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TRAITEMENT DES

DIARRHEES

4ème année de Pharmacie


Faculté de Médecine et de Pharmacie de
Port-au-Prince

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Docteur Florence Lescure
I) GENERALITES

- La diarrhée est caractérisée par une émission de selles liquides fréquentes (plus de


3 par jour) et abondantes (plus de 300 g par jour).
- On parle de diarrhée aigue si la diarrhée dure de quelques heures à quelques
jours : il suffit de prendre des mesures thérapeutiques simples.
- On parle de diarrhée chronique si la diarrhée dure de quelques jours à quelques
mois : nécessité de faire un diagnostic et d’adapter la thérapeutique.
- Le grand risque de la diarrhée est la déshydratation d'autant plus grave qu'elle
touche les enfants, les vieillards et les sujets malades.

On distingue :
- La diarrhée osmotique : elle est provoquée par la présence dans l'intestin de
substances entraînant un appel d'eau.

- La diarrhée sécrétoire : elle est provoquée par des pertes excessives d'eau et
d'électrolytes secondaires à la stimulation de la sécrétion et/ou à l'inhibition de
l'absorption au niveau du grêle ou du colon.

- Les diarrhées par troubles de la motricité intestinale regroupent deux


mécanismes distincts.
 En cas de ralentissement du transit, se développe une pullulation bactérienne
chronique responsable de plusieurs effets nocifs ;
 En cas d'accélération du transit, on constate une diarrhée motrice due le plus
souvent à une colopathie fonctionnelle.

- Les diarrhées par altération de la muqueuse sont provoquées par des lésions
qui peuvent aller de la destruction isolée de la bordure en brosse de la cellule
intestinale par une atteinte virale, à l'abrasion de la paroi intestinale avec
inflammation, ulcérations (entérite nécrosante et colites), en passant par l'atrophie
villositaire complète (maladie coeliaque).

Au cours des diarrhées avec colites (recto-colite hémorragique, maladie de


Crohn…), les selles sont nombreuses mais peu abondantes avec glaires, sang et
pus.

Au cours des diarrhées avec atrophie villositaire, le syndrome de malabsorption est


net avec selles graisseuses (stéatorrhée).

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DIARRHEES AIGUES D’ORIGINE INFECTIEUSE

Les diarrhées bactériennes :

1) Les diarrhées par bactéries invasives

Ces bactéries pénètrent et se multiplient dans les entérocytes (cellules intestinales),


provoquant des lésions localisées au colon qui perd ses capacités d'absorption et est
le siège d'une hypersécrétion.

On parle de dysenterie : le syndrome dysentérique comprend des douleurs


abdominales violentes, des émissions fréquentes sans matières fécales mais avec
des glaires et du sang.

Les bactéries en cause :

 Shigella => shigelloses
 Campylobacter

 Salmonelles => salmonelloses

Chez l'homme, elles sont responsables de deux grandes catégories d'infections :

1. Les fièvres typhoïde et paratyphoïde (salmonella typhi et paratyphi)


2. Les toxi-infections alimentaires

 Yersinia pseudotuberculosis et Yersinia enterocolitica

2) Les diarrhées par bactéries produisant des entérotoxines

Ces bactéries se multiplient à la surface de la muqueuse intestinale et produisent


une toxine responsable d'une hypersécrétion hydroélectrolytique.

 Vibrio cholerae => choléra


 Staphylocoques

 Escherichia coli entérotoxinogène (ETEC)

Ces bactéries prennent une place importante dans les causes des diarrhées aiguës
de l'adulte en particulier dans les diarrhées des voyageurs ("turista").

Petit rappel sur la diarrhée du voyageur  : elle est toujours d'origine infectieuse
habituellement alimentaire, bactérienne le plus souvent, parfois parasitaire, rarement
virale. Ces infections surviennent plus volontiers dans la première semaine du
voyage ; la plupart des personnes touchées ont été imprudentes et n'ont pas suivi les
règles de base (faire bouillir l’eau, faire bien cuire les aliments et éplucher les
aliments crus). Généralement, elle se caractérise par l'émission de 3 à 8 selles

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liquides par jour, avec anorexie, nausées, douleurs abdominales et pas ou peu de
fièvre. L'évolution se fait vers la guérison en 4 à 7 jours.

