LE SANG
2021-2022
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I .Généralités sur le sang
Le sang est un tissu conjonctif (seul tissu à être liquide) plus dense que l’eau, visqueux,
légèrement alcalin (7,35 < pH < 7,45), opaque, dont la couleur varie suivant la teneur en O2,
chaud (38 °C), légèrement salé et métallique. Volume total = 5 litres = 8 % du poids corporel.
Circule dans les vaisseaux sanguins vers tous les tissus du corps grâce aux contractions
cardiaques. Le sang est composé de plasma (phase liquide, 55 %) et de cellules (éléments
figurés du sang, 45 %) (Tableau I).
LE SANG
Plasma Eléments figurés du sang
Eau et électrolytes, lipides, sucres Les globules rouges (GR (hémoglobine)),
Facteurs de la coagulation Les globules blancs (GB),
Sérum (glycoprotéines, métalloprotéines, plaquettes
lipoprotéines……)
LE SERUM
Albumine (55-60 %) ;
α1-globulines (3-5 %) => cette fraction comprend : l'alpha-1-antitrypsine (AAT) (12 % de
glucides) et l’alpha-1-glycoprotéine = Orosmucoïde (40 % de glucides) ;
α2-globulines (5-9 %) => cette fraction comprend : l’α2- macroglobuline : 7,5 % de
glucides, l’haptoglobine : 18,6 % de glucides et la céruloplasmine: 0,3 % de cuivre ;
ß- globulines (1 et 2) (9-14 %) %) => cette fraction comprend : l’hémopexine et la
transferrine pour les ß- globulines 1 et le complément (C3) et les IgA pour les ß- globulines
2;
ɣ-globulines (12-20 %) => cette fraction comprend : les IgG, IgM, IgD, IgA et IgE.
NB : l’hémopexine : est une glycoprotéine sanguine dont le rôle est de se lier aux molécules hèmes
issues de la dégradation de l'hémoglobine.
Remarque :
Le sérum est le liquide séparé à la coagulation spontanée du sang (sans présence
d’anticoagulant).
Le plasma a une composition voisine mais en présence d’anticoagulant il contient en
plus le fibrinogène et les facteurs de la coagulation (Figure 1).
-après une séparation du sang total à fiable vitesse de centrifugation (200 g pendant 10
minutes) on obtient un plasma riche en plaquette, à forte vitesse de centrifugation (2000 g
pendant 10 minutes) on obtient les hématies, les leucocytes, les plaquettes et un plasma
pauvre en plaquette.
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sang
+ anticoagulant
Hème globine
NB : Les Ag présents sur les GR support de l’individualité biologique (Système ABO, HLA).
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1.2. Les protéines plasmatiques
À la différence des autres constituants qui sont dissous dans le plasma, les protéines
sont dissous sous formes d’une dispersion colloïdale dans le plasma. Comme elles sont les
plus volumineux constituants du plasma, elles ne passent pas à travers les pores de la paroi
des capillaires ordinaire vers le liquide interstitiel. Les protéines plasmatiques exercent une
pression osmotique colloïdale à l’intérieur du système circulatoire participant à la régulation
des échanges liquidiens entre le plasma et le milieu extracellulaire, empêchant ainsi la fuite du
plasma hors des capillaires et contribuant ainsi à la conservation du volume plasmatique.
Elles sont partiellement responsables du pouvoir tampon du plasma qui s’oppose aux
changements de pH;
Certaines d’entre elles se lient à des substances insolubles dans le plasma (hormones,
cholestérol, fer…..) ;
La plupart des facteurs qui interviennent dans la coagulation du sang sont des protéines
plasmatiques ;
De nombreuses protéines plasmatique sont sous forme de précurseurs inactifs dans le
plasma et sont activés en cas de besoin par des stimuli spécifiques (exemple :
l’angiotensinogène est activé en angiotensine, une hormone essentielle pour l’équilibre hydro-
électrolytique de l’organisme.
Le tableau si dessous résume les principales protéines plasmatiques leur caractéristiques
physicochimiques ainsi que leurs fonctions biologiques.
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Tableau III : Les protéines sériques du sang
(Environ 200 protéines identifiées, 70 sont obtenues dans un état de pureté élevé)
Les ≠ protéines Caractéristiques physico-chimiques Activités biologiques
-PM=62 000Da ; 4S\U ; -rôle clé : transport de la vitA ;
Pré-albumine -0,5%de la protéinémie (25-35mg\dl) ; -marqueur de l’état nutritionnel -->
-niveau de migr.électroph. le plus élevé. Taux ↓dans les états de malnutrition
-69 000 Da (585aa) ; 1seule chaine -principal agent de la pression oncotique ;
polypeptidique ; 50-60 des protéines totales ; -sert de protéine de transport pour de
-taux normal : 40-50g\l. nombreuses molécules insolubles dans l’eau
albumine (bilirubine, Acide gras, médicament….).
