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Aissam ZINE-DINE

Professeur À I'univenité Moulay Isamil dc Meknès


Faculté der rclènceo Juridiques [conomiquer et Soeialeo

Gours de droit pénal


Général

Tome I

L'infraction

Année universitaire
2018 - 2019
Gours de drolt pénal gén6ral

Préface

La raison du plus fort est toujours la meilleuret :


Nous l'allons montrer tout à I'heure.
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun, qui cherchait wenture,
Et que lafaim en ces lieux attirait.
Çui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras chôtié de ta tëmérité,
Sire, répond I'Agneau, que ïlotre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Ute je me ÿas désakérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas audessous d'Elle ;
Et que par conséquent, en aucunefaçon,
Je ne puis troubler sa boisson.
Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
Comment l'aurais-jefait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau ; je teue encore ma mère
Si ce n'est toi, c'est donc tonfrère.
Je n'en ai point, C'est donc quelqu'un des tiens:
Car vous ne m'épargnez guère,
Yous, vos Bergers etvos Chiens.
On me l'a dit : il faut que ie me venge."
Làdessus, aufond des forêts
Le loup l'emporte et puis le mange,
Sans autre forme de procès.

tean de IAFONTNNÇ nealeil: LesFoblet

1
-Lc Inup d I'Agnzaû est la dixième fable du livrc I de Jean de La Fontaine (1621-1695), situé duu
le premier recueil édite pour la première fois en 1668.

1
toun dc droit p6nal g6aéral æ
Pour mieux évoquer les hommes, plusieurs auteurs mettent en
scène des animaux. Cette fable de Jean de Lafontaine illustre une

réalité cruelle à portée universelle: le dialogue entre le loup et

l'agneau met en évidence le comportement de celui qui non seulement

exerce sa violence sur le plus faible mais cherche à lajustilier.

Appliqué à la vie humaine, l'état de naturel constitue un état de


guerre permanentê de tous contre tous dans lequel chaque homme use

à sa guise de ses forces pour s'approprier ce qu'il désire et préserver sa

vie et ses possessions en rccoûant à la violence conhe les âutres

hommes. C'est la üe sociale qui crée les normes de la vertu et du vice.

Il n'y a pas de faute avant la loi. La norme est inféodée à la loi, tant

que la loi n'est pæ explicite il ne saurait y avoir de mal ou de faute.


En effet, c'est à partir de la mise en æuvre de la règle de droit et

particulièrrment la règle pénale qu'un certain ordre social soit établi à


traveE surtout la sanction qui vient frappo ceux qui osent enfieindre
par leuls agissements (infractions) cet ordre.

Ce travail destiné aux étudiants de ta faculté de droit vise à


étudier d'une façon synthétique l'un des mécanismes les plus
importants qui permettent d'empêcher I'expression de cet état de

nature, à savoir le droit pénal général, tout en se limitanl à l'une de ses


préoccupations : l'inftaction. Quant à la sanctiorL un deuxième Tome

lui sera réservée.

I -Elat dê nâtuæ s'oPPo§e À étât cMl et dê§igne l'ébr dc§ mpror!§ humain§ antérLutdneni à tonle
;
insürrrdon polil iquÈ juridiquc Tous lÉs ârûêurs Hobbcs, Spinoz,' Ro{'ssÊâu Kût s'accord€nl ?our
les exigences d me
dire quc l'&d de nsturÈ ou élal sluve8e csl un &tat de viol€rr! incomp6tibl' ar€c
üê humatnc
2
Gours rle droit pénal général

Introductlon

Qu'il s'agisse du simple fait délictueux, ou dâns une échelle plus


élevée du tenorisme ou même de la spoliation foncière (médiatisée
ces derniers temps), on ne compte plus les sujets d'actualité ou débats

de société où la question de « sécurité », avec toutes ses couleurs


(sécurité pénale, sécurité foncière...), est partie prenante. Tous les
chemins convergent vers elle.

Le crime est une réalité permanente et renouvelée, un mal social


puisqu'« il blesse les états forts de conscience commune » (E.
Durkheim). C'est pourquoi, il fait souvent i'objet d'une réaction

sociale. La peine constitue donc cette réponse de la société; c'est un

mal infligé à un délinquant à cause de sa faute, une souffrance


imposée par l'autorité à titre de sanction de la violation de règles
fondamentales de la vie d'un groupe. En effet, le fait incriminé
(l'infraction), ou la peine inIligée (sanction) pour qu'elle soit légitime
doit obligatoirement être contenues dans un texte de loi préétabli. Le
droit pénal ne sanctionne pas n'importe quel type d'écart vis-à-vis de
la norme. Il réprime en réalité la violation des valeurs qui sont

essentiels à la vie en communauté. En effet, le droit pénal est la forrne

suprême de la légitimité pénale. C'est ainsi qu'une étude approfondie


de ce droit s'avère indispensable surtout que cette discipline est la plus

discutée (par spécialistes et profanes) de I'ensemble du système


juridique.

3
Gour rle rkoit pénal géléral æ
La théorie générale de ce droil (droit pénal généml) a pour objet
l'éhrde des principes généraux de I'incrimination et la responsabilité
pénale, la nature des peines, les causes d'aggravation et d'atténuation.

Ainsi, I'infrâction paraît comme la pierre angulairÊ de ce droit


puisqu'elle occupe une place hès importante au sein de la théorie de la
responsabilité pénale, ce qui explique cette tentative de cemer cette

notion en consacrant la première partie à une étude conceptuelle de


I'infi'action qui fonderait son utilité à travers un aperçu historique sur
l'évolution de la criminalité permettant de montrer ses

caractéristiques. A cette première partie sera réservé I'intihJlé suivant


(l'infraction : objet du droit pénal), quant à la deuxième partie, il aura
pour objet l'étude des éléments constitutifs de l'infraction.

4
Cours de rlroit pénal général

Partie l: Ir'infraction: objet du droit pénal

L'infraction est à la base une action humaine, qui constitue le


point de rupture de l'équilibre entretenu entre l'homme et la société.

La notion d'infraction qui s'inscrit parmi les théories générales


que le droit pénal élabore n'est pas une donnée qui se suffit à elle-
même. Comme le droit pénal général dans son ensemble, elle est

intimement liée aux différentes incriminations du droit pénal spécial.

Ainsi, Ce sont les règles particulières à chaque infraction qui ont


permis, historiquement, de dégager par « un double effort
d'abstraction et de généralisation » les insfuctions du droit pénal
général. Constat qui va nous mener à réserver le premier chapitre de

cette partie à l'évaluation du poids de l'histoire de la lutte contre


l'infraction dans l'élaboration des règles penales. Cette histoire révèle
la complexité et la diversité de cette infraction. Ce point fera l'objet
du second chapitre.

5
Gours de drolt pénal gén6nl

Ghapltre 1- Gonsidératlons hlstodques §ur le


dmlt pénal
La criminalité est vieille que le monde. Le phénomène criminel
est un fait inhérent à la nature humaine. L'homicide commis par le
mauvais fîls d'Adam (Ca*fn) contre son frère (Abel) en est bien
I'illustrationl. En effet, ce premier homicide de l'histoire humaine est
dicté par le mal dt à la passion à la concupiscence et à la colère, qui

se distinguent à la fois de la raison et de la révélation'

Ainsi, depuis que les hommes ont été chassés du jardin, jetés à
terre, ils se sont présentés au monde comme des ennemis les uns aux
autres2.

Toutefois, la vie en société a fait présenter le phénomène criminel


comme révélateur d'un antagonisme entre l'individu et le goupe
social. Dès lors qu'un groupe se constitue pour assurer la survie de
ses membres, des règles sont dégagées dont le respect s'impose sous

la menac.e de peines.

Dans les « premiers temps » caractérisés par I'absence de I'Etat,


certains comportent, marqués essentiellement par la violence ou la
ruse, appellent une sanction à raison du trouble individuel ou collectif

t
-Le Coran rapporæ dans la sourate de la Table : « Narreleu en toute vériré ce qui advi.ent 11 deux
fils d'Adam, I'orsqu'ils offrirent (à Dieu) leurs oblations. Celle de t'un firt acccptée, celle de I'auhe
reftsée...) vcnets 27-3 l.
2
-La pamle de Dieu fut ûÈs claire: « Vous serez (vous et voo descændants) les uns ennernis des
eu§gs.

6
Gours rle üroit pénal génétal

qu'ils causent. Mais cette réponse émane des victimes. Elle s'avère
purement privée.

Depuis son apparition, l'Etat s'est affirmé notamment à travers ce


pouvoir de punir qu'il a prétendu légitimer tout d'abord pour une
délégation divine. Il existait strement déjà une responsabilité pénale,
mais on ne pouvait parler encore d'un «< droit pénal ». Le droit pénal
naît avec l'affrrmation du principe de la légalité c'est à dire avec la
soumission de l'Etat au droitr. A partir de ce moment-là le pouvoir de
punir fouve sa légitimité dans les lois qui I'organisent. Elles en
rationalisent I'exercice sur une base contractuelle: les individus
constituant le groupe n'ont accepté de renoncer à leur liberté que dans

la limite de ce qui est strictement nécessaire pour assurer leur


sécurité.

Ainsi, parce que le droit pénal est par excellence I'ennemi de


l'arbitraire et de l'abus, son étude et l'exigence de sa mise en æuvre
deviennent on outil de la réalisation de la protection des citoyens dans

leur vie, leurs biens, leur honneur, leurs droits ...En un mot c'est l'un
des chemins de l'enracinement de l'Etat de droit.

Dans ce chapitre, l'étude de l'évolution du droit pénal (sectionl)


est nécessaire pour appréhender ses caractéristiques (section2).

r- LexisNotis,2* édition, 2012'P.165


Emmanuel DREYER" Droit t'nal général,

7
0oun rle drolt pénal général

Sællonl- I'lvolülen dr drult pSnel

Permanent, le crime I'est évidemment puisqu'il est lié à la vie en

société qui remonte à la plus haute antiquité1. Selon Durkheim, « le

crime ne s'observe pas seulement dans la plupart des sociétés de telle


ou telle espèce, mais dans toutes les sociétés de tous les ÿpes »

Ainsi, le droit pénal, avant de se traduire en règles attestant


l'apparition de l'Etat, il procède d'une conception particulière du

« pouvoir de punir » qui caractérisait presque tous les gtoupes


sociaux. Son évolution ne saurait donc être retracée sans que les règles
qui I'incament ne soient envisagées dans le contexte philosophique
plus général qui les a suscitées. L'histoire du droit est d'abord celle
des idées sur le droit, c'est de leur confrontation qu'est né le système

actuel (§1).

Le droit pénal marocain n'est pas loin de ce système actuel dont il


s'est d'ailleurs inspire. Malgré son âge relativement recent, on peut
envisagertrois périodes de durées différentes qui expriment chacune,
un stade dans son évolution: période avant-protectorale, la période
protectorale et la période post-protectorale (§2).

I -Jean 8'Ed., 1992,P.


PRADEL, Droit pénal général, Cujæ, 19

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Gours de üroit pénal g6néral

§1- Les fondements du << pouvoir de punir »

Les recherches historiques de la sociologie permettent de se

rendre compte des origines du pouvoir de punir. Ce pouvoir est


largement influencé par différentes théories doctrinales.

I- les origines

La plupart des historiens décèlent schématiquement qu'à leurs


origines, les sociétés ont connu une évolution en trois tempsl. La
première phase est celle de la vengeance privée. Le processus pénal
est alors laissé à I'initiative de la victime.

A cette première phase en succède une deuxième dite de la


justice privée. C'est toujours la victime qui agit mais elle le fait sous
le contrôle de I'Etat.

A cette seconde phase fait suite une troisième période dite de la


justice publique puisque c'est I'Etat qui prend le relais de la victime.

ÀDe lavengeance privée à Ia fusHce privée

A l'intérieur du groupe social primiüf, les relations humaines


étaient marquées par le règne de la force . Le chef du clan,
2

généralement à la fois chef de guelre, chef politique et chef religieux,

est investi des pouvoirs les plus absolus, en particulier pour faire

t -pnitippe
§eLVlOg ùoit pénal général, presses universitaires de Grenoble, 1993, P.13
I -Dans son auvre majeure « Le citoysn » qui a eu une inlluence considérable sur la philosophie
politique modemg par sa conceptualisation de l'étst de nature et du contrat social, le philosophe
anglais Thomas HOBBES (158&1679) a mentionné qw « I'homme était loup pour I'homme ».

9
Gours de drolt pélal g6n6ral æ
régner l'ordre dans Ie groupe. Ainsi, cette autorité domestique
impose ses préceptes et réprime leur inobservation.

Mais de groupe à Etroupe, en I'absence d'une âutorité centrale et


supérieure, les torts donnaient lieu à la guene et à la vengeance non

conhôlée. En quelque sorte, dans la nuit des temps, il s'agissait du


règlement de comptes.

Dans ce cadre, il faut souligner que la vengeance privée, si

brutale qu'elle soit, constitue une garanüe sommaire du maintien de


l'ordre social dans les relations entre clans. Parce que l'on sait que le
meurtre sera vengé, on s'abstient de le commettre.

Le caractère épuisant des luttes inlerminables ainsi que l'escalade


des représailles à entrainer la lassitude des familles et décime les
tribus, ce qui les a incités à limiter la vengeance, en d'autre termes
organiser la justice; mais il s'agit toujours d'une justice privée
puisqu'elle est encore rendue par les intéressés eux-mêmes.

Par l'action combinée de ces diverses causes, rme autorité


supérieure s'esquisse puis s'affirme, elle va limiter l'aveugle guerre
privée et faire réaliser de sérieux progês à I'organisation de la
répression.

L'importance du facteur religieux est indéniable puisqu'il


constitue le lien qü a permis le groupement des clans en une cité.
C'est pourquoi la cité, pour se faire obéir et faire régner l'ordre,
s'abrite demière les institutions religieuses.
10
Gours üe rilroit p6nal gén6ral

Bras séculier de la divinité, le pouvoir central doit réagir contre


les criminels dont la souillure déshonore la cité et attire sur elle la
colère divine'. Au fil des siècles, divers procédés y concourent :

- Les co-jureurs : Au lieu d'accompagner leur parent à la guerre


privée, les membres de la famille I'accompagnent au tribunal et le
soutiennent de leur serment.

- Le combat judicaire : Il s'agit ici non pas de jugement de Dieu


usite au moyen âge pour apporter la preuve d'un fait contesté, mais de

la limitation de la vengeance entre familles à un simple combat


singulier. Le combat des Horace et des Curiace en fourrait bon
exemple.

- L'abandon noxal: Si le coupable d'une agression injustifiée est


abandonné par les siens au clan adverse, ce geste interdit la vengeance

sur d'autres que le coupable.

- Le Talion : Sous l'expression «< æil pour æil, dent pour dent2 »
le degré de la vengeance se trouve modéré, la répression se trouve
individualisée.

t -Bemard
BOULOC, Droit penal général, f,hlloz, 24tu édition, 2015, P. 49
2
-Le Coran adopte égalemeàt cetù mesure répressive appelée («ISSAS »: « Ô vous qui croyez ! La
loi du talion vous esi prescrite en matière de meurtre : homme libre pour homme litno' esclave pou
esclave, femme pour femme, Si I'ayant droit conseut une æmise de cette peiîe au mcurtrier, ce demier
sera pourcuivi modéiém€nt et il dewa s'acquitter du prix du saog avec emprÊssement' C'est là une
mesuie d'allégement et de miséricorde pour vogs de la part de voüe Seigneur. Mais quiconque
transgrÊsse, pr la suite, ce compromis s€ra sévèrêment sanctionné. La loi du talion constitue pour
,ous-une gurirrtie de vie, 6 geas doués d'intelligOnce. Peut4tre frnirez-vous ainsi par cmindre.Dieu .»
(Sourate à vffsets 178 et 179); Cette loi est surcment I'une des plus ancienne et exrste aussi dans le
judatsme: «Mais si malheur arrive, tu paieras vie pour vie, æil pour æil, dent pour denl main pour
main, pied pour pied, brtlure pour br{lture, blessure pour blessure, meurtsi§sure pour meurtrissure. »
(Torah, Exode 2l : verset§ 23 à 25).

11
6ours de rkoit pénal général

- La composition pécuniaire: Cette tarification de la vengeance


découle du talion; non plus æil pour æil, mais telle somme d'argent
pour æil.

- Lieux d'asile: La vengeance est complètement interdite en


certains endroits, ou certains moments, par les trêves de Dieu.

Avec I'organisation de I'Etat, la justice privée tombe en déclin.


En France, au début du XVIème siècle, l'évolution est parachevée:
« toute justice émane du Roi ».

Ce constat est exprimé par un criminaliste de l'époque (ARGOU)

la vengeance est interdite aux hommes. Il n'y a que le Roi qui, la


puisse exercer par ses officiers, en vertu du pouvoir qu'il tient de
Dieu.

B.L'apparltion de la iustice publlque

Si la justice restait pour longtemps privée, c'est justement parce


qu'aucun intérêt supérieur n'était pris en compte à cette occasion. De
surcroît, il s'agissait toujours de juger un acte plutôt qu'un
délinquant; l'idée d'une responsabilité morale n'était pas encore
apparue.

Sous la justice privée, I'Etat se contente de prêter assistance à la

partie lésée pour lui permeffre d'obtenir justice tout en se cantonnant à

un rôle passif : l'initiative des poursuites revient à la victime, celle-ci

conduit le déroulement de la procédure et seul compte son intérêt

t2
Gours de rlroit pénal général

personnel.La phase de la justice publique traduit de profonds


changements, non pas dans les buts de la politique criminelle qui

demeurent vengeance et accessoirement expiration et intimidation,


mais dans les caractères de la réaction contre le crime : ceux-ci portent

désormais I'empreinte de la puissance publique. Le droit d'accusation

n'est plus réservé à la victime ou à ses proches parents, mais étendu à

d'autres citoyens (dans la Grèce antique) puis à des représentants du


pouvoir central.

L'action répressive (sanction) prend peu à peu un caractère social.


Elle cesse d'être une action privée pour devenir une action publiquel.
C'est la société toute entière qui est atteinte par l'infraction et qui
réagit, avec l'aide (de moins en moins) de la partie privée2.

Le bilan de cette période s'avère lourd, la rigueur de la répression

se manifestait dans la cruauté de certaines peines (fouet, galère, roue,


mort par le feu), ou dans I'oppression de la procédure qui provoquait
I'aveu, preuve décisive, par la torture. La procédure est secrète non
contradictoire ; I'accusé est à la merci du juge, il ignore ce qu'on lui

reproche, et doit se taire quand on ne le « fait » pas parler. Bref,


suivant un adjectifévocateur la procédurt est inquisitoire.

r-Tout particulièrement la composition tarifaire est frxée par la puissance publique' L'Etal finit par
prélever sa part dfis la contribution versée à la viotime, ce qui réalise la première forme d'amende.
Ceüe part porte le nom de « Fredum », ou argent de la paix Voir Wilftid JEANDIDIE& Dtoit
général, Monætrastieq 26'edition, 1991, p 43.
'-La violence privec ne conserve plus que des domaines exceptionncls très limites, tels que le
flagrant délit et la légitime défense.
13
Gours rle droit p6nal général

A partir de la seconde moitié du XVIII2 siècle des débats


philosophiques et politiques qui critiquaient avec force l'arbitraire et

la sévérité de la répresgion appelèrent une traduction immédiate en

droit positif.

Ainsi, un nouveau droit pénal va naitre des idées de certains


penseurs célèbres (Voltaire, Montesquieu, Roseau...)

II- L'influence des doc{rlnes successives

Il s'agit d'éfudier essentiellement les grands courants de pensée


qui ont eu une influence sur le droit pénal actuel. Ces grands courants
peuvent être ramenés à cinq : le courant de la justice absolue, le
courant classique, le courant néo-classique, le courant positiviste et,
enfin, celui de la défense sociale nouvelle.

A - L'école de Ia iustice absolue

Ce courant a deux représentants essentiels : Kant (1724-$A$ et

Joseph de Maistre (1735-182I)t.

