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6.

01 Principes
d'apologétique
MISSION DE LA FACULTÉ JEAN CALVIN

Vision, mission
Glorifier le Dieu trinitaire, telle est la raison d’etre de la Faculte. Perspectives de la
Elle a pour tache de promouvoir le regne du Seigneur sur la théologie de la
creation toute entiere en se mettant au service de l’Eglise dont la Faculté Jean Calvin
vocation est de faire des disciples de toutes les nations et de les
conduire a reconnaitre le Christ, Seigneur et Sauveur. Cette 1. L'autorité de la Bible
vocation eclaire la mission et la strategie de la Faculte. Nous croyons que l'Ecriture Sainte
est toute entiere inspiree de Dieu
La mission de la Faculte s’articule autour des quatre objectifs pour nous faire connaitre Jesus-
suivants : Christ et qu'elle est ainsi "la regle
tres certaine de notre foi". Toute
affirmation provenant d'une Eglise
Le rayonnement de la foi chretienne en vue du renouveau de l’Eglise en ou d'une parole humaine doit etre
encourageant le developpement de communautes vivantes. examinee a la lumiere de la Bible.

La formation en vue du ministere pastoral reconnu et ordonne. Il s’agit de 2. Les Confessions de foi
pre- parer des pasteurs qui aiment la foi chretienne telle qu’elle est resumee
dans les textes symboliques de la Reforme, en particulier dans la Confession
réformées
de foi de La Rochelle. L’’adhesion a ce texte implique le desir de propager et Nous croyons que ces confessions
defendre le depot apostolique dans son authenticite, sa simplicite et sa ont fidelement exprime la
substance de la verite biblique.
plenitude.
N'etant pas parfaites, elles n'ont
pas d'autorite absolue dans l'Eglise,
La formation biblique et theologique de ceux qui, n’ayant pas une l'Ecriture seule constituant le traite
vocation pastorale, desirent neanmoins servir le Seigneur et l’Eglise de telle d'alliance entre Dieu et son peuple.
sorte que l’ensemble du corps du Christ soit enrichi par leur service. Elles servent l'Eglise en exprimant
le mieux possible les conditions de
La recherche theologique et la diffusion de travaux qui edifient l’Eglise et cette alliance acceptee par la foi.
manifestent une presence chretienne au sein de la societe civile.
3. L'Eglise de Jésus-Christ
La structure fondamentale de
STRATÉGIE contemporains issus de milieux l'Eglise dans le monde ne doit pas
culturels, sociaux et ethniques etre definie de maniere prag-
La Faculte poursuit les objectifs differents ; matique ou selon les exigences
suivants : - concevoir des formes de ministeres d'une situation. L'Eglise, gar-
Propager la foi chretienne protes- adaptees a ces contextes ; dienne de l'evangile, est elle-
tante, calviniste et evangelique : - s’interesser aux questions meme etablie par celui-ci. Elle est
- fondee sur l’inspiration, l’autorite et la d’actualite et transmettre sans une evidence de la reconciliation
veracite de l’Ecriture sans sacrifier la compromis l’Evangile dans le accomplie en Christ. La Bible n'est
rigueur intellectuelle et universitaire ; langage contemporain. pas muette au sujet de l'Eglise et,
- comprise dans la triple perspective Privilegier des relations avec des pour cette raison, la Faculte
theologique : biblique, doctrinale et institutions sœurs qui partagent la veillera a developper une theologie
historique ; meme conviction. du peuple de Dieu.
- en debat avec les courants de pensee Contribuer a l’echange theologique
qui forgent la pensee contemporaine. avec des chercheurs qui se rattachent 4. La Mission
Etre au service de toutes les Eglises a d’autres confessions et Le commandement du Seigneur
Protestantes et les inciter a comprendre, denominations chretiennes. ordonne a l'Eglise de repandre la
a enseigner et a mettre en pratique la Recruter des etudiants de France et gloire eschatologique de Dieu.
parole de verite et de vie. de la francophonie (Europe, Afrique, Parmi les nations, par le culte,
Mettre en œuvre une pedagogie qui Amerique du Nord...) en particulier, l'evangelisation, l'enseignement et
integre l’etude et la piete, la foi et leur proposer une formation adaptee, le ministere de la misericorde. La
l’action, la formation intellectuelle et les inciter et les aider a trou- ver un theologie doit encourager cette
professionnelle. soutien spirituel et materiel. mission en exhortant l'Eglise et les
Former des ministres-theologiens Offrir aux pasteurs et autres chret iens a manifes- ter la
culturellement sensibles et capables de : ministres une formation continue qui seigneurie de Jesus dans tous les
- proclamer, dans un esprit de les stimule a renouveler, dans la domaines de la vie des hommes,
reconciliation, la parole vivante et fidelite, le ministere qu’ils exercent afin qu'ils croient en lui, le servent
efficace de Dieu, a nos dans l’Eglise ou dans une œuvre. et soient sauves.
CONTENU
DESCRIPTION DU PROGRAMME D’APOLOGÉTIQUE
1

PETIT GLOSSAIRE D'APOLOGÉTIQUE


9

SYLLABUS DE COURS
17

23
SESSION 1. INTRODUCTION AU COURS
31
SESSION 2. DÉFINITION(S) DE L’APOLOGÉTIQUE

SESSION 3. FONDEMENT THÉOLOGIQUE DE L’APOLOGÉTIQUE


53

TURNER, « VAN TIL ET ROMAINS 1.18-21 »


79

SESSION 4. L'APOLOGÉTIQUE CLASSIQUE


89

109
SESSION 5. L'APOLOGÉTIQUE ÉVIDENTIELLE
125
SESSION 6. UNE APOLOGÉTIQUE REFORMÉE (1)
141
TEXTE « QUE SONT LES PRÉSUPPOSÉS ? »

NANCY PEARCEY, « QU'EST-CE QU'UNE VISION DU MONDE ? »


145

SESSION 7. UNE APOLOGÉTIQUE REFORMÉE (2)


159

SESSION 8. LES ARGUMENTS POUR LA FOI


173

SESSION 9. QUESTIONS ET OBJECTIONS.


187

SESSION 10. ÉTUDE DE DÉBAT : THE GOD DELUSION DEBATE


197

SESSION 11. DIALOGUES APOLOGÉTIQUES


213

EXEMPLE DE DEVOIR À RENDRE


225

SESSION 12. CONCLUSION DU COURS


239

ARGUMENTS APOLOGÉTIQUES
251
Description du programme d’apologétique
Professeur : Yannick Imbert

L’apologétique cherche a nous aider à présenter, a expliquer et a défendre notre foi,


en paroles et en actes, et ce dans tous les domaines de notre vie. C’est la définition sommaire
de l’apologetique qui nous accompagnera dans tous les cours d’apologetique donnes a la Fa-
culté Jean Calvin. Cependant l’apologetique est un domaine très large qui touche de
nombreux domaines. Les étudiants inscrits a la Faculté Jean Calvin ont la possibilité de suivre
six cours d’apologetique qui leur donneront une vue globale de ce qu’est la défense de la foi
chrétienne. C’est cette dimension complète et compréhensive qui fait du programme
d’apologetique que vous allez suivre le cursus d’apologétique le plus complet en théologie
protestante francophone.

Présentation des cours

6.01 Introduction à l’apologétique

Dans ce cours, nous nous intéresserons au fondement biblique de l’apologétique, mais plus
encore, a la manière dont nous pouvons pratiquer la défense de la foi. Nous considérerons
plusieurs types d’apologetique pour nous arrêter sur une approche réformée. Nous ferons
aussi plusieurs exercices pratiques et analyserons ensemble plusieurs types d’arguments,
les objections a la foi chrétienne et des débats apologétiques.

6.02 La mission chrétienne

Les objectifs de ce cours sont de fonder et de définir la mission chrétienne sur une
approche fondamentalement biblique. Les grandes questions de la missiologie actuelle
seront abordées, comme par exemple la mission urbaine, la contextualisation, le lien entre
action sociale et évangélisation, ou la place de l’Église locale dans la mission

6.03 Sciences et foi

Le cours s’interessera aux questions théologiques et philosophiques afin de donner un


cadre plus précis a la notre réflexion. La promotion d’une foi investie dans le domaine
scientifique, une sensibilité aux merveilles scientifiques découvertes dans un monde créé
par Dieu, et la promotion d’un dialogue entre foi et science sont les buts de ce cours.

6.04 Art, culture et foi

Dans ce cours, nous essaierons ensemble de déterminer ce qui fait la culture contemporaine
et comment interagir avec celle(s). Nous nous poserons la question de savoir ce qu’est la
culture, mais aussi la manière dont nous pouvons interagir avec cette dernière. Nous nous
intéresserons ensuite a l’apologetique culturelle et a son importance dans le domaine
artistique.

1
6.06 Religions du monde

Dans un age de retour du religieux et des spiritualités, il est nécessaire de donner les outils a
une saine interaction envers les religions et/ou spiritualités de nos contemporains. Dans ce
cours, une grande place sera donnée a l'Islam et au bouddhisme.

6.07 La société contemporaine

Ce cours n’est pas un cours de philosophie au sens strict du terme. Son objectif est de
présenter l’evolution de la pensée et de la société jusqu’a la construction du monde
postmoderne. Notre point de départ sera la philosophie grecque, a partir de laquelle nous
progresserons en trois directions : la disparition de Dieu ; le sujet humain ; la société
contemporaine.

Les domaines étudiés dans ces six cours ont un seul et même objectif : apprendre a rendre
compte de notre foi et de notre espérance (1 Pierre 3.15) dans tous les domaines de notre vie. Nous
essaierons, après le premier cours, d’utiliser la méthode apologétique choisie dans tous les autres
domaines.

Théologie, ministère, et vie spirituelle

Les études entreprises a la Faculté Jean Calvin ne se limitent pas a une formation académique
mais elles sont un exercice théologique, biblique et donc spirituel. Dans vos études d'apologetique,
vous allez être encourages non seulement a mieux comprendre les domaines qui font l'objet des
cours, mais aussi a vous conformer toujours plus au parfait et suprême témoin, Christ lui-même.
Avec cette image toujours a l'esprit, nous devrons – professeur y compris – aborder nos cours ainsi :

- nous manifesterons un amour profond et toujours plus grand pour le Dieu trinitaire, pour
sa Parole, sa vérité et son Église, ainsi que l’humilité de Christ dans notre relation avec
les autres.
- nous manifesterons un désir de comprendre le monde dans lequel nous vivons afin
de témoigner de la grâce reçue en Christ avec toujours plus de pertinence .

Il ne faut cependant pas oublier que les cours suivis sont des cours de niveau universitaire. À la
dimension théologique et spirituelle se joint un sérieux tout aussi important et nécessaire. Dans cette
perspective il est attendu de vous :

- que vous démontriez non seulement une compréhension et une articulation de la


pensée biblique et la théologie réformée, mais aussi votre capacité a l’expliquer et a en rendre
compte de manière apologétique.

- vous demontriez aussi une capacité à discerner la vision du monde de nos contemporains
ainsi que les limites et les contradictions des visions philosophiques, scientifiques, etc.,
auxquelles vous serez confrontes.

Le cours comme apprentissage incarné

2
Le suivi des cours d’apologetique met en evidence trois elements fondamentaux de notre
apprentissage commun :

 apprendre : le cours est, en partie, un apprentissage. Il se fait parfois de maniere


magistrale, mais aussi a travers les lectures et les interactions entre professeur(s) et
etudiants. Cet apprentissage est un element pivot de votre progression apologetique et
theologique. L’approfondissement et la qualite de votre apprentissage rendra en effet plus
facile et plus evident la dimension d’edification presente dans vos cours.

 rendre compte de ce qui est appris : cette dimension est cruciale a une demarche
d’integration du cours. Il ne s’agit pas seulement d’apprendre pour le seul but de valider le
cours. Les cours proposes sont importants pour votre service de l’ É g l i s e , e n q u e l q u e
qualite que ce soit. Il est donc crucial de pouvoir faire votre ces cours.

 appliquer ce qui a ete appris : c’est ici que la dimension edifiante, pour la foi et la vie
chretienne – ainsi que pour votre ministere et votre apologetique – deviendra manifeste.
Ainsi, les cours, surtout dans leur integralite de six semestres, deviendront un
apprentissage incarne.

Il est important que l’etudiant prenne conscience de ce triple chemin entreprit dans le cours
d’apologetique. En effet, ce sont ces memes elements qui sont attendus dans sa participation en
classe, ainsi que dans ses travaux (ecrits et/ou oraux) et dans ses examens.

Six cours, en progression

Bien sûr, ces objectifs sembleront peut-etre tres lointains ou assez redoutables. C'est pour
cela que ces derniers s'inscrivent dans une progression faite au fur et a mesure des annees
passees a la Faculte Jean Calvin. Au cours de ses trois annees de cours d’apologetique, il est
aussi attendu que vous puissiez progresser dans la qualite de votre exposition ecrite et orale.
Cette progression prend en compte plusieurs dimensions.

 Le contenu explicite de ce qui est écrit ou rapporté. Vos devoirs, votre interaction
en cours, et vos examens devront demontrer une comprehension en profondeur des points
etudies en cours, une utilisation appropriee de ces derniers, et leur mise en œuvre correcte.
Ainsi, les idees exprimees seront bien expliquees et presentees, et soutenues par de
nombreuses references explicites au contenu du cours ainsi qu'aux lectures. Attention, les
exemples personnels ont leur place, mais ce ne sont pas des arguments.

 La capacité à synthétiser la pensée. Au fur et a mesure de vos cours, de vos


lectures, et de vos travaux ecrits, vous apprendrez aussi, en partie par vous-memes, a
developper une meilleure synthese de votre lecture mais aussi de votre propre pensee
theologique.

 L’articulation de la pensée. Il est impossible a quiconque, que ce soit votre


professeur, le croyant qui ecoute votre predication ou le non chretien qui ecoute votre
conference ou meme votre temoignage, de deviner ce que vous voulez dire. La seule chose
que nous avons pour nous comprendre, ce sont les mots et les idees que nous exprimons.
Ainsi, vous veillerez a toujours mieux communiquer votre pensee. La clarte, la coherence
et la syntaxe sont les trois domaines qui devront faire l’objet de votre attention particuliere.

 La construction théologie et l’évaluation critique personnels. Le dernier domaine


d’apprentissage, et probablement le plus important en fin de cursus, est le developpement
3
de votre propre theologie et la capacite que vous aurez a evaluer des ouvrages
theologiques, apologetiques ou philosophiques.

Les moyens de cette progression dans ces deux domaines sont multiples :

 Une bonne ecriture est la consequence d’une bonne lecture. La qualite de ce que nous
ecrivons est souvent le reflet de la qualite de ce que nous lisons. Cette observation vous
encouragera a choisir avec discernement vos lectures theologiques.

 Les exemples donnes lors des cours de methodologie en debut de premiere et/ou
deuxieme annee. Ces cours de methodologie sont obligatoires. Mais ils pourront aussi faire
l’objet de votre attention renouvelee. Il ne faudra pas hesiter, surtout au cours de la premiere
annee, a retourner vers ces cours de methodologie.

 Enfin, certains exemples donnes en cours pourront vous aider a progresser dans les
domaines mentionnes ci-dessus.

Devoirs écrits

Chaque cours exige que vous redigiez un, ou plusieurs, devoir ecrit. Les modalites precises de
ces devoirs seront indiquees dans le syllabus de cours. Le format des devoirs (dont la longueur
pourra changer) sera constamment le suivant : interligne 1,5 ; police Times New Roman ; taille 12.
Vos titres n’excederont pas la taille de police 14. Seule cette mise en forme sera acceptee. Vous
devez aussi enregistrer votre document ainsi (avec le code du cours et votre nom). Par exemple :
6.01 NOM_Devoir.doc

Attention seul le format doc ou odt est accepte. Pas de pdf ou de docx ! Un point sera enleve a la
note du devoir pour non respect de ces regles.

Le respect des consignes d’ecriture, y compris de format, est important. C’est un apprentissage
qui servira lorsque l’etudiant, au cours de son ministere, devra suivre des regles d’ecriture afin de
publier des articles ou memes des ouvrages. Certains regles changent, mais l’habitude de suivre les
consignes de formatage de document doit etre appris maintenant pour etre plus facile lorsque la
necessite se presentera.

Contact

Il vous est possible de prendre contact avec moi par email : yannickimbert@gmail.com. Dans
toute communication email, merci de bien indiquer le sujet de votre email. J’ai tendance a ne pas
faire attention aux emails qui m’arrivent sans sujet. En cas d’absence de reponse, il faut me re-ecrire
dans les cinq jours, a moins d’urgence absolue. Il est aussi tout a fait possible de prendre rendez-
vous par Skype (pseudo yannickimbert), Whatsapp ou Zoom.

Il est aussi possible de prendre rendez vous a la Faculte Jean Calvin. Meme dans ce cas, il faut
prendre rendez vous en envoyant un email auparavant. Merci aussi de preciser la raison pour
laquelle vous me demandez ce rendez vous.

4
Pour les etudiants sur place, il est aussi possible de m’attraper au vol a la Faculte. En cas de
probleme ou soucis sérieux, il est aussi possible de venir sonner a ma porte. Dans ce cas il vous faut
respecter ma vie privee et ne venir qu’en cas exceptionnel entre 9h-12h et 14h-16h.

Penser théologiquement1

La theologie est un monde de precisions, de distinctions, et de richesse. Le langage


theologique, appuye sur une solide comprehension de la Bible, essaie de toujours construire une
articulation coherente et comprehensible des textes et doctrines. Cette tache est importante pour
l’apologetique car, si nous ne savons pas ce que nous croyons, nous ne pourrons pas presenter et
defendre ce que nous croyons. Ce processus de construction theologique permet aussi de
developper une maniere de penser theologiquement. Je vous propose quelques principes
theologiques (quelques « proverbes » et notions importantes) sans lesquelles nous tombons
rapidement dans de serieuses erreurs.

Petits principes théologiques

 La double grâce de Dieu. En Christ nous sommes au benefice de deux grace communiquees
par Dieu : la justification et la sanctification. Ces deux graces sont distinctes mais inclues dans
l’oeuvre qui nous est imputee en Christ. Il n’y a pas justification sans sanctification ; il n’y a pas
sanctification sans justification.

 Un exemple n’est pas un argument. Souvent dans nos discussions nous donnons des exemples
personnels ou tires de l’histoire. Bien que ces arguments soient souvent utiles, ils ne suffisent
pas. Car si nous devions decider sur la base d’exemples, c’est le nombre d’exemples qui
definirait la verite. Bien sûr nous pouvons faire la meme remarque a notre interlocuteur non-
chretien.

Exemple : Michel Onfray prend constamment des exemples, souvent mal choisis, de
chretiens opposes a la « raison ». Cependant, qu’un chretien (ou mille) soient opposes a la
« raison » ne signifie pas que la foi chretienne soit, en elle-meme, opposee a la « raison ».
Un exemple n’est pas un argument !

 Fins et moyens. Attention, il est absolument necessaire de bien prendre en compte la


distinction entre la finalite d’une chose et les moyens utilises pour l’atteindre.

Exemple : Dans une epoque d’interet missiologique renouvele, il ne faudra pas oublier que
la mission n’est que le moyen que Dieu utilise dans l’histoire pour manifester
l’accomplissement du mandat missionnaire et la venue du royaume.

 Opera trinitatis ad extra indivisa sunt. Les œuvres externes de la Trinite sont unes et
indivisibles. Ce principe sert a souligner que, Dieu etant un et indivisible, ses œuvres sont elles
aussi unes et indivisibles. L'incarnation de Jesus, les dons du Saint-Esprit et l'amour du Pere sont
des oeuvres « externes » (tournees vers la creation) : bien qu’etant des œuvres distinctes de
chaque personne trinitaire, les trois personnes n’agissent pas en independance des autres.

1 Attention, la plupart de ces notions seront reprises en cours. Il n’est pas necessaire que l’etudiant comprenne toutes
ces notions avant de commencer ses cours d’apologetique !
5
 Le prioritaire n’élimine pas le secondaire. Quand une chose est prioritaire, cela ne signifie pas
que tout le reste est optionnel. Il peut y avoir des choses secondaires qui sont quand meme
necessaires.

Exemple : Il peut y avoir deux choses nécessaires a la mission chretienne : l’evangelisation


et l’engagement social. Dire que le premier est prioritaire n’elimine pas le fait que le
deuxieme est necessaire.

 Principes de connaissance et principe de l’être. Il est commun, en theologie reformee, de se


referer a deux principes de connaissance et un principe d’existence :

 Principe de connaissance interne (principium cognoscendi internum) : ce que nous


pouvons connaitre, en tant qu’etres humains, dependant de l’oeuvre de l’Esprit. Le Saint
Esprit est donc le principe de connaissance interne.

 Principe de connaissance externe (principium cognoscendi externum) : par contraste, le


principe exterieur a l’etre humain est la Bible.

 Principe de l’etre (principium essendi) : le « principe » qui explique l’existence de toutes


choses… le Dieu trinitaire de la revelation biblique.

 Principe unificateur et point pivot. Pour structurer une theologie coherente et en accord avec
l’Écriture, il convient de pouvoir identifier un principe unificateur qui sert a lier les doctrines de la
foi les unes aux autres. Mais il est aussi important de discerner un point (ou doctrine) pivot qui sert
a articuler la theologie et permet une certaine flexibilite.

Exemple : la theologie reformee presente un principe unificateur en la doctrine de l’alliance,


et un point pivot en la notion d’union avec Christ.

 Sens large et sens restreint. Le langage biblique, bien qu’etant riche, recouvre parfois plusieurs
notions. Un meme terme peut ainsi avoir deux definitions, liees mais distinctes.

Exemple : le mot « frere » dans la Bible peut avoir deux definitions. Au sens restreint, le
« frere » est celui qui se trouve dans la communaute de foi (le peuple de Dieu). Au sens large,
le « frere » est celui qui appartient a la meme humanite. Lorsque nous parlons du « frere »,
nous devons donc bien savoir dans quel sens nous l’utilisons.

 Unir sans confondre ; distinguer sans séparer. En theologie, nous sommes toujours obliges de
distinguer entres des notions et des doctrines qui sont toujours liees les unes aux autres. Pour ne pas
risquer de serieuses erreurs theologiques, il est important, entre autre, de toujours se rappeler de ce
principe.

Exemple : les trois personnes de la trinite sont distinctes, mais ne sont pas separees (elles
seraient trois dieux differents). Les trois personnes de la trinite sont aussi unies, mais le Pere
n’est pas le Fils ; le Fils n’est pas l’Esprit.

Trois articulations théologiques

6
 Les deux mandats. Nous ferons regulierement mention de deux mandats bibliques : le mandat
creationnel (Genese 1) et le mandat missionnaire (notamment Mt 28). Nous verrons en cours
l’articulation possible entre les deux mandats.

 La triple promesse de Dieu. Il est commun de discerner dans l’appel d’Abraham, et de maniere
recurrente dans l’ensemble de l’Ancien et du Nouveau Testament, trois dimensions a la promesse
de Dieu : Dieu se cree un peuple ; Dieu sera leur Dieu ; Dieu les conduit vers son royaume (ou une
terre).

 Les trois dimensions de l’image de Dieu. John Frame et Vern Poythress, deux theologiens
americains, proposent de reflechir par le moyen de « triades » a partir de ce que Frame appelle
les « attributs de la seigneurie » (autorite, controle, presence).

Autorite
Dimension normative

Controle Presence
Dimension situationelle Dimension existentielle

Ceci conduit Poythress a proposer dans ses nombreux livres une reflexion articulee autour des
trois dimensions normative, existentielle et situationnelle (ou contextuelle).

Nous reprendrons ce type de reflexion (la tri-perspective) dans plusieurs cours. L’application de
cette structure en triade a la doctrine de l’image de Dieu sera en particulier importante dans le
developpement de notre apologetique.

7
"Si le Dieu du
christianisme existe, les
preuves de son existence
sont abondantes et
évidentes, de sorte qu'il
est à la fois non
scientifique et un péché
de ne pas croire en lui."

Cornelius van til


Petit glossaire apologétique2

Ad hominem (argument). Argument qui attaque la personne plutot que les arguments. Ce type
d'argument cache souvent a eviter un vrai debat. Cependant, certains considerent que l'argument ad
hominem est parfois approprie.

Analogie, le raisonnement analogique. (1) Chez Thomas d'Aquin, ceci decrit une pensee qui
s'inscrit dans un langage qui n'est ni litteralement vrai (univoque), ni completement faux
(equivoque), mais qui est ressemblant ; (2) Pour Cornelius Van Til 3, « raisonner de maniere
analogique », c’est penser sur le fondement de la revelation de Dieu et donc « penser les pensees de
Dieu apres lui ».

Antithèse. Terme qui caracterise l'opposition entre la pensee chretienne et non chretienne. Cette
antithese existe de principe seulement, et est limitee dans la pratique par l'exercice de la grace
commune. Dans l'apologetique de Van Til, l'antithese demontre la radicalite du peche et de la grace
fondee toute entiere sur Dieu. L'antithese, chez Van Til, sert donc a souligner la non-autonomie de
l'etre humain. Nous sommes toujours dependants de Dieu.

Apologétique. Branche de la theologie qui donne les raisons de notre esperance. Il y a deux
dimensions a l’apologetique : offensive et defensive.

A priori. Connaissances que toute personne possede avant des experiences ou des reflexions
particulieres. Ces a priori sont utilises pour interpreter et evaluer l'experience.

Argument circulaire. (1) L'argument dont la conclusion d'un argument provient de son point de
depart ; (2) l'argument qui suppose quelque chose qui ne sera pas normalement accepte par qui ne
croit pas a la conclusion. Par exemple l'argument selon lequel Christ est Dieu fait homme parce que
l'Ecriture confirme cela. Parce qu'un musulman, par exemple, ne croit pas en la conclusion (Christ
est Dieu fait homme), il n'acceptera pas le point de depart (autorite de l'Ecriture).

Arguments théistes. Arguments essayant de demontrer l'existence de Dieu. Il y a plusieurs sortes


d'arguments theistes. Les arguments cosmologiques (au nombre de trois), l'argument tire des degres
de perfection, l'argument téléologique – ces cinq arguments forment les « cinq preuves » de Thomas
d'Aquin ; l'argument ontologique defendu par Anselme. D'autres formes de ces arguments ont aussi
ete presentes (notamment celui du kalaam, par William Lane Craig). À ces arguments il faudrait
ajouter deux types d'arguments mentionnes en cours : l'argument moral et l'argument esthétique.

Argument transcendantal : Un argument qui vise a montrer les conditions necessaires a la


possibilite de la pensee rationnelle ou discours sense. Van Til croyait que c'etait le seul genre
d'argument approprie a une apologetique chretienne, car le Dieu biblique est l'auteur de tout sens et
de rationalite.

Autonomie. La tentative de vivre en se prenant comme sa propre loi. Pour Van Til, c'est l'attitude
caracterisant l'incredulite – ou dans l'Ancien Testament, l'idolatrie.

Auto-attestation, auto-authentification. Dans tout systeme de pensee, l'autorite ultime se justifie


elle-meme. Par exemple pour un Richard Dawkins, l'autorite de la methode scientifique se justifie
par la science elle-meme, et par rien d'autre. Pour Van Til cette autorite ultime est celle de Dieu,

2 Attention, la plupart de ces notions seront reprises en cours. Il n’est pas necessaire que l’etudiant comprenne toutes
ces notions avant de commencer ses cours d’apologetique !
3 L’apologetique presentee en cours est fondee sur l’approche de l’apologete americain Cornelius Van Til.
97
surtout lorsque l'on parle de la nature des Écritures. Dieu est son propre temoin.

Autorité de l'expert. Soumission a la connaissance de quelqu'un de mieux informe, plutot qu'a


la soumission absolue a Dieu, comme etant le critere meme de la verite. Pour Van Til, c'est le
seul type d'autorite que le non croyant va accepter. Pour ce qui est de la methode d'apologetique,
cf. la « methode d'autorite » evaluee par Gaston Frommel dans son La Vérité humaine, vol. 1.

Capital emprunté. La verite connue et reconnue par le non croyant. Il ne peut pas rendre
compte de certaines choses en fonction de ses propres presupposes, mais seulement avec les
presupposes (ou vision du monde) bibliques. Ses affirmations (meme celles opposees a Dieu)
sont basees sur le « capital emprunte ».

Certitude. (1) L'assurance de ses croyances ; (2) L'impossibilite qu'une proposition soit fausse.
Van Til a souligne que la verite chretienne est certaine et devrait etre presentee comme une
certitude, et non pas comme une simple probabilite. C'est ce que Van Til critiquait chez
beaucoup d'autres apologetes : la discussion apologetique n’a souvent comme but que la
possibilité de l'existence de Dieu ou de sa verite. Pour Van Til, l’apologetique a un objectif :
montrer qu’il est impossible que Dieu n’existe pas.

Connaissance objective (de la vérité). Connaissance ou verite qui ne depend pas de ce que
l'homme pense, et qui le depasse donc. Cela signifie par implication qu'une connaissance
objective ne peut pas provenir d'un principe propre a l'homme mais doit lui etre exterieur. D'où
la necessite et l'importance de la notion theologique de révélation.

Contingence. (1) La dependance a autre chose pour origine et / ou etre poursuivi, l'inverse de la
necessite. Par exemple : Dieu n’est pas contingent (il ne depend que de lui-meme) ; (2) Hasard.

Corrélatif. Choses qui sont mutuellement dependantes. Pour Van Til, le non-croyant affirme que
Dieu et le monde sont correlatifs (par exemple : Dieu evolue avec sa creation).

Déterminisme. (1) Le point de vue selon lequel chaque evenement dans le monde a une cause ;
(2) Le point de vue que chaque evenement dans le monde a une cause « finie » (voir, materielle).
Van Til (et donc notre apologetique) peut etre considere comme un deterministe dans le sens de
(1), mais pas dans le sens (2). Cependant, les deux types de determinismes supposent souvent
une causalite ultime impersonnelle. En ce sens, Van Til a rejete le determinisme et a souligne
qu'il est equivalent au « hasard ».

Dualisme. Philosophie(s) selon laquelle il existe deux principes irreductibles pour expliquer la
realite : l'esprit et la matiere (le corps). Le dualisme s'est incarne de multiples manieres dans
l'histoire de la pensee. Il est souvent dit que la theologie chretienne soutient traditionnellement
un dualisme corps / ame. Il ne faut cependant pas confondre la distinction de deux choses
(dualité) et leur séparation absolue (dualisme). On se rappellera de la maxime theologique :
« unir sans confondre ; distinguer sans separer ».

Effets noétiques du péché. Les effets du peche sur la pensee, le raisonnement, et la


connaissance humains. Chez Van Til, le pecheur connait Dieu, mais reprime cette connaissance
(cf. Rm. 1.18-25).

Empirisme. L'empirisme soutient que toute connaissance vient de l'experience sensible (des
sens). Il se distingue du rationalisme qui pretend que la connaissance provient des idees de
l'esprit et de la connaissance de la raison. Ainsi, avec l'empirisme, les cinq sens sont la base de la
connaissance.

10
Enlever le toit. Pour Francis Schaeffer, methode qui consiste a enlever que le « toit » que nos
contemporains se construisent pour se proteger des questions existentielles. En « enlevant le
toit », l’apologete essaie de montrer qu’une vision non biblique du monde va s’effondrer.

Epistémologie. Theorie de la connaissance.

Éthique. Theorie du comportement et de la vie.

Evidentialisme. Methode apologetique qui fait appel a la raison humaine et fonde (en partie) l'acces
a la foi sur des donnees empiriques et historiquement verifiable. Attention : le terme français est un
anglicisme trompeur. Cette methode apologetique ne se fonde pas sur des choses « evidentes »
comme si les preuves de la verite chretienne etaient evidentes pour tous. Le terme anglais evidence
serait a rapprocher ici du pragmatisme.

Fait brut. (1) Chez Van Til, c'est un fait qui est non interprete (par Dieu ou par l'homme) et donc
devient la base de toute interpretation, c'est un « fait objectif » ; (2) un fait qui ne depend pas de ce
que l'homme pense.

Fidéisme. La croyance que Dieu est connu par la foi et non par la raison. Van Til est parfois accuse
de fideisme, mais il a montre a plusieurs occasions l'inconsequence de cette accusation.

Hasard. Les evenements se produisent sans cause determinee, et en ce cas ils sont conduits par des
principes purement physiques. Ce que Van Til et d'autres apologetes soulignent par consequence
c'est que le hasard nous conduit directement a ne rien pouvoir affirmer de certain. Voir Bahnsen, p.
728.

Humanisme. L'idee que l'homme est la valeur supreme et l'autorite meme a la fois pour la
connaissance et le comportement.

Implication. (1) L'acte de tirer une conclusion a partir d'une premisse ou affirmation premiere ; (2)
La conclusion tiree d'une chose premiere ; (3) dans la philosophie idealiste : une methode de pensee
qui emploie la logique pour comprendre les mecanismes psychologiques de l'esprit dans son
contexte situationnel. Van Til parle parfois de son approche comme une « methode d'implication »
dans ce troisieme sens, quelque chose de plus simple que la deduction ou l'induction, mais qui
comprend quand meme ces dernieres.

Incompréhensibilité de Dieu. (1) Notre incapacite a connaitre Dieu de façon exhaustive ; (2)
l'absence de toute identite entre la pensee humaine et la pensee divine. En fin de compte, (1) est le
sens le plus commun dans la theologie ; tandis que le (2) a ete l'objet de plusieurs controverses
apologetiques, notamment entre Van Til et Gordon Clark.

Irrationalisme. La croyance que la raison humaine ne suffit pas a decouvrir la verite. Van Til pense
que les non croyants sont irrationaliste et rationaliste en meme temps.

Mal (problème du). L'argument contre l'existence de Dieu a cause de la presence du mal dans le
monde, est souvent enonce de la maniere suivante : « Comment un Dieu tout-puissant et
entierement bon peut-il permettre la souffrance dans le monde ? » Selon le point de vue traditionnel,
Dieu a certaines caracteristiques ou attributs. Le premier est qu'il est tout-puissant, ce qui signifie
qu'il peut faire tout ce qu'Il veut. Une autre est que Dieu est bon et veut le meilleur pour ses
creatures. Certains pensent que ces deux attributs de Dieu sont incompatibles avec la presence du
mal dans le monde. Leur raisonnement est le suivant : « Si Dieu est tout-puissant et desire le
meilleur pour Ses creatures, alors pourquoi ne fait-il empecher le mal de se produire ? » Soit Dieu
est bon, et il ne peut rien faire (du coup que peut-il faire pour moi?) ; soit Dieu peut faire quelque
11
chose, mais il ne le veut pas (du coup est-il « bon »?).

Matérialisme. Philosophies qui affirment que la substance du monde est de nature materielle et
immanente, c’est-a-dire que « rien ne se cree, rien ne se perd ». Ainsi, les elements de la nature et
leurs phenomenes se suffisent a eux-memes, a leur formation, a leur mouvement et a leur
developpement. Il n'y a pas d'autres explications au monde que des causes materielles.
Métaphysique, ontologie. (1) Une vue generale du monde, une vision du monde et la vie ; (2)
Les realites fondamentales qui existent.

Méthodologie du blockhaus. Une approche apologetique qui commence avec les croyances
pretendument detenues en commun entre croyants et incroyants, puis essaie de completer ce
terrain d'entente avec une verite supplementaire (la trinite, le salut par la foi, la divinite de Christ,
ou autre). Van Til trouve cette methodologie chez Thomas d'Aquin, en particulier dans la
distinction de Thomas entre « raison naturelle » et « raison de la foi ». Ceci est aussi present dans
d'autres formes d' « apologetique traditionnelle ». Voir Bahnsen, pp. 64, 535f, 708 s. Van Til
appelle cela le « blockhaus » parce que sur la base d'un « terrain commun » la seule chose que la
discussion apologetique peut faire, c'est que chacun, a partir de son « blockhaus » lance des
arguments parfois identiques. Jamais le blockhaus non chretien n'est remis en question.

Monisme. La croyance que la realite est une et ne forme qu'un tout unifie, d'où le refus de la
distinction createur-creature.

Nécessité. La conclusion d’un argument est certaine et pas seulement probable. Van Til a
toujours insiste pour que l’apologetique demontre la necessite du Dieu de la revelation biblique.

Négation (voie de la). Connaitre Dieu en lui attribuant le contraire des qualites de ses creatures.
L'un des trois moyens, chez Thomas d'Aquin, pour exprimer la connaissance de Dieu, On ne
peut pas necessairement affirmer ce que Dieu est, mais ce qu'il n'est pas.

Neutralité. Essayer de penser ou de vivre sans realiser qu’un engagement religieux est
necessaire (car il porte sur des presupposes ultimes). Pour Van Til, cela est impossible : il n’y a
pas de position neutre concernant l’existence de Dieu, ainsi « la neutralite est une negation ».

Nihilisme.Le nihilisme vient du terme latin nihil, ce qui signifie « rien », d'où notre terme
« neant ». Ainsi, le nihilisme est litteralement « la croyance en rien. » Cette perspective, qui sert
en quelque sorte d'anti-philosophie, affirme qu'il n'y a aucune justification pour quoi que ce soit,
en particulier en ce qui concerne les valeurs morales. Le nihilisme nie egalement la possibilite de
la connaissance et de pouvoir attribuer de la valeur a quoi que ce soit. Ainsi, le monde et
l'existence humaine sont sans signification et sans but fixes (si but il y a il est fixe par l'individu
lui-meme).

Notions communes. Croyances que les chretiens et non-chretiens ont en commun. Van Til a
parfois nie l'existence de ces elements – surtout lorsqu'ils sont associes a la notion apologetique
de « terrain commun ». Mais Van Til ne nierait pas que les lois de la logique sont des notions
communes provenant de l'acte createur de Dieu.

Personnalité absolue. Caracteristique principale de Dieu pour Van Til. Contrairement a tout
point de vue non chretien, le Dieu de la Bible est a la fois absolu (il existe en sui-meme, il est
autonome) et personnel (il pense, parle, agit, aime, et juge). C'est aussi une conviction
importante de l'apologetique de Francis Schaeffer.

Point de tension (trouver le). Chez Schaeffer, il s'agit de trouver où et « a quel point » se situera
la tension entre la vision du monde non chretienne et la realite dans laquelle nous vivons.

12
Présupposé. (1) Une croyance qui precede les autres croyances ; (2) une croyance qui regit les
autres croyances ; (3) presuppose ultime: la croyance qui regit toutes les autres croyances, ou
l'engagement le plus fondamental du cœur.

Preuve. (1) Les faits utilises dans un argument utilise pour etablir une conclusion ; (2) les
declarations de ces faits.

Probabilité. La mesure selon laquelle une proposition se rapproche de la certitude. La foi


chretienne est certaine, non seulement probable, et pour un apologiste la revendication d'une simple
probabilite, c'est nier la clarte de la revelation de Dieu (a la fois de la revelation générale et de la
revelation spéciale).

Point de contact. Conviction partagee par deux personnes qui leur permet de raisonner en vue d'un
accord ulterieur. Lorsqu'il parle de « point de contact », Van Til fait en particulier reference au point
de contact entre croyant et incroyant. Pour lui, ce point de contact se trouve, non pas dans une
vision du monde commune, mais dans la vraie connaissance de Dieu que le croyant tout comme
l'incroyant ont, mais que ce dernier supprime (cf. Bahnsen, p. 105). Nous avons parle quant a nous
en cours de quatre points de contacts :

 nous vivons tous dans une meme realite creee par Dieu. deux points de contacts dus a
 nous sommes crees a l'image de Dieu. l'acte createur de Dieu.

 nous sommes tous pecheurs deux points de contacts qui


 nous sommes tous au benefice de la grace commune. sont dus a l’entree du peche.

Prédicat. La fixation d'un predicat a un sujet, d'où une assertion fabrication. VT dit que seule la
vision chretienne du monde rend la predication possible.

Présupposé. (1) une croyance qui precede les autres croyances ; (2) une croyance qui regit les
autres croyances ; (3) presuppose ultime: la croyance qui regit toutes les autres croyances, ou
l'engagement le plus fondamental du cœur.

Preuve. Un argument qui etablit la verite de la conclusion. Van Til estime qu'il y a « une preuve
absolument certaine » du theisme chretien par le biais de son argumentation transcendantale (ce que
nous appelleront « l’impossibilite du contraire »).

Probabilité. La mesure dans laquelle une proposition se rapproche de la certitude. VT cru que le
christianisme etait certain, et non pas seulement probable, et que pour un apologiste la revendication
simple probabilite, c'est nier la clarte de la revelation de Dieu.

Rationalisme. (1) Conviction que la raison humaine est l'arbitre ultime de la verite et de l'erreur. (2)
Conviction que la raison humaine (par opposition a l'experience des sens) est la seule maniere de
connaitre.

Reductio ad absurdum. Latin (reduction a l’absurde). Une forme d'argument qui, plutot que de
prouver directement une conclusion, reduit la conclusion contraire a une absurdite. C'est pourquoi il
est aussi appele « argument indirect » ou « l'argument de l'impossibilite du contraire ». Van Til croit
que tous les arguments devraient prendre cette forme.

Relativisme. La verite est determinee par l'individu ou par un principe / critere interne a la nature
humaine. La verite d'un individu peut donc etre elevee contre la verite d'un autre individu.
13
L'absence d'un critere commun a tous les hommes permettant d'evaluer la verite conduit
necessairement et logiquement a une certaine forme de relativisme. Attention cependant, un
relativisme ne signifie pas absence complete de verite, ni meme impossibilite de connaitre en verite.
Il convient aussi de distinguer relativisme et pluralisme. Dans une perspective relativiste, la verite
elle-meme est amoindrie. Dans une perspective pluraliste, la verite est consideree comme etant
multiple. Plusieurs points de vue peuvent etre simultanement vrais car ils forment un tout. Personne
ne peut donc pretendre posseder la verite qui est par definition multiple, plurielle.

Réalité. L’etat du monde cree par Dieu, regit par les lois creees par Dieu.
Sens de la déité, divinité (aussi sensus divinitatis, deitatis) . Maniere dont Calvin decrit la
connaissance que le non croyant possede (de Dieu), mais supprime (cf. Rom. 1.18-25).

Système. Une tentative d'exprimer sa vision du monde dans un ensemble coherent de pensees.
C'est et ce que: VT critique certains apologistes pour essayer de prouver que Dieu est, sans tenir
compte de ce qu'il est. Cadre souligne que vous ne pourrez jamais prouver la nature de Dieu tout
entiere en un seul argument, de sorte que le ce qui est une question de degre. Nous ne pouvons
pas reellement parler de tout. Mais un argument apologetique etre coherent avec tout ce que dit
la Bible au sujet de Dieu.

Terrain commun. Dans de nombreuses traditions apologetique, terrain « neutre » sur la base
duquel croyant et non-croyant peuvent discuter des preuves de l'existence de Dieu. Ce terrain
commun a souvent ete identifie au raisonnement philosophique. Van Til rejetait la notion de
terrain commun qui, pour lui, sous-entendait qu'il pouvait exister un domaine de la vie humaine
(la raison) qui n'etait pas affecte par la chute (cf. Bahnsen p. 276, pp. 420-24, p. 730).

Unité, holistique (défendre le christianisme en tant que). Defendre les elements particuliers du
christianisme avec une prise de conscience de la connexion de chaque element avec l'ensemble
du systeme de la verite. Ne s'avere pas tout a la fois, si VT semble parfois presque a exiger que
des apologistes qu'il critique. Voir Bahnsen, 26, 103n, 511.

Vision du monde. Une philosophie, en particulier une metaphysique. Une façon de comprendre
la realite qui regit toute pensee et de vie.

Sources utilisées dans la rédaction du glossaire

Greg BAHNSEN, Van Til's Apologetic: Readings and Analysis, Philippsburg, P&R, 2012.

Pascal CHARBONNAT, Histoire des philosophies matérialistes, Paris, Editions Syllepse, 2007.

Steve B. COWAN, Five Views of Apologetics, Grand Rapids, Zondervan, 2000.

John FRAME, Cornelius Van Til: An Analysis of His Thought, Philippsburg, P&R, 1995.

John FRAME, « A Van Til Glossary », IIIM Magazine Online, vol. 2, no. 35, 2000,
http://www.thirdmill.org/files/english/html/pt/PT.h.Frame.VanTil.Glossary.html

14
Peter JONES, One or Two: Seeing a World of Difference. Main Entry Editions, 2010.

G. KEMERLING, « A dictionary of philosophical terms and names », Philosophy Pages,


http://www.philosophypages.com/

Francis SCHAEFFER, « Dieu : Illusion ou realite » dans Une vision chrétienne du monde, ed.
Yannick Imbert, Aix-en-Provence, Kerygma, 2014.

Cornelius VAN TIL, Christian Apologetics, 2nd edition, ed. William Edgar, P&R, 2012.

15
Je crois
comme je crois que le soleil s'est levé :
non seulement parce que je le vois,
mais parce que par lui
je vois tout le reste.
Syllabus de cours d'apologetique

Diplome d'etudes
superieures en theologie

Programme DEST
Annee 1e annee

6.01 Introduction a
Annee academique 2019-2020 Code + intitule
l’apologetique
Professeur Professeur
Yannick Imbert Yannick Imbert
coordinateur enseignant
Credits 2,5 Coefficient 1

24 Heures de lectures 22,5


Heures de cours
Heures de travail
Devoirs 1 + 2 9+7+5 67,5
total

PRÉSENTATION DU COURS

Ce cours est une introduction a l’apologetique. Son objectif est d'explorer ce qu'est
l'apologetique. Nous construirons notre defense de la foi sur le fondement de la Bible, avec une
considerations pour les points theologiques importants a prendre en compte ; tout ceci en vue
d’arriver a une expression biblique et Reformee de notre propre apologetique. Pour ce faire il
sera aussi question d’aborder differentes « methodes » apologetique et de nous diriger vers celle
qui semblera le plus appropriee a la presentation et a la defense de la foi chretienne. Enfin, nous
ferons quelques exercices pratiques (1/3 du cours).

OBJECTIFS DU COURS

Premièrement, l’etudiant acquerra pendant ce cours les connaissances fondamentales de


l'apologetique, notamment ses definitions, questions et objections principales et les questions
liees a sa pratique. Deuxièmement, avec les connaissances acquises, l'etudiant fera aussi a
l'apprentissage de la pratique apologetique. Sera proposee une certaine methode de pratique
apologetique qui formera la base du « savoir faire » de l'etudiant. Des exercices pratiques
serviront a dynamiser cette apprentissage pratique. Enfin, l'etudiant prendra conscience de la
necessite de ne pas tant considerer l'apologetique comme un « faire » mais comme un « etre ».

17
VALIDATION

(1) Devoir 1 (8 points)

(2) Devoir 2 (3 points)

(3) Devoir 3 (6 points)

(4) Attestations de lecture (3 points)


Vous devez remplir le formulaire d’attestation de lecture qui est inclus dans ce syllabus. Vous
devez envoyer ce questionnaire en meme temps que votre devoir de synthese.

DEVOIR #1 : Evaluation d'un argument athée

Description méthodologique

Comme validation partielle de ce cours, il vous est demande de choisir un texte parmi les choix
presentes ci-dessous. Cette presentation devra se presenter ainsi :

i. Procedez ainsi dans votre analyses, reproduisez les arguments principaux de l'auteur, et ceci
dans vos propres mots. Vous devez le faire de maniere numerique (premierement,
deuxiemement, etc.), tout en resumant la maniere dont l’auteur developpe son argument (ou
sa position). Soyez aussi precis que possible, montrant les connexions entre differents themes
dans son raisonnement. Le resume de ces arguments ne necessite pas d’evaluation
personnelle, mais simplement de comprendre la pensee de l’auteur.

ii. Ensuite, il vous faut identifier le ou les points de depart principaux de l’auteur. Expliquez
brievement pourquoi ces points de depart (ou « presupposes ») sont problematiques dans une
monde. Ne critiquez pas l'argument de votre auteur simplement en declarant qu'il ne croit pas
en la Bible – c’est evident ! Explorez plutot comment l’auteur presente des elements deformes
d’une vision biblique du monde.
iii. Pretez une attention particuliere aux contradictions possibles dans l’argument de
l’auteur que vous avez choisi. La methode apologetique que nous adoptons ensemble
essaie de demontrer que toute autre vision du monde (autre que la Bible) est impossible et
contradictoire. Posez par exemple les questions suivantes a l’auteur :

La conclusion de l’auteur est-elle possible sur la base de son point de depart ?


Y a-t-il des choses contradictoires dans ce qui est affirme ?
L’argument presente manifeste-t-il des incoherences ou des affirmations arbitraires ?

En bref, identifiez les endroits où vous exploiter une faiblesse de l’argument et expliquez
pourquoi.

iv. Le but de cette evaluation critique de l'argument non-chretien est de vous encourager a
reflechir sur un argument afin d’en discerner les faiblesses internes, et ceci dans une
perspective reformee. Ceci est une partie indispensable, mais non la seule, d’une methode
apologetique alliancielle.

Prenez bien soin de distinguer vos parties, ce qui permettra au professeur de verifier la
comprehension de la methode apologetique vue en cours. Il est aussi recommande de ne pas
commencer la redaction avant la huitieme session du cours. Il est cependant possible de lire
l’article une ou deux fois auparavant.

18
Vous devez choisir trois arguments (et trois seulement !) dans l'un des deux textes suivants :

Sebastien Faure, « Douze preuves de l'inexistence de Dieu », en ligne (pdf),


http://rapaces.garap.org/mp3/inserts/SebastienFaure_12Preuves.pdf. Lire son introduction (pp
1-4) et ensuite travailler sur la deuxième serie d’arguments.
Bertrand Russell, « Why I Am Not a Christian », Londres, Watts & Co, 1927, en ligne,
http://users.drew.edu/~jlenz/whynot.html.