-association de protéines spécifiques -rôle de transport de TG et du cholestérol
(apoprotéine A, B, C, D et E) et de substances dans l’organisme ;
lipidiques (cholestérol estérifié ou non, -augmentation de taux dans le sang --
Lipoprotéines (LP) triglycérides et phospholipides) ; >facteur de risque des maladies
--> chylomicrons, VLDL, LDL, HDL. cardiovasculaires.
-1 chaine polyp. De 130 000Da (1000aa) -enzyme du groupe des oxydases auquel le
Céruloplasmine ou α- contenant 9% de glucides ; cuivre sert de cofacteur
-couleur bleue due à sa haute teneur en cuivre (concentration varie de 270 à 500 mg\l)
2-glycoprotéine (8 atomes\molécules).
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Figure 2 : Electrophorèse des protéines sériques
γ2
γ1 Ig (1,4g)
fibrinogène (0,4 g)
β2 β globuline (1,0g)
β1
α2 α globuline (1,0g)
α1
+ albumine (4,3g)
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II. L’hémoglobine structure et fonction
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Figure 4: Structure 3 D de la myoglobine de cachalot par diffraction X
(a) (b)
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2. Anatomie d’une sous-unité d’hémoglobine
Une même géométrie d’ensemble est retrouvée dans toutes les hémoglobines : 75 % de
la molécule est sous forme d’hélices α, arrangement classique de la structure secondaire d’une
protéine où chaque tour de spire comporte un peu plus de trois résidus d’acides aminés. Chez
les vertébrés, dans chaque sous-unité d’Hb, on distingue, en allant de l’extrémité N-terminale
vers l’extrémité C-terminale, huit segments hélicoïdaux, désignés par une lettre de A à H, et
des zones inter-hélicoïdales portant le nom des deux hélices qui leur sont adjacentes. À
l’intérieur de chacun de ces segments, les résidus sont numérotés d’après leur position (Figure
5a). Cette nomenclature est commune à toutes les hémoglobines, quelle que soit l’espèce dont
elles sont issues. Elle permet de comparer point par point la structure des hémoglobines de
différentes origines. Ainsi, le 8ème résidu de l’hélice F (F8) est toujours une His liée au fer de
l’hème. Les huit hélices, repliées sur elles-mêmes, réalisent une structure globulaire compacte
avec, près de la surface, une poche hydrophobe où est enfouie la molécule d’hème. La surface
externe de la sous-unité est tapissée par les chaînes latérales de résidus hydrophiles facilitant
les interactions avec le milieu aqueux ambiant. Les régions internes sont au contraire
essentiellement occupées par des résidus hydrophobes, qui, en échangeant entre eux un très
grand nombre de liaisons de faible énergie, stabilisent l’édifice moléculaire. La cavité où est
enfouie la molécule d’hème a la forme d’un «V» dont l’ouverture est partiellement occupée
par l’hélice C et le segment CD, le plancher est formé par les hélices B G et H, et les parois
par les hélices E et F. L’hème échange une soixantaine de liaisons de faible énergie avec les
groupements latéraux des résidus qui l’entourent.
Hb A (α2-β2) : 97 %
Hb A2 hémoglobine mineure (α2-δ2) : dont la synthèse débute dans la période néonatale et
qui restera par la suite à un taux faible < 5 %
HbF : <1 %
NB : δ très peu différente de β
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4. Structure de l’hémoglobine
Chez l’homme, on distingue des sous-unités de type α, longues de 141 résidus d’acides
aminés, qui ont une Arg en position C-terminale et dont la synthèse est sous le contrôle de
gènes localisés sur le chromosome 16, et des sous-unités de type β qui possèdent 146 résidus,
se terminent par une His et sont sous la dépendance de gènes portés par le chromosome 11.
Deux sous-unités α s’associent donc à deux sous-unités de type β selon une symétrie
tétraédrique pour former la molécule d’hémoglobine (figure 6). Dans la structure
tétramérique, les dimères sont disposés de façon à ce que la sous-unité α1 soit au contact de la
sous-unité β1 et α2 de β2. La disposition des chaînes est telle que des rapports très intriqués
existent entre chaînes latérales de résidus appartenant aux sous-unités non homologues. À
l’inverse, il n’existe qu’un très petit nombre de contacts entre sous-unités identiques (liaison
faible).