Pour ces deux auteurs, le droit de punir repose sur les exigences

de la justice: lorsqu'une infraction est perpétrée, la justice a été

bafouée et la peine qui sanctionne l'auteur de l'infraction doit assurer

l'expiration du crime. En tout état de cause, la répression doit être

' -C'est bien avant la édaction du code p&ul ftangais qtæ lc philosophe allemand Kant a élaboré sa
doctrine dans une étude intitulée «Critique de la raison pratiqræ(1788)» puis dans un autre livre
« éléments métaphysiques de la doctrine du &oi(1796) ». Ses idées ne sont difhsées en France
qu'aprèsl8l0grâcenotsmmentaupublicistefrarçaisdeMaisse quireprendlapenséedeKanlenla
modifiant légèrement pour en faire une doctrine personnelle dans un ouwage publié en 1820 « les
soirées de saint -Petersbwg ». Voir WilÊid JEANDIDIER, Droit pénal général, Op.cit., p. 50

t4
Cours de drott pfual g6n6tal

assurée indépendamment du problème de savoir si elle est utile ou


non à la société, et Kant aftirme que la répression doit être assurée

intégralement quand bien même son inutilité est certaine.

B- L'école classique

Classigue, ce courant I'est d'abord parce qu'il considéré l'homme

comme détenteur d'un übre-arbitre donc comme un être responsable


de ses actes et par conséquent de ses infractions. Classique, il l'est
ensuite parce qu'il part de I'idée selon laquelle celui qui a commis une
infraction doit ête condamné à une peine au selrs de châtimentl. A
cette peine, il assigne deux catégories de fonctions:dans une

perspective individuelle, des fonctions d'expiration, d'amendement,


de reclassement; dans une perspective sociale, des fonctions
d'intimidation et de prévention.

Cette analyse doit être complétée par un refus des châtiments


corporels, une volonté d'égalité entre les citoyens, une exigence de
légalité dans la détermination des infractions et des peines ainsi que
dans l'administration de la jusüce. Cet ensemble d'idées a constitué ce

que I'on a appelé le droit pénal classique ou le droit pénal libéral.


Même si ses origines sont bien antérieures, ce courant de pensée n'est
véritablement apparu qu'au XVIII siècle. Il a éte développé et défendu

par les grands philosophes Français (Montesquieq voltaire, rousseau,

Diderot) ainsi que par un certain nombre de criminalistes au premier

t- Philippe SALVAGE, Droit pénal général, presses universitaire§ & Grenoble, 193, p 10
15
Gours rle rlroit pélal géléral

rang desquels doivent être cités I'anglais Bentham, I'allemand


Feuerbach et surtout I'italien Beccaria qui en 1764, publia son fameux

« Traité des délits et des peines


I >r. L'ouvrage est un sucées

prodigieux ; on peut dire qu'il contribua à la révolution française2. En


effet, Beccaria est sans doute I'auteur qui, te premier, a développé
I'idée que le droit pénal se fonde sur la loi. Celle-ci apparalt à ses

yerD( comme le rempart contre I'arbitraire du juge3.

Cette légalité s'applique strictement à deux niveaux: les

incriminations et les peinesa.

C -L'école néo-classlque

Cette école représentée par Rossi, ortolan et Guizot domine les


années 1830-1870. Elle Ésume la synthèse entre les idées de la
révolution française et celles de l'ancien droit dans cette formule
célèbre : « Punir ni plus qu'il n'est juste, ni plus qu'il n'est utile ».

Cette formule traduit à la fois un ralliement à Beccaria (ne pas punir

1
- En réaction contre les vicæs du sy«ème alors en vigueur, Beccaria préconlsât l'égalité (au lieu de
l'arbitraire) a la modération (au lieu de la rigueur) dans la rÉpression.
2
- La révolution frangaisc allait consacrer ce sysême. La déclaration des drolts de I'homme de I 789 le
fait en des t€rme,s révélaleurs de leur origine.
- Article 5 : « la loi n'a Ie droit de défendre que les actions nuisibles à Ia société... »
. article 6: « la loi est I'expression dc la volonté générale. Elle doit être [a même pour tous, soit
qu'elle protège, soit qu'ellc puisæ.., »
- article 8 : o la loi n" doit etablir quc des peines striotement et évidfiEüt nécessaires, et nul ne peut
êüe puni qu'e[ vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement Eu délit ».
. article 9-: « tout homme (est) présumé innocentjusqu'à ce qu'il ait été déclaé coupable... ». Voir
Jean- Claude SOYER, Droit pénal a Procédure pénalq LGDJ, l8'* édition, 2004, P.25.
r-Certes,
Montesquieu I'avait déjà dit, mais Beccaria amplific l'idée en la généralisant.
o-
t-a pénologle est sans nul doute la pièce ruitresse du live de Beccaria, peut-êtse parcæ qrc la peine
est ta partiJ la plus üsible du droit Snal. Souvent, à propos de la peine, Beccaria parle de
« nécesiité » ou (i d'utilité commune ». Il estirne que la peine doit péveoir plüôt que de punir; elle
remplit une fonction de dissuasion et de prévention. Voir Jean PRADEL, «Histoirc des doctrines
pénales », presses universilair€s de Paris, 2* éditorl t991, p 30.

16
Gours de droit p6nal général

plus qu'il n'est utile) et un dépassement de Beccaria (ne pas punir plus

qu'il n'est juste). C'est le principe directeur de la doctrine

néoclassique. C'est une combinaison entre l'utilite sociale et de la


justice moraler.

Pow parvenir à une peinejuste, les néo-classiques insistent sur la


nécessité de son individualisation et c'est en cela qu'ils §e

différencient essentiellement de l'école classique san§ doute' Tous les


hommes sont libres, mais tous ceux qtri commettent le même délit ne
sont pas identiques : leur passé, les circonstances de leur commission

de l'infraction, leur personnalité, leur sexe sont autant d'éléments qui

différencient les individus.

Autrement dil la responsabilité doit s'apprécier in contrario, ce


qui suppose un pouvoir d'adaptation de la peine reconnu aujuge.

L'influence de cette doctrine fut grande, son prognrmme pas§e

largement dans le droit positif. Toutefois, lorsqu'elle était soumise à

l'épreuve des faits, élle se revélait insuflisante : la criminalité


s'amplifia beaucoup, Ce qui nécessite un changement radical de cette
situation.

t
- Dans son ûaité de droit pénal, Rossi illuste cette exigencê en raisonnÂnt srll le meurtre, d'usure et
le duel. Le rneurse doit êtse incriminé car sa réFession est utile à la société et moralern€utju§te pour
son auteur. En revanche, la régtssion de I'usure quoique utile, n'est pâs
jusle câr ce comportemcnt
n'est pas suflisamment immoral pour être puni. Quant au duel, s'il pamitju§te de le sanctionner, il est
pourtant inutile de le faire, parce que cet ecûe n'est socialement guère dangereux.

L7
Gours rle drolt p6nal géréral .

D- L'école positiviste

Le positivisme pénal est né d'observations scientifiques des


délinquants et de la critique subséquente de la vision abstraite des
moralistes et des utilitaristesl. Il a trouvé son fondement abstrait dans

le positivisme philosophique d'Auguste comte. Ce courant est fondé


par trois italiens: Lombroso2, Ferri3 et Garofaloa.

La doctrine positiviste est fondée sur les deux postulats suivants :

Toute d'abord, l'homme est considéré non pas comme un être


libre mais comme un être déterminé. Ainsi, le positivisme se résume

en un maitre-mot, celui de déterminisme. Le destin de chaque homme

est par avânce scellé, ses actes ne dépendent pas de sa liberté, qui n'est

qu'une vieille illusion, ils sont déterminés par sa constitution


personnelle et par le milieu social au sein duquel il vit. Le crime est

donc le résultat inexorable de causes endogènes (anthropologiques)s


ou exogènes (sociologiques).

t-
Les positivistes italiens dâroncent t'inefficacité de la politiquc Eiminelle de l'école néo*læsique,
puisque, par exemplg la criminaliÉ a triplé en France eotre 1826 et 1880. Voir Wilfrid
JEANDIDIE& Droit Snal général, op.cit., p 52.
2-
Lombroso (t 8361909, professern de médecine légale, pubtie en 1876 « I'homme crlminel ».
'. Ferri 1l8SO-1e28) professeur de droit et avocal est I'auteur d'un ouwage intitulé: la sociologie
criminelle (l 892).
4-
Garofalo (1852-1934), magistrat, a écrit « une criminologie » (1885).
5-
Le criminel - né des positiüsæs est un peu le pendant de la bête humaine de Zola (dans son ouwâge
h bête humaine). Il est sclon [nmbroso, câractérisé psr l'étroitesse du front, le dévelopPement exagéré
des sinus ûontaux...l'épaisseur plus grande de la boite du cÉne, lo développement disproportionné
des mâchoires et des pommettes, les cheveux plus épais et hérissés, les oreilles à anse ou oharnues, Ies
bras plus longs, les cheveux plus noirs, le visage glabre clrez les hommes, la gaucherie, la sensibilite
considérablement diminuée. Le mange absolu de remords, une exheme vanlté...et enfir\ la conception
toute reldive de la divinité et de Ia rlorale.
« Ie criminel-né », ajoute Lombroso, est un homme dont les parents élaiÊrt généralement nomuux,
mais dont l'évolution personnelle a été bloquée. I[ se trouve donc être analogue à un primitif
d'aujourd'hui ou à nos lointains ancêtres dont il cst une sorte de résurgence ataüqræ, Voir Jeat
PRADEL, histoire des doctrines pérules, op.cit. p 75-76.

18
Gours rle droit pénal g6aéral

Ensuite, le délinquant est moralement considéré irresponsable


(irresponsabilité morale) puisque I'homme est déterminé dans ses

gestes et ses pensées par sa morphologie ou son milieu. L'Etat


intervient cependant contre le crime, mais son intervention repose sur
la notion d'état dangereux (en italien témébilité) du délinquant. Selon
Lombroso, le délinquant est un << microbe social » qü menace la santé

de la collectivité.

Dans la politique criminelle des positivistes, l'infraction est


considérée comme un signe révélateur de la dangerosité de son

auteur; le traitement sera donc adapté à la personnalité du délinquant


et non pas à la nature de son infraction. Les conséquences de cette
proposition sont très importantes : la réaction sociale à l'infraction
n'est pas nécessairement une peine. La notion même de peine avec
l'idée de rétribution et de réprobation qui s'y attache droit disparaitre.
Punit- on ÿphoidique ? On le soigne ; et quand c'est une peine, sa

nature et son montant ne sont pas définis d'après I'infraction. C'est


I'abandon radical du système quasi algébrique du code pénal, qui
consiste à affecter chaque infraction d'une peine détenninée à

l'avancel.

Pour bien marquer la rupture, on ne parlera plus de peine, on


parlera de mesures de sureté 2, dé"idée non d'après la faute du

t- Jaques.Hemi ROBERT, Droit pénat géneral, presses universitaires de Frarrce, 2* Edition 1988,
P.39
2-
les meswes de sfueté ne soit pos ûès nombreues, ni différtnciées. Elles se ramènent à l'élimination
(mais sans ouauté d'expiation). Voir Jeur-Claude SOYER, Droit pénal et procédure péuale, Op.cit,
P.29

19
Gours rle droit pénal général

délinquant, puisqu'il ne peut pas en avoir commis, n'ayant fait que


suiwe une pente irrésistible, mais d'après son état dangereux,
autrement dit sa « témébilité ».

Il s'agit donc uniquement de scruter la personnalité de l'individu


pour choisir, comme dans un traitement médical (la thérapeutique), la
mesure de sureté qui s'imposel.

L'influence de la doctrine positiviste sur le droit positif est


incontestable. Elle a été officiellement reçue, entre les detx guerres,
par les régimes totalitaires d'Italie et d'Allemagne, ce qui, de nos
jours, ne lui fait pas une excellente publicité. Mais en France, elle a

été appliquée dans la législatiorl en particulier de 1880 à 1912, par les

lois qui ont institué le sursis, la libération conditionnelle, la relégation


des multi- récidivistes et le régime spécial des mineurs.

Inversement, on peut faire valoir, à son encontre, que le


déterminisme ne saurait constituer à lui seul l'explication essentielle

des conduites criminelles et qu'il n'est pas de justice sans libre arbitre.
Mesure qui a été critiquée par d'autres courants de pensées tels que
l'école de la défense sociale.

r-
Iden P.29

20
Goun de droit pénal général

B.Le droit pénal musulman

Avec I'avènement de l'Islam en terre marocaine, le droit pénal


musulman est devenu la source juridique officiellement dominante
dans la gestion des crimes et des châtiments. Ce droit est basé sur la

Charia dont la constitution suprême est le Coran et la Sunna. A partir


de ces fondements, les recherches doctrinales ont déterminé les

valeurs fondamentales de la société qui méritent une protection

pénale : religion, vie, raisotl descendance et biens.

Ainsi, la détermination de l'infraction repose sur le principe de

légalité; toutefois, une mention particulière doit être réservée à

l'exigence de la matérialité du fait délictueux, c'est l'acte réalisé qui


est visé et qui est susceptible de servir de poursuites pénales. Il
appartient à Dieu et à lui seul de juger les mobiles des actions
humaines. La justice terrestre ne doit prendre en considération que

I'intention criminelle de l'auteur de I'infraction pour y adapter la


réaction sociale, dans le respect du grand principe de la présomption
d'innocence et des règles précises édictées en matière de

responsabilitéI. En tout état de cause, pour qu'on parle d'infraction, il


faut qu'il s'agisse d'une action ou d'une omission qui porte atteinte à
la paix générale de la communauté musulmane et qui est incompatible

avec le comportement requis chez les croyants vertueux.

1-
Moheddine AMZAZI, Précis de droit criminel, Op.cit, P. 20.

2s
Gours ùe droit p6ral gén6ral æ
Quant aux sanctions, elles sont diverses mais elles se ramènent à
trois catégories:

+Lès « Houdoud »: cette catégorie est constituée par les peines


{ïxées par le Coran et par la tradition du prophète. Ces peins sont donc

de sources sacrées et sont intengibles en tant que tellesl.

il-es peins « Kassas >r : il s'agit d'une forme dérivée du talion


fondée sur le principe d'équivalence entre I'agression et la riposte
juridique et s'appliquant exclusivement en matère d'aüeintes
volontaires à la vie ou à I'intégrité corporelles des penonnes.

+Les peines « Taazir » : leur détermination est réservée à

I'autorité politique dans les cas suivants :

- I'atténuation de la responsabilité des auteurs de I'infraction,

- I'absence de I'un des éléments constitutifs de I'infractiolu

- une infraction prévue par les sources sacrées.

Reste à mentionner que cette période est caractérisée par la

dualité des droits : le droit islamique basé sur la Chari4 et un dmit


coutumier soigneusement gardé par les berbères et fondé sur la

tradition
2
. En effet, c'est pÉcisément en s'articlant §ur cette

r-
D'!pês le corân, lê voleu s'êrQo§! à I' nputaliotr dc lâ mairr l. bandit de gmnÀ chêmio§ oncoÜl'
selon iasaüæ rle son acrc. L peine de norl' la crucificstiol ou lâ tElégttio4 le foûicstôü se voil
ipftiqu;"enr coupu ac touct itndh que l sJühère.st passible dc lâ pêirc de mon psr lâPidâtioo
Ibid. P.21.
i] io iiritt* oot toojo*, lcnté de 3sùvegùd€r un Frticuhrisno" qui s! m'nifeds
par lG plténomène

aela Srto ,. Vot ,rUaatirrh BOULÀCH. Cours dt dto't Énâl g&éral' Op cit'' P' l?
"
26
Gours rle droit pénal général

particularite du Maroc que I'autorité du protectorat â progressivement


cherché l'éviction du droit criminel musulman.

II.La période protectorale

Pour résoudre dans les meilleures conditions les litiges mettant en

cause les ressortissants des puissances étrangères qui s'installaient au

Maroc avant même le protectoral ces puissances s'élaient efTorcées de


leur procurer un certain nombre de privilèges. C'est le régiine des

capitulations.

Ce régime de faveur consistait essentiellement dans le privilège


d'ordre juridictionnel : les bénéficiaires d'un faité de capitulation sont
justiciables, non par les tribunaux marocains, mais de la juridiction
constituée par le consul de leur pays'. Ce dernier applique, même en
I'absence d'une disposition formelle, sa propre loi nationale.

Toutefois, la compétence du tribunal consulaire ne s'était pas

limitée aux procès mettant en cause les ressortissants étrangers. Elle


avait été abusivement étendue aux justiciables marocains eux-mêmes.
Cette réglé fut même appliquée en matière pénale : si les poursuites
étaient dirigées contre un prévenu marocain, I'affaire était également

de la compétence du consul.

t- Dans l'hypothèse où le litige oppose plusieurs étrangers de nationalités différentes, il était porté
devant une formation collégiale : le tribunal des consuls étrangers. voir Mohannmed JALAL EssAID,
Introduction à l'étude du droit, Imprimerie Najah El Jadida-casablanca,ltuedition 2010, p.330.

27
Gours de droit p6nal général

C'était une sérieuse limitation apportée à la souveraineté

marocaine, puisque les Etats réellement indépendants réservent


toujours le jugement des affaires pénales aux juridictions nationales.

Vers la fin du XIXe siècle, le régime des capitulations était


sévèrement critiqué et a fini, avec le protectoral par être supprimél.
En effet, dans le haité du protectorat, la France s'est particulièrement
engagée à réformer le système judiciaire marocain et à le modemiser.

Cet engagement lui a essentiellement servi pour mettre en æuvre sa


stratégie d'éviction du droit pénal musulman. Sous couvert de la
réorganisation des juridictions chérifiennes (du Makhzen), la France
s'attacha à ressusciter les coutumes.

A.La survivance de laiustice coutumière

Avec le protectorat, la coutume était présentée par les juristes


français comme étant avant tout un phénomène berbère. A I'appui de

cette idée, on faisait remarquer que son champ d'action privilégié


coihcidât avec les régions dites berbérophones2' C'est pourquoi, le
dahir du ll septembre l9l4 relatif à l'adminishation des tribus

r- La plupart des Etats étrangers, avec à leur tête ta Russie (mais aussi I'Espagne, le Portugal, le. suède,
t nairerna*, la Belgique, t'ttatie et les pays bas), avait renoncé assez rapidement à leur privilèges de
prédiction. pour d'autre Etâts, comme I'Allemagne, l'Autriche et la Hongrio, la première guerre
mondiale a été I'ocsasion de mettre fin â leurs privilèges de façon unilatérale.
Finalement, seuls I'Angleterre et les Etats-Unis ont tenu à garder leurs capitulation§, düaltt toute [â
Dériode du Drotectorst. Ibid. P.333.
I- C. *n.t t es illusué par un possage significatif du bultetin du comité de I'Afrique frarçaise du
mois d,awil l9l2 : « noui n'avons pas à donner aux tribus aujourd'hui éparses, du Maghreb, sous un
pouvoir indigène, une unité qui se retoumeroit plus tard contre nous. Le particularisme des groupes
Lrberes est peutétrc d'aborà une gêne, mais il nous servira à atteindre le ézultat final que nous
devons chercher À obtenir au Maroc », cité par Mohammed JALAL ESSAID, Ibid. P. 156.
28
Gours rle droit pénal génétal

berbèresl avait décidé de consacrer solennellement le droit coutumier.


Son article premier disposait en termes énergiques : « les tribus dites
de coutumes berbères sont et demeurent régies et administrées selon
leurs lois et leurs coutumes propres, sous le conhôle des autorités ».

Ainsi, comme par le passé, les plaideurs pouvaient toujours


recourh à l'arbiuage d'une ou de plusieurs personnes. Seulement,
après la circulaire du 22 septembre 19152, en cas de désaccord sur leur

désignation, la « Jmaa » devait nécessairement intervenir. Sa mission

consiste d'abord à concilier les parties et, en cas d'échec, elle était
habilitée à désigner elle-même I'arbitre.

Cette tendance à faire de cette vieille institution tribale un


organisme judiciaire fut renforcée davankge et 1924 par d'autres
circulaires3. Ces instructions administratives firent des « Jmaà » de
véritables tribunaux compétents en matière de statut personnel,

familial et successoral, comme en matière immobilière.