Les diarrhées virales :

Les gastro-entérites virales se traduisent par des douleurs abdominales, une


diarrhée, des vomissements, des maux de tête, de la fièvre.

Plusieurs groupes de virus peuvent être distingués (les Rotavirus sont responsables


de la moitié des gastro-entérites aiguës du nourrisson ; les Entérovirus…).

Les diarrhées parasitaires :

Agents responsables : Entamoeba histolytica, Lamblia, Cryptosporidium, Anguillule.

Les diarrhées mycosiques :

Agent responsable : Candida albicans.

DIARRHEES AIGUES D’ORIGINE MEDICAMENTEUSE

Les diarrhées dues aux antibiotiques :

Il existe 2 formes cliniques de sévérité variable :

 Diarrhée bénigne :
- Elle provient d’un appauvrissement de la flore colique du patient (puis prolifération
de staphylocoques dorés habituellement bien tolérés car neutralisés par la flore
intestinale normale).
- Elle débute 3 à 5 jours après le début du traitement par l’antibiotique.

 Colite pseudo-membraneuse :
- Rare mais grave.
- Elle débute généralement 4 à 9 jours après le début du traitement et peut survenir
jusqu’à 6 semaines après l’arrêt du traitement.
- Elle se caractérise par des selles liquides abondantes et verdâtres, une fièvre
modérée et des douleurs abdominales plus ou moins constantes.

Antibiotiques responsables de ces diarrhées :


- Fréquemment : céphalosporines, aminopénicillines (amoxicilline, ampicilline),
clindamycine,
- Rarement : autres pénicillines, macrolides.

Les autres médicaments responsables de diarrhées :

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De nombreux autres médicaments sont responsables de diarrhées (laxatifs, produits
à base de sorbitol, AINS, colchicine, sels de magnésium….).

II) LES MEDICAMENTS


1) Solutions de réhydratation orale (SRO)

La réhydratation orale est le traitement essentiel de toute diarrhée aigue.

Elle fait appel aux solutés de réhydratation dérivés de la formule OMS :

Pour un litre d’eau :

NaCl : 3,5 g
KCl :1,5 g
NaHCO3 : 2,5 g
glucose : 20 g

Le rythme de la réhydratation est conditionné par la perte de poids.

En cas de vomissements incoercibles ou de signes de déshydratation profonde, la


voie parentérale est obligatoire avec des solutés de réhydratation du type Ringer
lactate ou glucose + électrolytes.

2) Ralentisseurs du transit intestinal

Attention à ne pas administrer ces médicaments en cas de diarrhée


microbienne car la stase intestinale favorise l’invasion bactérienne et retarde
l’élimination des micro-organismes. Administration également déconseillée en
cas de diarrhées survenant sous traitement antibiotique.

- Lopéramide :

Antidiarrhéique opiacé, sans effet sur le SNC aux doses thérapeutiques.

Efftes indésirables : constipation, rashs cutanés…

Contre-indications : rectocolites hémorragiques, colite pseudo-membraneuse post


antibiotique, enfants de moins de 2 ans pour la solution et 8 ans pour les
comprimés).

Interactions médicamenteuses : aminosides per os (résorption digestive accrue).

Posologies : un comprimé à 2 mg après chaque selle, jusqu’à 8 par jour.

- Diphénoxylate :

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Antidiarrhéique opiacé (associé avec de l’atropine).

Effets indésirables : somnolence, constipation, bouche sèche, mydriase, prurit…

Contre-indications : rectocolites hémorragiques, colite pseudo-membraneuse post


antibiotique, enfants de moins de 6 ans, risque de glaucome par fermeture de
l’angle, risque de rétention urinaire, grossesse et allaitement.