L’oxygénation de l’Hb s’accompagne d’un déplacement des S \U. Son PM est de 64 500
Da (64,5 kDa).
Selon la théorie allostérique, formulée par MONOD, WYMAN et CHANGEUX en 1965
l’hémoglobine serait en équilibre, à chaque pression partielle en oxygène, entre une forme de
forte affinité, dite R, et une forme de faible affinité, dite T.
Figure 6 : Molécule d’hémoglobine avec deux chaînes alpha et deux chaînes bêta maintenues
par des interactions non covalentes. Chaque chaîne possède un hème et un site de liaison de
l’O2
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Je retiens :
L’hémoglobine (Hb)
La myoglobine (Mb)
La myoglobine est constituée d’une seule chaîne polypeptidique de 153 acides aminés
et de masse 18 Kda;
La synthèse de la myoglobine a lieu dans toutes les cellules musculaires;
La myoglobine constitue 1 à 2 % du poids total des muscles squelettiques.
La concentration sanguine physiologique de la myoglobine est faible, plus élevée chez
l’homme (16–96 μg l–1) que chez la femme (9–82 μg l–1);
La myoglobine est une protéine spécifique des muscles du squelette et du myocarde
qui intervient dans leur oxygénation.
Elle a une très forte affinité pour l’oxygène à 37 °C; supérieure à celle de
l’hémoglobine, permettant un transfert aisé de l’hémoglobine à la myoglobine et ainsi
une fourniture au système mitochondrial au cours du travail musculaire.
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Tableau IV : Les différentes caractéristiques biochimiques entre l’hémoglobine et la
myoglobine
Fixation \libération O2
Courbe type sigmoïdal Courbe type hyperbolique
Faible affinité au début affinité élevée pour O2
Hb libère 25 % d’O2 Mb libère 10 % O2
Effecteurs
(O2, H+, CO2, Cl-, 2,3DPG)
Diminuent l’affinité de Hb pour O2 Pas d’effets sur Mb
NB : L’O2 est un effecteur régulateur (enzymes allostériques)
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5. La molécule de l’hème sous ces différents états
Par la nature et la disposition de ses groupements latéraux, la molécule d’hème est définie
comme une ferro-protoporphyrine de type IX. L’atome de fer situé en son centre est sous
forme réduite (Fe2+ ferreux) aussi bien dans l’hémoglobine oxygénée (HbO2) et la
carboxyhémoglobine (HbCO) que dans l’hémoglobine désoxygénée (désoxyHb). La forme
oxydée (Fe3+ ferrique) est impropre au transport de l’oxygène ; elle est caractéristique de la
méthémoglobine (metHb). Dans cette forme, l’atome de fer est lié sur sa face distale à un
groupe hydroxyl (OH). Les hémichromes sont une autre forme d’oxydation où le fer ferrique
est directement lié à un résidu de la face distale : cette structure est génératrice de radicaux
libres dangereux pour la membrane érythrocytaire, partiellement responsables des
complications hémolytiques observées chez les patients porteurs d’hémoglobines instables ou
thalassémiques. Dans l’HbO2, l’atome de fer présente six liaisons de coordinence : quatre
interviennent dans la structure de l’hème, la cinquième amarre l’hème à la globine au niveau
de l’His F8 (dite « histidine proximale ») et la sixième fixe la molécule d’oxygène entre l’His
E7 (dite « histidine distale ») et la Val E11. Dans la désoxyHb, l’atome de fer, plus
volumineux que dans l’HbO2, est pentacoordonné. Ces différentes formes de ligation sont
représentées dans la figure suivante
L’atome de fer est sous forme (Fe2+) dans la désoxyHb, l’HbO2 et l’HbCO. En revanche il est
sous forme (Fe3+) dans la metHb et les hémichromes. Des ligands différents sont complexés
au fer dans les quelques structures représentées.
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5.1. Structure de la molécule de l’hème
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6- L’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène
L’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène est caractérisée par une quantité P 50 qui est la
pression partielle (pO2) à laquelle 50 % des sites sont occupés (y=0,5). Une valeur faible de
P50 traduit une forte affinité de l’hémoglobine pour l’O2.
Au niveau des alvéoles pulmonaires, les hémoglobines fixent le dioxygène. Cette fixation
est favorisée par une pO2 élevée (environ 100 mmHg) l’Hb est totalement saturée, elle se
charge d’O2 et le transporte jusqu’aux tissus. Dans les zones où la pO2 est plus basse, aux
niveaux des tissus (pO2 de 30 mmHg), l’Hb libère son O2. Ainsi, les hémoglobines
parviennent à fournir le dioxygène nécessaire au métabolisme cellulaire. En revanche, à la
même pression, la myoglobine est capable de le capter pour le stocker, puis de le restituer
lors d’efforts musculaires soutenus.
