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développement
de l’électromobilité
pour le système
électrique
MAI 2019
PRINCIPAUX RÉSULTATS
Enjeux du
développement
de l’électromobilité
pour le système
électrique
MAI 2019
PRINCIPAUX RÉSULTATS
SOMMAIRE
8. Prolongements 76
6
L’ÉTAT DES LIEUX INITIAL 1
désormais très probable que le véhicule élec- pour les secteurs de l’énergie et des transports,
trique devrait se développer fortement au et la réussite de ce développement nécessite que
cours des prochaines années. Ainsi, les diffé- plusieurs conditions soient remplies. Outre les pro-
rentes projections des constructeurs (scénarios de blématiques liées à l’accessibilité des bornes de
la Plateforme française automobile – PFA) et des recharge ou à l’évolution industrielle de la filière
pouvoirs publics (ambitions de la Programmation automobile, la maîtrise de la sécurité d’approvi-
pluriannuelle de l’énergie et de la Stratégie natio- sionnement en électricité, des impacts environne-
nale bas carbone) tablent sur un nombre de véhi- mentaux et des coûts pour la collectivité et pour
cules électriques en circulation en France de plus l’utilisateur sont des facteurs de nature à faciliter
d’un million d’unités à l’horizon 2022-2023, de l’intégration de la mobilité électrique.
4,8 millions en 2028 (échéance de la PPE), et pou-
vant atteindre 7 à 16 millions d’unités (véhicules Ces problématiques suscitent cependant encore
particuliers et véhicules utilitaires légers) en 2035 des interrogations. Une partie d’entre elles portent
(soit entre près de 20 % et plus de 40 % du parc notamment sur la capacité du système électrique à
total). Le développement devrait concerner en pre- assurer l’approvisionnement en énergie de millions
mier lieu essentiellement les véhicules particuliers de véhicules électriques, ou encore sur l’intérêt de
et véhicules utilitaires légers mais devrait à terme déployer des solutions de pilotage de la recharge
également porter sur les véhicules lourds (bus et des véhicules. Ces problématiques doivent faire
camions électriques). l’objet d’études détaillées afin d’anticiper les
impacts du développement de l’électromobilité et
Le développement massif du véhicule électrique de préparer le système électrique à l’intégration
constitue un défi et une évolution structurante massive de ce nouvel usage.
Figure 1. Projections d’évolution du nombre de véhicules légers (véhicules particuliers et véhicules utilitaires légers)
électriques en France, toutes technologies confondues : véhicules 100 % électriques (VEB) et véhicules hybrides
rechargeables (VHR)
18
16
Parc de véhicules électriques
en circulation (en millions)
14
12
10
RTE haut (Ampère)
8 RTE médian
RTE bas
Objectif du contrat stratégique
6 de la filière automobile
Objectif PPE
4 Objectif SNBC (estimation RTE)
Scénario PFA « Green constraint »
Scénario PFA « Green growth »
2 Scénario PFA « Stagnation »
Scénario PFA « Liberal world »
0
2010 2015 2020 2025 2030 2035
En 2017, RTE a apporté des premiers éclairages Ces analyses aboutissent à une double conclusion :
sur les impacts du développement de l’électromo- uu Sur la consommation en énergie, les analyses
bilité dans le cadre du Bilan prévisionnel, établi du Bilan prévisionnel ont montré qu’il n’exis-
chaque année au titre du Code de l’énergie. tait pas de doutes sur la capacité du système
électrique à produire la quantité d’énergie
Les scénarios de long terme construits en concer- nécessaire à la recharge de plusieurs millions
tation avec les parties prenantes du secteur élec- de véhicules, dans un contexte de baisse de
trique et publiés dans l’édition 2017 du Bilan consommation observée sur les autres usages.
prévisionnel intègrent ainsi différentes trajectoires Ainsi, la consommation annuelle de 15,6 millions
contrastées de développement de l’électromobi- de véhicules électriques représenterait environ
lité, atteignant jusqu’à 15,6 millions de véhicules 35 à 40 TWh d’électricité, soit moins de 8 % de
électriques à horizon 2035. Les scénarios Volt et la production d’électricité totale en France.
Ampère, utilisés par le Gouvernement pour établir uu Sur les appels de puissance, un point de vigi-
le scénario de la PPE, prévoient notamment des lance était identifié sur la maîtrise de la pointe
trajectoires soutenues de développement de la du soir en hiver, mais la faculté à absorber une
mobilité électrique. flotte massive de véhicules électriques semble
attestée dès lors que des solutions simples de
L’objectif des analyses réalisées dans le Bilan pré- pilotage (par exemple, asservissement tarifaire
visionnel 2017 n’était pas de prédire la dynamique sur le signal heures pleines/heures creuses de
de pénétration du véhicule électrique mais de tester manière similaire au dispositif utilisé aujourd’hui
la résilience du système électrique à un dévelop- pour l’eau chaude sanitaire) sont mises en place
pement massif de cette technologie. En particulier, pour une partie du parc de véhicules électriques.
les études menées sur le scénario « haut » de
développement de la mobilité électrique ont Ces résultats étaient établis sur une représenta-
démontré, en première approche, la faculté tion simplifiée des besoins de mobilité, l’essentiel
du système à accueillir jusqu’à 15 millions de l’analyse portant sur les caractéristiques princi-
de véhicules électriques d’ici 2035 sans diffi- pales des scénarios de transition (évolution du parc
culté majeure. nucléaire, des énergies renouvelables et du parc
thermique, régimes d’évolution de la consomma-
tion, politiques énergétique des pays voisins, etc.).
8
L’ÉTAT DES LIEUX INITIAL 1
Depuis novembre 2017, les enseignements du réunissant l’ensemble des parties intéressées :
Bilan prévisionnel ont été largement utilisés, dans acteurs du système électrique (producteurs, fournis-
le cadre de travaux ultérieurs de prospective sur le seurs, gestionnaires de réseau de distribution, opé-
système électrique, ou pour l’élaboration du projet rateurs de flexibilité et d’effacement, institutions et
de PPE. Ils ont notamment fourni des bases tech- représentants de l’État, régulateur, etc.), acteurs du
niques pour envisager des scénarios de déploie- secteur de la mobilité au sens large (constructeurs
ment rapide de la mobilité électrique. automobiles, start-up proposant des solutions de pilo-
tage de la recharge, opérateurs de bornes de recharge,
Dans ce cadre, RTE a été saisi de demandes régu- aménageurs, collectivités, etc.), ONG, syndicats pro-
lières des parties prenantes pour poursuivre la fessionnels, consultants, universitaires et institutions
démarche engagée en 2017 et approfondir les publiques (représentants de l’État, régulateur…).
analyses croisées sur le développement de la
mobilité propre et ses impacts sur le système élec- Le cadrage des travaux, les hypothèses utilisées,
trique. Ces demandes ont notamment porté sur les résultats préliminaires et définitifs ont été pré-
un ensemble de points précis : procéder à une sentés, débattus, et affinés dans ce groupe de suivi.
analyse d’événements spécifiques tels que les Ce travail de concertation s’est étalé sur plus d’une
périodes de grands départs en vacances, préciser année. Il a nécessité une adaptation des outils de
la valeur économique du pilotage de la recharge et modélisation de RTE, de manière à pouvoir traiter
le coût pour le consommateur, détailler les enjeux des scénarios de mobilité très différenciés.
en matière de réduction des émissions de CO2 en
intégrant l’analyse de cycle de vie des batteries, Il a également été nourri des travaux sur la politique
analyser l’économie des batteries de seconde vie… de l’énergie (loi énergie-climat, Programmation
pluriannuelle de l’énergie et Stratégie nationale
Au cours des derniers mois, de nombreux rap- bas carbone) et des transports (loi d’orientation
ports ont été produits sur la mobilité électrique. des mobilités ou LOM), actuellement discutés au
L’étude de la FNH, publiée en avril 2018, a ana- Parlement. Notamment, le projet de SNBC table
lysé les conséquences du véhicule électrique sur sur une électrification forte du parc automobile à
le bilan carbone, et a appelé à des prolongements. moyen terme (dans des ambitions comparables à
À l’automne 2018, un rapport publié par la CRE a celles du scénario Ampère du Bilan prévisionnel
interrogé sur les opportunités offertes par la flexi- 2017 de RTE), et le projet de PPE publié en janvier
bilité de la recharge et ses modalités de mise en 2019 projette un déploiement ambitieux du véhi-
œuvre, et noté le besoin d’études approfondies sur cule électrique (4,8 millions d’unités en 2028) et
l’intégration de la mobilité électrique au système intègre un volet spécifique « stratégie de dévelop-
électrique. En mars 2019, l’OPECST a rendu public pement de la mobilité propre ». L’un des enjeux de
un rapport sur les scénarios technologiques per- cette stratégie est de permettre un développement
mettant d’atteindre l’objectif d’un arrêt de la com- parallèle et coordonné « des énergies nouvelles
mercialisation des véhicules thermiques en 2040. non carbonées et des nouvelles motorisations et
infrastructures logistiques associées ».
Pour approfondir ces sujets et répondre aux
demandes des pouvoirs publics, RTE, en copi- Les analyses réalisées et restituées dans ce
lotage avec l’AVERE-France (association natio- document permettent ainsi d’éclairer le débat
nale pour le développement de la mobilité public sur les interactions entre les feuilles de
électrique) a mis en place un groupe de travail route « énergie » et « mobilité » de la France.
Caractériser précisément les formes de mobilité l’étude détaillée des habitudes de transport et de
des véhicules électriques est essentiel pour modé- leurs projections, et notamment :
liser leur impact sur le système électrique dans (i) une analyse détaillée des caractéristiques de la
une approche de prévision ou de prospective. mobilité actuelle au sein des différentes catégo-
ries de population, issue des enquêtes sur les
Ceci implique de disposer d’une évaluation robuste habitudes de déplacement (en particulier l’en-
des distances parcourues (et des vitesses) – qui quête nationale transports et déplacements) ;
conditionneront la consommation en énergie – mais (ii) l’établissement de plusieurs projections diffé
aussi d’identifier les types de trajets effectués, les renciées sur l’évolution de ces besoins de
heures et lieux de départ et d’arrivée qui détermine- mobilité (tenant compte du développement du
ront à quels instants les utilisateurs sont susceptibles télétravail, du covoiturage, etc.) ;
de charger leurs véhicules et avec quelle puissance, (iii)
des hypothèses prospectives sur la diffusion
ou encore de caractériser les services de flexibilité de l’électromobilité parmi les différents profils
que ces véhicules peuvent rendre au système élec- d’utilisateurs.
trique sans contraindre la mobilité des utilisateurs.
L’enquête nationale transports et déplacements
La représentation des besoins de mobilité et de (ENTD)1 fait office de document de référence sur les
leur évolution utilisée pour ces travaux repose sur habitudes de mobilité. Elle fournit des informations
Figure 2. Profil de mobilité moyen des véhicules légers en France selon le jour de la semaine (calculs à partir de l’ENTD 2008)
40
35
Millions de véhicules
Pas de déplacements
30 sur la journée
Déplacements longue distance
25 Déplacements divers
(pas de trajets domicile-travail
20
ou professionnels)
15 Déplacements domicile-travail
et professionnels
10 Dont :
- domicile-travail uniquement
5 - domicile-travail-divers
- professionnel
0
Lundi à vendredi Samedi Dimanche
1. L
a dernière enquête de cette ampleur a été réalisée en 2008. Une réactualisation est prévue en 2020.
10
L’ENJEU DE L’ÉTUDE APPROFONDIE 2
détaillées sur la mobilité actuelle du parc de véhicules Figure 3. Distances annuelles moyennes parcourues
par véhicule en France (source : ENTD 2008)
légers, les différents types de trajets (motifs, lieux
d’origine et de destination, distances parcourues,
horaires de départ et d’arrivée, selon les jours et
14 000
selon les catégories d’utilisateurs). L’analyse détail-
lée des données de l’enquête permet ainsi de dresser 12 000
La reconstitution des appels de puissance des véhi- Pour chacun d’entre eux, des hypothèses contrastées
cules électriques et de la flexibilité que ces der- ont été considérées, afin d’évaluer la sensibilité des
niers sont susceptibles d’apporter repose sur un enjeux techniques, économiques et environnemen-
ensemble d’hypothèses et de « paramètres clés ». La taux aux différents paramètres.
concertation sur les hypothèses a mis en lumière les
incertitudes et disparités entre les anticipations des
différentes parties prenantes sur ces paramètres. 2. Dans l’ENTD, les déplacements longue distance sont définis comme les
déplacements dont la destination principale se situe à plus de 80 km à vol
d’oiseau du domicile.
Véhicules légers
électriques
autonomes
(parc en 2035) Développement nul ou marginal 1 million de véhicules électriques
du véhicule électrique autonome autonomes partagés
L’analyse réalisée intègre la possibilité de développement d’une nouvelle forme de mobilité, dans laquelle une partie des utilisateurs ne
sont plus propriétaires de véhicules en propre mais ont recours à des services de mobilité basés sur des véhicules électriques autonomes
partagés sous forme « robots-taxis »
Parts modales
des différentes
Parc de véhicules et caractéristiques
formes de
Ambitions publiques sur l’évolution Forte augmentation de la part Renforcement des transports
mobilité
des parts modales des transports en commun en commun et mobilités douces
Les efforts en matière de décarbonation des transports peuvent également conduire à des évolutions en matière de besoins de
mobilité, avec par exemple une augmentation du recours aux transports en commun et/ou aux mobilités douces.
Bus et camions
électriques
(parc en 2035) 20 000 camions électriques 94 000 camions électriques 129 000 camions électriques
5 000 bus et cars électriques 18 000 bus et cars électriques 27 000 bus et cars électriques
Le développement de la mobilité électrique devrait être de moindre ampleur pour les véhicules lourds, dont la plupart font face à
des besoins d’autonomie importants. Toutefois, le développement du véhicule électrique est susceptible de concerner une partie
des véhicules lourds, notamment pour la desserte locale (bus et cars en zones urbaines, camions de livraison urbaine et régionale).
Part des
véhicules hybrides
rechargeables
(VHR) et véhicules
100 % électriques
à batterie (VEB) 22 % VHR/78 % VEB 40 % VHR/60 % VEB 45 % VHR/55 % VEB
(parc en 2035)
En fonction de l’évolution des différentes technologies, des politiques de soutien public ou encore des besoins des utilisateurs
en matière d’autonomie, la part des véhicules hybrides rechargeables dans l’ensemble de la flotte de véhicules électriques pourrait
se fixer à des niveaux très différents. Par ailleurs, un développement marginal de véhicules à hydrogène (produit par électrolyse) est
considéré : entre 16 000 et 35 000 unités en 2035.
Taille des
batteries des VEB
en circulation
(en 2035) 56 kWh - 330 km 73 kWh - 440 km 89 kWh - 530 km
La tendance actuelle est à l’augmentation de la taille des batteries, permettant d’améliorer l’autonomie des véhicules et faciliter leur
acceptabilité. Toutefois, des batteries de grande taille conduisent également à des impacts environnementaux plus importants et ne sont
pas toujours justifiées pour des véhicules réalisant essentiellement des parcours de courte distance.
Fabrication
et recyclage
des batteries
Fabrication France Fabrication Asie (Chine, Corée du Sud) Recyclage 50 % Recyclage 85 %
Le lieu de fabrication et le recyclage des batteries influent sur l’analyse environnementale.
12
L’ENJEU DE L’ÉTUDE APPROFONDIE 2
de diffusion
Dynamique
Diffusion
du véhicule
électrique Homogène sur la population Plus importante chez les actifs aisés
en région urbaine ou périurbaine
Le véhicule électrique est susceptible de se développer plus ou moins fortement selon les différentes catégories de population (actifs/
inactifs, gros rouleurs, populations plus ou moins aisées, etc.)
Kilométrage
Mobilité
km km km km
moyen
1 1 5 0 0 1 2 5 0 0 1 4 0 0 0 1 5 3 0 0
Moyen hors longue distance Moyen avec longue distance Haut hors longue distance Haut
L’utilisation des véhicules électriques et les distances qu’ils parcourent annuellement peuvent différer selon les catégories d’utilisateurs
dans lesquelles le véhicule électrique se diffuse.
Accès
aux points
de charge
Faible accès hors domicile Accès médian hors domicile Fort accès hors domicile
L’accès aux points de charge (au domicile, au travail, sur la voie publique, etc.) conditionne les lieux mais également les périodes
Points de charge
au cours desquelles les véhicules électriques pourront être rechargés, ainsi que la flexibilité sur le déplacement de la recharge.
Puissance
des points
de charge
Puissance basse Puissance médiane Puissance haute
Moyenne à domicile en 2035 : 5,2 kW Moyenne à domicile en 2035 : 6,2 kW Moyenne à domicile en 2035 : 6,7 kW
La puissance des points de charge détermine la vitesse de recharge des batteries (recharge lente, rapide, ultra-rapide, etc.). Ceux-ci
pourront être de puissance très différente selon les lieux dans lesquels ils sont déployés (domicile, lieu de travail, voie publique,
stations sur autoroute). Ainsi, à domicile, les points de charge seront essentiellement constitués de prises de 3,7 kW à 7,4 kW, tandis
que les puissances des bornes de recharge rapide sur autoroute pourront elles atteindre jusqu’à 350 kW.