Interactions médicamenteuses : alcool, médicaments sédatifs, aminosides per os


(résorption digestive accrue).

Posologies : 1 à 2 comprimés à 2,5 mg à la première selle et un comprimé après


chaque selle supplémentaire, jusqu’à 8 par jour.

3) Antisécrétoires intestinaux 

- Racécadotril (ex-acétorphan) :

Inhibiteur de l’enképhalinase, enzyme responsable de la dégradation des


enképhalines qui ont un rôle dans la régulation de la motricité digestive et les
échanges hydro-électrolytiques => diminution de la sécrétion d’eau et d’électrolytes
sans modifications du transit intestinal.

Efftes indésirables : rares cas de somnolence.

Posologies : 100 mg 3 fois par jour avant les repas (ne pas dépasser 7 jours de
traitement).

4) Produits d’origine microbienne (probiotiques)

- Flores levuriques : Saccharomyces boulardii


Levures non pathogènes, résistantes aux antibiotiques qui apporteraient des
enzymes, des acides aminés et des vitamines du groupe B et qui inhiberaient la
croissance des Candida Albicans et d’autres germes pathogènes.

- Flores bactériennes : Lactobacillus casei, Lactobacillus acidophilus


Micro-organismes non pathogènes, résistantes aux antibiotiques qui stimulent la
régénération de la flore intestinale.

Indications : prévention des diarrhées induites par les antibiotiques, traitement des
diarrhées.

5) Adsorbants antidiarrhéiques

- Les silicates ou argiles naturelles (silicate d’aluminium ou kaolin, silicate


d’aluminium et de magnésium ou attapulgite ou montmorillonite bedellitique ou
smectite) adsorbent l’eau, les gaz et fixent les toxines microbiennes.

Indications : traitement des colopathies fonctionnelles en particulier avec météorisme


et diarrhées.

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- La pectine et le charbon sont également utilisés.
- Toujours prendre les adsorbants à distance des autres médicaments.

6) Antiseptiques intestinaux

- Nitrofuranes intestinaux : nifuroxazide, nifurzide


Antibactériens de la famille des nitrofuranes (altérant l’ADN bactérien) peu résorbé
per os et ayant une action bactériostatique.

Posologies :
Adulte : 800 mg/j en 2 à 4 prises
Enfant (de plus de 6 ans) : 600 à 800 mg/j en 2 à 4 prises
Durée maximale de traitement : 7 jours

- Sulfaguanidine :
Sulfamide antibactérien peu résorbé per os et ayant une action bactériostatique.

- Hydroxyquinoléïnes méthylées : tilbroquinol, tiliquinol


Antiseptiques intestinaux dérivés de l’hydroxy-8-quinoléïne ayant une action
amoebicide de contact, une action antibactérienne sur la majorité des germes
intestinaux pathogènes et une action antifongique intestinale sur Candida albicans.

7) Antibiotiques intestinaux

- Colistine :
Antibiotique polypeptidique peu résorbé per os et ayant une action bactéricide.

Effets indésirables : troubles digestifs, neurotoxicité et néphrotoxicité rares.

Posologies :
Adulte : 150 000 UI/kg/j en 3 à 4 prises
Enfant : 250 000 UI/kg/j en 3 à 4 prises
Durée maximale de traitement : 7 jours

- Autres antibiotiques :

- Fluoroquinolones (Ciprofloxacine, Péfloxacine, Ofloxacine, Norfloxacine…)


- Céphalosporines (si contre-indications aux fluoroquinolones)
- Chloramphénicol (traitement de choix des fièvres typhoïdes et
paratyphoïdes)
- Vancomycine (pour colites pseudo-membraneuse suite à une
antibiothérapie)
- Métronidazole (pour diarrhées survenant à la suite d’une antibiothérapie ou
diarrhées parasitaires)
- Triméthoprime/Sulfaméthoxasole

Mesures hygiéno-diététiques à prendre en parallèle  :

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- Arrêter le lait,
- Boire de façon abondante et répétée,
- Alimentation à base de riz, carottes…

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