Format du devoir

Le format de ce devoir est le suivant : 1 000 mots, plus ou moins 10%. Aucune exception de sera
acceptee ; interligne 1,5 ; police Times New Roman ; taille 12. Vos titres n’excederont pas la
taille de police 14. Seule cette mise en forme sera acceptee. Vous devez aussi enregistrer votre
document ainsi (avec le code du cours et votre nom) : 6.01 NOM_Devoir1.doc. Attention seul le
format doc ou odt est accepte. Pas de pdf ou de docx !

Vous ne devez pas non plus oublier d'indiquer votre nom en tete de devoir.

Un point sera enleve a la note du devoir pour non respect de ces regles.

Date de remise des travaux : 17 mai 2021.

Retards : Tout devoir en retard sera sanctionne par la soustraction d'un point par semaine de
retard. Aucun devoir ne sera accepte a moins d’une semaine avant la session des examens [hors
cas exceptionnel de maladie sur certificat medical]. Le devoir sera note a 0/20 en consequence.

Correction : Je ne propose pas de corrections sur les devoirs faits pendant l’annee, bien que je
commente vos devoirs. Cependant, il est utile de prendre connaissance d’une correction de la
première serie d’arguments de Sebastien Faure, « Douze preuves de l'inexistence de Dieu » [en
ligne, http://rapaces.garap.org/mp3/inserts/SebastienFaure_12Preuves.pdf]. Il est conseille que
vous puissiez lire ce texte « comme si » ce texte etait votre devoir et, ensuite seulement, de
proceder a l’etude de la correction proposee.

DEVOIR #2 : description méthodologique

Description méthodologique

Le deuxieme devoir a pour but de nourrir une reflexion personnelle sur le cours. Pour cela, vous
devez proceder ainsi :

i. Pendant les deux premieres semaines de cours, decrire ce qu'est pour vous l'apologetique
et vos attentes par rapport au cours. N'essayez pas d'avoir de reponses que vous n'avez pas :
il n'y a pas de mauvaises reponses ici !

ii. Pendant le semestre, prenez deux ou trois moments pour revenir sur ces premieres
impressions. Notez ce qui vous a fait reflechir, pose question, etc. Ceci n'a pas forcement a
etre articule sous forme d'une dissertation !

iii. Enfin, evaluez la maniere dont le cours vous a encourage et a nourri, change, ou
interroge votre vision de Dieu. Cette derniere partie du devoir demande une petite reflexion
critique sur vos attentes et la maniere dont vous aurez vecu spirituellement ce cours.

19
Ce devoir etant premierement un effort de travail et de progression personnelle, la notation
tiendra compte de la maniere dont vous aurez conduit cette auto-evaluation, plus que sur le
contenu theorique. Le but n'est donc pas de presenter une vue correcte du cours mais de reflechir
sur sa portee theologique et spirituelle. Cependant, vous devez faire ce travail a l'ecrit pour les
besoins de la validation.

Format du devoir

Le format de ce devoir est le suivant : 1 000 mots, plus ou moins 10%. Aucune exception de sera
acceptee ; interligne 1,5 ; police Times New Roman ; taille 12. Vos titres n’excederont pas la
taille de police 14. Seule cette mise en forme sera acceptee.

Vous devez aussi enregistrer votre document ainsi (avec le code du cours et votre nom) : 6.01
NOM_Devoir2.doc. Attention seul le format doc ou odt est accepte. Pas de pdf ou de docx !

Vous ne devez pas non plus oublier d'indiquer votre nom en tete de devoir.

Un point sera enleve a la note du devoir pour non respect de ces regles.

Date de remise des travaux : 17 mai 2021.

DEVOIR #3 : Texte pour votre Eglise

Description méthodologique

Pour le deuxieme devoir, les etudiants devront presenter deux grands arguments en faveur de la foi
chretienne et deux grandes objections a la foi chretienne. Ces presentations doivent :

(i) Presenter les raisons pour lesquelles vous avez choisi tell ou tel objection/argument.

(ii) Les arguments ne doivent pas forcement etre ceux qui repondent aux objections
identifiees. C’est possible, mais pas necessaire.

(iii) La clarte de votre presentation est essentielle. Vous portez une attention particuliere au
resume des objections et des arguments.

(iv) Vous devez aussi clairement identifier quels sont les auteurs sur lesquels vous vous etes
fondes pour presenter vos objections et vos arguments.

Format du devoir

Le format de ce devoir est le suivant : 1 000 mots, plus ou moins 10%. Aucune exception de sera
acceptee ; interligne 1,5 ; police Times New Roman ; taille 12. Vos titres n’excederont pas la taille
de police 14. Seule cette mise en forme sera acceptee.

Vous devez aussi enregistrer votre document ainsi (avec le code du cours et votre nom) : 6.01
NOM_Devoir3.doc. Attention seul le format doc ou odt est accepte. Pas de pdf ou de docx !

Vous ne devez pas non plus oublier d'indiquer votre nom en tete de devoir.
Un point sera enleve a la note du devoir pour non respect de ces regles.

Date de remise des travaux : 17 mai 2021.

20
LECTURES OBLIGATOIRES

Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie, Paris : Gallimard, 1984, pp. 43-66.


Yannick Imbert, Croire, expliquer, vivre : Introduction à l'apologétique, Charols, Excelsis,
2014, pp. 21-87 et 101-186.
C. S. Lewis, « Dieu au banc des accuses » in Dieu au banc des accusés, Bale et Paris : Brunnen
Verlag et Sator, 1982, pp. 93-98.
Alister McGrath, Jeter des ponts, Quebec, La Clairiere, 1999, pp. 13-47.
Francis Schaeffer, Dieu : illusion ou réalité, dans Une vision chrétienne du monde, Aix-en-
Provence, Kerygma, 2015, pp. 263-277.

L'etudiant devra aussi prendre connaissance de la transcription partielle du debat entre Richard
Dawkins et John Lennox intitule The God Delusion Debate. Le texte sera disponible en format
pdf et mis en ligne (codes d’acces remis une ou deux semaines avant le debut des cours).

Achat obligatoire : Yannick Imbert, Croire, Expliquer, Vivre : Introduction à l'apologétique,


Charols, Excelsis, 2014.

Total des lectures : 225 pages

Lorsque les lectures obligatoires sont disponibles en pdf, ces dernieres sont mises en ligne sur la
plateforme des cours a distance. Dans le cas contraire, l'etudiant doit se procurer lui-meme les
lectures. En cas de doute, il pourra contacter la bibliothecaire de la Faculte.

PLAN DE COURS

SESSION 1. INTRODUCTION AU COURS


Lectures : G. K. Chesterton, Orthodoxie, ch. 3, pp. 43-66.

SESSION 2. DÉFINITION(S) DE L’APOLOGÉTIQUE


Lectures : Yannick Imbert, Introduction à l'apologétique, ch. 1, pp. 21-44.
Attention : Faire les questions de preparation en fin de chapitre peut aider pour le cours.

SESSION 3. LE FONDEMENT THÉOLOGIQUE DE L’APOLOGÉTIQUE


Note importante : Avant ce cours il est necessaire d'avoir fait les lectures suivantes sur la
theologie biblique de l'apologetique : Yannick Imbert, Introduction à l'apologétique, ch. 2-3, pp.
45-86. Ces chapitres peuvent faire l’objet d’une question d’examen.
Lectures : Alister McGrath, Jeter des ponts, ch. 1, 13-47.
Attention : faire les questions de preparation en fin de chapitre (utile pour le quiz).

SESSION 4. L'APOLOGÉTIQUE CLASSIQUE


Pas de lectures.

SESSION 5. L'APOLOGÉTIQUE ÉVIDENTIELLE


Pas de lectures.

21
SESSION 6. UNE QUESTION DE MÉTHODE : UNE APOLOGÉTIQUE REFORMÉE (1)
Lectures : Yannick Imbert, Introduction à l'apologetique, ch. 4 a 6, et questions de preparation.

SESSION 7. UNE QUESTION DE MÉTHODE : UNE APOLOGÉTIQUE REFORMÉE (2)


Lectures : Francis Schaeffer, Dieu : illusion ou réalité, pp. 263-277 ; Francis Schaeffer, Démission
de la raison, pp. 11-46 et 81-92.

SESSION 8. LES ARGUMENTS POUR LA FOI


Lectures : Yannick Imbert, Introduction à l'apologétique, ch. 7, et questions de preparation.

SESSION 9. QUESTIONS ET OBJECTIONS


Pas de lectures.

SESSION 10. ÉTUDE DE DÉBAT : THE GOD DELUSION DEBATE.


Lectures : Transcription du debat (format pdf).

SESSION 11. EXERCICES APOLOGÉTIQUES


Pas de lectures.

SESSION 12. CONCLUSION DU COURS


Pas de lectures.

22
01
F
ondement s
t
héologique
s de
l
'apologéti
que

I. INCARNER L'APOLOGÉTIQUE

A) L'apologétique dans le monde

i. Une humanité qui souffre

23
ii. Une humanité en question

24
iii. Un monde qui fuit

25
B) Apologétique et témoignage

i. Se rendre compréhensibles

ii. Rendre visible la foi

26
iii. Témoigner dans la pertinence

II. EXEMPLES : CHESTERTON ET LEWIS

A) G. K. Chesterton, Orthodoxie

i. Le paradoxe de la folie

27
ii. Le maître du paradoxe

iii. Le maître du sens commun

28
B) C. S. Lewis, Dieu au banc des accusés


⇥⇤⌅⇥⇧⌃⌥⇥ ⌦ ↵⇥ ↵ ⌦✏⇥⇣⌅⇥
⌥⌘ ⌦✓
✏⇥◆⇣ ⇥
✓✏◆⇥⌦ ⇣✓
⌘↵◆
⇣✏⇥⌃⌫⌅⇥✏⌅ ⌫⌅⌘✏⇥✏⇥ ⌅⌫◆⇥⇠
⌫⇣ ◆⇡
⇥✓
⌫ ◆ ⇣⌃⌫⌅⇥
⇢✏⇣⌘
↵◆✏⌅⌘✏⇥✓⌥⇥⌫⌦⇥⌧ ↵⌘
⌦✏⌅⌅✏⇥⇥⇣⌅⇥⇣ ✓⌦⇥✏⇥ ⌅⌫⌅
⌫ ⌥⌅⌘◆!
⇥⇥"⇥

#!$⇥%✏&⌦◆

i. « Le seul adversaire considérable auquel nous sommes confrontés »

ii. Le scepticisme de l’Histoire

29
1
iii. Problème de la langue

C) Actualité de l'apologétique

30
02
d
éfi
ni
ti
onsd
e
l
'a
pol
ogé
tiq
ue

I. ETYMOLOGIE

a) Apo-logia

Etymologie ἀπο + λογα


[pour, en faveur de] [la parole]

Une apologie, c’est donc litteralement une « parole pour » ou une « parole en faveur ».

31
B) Un terme juridique

i. Une défense

Apologia : Origine juridique.

Plaidoirie presente devant le procureur en défense de l’accuse.

ii. Deux apologétiques

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Deux cotes a l’apologetique : offensive et défensive

32
Quelques problèmes avec cette definition :

De plus, la definition est vague : que defendons-nous et comment ?

II. DÉFINITIONS

A) Position de G. Frommel

i. Science ou art

33
L’apologetique en tant que science est mecanique, fixe.

L’apologetique en tant qu’art laisse place a une adaptation.

34
ii. La vérification de la vérité chrétienne

Une autre question importante que pose Gaston Frommel est le moyen de « vérifier » la verite de la
foi chretienne / Bible.

Est-ce la raison ? Est-ce la philosophie, la science ?

Frommel souligne que l’apologetique cherche souvent un « tribunal » qui puisse juger des
affirmations de la foi chretienne.

35
Mais, conclut-il « ce tribunal ne saurait etre la nature humaine » !4
Pourquoi ?

iii. Deux choses certaines

Pour Frommel, il y a deux choses certaines, fixes, pour l’apologetique :

L’évangile

4 Gaston Frommel, La vérité humaine, vol. 1, p. 2.

36
La nature humaine

iv. Définition de Frommel


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37
B) L'importance de la foi

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i. Conséquences et implications de la foi chrétienne.

Avons-nous peur de la « defense » de la foi chretienne ?

38
ii. Apologétique et conversation

Pourquoi « conversation » ?

Un autre definition qui va dans le meme sens :

« L’apologétique, c’est se frayer un


chemin à travers le doute [scepticisme]
pour que le sceptique ait une bonne
vision de la croix de Jésus Christ ».

39
Distinction apologétique et évangélisation ?

Probleme ?

40
C) Une défense rationnelle

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i. La foi est-elle rationnelle ?

Quelle utilisation de la raison ?

41
Douglas Groothius : l'apologetique demontre la verite biblique par une investigation
intellectuelle et argumentative.

Foi et rationalite : dilemme.

ii. Rationnel et rationalisme

DÉF
Attention distinction importante a faire entre rationnel et rationalisme

42
D) Une apologétique biblique

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i. Le fondement de l’apologétique

43
ii. L’Ecriture seule ?

La Bible comme fondement et appui.

Dans la pratique apologetique ? Que faisons-nous ?

44
E) Une défense de la vérité révélée

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i. Apologétique et vérité

La foi a un contenu.

45
Nous defendons et presentons quelque chose de precis.

ii. Apologétique et fondements communs

Que sont des « fondements communs » ?

La plupart des apologetes sont en quete d’un terrain commun.

46
DÉF DÉF
terrain commun points de contact

Nous prefererons le terme « points de contact ».

Nous y reviendrons.

47
iii. Problèmes

F) L'apologétique : une nécessité

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i. Savoir quoi dire

48
Education theologique dans les Églises.

ii. Problèmes

Attention, il y a deux types de crédibilités.

Compréhensibilité

49
Accommodation

Distinction cruciale lorsque nous rencontrons des figures comme Friedrich Schleiermacher ou
Rudolf Bultmann.

G) Définition adoptée

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50
i. L’apologétique comme justification

Presentation et defense.

Deux elements necessaires.

ii. En paroles ou en actes

51
iii. Une vision du monde

52
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I. L'APOLOGÉTIQUE DANS UN MONDE CRÉÉ

A) La création de l'homme

i. La création appelle l’homme vers son créateur

Psaume 19 :
2 Le ciel raconte la gloire de Dieu, la voûte céleste dit l'œuvre de ses mains.
3 Le jour l'annonce au jour, la nuit l'explique à la nuit.
4 Ce n'est pas un langage, ce ne sont pas des paroles, on n'entend pas leur voix.

53
Souligner CITATION PAGE 14 … l'apologetique est fondee sur la creation, comme l'explique bien
McGrath :

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La revelation generale : À QUOI peut-elle servir ?

54
EMPREINTE de Dieu.

RUPTURE dans la creation :

Ce que nous aurions pu connaître du Createur dans la nature est maintenant


obscurci.

Notre connaissance et les moyens que nous avons de connaitre sont affectés par la
séparation d'avec Dieu.

55
ii. Le Créateur demeure présent pour sa création

L’ordre cree est un point de contact commun a tout le monde.

B) Les conséquences noétiques du péché

Si les effets du péchés touchent aussi notre intelligence, que dire de notre capacite a « connaitre »
Dieu dans la nature ?

56
i. La question de la connaissance

Existe-t-il des capacites naturelles donnant acces a Dieu ?

Plusieurs possibilités.

Que sont des capacités naturelles ? La raison, l’imagination la conscience, et meme pour
certains, la morale.

57
Souvent en apologetique ces capacites ont ete vues comme les « juges » de la vérité de la foi et
de la revelation :

BIBLE

RAISON

Ces capacites naturelles sont-elles affectees par la chute ?


Si elles le sont, peuvent-elles etres de vrais juges ?

58
DÉF
Renforce, a tort, l’idee de l’homme autonome

ii. La communication par le langage humain

Si Dieu ne se revele pas, pouvons nous le connaitre ?

59
Caractères : Parole puissante et dynamique.

Dieu a une « capacite » a accommoder sa personne, sa puissance, et sa Parole a sa creature.

Analogie avec le projet apologetique. Importance des mots (cf. McGrath, pp. 25-26).

60
C) La relation de Dieu avec l'homme

i. Relation et communion

Deux types de relations : communion et rebellion.

DIEU

obeissance createur
communion souverain

HOMME

61
ii. Rupture de la communion avec Dieu

La relation est-elle vraiment brisee ?

DIEU

communion createur
brisee souverain

HOMME

62
La communion avec Dieu est brisee mais il demeure une certaine relation.

Nous sommes en relation de communion ou d’opposition avec Dieu.

iii. L'homme toujours en relation avec Dieu

63
II. LE POINT DE CONTACT

A) La nécessité d'un point de contact

i. Terrain commun ou point de contact

Différence entre point de contact et terrain commun.

Terrain commun : présuppose un domaine pas touche par le peche.

64
ii. Le double point de contact

Pour McGrath, Calvin presente plusieurs points de contact :

Sens de la divinité, p. 29.

L’ordre du monde, p. 29.

65
B) Raison ou conscience : les êtres humains devant Dieu

i Raison ou conscience

Raison ou conscience comme terrains communs ?

La raison ?

La conscience ? Voir Alexandre Vinet.

Mais si la raison n’est pas un terrain commun que chretiens et non-chretiens peuvent utiliser, cela
signifie-t-il que les non-chretiens ne peuvent rien connaitre ?

66
ii. Point de contact, terrain commun, et neutralité

C) Romains 1 et la connaissance de Dieu

i. Une vérité captive mais implantée

Romains 1.18 a 25.

67
Trois elements :

Dieu est manifeste

Dieu s’est fait connaître

Dieu se révèle a l’etre humain en le creant a son image.

68
ii. Un Dieu bien connu

« 20 En effet, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance


éternelle et sa divinité, se voient comme à l'oeil, depuis la création
du monde, quand on les considère dans ses ouvrages. Ils sont donc
inexcusables »

Qu’est-ce qui est connu de Dieu ?

Le Dieu trinitaire a « imprimé » sa connaissance en nous.

69
« 21 puisque ayant connu Dieu, ils ne l'ont point glorifié comme
Dieu, et ne lui ont point rendu grâces; mais ils se sont égarés dans
leurs pensées, et leur coeur sans intelligence a été plongé dans les
ténèbres. »

iii. Le désaccord McGrath – Van Til

Cf. la lecture.

70
Centree sur la place de la raison dans la « connaissance » dont parle Rm 1.18-25.

QUESTION : s’agit-il d’une connaissance acquise ou implantee ?

Lecture recommandée : David L. Turner, « Cornelius Van Til and Romans 1.18-21 », Grace
Theological Journal, 2/1, 1981, pp. 45-58 (cf. document en fin de session).

71
III. CONCEPTS THÉOLOGIQUES

A) L'image de Dieu

La première chose qui emerge du recit de la creation, c'est la nature personnelle de


Dieu.

Dieu est une personnalité absolue. Il n’y a rien d’abstrait en lui. Il est personnel.

72
Qu’est-ce que l’image de Dieu.

Le corps humain, image de Dieu.

B) La grâce commune de Dieu

i. Trois fonction de la grâce commune

73
La providence universelle de Dieu : Matthieu 5.45

Dieu restreint les consequences du peche (Rom. 13.1 ; Gn 3-4)

Nous pouvons donc comprendre le monde car Dieu nous donne le privilege, par sa grace
de connaitre le monde : nous comprenons intellectuellement mais nous ne connaissons pas
vraiment tant que nous ne connaissons pas le Createur (Rom 1.18 ss. ; Rom 2.14)

74
ii. La grâce commune et la possibilité de l'apologétique

C) Conclusions

75
Notre methode apologetique prendra en compte :

Nous sommes image de Dieu : nous avons une connaissance de Dieu que nous
rejetons et fuyons.

Le fait que nous soyons image de Dieu et que nous sommes pécheurs : cela constitue
le point de contact entre croyants et non croyants.

76
Notre apologetique essaie de découvrir la « vision du monde » de notre
interlocuteur.

Nous essaierons de montrer la contradiction entre ce que nos contemporains croient et


le monde cree par Dieu.

77
Dieu nous a confié le
ministère de la Parole,
pas ses résultats.�
CORNÉLIUS VAN TIL ET ROMAINS 1:18-21
UNE ÉTUDE SUR L'ÉPISTÉMOLOGIE
DE L'APOLOGÉTIQUE PRÉSUPPOSITIONALISTE
David L. Turner
Grace Theological Journal no. 2/1, 1981, pp. 45-58

[Note sur la traduction : bien qu’un peu technique cet article est important pour comprendre
l’apologetique de Van Til. L’article propose une evaluation exegetique et s’appuie sur le texte grec.
L’etudiant qui ne connait pas encore assez cette langue pourra s’appuyer sur le texte interlineaire
grec-français par exemple ici https://biblehub.com/interlinear/romans/1.htm. Les notes de bas de
page n’ont pas ete traduites.]

Est-ce que le chrétien devrait essayer de prouver l’existence de Dieu au non-croyant ?


Beaucoup d’apologètes répondraient par l'affirmative, du moins dans certains cas. Cependant, Van
Til répond « non ». Selon son point de vue, certes développé en supposant la vérité de la Bible, le
non-croyant est en quelque sorte déjà conscient, dans les profondeurs de son cœur, que Dieu existe.
Van Til développe cet argument concernant le sensus deitatis (sens de la divinité) en grande partie
à l’appui de Rm 1.18-21. La présente étude vise d'abord à résumer certaines des caractéristiques
pertinentes de l'épistémologie de Van Til. Puis une brève exégèse des caractéristiques pertinentes
de Rm 1.18-21 suivra, avec la conclusion que Van Til a principalement raison. Dans
l'évangélisation et l'apologétique, le chrétien ne doit pas essayer de prouver l'existence de Dieu au
non-croyant. Ce dernier, s'il est honnête avec lui-même, le sait déjà. Le chrétien doit proclamer
l’Évangile, la dynamique que Dieu a établie pour ramener les perdus vers lui.

INTRODUCTION
L'apologetique presuppositionaliste de Van Til differe radicalement de l'apologetique
traditionnelle (qu'elle soit empirique, rationaliste ou une combinaison des deux.) Considerant les
Écritures comme s’authentifiant elles-memes, il assume leur verite. La citation suivante resume bien
sa position de base :

« Je considere ce que la Bible dit a propos de Dieu et de sa relation a l'univers comme


etant incontestablement vrai, et ceci de sa propre autorite. La Bible exige des hommes
qu'ils croient qu'il existe en dehors du monde et au-dessus du monde et que par son
plan, il controle tout ce qui se passe dans le monde. Tout dans l'univers cree montre
donc le fait qu'il est controle par Dieu, qu'il est ce qu'il est en vertu de la place qu'il
occupe dans le plan de Dieu. La preuve objective de l'existence de Dieu et de la
gouvernance globale du monde par Dieu est donc si evidente que tout le monde devrait
pouvoir le voir. Les hommes ne peuvent echapper a cette preuve. Ils la voient autour
d'eux. Ils le voient en eux. Leur propre constitution montre si clairement les faits de la
creation et du controle de Dieu sur eux qu'il n'y a pas d'homme qui puisse y echapper.
S'il est conscient de lui-meme, il est aussi conscient de Dieu. Peu importe comment les
hommes essaient, ils ne peuvent pas se cacher le fait de leur propre creation. Que les
hommes s'engagent dans l'etude inductive des faits de la nature les concernant, ou qu’ils
s'engagent dans l'analyse de leur propre conscience, ils sont toujours face a face avec le
Dieu qui les a crees. »5
5 Cornelius Van Til, The Defense of the Faith, 3e ed., Philadelphie, P&R, 1967, p. 195.
79
Selon Van Til, Dieu est le point de reference logique de toute affirmation [litt. predication].
L'homme en Eden, cree a l'image de Dieu, pensait les pensees de Dieu a sa suite. L'homme dechu,
cependant, supprime sa connaissance de Dieu meme s'il est toujours conscient de l'existence de
Dieu. L'homme regenere s'est vu redonner la capacite de penser les pensees de Dieu « d’apres lui ».
Ainsi, pour Van Til, l'apologetique est en grande partie un appel a l'image de Dieu dans l'homme,
laquelle image inclut un sensus deitatis (sentiment de deite) qui ne peut pas etre eradique6.

Le moins que nous puissions dire, c’est que tout cela est rejete par les apologetes traditionnels,
qui font principalement appel aux capacites rationnelles de l'homme ou a la perception de ses sens.
Les hommes qui entrent dans cette categorie croient que Van Til a detruit la possibilite de
l’apologetique : sa defense de la foi a laisse la foi sans defense. Dans cette optique, Van Til est
essentiellement un fideiste, quelqu'un qui exige des hommes qu'ils croient en Dieu independamment
de toute preuve7. La reponse de Van Til a cela est en substance l'affirmation selon laquelle sa
position concorde avec les doctrines bibliques de la grace commune, de la revelation generale et de
la connaissance inherente mais supprimee de Dieu par l'homme. Van Til n’en appelle donc pas
qu’aux capacites rationnelles ou sensorielles de l'homme, qui, selon lui, sont serieusement affectees
par la chute. Au lieu de cela, Van Til fait appel au sens interieur de la deite que la pensee de
l'homme dechu supprime. Les passages bibliques importants pour l'argument de Van Til incluent
Genese 3, Actes 14 et 17, 1 Corinthiens 2, Éphesiens 2 et 4, et surtout Romains 1-2.

En lisant les œuvres de Van Til, cependant, on se rend compte que l'exegese biblique n'est pas le
point fort de Van Til. Il se contente generalement de citer des passages traduits sans se soucier des
textes originaux8. En reponse a G. C. Berkouwer, Van Til admet ce probleme : « Je reconnais que
mon petit livre sur La Souveraineté de la Grâce aurait dû contenir beaucoup plus d'exegese qu'il ne
l'a fait. C'est un defaut. Le manque d'exegese biblique detaillee est un manque dans tous mes ecrits.
Je n'ai aucune excuse pour cela. »9

Ce probleme souligne la necessite de cette etude. Il ne fait aucun doute que Rm 1, 18-21 est un
passage majeur pour la methode apologetique de Van Til. Pourtant, il ne donne nulle part une
exegese detaillee du passage. Il semble donc imperatif de presupposer a l'apologetique de
determiner s'il a bien compris ce passage vital. Cette breve etude se concentre d'abord sur un aperçu
de quelques traits saillants de l'epistemologie de Van Til. Puis quelques facteurs exegetiques cles
dans Rom 1.18-21 sont abordes.

UN SURVOL DES ASPECTS PARTICULIERS DE


L’ÉPISTÉMOLOGIE DE VAN TIL
Selon une source, l'epistemologie est « la theorie de la connaissance… cette branche de la
philosophie qui s'interesse a la nature et a la portee de la connaissance, a ses presupposes et a son
fondement, et a la fiabilite generale des pretentions a la connaissance »10. Les travaux de Van Til
mettent l'accent sur l'epistemologie, en particulier son Christian Theory of Knwoledge.
6 Cornelius Van Til, The Reformed Pastor and Modern Thought, Philadelphie, P&R, 1971, p. 6, 140, 151.
7 Gordon Gordon R. Lewis, "Van Til and Carnell-Part I," Jerusalem and Athens (ed. E. R. Geehan; Nutley, NJ: Presby-
terian and Reformed, 1971) 359-61; and Testing Christianity’s Truth Claims (Chicago: Moody, 1976) 144-48.
8 But see "Apologetics" (syllabus, Westminster Theological Seminary, n.d.) 43-44; Introduction to Systematic Theolo-
gy, vol. 5 of In Defense of Biblical Christianity, (Nutley, NJ: Presbyterian and Reformed, 1976) 93; Christian Theory of
Knowledge (Nutley, NJ: Presbyterian and Reformed, 1969) 245, 264, 308; and The Intellectual Challenge of the Gospel
(Philadelphia: Presbyterian and Reformed, 1953) 6.
9 Jerusalem and Athens, 203. Van Til further states that he has been aware of traditional reformed exegesis and wishes
he had included more of it in his writings. He adds that he hopes his readers will do their own exegesis. A former stu-
dent of Van Til, Prof. James M. Grier, Jr., of Cedarville College, related that Van Til usually referred his students to the
exegesis of his colleagues John Murray, Ned Stonehouse, and E. J. Young. Murray and Van Til do differ on some fea-
tures of Romans 1, however, as will be shown later in this study.

80
La pensée analogique

L'epistemologie de Van Til repose sur le concept fondamental de la pensee analogique, fonde
sur la distinction entre Dieu en tant que Createur et l’homme, en tant que creature. Dieu est
« original », absolu et infini tandis que l'homme est derive, limite et « fini ». L'homme, cree a
l'image de Dieu, etait responsable de penser analogiquement les pensees de Dieu apres lui. De cette
façon, l'homme devait interpreter l'univers de Dieu, a l'aide de l’interpretation premiere de Dieu, la
revelation speciale. Pour prouver ce concept, Van Til s'appuie sur Genese 1-3, dans lequel Dieu, par
une revelation speciale, interpreta la terre (revelation generale) pour l'homme et chargea ensuite
l'homme d'etre soumis a cette revelation et a son interpretation. La connaissance de Dieu est donc
complete et analytique, tandis que la connaissance de l'homme est limitee et analogique, et pourtant
authentique.

« Le systeme que les chretiens cherchent a obtenir peut… etre dit analogique… Dieu a
un systeme absolu et autonome a l'interieur de lui-meme… Mais l’homme, en tant que
creature de Dieu, ne peut avoir une reproduction de ce systeme de Dieu… Il doit… en
cherchant a former son propre systeme, etre constamment soumis a l'autorite du systeme
de Dieu dans la mesure où ce systeme lui est revele. Pour cette raison, toutes les
interpretations de l'homme dans n'importe quel domaine sont soumises aux Écritures.
L'Écriture nous informe qu'au debut de l'histoire, avant que l'homme ait peche, il etait
soumis a la revelation directe de Dieu dans toutes les interpretations qu'il faisait de son
environnement. »11

Le concept de la connaissance analogique de Van Til a donne lieu a un differend avec Gordon
Clark12. Clark semble soutenir que la connaissance doit etre univoque et complete afin d'etre
authentique, et il accuse le systeme de Van Til de conduire au scepticisme car, par lui-meme,
l'homme ne peut connaitre la verite mais seulement une analogie de la verite. En reponse, Van Til
affirme que la perspective univoque de Clark oblitere la distinction entre le Createur et la creature et
nie l'incomprehensibilite de Dieu. De l'avis de Van Til, « nous connaissons le monde vraiment…
sans le connaitre de maniere exhaustive… »13

Il faut maintenant expliquer l’implication de ce fait sur Rm 1.18 ff. Selon Van Til, ce passage
affirme que les hommes connaissaient Dieu, tout en choisissant de servir la creature plutot que le
Createur, tout en supprimant leur connaissance interieure de Dieu. Van Til y voit une rebellion
contre la distinction Createur-creature et la mise en place de l'autonomie humaine a la place de la
revelation speciale – qui sert de point de reference ultime pour comprendre l'univers. La solution de
Van Til implique que les croyants se soumettent une fois de plus a la revelation speciale de Dieu
afin d'interpreter correctement la realite : « L'interpretation de l'homme doit toujours etre
reinterpretee. Les hommes ne peuvent obtenir la realite du tout que par l'interpretation de Dieu… Le
fait qu'il s'agit d'une reinterpretation de l'original de Dieu rend notre interpretation valable. »14

10 D. W. Hamlyn, "Epistemology, History of," The Encyclopedia of Philosophy (ed. Paul Edwards; 8 vols.; New York
Macmillan, 1967), 3. 9-10.
11 Van Til, Christian Theory of Knowledge, 16; ct. The Defense of the Faith, 31-50; and "Apologetics," 9-11.
12 Gordon H. Clark, "The Bible as Truth" BSac 114 (1957) 157-70; and "Apologetics," Contemporary Evangelical
Thought (ed. by C. F. H. Henry; Great Neck, NY: Channel, 1957), 159.
13 The Defense of the Faith, 43. For further discussion of this question, see Robert L. Reymond, The Justification of
Knowledge (Nutley, NJ: Presbyterian and Reformed,1976) 98-105, and Gilbert B. Weaver, "The Concepts of Truth in
the Apologetics Systems of Gordon Haddon Clark and Cornelius Van Til" (unpublished Th.D dissertation, Grace Theo-
logical Seminary, 1967) passim. Reymond favors Clark's approach and Weaver argues that Van Til is correct.
14 Psychology of Religion, vol. 4 of In Defense of Biblical Christianity (Nutley, Presbyterian and Reformed, 1971) 53.
81
Trois types de conscience épistémologique

Une deuxieme caracteristique fondamentale de l'epistemologie de Van Til est sa conception de


trois types de conscience. Base sur sa distinction Createur-Creature, Van Til discerne (1) la
conscience adamique, (2) la conscience non regeneree, et (3) la conscience regeneree 15. Par
« conscience adamique », il se refere a la soumission pre-lapsaire d'Adam a la revelation lorsqu'il
reconstruit et reinterprete de maniere receptive le systeme de Dieu. La « conscience non regeneree »
fait reference a la tentative erronee et futile de l'homme de creer son propre systeme autonome
(construction creative) au mepris total de la revelation de Dieu. « La conscience regeneree » fait
reference a la pensee du croyant qui est en train d'etre restauree dans la conscience adamique, c'est-
a-dire qui reinterprete a nouveau la realite dans la soumission a la revelation (cf. Ep 4, 20-24). Il
faut ajouter ici que la position de Van Til ne nie pas une conscience de soi commune, creee pour
tous les hommes.

A ce stade, il est imperatif de faire une qualificatification. Van Til s'empresse de souligner que
les hommes, qu'ils soient regeneres ou non, peuvent dans la pratique etre respectivement meilleurs
ou pires qu'ils ne le sont en principe. Ainsi, l'homme non regenere n'est souvent pas aussi mauvais
en pratique qu'il pourrait l'etre en principe, et l'homme regenere est souvent, malheureusement, pas
aussi bon en pratique qu'il devrait l'etre en principe. Ici, le motif paulinien « vieil homme » contre
« homme nouveau » est utilise de maniere inedite. De meme que le « vieil homme » du croyant
l'entrave dans sa quete de soumission a Dieu 16, de meme le vieil homme du non-croyant (son image
de Dieu et son sensus deitatis) l'entrave dans sa quete d'autonomie. Selon les propres mots de Van
Til,

« C'est l'homme nouveau en Jesus-Christ qui est le vrai homme. Mais ce nouvel
homme trouve en chaque exemple concret qu'il a en lui un vieil homme qui fait la
guerre a ses membres et reprime l'elaboration des principes du nouvel homme. De
meme, on peut dire que le non-croyant a son nouvel homme. C'est cet homme qui, lors
de la chute, a declare l'independance de Dieu, cherchant a etre son propre point de
reference… Mais comme dans l'homme nouveau du chretien, l'homme nouveau du non-
croyant trouve en lui un vieil homme qui se bat dans ses membres contre sa volonte.
C'est le sens de la divinite, la connaissance de la creature et de la responsabilite envers
son Createur et Juge… Or, le non-croyant ne parvient jamais pleinement dans cette vie a
supprimer le vieil homme qu'il a en lui… C'est la raison pour laquelle il fait un bien
relatif bien que dans son cœur, dans son nouvel homme, il soit totalement mauvais. La
situation est donc toujours mitigee. Dans toute declaration de philosophie personnelle, il
y aura toujours des vestiges de son ‘vieil homme’. Dans le cas du chretien, cela
l'empeche d'etre toujours chretien dans sa philosophie de vie et dans sa pratique. Dans le
cas du non-croyant, cela l'empeche d'etre pleinement soumis a Satan dans son
opposition a Dieu. »17

Rom 1.18 ff. est evidemment pertinent a ce point du developpement de Van Til. L'homme
semble etre vu par Paul comme supprimant (1.18) sa connaissance (1.21, 28, 32) de Dieu dans sa

15 See The Defense of the Faith, 48-50; Introduction to Systematic Theology, 25- 30; and Christian Theistic Ethics, vol.
3 of In Defense of Biblical Christianity (Nutley, NJ: Presbyterian and Reformed, 1977) 20-24.
16 The writer is aware of the division among exegetes on the old man vs. new man motif (Rom 6:5; Eph 4:22-24; Col
3:9-10.) Van Til seems to agree with those who hold that this motif contrasts the old and new in the believer. There are
others, however, who hold that the old man is the unregenerate man and the new man is the regenerate man. Even if one
does not agree with Van Til's terminology, it must still be recognized that the believer still has the capacity to sin. For
an able discussion of this question with a defense of the latter view, see John Murray, Principles of Conduct (Grand
Rapids: Eerdmans, 1957) 211-19.
17 See Van Til's “Introduction" in B. B. Warfield, The Inspiration and Authority of the Bible (Philadelphia: Presbyteri-
an and Reformed, 1948) 24; and also his "Nature and Scripture" in The Infallible Word (3rd rev. ed.; Philadelphia: Pres-
byterian and Reformed, 1967) 282.

82
quete futile d'autonomie. Ainsi, le « vieil homme » du non-croyant, sa conscience du Createur et de
l'univers cree, entrave son « homme nouveau » dans sa vaine tentative d'acquerir la sagesse sans
Dieu (1.22).

Conclusion

Le point de depart du systeme de Van Til est le Dieu trinitaire qui s'est revele infailliblement
dans les Écritures qui s'attestent elles-memes. Sans ce fondement, ni la loi de la contradiction ni la
perception sensorielle de l'homme ne seraient intelligibles. L'homme n'est pas considere comme un
chercheur impartial de la verite qui peut etre convaincu de l'existence de Dieu par des arguments
probabilistes fondes sur la raison ou l'experience. Au lieu de cela, l'homme est considere comme
etant rebelle contre Dieu. Pourtant, dans son etre le plus profond, le non-croyant reconnait encore
son Maitre. Par consequent, le point de contact dans l'apologetique et l'evangelisation 18 est le « vieil
homme » du non-croyant : sa conscience de Dieu et de l’univers de Dieu – qu'il possede parce qu’il
a ete cree a l'image de Dieu. La revelation naturelle est autoritaire, suffisante et perspicace pour
l'homme naturel19, mais il est coupable de supprimer son temoignage et de ne pas l'interpreter
conjointement avec une revelation speciale (surnaturelle).

NOTES ÉXÉGÉTIQUES SUR RM 1.18-21


AVEC ÉVALUATION DE LA POSITION DE VAN TIL
Cette section ne pretend pas etre une exegese exhaustive de ce passage. Cependant, elle
exposera certaines questions qui, dans ces versets, sont d'une importance cruciale pour Van Til en
particulier, et pour l'apologetique chretienne en general. La position de Van Til sera evaluee d’une
perspective geographique.

Argument du passage
L'argument general de Rm 1.8-32 semble avoir trois mouvements. Premierement, Paul relate la
revelation de la colere de Dieu (1.18). Deuxiemement, il explique les raisons de la colere de Dieu, a
savoir que les hommes ont supprime et rejete l'auto-revelation de Dieu dans la nature. Ils adorent
idolatrement la creation et non le Createur (1.19-23). Troisiemement, Paul montre les resultats de la
colere de Dieu (1.24-32). Le jugement de Dieu sur l'idolatrie de l'homme comprend la delivrance
des hommes jusqu'a l'impurete (24-25), l'homosexualite (26-27) et la depravation radicale (28-32).
Dans son ensemble, cette section de l'epitre met l'accent sur la continuite actuelle de la revelation de
la colere de Dieu (apokalyptetai, 1.18), qui doit etre identifie avec le fait que Dieu livre les hommes
au peche (paredōken, 1.24,26,28). Le but de l'argument de Paul n'est pas que ces peches peuvent
conduire a la colere de Dieu dans le futur. Au contraire, ces peches indiquent que la colere de Dieu
est deja deversee : « En d'autres termes, la rebellion sexuelle, le laisser-aller moral [litt. license], et
l'anarchie sont le jugement retributif de Dieu. »20

Plus precisement, l'argument de 1, 18-21 semble etre construit sur les conjonctions gal~ (18, 20)
et dio~ (19, 21). Le salut par la foi et la revelation de la justice de Dieu (1.16-17) sont de la plus
haute importance parce que (gar) la colere de Dieu est egalement revelee (1.18). La colere de Dieu
est revelee parce que (dio) les hommes n'ont pas repondu a la revelation de Dieu clairement

18 Van Til has been criticized for joining apologetics and evangelism by Frederic R. Howe, "Kerygma and Apologia,"
Jerusalem and Athens, 445-52. Van Til's response to Howe is that no "sharp distinction" between apologetics and evan-
gelism is justified from Scripture. In Van Til's view, the "defense of the truth of Christianity . . . is always, at the same
time, a witness to Christ as the Way, the Truth, and the Life" (ibid., 452).
19 « Nature and Scripture », 272-83.
20 S. Lewis Johnson, Jr., "'God Gave Them Up': A Study in Divine Retribution," BSac 129 (1972) 130.
83
presente dans la nature (1.19). 1.20 semble etre largement [une consequence] exegetique de 1.19 ; le
gar devrait probablement etre compris comme explicatif (« en effet »). Les hommes sont sans
excuse (1.20c) parce que (dio) ils n’ont pas glorifie Dieu meme s'ils le connaissaient (1.21a).

Romains 1.18

Dans Rm 1, 18, le sens de katechontōn est crucial. Le verbe katechó a deux sens legitimes dans
le Nouveau Testament, « tenir fermement » et « retenir »21. La question fondamentale ici est de
savoir si Paul declare simplement que le non-croyant « retient » (= « posseder, avoir ») la verite ou
« supprime » (= « entraver, tenir ») la verite. Les exegetes reputes peuvent etre des deux cotes de la
question22. La deuxieme solution semble correspondre beaucoup mieux a l'argument contextuel.
Toutefois, les deux possibilites sont complementaires et non contradictoires. Si les non-croyants
possedent la verite dans un etat injuste, ils la suppriment en realite. De meme, la suppression de la
verite semble presupposer la possession de celle-ci.

Pour Van Til, katechontōn se refere definitivement a la suppression. Lorsqu'on parcourt les
œuvres de Van Til, on trouve de nombreuses « traductions » du mot, y compris « retenir, garder,
empecher, entraver, resister, reprimer et supprimer ». Selon Van Til, l'homme non-croyant est
engage dans une bataille perdue d’avance, celle de l’affirmation de l'autonomie humaine malgre le
sensus deitatis. La suggestion de Cranfield, selon laquelle le katechontōn est simplement conatif,
s'inscrit dans le cadre de la perspective de Van Til 23. La tentative dechue d'obliterer la verite, est
inherente a leur etre meme. Cette tentative « est toujours vouee a l'echec »24.

Romains 1.19

Deux caracteristiques de 1.19 sont pertinentes pour cette discussion. La premiere d'entre elles
concerne le sens de l'expression to gnōston tou theou. Cette expression fait-elle reference a une
connaissance reelle ou simplement potentielle ? En d'autres termes, y a-t-il un sens reel dans lequel
les non-croyants connaissent Dieu, ou Paul dit-il simplement que Dieu est « connaissable » ? Ce
deuxieme point de vue est appuye par de nombreux chercheurs bien connus 25. Cependant, la
declaration de H. G. Liddon est difficile a refuter : « L'expression… doit, selon l'invariable usage du
Nouveau Testament et de la LXX, signifier ‘ce que l'on sait’ et non ‘ce que l'on peut savoir de
Dieu’. »26

21 See BAGD, 422-23, for a detailed discussion.


22 Those who view katexo<ntwn as possession include G. Abbott-Smith, Manual Greek Lexicon of the New Testament
(3rd ed.; Edinburgh: T. & T. Clark, 1937) 241, following J. B. Lightfoot, Notes on the Epistles of St. Paul (reprinted;
Winona Lake, IN: Alpha Publications, n.d.) 251. See also R. St. John Parry, ed., The Epistle of Paul the Apostle to the
Romans (CGT; Cambridge: Cambridge University, 1912) 43-44. However, most exegetical commentaries view
katexo<ntwn as suppression. See, for example, C. E. B. Cranfield, A Critical and Exegetical Commentary on Romans
(ICC; Edinburgh: T. & T. Clark, 1975), 1. 112; C. K. Barrett, A Commentary on the Epistle to the Romans (New York:
Harper and Row, 1957) 34. Against both of the above is the translation "laying claim" advocated by F. W. Danker in
"Under Contract," Festschrift to Honor F. Wilbur Gingrich (ed. E. H. Barth and R. E. Cocroft; Leiden: Brill, 1972) 93.
23 Commentaire sur Rm 1, p.112.
24 Ibid.
25 Ibid., 113. William Sanday and Arthur C. Headlam, A Critical and Exegetical Commentary on the Epistle to the Ro-
mans (ICC; Edinburgh: T. & T. Clark, 1902) 42; E. H. Gifford, The Epistle of St. Paul to the Romans (London: John
Murray, 1886) 62. BAGD (164) translates "what can be known about God or God, to the extent that he can be known."
Similarly, R. Bultmann, "'ginw<skw," TDNT 1(1974) 718-19, under- stands it "God in his knowability."
26 H. P. Liddon, Explanatory Analysis of St. Paul's Epistle to the Romans (London: Longmans, Green, 1899) 26. See
also H. A. W. Meyer, Critical and Exegetical Handbook to the Epistle to the Romans trans. by J. C. Moore and E. John-
son; rev. and ed. by W. P. Dickson; New York: Funk and Wagnalls, 1884) 57; R. C. H. Lenski, The Interpretation of St.
Paul’s Epistle to the Romans (Minneapolis: Augsburg, 1961) 95-96; and Charles Hodge, Commentary on the Epistle to
the Romans (reprinted; Grand Rapids: Eerdmans, 1976) 36. It should be noted that even gnw<ston means "knowable"
the context seems to require not only that God is "knowable" but that he is actually "known." That is why the suppres-
sion takes place.

84
Pour Van Til, l'homme non sauve connait vraiment Dieu. Dieu se revele clairement a travers la
nature et la conscience. Van Til admettrait que la revelation de Dieu par la nature est d'une portee
limitee (cf. 1, 20), mais il insisterait encore pour que l'homme connaisse reellement ce Dieu. Bien
que gnōston puisse avoir une signification potentielle en grec classique 27, il semble preferable, a la
lumiere de l'usage et du contexte du Nouveau Testament, de le comprendre comme une reference a
une connaissance reelle mais refoulee. Il n'y a pas lieu de parler ici d'une connaissance potentielle
de Dieu a acquerir par l'argumentation de la probabilite. Paul ne cherche certainement pas un
« argument cosmologique ». Il parle plutot d'une connaissance reelle de Dieu obtenue de la nature.
L'homme supprime cette connaissance limitee et devient ainsi « sans excuse » (1.20).

La deuxieme caracteristique de 1.19 qui merite d'etre traitee ici est la signification de l'huile
prepositionnelle en autois. Trois points de vue ont ete suggeres, chacun d'eux etant
grammaticalement possible : (1) Dieu est manifeste dans la conscience de chaque homme 28 (2) Dieu
est manifeste parmi les hommes de maniere collective 29, et (3) Dieu est manifeste aux hommes (=
simple datif d'objet indirect autois, 1:19b)30.

Évidemment, la 1e perspective serait plus en harmonie avec la position de Van Til sur le sensus
deitatis. L'objection la plus forte a cela, cependant, est que le contexte met l'accent sur la revelation
externe objective, et non sur l'apprehension subjective individuelle interne de cette revelation 31.
Cette objection peut avoir une certaine force, mais il faut noter que le contexte de Romains 1 inclut
l'idee d'une apprehension subjective de la revelation dans la nature (cf. gnōston, 1.19 ; gnontes,
1.21 ; epignōsei, 1.28 ; et epignontes, 1.32). Comment pourrait-on dire autrement que les hommes
« suppriment » la verite (1.18) ? Meme si le point de vue 2 ou 3 est favorise, la position de Van Til
n'est pas necessairement niee.

Romains 1.20

Alors que beaucoup de temps pourrait etre passe sur les attributs de Dieu (dynamis kai theiotēs),
deux autres considerations sont plus particulierement pertinentes pour cette etude. La premiere
concerne la signification de la phrase prepositionnelle apo ktiseōs kosmou. Les chercheurs sont
divises sur la question d'une connotation temporelle (« depuis ») ou d’origine (« de »). On pourrait
soutenir que l'idee d’« origine » ou « source » est plus naturelle selon la preposition 32, mais
l'utilisation temporelle est aussi clairement demontrable33. La question est donc de savoir si cette
phrase se refere a la « source » de la revelation des attributs invisibles de Dieu ou a « l'origine » de
la revelation des attributs invisibles de Dieu, ou au moment où ces attributs ont commence a etre
reveles de cette façon.

Aucune de ces deux possibilites ne pose de probleme a l’apologetique de Van Til. La vue
temporelle est cependant a privilegier, puisque la source ou le moyen de la revelation s'exprime deja
par tois poiēmasin (1.20)34. Ainsi, la vue temporelle evite une tautologie. La revelation naturelle de
Dieu a donc commence a l'epoque de la creation de l'univers, mais meme pendant la periode pre-
lapsaire, les paroles directes et verbales de Dieu la revelation interpretait la revelation naturelle pour
Adam.