I - A travers ce dahir, la politiquc coloniale consistait à préserver l'atrtonomie des berbères, en


paniculier dans le domainejuridique, en les soustrayant à la législaion islamique et en maintçnrnt leur
droit coutumier. 8.O., n' 100 du 2 I septembre 19 14, p. 7 42
2
-Le point de départ de I'organisation d'une justice civite berbère fut une simple circulaire du 22
septembre 2015. Elle fut rédigée par un contrôleur civil, H.Bruno. Celü-ci à la suite d'une mission
d'ànquête dans les tribus de la région de Meknès avail découvert une série de coutumiers berbères qui
bouleversait I'idée que se faisait le colon sur lajustice berbère. En realité, lajustioe ne firt pas rendu
par les « Jmaa », comme le prétendail le mythe Kbaylg mais par un ou plusieurs aÔitres : loute la
procédure se réduisait à un arbitage et l'arbitre était choisi par les pârties elles-mêmes. Voir Charles.
Robert AGERON, Revue d'hisloire modeme et contemporaine, ùome 18 n"l, Janvier-mars 1971,P.67-
68
3
- Une circulalre du 29.iânvier 1924 complétée par une circulaire du 14 février 1924 organisa lusque
dans h détall des « Jmaa » judiciaires et définlt leur compétence. lbid, P.69

29
CIours rle droit p6nal général

Toutefois, pour soustraire totalement les marocains berbères du


I
droit musulman , I'autorité coloniale française se proposait de

consacrer, non par une simple circulaire, mais par un texte législatif
en I'occurence le dakin du 16 mai 1930 réglant le fonctionnement de

la justice dans les tribus de coutume berbère non pounnrs de


mahkamas pour I'application du chraâ2, la compétence du tribunal

coutumier en conférant à ses décisions I'autorité de la chosejugée.

Les athibutions de cette juridiction s'étendaient à toutes les


matières: civile, commerciale, mobilière et immobilière, mais la
réforme la plus lourde de conséquences est que le jugement des

affaires pénales a été dévolu au tibunal coutumier d'appel s'il


s'agissant d'un déliq aux juridictions françaises s'il s'agissait de
crimes commis dans une région berbère3.

t - « L'ldée essentiel dont ll faut se péné§er est que le peuple marocain n'est pâs arabe » : ainsi
débutalt un ouvrage du capitaine Victor Piquet, publié à Parls en 1925 sous le double titre: Le
peuple marocain, Le bloc berbère, Voir Charles-Robert AGERON, Revue d'histoir€ modeme êt
contemporÊine, tome lE n'1, Janüer-mârs 1971, P.5l
'- 8.O., n'918 du 30 mai 1930, p. 652
I -L'article
4 du dahlr du 16 mal 1930 dlsposait que r En matlère pénale, ces tribunaux (coutumlers)
d'appel sont également compétenB, en premler et demler ressort, pour la répresslon des lnfractlons
prévues à falinéa 2 de lartlcle premler cl-dessu§, et en outre de toutes lnfractlons commises pâr des
membtes des trlbunaux coutumlers dont la compétence normale est attrlbuée au chef de la tribu » ;
alors que l'artlcle 5 du même dâhlr dlsposâlt que « les lurldictlons françalses stâtuant en matlère
penale, gufuant les règhs qul leur sont propres, sont compétentes pour la répression des crimes
commis en pays berbère quelle que solt lâ condition de l'auteur du crime Dans ces cas, est appllcable
le dahir du 12 âoût 1913) §ur la procédure crimlnelle».

30
Cours tle rlroit p6nal géléral

Ce Dahir e été lrès mal accueilli et fut considéré comme une


atteinte à la souverâineté du sultân et à l'unité du pays, du fait que
I'organisation de la justice pénale a toujours relevé du droit publicr.
C'est pourquoi ce texæ législatif a éte abrogé par le dahir du 8 awil
1934 règlemeffant le fonctionnement de la justice dans les tribus de

coutumes berbères2 tout soumettâût à un régime uniforme en matière


pénale les juridictions des pachas et caids et portanl extension de
-
compétence et réorganisation du Haut tribunal chéri{ien.

B.L'élarglssement de la justice Makhzen

l-es tribunaux Makhzen ont bénéficié d'un élargissement

appréciable de leurs attributions, au point d'apparaître comme des


tribunaux de droit commun. Ces réformes, qui étaient le fruit de deux
dahirs du 4 aout l9l8 réglementant lajuridiction des pachas et caids3,

avaient complètement transformé les anciermes juridictions des pachas

et des caïds, en les soumetüant notamment à un double contrôle.

-Celui des autorités du protectorat, par l'intermédiaire du


commissaire du gouvement qui jouait le rôle de ministère public.

-Et celui du haut tribunal chérifierq à la faveur du double degré de


juridiction

'- E pcrmett.nt âüx tnbonaux coutumiers et aux jwidirtions Êançaises de lrâmher mêrn€ des
questioos Énales qü Étaientjusqu'isi rése.vécs au hâut tribunsl chérifien ou so{rmises à soa cor[rôle
- cette prisâ de pôsitioD aboutissait à r€coDtraitrÈ l'.xist{cE d'un ordre public bêrbàe el, à plus
moins longuë êohéâncê d'ùlr Etat berbèrE; me'surE qui conûÊdil les engagemenb formels âssumés
dars le trairé de Fès. Voir Mohammsd JALÀL EssAID, lnrmducrior' à l'énde dù dmit l*edrxon
2010, P.160.
'l- 4.o., D' I 120 dü 13 aÿrit 193, p 106
! -B.o., o" 306 du 2 æptenbre l9lt,p. 818

31
Gours rle droit pénal général

La compétence des tribunaux Makhzen, s'étendait à tous les


marocains, qui étaient justiciables de ces juridictions quelle que soit
leur conversion.

En plus des affaires pénales, les tribunaux Makhzen tranchaient


également les questions civiles et commerciales, sauf celles qui étaient

réservées aux autres juridictions, en particulier les tribunaux

modernes.

Le 24 mars 1953, furet promulgués un code pénal, un code de


procédure pénale et une nouvelle organisation judiciairer. Ces codes

furent pratiquement la reproduction fidèle de leurs conespondants


français. A l'indépendance, son abrogation est légitimement

considérée comme une tâche prioritaire.

III. La période de l'lndépendance

Le 26 novembre 1962, le Maroc se date d'un nouveau code

pénal2. L'impact et le poids de la période protectorale se font ressentir

tant dans I'approche conceptuelle de I'institution pénale que dans les


solutions proposées pour définir les outils ou le cadre pour

l'élaboration d'une politique criminelle.

!-
Tous cês textes de lol ont été publlé au bulletln offrciel n' 2142 .bls du 19 novembre 1953, P.1677-

llïÏlrî, ,u *"embre 1962 porant approbation du texte du code Snal, 8.o., no 2640 bis du s juin
1963, P.843

32
Gours te üroit pénal g6néral

Ce code est ne copie presque conforme de l'avant-projet du code


pénal français de 1953 (projet Matter). Ce code est entré en vigueur le

17 juin 1963.

C'est la loi du 26 janvier 1965t qui établira une véritable


unification et une marocanisation de la législation pénale2.

Certes, ce code de 1962 a joui d'une tès grande stabilité. Le


recensement des modifications apportées au code pénal depuis sa
promulgation révèle un bilan très migre3. Toutefois, depuis la nouvelle
constitution de 201l, il est amené incessamment à être amendé afin

qu'il puisse être compatible avec les nouvelles dispositions


a
constitutionnelles (respect des droits et libertés des citoyens,
inviolabilité du domicile, protection du droit de propriété, la lutte
contre toute les formes de discrimination...)

'- Loi u' 3-64 promulguée par dahir du 26 janvier 1965 relative à I'unification des tribunauq B.O.,
no 2727 du3 Êvrier 1965, P. 103
2
- Ce dispositif législatifposait solennellement trois objectifs.
- L'uni{ication : sont unifiées sur le territoire marocaio tout€s lesjuddisüons du royaume.
- La marocanisation: ne peuvent exorcer les fonctions de magistrats que des personnes ayant la
natioaslite marocsine,
- L'arabisation: seule la langue arabe est admise devant les tribunaux trnt pour les débats et les
plaidoiries que pour la rédacüon desjugements.
r- Mohiédinc AMZAZI, Pnécis
dc &oit 6iminel, Dar Nachr Al Mmifa, l*édition, 199.4, p29.
o-
Én 20 15, le ministre de lajustice Mustapha Ramid a présente un nouveau projet de code penal. t es
principoux apports sont les süvants :
- L'iotoduction ds plusiews nouvellæ dispositions pour sanctionner la discriminatiorç le racisme ou
l'incitation À la haine ;
- Le renforcernent des sancüoos contre le harcèlement sexuel dars la rue ;
-L'infoduction des peines alternatives (amendesjoumalières, travaux d'intérêE généraux)
-L'introduction d'un article réprimant « ce qui porte stteinte aux religions, aux prophètes, ou à bien »
et d'un crimê sur les crimes d'honneur.
Ce projet de réforme a fait I'objet d'un débat intense par les différentes classes sociales. Certains
chercheurs ont considéré le dit projet de réforme ne prend pas en compte I'évolution de la société
marocaine. Certaines infractions come la rupture du jeune en publio durant le mois sacré de
ramadan, les relations sexuelles hors mariage ou encore le blasphème occupent une place importante
dans la liste des crimes punissables. Voir Omar BROUKSY, « Maroc : un p§et de réforme du code
penal divise la société », Le monde, paris, 14 avril 2015.

33
Cours de droit p6nal géréral

Ainsi, en intégrant ces principes, le droit Snat marocain vise une


prôtection optimum des intérêts de la société. La consolidation de la
situation sécuritaire faitl'objet d'une attenton particulièrc de la haute
autorité du pays qui veille à ce que le royaum€ rcste parmi les pays les
plus stables et strs.

Si les statistiques I de mesurer l'ampleur du


permettent

- des tendances qui permettent


phénomène criminel en oftant
d'orienter la politique pénale; il serait, dans la pratique, très difficile

de mesurer avec exactitude le volume de la criminalité, En effet,


l'infraction pénale se caractérise par sa diversité et sütout par sa
complexité.

| -Les
stâtisti+er dévoiléd p6r lÀ Direerion Géû&Àle de la Siir€té Nrrionsle (DGS)o tur* ûentiü &
873.156 afrniÉs crirbiri€ll€s oll délictuelles cd lrrl an €l demi (elrtrÉ jsnüer 2015 el juillet 2016). L€s
lervicrs alc policê ti.mcnt à rlrsurü que 957. de cês affaire3 âuniert été résolus €t présenté$ devant
la jt§tice- voir b site !êÀ!U.isru!a[Iiq!9.ça!q, article du 2aoir20l6.
Tout fois, lc mioistèr. d6l'tntéri.ur préoise que l€ Eux d! criminslité âu Mârsc, dlns cês différ€ntls
lomes, est I'un des plus bas au monde, en ce sens qu'il n de prsss pas 2l sffair€s pour 1.000
citoyens par all voir le site $sûÀLtq![ê!tr@e anicle du 5 décenbrE 2017

34
Gonrs rlc droit pénal géilral

§cctlcn 2: lcr corucidrrlqurr dr droh p5nol

Dans le langage des juristes pénalistes, les termes « droit pénal »

ou « droit criminel » possèdent une signification conceptuelle


identique, et on emploi indifféremment l'une au I'autre expression

Parmi les définitions du droit pénal usuellement répandue est celle


qui consiste à le ramener à << l'ensemble des lois qui réglementent
dans un pays donné l'exercice de la répression par I'Etat ».

Cette définition met I'accent sur le pôle dominant du droit pénal à

savoir « la répression » et met hors du champ définitionnel i'ensemble

des << mesures de défenses sociales qui, de nos jour, occupent une
place de plus en plus importante dans I'arsenal répressif. A cette

définition restrictive, d'auffes proposent une acception plus extensive.


En effet, l'expression droit pénal, entendue dans son acception la plus
large, désigne la branche du droit positifayant pour objet l'étude de la
répression par l'Etat des comportements de nature à créer un trouble

intolérable pour I'ordre social »l

Ainsi, le droit pénal est positif et juridique, il est également


suppressif et préventif. C'est une discipline dont I'appartenance au

droit privé ou au droit public est controversée.

|
-G.Levasseus, A.Chavonne, J.Montreuil, B.Bouloc, Droit pénÀl général et procédure pérmle, Dalloz,
1999, p.l

35
Cours rle rlroit pélal général

§1- Le droit pénal est positifet iuridique

Cette caractéristique appelle certaines observations :

I - Le droit pénal est Posltlf: C'est même le plus positifdes

droits. Il ne s'agit pas d'un droil idéal ou d'un droit natutel, mais d'un

ensemble de règles du droit positif, de normes écrites. Le droit pénal

ne saurait être confondu avec la morale. Certes, de nombreuses


-
incriminations sont conformes, voire même inspirées de prescriptions
I
de la momle . Toutefois, des différences existent entre ces deux
disciplines à un triple point de vue2.

-Quand à la sanction qui peut demeurer toute intérieure dans

I'ordre moral et qu'est nécessairement l'æuvre d'une contrainte


extérieue en droit pénal.

-Quant au but poursuivi, des lors que le droit pénal ne cherche


pas à perfectionner moralement I'individu; mais, il se préoecupe plus

prosaiquement de faire régner un certain ordre dans la société, même

de façon purement extérieure.

II -Le drolt pénal est luridique : c'est un drcit écrit. Ainsi seul

un texte écrit (la loi) peut, en tant qu'expression de la volonté générale

| -L'éüdente réprobâtion que suscitent cenain€s infrlctions peül laiss€I croite qu. ie droit
Pénal vierÉ
alors au r.nfon de Ia molsle, il en serlit la tndü.lion juridiqu., mds un tel süs repor€rat sü utr€
codusion. D'âtJord et sans qu'il ne soit néc$sâirê d'eî dir. d'âvantrgq Ie§ sâDction§ ûorde! êt le§
sanctions pénâles nê sont pô§ (h mêmë ordrÊ. Brl3urlc et surtout, il importe dê soûli8ncr que tous les
intédts prctéEés que les fÀ{ons d'lgir épréùemible3 soDt idcntifié§ §elon des critèrcs dbtnca ên
Inoral êt cn droit pênal. ll laul sê gardêr à cêt égbtd d'une double confusion: quânt aux ffns
poursûivies et quônt aux noyens utilkés dâns l€s deux cas. Vot EmmÀtuel DREYER, Droû Éûâl
aaoéml Lrxis Ne\is.2@ édinoG 2012, P.l0l-101.
t-Mohreildine AN4zAZI. prècis de droil criminet. DarNÀchr AlMaffifÀ l& édition I9q4. P l3

35
Gours de ûroit p6nal générd

créer des infractions et des peines, en modifier la teneur ou les abroger

s'il y échet. La loi a donc l'exclusivité de tracer la frontière entre le


permis et l'interdit. Toutefois,ni la coutume ni l'usage ne peuvent
suffrre pour fonder la légalité d'une incrimination ni en modifier le
contenu. Ce n'est pas en effet à la conscience collective

impressionnable et changeante que droit être remis le soin de

déterminer les faits contraires à I'ordre social, mais au législateur. Il


en résulte pour le citoyen une garantie contre l'arbitraire, en ce que la

police et la justice répressive ne pounont I'inquiéter et le condamner


si le fait pæ lui commis, bien qu'il semble nuisible à la société, ne
tombe pas exactement sous le coup des provisions légales.

§2 : Le droit pénal est répressifet préventif

Le droit criminel est un droit sanctionnateur. C'est qui fait


d'ailleurs sa spécificité et permet de l'identifier. Mais l'existence de la
sanction et son importance ne doit pas occulter le caractère normatif et

moralisateur de ce droit d'une part comme elle ne doit pas faire


oublier que, par son existence et par son application, le droit pénal
développe et génère un effet de prévention générale de la délinquance

d'autre part.

37
Cours de droit pénal général

I - Le caractère préventifdu droit pénal

Parce qu'elle dresse à I'avance une liste complète et précise des

incriminations et des sânctions qui y sont attachées, la loi pénale est


de natuie à réaliser un effet préventif.

De même I'application de la loi pénale réalise un but de


prévention générale: quand le public voit appliquer effectivement
telle ou telle peine à I'auteur d'une infraction, il se produit une

certaine intimidation qui renforce l'effet préventif de la loi pénaler.

Ainsi, pour protéger la société contre les agissements anti-


sociaux, les mesures préventives doivent se trouver au premier plan
pour mener à bien me politique criminelle efficace. Toutefois,
lorsqu'une violence de la loi pénale se produit, des moyens répressifs
doivent être mis en æuvre à l'encontre de celui qui snest rendu

coupable.

II - Le caractère répressifde la loi pénale

Afin d'assurer la défense de I'ordre public, le droit pénal se droit


d'être sanctionnateur, la peine vient frapper celui qui s'est affranchi de
la règle répressive.

|
-La dispense de peine accordée au délinquant qui dénonce I'infraction à laquellc il avait accepté de
porticiper (exemple dc peine du dénonciateur, faveurs accordée aux « repentis ») aura un effet
péventif on amenant la décowerte d'infraction nom encore consommées et en détoumant de leur
projet crimiræls des malfaitews qui redouæront la hahison de leun æsociæ. Voir Gaston STEFAM,
Georges LEVASSEUR, Bernud BOULOC, Droit fnal général, Dalloz, l7* é.dition, 2000, P.20

38
Gours rle droit pénal génétal

Autrefois, on insistait surtout sur l'effet d'intimidation de la


peine. Cette intimidation s'adresse non seulement au public (effet
d'exemplarité, qui a été noté ci-dessus à propos de l'effet préventif de
l'application de la loi pénale), mais aussi à l'intéressé lui-même, elle
doit être telle que le condamné ne renouvelle pas son infraction et
; elle doit éviter la récidive
n'enfreigne plus les prescription légales
depuis longtemps, ce but d'intimidation, s'il n'a pas disparu, n'est
plus au premier plan.

En effet, par le fait que la peine poursuit un but de

« rérdaptation », elle est orientée non seulement vers le passé mais


aussi vers I'avenir ; elle tend, par la fansfonnation qu'elle aura réalisé

cher I'individu, à éviær que celui-ci ne commette à I'avenir de


nouvelles infractions. Ainsi quoique mesures répressives, les peines
doivent assurer également une action préventive.

Les fonctions de prévention sociale et de réadaptation du

détinquant sont beaucoup plus nettement marquées dans les mesures


dites traditionnellement de « sureté » dont I'objet est de protéger tout à
la fois la société (conte les risques de réitérations d'infraction) et
I'individu qui en fait l'objet, soit en le soignant soit en lui ôtant les
moyens ou en lui évitant les occasions de commettre de nouvelles
infractions.

Mais de tel objectif suppose que I'on connaisse les raisons de la


délinquance, que l'on dispose à propos du crime de connaissances de

39
Gours de droit pénal g6n6ral

valeur scientifique; en d'auffes termes qu'il existe de véritables


<< sciences » criminelles. On parle dès lors de I'aspect scientifique du

droit pénal.

§3 - Diversité du droit pénal

L'étude du droit pénal nous oblige, de prime abord, de marquer


ses frontières avec d'autres disciplines qui, différentes mais voisines et

parfois même très proches.

A la manière d'une mosal§ue, le droit penal est un ensemble fait

de pièces diverses à caractèrejuridique de scioltifique.

I -Les branches iuridiques du droit pénal

La richesse du droit pénal se révèle à travers différentes branches


juridiques. On distingue généralement entre le droit pénal de fond et

le droit pénal de forme.

A- Ie droit pénal de fond

Le droit pénal de fond est constitué par le droit pénal spécial et le


droit pénal général

o Le droit pénal spécial

Le premier souci du législateur est de déterminer la nature des

agissements qu'il estime dangereux pour I'ordre public. Il analyse les

conditions précises de leur incrimination et les peines exactes qu'elles


peuvent entraîner compte tenu des circonstances aggravantes que la loi
40
Gours ile droit pénal général

a pu prévoir pour graduer celle-ci. C'est en quelque sorte l'étude du


catalogue des infractions, il occupe la majeure partie du code pénal
(de l'article... à l'article...). C'est sans doute Ia partie la plus ancienne

du droit pénal: on a commencé par établir les incriminations et les


peines. Les théories générales n'ont été édifiées que plus tard.

Au sein du droit pénal spécial, des spécialités sont apparues,


cofilme le droit pénal des affaires, le droit pénal économique, le droit
pénal du travail, le droit pénal des sociétés, le droit pénal fiscal, le
droit pénal boursier...

o Le droit pénal général

Le droit pénal général est un droit târdif, d'inspiration doctrinale


et jurisprudentielle, à forte dimension théorique. Il est issu de

I'observaüon du droit penal spécial à partir duquel furent peu à peu


dégagées les grandes lignes de la responsabilité pénale : ses conditions

et ses conséquences, c'est-à-dire les sanctions pénalesl.

C'est le droit pénal général qui prévoit les grandes catégories


d'infraction en fonction de leur gravité relative ou de leurs camctères
essentiels, et qui attache à chacun de ces catégories un régime
juridique déterminé; c'est lui qui précise les éléments (légal, matériel
et moral) dont la réunion est indispensable pour qu'une infraction,
quelle qu'elle soit, soit légalement constituée. Certains des traits
essentiels de cette discipline ne sont que des constructions
t . «Le droit Snat général est la gramrnaire ds la langue ffnale dont le dmit pénêl spécial foumit le
vocabulaire » VoirÈmmanuel DREYER, Droit frnal général, Lexis Nexis,Ztu pA,ZOt2,p. nA

4t
Gours rle droit pénal général

intellectuelles devant permethe de mieux expliquer des solutions


nécessairement éparses en droit positif.

B - Le droit pénal de forme

La mise en æuvre du droit pénal de fond (spécial et général)


suppose le déroulement d'un procès devant unejuridiction répressive.

Entre I'infraction commise et la peine prononcée se situe tout le


déroulement de la poursuite, c'est I'objet d'une autre branche de droit
pénal, la procédure pénale.

La procédure pénale ou droit pénal de forme comprend

l'ensemble des regles relatives à la compétence des juridictions, aux


différentes actions dirigées devant elle ainsi qu'aux licéité des preuves

devant la juridiction de jugementl. Le code de procédure pénale


contient l'essentiel de ces règles

C'est à travers cette discipline que sont conciliés les intérêts


contradictoircs de la société, de la personne poursuivie et de celle qui

se prétend victime.

Ceci dit, en plus des branches à caractère juridique composant le

droit pénal, ce demier relèverait des sciences criminelles.

I -La poédure qü président à la recherche, à Ia constatation des


frnale déærmine læ êgles
infractions, à I'administsation de la preuve, de I'imputabilité de celle-ci aux autew§ présumés, à la
fixation des peinæ infligées à ces derniers, Voir G.LEVASSEUR, A.CHAVONNE, J. MONTREfIL'
B.BOULOC, Droit pénal et Procédure pénale, Dalloz, 1999, P.l 3
42
Gours de drolt pénal génétal

II- L'aspect scientifique du droit pénal

Jadis appelées << sciences auxiliaires du droit pénal », elles ont

pris aujourd'hui une telle arnpleur qu'il parait difficile de conserver


cette expression.

En effet, dès I'instant oîr l'on a pris conscience que I'infraction


n'est pas seulement un acte contraire aux dispositions de la loi pénale
mais aussi un acte humain, il s'est avéré manifestement insuffisant de

limiter les sciences criminelles aux seules branches relevant du droit


pénal positif.

Si le droit criminel décide et édicte des incriminations et des

peines, les sciences criminelles, qui constatent ont pour objet


l'observation du phénomène criminel afin d'en comprendre la

dynamique humaine et sociale. Certaines permettent la découverte


des infractions et l'identification de teurs aut€urs, telle est la mission

de la criminalistique. D'autres ont un objectif plus ambitieux


puisqu'elles tendent d'expliquer le phénomène criminel, telle la
criminologie. Enfin une troisième catégorie vise à orienter la lutte
contre la criminalitét.

'- Jean PRADËL, Histoire des doctines penales, presses universilaires de Paris, 2"* édition 1991,
P.97

43
Gours de ürolt p6ml général

A- La criminalistique

Elle peut être définie coûtme l'ensemble des procédés


scientifiques ayant pour objet la détection des infractions, leur preuve
et I'identification de leurs auteurs.

Parfois, il n'y a qu'utilisation de sciences ou de techniques


préexistantes. Ainsi pour la médecine légale qui permet de connaihe

les causes de la mort d'un individu et les circonstances de cette mort


par I'examen du corps humain, la toxicologie qui renseigne sur la
présence ou la nature d'une foison, la chimie sur des fraudes

alimentaires, la balistique sur l'arme utilisée.

Parfois, il y a création de techniques spécifiques facilitant


l'identification des suspects. Ainsi l'anthropométrie qui a pour objet
I'identification des délinquants en fonction de leurs caractéristiques
anatomiques (longueur, largeur de la tête, taille, envergure), la
dactyloscopiequi est le procédé d'identification au moyen des
empreintes digitales. Il faut y ajouter des techniques plus
récentes comme ainsi le repérage par la texture de I'iris ou par les

empreintes génétiques.

S'appuyant sur les moyens modemes (ordinateurs surpuissants,


microscopes électroniques...), la détection des crimes et la recherche

de leurs auteurs est en progrès spectaculaire: elle est menée par des
laboratoires de police scientifique et technique.

M
Gours de droit pélal général

B - la criminologie

La criminologie est « constituée par l'ensemble des sciences qui


ont pow objet l'étude de crime en tant que phénomène individuel et
socialr »>. C'est donc une discipline qui tend à étudier la délinquance
dans l'espoir d'en améliorer les outils de prévention et 1es moyens de
contrôIe2.

A cette fin concourent des sciences médicales et des sciences


sociales.

*Les sciences médicales considèrent les causes endogènes de la

criminalité c'est-à-dire les causes intérieures à I'individu. Ainsi,


l'anthropologie criminelle, fondée par Lombroso, cherche ces causes
dans la constitution anatomique du délinquant. La biologie criminelle

dans sa physiologie et son système endocrinien. La psychologie et la

psychiatrie criminelles, dans le fonctionnent normal ou pathologique,


de ses processus mentaux...

* les sciences sociaux considèrent les causes exogènes de la


criminalité c'est à dire les causes extérieures de l'individu. La
sociologie criminelle, dont l'un des créations est Ferri, cherche des

t 2* édition 2012 p. I 13
-Emmanuel DREYER, Droit penat général, Lexis Neds,
2
-Le développement rapide de la criminologie a posé le poblèrne de ses rapports avec le droit
criminel. A l'origine les r€lations ont été conflictuelles : À la fin du l9o sièole les positivistes ort en
eff€t prétendu que le droit criminel devant êEe une branche accessoire de la criminologie, sa branche
juridique- Cette position ext émiste a suscité un€ réaction inverse selon laquelle la oriminologie no
serait qu'une aonoxe du droit oriminel. Aujourd'hü I'on s'accorde pour reconnaitre que droit pénal et
criminologie sont des sciencæs criminelles distinctes, mais liês erure elles par des raports é:lroits qü
proviennent d'une part de leurs communauté d'objets - le criminel et l'acte criminel- et d'autre part de
leur communauté de but -la défense de la société-. Voir Wilûid JEABDIDIER, Droit général,
Montckestien, 2h édition, 1991, P.72
45
Gours rle droit pénal g6n6ral

causes dans le milieu géographique, démographique et social


(influence de la famille, des études, de la profession, de mass-
media...).

C - La politique criminelle

La politique criminellerpeut être définie comme I'ensemble des

procédés susceptibles d'être employés par I'Etat pour lutter contre la

délinquance. Le droit criminel n'est que I'un des éléments de la


politique criminelle. En ce sens, le droit pénal apparait comme la mise
en forme jutidique de la politique criminelle dans le droit positif :

c'est une technique de mise en æuvre juridique de la politique.

Les poliüques criminelles peuvent être classées d'après les


rnoyens mis en æuvre: les unes accordent la prééminence au droit

pénal, les autres ont recours à des degrés divers au droit administratif,

au droit civil, voire à des procédures de conciliation extra-judicaires.

Les politiques criminelles se distinguent encore par leur objet, selon


qu'elles se préoccupent uniquement de la délinquance ou qu'elles
élargissent leur emprise à la déviance2.

C'est cette politique criminelle qui constitue la particularité du


droit pénal appliqué dans chaque Etat. Ce particularisme mène à se

poser la question sur l'autonomie de cette discipline juridique.

I -La
formule « politique criminelle » n'est pas récente. Elte serait apparue en 1803, dans un manuel
de I'allemand Feuerbach (1775-1t33). Lajuridiction de Strasbourg I'emploie tout en rÊcomaissant
que sa définition relève de la seule compétence d€s Etats, voir Emmanuel DREYE& Droit pénal
général, op cit, p I 16
'-Wilfrid JEANDIDIER, Droit pénal général, Op. cir., p,75

46
Gours de rkoit pénal général

§4 - Le particularisme du droit pénal

Parmi les diverses disciplines juridiques, le droit pénal a une


place bien originale en raison de sa fonction qui est la défense de
I'ordre social. Ce particularisme, souvent souligné en doctrine, n'est
pas sans conséquences.

Un débat fort académique oppose les partisans d'un rattachement


du droit pénal au droit public, qui connait des rapports ou I'Etat
intervient ; ou au droit privé, qui régit les rapports entre particuliersl,
Toutefois, ce débat ne saurait disparaitre sa spécificité.

I -Le rattachement du droit pénal au droit public

Certains juristes2 ont tenté de rattacher le droit pénal au droit


public puisqu'il traite de rapports enre l'individu et l'Etat. Cette
prééminence de l'aspect public se manifeste sur deux plans :

*Le premier est lié au rôle que joue l'Etat dans la production des

règles relatives aux infractions, aux sanctions et à la procédure. En


outre, I'Etat jouit du monopole de la mise en «ruvre de cet ensemble

de règles, qu'il s'agit là d'une prérogative de puissance publique sans

équivalent dans le reste du droit privé.

* Le deuxième plan se manifeste à travers f interdiction faite aux

parties de disposer de la mise en æuvre de la reaction pénale. C'est


I
-La question est d'importance car différents sont les intérêts en cause- respect de I'individu dans ùn
cas, primauté de I'lnterêtgénéral dans I'autre- etdivergentes sont lee méthodes de raisonnemenl Voir
Jean PRADEL, Droit pénal général, Cujas, 8* édition, 1992, P. 8]
2
-Mohieddine AMzAzI, Precis de droit criminel, Dar Nachr Al Maarifa, là' édition, 1994, P. 1l

47
Gours de drolt pénal général

I'Etat et lui seul qui a autorité en la matière. Même la victime de


l'infraction n'a qu'un rôle limité dans l'instance pénale. La
renonciation de la partie civile ou son désistement ou la transaction
n'influent qu'exceptionnellement sur le sort de I'action publique et
son évolution. Si l'infraction apparait souvent comme une atteinte à

un bien juridique individuel, il est fondamental de ne pas ignorer


l'éminente importance de ce bien pour la collectivité: la vie,
I'integrité corporelle, la foi publique, la propriété... sont des valeurs
essentielles que tout système juridique droit protéger. Si le meurtre est

le fait de donner la mort à autrui, son incrimination et la répression de


son auteur sont fondées sur l'intangibilité de la vie humaine et sur le

droit pour le groupe social de réagir contre le meurtrier.

II- Le rattachement du droit pénal au drolt privé

D'autres juristes, en s'attachant à la technique utilisée par le droit


pénal, ils ont pu conclure que cette discipline s'apparente davantage
au droit privéI.

*Tout d'abord, le droit criminel est en gmnde partie orienté vers

la défense de droits subjectifs de I'individu: le patrimoine, la liberté,


la vie, l'honneur. L'un des buts essentiels de la loi pénale consiste
précisément à protéger les biens et I'intégrité des personnes. Ainsi, en

réprimant par exemple le délit de vol, le code pénal cherche à défendre

un droit privé : le droit de propriété.

I à I'étude de droit, lmprimerie Najah El Jadida-Casablanca,


-Mohamed JALAL ESSAID, Introduction
4é* edition,2010, P. 33
48
Cours rle rlroit p6nal général

*On ne saurait ensuite oublier que ce sont les mêmes magistrats

qui composent les juridictions répressives et les juridictions civiles


(principe de l'unité des deux justices, civile et pénale). Ainsi,
I'assimilation du droit pénal et du droit privé se retrouve également au
niveau de l'organisation j udicaire.

*Faut-il ajouter que les regles de la procédure pénale sont


élaborées en considération d'interêts privés puisqu'elles s'efforcent

d'assurer la sauvegarde des droits et des libertés de l'individu


poursuivi. Il est presumé innocent tant qu'un jugement définitif n'aura
pas constaté sa culpabilité, d'autant plus que les droits de la défense

lui sont garantis.

III -La prétention autonomiste du droit pénal

Pour la plupart des chercheursl, le droit pénal n'est ni une


branche du droit privé ni une branche du droit public car sa mission
est d'assurer la sanction des règles posées par des disciplines de ces

deux grandes familles juridiques.

Cette autonomie, qui résulte tantôt de prescriptions légales


fonnelles, tantôt de manifestations jurisprudentielles, tient à l'objet
particulier du droit criminel et à la mission spéciale des tribunaux
répressifs qui ont la charge de I'appliquer. Il s'agit en effet de
protéger les intérêts essentiels de la société, et cela explique que,

partout où ces intérêts sont en cause, même quand le droit pénal ne


I
6aston §TEFAM Georges LEVASSEUR" Bemard BQLJLOC, Doit fnal générat, Dalloe ll Ed.,
2000, P. 30

49
Cours rle droit pénal général

fait qu'apporter à d'autres droits le secours de ses peins, c'est lui-


même et lui seul qui doit déterminer ies conditions dans lesquelles ces

sanctions sont prononcées et appliquées.

C'est ainsi qu'il y aura infraction en matière de chèque même si le


document en question ne remplit pas les conditions formelles
d'existence du chèque, qu'il y aura abus de confiance malgré la nullité

du contrat qui a déterminé la remis de la choser.

Cette autonomie est également justifiée par le fait que la justice


penale doit être individualisée: dans l'élaboration de la décision, le
juge répressif lié sans doute par la loi, doit tenir compte des

caractéristiques de la personnalité du délinquant, il doit en outre tenir


compte de ses conditions subjectives propres à la fois pour établir son

degré de responsabilité et pour déterminer les moyens les plus aptes à


2
assurer sa réinsertion sociale . Alors que le juge civil ne doit
considérer que la qualité juridique des parties et I'analyse objective de

leurs prétentions.

Pour apprécier la nécessité de cette autonomie du droit pénal, il


convient d'examiner la diversité de I'infraction pénale. Cet examen va
nous permettre de mesurer sa complexité

' -voir article


547 du code Snal.
'-On ne manque pas de rappelor que « I'inûadion pénale ne se résume pas à la violation de telle ou
telle normc & conduite, puisque le législateur prend aussi cn cornpte la gravité de la faute pour
apprécier I'atteinte portée À la valeur sociale protégée ». Voir Emmanuel DREYER, Doit pénal
général, Lexis Nexi s, 2tu H., 2012, P. 62

50
Cours de droit pénal général

Chapihe 2 : L'lnfracüon pénale : dlyercité et


complqlté
L'évolution de la société fait que les comportements d'écarts aux
normes réputées nourrir le sentiment d'insécurité est également en
évolution constante. Les incriminations ont été multipliées ce qui
suscite une attention particulière des pouvoir publics. L'application de
la sanction aux délinquants est inévitable.

En effet, l'infraction ou incrimination est tout fait prévu et puni


par la loi pénale. Bien que certains auteurs emploient indifféremment
I'infraction et l'incrimination, Ies deux notions se distinguent
nettement. L'incrimination est le fait pour le législateur de rendre un

comportement criminel alors que l'infraction est l'attitude du citoyen


qui transgresse les interdis du législateur. On peut dire que le

législateur établit des incriminations et que l'individu commet des


infractions, d'où la nécessité de préciser le concept de l'in&actionr.

L'infraction est ainsi I'expression et la matérialisation d'un


interdit pénalz. Cette définition légale répond à un souci prédominant
d'ordre technique, mais elle n'exclut pas pour autant la coloration
morale etlou sociale de I'acte; ce qui justifie la diversité d'approches
qui portent sur la notion de l'infraction.

r-
Je{n PRADEL, Droit pénal général, CUJAS, tom I, 199 l, P. 266.

'?- Wilfrid JEANDIDIER, Droir général, Montctuesüeq 2é* édirion, 1991, P.213.

51,
Gours rle droit pénal général

Soctlor I r Dlvcrdtô d'rpprochel


Une définition exacte de I'infraction serait toute action ou
omission prévues et punles par la loi pénale parce qu'elles choquent la

morale et trouble l'ordre social. Cette défrnition met I'accent sur la


particularité des approches morales et sociologiques qui fournissent
des définitions idéales à l'infraction auxquelles il faut renoncer (§l).

De même, I'infraction n'est pæ le seul fait nuisible, antisocial que

la loi sanctionne. Par exemple, celui qui a causé un préjudice est


condamné à verser des dommages- intérêts, on dit qu'il a commis un
délit civil. Un médecin à la vie scandaleuse est radié de son ordre
professionnel, on dit qu'il a commis un délit disciplinaire. Ce qui
nécessite de de chercher en quoi ces délits se distinguent-ils de
l'infraction pénale ? (§2)

§1 - Renoncement aux déffnltlons idéales de l'infraction

Une définition idéale de l'infraction s'elle paraîÎ satisfaisante


pour I'esprit, elle serait pour la plupart des auteurs, insuffrsante aussi
bien pour la protection de la liberté individuelle de ceux auxquels on
peut songer à l'imputer que potlr la défense de I'ordre social en sorte
qu'on a dt renoncer aussi bien à une définition morale qu'à une

dé{inition sociologiquel.

r- général, Ellipses, 2004, P.263.


Michèle-Laure RASSAT, Droit t'nal
52
Gours tle droit pénal général

LDéfinition morale de l'infraction

Selon cette conception, l'infraction est un fait moralement


répréhensible.

En effet, cette définition serait la source d'une très grande

incertitude et par conséquent d'un arbitraire important. Les


conceptions morales peuveht être très exigeantes pour certains et très

souples pour d'autres et il n'appartient pas à la collectivité de déftnir

des normes morales moyennes. D'autant plus qu'un grand nombre

d'in&actions sont tout à fait indépendantes de considerations morales :

s'il est indispensable au bon fonctionnement de la circulation que tous

les automobilistes roulent sur le même côté de la chaussée, et par


conséquent que I'on punisse ceux qui ne se conforment pas à cette

règle pratique, aucun argument morale ne peut conduire aux choix de

la partie droite ou de la partie gauche de la routel.

Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que la grande part de la


morale continue à fonder la plupart des incriminations au moins
classiques. D'ailleurs, l'évolution du droit pénal a fait de ces
incriminations b'origirre morale de véritables règles de droit au profit
de la consécration et de la sanction étatique2.

'- ftia p zo+.


'- ll s'agit de distinguer entre I'infiaction par nature et I'infraction par déteminstion de la loi. La
premièri est ælle qui est incrirninéc puce que dans unc société domee, elle ne peut pas nc pas l'êtrc.
Le meurtr" ou le vol en sont les ÿpes. L'infraction par déterminaiion de la loi est le fait incriminé
pour répondre à certains objectifs moralernent neutres mais jugés socialement rüiles à un moment
àonné à b /us süvent, c{ntrngÊnts et variables. Ce sont les inftactions économiques, sociales,
æchniques,...ètc. Cette classification correspond à la distincion du droit pénal naturel et du droit Snal
artificiel. Ibid P.264.
53
Courc rle ûroit pénal général

Ainsi, il ne s'agit pas d'exclure la morale du droit pénal mais de

constater qu'elle est techniquement insuffisante pour servir de critère

à I'infraction.

II.Défi nition sociologlque de I'infraction

Selon la conception sociologique, l'infraction est tout fait qui

trouble I'ordre social. Cette définition q sur la précédente, l'avantage

d'inclure le droit pénal artificiel, mais elle a l'inconvénient de ne pas


permettre de savoir quand un comportement directement préjudiciable

à un particulier devient suffisamment grave pour qu'on puisse


considérer qu'il porte atteinte aussi à I'ordre public. A quel stade, par

exemple, le droit pénal droit- il intervenir quand un individu s'impose


dans un lieu occupé par autrui : quand il passe sur son champ, quand
il pénétra dans son jardin ou seulement quand il entre dans sa

maison ?

En effet, dire qu'un fait est répréhensible quand il trouble l'ordre


social oblige d'abord à définir ce qu'est I'ordre social, pas forcément
compris de la même façon par tous les groupes qui, réunis,
constituent un Etat donné ; ce qui fait dire à une partie de la doctrinel

que la définition sociologique de l'infraction est, comme la


précédente, imprécise et somme d'arbitraire.

De ces définitions précédentes, on déduit donc qu'il y a des


conceptions fort-différentes de l'infraction, suivant qu' elles émanent

'- tbid. p zet.


54
Cours rle rlroit pénal général

de telle ou telle discipline. Mais qui quoil en soit de cette coloration


particulière, la règle est que la seule définition compète et précise
I' infraction est purement juridique.

§2- Spécificités de la déflniHoniuridique de I'inftaction

Du point de vue juridique, on peut défxù I'infraction par l'action


ou l'omission imputable à son auteur, prévue par la loi et punie d'une

sanction pénalel.

Prise dans ce sens, I'infraction est souvent appelé le délit, c'est


aussi, au sens étroit et précis, on le verre, une infraction d'une gravité
moyenne, intermédiaire entre le crime et la contravention.

Toutefois, il est fréquent qu'un même fait constitue plusieurs


manquements à la loi pénale d'abord et d'autres branches du droit
ensuite. Le meilleur exemple est celui d'une violation du secret

professionnel par un médecin qui constitue une faute déontologique


(disciplinaire), une faute civile à l'égard de son client et une infraction
pénale. Ce qui nous mène à distinguer le délit pénal d'une part du délit

civil et d'autre part du délit disciplinaire.

l- hise dans ce sens, l'infraction est souvent appelée le déli! c'est aussi, au sens étroit et précis, une
infraction d'une gavité moyenne, intermédiaire en§e le crime et ls contravention Voir Bemard
BOIILOC, Droit penal généml, Dalloz, 24e Ediüoq 20t5, p 92.
55
Gours de rlrolt p6lal g6léral æ
I -Délit pénal et délit ciÿil

Le délit civit diffère de I'infraction pénale à ûois égardsr :

-Quant à la source : le délit civil est toui fait fautif qui cause à
autrui un dommage. La liste dês fâutes n'est pas à l'avance dressée de
façon limitative. Au contraire, I'infraction pénale figure
nécessairement sur un calalogue exhaustif, décrivant de façon précise

l'acte visé « pas d'infraction sans texte ».

-Quant ru résultat: le délit civil n'existe pas sans un dommage


causé. Au contraire, I'infraction penale pouvant exister
indépendamment de la réalisation d'un dommage (excès de vitesse,

simple tentativg délit manqué, pod d'armes prohibées), et la sanction

est souvent indépendante du résultat. Même si le juge peü en tenir


comple pour I'individualisation de la peine, il ne s'agit-là que d'un
élément d'appréciation parmi d'autres.

-Quant à la sanction: l'indemnisation, sanction du délit civil,


profite à la victime. La peine, sanction de I'infraction pénale, vise à

protéger la societé et à resocialiser le délinquanl, elle ne « profite »


pas à la victime.

Le droit civil connait pour sanctionner ses prescriptions tout un


arsenal de sanctions qui lui sont propres: nullité, révocation,
déchéance, inopposabilité...A l'inverse, il arrive que les obligations
posées par le droit civil soient si importantes que leur inexécution
t-Je$-ClaudeSOYER,Droit!énolerprocéôæÉnale,L.O.D.I,l2hédition,20c/,p-4245

56
Gours üe rilroit pénal g6n6ral

transcende les personnes directeur intéressées et risque de causer un

trouble social. Dans ce cas, il arrive qu'on incrimine pénalement un


semblable manquement: abandon de famille, non-représentation

d'enfant.

En effet, On se trouve totalement en droit civil quand la non-


exécution d'une obligation trouve sa sanction en droit civil seul, on
passe totalement en droit pénal quand le non-respect d'une situation

de droit privé donne lieu à une inuimination.

Ainsi, lorsqu'un délit est à la fois civil et pénal (co-ups et

blessures) il à deux actions: l'action publique pour


donne leur
l'application de la peine, I'action civile pour la réparation du
dommage. Toutefois, il peut y avoir infraction pénale sans délit civil
(par exemple, violation d'un << stop » non suivie de collision), ou délit

civil sans infraction pénale (par exemple, le peintre d'une façade, en

manæuvrant son échelle de façon maladroite, casse une baie vitrée).

IL Délit pénal et délit disciplinaire

La faute disciplinaire consiste dans la violation des règles

particulières à des groupements restreints: sociaux ou professionnels


(fonctionnaires, magistrats, avocats, médecins, topographes..').il
difGre de I'infraction pénale à trois égards :

-Quant à la source: la faute disciplinaire peut résider dans un


fait, sans doute contraire aux intérêts collectifs du groupement social

37
Gours e rkolt pénal général æ
rÊsFeint, même s'il n'est pas expressémenl interdit par les règles de ce

groupement; aulrement dit sans que le fait soit nécessairement

désigné à l'avance de façon précise (ainsi, tout manquemant à la


honneur, à la dignité ou à I'honorabilité sans autre précision - peut

constituer de la part d'un médecin, une faute disciplinairel) ; ators que


I'infracüon pénâle est limitativement prévue par le législateur et
résulte ainsi de la violation de la loi pénale.

-Qu.nt au r&ultat : le délit disciplinaire ne perhrbe qu'un ordrc


juridique particulier au groupement en cause; I'inftaction pénale
perturbe un ordrejuridique général, d'application beaucoup plus vaste.

-Qusnt à la sanction : alors que le délit pénal ne puisse être puni


que de peirs préwes par la loi pénale, et prononcées par un tribunal

répressif, le délit disciplinaire enhalne I'infliction de mesures


disciplinaires concemant exclusivement I'exercice de la profession
(blâme, suspension temporaire de I'exercice de la profession ou même

exclusion du groupement). Ces mesures disciplinaires sont


généralement prononcées par les juridictions disciplinaires (exemple :

conseil de I'ordre pour les avocats, les médecins et les ingénions


topôgraphes.,,, conseil de la faculté pour les étudiants...) et elles sont

de beaucoup inferieu$ aux sanctions pénales (réclusion criminelle),

r- Le dâhir n' l-13-16 dù 13 mars 2013 porEnt pfomulgÂtion de Ia loi D'08-12 rÊlâtive à I'ordrc
nstional dês méd€ciB dispôsÊ &n3 son adiol6 2 qu. : « l'ordre nliioIal dês médecinsl. .] â pour
objet d'âssurer lâ sâwe8a.de des principê§, lrôdilions el valÊüs de morÀlité, de dignité el d'abnégation
qui fond l'honneur d€ la pmfession d. médecin... I
s8
Gours rle droit pénal g6néral

En effet, une infraction pénale peut également être un délit


disciplinaire. Par exemple, un médecin s'est rendu coupable d'un
avortement illicite. Dans cette hypothèse, on admet généralement que
la décision disciplinaire ne doit pas contredire la décision pénale.

C'est que le disciplinaire veille au respect de règles particulières à un


groupe. Le pénal, qui veille au respect de règles civiques s'imposant à

chaque citoyen, dispose d'une force supérieure.

Toutefois, il faut souligner que sous la notion d'infraction, se

trouvent des infractions, au pluriel, d'autant plus que par hypothèse


toutes les infractions différent les unes des autres et ne sauraient donc

avoir le même régime, ce qui nécessite d'y mettre un peu d'ordre en


les répartissant en diverses catégories, par famille. C'est le classement

des infractions.

59
Goun dc droit pélal général æ
tcdlonl r lr tlorrrmrnt dle lllrortlotrt

Nombreuses et variées sont les divisions et classifications des


infractions et leur exarÈn exhaustif permet d'avoir une connaissance
complète non seulement de la théorie de l'infraction mais encore de

celle du décliquent. Parmi les classifications principales des

infractions, trois groupes peuvent êtr€ distingués. Dans un cas, le


critère de la cla§sification est tiré de la définition légale des

infiactions, dans un autre, des formes de l'exécution matérielle que


peuvent prendre celles-ci, dans un troisième cas, de I'existence ou de

I'intention coupable (élément moral).

§1- Classifications fondées sur l'éIément légal

Deux types de clarifications sont inspirés du critère légat selon


que le législateur a considéré la gravité de I'inûaction ou sa nature.

I.Lâ classilicadon fondée sur la gravité de l'lnfraction

L'article 1l I (a1,1) du code pénalr dispose que les infractions sont

qualifiées crime, délit conectiormel, délit de police ou contravention :

-L'infraction que la loi punil d'une des peins prévus à I'article 16

est un cdme.

-L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisomement dont


elle fixe le maximum à plus de deux ans est un délit correctionnel.

l- prli' 4111-l t1 dlj 26 nôvembÿe 1962 podânl approbation du iexte du code FÉnal, pubtié &u
bulletin ofïi€ielû'2640 du05jun i 963, P 841
60
Gours üe drolt pénal général

-L'infraction que la loi punit d'une peine d'emprisonnement dont


elle fixe le maximum à deux ans, ou moins de deux ans, ou d'une

amende del200 dirhams est un délit de police.

-L'infraction que la loi punit d'une des peines prévues à l'article


l8 est une contravention

Selon l'article 16 de la loi pénale, les peines criminelles sont :

l-La mort

2-La réclusion perpétuelle

3-La réclusion à temps pour une durée de 5 à 30 ans

4-La résideno. r#e.


5-La dépravation civique

Les peines délictuelles principales (art 17) sont :

l-L'emprisonnement

2-L'amende de plus de 1200 dirhams.

La durée de la peine d'emprisonnement est d'un mois au moins et


de cinq années au plus, sauf les cas de récidive ou autres où la loi
détermine d' autres limites.

Les peines contraventionnelles principales (art 18) sont :

61
Gours rlc rkolt p6nal gél6ral

l-La détention de moins d'un moins.

2-L'amende de 30 dirhams à 1200 dirhams

En effet, cette division tripartite de I'infraction, établie d'apres la


peine, bien qu'elle présente des intérêts, elle a suscité plusieurs
critiques à cause de certaines difticultés de son application.

A,Intérêts de la division tripartlte de l'lnfraction


-
Cette division obéit à un régime juridique particulier tant à
propos des règles de fond que celles liées à son régime procédurale.

a. Du point de vue de la procédure

Relativement au jugement, les crimes relèvent de la chambre

criminelle près la cour d'appel, les délits et les contraventions


relèvent de la compétence des tibaux de première instance.

Le regime juridique de la mise en æu'vre de I'action publiqræ


relativement à la prescription est diffèrcnt : pour les crimes, le délai de
prescription de l'action publique est de 15 ans, 4 ans pour les délits et
un an pour Iês contr€factions, le tout à compter du jour de la
commission de I'infractionl.

r-
Arlicl. 5 du dahir n" L02.255 dü 3 octohe 2002 portant promügation dc h loi n 22.01 relstive À
l, pro{édûre pémle.

62
Cours de üroit pénal gén6rd

b,Du point de vue des règles de fond

-Le régime de la tentative : toute tentative de crime est assimilée


au crime consommé (article 144 du C.P), la tentative du délit n'est
punissable qu'en vertu d'une disposition spéciale (art 115 C.P) et la

tentative de contravention n'est jamais punissable (art 116 C.P)

-Le régime de la complicité: la complicité en matière de crimes


et des délits est punissables, mais jamais en matière contraventionnelle

(art 124 C.P).

-Le régime de la culpabilité : s'agissant des crimes et délits, le


ministère public droit prouver la faute de la personne poursuivie; alors

qu'en matière contraventionnelle, La faute est présumée et le


contrevenant droit prouver l'existence d'un cas de force majeure.

-Le sursis ne bénéficie que pour les infractions qualifiées de


délits. Ceci dit, cette classification tripartite souffre de certaines
défaillances. C'est pourquoi elle a été souvent critiquée.

B.Critiques de la distinctlon

Elles sont nombreuses et plus ou moins dignes de considération :

a. L'illogisme : ce n'est pas de la gravité de la peine que doit


dépendre la gravite de l'infraction. Une position logique, dit-on, serait

63
Gonrs rle rfuoit pénal g6néral æ
de déterminer d'abord la gravité de I'infraction puis d'en dédüre la
peine, alors que le code pénal raisonne à l'enversl"

b. Le caractère artif,clel : la deuxième critique apportée à cette

division tripartite de l'infracüon résulte de son incapacité de séparer


nettement les crimes et les délits. Leur caractère artificiel apparâit
manifestement lorsque par I'effet des circonstances où il a é1é

commis (circonstances aggravantes), le délit devient un crime (ex. vol

aggravé par le port d'une arme)2.

En effet, ces critiques et autres, découlent surtout de quelques


diflicultés d'application que le principe de classification pÉsente,

C Diffi cultés d'applicaüonr

L'application de cette classification tripartite révèle de


nombreuses difficultés qui se présentent à des niveaux divers :

a, Les pelnes hybrldes: la peine édictée par le texte est


délictuelle par son maximum mais conventionnelle dans son
minimum. La jurisprudence considère que c'est ce maximum qui droit
fixer la qualification pénale, puisque le juge est en mesure de le
prononcer.

b. La quallflcatton de l'lnfraction : à ce niveâu, [a difficulté a

hait à lâ variation de Ia peine provoquée par des circonstances

I-
Michèle-Lsure ttAssAT, Op.cit., P.275
a Bema'd BOULOC, Op cit., P l8l

64
Cours r[e rlroit pénal général

atténuantes ou en czrs de récidive; dans ce cas, le législateur prévoit

lui-même la solution en précisant que de ces cas, la catégorie de


I'infraction n'est pas modifiée.

Ex, à propos des circonstances attenantes appliquant l'excuse de

minorité prévue par l'article 139 du code pénal. Cet article prévoit
qu'en matière de crime ou de délit, le mineur bénéfice d'une excuse
de minorité. La peine est alors atténuée en vertu de I'article 517 du
code de procédure pénale. Si I'infraction est passible de la peine de
mort on de la réclusion criminelle à perpétuité, la peine est de dix à

vingt ans.

Le même principe d'atténuation s'applique à propos des excuses


de provocation prévues par les articles 416 à 421, sanctionnées alors
par les peines prévues à l'article I 7 du code pénal'

Dans ces cas, la qualification pénale initiale demeure inchangée

nonobstant les causes attentives de la peinel.

Quant à la récidive, I'application de ses conséquences conduite le


juge repressif à appliquer à l'agent une peine plus lourde que celle
prévue par le texte violé. Cette peine aggravée en raison de l'état de

récidive ne modifie pas elle aussi la nature initiale de f infraction


commlse.

l-Aproposdescirconstanc€sattenant€sengénéral, préviensparlesarticles146àl5lducode$nal,
elles-podüsent le meme effet quant au mainüen de la qualifioation initiale.
65
Cours rle rlroit pénal gén6ral æ
Il- Classifications fondées sur la nature de l'infractlon

Il s'agit là de disünguer les infiactions de droit commun des

infractions politiques d'rme part et de celles militaires d'aute pad. De


même, une distinction enhe I'infraction du droit commun et
I'infraction terroriste s'impose.

ÀInftaction de droit communl et infractions politiques

La notion d'infraction politiques est difficile à déterminer parce


que le législateur non seulement n'a pas foumi une numération
limitative des infractions qui serait politiques, mais encore ne donne
pas de définition générale"

La distinction entre les infractions de droit commun et celles


politiques a fait I'objet d'un débat doctrinale pour en déterminer les
critères.

a. Le débat doctrinal

D'emblée, lorsque les criminologies se penchent sur la violence


politique, ils posent une distinction essentielle :

-Ceux qui par ruse ou strâtégie pacifiste entendent agir sur les
mécanismes d'appropriation du pouvoir.

I-
L€s infractiom diles de droit commlnl sont cclles qui De sont ni pôlitiques ni militaires. Voir
G.Levssscur, A.Chsvoûte, J.MoDtreüI, B.Bouloc, Droit péîal ct procédùr. Énale, Dalloa 1999,
P.26

66
Gours de üroit p6nal général

-Ceux qui par violence ouverte et déclarée tenant à la même


ambition

Les premiers, des aristocrates de la criminalité n'ont jamais


constitué un sujet particulier de préoccupation pour les criminologues.

C'est une lutte entre des systèmes de gouvernement plus qu' << entre

les hommes» et même pour certains comme Lombroso, ce ÿpe de

délinquant « accélèrent l'histoire» ou encore une forme de

« criminalité artificielle» selon Garofalo. Ce sont des délinquants par

idéologie caractérisés par un certain état d'esprit, même, s'ils sont


attirés par le pouvoir.

A l'égard de ses délinquants, I'application classique du système

répressif serait du reste inefficace et l'ambition recherchée par un


pareil système ne serait pas atteinte.

b. Critères de distinction

Deux critères sont concevables

o Selon le critère objectif, l'infraction est politique quand son


objet (d'oir le mot objectif) est politique, Ainsi, le complot en vue de
changer le régime constitutionnel est objectivement politique.

67
Gours dg drolt pénal général rilrrrr*iur**ilü rr !,f,! rirri{llrrrrr | !t!!! !

o Selon le critère subjectif, l'infraction quelle qu'elle soit


devient politique si le mobile de son auteur (c'est-à-dire de son sujet
d'où le mot subjectif; est un mobile politiquel.

Chacun de ces critères est en lui-même précis, mais la réalité


présente des situations délicates, parce que mêlant le politique et le

non-politique. Par exemple, I'assassinat d'un ministre est

objectivement une infraction de droit commun, mais la qualité de la


victime révèle le mobile politique de I'assassinat. On parle ici
d' infraction complexe.

Autre exemple, un vol d'armes dans une armurerie lors d'une


insunection; le vol est objectivement une infraction de droit commun,
mais le contexte de l'agissement révèle le mobile politique du voleur.
On parle ici d'infraction connexe puisque le vol, distinct de

l'insurrection, s'y rattache cependant.

c. Intérêts de la distinction

notre droit ne prenait pas contrairement


Malheureusement, à

certaines législations une véritable nomenclature quant à


l'établissement d'une échelle de peines aux infractions politiques;
Toutefois, leur distinction aux infractions de droit commun présente
un intérêt surplusieurs plans :

o Au niveau de I'exécution des peines, il n' y a aucune différence


dans le traitement entre délinquant de droit commun et délinquant
I-
Jean- Claude SOYER, Droit pénal et Procédure pénale, Op.cit-, P.46.

68
Cours rle droit pélal général

politiquel, c'est à dire, les attentats et complots contre le Roi, la


famille royale et attentats et complots conte la forme du
gouvemement, des crimes et délits contre la streté extérieure de l'Etat

et les crimes et délits contre la sûreté intérieure de I'Etat sont assimilés


aux crimes et délits du droit com.mun.Toutefois, les infractions
politiques sont instruites et jugées par priorité comme affaires
urgentes2.

o Dans la rigueur de la terminologie, la peine d'emprisonnement


prononcée contre un délinquant politique est une « détention »ret non

<< une réclusion ».

r La condamnation poncée ne fait pas obstacle à l'octroi


ultérieurement d'un sursis, pas plus qu'elle ne constitue un obstacle à

I'octroi des circonstances atténuantes ou une cause d'aggravation en


cas de récidive. Le délinquant politique ne peut faire l'objet d'une
extradition.

r Le jugement des infractions à connotation politiques relève de

la compétence du tribunal militaire3.

B. Infractlon de droit commun et infraction militaires

L'armée est un monde à part, hermétique et hiérarchisé à

I'extrême. Toute atteinte à la discipline militaire doit ête réprimée

t-
L'article 218 du dmit pénal prévoit que « pour l'exéeüion des peines, crimes et délits prérues au
présent chaptre sout considérés comme des crimes a délits de droit commun ».
' - Article 2 16 du code pérul.
!-
Article 6 du code dejusüce militaire.
69
Gours de ilrolt p6nal général

pour effet d'exemplarité, sous peine de désagrégation de ce groupe


social au particularisme si accentué. Comment caractériser l'infraction

militaire ? Quel est l'interêt de sa distinction avec l'infraction de droit


commun ?

a. Notion de l'lnfraction milltaire

Deux critères sont théoriquement envisageables :

. Critère Subjectif: Dans ce critère, on met en évidence soit la


nature intrinsèque militaire de I'acte, soit I'auteur portant la qualité de

militaire. Ainsi, seront qualifiees d'infraction militaire par nature (qui


ne peuvent être commises que par les militaires : L'insoumission, la
désertation, l'insubordination, les mutilations volontaires, les
sabotages contre le matériel militaire.

. Critère objectif : En vertu de ce critère, le délinquant peut être :

-Toutefois personne auteur d'un fait qualifié de crime commis au


préjudice de l'armée.

-Toute personne pour un fait qualifïé de crime lorsqu'un ou


plusieurs membres des forces armées sont coauteurs ou complices.

- Toute personne perpéhant une infraction contre la streté


intérieure de I'Etat en tenant compte des dispositions des articles 190
et202 du code pénal.

70
Gours de droit pénal génétal

b. Intérêts de la distinction

Ces intérêts se manifestent différemment selon qu'il s'agisse du


plan national ou du plan intemational.

Sur le plan national : les infractions militaires relèvent de la


compétence des Forces armées royales. Juridiction militaire et par
nature d'exception. Elle peut prendre à l'égard des auteurs poursuivis

toutes les sanctions classiques mais aussi des sanctions propres à


l'univers militaire, le tout dominé par un esprit de sévérité.

Sur le plan intemational : l'extradition n'est pas appliquée en


matière d' infraction mil itaire

C- Infraction de droit commun et infraction terroriste

Généralement, toute infraction de droit cofirmun pourrait être

qualifiée d'infraction de terrorisme lorsqu'elle a été commise dans un


certain but. Ce qui nous conduit à préciser le critère et I'intérêt de
distinction.

a. Critère de distinction

Les règles relatives au terrorisme sont issues de la loi no 03-03

relative à la lutte contre le terrorisme promulguée par le dahir n"

7L
Courr rlc droit pénal général

1.03.140 du 28 mai 2003r telle qu'elle est modifiée et complétée par la

loi 86-14 du 20 mai 20152.


-i-
Pour êhe soumises à un régime juridique distinct de droit

commun, les infractions en cause doivent êtrc intentionnellement en


relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but
I'atteinte grave à l'ordre public par I'intimidation, la terreur ou la
violence »3.

Le terme « entreprise » est à la vérité assez peu précis, et paraît

impliquer une organisation, un plan d'action ou un dessein formé à


l'avance. Peu importe par ailleuts le nombre de participants à cette
enheprise, puisque la loi envisage « I'entreprise individuelle». En
revanche, I'agent doit avoir comme but de houbler gravement I'ordre

public par l'intimidation ou la terreur, c'est à dire une peur collective

de la population pour I'amener à céder ou inciter le gouvemement à


céder.

b. Effet§ de lâ distinction

La distinction entraine des conséquences sur la compétence et la


peine.

. Relativement à la compétence: Les nouvelles dispositions du

code de la procédure pénale prévoient, et ce nonobstant toute

I-Br lctinofficiel î'5114 dujcudi 5iuin 2c,03.


r- Promul8uée per le dahlr n'1-15-153 dû 20 môl 1953, Bülletln olfichl n'6366 du t)4 iuln 2015,
P.3027-3028.
'' Articlc 218 (d.1) du code Énrl.
72
Cours rle droit pénal général

disposition contraire, que sera poursuivie etjugée devant lajuridiction


marocaine compétente, toute personne de nationalité marocaine ou
étrangère ayant commis hors du territoire marocain en sa qualité
d'auteur principal, de coauteur ou de complice, le crime de terrorisme
qu'elle vise, ou par I'atteinte au Maroc ou à ses intérêts.

Toutefois, si les actes en question ne visent pas le Maroc, et qu'ils


ont été commis par un éhanger et hors du territoire du royaume, leur
auteur ne peut être poursuivi ni jugé que s'il se trouve sur le sol

marocain.

. Relativement aux peines : La peine encourue pour I'infraction

terroriste est aggravée d'un échelon. Selon I'article 218(41.7) du code


pénale : Ie maximum des peines préwes pour les infractions visées à

I'article 218 (a1.1), est relevé comme suit, lorsque les fais commis
constituent des infractions de terrorisme :

-La mort lorsque la peine préwe est la réclusion perpétuelle ;

-La réclusion perpétuelle lorsque le maximum de la peine prévue


est de 30 ans de réclusion ;

-Le maximum de peines privatives de liberté est relevé au double,


sans dépasser trente ans lorsque la peine prévue est la réclusion ou
l'emprisonnent;

-Lorsque la peine prévue est une amende, le maximum de la peine

est multiplié par cent sans être inférieur à 100.000 dirhams ;

7l
Goun de trolt p6nal gfu6ral æ
-Lorsque l'auteur est ne personne morale, la dissolution de la
personne morale ainsi que les derx mesurcs de streté préwes à
l'article 62 du code pénal doivent être pmnoncées sous réserve des

droits d'autrui.

§2- Classiftcatlons fondées sur l'élément matériel

La distinction des infractions fondées sur la matérialité est


classiquement envisagée soit d'après le mode d'exécution matérielle,

soit d'apres le résultat, soit enfin sn partant de la localisation dans le


temps de leur constations matérielle.

I.Le critère quant au mode d'exécutlon

En partant du mode d'exécution matérielle, on distingue

I'infraction d'action ou de commission, les infractions d'inaction ou


d'omission, les iofractions instantanées et les infractions continues ou
successives, les infracüons simples et les inftactiors complexes.

A, Inftaction instantanés et infractions continues

L'infraction instantanéê est celle qui se réalise en une période de

temps pratiquent négligeable: vol, meurtre, cela ne veut pas dire


qu'une telle infraction n'exige pas parfois une longue préparation, elle

se trouve néanmoins consommée en un instant.

L'infraction continue (que I'on appelle aussi successive) est celle


qui se prolonge dans le temps par une réitération constante de lâ
volonté du coupable après l'acte volontaire initial. Ce sera par
74
Gorrs rle droit pénal géléral

exemple, le cas de la non- représentation d'enfant, de l'abandon de


famille, du port illégal de décoration qui exige une nouvelle intention
coupable à chaque nouvelle sortie du délignanl du recel de choses
volées qui exige que le receleur conserve volontairement le chose

reçue en connaissant la provenance frauduleuse.

L'infraction continuée constituerait une catégorie intermédiaire.


C'est la réitération d'une série d'infraction instantanées de même
nature, liées entre elles par une intention unique : le vol de gaz ou
d'électricité par branchement clandestin, le déménagement d'une villa
ou le voleur es obligé de faire plusieurs voyages. En raison de l'unité
d'intention, la jurisprudence soumet ces infractions continuées au
régime des infractions continuesl.

a. Eléments de distinction

C'est le temps d'exécution ou la possibilité de se prolonger dans


le temps qui permet de distinguer entre les deux infractions.

L'infraction continue est une infraction dont le temps corstitue


l'un des éléments constitutifs ou celle qui peut connaître un
prolongement dans le temps postérieurement à sa commission.

'- G.Levasseur, A.Chavonne, J.Montreuil, B.Bouloc, Droit Énsl et trocédure pénale,Dallo4. 1999,
P.30-31

75
Cours rle drolt p6nal général .

De même, une infraction instantanée peut par son mode


d'exécution, présenter les caractères d'une infraction continue (un vol
dont la réalisation peut s'étaler dans le temps),

b.Intérêts de Ia distinction

Concernant la détermination de la juridiction compétente: Le


délit instantané par nature relève de la compétence d'un seul

tribunal puisque, par définition, il s'est commis sur un lieu


unique.

- Pour le délit continu, il y a possibilité d'une compétence multiple,


puisque le délit peut avoir des effets sur plusieurs points.

En cas de survenance d'une loi pénale nouvelle : L'infraction


instantanée demeure régie par la loi en vigueur au moment où a
été accompli l'acte incriminé, tandis que I'infraction continue
reste soumise à toute loi nouvelle, même plus sévère, si I'action
s'est prolongée sous I'emprise de la loi nouvellel.

- Le délai de prescription de I'action publique: a pour point de


départ le jour où l'acte délictueux prend fin jour l'infraction
continue2.

t
- Mikæl BENI,LOUCHE : « Leçons de droit Énale général » Ellipses, 2009, P.26.
2-
Pour les inÊaclions occultes, le délai de prescription de I'action publique a pour point de départ le
jorn ou le délit est apparu et a pu etrÊ dans dcs conditions P€rmettant l'exErcice de I'action pubtique
(ex.abus de confiance) .

76
Gours ile droit pénal général

B. Infractions simples et infractions d'habitude (acte


unique ou pluralité d'actes).

L'infraction simple ou d'occasion est consommée en un seul trait


de temps par un acte d'action ou d'omission unique ou isolé (vol,
meurtre, coups et blessures)

A l'opposé, l'infraction d'habitude est composée de plusieurs


actes semblables dont chacun pris isolément ne constitue pas une
infraction, mais pris dans leur totalite ils constituent l'infraction en
question (ex, exercice illégal de médecine, mendicité)

a. Critèresde distinction

La répétition du même acte est le critère qui permet d'établir la


distinction entre ces deux catégories d'infraction. La répétition
constituant I'habitude est distincte de la répétition propre à la récidive
qui ne se réalise qu'après la condamnation du délinquant par une

décision définitive.

Le nombre de fois constitue dans le cadre des infractions

d'habitude un élément constitutif de I'infraction' La jurisprudence


considère que l'habitude est caractérisée dès la commission de deux

actesl.

' - trlikæt SEI.IILLOUCIIE : « Leçons de droit penale général », Op.cit., P.27.

77
Gours de droit pénal général

h. Effets de la distinction

Trois grands effets se présentent :

r Détermination de la juridiction compétente : seule l'infraction


d'habitude est susceptible de générer la compétence de plusieurs
juridictions, à savoir toutes celles dans le ressort desquels un acte
constitutif d'habitude a eu lieu.

o Cas de suwenance d'une loi pénale nouvelle: l'infraction


simple demeure régie par la loi en vigueur au moment où a été
accompli l'acte incriminé; tandis que I'infraction d'habitude est

soumise à toute loi nouvelle, même plus sévère, si un des actes


constitutifs de I'habitude a eu lieu après I'adoption de la loi.

o Délai de prescription de I'action publique: pour l'infraction


instantanée, ladite prescription a pour point de départ le jour de

commission de I'infraction, alors que concemant l'infraction


d'habitude, il s'agit du jour du dernier acte constitutif de d'habitudel.

C. Infractions simples et lnfractions complexes

La distinction non prévue par le code pénal enûmine plusieurs


effets.

L'infraction simple est composée d'un seul élément matériel qui


donne à l'acte sa qualification pénale (ex. le meurtre qui est constitué
par tout acte de nature occæionnant la mort).

», op.cit., P.27
' - Mikael BENI,LoUCIIE: « Leçons de droit Snale
général

78
Goun de droit pénal génétal

L'infraction complexe quant à elle présente la particularité d'être


constituée de plusieurs actes dont la nature est diffërente du point de
vue de leur réalisation matérielle

L'exemple classique est fournie par l'escroquerie en ce sens que


les manæuvres frauduleuses (fréquemment constituées de plusieurs
actes étalés dans le temps) provoquent une remise de valeurs par la

victime (acte distinct du ou des précédents).

b-Effets de la distinction

Ils sont au nombre de trois :

- Détermination de la juridiction compétente: seule I'infraction


complexe est susceptible de générer la compétence de plusieurs
juridictions, à savoir toutes celles dans le ressort desquelles un
fait constitutifde l'infraction a eu lieu.

- Cas de survenance d'une loi pénale nouvelle : I'infraction simple

demeure régie par la loi en vigueur au moment où a été accompli

I'acte incriminé; tandis que l'infraction complexe est soumise à


toute loi nouvelle, même plus sévère, si un des faits constitutifs

de I'infraction a eu lieu après I'adoption de la loi.

- Délai de prescription de l'action publique : le point de départ de


la prescription pour I'infraction instantané est le jour de

79
Gours de drott pénal g6néral

commission de l'infraction, alors que pour l'inFaction complexe

c'est le jour du dernier acæ constitutit'.

ILLe crltère quant au résultat

Du point de vue du résultat, on distingue : les infractions


matérielles et les infractions formelles.

À Crltère de la disünction

Il y a infraction matérielle lorsque le résultat dommageable figure

parmi les éléments constitutifs de I'infraction, de sorte que celle-ci


n'est consommée qu' autant qu'un tel résultat a été obtenu. Il n'y a

meurtre, par exemplg que si la victime est décédée (si elle ne I'est pas

en dépit du but recherché, il y a simplement tentative de meurtre).


Dans ce cas, le résultat qualifie I'infraction.

Une infraction est dite formelle lorsqu'elle est considérée comme


consommée indépendamment du résultat dommageable voulu par son

auteur. ll y a par exemple empoisonnent dès I'administration de

substance de nature à entralner la mort, indépendamment des suites

pour la victime.

B.Intérêt de la dlstlnction

Il se localise surtout à propos du régime de la tentative : s'il est


facile de séparer enhe un délit consommé et un délit tenté à propos

t
- En cas d'escroquerie supposant plusieurs remises de fonds, le délai de prescription débuæ aujour
de la dernière remise.

80
Gonrs rle droit péml gén6ral

des infractions matérielles; cette séparation, en revanche, est


beaucoup plus délicate lorsque nous sofirmes devant un délit formel.

Ce demier existe du seul fait de sa commission et même si son auteur


est intervenu pour empêcher le résultat de se produire.

III. Critère quant au moment de Ia constatlon de l'élément


matériel.

A ce stade, on pose traditionnellernent la distinction entre

infraction flagrante et infraction non flagrante.

L'infraction flagrante est celle qui vient de se commettre ou qui se

comment. L'infraction non flagrante est celle qui est séparée par un
temps plus ou moins long à partir du jour de sa commission.

La constatation des éléments matériels de I'infraction flagrante est


qrrasiment instantanée, les differences vont se dérouler au niveau de la
procédure pénale.

Ainsi, les conditions de poursuites, d'instruction et de jugement


seront assez rapides et ne dégagement pas les garanties que I'on
retrouve lorsque I'infraction n'est pas flagrante.

§3 - Classiffcations fondées sur l'élément moral

La principale distinction des infractions fondée sur l'élément


moral est celle des infractions intentionnelles et des infractions non
intentionnelles.

81
Cours de droit pénal général

I.Critère de la disünction

Les infractions intentionnelles sont celles qui requièrent, chez


l'agent, l'intention. En d'autres termes non techniques mais excessifs,
« il l'a fait exprès r». Le meurtre par exemple, suppose évidement que

le meurtrier ait voulu la mort de sa victime.

Les infractions non intentionnelles sont celles qui existent,

indépendamment de l'intention de I'agent, et quand bien même donc

« il ne l'a pas fait exprès »rl. Par exemple, au cas de contravention

pour stationnement d'un véhicule en un endroit prohibé, I'infraction


existe même si le contrevenant s'est irregulièrement garé par mégarde,

et sans vouloir enfreindre le règlement. En d'autres termes, s'agissant

d'une infraction non intentionnelle, la bonne foi, c'est-à-dire I'absence


d' intention est indifférente.

II.Intérêt de la distinctlon

La distinction entre infractions intentionnelles et infractions non


intentionnelles est utile en ce qui conceme la tentative2 ; celle-ci
n'existe que pour les infractions intentionnelles, elle est exclue en
matière d'infractions non intentionnelles.

De même, une infraction non intentionnelle ne peut pas être

justifiée par légitime défense, qui implique une riposte volontaire.

I
- Jean - Ctaudp SOYE& « Droit pénale et procédure pémle », Op.cit., P.51.
2
- G.Levasseur, A.Chavonne, J.Montreuil, B.Bouloc, Droit fnal et procédure pénale, Dalloz, 1999,
P.33

82
Gours rle ilroit p6nal génénl

Enfin, si l'infraction est intentionnelle, une condamnation ne


poura intervenir qu'autant que la preuve de cette intention aura été
rapportée par le ministère public.

83
toun de rhoit pénal gfuéral æ

Partle 2 : Les éléments constitutifr de


l'infraction
Pour la définition de l'infraction; il faut nécessairement une
violation matérielle de la norme pénale. Toutefois, cette violation
matérietle, ou puremênt mécanique, ne suffit pæ. Il est nécessaire
pour asseoir définitivement sa configuration juridique que l'agent
poursuivi pour sa non-conformité à I'ordre pénal ait agi avec
« lucidité » et « volonté ».

L'infraction suppose donc la réunion de trois éléments

constitutifs: l'élément légâ1, un texte décrivant et réprimant I'acte


interdit(S1), l'élément matériel, la description de I'acte interdit ( S)et

l'élément moml, relatifà l'état d'esprit de I'agent( 53)

84
Gours tle rlroit pénal géléral

Chapitre 1 : l'élément légal

La loi, expression de la volonté générale, revêt en droit pénal une


importance inégalee qui prend le visage du célèbre principe de la
légalité criminelle
I (nécessité d'une loi pénale) (Sr). En effet, en
confiant au « législateur » le soin de déterminer les actes punissables

et les peins applicables, ce principe constitue une garantie essentielle


de la liberté individuelle.

L'une des conséquences de I'application du principe de légalité


est que le citoyen soit protégé contrÊ l'arbitraire du juge (Sz) car il
peut connaître à I'avance ce qu'est défendu et la peine à laquelle il
s'expose en le faisant. Toutefois, il y'a lieu de se poser la question sur
l'étendue de l'application dudit principe de légalité(S3).

r- La place de I'élément légal parmi les éléments constitrrtifs de l'infraction est discutêe. Le débæ
parait résulter d'une confirsion entre la notion de I'infraction et la commission de celle- ci, entre le
contenant et le conteûu. Le terme d'infiaction désigne en effet autant I'existence d'une incrimination
que la commission de l'acte incriminé. Dans ce second sens, le texte apparaît comme une conditior,
puisque 'un comportement ne saurait sonstituer une infraction que s'il a été préalablement incriminé
par un texte. En revanche, le texùe est un élément inhérent à la définition à la déIinition de I'infraction.
Voir Christophe PAULIN, Droit pénal général, Litec , 4b éditiorL 2005, p13.
85
Gours de rlroit pénal gén6ral

Sætlon l- lo nôccrltl dc la Iol Snolc


A l'origine, cette nécessité conjuguait la crainte de l'arbifaire
exprimée par Beccaria et l'exaltation de la volonté générale, tenant à
I'influence de Rousseau; ce qui nous mène à l'étude du contenu d
principe de la légalité et son évolution.

I.Contenu du principe de légalité

Le principe de la légalité est souvent exprimé sous la forme d'un

adage en latin « Nullum Crimen Nulla Poena Sne Lege »; ce qui


signifîe que ce principe intéresse aussi bien les incriminations que les
sanctions.

A,La légaltté des incriminatlons

L'incrimination est la description du comportement incriminé. Le


contenu du principe à la légalité découle de la nécessité de ne
soumettre à la répression pénale que les faits qui réunissent les

éléments précis que la loi a préalablement définis.

Cette définition d'origine législative doit être la plus précise


possible car il n'est pas conforme au principe légaliste qu'il soit
ambigu ou floul. Il peut cependant, en fonction de certaines

1
-Il nc suffit pæ d'exiger rme précision suffisante des normes pénales pour que le principe de légalité
soit respecté. Il faut irnposer en plus une clarté certaine dc ces normes : l'excès de précision est parfois
à I'oppôsé de I'objeotiad'intÊlligibilité. læs te:$es doivent pouvoir être immédiatement compris, Non
seuleÂent les termes employes ne doivent pas ete flous, mais ils ræ doivsnt pas ête confrrs: une
excessive précision peut altérer te sens d'un texte en nusquânt à la fois I'objectif recherché et les
*oyrrs qui doiveni être mis en æuvre pour I'alteindre. voir Emmanuel DREYER, Droit pénal
général, Lexis Nexis, 2* édition, 2012, P. t 82

86
Gours ile droit pénal général

nécessités d'ordre technique, être conçu en termes généraux à charge

pour les juges d'en adapter la teneur aux réalités sociales. L'essentiel
est qu'un fait non prévu par la loi n'est pæ de nature à donner lieu à
une poursuite ni à une condamnationl.

En effet, la nécessité d'un texte déterminant l'incrimination et


I'exigence de sa clarté et de sa précision conduisent à définir le rôle du
juge par rapport à celui du législateur. Il ne lui appartient pas d'établir

une incrimination, ce qui ressort uniquement dudit texte. Il lui revient


seulement de rechercher si les actes de la personne qui lui sont déférés

correspondent à I' incrimination.

Sous cet ongle, deux remarques peuvent être avancées

Il s'agit d'abord de l'élargissement présumé du champ du droit


pénal à traves surtout la flexibilité de certaines dispositions d'ordre
général souvent rencontrées dans des textes spéciaux et parfois même

dans le code pénal.

La deuxième remarque se rapporte l'alinéa 1l de I'article 609 du


code pénale2 ainsi qu'à certaines lois particulières qui reconnaissaient
aux décrets, arrêtés, et aux circulaires le droit de préciser le contenu
des éléments constitutifs des infractions qu'elles créent ou des

conditions spécifiques de I'application de leurs règles. La conformité

t
- Mohieddine AMZAZI, précis de droit criminel, Dar Nachr Al Maarifa, 1994,P.53-54.
'- L'alinéa I I de I'article 609 du code Snal dispose que : sont punis de l'émende des l0 à 120
dirhams:
- Ceux qui conheviennent aux décrets, Irêtés légalement pris par I'autorité adminisaative, lonque les
inÊactions à ces text€s ne sont pæ réprimées par des dispositions spéoiales.
87
Gours rle droit p6nal g6n6rd

de ces techniques au principe de la légalité est douteuse comme I'est


le respect du principe de la séparation des pouvoirsl.

B.La légallté des s,anctlons

La légalité des peines signifie qu'aucune sanction ne peut être


infligée si elle n'est expressément prévue et avec précision déterminée
par la loi dans sa nature et sa mesure.

En effet, I'application de la sanction est contrôlée sous couvert de


proportionnalité ente, d'une part, l'afÏliction provoquée par

l'exécution de la peine chez le coupable2. Ainsi le juge n'est pas un


simple distributeur automatique des peines légales. Le code pénal
ainsi que les lois pénales spéciales fixent un minimum et un maximum

aux sanctions qu'ils édictent et accordent une large faculté

d'appréciation dans ce cadre aujuge ; celui- ci peut choisir la sanction


qui lui paraît adaptée aux conditions de l'infraction et à Ia personnalité
de I'auteur. Bien plus, le jeu des excuses légales, des circonstances
attenantes et aggravantes font jouir le juge d'une liberté d'action
particulièrement importante dans la mesure de la peine. Cette donne
constitue l'une des conséquences du principe de la légalité pénale.

I.Conséquences du prlncipe de lalégalité

Le principe de la légalité conduit à définir le rôle du juge par


rapport à celui du législateur. S'il appartient au législateur d'établir
t-
Ibid P.s4
2
- C'est à Beccaria que I'on doit une telle exigence : « ta vraie, la seule mesurc des délits est le tort
fait à lanotion etnon l'intentionducoupoble ».

88
Gours tle droit pénal général

seule une infraction le rôle du juge s'avéré toutefois, crucial,


I'incrimination n'existe pas sans lui.

D'abord, il en relève le sens profond en interjetant le texte qui le

contient (A), ensuite il lui revient de recherche si les actes de la


personne qui lui est déférée correspondent à I'incrimination à travers

la qualification des faits (B).

A.L'interprétation de Ia loi pénale

Interpréter une loi consiste à en dégager le sens afin d'en


déterminer le champ d'application. Le plus souvent, c'est à partir
d'une lecture attentive du texte, de se syntaxe et de sa ponctuation,
que les magistrats surmontent les difficultés de son application. En
effet, comme le juge est tenu de juger, sons peine de déni de justice, il
lui appartient de résoudre la question qui lui est posee.

Lorsque de la loi est clair, le juge n'a plus véritablement à


interpréter mais seulement à appliquer. En raison du principe de
l'interprétation resffictive, il n'a pas le droit d'étendre la loi pénale à
des cas que le législateur n'a pa§ visés. Toutefois, lorsque le texte
pénal est obscur et se prête à plusieurs interprétations, le juge doit
s'efforcer d'en pénétrer le sens véritable et d'en faire application en
fonction de ce sensl. La question est de savoir quels critères ou quelles
méthodes d'interprétation ce juge utilisera pour donner au texte une

I-
Bemard BOULOC, Droit pénal général, Op.cit, P.133.
89
Goun rle rilroit pénal g6n6ral

clarté. Ainsi on distingue entre la méthode littérale, celle dite


téléologique et une troisième dite analogique.

a.La méthode littérale

Cette méthode est I'une des conséquences du principe de la


légalité dans son acception la plus restictive.

Appelée aussi méthode « traditionnelle » ou « resffictive » ; cette

méthode s'attache principalement à la « lettre de la loi » et doit faire


prédominer cette demière son « esprit » : Le juge ne doit être que la
bouche qui prononce la parole de la loi.

Cette méthode d'interprétation fouve sa raison dans le contexte

qui lui a donné naissance : une grande méfiance à l'égard desjuges et


de leur pouvoir arbifaire. La solution consistait à lier le juge au texte
qu'il allait appliquer.

Deux reproches ont été adressés à cette méthode: D'abord, elle


est stérilisante. L'interpretation litterale priverait la norme de sa

souplesse eu égard l'évolution de son contexte ambiant. Ensuite, [e


passage enffe le niveau d'une disposition générale et abstraite à un cas

vivant c'est aujuge de la restituer.

b.La méthode théologique

Cette méthode d'interprétation est fondée sur la << ratio logis »,

c'est-à-dire la volonté présumée ou déclarée du législateur.

90
Cours de droit pénal générd

L'insuffisance de la lettre conduit à se faire prévaloir son esprit. Cette


technique repose sur «< le but recherché » par la loi. La démarche
paraît justifiée : comment dire le sens d'un texte sans s'interroger sur

le résultat qui en est attendu ? Toutefois, cette technique


d' interprétation paraît dangereuse.

D'abord, parce qu'il s'avère délicat de déterminer la volonté de


l'auteur d'une norme. Elle est rarement exprimée et vieillit plus

rapidement que la norme elle- même. Le premier risque est donc celui

de I'arbitraire du juge qui peut avoir tendance à dissimuler sa propre

volonté denière celle attribuée au législateur. Ensuite, le danger est


sur la base de cette évaluation divinatoire, d'affranchir le juge de
toutes limites en rétablissant le plus complet arbitrairer.

c.La méthode analogique

Raisonner par analogie signifie appliquer à une situation non


envisagée par une loi une solution prévue par celle- ci dans un cas
similaire. Il ne s'agit plus d'interpréter la loi que de dégager une règle
nouvelle2.

En effet, cette méthode consiste à étendre I'application d'un texte

à une situation différente de celle qu'il régit ; en raison des similitudes


existant entre elle et celle visée par le texte.

I « Droit pénal général », OP cit., P. 375


- Emmanuel DREYER,
2
- tbid P.3zB

91
Gours üe droit pénal général

Pareil raisonnement est contraire au principe de légalitél . Le


danger qu'il présente est que les juges répressifs fassent

« indirectement et soumoisement ce qu'il leur est interdit de faire


franchement et ouvertement »»2. Au contraire, le juge ne peut se

substituer au législateur et sanctionner, grâce à I'interprétation d'un


texte, un comportement qui ne correspond ni à la lettre ni à I'esprit de

celui- ci. Il ne doit pas compromethe par sa propre démarche, la


prévisibilité des textes qu'il est chargé d'appliquer3. Toutefois, la
condamnation du raisonnement par analogie n'a pas dépassé le stade

de proclamations de principe, ce qui justifie sa survivance puisque de

nombreux textes d'incrimination reposent sur des formules vagues ou

incertaines. En tout état de cause, investi du pouvoir d'appliquer la


loi, le juge doit vérifier si le texte pénal est applicable aux faits de
l'espèce. C'est l'opération de qualification.

B,La quallflcation des faits

La qualification est « le nerf du raisonnement judicaire >>. C'est


l'opération intellectuelle par laquelle le juge confronte une situation
concrète aux prévisions abstraites de la loia. En effet, le juge ne peut
poursuiwe, juger et condamner quelqu'un qu'à la condition que
I'attitude en cause soit prévue et punie par la loi pénale. Le processus

t-
Christo,ph€ PAULIN, Droit Énd général. Op.cit., p.l6
' - E. GARCON, « Le droit pénal général», Payot" 1992,P.72
' - En droil, le raisonnement par anâlogie connait des défenseun, car il permet au juge d,établir une
égalité de taiternent enùe personnes se rouvant dans des situations similaires mais que le législateur
n'a pas toute§ envisagées. Le même raisornemeat ne saurait être tenu en matière Snale où la légalité
impo(e plua que l'égalité.
{ - Emmanuel
DREYE& « Drcit pén8l général », Op.cit. P.393.
92
Gours rle droit pénal g6nétal

pénal est donc subordonné au fait d'avoir rattaché le fait recherché à

un texte d'incrimination et de lui avoir donné le nom d'une infraction


pénale. La qualification pénale est donc l'acte le plus important de

toute la poursuite pénalel : il est le premier acte obligatoire pour toute


autorité informée ou saisie d'un fait qui paraît être une infraction
pénale(A). Il s'agit surtout de résoudre les conflig de qualification
(B).

a.Les Instances de qualification

Elles sont nombreuses

ol,e procureur du Roi, en vertu de sa qualité d'agent principal au


procès pénal qualifie le ou les faits qu'il défère aux juridictions
régressives ou au magistat instructeur au moyen de son réquisitoire à

frn d'informer. Dès ce stade, il y a un premier lilrage dont le rôle est


précisément d'atJribuer une base légale aux poursuites'

.La partie civile: Si la poursuite est déclenchée à l'initiative


d'une victime partie civile, c'est elle qui confiera les faits dans sa
plainte avec constitution de partie civile ou sa citation directe devant
une juridiction de jugement.

.Le juge d'instruction: Son pouvoir de qualification et de


modification du fait vient de ce qu'il est saisi << in rem », c'est-à-dire

I- lawe RASSAT , « Droit pénal général », Op'cit. P.121.


Michèle -
93
Coun de droit p6nal g6néral

qu'il est chargé d'instruire sur un fait matériel donné qui lui a été
déféré par le parquet.

Il est toutefois, à signaler que les juridictions répressives ne sont

pas juridiquement liées par la qualification qui leur est soumises. En

effet, en vertu d'une règle fondamentale, toute juridiction a le droit et


même I'obligation d'examiner la qualification du fait qui lui est
soumis par les différents agents du procès et en cas d'erreur
d'appréciation, elle doit rectifier la qualification erronée. Ainsi, les
juridictions de jugement ne peuvent statuer que sur les faits qui leur
sont soumis et seulement à l'égard des personnes nommément
désignées.

Mais autour de la qualification gravitent aussi un certain nombre


de problèmes.

b,Les problèmes liés aux qualiffcations multiples

Certaines situations de fait relèvent a priori de plusieurs

qualifications pénales, ce qui pose des difficultés de qualifïcation


pénales. Ce cas de figure surgit soit en présence de qualifrcations

alternatives ou incompatibles, soit en présence de véritable concours

de qualifications.

94
Goun de rilroit pénal gélétal

l.Qualifi cations incompaübles

On parle de qualification incompatible lorsqu'une infraction qui


est objectivement imputable à un délinquant s'analyse comme la
conséquence d'une première infraction.

Ex.- L'auteur de violences ( coups et blessures) qui a laissé sa


victime baigner dans une mare de sang en s'abstenant de lui prodiguer
les premiers soins ou même en s'abstenant d'appeler les secours.

-Un viol qü est aussitôt suivi de recel car l'auteur n'aurait pas

immédiatement restitué la chose à son propriétaire.

On considéré généralement que la deuxième qualification doit


être rejetée.

2. Qualifications alternatives

Dans cette hypothèse, on analyse le degré de la faute commise


qui conditionne l'application de telle ou telle qualification,

Ex. les coups mortels sont qualifiés de « meurtre » ou

d' « assassinat » si l'agent avait I'intention de donner la mort à sa

victime. Si le défaut de « I'animus nécandi » est prouvé, l'infraction


sera qualifrée de coups et blessures ayant entainé la mort sans
I'intention de la de la donner; et il n'y aura qu'un homicide
involontaire si le décès est la conséquence d'une imprudence.

95
Gours dc droit pénal général

Ces qualifications sont par nature altematives : c'est I'une ou


I'auhe qualification qui peut être adoptee.

3.Concours de quallflcatlons

Une activité délictueuse en fonction de son contexte peut tomb€r


sous la qualification de plusieurs textes portânt des incriminations
differentes.

Exemple I : le viol commis dans un lieu public met en jeu


I'article 486 du code pénal qui punit son auteur de la réclusion
criminelle de 5 à l0 ans, mais tombe également sous I'article 483 CP

qui reprime l'outrage public à la pudeur d'une peine

d'emprisonnement d'un mois à 2 ans.

Exemple 2 : I'escroquerie commise à l'aide d'un faux en écriture

publique ou en écriture de commerce réponde conélativement à la


définition de l'escroquerie réprimée par l'article 540 CP prévoyant
une peine d'emprisonnement d'un à 5 ans et à celle de I'article 354
CP (faux en écriture publique commis par personne privée) réprimant

l'infraction d'une reclusion de 10 à 20 ans.

Exemple 3 : L'automobiliste qui ne s'est pas a:rêté à un « stop »

et tue un piéton, il est commutativement auteur de la violation d'une

disposition du code de la route mais également d'un homicide


involontaire réprimé par I'article 432 CP.

96
Gours rle droit pénal général

En effet, pour tous ces cas, le droit positif marocain a opté pour
l'uniformité de la répression consistant à négliger les qualifications les

moins graves pour n'imputer au délinquant que la qualification


majeure, c'est à dire celle comportant la pénalité la plus gran"l.

t- L'artisle I l8 du code pénal dispose que: « Le fait unique susceptible de plusieun qualifications
doit être apprécié suivant la plus grave d'entre elles ».
97
Goun dr droit pénal général

§ætlol2r I'rppllollor dc lo lol pÉrulo

Le juge répressif a pour mission de décider si la personne qui lui

est déferée à commis les faits incriminés par la loi. Toutefois, il peut

se faire que plusieurs textes paraissent avoir des titres concurrents à


régir une même infraction. Ce qui oblige le juge de déterminer, parmi
eux, le texte applicable, c'est à dire qu'il résolve les conflits de loi
dans le temps (A) ou dans l'espace (B).

I.L'application de la loi pénale dans le temps

Le droit pénal est évolutif. Ainsi, I'incrimination est le prealable


légal de I'infraction. La question qui se pose dans ce cadre est de
savoir si lorsque diverses lois se succèdent dans le temps, le juge doit
appliquer la loi nouvelle penale aux faits commis ou si ceux-ci restent
soumis à la loi ancienne. Bien que le droit pénal prône les principes de

non rétroactivité de la loi, il lui apporte des atténuations.

A.Le principe de non rétroacHvité de la loi pénale

Il est à préciser que ce principe n'est pas propre au droit pénal, on

le retrouve inscrit dans la charte constitutionnelle en son article 6: la


loi ne peut avoir d'effet rétroactif.

En raison des conséquences extrêmement lourdes attachées


habituellement aux violations des prescriptions pénales, ce principe
jaillit encore avec plus de force et d'exigence, et encore avec plus de

précision. L'article 4 du code pénal dispose que : « Nul ne peut être

98
Gours rle droit pénal général

condamné pour un fait qui, selon la loi en vigueur au moment où il a


été commis, ne constituait pas une infraction ».

Ainsi, le principe de non rétroactivité de la loi es! en matière


pénale, inhérent au principe de légalité. L'analyse juridique de
I'infraction doit rester figée dans le temps selon les termes de la loi
anciennel. Une infraction peut être reprochée à son auteur car il a

sciemment eu le comportement envisage par un texte d'incrimination

et la répression paraît alors légitime puisque la loi prévenu l'agent


avant de le punif.

Ce principe de non rétroactivité reçoit en droit marocain des

atténuations identiques à celles qui accompagnent sa mise en ceuvre

dans la majorité de systèmes juridiques comparés.

B.Atténuations au principe

Ces attentions sont relatives aussi bien la rétroactivité « in


mitius » qu'à l'application immédiate des règles pénales de frome.

a.Rétroacüvité au de la loi nouvelle plus douce

Encore appelée rétroactivité in mitius est, au même titre que le


principe de légalité, une regle générale du droit pénal3. Elle signifie

l- L'article 8 de ta déclaration universelle des droits de I'homme et du citoyen du 26 aout 1789


dispose que : « la loi nc doit établir des peines strictement et évidement nécessairEs, et nul ne peu ehe
puni qu'en vertu d'une loi etablie et promulguée adérieurement au délit, et légalement appliqÉe ».
'- Cette solution æ justifie égalemeat par la crainte, historiquement fondée, de voir inorimrné un
comportement à posteriori dans le seul bul de nuire à son auleur. C'est le risque d'incrimination de
circonstances qu'il s'agit alors de prévenir. Voir Emmanuel DREYE& «Droit pénal général, Op.cit.,
P.106E
3
- Chdstophe PAULIN, Droit pénat général, Op.cit., P.27

99
Gours rle droit p6nal général

qu'une loi nouvelle modifiant, dans le sens de I'indulgence, les


éléments constitutifs de l'infraction ou la peine encourue doit être
appliquée non seulement aux faits postérieurs à son entrée en viguier

mais également aux faits antédeurs, dès lors qu'ils n'ont pas été
1.
définitivement jugés

L'article 6 du code pénal dispose que : « lorsque plusieus lois ont


été en vigueur enhe le moment où l'infraction a été commise et le
jugement définitit la loi dont les dispositions sont les moins
rigoureuses, doit recevoir application ».

Devant le silence du législateur, la jurisprudence et la doctrine


estiment que sont moins rigoureuses, celles qui font disparaltre une
circonstance aggravante ou admettent une excuse absolutoire ou
atténuante, ou correctionnalisent un délit 2 ... mais, il existe des

hypothèses où les dispositions nouvelles contiennent des ambiguiTés


qui justifient l'hésitation. Dans ce cas, la comparaison entre deux
peines, de même nature, s'effectue sur la base de leur place respective
I-
La jurisprudance 6'ançarse est de même aüs. Dans une affaire ou rn employeur de nationalite
ûançaise est déclaré coupable d'emploi d'un ressortissant roumain non muni d'une autorisalion de
travail durant les années 2010 et 201 l, la cour de cassation a décidé que :
(...) Vu I'article I 12-1 du code penal,
Attend qu'il résulte de c.€ texte que, saufdispositions expresses confraires, une loi nouvelle s'applique
aux infractions commises avant son entrée en vigueur et n'ayant pâs donné lieu à une condfinûation
passee en force de chosejugee lorsque 'elle est moins sévère que la loi ancienne ;
Attendu que la Roumanie étant devenue membrc de I'union européenne le l" janvier 2007, la totalité
des restrictions à I'acês au marché du travail a été levée pour les ressortissants de cet Etat à compter
du ld jaovier 2014, de sort que I'inùaction poursuivie avait perdu son caractère punissable, la cour
d'Appel a méconnu le sens et la portée du texte susüsé,
D'où il suit que la càssation en encourue; que n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond,
elle aura lieu sans renvoi , ainsi que le permet I'aüicle L4l'l-3 du code de I'organisation judicaire »
Cæs Crirn,3 nov. 2015, noI4-84459,FD. Voir Rewe « DroitÉnal » nol du Janvier 2016, P.38.
2
-Uohieddine AMZAZI, précis de droit criminel, Dar Nachr Al Maarif4 1994, P.60

100
Gours de droit p6nal génétal

dans l'échelle des peines, (arts 16, 17 et 18 CP) et de leur maximum


et minimum. En cas de modification de ces deux limites, seul le
maximum est pris en considération.

Quant au conflit soulevé par la loi temporaire, I'article 7 du code


pénal ne laisse planer aucun doute sur sa solution. Il reconnaît la

souveraine autorité de la dite loi sur les fait qui tombent sous ses
prescriptions des lors qu'ils ont été commis pendant la durée de son
application. La solution ainsi adoptée est en réalité une exception à
I'exception tirée de la douceur de la loi et constitue dès lors un retour
au principe de non rétroactivité et sa confirmation.

Sur un autre plan, l'article 8 du code pénal énonce dans son


deuxième alliera : « les mesures de sureté applicables sont celles
édictées par la loi en vigueur au moment du jugement de
I'infraction ». Il en résulte que si, après la commission d'une
infraction et avant la clôture de la procédure du jugement, une loi
nouvelle crée une nouvelle mesure de streté, celle-ci devient
applicable même si elle paraît plus sévère que celle qui était en
vigueur auparavant. Cette solution se fonde sur la nature particulière
des mesures de sureté qui sont présumées favorables à l'inculpé car

elles visent sa réintégration sociale ou son traitement.r

I- lbid p.ot
101
Gourr tle drolt pénal géréral æ
b- L'apptlcation immédiate des lois nouvelles de forme

A la différence des lois nouvelles de fond qui s'appliquent


uniquement aux inftactions à venir, les lois nouvelles de formel sont

immédiatement applicables, peu importe leur sonlenu : peu importe


qu'elles aient été adoptées alin de faciliter la répression ou de

renforcer les droils de la défense, Blles s'appliquent dans à la

poursuite de toutes les infractions qui n'ont pas encore fait I'objet

d'une condamnation passée en force de chose jugée inévocable au

moment d€ leur entrée en vigueur. Elles onl vocation à régir tous les

actes restant à accomplir jusqu'à ce qu'une telle décision soit rendue.

La solution parait simple: « aucune réfërence n'est faite à la

rétroactivité ou à la non rétroactivité, loi nouvelle ne disposant ni pour


la pæsé, ni pour l'avenir ; mais pour le présente ».2

On prétend alors que les lois de forme ne sont pæ prises en


comple pâr I'agent avant I'infraction, de sorte que ses prévisions ne

sont pas bouleversées par la modi{ication de telles lois.


L'âvertissement attribué à la loi pénale ne concemerait que
t'application du droit pénal de fond. En effet, pour défendre
I'application immédiate les lois de forme, on ajoute alors qu'elles
favorisent une meilleure administration de la juslice, de sorte que
chacun profiterait de leur application immédiate . .. il 'y aurait aucune
|
- La formü1. « lob de forme » peut sembler bêâu.oup plüs incerhin€ que !a fo.mule « loh d.
folü ». En €tre! ls cstégoric d€s lois d! fonnc ae déffnit EsseûtiellemÊnt psI défêul êt rélIlil toùl ce qui
ne r€l&€ pas de ls .rtégorie dês lois d€ fond ; tout ce qui tE relève pfle dê la définltion d'uoÈ
inftsction, de ss sanstion ou dù régimc dc responsâbilité. voir ErDmâîuêl DRBYER, Drcn Énel
gérlêrsl, Leds Nexi§, 2* édition, 201 2. P. l 08l
'- rbid. P 1082

102
Gours de droit p6nal g6néral

raison de différer leur application puisque ces lois de forme seraient,


par principe, meilleurs que les précédentes.

Il.t'application de Ia loi pénale dans I'espace

La compétence territoriale de la loi pénale marocaine est justifiée

objectivement par le rattachement de [a situation juridique née d'une


infraction au territoire du royaume. Ce territoire est essentiel car c'est
l'endroit où s'exerce la souveraine marocaine. Le juge répressif
marocain doit donc en respecter les limites' Ce qui nous conduit à
distinguer les infractions commises au Maroc de celles commises à
l'étranger.

A.Les infractions commises au Maroc

La territorialité de la loi pénale pose le principe général selon


lequel la toi applicable est la loi pénale nationale du territoire de l'Etat

sur lequel l'infraction a été commise et ce, quel que soit la nationalité

de I'auteur ou de la victime.

Appliqué au cas marocain, ce principe suscite la question aussi


bien sur l'étendue du territoire marocain que sur I'afftrmation du
principe de la territorialité de la loi pénale.

a.L'étendue du territoire marocain

Le droit criminel marocain ne donne au territoire aucune

dé{inition. Celle-ci est puisée dans le droit constitutionnel et le droit


intemational. En effet, le tenitoire du royaume se définit d'abord au
103
Gours tc drolt p6nal g6téral

regard de ses frontières terrestres, cela comprend toutes les portions


du territoire qui se trouvent à l'intérieur des frontières du royaume. Il
comprend également l'espace maritimel et aérien.

En plus de ce territoire réel, le Maroc dispose d'un territoire


fictif : Il s'agit des navires et des aéronefs marocains quel que soit
l'endroit où ils se trouvent2.

b.L'affirmation du principe de Ia territorlallté pénale

Le principe de tenitorialité est affirmé par I'article l0 du code


pénal : « sont soumis à la loi pénale marocaine, tous ceux qui,
nationaux, étrangers ou apatrides se trouvent sur le tenitoire du
royaume, sauf les exceptions établies par le droit public inteme ou le

droit international ».

En effet, l'infraction commise sur le territoire marocain est ainsi


une infraction aux lois marocaines et les juridictions du royaume sont
légitimement en droit de la sanctionner. Le travail du juge marocain
s'en trouve simplifié car il applique la loi qu'il connalt le mieux sans
crainte de se tromper dans I'interprétation d'une loi étrangère.

Généralement, pour la recherche des preuves et l'établissement de la

culpabilité, l'Etat sur le territoire duquel l'infraction est commise

I
- La bande maritime (la nrr territoriale) est comprise entre la terre et une ligne imaginaire pamllèle à
la cotÊ.
Elle est fixée à 12 mille marins du rivage de la mer, soit environ 20.km. Il faut êgalcmcnt ajouær une
zone de pêche exclusive constituee su unÊ étendue de 70 mille marins.
2
- L'article I I du code pénal dispose que: « Sont considérés comme faisant partie du tenitoirc, tes
navires ou les aéronefs marocains quel que soit I'endroit où ils se trouvent saufs'ils sont soumis, en
veru du &oit intemational, à une loi éfangèrc ».
104
Gours tle droit péaal général

apparaît le mieux placé pour diligenter les poursuites et apporter une


réponse satisfaisant sa population. Toutefois, ce principe connaît
certaines limites. Les immunités diplomatiques en est I'exemple typer.

B.Les infractions commises à l'étranger

Il faut distinguer entre deux cuts : cas où I'infraction est commise

par un marocain et le cas où elle est commise pax un étranger.

a.Infraction commise par un marocain

L'infraction commise par un marocain à l'étranger entre dans la


compétence normale de I'Eat sur le tenitoire duquel elle est commise.
Toutefois, le code pénal pose dans son article 12 le principe

d'existence d'une compétence des juridictions marocaines dans cette


hypothèse. Les articles 751 et 752 du code de procédure pénale

déterminent le régime juridique de cette compétence. Ainsi, peut être


jugée par les juridictions marocaines, l'infraction commise par un
marocain à l'éfanger si certaines conditions sont réunies :

-Le retour de I'auteur de l'infraction au Maroc ;

-Il faut que le fait soit qualifié par la loi marocaine de crime. En
effet, seule cette qualification emporte compétence de la loi nationale,
car jugée d'une gravité exceptionnelle (art. 751 C.P) ;

r- Les représentants diplomUiques ne pêwent êtrejugés, condamlés ou d&enus pour les iufrrctioru
qu'ils coàmetænt sur'le territoire naiional. L'incompéterre est d'ordre public. Ces représentants
gouvemements. (Pour_le cas
i"nv"nt O" l,autoritéjudicaire do leur pays sut dénonoiation de leurs
i*o."in, or r. re6re au Dahir du lojüllet 12969 portaat adhésion du royaume À la convention sur
les relations diplomatiquæ signée àvienne le l8 avril 1961)

105
Gous tle drolt pélal général æ
-Que l'auteur du crime ne justifie pas avoir é1é délinitivement
jugé à l'étranger; et en cas de condamnation, il faut démonher qu'il a

subi sa peine ou éteinte par la prÊscdption ou qu'il a bénéficié d'une


mesure de grâce.

Si ces conditions sont restrictives, c'est parce que la loi nationale

n'a pas à se preoccuper de [a défense de I'ordre pénal d'un autre Etat.


C'est cette restriction que I'on retrouve en matière de répression
lorsqu'il s'agit de délit (art.752). Dans ce cas la réciprocité est exigée
d'autant plus que la poursuite ne peut avoir lieu qu'à Ia requête du
ministère public saisi d'une plainte de la lrrsonne lésée ou d'une
dénonciation des autorités du pays où le délil a été commis.

b.lnfraction commise par un étranger

Le principe est l'incompétence des tribunaux et de la loi nationale

au cas or) un étranger commeürait rme infraction en dehors du


territoire du royaume et viendrait se réfugier sur ce tenitoire. Mais,
Iorsque cette infraction est constitutive d'une aüeinte à la streté de

I'Etat mârocain ou d'une contrefaçon de monnaie ou de billes de


banque nationaux ayant cours légal au Maroc, Ies juges marocains
peuvent en connaitre à la condition que I'auteur soit anêté au Mâroc

ou que son extradition soit obtenuer. En outre, aux termes de I'alinéa 2

de I'article 750 du Code de procédure Pénale, les juridictions

' - Le droil pénal français êt lajurisprudorce ftùçli!ê sdoptent le mêma priflcipe. Ainsi, seloD un anêl
de la cour de cassatior: ( une infraction coinmise à l'étrrnger par un étlrnger à l,encontrc d'une
victirne étrârgère ne relève de L loi pénale Êânçsisê qu'en css d,lndiüsibilhé » Cass. Crime.,3l msi
2016, n" I 5-85-920 Voir rerre « Droit Énal » r.9, sëptembre 2016, P .32

106
Cours üe droit pénal génétal

marocaines sont compétentes pour statuer valablement sur les

infractions commises à bord d'un aéronef étranger lorsque celui-ci


atterrit au Maroc ou lorsque I'auteur ou la victime de I'infraction sont
de nationalité marocaine.

Ainsi, il apparaît que la compétence tenitoriale de la loi pénale


marocaine est complétée pax une compétence personnelle à l'égard des

nationaux et par une compétence réelle à l'égard des étrangers.

107
Gours de drolt péaal g6néral æ
§rclont : lrr frttr lurtlicoilft

Il n'est pss rare de constater qu'un âcte bien que contraire à


l'ordre pénal soit néanmoins licite et n'expose son auteur à aucune
réaction pénale. L'acte ainsi commis est, dit-on, juslifié. Il est alors
dépouillé de sa nature inûactionnelle ou antisociale.

Le chapihe IV du livre II du code pénal évoquant ce type d'actes


a pour intifulé « des faits justificatifsr qui suppriment I'infraction », ou

les articles 124 et 125 leur sont réservés.

Ainsi, les fails justificatifs sont les circonstances dans lesquelles


le législateur aulorise, exceptionnellement, la commission de I'acte
qui, normalement, serail constitutif d'une infraction. L'élément légal
de I'infraction est alors neuftalisé. Les faits, en principe interdits, étant

conformes à la loi. Les fai§ justificatifs font donc disparaltre


I'existence même de l'infraction et mon seulement la responsabilité
pénale2.

Ainsi, l'article 124 du C.P qui pose la liste énumérative des fails
juslificatifs, commence par ure triple négation : « il n'y a ni crime, ni
délit ni contravention.. . »
I
- Le législateur fraûçais n's pas employé I'exprEssiotr « fritsjustificatifs », c'eÉt lâ doctriûe qui à p.is
le soin de qùdiffer coûne « fiits j'Etiff&rifr » lca mécânism€s légitimânt de3 faits qü suâi€nt pu
coostitüer aulant d'inÊ?ctioo- Pour Emrnmucl DREYER" cetie qualiicÀtion s'avè.e ess€z ndadroit!
car il E'âgit d'lppliqlær, dârs difféæntês hypothèsʧ, m mécânisme pùrerentjuridiqùr, de sorb qu.
les « fails » s'etræêût dêri&ê les codltions légales doot la râmion êsi néccssairÊ pour qu;u,
comport€rn€ soit lavé do sa dimcBion infirotiomëlte Voir Emmsnüel DRBYE& Droit pénal
général, Op.cit., P.751
'- Ctrisropr eeUUN, Droir Énât gétrerat, Cluistophe pAULtN, Droit Énal général, Liréc, 4b
édilion, 2005, P.67

108
Cours tle droit pénal g6néral

Quant au code pénal français, son article 122 qui traite ces faits
commence par une négation « n'est pas pénalement responsable la
personne qui... »

ll en résulte que I'acte commis dans le cadre de la justification se

trouve dépénalisé et la hansgression de l'ordre pénal n'est


qu'apparente, et I'apparence ne suffit ptls pour mettre en branle les
effets répressifs attachés à la violation de cet ordre. [l s'agit toujours
de circonstances objectives qui n'ont aucun rapport avec la
psychologie de l'agent.

Ces faits justificatifs prévus par la loi pénale corespondent soit à


I'accomplissement d'un devoir (ordre de loi ou commandement de

l'autorité légitime, soit à l'exercice d'un droit (légitime défense).


Certains penalistes ont « rapproché » des faites justificatifs le
consentement de la victime.

I.La fustification par l'acccmplissement d'un devoir

L'article 124 du C.P dispose qu'«il n'y a ni crime, ni délit, ni


contravention:

l-lorsque le fait était ordonné par la loi et commandé par

l'autorité légitime ».

A la lumière de ce texte, il faut préciser [a doubie composante

du fait justificatif résultant de l'accomplissement d'un devoir à

savoir : I'ordre de la loi et le commandement de I'autorité légitime.

109
Gours rle üroit pénal gén6ral

ÀL'ordre de la loi

L'ordre de la loi conceme l'hypothèse où un texte ordonne ou


permet d'accomplir ce qu'un texte pénal érige en infraction. Le même

acte ne pouvant être à la fois interdit et permis. L'élément légal de


l'infraction est neuhalisé lorsque l'agent agi conformément au texte
autorisant son acte à condition que les deux textes occupent la même

place dans la hiérarchie des normes selon le principe du parallélisme

des formes (on conçoit mal, par exemple, qu'un reglement puisse
empêcher I'application d'un texte de loi).

La question qui se pose est de savoir si selon les dispositions de


l'article 124 du C.P précité la justification est subordonnée à la
réunion de la loi et du commandement de I'autorité légitime ou bien
I'ordre de la loi peut suffire seul à justifier certains agissements.

Face au silence du législateur, il y a lieu de s'inspire de


l'évolution historique du Cod pénal français: si dans l'ancien Code
pénal françaisr, la règle était que I'ordre de la loi devait être transmis

par I'autorité légitime ; aujourd'hui l'article 121'4 (alinéa 1) du code


pénal déclare justifié I'acte << prescrit ou autorisé par des dispositions
législatives ou reglementaires ». Ainsi, si la loi s'adresse directement à

telle personne, celle-ci n'a pas besoin d'attendre I'ordre d'un supérieur
pour agir2 r le médecin, à qui la loi impose I'obligation de déclarer

I-
Le code pénal iarçais de 1810 prévoyait qu' « il y avait ni crimq ni délit lorsque I'homicide, les
blessures et les coups étaient ordonnés pas la loi et commandés par I'autorite légitime »
'- Bemard BOULOC, Droit penal général, Dalloa 24* édition,20l5, P.343

110
Cours de droit pénal génétal

certaines maladies contagieuses, ne viole nullement le secret

professionnel en le déclarantl.

En droit Énal marocain, les prescriptions légales qui


subordonnent d'une manière ou d'une autre I'exécution à la condition
cumulative et de l'ordre de la loi et du cornmandement de l'autorité
légitime sont les plus nombreuses. Cette condition de cumul est
nécessaire surtout dans des domaines très sensibles nnettant en jeu la

vie, l'intégrité ou la liberté des personnes. La peine capitale, par


exemple, est subordonnée à une décision d'un tribunal plus à un
commandement émanant du ministère public.

Dès lors, toute application spontanée de la loi par I'exécutant


échappe à la justifîcation. Le fait justificatif exige les conditions

suivantes :

-L'exécution d'un ordre,

-Donné par une autorité légitime,

-Conformément à la loi,

B.Le commandement de l'autorité légitime

Le mot « autorité » cantonne le fait justificatif au domaine public.


N'en est donc pas une autorité, au sens du fait justificatif, le père pour

I (al. 2)
-Cettc disposition de l'article 226-13 du code Snal français ressemble à celle de l'article 446
du code Snal marocain.
111
Gours de droit p6nal général

son enfant, le mari pour sa femme ou le pafon pour son employér.


Pour la jurisprudence, I'autorite légitime ne peut être une autorité
privée mais une autorité publique, civile ou militaire, à condition
qu'elle soit légitime2, et qu'un lien sa subordination doit exister entre
cette I'autorité qui donne I'ordre et la personne hiérarchiquement
appelée à I'exécuter par I'obéissance.

Toutefois, le comrnandement illégal d'une autorité légitime ne


peut en a aucune manière justifier I'infiaction commise par le
subordonné. En effet, on ne poulrait pas rendre conforme au droit ce
que le droit interdit.

D'une manière générale, est illégitime ou illégal I'ordre fondé sur


un défaut de titre ou celui donné malgré I'ordre adressé par l'autorité
légitime. Le code pénal envisage ces hypothèses soit dans le cadre des
infractions contre la sûreté de I'Etat (commandement militaire (arl202

CP) ou commandement illégal de bandes armées (art 203CP) soit dans

le cadre de l'usurpaüon (arts 380 et 262 CP)3.

Pour les infractions autres que celle visées par ces textes, la
question de savoir si le commandant illégal constitue à lui seul un fait

I
- Michèle-Laure RASSAI Droit Snal général, Ellipses, 2004, P.3?0

'- L'infraotion ne serait pas dsvantage justifiée sous un ordre bien qu'émanant d'une autorité, cette
autorité ne senit cependant pas une légitime ou compétente (un mandat d'anêt, de dépôt ne poumient
être déliwés quc par un magistrat instrucæur rnais pas un magistrat quelconque du pùquet.
! -L'usurpation consiste dans lê fait de s'immiscer sans ütre dsns uno fonction publique ou miliaire, ou
le fait d'accomplir un acte de ces fonctions (art 380 CP) ; ou lorsque I'exercice de l'âutorité publique
est illégalement prolongée (art 262 CP).

tlz
Gours rle droit pénal g6néral

justificatif demeurait donc entière. Elle a reçu en doctrine trois


I
solutions différentes.

D'après un premier système, l'exécution d'un ordre même illégal


est toujours une cause de justification car, en toute circonstance,
I'inferieur est tenu à l'obéissance envers son supérieur et doit exécuter
ses ordres, sans pouvoir les apprécier ni les discuter.

Pour d'autres auteurs, au contraire, qui reconnaissent à l'inferieur

le droit, sinon le devoir, d'apprécier la légalité de l'ordre reçu, et de


refuser de s'y soumettre quand il est illégal. L'exécution de I'ordre

illégal ne saurait justifier l'acte accompli. C'est le système dit des

« balonnettes intelligentes » qui, il faut le reconnaître, risque de

compromettre dangereusement I'autorité et la discipline, surtout dans


I'armée.

Aussi, un troisième système fait-il une distinction entre l'ordre


manifestement illégal et I'ordre en apparence légal' L'illégalité
manifeste de l'ordre empêcherait d'invoquer le fait justificatif ;

I'illégalité non manifeste serait une cause de justification'

II-ta iustification par l'exercice d'un droit

En plus de la justifîcation qui résulte de I'ordre de la loi ou de


commandement de l'autorité légitime, le code pénal prévoit deux
autres cause objectives d'irresponsabilité : la légitime défense (a* 124

al.3 CP) et l'état de nécessité (est 124 al.2 CP).


I -- Bemard BOULOC' Droit pénal général, Dalloa 24 édition' 2015' P 3545'346
113
Gours de droit pélal général

A.ta légitime défense

La légitime défense ferait partie des dispositions de droit pénal


naturel, dans la mesure où elle se retrouverait à toutes les époques et

dans toutes les sociétés, mais à des conditions qui différent


sensiblementr.

La légitime défense justifie les infractions commises en se

défendant ou en défendant autrui contre une attaque.

L'article 124 (a1.3) du code pénal dispose qu' « il n'y a ni crime,


ni délit, ni contravention lorsque l'infraction était commandée par la
nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d'autrui (...),
pourvu que la défense soit proportionnée à la gravité de I'agression »

Cet article constitue une apparente exception au principe selon


lequel nul ne peut se faire justice à lui-même. En raison de l'urgence
et de l'impossibilité matérielle de se défendre par la police,2 la loi a
permis aux particuliers de se substituer en quelque sorte, dans
certaines circonstances, à celle-ci. En effet, lorsqu'une personne est

attaquée, il y a deux intérêts en présence, celui de l'agresseur et celui

de la victime. Il est conforme à I'intérêt de tous que la victime soit

y ait légitime défense, il faut tout


préférée à I'agresseur. