept légal. Il est encadré
par des textes qui eux-mêmes influencent les comportements des
individus.

1 – Un mal récurrent 21

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réponses
1 Vrai
C’est effectivement dans la culture de l’entreprise, le comportement des res-
ponsables et les procédures internes que l’absentéisme se développe.

2 Faux
D’une façon générale, le traitement de l’absentéisme nécessite un sentiment
de justice. Tout ce qui pourrait être assimilé à des passe-droits ou des privi-
lèges renforce les comportements d’absentéismes.

3 Faux
À l’instar de l’utilisation privée du téléphone portable, du fax et du courrier,
le mail et les réseaux sociaux, sauf autorisation explicite de l’employeur,
doivent se cantonner au professionnel. Et peuvent dès lors être proscrits.

4 Vrai
Une dernière étude fait état de 47 %. Officieusement, les chiffres pourraient
atteindre les 75 %.

5 Vrai
L’être humain n’est pas une machine comme les autres. L’entreprise doit
accepter un taux minimal d’absence lié à la maladie, l’âge…

22 Vaincre l’absentéisme

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