La myoglobine présente une courbe hyperbolique de type Méchalienne. Elle traduit une
simple association réversible de l’hème et de l’oxygène.
La fixation de l’O2 par l’Hb est une sigmoïde elle traduit un phénomène de coopérativité
positive homotropique (sites identique) entre les 4 S/U.
La structure quaternaire en quatre sous-unités (tétramèrique) de l’Hb favorise la prise en
charge et la délivrance du dioxygène. En effet, les globines isolées sont rapidement saturées à
cause de leur grande affinité pour l'O2, mais elles le libèrent plus difficilement aux plus basses
pressions.
La fonction de transport de l’O2 par l'hémoglobine est affectée par d'autres facteurs
comme la température, le pH ou le 2,3 diphosphoglycérate (2,3 DPG).
Remarque : le DPG est un intermédiaire de la voie de la glycolyse qui est séquestré dans les
globules rouges et qui se fixe spécifiquement sur la désoxyhémoglobine, favorisant de ce fait
la libération de l’oxygène.
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7. Les hémoglobines instables
L’hémoglobines instables ce sont des hémoglobines qui ont tendance à former des
précipités qui s’attache à la surface interne du globule rouge et sont cause d’hémolyse. Cette
instabilité est due à plusieurs mécanismes :
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8. Les hémoglobinopathies
On distingue deux grands groupes d’hémoglobinopathies :
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Conclusion
L’étude des quelques 800 mutants de l’hémoglobine humaine aujourd’hui connus nous
montre que le changement d’un seul résidu suffit souvent à changer drastiquement la fonction
de la molécule. Parfois, des modifications post-traductionnelles inattendues viennent encore
compliquer le tableau. L’étude de la protéine, de sa structure, de sa fonction et de son
expression phénotype sont donc autant d’étapes incontournables dans la compréhension de
cette protéine aux multiples facettes.
L’expression de ses gènes par les techniques de la biologie moléculaire, la création de
variants par mutagenèse dirigée et leur expression dans des systèmes acellulaires et cellulaires
vont sans doute être les outils de demain pour encore mieux connaître ce chapitre de
l’évolution dans un domaine essentiel de la physiologie.
L’hémoglobine est certainement l’une des protéines actuellement les mieux connues. Si,
autrefois, on pouvait se contenter d’une image figée obtenue par diffraction de rayons X à
partir d’un cristal, l’introduction de la dynamique moléculaire, alliée aux progrès de
l’informatique et des techniques biophysiques, permet aujourd’hui de suivre d’une façon
continue le mouvement de chaque atome de la molécule lors de la transition RT. Un nombre
considérable de structures intermédiaires sont ainsi individualisées. Le modèle de MWC
permet certes une description simplifiée de la fonction oxyphorique, mais il n’apporte pas
toutes les réponses. Chez l’homme, les hémoglobines assurent-elles d’autres fonctions que le
transport d’oxygène ? Deux familles supplémentaires d’hémoglobines ont été décrites chez les
vertébrés : la neuroglobine et la cytoglobine. Il s’agit de molécules hexacoordonnées, à très
forte affinité pour l’oxygène. La neuroglobine, déjà présente dans le tube neural de multiples
espèces primitives, pourrait servir de réserve d’oxygène protégeant l’activité nerveuse. Dans
le cerveau humain, la neuroglobine est essentiellement localisée dans le noyau sub
thalamique, le thalamus et le lobe frontal. On la retrouve également, à plus faible
concentration, dans d’autres tissus comme l’hypophyse, l’appendice, le côlon ou le poumon.
Quelle est sa fonction ? S’agit-il d’un transporteur d’oxygène ou plutôt d’une molécule
assurant un rôle protecteur contre les agents oxydants ? La cytoglobine est d’apparition plus
récente, puisqu’elle semble avoir divergé de la myoglobine. Elle est distribuée dans une
grande variété de tissus, à l’exception du cerveau, où elle exerce une fonction encore mal
connue !.
Le chapitre des hémoglobines n’est certainement pas encore clos et les progrès apportés
par la mutagenèse dirigée dans la compréhension des relations entre structure et fonction
permettront peut-être un jour de voir le développement de transporteurs artificiels d’oxygène
d’origine hémoglobinique à visée transfusionnelle.
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