27 LSJ, p. 355.
28 Sanday and Headlam, Romans, 42; Gifford, Romans, 62; Liddon, Romans, 25; Meyer, Romans, 57; and Charles M.
Horne, "Toward a Biblical Apologetic," Grace Journal 2:2 (1961) 15.
29 Cranfield, Romans, 1. 113-14.
30 John Murray, The Epistle to the Romans (NICNT; Grand Rapids: Eerdmans, 1959), 1. 37-38.
31 Cranfield, Romans, 1. 114; Murray, Romans, 1 37-38.
32 Gifford, Romans, 63, 70.
33 BAGD, 87; J. H. Thayer, A Greek-English Lexicon of the New Testament (Edinburgh: T. & T. Clark, 1901) 58; San-
day and Headlam, Romans, 42-43; Cranfield, Romans, 1. 114; and Murray, Romans, 1. 39.
34 Nigel Turner views this as a probable instrumental dative. See his Syntax, vol. 3 of A Grammar of New Testament
Greek by J. H. Moulton (Edinburgh: T. & T. Clark, 1963) 240.
85
Une deuxieme caracteristique notable de 1.20 est la signification du verbe kathoratai. Avec
kathēkonta (1.28) ce verbe forme un oxymore frappant35. Le verbe kathoraó est une forme
composee dans laquelle kata intensifie horáō. Le sens est « percevoir » ou « remarquer » et peut
etre rendu ici avec le participe modal nooumena, « perçu avec l'œil de la raison »36. Cranfield,
soutenant que la perception mentale subjective est exclue, soutient que seule la vue physique est en
vue37.

Pour Van Til, la clarte (ou perspecuite) de la revelation naturelle est un facteur important. Il est
d'avis que les preuves theistes (les « cinq voies » de Thomas d’Aquinas38) compromettent
serieusement cette clarte, car, telles qu'elles sont formulees par le peuple, elles ne tiennent pas
compte du sensus deitatis et se contentent de conclusions probables sur l'existence divine. La
position de Van Til semble etre justifiee par le verbe kathoratai. Les non-croyants sont consideres
comme percevant clairement les attributs invisibles de Dieu alors qu'ils suppriment simultanement
sa connaissance. Van Til a donc raison d'affirmer que les preuves theistes, telles qu'elles sont
normalement formulees, sont contre-productives. Si les hommes savent deja que Dieu existe, c'est
une erreur d'essayer de le leur prouver de la maniere habituelle.

L'approche habituelle repond au desir d'autonomie de l'homme et ne tient pas compte du sensus
deitatis ou de la clarte de la revelation naturelle. Raisonner avec un esprit pretendument neutre et
non sauve concernant la possibilite de l'existence de Dieu ignore totalement l'elan de Paul dans ce
contexte.

Romains 1.21

Une seule phrase de Rom 1.21 sera discutee, le participe adverbial gnontes ton Theon. Puisqu'il
est aoriste, il pourrait impliquer une action anterieure ou simultanee a celle des principaux verbes
edoxasan, ēucharistēsan, emataiōthēsan, e t eskotisthē. Cranfield opte pour l'action prealable
« puisque leur experience de Dieu a necessairement toujours precede leur incapacite a en
reconnaitre la veritable signification et a agir en consequence »39. Il semble egalement vrai,
cependant, que leur incapacite a interpreter correctement leur experience de Dieu survient meme
lorsqu'ils sont conscients de son existence et de son existence. Le participe a peut-etre une force
concessive ici40. Le sentiment serait alors que meme s'ils connaissaient Dieu (comme le montre Paul
en 1.18-20), ils refusaient encore de le glorifier ou de le remercier.

Cette comprehension peut etre appuyee dans le contexte de 1.21. La suppression de la verite
(1.18) exige un certain degre de connaissance a son sujet, et 1.19-20 parle de l'etendue de cette
connaissance (etant exegetique a 1.18). La vanite et l'obscurcissement de la pensee en 1.21 et les
activites decrites dans les versets suivants supposent tous la connaissance de la verite par l'homme.
Il convient de noter en particulier a cet egard 1.28, où les hommes sont depeints comme n'aimant
pas avoir Dieu dans leur connaissance (epignōsei), ce qui entraine la punition d'un adokimon noun.
35 Murray, Romans, 1. 28. For another mind-boggling oxymoron see Eph 1:19.
36 BAGD 391. Thayer, Lexicon, 314 translates the verb "to see thoroughly, perceive clearly, understand." W.
Michaelis views noou?mena as a simultaneous modal participle describing a mental process, "o[ra<w," TDNT 5.
380.
37 Romans, 1. 115. Similarly, Sanday and Headlam, Romans, 43, mention that the kata> prefix may be directive,
resulting in the meaning "surveyor contemplate."
38 St. Thomas Aquinas, Existence and Nature of God, vol. 2 of Summa Theologiae. ed. T. McDermott (60 vols.; New
York: McGraw-Hill, 1964) 13-17 (Question 2, art. 3). Aquinas interpreted Rom 1:18ff. as indicating men could
come to know about God's existence by their natural powers of reasoning. Van Til, on the other hand, says that men
already know God and use their rational capacities to suppress this knowledge. G. Bornkamm is certainly correct in
pointing out that Paul here emphasizes natural revelation as a basis for judgment, not as a basis for a theoretical
understanding of God. See his "Faith and Reason in Paul's Epistles," NTS 4 (1958) 96-97. It is difficult to
understand the position of J. J. O'Rourke, who admits that Paul is speaking about
39 Romans, 1. 116n.
40 H. E. Dana and J. R. Mantey, A Manual Grammar of the Greek New Testament (Toronto: Macmillan, 1955) 227.
See also Barrett, Romans, 36; NASB.

86
Dans l'acte d'accusation final du chapitre, 1.32, il est fait une autre reference au fait qu'ils
connaissaient les normes justes de Dieu (to dikaiōma tou Theou epignontes).

Avec les mots « il n’y a pas d’athees, encore moins dans l’au-dela »41, Van Til exprime sa
conviction que tous les hommes connaissent Dieu au plus profond de leur etre. Paradoxalement,
cependant, les hommes ne veulent pas connaitre Dieu et peuvent pretendre etre athees. Ainsi, la
meme personne est en un sens a la fois theiste et athee. Seule la grace de Dieu en Christ peut creer
en une telle personne une veritable connaissance salvifique de la divinite.

RÉSUMÉ ET CONCLUSION
La distinction entre la revelation naturelle et la theologie naturelle est aujourd'hui une question
d'une importance vitale en apologetique. S'il est certain que Dieu s'est revele dans la nature, il n'est
pas biblique d'affirmer que l'homme repond positivement a la revelation naturelle. Au contraire,
l'homme supprime cette connaissance, se rebelle contre elle, et est donc judiciairement abandonne
par Dieu. Rom 1.18 ss. ne doit pas etre compris comme un argument cosmologique de la probabilite
de l'existence de Dieu. Une telle apologetique doit etre rejetee. Le terrain d'entente entre croyants et
non-croyants ne reside pas dans une epistemologie commune supposee, mais dans un port commun
de l'image de Dieu42. Ce terrain d'entente metaphysique, impliquant le sensus deitatis, devient le
point de contact approprie en apologetique et evangelique. Les hommes sont accessibles a l'evangile
parce qu'ils sont porteurs de l'image de Dieu et vivent dans l'univers de Dieu qui leur temoigne
constamment de Dieu4344. Voici le vrai genie de la methode apologetique de Cornelius Van Til. Que
tous ceux qui proclament l'evangile du Christ considerent l'accent de Van Til.

Deux domaines d'etude complementaires semblent suggeres par cette etude. Tout d'abord, il a
ete note plus haut que l'on peut se demander si Van Til n'a pas trop insiste sur le sensus deitatis dans
Romains 1. Meme John Murray avait des reserves a ce sujet 45. Cela suggere la necessite d'une etude
de 2:1-16 (en particulier 2:14-15) et d'une correlation de son importance avec celle de 1:18ff. La
tension entre la theologie naturelle et la revelation naturelle est un domaine plus vaste qui merite
d'etre plus etudie. Cranfield, par exemple, dans son desir d'eviter la premiere, est reticent a accepter
la deuxieme. Il ne condere pas que les hommes connaissent subjectivement Dieu par la revelation
naturelle. Selon lui, les hommes connaissent Dieu « dans le sens que dans leur conscience du monde
cree, c'est de lui qu'ils ont toujours ete, bien qu'involontairement, conscients – objectivement – de ce
qu'ils etaient. Ils l'ont en fait experimente… bien qu'ils ne l'aient pas reconnu… C'est dans ce sens

41 The Defense of the Faith, 153.


42 See the critique of "natural theology" in G. C. Berkouwer, General Revelation (Grand Rapids: Eerdmans, 1955)
148-53. Berkouwer concludes that "only by distinguishing between general revelation and natural theology can we
do justice to the message of Scripture" (153). See also Anders Nygren, Commentary on Romans (trans. by C. C.
Rasmussen; Philadelphia: Fortress, 1949) 102-9; and M.D. Hooker "Adam in Romans 1," NTS 6 (1960) 299-300.
43 Evidential apologetics relies upon a supposed epistemological common ground between believers and unbelievers.
From this perspective comes J. W. Montgomery's parable of the Shadoks and the Gibis, which originally appeared
in Jerusalem and Athens, pp. 383-88, and has recently been republished without change in Faith Founded on Fact:
Essays in Evidential Apologetics (New York: Thomas Nelson, 1978), 107-28. Montgomery concludes that
presuppositionalism (which he labels fideism) results in an impasse-there is no point of contact between the
mythical Shadoks and Gibis, who diverge radically in their respective world-views. However, Montgomery has
neglected the truth of Rom 1 that men at bottom know God. As Jim S. Halsey states, "Montgomery's engrossing
parable of the Shadoks and the Gibis fails as a valid critique of Van Til's apologetic for it assumes that each
race...has been created as a metaphysical blank. In other words, the parable ignores the central and crucial fact that
both the Shadoks and the Gibis know the truth from the outset of their respective existences. The difference between
the two (Christian and non-Christian) occurs at the point of epistemological interpretation." See Halsey's For a Time
Such as This: An Introduction to the Reformed Apologetic of Cornelius Van Ti1 (Nutley, NJ: Presbyterian and
Reformed, 1976) 78.
44 In his stimulating study, "The Scope of Natural Revelation in Romans 1 and Acts 17," NTS 5 (1959) 133-43, H. P.
Owen states "Paul would...seem to imply that the knowledge gained by natural revelation (either in an actual and
recognized, or in a potential and unrecognized form) constitutes a 'point of contact' for the gospel" (142).
45 Murray, Romans, I. 37-38
87
limite qu'ils l'ont connu toute leur vie. »46

Il a deja ete soutenu que le langage de Paul dans Rom 1.18 ff exige une plus grande conscience
de Dieu que ne le permet Cranfield. Peut-etre que la motivation de Cranfield est de soulager le
paradoxe que la position de Van Til met en place. Cranfield souligne l'eloignement de l'homme de
Dieu au detriment de la revelation naturelle. Cependant, Van Til souligne l'eloignement de l'homme
de Dieu comme etant une rebellion contre sa propre conscience et son environnement. Ici, les
disciples de Van Til devraient etre avertis par Cranfield de ne pas insister sur le sensus deitatis sans
mettre l'accent sur la suppression de la verite par l'homme, la rebellion contre la verite et l'abandon
judiciaire a la depravation radicale.

46 Romans, 1. 116-17.

88
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I. L'APOLOGÉTIQUE CLASSIQUE

A) Définition

i. Une méthode rationnelle

Accent sur la raison.

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89
Les grands arguments utilises par ce type d’apologetique sont les suivants :

L’argument cosmologique Les Cinq Voies de Thomas d’Aquin

La premiere cause
Le premier moteur
La necessite et la contingence

L’argument de la perfection

L’argument téléologique

L’argument ontologique (Anselme)

L’argument moral (type C. S. Lewis)

90
ii. L’utilisation de syllogismes

Qu’est-ce qu’un syllogisme ?

C’est l’une des bases du raisonnement logique. Une conclusion doit proceder (venir) logiquement et
necessairement d’affirmations (premisses) faites auparavant.

Par exemple :

1) Tous les hommes sont mortels (premisse 1, appelee « majeure »)

2) or Socrate est un homme (premisse 2, appelee « mineure »)

3) donc Socrate est mortel (conclusion)

91
Le syllogisme demontre une conclusion valide, pas nécessaire ou vraie.

Par exemple :

1) Jean-Philippe Bru arrive en Mercedes.

2) Jean-Philippe Bru n’a pas les moyens d’acheter une Mercedes.

3) Donc Jean-Philippe Bru a gagne au loto.

Ou dans les mots de Geluck et son Chat :

92
Nous voyons une utilisation de syllogisme en Jean 7.21-24.

iii. Les lois de la logique

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93
Deux lois de la logique sont en particulier importantes :

La loi de non contradiction.


« Dieu existe » et « Dieu n’existe pas » sont deux affirmations contradictoires.

Le principe de bivalence.

Une affirmation claire ne peut pas etre possible et impossible a la fois.

94
B) Les Cinq Voies

i. Les arguments cosmologiques

La première cause

1. Tout ce qui vient a exister a une cause.

2. La cause de ce qui vient a exister a une cause.

3. Il est impossible de remonter ainsi « a l’infini ».


(impossibilite d'une « regression » a l'infini)

4. Ainsi, il doit exister un etre necessaire qui est la cause de tout et qui n’est pas cause.

95
Le premier moteur

1. Tout ce qui vient a etre en mouvement a une origine (un moteur)

2. Le mouvement de ce qui met en mouvement a une origine (un moteur)

3. Il est impossible de remonter ainsi « a l’infini »

4. Ainsi, il doit exister un etre necessaire qui est le « moteur » de tout et qui n’est pas en
mouvement

La nécessité et la contingence

96
1. Tout etre existant est soit contingent, soit necessaire.

2. Tous les etres ne peuvent etre contingents.


Si toutes les choses qui existent etaient contingentes, cela veut dire que le monde dans
lequel nous vivons actuellement n’existe pas necessairement. Il faut qu’il y ait un etre
qui existe necessairement (cf. point 3).

3. Par consequent, il existe un etre necessaire dont dependent les etres contingents.

4. Un etre necessaire, dont dependent toutes les choses contingentes, est ce que nous
entendons par « Dieu ».

5. Donc, Dieu existe.

L’argument du kalaam47
William Lane Craig.

47 Pour aller plus loin, consulter l’article de William Lane Craig, « The Kalam Cosmological Argument », disponible
en anglais sur le site de Reasonable Faith.
97
1. Tout ce qui a commence a exister a une cause.

2. L'univers a commence a exister.

3. Ainsi l’univers a une cause.

4. Cette cause doit etre elle-meme sans cause.


Ceci est expliquee par l’impossibilite d’un nombre infini de causes.

5. Les caracteres de cette « cause non causee » doivent etre les suivantes :
« Elle doit transcender l'espace et le temps, car elle a cree l'espace et du temps. Par
consequent, elle doit etre immaterielle et non physique. Elle doit etre incroyablement
puissante, car elle a cree toute la matiere et l’energie. » (citation de W. L. Craig)

6. Donc, Dieu existe.

Cet argument est souvent presente de maniere tres scientifique. Cf. W. L. Craig

98
ii. L’argument des degrés de perfection

1. Nous pensons que certains attributs sont quantifiables.

2. Ces attributs se trouvent sur une ligne continue definie par ses deux points finaux. Il y a
deux extremes opposes.

3. Parfois, le degre d'un attribut est communique a un objet par une source externe.

4. L'etre lui-meme confere des degres de perfection. Un etre intelligent existe a un degre plus
parfait qu'un autre ; de meme un etre capable d'amour existe a un degre plus parfait que celui
sans cette capacite.

5. Il doit exister un « meilleur » etre, une source et une norme reelle de toutes les perfections
que nous reconnaissons et qui nous appartiennent.

6. Cet etre parfait est Dieu.

99
iii. L’argument téléologique

William Paley et l'analogie de la montre.

L'expérience et la raison nous disent que la montre n'est pas « simplement » arrivee la.

Forme de l'argument :

1. Le reglage precis de l'univers est dû a la necessite physique, au hasard ou au design.

2. Ce n'est pas dû a la necessite physique ou au hasard.

3. Par consequent, c'est dû a une conception.

100
Cf. W. L. Craig

C) L’argument ontologique

i. Présentation

Anselme, premier a le formuler, le disait ainsi :

1. Dieu est par definition le plus grand etre concevable.

2. C'est evident, parce que si l'on peut concevoir un etre plus grand que Dieu, alors cet
autre etre serait Dieu.

3. Si Dieu existe uniquement dans l'esprit (la pensee), quelque chose de plus grand que Dieu
peut etre conçu : une chose qui existe dans le monde reel et dans la pensee.

101
4. Mais Dieu est le plus grand etre concevable, donc, de maniere definitive, nous ne pouvons
concevoir rien de plus grand que Dieu.

5. Dieu doit donc etre un etre qui existe non seulement dans l'esprit, mais aussi en realite.

6. Par consequent, Dieu existe.

Une autre version attachee a la personne d’Anselme est la suivante :

1. Un etre dont la non existence est inconcevable est plus grand qu'un etre dont la non-
existence est concevable.

2. Dieu est le plus grand etre concevable.

3. Dieu, alors, est un etre dont la non-existence est inconcevable.

4. Par consequent, Dieu existe.

ii. Problèmes

Première objection : cet argument peut etre utilise pour prouver n'importe quel etre bizarre.

102
Deuxèime objection : cet argument peut etre utilise pour prouver que Dieu doit pouvoir
démontrer que lui-meme n'existe pas !

D) L’argument moral

i. Qu’est-ce que l’argument moral ?

103
Formulation :

1. Il existe une loi morale universelle.

2. S'il existe une loi morale universelle, il y a un Legislateur moral.

3. S'il y a un Legislateur de la Loi Morale, il doit etre quelque chose d’autre et au-dela de
l'univers.

4. Par consequent, il existe quelque chose au-dela de l'univers.

La religion chrétienne est, à terme, un


sentiment de confort indescriptible.
Mais cela ne commence pas dans le
confort ; Elle commence par… une
consternation… si vous cherchez la
vérité, vous pouvez trouver un
réconfort à la fn : si vous cherchez le
réconfort, vous n'obtiendrez ni le
confort ni la vérité, seulement du
savon doux et des vœux pieux pour
commencer et, à la fn, le Désespoir. »

C.S. Lewis, Mere Christianity (New York:


Harper Collins, 2001 edition), p. 32.

Autre version de l’argument presente par W. L. Craig :

1. Si Dieu n’existe pas, alors il n’y a pas de critere objectif pour juger ce qui est bien et mal.

2. Il existe des choses que nous jugeons bien ou mal.

3. Donc Dieu existe.

104
iii. Problèmes

Comment etre certain qu'il existe un Legislateur ?

Et meme un seul ?

Comment montrer que c'est le Dieu de la révélation ?

105
II. ÉVALUATION DE L’APOLOGÉTIQUE CLASSIQUE

A) Limites de la méthode classique

i. L’utilité et pertinence des « preuves théistes »

ii. Fiabilité des « preuves théistes »

Objectif des arguments classiques : prouver l'existence necessaire d'un Créateur.

106
Dans l'apologetique classique, nous demandons aux « arguments » de faire quelque chose qu'ils
ne peuvent pas accomplir.

B) Problèmes théologiques

i. Les effets du péché

« Nous avons vu que la perspective


traditionnelle considère l'homme
naturel comme capable de
comprendre non seulement le
monde mais la Bible elle-même.
Celui qui n’est pas régénéré n’a pas
besoin de lumière surnaturelle et
spirituelle pour comprendre
quelque chose dont l'esprit humain
est capable… »
R. C. Sproul, John Gerstner, et Arthur Lindsley,
Classical Apologetics: A Rational Defense of the
Christian Faith and a Critique of Presuppositional
Apologetics, Grand Rapids, Zondervan, 1984, p.
298.

107
ii. La validité de la raison

iii. Le terrain commun

108
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I. PRÉSENTATION DE L'APOLOGÉTIQUE EMPIRISTE

A) Définition

i. Une expression ambiguë

Deux sens différents en français et en anglais.

Dans le Dictionnaire d’apologétique, sous la direction de Lydia Jaeger, nous parlons


d’apologetique empiriste.

Cf. l’article joint apres le plan du cours de cette session.

109
ii. Définition

« L'ap ologéti que évidenti al iste


commence à partir d'un point
spécifque de l'histoire afn de
prouver le christianisme, plutôt que
de commencer en l'élargissant au
champ de l'existence de Dieu. »

Apologetique empiriste. Utilisation des preuves (ou faits) historiques.

Grands representants : Lee Strobel, Josh McDowell, dans une certaine mesure C. S. Lewis.

110
John Warwick Montgomery, La foi fondée sur les faits.

Bernard Ramm presente trois types de « faits » :

Matériels

Surnaturels

Expérientiels

111
B) La méthode évidentielle

i. Une méthode fondée sur les faits

DÉF
Nous avons un acces direct aux faits. Objectivité des faits.

Les faits ne sont pas interprétés.

ii. Une méthode inductive

112
Les arguments inductifs sont ceux qui demontrent la validite ou verite de la conclusion (Christ
est ressuscite) a partir de l’association des faits, preuves, ou donnees.

iii. Des faits qui parlent d’eux-mêmes

« L’apologétique, c’est se frayer un


chemin à travers le doute
[scepticisme] pour que le sceptique
ait une bonne vision de la croix de
Jésus Christ ».
John W. Montgomery, éd., Evidence for Faith:
Deciding the God Question. Cornell Symposium on
Evidential Apologetics 1986, Dallas, Probe Books,
1991, p. 335

L’appui sur les faits ne nie pas l’importance de la logique.


113
« si vous tenez à vos mauvais
présupposés avec une ténacité
suffsante, les faits ne feront
aucune différence pour vous. »
J. W. Montgomery, “Death of the Death of
God,” dans Suicide of Christian Theology,
Trinity Press, 1970, p. 122.

iv. Une méthode de probabilité

La conclusion des arguments est probable plutot que certaine.

Démontrer l’existence probable de Dieu, est-ce suffisant ?

114
Reponse des apologètes empiristes :

Il est impossible d’être certain de l’existence d’un Dieu qui nous depasse autant.

Une certitude est une probabilite a 100%, ce qui n’existe pas.

C) Le terrain commun

i. L’objectivité des faits

Question du terrain commun et du critère commun a la verite.

Deux poles : objectivité et impartialité.


115
ii. Problèmes

Trois points de conclusion :

Le peche supprime notre connaissance.

Nos presupposes contre Dieu affectent notre lecture de l’histoire

Il n’y a pas de « faits bruts », de faits non interpretes.

Dans l'apologetique empiriste aussi, nous demandons aux « arguments » de faire quelque chose
qu'ils ne peuvent pas accomplir.

116
II. LES PREUVES DE L’APOLOGÉTIQUE EMPIRISTE

A) La fiabilité des textes des Évangiles

i. Le trilemme de C. S. Lewis

« Le Christ [1] a trompé l'humanité par


une fraude consciente, ou [2] il a été
lui-même trompé, ou il était victime
d'hallucination, ou [3] il était Divin.
On ne peut pas sortir de ce trilemme. »

John Duncan, cité par Justin Taylor, “Is CS


Lewis's Liar, lord, or lunatic argument
unsound?,” Gospel Coalition.

Lewis :

1) Si Jesus n'etait pas Seigneur, il serait un menteur ou un fou.

2) Jesus n'etait ni menteur ni lunatique.

3) Par consequent, Jesus est Seigneur.

117
L’argument est-il convaincant ? Trois criteres :

i) Les termes sont-ils clairs ?

ii) La logique est-elle valide ?

iii) Les premisses sont-elles vraies ? Non. L’argument est valide, mais pas « vrai » car la
premisse (1) n’est pas vraie. Il peut y avoir d’autres options.

Deux autre options mentionnee par George Marsden, biographe de C. S. Lewis :

Les personnes atteintes de maladies mentales sont capables de donner a la fois un


enseignement moral formidable et des revendications folles de statut divin.

Jésus n'a jamais prétendu être Dieu, ou Jesus est une legende.

« Qu'est-ce que vous croyez arrivé aux récits au cours des années
suivantes, alors qu’elles étaient reproduites, non pas comme des
récits désintéressés rapportées par des témoins oculaires mais
comme une propagande destinée à convertir les gens à la foi. »

Bart Ehrman, Jesus Interrupted, HarperCollins, 2009, p. 146-147.

118
ii. Le volume des textes transmis

Cf. Josh McDowell

Manuscrits grecs du Nouveau Testament, entier ou partiel : environ 5 500.

119
iii. Le test des noms utilisés dans les Évangiles

Argument developpe par Richard Bauckham48 et Peter Williams49.

Exemple
Les deux principaux noms masculins (Simon et Joseph) dans la Palestine du premier siecle, en
dehors du Nouveau Testament ont une frequence de 15,6%. La frequence de ces deux noms dans
les Evangiles et les Actes est de 18,2%. La frequence des 9 premiers noms masculins en dehors du
Nouveau Testament est de 41,5% alors que la frequence dans les Evangiles et les Actes est de
40,3%.

iv. Le principe d’étonnement et d’embarras

Les etonnements des disciples. Leur embarras et incrédulité souligne la veracite des recits50.

Argument de Donald Guthrie concernant Marc 13.3251.

48 Richard Bauckham, Jesus and the Eyewitnesses: The Gospels As Eyewitness Testimony, Grand Rapids, Eerdmans,
2008.
49 Peter Williams, « New Evidences the Gospels were Based on Eyewitness Accounts »,
https://www.youtube.com/watch?v=r5Ylt1pBMm8, consulte le 10 juillet 2017.
50 Gary Habermas, The Risen Jesus and Future Hope, Lanham, Rowman and Littlefield, 2003, pp. 21-22 presente de la
documentation sur ce sujet.
51 Donald Guthrie, New Testament Theology, Downers Grove, InterVarsity, 1981, p. 794, note 14.

120
B) La mort et la résurrection de Christ

i. La mort de Christ

ii. La résurrection de Christ

Cf. N. T. Wright, https://www.youtube.com/watch?v=Ln6LWHe84SQ

Deux arguments :

1. La croissance du mouvement messianique chretien apres la persecution publique de son


messie52.

52 N. T. Wright, Jesus and the Victory of God, Fortress Press, 1996.


121
« Judas le Galiléen, Simon, Athronges, Eleazar ben Deinaus et
Alexandre, Menahem, Simon bar Giora et Bar Kochba lui-même.
Face à la défaite de leur chef, les adeptes de ces fgures
disparaissaient ou se fondaient dans les sous-bois. »

N. T. Wright, Jesus and the Victory of God, Fortress Press, 1996, p. 110.

2. Les mutations chretiennes de la vision du judaïsme du Second Temple de la resurrection53.

iii. Le tombeau vide

Plusieurs arguments :

La clémence de Pilate54

53 N. T. Wright, The Resurrection of the Son of God, Fortress Press,


54 Craig Evans, « Getting the Burial Traditions and Evidences Right », dans How God Became Jesus: The Real
Origins of Belief in Jesus’ Divine Nature—A Response to Bart Ehrman, Grand Rapids, Zondervan, 2014, p. 75.

122
La méthode de mise au tombeau55.

C) Autres arguments

i. Le développement des Églises

ii. L’utilisation de « Christ » dans les textes non chrétiens

55 N. T. Wright, The Resurrection of the Son of God, Fortress Press, 2003, 707.
123
06
Méthode
⇡:Une
apologéti
que
Réformé
e( I)

I. UNE QUESTION DE PRÉSUPPOSÉS

A) Une méthode apologétique indirecte

i. L’importance de la méthode

Attention : on essaie maintenant de presenter une methode apologetique.

C'est le squelette sur lequel nous mettrons les muscles apologetiques.

125
ii. Méthode directe ou indirecte

La méthode directe
Les deux methodes classique et evidentielles sont a mettre ici.

La méthode indirecte
Essaie de montrer qu’une vision du monde non biblique se contredit et s’effondre « de
l’interieur ».

Une analogie cinématographique : dans le film Armageddon, la meteorite qui va


detruire la terre ne peut pas detruite en l’attaquant de l’exterieur. Il faut la faire exploser de
l’interieur.

C’est seulement une comparaison, mais elle peut etre utile.

Essaie de demontrer qu’il est impossible que Dieu n’existe pas.

126
B) Nous vivons de présupposés

i. La nécessité des présupposés

Notre méthode apologétique est une methode indirecte qui nous demande de discerner,
d’evaluer et de nous confronter aux presupposes des visions non bibliques.

Distinctions a faire :

Conscient et inconscients

Fixes et changeants

Ordinaire et ultimes

127
ii. Les présupposés : tout le monde a une foi

Commençons par une question : « Que sont les présupposés ? »

« Un présupposé est une conviction qui


prend le pas sur une autre et sert de
critère pour évaluer le reste de nos
convictions. »
John Frame, A History of Western Philosophy and
Theology, Philippsburg, P&R, 2015, p. 108.

Que veut dire « présupposer Dieu » ?

Que nous devons demander au non croyant de supposer l’existence de Dieu ?

Plutôt, c’est que Dieu, a l'origine de nos pensees.

128
Exemple : l’historicité de la résurrection

Quel est le probleme ? L’historicite de cet evenement ou le fait qu’on « presuppose » qu’il ne peut
pas y avoir de miracles ?

Le presuppose est une vision materialiste : seule la matiere existe.

Identifier le bon problème56

Répondre aux présupposés en montrant qu’ils sont contradictoires.

56 Yannick Imbert, Croire, expliquer, vivre, pp. 17-110.


129
C) La neutralité devant Dieu

i. La révélation de Dieu ou l'homme autonome : pas de milieu

Cornelius Van Til : opposition radicale, de principe, entre deux visions du monde. Biblique et
non biblique.

Donc contraste radical de principe entre chretien et non-chretien.

Van Til va meme plus loin en affirmant que « on ne sait pas si Dieu existe » equivaut a dire
que « Dieu n'existe pas ».

ii. L'impossibilité de la neutralité

130
Adam et Eve, et Genèse 2-3.

Présupposé : Adam et Eve pensaient pouvoir connaitre « comme » Dieu.

La neutralité est une négation. Vivre comme si Dieu n’existait pas, c’est de principe nier son
existence. Dans ce principe, il n’y a pas de difference entre agnostique et athee.

Agnostique : souvent quelqu’un qui va vivre comme « athee pratiquant ».

Athée : peut parfois parler et agir comme s’il n’etait pas certain que Dieu existe ou non. Ce
qui est une position plus agnostique.

iii. Une opposition de principe

Il faut apprecier cette radicalité de Van Til. Soit Dieu existe, soit [ ______remplir le
blanc______ ]
131
Van Til appelle cela le « principe d'antithèse ».

D) Quel dialogue apologétique ?

i . La grâce commune

S’il y a opposition « de principe » entre chretiens et non chretiens, ce principe est « mitigé » par
la notion de grace commune.

N’élimine pas la radicalite du peche.

Si nous pouvons connaitre quoi que ce soit c’est que Dieu, par sa grace commune, permet que nous
le connaissions.

La grace commune est un acte de Dieu.

132
ii. Le capital emprunté

Autre notion importante de Van Til.

Dans la pratique, la grace commune se voir en pratique dans ce que Van Til appelle le « capital
emprunté ».

Ce sont des affirmations qui ne peuvent etre vraies que si le Dieu de la Bible existe. Par
exemple : « L’inceste est immoral », « Les etres humains ont une dignite a defendre », ou meme 2
+ 2 = 4.

Le capital emprunte, c’est la banque des idées bibliques.

Nous vivons tous dans le même monde

Nous raisonnons tous avec de mêmes « lois de la nature »

133
Nous « reconnaissons » ces lois, soit nous les utilisons sans le savoir.

II. PRINCIPES D'APOLOGÉTIQUE

A) Retour au point de contact

i. Résumé

Nous pouvons identifier quatre points de contact :

Créés à l’image de Dieu

Nous vivons tous dans le monde créé par Dieu

Nous sommes tous pécheurs

Nous sommes tous au bénéfice de la grâce commune

134
ii. Importance dans la pratique apologétique

L'etre humain a été créé avec ces désirs de bonheur, de paix, de justice, d'amour.

Le peche detourner (pervertit) tous ces desirs.

B) La vision du monde

i. L’importance de la vision du monde

135
« Garde ton cœur plus que toute autre chose : de lui viennent les
sources de la vie » Proverbes 4.23.

Litterature, cinema

COEUR

Philosophie, science

La vision du monde est « une vision ou


perception profondément influente au
sujet de Dieu, du monde, et de nous-
mêmes, vision qui est ancrée et incarnée
dans le coeur humain »
David Naugle, Worldview: The History of a Concept,
Grand Rapids, Eerdmans, 2002.

136
ii. La construction d’une vision du monde

Qualites d’une vision du monde :

Holistiques
anthropologie

religion cinema

architecture musique

education COEUR economie

litterature
art

politique science
environnement

Exploratoires

137
Expriment une perspective

Plurielles

Se nourrissent de la réalité

138
iii. Importance en apologétique

Quelles questions poser pour identifier les aspects d’une vision du monde ?

Qu’est-ce que la nature humaine ?

Qu’est-ce qui est important, significatif pour nous ?

Qu’est-ce que la vérité ?

Quel est le but de la vie humaine ?

Mais nous pouvons aussi poser la question suivante : « Qu’est-ce que je crains le plus ? »

139
« Sans aucun fait référent,
ce qui est normatif est purement
une question de préférence. »
RAVI ZACHARIAS
6.01 INTRODUCTION À L'APOLOGÉTIQUE
« QUE SONT LES PRÉSUPPOSÉS ? »

DÉFINITIONS57

De maniere tres simple, une « presupposition » est quelque chose nous considerons comme allant de
soi. Les presupposes sont des croyances, ou affirmations, que la personne considere comme
acquises. Le langage des « presuppositions » est complexe, y compris chez Cornelius Van Til. Trois
sens du terme « presuppositions » peuvent etre delimites.

Premier sens

Le premier sens souligne la conscience que tout homme, qu'il soit regenere ou non, a de Dieu (Rm
1.18-32). Quels que soient les efforts faits par les etres humains pour rejeter Dieu, ce presuppose est
incontournable. Tous ont plus ou moins conscience de ce presuppose fondamental. Calvin a parle de
ceci comme etant le « sens de la divinite ».

Ainsi, Van Til a par exemple ecrit : « Le non-chretien… meme dans sa negation virtuelle de Dieu, il
presuppose encore reellement Dieu. »58

De meme, Van Til dit : « La position chretienne cherche a rendre intelligible l’experience humaine
en termes de presupposition de Dieu ; la position non chretienne cherche a rendre l' »experience
humaine intelligible en termes de l'homme conçu comme ultime. »59

Ce premier sens rejoint la perspective normative dont nous parlons avec Poythress (la tri-
perspective). Dieu nous a crees pour penser, soit « d’apres lui » soit contre lui. Ceci est le resultat
(1) de notre creation a l’image de Dieu, et (2) de la revelation de Dieu.

Deuxième sens

Le deuxieme usage du presuppose fait reference au systeme de croyance adopte par une personne,
qu’il soit chretien ou non. Ceci est etroitement associe a la notion de vision du monde. Ce sont
toutes les conviction fondamentales qui nous permettent d’integrer et de relier tout ce que nous
pensons, disons, et faisons.

Greg Bahnsen a defini la vision du monde comme un reseau de presupposes. Il a dit : « Les
presupposes constituent une perspective fondamentale ou un point de depart tres large qui interprete
tout ce que nous croyons. Dans cette perspective, tout ce que nous croyons est evalue et lie. C’est
pourquoi on dit que les presuppositions ont la plus grande ‘autorite’. Les presuppositions
s'avereront etre les convictions les moins negociables d’une personne. »

Et aussi : « Une vision du monde est un reseau de presupposes qui ne sont pas testes par les
sciences naturelles et sur lesquels toute experience est liee et interpretee. »

57 Voir, http://apolojet.wordpress.com/2012/11/13/van-tils-presuppositionalism-frames-perspectivalism/
58 Cornelius Van Til, A Christian Theory of Knowledge, p. 13.
59 Cornelius Van Til, The Dilemma of Education, p. 30-31.
141
Pour identifier un presuppose, nous devons essayer de discerner quelles sont les affirmations ou
conclusions que quelqu’un ne peut pas, ou ne veut pas, reconsiderer.

Ce deuxieme sens rejoint la perspective situationnelle : Nous developpons tous une vue sur le
monde en repondant a divers problemes et preoccupations de la vie. Le chretien cherche a
developper une vision du monde chretienne afin de soumettre ses pensees a la parole revelee de
Dieu, et finalement a Dieu lui-meme. Les incroyants developpent diverses conceptions du monde
non chretiennes afin d'echapper a la revelation de Dieu. Ils se soumettent a d’autre autorites.

Troisième sens

Dans un troisieme sens, un « presuppose » est l’engagement ultime du cœur d’une personne. Ceci
est en grande partie inconscient. John Frame a sans doute mieux explique la nature du cœur des
presupposes : « Peut-etre que le presuppositionnalisme est plus une attitude du cœur, une condition
spirituelle, qu'un phenomene empirique facilement descriptible. »60

Ce deuxieme sens rejoint la perspective existentielle : C’est la plus profonde motivation de notre
cœur. C’est ce qui se voit dans la vie de tous les jours, c’est l’engagement personnel que chacun
manifeste envers certaines dimensions essentielles de sa vie.

Quelles sont les questions qui rendent visibles nos présupposés ? 61

Qui suis-je ?
Où suis-je ?
Quel est le probleme ?
Quelle est la solution ?
Comment puis-je le savoir ?
Comment savoir ce qui est bien ou mal ?

En fin de compte la question centrale est celle-ci : Qu’est-ce qui fait autorite pour nous ? Qu’est-ce
que nous ne mettons jamais en question ?

EXERCICES

Ces quelques exemples tres simples permettent de voir ce que sont des presupposes. Pour chaque
phrase, nous pouvons discerner un ou plusieurs presupposes.

1. Jean a arrêté de fumer.


Presuppose : Jean fumait deja.

2. Le roi de Suède est marié.


Presuppose : Il y a un roi en Suede.

3. Tu es encore en retard.
Presuppose : La personne a deja ete plusieurs fois en retard.

4. Si j’étais Superman, je pourrais voler.


Presuppose : Je ne suis pas Superman.

60 John Frame, Apologetics to the Glory of God, p. 87.


61 Yannick Imbert, Croire, expliquer, vivre, p. 107.

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5. Romain a échoué ses examens.
Presuppose : Romain a essaye de passer ses examens.

6. Est-ce que tu veux bien faire la vaisselle cette fois ?

Il y a de la vaisselle qui doit etre lavee.


Je n'ai pas le temps de faire la vaisselle.
Quelqu'un n'a pas fait la vaisselle la derniere fois qu'il aurait fallu la faire.

7. Je voudrais plus de lait pour mon thé

Je deteste le the au lait.


Je vais prendre du the.
Quelqu'un a deja mis du lait dans son the.
Je n'aime pas mon the avec la quantite de lait actuellement presente dans le the.

8. As-tu déjà lu l’Institution de la religion chrétienne ?

L’Institution vaut la peine d’etre lue.


La personne qui parle a deja lu ce livre.
Il y a un livre qui s’appelle l’Institution

9. La création est imparfaite, donc le Créateur est imparfait

Le monde a toujours ete imparfait.


Le Createur n'existe pas.
La creation et le Createur sont une seule et meme chose.
Un ‘effet’ (la creation) partage toujours les caracteres de sa ‘cause’ (le Createur).

Il y a divers presupposes selon les convictions des personnes qui repondent. Il est possible de tenir a
un presuppose et pas a l’autre.

10. La femme d'Alex a appelé


(Repondre a cette question sous forme de quiz en ligne)

Alex est marie.


Alex est un homme.
La femme d'Alex a appele le responsable.
Il existe une femme mariee.

Ce dernier exemple est interessant. Nous aurions tendance a cocher la case « Alex est homme ».
Mais la seule chose que la phrase affirme c’est que « Alex » a une femme. Ce qui peut, avec la loi
actuelle, etre une autre femme. Nous avons donc présupposé que « etre marie » est entre un homme
et une femme !

11. Churchill et la paix de Versailles

(i) Churchill pensait que la paix de Versailles (signee en 1918) avait ete une mauvaise idee.
(ii) Churchill pensait que l'Angleterre devait defendre la paix de Versailles.

Nous pourrions croire que les deux attitudes sont contradictoires. Mais il est possible qu’elles soient
toutes les deux vraies : il y a simplement un presuppose a l’oeuvre. Ce presuppose est une
conviction, une attitude, fondamentale de Churchill : la loyaute. Il etait contre le traite de Versailles,
143
mais une fois signe, ce traite devait etre maintenu et defendu, surtout face a la montee de
l'Allemagne nazie.

12. Si Dieu existe, pourquoi est-ce qu’il ne se montre pas à moi ?

Presuppose : La seule / meilleure maniere que Dieu a de se reveler est de se montrer


« physiquement » aux gens.
Presuppose : Si dieu se montrait a moi, je croirai en lui.

13. En débat public, la « charge de la preuve » appartient au chrétien

Presuppose : Le chretien est celui qui doit prouver sa position. A priori, sa position est irrationnelle.
Et donc il est aussi presuppose que la position athee (par exemple) est la position rationnelle.

14. Si Dieu avait fait des miracles, nous en verrions encore aujourd’hui.

Presuppose : Ce que Dieu a deja fait une fois, il doit le faire une nouvelle fois.

EXPRESSIONS QUI INDIQUENT DES PRÉSUPPOSITIONS

Parfois (mais seulement parfois !), certains mots ou expressions nous indiquent qu’il y a un
presuppose en jeu. C’est par exemple le cas des expressions suivantes : Il est evident, tout le monde
sait que, il est naturel, il est impensable que.. etc.

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« QU’EST-CE QU’UNE VISION DU MONDE ? »
NANCY PEARCEY

Une etudiante elegamment vetue entra dans le bureau du conseiller, en faisant signe de la tete
comme un geste de defi. Sarah identifia immediatement le type de personne dont il s’agissait. La
clinique du Planning Familial où elle etait en fonction attirait souvent des etudiants de haut niveau
venus de l’universite voisine et la plupart etaient riches, privilegies et pleins de confiance en eux-
memes. « Asseyez-vous, je vous prie. J’ai les resultats de votre test… Vous etes enceinte. » La
jeune femme acquiesça et fit la grimace : « Je m’en doutais un peu. » « Avez-vous pense a ce que
vous voulez faire ? » La reponse fut rapide et nette. « Je veux me faire avorter. »

« Voyons d’abord les options a votre disposition, » dit Sarah. « Il est important pour vous
d’envisager toutes les possibilites avant votre depart aujourd’hui. » Parfois les jeunes femmes
s’impatientaient, meme jusqu’a devenir hostiles. Elles etaient deja convaincues qu’il n’existait pas
d’autres options viables. Apres des annees d’experience dans sa profession, Sarah savait que les
femmes sont souvent angoissees apres un avortement. Elle desirait aider les etudiantes a reflechir a
l’impact eventuel d’un avortement au cours des annees suivantes, afin qu’elles prennent une
decision en connaissance de cause. Si elles se derobaient, elle se rabattait sur le protocole : « C’est
ma responsabilite, je dois le faire. »

Pourquoi Sarah s’inquietait-elle ? C’etait une chretienne pratiquante, comme elle me l’expliqua
des annees plus tard, et elle pensait qu’etre croyante signifiait cela – montrer de la compassion pour
les femmes qui envisageaient d’avorter. Elle n’etait d’ailleurs pas seule : sa clinique etait situee
dans la ceinture biblique, et presque tout le personnel feminin etait pratiquant. Pendant les pauses,
elles discutaient de leurs groupes d’etudes bibliques ou des programmes d’ecole du dimanche de
leurs enfants.

L’histoire de Sarah illustre la façon dont des croyants sinceres sont entraines dans une vision
laïque du monde, – malgre le caractere orthodoxe de leurs croyances theologiques. Sarah avait ete
eduquee dans une denomination fermement attachee a l’Evangile. Adolescente, elle avait ete
ebranlee dans sa foi et etait sortie de la crise avec une nouvelle confiance en Dieu. « J’ai garde la
bible blanche que ma grand-mere m’a restituee a ce moment-la, » me dit-elle. « J’ai souligne tous
les passages qui traitent de la securite du salut. » Par la suite, elle n’a jamais plus doute des
doctrines fondamentales de la Bible.

Alors comment s’est-elle retrouvee avec un poste dans l’association du Planning Familial pour
conseiller les femmes a propos de l’avortement ? Pendant son cursus universitaire elle avait connu
une epreuve d’un genre particulier. Elle avait ete plongee dans le relativisme liberal qui avait cours
dans la plupart des campus universitaires aujourd’hui. Dans les cours de sociologie, d’anthropologie
et de philosophie, l’accent etait mis sur le caractere relatif de la verite dans la culture, le postulat
etant que des forces culturelles font emerger des idees et des croyances au travers de l’histoire, mais
sans que ces idees ou ces croyances, vraies ou fausses, puissent pretendre a aucune finalite.

Et le christianisme ? Il etait considéré comme non pertinent pour la culture universitaire « Dans
un cours sur la philosophie morale, le professeur a presente toutes les theories possibles et
imaginables, de l’existentialisme a l’utilitarisme, sans jamais dire un mot de la theorie chretienne de
145
la morale – alors qu’elle a domine toute l’histoire de l’occident, » se souvient Sarah. « Comme si
l’irrationalite supposee du christianisme le rendait indigne de figurer aux cotes des autres theories
morales. »

Sarah ne savait absolument pas comment reagir face a ces assauts contre sa foi. Son eglise
l’avait aidee a trouver l’assurance du salut, mais ne l’avait pas dotee de ressources intellectuelles
capables d’affronter les ideologies enseignees dans ses cours. L’enseignement de l’eglise avait
suppose une separation radicale entre le sacre et le seculier, et ne s’etait interesse qu’a la vie
religieuse de Sarah. En consequence, elle finit par absorber, au fil du temps, la perspective laïque
adoptee dans les cours. Le monde de ses pensees etait coupe en deux, la religion etant strictement
limitee au culte et a la morale personnelle, tandis que ses opinions sur tout le reste passaient par le
filtre du naturalisme et du relativisme.

« J’ai peut-etre commence par prendre puis par parsemer quelques bribes d’une vision du monde
par-dessus mes croyances chretiennes, » mais apres l’obtention de mes diplomes et une fois
engagee dans l’association du Planning Familial, le modele s’est inverse : mon christianisme s’est
reduit a un mince vernis plaque par-dessus une vision seculiere du monde. Cela equivalait presque a
une personnalite scindee en deux. » Pour s’en tenir aux categories decrites dans l’Introduction, son
esprit avait integre la verite duelle caracteristique de la culture occidentale: seculier/sacre,
fait/valeur, public/prive. Malgre la sincerite de sa foi, celle-ci en etait reduite a une experience
subjective, purement privee, tandis que la connaissance se definissait en termes de naturalisme
seculier.

L’histoire de Sarah est particulierement dramatique mais illustre cependant un modele plus
banal que nous n’aimerions le croire. La deficience dans sa foi etait imputable au fait qu’elle avait
accepte les doctrines au titre d’articles de foi separes : la divinite de Christ, Sa naissance virginale,
Ses miracles, Sa resurrection d’entre les morts – elle pouvait les cocher l’un apres l’autre. Mais elle
n’avait pas une claire conscience du systeme unifie et en surplomb que presente la verite du
christianisme; il s’applique aux questions de societe, a l’histoire, a la politique, a l’anthropologie,
comme a tout autre domaine. En bref, il lui manquait une vision chretienne du monde. Elle adherait
au christianisme comme a une collection de verites, mais non comme a la Verite en soi.

Les vues relativistes de Sarah ne furent remises en cause qu’apres une crise personnelle, soit
plusieurs annees plus tard. « Lorsque le Congres tenait des sessions sur l’avortement therapeutique
en fin de grossesse, j’etais bouleversee. Et j’ai compris que si l’avortement etait mauvais a neuf
mois, il l’etait aussi a huit mois, a sept et six mois – et jusqu’au debut du processus. » Ce fut une
experience tres destabilisante, et Sarah sentit la necessite de revoir sa vision seculiere du monde, un
article apres l’autre, puis de s’efforcer de construire, en lieu et place, une vision du monde
chretienne. Ce fut un travail de recherche certes tres eprouvant, mais aujourd’hui Sarah decouvre la
joie d’etre sortie du piege represente par la dichotomie en question, et de voir sa foi prendre vie
dans des domaines où elle ne se doutait meme pas qu’elle puisse s’appliquer. Elle apprend que le
christianisme, loin d’etre simplement une verite d’ordre religieux, est en fait la verite entiere – la
verite qui recouvre toute la realite.

UNE PENSÉE A DEUX NIVEAUX

A l’exemple de Sarah, les croyants ont integre la dichotomie entre fait et valeur, public et prive;
ils restreignent leur foi a la sphere du religieux et adoptent dans le meme temps les visions admises
dans leur milieu professionnel ou social. Nous connaissons sans doute tous des enseignants
chretiens qui acceptent sans les critiquer les toutes dernieres theories sur l’education; des hommes
d’affaire chretiens qui gerent leurs operations financieres selon les theories de gestion seculieres en
vigueur dans la sphere entrepreneuriale; des ministeres chretiens qui refletent les techniques du
marketing; des familles chretiennes dans lesquelles les adolescents regardent les memes films et

146
ecoutent la meme musique que leurs amis incroyants. Sinceres dans leur foi, ils n’en ont pas moins
faites leurs les opinions ayant cours dans tous les autres domaines, par simple osmose avec la
culture environnante.

Cette question a fait l’objet d’un expose succinct de Harry Blamires dans un classique intitule
The Christian Mind. Quand j’etais une jeune chretienne, ce livre faisait presque fureur, et la
dramatique phrase d’introduction : « Il n’y a plus d’esprit chretien » courait les rues. Que signifiait
cette phrase ? Blamires ne laissait pas entendre que les chretiens sont incultes, des pequenauds,
meme si ce stereotype reste courant dans le monde seculier. Voici quelques annees un abominable
article du Washington Post decrivait les chretiens conservateurs comme etant « pauvres, incultes et
facilement menes.» Le journal fut immediatement submerge d’appels et de fax de la part des
chretiens de tout le pays, qui donnaient la liste de leurs diplomes et de leurs comptes en banque !

Mais si le sens de cette phrase etait different, que fallait-il comprendre ? Dire qu’il n’y a pas
d’esprit chretien signifie que des croyants ayant une formation technique de haut niveau sont
cependant depourvus de toute vision biblique du monde pour interpreter l’objet central de leur
activite. Selon Bamires, « nous parlons de ‘l’esprit moderne’ et de ‘l’esprit scientifique’ et ce terme
d’‘esprit’ regroupe un eventail de notions et d’attitudes acceptees par toute la collectivite. Mais il
n’existe pas d’’esprit chretien’ – aucun ensemble de presupposes bibliquement fondes, partages par
tous sur des sujets tels que la loi, l’economie, l’education, la politique ou les arts. En tant qu’etre
moral, le chretien se soumet a l’ethique biblique. En tant qu’etre spirituel, il prie et assiste aux
reunions religieuses. Mais en tant qu’etre pensant, le chretien moderne a succombe au secularisme,
accepte une structure referentielle elaboree par l’esprit seculier et des criteres qui refletent les
evaluations du monde seculier. » Lors donc que nous entrons dans le courant du discours adjuge a
notre domaine professionnel, nous devenons mentalement des participants non-chretiens, nous
rejoignons mentalement les non-chretiens, car nous employons leurs concepts et leurs categories, et
ce malgre nos croyances.

Comme je vis dans la region de Washington, D.C., j’ai eu un temoignage de premiere main
quant au nombre croissant de croyants aujourd’hui engages dans la politique, un fait certes tres
encourageant. Mais l’experience m’a aussi appris que tres peu pratiquent une philosophie politique
explicitement chretienne. Un chef de personnel du Congres l’admit un jour : « J’ai conscience que
certaines de mes idees sont plus liees a la politique conservatrice a laquelle j’adhere, qu’a ma
connaissance de leur substrat biblique. » Il avait conscience de la necessite de formuler une
philosophie du pouvoir ancree dans la Bible, mais ne savait comment proceder.

De meme, au fil de livres publies pendant des decennies sur la science et la vision du monde,
j’ai pu interagir avec des scientifiques qui sont des croyants profondement consacres; peu d’entre
eux ont cependant construit une philosophie des sciences a partir d’une culture biblique. Parmi les
ministres du culte, beaucoup, de meme, prennent grand soin de s’assurer que leur message est
biblique, sans jamais se demander si leurs methodes le sont. J’ai su recemment par un professeur de
journalisme que meme les meilleurs journalistes chretiens – des hommes sinceres et hautement
qualifies – se caracterisent par une absence de theorie chretienne quant a leur profession. Dans la
culture populaire, les croyants ont elabore une culture entierement parallele touchant aux artistes et
aux professionnels du spectacle; mais la encore, et Charlie Peacock s’en plaint, il en est peu qui «
pensent le christianisme » en matiere d’art et d’esthetique. La tournure est empruntee a Blamires, et
quand je me suis adresse a un groupe d’artistes et de musiciens au domicile de Charlie, il m’a
montre une demi-douzaine d’exemplaires de son livre – assez pour en preter a plusieurs amis.

« Penser le christianisme, » c’est comprendre que le christianisme est la source de la verite sur la
realite tout entiere, une perspective apte a tout interpreter jusque dans le detail. La Genese nous
apprend que Dieu a amene tout l’univers a l’existence par Sa Parole – c’est-a-dire le Logos selon
Jean 1:1. En grec, ce terme a le sens de Parole mais aussi de raison ou de rationalite, et pour les
147
stoïciens il definissait la structure rationnelle de l’univers. La matrice sous-jacente de tout l’univers
se trouve ainsi refleter l’esprit du Createur. L’histoire biblique ne laisse apparaitre aucune
dichotomie entre les faits et les valeurs. Rien qui affiche une identite independante ou autonome,
separee de la volonte du Createur. Force est des lors d’interpreter toute la creation a la lumiere de sa
relation a Dieu. Chacun des domaines abordes exhibe les lois ou ordonnances creationnelles au
moyen desquelles Dieu a structure le monde.

L’Ecriture le dit, l’univers nous parle de Dieu – « les cieux declarent la gloire de Dieu »
(Psaumes 19:1) – et son caractere divin se reflete en effet dans ce qu’Il a cree. Il y est fait reference
sous le terme de revelation « generale » car elle s’adresse a tous en tout temps, par contraste avec la
revelation « particuliere » contenue dans la Bible. Selon Jonathan Edwards, Dieu communique non
seulement « par Sa Parole qui s’adresse a nous dans l’Ecriture » mais aussi dans la creation et les
evenements historiques. En realite, « toute la creation divine preche. » Les chretiens peuvent
cependant se montrer sourds et aveugles au message de la revelation generale, et avoir l’Esprit de
Christ consiste en partie a prier pour que la sensibilite spirituelle « entende » la predication affichee
par la creation.

Le grand historien des religions Martin Marty a dit un jour que la religion a deux fonctions :
c’est d’abord un message de salut personnel, c’est-a-dire de reconciliation avec Dieu; c’est ensuite
une grille d’interpretation du monde. Au plan de l’histoire, les evangeliques ont bien rempli la
premiere fonction – le salut des ames. Mais ils n’ont pas ete vraiment a la hauteur quant a donner a
chacun la capacite d’interpreter le monde, autrement dit de fournir un reseau de concepts
interconnectes, un peu comme une jumelle relayant une vision biblique des differents champs où
s’exercent les sciences, la politique, l’economie ou la bioethique. Les evangeliques, nous dit Marty,
ont singulierement « insiste sur la piete personnelle et le salut individuel, laissant a chacun le soin
d’interpreter le monde selon ses propres criteres. »

De fait, beaucoup ne pensent plus du tout que le christianisme a pour fonction d’interpreter le
monde. Marty appelle cela le Schisme Moderne (titre de l’un de ses ouvrages, Modern Schism), et
declare que pour la premiere fois dans l’histoire le christianisme a ete encastre dans la sphere privee
au point de ne plus etre entendu dans la sphere publique.

Selon Sidney Mead, un autre historien : « Cette interiorisation ou privatisation de la religion est
l’un des changements les plus importants jamais advenus dans la chretiente. » D’où l’aspect
disperse, fragmente de nos vies, la foi etant soigneusement verrouillee, enfermee a double tour dans
le royaume prive de l’eglise et de la famille, sans guere d’occasions de renseigner notre vie et notre
activite a l’exterieur. Le dimanche une fois ecoule, l’aura du culte se dissipe et nous endossons les
attitudes du seculier pour le reste de la semaine. Nous vivons dans deux mondes separes, en
maintenant une distance rigoureuse entre vie religieuse et vie courante.

LES MARGINAUX DE L’INSTITUT BIBLIQUE

La plupart des croyants ressentent en meme temps cette situation comme une frustration. Nous
voulons reellement que notre foi soit partie prenante de chaque aspect de notre vie, y compris son
cote professionnel. Nous ne voulons pas d’une personnalite composite – mais une veritable integrite
(le mot latin signifiant « complet »). J’ai rencontre un professeur d’art qui, nouveau converti,
souffrait beaucoup de ne pas savoir comment appliquer sa foi nouvelle a sa profession. « Je veux
que tout dans ma vie reflete ma relation a Dieu,» me dit-il. « Je refuse de savoir ma foi deconnectee
de mon art. »

Nous serions tous de l’avis de Dorothy Sayers : la religion qui ne s’exprime pas dans la vie
professionnelle ne s’exprime pas davantage pendant le reste de notre temps – il ne faut donc pas
s’etonner qu’elle n’ait droit de cite en aucun domaine ! « Comment est-il possible de conserver un

148
quelconque interet pour une religion apparemment sans rapport avec la quasi-totalite de sa vie ? »

Le dualisme seculier/sacre confine a un reel denigrement le travail ordinaire, par opposition aux
activites dans l’eglise dont la valeur est rehaussee. Bob Briner, dans son ouvrage Roaring Lambs,
decrit l’epoque où, etudiant dans un campus chretien, il etait implicitement admis que le travail
chretien a plein temps etait la seule maniere de reellement servir Dieu. Comme il se destinait deja a
une carriere de directeur sportif, Briner ecrit ceci : « Sur le campus, je me percevais comme une
sorte de citoyen de seconde categorie. Ceux de mes compagnons qui se preparaient au ministere de
la predication ou au service missionnaire etaient traites comme accomplissant le travail reel de
l’eglise. Nous, nous etions le comite de soutien. »

Il fallait entendre par la que les gens engages dans des professions ordinaires pourraient
participer par leurs prieres et un soutien financier, point final. « Presque rien dans mes experiences
d’eglise ou d’etudiant n’offrait de possibilites pour une vie chretienne engagee et dynamique, mais
exterieure au ministere a caractere professionnel. » Et voici la conclusion de Briner : « Vous etes,
nous dit-on, le sel et la lumiere, mais personne ne nous a dit comment faire. » Tout tournait autour
de l’idee superficielle de consecration de votre travail au Seigneur, mais apparemment dans le sens
tres restreint de « faites de votre mieux, et ne commettez pas de peches evidents. »

Ce meme dualisme seculier/sacre faillit avoir raison de la creativite des fondateurs des videos
humoristiques de Veggie Tales. Phil Vischer declare avoir toujours eu le desir d’etre producteur de
cinema, mais que « le message reçu depuis l’enfance impliquait le ministere a plein-temps comme
seule vocation chretienne valide. Les jeunes chretiens devaient aspirer a devenir soit pasteurs soit
missionnaires. » N’ecoutant que son devoir, il fit ses valises et partit dans un institut biblique pour
se preparer au ministere.

A mesure cependant qu’il constatait la forte influence des films sur les enfants, la necessite de
productions de grande qualite s’imposait a lui. Il prit enfin une decision qu’il commente en ces
termes : « J’ai pense que Dieu pouvait employer un ou deux producteurs de films, en depit des
opinions des uns et des autres. » Il quitta l’institut biblique pour creer une societe de production
videographique avec son ami Mike Nawrocki. Alors que ses anciens camarades devenaient pasteurs
et responsables de jeunesse, les deux hommes preterent leur voix a Bob la Tomate et Larry le
Concombre. Les traits d’humour allies aux messages bibliques ont assure l’immense succes de ces
videos. Cependant, si ces deux deserteurs de l’institut biblique ne s’etaient pas affranchis de la
mentalite du dualisme seculier/sacre et n’avaient pas decide que la production de films a vraiment
valeur de vocation pour les chretiens, leurs talents auraient pu etre perdus pour l’Eglise. Les dons
accordes a chaque membre du corps de Christ le sont au benefice de l’ensemble, de sorte que la
suppression de ces dons est une perte pour nous tous.

Le developpement du clivage seculier/prive surprend moins des que nous prenons conscience de
sa normalisation par de nombreux pasteurs et enseignants eux-memes. Un directeur d’ecole me
confia un jour que la plupart des educateurs definissent « un enseignant chretien » en termes stricts
de comportement, comme le fait de donner le bon exemple ou de s’interesser aux etudiants. Presque
aucun ne se definit par rapport a la vision biblique qu’il peut transmettre au travers des sujets traites
en matiere de litterature, de sciences, de sciences humaines ou dans les domaines artistiques. Pour
etre clair, il se preoccupe d’etre chretien dans son travail, mais non par rapport a une infrastructure,
une matrice biblique de son travail proprement dit.

La strategie classique de nombreuses ecoles chretiennes consiste a injecter dans la classe


quelques elements « religieux » bien delimites, telles la priere et la memorisation de passages
bibliques – puis a s’aligner tres exactement sur les programmes des ecoles laïques. Le programme
des etudes saupoudre de piete le sujet traite, tel du sucre glace sur un gateau, sans toucher au
contenu.
149
SUBTILE TENTATION

Ce modele s’applique jusqu’aux niveaux les plus hauts du monde academique. « Dans
l’enseignement superieur, les chretiens sont fortement, bien que de façon subtile, tentes de
cloisonner notre foi, » declare un professeur de sociologie apres une longue carriere dans une
faculte chretienne. La religion conserve sa pertinence dans des spheres specifiques – l’eglise et les
activites religieuses du campus. « Mais dans l’enseignement et la recherche, l’attention tend a se
concentrer sur les theories, les concepts, et toute la panoplie conventionnelle de nos disciplines
respectives. »

Le danger du clivage devient alors visible : « Les theses, concepts, et autres elements » sont
concedes aux incroyants dans chaque sphere. Les chretiens ont surtout accepte un marche : dans la
mesure meme où nos etudes bibliques et nos reunions de prieres sont autorisees, le contenu des
differents champs academiques est abandonne aux non-croyants.

J’en ai eu, voici de nombreuses annees, un exemple peu ordinaire en la personne d’un physicien
de l’enseignement superieur contacte pour l’un de mes articles. Il soutenait financierement un
ministere tres celebre consacre aux etudiants d’une grande universite; la question posee portait sur
la perspective chretienne applicable a sa specialite, et en particulier sur « la nouvelle physique » – la
theorie de la relativite et la mecanique quantique. Les propositions et contre-propositions n’ont pas
manque quant a l’impact pretendument revolutionnaire de la nouvelle physique – qui demolissait la
vision newtonienne du monde en vigueur pendant trois cents ans, en meme temps que le
determinisme, pour laisser la place au libre arbitre, une physique qui sapait le materialisme, et j’en
passe. De fait beaucoup de livres populaires sur le sujet pretendent meme que la theorie des quanta
confirme la metaphysique orientale (l’exemple type etant The Tao of Physics ). Jeune ecrivain,
j’etais curieuse de savoir quel regard pouvait porter un enseignant chretien de haut niveau sur les
vastes implications philosophiques de la nouvelle physique.
A ma consternation, le professeur n’avait rien a declarer. « La physique et la foi sont des
domaines completement separes, » me dit-il. J’ai garde en memoire les mots exacts : « La
mecanique quantique est comparable a la mecanique d’une voiture. Elle n’a rien a voir avec ma
foi. »

Voila un homme tres engage dans le temoignage aupres des etudiants, mais qui visiblement
maintenait sa foi et son savoir dans des directions paralleles – cote a cote, tels des rails de chemin
de fer sans intersections. Chretien et physicien, il ne disposait d’aucune vision chretienne du monde
capable de reunir ces deux realites.

Le developpement d’une mentalite chretienne engage assurement beaucoup plus de


responsabilites que celle de l’obtention d’un diplome d’etudes superieures. Nombre de chretiens
pourvus de doctorats ont simplement enterine une double approche de leur specialite, comme si la
science, la sociologie ou l’histoire se caracterisaient par la neutralite au plan religieux, et comme si
la verite biblique n’avait rien d’important a faire valider dans ces enclos du savoir. Cette attitude
semble en definitive devaloriser la Parole de Dieu comme « lumiere sur nos sentiers » et proner un
accommodement aux decrets des experts. Ainsi delestee de sa puissance de transformation des
esprits, la Parole de Dieu fait place a une rupture interieure et a la perte de la joie que procurent des
vies vecues dans la droiture et la plenitude.

L’IDOLATRIE DES LUMIERES

Les tenants de l’esprit seculier renforcent cette mentalite en affirmant que leur theorie, loin de
refleter une philosophie particuliere, exprime simplement « la façon de penser de toute personne
raisonnable. » Leurs options sont ainsi promues sous couleur d’impartialite, de rationalite, et de
parfaite adaptation au domaine public, alors qu’ils denoncent les points de vue religieux dits

150
partiaux et tendancieux. Cette tactique a souvent mis les chretiens sur la defensive quant a leur foi,
avec pour effet boomerang de taxer lourdement leur potentiel d’influence sur la culture au sens le
plus large.

L’erreur est de croire qu’il existe des theories objectives ou neutres, indemnes de toute pensee
philosophique et religieuse. S’il est evident que dans le domaine du sacre, chaque groupe – chretien,
juif, musulman, Nouvel Âge ou autre – possede ses propres croyances, la pensee seculiere accredite
souvent le libre acces de tous a une connaissance neutre dans laquelle les valeurs religieuses et
philosophiques ne sont pas censees interferer.

Mais cet ideal – voila l’ironie – est lui-meme le produit d’une tradition philosophique atypique.
L’idee de pouvoir deposseder l’esprit de tous presupposes et positions religieux prealables afin
d’atteindre aux verites brutes et pures de la « raison » est un produit des Lumieres. Au XVIIe siecle,
Rene Descartes, souvent considere comme le premier philosophe moderne, l’a soutenu avec
beaucoup de force. Pour Descartes, la meilleure maniere de trouver la verite etait de liberer l’esprit
de tous les doutes possibles et imaginables, jusqu’ au moment où apparait un substrat de verites
dont il s’avere impossible de douter. Il pensait avoir lui-meme creuse assez profond pour enfin
acceder a ce soubassement de verites incontestables au moyen de son celebre cogito : « Je pense
donc je suis. » Apres tout, la generalisation du doute s’inscrit aussi dans le continu de la pensee, de
sorte que l’existence du sujet pensant se trouve promue au rang de seule certitude.

L’idee se fit jour que par un exercice de doute systematique, l’esprit humain – ou la Raison
(l’initiale est souvent en majuscule) – pouvait atteindre a une objectivite et a une certitude
apparentees a celles de Dieu. Dans l’un de mes cours de philosophie a la faculte, le professeur
aimait a definir l’objectivite comme « la maniere dont Dieu voit les choses. » Sans etre du tout
croyant, il pensait que seul un Être transcendant ayant une parfaite vision de toute la realite pouvait
atteindre a l’objectivite. L’orgueil demesure des Lumieres sera de penser que la Raison etait
precisement ce genre de puissance transcendante, pourvoyeuse d’une connaissance infaillible. La
Raison devint ainsi rien de moins qu’une idole, admise comme source de la Verite absolue en lieu et
place de Dieu.

L’ironie veut aussi que Descartes lui-meme ait ete un fervent catholique; la certitude que Dieu
lui avait revele la logique irrefutable du cogito l’amena a faire vœu de pelerinage a Notre Dame de
Loreto en Italie – vœu accompli quelques annees plus tard. Descartes est un tragique exemple, en
fait, de la maniere dont un chretien sincere peut neanmoins promouvoir une philosophie qui n’est
certainement pas chretienne. Descartes contribua a l’institution d’une forme de rationalisme où la
Raison, par-dela sa capacite humaine a formuler une pensee rationnelle, incarnait desormais la
source infaillible et autonome de la verite. Aux yeux de tous, elle allait devenir un arsenal de verites
independantes de toute philosophie ou religion.

DEUX CITÉS

Un puissant contraste existait entre le projet des Lumieres et la tradition chretienne orthodoxe
qui proposait une vision beaucoup plus humble et plus realiste de la connaissance (ou
epistemologie). Elle reconnaissait que la connaissance admise pour telle est modelee en profondeur
par notre condition spirituelle. Augustin en donne la meilleure expression dans sa symbolique des
deux cites : La Cite de Dieu et la Cite de l’Homme. Augustin ne parlait pas de la separation entre
l’Eglise et l’Etat, contrairement a l’avis de certains; il decrivait deux systemes de pensee et
d’allegeance. Nous contribuons a l’edification de la Cite de Dieu quand l’amour de Dieu anime et
dirige des actions en vue de Son service. En revanche, nous edifions la Cite de l’Homme toutes les
fois que ces actes sont motives par l’amour propre, pour servir a des fins detournees.

151
Appliquee a la vie intellectuelle, l’image des deux cites signifie aborder le debat avec une
motivation spirituelle predeterminee qui affecte nos futurs choix de telle ou telle verite. Loin d’etre
une page blanche, notre esprit annonce la couleur de notre position spirituelle – etre pour ou contre
Dieu. Selon le chapitre 1 de l’epitre de Paul aux Romains, soit nous adorons et servons le vrai Dieu,
soit nous adorons et servons les creatures (les idoles). Les humains sont intrinsequement des etres
religieux, crees pour communiquer avec Dieu – s’ils Le rejettent, ils ne cessent pas pour autant
d’etre religieux mais adoptent simplement un autre principe directeur au fondement de leurs vies.

Cette idole prend souvent une forme concrete, comme la securite financiere ou la reussite
professionnelle; dans d’autres cas, ce sera une ideologie ou un ensemble de croyances de
substitution. Mais peu importe la forme, car la pensee exprimee en Romains 1:18 est que les
adorateurs d’idoles s’emploient activement a supprimer leur connaissance de Dieu, tout en
cherchant des dieux de substitution. Ils sont donc bien loin d’etre neutres en matiere de religion.

Le christianisme n’est pas deterministe : il enseigne que, par la grace de Dieu, les individus
peuvent recevoir la lumiere de la verite pour s’incliner devant Lui, et passer ainsi d’un bord a l’autre
– du royaume des tenebres au royaume de Christ (cf. Colossiens 1: 13). Cela s’appelle la
conversion. Nous n’en sommes pas moins a tout moment d’un cote ou de l’autre. Nous interpretons
notre experience a la lumiere de la revelation divine ou a celle d’un systeme de pensee
concurrentiel. Notre vocation de chretiens consiste a evincer peu a peu toutes les « idoles » nichees
dans l’intellect afin de pouvoir vivre chaque aspect de notre vie en tant que citoyens de la Cite de
Dieu.

Au cours des dernieres decennies, cette vision traditionnelle a reçu un renfort apparemment
inattendu. La philosophie contemporaine des sciences a rejete l’ancienne definition positiviste de la
connaissance, qui liberait comme par magie les savants, les hommes en blouse blanche, des idees
preconçues et des croyances a priori des leur accession au laboratoire. Les philosophes sont en
revanche beaucoup plus prompts aujourd’hui a admettre le facteur humain dans la validation des
connaissances – a admettre, autrement dit, qu’il est impossible de cerner les faits a partir d’une
posture philosophique purement neutre. La demarche scientifique concerne des personnalites au
profil accompli, des personnes qui accedent au laboratoire munies de toute une panoplie
d’experiences anterieures, de theories, de croyances, d’ambitions et d’interets socio-economiques.
Ces conceptions preexistantes colorent pratiquement toutes les facettes de l’entreprise scientifique :
preferences en matiere de recherche, espoirs de certaines decouvertes, objectifs et interpretation des
resultats.

« Tous les faits sont satures de theories » est de nos jours le slogan en vogue en philosophie des
sciences. Peut-etre un tant soit peu exagere, il souligne pourtant que meme le choix d’un « fait »
perçu comme tel est influence par nos theories. Nous traitons les donnees en fonction d’une
armature theorique qui nous rend le monde comprehensible.

ABSOLUMENT DIVIN

Il faut en conclure qu’aucun systeme de pensee n’est un pur produit de la raison – car celle-ci
n’est pas, contrairement a l’idee de Descartes et des autres rationalistes, depositaire de verites
infaillibles et autonomes a l’egard de la religion. Il s’agit plutot d’une faculte humaine, une capacite
a raisonner a partir de premisses. D’où l’extreme importance de connaitre les premisses d’un
individu, car tout en decoule.

Si vous remontez assez loin dans un systeme conceptuel, vous decouvrez eventuellement un
point de depart. Il faut que quelque chose existe en soi – une realite premiere, a l’origine de tout le
reste. Son existence ne s’explique pas; elle « est » tout simplement. Pour le materialiste, c’est la
matiere, et tout est reduit a l’etat de constituant. Pour le pantheiste, la realite ultime est une force

152
spirituelle ou substrat, et la meditation a pour but de se reconnecter a ce grand tout de nature
spirituelle. Pour le darwiniste dogmatique, la realite ultime est la biologie, et tout, y compris la
religion et la morale, procede de divers mecanismes darwiniens. Pour l’empiriste enfin, toute la
connaissance remonte aux donnees sensorielles, et ce qui ne passe pas par les sens n’est pas reel.

Ainsi de suite. Chaque systeme de pensee part d’un principe premier. Si le point de depart n’est
pas Dieu, ce sera une certaine dimension de la creation – materielle, spirituelle, biologique,
empirique ou autre. Tel aspect de la realite sera « absolutise » ou mis en avant comme fondement et
source de tout le reste – la causalite sans cause, le sui per se. En langage religieux, le principe
premier fonctionne comme modele divin, si ce terme definit l’entite unique dont tout procede. Cette
hypothese de depart doit etre acceptee par un acte de foi et non par deduction. (Sinon, il ne s’agit
pas vraiment du point initial de tout raisonnement – ce point est ailleurs, et il nous appartient de
creuser plus profond pour le substituer au precedent.)

Vue sous cet angle, nous pourrions dire que toute alternative au christianisme fait fonction de
religion. En l’absence meme de rituel ou de cultes, elle admet un certain principe ou force de la
creation comme cause premiere et per se de tout ce qui existe. Les incroyants eux-memes
s’accrochent a une ultime ou premiere raison d’etre, laquelle fait fonction d’idole ou de divinite.
D’où cette explication du philosophe Roy Clouser : « Les ecrivains sacres s’adressent toujours a
leur lecteur comme s’il croyait deja en Dieu ou en une divinite de substitution. » La foi est une
disposition humaine universelle; a defaut d’etre orientee vers Dieu, elle s’orientera vers autre chose.

« Le besoin d’une religion semble tres tenace dans l’animal humain selon » le philosophe John
Gray (meme si cet athee s’en plaignait). « Le comportement des humanistes seculiers soutient
assurement cette hypothese. Les athees sont tout aussi engages au plan emotionnel que les croyants,
mais sont d’ordinaire plus rigides intellectuellement. » En bref, ce n’est pas que les chretiens aient
la foi, alors que les laïcs fonderaient leurs convictions sur les faits et la raison. Le secularisme
s’appuie tout autant que le christianisme sur des croyances ultimes; une partie de la creation – la
matiere ou la nature – joue le role du divin. Le probleme n’est donc pas de bien distinguer entre une
conception religieuse et une conception purement rationnelle; le probleme est de savoir laquelle des
deux est vraie ou fausse.

Tel est le sens donne par Augustin a l’image des deux cites. Depuis la Chute, la race humaine a
ete divisee en deux groupes distincts – ceux qui suivent Dieu et se soumettent a Sa verite, et ceux
qui fabriquent une idole quelconque et organisent leur reflexion afin de rationaliser leur culte. Au fil
du temps, comme les engagements fondamentaux determinent les choix, les perspectives de tous
sont inevitablement inflechies de façon a conforter ces choix. Un faux dieu entraine inevitablement
la formation d’une fausse vision du monde.

Voila pourquoi les chretiens ne peuvent abandonner complaisamment certains domaines


pretendument seculiers aux incroyants – a la seule condition de se voir conceder une sphere
restreinte, la sphere restreinte du sacre où nous pouvons a loisir chanter des cantiques et lire la
Bible. Il nous incombe bien plutot d’identifier et de critiquer les idoles intellectuelles dominantes,
puis de construire des alternatives a partir d’assises bibliques.

LE TOURNEVIS D’ARISTOTE

Il ne faudrait pas en inferer que chretiens et non chretiens sont toujours en desaccord : ils se
rejoignent en fait dans une grande variete de secteurs. Les incroyants se revelent meme plus
competents dans le batiment, la gestion de banques, la chirurgie ou la creation de logiciels. La
raison en est la doctrine de la Creation : nous avons tous ete crees a l’image de Dieu pour vivre dans
un monde cree par Dieu, et nos facultes ont ete conçues pour nous donner une reelle connaissance
de ce monde. Croyants et incroyants peuvent, en consequence, s’accorder de maniere tres
153
significative dans de nombreux domaines.

Par ailleurs, la Bible enseigne la doctrine de la grace commune. Alors que la grace particuliere
refere au salut, la grace commune designe la providence divine – la maniere dont Dieu agit dans
toute la creation. Il « fait pleuvoir sur les justes et les injustes, » dit l’Ecriture (Matthieu.5:45). Ses
dons concernent aussi les incroyants, y compris les dons intellectuels de la connaissance et de la
perspicacite. Voila qui explique la parole de Jesus : meme les mechants « savent donner de bonnes
choses a leurs enfants » (Matthieu 7:11) et etre de bons parents. Il pouvait aussi reprocher a ses
adversaires de ne pas savoir interpreter les signes des temps : Puisqu’ils etaient capables de prevoir
le mauvais temps imminent, Jesus esperait qu’ils sauraient aussi discerner les differents sens de
l’histoire (Matthieu 16:1-4). Preuve donc que la Bible elle-meme temoigne de la capacite des
incroyants a intervenir efficacement dans le monde, y compris au niveau du cognitif.

Cela dit, toute tentative d’explication se heurte aussitot a nos credo spirituels et philosophiques.
Prenons, par exemple, les mathematiques. Peut-etre pensez-vous qu’il n’existe pas de vision
chretienne des mathematiques; or elle existe. Nous sommes tous d’accord pour dire que 5+7 = 12.
Mais quand il est question de justifier la science des mathematiques, il y a conflit et des camps se
forment.

A l’aube de la civilisation occidentale, la decouverte de la geometrie euclidienne assure la


celebrite des Grecs de l’Antiquite. Ceux-ci ne croyaient pas a un monde soumis a un ordre
mathematique precis, car ils pensaient la matiere comme une entite independante, une entite assez
recalcitrante pour ne jamais « obeir » completement a des regles mathematiques. Avec pour
consequence l’enfermement des mathematiques dans le « ciel » abstrait du platonisme.

En revanche, dans la premiere periode de la modernite, la plupart des scientifiques etaient


chretiens; ils n’admettaient pas la preexistence de la matiere qu’ils croyaient sortie de la main de
Dieu. Ainsi depourvue de tout pouvoir de resistance a Sa volonte, elle « obeissait » a Ses lois – lois
instituees avec une precision mathematique. L’historien R. G. Collingwood ecrit a ce propos : « La
possibilite de mathematiques appliquees exprime, en termes de science naturelle, la croyance
chretienne a la creation de la nature par un Dieu tout-puissant. »

Mon pere etant professeur de mathematiques, j’aime a lui rappeler les paroles de Collingwood et
j’en tire la conclusion suivante : « L’existence meme de ton domaine professionnel est un produit de
la vision chretienne du monde. »

De nos jours pourtant, la plupart des philosophes ont cesse meme de considerer les
mathematiques comme un corpus de verites. La philosophie des mathematiques regnante les
apparente a une structure sociale, tel par exemple le baseball. « Apres trois coups, tu es elimine »
decrit une regle arbitraire du baseball. Ce n’est ni vrai, ni faux; ce n’est qu’un choix de regles. De la
meme maniere, le regard porte sur les mathematiques les assimile a des regles du jeu.

Il n’est pas jusqu’aux ecoliers americains a qui cette vision postmoderne des mathematiques est
inculquee. Un programme scolaire en vogue de niveau college declare que les eleves devraient
apprendre que « les mathematiques sont fabriquees par l’homme, arbitraires, et les bonnes solutions
resultent d’un consensus entre des experts supposes tels. » Fabriquees par l’homme ? Arbitraires ?
Nos ecoles privees ont de toute evidence patauge dans les eaux glauques du postmodernisme.

Et si les mathematiques sont arbitraires, il n’existe pas de reponses erronees, mais simplement
des perspectives differentes. Au Minnesota, les directives transmises aux enseignants
recommandent une attitude de tolerance face a de « multiples visions mathematiques du monde. »
Au Nouveau Mexique, j’ai rencontre un jeune diplome du college qu’un professeur de
mathematiques avait traite « d’esprit etroit, » parce qu’il attachait de l’importance a la bonne

154
reponse. Aussi longtemps, insistait le professeur, aussi longtemps que les eleves travaillent en
groupe et parviennent a un consensus, le resultat est acceptable.

De ce fait, meme la forme de connaissance la plus simple et la plus universelle – les


mathematiques – est parfois sujette a des interpretations tres contrastees du monde. A l’evidence,
l’impact de la vision chretienne gagnera encore du terrain aux abords de spheres plus complexes,
tels la biologie, l’economie, le droit ou l’ethique.

Le danger est qu’en l’absence d’un developpement pleinement conscient d’une approche
biblique de ce sujet par les chretiens, nous nous impregnions a notre insu d’une autre approche
philosophique. Un courant d’idees sur l’interpretation du monde peut se comparer a une boite a
outils philosophique, pleine de termes specifiques et de concepts. Si les chretiens ne developpent
pas leurs propres outils d’analyse, des qu’une question difficile exigera d’eux de la reflexion, ils
regarderont ailleurs et emprunteront les outils de quelqu’un d’autre – en depit des concepts
generalement acceptes dans leur champ professionnel, voire bien au-dela. Lorsque les chretiens se
comportent ainsi, ecrit Os Guinness, ils ne se rendent pas compte que « l’outil emprunte n’est pas
isole, mais fait partie d’une boite a outils philosophique complete empruntee en meme temps,
chaque « outil » ayant ses propres prejuges, sa propre maniere d’obliquer, de contourner une
question. » Les chretiens peuvent meme s’impregner de toute une serie de principes etrangers sans
s’en apercevoir – a l’instar de Sarah, la jeune femme de notre histoire. L’emploi d’outils d’analyse
enclaves dans des presupposes non chretiens « equivaut a porter les lunettes de quelqu’un d’autre,
ou a marcher avec ses chaussures. Les outils façonnent celui qui s’en sert. »

En d’autres termes, nous cessons d’etre le sel et la lumiere d’une culture perdue, et cette culture
peut parvenir a nous modeler.

LA « BOITE A OUTILS » BIBLIQUE

Existe-t-il un antidote au clivage « seculier/sacre » ? Comment s’assurer que nos outils


conceptuels disposent de references bibliques pour chaque probleme ? Il importe d’abord de
posseder une parfaite conviction quant a l’existence d’une perspective biblique dans tous les
domaines – et pas simplement pour les questions spirituelles. A cet egard, l’exportation de l’Ancien
Testament reapparait sans cesse : « La crainte de l’Eternel est le commencement de la sagesse »
(Psaumes 111:10; Proverbes 1:7; 9:10; 15:33). De son cote, le Nouveau Testament enseigne qu’en
Christ « se trouvent tous les tresors de la sagesse et de la science » (Colossiens 2: 3). Ces versets
sont souvent assignes a la seule sagesse spirituelle, mais le texte n’impose aucune limite au terme
de « sagesse. » Clouser ecrit : « La plupart des gens ont tendance a voir dans la crainte de l’Eternel
le fondement de la seule connaissance religieuse… Ces passages comportent en fait une assertion
des plus radicale – a savoir que d’une certaine façon toute connaissance repose sur la verite
religieuse. »

Cet axiome est plus facile a saisir quand nous rapprochons le christianisme des autres systemes
de croyances. Tous fonctionnent en effet de la meme maniere. Comme nous l’avons vu, tout ce
qu’un systeme met en avant a titre d’entite dotee d’une existence en soi correspond, pour l’essentiel,
a ce qu’il hausse au rang du divin. Cette allegeance de type religieux devient alors le principe
directeur qui controle tout. La crainte d’un « dieu » preside a chaque systeme de connaissance
propose.

Percevoir clairement le fonctionnement des principes premiers, c’est aussi comprendre que toute
verite est necessairement d’origine divine. Dieu est l’unique realite en soi, et tout tire son origine et
son existence de chaque instant de Dieu. Rien n’existe qu’Il ne le veuille; rien n’echappe aux points
de jonction de l’histoire biblique que representent la Creation, la Chute et la Redemption.

155
Création

Le message chretien ne commence pas par ces paroles : « Accepte Christ comme ton Sauveur »;
ses premiers mots sont : « Au commencement Dieu crea les cieux et la terre. » La Bible presente
Dieu comme la seule source de tout l’ordre du cree. Nul autre dieu n’entre en competition avec lui;
aucune force naturelle n’existe sui generis; rien n’est dû de par sa nature ou son existence a une
autre origine. Sa Parole, Ses lois ou encore Ses ordonnances creationnelles assignent ainsi au monde
son ordre et sa structure. La Parole creatrice de Dieu est la source des lois de la nature physique, un
objet d’etude pour les sciences naturelles. Cette meme Parole est aussi a l’origine des lois de la
nature humaine – a savoir les principes de la morale (l’ethique), de la justice (la politique), de
l’entreprise creatrice (l’economie), de l’esthetique (les arts) et jusqu’a la categorie de la pensee
rationnelle (la logique). Voila qui justifie la parole du psalmiste (Psaumes 119: 91) : « Toutes
choses te sont assujetties. » Il n’existe aucun axe de reflexion qui soit neutre au plan philosophique
ou spirituel.

Chute

L’universalite de la Creation va de pair avec l’universalite de la Chute. La Bible enseigne que


tous les aspects de la Creation – y compris l’esprit humain – sont participants d’une grande revolte
contre le Createur. Les theologiens appellent cela l’effet noetique de la Chute (l’impact sur l’esprit),
qui se traduit par une subversion de notre aptitude a comprendre le monde sans la grace
regeneratrice de Dieu. L’Ecriture deborde d’avertissements contre l’idolatrie ou la desobeissance
deliberee a Dieu qui rendent les humains « aveugles » ou « sourds. » Paul ecrit : « Le dieu de ce
monde a aveugle l’intelligence des incredules, afin qu’ils ne voient pas briller la splendeur de
l’Evangile » (2 Corinthiens 4:4). Le peche « obscurcit » l’intelligence (Ephesiens 4:18).

Certes, les incroyants continuent de porter l’image de Dieu, de vivre dans le monde cree par
Dieu et sont toujours soutenus par Sa grace commune, autrement dit capables de decouvrir des
segments isoles d’une connaissance authentique. Les chretiens devraient faire bon accueil a ces
intuitions. Les Peres de l’Eglise avaient coutume de dire que toute verite vient de Dieu; d’où cet
appel pressant aux chretiens a « depouiller les Egyptiens » en s’appropriant le meilleur de la culture
seculiere, sans negliger les reelles possibilites d’integration a une vision biblique du monde. Il peut
meme arriver aux chretiens de se meprendre sur des points correctement perçus par des non-
croyants. Cependant, l’ensemble des systemes de pensee edifies par les non-croyants n’en seront
pas moins faux – car si le systeme n’est pas fonde sur la verite biblique, il prendra appui sur un
autre principe premier. Meme les fruits authentiques de la recherche individuelle n’echapperont pas
a la lentille deformante d’une fausse vision du monde. D’où l’exigence d’une approche chretienne a
la fois critique et constructive. Nous ne pouvons nous borner a emprunter le meilleur de la culture
environnante comme si tel ou tel territoire investi par des gens a l’esprit ouvert et objectif etait
spirituellement neutre – en bref, comme si la Chute ne s’etait jamais produite.

Rédemption

Enfin, la Redemption elle-meme est tout aussi complete que la Creation et la Chute. Dieu ne
sauve pas l’ame sans se preoccuper de l’esprit. Il rachete la personne tout entiere. La conversion a
pour objectif la reorientation de nos pensees, de nos emotions, de notre volonte, de nos habitudes.
Paul nous presse d’offrir tout notre etre a Dieu comme « un sacrifice vivant, » de façon a ne pas
nous « conformer au monde » mais a « etre transformes par le renouvellement de l’intelligence »
(Romains 12:1-2). Ce rachat s’accompagne pour nous du renouvellement de toutes choses (2
Corinthiens 5:17). Dieu promet de nous donner « un cœur nouveau, un esprit nouveau » (Ezechiel
36:26), et il anime notre personnalite tout entiere d’une vie nouvelle.

1
Cela explique que la Bible assimile en priorite le peche a l’abandon de Dieu au profit d’autres
dieux, et n’accorde qu’une place secondaire aux listes de comportements particuliers juges
immoraux. Le premier commandement vient, somme toute, en premier – les autres suivent des que
nous sommes bien au clair quant a la personne ou l’objet de notre adoration. La Redemption
corrobore ce commandement : elle consiste, en premier lieu, a rejeter nos idoles mentales pour
revenir au vrai Dieu. Nous experimenterons alors Sa puissance de transformation dans chaque
aspect de nos vies. Parler d’une vision chretienne du monde revient, en somme, a exprimer en
termes differents les modalites de notre redemption, puisqu’elle recentre toute notre conception de
la vie sur Dieu et la reconstruit a partir de la verite qu’Il nous a revelee.

LIRE LES PANNEAUX DE SIGNALISATION

Quelle est la demarche a suivre pour construire une vision chretienne du monde ? Nous voici
ramenes au recit de la creation dans la Genese, c’est-a-dire au commencement du monde, pour
decouvrir le dessein originel de Dieu pour la race humaine. Apres l’irruption du peche, la race
humaine a en quelque sorte bifurque, perdu son chemin et s’est egaree loin du sentier trace.
L’acceptation du salut en Christ nous replace sur ce sentier et restaure notre vocation originelle. La
Redemption ne concerne pas uniquement notre delivrance du peche, mais aussi un salut en vue de
quelque chose – a savoir la reprise de la tache qui nous a ete assignee au moment de notre creation.

Et quelle etait cette tache ? En Genese, Dieu donne ce que nous pourrions appeler la premiere
definition du travail : « Soyez feconds, croissez et multipliez, remplissez la terre et assujettissez-la.
» Les premiers mots : « Soyez feconds, multipliez » ont trait au developpement de la societe :
fonder des familles, des eglises, des ecoles, des villes, des gouvernements, promulguer des lois. La
seconde proposition « assujettissez la terre » a trait a l’utilisation du monde naturel : cultiver la
terre, construire des ponts, concevoir des ordinateurs, composer de la musique. Ce passage porte
quelquefois le nom de Mandat culturel, parce qu’il signifie que notre vocation originelle etait de
creer des cultures, construire des civilisations – rien de moins.

Cela signifie que notre vocation ou activite professionnelle n’est pas une activite de seconde
zone que nous accomplissons uniquement comme notre gagne-pain. Il s’agit plutot de la haute
vocation qui a motive notre creation a l’origine. La vraie maniere de servir un Dieu createur est de
se montrer creatif avec les talents et les dons mis a notre disposition. Nous pourrions meme dire que
nous sommes appeles a poursuivre l’œuvre du Dieu createur. Non pas a partir de rien, ex nihilo,
comme Dieu l’a fait a la creation; il nous appartient cependant de developper les competences et
potentialites inscrites a l’origine dans la creation – telle l’utilisation du bois pour la construction, du
coton pour les vetements, ou du silicium pour fabriquer des puces d’ordinateur. De plus, et malgre
l’absence en Eden de references explicites aux institutions sociales et economiques, leur
justification biblique trouve son ancrage dans le Mandat culturel.

Au cours des six premiers jours du recit de la Genese, Dieu forme l’univers puis le remplit –
voici le soleil et la lune dans le ciel, la mer et ses creatures, la terre avec ses animaux. Suit une
pause, comme pour souligner que la prochaine etape sera le couronnement de tout ce qui a precede.
C’est la seule etape du processus creationnel où Dieu annonce Son plan a l’avance, un moment où
les membres de la sainte Trinite se consultent. Faisons une creature a notre image, pour qu’elle nous
represente et poursuive notre œuvre sur la terre (Genese 1:26). Dieu cree alors le premier couple
humain, pour dominer la terre et la gouverner en Son nom.

Le texte montre clairement que les humains ne sont pas les maitres souverains, autonomes,
parfaitement libres de leurs actes. Leur autorite est une autorite deleguee : ils sont les representants
du souverain Maitre, appeles a refleter Son souci de la creation, marque au coin de Sa saintete et de
Son amour. Ils doivent « cultiver » la terre – un terme a la meme racine que « culture. » L’image de
Dieu devient ainsi manifeste dans notre creativite et le developpement des cultures.
155
Cet objectif etait celui de Dieu dans la creation des etres humains et il l’est encore aujourd’hui.
L’objectif divin originel n’a pas ete abroge par la Chute. Lors meme que le peche a corrompu tous
les aspects de la nature humaine, il n’a pas fait de nous des sous-hommes. Nous ne sommes pas des
animaux. Nous refletons encore et toujours, « obscurement, comme au travers d’un miroir » (1
Corinthiens 13:12), notre nature originelle, a l’image de celle de Dieu. Les incroyants accomplissent
eux aussi le Mandat culturel – ils « multiplient et remplissent la terre » : ils se marient, fondent une
famille, ouvrent des ecoles, dirigent des entreprises. Et ils « cultivent la terre » – au titre de
constructeurs de voitures, d’ecrivains, de chercheurs, voire d’inventeurs de gadgets, etc.

A la suite de l’une de mes conferences, une jeune femme a objecte : « Quand vous parlez du
Mandat culturel, votre discours n’est pas specifiquement chretien; vous citez des activites courantes
pratiquees par tous. » Mais c’est justement la le point cle : la Genese nous parle de notre vraie
nature, de nos activites courantes, de la façon dont Dieu nous a tous dotes d’une certaine orientation
ou maniere de fonctionner. Le sens de notre vie, sa finalite, consiste precisement a repondre a cette
nature humaine, a mettre en œuvre ce don de Dieu.

La Chute n’a pas detruit notre vocation premiere, mais l’a rendue plus difficile. Le travail
s’accompagne de souffrance et d’une grande somme d’efforts. En Genese 3:16-17, le terme
hebraïque traduit par « travail » s’applique aussi bien a la grossesse qu’a la production des aliments.
Le texte biblique laisse entendre que les deux taches essentielles de l’adulte – eduquer la generation
suivante et subvenir aux besoins de sa famille – iront de pair avec la douleur de vivre dans un
monde dechu et dechire. Toutes nos entreprises seront perverties, objet de diverses deviances dues
au peche et a l’egoïsme

Au moment de notre redemption, Dieu nous libere a la fois de la culpabilite et de la puissance du


peche; Il restaure notre humanite, toute notre humanite, de telle sorte que nous pouvons a nouveau
accomplir les taches pour lesquelles nous avions ete crees. La redemption accomplie par Christ a la
croix confere a notre travail une nouvelle dimension – car il devient un moyen de participation a
Ses desseins redempteurs. Le developpement de la creativite nous permet non seulement de
retrouver notre raison d’etre originelle mais aussi d’apporter au monde une force redemptrice apte a
inverser le cours des choses et arreter la corruption issue de la Chute. Nos dons sont mis au service
de Dieu en vue de hater l’avenement de Son regne, l’accomplissement de sa volonte. Le cœur et
l’esprit renouveles, notre travail puise des lors son inspiration dans notre amour pour Dieu et la joie
de Le servir.

L’enseignement a tirer du Mandat culturel est que notre sentiment d’accomplissement depend
entierement de notre engagement dans un travail constructif. L’existence ideale, loin de signifier
loisirs eternels ou vacances sans fin – ni meme une retraite de type monastique dans la priere et la
meditation -fait appel a un travail creatif accompli pour la gloire de Dieu et au benefice des autres.
Nous n’avons pas pour unique vocation « d’aller au ciel » mais aussi de cultiver la terre; pas
seulement de « sauver des ames » mais aussi de servir Dieu par notre travail. Dieu Lui-meme n’est
pas seulement engage dans l’œuvre de salut (la grace particuliere), mais aussi dans la preservation
et le developpement de sa creation (la grace commune). L’obeissance au Mandat culturel nous rend
participants, nous enrole dans l’activite meme de Dieu, en tant qu’agents de sa grace commune.

Tel est le riche enseignement que le mot Redemption doit nous remettre en memoire. Le terme
refere a une realite beaucoup plus vaste que l’evenement de la conversion. Il s’agit de toute une vie
de recherche pour consacrer nos competences et nos talents a la construction de choses belles et
utiles, avec en parallele la lutte contre les forces du mal et du peche qui oppriment et deforment la
creation. How Now Shall We Live ? ajoute au triptyque Creation, Chute, Redemption un quatrieme
volet : la Restauration, afin de mettre en relief la continuite de cette vocation. Certains theologiens
proposent pour cette categorie le terme de Glorification qui rappellerait a la fois notre but ultime –

156
vivre dans des cieux nouveaux, sur une terre nouvelle, et le caractere preparatoire de notre travail
terrestre. Quelle que soit la terminologie utilisee, etre chretien equivaut a s’engager dans un long
processus – un processus a vie- de croissance dans la grace, aussi bien au niveau de la vie
personnelle (sanctification) que de notre vocation (renouveau culturel). Ces nouveaux cieux et cette
nouvelle terre s’inscriront dans la continuite de la creation presente – certes purifiee par le feu –
mais tout aussi reconnaissable que Jesus dans Son corps de resurrection. Selon C.S. Lewis a la fin
des Contes de Narnia, nous avons commence le recit d’une grande aventure qui ne finira jamais. «
La Grande Histoire que personne sur la terre n’a lue; une histoire sans fin dans laquelle chaque
chapitre est encore meilleur que le precedent. »

LA CROISSANCE APRES LA NAISSANCE

De nombreuses eglises prechent sans cesse la justification – comment se reconcilier avec Dieu.
La sanctification – comment vivre apres la conversion – est, en revanche, un sujet beaucoup plus
rare. Dans les eglises lutheriennes où j’ai grandi, le combat de la Reforme semblait toujours
recommencer : chaque sermon en revenait invariablement a la justification par la foi. Peu apres ma
conversion, un sentiment de frustration m’amena a faire remarquer a ma grand-tante Alice, une
femme devouee et intelligente, que nous n’avions vraiment pas besoin d’entendre le message du
salut par la foi tous les dimanches.

Ses yeux brillerent derriere ses lunettes, et elle me repondit tranquillement : « Il faut toujours
nous le rappeler, tres chere, car la grace est trop contraire a nos tendances humaines. »

Elle avait certes raison, mais il n’en reste pas moins que la plupart des eglises insistent fortement
sur la conversion et tres peu sur la maniere de vivre apres la conversion. Je propose l’analogie
suivante : notre naissance physique est d’une certaine façon l’evenement le plus important de notre
vie, puisqu’il en est le point de depart. C’est simultanement l’evenement le moins important, pour la
meme raison. Si quelqu’un revenait chaque jour sur le caractere merveilleux de la naissance, cela
semblerait plutot etrange. Apres notre venue au monde, le plus important est de grandir et de
devenir mature. De meme, si la nouvelle naissance est bien la premiere et necessaire etape de notre
vie spirituelle, il ne faudrait pas focaliser constamment notre message sur la maniere de parvenir au
salut. Il est primordial pour les eglises d’amener les convertis a la maturite spirituelle et d’equiper
les saints pour la mission que Dieu nous a confiee dans le cadre du Mandat culturel.

Chacun a un role a jouer par sa participation a la culture et l’application des normes divines en
vue d’une societe vraiment humaine et juste. Une grande partie de notre temps est certes consacree
a la direction des affaires, a l’enseignement, la publication de journaux, l’appartenance a un
orchestre, et tout ce qui contribue a la prosperite d’une civilisation; et meme les responsables d’ «
un service chretien a plein-temps » doivent encore entretenir la maison, prendre soin des enfants,
etc. Il faut absolument comprendre que ces taches ne sont pas inferieures ou de seconde categorie
pour le Royaume. Nous sommes au contraire des acteurs, des agents de la grace commune de Dieu
dans le monde, pour Son service.

Martin Luther aimait a dire que nos occupations sont les « masques » de Dieu – ses modalites
d’intervention cachees dans la creation, par des moyens humains. Dans notre travail, nous sommes
les mains, les yeux, les pieds de Dieu. D’apres l’ecrivain lutherien Gene Edward Veith, il y a des
moments où Dieu agit sans intermediaire et de façon miraculeuse, comme lorsqu’Il nourrit les
Israelites de la manne celeste, au desert. En temps ordinaires, Il nourrit les gens par l’intermediaire
des myriades d’ouvriers dans les secteurs de l’agriculture, des transports, du conditionnement des
aliments et du commerce de detail, par exemple. Dieu guerit quelquefois les malades de façon
miraculeuse, a l’exemple de Jesus dans le Nouveau Testament. Mais Il agit de façon aussi certaine
par l’intermediaire de medecins, infirmieres et specialistes de la sante. Dieu peut aussi quelquefois
chasser un ennemi de façon miraculeuse, comme dans le livre des Juges. Dans la vie courante, Il
157
nous protege du mal par l’intermediaire de la police, des procureurs, des juges – ou des militaires
face a des ennemis exterieurs. Il eduque des enfants au moyen des parents, des enseignants, des
pasteurs et responsables des sports. Les incroyants sont quelquefois eux-memes ces « masques » de
Dieu, les instruments de Son amour et de Sa providence.

La metaphore du « masque » de Dieu vise a nous faire comprendre que notre vocation n’est pas
notre activite pour Dieu, a charge pour nous des lors d’executer et d’aller jusqu’au bout de
l’entreprise en question. C’est plutot une contribution precise a l’œuvre de Dieu. Car Dieu Lui-
meme S’implique non seulement dans l’œuvre du salut, mais egalement dans le maintien et la
preservation de la creation.

Cette profonde verite permet aussi d’eviter tout triomphalisme. Certaines personnes sont
opposees au concept de vision chretienne du monde au motif que cela aboutit a prendre le monde en
mains et a imposer nos croyances a tous, du haut en bas de l’echelle. C’est l’occasion de leur
rappeler (et de nous rappeler a nous-memes) que l’instrument employe pour notre salut a ete,
somme toute, la croix. Dieu est venu sous une forme humble, Il est entre dans la faiblesse humaine,
jusqu’a accepter de mourir par la main des pecheurs. Dans un monde dechu, nous pourrions nous
aussi payer le prix de notre fidelite a l’appel de Dieu. Si nous nous levons pour defendre ce qui est
juste face a l’injustice, nous pourrions avoir moins de succes dans notre carriere, ne pas etre
reconnus au niveau professionnel, ni recolter les hommages, ou encore gagner moins d’argent que
prevu. Ceux qui suivent Christ peuvent finir par partager Ses souffrances. Luther a insiste sur ces
themes dans sa « theologie de la croix » qui peut nous aider a resister au triomphalisme, a l’orgueil,
a la propre justice.

Par la grace de Dieu, nous pouvons etablir une reelle distinction a l’interieur de notre propre
champ d’action, mais a condition de « crucifier » notre desir de reussir, de mener le jeu et d’etre
applaudi. Jesus a dit : « Si quelqu’un veut venir apres moi, qu’il renonce a lui-meme, se charge de
sa croix jour apres jour, et qu’il me suive » (Luc 9:23). Si nous avons l’ardent desir de recevoir la
pensee de Christ, il faut d’abord nous soumettre volontairement au modele de souffrance qu’Il nous
a donne, et nous attendre aussi a ce que le developpement d’une vision chretienne du monde passe
par un combat dur et douloureux – interne dans un premier temps lorsque nous extirpons les idoles
de notre esprit, puis externe, quand nous affrontons l’hostilite d’un monde dechu et incredule. Notre
force pour cette tache ne peut venir que de notre union spirituelle avec Christ et de notre pleine
conscience de la souffrance comme chemin trace pour etre rendu conforme a Lui et refaçonne a Son
image.

Source : Nancy Pearcey, Vérité totale, Éditions La Lumiere, 2016.

158
07
Méthode
⇡:Une
apologéti
que
Réformé
e( II
)

I. UNE APOLOGÉTIQUE EN TROIS ÉTAPES

A) Etape 1 : se mettre sur le terrain non chrétien

i. Déterminer le présupposé

En fonction de la personne, nous pouvons faire appel chez notre interlocuteur a bien des choses !

Dans l’objectif de :

Determiner la question fondamentale que se pose votre interlocuteur.

159
Identifier la « foi » de l'homme.

Comprendre le monde dans lequel l'homme vit.

Quelques questions a poser pour devoiler les presupposes :

Comment sais-tu cela ?

160
Comment en es-tu certain ?

Qu’est-ce qui donne sens au reste de la vie ?

ii. Trouver la contradiction

Il y a toujours un point où une vision non biblique du monde va se contredire.

Francis Schaeffer appelle cela le « point de tension ».

161
De telles contradictions, il y en a de plusieurs types :

Entre deux choses affirmées

Exemple : « Toute verite est partielle ».

Contradiction : si cette phrase est vraie, alors elle est aussi partielle. Du coup, est-ce qu’il
peut y avoir une verite ?

Entre une chose affirmée (crue) ET la vie de tous les jours

Entre ce qui est cru et vécu ET la réalité.

162
Exemple de Schaeffer et du moine bouddhiste.

REALITE FOI
la souffrance, ça fait mal ! ≠ Le mal est illusion

Exemple de Chesterton sur l’evolution de la pensee.

B) Etape 2 : Pousser le raisonnement jusqu'à ses conclusions finales

Analogie : c’est comme si vous etiez pres d’une falaise et que la terre derriere vous s’ecroulait…

i. La religion est culturelle

Prendre la position de votre interlocuteur et l'amener aux conclusions logiques qui devraient en
decouler.

Cf. Tim Keller, La raison est pour Dieu.


163
ii. Chacun a une part de vérité

Affirmation : chacun a une part de la verite.

Vous connaissez l'illustration suivante : les aveugles et l’elephant.

Conclusion : nous avons tous besoin de la verite des autres.

Mais que dire de cette « fable » ?

Si nous sommes aveugles, qui nous dit que, finalement, il s’agit bien d’un elephant ? Cela suppose
que quelqu’un voit !

iii. Enlever le toit

Enlever le toit, c’est retirer, par l’apologetique, la vision non biblique du monde qui sert a se
« proteger » de l’existence de Dieu.

164

 
Enlever le toit Remettre l’espérance
de l’Evangile

C) Etape 3 : « Viens et goûte la bonté de Dieu »

i. Répondre aux questions posées !

Contre exemple : un appel au sentiment d'eternite.

Nous devons répondre aux questions posees.

165
ii. La révélation de Christ comme seule espérance

iii. La démonstration de la bonté de Dieu

II. ARGUMENTS ET EXEMPLES

A) Quelle place pour les arguments ?

i. Des arguments à la bonne place

166
Dans les autres methodes on a quelque chose comme ce qui est a gauche :

nature logique
(histoire, etc)
Bible

Conclusion
nature logique
(histoire, etc)

instrument Question Bible


(raison, etc)

monde,
Question
histoire, logique

A droite la vision proposee, plutot en spirale que directe.

Logique, histoire, Bible sont en unité, et trouvent leur source dans le « cadre » que donne la
Bible.

167
ii. Des arguments qui montrent les limites de la raison humaine

Utiliser les arguments pour :

Pour montrer une impossibilité

Pour dévoiler un présupposé

B) Exemples

i. Toutes les religions sont fausses : elles se contredisent toutes.

Quelles sont les conditions pour que nous puissions dire cela ?

168
Connaître toutes les religions

Montrer qu’elles sont toutes fausses

Il y a une tension entre ce qui est « dit » et la « realite ».

Or, cela ne marche pas :

De deux choses contradictoires, l’une peut etre vraie. Ce n’est pas parce que deux
religions sont contradictoires que les deux sont fausses !

169
La conclusion de l’exemple ci-dessous est donc fausse et temoigne d’un fort presuppose.

ii. Les droits de l’homme

Cf. Tim Keller, La raison est pour Dieu, pp. 166-167.

Une objection courante : Dieu n’est pas necessaire a une vie morale.

Exemple de Richard Dawkins : tout est adaptation a nos conditions de vie.

170
Conclusion logique : les droits de l'homme sont aussi le fruit de ce processus. Ce n'est pas que
les gens ont (au sens fort, universel du terme) des droits egaux de fait qu’ils sont humains.

iii. Tout a une explication exclusivement matérielle

iv. Le débat Bahnsen / Stein

171
C) Une apologétique alliancielle

CRÉATION

Image de Dieu

Nous sommes tous en Connaissance


relation avec Dieu renouvelée

DIEU DE L’ALLIANCE

Capacités, désirs Union avec Christ

Détournés, renversés

172
08
Arguments
pou
rl afoi
chréti
enne

I. LA NOTION DE PREUVE

A) Le problème des arguments

i. Les preuves ne suffisent pas

Pas de faits neutres.

Van Til est convaincu que les affirmations au sujet de la verite (Dieu, Christ, la resurrection)
resultent de la coherence entre les presupposes ultimes et les faits62.

62 Nate Shannon, « Christianity and Evidentialism. Van Til and Locke on Facts and Evidence », Westminster
Thelogical Journal, 74, 2012, pp. 323-353, ici p. 342.
173
Dans son petit ouvrage Ce que je crois, il ecrit ainsi :

« Nous présentons le message et les


preuves pour la position chrétienne aussi
clairement que possible… »
V a n T i l , Pourquoi je crois en Dieu, collection
Étincelles, no. 5, Aix-en-Provence, Kerygma, 2004.

« La foi chrétienne remplit toutes les


conditions légitimes de la raison. »
Thom Notaro, Van Til and the Use of Evidence,
Philadelphie, P&R, 1980, p. 17.

Ou encore :

« Je ne rejette pas les 'preuves théistes'


mais j'insiste seulement sur le fait qu'elles
doivent être formulée d'une manière s ne
compromette pas la doctrine de
l'Ecriture. »
Van Til, The Defense of the Faith, Philadelphie,
P&R, 1967, p. 197.

174
ii. Le problème de la vérification

Affirmations du christianisme

Vérification par
la raison humaine Conclusion : acceptation ou rejet

Cf. video sur les objections de l’atheisme, « Lutheran satire » (en anglais) :

175
iii. Le problème de la circularité

Exemple de circularité :

(1) Ce que dit la Bible est vrai ;

(2) La Bible dit que Dieu existe ;

(3) Donc Dieu existe car la Bible me le dit.

La circularite est inevitable, dans un cas particulier : des que nous essayons de nous appuyer
sur quelques chose d’absolument certain.

William Alston : connaitre quelque chose dans un domaine, c’est presupposer qu’on connait au
moins quelque chose dans ce domaine63.

63 William Alston, The Reliability of Sense Perception, Ithaca, Cornell University Press, 1993.
176
B) L'argumentation holistique

i. Présentation

Trois types de preuves :

Normative
Nous pourrions parler de « preuves normatives ». Ce sont les preuves qui ont comme objet
Dieu lui-meme, notamment dans sa relation au monde.

Essentiellement les preuves de l’apologétique classique.

Situationnelle
Nous pourrions parler de « preuves situationnelles ». Ce sont les preuves qui ont comme objet
le monde dans lequel nous vivons, ainsi que les evenements qui s’y produisent.

Essentiellement les preuves de l’apologétique empiriste.

177
Existentielle
Nous pourrions parler de « preuves existentielles ». Ce sont les preuves qui ont comme objet
ce qui releve d’une certaine subjectivite.

Exemple : l’argument esthetique, le temoignage personnel.

ii. Une structure trinitaire

John Frame, Vern Poythress. La structure trinitaire du monde.

Application a l’apologetique et aux preuves.

Tout argument se fonde sur le fait que Dieu est la source de tout ce qu'on peut voir (l'existence)
et connaitre (la connaissance), et vivre (existentiel).

178
iii. Des arguments en union les uns avec les autres

Premièrement, un seul type d’argument ne suffit pas.

Un argument « normatif » doit etre en lien avec un argument « situationnel ».

C’est une approche holistique de l’utilisation des arguments.

Deuxièmement, si tous les arguments sont lies les uns aux autres… chacune des
dimensions implique la presence des deux autres.

179
Normatif
Preuves rationnelles

DIEU

Situationnel Existentiel
Preuves empiriques Preuves subjectives

II. LES GRANDS ARGUMENTS EN FAVEUR


DE LA FOI CHRÉTIENNE

A) Les arguments normatifs

i. L’argument ontologique

180
ii. L’argument moral

Cf. « L’argument moral », Reasonable faith, en ligne.

Note de vocabulaire : En philosophie, quelque chose est considere comme « objectif » s’il est
valable pour tout le monde et tout le temps. Mais aussi s’il ne depend pas de ce que je crois. Par
exemple l’existence de la lune est objectif parce que meme si je decidais de ne plus croire qu’elle
est la, elle existerait quand meme !

iii. L’argument « transcendantal »

181
B) Les arguments situationels

i. Les Cinq voies

ii. L’argument de la capacité linguistique

D’où vient notre capacite au langage ?

Argument developpe par le linguiste et l’anthropologue Kenneth Lee Pike (1912-2000), Vern
Poythress (professeur de Nouveau Testament et d’interpretation a Westminster Theological
Seminary)… et recemment Pierce Hibbs dans plusieurs ouvrages.

182
Le Dieu trinitaire est « l’originateur » du langage.

Impossibilité du contraire

iii. L’argument du désir

Un argument que nous n’avons pas vu auparavant.

183
Developpe notamment par C. S. Lewis et qui peut etre mis en forme ainsi :

1. Tout, desir naturel inne en nous correspond a un objet réel qui peut satisfaire
ce desir.

2. Mais il existe en nous un désir que rien dans le temps, rien sur terre, pas
creature ne peut satisfaire.

3. Par consequent, il doit exister quelque chose de plus que le temps, la terre et les
creatures, qui peut satisfaire ce desir.

4. Ce est quelque chose de ce que les gens appellent « Dieu » et « la vie avec Dieu pour
toujours. »

C) Les arguments existentiels

i. L'argument esthétique

184
Par exemple, J. P. Moreland affirme que caracteristiques du monde comme :

« un coucher de soleil, tombent dans le


Vermont, le corps humain, les montagnes
Rocheuses [et] le chant des oiseaux…
présentent tous une beauté objective et
suggèrent que la beauté, dans ces exemples,
ne peut pas être expliquée en termes de
survie, de sélection naturelle, etc. »
J. P. Moreand

A quoi correspond la nature esthetique de l'etre humain ?

à un hasard ?

à une évolution ?

à un consensus ?

185
à un acte créateur ?

ii. Le témoignage personnel

iii. La vie de l’Église

186
09
Les obje
cti
ons
àl afoi
chrétie
nne

I. LES OBJECTIONS BASÉES SUR LA BIBLE

A) Les contradictions de la Bible

i. Contradictions entre les livres bibliques

Voir ce lieu de ressources : https://answersingenesis.org/contradictions-in-the-bible/scripture-index/

Entre 2 Samuel 24.13 et 1 Chroniques 21.11-12.

187
Entre Matthieu 10.5-10, Marc 6.8-9, et Luc 9.1-3.

Il y a aussi des ressources interessantes sur les arguments en faveur de la fiabilite des textes, de la
construction du canon du NT, etc.

Cf. le « Barth Ehrman Project » : http://ehrmanproject.com

ii. Contradiction entre la Bible et le caractère de Dieu

188
Exemple : Le « genocide » cananeen.

i) Il n'y avait aucune commande de l'AT pour eradiquer les cananeens en totalite.

ii) Au contraire, il fallait expulser les cananeens vivant dans les limites d'Israël (Num.
33:52). Les cananeens ont ete autorises a vivre dans des États limitrophes.

Il ne s'agit donc pas d'eradiquer un groupe particulier de personnes, mais de deposseder les
Cananeens pour faire place aux Israelites (Num 33:53). Les Israelites ne pouvaient pas
occuper la terre promise jusqu'a ce que les habitants païens soient expulses.

iii) L'execution en masse etait un plan de contingence au cas où les Cananeens choisissaient
de rester et se battre (Deut 20).

iv) La coexistence pacifique entre les Israelites et les Cananeens n'etait pas possible (Num
33:55).

v) Les etrangers ont toujours la liberte de se convertir a la vraie foi.

Remarque : il ne faut pas hesiter a vous procurer une encyclopedie des difficultes bibliques. Soit
en ligne, soit en livre.

iii. La dimension culturelle de la Bible

189
La Bible et l’esclavage

La Bible et la place des femmes

B) Le manque de confirmation archéologique

i. Objections basées sur un manque d’exégèse

Parfois, les objections seront basees sur un manque de connaissance biblique. Un manque
d’exegese.

Cf. sur des blogs de conviction athee, mais aussi sur « Answering Christianity », qui est un site
musulman.

190
Site internet utile : https://carm.org/archaeological-evidence-verifying-biblical-cities

ii. Objections basées sur un manque de données archéologiques

iii. Le présupposé de l’impossibilité du miracle

191
C) Le problème idéologique

i. Jésus et son histoire

Travaux du professeur Bart Ehrman (encore lui).

Reponses compilees sur le site : http://ehrmanproject.com

Cf. son argument dans l’ouvrage How Jesus Became God: The Exaltation of a Jewish Preacher
from Galilee :

Jesus a enseigne un message apocalyptique.

Jesus n’a pas eu une sépulture decente

Les disciples ont eu des visions et ont interprete cela en pensant que Jesus etait ressuscite.

Les disciples ont conclu que Jésus avait été exalté par Dieu. Jesus etait maintenant le
Messie, le Fils de l'Homme.

Les chrétiens ont rapidement commencé à rejeter l’idée selon laquelle Jesus serait devenu
« divin ».

Quelque temps avant les premieres epitres de Paul une « christologie d'incarnation » a
émergé, selon laquelle Jesus etait considere comme l'ange en chef de Dieu qui est devenu
humain.

Après Paul et les évangiles synoptiques, une forme plus developpee de la « christologie
d'incarnation » a emerge.

Au cours des siecles qui ont suivi la periode du Nouveau Testament, une opposition entre
doctrines « orthodoxes » et « hérétiques » s’est développée.

192
ii. Religion et pouvoir

Objection : c’est l’empereur qui a cree la divinite de Jesus.

« Que le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, et le Souverain


Sacrificateur éternel Lui-même le Fils de Dieu Jésus-Christ, vous édifie dans la
foi et la vérité, et en toute douceur et en évitant la colère et la longanimité
souffrance et endurance patiente et dans la pureté, et qu'il vous accorde
beaucoup et partie parmi ses saints, et à nous avec vous, et à tous ceux qui sont
sous le ciel, qui croiront en notre Seigneur et Dieu Jésus Christ et sur Son Père
qui l'a ressuscité des morts. »
Polycarpe, Lettre aux Philippiens, ch 12.

193
Jésus-Christ, notre Dieu (Lettre aux Ephésiens, chapitre 1, Lettre aux Romains, ch 1).
Christ notre Dieu (Lettre aux Smyrnéens, ch 10).
Notre Dieu, Jésus-Christ (Lettre aux Ephésiens, chapitre 18, Lettre à Polycarpe, ch 8).
Dieu, même Jésus-Christ (Lettre aux Smyrnéens, ch 10).
Dieu Lui-même étant manifesté sous forme humaine (Lettre aux Ephésiens, ch 19).
Dieu existant en chair (Lettre aux Ephésiens, ch 7.
Ignace d’Antioche

II. LES OBJECTIONS SCIENTIFIQUES


ET HISTORIQUES

A) La foi et la science

i. La popularisation de l’opposition science / foi

Dan Brown, Origines.

194
ii. Une question complexe

iii. La question des miracles

Les miracles comme violation des lois de la nature.

L’impossibilité des miracles.

Problème : vision du monde materialiste.


195
B) La violence des religions

i. Le problème des exemples

ii. Pourquoi la violence ?

196
10
The G
od
delus
ion
debate

PRÉSENTATION DU DÉBAT
Le 3 octobre 2007, les professeurs Dawkins et Lennox, tous deux de l'Universite d'Oxford ont
debattu a L'Universite de Birmingham (Alabama, USA) de ce qui est sans doute la question la plus
critique de notre temps : l'existence de Dieu. Le debat a porte sur les vues de Dawkins exprimee
dans son best-seller, The God Delusion, et sur leur validite a l'encontre de la foi chretienne.

Richard Dawkins

Richard Dawkins est est un biologiste britannique, vulgarisateur et


theoricien de l'evolution, et membre de la Royal Society. Il est
professeur a l'Universite d'Oxford (« Professeur pour la
comprehension de la science »).

Il acquiert une renommee mondiale avec son livre de 1976 intitule The
Selfish Gene (Le Gène égoïste) et en 2006 publie l'ouvrage pour lequel
la plupart le connaissent, The God Delusion (Pour en finir avec Dieu),
vendu a plus d'un million d'exemplaires. Il est l'un des philosophes
athees les plus reconnu, defendant une pensee rationaliste et
materialiste.

John Lennox

John Lennox est professeur de mathematiques a l'Universite d'Oxford,


fellow en mathematiques, en philosophie des sciences et conseiller
pastoral au Green Templeton College de l'Universite d'Oxford. Il est
aussi specialiste de la philosophie des sciences.

John Lennox a recemment debattu la plupart des principaux


defenseurs du « nouvel atheisme », en particulier Richard Dawkins et
Christopher Hitchens. Son livre le plus influent est certainement God's
Undertaker: Has Science Buried God?, et ses positions presentees
dans ces debats ont aussi ete publies.

197
THÈSES ET DÉVELOPPEMENT DU DÉBAT

PREMIÈRE THÈSE
« La foi est aveugle, la science est basée sur les preuves »
(19 min 43 a 30 min 50)
Citation : la religion nous demande d'etre satisfaits avec le fait de ne pas (chercher a) comprendre.

DEUXIÈME THÈSE
« La science soutient l'athéisme et non le christianisme »
(30 min 50 a 44 min 05)
Citation : la vraie lutte est entre rationalisme et superstition … il n'y a pas d'evidence en faveur de
« l'hypothese-dieu ».

TROISIÈME THÈSE
« Le dessein (intelligent) est mort, ou bien il faut expliquer qui a créé
le créateur »
(44 min 05 a 56 min 50)
Citation : qui a cree Dieu ? L'existence de Dieu, bien que tres difficile a nier, est hautement
improbable.

QUATRIÈME THÈSE
« Le christianisme est dangereux »
(56 min 50 a 1h 17 min 20)
Citation : Imaginez un monde sans religion …

CINQUIÈME THÈSE
« Personne n'a besoin de Dieu pour être moral »
(1h 17 min 20 a 1h 28 min 10)
Citation : nous n'avons pas besoin de Dieu pour etre bon ou mauvais

SIXIÈME THÈSE
« Les affirmations au sujet de Jésus ne sont pas vraies »
(1h 28 min 10 a 1h 36 min 18)
Citation : les preuves historiques au sujet de l'existence de Jesus sont minimales

198
TRANSCRIPTION PARTIELLE DU
« GOD DELUSION DEBATE »
JOHN LENNOX VS. RICHARD DAWKINS
préparé par Yannick Imbert

Directeur de « Fixed Point »

Bonsoir, je suis Larry Taunton le directeur executif de Fixed Point Foundation le promoteur de
cet evenement, nous vous souhaitons la bienvenue a l'Universite d'Alabama ; au centre Alan
Stevens de Birmingham et nous acceuillons aussi ceux qui nous ecountent dans le monde. Le debat
de ce soit inclus deux des grands esprits qui ecrivent et debattent actuellement de cette question, le
professeur Richard Dawkins et le docteur John Lennox.

Je ne vais pas perdre du temps maintenant a vous donner leurs biographies que vous trouverez
dans votre programme, c'est un honneur de connaitre ces deux hommes. Nous vous avons amene ici
ce soir sous de fausses raisons ; ce n'est pas en fait un debat ce soir, mais Richard Dawkins voulait
venir a la Bible Belt pour annoncer sa conversion a la foi chretienne. Peut-etre que je me trompe.
Accessoirement Richard represente la position athee dans ce debat, si vous ne le saviez pas, et dr.
John Lennox la position theiste. Il y a quelque chose que je voudrais dire sur le debat lui-meme ;
nous pensons que la plupart des choses concernant cette question n'ont pas ete particulierement
utiles et ont frequemment comme cadre « la science contre la religion ». Ce que nous cherchons a
faire ce soir est de recentrer reduire la discussion juste un peu afin de l'ameliorer d'où le nom du
debat, « La delusion de Dieu ». Je debat de ce soit mettra en avant le livre de Richard Pour en finir
avec Dieu, et ceci contre la foi chretienne.

Modérateur

Merci Larry. Bonsoir, et bienvenue a vous a ce debat. Vous connaissez tous le sujet du debar
qu'a mentionne Larry, « Pour en finir avec Dieu contre le christianisme », il y aura une structure a
notre debat de ce soir. Nous allons commencer avec des declarations autobiographiques de chacun
de nos debatteurs, en commençant avec le professeur Dawkins puis par la suite avec le dr. Lennox.
Lorsque je demanderais a chacun de donner leur presentation, je leur demanderais de dire quelque
chose a leur sujet et quelque chose a propos du livre, Pour en finir avec Dieu.

Nous passerons ensuite aux six principales theses du professeur Dawkins dans Pour en finir
avec Dieu. Alors evidemment c'est un long livre nous ne pouvons pas nous interesser a l'ensemble,
mais nous avons selectionne ce que nous pensons etre les six affirmations principales et pour les
presenter, je lirais quelques extraits du livre du professeur Dawkins et lui donnerais l'occasion
d'elaborer un peu, puis le dr. Lennox aura l'occasion de repondre. Chacun de ces echanges devrait
etre d'environ cinq minutes pour de chaque cote et ce qui n'est pas indique dans votre programme
c'est que chacun de nos debatteurs pourra terminer le programme avec des observations finales.
Nous commencerons alors avec dr. Lennox puis terminerons avec le professeur Dawkins.

Alors professeur Dawkins, ce soir vous aurez a la fois le premier et le dernier mot. Je suppose
dans l'interet de la charite chretienne. Professeur Dawkins pouvez-vous commencer notre
discussion avec une declaration autobiographique, et nous dire quelque chose a propos de vous-
meme.

199
Richard Dawkins

Je suis ne en Afrique, je suis un enfant de ce qui etait a l'epoque de l'Empire britannique. Issu
d'une longue lignee d'officiers coloniaux. J'ai eu de nombreuses occasions de devenir un naturaliste
parce l'Afrique comme vous le savez est un endroit merveilleux pour devenir un naturaliste.
Malheureusement ce n'est pas ce qui est arrive. Je n'ai jamais vraiment ete un bon naturaliste, a la
grande deception de mon pere j'imagine, qui est un tres bon naturaliste.

Ceci est un preambule a dire que mon interet pour la science et la biologie, ce qui est ce en quoi
je me specialise, est venu plus d'un interet pour des questions fondamentales plutot que de l'amour
de l'observation des oiseaux ou des insectes ou collectionner des fleurs. Je voulais savoir pourquoi
nous sommes tous ici, ce qu'est le sens de la vie, pourquoi l'univers existe, pourquoi la vie existe,
c'est ce qui m'a attire. Mes parents ont quitte l'Afrique quand j'avais environ huit et je suis venu
avec eux. Je ai ete envoye en internat en Angleterre, et je suppose qu'un partie de la raison de ce
resume autobiographique est de donner une sorte d'antecedents religieux puisque nous parlons de la
religion ce soir. J'ai eu une education anglicane inoffensive et je ne pourrais jamais pretendre qu'on
a force la religion en moi come si j'avais grandit au sein d'une foi plus militante.

L'anglicanisme comme vous le savez est une version tres civilisee tres du christianisme, pas de
cloches, d'encens et aucun creationniste lunatique. J'ai ete confirme dans l'Église d'Angleterre et a
l'epoque je croyais sincerement et j'ai eu une breve periode de doute a l'age d'environ neuf ans, donc
avant ma confirmation. Ce doute a ete cause par la realisation qu'il y a beaucoup de differentes
religions dans le monde et je ai reconnu que c'etait et un accident de ma naissance que d'etre ne dans
la foi chretienne et j'ai reconnu presque instantanement que si j'etais ne en Afghanistan ou en Inde,
j'aurais cru des choses tres differentes. Et ceci, a juste titre, secoua ma foi dans la religion
particuliere dans laquelle j'avais ete eleve et je ne comprends pas pourquoi je semble avoir perdu
ces doutes quand j'avais environ 13 ans et j'ai ete confirme dans l'Eglise d'Angleterre.

Je suis alle a Oxford apres avoir perdu ma foi pour de bon a l'age d'environ 15 ou 16 ans. Parce
que j'ai decouvert qu'il n'y avait pas de bonnes raisons de croire en un quelconque type de createur
surnaturel. Les derniers vestiges de ma foi religieuse ont disparus quand j'ai enfin compris
l'explication darwinienne de la vie. Je suis alle a Oxford, j'ai obtenu un doctorat et je suis alle a
l'Universite de Californie a Berkeley comme tres jeune professeur adjoint de comportement animal,
puis est retourne a Oxford apres environ deux ans a Berkeley.

J'ai poursuivit ma carriere etudiant le comportement animal. Aux environs de 1972, il y avait
une greve generale en Grande-Bretagne et il n'y avait pas l'electricite, et je ne pouvais pas faire mes
recherches et j'ai pense ecrire un livre que j'ai commence et qui est devenu mon premier livre Le
gène égoïste. Mais malheureusement l' electricite est revenue et j'ai range les deux premiers
chapitres du livre que j'avais deja ecrit, je les ai mis dans un tiroir et je les ai oublie jusqu'a environ
trois ans plus tard en 1975 quand j'ai eu un conge sabbatique et j'ai pu terminer la redaction de Le
gène égoïste. Depuis, j'ai ecrit 8 autres livres … et, plus recemment, Pour en finir avec Dieu qui fait
l'objet du debat de ce soir.

Je considerais comme un enorme privilege que d'etre en vie, surtout a la fin de la 20 siecle /
debut du 21e siecle. C'est un privilege d'etre un scientifique et donc d'etre en position de
comprendre quelque chose au mystere de l'existence, pourquoi nous existons. Je pense que les
explications religieuses, meme si elles peuvent avoir ete satisfaisantes pendant de nombreux siecles,
sont maintenant remplacees. Je pense qu'elles sont insignifiantes et « bornees » et je pense que la
comprehension que nous pouvons obtenir de la science au niveau de toutes ces questions profondes,
auxquelles la religion autrefois aspiraient, sont maintenant mieux expliquees, avec plus de beaute et
d'elegance, par la science

200
John Lennox

Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de m'avoir invite, je suis ravi d'etre ici.
Chacun de nous a une biographie et une vision du monde. Nous avons des reponses aux grandes
questions que la vie nous lance. Alors quelques details biographiques. Je suis mariee a Sally, nous
avons trois enfants et quatre petits-enfants. Je travaille maintenant a l'Universite d'Oxford comme
mathematicien et comme philosophe de la science. Je suis ne au milieu du siecle dernier dans un
pays a la reputation tragique pour la violence sectaire, l'Irlande du Nord. Mes parents etaient
chretiens mais ils n'etaient pas sectaires. Dans le livre Pour en finir avec Dieu, Richard, vous dites
que la religion nous enseigne que c'est une vertu que d'etre satisfait de ne pas comprendre. Bien,
quelles que soient les autres religions, il s'agit certainement pas du Christianisme que mes parents
m'ont enseigne a partir de la Bible. Ils m'ont encourage a etre intellectuellement curieux parce qu'ils
etaient comme ça eux-memes, non pas en depit de leur foi chretienne mais a cause de celle-ci. Je
leur dois une immense dette pour m'avoir donne la liberte de tout lire depuis Marx et Russell jusqu'a
C.S. Lewis et d'avoir alors developpe un interet pour les grandes questions de la vie.

J'ai ete tres chanceux de pouvoir quitter l'Irlande et d'aller a Cambridge où j'ai pu me livrer a ma
passion pour les mathematiques et pour la science en general. Cambridge m'a non seulement donne
l'occasion de developper mes interets intellectuels mais m'a donne la possibilite de rencontrer de
nombreuses personnes avec d'autres visions du monde et qui ne partageaient donc pas mon
experience ou mes convictions. Par la suite, j'ai developpe un interet considerable pour l'atheisme,
un interet qui m'a conduit ensuite, en tant que boursier « Alexander von Humboldt », d'etudier en
Allemagne, puis de voyager tres frequemment en l'Europe de l'Est au cours de la periode de la
guerre froide. Apres la chute du communisme je me suis rendu frequemment dans des academies de
science et des universites en Russie pour discuter et raisonner sur ces choses et de voir directement
les effets d'une exposition systematique a l'endoctrinement athee pendant les 70 precedentes annees.

Je suis donc moi aussi tres privilegie de vivre en ces temps et d'etre implique dans le debat
public a propos de ces questions. En lisant le livre de Richard je l'ai trouve absolument fascinant
parce qu'il me frappe comme etant une croisade passionnee pour avertir ses freres humains de
l'esclavage, de l'oppression et des tortures mentales et eventuellement physiques imposees par les
religions. Et j'eprouve reellement beaucoup de sympathie pour vous sur ce point particulier parce
que je suis totalement oppose a toute religion qui chercherait a s'imposer par la force, ou une
religion qui tirerait profit des abus des gens – de quelque sorte que ce soit. Vous ne pouvez pas
imposer la verite par la force. Nous pensons tous les deux, je pense, que la religion devrait etre
debattue de maniere rationnelle, comme toute autre chose. Je partage sa passion (note : celle de
Dawkins) pour la verite, et aucun de nous n'est heureusement un relativiste postmoderne.

Mais en tant qu'athee passionne Richard s'est engage en faveur de l'idee que Dieu est une
illusion. Pour lui, je comprends que la realite ultime, consiste en l'energie impersonnelle de
l'univers.

Je crois exactement le contraire. Dieu loin d'etre une illusion est reel. La realite ultime est un
Dieu personnel, eternel et surnaturel qui s'est revele, ainsi que l'univers dans l'Ecriture et
supremement en Jesus son Fils qui est le Seigneur et le Dieu incarne. Je suis tres conscient que cela
me place, selon le livre de Richard, fermement dans la categorie de ceux qui divaguent, ceux
victimes d'hallucinations … (rires) Vous suggerez que la religion construit une protection dans
l'esprit contre la verite scientifique. Et bien cela peut-etre tragiquement vrai dans le cas de certaines
religions, mais ce n'est pas ainsi avec le christianisme biblique. Et mesdames et messieurs je suis
passionne pour la verite qui est que Dieu est le Dieu de toute verite. L'une des declarations les plus
celebres que Jesus ait jamais prononcees est « Je suis la verite ».

Une affirmation etonnante a propose de laquelle C.S. Lewis a fait remarquer il y a longtemps
201
qu'elle venait soit d'un megalomane, pathologiquement erronee ou valide, puisqu'elle affirme non
seulement dire des choses vraies mais pretend aussi etre la verite ultime elle-meme. La verite ultime
de tout, de la nebuleuse d'Andromede a la vie, la conscience et l'esprit humains. Notez s'il vous plait
que ce qui nous divise ce n'est pas la science, nous sommes tous les deux engages envers elle. Ce
qui nous divise, c'est notre vision du monde. La sienne, athee ; la mienne, theiste et chretienne. Son
livre nous presente un monde etrange. C'est une tentative de delivrer les gens de l'interdit de la
religion afin qu'ils puissent mener une vie d'abondance desinhibee sans s'encombrer des menaces
d'un dieu imaginaire. Il dit que ça a l'air sombre et froid, en particulier si vous regardez cela avec la
« couverture » et la securite de l'ignorance religieuse.

Mais Mesdames et Messieurs, nous devons prendre cela au serieux. Si c'est cela la realite, alors
nous devons y faire face. Mais nous devons en parler serieusement et examiner les preuves. Aucun
d'entre nous ne souhaite baser sa vie sur une illusion. Mais où est l'illusion : l'atheisme ou le
christianisme ? Nous avons chacun a decider de cela sur la base des preuves, bien sûr.

THÈSE 1 : « LA FOI CONTRE LA SCIENCE »


Modérateur

Merci. La premiere these du professeur Dawkins et qui est indiquee dans votre programme est
un resume, ce n'est pas une citation directe : « la foi est aveugle, la sciences est basee sur des
preuves. » J'ai un extrait, en haut de la page 126, pour illustrer votre argumentation professeur
Dawkins :

« L'un des reels effets negatifs de la religion est qu'elle nous enseigne que c'est une
vertu que d'etre satisfait de ne pas comprendre. »

Pourriez-vous s'il vous plait elaborer ?

Richard Dawkins

La science utilise des preuves pour decouvrir la verite. Elle s'est amelioree au fil des siecles en
depit de l'opposition de la religion, bien qu'il faille admettre que bien sûr, la science est venue
« hors de » une tradition religieuse. La religion, d'apres la citation nous apprend a etre satisfaits
(etait-ce avec le manque de preuve ou l'absence de comprehension ?) de ne pas comprendre. Je
pense que lorsque vous considerez la beaute du monde, et que vous vous demandez comment il est
venu a etre ce qu'il est, vous etes naturellement submerge par un sentiment de reverence,
d'admiration et vous sentez presque un desir d'adorer quelque chose. Je le ressens, je reconnais que
d'autres scientifiques comme Carl Sagan ou Einstein ressentent cela. Nous ressentons tous une sorte
de reverence religieuse pour les beautes de l'univers, pour pour la complexite de la vie, pour
l'ampleur du cosmos de l'ampleur et du temps geologique. Et il serait tentant de traduire ce
sentiment de reverence et d'adoration en un desir d'adorer quelque chose en particulier, une
personne ou un agent et vous voulez l'attribuer a un createur.

Ce que la science a maintenant atteint est une emancipation de cette impulsion a attribuer ces
choses a un createur et ceci est une emancipation majeure car les humains ont un desir presque
irresistible de penser qu'ils ont expliquer quelque chose en l'attribuant a un createur. Nous sommes
tellement habitues a expliquer les choses dans notre propre monde, comme ces cameras de
television comme les lumieres, comme tout ce que nous faisons, les vetements que nous portons, les
chaises sur lesquelles nous nous asseyons, tout ce que nous voyons autour de nous est un objet
fabrique et c'est tellement tentant de croire que les choses vivantes, les fleurs, les montagnes ou les
rivieres ont tous ete faites par quelque chose. Et ce fut un accomplissement supreme de
202
l'intelligence humaine que de realiser qu'il y a une meilleure explication pour ces choses. Que ces
choses peuvent venir a exister par des causes purement naturelles. Lorsque la science a commence a
atteindre cela (le but etait la mais nous l'avions pas encore les moyens), mais de nos jours a la fin du
20e siecle et debut du 21e siecle, nous ne savons toujours pas tout, mais nous avons realise
enormement dans la connaissance (note : sous entendu « scientifique ») et nous comprenons
maintenant essentiellement comment la vie a vu le jour.

Nous savons que nous sommes tous des cousins de tous les animaux et plantes, nous savons que
nous descendons d'un ancetre commun qui aurait pu etre quelque chose comme les bacteries. Nous
savons que le processus par lequel le soleil est venu a etre. Nous ne connaissons pas les details,
mais nous savons essentiellement comment se sont produites ces choses. Il y a encore des lacunes
dans notre comprehension, nous ne comprenons pas comment le cosmos est entre en existence en
premier lieu mais nous y travaillons. L'entreprise scientifique est une recherche active des lacunes
dans notre connaissances, qui cherche notre ignorance afin que nous puissions extirper cette
ignorance.

Mais la religion nous enseigne a etre satisfait de ne pas vraiment comprendre. A propos de
chacune de ces questions difficiles qui revient dans la discussion, et bien la science dit « Allons-y,
retroussons nos manches et travaillons a cela ». La religion dit « Oh, c'est Dieu qui l'a fait ». Nous
n'avons pas besoin d'y travailler, Dieu l'a fait. C'est aussi simple que cela. Nous n'avons pas de
motivation qui nous pousse a essayer de comprendre. La religion est abrutissante parce que la
religion offre une explication facile et apparente a tout ce que nous verrons plus tard dans la soiree,
et ce n'est pas vraiment une explication et elle nous empeche de poursuivre nos travaux sur ces
problemes.

John Lennox

Il y a deux questions ici. La foi est aveugle ; la science est fondee sur les preuves. Je ne suis pas
d'accord avec le premier mais je suis bien d'accord avec le second. Une certaine foi peut etre
aveugle. Et une foi aveugle peut peut bien entendu etre tres dangereuse, surtout si elle est associee
avec une obeissance aveugle a une autorite inegale. Et ceci, mesdames et messieurs, j'aimerais le
souligner, est vrai que la foi soit celle des religieux ou des personnes seculieres. Mais toutes les
foi(s) ne sont pas aveugles parce que la foi elle-meme comporte l'idees de « croire », de confiance,
d'engagement et elle est la seulement parce qu'il y a de solide preuves en sa faveur. La foi en le
monstre du spaghetti volant, une delicieuse idee mon cher Richard Dawkins, est une foi aveugle
parce qu'il n'y a aucune preuve en faveur du monstre du spaghetti volant ! Mais la foi en la theorie
de la relativite n'est pas aveugle, car il y a des preuves a l'appui. Je ne peux pas parler avec autorite
pour les autres religions mais la foi au sens chretien n'est pas aveugle.

Et en fait je ne connais pas un seul chretien serieux qui pense qu'elle l'est. En effet, ainsi que je
le comprends, la foi aveugle dans des idoles et des creations de l'imagination humaine, en d'autres
mots des dieux illusoires, est fermement condamnee dans la Bible. Ma foi en Dieu et en Christ
comme Fils de Dieu n'est pas une illusion mais elle est rationnelle est soutenue par les preuves.
Certaines sont objectives, certaines d'entre elles viennent de la science, certaines viennent de
l'histoire et une partie de ces preuves est subjective, venant de l'experience.

Bien sûr, nous ne parlons pas de preuve. Il n'y a de « preuve » au sens strict que dans mon
propre domaine des mathematiques. Mais si dans les autres domaines, y compris la science, on ne
parle pas de preuve (ang. proof), nous pouvons parler d'indications (ang. evidence) qui
convainquent au-dela du doute raisonnable. Je pense qu'il est important dans ce contexte de mettre
l'accent sur les limitations de la science, car assimiler la science a la rationalite est un danger qui
revient constamment. Mais ce qui est au-dela de la science n'est pas necessairement irrationnelle. La
science ne peut pas nous dire, par exemple, si un poeme ou une œuvre de litterature, ou une œuvre
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d'art ou une musique est bonne et belle. La science ne peut vous dire que si vous mettez de la
strychnine dans le the de votre grand-mere, ça va la tuer. Mais la science ne peut pas vous dire s'il
est moralement juste de le faire ! Le prix Nobel Sir Peter Medawar, qui est en fait un heros pour
nous deux, a fait remarquer que vous pouvez voir facilement les limites de la science, car elle ne
peut pas repondre aux questions elementaires d'un enfant : « Qui suis-je ? Quel est le but de mon
existence ? Où est-ce que je vais ? »

Donc Richard vient juste de mettre en contraste la foi et la religion. La religion se contente de ne
pas comprendre alors que la science est l'entreprise « demelant » la comprehension de l'univers. Et
je comprends tres bien la force de cette objection parce parfois je l'avoue les chretiens ont ete
coupables de presenter une sorte d'explication paresseuse du type « Dieu des lacunes ». Je peux
comprendre parce que Dieu l'a fait. Et bien sûr au fur et a mesure que notre connaissance augment
les lacunes disparaissent, et Dieu avec. Mais je voudrais indiquer qu'il y a deux sortes de lacunes,
mesdames et messieurs. Il y a des lacunes que la science referme, et j'appelle cela les « mauvaises
lacunes ».

Mais il y a aussi des lacunes que la science « ouvre » et nous pourrons peut-etre en mentionner
certaines plus tard. Mais concernant cette idee elle-meme, Richard a mentionne le fait tres important
que la science, et la science moderne telle que nous la connaissons, a explose au cours des 16eme et
17eme siecles et elle est nee dans un arriere-plan chretien. Beaucoup de philosophes de la science
ont etudie cette certains viennent a la conclusion que, et cela a ete appele la these de Whitehead, les
etres humains sont devenus scientifiques parce qu'ils s'attendaient aux lois de la nature, et ils s'y
attendaient parce qu'ils croyaient en un « legislateur ». Je pense que ceci est extremement important
parce que cela signifie que la religion, loin d'entraver la science en etait la force motrice expliquant
en premier lieu la montee de la science.

Et quand Isaac Newton par exemple a decouvert la loi de la gravite et a ecrit les equations du
mouvement, il n'a pas dit : « Merveilleux ! Je comprends maintenant cela, j'ai un mecanisme, ainsi
je n'ai pas besoin de Dieu ». En fait, c'etait exactement le contraire. C'etait parce qu'il comprenait la
complexite et la sophistication de la description mathematique de l'univers que sa louange du
Createur fut augmentee. Je voudrais suggerer que Richard fait ici une erreur de categories parce que
vous etes confondez le « mecanisme » avec l'« agent ». Nous avons un mecanisme x, y z, ainsi nous
n'avons pas besoin d'un agent. Je suggererais que la sophistication du mecanisme de la science, qui
se rejouit de trouver de tels mecanismes, est la preuve de la pure merveille du genie createur de
Dieu.

THÈSE 3 : « LE DESSEIN EST MORT, OU ALORS IL FAUT


EXPLIQUER LE CONCEPTEUR »
Modérateur

Professeur Dawkins. Je comprends votre desir de repondre a Dr Lennox, mais je pense que le
prochain sujet et l'extrait que je vais lire vous permettront de faire avancer la discussion de la
prochaine these, c'est-a-dire que « le dessein est mort » autrement il faut expliquer qui a conçu le
concepteur. » Je pense que cela vous permettra bien d'avancer. La citation que je vais lire, l'extrait,
se trouve a la page 109 et ce que vous avez ecrit est la suivante:

« Tout l'argument tourne sur la question familiere « Qui a fait Dieu? », Que la plupart
des gens pensants decouvrir par eux-memes. Un Dieu concepteur ne peut pas etre utilise
pour expliquer la complexite organisee parce qu'un Dieu capable de concevoir quoi que
ce soit doit etre assez complexe pour exiger le meme type d'explication dans son propre

204
droit. Dieu presente une regression infinie dont il ne peut nous aider a nous echapper.
Cet argument, comme je le montrerai dans le chapitre suivant, demontre que Dieu ne
croyait pas techniquement refutable, est tres, tres improbable en effet » (Dawkins, 2008,
p.109).

Richard Dawkins

Lancez un centimes et vous avez 50% de chance de le faire tomber sur pile. Bien, « le design est
mort sinon il faut expliquer qui a conçu le concepteur ». Eh bien, nous avons beaucoup de mal apres
que le « dessein » soit mort. Je pense que probablement John et moi sommes d'accord que la vie est
expliquee : Darwin explique la vie et aucun scientifique serieux doute que, donc nous retournons a
l'etape precedente et plutot plus difficile dans la comprehension d'où nous en venons c'est l'origine
de l'univers Meme. Et c'est vraiment vraiment difficile. Nous ne le savons pas. Nous comprenons
essentiellement la biologie; Nous ne comprenons pas la cosmologie. Dans un sens, on pourrait dire
que la cosmologie attend son Darwin.

John a mentionne, en reponse a la question precedente, l'idee que les constantes physiques
etaient bien reglees. Il est vrai que de nombreux scientifiques, de nombreux physiciens soutiennent
que les constantes physiques, cette demi-douzaine de nombres, que les physiciens doivent
simplement supposer afin de tirer le reste de leur comprehension – et bien ils les supposent. Vous ne
pouvez pas expliquer pourquoi ces nombres sont la, et les physiciens ont calcule que si l'un de ces
nombres etait un peu different, l'univers tel que nous le connaissons n'existerait pas. Nous ne serions
pas ici. L'univers aurait peut-etre echoue dans la premiere yoctoseconde [10 -24 seconde] et donc
nous ne serions pas ici ou d'autres choses allaient mal.