Fréquence
de connexion
des utilisateurs
45 % en connexion 65 % en connexion 85 % en connexion
systématique systématique systématique
Les utilisateurs de véhicules électriques parcourant des distances limitées chaque jour, leurs batteries seront rarement vides à la
fin de la journée. Plusieurs comportements peuvent alors être observés : soit l’utilisateur se branche systématiquement quand
il est garé et qu’il a accès à une borne de recharge, soit il ne se branche que lorsque la batterie est en dessous d’un niveau de
Recharge
charge (50 %). Ce paramètre détermine la fréquence des recharges et le nombre de véhicules connectés à chaque instant et
donc les possibilités de flexibilité offertes au système électrique.
Pilotage de
la recharge
Aucun pilotage Pilotage bas Pilotage médian Pilotage haut
40 % des recharges 60 % des recharges 80 % des recharges
pilotées dont 0 % de V2G pilotées dont 3 % de V2G pilotées dont 20 % de V2G
Un développement plus ou moins poussé du pilotage de la recharge des véhicules électriques, sous ses différentes formes (pilotage
tarifaire simple, pilotage dynamique, vehicle-to-grid, etc.) constitue un paramètre clé de l’étude.
Le véhicule électrique en tant que système électrique. Ceci présente a priori un grand
consommation « pilotable » selon intérêt dans un système où la consommation (tem-
l’état du système pérature) et la production (vent, ensoleillement,
hydraulicité) dépendent fortement de paramètres
Un véhicule particulier est majoritairement un objet exogènes.
statique : la majeure partie du temps, il est sta-
tionné – souvent à domicile ou sur le lieu de travail –,
et beaucoup plus rarement, il est utilisé (4 % du temps Le véhicule électrique en tant
en moyenne). Au niveau de tout le pays, même lors que solution de stockage
des heures de déplacement les plus chargées, moins
de 10% du parc de véhicules est en circulation. Dans leur dimensionnement et leur doctrine
d’exploitation, les systèmes électriques ont été
Une partie des véhicules en stationnement ne construits selon un principe simple : l’électricité ne
peuvent pas être systématiquement raccordés à se stocke pas, et à l’exception de certains barrages
une borne. Par exemple, 6 millions de ménages en hydrauliques (type STEP) en nombre limité, les
France parmi ceux qui possèdent au moins une voi- solutions de stockage sont très onéreuses.
ture n’ont pas accès à une place de stationnement
à usage privé. L’accès à la recharge sur le lieu de Or, à partir du moment où les véhicules élec-
travail constitue également un enjeu. Néanmoins, triques seront diffusés en nombre suffisant,
même en intégrant ces facteurs, de nombreuses une flotte de petites batteries seront en per-
voitures sont très souvent immobiles à proximité manence connectées au système électrique.
immédiate d’un point de recharge. Dès lors que Ceci offre la possibilité d’une mise en partage à
le véhicule électrique est largement adopté et large échelle de ce potentiel de flexibilité, et d’en-
qu’un nombre suffisant de points de charge visager que ce « stockage diffus » joue un rôle
existent, un nombre important de véhicules important dans l’optimisation et l’équilibrage du
électriques pourront être raccordés au sys- système et la réduction de ses coûts.
tème en quasi-permanence : pour tous ces
véhicules, des marges de manœuvre réelles En tant que tel, le développement de la mobilité
existent sur le positionnement de la recharge. électrique conduit donc à modifier largement notre
représentation du système électrique, et à envi-
De plus, l’analyse des données sur la mobilité des sager ce nouvel usage comme une opportunité
français montre que les périodes de stationnement technique.
sont généralement longues (plusieurs heures d’affi
lée, notamment la nuit). Ces durées sont suffisam-
ment importantes pour permettre de placer la charge Des volumes importants de
aux meilleurs moments (à la fois pour le système élec- flexibilité, pouvant être gérés
trique et le consommateur). Sauf dans des confi- à l’échelle de la semaine
gurations spécifiques (par exemple recharge en
itinérance sur autoroute lors d’un trajet long), L’analyse technique de ces nouveaux gisements
la recharge des véhicules électriques peut être (pilotage simple accessible via une recharge mono-
pilotée sans impact sur la mobilité. directionnelle, utilisation comme un stockage via
une recharge réversible) montre, sur le plan tech-
Le pilotage de la recharge des véhicules offre donc nique, le grand intérêt que représente la mobilité
une source de flexibilité très intéressante pour le pour le secteur électrique.
14
L’ENJEU DE L’ÉTUDE APPROFONDIE 2
2. P
ilotage monodirectionnel de la recharge avec participation
au réglage de fréquence
7. …
16
L’ENJEU DE L’ÉTUDE APPROFONDIE 2
L’évaluation des impacts du développement de Les hypothèses d’évolution du mix électrique utilisées
la mobilité électrique et des enjeux techniques, pour l’analyse sont basées sur les ambitions indiquées
économiques et environnementaux associés à la dans le projet de PPE publié par le Gouvernement
flexibilité des recharges repose sur une modéli- début 2019. Elles intègrent en particulier :
sation du fonctionnement du système électrique uu une accélération du développement des éner-
européen. Cette modélisation, également utilisée gies renouvelables (EnR) d’ici 2028 (multipli-
pour les analyses du Bilan prévisionnel, consiste à cation par 2,5 des capacités d ’éolien terrestre
simuler l’équilibre offre-demande au pas horaire à d’ici 2028 et multiplication par 4 des capacités
l’échelle européenne (en considérant les possibi- photovoltaïques sur la même période, dévelop-
lités d’échanges aux interconnexions) et pour un pement des parcs éoliens en mer, etc.), suppo-
très grand nombre de chroniques d’aléas (consom- sée prolongée sur la période 2029-2035,
mation, production éolienne, solaire et hydrau- uu la fermeture des centrales au charbon à moyen
lique, disponibilité des centrales nucléaires et terme et l’absence de nouveaux projets de
thermiques à flamme, etc.). centrales thermiques à combustible fossile,
uu un déclassement de 14 réacteurs nucléaires d’ici
Les véhicules électriques font l’objet d’une modé- 2035 (en comptant ceux de Fessenheim) selon
lisation explicite représentant leurs besoins de la trajectoire indiquée par le Gouvernement,
mobilité, les périodes où ils sont connectés (et uu une consommation d’électricité finale stable (les
les puissances de connexion) et l’état de charge effets d’efficacité énergétique compensant les
des batteries. Cette modélisation permet de nouveaux usages comme le véhicule électrique)
simuler la sollicitation de la flexibilité des véhi- et un développement de la production d’hydro-
cules électriques en tenant compte des besoins gène par électrolyse,
de mobilité. uu un développement soutenu des interconnexions.
Scénarios de mobilité
Scénarios de mix électrique
(Crescendo, Opera, Forte,
(PPE, Ampère, Volt…)
Alto, Piano…)
Courbes de charge
Simulation
Simulation de du fonctionnement
la mobilité des VE du système électrique
Enjeux économiques
et des besoins européen et de la flexilité
de recharge de la recharge
(modélisation du Bilan prévisionnel)
Enjeux environnementaux
Ce scénario d’évolution du mix électrique présente Par conséquent, l’intérêt d’un mix comme celui
certaines caractéristiques communes avec les scé- de la PPE est fortement renforcé avec de la
narios Ampère et Volt, analysées dans le Bilan consommation pilotable (qui permet d’adapter la
prévisionnel 2017 : consommation à la disponibilité de la production
uu Le mix est marqué par une forte croissance du renouvelable), et des nouveaux usages comme le
parc « décarboné à faible coût variable » (éner- véhicule électrique (qui permettent de profiter de
gies renouvelables et nucléaire). Cela signifie la production d’électricité décarbonée à faible coût
qu’il existe souvent beaucoup de puissance variable en France et entrent en concurrence avec
disponible à faible coût, et que cette électri- les exports).
cité est compétitive sur les marchés de l’éner-
gie (elle trouve donc quasi systématiquement Ceci renforce l’intérêt de disposer d’une ana-
preneur). lyse approfondie de la coordination entre
uu En conséquence, dans un contexte où la consom- la feuille de route « énergie » et la feuille de
mation électrique serait globalement stable, le route « mobilité
». Un développement de la
système électrique français se retrouve forte- mobilité électrique réalisé en cohérence avec
ment exportateur, avec des volumes d’export la PPE offre l’opportunité d’exploiter le sys-
pouvant atteindre voire dépasser 100 TWh tème dans ses conditions optimales (corré-
par an à partir de 2030. Cette caractéristique ler les recharges avec la production solaire
a fait l’objet d’analyses détaillées à la suite du ou éolienne, réduire les écrêtements de pro-
Bilan prévisionnel 20173 qui ont confirmé la fai- duction renouvelable, ne pas faire peser sur
sabilité technique de soldes exportateurs très le nucléaire la charge de l’ajustement du
importants dans ce type de scénario mais ont système mais la renvoyer à d’autres moyens
également identifié un point de vigilance sur flexibles, comme la recharge des véhicules
les conditions économiques de ces exports électriques, etc.).
3. RTE, octobre 2018, Analyses complémentaires sur les échanges d’électricité aux interconnexions dans les scénarios du Bilan prévisionnel.
18
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS
POUR LE DÉVELOPPEMENT DE
LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE
Figure 7. Trafic passager pour les différents modes de transport terrestre dans les différents scénarios
1 000
Milliards de passagers -
Véhicules thermiques
800 (hors GPL/GNL/GNV)
Véhicules GPL/GNL/GNV
Véhicules électriques
kilomètres
loppement important de la mobilité électrique, façon plus marquée auprès des « gros rouleurs ». Sont
dans un cadre « tendanciel » sur l’évolution des ainsi concernés en premier lieu les actifs se rendant sur
formes de mobilité. leur lieu de travail avec leur voiture, ainsi que les habi-
S’agissant des ambitions sur la mobilité électrique : tants des zones urbaines et périurbaines, là où l’utili-
deux variantes sont considérées – l’une, médiane, sation des véhicules thermiques est le plus susceptible
basée sur les projections des constructeurs (scéna- d’être découragée avec la mise en œuvre de mesures
rio Green Constraint de la Plateforme française auto- et d’incitations pour limiter la pollution locale.
mobile), l’autre, haute, compatible avec les ambitions Malgré une augmentation de la capacité des batteries
publiques de la PPE et de la SNBC (scénario Ampère des véhicules, l’autonomie des véhicules demeure rela-
du Bilan prévisionnel 2017). tivement contraignante pour les déplacements longue
La mobilité demeure organisée autour du véhicule distance. Les véhicules tout électriques restent ainsi
particulier, qui reste de loin le principal moyen de moins utilisés que les véhicules thermiques pour les
transport, mais certaines de ses caractéristiques évo- grands déplacements.
luent dans le prolongement des tendances actuelles : Sur le plan de la recharge, des infrastructures se déve-
développement du covoiturage (meilleur taux de rem- loppent sur la voie publique et sur les lieux de travail,
plissage des véhicules), du télétravail (diminution des permettant à près de 30 % des utilisateurs d’avoir un
besoins de mobilité par personne), de l’utilisation du accès régulier à des bornes en dehors de leur domicile.
vélo et des transports en commun (modification des La puissance des bornes reste modérée. Le pilotage de
parts modales). Les distances parcourues par les véhi- la recharge, dans ses formes les plus simples, est large-
cules augmentent ainsi moins vite que la population. ment adopté, par exemple via un asservissement tari-
Du point de vue industriel, les caractéristiques des véhi- faire similaire au dispositif utilisé pour les chauffe-eau
cules (taille, performance, autonomie) sont conformes aux et dont la mise en œuvre est facilitée par le déploiement
projections standards actuelles. La localisation de la fabri- des compteurs communicants. En revanche, les services
cation des batteries correspond aux logiques industrielles rendus par l’utilisateur au système via la recharge réver-
actuelles, et se situe très majoritairement en Asie. sible (vehicle-to-grid) demeurent marginaux.
11,7 millions de véhicules légers électriques 15,6 millions de véhicules légers électriques
+112 000 véhicules lourds électriques + 156 000 véhicules lourds électriques
dont 40 % de véhicules hybrides rechargeables dont 22 % de véhicules hybrides rechargeables
26,6 millions de véhicules légers thermiques 22,7 millions de véhicules légers thermiques
544 000 véhicules lourds thermiques 500 000 véhicules lourds thermiques
et comportements
Modalités d’usage
Batteries de capacité moyenne 14 000 km parcourus en moyenne par an pour 28 % des véhicules ont un accès
(73 kWh/440 km en moyenne) les véhicules légers 100 % électriques régulier à une borne hors domicile
Batteries
Pas de choix fort en
fabriquées en Asie
faveur du recyclage
(Chine, Corée du Sud)
20
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE 3
Résultats
Le scénario Crescendo permet de capter une part valorisation de l’électricité décarbonée (EnR et
importante des gains (techniques, économiques, nucléaire) dans des périodes de surplus de produc-
et environnementaux) associés à la mobilité élec- tion. Les opportunités d’optimisation ne sont pas
trique et décrits dans le rapport. En revanche, il utilisées au maximum, mais permettent malgré tout
ne permet pas d’aller jusqu’au bout de la logique de limiter le coût de production d’électricité pour la
d’optimisation. recharge des véhicules.
Dans ce scénario, la consommation annuelle d’élec- Le développement du pilotage permet également de
tricité associée au développement de la mobi- maîtriser la facture énergétique des consommateurs,
lité électrique atteint environ 29 TWh (scénario avec un coût annuel du plein électrique inférieur à
médian) à 40 TWh (scénario haut), soit de l’ordre 300 € par an en moyenne (contre un coût annuel
de 6 % à 8 % de la consommation totale d’électricité moyen du plein essence de l’ordre de 1 200 € par an
en France. aujourd’hui).
Le développement généralisé des solutions simples Dans le scénario Crescendo, le développement de la
de pilotage de la recharge permet de limiter les mobilité électrique conduit à un effet très positif sur
appels de puissance à la pointe. La contribution des les émissions de CO2 avec une réduction de l’em-
véhicules électriques aux pointes de consommation preinte carbone des transports de plus de 20 mil-
est comprise entre 2,2 GW et 3,6 GW, ce qui est lions de tonnes par an. Ce bilan est attribuable aux
possible dans le scénario de la PPE. Notamment, émissions évitées par la combustion de carburant
il n’en résulte pas de difficulté pour la sécurité mais également par une utilisation globalement
d’approvisionnement, y compris lors des grands optimisée du système électrique via le pilotage de
déplacements. la recharge.
Le pilotage de la recharge permet une utilisa-
tion efficace du parc de production d’électricité à
l’échelle européenne, et en particulier une meilleure
35 €/MWh 35 €/MWh
Coût complet moyen de 290 €/an Coût complet moyen de 290 €/an
production de l’électricité Plein électrique moyen production de l’électricité Plein électrique moyen
utilisée pour la recharge pour le consommateur utilisée pour la recharge pour le consommateur
Émissions
de CO2
Le scénario Opera explore les opportunités de l’autonomie des batteries, production des batteries
offertes par un pilotage généralisé de la recharge en Asie) sont prolongées.
et une utilisation poussée de la flexibilité des
Les spécificités du scénario Opera se déclinent sur les
batteries. Par construction, ce scénario se positionne
différents paramètres techniques, qui facilitent l’inté-
ainsi parmi les configurations les plus favorables pour
gration au système électrique.
le système électrique.
D’une part, l’accès à un point de charge sur le lieu de
Dans ce scénario, le véhicule particulier reste large-
travail ou dans les équipements collectifs est généra-
ment dominant dans les déplacements, selon le même
lisé, permettant ainsi de lisser les appels de puissance
cadrage général que dans Crescendo (poursuite des
au sein de la journée et de placer les soutirages aux
inflexions observées sur le développement du covoi-
moments des pics de production solaire.
turage, du télétravail, des transports en commun et
des mobilités douces). Deux variantes principales sont D’autre part, le pilotage de la recharge est fortement
étudiées pour l’électrification du parc – la médiane est développé : 80% des recharges sont pilotées et une
basée sur les projections des constructeurs (scénario partie significative des véhicules (20%) rend des ser-
Green Constraint de la Plateforme française automo- vices au système électrique en utilisant la batterie pour
bile), la haute sur les ambitions publiques de la PPE et injecter de l’énergie sur le réseau (vehicle-to-grid).
de la SNBC (scénario Ampère de RTE).
Enfin, les utilisateurs prennent l’habitude de connec-
Le développement du véhicule électrique au sein ter systématiquement leur véhicule au réseau élec-
de la population s’effectue de façon plus marquée trique et la puissance des points de charge auxquels
auprès des gros rouleurs actifs utilisant leur véhi- ils se connectent est généralement élevée, permet-
cule pour se rendre sur leur lieu de travail et habi- tant ainsi d’offrir d’importants services de flexibilité
tant en zone urbaine ou périurbaine. Dans les deux au système électrique.
cas, les logiques industrielles existantes (croissance
11,7 millions de véhicules légers électriques 15,6 millions de véhicules légers électriques
+112 000 véhicules lourds électriques + 156 000 véhicules lourds électriques
dont 40 % de véhicules hybrides rechargeables dont 22 % de véhicules hybrides rechargeables
26,6 millions de véhicules légers thermiques 22,7 millions de véhicules légers thermiques
544 000 véhicules lourds thermiques 500 000 véhicules lourds thermiques
et comportements
Modalités d’usage
Batteries de capacité moyenne 14 000 km parcourus en moyenne par an pour 45 % des véhicules ont un accès
(73 kWh/440 km) les véhicules légers 100 % électriques régulier à une borne hors domicile
Batteries
Pas de choix fort en
fabriquées en Asie
faveur du recyclage
(Chine, Corée du Sud)
22
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE 3
Résultats
-5,2 GW -5,2 GW
28 TWh d‘appels de puissance à la 40 TWh d‘appels de puissance à la
de consommation pointe hivernale en moyenne de consommation pointe hivernale en moyenne
des véhicules électriques (grâce au V2G) des véhicules électriques (grâce au V2G)
mix électrique
Effet sur le
23 €/MWh 23 €/MWh
Coût complet de l’énergie 275 €/an Coût complet de l’énergie 280 €/an
produite pour la recharge Plein électrique moyen produite pour la recharge Plein électrique moyen
des véhicules pour le consommateur des véhicules pour le consommateur
Émissions
de CO2
Le scénario Forte vise à tester une configuration D’une part, l’accès à un point de charge sur le lieu
volontairement peu favorable pour le système de travail ou les équipements collectifs est faible-
électrique, marquée par une absence de choix ment développé. Ainsi l’essentiel des véhicules uti-
fort des pouvoirs publics, un faible déploiement des lisés pour des trajets domicile-travail ne peuvent se
logiques de pilotage, et une forte utilisation des véhi- recharger pendant les heures de forte production
cules électriques pour la longue distance. Il répond solaire. D’autre part, seule une minorité des utili-
ainsi au souhait de tester la résilience du système en sateurs pilotent la recharge de leur véhicule élec-
matière de sécurité d’approvisionnement à un cas de trique et aucun véhicule ne participe activement au
figure volontairement contraignant. fonctionnement du système via le vehicle-to-grid.
En conséquence, les recharges obéissent à un pro-
Les habitudes de mobilité sont supposées inchangées
fil essentiellement naturel, et se placent en grande
par rapport à aujourd’hui. Malgré une très légère aug-
partie aux heures de retour au domicile, le soir, à des
mentation des parts modales des autres moyens de
heures où le système électrique dispose de moins de
transport, le parc de véhicules individuels ne dimi-
marges.
nue pas. Les utilisateurs de véhicules électriques
attendent essentiellement d’une voiture électrique Enfin, les puissances des points de charge sont
qu’elle offre le même « service » qu’une voiture ther- importantes et la plupart des utilisateurs prennent
mique : ils privilégient la recherche d’autonomie et l’habitude de brancher leurs véhicules dès qu’ils en
donc les batteries de grande capacité, de manière à ont la possibilité : les recharges étant systématiques,
permettre des déplacements « longue distance ». elles ne portent que sur les besoins d’une journée de
déplacement et se font à des puissances relativement
Le développement de la mobilité électrique n’est pas
élevées. Elles sont donc peu étalées dans le temps,
accompagné de choix visant à faciliter son intégra-
peu flexibles et relativement concentrées aux heures
tion dans le système électrique et la valorisation de la
de retour à domicile.
flexibilité sur la recharge.
11,7 millions de véhicules légers électriques 15,6 millions de véhicules légers électriques
+112 000 véhicules lourds électriques + 156 000 véhicules lourds électriques
dont 40 % de véhicules hybrides rechargeables dont 22 % de véhicules hybrides rechargeables
26,6 millions de véhicules légers thermiques 22,7 millions de véhicules légers thermiques
544 000 véhicules lourds thermiques 500 000 véhicules lourds thermiques
et comportements
Modalités d’usage
Batteries de grande capacité 15 300 km parcourus en moyenne par an pour 16 % des véhicules ont un accès
(89 kWh/530 km en moyenne) les véhicules légers 100 % électriques régulier à une borne hors domicile
Batteries
Pas de choix fort en
fabriquées en Asie
faveur du recyclage
(Chine, Corée du Sud)
24
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE 3
Résultats
Par construction, le scénario Forte est le moins Sur le plan économique, le scénario Forte ne permet
favorable pour le système électrique. La mobilité pas de bénéficier pleinement des synergies avec le
électrique a un impact significatif sur les appels de mix de production d’électricité décarboné. L’électricité
puissance à la pointe avec une contribution moyenne utilisée pour la recharge demeure très compétitive,
comprise entre 5,7 GW (variante médiane) et 8 GW mais est plus chère que dans les autres scénarios. En
(variante haute). particulier, sur certaines périodes, des surplus de pro-
duction EnR et nucléaire à coût variable faible voire
Dans la variante haute avec 15,6 millions de véhi-
nul ne sont pas valorisés alors qu’ils pourraient être
cules, le taux de pilotage de la recharge doit être
utilisés pour la recharge des véhicules.
d’au moins 55 % pour assurer le niveau de sécu-
rité d’approvisionnement requis par les pouvoirs Ceci se traduit sur la facture énergétique des consom-
publics. mateurs, dont le coût annuel du plein électrique
apparaît en moyenne supérieur à 350 € par an et
Les pointes de consommation demeurent dues aux
pourrait être nettement réduit. Le véhicule électrique
recharges pour les besoins de mobilité « du quo-
demeure largement moins cher à l’utilisation, mais
tidien
». Malgré l’utilisation des véhicules pour les
tout le potentiel de baisse n’est pas utilisé.
déplacements de longue distance, les épisodes de
tension sur la sécurité d’approvisionnement ne sont Sur le plan environnemental, le bilan carbone asso-
pas liés aux périodes de grands déplacements (chas- cié à l’électrification des véhicules demeure large-
sé-croisé des vacances d’été...) qui interviennent ment positif (de l’ordre de 20 à 23 millions de tonnes
essentiellement à des périodes pendant lesquelles le de CO2 évitées par an), bien que la plupart des para-
système dispose de marges. mètres soient orientés de manière défavorable : la
taille importante des batteries, leur fabrication en
Les points de vigilance sur la sécurité d’approvision-
Asie et leur faible taux de recyclage induisent un
nement sont essentiellement une conséquence d’un
bilan carbone plus élevé des véhicules électriques et
faible développement du pilotage de la recharge,
la faible optimisation de la recharge conduit à des
notamment à domicile. Un développement plus
émissions plus importantes à l’échelle du secteur
important (55 % au lieu de 40 %) que dans les hypo-
électrique européen. Des leviers supplémentaires
thèses du scénario suffit à éviter tout problème de
de réduction des émissions de CO2 ou des pollutions
sécurité d’approvisionnement.
chimiques restent donc accessibles.
45 €/MWh 46 €/MWh
Coût complet moyen de 360 €/an Coût complet moyen de 365 €/an
production de l’électricité Plein électrique moyen production de l’électricité Plein électrique moyen
utilisée pour la recharge pour le consommateur utilisée pour la recharge pour le consommateur
Émissions
de CO2
fication profonde des modes de déplacement, et 100 % du temps lors des heures « de pointe » de
déclenchée par une rupture technologique – le mobilité. Contrepartie à leur mode d’utilisation, les
véhicule autonome (de niveau 5) – et organisée véhicules autonomes réalisent fréquemment des tra-
autour du principe de services de mobilité parta- jets « à vide ».
gée – par l’intermédiaire de « robots-taxis ».
Les véhicules autonomes se rechargent lors des
Le parc de véhicules autonomes atteint un million périodes de moindre besoin de mobilité (essentiel
d’unités en circulation à l’horizon 2035. Ces véhicules lement la nuit mais aussi au sein de la journée,
ne sont pas possédés en propre par les ménages, du hors périodes de pointe de mobilité). Au sein de ces
fait de leur coût important mais sont, au contraire, périodes, la recharge est pilotée de manière dyna-
utilisés de manière régulière et partagée sous forme mique en utilisant les fonctionnalités avancées des
de « robots-taxis » : l’absence de conducteur permet véhicules.
de rendre l’utilisation de ces taxis beaucoup plus
La bascule vers la mobilité partagée est organisée
abordable pour l’utilisateur, et une partie de la popu-
par les pouvoirs publics de manière conjointe avec un
lation peut alors basculer de manière définitive sur ce
renforcement de l’offre en transports en commun. Le
type de mobilité pour les trajets du quotidien.
véhicule autonome facilite ainsi l’accès aux transports
La diffusion du véhicule autonome partagé conduit de collectifs dans les zones où le maillage des transports
nombreux ménages à ne plus posséder leur propre est moins dense.
véhicule pour utiliser des services de mobilité fournis
En parallèle du développement des véhicules auto-
par les véhicules autonomes partagés, couplés avec
nomes, le reste du parc de véhicules légers s’électrifie
l’utilisation accrue de transports en commun. Le parc
avec 8,2 millions d’unités en circulation en 2035. Le
de véhicules légers se contracte significativement, de
parc résiduel de véhicules thermiques légers se réduit
38 millions d’unités aujourd’hui à moins de 32 mil-
à 22,7 millions d’unités, soit un nombre identique à
lions en 2035. En moyenne, un robot-taxi se substitue
celui de la variante « haute » des autres scénarios. Par
à sept voitures particulières.
rapport aux autres scénarios, la substitution entre
Les véhicules autonomes électriques sont utilisés de véhicules autonomes et individuels concerne donc
façon massive, 50 % du temps en moyenne (contre uniquement les véhicules électriques.
Batteries
Pas de choix fort en
fabriquées en Asie
faveur du recyclage
(Chine, Corée du Sud)
26
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE 3
Le scénario Alto présente des caractéristiques tech- de véhicules, augmentation des services rendus,
Résultats
48 TWh
de consommation des véhicules +5 TWh +4,4 GW
électriques dont 25 TWh pour de consommation supplémentaire d‘appels de puissance à la
les véhicules électriques autonomes des transports collectifs pointe hivernale en moyenne
mix électrique
Effet sur le
+10,7 TWh
de production d’électricité décarbonée « récupérés » pour la recharge des véhicules
économiques
Enjeux
39 €/MWh
Coût complet moyen de production 310 €/an
de l’électricité utilisée pour la recharge Plein électrique moyen pour le consommateur
Émissions
de CO2
-18 MtCO2/an
empreinte carbone évitée
au niveau mondial
Dans le scénario Piano, politiques publiques et Pour les déplacements individuels en véhicule léger, la
évolutions sociétales se conjuguent pour parvenir mobilité électrique se développe fortement, selon le
à une évolution importante des formes de mobilité. scénario le plus haut (plus de 15 millions de véhicules
électriques en circulation à horizon 2035).
Les déplacements effectués en véhicules particuliers
se réduisent fortement, au profit des mobilités douces Pour améliorer les bénéfices environnementaux, le
et des transports en commun, dont l’offre est ren- développement de la mobilité électrique est systéma-
forcée. Dans les zones urbaines, une grande partie tiquement suivi de choix techniques permettant de
des trajets courts (moins de 6 km) sont réalisés en faciliter l’intégration dans le système électrique. Ceci
mobilité douce (vélo, vélo électrique, marche à pied, implique un accès à des points de charge sur le lieu de
trottinette, etc.). La part modale des transports en travail et la généralisation du pilotage de la recharge.
commun augmente fortement pour représenter près Ces choix permettent d’utiliser au mieux le parc de
de 20 % des kilomètres passagers en 2035. production d’électricité décarbonée.
Cette évolution des modes de déplacements ne repose Enfin, le souci de limiter l’impact environnemental de
sur aucun pari technologique et résulte de politiques la mobilité électrique se traduit par le recours à des
publiques volontaristes : limitation de l’utilisation des batteries de petite taille et par le choix de fabriquer
véhicules (notamment thermiques) en ville, développe- les batteries en France (ce qui permet d’utiliser une
ment d’infrastructures pour les mobilités douces (pistes électricité décarbonée dans le processus énergivore
cyclables), renforcement de l’offre de transports en de fabrication) et de pousser le taux de recyclage
commun, facilitation de l’intermodalité entre mobilités au-delà de la réglementation actuelle.
douces et transports en commun (avec par exemple la
mise en place de parkings à vélo sécurisés), etc.
Batteries de petite capacité 14 000 km parcourus par an pour 45 % des véhicules ont un accès
(56 kWh/330 km en moyenne) les véhicules légers 100 % électriques régulier à une borne hors domicile
Batteries
Taux de recyclage élevé
fabriquées
des batteries
en France
28
DES SCÉNARIOS CONTRASTÉS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE 3
Résultats
Par construction, le scénario Piano conduit à des services de flexibilité) de seulement 280 € par
une performance environnementale améliorée : an pour les utilisateurs en moyenne, et qui est même
l’utilisation globale du véhicule individuel se contracte bien inférieur pour les utilisateurs pour les utilisateurs
par rapport à aujourd’hui, le parc de véhicules exploitant les possibilités offertes par la recharge
légers est fortement électrifié, et cette électrification réversible.
s’accompagne d’une réduction des émissions sur le
cycle de vie des véhicules. Sur le plan environnemental, ce scénario est le
plus vertueux : la réduction de l’empreinte carbone
Il s’agit d’un scénario où la consommation électrique des transports est particulièrement importante. Le
des transports est plus importante. L’électrification développement des mobilités douces sur les petits
du parc de véhicules légers, et le report modal d’une trajets en zone urbaine et le report vers les transports
partie de la mobilité thermique vers les transports en en commun conduisent à réduire à la fois le parc de
commun électriques, y concourent. véhicules thermiques et les distances parcourues, et
conduit à une économie de 7 millions de tonnes de
Le pilotage généralisé de la recharge permet CO2 par an. À elle seule, la fabrication en France des
d’atteindre un haut niveau de sécurité d’approvision- batteries permet d’économiser jusqu’à 3 millions de
nement. Il apporte également des avantages cer- tonnes, et les exigences supplémentaires sur le taux
tains sur le plan économique : le coût de production de recyclage contribuent à hauteur de près d’1 million
de l’électricité correspondante reste maîtrisé. Ceci de tonnes. Au total, l’empreinte carbone de la mobilité
se traduit également par une facture énergétique peut être réduite d’un peu moins de 40 millions de
réduite pour les consommateurs, avec un coût net tonnes par an.
du plein électrique annuel (coût TTC de l’électricité
pour la recharge, diminués des recettes éventuelles
14,4 TWh
de production d’électricité décarbonée « récupérés » pour la recharge des véhicules
économiques
Enjeux
30 €/MWh
Coût complet moyen de production 280 €/an
de l’électricité utilisée pour la recharge Plein électrique moyen pour le consommateur
Émissions
de CO2
-38 MtCO2/an
empreinte carbone évitée
au niveau mondial
30
UN SYSTÈME ÉLECTRIQUE EN MESURE D’ACCUEILLIR LE DÉVELOPPEMENT DU VÉHICULE ÉLECTRIQUE 4
En tenant compte de l’ensemble des mobilités Les orientations contenues dans le projet de PPE
modélisées (véhicules légers, véhicules lourds, conduisent la France à bénéficier d’un produc-
transports en commun), l’électrification du sec- tible d’électricité décarbonée (EnR et nucléaire) de
teur des transports induit une consommation l’ordre de 615 TWh à l’horizon 2035. Dans ce cas
électrique de l’ordre de 40 à 65 TWh à l’horizon de figure, même dans un scénario de fort dévelop-
2035 (contre 13 TWh aujourd’hui, essentiellement pement de la mobilité électrique, la consommation
pour les transports ferrés). Cet accroissement de électrique nationale pourra être largement cou-
consommation est significatif mais ne représente verte, en énergie, par le parc de production fran-
en moyenne que 8 % de la consommation d’élec- çais. Le message du Bilan prévisionnel 2017,
tricité, et au maximum 10 % dans les scénarios obtenu avec le scénario Ampère, est donc
comme Alto (du fait des robots-taxis), Piano (du confirmé dans le cadre du scénario de la PPE
fait de l’augmentation du secteur ferroviaire) ou et d’une représentation affinée de la mobilité.
Forte (déplacements longue distance importants).
L’enjeu de l’intégration de la mobilité électrique
Ce montant est inférieur à la consommation pour ne porte pas sur la capacité du parc de production
le chauffage dans le secteur résidentiel (44 TWh à couvrir l’énergie consommée pour la recharge
aujourd’hui). Un tel volume serait atteint en des véhicules électriques mais sur l’adéquation à
15 ans, ce qui ne constitue pas un rythme inédit (la chaque instant entre la puissance soutirée par les
consommation d’électricité a progressé de 55 TWh véhicules électriques et la puissance produite par
en France entre 2000 et 2010) et devrait intervenir le parc de production.
dans un contexte par ailleurs baissier sur d’autres
postes de consommation.
Figure 8. Consommation électrique annuelle et productible du parc électrique décarboné (EnR et nucléaire) français
à l’horizon 2035, selon les orientations publiques sur l’évolution du parc de production d’électricité
700
70
600 60
500 50
40
TWh
400
30
TWh
300 20
10
200
0
100 Crescendo Crescendo Opera Opera Forte Forte Alto Piano
médian haut médian haut médian haut
0
Productible Consommation Camions et bus électriques Véhicules légers à hydrogène (VH2)
décarboné Véhicules électriques autonomes Véhicules légers hybrides rechargeables (VHR)
Train, RER, métro Véhicules légers tout électriques (VEB)
Les besoins de mobilité longue distance4 repré- (typiquement le samedi du week-end du 15 août
sentent aujourd’hui de l’ordre de 20 % des dis- ou au moment des vacances de Noël). Des appels
tances parcourues. Ils sont très concentrés dans de puissance d’une telle ampleur n’existent que
l’année, notamment pendant les jours de fin de dans les scénarios où se développe fortement la
semaine, en particulier lors des week-ends prolon- mobilité électrique pour la longue distance – ce qui
gés (Pentecôte, Pâques, etc.), lors des départs en n’est pas acquis et ne devrait pas être le « terrain »
vacances scolaires et lors des « chassés-croisés » privilégié de la mobilité électrique, au moins au
de juillet-août. cours des prochaines années – et uniquement dans
l’hypothèse d’un dimensionnement des infrastruc-
Les nouvelles analyses réalisées par RTE montrent tures de recharge sur les axes routiers suffisant
que, dans les scénarios les plus contraints, les pour « passer la pointe de mobilité » (sans assu-
appels de puissance pour les besoins de mobilité rance d’un modèle économique pour les investis
longue distance peuvent représenter jusqu’à plus sements consentis dans des bornes de recharges
de 8 GW lors des jours de plus forts déplacements qui seraient à l’année très peu utilisées).
Figure 9. Puissance soutirée pour les besoins de mobilité longue distance dans le scénario Forte haut
(cumul de la puissance soutirée en itinérance sur les axes routiers et de la puissance soutirée à destination).
Vacances d’été
10
Départ des
Week-end vacances de Noël
9 du 15 août
Week-end et
ponts de mai
8 Week-end
de Pâques Chassé-croisé
juil.-août des
7 vacances d’été
Week-end et pont
du 11 novembre
6
GW
0
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre
32
UN SYSTÈME ÉLECTRIQUE EN MESURE D’ACCUEILLIR LE DÉVELOPPEMENT DU VÉHICULE ÉLECTRIQUE 4
Bien que significatifs, ces appels de puissance d’approvisionnement notamment via la maîtrise de
n’engendrent pas d’inquiétude pour la sécurité l’ensemble des usages électriques à la pointe.
d’approvisionnement. En effet, ils devraient être
concentrés essentiellement sur les périodes où Lors des grands déplacements, seulement 30 %
le système électrique dispose de marges impor- à 40 % (selon l’hypothèse sur l’autonomie des
tantes : période estivale, samedi et dimanche. véhicules) de l’énergie utilisée pour la mobilité
longue distance serait soutirée « en itinérance »
Le point d’attention relevé par l’étude ne sur les grands axes routiers, au milieu des trajets.
concerne pas les « chassés-croisés estivaux », Le reste correspond à des recharges qui peuvent
mais le vendredi de départ des vacances sco- être effectuées avant le départ et après, sur le lieu
laires de Noël, où les trois zones scolaires sont d’arrivée : ces recharges pourront être pilotées et
« synchronisées ». Les appels de puissance pour placées aux moments où le système électrique dis-
les besoins de mobilité longue distance pourraient pose de marges (par exemple au cours de la nuit
atteindre jusqu’à plus de 8 GW et s’avérer potentiel- précédente).
lement contraignants pour le système électrique, en
cas de concomitance avec une vague de froid. La localisation géographique des appels de puis-
sance pour la mobilité longue distance pourra
Dans ces circonstances spécifiques, des moyens toutefois entraîner localement des besoins de ren-
existent pour y remédier et assurer la sécurité forcement des réseaux (transport et distribution).
Le principal enjeu pour le système électrique cor- ruraux, niveaux de revenus, professionnels
respond aux recharges pour répondre aux besoins et flottes d’entreprises, etc.).
de mobilité locale. Celle-ci pèse en effet pour 80%
des distances parcourues par les véhicules actuels A contrario, la capacité des batteries, la fréquence
et le basculement vers le véhicule électrique est de la recharge, la part des véhicules hybrides,
susceptible de concerner prioritairement ce type ou encore la puissance des bornes de recharge,
de mobilité. ont un impact moindre sur le profil des appels de
puissance.
Les profils des appels de puissance dépendront
fortement de la forme que prendra le développe- Dans toutes les configurations étudiées, les
ment de la mobilité. La situation à laquelle fera appels de puissance sans pilotage de la recharge
face le système électrique dépendra ainsi en (« recharge naturelle ») sont principalement concen-
premier lieu de la faculté à recharger le véhi- trés sur la plage 19 h-21 h. Ceci résulte des retours
cule en milieu de journée et en second lieu de à domicile des personnes utilisant leur véhicule
la répartition du développement de la mobi- pour des trajets domicile-travail. Deux autres pics,
lité électrique dans les différentes catégories moins prononcés sont susceptibles d’apparaître
de la population (actifs5/inactifs, citadins/ (i) le matin correspondant à la recharge à l’arrivée
5. Le terme « actif » désigne dans ce rapport les personnes ayant un emploi, et les étudiants.
500
- Puissance médiane des bornes de recharge
- Connexion systématique pour l’essentiel
400 des utilisateurs (85 %)
300 H
ypothèses du scénario Forte
(hors pilotage) :
- Faible accès aux points de charge hors
200
domicile (16 %)
- Puissance haute des bornes de recharge
100 - Connexion systématique pour l’essentiel
des utilisateurs (85 %)
0
00:00 04:00 08:00 12:00 16:00 20:00
- - - - - -
01:00 05:00 09:00 13:00 17:00 21:00
sur le lieu de travail et (ii) le midi, correspon- électrique, la consommation des véhicules élec-
dant au retour à domicile d’utilisateurs inactifs ou triques à 19 h serait plus élevée de 3 GW un jour
d’actifs rentrant déjeuner à domicile. de vague de froid (avec des températures compa-
rables à celles du 8 février 2012, date du maximum
Sans aucun pilotage, ces appels de puissance ont historique de consommation électrique en France)
des caractéristiques peu favorables au système par rapport à un jour tempéré de mi-saison.
électrique. D’une part, ils sont concentrés dans la
journée au moment où le système électrique a le Ceci souligne que ce sont bien les trajets
moins de marges (pointe de consommation du soir, « du quotidien » qui constituent le principal
absence de production photovoltaïque) et, d’autre enjeu pour le système électrique du déve-
part, ils sont thermosensibles, du fait des besoins loppement de la mobilité électrique. Le pilo-
d’énergie pour le chauffage de l’habitacle. Dans tage de ces recharges présente alors un intérêt
un scénario haut de développement de la mobilité évident.
34
UN SYSTÈME ÉLECTRIQUE EN MESURE D’ACCUEILLIR LE DÉVELOPPEMENT DU VÉHICULE ÉLECTRIQUE 4
En France, dans le mix dessiné par la PPE et com- et hebdomadaires de la demande résiduelle
posé essentiellement de moyens EnR et nucléaires, (c’est-à-dire la consommation d’électricité
l’ensemble des solutions de flexibilité permettant française défalquée de la production EnR
de déplacer la consommation électrique sur des fatale) adressée au parc de production pilo-
périodes de forte disponibilité des productions table (parc nucléaire, thermique à flamme et
nucléaire et renouvelable présenteront de l’intérêt hydraulique pilotable).
pour l’équilibrage du système et pour la valorisa-
tion de la production d’électricité décarbonée. L’utilisation du parc de production peut ainsi être
optimisée, en réduisant notamment les périodes
En particulier, le pilotage de la recharge des véhi- où la production renouvelable doit être écrêtée par
cules électriques offre la possibilité de moduler absence de débouchés et en limitant les variations
fortement la courbe de consommation nationale et de production du parc nucléaire. Cette optimisation
de l’adapter à la production des énergies renouve- conduit à moins solliciter les moyens fossiles, voire
lables, tout en respectant les besoins de mobilité des à réduire le besoin de capacité de « back-up » pour
utilisateurs de véhicules électriques. Il permet de assurer la sécurité d’approvisionnement.
réduire fortement les variations journalières
Figure 11. Consommation totale France et consommation diminuée de la production EnR fatale dans différentes configura-
tions de pilotage de la recharge des véhicules électriques, pour un jour ouvré moyen (scénario Crescendo médian 2035)
GW
GW
30 30 30 électrique
totale 20 20 20 Injection
10 10 10 véhicules
0 0 0 électriques
-10 -10 -10 (V2G)
-20 -20 -20
- - -
0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h
80 80 80
70 70 70
60 60 60
50 50 50
Production 40 40 40
GW
fatale
GW
GW
30 30 30
d’énergie 20 20 20
renouvelable 10 10 10
0 0 0
-10 -10 -10
-20 -20 -20
0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h
80
= 80
= 80
=
70 70 70
60 60 60
Consommation
50 50 50
nette adressée
40 40 40
au parc
GW
GW
GW
30 30 30
thermique 20 20 20
et nucléaire 10 10 10
ou aux 0 0 0
importations -10 -10 -10
-20 -20 -20
0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h 0h 2h 4h 6h 8h 10h12h14h16h18h20h22h 0h
L’une des questions récurrentes du débat public Toutefois, même avec ce type de développement
sur le développement du véhicule électrique porte de la mobilité et en tablant sur la trajectoire de
sur la capacité du système à couvrir les appels de développement du scénario Green Constraint de
puissance associés à la recharge des batteries des la Plateforme française automobile (PFA) – avec
véhicules. Cette interrogation concerne en premier 11,7 millions de véhicules en 2035 –, le respect du
lieu la pointe du soir en hiver (autour de 19 h), critère de sécurité d’approvisionnement électrique6
déjà aujourd’hui caractérisée par des appels de est assuré.
puissance importants, et qui pourrait également
concentrer demain un nombre élevé de recharges Ceci s’explique par deux raisons principales :
de véhicules électriques au moment du retour au (i) L’étalement des heures de départ et d’arrivée
domicile de leurs utilisateurs. des véhicules et la diversité des profils d’utili-
sation des véhicules (actifs rentrant ou non le
Le scénario Forte permet d’étudier un cas de figure midi, inactifs, etc.) conduit à un foisonnement
volontairement contraint pour la sécurité d’approvi- naturel des recharges et permet de limiter les
sionnement électrique, dans lequel les utilisateurs pics de consommation associés à la recharge :
auraient peu d’accès à des bornes de recharge en de la même façon qu’aujourd’hui, tous les
dehors du domicile, et où la majorité des recharges foyers n’allument pas leurs fours ou leurs
de véhicules ne seraient pas pilotées. plaques électriques de manière parfaitement
Figure 12. Effet du développement de la mobilité électrique sur les marges du système électrique selon les scénarios
(comparaison avec un scénario sans développement de la mobilité électrique à horizon 2035)
6
Réduction
4 des besoins
en capacités
2 =
Augmentation
des marges
0
GW
-2
Augmentation
des besoins
-4
en capacités
=
-6 Réduction
Zone où le critère public de sécurité d'approvisionnement
n'est pas respecté avec le parc de production considéré des marges
-8
-10
Crescendo Crescendo Opera Opera Forte Forte Alto Piano
médian haut médian haut médian haut
6. L
e critère de sécurité d’approvisionnement électrique défini par les pouvoirs publics ne correspond pas à une absence de défaillance mais à un niveau de
risque de défaillance limité à moins de trois heures par an en espérance. Les analyses présentées dans le Bilan prévisionnel 2018 et dans le rapport d’analyses
complémentaires remis au ministre en avril 2019 détaillent la définition de ce critère.
36
UN SYSTÈME ÉLECTRIQUE EN MESURE D’ACCUEILLIR LE DÉVELOPPEMENT DU VÉHICULE ÉLECTRIQUE 4
synchronisée, la recharge des véhicules élec- Par conséquent, si les ambitions publiques en
triques, même non pilotée, s’étalera naturelle- matière d’évolution du parc de production d’élec-
ment dans le temps. tricité sont suivies, la sécurité d’approvisionne-
(ii)
Le mix de production d’électricité projeté ment pourrait être assurée au niveau du critère
par la PPE présente des marges de capacité actuel, sans nécessiter un développement à
confortables par rapport au critère de sécurité grande échelle du pilotage de la recharge des
d’approvisionnement à horizon 2035, du fait véhicules électriques. La modification à large
notamment du maintien d’un socle nucléaire échelle des habitudes de mobilité, ou l’adop-
important et du développement des EnR et des tion généralisée du pilotage de la recharge,
interconnexions. ne constituent donc pas des prérequis tech-
niques à une forte électrification du parc
Seule la variante haute du scénario Forte, avec automobile.
15,6 millions de véhicules électriques en 2035, est
susceptible de présenter un léger déficit de capacité Ce diagnostic est tributaire d’une réalisation effec-
par rapport au critère de sécurité d’approvisionne- tive du scénario de la PPE (notamment les tra-
ment en cas de développement limité du pilotage. jectoires EnR et les économies d’énergie pour les
Il est possible d’y remédier avec un développement usages spécifiques de l’électricité) et d’un degré
un peu plus important de solutions simples de pilo- minimal de pilotage.
tage de la recharge (55% au lieu de 40%).
7. Le développement massif du vehicle-to-grid pose des défis sur le plan technique (compatibilité des matériels, notamment des bornes de recharge,
fonctionnement de la chaîne de pilotage, effet sur l’usure de la batterie), sur le plan économique (coût des convertisseurs, attentes de revenus par les
utilisateurs et leurs agrégateurs) et sur le plan de l’acceptabilité (perception par les utilisateurs d’un impact sur leurs besoins de mobilité, nécessité d’une
participation plus active de l’utilisateur, perception d’un risque d’usure des batteries prématuré).
38
UN SYSTÈME ÉLECTRIQUE EN MESURE D’ACCUEILLIR LE DÉVELOPPEMENT DU VÉHICULE ÉLECTRIQUE 4
Figure 13. Courbes de charge pour un million de véhicules électriques dans le scénario Crescendo médian,
selon le type de pilotage
1 000 1 000
800 800
600 600
400 400
200 200
MW
MW
0 0
-200 -200
-400 -400
-600 -600
-800 -800
00:00 04:00 08:00 12:00 16:00 20:00 00:00 04:00 08:00 12:00 16:00 20:00
Dans le scénario de la PPE, la France dispose option « sans regret », conduisant à des gains
à l’horizon 2035 d’une capacité de production collectifs à hauteur de près d’un milliard d’euros
décarbonée en nette croissance par rapport à par an.
aujourd’hui (environ 615 TWh – 320 de nucléaire
et 295 d’ENR, contre 505 TWh – 395 de nucléaire 5) La sophistication du pilotage de la recharge entre
et 110 d’EnR aujourd’hui). Les analyses écono- le système et les véhicules permet de capter des
miques témoignent de la forte cohérence éco- gains supplémentaires significatifs, mais plus
nomique entre ce type de transformation du variables selon les scénarios.
mix électrique et le développement la mobilité
électrique. 6)
La participation des véhicules électriques aux
réserves permet en théorie d’aller encore plus
Le rapport permet en premier lieu un chiffrage loin dans l’optimisation, mais devrait demeurer
exhaustif du coût occasionné par le développement un marché de niche et n’a pas de sens à une
de la mobilité électrique sur la production d’électri- large échelle.
cité. Ce chiffrage peut être mis en perspective :
7) La participation ultérieure des batteries à la flexi-
1) Par rapport au coût complet de la mobilité : la bilité du système électrique (via une utilisation
production d’électricité destinée à la recharge des batteries de seconde vie sous forme de stoc-
des véhicules électriques (l’équivalent du carbu- kage stationnaire) conduit à un intérêt écono-
rant) constitue une partie infime du coût total, et mique incertain.
un poste de dépenses très inférieur à l’approvi-
sionnement en produits pétroliers. Ceci montre qu’un développement coordonné de la
mobilité électrique avec le parc de production est un
2) Par rapport au coût complet du mix électrique : la gage d’optimisation et de cohérence de l’ensemble
production d’électricité pour la recharge des véhi- du scénario. Les gains associés se traduisent à
cules électriques ne représente qu’environ 5% différents niveaux. Notamment, une bonne articula-
du coût complet à horizon 2035, et se fait sans tion entre le déploiement de la mobilité électrique et
surcoût par rapport aux évaluations actuelles, qui l’évolution du mix se traduit :
intègrent déjà cette consommation.
8) P
our les finances publiques, par une réduction
3) À niveau équivalent d’électrification, ce poste de des besoins de soutien public au développement
coût est lui-même variable selon les scénarios, des EnR à ambitions inchangées.
et dépend au premier ordre des facteurs étudiés
dans ce rapport, comme le degré de pilotage. 9) Pour les producteurs : par une meilleure stabilité
des prix de l’électricité et la réduction des situa-
Au travers des cinq scénarios étudiés, le rapport tions de prix faibles ou négatifs.
analyse de manière approfondie les opportunités
pour optimiser le coût de la production d’électri- 10) Pour le consommateur : par des recharges au
cité nécessaire pour le véhicule électrique. Ce coût moment où les coûts de l’électricité sont les
peut varier du simple au double selon le degré de plus faibles, avec un gain annuel (avec un pilo-
pilotage : tage simple) de l’ordre de 60 à 170 € par an
(chapitre 6).
4)
Le déploiement généralisé du pilotage de la
recharge, même simple, apparaît comme une
40
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
L’évaluation économique des transformations néces- La nouvelle étude de RTE permet de chiffrer préci-
saires pour décarboner le secteur des transports sément un poste spécifique associé à cette transfor-
fait l’objet d’un nombre croissant de réflexions et mation : le coût annuel de production d’électricité.
d’études – récemment encore avec une publication Ce poste représente une partie du coût d’adapta-
de l’OPECST citant le chiffre de 500 milliards d’euros tion du système électrique, qui lui-même constitue
sur 20 ans pour atteindre l’ambition de mettre fin à une fraction du coût d’ensemble d’un scénario de
la vente de véhicules thermiques d’ici 2040. mobilité.
L’évaluation des coûts associés à un scénario de À horizon 2035, le coût de production d’électricité
transformation pose des questions méthodolo- est estimé à 1 à 2 milliards d’euros par an (voir
giques importantes. Elle nécessite de distinguer : § 5.2 et 5.3) pour un volume de 15,6 millions
uu le coût complet des véhicules à proprement par- de véhicules électriques légers et 156 000 bus
ler (coût initial, coût d’entretien et d’assurance) ; et camions électriques : la production d’élec-
uu le coût des infrastructures de recharge ; tricité constitue donc un poste de coût
uu pour les véhicules thermiques et hybrides très faible dans le coût complet du trans-
rechargeables : les coûts de l’approvisionnement port, très inférieur à celui des carburants
en carburants (pétrole, raffinage, distribution) ; si cette mobilité était faite à partir de véhi-
uu pour les véhicules électriques : le coût de l’adap- cules thermiques. Ce faible coût énergétique,
tation du système électrique, en intégrant les en comparaison au coût associé aux imports de
réseaux (raccordement des infrastructures de carburant pour les véhicules thermiques, est de
recharge et adaptation des réseaux en amont) nature à faciliter la transition vers le véhicule
et la production d’électricité. électrique.
Figure 14. Coûts totaux annualisés pour 15,6 millions de véhicules à l’horizon 2035 selon leur motorisation
70
60
Véhicules
50 Entretien et assurance des véhicules
Infrastructures de recharge
Md€/an
0
Véhicules Véhicules Véhicules Véhicules
thermiques électriques thermiques électriques
(essence) (essence)
42
5.2 … et une faible part des coûts totaux
de production d’électricité à horizon 2035
Même si le poste de coût « production d’électri- rechargeable, généralisation du pilotage, accès aux
cité » représente une faible part du coût complet, points de charge hors domicile, développement de
son optimisation peut être recherchée en activant véhicules autonomes, importance du report modal,
les différents leviers décrits dans les scénarios. etc.) conduisent en effet à des résultats très diffé-
Les différentes configurations de développement rents, selon les différentes métriques.
de la mobilité électrique (part du véhicule hybride
2,0
Hors taxes, hors coûts réseau
1,8
1,6
1,4
1,2
Md€/an
Véhicules légers
1,0 (VP+VUL)
électriques
0,8
(y.c. véhicules
autonomes)
0,6
Bus et camions
0,4 électriques
Renforcement
0,2 transports
ferroviaires
0
Médian Haut Médian Haut Médian Haut
Crescendo Opera Forte Alto Piano
18
14
c€/L de carburant évité
12
10
0
Médian Haut Médian Haut Médian Haut
Crescendo Opera Forte Alto Piano
44
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
Le pilotage de la recharge des véhicules élec- 2017 sont ainsi tous caractérisés – chacun selon
triques permet de placer les recharges pendant une intensité différente – par une augmentation
les périodes où les coûts de production sont les de la fréquence de ce type de situation, et par le
plus faibles. Ceci peut notamment être le cas lors recours croissant à des « écrêtements » de pro-
de périodes de très forte production éolienne (qui duction fatale comme solution pour y faire face.
peuvent survenir de manière aléatoire durant une L’écrêtement consiste en une réduction consentie
semaine), ou de très forte production solaire (en ou imposée de la production renouvelable. Il s’agit
milieu de journée). d’une méthode rationnelle pour gérer les situations
de surabondance de la production, mais une uti-
Aujourd’hui, des épisodes de « surabondance » lisation trop fréquente serait sous-optimale pour
de la production à bas coût peuvent se produire, la collectivité, car elle conduirait à renoncer à une
essentiellement le week-end. Ils se traduisent production « gratuite ».
par une modulation à la baisse importante du
parc nucléaire (avec par exemple une réduction Avec un pilotage de la consommation généralisé
de 10 GW de la puissance produite par le parc le pour les usages qui peuvent l’être (recharge-
week-end du 17 mars 2019) en France, ou par des ment des chauffe-eau, recharge des véhicules),
prix négatifs en Allemagne (par exemple, -80 €/ il est possible d’éviter la plupart de ces situa-
MWh le 21 avril 2019). tions. Ceci permet d’optimiser le fonctionnement
du système électrique en maximisant l’utilisa-
À l’avenir, ce type de situation devrait être plus tion des capacités de production à faible coût
fréquent avec la croissance des énergies renou- variable.
velables. Les scénarios du Bilan prévisionnel
50 Éolien
40 Hydraulique
30 Gaz
20 Bioénergies
10 Nucléaire
0
Samedi Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi
50 Mobilité
40 électrique
30 Consommation
20 hors mobilité
10 électrique
0
Samedi Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi
60 Éolien
Hydraulique
40 Gaz
20 Bioénergies
Nucléaire
0
Samedi Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi
60 Mobilité
électrique
40 Consommation
hors mobilité
20
électrique
0
Samedi Dimanche Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi
46
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
Figure 17. Effet sur les bilans énergétiques du pilotage de la recharge des véhicules électriques à l’horizon 2035
par rapport à une configuration sans pilotage (écart entre la variante 100 % pilotage tarifaire et la variante 100 %
recharge naturelle du scénario Crescendo haut)
5,0
35-200 €/MWh
4,5
4,0
5-10 €/MWh
3,5
3,0
TWh/an
2,5 ~0 €/MWh
55-90 €/MWh
2,0
1,5
1,0 ~0 €/MWh
0,5 France
300-900 €/MWh Europe
0,0
EnR Pertes de Nucléaire Charbon, Gaz Effacements
(augmentation) rendement (augmentation) Lignite et Fioul (réduction) (réduction)
STEP (réduction) (réduction)
Sur le plan technique, les bénéfices se traduisent : Une valeur supplémentaire significative (de
uu à court terme par une réduction des écrête- l’ordre de 0,3 Md€ par an) est possible à par-
ments de production EnR et une moindre modu- tir de dispositifs de pilotage plus sophisti-
lation du parc nucléaire pour cause de manque qués, consistant à adapter chaque semaine, voire
de débouchés ; chaque jour le pilotage de la recharge en fonction
uu à long terme, par un moindre besoin en capaci- des conditions réelles du fonctionnement du mix
tés (évitant le développement ou le maintien de de production. Les solutions techniques requises
capacités de pointe). sont plus complexes : elles peuvent engendrer des
coûts et nécessiter un niveau d’implication plus
Les gains associés sont importants. Avec un important des utilisateurs (par exemple en ren-
développement de 15,6 millions de véhicules seignant leurs habitudes de mobilité à travers une
électriques, le pilotage peut permettre une application sur smartphone).
économie pour la collectivité française de
l’ordre de 0,9 Md€ par an. Enfin, le pilotage des recharges peut également pré-
senter un intérêt important à l’échelle locale. Il aura
Une conclusion importante des travaux est vocation à participer de l’économie des « boucles
que des formes très simples de pilotage suf- locales » en intégrant les différents types d’auto-
fisent pour atteindre ce gain. Elles peuvent consommation, le foisonnement pour limiter les
reposer simplement sur le branchement du véhi- puissances souscrites, et les optimisations de la
cule le week-end et non en semaine pour les boucle locale du réseau par les distributeurs, en inté-
utilisateurs pouvant moduler leur recharge sur grant les travaux pilotés par Enedis et les ELD. Ces
plusieurs jours, ou un asservissement à un signal aspects ne sont pas abordés dans le présent rapport.
tarifaire statique, etc. Le déploiement en cours des
compteurs communicants offre notamment toutes La bonne coordination entre le pilotage national et
les fonctionnalités nécessaires pour mener à bien le pilotage local est importante, et fait l’objet de
ce niveau de pilotage, et capter ainsi l’essentiel des travaux de la part de RTE et d’Enedis.
gains associés.
La recharge réversible (vehicle-to-grid) offre la recharge peut alors être réévalué à hauteur de
possibilité d’aller plus loin dans l’optimisation du l’ordre de 0,6 Md€ par an (si seulement entre
système électrique. Les batteries des véhicules 20 % et 50 % des véhicules sont pilotés).
électriques sont alors utilisées pour stocker de
l’énergie lors des périodes où la production à bas Ces bénéfices doivent être comparés aux coûts :
coût est abondante, et la restituer au système le développement du V2G nécessite en effet des
électrique lorsque la production doit être assurée équipements spécifiques (au sein du véhicule ou
par des moyens plus coûteux. dans la borne) pour assurer la conversion en cou-
rant alternatif de l’énergie de la batterie (produite
Le vehicle-to-grid permet ainsi d’augmenter la en courant continu).
production décarbonée à bas coût (par exemple,
de l’ordre de 3 à 4 TWh par an dans le scénario Sur la base de ces éléments, l’espace économique du
Crescendo). L’enjeu économique, par rapport vehicle-to-grid apparaît largement conditionné (1) au
à une situation où tous les véhicules seraient déploiement préalable de formes simples de recharge
pilotés de manière dynamique mais unique- et (2) aux coûts supplémentaires qu’il engendre. Sur
ment monodirectionnelle, a été chiffré à la base des hypothèses partagées sur l’évolution des
0,2 Md€ par an. coûts engendrés par la recharge réversible, l’arbi-
trage économique entre la valeur apportée au
En revanche, l’enjeu de la recharge réversible peut système économique en fonction du nombre de
être nettement plus important par rapport à une situa- véhicules équipés et le coût des déploiements
tion où seulement une partie des véhicules seraient conduit à envisager un développement signifi-
pilotés de manière monodirectionnelle. Le gain éco- catif (plusieurs millions de véhicules) mais pas
nomique par rapport au pilotage simple de la sur l’intégralité du parc.
Figure 18. Gisement de valeur associée au pilotage dans le scénario Crescendo haut (variantes sur le développement
du pilotage de la recharge, comparées à une situation sans aucun pilotage de la recharge)
1 600 1 600
1 400 1 400
1 200 1 200
Valeur en M€/an
Valeur en M€/an
1 000 1 000
800 800
600 600
400 400
200 200
0 0
40% pilotage 40% pilotage 40% pilotage 100% pilotage 100% pilotage 100% pilotage
tarifaire statique, dynamique, dynamique avec V2G, tarifaire statique dynamique dynamique avec V2G
60% sans pilotage 60% sans pilotage 60% sans pilotage
Coûts d’équipement et de mise en œuvre croissants Coûts d’équipement et de mise en œuvre croissants
48
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
La recharge réversible est susceptible d’en- 100 cycles complets équivalents quand seulement
traîner une usure prématurée des batteries du peu de véhicules offrent cette flexibilité), leur
fait de l’accroissement du nombre de cycles de profondeur est généralement très faible (plus de
stockage-déstockage réalisés. 85% des cycles ont une profondeur inférieure à
30% de la capacité de la batterie), et une grande
Cependant, les analyses menées par RTE partie de la valeur est accessible avec un nombre
conduisent à nuancer ce point : si le nombre limité de cycles, ce qui permet d’envisager sim-
de cycles stockage- déstockage réalisés peut plement de restreindre le nombre de cycles sans
être potentiellement important (jusqu’à près de perte significative de la valeur potentielle.
Pour équilibrer le système électrique au plus Les batteries électrochimiques qui équipent les
proche du temps réel et maintenir la fréquence, véhicules électriques sont parfaitement capables
les gestionnaires de réseau de transport utilisent de respecter les exigences spécifiques pour fournir
des « réserves automatiques » appelées « services ce type de services. Les mécanismes de m arché,
système ». Ces services sont exigeants sur le plan désormais ouverts aux moyens d’effacement et
technique, et impliquent des temps de réaction de de stockage, permettent ainsi aux batteries de
l’ordre de quelques secondes (réserve primaire) ou concurrencer les centrales de production sur ce
quelques minutes (réserve secondaire). segment.
Figure 19. Valeur associée à la participation des véhicules électriques à la constitution des réserves primaire et secondaire
(bénéfices générés pour la collectivité divisés par le nombre de véhicules y contribuant) - scénario Crescendo haut
1 000
900
800
700
€/véhicule/an
600
500
Avec V2G, variante avec
concurrence de 400 MW
400 de batteries stationnaires
Avec V2G, sans concurrence
300 de batteries stationnaires
Sans V2G, variante avec
200 concurrence de 400 MW
de batteries stationnaires
100
Sans V2G, sans concurrence
de batteries stationnaires
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1 000
La croissance prévisible du nombre de véhicules par unité de masse). Dans ce cas de figure, les
électriques doit conduire à préparer le retraitement batteries sont alors installées et connectées au
massif des batteries utilisées, une fois que leurs réseau, et réalisent des injections et des souti-
performances ne sont plus compatibles avec un rages de la même façon qu’une STEP. Cette solu-
usage « mobilité ». tion implique des coûts de reconditionnement
non négligeables, mais les batteries recondition-
Deux options principales sont aujourd’hui envisa- nées resteront moins chères que des batteries
gées pour traiter cette question. neuves (à capacité de stockage identique).
uu La première consiste à recycler les matériaux Avec les niveaux de développement de la mobi-
et à les réutiliser, notamment pour fabriquer de lité électrique considérés dans les différents scé-
nouvelles cellules pour les batteries des futurs narios, des volumes significatifs de batteries en
véhicules électriques. fin de vie devraient être traités à l’horizon 2035-
2045. Les capacités résiduelles de stockage
uu La seconde solution, envisagée par certains d’énergie des cellules pourraient représenter des
constructeurs automobiles, consiste à recondi- volumes importants, même si leur durée de vie
tionner les batteries usagées des véhicules résiduelle est aujourd’hui mal connue. À cet hori-
électriques pour un usage stationnaire (moins zon et sur la base des scénarios actuels (PPE, ou
exigeant en capacité de stockage énergétique scénarios de type Ampère ou Volt), les besoins
50
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
Figure 20. Évolution du stock de batteries de seconde vie potentiellement utilisables dans le scénario haut
de développement de la mobilité électrique (en l’absence de retraitement et de recyclage, avec une hypothèse
de durée de première vie de la batterie de 15 ans et une capacité résiduelle moyenne de 65 % sur cinq années
d’utilisation en seconde vie)
15,6 millions
de VE en
circulation
8,3 millions
de VE en
circulation
2040
2035
2,7 millions
de VE en 2030
circulation
Stock potentiel
2025 Stock potentiel de 2 millions
de 400 000 de batteries de
Stock potentiel de batteries de seconde vie
de 75 000 seconde vie
~60 GWh
batteries de ~10 GWh
seconde vie
Stock marginal ~1 GWh
de batteries de
seconde vie
~0 GWh
Figure 21. Coûts annualisés et revenus de marché des batteries de seconde vie à horizon 2035
(scénario Crescendo médian) selon le volume de stockage disponible (6 GWh avec une hypothèse de
durée de vie initiale de 15 ans, 36 GWh avec une hypothèse de durée de vie initiale de 10 ans)
80
k€/MW/an
60
40 R
evenus sur les marchés en 2035
C
oût annualisé en 2035 pour
une batterie de seconde vie
20 (reconditionnée) par MW pour
une durée de stock de 2 heures
(hypothèse étude ADEME PEPS4)
0
0 5 GW / 10 GWh 10 GW / 20 GWh 15 GW / 30 GWh 20 GW / 40 GWh
Capacité de stockage
Les filières EnR et nucléaire ont comme point com- D’une part, le développement de la mobilité élec-
mun d’être caractérisées par des coûts fixes impor- trique en tant que telle contribue à l’équilibre éco-
tants, mais des coûts variables très faibles voire nuls, nomique du scénario de la PPE. Il permet en effet
et d’être donc compétitives sur le marché de l’électri- de tirer parti (1) des marges de production assu-
cité européen. Sauf dans certains cas de saturation rées par le développement du parc, et (2) d’utiliser
du marché conduisant à ne pas utiliser du productible le productible décarboné pour réduire les émis-
décarboné disponible, la production EnR et nucléaire sions du secteur des transports.
française peut être exportée sur le marché européen.
D’autre part, le développement du pilotage amé-
Toutefois, les analyses menées par RTE montrent liore cette intégration, en faisant mieux corres-
qu’en cas de retard sur le développement des inter- pondre les soutirages avec les périodes de forte
connexions ou des nouveaux usages électriques, le production. Il a donc pour effet de réduire à la fois
haut niveau de production d’électricité décarbonée les occurrences de prix bas mais aussi les occur-
disponible en France pourrait conduire à des situa- rences de prix haut (la charge en période de forte
tions de prix bas. Ce type de situation pourrait par consommation étant plus limitée). Ceci permet de
suite entraîner des problèmes de rentabilité pour réduire l’appel aux moyens thermiques, en France,
certains moyens de production (nucléaire et cen- mais surtout dans les pays voisins – le fonction-
trales à gaz) et conduirait à un niveau de soutien nement du système électrique obéissant à une
public important pour les énergies renouvelables. logique européenne et non nationale.
Les conclusions de ce rapport mettent en lumière Cette intégration vertueuse se traduit selon diffé-
deux effets importants. rents indicateurs.
52
L’ANALYSE ÉCONOMIQUE À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME ÉLECTRIQUE 5
Figure 22. Coûts complets et revenus de marché des installations photovoltaïques au sol à l’horizon 2035
dans les différents scénarios de développement de la mobilité électrique et avec le mix électrique de la PPE
50
45 Exemple : économie
de 400 M€ par an
Complément dans le scénario
40 à couvrir Piano par rapport
par les au scénario Forte
35 subventions pour le financement
publiques de la production
30
photvoltaïque (environ
€/MWh
15
10
Revenus
5 de marché
C
oût complet
0
Sans Crescendo Opera Forte Alto Piano
développement haut haut haut
de la mobilité
Vis-à-vis des producteurs inchangés, à réduire les soutiens publics pour cer-
taines filières.
Dans le scénario de la PPE, les prix sur les marchés
de l’électricité pourront s’établir à des niveaux La mobilité électrique contribue donc, au même
faibles sur des durées annuelles significatives. Si la titre que les autres transferts d’usage vers l’élec-
quantification précise des prix durant ces périodes tricité et le développement des interconnexions,
est un exercice délicat (elle dépend de nombreux à limiter le coût public du soutien aux EnR et à
« petits » paramètres, et très largement de l’évo permettre la viabilité économique des différentes
lution des parcs électriques dans les pays voisins), filières de production d’électricité et à la rendre
les analyses existantes soulignent que, dès 2025, moins dépendante des choix des pays voisins (sur
ce type de situation pourrait devenir beaucoup plus leur parc de production, sur l’acceptabilité de pro-
fréquent. À titre d’exemple, en croisant le scénario jets d’interconnexion).
de la PPE (pour le mix électrique) avec un scéna-
rio de type Forte haut pour la mobilité, les prix Avec les ambitions sur l’évolution du mix de pro-
pourraient être inférieurs à 20 €/MWh pendant
duction, le développement de la mobilité élec-
20 % du temps. trique (dans une configuration à 15,6 millions de
véhicules) conduit à réduire le coût de soutien
Une généralisation du pilotage est susceptible d’en- public au développement du photovoltaïque et
traîner un rééquilibrage important. En considérant de l’éolien d’environ 1,8 à 2,3 Md€ par an. Cette
80 % de pilotage (scénario Opera) au lieu de 40 % réduction du coût public provient d’une part de
(scénario Forte), les périodes pendant lesquels les l’effet du développement de la mobilité électrique
prix sont très bas (inférieurs à 20 €/MWh) seraient (consommation supplémentaire) et d’autre part de
réduites de 400 heures par an. l’effet du pilotage de la recharge (déplacement de
consommation).
54
POUR LE CONSOMMATEUR, UN COÛT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE QUI PEUT ÊTRE MAÎTRISÉ 6
La part relative à l’énergie consommée dans le au coût du « plein essence annuel » même
coût total de détention d’un véhicule est beau- en l’absence d’optimisation de la recharge
coup plus faible pour les véhicules électriques du véhicule et sans tenir compte d’une éven-
que pour les véhicules thermiques : cela tient à la tuelle hausse sur la fiscalité carbone associée
moindre consommation énergétique des véhicules aux produits pétroliers.
électriques (meilleur rendement de la motorisa-
tion) et à un coût TTC de l’énergie électrique plus Le transfert de l’usage « mobilité » vers l’électri-
faible. Cependant, la consommation d’électricité cité permet donc de réduire fortement la facture
représente quand même un montant significa- énergétique des automobilistes. Cette réduction
tif, typiquement de l’ordre de 5 à 10 % du coût de facture énergétique peut être en partie com-
total de détention d’un véhicule électrique sur sa pensée par un surcoût à l’achat du véhicule élec-
durée de vie (contre une part de la consomma- trique (aujourd’hui en partie réduit par les primes
tion de carburant d’environ 30 % pour un véhicule à la conversion et les subventions), même si à long
thermique). terme les différences de prix entre les véhicules
thermiques et électriques devraient progressi
Le coût du « plein électrique annuel » est vement se réduire, notamment avec la baisse
dès aujourd’hui environ trois fois inférieur attendue des coûts des batteries.
Figure 23. Comparaison des coûts totaux de détention sur la durée de vie entre un véhicule essence et électrique
(citadine de catégorie A, basé sur une comparaison entre Renault Clio 5 zen essence et Renault Zoe life 41 kWh)
60 000
Coût total sur la durée de vie,
50 000
actualisation de 5% (en €)
40 000
30 000
Achat du véhicule
20 000 Bonus écologique et prime
à la conversion
10 000 Borne de recharge à domicile
Assurance
Entretien
0
Essence
Électricité (en heures creuses)
-10 000
Coût total de détention (TCO)
-20 000
Citadine essence Citadine électrique
L’optimisation du placement de la recharge des son véhicule pour des trajets domicile-travail avec
véhicules électriques conduit à des économies pour ou sans retour à domicile le midi, actif utilisant son
le consommateur sur sa facture d’électricité. Ces véhicule pour des trajets professionnels, personne
économies de facture dépendent évidemment du en situation d’inactivité, etc.
profil de l’utilisateur, notamment du nombre de
kilomètres parcourus, mais également de la flexibi- En l’absence totale de pilotage, la recharge du véhi-
lité dont il dispose sur la recharge de son véhicule. cule électrique coûte typiquement de l’ordre de
400 € par an, pour un véhicule de taille moyenne, ne
L’étude explore les gains potentiels pour plusieurs se rechargeant qu’à domicile : l’essentiel de l’éner-
profils d’utilisateurs choisis pour être représenta- gie soutirée se situe lors des périodes où les tarifs
tifs de différents comportements de mobilité qui de détail sont les plus élevés. C’est notamment le
émergent de l’enquête transport : actif utilisant cas pour un actif qui rentre le soir à domicile après
Figure 24. Placement de la recharge sur une semaine dans différents modes de pilotage, pour un utilisateur actif
se rechargeant uniquement à domicile
Recharge naturelle
8
5
kW
3 Consommation
hors véhicule
2 électrique
Recharge
1 du véhicule
électrique
0
Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Dimanche
5
kW
3 Consommation
hors véhicule
2 électrique
Recharge
1 du véhicule
électrique
0
Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Dimanche
56
POUR LE CONSOMMATEUR, UN COÛT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE QUI PEUT ÊTRE MAÎTRISÉ 6
une journée de travail, et met immédiatement son Figure 25. Placement de la recharge sur les différentes
véhicule en charge, aux heures où les prix/tarifs de plages tarifaires en fonction du mode de pilotage, pour
un actif réalisant un aller-retour vers le lieu de travail
détail sont les plus élevés. sur la journée, sans retour méridien au domicile
kWh/an
prix de détail sont les plus bas. Il en résulte une 1 500
La recharge réversible peut permettre aux utili- L’intérêt du vehicle-to-home pour l’utilisateur est
sateurs de véhicules électriques de recharger leur très dépendant de ses habitudes de mobilité et de
batterie pendant les heures où leur tarif de souti- la consommation électrique de ses autres usages.
rage est le moins élevé, en vue d’une restitution Il est notamment tributaire de la présence du véhi-
ultérieure. Cette restitution peut prendre diffé- cule au domicile à la fois (i) pour injecter pendant
rentes formes : les périodes de consommation des autres usages
uu elle peut être destinée à couvrir tout ou partie et où les tarifs sont élevés et (ii) pour soutirer
de la consommation des autres usages du foyer pendant les périodes où les tarifs sont faibles.
pendant les périodes où le tarif est plus élevé, L’économie supplémentaire pour l’utilisateur peut
sans injection nette sur le réseau public d’élec- varier fortement, entre 20 € et 100 € par an pour
tricité (on parle de vehicle-to-home). La déten- les profils étudiés (hors profils ayant accès à une
tion d’un véhicule électrique revient alors, pour borne de recharge avec un tarif préférentiel sur le
un foyer, à disposer d’une solution de stockage lieu de travail).
interne, qui peut être mise au service d’une
meilleure gestion de la consommation du foyer ; L’intérêt du vehicle-to-grid pour des arbitrages
uu elle peut être réinjectée sur le réseau public sur les marchés de l’énergie est aujourd’hui réduit
d’électricité (on parle de vehicle-to-grid). Ceci pour les consommateurs (voir évaluations dans le
revient à mutualiser les solutions de stockage rapport complet). Ceci tient à la structure de tarif
individuelles à l’échelle de tout le réseau, selon TTC de détail : alors que l’énergie soutirée est
la même logique que pour les installations de valorisée au tarif TTC de l’énergie (intégrant la
production « classiques ». part proportionnelle à l’énergie des taxes et du
8 8 8
Heures Heures Heures Heures Heures Heures
creuses de pointe creuses de pointe creuses de pointe
6 6 6
4 4 4
kW
kW
kW
2 2 2
0 0 0
-2 -2 -2
-4 -4 -4
58
POUR LE CONSOMMATEUR, UN COÛT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE QUI PEUT ÊTRE MAÎTRISÉ 6
Figure 27. Coût du plein annuel pour un automobiliste (actif réalisant un aller-retour vers le lieu de travail
sur la journée et réalisant 14 000 km par an) selon le mode de pilotage de la recharge
4 6
1
1 400 Gains Gains
1 240 Plein supplémentaires importants en
2 5
électrique liés à la fonction cas de fourniture
1 200 3
~3 fois moins bidirectionnelle : bidirectionnelle de
Gains mode vehicle-to-home Gains services système,
Coût total TTC (en €/an)
cher que le
1 000 importants Gains pour déplacer additionnels avec les niveaux de
plein essence
apportés par additionnels la consommation en cas de rémunération actuels,
800 le pilotage liés à la maîtrise du foyer d’heures réinjection sur sans développement
tarifaire de la puissance pleines à heures le réseau, en mode de concurrence par
600 souscrite creuses vehicle-to-grid d’autres utilisateurs
420 (très optimiste)
400 280 280 250 240 -10
200
-200
-400
Recharge Pilotage Pilotage tarifaire Vehicle-to-home Vehicle-to-grid Vehicle-to-grid
naturelle tarifaire avec gestion de et services système
la puissance souscrite
Dépenses d’essence Facture TTC d’électricité (part puissance) Facture TTC d’électricité (part énergie)
Revenus sur les marchés Coût annuel net de la recharge
1 400
1 100
1 200
Coût total TTC (en €/an)
1 000
800
600
390
400 250 210
150 140
200
-200
-400
Recharge Pilotage Pilotage tarifaire Vehicle-to-home Vehicle-to-grid
naturelle tarifaire avec gestion de
la puissance souscrite
Dépenses d’essence Facture TTC d’électricité (part puissance) Facture TTC d’électricité (part énergie)
Revenus sur les marchés Coût annuel net de la recharge
La baisse engagée des coûts des panneaux photo- laquelle des modèles combinant détention d’un
voltaïques ces dernières années conduit à un inté- véhicule électrique et autoconsommation solaire
rêt croissant pour la généralisation de solutions peuvent présenter un intérêt pour le consomma-
d’autoconsommation, basées sur l’installation de teur. Cela nécessite que ces derniers puissent pla-
modules solaires sur toiture. Bien que toujours cer la recharge de leur véhicule lors des périodes
modeste, le nombre d’installations de ce type8 est de production photovoltaïque et ainsi maximiser
désormais en augmentation rapide. Les analyses le taux d’autoconsommation et donc la rentabilité
publiées par RTE dans le Bilan prévisionnel 2017 associée. L’intérêt dépend donc du profil d’utilisa-
ont permis d’identifier que le développement de tion du véhicule, et notamment de sa présence au
l’autoconsommation résidentielle individuelle pour- domicile lors des périodes de production solaire.
rait concerner plusieurs millions de foyers d’ici une Pour certains utilisateurs, l’intérêt est plus marqué
quinzaine d’années, et ont mis en avant les diffé s’ils peuvent mettre en place une solution de type
rents facteurs pouvant amplifier ou au contraire vehicle-to-home.
atténuer le développement de cette forme de
production. Par rapport à un scénario de référence, le dévelop-
pement de la mobilité électrique est ainsi suscep-
Le couplage de l’achat d’un véhicule électrique tible d’augmenter la puissance solaire installée en
avec la mise en place de panneaux photovol- autoconsommation de l’ordre de 1 à 2 GW. L’impact
taïques sur toiture est susceptible d’apparaître dépend du niveau de développement de la mobilité
séduisant d’un point de vue environnemental et électrique, de la répartition de cette mobilité au
de répondre ainsi à une appétence sociétale. Les sein des différentes catégories de la population et
analyses économiques confirment l’intuition selon du développement du pilotage vehicle-to-home.
60
POUR LE CONSOMMATEUR, UN COÛT DE LA MOBILITÉ ÉLECTRIQUE QUI PEUT ÊTRE MAÎTRISÉ 6
Figure 28. Influence du pilotage de la recharge du véhicule électrique sur les taux d’autoconsommation
(Scénario Crescendo, horizon 2035)
Avec VE
Avec VE Avec VE
Sans VE recharge pilotée
recharge naturelle recharge pilotée
et V2H
100%
90%
Taux d'autoconsommation
90%
86%
80%
75% 75%
Actif sans
60% retour méridien
au domicile
Inactif
50%
Le développement du véhicule électrique constitue 5) La réduction de la taille des batteries (par exemple
l’un des principaux leviers, activable dès aujourd’hui, dans le scénario Piano) et l’augmentation du taux
pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. de recyclage (85 % au lieu de 50 %) améliorent
En intégrant l’analyse du cycle de vie, l’étude per- encore la performance environnementale, et
met une analyse poussée de l’empreinte carbone dégagent de l’ordre de 1 à 2 MtCO2eq par an.
dans chaque scénario et de l’influence des différents
paramètres. 6)
L’effet d’un pilotage généralisé de la recharge
est très net : un gain de 5 MtCO2eq par an est
1) L’utilisation d’un véhicule électrique, en France, à la clé. Ces réductions seraient très majoritai-
ne conduit à presque aucune émission de CO2 : rement enregistrées dans les pays voisins de la
par rapport à un véhicule thermique, les émis- France, via une moindre utilisation de leur parc
thermique.
sions sont diminuées d’un facteur 20. Ceci est
dû à la structure du mix électrique français très
7) Le renforcement des transports en commun et le
largement décarboné. recours aux mobilités douces améliorent systé-
matiquement la performance environnementale
2)
Aujourd’hui, la France est fortement exporta-
(7 MtCO2eq par an à eux deux).
trice d’électricité, et ces exports se substituent
à des productions fossiles dans les pays voisins. 8) L’étude met en avant un bilan carbone contrasté
À parc électrique inchangé, augmenter la part de pour le véhicule autonome dans le scénario Alto,
l’électricité dans les transports en France entre son effet sur la réduction du parc automobile
en concurrence avec la réduction des émissions pouvant être compensé par le mode d’utilisa-
du parc électrique dans certains pays européens. tion envisagé (nombreux trajets à vide pour les
L’analyse menée à montre que l’effet le plus robots-taxis) et ses caractéristiques (batteries
important sur les émissions est obtenu en électri- importantes, électronique embarquée, etc.). Ceci
fiant le secteur de la mobilité – cet arbitrage étant invite à identifier les modes de déploiement et
de plus en plus vrai à mesure que les pays voi- d’articulation avec les transports en commun les
sins de la France poursuivront la décarbonation plus efficaces pour le véhicule autonome partagé.
de leur parc électrique.
Ces résultats sont enfin restitués dans la perspective
3) Le net avantage du véhicule électrique, sur le plus large de la politique énergétique et environ
plan des émissions, demeure attesté même en nementale :
intégrant l’ensemble du cycle de vie, y compris
dans le cas de batteries fabriquées en Chine uti- 9) La promotion de solutions décarbonées pour le
transport individuel nécessite aujourd’hui un
lisant de l’électricité carbonée dans leur proces-
soutien public important, qui s’exprime notam-
sus de fabrication, dans les scénarios les plus
ment via différentes aides à l’acquisition d’un
contraints comme Forte et Alto. Un gain mini-
véhicule électrique. L’étude montre que le niveau
mal de 18 MtCO2eq par an est ainsi atteignable à
de soutien requis pourrait décroître à moyen
horizon 2035. terme et s’établir à moyen terme nettement en
dessous de la valeur tutélaire du carbone.
L’étude met en avant les différents leviers activables
pour réduire encore l’empreinte carbone : 10)
Les leviers présentés dans le scénario Piano
permettent également de limiter les besoins
4) La fabrication des batteries en France permettrait d’approvisionnement en métaux rares, qui
de réduire l’empreinte globale des transports de soulèvent des enjeux environnementaux et
2 à 3 MtCO2eq par an malgré une légère aug- éthiques significatifs aujourd’hui.
mentation des émissions du secteur industriel
en France, du fait du faible contenu carbone de
l’électricité française.
62
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
En France, la production d’électricité est déjà très Cette configuration est particulièrement favorable
largement décarbonée. En 2018, les émissions à la bascule vers l’électricité pour la mobilité, même
associées au secteur électrique se sont élevées à en tenant compte de la baisse significative de la
20,4 millions de tonnes de CO2, contre par exemple consommation des véhicules thermiques, projetée
274 millions en Allemagne, 68 millions au Royaume- au cours des prochaines années.
Uni, ou 93 millions en Italie. Ramenées à la popula-
tion, les émissions du secteur électrique en France Sur l’ensemble de la période 2020-2035,
sont parmi les plus faibles au monde, seuls des pays l’électrification de 15,6 millions de véhicules
comme la Norvège (production d’électricité presque électriques permet ainsi d’éviter entre 150 et
entièrement hydraulique) ou la Suisse (nucléaire et 200 millions de tonnes de CO2 issues de la
hydraulique) étant comparables. combustion de carburants (émissions « au
pot d’échappement »).
Les orientations de la PPE vont conduire à amélio-
rer encore cette performance. Avec la fermeture Ce résultat, cohérent avec les principales études
des centrales au charbon, prévue pour 2022, un existantes sur le sujet, découle bien de la nature
gain d’environ 7 millions de tonnes est attendu. du mix électrique en France. Projeté sur un mix
À compter de 2022, la croissance des éner- utilisant comme combustible principal le charbon
gies renouvelables devrait également conduire en partie importante (Allemagne) ou en quasi-
à réduire les durées de fonctionnement des cen- totalité (Pologne), l’électrification de la mobilité
trales à gaz. Dans les scénarios Ampère, Volt ou n’a pas d’influence aussi positive sur les émissions
PPE, le système électrique atteint vers 2030-2035 de CO2.
des niveaux d’émissions extrêmement faibles, de
l’ordre de 10 millions de tonnes par an.
Figure 29. Émissions de gaz à effet de serre annuelles associées à l’énergie consommée par les véhicules en phase
d’usage (émissions directes au pot d’échappement et cycle de vie des carburants pour les véhicules thermiques,
émissions de la production d’électricité pour les véhicules électriques) pour un véhicule parcourant 14 000 km par an
3,0
2,5
2,0
tCO2eq/an
Production d’électricité
1,5 Émissions du cycle amont
du carburant (extraction,
1,0 raffinage, distribution)
Émissions au pot
0,5 d’échappement
(combustion du carburant)
0,0
France Allemagne Pologne France
Véhicule Véhicule électrique Véhicule Véhicule
thermique thermique électrique
(essence) (essence) (scénario
Forte haut
avec mix du
scénario PPE)
2018 2035
Le développement d’un nouvel usage de l’électri- développement d’un nouvel usage – la mobilité
cité, comme le véhicule électrique, a un effet sur le électrique – entre en concurrence avec les exports
fonctionnement du système électrique français et d’électricité vers les pays voisins, ce qui se traduit
européen et sur les émissions associées. par un surcroît d’émissions dans les pays fronta-
liers pour produire de l’électricité.
L’évaluation de l’effet soulève des questions métho-
dologiques d’affectation des émissions totales d’un La France est en effet aujourd’hui le premier expor-
mix de production aux différents usages de l’élec- tateur d’électricité en Europe (60 TWh en 2018),
tricité. Plusieurs approches ont été testées : dans et ces exports contribuent fortement à la réduc-
tous les cas, les émissions du parc de production tion des émissions à l’échelle de tout le continent
en France engendrées par le développement de la puisque l’électricité exportée se substitue à des
mobilité électrique sont infimes (elles dépassent productions fossiles (si toute la production expor-
à peine 1 MtCO2 par an, même dans la variante tée par la France était assurée par des centrales
haute du scénario Forte). à gaz plutôt que par le mix français, elle condui-
rait à des émissions supplémentaires de près de
En revanche, l’effet sur les émissions du système 22 MtCO2 par an). Les simulations de RTE, détail-
électrique européen peut être plus contrasté. lées au cours de l’année 2018 avec la parution
En raisonnant à parc électrique inchangé, le d’analyses dédiées, montrent que ces caractéris-
tiques devraient se renforcer, avec une croissance
du solde exportateur – dans le scénario de la PPE
Figure 30. Émissions de CO2 évitées par la production comme dans les scénarios Volt et Ampère.
d’1 MWh d’électricité décarboné en France selon son
utilisation (année de référence 2035)
Le nouveau rapport permet de mettre en regard
ces deux effets (utilisation de la base décarbonée
0,8 pour réduire les émissions du secteur des trans-
0,7 ports en France ou de la production d’électricité
0,6 dans les pays voisins) et d’adopter une approche
0,5 basée sur l’« empreinte carbone ».
tCO2eq
0,4
0,3
Ces analyses montrent sans ambiguïté que
0,2
les émissions évitées par l’électrification des
0,1
0,0
transports en France sont plus importantes
Électrification de Export, permettant d'éviter que celles qui auraient pu être évitées si
la mobilité (hypothèse de la production d'électricité
scénario Crescendo haut) carbonée à l'étranger cette même électricité décarbonée avait
(hypothèse scénario PPE 2035)
été disponible pour l’export et la réduction
de la production d’électricité carbonée hors
Émissions évitées sur la production d’électricité des pays voisins de France. Ce résultat est vrai dans tous les
Émissions évitées sur le cycle amont du carburant (extraction,
raffinage, distribution) scénarios, y compris dans la configuration
Émissions évitées au pot d’échappement (combustion du carburant)
du scénario Forte.
64
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
Les études existantes comparant le cycle de vie des de vie, soit un niveau très inférieur à l’utilisation
véhicules thermiques et électriques (par exemple moyenne d’un véhicule en France (200 000 km sur
l’étude récente de la FNH9) concordent sur les sa durée de vie).
grandes lignes de l’analyse environnementale de la
mobilité électrique. Elles soulignent qu’un véhicule Dans des conditions standards, les gains sur les
électrique présente un intérêt en termes d’em- émissions nationales ne sont pas compensés
preinte carbone par rapport à un véhicule ther- par un surcroît d’émission à l’étranger du fait
mique à condition que les émissions évitées lors de de la production des batteries, même si ces
la phase d’utilisation compensent l’impact carbone dernières sont produites dans des pays où la
de la fabrication des batteries. production d’énergie utilise très majoritaire-
ment du charbon. Selon la capacité de la batte-
Ces études montrent ainsi que, du fait du faible rie, le lieu de fabrication, le taux de recyclage
contenu carbone du mix en France, l’électrification et l’horizon considéré, le véhicule électrique a
des véhicules présente un intérêt en matière d’em- une empreinte carbone 2 à 4 fois moindre que
preinte carbone dès lors qu’un véhicule parcourt celle d’un véhicule thermique (selon les modèles
plus de 30 000 à 50 000 kilomètres sur sa durée comparés et l’horizon considéré).
Figure 31. Décomposition des effets de l’électrification sur les émissions de gaz à effet de serre associées au secteur
des transports terrestres (scénario Forte haut – année 2035)
100
80
Carburant
Électricité Électricité Amont Cycle de vie
60 carburant Cycle de vie des batteries
des véhicules
40
20
0
Empreinte Émissions Émissions Émissions à Émissions Émissions du Émissions du Émissions du Empreinte
carbone des directes « au pot directes en l'étranger du amont cycle de vie cycle de vie cycle de vie carbone après
transports d’échappement » France liées cycle de vie de du cycle du des véhicules des véhicules des batteries électrification
routiers sans à la production la production carburant thermiques électriques des véhicules du parc
électrification d’électricité d'électricité (hors phase hors batterie électriques
(prend en compte usage) (hors phase
l'amélioration des usage)
performances des
véhicules thermiques)
9. Fondation pour la nature et l’Homme – Le véhicule électrique dans la transition écologique en France (2018)
45
40
35
30
tCO2eq
25
20
15
10
0
Véhicule Véhicule Véhicule Véhicule Véhicule Véhicule Véhicule Véhicule
essence électrique électrique électrique essence électrique électrique électrique
- - - - - -
mix électrique mix électrique mix électrique mix électrique mix électrique mix électrique
décarboné gaz charbon décarboné gaz charbon
(France) (France)
Véhicule parcourant 50 000 km sur sa durée de vie Véhicule parcourant 200 000 km sur sa durée de vie
Émissions liées au cycle de vie des véhicules Émissions liées au cycle de vie de la production
Émissions liées au cycle de vie des batteries d’électricité
(en tenant compte d’un taux de recyclage de 50%) Émissions liées au cycle de vie du carburant pétrolier
Le nouveau rapport permet d’apporter une vision La réduction de l’empreinte carbone est systéma-
consolidée à la maille du parc (y compris en inté- tique, même dans des scénarios où les paramètres
grant les bus et les poids lourds), en comparant les ne sont pas les plus favorables aux émissions de
différents scénarios étudiés (via les variantes sur gaz à effet de serre, comme dans le scénario Forte
le pilotage des recharges, la capacité des batte- (batteries de grande capacité, fabriquées en Asie,
ries, la localisation de leur fabrication et leur taux taux de recyclage limité, développement très limité
de recyclage), et en intégrant de façon détaillée du pilotage de la recharge).
les effets sur le mix électrique européen (via une
simulation des imports/exports d’électricité entre D’autre part, ce résultat demeure également
zones). vrai pour l’électrification des véhicules lourds
(bus et camions). L’enjeu concernant ce secteur
Ces analyses permettent de dresser une analyse est significatif (la mobilité routière lourde repré-
exhaustive, à l’échelle du parc total de véhicules, sente environ 30 MtCO2 par an), même si l’élec-
de l’empreinte totale sur les émissions de gaz à trification de ce secteur devrait être plus lente et
effet de serre des transports terrestres. partielle que pour la mobilité légère.
Elles conduisent à des résultats très nets. Ceci ne doit pas néanmoins masquer que le véhicule
électrique n’a pas une empreinte carbone nulle.
D’une part, l’électrification de la mobilité légère L’étude permet de tester l’influence de différents
constitue bien un levier puissant de réduction paramètres clés de la mobilité sur les émissions
de l’empreinte carbone des transports, quelle et d’identifier les différents leviers permettant de
que soit ses modalités de développement. gérer et de réduire encore cet impact.
66
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
Les différentes hypothèses testées dans l’étude 2 à 3 MtCO2 par an (selon l’hypothèse sur la capa-
permettent de rendre compte des enjeux de locali- cité des batteries), pour un parc de 15,6 millions de
sation de la fabrication des batteries pour la réduc- véhicules électriques. Cette évaluation intègre une
tion de l’empreinte carbone. très légère augmentation des émissions nationales
liées à la consommation d’électricité pour la fabrica-
La production des batteries s’effectue aujourd’hui tion des batteries (de moins de 0,3 MtCO2 par an).
très majoritairement en Asie (les 10 plus gros fabri-
cants de cellules lithium-ion sont tous asiatiques), Sur l’ensemble de la chaîne de valeur du véhicule
dans des pays où la production d’électricité utilise électrique, une bascule vers la mobilité électrique
majoritairement ou principalement le charbon et est accompagnée de politiques volontaristes pour la
donc fortement émettrice de gaz à effet de serre. localisation de la production des batteries condui-
rait donc à un « double dividende » climatique :
Si l’analyse restituée au § 7.3 montre que les réduc- uu non seulement les émissions en France seraient
tions d’émissions liées à la bascule vers la mobilité réduites d’une vingtaine de millions de tonnes
électrique dans un pays comme la France sur- de CO2 par an en se passant des produits pétro-
passent largement les émissions supplémentaires liers (en fonction des scénarios) ;
résultant de la production de batteries en Asie, il uu mais en plus l’empreinte du véhicule électrique
demeure qu’un levier d’optimisation pour réduire les serait améliorée de 2 à 3 MtCO2 par an, en
émissions de l’ensemble du cycle consiste à locali- déplaçant la production de batteries vers une
ser la fabrication des batteries dans un pays où la production d’électricité quasi décarbonée.
production d’électricité est largement décarbonée.
Ce type de politique industrielle apparaîtrait par-
Au-delà des considérations stratégiques qui ticulièrement adapté au mix issu du projet de
peuvent y être associées, la production de PPE, potentiellement caractérisé par de nom-
batteries dans un pays comme la France per- breux épisodes de prix faibles sur les marchés de
mettrait de réduire les émissions de l’ordre de l’électricité.
Figure 33. Analyse de cycle de vie d’une batterie actuelle de 40 kWh selon le lieu de fabrication
(hors prise en compte du recyclage)
10
9
8
Levier CO2 n° 1 :
7
fabrication
6
des batteries
tCO2eq
5 en France
4
3
2
1
0
Fabrication Fabrication Fabrication Fabrication
en Corée du Sud en Chine en Pologne en France
Aujourd’hui, un effort important est consacré, par Or, pour un véhicule parcourant essentiellement
les constructeurs et fabricants de batteries, à aug- des distances limitées (de l’ordre de 35 à 40 km
menter la capacité des batteries (en kWh d’énergie par jour en moyenne, en dehors des quelques
stockée) pour améliorer l’autonomie des véhicules déplacements longue distance dans l’année), une
et faciliter leur adoption par les utilisateurs. Cette capacité de stockage aussi importante peut s’avé-
croissance de la capacité des batteries est permise rer largement superflue, d’autant plus que la taille
par des progrès technologiques et un passage à des batteries a un impact sur le bilan carbone du
l’échelle industrielle qui permettent (i) de fabriquer véhicule électrique. En effet, plus la capacité de la
des batteries avec une meilleure densité d’éner- batterie est importante, plus la quantité d’éléments
gie et (ii) de réduire les coûts unitaires du kWh de électrochimiques et donc de matériaux nécessaires
batterie. à sa fabrication est élevée.
Dans un scénario comme Forte, tout comme dans Dès lors, une croissance modérée de la capa-
d’autres projections de différents acteurs, la capa- cité de stockage des batteries, en particulier
cité moyenne des batteries de véhicules électriques pour des véhicules principalement utilisés
pourrait ainsi atteindre de l’ordre de 90 kWh, cor- pour des déplacements locaux, contribue à
respondant à une autonomie de plus de 500 km, réduire l’impact environnemental du véhi-
contre environ 40 kWh pour l’écrasante majorité cule électrique (par exemple dans le scénario
des véhicules électriques aujourd’hui commercia- Piano).
lisés en France.
Figure 34. Analyse de cycle de vie d’une batterie actuelle selon sa capacité de stockage et le taux de recyclage
(hypothèse de fabrication en Corée du sud)
14
recyclage
6
0
sans recyclage recyclage sans recyclage recyclage
recyclage à 50% à 85% recyclage à 50% à 85%
68
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
De même, le recyclage des batteries en fin de vie de l’ordre de 1 à 2 MtCO2 par an (comparaison
permet de limiter les impacts environnementaux entre l’hypothèse basse sur la capacité des batteries
associés à l’extraction des matériaux. avec un taux de recyclage de 85 % et l’hypothèse
haute sur la capacité avec un taux de recyclage de
Dans un scénario à 15,6 millions de véhicules, 50 %). Le gain dépend de l’hypothèse de localisa-
l’enjeu sur la maîtrise de la capacité des batte- tion : l’enjeu est moins important si la fabrication
ries et d’un fort taux de recyclage représente des batteries est réalisée en France.
Le pilotage de la recharge présente un intérêt 5 MtCO2 par an peuvent alors être évitées avec
technique évident, et une valeur économique très une généralisation du pilotage (par rapport à un
significative. L’analyse montre également qu’il pré- scénario où il ne serait pas mis en œuvre).
sente des avantages sur le plan des émissions de
gaz à effet de serre. Les gains associés ne se situent pas, pour l’essen-
tiel, en France. Cela résulte de la réalité technique
En améliorant l’utilisation de la production d’élec- et économique du fonctionnement du système
tricité décarbonée en France et en réduisant le électrique à l’échelle européenne : le degré de dif-
recours à la production d’électricité thermique fos- fusion du pilotage en France a une influence sur
sile en Europe, le pilotage de la recharge conduit en la sollicitation de tous les moyens de production
effet à améliorer l’impact de la recharge des véhi- pilotables en Europe, et notamment les moyens
cules électriques sur les émissions de gaz à effet thermiques fossiles qui se situent majoritairement
de serre du système électrique européen. Près de dans d’autres pays.
Figure 35. Émissions associées à la production d’électricité selon le mode de pilotage de la recharge
(année de référence 2035)
0,35
0,30
0,25
0,20
Émissions directes de la production
0,15 d’électricité en France (émissions des
centrales de production)
0,10 Émissions du cycle de vie des moyens
0,05 de production et émissions de la
production d’électricité à l’étranger
0,00
Faible développement du pilotage Fort développement du pilotage
(40% piloté sans V2G) (80% piloté dont 20% V2G)
Au-delà des choix sur les modalités de développe- Les études réalisées sur le développement des véhi-
ment de la mobilité électrique, les évolutions des cules autonomes partagés utilisés sous forme de
modes de déplacements offrent la possibilité de robots-taxis (scénario Alto) conduisent à des résultats
maximiser les bénéfices apportés sur l’empreinte ambivalents s’agissant de l’impact sur les émissions.
carbone des transports. Les options favorisant
le report modal (vers les mobilités douces, Au titre des effets positifs sur les émissions, l’uti-
vers des transports en commun électriques), lisation des robots-taxis permet de réduire le parc
le développement de l’auto-partage et du automobile. Des services de mobilité, basés sur
covoiturage présentent un intérêt environne- des véhicules fortement utilisés au détriment de la
mental, même avec une électrification mas- détention de véhicules privés faiblement utilisés,
sive du parc de véhicules. peuvent alors se développer. Le développement
de ces robots-taxis, combiné à un développement
Le scénario Piano qui combine l’utilisation des des transports en commun (les véhicules auto-
différents leviers permet une réduction totale de nomes agissent comme moyen de « rabattement »
l’empreinte carbone des transports de près de vers des liaisons structurantes de transport en
40 MtCO2 par an, soit un volume d’émissions évi- commun), peut par ailleurs réduire les distances
tées environ 40 % supérieur à celui obtenu dans le parcourues en transport routier et ainsi améliorer
scénario Forte (variante haute). l’empreinte carbone des transports.
Figure 36. Effet du report modal sur les émissions de gaz à effet de serre (en analyse du cycle de vie)
7
Levier CO2 n° 4 :
6
report modal vers
MtCO2eq/an
5
les transports
4 en commun et
3
mobilités douces
0
Émissions évitées par un report Émissions évitées par le report de
supplémentaire de 9% de la mobilité 62% des trajets de moins de 6 km
routière vers les transports en ville et 3 km en zone rurale vers
en commun ferrés les mobilités douces (trajets n'impliquant
ni enfant ni personne âgée)
Émissions évitées sur les véhicules
70
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
45
Réduction de l'empreinte carbone
40
35
(MtCO2eq/an)
30
25
20
15
10
0
Émissions Effet de Effet de Effet de Effet du Effet du report Effet du report Émissions
évitées dans la réduction la fabrication l'augmentation du pilotage de la modal vers les modal d'une évitées dans le
le scénario de la capacité en France taux de recyclage recharge et du transport en partie des petits scénario Piano
Forte haut des batteries des batteries des batteries développement commun trajets vers les
(89 kWh > (50% > 85%) de la recharge mobilités douces
56 kWh) hors domicile
Leviers de maîtrise de l'empreinte des batteries Leviers Leviers de réduction des besoins de déplacements
d'optimisation en véhicules particuliers
du système
électrique
Cependant, plusieurs impacts viennent contrecar- Ces premiers éléments d’analyse doivent être
rer les effets positifs associés à la réduction du considérés avec précaution compte tenu des incer-
parc automobile privé : titudes sur les futures caractéristiques des véhi-
(i) la durée de vie de ces véhicules partagés est cules autonomes et leur empreinte carbone. Ils
réduite par rapport à celle d’un véhicule par- montrent simplement qu’il n’existe pas d’auto-
ticulier du fait des fortes distances parcourues maticité ou de réponse évidente, qui tiendrait
par an, pour acquis que le développement du véhi-
(ii) les batteries sont de taille plus importante, cule autonome, par son effet sur la réduction
(iii) l’empreinte de toute l’électronique (calculateur, du parc de véhicules particuliers, entraînerait
senseurs) et des data centers pour le stockage une baisse des émissions.
de données nécessaires aux fonctions d’auto-
nomie pèsent sur l’analyse globale, Ces résultats appellent des prolongements, qui pour-
(iv) la consommation unitaire kilométrique de raient porter sur une utilisation plus fine des véhicules
ces véhicules est plus importante (effet du autonomes, sous forme de transport en commun de
poids et de la consommation des fonctions faible capacité (avec des taux de remplissage plus
d’autonomie), élevés que les véhicules classiques). Ces derniers
(v) les distances parcourues à vide (contrepartie pourraient être potentiellement plus vertueux d’un
à l’utilisation massive et partagée) font aug- point de vue environnemental. Enfin, ce scénario
menter la consommation. pourrait reposer sur le principe d’un développement
massif de l’auto-partage sans nécessairement repo-
Ceci conduit le scénario Alto à présenter des ser sur des véhicules autonomes. Des variantes du
émissions supérieures, par rapport aux variantes scénario Alto plus performantes sur le terrain envi-
hautes de Crescendo, Opera et Forte, alors même ronnemental semblent ainsi envisageables et pour-
qu’un nombre nettement inférieur de véhicules ront être étudiées par la suite.
légers sont en circulation.
180
160
140
120
MtCO2eq/an
100
80
60
40
20
0
Sans Crescendo Opera Forte Crescendo Opera Forte Alto Piano
développement médian médian médian haut haut haut
de la mobilité
électrique
2017 2035
Émissions indirectes imputables aux transports (cycle de vie hors phase usage et émissions des parcs de production d’électricité à l’étranger)
Émissions directes en France imputables aux transports (au pot d’échappement et production électrique)
Plusieurs études récentes (IFPEN-ADEME, UFC modèles thermiques sont éligibles à un bonus éco-
QueChoisir, CGDD) se sont penchées sur le coût logique et à une prime à la conversion), de la capa-
total de détention d’un véhicule pour un utilisa- cité de la batterie (qui représente un coût important
teur (le TCO10) – indicateur qui intègre l’ensemble d’un véhicule électrique) et de la situation fiscale
des coûts sur la durée de possession d’un véhi- de l’acquéreur – personne physique ou morale (la
cule (achat et financement du véhicule, entretien, prime à la conversion dépend de la situation fiscale
assurance, carburant ou électricité, en intégrant du foyer, les entreprises sont exonérées de l’impôt
l’ensemble des taxes et subventions perçues). sur les véhicules de société pour les véhicules peu
émetteurs de CO2, etc.).
Ces études convergent pour conclure que ce
coût total pour le consommateur est désor- La compétitivité du coût de détention des véhicules
mais proche, voire inférieur, à celui d’un électriques par rapport aux véhicules thermiques
véhicule thermique. Ce résultat dépend des est rendue possible grâce aux soutiens financiers
conditions d’utilisation (notamment les distances publics, implicites ou explicites : bonus écolo-
parcourues), des types de véhicules (certains gique, prime à la conversion, moindre taxation de
72
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
l’électricité par rapport à l’essence ou le diesel. Ces Avec la baisse attendue du coût des batteries, le
soutiens publics semblent aujourd’hui indispen- surcoût de la mobilité électrique est amené à bais-
sables pour que les ventes de véhicules électriques ser, dans des proportions qui font l’objet de fortes
progressent11. incertitudes (dépendance aux hypothèses sur
l’évolution des coûts, la capacité des batteries, le
Ceci signifie que le véhicule électrique est plus prix du pétrole, etc.).
cher en coût pour la collectivité que le véhicule
thermique. Ce surcoût (qui est compensé par Sous certaines hypothèses optimistes mais
les finances publiques) représente de l’ordre de plausibles, il pourrait n’y avoir aucun surcoût
10 000 € par véhicule sur l’ensemble de sa durée du véhicule électrique par rapport au véhicule
de vie. thermique à l’horizon 2030-2035. Dans les
projections les plus défavorables, le coût de la
Rapporté aux émissions de CO2 évitées, ce surcoût réduction des émissions de gaz à effet de serre
pour la collectivité représente de l’ordre de via l’électrification de la mobilité légère peut
250 à 350 €/tCO2 évitée sur l’ensemble de la durée représenter jusqu’à 200 € par tonne de CO2 évi-
de vie du véhicule – un niveau à comparer au coût tée, soit un niveau en deçà de la valeur tutélaire
des émissions pour la collectivité (changement cli- du carbone à cet horizon (comprise dans une
matique) et des autres externalités (le véhicule fourchette entre 250 €/tCO2 et 500 €/tCO2 à cet
électrique émet peu de particules fines et évite les horizon). Ceci illustre la compétitivité des actions
problèmes de santé publique associés). Ce résultat envisageables pour électrifier le secteur de la mobilité
se situe dans le faisceau des études existantes. légère, sur le seul motif du CO2.
Figure 39. Estimations du coût pour la collectivité de réduction des émissions de gaz à effet de serre
via l’électrification des transports
400
300
en €/tCO2évitée
200
100
-100
-200
-300
2017-2020 horizon 2025 horizon 2030 horizon 2035
11. L’exemple du Danemark, qui a supprimé les subventions aux véhicules électriques début 2016, illustre bien la nécessité, avec les coûts actuels des véhicules,
d’un soutien financier pour inciter à l’achat de véhicules électriques (la suppression des subventions au Danemark en 2016 a conduit à une division par dix
des ventes de véhicules électriques entre le dernier trimestre 2015 et le premier trimestre 2016).
Les enjeux associés au dérèglement clima- des eaux qui ont pour effet d’appauvrir les milieux
tique sont aujourd’hui au cœur du débat public. naturels et d’affecter la faune et la flore. L’étude de
L’essentiel de l’analyse réalisée dans le cadre du la FNH a permis de quantifier ces effets : pour un
rapport porte ainsi sur les émissions de gaz à effet européen moyen, basculer vers le véhicule élec-
de serre. Néanmoins la question climatique ne doit trique induit une augmentation de ses impacts
pas masquer l’existence d’autres enjeux environ- sur la biodiversité de l’ordre de 8 % à 15 % (selon
nementaux, éthiques et stratégiques associés au le type de véhicule). Dans un contexte de baisse
développement de la mobilité électrique. alarmante de la biodiversité (un million d’espèces
animales et végétales – soit une sur huit – risquent
D’une part, le développement de la mobilité de disparaître à brève échéance de la surface de
électrique permet de réduire d’autres sources la terre ou du fond des océans, selon l’étude de la
de pollution et engendre un bénéfice significa- plate-forme intergouvernementale scientifique et
tif en termes de santé publique : diminution de politique sur la biodiversité et les services écosys-
certains polluants, notamment des particules témiques), les conséquences du développement
fines, particulièrement nocives (responsables de des véhicules électriques sur les milieux naturels
48 000 décès par an en France selon Santé publique doivent être considérées.
France) et de la pollution sonore (responsable de
43 000 hospitalisation et 10 000 décès par an en À ces préoccupations environnementales, s’ajoutent
Europe, selon l’Agence européenne de l’environ- des enjeux éthiques : l’extraction des métaux
nement). L’étude du Commissariat général au (notamment le cobalt) nécessaires à la fabrica-
développement durable (CGDD), qui intègre un tion des batteries, essentiellement concentrée en
coût pour ces pollutions a permis de montrer que République démocratique du Congo, s’effectue dans
les bénéfices de la mobilité électrique en termes des conditions d’atteinte aux droits humains qui
de pollutions locales évitées peuvent avoir une ont été plusieurs fois portées à la connaissance de
valeur monétaire significative : sur la durée de tous12.
vie du véhicule, 1 000 € d’externalités évitées en
termes de nuisances liées au bruit et à la pollu- La réflexion sur la décarbonation du secteur des
tion locale. transports ne doit pas occulter ces questions, ni le
fait que la mobilité basée sur des produits pétro-
D’autre part, à travers la production des batte- liers n’est pas exempte d’enjeux de cette nature.
ries, le développement de la mobilité électrique Le recyclage des matériaux et les efforts
augmente l’incidence d’autres impacts pour l’envi- de recherche dans de nouvelles technolo-
ronnement, notamment dans les territoires où les gies de batteries (qui permettent de réduire
ressources minérales (lithium, cobalt, nickel, man- les besoins de ressources) présentent donc
ganèse) sont extraites et traitées. une forte importance, à côté des efforts
de sobriété évoqués (usage des mobilités
Le développement des véhicules électriques conduit douces, transports en commun, contrôle de la
à des impacts sur les écosystèmes à travers l’aci- taille des batteries), qui sont de toutes façon
dification des milieux naturels et l’eutrophisation sans regret.
12. Selon l’UNICEF et Amnesty International, 40 000 enfants y travaillent jusqu’à 12 heures par jour, dans des conditions sanitaires déplorables et pour une
rémunération de 1 à 2 dollars par jour. Voir le rapport Les atteintes aux droits humains en république démocratique du Congo alimentent le commerce
mondial du cobalt, Amnesty International.
74
ANALYSE ENVIRONNEMENTALE 7
Les principaux résultats présentés dans ce docu- une priorité des futurs travaux sur la mobilité
ment résultent d’une étude approfondie, dont les électrique.
conclusions ont été discutées en groupe de suivi.
Ils seront détaillés dans un rapport complet, qui Cela implique en premier lieu d’organiser le par-
sera publié au cours du mois de juin 2019. tage des données existantes afin d’en tirer le plus
grand profit. Ce partage devrait s’effectuer au-delà
L’étude permet de répondre à un certain nombre du périmètre des démonstrateurs, aujourd’hui de
de questions, mais appelle également à des pro- petite taille en France, et pourrait nécessiter la
longements – au niveau théorique et pratique. Ces mise en œuvre de partenariats plus poussées avec
prolongements pourront être examinés dans ce certains territoires et d’expérimentations à grande
cadre au cours des prochains mois. échelle (par exemple sur le vehicle-to-grid).
1) Observer en pratique les Les scénarios Opera et Forte décrivent des situa-
conséquences du développement tions opposées pour le système électrique – un
de la mobilité pilotage généralisé de la recharge, ou à l’inverse
un pilotage très limité. Le retour d’expérience sur
Les résultats présentés dans ce rapport sont issus le comportement réel des utilisateurs pourra per-
de modélisations sur les habitudes de déplace- mettre d’alimenter la construction de nouveaux
ment des français, et reposent sur l’ensemble des scénarios basés sur des paramètres affinés.
sources publiques disponibles à ce jour. Les profils
d’appel de puissance qui en résultent ont pu être Le scénario Alto est nécessairement plus pros-
comparés avec certaines courbes de charge réelles pectif par nature (il n’existe encore aucun véhi-
disponibles pour les premiers utilisateurs de véhi- cule autonome de niveau 5). Les expérimentations
cule électrique. qui pourraient être lancées dans le cadre de la loi
d’orientation de la mobilité pourraient fournir des
Néanmoins, il n’existe encore aucun retour d’ex- cas d’usage intéressants pour affiner les analyses
périence consolidé reposant sur un nombre suffi- techniques (modes de recharge), économiques
sant d’utilisateurs (et permettant donc de corriger (coût de la recharge, faculté de pilotage) et envi-
les biais liés au panel actuel, par définition très ronnementales (taille des batteries, fréquence des
restreint). Il est donc impossible d’anticiper si les trajets à vide, etc.).
modèles de mobilité s’orienteront en pratique vers
ou tel ou tel scénario. Dans le scénario Piano, l’articulation des formes
de mobilité et leurs conséquences pour le système
Il sera nécessaire de capitaliser, à intervalle électrique pourraient également être précisées.
régulier, sur les données disponibles afin d’af-
finer les modèles et les visions prospectives, RTE précisera les partenariats nécessaires avec
et ainsi de mieux accompagner le déploiement les autorités organisatrices des transports concer-
massif de la mobilité électrique. Ceci constituera nées afin de nourrir ces études.
76
PROLONGEMENTS 8
RTE et Enedis travaillent en concertation sur ces (2) Mettre en œuvre, y compris sur des volumes
sujets, et ont notamment convenu de mener une limités, des procédures simplifiées afin d’ac-
étude commune dans les prochains mois pour ce compagner des modèles d’affaire nouveaux.
qui est de l’équipement des stations d’autoroute. RTE rappelle que la procédure de « bac à sable
Les résultats de cette étude sont attendus pour le réglementaire » instaurée par la loi PACTE peut
premier semestre 2020. être utilisée pour accélérer la mise en œuvre
de certaines souplesses, et que RTE a prévu
dans les règles d’ajustement une procédure
4) Garantir l’ouverture spécifique (« coupe-file ») pour accélérer la
des mécanismes de marché mise en œuvre de certaines solutions si l’in-
térêt des acteurs est manifeste. Ce dispositif
L’étude montre le grand intérêt du pilotage de la pourrait être utilisé pour accompagner une
recharge. Ceci devrait se traduire dans les offres expérimentation sur la flexibilité des véhicules.
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