Il est tentant, une fois de plus, d'importer l'idee facile et facile du concepteur et de dire que le
concepteur a tourne les boutons de l'univers au big bang et les a exactement pour la constante
gravitationnelle droite, la force forte droite, la faible Force droite et ainsi de suite. Mais il me
semble manifestement evident que c'est une explication inutile parce que, comme le dit la citation:
«Qui a conçu le concepteur?» Vous avez explique precisement rien parce que, au lieu de dire
simplement: «Oh, les boutons etaient simplement regles sur le Les bonnes valeurs de toute façon ",
vous dites" oh, il y avait un Dieu qui savait comment regler les boutons a la bonne valeur. "Et si
vous allez postuler cela, alors vous avez vendu en un sens le laissez-passer.

Certains physiciens resolvent ce probleme en n'invoquant pas Dieu, bien sûr, mais en invoquant
le principe anthropique en disant: «Bien ici nous sommes, nous existons, nous devons etre dans le
genre d'univers dans lequel est capable de nous donner naissance». En soi, je pense est insatisfaisant
et comme John Lennox dit a juste titre, certains physiciens resoudre que par l'idee multivers, l'idee
que notre univers n'est qu'un des nombreux univers.

Il y a une sorte de bulle moussante, une mousse bouillonnante d'univers et celle dans laquelle la
bulle dans laquelle nous sommes n'est qu'un des milliards d'univers et chacun de ces univers a des
constantes fondamentales differentes. La plupart d'entre eux ont des constantes fondamentales qui
sont inadaptees pour donner lieu a la sorte de permanence et le genre de chimie et le genre de
conditions qui donnent l'evolution biologique, l'evolution darwinienne la possibilite de se lancer.

Une minuscule minorite de ces univers a ce qu'il faut pour donner naissance a l'evolution
darwinienne, finalement a la chimie, puis a l'evolution. Et cette minuscule minorite doit inclure
l'univers dans lequel nous sommes assis parce que nous sommes ici. Le principe anthropique, le
principe que nous devons etre dans une universite de donner naissance a nous, plus le principe du
multivers, fournit au moins une explication interimaire, satisfaisante d'une maniere que le createur
ne pourrait pas etre une explication satisfaisante pour le Raison que j'ai donnee. Puis, nous etant
arrives dans un univers capable de generer des etoiles, capables de generer la chimie et finalement
205
capable de generer l'origine de la vie, alors l'evolution biologique prend le dessus et maintenant
nous sommes sur une course claire.

Maintenant, nous comprenons ce qui est arrive une fois l'evolution biologique commence, alors
il est facile de comprendre la plupart de ce qui est difficile, la plupart de la difficulte de comprendre
l'univers reside dans la vaste complexite de la vie. C'est ce qui impressionne vraiment les gens. C'est
pourquoi les gens qui croient en Dieu croient generalement en Dieu parce qu'ils regardent autour du
monde vivant et ils voient comment il est impressionnant.

Donc ce niveau d'impression est completement detruit par Darwin, et Darwin n'indique
evidemment pas l'origine de l'univers et pour cela j'invoque le principe anthropique et le multivers,
moins satisfaisant certes, mais la science progresse. Celui que vous pouvez etre absolument sûr est
qu'un concepteur creatif ne peut pas etre une explication satisfaisante.

John Lennox

Le principe anthropique, comme vous l'avez dit Richard, est un truisme total. Bien sûr, nous
devons etre dans une planete de telle sorte que nous pourrions apparaitre sur celle-ci. Cela ne
repond pas a la question de savoir comment nous sommes venus a y exister. Et je crains d'etre en
desaccord avec votre darwinisme. Le darwinisme n'explique pas la vie. Il peut expliquer certaines
choses sur ce qui se passe quand vous avez la vie, mais l'evolution suppose l'existence d'un
replicateur de mutation. Il n'explique pas comment ce replicateur est venu a exister en premier lieu.
Voila une discussion importante. Je veux aborder la question «qui a conçu le concepteur» parce que
c'est la vieille question d'ecolier, « Qui a cree Dieu ? » Je suis reellement tres surpris de le trouver
comme un argument central dans votre livre parce qu'il suppose que Dieu est cree et donc je ne suis
donc pas etonne que vous appeliez le livre Pour en finir avec Dieu, parce que des dieux crees sont
par definition une illusion.

Maintenant, je sais et je dois expliquer que Richard n'aime pas les gens qui lui disent qu'ils ne
croient pas en Dieu, il ne croit pas en mais je pense que cela est peut-etre toucher un endroit
douloureux parce que vous laissez vous-meme large sujet au meme probleme. Apres tout, vous dites
que Dieu est une illusion et pour peser cet argument je dois savoir ce que vous entendez par « Dieu
». Et si vous dites : « S'il y a un Dieu, vous devez demander qui a cree Dieu », cela signifie que
vous l’avez reduit a la pensee des dieux crees. Eh bien, aucun d'entre nous ne croit aux dieux crees ;
Juifs, musulmans ou chretiens. Je pense que cet argument est tout a fait hors de propos et peut-etre
que vous devriez le mettre dans votre etagere marquee « theieres celestes » où il a sa place.

Le Dieu qui a cree l'univers Mesdames et Messieurs n'a pas ete cree. Il est eternel. C'est la
distinction fondamentale entre Dieu et l'univers. Il est venu a exister, Il n'a pas. Et c'est precisement
ce que l'apotre chretien Jean fait au debut de son evangile : « Au commencement etait la parole ».
La Parole etait deja. Toutes choses sont venues par lui. Dieu est incree. L'univers a ete cree par Lui.
Maintenant, je ne sais pas si Richard a des difficultes avec le concept de l'incree. Je ne sais pas et
j'aimerais savoir s'il croit, en tant que materialiste, que la matiere et l'energie des lois de la nature
etaient toujours la, parce que s'ils croyaient en quelque chose d'eternel. Alors peut-etre la difficulte
reside dans la croyance en une personne eternelle.

Mais je veux approfondir cette question, car il a suggere que l'introduction de Dieu signifierait la
fin de la science. Dieu n'est pas une explication puisque par definition Dieu est plus complexe que
la chose que vous expliquez. Maintenant, ce qu'il declare est l'argument central de son livre. Je
n'aurais pas attendu un argument comme celui-ci d'un scientifique parce que les explications dans la
science elles-memes sont habituellement en termes de complexite croissante. Une chute de pomme
est un evenement simple. L'explication des termes de la loi de gravitation de Newton etire deja les
esprits de beaucoup de gens, mais son explication en termes de chaine dans l'espace-temps etire les

206
esprits des plus habiles. La simplicite n'est pas le seul critere de la verite. Permettez-moi de vous
donner un exemple: supposez que vous etes un archeologue et que j'explore une grotte avec vous, et
que vous etes un expert chinois. Sur cette grotte, vous voyez deux egratignures et vous dites :
« L'intelligence humaine ! » Et je dis : « Pardon ? Ce ne sont que deux griffures. » Et vous dites :
« Mais voila le caractere chinois 人 (ren) qui signifie un etre humain. » Mais je dis : « Voyons
Richard, ce n'est pas une explication du tout ! »

Vous postulez quelque chose d'aussi complexe qu'un cerveau humain pour expliquer deux
egratignures. Cela signifie que votre explication est plus complexe que la chose que vous expliquez.
Ce n'est pas une explication du tout. Et cela me semble exactement ce que vous dites dans votre
livre. La raison pour laquelle nous pouvons deduire quelque chose d'aussi sophistique que
l'intelligence humaine a partir de deux egratignures sur un mur de grotte est parce qu'elles ont une
dimension semiotique. Ils portent un sens. Et cela me fascine en tant que mathematicien parce que
le reductionniste s'engage a deduire des choses qui portent un sens, et j'y inclurais la molecule
d'ADN. S'engage a vous expliquer en termes de materiaux de base.

Mais comme l'a souligne il y a longtemps le prix Nobel Roger Sperry, la signification du
message ne se retrouvera pas dans la physique et la chimie du papier et de l'encre. Et ce qui m'a
aussi fascine dans votre livre c’est de voir que vous avez approuve la recherche d'une TOE, une «
theorie de tout » [theory of everything], mais c'est une theorie apres laquelle il n’y a plus
d’explication. Incidemment, il n'y a pas d'espoir de trouver une TOE comme Stephen Hawking l'a
dit en 2004 sur la base des mathematiques de Gödel et de son application a la physique. Donc, j’ai
trouve interessant que vous soyez prets a accepter qu’une TOE soit une bonne chose en physique,
comme peut-etre vous aimeriez une TOE a condition qu'il n'y ait pas de Dieu attache a celle-ci.

THÈSE 5 : « NOUS N'AVONS PAS BESOIN DE DIEU POUR ETRE


MORAL »
Modérateur

La cinquieme these est « nous n'avons pas besoin de Dieu pour etre moral ». Je ne ai qu'une
citation, d'apres la page 226 (de The God Delusion) : « Nous n'avons pas besoin de Dieu pour etre
bon ou mauvais. »

Richard Dawkins

Si vous reflechissez a la raison pour laquelle vous pourriez avoir besoin de Dieu pour etre moral,
je ne pourrais penser qu'a deux raisons a cela. Vous pourriez dire que vous avez besoin d'un « livre »
pour vous dire ce qui est moral. Et bien j'espere sincerement que personne dans cette salle ne fonde
sa moralite sur la Bible chretienne ou le Coran, parce que si elles le font, alors leurs mœurs sont
susceptibles de devenir hideux. Inutile de dire que vous pouvez trouver quelques versets decents
(applaudissements) vous pouvez trouver quelques versets decent dans la Bible et dans le Coran, et
si vous choisissez un de ces versets vous pouvez dire avec le recul, « ce verset s'inscrit dans le cadre
de ce je crois etre moral, mais ce verset ne l'est pas ; donc je peux ignorer ce verset et choisir cet
autre verset », mais vous n'avez pas besoin de la Bible pour faire une telle selection. Vous avez fait
cette selection et ce choix sur la base de quelque chose d'autre, quelque chose que nous avons tous
en commun, que nous soyons religieux ou non.

Nous sommes tous, dans une plus ou moins grande mesure, « moraux », certains d'entre nous
plus que d'autres. Que nous soyons ou non « moraux » n'a rien a voir avec le fait que nous lisons la
Bible. Certaines personnes sont gentilles, certaines personnes sont sympathiques ; certaines
207
personnes se soucient de la souffrance, d'autres personnes ne le font pas. Cela n'a rien a voir avec la
Bible. La raison pour laquelle vous pourriez avoir besoin de religion pour etre moral, c'est que soit
vous avez peur de Dieu, vous avez peur d'etre puni si vous n'etes pas moral, soit vous essayez
d'aspirer a Dieu (rires de l'audience) et vous etes « bon » afin d'obtenir une recompense. Aucune de
ces deux choses n'est une tres noble raison d'etre « bon », pour dire le moins.

A ce stade, vous pourriez dire que je fais face a un defi : comment puis-je savoir ce qui est
moral? Globalement je ne le sais pas, mais ce que je voulais souligner, c'est qu'il ne semble y avoir
une sorte d'acceptation humaine universelle concernant le fait que certaines choses sont « bonnes »
et d'autres ne le sont pas. Si vous regardez cela de maniere inter-culturelle, si vous regardez
differentes conclusions anthropologiques sur les differentes cultures, vous trouverez qu'il y a une
sorte d'accord que certaines choses sont mauvaises et d'autres choses sont bonnes, mais il y a
desaccord sur le detail. La regle d'or, « faites ce que vous aimeriez qu'on vous fasse », « faites aux
autres ce que vous attendez qu'ils vous fassent ». C'est un principe tres repandu, et il s'eleve presque
au rang de sens commun, d'une certaine maniere. Vous n'avez vraiment pas besoin d'un livre saint
pour vous dire de le faire.

Maintenant, en tant qu'evolutionniste, je pense que tout cela vient en partie de notre passe
evolutif. Je pense qu'il y avait un moment de notre histoire où nous avons vecu en groupes de
parente et nous vivions en petits groupes dans lesquels les bonnes actions pouvaient etre
reciproque ; et dans ces conditions, nous avons developpe une sorte de desir d'etre bon qui etait
parallele a la soif de sexe, qui presente des avantages darwiniens evidents. Maintenant, nous ne
vivons plus dans des petits villages, dans des petits clans, et donc la pression darwinienne d'etre bon
n'est plus aussi fort, ni la pression darwinienne pour le sexe aussi forte que par le passe car de nos
jours, nous utilisons souvent des contraceptifs et le comportement consequent sexuel ne conduira
pas a la consequence darwinienne qui en provient.

Mais ça ne fait rien. La chose importante ici, c'est que notre passe evolutif construit en nous un
desir de sexe et par le fait meme, il construit en nous un desir d'etre bon. Un desir d'etre amical, une
soif de cooperer. Un desir d'etre sympathique envers la souffrance. Donc, je pense que cela vient en
partie de cela, mais je pense que cela vient aussi de quelque chose de moins facile a definir, mais
qui est clairement la, quelque chose que je appelle le zeitgeist moral changeant. C'est quelque chose
qui change de decennie en decennie. Vivant comme nous le faisons en 2007, il y a un large
consensus concernant ce qui est bien et mal. Le racisme est mauvais, la discrimination sexuelle est
mauvaise. La cruaute est mauvaise ; cela caracterise la façon dont nous vivons au debut du 21e
siecle, mais ce n'est pas necessairement ce qui caracterisait nos ancetres vivant en ce lieu il y a 200
ans.

Le consensus a evolue et je trouve que c'est tout a fait fascinant et tres interessant de voir cela
car cela suggere qu'il y a vraiment une sorte de « quelque chose » dans l'air concernant ce qui est
considere comme moral, et ça n'a clairement rien a voir avec la religion parce que cela ne vient pas
de l'Écriture. L'Écriture ne change pas au fil des decennies de la meme maniere dont change notre
attitude concernant l'esclavage, envers les femmes, etc. Cela semble vraiment etre un effet d'un
deplacement puissant du Zeitgeist qui ne vous dit rien en soi, mais qui indique qu'il y a quelque
chose dans l'air, une autre force, quelque chose que nous ne pouvons pas comprendre avec une
sophistication sociologique ou psychologique suffisante, mais quoiqu'elle soit, ce n'est pas la
religion.

John Lennox

La question est : « Avons-nous besoin de Dieu pour etre moral ». Si nous formulons cela sous la
forme, « un athee peut-il etre bon ? », bien sûr. Parce que, comme je le vois, le fait meme que les
etres humains partout dans le monde manifestent un tronc commun moral est la preuve de la verite

208
biblique qui affirme que nous sommes des etres moraux faits a l'image de Dieu. Donc ce que je
voudrais dire, c'est ceci : bien sûr, nous pouvons etre bon sans Dieu, dans le sens de notre
comportement personnel ; mais je ne suis pas sûr que nous pouvons trouver des fondations pour le
concept « d'etre bon » sans Dieu.

Vous (note : Richard Dawkins) admettez que vous ne pouvez pas deriver l'ethique a partir de la
science dans votre livre L'aumônier du diable. La science n'est pas une methode qui nous permette
de decider ce qui est ethique et je trouve tres interessant de lire dans l'un de vos autres livres, Le
Fleuve de la vie, pour trouver ce que je comprends etre votre analyse de ce que l'univers est en fin
de compte, un univers de :

« … forces physiques aveugles et de replication genetique, certaines personnes vont etre


blessees, d'autres personnes vont avoir de la chance, et vous ne trouverez pas de rime ni
de raison en cela, ni de justice. L'univers que nous observons a precisement les
proprietes nous devrions en attendre s'il n'y a, au reste, pas de « plan », pas de but, pas
de mal, et pas de bien, rien que de l'indifference impitoyable. L'ADN ne connait rien et
ne se soucie de rien. L'ADN existe simplement. Et nous dansons a sa musique. »
(Dawkins, 1996, p. 133).

Alors la il me semble que vous dites que le bien et le mal n'existent pas, donc je ne sais meme
pas où vous obtenez les criteres moraux pour en discuter. Si un rocher tombe d'une montagne sur
votre tete et vous tue, cela n'a aucun sens d'appeler le rocher « mal ». Il existe, tout simplement. Si
Pol Pot choisit d'eliminer un million intellectuels ou si le terroriste du 9/11 choisit d'envoyer des
centaines de personnes a leur mort dans les tours jumelles, comment pouvez-vous appeler cela
« mal » s'ils etaient simplement en train de danser sur la musique de leur ADN ? Tout cela me parait
etre un monde hideux que vous nous presentez. Ce n'est pas moral du tout.

Et par consequent poussant juste cette reflexion un peu plus loin ; si le bien et le mal n'existent
pas, s'il n'y a pas de « mal » et pas de « bon », rien qu'une indifference impitoyable aveugle,
comment cela peut-il avoir un sens que de parler des maux de la religion ou du bien de l'atheisme ?
Alors je sais que vous suggerez ailleurs que nous avons a nous rebeller contre nos genes, mais cela
cree a mon sens un immense probleme avec (le reste de) ce que vous dites, parce que si nous ne
faisons rien d'autre que de danser sur le rythme de notre ADN, quelle partie de nous peut se rebeller
contre celui-ci (l'ADN) ?

Je tiens donc a suggerer que l'atheisme, loin de fournir une explication adequate pour la morale,
la dissout, et ceci est un probleme qui existe depuis des siecles. Comment quelque chose qui est
aveugle et impersonnel comme l'univers, peut-il nous imposer un sens moral ? Et David Hume,
philosophe que vous citez, fit remarquer cela tres clairement. Il a dit:

« Vous ne pouvez pas obtenir un devrait (un devoir) partir d'un est. Vous ne pouvez pas
tirer la morale et l'ethique a partir de la matiere et de l'energie. Vous ne pouvez pas aller
des faits aux valeurs. »64

Et ce qui me preoccupe beaucoup, ce est que meme si vous ne le dites pas dans votre livre, c'est
ce genre de philosophie, qui ne fonde pas la morale sur un Dieu transcendant, se doit de trouver la
morale soit dans la nature brute ou dans une combinaison de la nature et la societe, et cela conduit
souvent a une sorte d'utilitarisme. Et nous sommes dans une confusion ethique grave Je pense que
dans notre monde contemporain, dans le domaine juridique, dans l'ethique et le domaine medical et
dans le domaine de l'entreprise, parce que les fondations s'effritent.

Et je voudrais suggerer, je sais que c'est provocateur, mais je voudrais suggerer que Dostoïevski

64 Dans Traité de la nature humaine, section III.1.i, « Moral Distinctions Not deriv’d from Reason ».
209
etait tres perspicace, et j'ai vu que beaucoup de Russes sont d'accord avec moi quand il dit :

« Si Dieu ne existe pas, tout est permis »65.

Il ne dit pas que les gens ne peuvent pas etre bon ; il dit que les fondements de la morale sont
retires, et Niche predit exactement la meme chose. Donc, je trouve qu'essayer d'obtenir la moralite
ailleurs (note : qu'en Dieu) est quelque chose qui est voue a l'echec.

Richard Dawkins

Si vous pensez a pourquoi vous pourriez avoir besoin de Dieu pour la morale, je ne pouvais
penser a deux raisons de ce qui pourrait arriver. Vous pourriez dire que vous avez besoin d'un livre
pour vous dire ce qui est moral. Eh bien, pour ce que j'espere sincerement que personne dans cette
salle fonde leurs mœurs sur la Bible chretienne ou le Coran parce que si elles le font, alors leur
morale est susceptible d'etre hideux. Inutile de dire que vous pouvez trouver quelques versets
decents (applaudissements du public), vous pouvez trouver quelques versets decents dans la Bible et
le Coran et si vous choisissez et choisissez ces versets que vous pouvez dire avec le recul, "ce verset
s'inscrit dans ma vision de Ce qui est moral, ce verset ne fait pas, donc je peux ignorer ce verset et
choisir ce verset ", mais vous n'avez pas besoin de la Bible afin de faire ce picking et le choix. Vous
avez choisi et choisi en fonction de quelque chose d'autre, que nous avons tous en commun, que
nous soyons religieux ou non.

Nous sommes tous, dans une plus ou moins grande mesure, morale, certains d'entre nous plus
que d'autres. Que nous soyons morales ou non n'a rien a voir avec la lecture de la Bible. Certaines
personnes sont aimables, certaines personnes sympathiques; Certaines personnes se soucient de la
souffrance, d'autres ne le font pas. Cela n'a rien a voir avec la Bible. L'autre raison pour laquelle
vous pourriez avoir besoin de religion pour etre moral, c'est que vous avez peur de Dieu, vous avez
peur si vous n'etes pas moral, vous serez punis, ou vous essayez de sucer a Dieu Rire) et etre bon
pour que vous obtiendrez une recompense. Ni l'un ni l'autre de ces deux est une raison tres noble
d'etre bon pour dire le moins.

Maintenant, vous pourriez dire que cela me force dans un defi: comment puis-je savoir ce qui est
moral? Je ne suis pas dans l'ensemble, mais le point que je veux faire est qu'il semble y avoir une
sorte d'acceptation humaine universelle que certaines choses sont bonnes et d'autres ne le sont pas.
Si vous regardez de travers culturellement, regardez les differents resultats anthropologiques sur
differentes cultures, vous verrez qu'il y a une sorte d'accord que certaines choses sont fausses et
d'autres choses sont bonnes, il y a un desaccord dans le detail. La regle d'or, « faites aux autres ce
que vous voudriez qu’ils vous fassent ». C'est un principe tres repandu, et il s'agit presque d'un sens
commun. Vous n'avez certainement pas besoin d'un livre sacre pour vous dire de le faire.

Maintenant, en tant qu'evolutionniste, je pense qu'il vient en partie de notre passe evolutif. Je
pense qu'il y a eu un moment dans notre histoire où nous vivions dans de petits groupes de parents
et que nous vivions en petits groupes où l'on pouvait s'attendre a de bonnes actions, et dans ces
conditions, nous avons developpe une sorte de desir de bien qui etait parallele a la La convoitise
pour le sexe, qui a des avantages darwiniens evidents. Maintenant, nous ne vivons plus dans de
petits villages, dans de petits clans, et donc la pression darwinienne pour etre bon n'est plus aussi
forte, ni la pression darwinienne pour la luxure aussi forte qu'elle l'etait autrefois car aujourd'hui
nous utilisons souvent des contraceptifs et donc le comportement sexuel Pas conduire a la
consequence reproductive qui est bien sûr la raison darwinienne pour elle. Mais ça n'a pas
d'importance. Le fait est que notre passe evolutionniste a construit en nous une convoitise pour le

65 Bien que l'on se soit demande si Dostoïevski a declare ces mots exacts, certains (comme
http://infidels.org/library/modern/andrei_volkov/dostoevsky.html) suggerent que cette phrase cle apparait mot pour mot
dans la partie 4, livre 11, chapitre 4 ("un hymne et un secret") des Frères Karamazov, de Dostoïevski (1880).

210
sexe et par le meme signe, il a construit en nous une envie d'etre bon. Une envie d'etre amical, une
envie de cooperer. Une envie de sympathiser avec la souffrance.

Je pense donc que cela vient en partie de cela, mais je pense que cela vient aussi de quelque
chose de moins facile a definir, mais qui est clairement la, quelque chose que j'appelle le zitgeist
moral changeant. C'est quelque chose qui change de decennie a decennie. Vivre comme nous le
faisons en 2007, ce serait un large consensus sur ce qui est bien ou mal. Le racisme est faux, la
discrimination sexuelle est fausse. La cruaute est fausse, ce qui caracterise la façon dont nous
vivons dans le debut du 21e siecle, qui n'aurait pas necessairement caracterise nos ancetres dans ce
lieu il ya 200 ans. Le consensus est passe et je trouve cela tres interessant et fascinant, ce qui laisse
penser qu'il y a vraiment quelque chose dans l'air au sujet de ce qui est considere comme moral, et il
n'a manifestement rien a voir avec la religion parce qu'elle ne vient pas De l'Écriture. Les Écritures
ne changent pas au fil des decennies dans notre attitude envers l'esclavage, nos attitudes a l'egard
des femmes etc. Il semble vraiment y avoir un puissant effet Zeitgeist changeant qui ne vous dit rien
en soi, mais qui indique qu'il y a quelque chose dans l'air, une autre force, quelque chose que nous
ne pouvons pas comprendre avec suffisamment de sophistication sociologique, psychologique, Mais
quoi qu'il en soit, ce n'est pas la religion.

John Lennox

La question est : « Avons-nous besoin de Dieu pour etre moral ». Si nous le formulons ainsi
« Un athee peut-il etre bon ? » Bien sûr. Parce que, selon moi, le fait meme que les etres humains
partout dans le monde montrent un noyau commun de morale est la preuve de la verite de
l'affirmation biblique que nous sommes des etres moraux faits a l'image de Dieu. Ce que je voudrais
dire, c'est que nous pouvons etre bons sans Dieu dans le sens de notre comportement personnel,
mais je ne sais pas si nous pouvons trouver des bases pour le concept d'etre bon sans Dieu.
Vous admettez que vous ne pouvez pas obtenir l'ethique de la science dans votre livre L’aumônier
du diable. La science n'est pas une methode pour decider ce qui est ethique et je trouve tres
interessant de lire un de vos autres livres, River Out of Eden, pour trouver ce que je comprends,
c'est votre analyse de ce que l'univers est comme au fond, dans un univers de :

«… des forces physiques aveugles et la replication genetique, certaines personnes vont


etre blessees, d'autres auront de la chance, et vous n'y trouverez ni rime ni raison, ni
justice. L'univers que nous observons a precisement les proprietes que nous devrions
attendre s'il n'y a, au fond, aucun dessein, aucun but, aucun mal et aucun bien, rien que
l'indifference impitoyable. L'ADN ne connait ni ne se soucie. L'ADN est juste. Et nous
dansons a sa musique. »(Dawkins, 1996, p.133).

Maintenant, cela me semble dire que le bien et le mal n'existent pas, alors je ne sais meme pas
où vous obtenez les criteres moraux pour en discuter. Si un rocher tombe d'une montagne sur votre
tete et vous tue, il ne fait aucun sens d'appeler le mal rock. Il existe juste. Si Pol Pot choisit
d'eliminer un million d'intellectuels ou si les terroristes du 11 septembre choisissent de faire voler
des centaines de personnes jusqu'a leur mort dans les tours jumelles, comment pouvez-vous les
appeler mauvais s'ils ne faisaient que danser a leur ADN ? Maintenant, cela me frappe comme un
monde hideux dans lequel vous nous livrez. Ce n'est pas une moralite du tout.

Et donc, poussant cela un peu plus loin, si le bien et le mal n'existent pas, il n'y a ni mal ni bien,
rien que l'indifference aveugle et impitoyable, comment peut-il avoir raison de parler des maux de
la religion ou du mal Bien de l'atheisme ? Maintenant, je sais que vous suggerez ailleurs que nous
devons nous rebeller contre nos genes, mais cela cree a mon esprit un immense probleme avec ce
que vous dites parce que si nous ne sommes rien d'autre que nos genes dansant au son de notre
ADN, quelle partie de nous pouvons Se rebeller contre eux? Donc, je veux suggerer que, loin de
l'atheisme fournir une explication adequate pour la moralite, il dissout, et c'est un probleme qui a ete
211
autour depuis des siecles. Comment quelque chose d'imprevoyant et impersonnel comme l'univers
peut-il nous imposer un sens moral ? Et David Hume, un philosophe que vous citez, a souligne cela
tres clairement. Il a dit:

« Vous ne pouvez pas obtenir un doit d'un est. Vous ne pouvez pas deriver la morale et
l'ethique de la matiere et de l'energie. Vous ne pouvez pas passer des faits aux valeurs. »

Et ce qui me preoccupe beaucoup, c'est que meme si vous ne le dites pas dans votre livre, c'est
que ce genre de philosophie, qui n'a aucune base pour la morale dans un Dieu transcendant, doit
trouver la morale soit dans la nature brute ou une combinaison de la nature Et la societe, et conduit
souvent a une sorte d'utilitarisme. Et nous sommes dans une grave confusion ethique, je pense dans
notre monde contemporain, dans la sphere juridique, dans la sphere ethique et medicale, et dans le
monde des affaires, parce que les fondations sont en ruine. Et je veux suggerer, je sais que c'est
provocateur, mais je veux suggerer que Dostoïevski etait tres perspicace, et beaucoup de Russes
sont d'accord avec moi, quand il a dit :

« Si Dieu n'existe pas, tout est permis. »

Il ne dit pas que les gens ne peuvent pas etre bons. Il dit que les fondements de la morale sont
supprimes, et Nietzsche predit exactement la meme chose. Donc, je trouve que la tentative d'obtenir
la moralite ailleurs est quelque chose qui est vouee a la destruction. J'aimerais passer du temps a
discuter de la Bible. Je pense que votre point de vue sur la Bible est un peu unilateral. Il y a des
choses a discuter.

212
11 dial
ogue
apologé
t
s
ique
s

DIALOGUE APOLOGÉTIQUE #1 :
L'ATHÉE FREUDIEN

Chrétien. Vous m’avez dit tout a l’heure que vous etiez athee. Pouvez-vous m’expliquer un peu
ce que vous voulez dire par cela ? J’ai une opinion bien differente moi-meme et je voudrais essayer
de comprendre ce que vous voulez dire.

Athée. Merci pour cet effort de sincerite. Mais je dois vous prevenir tout de suite que je crois de
maniere certaine que Dieu n’existe pas. Je sais que la plupart des gens sur la planete croient en une
sorte de dieu. Mais selon les preuves scientifiques, il n’y a pas de preuves. Au mieux c’est le
resultat d’un besoin psychologique.

C. Que voulez-vous dire ?

A . Et bien, nous sommes tous les deux d’accord que le monde est un endroit assez effrayant a
premiere vue : il suffit de regarder un peu les informations ou de lire le journal. Tout peut arriver.
Pour arriver a vivre dans ce monde, nous avons tous besoin de compenser en cherchant des
explications. La plus connue et la plus facile est de personnaliser l’univers avec un ou plusieurs
dieux. Si nous pouvons imaginer de tels dieux derriere tel ou tel evenement, tremblements de terre,
catastrophes, etc., la souffrance… alors nous trouverons un reconfort.

C. C’est possible. Oui cela pourrait etre une explication. Mais cela prouve-t-il que la religion est
apparue ainsi ?

A. Ce qui est certain c’est que les progres de la science expliquent de plus en plus le monde sans
avoir recours au concept de Dieu. A vrai dire je ne pense pas qu’il y ait une question a laquelle la
science ne puisse pas chercher et trouver de reponse. Cela parait preferable a l’explication des
chretiens : un Dieu invisible dont on ne peut pas mesurer la presence. N’est-ce pas plus cense
d’admettre l’echec de Dieu et de se tourner finalement vers la science ou la philosophie ? « Dieu »
est un concept reconfortant. Mais pour d’autres l’existence de Dieu a ete une hypothese destructrice.

C. Comment cela ?

A . Alors … au pire la religion conduit a l’extremisme et a la violence. Au mieux, la religion


empeche les hommes de progresser dans la connaissance. C’est certain, le monde est dur … mais ne
213
vaut-il pas la peine d’y vivre sans illusion et de la meilleure maniere possible ?

C. Si croire en Dieu est une illusion, comment expliquez-vous que tout ce que nous croyons ne
soient pas des illusions ? Vous croyez en la science, n’est-ce pas ?

A. Et bien non pas vraiment. Je veux dire, je ne dirai pas les choses ainsi. Je ne « crois » pas en la
science. La science apporte des preuves et je crois que ces preuves sont vraies. Mais ce n’est pas de
la foi. Par la science nous pouvons trouver des lois qui s’appliquent meme a la psyche humaine,
comme Freud l’a dit.

C. Mais les scientifiques n’admettent-ils pas de plus en plus que la methode scientifique inclus la
subjectivite du scientifique. Et donc que la science n’est pas completement neutre. Nous pourrions
dire que meme la recherche scientifique n’est pas totalement scientifique.

A. Cela me parait un peu pousse comme argument. Mais il y a des reponses a ceci.

C. L’une d’entre elles serait-elle completement objective ? Quelle est la maniere dont vous pouvez
etre totalement certain que l’objet que vous etudiez est vraiment la ?

A. Il n’y a pas besoin de systeme ou de philosophie pour cela. Nous voyons tous que les choses
sont là, devant nous.

C. Est-ce que vous croyez tout ce qui est dit etre scientifique ?

A. Non, pas vraiment.

C. Et pourtant tout ce qui est presente selon des lois scientifiques possede des preuves scientifiques.
Alors comment determiner les vrais faits scientifiques et ceux qui ne sont qu’une illusion ?

A. Parce que les mesures scientifiques sont valables.

C. Mais est-ce que les scientifiques font des erreurs ?

A. Bien sûr. Mais au moins ils font preuve de rationalite et ils se dirigent dans la bonne direction.

C. Comment pouvez-vous en etre sûr ?

A. Parce que je crois qu’il y a un consensus scientifique sur ces questions.

C. Alors vous me dites que vous avez foi dans le jugement scientifique ?

A. Je n’aime pas vraiment cette expression. Je ne suis pas irrationnel, je me base sur la science. Et
les scientifiques au mois sont des gens de confiance.

C. Je ne veux pas vous offenser mais … en poussant l’argument un peu loin si vous le permettez :
les docteurs Nazis etaient-ils dignes de confiance ?

A. Non certainement pas ! Mais je ne vois pas le rapport avec la science.

214
C. D’accord mais ils etaient des scientifiques. Tous les scientifiques et tous les hommes ne sont pas
dignes de confiance comme vous semblez le croire. Et ce n’est pas parce que nous progressons, soit
disant, dans la bonne direction, que nous devenons meilleurs.

A. Peut-etre bien. Mais cela fausse-t-il ce que je viens de dire ?

C. Vous me dites ne croire que dans les preuves scientifiques qui vont nous conduire vers un
progres de l’humanite. Ou c’est cela que j’ai compris. Mais comment etes-vous certains que
d’autres preuves scientifiques ne vont pas venir tout renverser dans 50 ans ? Vous ne pouvez pas
etre sûr du monde dans lequel vous vivez.

A. Non. Peut-etre pas. Mais une conclusion scientifique est plus probablement vraie que toutes les
religions confondues.

C. Mais encore une fois, sur quelle base pouvez-vous affirmer cela avec certitude ?

A. Toujours sur la base de la science ! Nous n’avons fait que parler de cela !

C. Mais je croyais que nous avions conclu que vous ne pouviez pas etre totalement certain de votre
maniere de considerer ces choses.

A. Oui, mais c’est une question de probabilite. Meme si une theorie scientifique peut-etre rendue
invalide dans le temps, elle est toujours plus probable que l’existence d’un Dieu tout puissant …
non ?

C. Plus probable … mais sur quelle base ? Compare a quoi ? La probabilite de pouvoir faire face a
la realite de ce monde tous les matins ne vous sera d’aucun secours. La probabilite que votre
conjoint vous aime ne sera jamais quelque chose de tres romantique. En plus, vous devez etablir
cette probabilite par rapport a ce qui vous semble le plus realiste. Alors forcement pour vous la non-
existence de Dieu est plus probable sur la base de votre rejet de Dieu. Vous voyez ?

A . Oui mais, je ne suis pas sûr que nous pouvions faire mieux. Je ne semble pas pouvoir vous
convaincre. Mon explication me semble plus probable, et plus logique !, voila tout.

C. Je suis desole de ne toujours pas etre d’accord avec vous. Nous pouvons aller plus loin que cela,
mais nous avons besoin d’un bon point de depart. Supposez un instant qu’il existe un Dieu, qui soit
tout puissant et qui connaisse toutes choses. Si ce Dieu existait et avait fait en sorte de se faire
connaitre, alors nous aurions une base pour notre certitude sans avoir a nous baser sur des
probabilites. Ce Dieu serait la base meme de notre certitude scientifique.

A . Je n’aime vraiment pas cette idee car je pense que c’est introduire une hypothese dont nous
n’avons pas besoin. Les gens utilisent l’idee de Dieu pour se rendre certains de ceci ou cela. Ils
manquent d’assurance alors ils inventent Dieu. C’est une sorte de bequille.

C. Je ne nie pas que l’idee de « dieu » ou des divinites puissent etre une bequille. Plus certainement
elle est un reconfort. Mais où est le mal a trouver reconfort dans ce monde ? N’est-ce pas l’une des
raisons que vous avez d’etre avec votre epouse … de dependre de quelqu’un ?

A. Sauf que les autres humains existent. Pas Dieu.

215
C. Donc vous n’avez pas de vraies preuves que Dieu n’existe pas, que des probabilites. Par contre
quand l’idee ne vous convient pas, alors vous etes certain de l’absence de Dieu ?

A . Non pas simplement parce que l’idee ne me plait pas. Ce n’est pas un critere pour etablir la
verite d’une chose.

C. Alors vous etes prets a admettre, ou au moins a supposer avec moi, que si un tel Dieu existait, il
serait une base pour notre certitude ?

A. C’est un grand si. Mais je ne vois pas a quoi cela vous amenerait que j’admette cela puisque je
sais deja que Dieu n’existe pas. Les hypotheses concernant tel ou tel Dieu ne m’interesse pas
vraiment.

C. Mais pas impossible selon ce que je vous ait expose. L’existence de Dieu est impossible sur la
base que vous avez presente … mais selon vous cette base n’est que probable, pas certaine. Donc il
est probable que Dieu n’existe pas dans le monde probable dans lequel vous pensez vivre. Cela
rend les choses un peu floues non ?

A. Peut-etre, mais l’idee de Dieu est une chose que je n’arrive pas a accepter. Et pourtant tant de
personnes croient en Dieu et menent des vies saines dan un monde moderne.

C. Je voudrais suggerer que ce qui n’est pas sain, c’est justement de ne pas croire. La raison pour
laquelle tant de personnes croient n’est pas que cela leur est impose ou qu’ils sont stupides ou
credules ! C’est simplement parce que c’est vrai : Dieu est vraiment la. À mon sens, et meme sur
votre base de raisonnement, cela me semble plus probable.

A. Je commence a avoir une idee de ce que vous voulez dire. Vous etes entrain de me dire que je
n’ai pas plus de raisons de faire confiance a la science que vous n’avez de raisons de croire en Dieu.

C. En fait je vais meme plus loin. Je dis en fait que selon votre propre raisonnement vous n’avez
pas la possibilite d’etre certain de quoique ce soit.

A. Mais je suis un scientifique … je ne m’occupe que de faits. De vrais faits, solides, prouves. Et
vous ne voulez certainement pas dire que cette science n’est pas vraie.

C. Seulement si vous presupposez un critere ultime pour la verite, un critere qui soit 100% objectif.
Et j’ai cru comprendre que vous ne pouviez pas atteindre cette certitude. Et dans ce cas il n’y a
qu’une relativite des choses.

A. Et où prenez-vous ce critere absolu ? Certainement vous qui croyez en Dieu ne pensez pas etre
comme Dieu et tout connaitre ?

C. Non bien sûr. Mais je crois que Dieu s’est revele a nous et qu’il nous a donne un moyen de
pouvoir vraiment connaitre des choses. Et meme de maniere scientifique puisqu’il a lui-meme cree
le monde et tout ce qu’il renferme ; le monde et la maniere dont il a ete cree. De plus, et au-dela des
lois de la science, je sais que Dieu existe car il est venu lui-meme se montrer sur terre en Jesus
Christ : un vrai homme dont nous savons qu’il a marche et est mort. Et qu’il est ressuscite. Voila
une vraie preuve historique, et donc scientifique.

216
DIALOGUE APOLOGÉTIQUE #2 :
FRED, LE SCEPTIQUE SENTIMENTAL
Voici le cas du « sceptique sentimental ». Ce jeune homme que nous rencontrons dans la rue n’est
pas à proprement parler un athéiste mais une personne qui ne peut pas accepter que Dieu soit bon,
miséricordieux etc. En fait ces personnes sont en plus grand nombre qu’un athéiste « pur » bien
qu’ils soient parfois, dans le discours, bien similaire.

Fred : Alors tu es chretien ? Je ne savais pas qu’il y en avait encore lorsqu’on voit tout _______
(remplir le blanc avec toutes sortes de mauvaises nouvelle : le mal, la violence etc.). Comment
expliques-tu cela ?

Paul : Je ne suis pas sûr de pouvoir t’expliquer quelque chose. Mais je peux essayer de te dire une
chose ou deux a propos de qui est Dieu … peut-etre cela mettra les choses en perspective.

Fred : Tu peux essayer mais meme s’il y a un dieu il est probablement tres loin et ne se sent pas
concerne pas nous « pauvres humains » (sourire ironique). En fait si Dieu existe, il ne peut
certainement pas etre bon et tout-puissant a la fois. Qui me dit qu’il n’est pas cruel et arbitraire et
qu’il joue avec nous comme avec des poupees. En fait il faut juger en fonction des preuves.

Paul : De quelles preuves parles-tu ?

Fred : Il suffit de lire le journal. Inondations, ouragans, des milliers d’enfants meurent de faim ou
n’ont pas acces a de l’eau potable. Sans mentionner les enfants soldats, abuses ou autre. Alors Dieu
a cree tout cela ? Ou il peut le justifier ?

Paul : Quelle est la relation que tu fais entre Dieu et toutes ces atrocites ? Est-ce que tu lui mets
tout sur le dos ?

Fred : Et bien il semble clair que si Dieu est tout-puissant—tu crois cela pas vrai ?—et s’il a cree
le monde, alors il est responsable pour tout ce mal. Il aurait pu tout eviter … mais bien sûr Dieu
n’existe pas.

Paul : C’est une relation que les chretiens ne font pas : relation entre la creation et le mal. Au
moins dans sa forme la plus simple. Bien sûr, Dieu est ultimement au-dessus et en controle de tout,
et toutes choses font partie de son « plan », mais cela ne fait pas de lui l’auteur du mal.

Fred : C’est n’importe quoi. Si Dieu est createur, alors tout ce que nous voyons est son œuvre.

Paul : Les chretiens croient que Dieu n’est pas un programme informatique, pas plus qu’il n’est
une machine automatique : rien n’arrive de maniere mecanique ou automatique avec Dieu.

Fred : Comment cela pourrait-il etre autrement ? Quel autre genre de cause existe ? Dieu cause ou
ne cause pas les choses. Il est createur ou pas : donc il existe ou pas.

Paul : Je ne sais pas si je peux vraiment trouver un langage adequat pour dire ce que cet autre
genre de « causalite » peut etre, mais je pourrais peut-etre prendre un exemple de la Bible si tu veux
bien. L’un des bons amis de Jesus, Lazare, vient de mourir. Jesus se rend a la tombe et pleure
devant la pierre qui ferme la tombe. En fait le terme veut dire que Jesus etait furieux en dedans de
217
lui-meme. Et maintenant Jesus est sur le point de rendre la vie a Lazare, mais il etait furieux a l’idee
de la mort de Lazare. Mais Jesus n’etait pas contre Dieu. Il etait furieux contre le pouvoir du mal et
de la mort mais pas contre le Createur.

Fred : Et bien c’est une belle histoire et cela montre qu’au moins ton fameux Jesus est humain.
Mais il n’avait pas compris que si son Dieu existait il avait cause la mort de son ami Lazare. Son
Dieu est responsable de la mort de son ami.

Paul : Oui, en quelque sorte tu as raison. Mais si Dieu etait responsable de tout ce que tu
mentionnes, crois-tu qu’il serait venu en chair, Christ, pour souffrir pour nous et avec nous. Je ne
pense pas qu’il en aurait prit la peine de mourir sur une croix.

Fred : Pourquoi Dieu creerait-il un tel monde, un monde dans lequel les choses iraient mal, meme
pour ton fameux Jesus ?

Paul : Je ne sais pas, mais je peux dire qu’il est saint, bon et que ses motivations ne sont pas
arbitraires. Et notre comprehension du « bien » est limite. Mais le vrai probleme n’est pas la. Ce qui
est en jeu c’est pourquoi nous avons decide de prendre une terre creee bonne et d’essayer de faire
mieux que Dieu et ainsi de la detruire.

Fred : Comment peux-tu savoir que nous avons fait cela ?

Paul : D’abord … je l’ai fait moi-meme. Je me demande parfois ce que je ferai si j’etais seul dans
telle ou telle situation et honnetement je n’aime pas la reponse. Mais cela me montre aussi que ce
que la Bible dit au sujet de la condition humaine se retrouve dans la vie de tous les jours.

Fred : Tu parles bien sûr de « peche » contre Dieu c’est cela ?

Paul : Oui en partie. Quelqu’un a dit que c’etait la plus grande preuve de la verite du
christianisme. Mais plus que de « peche » en general je parle du fait que moi personnellement je
suis pecheur. Et que toi aussi.

Fred : Si tu avais raison cela voudrait dire que tous les hommes sont mauvais. C’est de l’insanite
pure et cela n’a aucun sens. Je connais plein de gens bien … toi compris ! Meme si nous ne sommes
pas toujours d’accord.

Paul : Je ne dis pas que les hommes sont tous des demons. Mais en terme de moralite ultime,
generale, il faut reconnaitre que nous ne sommes certainement pas des anges. Parlons de nos
motivations, des nos buts et des moyens que nous utilisons … ce n’est pas brillant.

Fred : Personne n’est parfait !

Paul : Exactement. Et pourquoi cela, pourquoi avons-nous tous ces problemes ? Est-ce a cause de
l’environnement dans lequel nous vivons ou dans lequel nous avons grandi, nous avons toutes les
excuses ! Mais si Dieu a vraiment cree ce monde et nous les hommes, et que nous ne sommes pas
parfait, alors nous avons un serieux probleme.

Fred : Dieu, s’il existe, n’est-il pas un Dieu qui pardonne de toute façon ?

Paul : Il l’est. Mais ce n’est pas une carte de Monopoly du style « ne passez pas par la case
prison » ! Dieu ne nous dit pas « Cela ne fait rien. Ce n’est pas grave apres tout. » Dieu prend tout

218
serieusement et il nous tient responsable parce qu’il veut dans son amour que nous soyons
responsables de ce que nous faisons. Mais cela l’a aussi conduit a faire des choix radicaux.

Fred : Par exemple ?

Paul : Dieu a aime le monde et est venu en son Fils mourir pour le sauver. Dieu veut que nous
soyons responsables de notre peche, comme les chretiens l’appelle, mais il ne nous demande pas de
le reparer nous-meme.

Fred : Bon tout ça semble bien joli, mais un peu etrange et primitif. Le coup du Dieu qui meurt et
soudain revient a la vie … Si ton Jesus est vraiment venu pour faire tout ce que tu dis, je ne suis pas
sûr que nous ayons assez de preuves pour y croire. En plus je en suis pas sûr de voir le changement
chez ceux qui croient en lui. En plus ce monde qu’il a « tant aime » est toujours le meme desordre
total.

Paul : Oui je l’admet c’est tres etrange. En realite c’est meme une folie, mais d’un genre tres
particulier. Le plan de Dieu, son salut se fait par etapes. Une etape est deja accomplie et l’autre est a
finir.

Fred : Je ne m’attendais pas a une reponse aussi etrange. Je ne suis pas sûr de voir où tu veux en
venir. Pourquoi Dieu n’a-t-il pas « sauve » le monde d’un claquement de doigts.

Paul : Je ne connais pas toutes les raisons. Mais l’une de ces raisons est que c’est Christ, a la fois
homme et Dieu, qui devait venir pour le monde. Et personne d’autre. Dieu est entre dans l’histoire
et encore une fois cela prouve l’amour de Dieu. En faisant cela Jesus a aussi renverse le pouvoir du
mal. Il s’est fait « pecheur » pour pouvoir detruire le peche de l’interieur si je peux parle ainsi.

Fred : Oui si tu le dis. Mais je ne suis pas convaincu. Tes « preuves » ne me semblent pas tres
convaincantes.

Paul : Tu as raison. Il faudrait aller plus loin. Il faudrait par exemple que tu me dises vraiment
pourquoi tu ne peux ou ne veux pas croire. Tu as des raisons et je suis sûr qu’elles sont valables.
Mais je voudrai pouvoir te donner une vision de la foi chretienne qui apporte une vraie reponse, et
un vrai espoir dans un monde en detresse.

219
EXERCICES DE MISE EN SITUATION

Scénario 1 :
Je suis une personne lambda sans rien de particulier qui croit ce qu'on dit et la majorité des gens
doutent de l'existence de Dieu. Si ce dernier existait, il se manifesterait de manière plus évidente.

Scénario 2 :
Je suis un professeur de droit qui pense que tout dans le monde est une affaire de culture. C'est ce
que l'évolution du droit en Europe dans les 500 dernières années nous apprend.

Scénario 3 :
Je suis un pratiquant bouddhiste français. Je pars du principe que la solution au mal est de tous
pouvoir être « unifiés » dans un grand tout.

220
Scénario 4 :
Je suis un croyant de tradition vaguement protestante qui n'es pas certain que Dieu existe ? Je pars
du principe que la vérité est « plurielle » (c'est ce qu'on appelle le pluralisme).

Scénario 5 :
Je suis un croyant musulman, très pratiquant, convaincu qu'Allah est un Dieu d'amour qui ne
demande de ceux qui croient en lui que des démonstration de bonté et d'amour.

Scénario 6 :
Je suis un jeune professionnel d'une 40aine d'années qui a vaguement suivi un catéchisme
protestant et qui, à cause des diverses interprétation, se fait sa propre version du christianisme
dans lequel Jésus est l'image de l'homme spirituel.

221
Scénario 7 :
Je suis un jeune père de famille qui a un boulot décent, qui vient d'acheter sa première maison avec
un crédit avantageux, et qui a priori ne court pas vers le divorce. Je n'ai jamais pensé à la « foi »
parce que je n'en vois pas la pertinence personnelle.

Scénario 8 :
Je suis un militant altermondialiste qui pense que la chose la plus importante est la justice et
l'équité, tout ce que la société ne peut pas nous donner. Et comme notre société a été
essentiellement construite sur des valeurs judéo-chrétienne, je rejette de fait cette religion.

Scénario 9 :
Je suis un militant altermondialiste qui pense que la chose la plus importante est la justice et
l'équité, tout ce que la société ne peut pas nous donner. Et comme notre société a été
essentiellement construite sur des valeurs judéo-chrétienne, je rejette de fait cette religion.

222
Scénario 10 :
Je suis un scientifique à la retraite qui pense que la foi n’a pas de pertinence. Après tout, la foi et la
raison ne sont-elles pas opposées ?

Scénario 11 :
Je suis un informaticien qui croit en Jésus-Christ. Je crois qu’il est « historique » mais pas qu’il
était vraiment le « Fils de Dieu ».Ceci relève du pur domaine de la foi.

223
EXEMPLE DE CONTRADICTION :
LE DÉBAT BANHSEN / STEIN

B. Repondons-nous a toutes les questions logiques de la meme maniere ?


S. Non. Nous y repondons par certaines methodes. Mais les lois de la raison et de la logique nous
presentent les meme preuves et faits.
B. Bien. Mais vous avez dit qu’il existe parfois des contradictions et des fautes de logique.
S. Oui, j’ai utilise ces expressions.
B. Croyez-vous que la logique a ses lois?
S. Oui.
B. Sont-elles universelles?
S. Tous les hommes sont d’accord a leur sujet. Ce ne sont pas des lois abstraites qui existeraient
dans la nature. Elles representent un consensus.
B. Sont-elles simplement des conventions?
S. Elles sont des conventions qui se verifient elles-memes.
B. Mais sont-elles des lois sociologiques ou des lois de la pensee (logique).
S. Ce sont des lois de la pensee qui sont interpretees et fixees par les hommes.
B. Sont-elles materielles?
S. Comment pourraient-elles l’etre ?
B. C’est la question que je vous pose.
S. Je dirai qu’elles ne sont pas materielles.

(pause)

S. Dieu est-il materiel ou immateriel?


B. Immateriel.
S. Qu’est-ce qu’une chose immaterielle?
B. Ce qui n’est pas restreint par l’espace.
S. Donnez-moi un autre exemple de quelque chose qui est immateriel.
B. Les lois de la logique.

224
CORRECTION DE DEVOIR
SUR LE TEXTE DE BERTRAND RUSSELL
« POURQUOI JE NE SUIS PAS CHRÉTIEN »
https://users.drew.edu/~jlenz/whynot.html

Comme votre president vous l'a dit, le sujet dont je vais vous parler ce soir est « Pourquoi je
ne suis pas chretien ». Peut-etre serait-il mieux, tout d'abord, d'essayer de comprendre ce que l'on
entend par le mot « chretien ». Il est utilise ces jours-ci dans un sens tres lache par un grand nombre
de personnes. Certaines personnes veulent dire par ce terme une personne qui essaie de vivre une
bonne vie. En ce sens, je suppose qu'il y aurait des chretiens dans toutes les sectes et les croyances.
Mais je ne pense pas que ce soit le bon sens du mot, ne serait-ce que parce que cela impliquerait que
tous les gens qui ne sont pas chretiens - tous les bouddhistes, confuceeens, mahometans et ainsi de
suite – ne cherchent pas a vivre une bonne vie. Je ne veux pas dire par « chretien » toute personne
qui essaie de vivre decemment selon ses lumieres. Je pense que vous devez avoir une certaine
certitude de croyance avant que vous ayez le droit de vous appeler chretien. Le mot n'a pas un sens
aussi entier maintenant qu'il l'avait dans les temps de saint Augustin et saint Thomas d'Aquin. En
ces jours-la, si un homme disait qu'il etait chretien, on savait ce qu'il voulait dire. Vous avez accepte
toute une collection de croyances qui ont ete etablies avec une grande precision, et vous croyez
chaque syllabe de ces croyances avec toute la force de vos convictions.

QU'EST-CE QU'UN CHRÉTIEN ?

Aujourd'hui, ce n'est pas tout a fait ça. Nous devons etre un peu plus vagues dans notre
definition du christianisme. Je pense, cependant, qu'il y a deux choses differentes qui sont tout a fait
essentielles pour quiconque s'appelle chretien. Le premier est d'ordre dogmatique, c'est-a-dire que
vous devez croire en Dieu et en l'immortalite. Si vous ne croyez pas a ces deux choses, je ne pense
pas que vous pouvez correctement vous appeler chretien. Alors, comme son nom l'indique, vous
devez avoir une sorte de croyance sur Christ. Les mahometans, par exemple, croient aussi en Dieu
et en immortalite, et pourtant ils ne se diront pas chretiens. Je pense que vous devez avoir au
minimum la croyance que le Christ etait, sinon divin, au moins le meilleur et le plus sage des
hommes. Si vous ne croyez pas au moins cela sur le Christ, je ne pense pas que vous avez le droit
de vous appeler un chretien. Bien sûr, il y a un autre sens que l'on retrouve dans l'Almanach de
Whitaker et dans les livres de geographie, où la population du monde serait divisee en chretiens,
musulmans, bouddhistes, fetichistes, etc. Et en ce sens nous sommes tous chretiens. Les livres de
geographie nous comptent tous, mais c'est un sens purement geographique, que je suppose que nous
pouvons ignorer. C'est pourquoi je considere que lorsque je vous dis pourquoi je ne suis pas
chretien, je dois vous dire deux choses differentes. D'abord, pourquoi je ne crois pas en Dieu et en
l'immortalite. Et, d'autre part, pourquoi je ne pense pas que le Christ etait le meilleur et le plus sage
des hommes, bien que je lui accorde un tres haut degre de bonte morale.

Mais sans le succes des efforts des non-croyants dans le passe, je ne pourrait pas prendre une
definition aussi elastique du christianisme. Comme je l'ai deja dit, il y avait autrefois un sens
beaucoup plus « sanglant ». Par exemple, il impliquait la croyance en l’enfer. La croyance au feu de
l'enfer eternel etait un element essentiel de la croyance chretienne jusqu'a des temps assez recents.

Dans ce pays, comme vous le savez, il a cesse d'etre un element essentiel a cause d'une
decision du Conseil prive, et l'archeveque de Canterbury et l'archeveque d'York ont conteste cette
decision. Mais dans notre pays notre religion est reglee par une loi du Parlement, et par consequent
le Conseil prive a pu passer outre et l'enfer n'etait plus necessaire a un chretien. Par consequent, je
n'insisterai pas qu'un chretien doit croire en l'enfer.
225
L'EXISTENCE DE DIEU

Pour en venir a cette question de l'existence de Dieu, c'est une question importante et serieuse,
et si je tentais de le traiter de maniere adequate, je devrais vous garder ici jusqu'a ce que le
Royaume vienne, de sorte que vous devrez m’excuser si je le traite d'une maniere un peu sommaire.
Vous savez, bien sûr, que l'Église catholique a pose comme un dogme que l'existence de Dieu peut
etre prouvee par la raison sans aide. C'est un dogme un peu curieux, mais c'est un de leurs dogmes.
Ils ont dû l'introduire parce que les Libre Penseurs ont adopte une fois l'habitude de dire qu'il y avait
tel ou tel argument que la raison simple pourrait avancer contre l'existence de Dieu, mais bien sûr
ils savaient par la foi que Dieu existait. Les arguments et les raisons ont ete longuement exposes, et
l'Église catholique a estime qu'elle devaient arreter cela. Par consequent, ils ont etabli que
l'existence de Dieu peut etre prouvee par la raison, sans aide, et ils ont dû mettre en place ce qu'ils
consideraient comme des arguments pour le prouver. Il y a, bien sûr, un certain nombre d'entre eux,
mais je n'en prendrai que quelques-uns.

L’ARGUMENT DE LA PREMIÈRE CAUSE

Peut-etre le plus simple et le plus facile a comprendre est l'argument de la premiere cause.
(L’argument affirme que tout ce que nous voyons dans ce monde a une cause, et que vous revenez
dans la chaine des causes de plus en plus en arriere et vous devez en venir a une premiere cause, et a
cette premiere cause, vous donnez le nom de Dieu). Cet argument, je suppose, n'a pas beaucoup de
poids aujourd'hui, parce que, d'abord, la cause n'est pas tout a fait ce qu'elle etait. Les philosophes et
les hommes de science se sont lances dans la causalite, et elle n'a rien de la vitalite qu'elle avait.
Mais, en dehors de cela, vous pouvez voir que l'argument qu'il doit y avoir une premiere cause est
celui qui ne peut avoir aucune validite. Je peux dire que lorsque j'etais un jeune homme et que je
debattais de ces questions tres serieusement dans mon esprit, j'ai longtemps accepte l'argument de la
Premiere Cause, jusqu'a ce qu'un jour, a l'age de dix-huit ans, je lis l'Autobiographie de John Stuart
Mill , Et j'ai trouve cette phrase : « Mon pere m'a appris que la question ‘Qui m'a fait ?’ N’a pas de
reponse, puisqu'il suggere immediatement la question suivante : « Qui a fait Dieu ? » Cette phrase
tres simple m'a montre, je pense encore, l'erreur dans l'argument de la Premiere Cause. Si tout doit
avoir une cause, alors Dieu doit avoir une cause. S'il peut y avoir quelque chose sans cause, cela
peut tout aussi bien etre le monde que Dieu, de sorte qu'il ne peut y avoir de validite dans cet
argument. Il est exactement de la meme nature que l'opinion hindoue que le monde reposait sur un
elephant et que l'elephant reposait sur une tortue. Et quand ils dirent : « Que diriez-vous de la
tortue ? », l'Indien a dit : « Et si nous changions de sujet ? » L'argument n'est vraiment pas mieux
que cela. Il n'y a pas de raison pour laquelle le monde n'ait pu naitre sans cause. Il n’y a pas plus de
raisons de croire que le monde n'aurait pas dû toujours exister. Il n'y a aucune raison de supposer
que le monde ait eu un commencement. L'idee que les choses doivent avoir un debut est vraiment
due a la pauvrete de notre imagination. Par consequent, peut-etre, je n'ai pas besoin de perdre plus
de temps sur l'argument concernant la Premiere Cause.

L'ARGUMENT DE LA LOI NATURELLE

Ensuite, il y a l’argument tres courant de la loi naturelle. C'etait un argument de choix tout au
long du 18e siecle, surtout sous l'influence de sir Isaac Newton et de sa cosmogonie. Les gens
observaient les planetes qui tournaient autour du soleil selon la loi de la gravitation, et ils pensaient
que Dieu avait donne un ordre a ces planetes pour qu’elle se meuvent de cette maniere particuliere.
C'etait, bien sûr, une explication pratique et simple qui leur a permis de chercher plus loin les
explications de la loi de la gravitation. Aujourd'hui, nous expliquons la loi de la gravitation d'une
maniere un peu compliquee, qu'Einstein a introduite. Je ne propose pas de vous donner une
conference sur la loi de gravitation telle qu'interpretee par Einstein, parce que cela prendrait encore
un certain temps. En tout cas, vous n'avez plus le genre de loi naturelle que vous aviez dans le
systeme newtonien, où, pour une raison que personne ne pouvait comprendre, la nature se

226
comportait d'une maniere uniforme. Nous constatons maintenant que beaucoup de choses que nous
pensions etre des lois naturelles sont vraiment des conventions humaines. Vous savez que meme
dans les profondeurs les plus reculees de l'espace stellaire il y a encore cent centimetres dans un
metre. C'est, sans doute, un fait tres remarquable, mais vous n'appelleriez pas cela une loi de la
nature. Et beaucoup de choses qui ont ete considerees comme des lois de la nature sont de ce genre.

D'autre part, quand vous arriverez a la connaissance de ce que les atomes sont reellement,
vous trouverez qu'ils sont beaucoup moins soumis a la loi que les gens ne le pensaient, et que les
lois auxquelles vous arrivez sont des moyennes statistiques du genre qui serait emergent du hasard.
Il y a, comme nous le savons tous, une loi qui fait que, si vous jetez des des, vous n’obtiendrez deux
six qu'une fois en trente-six fois, et nous ne considerons pas cela comme une preuve que la chute
des des est reglementee par le « dessein ». Au contraire, si les doubles six arrivaient a chaque fois,
nous devions penser qu'il y avait un « dessein. » Les lois de la nature sont de ce genre pour un grand
nombre d'entre elles. Ce sont des moyennes statistiques qui ressortiront des lois du hasard. Et cela
rend toute cette affaire de loi naturelle beaucoup moins impressionnante qu'elle ne l'etait autrefois.
Independamment de cela, toute l'idee que les lois naturelles impliquent un legislateur est due a une
confusion entre les lois naturelles et humaines.

Les lois de l'homme sont des regles qui vous commandent de vous comporter d'une certaine
maniere, d’une maniere que vous pouvez choisir de vous comporter ou de ne pas se comporter.
Mais les lois naturelles sont une description de la façon dont les choses se comportent en fait, et
etant une simple description de ce qu'elles font en fait, vous ne pouvez pas pretendre qu'il doit y
avoir quelqu'un qui leur a dit de le faire parce que meme alors vous etes face a la question :
« Pourquoi Dieu a-t-il delivre seulement ces lois naturelles et pas d'autres ? » Si vous dites qu'il l'a
fait simplement de son bon plaisir et sans raison, vous trouvez alors qu'il y a quelque chose qui n'est
pas sujet a loi, et donc votre idee de loi naturelle est compromise. Si vous dites, comme le font
d'autres theologiens orthodoxes, que dans du sein des lois que Dieu delivre, il avait une raison de
donner ces lois plutot que d'autres. Vous avez vraiment une loi existant au-dela et avant Dieu, et
Dieu ne vous sert a rien, parce qu’il n’est pas le grand Legislateur.

Bref, tout cet argument a propos du droit naturel n'a plus rien a voir avec la force qu'il avait.
Je voyage a temps dans mon examen des arguments. Les arguments qui sont utilises pour
l'existence de Dieu changent leur caractere avec le temps. C'etaient d'abord des arguments hardis et
intellectuels qui incarnaient certaines erreurs bien definies. À mesure que nous atteignons les temps
modernes, ils deviennent moins respectables intellectuellement et de plus en plus affectes par une
sorte de vague morale.
L'ARGUMENT DU DESSEIN (DESIGN)

La prochaine etape de ce processus nous amene a l'argument du design. Vous connaissez tous
l'argument de la conception : tout dans le monde est fait juste pour que nous puissions y vivre, et si
le monde etait si peu different, nous n'aurions pas reussi a y vivre. C'est l'argument de la conception.
Il prend parfois une forme assez curieuse. Par exemple, on fait valoir que les lapins ont des queues
blanches pour etre faciles a tirer. Je ne sais pas comment les lapins verraient cette demande. C'est un
argument facile a parodier. Vous connaissez tous la remarque de Voltaire, que, bien evidemment, le
nez a ete conçu pour etre de nature a s'adapter a des lunettes. Cette sorte de parodie s'est averee ne
pas etre aussi tiree par les cheveux qu’on ne l’aurait cru au 18 e siecle, parce que depuis Darwin nous
comprenons mieux pourquoi les etres vivants sont adaptes a leur environnement. Ce n'est pas que
leur environnement a ete conçu pour leur convenir, mais qu'ils sont devenus convenables a
l’environnement, et c'est la base de l'adaptation. Il n'y a aucune preuve de la conception a ce sujet.

Quand vous venez examiner cet argument du design, c'est une chose etonnante que les gens
puissent croire que ce monde, avec toutes les choses qui sont en lui, avec tous ses defauts, devrait
etre le meilleur de ce que l'omnipotence et l'omniscience ont pu produire. En des millions d'annees.
227
Je ne peux vraiment pas le croire. Pensez-vous que, si on vous a accorde l'omnipotence et
l'omniscience et des millions d'annees pour parfaire votre monde, vous ne pourriez rien produire de
mieux que le Ku-Klux-Klan ou les fascistes ?

De plus, si vous acceptez les lois ordinaires de la science, vous devez supposer que la vie
humaine et la vie en general sur cette planete s'eteindront a un moment : c'est une etape dans la
desintegration du systeme solaire. À un certain stade de la cette decomposition vous obtenez le
genre de conditions de temperature, et ainsi de suite, qui conviennent au protoplasme, et il n’y a la
vie, dans la vie de l'ensemble du systeme solaire, que pour un court laps de temps. Vous voyez dans
la lune le genre de chose que la terre va devenir, quelque chose de mort, froid et sans vie. On me dit
que ce genre de point de vue est deprimant, et les gens vont parfois vous dire que s'ils croyaient
cela, ils ne seraient pas capables de continuer a vivre. Ne le croyez pas : c'est du non-sens. Personne
ne s'inquiete beaucoup de ce qui va se passer dans des millions d'annees. Meme s'ils pensent qu'ils
s'inquietent beaucoup de cela, ils se trompent vraiment. Ils sont inquiets de quelque chose de
beaucoup plus banal – ou alors c’est simplement une mauvaise digestion. Mais personne n'est
vraiment serieusement rendu malheureux par la pensee de quelque chose qui va arriver a ce monde
dans des millions d'annees. Par consequent, bien que ce soit evidemment une vue sombre de
supposer que la vie va mourir – du moins je suppose que nous pouvons le dire, bien que parfois,
quand je contemple ce que les gens font avec leur vie, je pense que c'est presque une consolation –
ce n’est pas pour rendre la vie miserable. Il vous fait simplement tourner votre attention vers
d'autres choses.

LES ARGUMENTS MORAUX POUR DIEU

Nous atteignons maintenant une etape de plus dans ce que j'appellerai la descente
intellectuelle que les theistes font dans leurs argumentations, et nous arrivons a ce qu'on appelle les
arguments moraux pour l'existence de Dieu. Vous savez bien, bien sûr, qu'il existait autrefois trois
arguments intellectuels pour l'existence de Dieu, qui ont tous ete contestes par Emmanuel Kant dans
Critique de la raison pure. Mais des qu'il se fut debarrasse de ces arguments, il inventa un discours
moral, et cela le convainquit. Il etait comme beaucoup de gens : en matiere intellectuelle, il etait
sceptique, mais en matiere morale, il croyait implicitement aux maximes qu'il avait absorbees sur
les genoux de sa mere. Cela illustre ce que les psychanalystes soulignent bien, l'emprise
immensement plus forte que nos souvenirs lointain ont sur nous par rapport aux souvenirs plus
recents.

Kant, comme je l'ai dit, a invente un nouvel argument moral pour l'existence de Dieu, et qui,
sous diverses formes, a ete extremement populaire au cours du 19 e siecle. Il a toutes sortes de
formes. Une forme est de dire qu'il n'y aurait pas de droit ou de mal si Dieu n’existait pas. Je ne suis
pas pour le moment preoccupe par la question de savoir s'il y a une difference entre le bien et le
mal, ou s'il n'y en a pas. C'est une autre question. Ce qui me preoccupe, c'est que, si vous etes sûr
qu'il y a une difference entre le bien et le mal, vous etes alors dans la situation suivante : est-ce que
cette difference est due a l’acte de Dieu ou non ? Si elle est due a l’acte de Dieu, alors pour Dieu
lui-meme il n'y a aucune difference entre le bien et le mal, et ce n'est plus une declaration
significative de dire que Dieu est bon. Si vous dites, comme le font les theologiens, que Dieu est
bon, vous devez alors dire que le bien et le mal sont un sens independants de l’acte de Dieu, parce
que les actes de Dieu sont bons, et non mauvais, independamment du simple fait qu'il les a fait. Si
vous dites cela, vous devez alors dire que ce n'est pas seulement par Dieu que le bien et le mal sont
nes, mais qu'ils sont dans leur essence logiquement anterieurs a Dieu. Vous pourriez, bien sûr, si
vous le voulez, dire qu'il y avait une divinite superieure qui a donne des ordres au Dieu qui a fait ce
monde, ou dire ce que que certains des gnostiques ont dit – un argument que j'ai souvent pense etre
un tres plausible – qu’en fait, ce monde que nous connaissons a ete fait par le diable a un moment
où Dieu ne regardait pas. Il y a beaucoup a dire a ce sujet, et je n’ai pas l’intention ici de le refuter.

228
L'ARGUMENT POUR LE RECOURS DE L'INJUSTICE

Puis il y a une autre forme tres curieuse d'argument moral, qui est la suivante : ils disent que
l'existence de Dieu est necessaire pour amener la justice dans le monde. Dans cette partie de
l’univers que nous connaissons, il y a une grande injustice, et souvent les bons souffrent, et souvent
les mechants prosperent, et on sait a peine lequel de ceux-la est le plus choquant. Mais si vous
voulez la justice dans l'univers dans son entier, vous devez supposer une vie future pour reparer
l'equilibre de la vie ici sur terre. Ils disent donc qu'il doit y avoir un Dieu, et il doit y avoir le ciel et
l'enfer afin que, a long terme, il y ait justice. C'est un argument tres curieux. Si vous regardiez la
question d'un point de vue scientifique, vous diriez : « Apres tout, je ne connais que ce monde. Je ne
connais pas le reste de l'univers, mais dans la mesure où l'on peut discuter de tout avec les
probabilites, on dirait que ce monde est probablement un echantillon equitable, et s'il y a injustice
ici, il y a des injustices ailleurs ailleurs. »

Supposons que vous ayez ouvert une caisse d'oranges, et vous ayez decouvert que toute la
rangee superieure etait pourrie. Vous ne discuteriez pas ainsi : « Les dessous doivent etre bons, afin
de retablir l'equilibre. » Vous diriez : le lot entier est mauvais. Et c'est vraiment ce qu'une personne
scientifique dirait de l'univers. Il dirait : « Ici, nous trouvons dans le monde une grande injustice et,
dans la mesure du possible, c'est une raison pour supposer que la justice ne regne pas dans le
monde. Et donc, dans ce sens, cela offre un argument moral contre la divinite et non en sa faveur »
Bien sûr, je sais que les arguments intellectuels dont je vous ai parle ne sont pas ce qui change
vraiment les gens. Ce qui pousse vraiment les gens a croire en Dieu n'est pas du tout un argument
intellectuel. La plupart des gens croient en Dieu parce qu'ils ont ete enseignes des la petite enfance
pour le faire. C'est la raison principale.

COMMENT LES ÉGLISES ONT RETARDÉ LE PROGRÈS

Vous pouvez penser que je vais trop loin quand je dis qu’il en est encore ainsi. Je ne pense
pas. Prenez un exemple. Vous serait patient avec moi. Ce n'est pas un fait agreable, mais les Églises
m’obligent a mentionner des faits qui ne sont pas agreables. En supposant que dans le monde que
nous vivons aujourd'hui une jeune fille inexperimentee est mariee a un homme avec la syphilis,
dans ce cas l'Église catholique dit : « «C'est un sacrement indissoluble. Vous devez rester ensemble
pour la vie. » Et aucune mesure ne doit etre prise par cette femme pour s'empecher de donner
naissance a des enfants avec la syphilis. C'est ce que dit l'Église catholique. Je dis que c'est une
cruaute diabolique, et aucune personne dont les sympathies naturelles n'ont pas ete deformees par le
dogme ou dont la nature morale n'etait pas absolument morte a tout sentiment de souffrance, ne
pourrait soutenir qu'il est juste et correct que cet etat de choses se poursuive.

Ce n'est qu'un exemple. Il y a beaucoup de manieres dont l'Église, par son insistance sur ce
qu'elle appelle la morale, inflige a toutes sortes de gens une souffrance immeritee et inutile. Et, bien
entendu, comme nous le savons, l’Eglise est dans sa majeure partie un adversaire du progres et de
toute amelioration diminuant la souffrance dans le monde. Et ceci parce qu'elle a choisi de qualifier
de morale comme un ensemble etroit de regles de conduite qui n'ont rien a voir avec le bonheur
humain. Et quand vous dites que, ceci ou cela devrait etre fait parce que cela ferait le bonheur
humain, ils pensent que cela n'a rien a voir avec ce dont nous parlons. Qu'est-ce que le bonheur
humain a a voir avec la morale ? L'objet de la morale n'est pas de rendre les gens heureux.

CE QUE NOUS DEVONS FAIRE

Nous voulons nous tenir debout et regarder le monde de façon directe – ses choses bonnes, ses
choses mauvaises, ses beautes et sa laideur. Regardez le monde tel qu'il est, et n’ayez pas peur de
lui. Allez conquerir le monde par l'intelligence, et non pas seulement en etant subjugues servilement
par la terreur qui en decoule. Toute la conception de Dieu est une conception derivee des antiques
229
despotismes orientaux. C'est une conception tout a fait indigne d’hommes libres. Lorsque vous
entendez les gens dans l'eglise se deprecier et dire qu'ils sont miserables pecheurs, et tout le reste,
cela semble meprisable et indigne d’etres humains. Nous devrions nous lever et franchement
regarder le monde en face. Nous devrions faire un monde le meilleur possible, et s’il n’est pas aussi
bon que nous le voulons, il sera toujours mieux que ce que les autres en ont fait pendant des ages.
Un monde bon a besoin de connaissances, de bonte et de courage. Il n'a pas besoin d'un desir
regrettable du passe, ou d’une liberte entravee par des mots prononces il y a longtemps par des
hommes ignorants. Il a besoin d'une perspective sans peur et d'une intelligence libre. Il a besoin
d'espoir pour l'avenir, de ne pas regarder tout le temps en arriere vers un passe qui est mort, un
passe dont nous savons qu’il sera surpasse par l'avenir que notre intelligence peut creer.

DÉFAUTS DE L'ENSEIGNEMENT DE CHRIST

Ayant accorde l'excellence de ces maximes, je viens a certains points où je ne crois pas que
l'on puisse accorder soit la sagesse superlative, soit la bonte supreme du Christ, telle qu'elle est
decrite dans les Évangiles; Et je dirai ici que l'on ne se preoccupe pas de la question historique.
Historiquement, il est tout a fait douteux que le Christ ait jamais existe du tout, et s'il l'a fait, nous
ne savons rien de lui, de sorte que je ne me preoccupe pas de la question historique, qui est tres
difficile. Je m'interesse au Christ tel qu'il apparait dans les Évangiles, en prenant le recit de
l'Évangile tel qu'il se presente, et la on trouve des choses qui ne semblent pas tres sages. D'une part,
Il a certainement pense que sa seconde venue se produirait dans des nuages de gloire avant la mort
de tous les gens qui vivaient a cette epoque. Il y a beaucoup de textes qui le prouvent. Il dit, par
exemple: «Vous n'aurez pas parcouru les villes d'Israël jusqu'a ce que le Fils de l'homme soit venu.»
Il dit: «Il y a ici quelques-uns qui ne goûteront pas la mort tant que le Fils de l'homme n'aura pas
Royaume'; Et il ya beaucoup d'endroits où il est tout a fait clair qu'il croyait que sa seconde venue
se produira pendant la vie de beaucoup de personnes vivant alors. C'etait la croyance de ses
disciples anterieurs, et c'etait la base d'une bonne partie de son enseignement moral. Quand il a dit:
«Ne pensez pas au lendemain», et de telles choses, c'etait en grande partie parce qu'il pensait que la
seconde venue allait etre tres bientot, et que toutes les affaires ordinaires ordinaires ne comptait pas.
En fait, j'ai connu des chretiens qui croyaient que la seconde venue etait imminente. Je connaissais
un pasteur qui effrayait terriblement sa congregation en leur disant que la seconde venue etait tres
imminente, mais ils etaient tres consoles lorsqu'ils trouverent qu'il plantait des arbres dans son
jardin. Les premiers chretiens l'ont vraiment cru, et ils se sont abstenus de planter des arbres dans
leurs jardins, parce qu'ils ont accepte du Christ la croyance que la seconde venue etait imminente. À
cet egard, il n'etait pas aussi sage que d'autres, et il n'etait certainement pas supremement sage.

LE PROBLEME MORAL

Ensuite, vous arrivez a des questions morales. Il ya un defaut tres grave a mon esprit dans le
caractere moral du Christ, et c'est qu'Il a cru en l'enfer. Je ne crois pas que quiconque est vraiment
profondement humain puisse croire au chatiment eternel. Le Christ, tel qu'il est represente dans les
Évangiles, croyait au chatiment eternel, et on trouve a maintes reprises une fureur vindicative contre
ceux qui n'ecoutaient pas sa predication - attitude qui n'est pas rare chez les predicateurs, mais qui
detruit quelque peu l'excellence superlative. Vous ne trouvez pas, par exemple, cette attitude dans
Socrate. Vous le trouvez assez fade et courtois envers les gens qui ne veulent pas l'ecouter; Et il est,
a mon avis, beaucoup plus digne d'un sage de prendre cette ligne que de prendre la ligne de
l'indignation. Vous vous souvenez probablement du genre de choses que Socrate disait quand il etait
en train de mourir, et des choses qu'il disait generalement aux gens qui n'etaient pas d'accord avec
lui.

Vous constaterez que dans les Evangiles, le Christ a dit: «Serpents, generation de viperes,
comment pouvez-vous echapper a la damnation de l'enfer?» Cela a ete dit aux gens qui n'aimaient
pas Sa predication. Ce n'est pas vraiment a mon avis tout a fait le meilleur ton, et il ya beaucoup de

230
ces choses au sujet de l'enfer. Il y a, bien sûr, le texte familier sur le peche contre le Saint-Esprit:
«Quiconque parle contre le Saint-Esprit ne lui sera pardonne ni en ce monde ni dans le monde de
venir.» Ce texte a cause une quantite indescriptible de La misere dans le monde, car toutes sortes de
gens ont imagine qu'ils ont commis le peche contre le Saint-Esprit, et a pense qu'il ne serait pas
pardonne ni dans ce monde ou dans le monde a venir. Je ne pense vraiment pas qu'une personne
avec un bon degre de bonte dans sa nature aurait mis des craintes et des terreurs de cette sorte dans
le monde.

Alors le Christ dit: «Le Fils de l'homme enverra ses anges, et ils rassembleront de son
royaume tout ce qui offensera, et ceux qui font l'iniquite, et les jettent dans une fournaise de feu; Il y
aura des pleurs et des grincements de dents; Et il continue sur le clameur et le grincement des dents.
Il vient dans un verset apres l'autre, et il est tout a fait manifeste au lecteur qu'il y a un certain plaisir
en contemplant des pleurs et des grincements de dents, sinon il ne se produirait pas si souvent.
Alors vous tous, bien sûr, rappelez-vous des moutons et des chevres; Comment a la seconde venue
de partager les brebis et les boucs Il va dire aux chevres: «Retirez-vous de moi, maudits, dans le feu
eternel.» Il continue: «Et ceux-ci s'en iront au feu eternel. Dit encore: Si ta main t'offense, coupe-la;
Il vaut mieux pour toi entrer dans la vie mutilee, que d'avoir deux mains pour aller en enfer, dans le
feu qui ne sera jamais eteint; Où le ver ne meurt pas et le feu ne s'eteint pas. »Il repete encore et
encore. Je dois dire que je pense que toute cette doctrine, que le feu de l'enfer est une punition pour
le peche, est une doctrine de la cruaute. C'est une doctrine qui a mis la cruaute dans le monde et a
donne au monde des generations de cruelles tortures; Et le Christ des Evangiles, si vous pouviez le
prendre comme ses chroniqueurs le representent, aurait certainement dû etre considere en partie
responsable de cela.

Il y a d'autres choses de moindre importance. Il y a l'exemple du porc de Gadarene où il n'etait


certainement pas tres gentil avec les cochons de mettre les demons en eux et les faire descendre la
colline a la mer. Vous devez vous rappeler qu'Il etait omnipotent, et Il aurait pu faire que les
demons s'en allaient tout simplement; Mais il choisit de les envoyer dans les cochons. Puis il y a la
curieuse histoire du figuier, qui m'a toujours perplexe. Vous vous souvenez de ce qui s'est passe
autour du figuier. 'Il avait faim; Et voyant un figuier loin d'avoir des feuilles, Il est venu s'il pouvait
trouver quelque chose sur lui, Et quand il y est arrive, il n'a trouve que des feuilles, car le temps des
figues n'etait pas encore. Et Jesus repondit et lui dit: "Aucun homme ne mangera de toi du fruit pour
toujours". . . Et Pierre. . . Lui dit: Maitre, voici, le figuier que tu as maudit est efface. »C'est une
histoire tres curieuse, car ce n'etait pas le bon moment de l'annee pour les figues, et tu ne pouvais
vraiment pas blamer l'arbre. Je ne peux pas croire que, soit en matiere de sagesse, soit en matiere de
vertu, Christ soit aussi eleve que d'autres personnes connues de l'histoire. Je pense que je devrais
placer Bouddha et Socrate au-dessus de Lui sous ce rapport.

LE FACTEUR EMOTIONNEL

Comme je l'ai deja dit, je ne pense pas que la veritable raison pour laquelle les gens acceptent
la religion a quelque chose a voir avec l'argumentation. Ils acceptent la religion pour des raisons
emotionnelles. On dit souvent qu'il est tres mal d'attaquer la religion, parce que la religion rend les
hommes vertueux. On me dit donc; Je ne l'ai pas remarque. Vous savez, bien sûr, la parodie de cet
argument dans le livre de Samuel Butler, Erewhon Revisited. Vous vous souviendrez qu'a Erewhon
il ya un certain Higgs qui arrive dans un pays eloigne, et apres avoir passe quelque temps il
s'echappe de ce pays dans un ballon. Vingt ans plus tard, il revient dans ce pays et trouve une
nouvelle religion dans laquelle il est adore sous le nom de «l'enfant du soleil», et on dit qu'il est
monte au ciel. Il trouve que la fete de l'Ascension est sur le point d'etre celebree, et il entend les
professeurs Hanky et Panky se dire entre eux qu'ils n'ont jamais mis les yeux sur l'homme Higgs, et
ils esperent qu'ils ne le feront jamais; Mais ils sont les grands pretres de la religion de l'Enfant du
Soleil. Il est tres indigne, et il s'approche d'eux, et il dit: «Je vais exposer tout ce faucille et dire aux
gens d'Erewhon que c'etait seulement moi, l'homme Higgs, et je suis monte en ballon. On lui a dit:
231
«Vous ne devez pas faire cela, parce que toutes les morales de ce pays sont liees autour de ce
mythe, et si elles savent une fois que vous n'avez pas monter dans le ciel, ils deviendront tous
mechants»; Et il est persuade de cela et il s'en va tranquillement.

C'est l'idee - que nous devrions tous etre mechants si nous ne tenons pas a la religion
chretienne. Il me semble que les gens qui l'ont tenue sont pour la plupart extremement mechants.
Vous trouvez ce fait curieux, que plus la religion de toute epoque a ete intense, et plus la croyance
dogmatique a ete profonde, plus la cruaute a ete grande et plus l'etat des choses s'est aggrave. Dans
les pretendus ages de la foi, quand les hommes croyaient vraiment a la religion chretienne dans
toute sa completude, il y avait l'Inquisition, avec ses tortures; Il y avait des millions de femmes
malheureuses brûlees comme des sorcieres; Et il y avait toute sorte de cruaute pratiquee sur toutes
sortes de gens au nom de la religion.

Vous voyez partout dans le monde que tout progres dans le sens humain, toute amelioration
du droit penal, chaque pas vers la diminution de la guerre, chaque pas vers un meilleur traitement
des races colorees, ou chaque attenuation de l'esclavage, chaque Le progres moral qu'il y a eu dans
le monde, a ete systematiquement oppose par les Églises organisees du monde. Je dis tout
deliberement que la religion chretienne, telle qu'organisee dans ses Églises, a ete et est encore le
principal ennemi du progres moral dans le monde.

LA FONDATION DE LA RELIGION

La religion est basee, je pense, principalement et principalement sur la peur. C'est en partie la
terreur de l'inconnu, et en partie, comme je l'ai dit, le desir de sentir que vous avez une sorte de frere
aine qui vous tiendra dans tous vos troubles et disputes. La peur est la base de tout cela - la peur du
mysterieux, la peur de la defaite, la peur de la mort. La peur est le parent de la cruaute et, par
consequent, il n'est pas etonnant que la cruaute et la religion aille de pair. C'est parce que la peur est
a la base de ces deux choses. Dans ce monde, nous pouvons maintenant commencer un peu a
comprendre les choses, et un peu a les maitriser par l'aide de la science, qui a force sa marche pas a
pas contre la religion chretienne, contre les Églises et contre l'opposition de tous les preceptes
anciens . La science peut nous aider a surmonter cette peur craven dans laquelle l'humanite a vecu
pendant tant de generations. La science peut nous apprendre, et je pense que nos coeurs peuvent
nous enseigner, ne plus regarder autour de soutiens imaginaires, ne plus inventer des allies dans le
ciel, mais plutot regarder nos propres efforts ici ci-dessous pour faire a ce monde un endroit
convenable À vivre, au lieu de la sorte de lieu que les eglises dans tous ces siecles ont fait.

CE QUE NOUS DEVONS FAIRE

Nous voulons nous tenir debout et regarder le monde de façon juste et equitable, ses bons
faits, ses mauvais faits, ses beautes et sa laideur; Voir le monde tel qu'il est, et ne pas avoir peur de
lui. Conquerir le monde par l'intelligence, et non pas seulement par etre subjuguee servilement par
la terreur qui en decoule. Toute la conception de Dieu est une conception derivee des antiques
despotismes orientaux. C'est une conception tout a fait indigne des hommes libres. Lorsque vous
entendez les gens dans l'eglise se deprecier et dire qu'ils sont miserables pecheurs, et tout le reste, il
semble meprisable et pas digne de soi-meme des etres humains. Nous devrions nous lever et
regarder le monde franchement en face. Nous devons faire du mieux que nous pouvons du monde,
et si ce n'est pas si bon que nous le voulons, apres tout ce sera encore mieux que ce que ces autres
ont fait de lui dans tous ces ages. Un monde bon a besoin de connaissances, de bonte et de courage;
Il n'a pas besoin d'un desir regrettable apres le passe, ou d'une entrave de la libre intelligence par les
mots prononces il ya longtemps par les hommes ignorants. Il a besoin d'une perspective sans peur et
d'une intelligence libre. Il a besoin d'espoir pour l'avenir, ne pas regarder en arriere tout le temps
vers un passe qui est mort, qui nous avons confiance sera surpasse par l'avenir que notre intelligence
peut creer.

232
EXEMPLE DE DEVOIR À RENDRE
POUR VALIDATION DU COURS 6.01
Bertrand Russell, « Pourquoi je ne suis pas chrétien »

Rappel du syllabus : Je ne propose pas de corrections sur les devoirs faits pendant l’annee, bien
que je commente vos devoirs. Cependant, il est utile de prendre connaissance d’une correction de la
première serie d’arguments de Sebastien Faure, « Douze preuves de l'inexistence de Dieu » [en
ligne, http://rapaces.garap.org/mp3/inserts/SebastienFaure_12Preuves.pdf]. Il est conseille que vous
puissiez lire ce texte « comme si » ce texte etait votre devoir et, ensuite seulement, de proceder a
l’etude de la correction proposee.

INTRODUCTION

A. Tout ceux qui se disent chretiens ne le sont pas


1. Être chretien c’est croire quelque chose

QU'EST-CE QU'UN CHRÉTIEN ?

A. Deux choses pour etre chretien

1. Dogmatique
i) Croire en Dieu
ii) Croire en l’immortalite

2. La personne de Christ
(Russell n’est pas clair sur le fait que ceci est son « deuxième » point)
i) Il etait divin
ii) Ou au moins un homme sage

B. Plus besoin de l’enfer


1. Le Parlement a decide que cette doctrine n’etait plus necessaire

L'EXISTENCE DE DIEU

A. Traitement sommaire de la question


B. L’existence de Dieu peut etre prouvee par la raison seule

L’ARGUMENT DE LA PREMIÈRE CAUSE

A. L’argument dit : « Tout ce qui existe a une cause »

1. La notion de causalite a change


i) Cette nouvelle causalite rend l’argument moins fort

2. Change d’avis en lisant John Stuart Mill


i) Decouvre la question : « Si tout a une cause, quelle est la cause de Dieu ? »
ii) Si quelque chose n’a pas de cause, pourquoi ce ne serait pas le monde ?

233
B. Exemple hindoue

L'ARGUMENT DE LA LOI NATURELLE

A. La loi naturelle et Newton

1. L’observation conduisait naturellement a supposer le Createur


i) Explication pratique et simple de la gravitation
ii) L’explication de la gravitation a changee

2. Ainsi les lois naturelles ne sont que des conventions humaines


i) Le changement d’une loi scientifique est due a une « convention humaine »
(Affirmation non explicite)
ii) Exemple : partout, cent centimetres font toujours un metre
- c’est remarquable
- mais ce n’est pas une loi de la nature

B. La loi « naturelle » n’est pas aussi uniforme

1. L’importance des statistiques


i) L’exemple des des
ii) La regularite est anormale

2. Les « lois de la nature » fonctionnent de meme


i) Il n’y a pas de lien entre ce qui se produit et un Legislateur
ii) Croire ainsi est une confusion entre les lois naturelles et humaines

C. Les lois de la nature sont une description de ce qui se produit

1. Les lois naturelles sont une descriptions des faits


i) la description des faits ne necessite pas Dieu

2. Croire qu’il y a un Legislateur souleve un probleme


i) Pourquoi Dieu a-t-il fait ces lois et pas d’autres ?
- s’il n’etait pas oblige de creer ces « lois », alors ces dernieres ne sont pas
vraiment des « lois
- s’il etait oblige de creer ces « lois », alors il y a quelque chose au-dessus
de Dieu
ii) Conclusion : Dieu n’est pas le grand Legislateur

D. L’argument de la loi naturelle reflete une comprehension intellectuellement depassee

L'ARGUMENT DU DESSEIN (DESIGN)

A. L’argument de la conception

1. Le monde a ete cree propice a la vie humaine

i) Un argument curieux
- l’exemple du lapin
- l’exemple de Voltaire : le nez a ete fait pour les lunettes

ii) Il n’y a pas creation mais adaptation

234
- nous n’avons pas etes crees pour un environnement
- nous nous sommes adaptes a notre environnement

2. Les defauts du monde


i) Le monde est plein de defauts
ii) L’omniscience et l’omnipotence auraient du produire un meilleur monde

B. Le monde s’eteindra

1. Le cycle naturel de la vie est de s’eteindre


i) Certains disent que c’est une vue deprimante
ii) Personne ne s’inquiete de la fin du monde

2. Au lieu de deprimer, nous devons nous tourner vers « d’autres choses »

LES ARGUMENTS MORAUX POUR DIEU

A. Kant et les arguments pour Dieu

1. Kant a detruit les arguments intellectuels

2. Mais Kant a conserve un argument moral


i) La raison : il avait apprit cela pendant l’enfance

B. L’argument moral

1.Quelle est la question ?


i) Le bien et le mal existeraient-ils si Dieu n’existait pas ?
ii) La question n’est pas de savoir si bien et mal sont identiques

2. Il y a une difference entre le bien et le mal


i) Si cette difference est due a Dieu, alors pour Dieu il n’y a pas de difference
entre le bien et le mal
ii) Si cette difference n’est pas due a Dieu, alors il y a une loi morale au-dessus de
Dieu
iii) Ou alors notre monde a ete cree par le diable

L'ARGUMENT DU RECOURS DE L'INJUSTICE

A. Une autre forme de l’argument moral

1. Dieu est necessaire a la justice

i) Les mechants prosperent


- alors que les justes souffrent
- une vie future doit exister pour retablir la justice
- donc un Dieu doit exister

ii) L’injustice que nous voyons doit nous faire penser que le monde est injuste

2. Exemple de la caisse d’oranges

B. Nous croyons en Dieu parce que c’est ce qu’on nous a enseigne


235
COMMENT LES ÉGLISES ONT RETARDÉ LE PROGRÈS

A. Les Églises ont retarde le progres

B. Exemple de la syphilis
1. Imaginez un couple dont l’un des epoux a la syphilis
2. Conseiller de ne pas rompre le mariage est une absence de compassion

C. La morale de l’Église impose la souffrance


1. Difference entre morale et bonheur
2. La morale n’a pas comme objet le bonheur

CE QUE NOUS DEVONS FAIRE

A. Regarder le monde en face

1. Utiliser l’intelligence

2. Ne pas etre esclave


i) Dieu est modele sur les despotes orientaux
ii) Cette conception est indigne des etres humains

B. Le monde a besoin de connaissance, de bonte, de courage


1. L’homme regarde avec espoir vers l’avenir
2. L’homme ne regarde pas vers le passe

Présupposés de Russell

1. L’argument de la premiere cause : part d’une mauvaise definition de cet argument ! Il dit
que tout ce qui commence a exister a une cause. Dieu n’a pas « commence a exister ».
2. Russell mentionne un changement de « causalite ». Mais il ne dit pas ce que c’est.

3. Une loi scientifique qui « change » est en fait une convention humaine. Mais bien sûr cela
conduit a de gros problemes pour Russell. Quelles lois ne sont pas modifiees ou precisees ?

De fait il presuppose que « lois de la nature » et « lois scientifiques » sont la meme


chose.

4. Les lois de la nature sont « hasardeuses ». Mais dans ce cas comment etre certains que
demain je ne tomberai pas du lit en me levant ? (si tout n’est qu’affaire de probabilite)

5. Concernant les lois de la nature, il presuppose une certaine vue de Dieu. La reponse se base
sur une certaine theologie. Dieu a cree un monde – selon sa volonte – et maintenant il reste
fidele a ce monde.
6. De plus il ne repond pas a la question du fondement des lois de la nature.

7. Pour ce qui est de la « conception », il decrit un monde qui n’a pas change et dans lequel le
peche n’a pas eu de consequences.

8. Pour l’argument moral, la aussi la reponse se fonde sur la notion d’alliance entre Dieu et sa
creation. Aussi sur le fait que Dieu cree « a son image ». Le bien n’est donc pas une chose
« creee » mais qui existe en la definition meme de Dieu.

236
9. Le monde est essentiellement injuste, ou du moins plus probablement injuste.

Mais alors comment expliquer la justice : n’est-ce qu’une probabilite ?

Plus encore, comment expliquer le desir de justice ? Si le monde est plus


probablement injuste et que nous sommes « adaptes » a ce monde, nous ne
devrions pas etre choques par l’injustice. Nous devrions y etre adaptes.

10. Plusieurs fois, Russell presuppose que nous croyons parce que nous l’avons apprit etant
enfants. N’est-ce pas une forme d’argument culturel ?

Cela conduirait-il Russell a dire que tout ce que nous croyons aujourd’hui est le fruit de
notre « enfance » ?

Et si oui, pourquoi cela serait-il le cas pour Dieu seulement ? Il y a beaucoup de


choses dont nous sommes convaincus… cela est-il toujours le resultat de notre
education.

11. Probablement le presuppose fondamental chez Russell est qu’il n’est pas rationnel de
croire en Dieu. Il explique pourquoi nous croyons par l’education, puisque ce n’est pas par la
raison.

237
En réalité, la foi est une
réponse aux preuves,
et non une réjouissance en
l'absence de preuves.
JOHN LENNOX
12 concl
Duc o
u
us
r
s
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on

I. L’AVENIR DE L’APOLOGÉTIQUE

A) Une apologétique pratique

i. Unité de la théologie et de la pratique

L’apologetique est a l’extérieur de l’Église ce que la theologie pratique est a l’intérieur.

Application de l’ensemble de la theologie a un domaine pratique.


239
ii. Application dans tous les domaines de la vie

Une théologie nourrit une apologétique.

La theologie reformee (tradition calviniste en particulier) souligne la necessite de vivre la foi dans
tous les domaines de la vie humaine.

Cf. Abraham Kuyper, le neo-calvinisme.

240
L’apologetique aura donc une place dans ces memes domaines. Laquelle ?

iii. Apologétique, évangélisation et vie ordinaire

Cours sur la mission.

L’apologetique est liee a l’évangélisation.

Attention, l’apologetique n’est pas une « pré évangélisation ». L’evangelisation est une forme
d’apologetique.
241
Il faut de-specialiser l’evangelisation et en faire quelque chose d’ordinaire.

De meme, il est possible de faire de l’apologétique quelque chose d’ordinaire !

B) Construire une communauté apologétique

i. L’apologétique dans l’Église

Pour transformer l’apologetique, il faut l’ancrer dans l’Église locale.

Proposez et encouragez l’apologetique dans l’Église !


242
ii. Une communauté d’apologètes

Mais il faut aussi creer une vraie culture de l’apologetique.

Quelles caractéristiques ?

Une raison d’être

Une culture

243
Une formation continue

Une équipe, une technique

II. CONCLUSION ET QUESTIONS

A) Résumer le cours

i. Schéma de résumé

Cf. premier schéma.

244
ii. Méthode

Cf. deuxième schéma.

iii. Trouver les présupposés

Cf. texte annexe.

Les contradictions et les impossibilites d’une vision du monde peuvent vous indiquer des
presupposes.

245
Exemples

(a) Winston Churchill disait :

(1) Que le traite de Versailles etait mauvais.


(2) Qu’il fallait respecter le traite de Versailles.

Présupposé : l’« honneur ». Une fois un accord conclut, il faut le respecter.

(b) Dawkins dans le debat vu en cours.

Cf. la these 5. page 11 du debat.

(1) Nous ne pouvons pas savoir ce qui est moral.


(2) En meme temps il y a « quelque chose dans l’air » qui produit un consensus moral.

Présupposé : Dieu ne peut pas exister.

B) Le caractère d'un apologète

i. Ferme dans sa foi

246
ii. Flexible dans son apologétique

iii. « Toujours prêt »

247
iv. A l'écoute de toute personne

v. Patient et plein de compassion

C) Vivre dans le monde

i. Observer

248
ii. Apprendre

iii. Proclamer, témoigner, défendre

249
D) Questions et précisons

250
LISTE D'ARGUMENTS
APOLOGÉTIQUES

Vous trouverez dans les pages suivantes une presentation non exhaustive de divers arguments
qui servent a expliquer ou « defendre » l'existence de Dieu, la fiabilite des textes bibliques ou
l'existence de certains faits objectifs du monde (le sens esthetique, etc.). La liste presente chaque
argument selon son utilisation par des traditions apologetiques diverses. Elle presente aussi les
arguments selon les trois categories que nous avons vues en cours : perspective normative,
situationnelle et existentielle. Chaque perspective sera indiquee par la couleur de l'entete.

La presentation de chaque argument est tiree de divers ouvrages, articles, ou blogs, mis en
reference en fin de presentation. Pour chaque arguments, vous trouverez une description breve de
leurs forces et de leurs faiblesses. Une tentative d'application de l'argument dans le cadre de
l'apologetique alliancielle presentee en cours sera aussi faite. La place des arguments dans
l'apologetique issue de Van Til demeure un grand champ de recherche... cette partie de la
description des arguments est ainsi soumise a revisions en cours d'annee.

251
L’ARGUMENT DE LA PREMIÈRE CAUSE
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Cosmologique, premiere cause


TRADITION Classique, version thomiste

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Thomas d’Aquin, Peter Kreeft, William L. Craig

PRÉSENTATION

Thomas d'Aquin est le theologien qui a popularise ce type d'argument cosmologique. Peter Kreeft le
resume ainsi : « Thomas d'Aquin soutient que s'il n'y avait pas de premiere cause efficace, ou cause
de la naissance de l'univers, alors il ne pourrait y avoir de seconde cause parce que les secondes
causes (c'est-a-dire les causes secondaires) dependent d'une premiere cause (c'est-a-dire une cause
« non causee »). Il y a des causes secondaires tout autour de nous ; il doit donc y avoir une premiere
cause. »

Nous pouvons le resumer ainsi :

(1) Tout ce qui commence a exister a une cause.


(2) L'univers a commence a exister.
(3) L'univers ne peut pas etre eternel.
(4) Donc l'univers doit avoir une cause qui elle-meme n'est pas causee. C'est la premiere
cause.

La conviction fondamentale derriere cet argument est que l'univers ne s'explique pas tout seul. Bien
sûr, il reste a savoir si ceci est exact.

FORCES

 Une fois que le principe de l'argument de type « cosmologique » est etablit, cette version
de l'argument est relativement simple a comprendre (en tous cas a premiere vue).
 Cette preuve etablit l'existence d'un createur qui transcende l'espace et le temps.
L’argument propose une raison « logique » quant a l’existence du monde.

FAIBLESSES

 L'une des critiques de cet argument est : « Si tout a une cause, qui a cause Dieu ? » Cette
objection n'est pas valide car l'argument ne dit pas que tout ce qui existe a une cause, mais que
tout ce qui vient (ou commence) a exister » a une cause. Or Dieu n'a jamais commence a
exister.
 L’argument prouve au mieux la necessaire existence d’un createur, sans plus.
 L’argument presuppose que le raisonnement ne peut pas se poursuivre a l’infini.
 L’argument presuppose que le createur prouve est identique au Dieu de la Bible... ce qui
reste encore a demontrer.
 L’argument presuppose qu’un « juste raisonnement » doit nous faire conclure a
l’existence necessaire du createur.

UTILISATION ALLIANCIELLE

De meme que pour les autres arguments cosmologiques, nous pouvons utiliser cet argument afin de
montrer que les alternatives a l’existence d’un Createur sont impossibles.

Cet argument peut aussi etre utilise pour essayer d’identifier quelles sont les aspects de la nature de
Dieu (cf. argument du kalaam et argument du premier moteur).

RESSOURCES

William Lane Craig, Foi raisonnable, Editions La Lumiere, 2012.

Douglas Groothius, Christian Apologetics. A Comprehensive Case for the Biblical Faith, Downers
Grove, IVP, 2011, pp. 207-239

Peter Kreeft, « The First Cause Argument », http://www.peterkreeft.com, consulte le 2 août 2019.
L’ARGUMENT DU PREMIER MOTEUR
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Cosmologique, premier moteur


TRADITION Classique, version thomiste
OBJECTIF Argument en faveur de l’existence de Dieu

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Thomas d’Aquin, Edward Feser

PRÉSENTATION

1. Un etre contingent existe.


(contingent = non necessaire. Nous sommes tous des etres « contingents »)
2. Cet etre contingent a une cause de son existence.
(Je ne me suis pas « cause » moi-meme!)
3. La cause de son existence est autre chose que soi.
(Sinon je me « cause » moi-meme !)
4. Ce qui fait que cet etre contingent existe doit etre un ensemble qui ne contient que des etres
contingents ou un ensemble qui contient au moins un etre non contingent (necessaire).
(Par exemple : mon pere et ma mere)
5 . Un ensemble qui ne contient que des etres contingents ne peut pas faire exister cet etre
contingent.
(On pourrait continuer l’argument… Mon pere a une cause, mon grand-pere, qui a une
cause, qui a une cause… Or nous ne pouvons pas continuer à l’infini)
6. Par consequent, la cause de cet etre contingent doit etre un ensemble contenant au moins un
etre necessaire.
7. Par consequent, un etre necessaire existe.

FORCES

L’argument se fonde sur un principe de causalite qui est a priori evident pour tous.
L’argument est logique et rationnel ce qui peut servir a montrer que la foi chretienne n’est pas
irrationnelle.
L’argument propose une raison « logique » quant a l’existence du monde.

FAIBLESSES

L’argument prouve au mieux la necessaire existence d’un createur, sans plus.


L’argument presuppose que le raisonnement ne peut pas se poursuivre a l’infini.
L’argument presuppose que le createur est identique au Dieu de la Bible.
L’argument presuppose qu’un « juste raisonnement » doit nous faire conclure a l’existence
necessaire du createur.

Ces faiblesses expliquent pourquoi, par exemple, William Lane Craig, complemente cet argument
par des arguments « historiques » tires de l’apologetique empiriste. L’apologetique classique
devient donc pour lui une apologetique en deux etapes : (a) demontrer qu’il doit exister un (dieu)
createur, (b) demontrer que ce Dieu est celui de la revelation biblique.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Nous pouvons utiliser cet argument afin de montrer que les alternatives a l’existence d’un Createur
sont impossibles.

Cet argument peut aussi etre utilise pour essayer d’identifier quelles sont les aspects de la nature de
Dieu

RESSOURCES

William Lane Craig, Foi raisonnable, Editions La Lumiere, 2012.

Douglas Groothius, Christian Apologetics. A Comprehensive Case for the Biblical Faith, Downers
Grove, IVP, 2011, pp. 207-239.
L’ARGUMENT DE LA CONTINGENCE
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Cosmologique, premier moteur


TRADITION Classique, version thomiste

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Thomas d’Aquin, Edward Feser, Peter Kreeft, William
L. Craig

PRÉSENTATION

Cet argument est une forme d'argument cosmologique qui cherche a etablir l'existence de Dieu a
partir du monde qui existe. Pour l'expliquer, il faut definir le terme « contingent ». Derriere ce terme
peut-etre complique se trouve une idee assez simple : dans le monde il y a des choses qui existent
necessairement et des choses qui sont « potentielles ». Il y a des choses « contingentes », c'est a dire
qui auraient pu ne pas exister. Par exemple, moi j'aurais pu ne pas exister (par exemple, si mes
parents ne s'etaient pas rencontres).

Comment cela peut-il servir d'indices en faveur de l'existence de Dieu ? Regardons les choses
ainsi :

(1) Tout ce qui existe a une explication pour son existence.


(2) Si l'univers a une explication de son existence, cette explication est Dieu.
(3) L'univers existe.
(4) Ce qui est necessaire afin que l'univers existe ne peut exister a l'interieur de l'univers ou
etre limite par l'espace et le temps.
(5) Par consequent, l'univers a une explication de son existence.
(6) Donc, l'explication de l'existence de l'univers est Dieu.

Nous pouvons aussi le presenter ainsi. Dans le monde, soit une chose est necessaire, soit elle est
contingente. Si tout etait contingent, le monde n'aurait pas de commencement. Or ceci est une
absurdite philosophique. Le monde doit donc avoir un commencement necessaire... qui est Dieu.
Edward Feser presente l'argument de maniere plus precise dans un article en ligne (en anglais).

FORCES

L’argument se fonde sur un principe de causalite qui est a priori evident pour tous. C'est le
meme principe de causalite commun a tous les arguments cosmologiques.
L’argument est logique et rationnel ce qui peut servir a montrer que la foi chretienne n’est pas
irrationnelle.
L’argument propose une raison « logique » quant a l’existence du monde.
FAIBLESSES

L’argument prouve au mieux la necessaire existence d’un Dieu a l'origine du monde.


L’argument presuppose que le raisonnement ne peut pas se poursuivre a l’infini.
L’argument presuppose que le createur est identique au Dieu de la Bible.
L’argument presuppose qu’un « juste raisonnement » doit nous faire conclure a l’existence
necessaire du createur.

UTILISATION ALLIANCIELLE

De meme que pour les autres arguments cosmologiques, nous pouvons utiliser cet argument afin
de montrer que les alternatives a l’existence d’un Createur sont impossibles.

Cet argument peut aussi etre utilise pour essayer d’identifier quelles sont les aspects de la nature
de Dieu (cf. argument du kalaam et argument du premier moteur).

RESSOURCES

William L. Craig, « Argument from Contingency », 5 août 2007, http://www.reasonablefaith.org,


consulte le 2 août 2019.

William Lane Craig, Foi raisonnable, Editions La Lumiere, 2012.

Edward Feser, « Avicenna’s argument from contingency », 26 mai 2013, en ligne, consulte le 2 août
2019.

Douglas Groothius, Christian Apologetics. A Comprehensive Case for the Biblical Faith, Downers
Grove, IVP, 2011, pp. 207-239.

Peter Kreeft, « The Contingency Argument for God », Strange Notions, consulte le 2 août 2019.

Alexis Masson, « La preuve de Dieu par la contingence » , Episthéo, http://www.epistheo.com,


consulte le 2 août 2019.
L’ARGUMENT DES DEGRÉS DE PERFECTION
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Perfection
TRADITION Classique, version thomiste

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Echelle de l'etre
REPRÉSENTANTS Thomas d’Aquin, Edward Feser, Peter Kreeft, Norman
Geisler

PRÉSENTATION

Cette preuve est souvent consideree comme la quatrieme des Cinq Voies formulees par Thomas
d'Aquin. C'est celui des degres de perfection. Thomas part de la conviction qu'il existe une grande
chaine d'etre dans laquelle les creatures deviennent plus parfaites. L'argument lui-meme raisonne de
la maniere suivante.

Nous remarquons autour de nous des choses qui varient en degre. Une couleur, par exemple,
peut etre plus claire ou plus foncee qu'une autre, une tarte aux pommes fraichement cuite est plus
chaude qu'une tarte preparee la veille. Recevoir est « mieux » que donner. Aimer est « mieux »
(plus parfait) que haïr. Donc, nous faisons une hierarchie entre les choses qui ont « plus » ou
« moins » telle ou telle qualite. Et quand nous faisons cela, c'est similaire a une echelle allant du
« moins parfait » au « plus parfait ». Par exemple, les choses sont plus ou moins chaudes quand
elles sont plus ou moins eloignees d'une source de chaleur. C'est cette source qui communique a ces
choses la chaleur qu'elles possedent, et ceci dans une mesure plus ou moins grande. Cela signifie
que le degre de chaleur est cause par une source exterieure.

Ceci peut s'appliquer aux etres humains : nous sommes plus ou moins « bon » ou « juste » ou
« bienveillants » . Par conséquence, ces degres de perfection concernent notre « etre » et se nous
dirigent en finalite vers le « meilleur » etre, la source de toutes perfection. Si cet etre parfait
n'existait pas, nous ne pourrions pas parler de quelqu'un comme etant plus ou moins bon, car nous
n'aurions pas de critere parfait pour juger de ce degre. Cet etre absolument parfait, « l'Etre parfait »
est « la Perfection de toutes les perfections ». Cet etre parfait est Dieu.

FORCES

L’argument se fonde sur une observation empirique que tous peuvent faire. Il y a des degres
de « perfections » dans le monde.
L'argument essaie d'aboutir a une conclusion qui est bibliquement juste : Dieu est le seul etre
parfait.
L’argument est logique et rationnel ce qui peut servir a montrer que la foi chretienne n’est pas
irrationnelle. Pour certains cela sert a accrediter la validite de la foi chretienne.
L’argument propose une raison « logique » quant a l’existence du monde.
FAIBLESSES

L’argument prouve au mieux l'existence d’un etre parfait, mais pas necessairement le Dieu de
la Bible (cela « prouve » un attribut de Dieu).
L'argument part du principe que les etres existent sur une « echelle » et que tout etre partagent
une meme qualite. Ceci serait bien sûr un a priori a demontrer.
L’argument presuppose qu’un « juste raisonnement » doit nous faire conclure a l’existence
necessaire du createur.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Dans notre perspective apologetique, nous essayons de montrer qu'il est impossible que Dieu
n'existe pas. Cette « preuve » doit etre utilisee pour cet objectif. Dans ce cas, peut-etre que
l'approche de William Craig est a preferer. Tout en restant conscients des presupposes qui restent
caches chez notre interlocuteur.

RESSOURCES

Matt Fradd, « Why Does Every Atheist Misunderstand Your Arguments for God’s Existence? », 27
fevrier 2018, Pints With Aquinas, consulte le 2 août 2019.

Norman Geisler, Christian Apologetics, Grand Rapids, Baker, 1988.

Peter Kreeft, « Twenty Arguments God's Existence », en ligne, consulte le 2 août 2019.
L’ARGUMENT TÉLÉOLOGIQUE
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Argument teleologique, du « dessein »


TRADITION Classique, version thomiste

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Thomas d’Aquin, William Paley, William L. Craig.

PRÉSENTATION

L'argument peut etre resume ainsi :

(1) L'univers, ou du moins de nombreux aspects de celui-ci (l'œil humain, etc.) donnent
l'impression d'etre due a une « conception » (ou un « dessein »).
(2) Tout ce qui semble etre le produit d'une conception intelligente est, dans la realite, le
produit d'une telle conception intelligente.
(3) L'univers
(4) Par consequent, l'univers, ou du moins de nombreux aspects de celui-ci, sont des produits
d'une conception intelligente.

Cet argument a ete presente par un theologien anglican William Paley, par son analogie de la
montre. Il ecrit :

« En marchant dans la lande, supposons que je me cogne le pied sur une pierre et qu'on m'ait
me demande comment la pierre s'est retrouvee la, je pourrais repondre qu'elle s'y trouvait
depuis toujours ; il ne serait peut-etre pas tres facile de demontrer l'absurdite de cette reponse.
Mais supposons que j'aie trouve une montre sur le sol, et qu'on me demande comment la
montre se trouvait a cet endroit, je devrais hesiter a donner la meme reponse – que la montre
pouvait avoir toujours ete la. »

Tout simplement : la complexite de l'univers montre qu'il doit y avoir un createur intelligent.
William Craig propose une version sensiblement differente qu'il appelle « l'argument de
l'ajustement precis » (fine-tuning argument). Par elimination des alternatives, Craig conclut que
l'univers est favorable a la vie et que cela ne peut etre le resultat que de l'acte createur d'un Dieu tout
puissant, personnel, et qui existe en dehors de l'espace et du temps.

FORCES

 L'argument s'appuie sur une observation que tout le monde peut faire, ce qui ajoute a
priori a sa force.
 L'utilisation de l'analogie (la montre) rend cet argument tres comprehensible. On
s'eloigne de l'argumentation purement philosophique (bien qu'il le soit quand meme !).
L'argument est simple et direct a suivre.
 L'argument n'est pas necessairement incompatible avec l'evolution et le Big Bang, ce qui
pour certains chretiens sera positif.
 Le concept de Dieu en tant que createur renforce l'idee que Dieu est implique dans
l'histoire de l'univers et qu'il est donc omnipotent, omniscient et bon.
 L'argument de la conception donne un but a l'univers, plutot que d'en faire quelque chose
« d'aveugle ». Cela donne un sens a l'univers.

FAIBLESSES

L’argument prouve au mieux la necessaire existence d’un createur, sans plus.


L’argument presuppose que le createur est identique au Dieu de la Bible. D'ailleurs il pourrait
y avoir plusieurs createurs travaillant en meme temps.
L'argument ne dit rien sur la possibilite que le createur ait lui-meme ete cree. Il faudrait alors
unir cet argument avec d'autres types d'arguments.
L'analogie est a priori convaincante. Cependant, pouvons-nous vraiment proceder a une telle
analogie ? (creation de la montre et creation de l'univers)

UTILISATION ALLIANCIELLE

Dans notre perspective apologetique, nous essayons de montrer qu'il est impossible que Dieu
n'existe pas. Cette « preuve » doit etre utilisee pour cet objectif. Dans ce cas, peut-etre que
l'approche de William Craig est a preferer. Tout en restant conscients des presupposes qui restent
caches chez notre interlocuteur.

RESSOURCES

William Lane Craig, « Fine Tuning », Reasonable Faith (video), 2 août 2019.

Alexis Masson, « La Preuve Teleologique », 23 decembre 2010, Episthéo, 2 août 2019.

William Paley, Natural Theology, or Evidences of the Existence and Attributes of the Deity
Collected from the Appearances of Nature, New York, Sheldon & Company, 1879, en
particulier pp. 5-13.

« Strengths and Weaknesses: Teleological Argument », Philosophical Investigations, 2 août 2019.


L’ARGUMENT ONTOLOGIQUE
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Ontologique
TRADITION Classique

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Anselme, Edward Feser, Alvin Plantinga

PRÉSENTATION

L'argument ontologique defend que l'idee que Dieu n'existe pas est tout aussi absurde que l'idee
qu'un triangle à quatre côtés existe. Tout d'abord, il est evident que tout le monde peut concevoir
que Dieu puisse exister. À ce moment cela veut dire que Dieu existe au moins dans la pensee. C'est
ce que dit l'insense du Ps 14.1. Pour demontrer que Dieu existe, Anselme part d'une definition de
qui Dieu est : « l'etre le plus grand qu'on puisse concevoir ». Nous pouvons le resumer le reste de
l'argument ainsi :

(1) Supposons (avec l'insense) que Dieu n'existe que dans la pensee, et pas en realite.
(2) Compte tenu de notre definition de Dieu, cela signifie « l'etre le plus grand qu'on puisse
concevoir » existe dans la pensee seulement.
(3) Mais meme un athee peut concevoir que Dieu puisse exister dans la realite. Un athee peut
concevoir un cas de figure dans lequel le theisme est vrai, meme si nous ne croyons pas que
c'est vraiment le cas.
(4) Cependant, il est « superieur » d'exister dans la realite que seulement dans la pensee.
(5) Nous serions donc obliges de dire que nous pouvons concevoir un etre plus grand que
« l'etre le plus grand qu'on puisse concevoir ». Par exemple ma grand-mere existe dans la
realite. Son existence serait « superieur » a « l'etre le plus grand qu'on puisse concevoir ».
(6) Mais ceci est clairement absurde.
(7) Donc l'affirmation (1) est fausse. Dieu exister necessairement aussi bien dans la realite que
dans la pensee.

FORCES

 L'argument montre que le concept de Dieu n'est pas irrationnel ou illogique.


 La logique de l'argument, une fois comprise, est assez claire.

FAIBLESSES

 L'argument se presente a premiere vue de maniere assez complexe.


 Certains critiques disent qu'avec cette preuve on pourrait prouver l'existence de
n'importe quelle chose soit-disant parfaite.
 Cette preuve semble reposer que quelque chose de subjectif : nous arrivons a penser a
Dieu, ainsi Dieu existerait. Cette critique est cependant assez simpliste.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Nous pouvons utiliser cet argument afin de montrer que la pensee meme de Dieu semble bien
implantee en nous, ce qui est a l'image de ce que Paul dit en Rm 1.18-25. Comme pour les autres
arguments, il est possible d’utiliser cet argument afin de souligner l’impossibilite des autres
alternatives.

Cet argument peut aussi etre utilise pour essayer d’identifier quelles sont les aspects de la nature
de Dieu qui ne sont pas acceptees par notre interlocuteur.

RESSOURCES

Edward Feser, « Anselm's Ontological Argument », 26 novembre 2010, en ligne, consulte le 2 août
2019.

Edward Feser, « Plantinga’s ontological argument », 1 decembre 2010, en ligne, consulte le 2 août
2019.

Alexis Masson, « La preuve ontologique », Episthéo, consulte le 2 août 2019 (deuxieme article ici).
L’ARGUMENT MORAL
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Argument moral


TRADITION Classique

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Moralite objective
REPRÉSENTANTS C. S. Lewis, William L. Craig

PRÉSENTATION

C. S. Lewis est l’un des apologetes qui a presente un argument de type moral, visant a
demontrer qu’il existe necessairement un Legislateur moral transcendant :

1. Il existe une loi morale universelle.

2. S'il existe une loi morale universelle, il y a un Legislateur moral.

3. S'il y a un Legislateur de la Loi Morale, il doit etre quelque chose d’autre et au-dela de
l'univers.

4. Par consequent, il existe quelque chose au-dela de l'univers.

William Lane Craig propose une version differente de l’argument moral, mais son but est
sensiblement different. Il tente de montrer qu’il y a des valeurs morales objectives et universelles
seulement si Dieu existe. Dans un certain sens, c’est le meme argument mais presente de maniere
« negative ». Dans sa forme la plus succincte :

1. Si Dieu n'existe pas, les valeurs morales objectives n'existent pas.

2. Les valeurs morales objectives existent.

3. Donc, Dieu existe

FORCES

 L’argument est assez simple, bien qu’il faille faire un effort de clarté dans sa
presentation.
 Il y a une force de persuasion presque intuitive dans cet argument. C’est probablement
pour cela que William Craig pense que cet argument est le plus « fort » dans une societe post-
chretienne.
 Bien qu’il puisse etre classe parmi les arguments « normatifs », l’argument moral est
profondement personnel. Sa dimension concrete, ethique, est evidente et renforce sa portee.
FAIBLESSES

 Une objection simpliste est que l’argument semble conclure qu’il est impossible d’etre
« moral » sans Dieu. Ce n’est bien ûr pas ce que dit l’argument !
 Il y a encore un grand chemin a faire entre l’existence d’un Legislateur et celui du Dieu
de la Bible.
 Le terme « moral » est difficile a definir, et donc a defendre.
 L’argument tient essentiellement a la conclusion que Dieu est, à ce jour, le seul
fondement objectif a l’existence de normes morales. Bien sûr, cela ne signifie pas que nous ne
trouverons pas une autre alternative « naturelle » un jour.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Afin de mettre le Dieu de la Bible au coeur de cet argument, il faut l’integrer dans un argument
plus large qui montre aussi que nous ne pouvons connaitre l’existence de ce legislateur moral
(Dieu) que si ce dernier se revele. Nous en revenons a la question de l’autorite – ici celle qui nous
permet de connaitre ce qui est bien ou mal.

Sans la revelation de Dieu nous ne pouvons pas savoir qu’il existe des « valeurs morales
objectives », ce qui pose une autre difficulte pour l’argument moral. Mais nous pouvons l’utiliser
pour essayer de montrer a notre interlocuteur qu’il n’y a aucune alternative a l’existence du Dieu de
la Bible.

RESSOURCES

William L. Craig, « Q/A #349 The Moral Argument for God », 23 decembre 2013, Reasonable
Faith, https://www.reasonablefaith.org, consulte le 11 juillet 2019.

William L. Craig, « The Moral Argument », en ligne, Youtube, consulte le 11 juillet 2019.

C. S. Lewis, L'abolition de l'homme, Raphaël, 2005 (en particulier l’annexe).

C. S. Lewis, Les fondements du christianisme, Ligue pour la lecture de la Bible, 2013.

Luke Wayne, « The Moral Argument », 28 avril 2016, Christian and Apologetics Research
Ministry, consulte le 15 juillet 2019.
L’ARGUMENT DU TRILEMME
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Trilemme
TRADITION Classique, version de Lewis

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Dilemme (enfin, « trilemme »)
REPRÉSENTANTS C. S. Lewis, John Duncan, G. K Chesterton

PRÉSENTATION

Dans son fameux livre Les fondements du christianisme, C. S. Lewis proposa une version
actualisee d’un argument plus vieux, deja formule au 19 e siecle. La maniere dont Lewis developpe
le fameux « trilemme » peut se resumer de maniere suivante :

(1) Si Jesus n'etait pas Seigneur, il est soit menteur, soit fou.
(2) Jesus n'etait ni menteur, ni fou.
(3) Par consequent, Jesus est Seigneur.

Tout l’argument repose, bien sûr, sur les deux premieres lignes. En les etudiant, beaucoup de
penseurs ont rate un point essentiel de Lewis. Ce dernier ne regardait pas le « trilemme » comme un
argument purement rationnel, mais comme un argument ancre dans le contexte du 1 er siecle dans
lequel Jesus a vecu, est mort, et ressuscite – et dans lequel les textes du Nouveau Testament ont ete
ecrits.

Lewis raisonne sur la base de ce qu’un juif du 1 er siecle aurait, ou non, accepte. Selon Lewis, il
est tout a fait impossible que les juifs « monotheistes » aient pu creer de toutes pieces un recit
legendaire. D’autant plus que le texte evangelique, souligne Lewis, ne porte aucune des marques
d’un recit legendaire. Le Jesus des evangiles et donc historique, et nous devons prendre ses paroles
comme elles sont rapportees. C’est la que le « trilemme » prend tout sa force.

FORCES

 Le « trilemme » est tres facile a comprendre. Il ne s’embarrasse pas de termes


philosophiques compliques ou d’un raisonnement complexe.
 L’argument est « valide », c’est a dire que le point (3) est une consequence necessaire
des points (1) et (2).
 L’argument a une longue histoire qui tend a confirmer sa portee apologetique.
FAIBLESSES

 Bien qu’il soit valide, l’argument n’est pas bon car le point (1) ne presente pas toutes les
options. Jesus lui-meme pourrait etre une invention des premiers chretiens, ou avoir ete
trompe (mais par qui ?), ou bien les paroles de Jesus pourraient avoir ete inventees. Lewis
repond a la premiere objection, mais pas directement dans l’argument lui-meme.
 L’argument ne peut vraiment etre utilise qu’a partir du moment où l’interlocuteur admet
au minimum l’integrite des textes evangeliques.

UTILISATION ALLIANCIELLE

L’utilisation du « trilemme » doit etre fait avec prudence. Nous ne devons pas penser que
l’argument, tel quel, trouvera necessairement un echo positif chez notre interlocuteur. Il me semble
que l’un des aspects positifs de cet argument, c’est qu’il peut servir a reveler quelles sont les
oppositions de notre interlocuteur a la personne et a l’oeuvre de Christ.

En effet, notre interlocuteur pourra avancer des objections que le « trilemme » n’anticipe pas.
Nous devrons etre a l’ecoute de ces objections. Nous devrons aussi realiser que les objections au
« trilemme » sont une demonstration que le rejet des « preuves » en faveur de Dieu, de Christ, ou de
la fiabilite de la Bible, sont une question spirituelle – et pas seulement intellectuelle.

RESSOURCES

Kyle Barton, « The History of the Liar, Lunatic, Lord Trilemma », 4 mai 2012, Conversant Faith,
consulte le 18 juillet 2019.

William Lane Craig, Foi raisonnable. Vérité chrétienne et apologétique, La Lumiere, 2012.

C. S. Lewis, Les fondements du christianisme, Ligue pour la lecture de la Bible, 2013.

Justin Taylor, « Is C.S. Lewis’s Liar-Lord-or-Lunatic Argument Unsound? », 1er fevrier 2016, The
Gospel Coalition, http://www.thegospelcoalition.org, consulte le 18 juillet 2019.
L’ARGUMENT DE
L’IMPOSSIBILITÉ DU CONTRAIRE
PERSPECTIVE NORMATIVE

ARGUMENT Transcendantal
TRADITION Alliancielle

PERSPECTIVE Normative
PRINCIPE Impossibilite du contraire
REPRÉSENTANTS Cornelius Van Til, John Frame, William Edgar

PRÉSENTATION

L’argument transcendantal, dans sa presentation apologetique actuelle, provient directement de


la methode apologetique de Cornelius Van Til. L’argument transcendantal de Van Til peut etre
resume de maniere assez simple.

Puisque Dieu est createur de la realite dans laquelle nous vivons, rien de ce que nous disons ou
faisons ne peut avoir de sens en dehors de l’existence du Dieu de la Bible. Les consequences de cela

sont radicales pour Van Til. Rien ne peut se faire ou se penser si Dieu n’avait pas cree le monde.

Nous pourrions meme dire que les arguments contre l’existence de Dieu ne sont possibles que si
Dieu existe. Ainsi, un argument

L’argument est appele « transcendental » parce qu’il se nourrit du principe que nous pouvons
appeler « impossibilite du contraire ». D’ailleurs la methode de Van Til peut se definir de la meme
maniere. Au lieu de chercher a demontrer que Dieu existe, il chercha a demontrer qu’il est
impossible que Dieu n’existe pas (« impossibilite du contraire »).

Nous pouvons appliquer ce type de raisonnement a toutes les visions du monde. Par exemple, le
materialisme n’est possible que parce que le Dieu de la Bible est le Dieu createur. S’il n’en etait pas
ainsi, le monde n’existerait pas – et donc pas de vision materialiste !
FORCES

 La grande force de l’argument c’est sa conviction theologique : l’existence de Dieu n’est


pas une possibilite. Dieu existe nécessairement et Dieu est la condition meme grace a qui tous
les arguments (meme ceux qui veulent prouver sa non-existence) sont possibles.
 Cet argument, et la methode apologetique de Van Til, veulent presenter l’absolue
necessite de l’existence de Dieu, et pas seulement sa possibilite.
 Cet argument peut etre applique a toutes les visions du monde non bibliques, ainsi
qu’a toutes les notions philosophiques.

FAIBLESSES

 Bien qu’il puisse etre presente de maniere assez simple, l’argument transcendantal de
Van Til est assez complexe. Il a une longue histoire philosophique, ce qui peut rendre difficile
l’interaction avec un interlocuteur qui aurait une solide connaissance philosophique.
 L’une des faiblesses de l’argument de Van Til est son opposition aux autres
arguments, notamment les arguments « classiques » (par exemple, cosmologiques) et les
arguments historiques.
 Il semble que l’argument transcendantal soit recent dans l’histoire de l’apologetique.
Bien que cela ne signifie pas qu’il est mauvais, ceci est parfois utilise comme une objection
possible a l’argument en question.

UTILISATION ALLIANCIELLE

De fait que cet argument est une partie integrante de l’apologetique « alliancielle » de Van Til,
son utilisation et sa presentation sont identiques. Il n’y a donc pas besoin d’en re-discuter ici.

RESSOURCES

Don Collett, « Van Til and Transcendental Argument Revisited » , Trinity School for Ministry,
https://www.tsm.edu, consulte le 18 juillet 2019.

John Frame, « Transcendental Arguments », 30 mai 2012, http://frame-poythress.org, consulte le 18


juillet 2019.

Thom Notaro, Van Til and the Use of Evidence, Philippsburg, P&R, 1980.

Cornelius Van Til, The Defense of the Faith, ed. K. Scott Oliphint, 2e edition, Philippsburg, P&R,
2008.
L’ARGUMENT DU CHANGEMENT DOGMATIQUE
PERSPECTIVE SITUATIONNELLE

ARGUMENT Changement dogmatique


TRADITION Empiriste

PERSPECTIVE Situationnelle ou contextuelle


PRINCIPE Changement inexplicable
REPRÉSENTANTS N. T. Wright

PRÉSENTATION

N.T. Wright soutient que la resurrection ne peut pas etre un mythe invente par les premiers
disciples a cause de grandes « mutations » dogmatiques qui interviennent dans la foi des premiers
disciples.

Dans le « judaïsme du second Temple » (contemporain de Jesus), la mort etait, dans ce monde,
finale. Il n'y avait aucune possibilite de resurrection corporelle avant la resurrection generale de tous
les justes pour le jour du jugement. Or la resurrection de Jesus amene un changement
« dogmatique » (de croyance) radical !

La conclusion de Wright est que ces « changements dogmatiques » ne peuvent s’expliquer que
par un evenement determinant, transformant et nourrissant les convictions des premiers disciples.
N. T. Wright mentionne sept « mutations » de croyance qui renforcent cette idee :

(1) La theologie chretienne de l'au-dela est uniforme (centree sur la Resurrection), alors que
les vues etaient multiples dans le judaïsme. Le jour du jugement, les morts justes reçoivent de
nouveaux corps de resurrection, identiques au corps de resurrection de Jesus.
(2) La doctrine de la resurrection etait peripherique (judaïsme), et elle devient maintenant
centrale (christianisme).
(3) La presentation de la resurrection etait tres diverse (judaïsme), et elle devient unique : un
corps incorruptible, a orientation spirituelle, transforme a partir du corps anterieur corruptible
(christianisme).
(4) Le moment de la resurrection passe d’un jour unique, celui du jugement (judaïsme) a une
scission entre la resurrection du Messie et la resurrection du reste des justes le jour du
jugement (christianisme).
(5) Il y a une nouvelle vision de l'eschatologie : nous sommes, dans ce temps, « co-ouvriers »
avec Dieu pour transformer le monde.
(6) Il existe un nouveau concept metaphorique de la resurrection : nous sommes appeles a
« naitre de nouveau ».
(7) Il existe une nouvelle association entre le concept de resurrection et le Messie. (Le Messie
n’etait meme pas cense mourir et il n’etait certainement pas cense ressusciter des morts dans
un corps ressuscite).
FORCES

 Cet argument prend tres au serieux les textes bibliques.


 Cet argument est tres serieux et ne peut etre conteste de maniere credible que si
l’interlocuteur connait le judaïsme du second temple.

FAIBLESSES

 L’explication que Wright propose est assez convaincante. Cependant, quelqu’un pourrait
dire que ce n’est pas parce qu’on a du mal a expliquer un changement comme celui-ci, qu’il
est forcement dû a un changement comme la Resurrection de Christ.
 L’argument est tres « solide », mais cela peut aussi etre une faiblesse : il faut bien
connaitre le judaïsme du second temple pour etre credible et bien l’expliquer.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Cet argument peut etre utilise pour montrer l’impossibilite des alternatives proposees a l’enigme
de l’emergence de la communaute et de la foi chretienne. Bien sûr l’opposition aux arguments
n’etant pas uniquement intellectuelle, mais aussi spirituelle, il s’agira de discerner les presupposes
qui rendent impossible l’acceptation de cet argument « historique ». En particulier nous devons etre
attentif aux reponses que notre interlocuteur pourra donner : quelles sont les possibles contradiction
que ces efforts passes a repondre a l’argument peuvent reveler ?

RESSOURCES

N. T. Wright, « Did Jesus Really Rise from the Dead? » Conference donnee au Bast Center, 16
mars 2007 (en anglais), en ligne.

N. T. Wright, Surprised by Hope: Rethinking Heaven, the Resurrection, and the Mission of the
Church, HarperOne, 2008.
LE TEST DES NOMS PROPRES
DANS LES ÉVANGILES
PERSPECTIVE SITUATIONNELLE

ARGUMENT Test des noms propres dans les Evangiles


TRADITION Empiriste

PERSPECTIVE Situationnelle
PRINCIPE Frequence et statistique
REPRÉSENTANTS Richard Bauckham, Peter Williams

PRÉSENTATION

Le test de la frequence des noms propres dans les Evangiles a comme but de montrer la fiabilite
des textes bibliques. En particulier il cherche a montrer qu’il est raisonnable de croire que les textes
des evangiles ont bien ete ecrits a la periode qu’ils pretendent decrire (soir le 1 er siecle). Le point de
depart de cet argument est une observation : Il existe une correlation remarquable entre la frequence
des noms trouves dans les Evangiles et les Actes et la frequence des noms trouves dans des ecrits
contemporains au Nouveau Testament.

Cet argument peut se diviser en deux parties. Premièrement, la simple frequence est en elle-
meme un argument. Par exemple, les 6 noms masculins les plus frequents dans la Palestine du 1e
siecle sont : (1) Simon / Simeon, (2) Joseph / Joses, (3) Lazare / Eleazar, (4) Judas / Judah, (5)
John / Yohanan, (6) Jesus / Josue. Le meme classement en Egypte pendant cette meme periode est
le suivant : (1) Eleazar (classé 3e en Palestine), (2) Sabbataius (classe 68 e en Palestine), (3) Joseph
(classé 2 en Palestine), (4) Dositheus (classe 16 e en Palestine), (4) Pappus (classe 39e en Palestine),
(5) Ptolemaius (classe 50e en Palestine), (6) Samuel (classe 23e en Palestine). D’autres exemples
sont donnes par Peter Williams.

Deuxièmement, nous constatons que dans les Evangiles, les noms propres les plus frequents sont
toujours qualifies, afin que le lecteur puisse savoir de quelle personne il est question. En Matthieu
10.2-4 nous lisons : « Voici les noms des douze apotres. Le premier, Simon (1), que l’on appelle
Pierre, et Andre, son frere ; Jacques (11), fils de Zebedee, et Jean (5) son frere ; Philippe (61) et
Barthelemy (50) ; Thomas et Matthieu (9) le collecteur d’impots ; Jacques (11), fils d’Alphee et
Thaddee (39) ; Simon (1) le zelote et Judas (4) Iscariote, celui-la meme qui le livra. »

Les nombres en gras sont la frequence du nom dans la Palestine du 1er siecle. « Simon » est
toujours qualifie car c’est le nom propre le plus populaires. Jacques est aussi tres commun est donc
doit etre precise. Par contre Philippe, Barthelemy, ou Thadee ne sont pas tres communs et donc il
est inutile pour l’evangeliste de clarifier de quel Thaede il est question.
FORCES

 L’argument a une grande force qui reflete la tres serieuse specialisation qu’il
presuppose. Il est difficile de le contredire sans devoir aussi passer du temps dans le monde du
1er siecle, ce que peu de gens peuvent faire.
 L’argument a aussi une certaine force a premiere vue, notamment parce qu’il contient un
raisonnement empirique, voir meme intuitif : ce qui semble etre une coïncidence n’en est
certainement pas une !

FAIBLESSES

 Certains pourraient dire que les noms utilises par les auteurs des Evangiles pourraient
quand meme etre des « inventions » realistes, utilisant les noms les plus communs du 1 er
siecle.
 L’argument est difficile a defendre avec force et precision car il demande une bonne
connaissance de la culture et de la litterature du 1er siecle.
 L’argument depend en partie de la validite des choix des textes sur lesquels Bauckham et
Williams etablissent la frequence des noms propres.
 Il ne faut pas etre tente de faire dire a l’argument plus que ce qu’il essaie de demontrer
(que les textes ont probablement bien ete ecrits pendant le 1er siecle).
 Ce qui semble etre une coïncidence peut peut-etre en etre une !

UTILISATION ALLIANCIELLE

L’argument lui-meme est limite a renforcer la fiabilite de l’autorite des textes evangeliques. En
utilisant cet argument, il faudra etre conscient de cette limite (qui n’est pas necessairement
mauvaise en soi) et essayer de discerner dans le raisonnement de notre interlocuteur s’il n’y a pas
des presupposes en action, predisposant la personne a questionner la fiabilite des textes
evangeliques.

RESSOURCES

Richard Bauckham, Jesus and the Eyewitnesses: The Gospels As Eyewitness Testimony, Grand
Rapids, Eerdmans, 2008 (en particulier les chs. 3 et 4).

Michael Strickland, « What's in a Name? Richard Bauckham, First-Century Palestinian Jewish


Names, and the Protoevangelium of James », American Theological Inquiry, vol. 7, no. 2, 2014,
en ligne, http://www.academia.edu, consulte le 15 juillet 2019 (article un peu technique).

Peter Williams, « New Evidences the Gospels were Based on Eyewitness Accounts » , Youtube,
consulte le 15 juillet 2019
ARGUMENT DE
L'EXPANSION DE L'ÉGLISE
APOLOGÉTIQUE EMPIRISTE

ARGUMENT Expansion de l'Eglise


TRADITION Empiriste

PERSPECTIVE Situationnelle
PRINCIPE Developpement historique
REPRÉSENTANTS Ravi Zacharias, Peter Kreeft, Josh et Sean McDowell,
Lee Strobel, N. T. Wright

PRÉSENTATION

La croissance exponentielle des premieres eglises chretiennes ne s'explique que si les premiers
chretiens : (i) croyaient vraiment en Jesus tel qu'il est presente dans les Evangiles, et (ii) etaient
motives par la foi en Christ d'une maniere quasi surnaturelle. Les alternatives a la croissance de
l'Eglise ne sont pas suffisantes, que ce soit celle de l'hallucination generale, de la naïvete des
premiers chretiens, ou de la construction de la resurrection par les tous premiers disciples.

Les apologetes qui presentent cet argument s'appuient souvent sur des donnees extra-
testamentaires comme : (a) les premieres confessions chretiennes, (b) les premieres predications, (c)
les ecrits des Peres de l'Eglise (Polycarpe, Clement, etc.).

FORCES

 Cet argument, lorsqu'il est bien etudie et presente, s'appuie sur une solide connaissance
historique de l'expansion des premieres eglises chretiennes.
 Cet argument a le merite de pouvoir etre presente de maniere assez breve et directe.

FAIBLESSES

 Cet argument doit etre approfondi a la lumiere des connaissances que nous avons
concernant la croissance des premieres eglises et peut demander un fort investissement en
recherches.
 Cet argument presuppose la fiabilite historique des temoignages chretiens. S'ils le sont
effectivement, il reste cependant a le demontrer.
UTILISATION ALLIANCIELLE

Cet argument peut etre utilise pour montrer l’impossibilite des alternatives proposees a l’enigme
de la croissance extraordinaire de la communaute et de la foi chretienne (utilisation similaire a celle
du « changement dogmatique »). Bien sûr l’opposition aux arguments n’etant pas uniquement
intellectuelle, mais aussi spirituelle, il s’agira de discerner les presupposes qui rendent impossible
l’acceptation de cet argument « historique ». En particulier nous devons etre attentif aux reponses
que notre interlocuteur pourra donner : quelles sont les possibles contradiction que ces efforts
passes a repondre a l’argument peuvent reveler ?

RESSOURCES

Eusebe de Cesaree, Histoire ecclésiastique, 4 vols., coll. « Sources chretiennes », Paris, Le Cerf,
2001.

Christopher Dawson, The Formation of Christendom, New York, Sheed & Ward, 1967.

Sean McDowell, « Was the Resurrection of Jesus a Late Church Invention? », 31 mars 2019,
http://www.josh.org, consulte le 28 août 2019.

N.T. Wright, The Resurrection of the Son of God, Minneapolis, Fortress Press, 2003.
LE PRINCIPE D’EMBARRASSEMENT
APOLOGÉTIQUE EMPIRISTE

ARGUMENT Principe d’embarras


TRADITION Empiriste

PERSPECTIVE Situationnelle
PRINCIPE Causalite
REPRÉSENTANTS Donald Guthrie, Gary Habermas

PRÉSENTATION

Le « principe d’embarras » chercher a demontrer la fiabilite et la veracite du texte biblique, en


particulier du texte neo-testamentaire – en particulier evangelique – sur la base des passages
profondement embarrassant pour les premiers disciples. Si les textes des evangiles etaient de pures
fictions, de tels passages auraient vraisemblablement ete « elimines ». Un exemple est le suivant :
« Mais ce jour ou cette heure, nul ne les connait, ni les anges du ciel, ni le Fils, personne sinon le
Pere. » (Marc 13.32). Le neotestamentaire Donald Guthrie indique :

« Bien que certains erudits considerent ce dicton comme une creation apocalyptique
juive ou comme un produit communautaire, il est impossible de supposer qu'un dicton
aussi embarrassant du point de vue christologique aurait dû etre invente. Il n'y a aucune
raison forte de mettre en doute son authenticite. »

L'embarras cause par cette phrase de Jesus est un tellement grand qu'il ne peut avoir ete cree de
toute piece par les premiers disciples. Les exemples cites incluent les doutes de Jean-baptiste (Mt
11.2-3) ; la colere de Jesus face au figuier qu'il maudira (Mc 11.13-14) ; ou la non croyance de sa
propre famille (Mc 3.21). Il faut aussi mentionner, en le qualifiant, les doutes des premiers croyants,
meme apres la resurrection ; les femmes comme premiers temoins de la resurrection (cf. Mt, Mc).

FORCES

 Ce principe est assez simple a comprendre et a articuler. Il est aussi relativement simple
a expliquer a quelqu'un, meme s'il n'est pas familier de la Bible.
 Ce principe est a premiere vue assez cense.
 Ce principe a le merite de mettre l'accent sur la comprehension de la Bible dans son
contexte.

FAIBLESSES

 Il est parfois difficile de savoir si les evangelistes eux-memes etaient embarrasses par les
exemples donnes par les defenseurs de ce principe. Or, une partie de la force du principe de
surprise tient a cet embarras initial que produit le texte.
 Ce principe est tres relatif et s'appuie essentiellement sur une reaction initiale et
subjective a un texte.
 Ce principe s'appuie aussi fortement sur la connaissance de ce qui aurait ete admis
comme « normal » ou « comprehensible » a l'epoque, ce qui peut etre plus ou moins simple a
determiner.

UTILISATION ALLIANCIELLE

Ce principe de surprise peut etre utilise pour mettre en valeur les oppositions du cœur humain a
Dieu. Ce principe peut servir a devoiler : (a) l'impossibilite de totalement saisir la nature ou sagesse
de Dieu, (b) la force et la radicalite de notre aveuglement spirituel.

RESSOURCES

Donald Guthrie, New Testament Theology, Downers Grove, IVP Academic, 2013.

Gary Habermas, « Recent Perspectives on the Reliability of the Gospels », 11 juin 2009, CRI,
consulte le 18 juillet 2019.
L’ARGUMENT DU TÉMOIGNAGE OCULAIRE
APOLOGÉTIQUE EMPIRISTE

ARGUMENT Temoignage oculaire


TRADITION Empiriste

PERSPECTIVE Situationnelle
PRINCIPE N/A
REPRÉSENTANTS Richard Bauckham, N.T. Wright, Ravi Zacharias,
Josh McDowell

PRÉSENTATION

Les defenseurs de cet argument s'appuient sur une solide theologie biblique, a l'image de l'un
des principaux neo-testamentaires contemporains, Richard Bauckham. Selon ce dernier, les recits
evangeliques ne sont pas, comme certains l'ont dit au courant du 20e siecle, le resultats de traditions
orales. Ils sont plutot bases sur les recits directs de temoins oculaires de la vie et du ministere de
Jesus. La fiabilite du temoignage oculaire est utilisee pour expliquer ou defendre la fiabilite des
textes bibliques, en particulier les recits evangeliques. Pour etablir cette fiabilite, de nombreux
criteres sont utilises comme (i) le caractere du temoin en question, (ii) la nature du temoignage, (iii)
le contenu du temoignage, (iv) sa comparaison avec d'autres textes connus comme etant historiques.

Une objection (ou faiblesse ? ) a la validite des temoignages oculaires est que plus l'evenement
rapporte est extra-ordinaire, plus le temoignage devrait etre evident et convaincant. En d'autres
termes, mois il devrait y avoir de doutes possibles. Bien sûr, si nous adoptons cette posture, plus un
« crime » est grave, plus il faudrait que le temoignage oculaire du crime soit probant. Mais il est
difficile de savoir comme ceci peut etre possible. Or si une telle « attente » est impossible dans la
vie de tous les jours, pourquoi l'attendre du temoignage oculaire (par exemple) des miracles ou de la
mort de Christ ?

FORCES

 Cet argument chercher a renforcer la fiabilite des textes bibliques et porte donc une
attention particuliere au texte biblique. Il encourage ainsi les chretiens a approfondir leur
connaissance de la Bible.
 Cet argument prend aussi au serieux l'inspiration de la Bible.

FAIBLESSES

 L'argumentation de Bauckham est tres solide mais demande une certaine connaissance
du monde du 1er siecle. Cette « faiblesse » (qui est aussi une force) relativise l'utilisation de
l'argument sans un petit peu de recherche.
 Certaines parties de l'argument developpe par Bauckham sont tres conjecturales. Le fait
que les douze apotres auraient fonctionne comme un « cercle » validant les recits des temoins
oculaires est loin d'etre certain.

UTILISATION ALLIANCIELLE

RESSOURCES

Richard Bauckham. Jesus and the Eyewitnesses: The Gospels as Eyewitness Testimony. 2e ed.,
Grand Rapids, Eerdmans, 2017.

Heath Henning, « Eye-witness Evidence of Christ Resurrection », 11 mai 2019, Truth Watchers,
consulte le 3 septembre 2019.

Josh McDowell, « Reclaiming Easter Series » , Josh McDowell Ministry, consulte le 3 septembre
2019.

« Ravi Zacharias on the resurection of Christ », 7 mars 2013, Thinking Matters, consulte le 3
septembre 2019.

Margaret Manning Shull, « Credible Witnesses », RZIM, consulte le 3 septembre 2019.

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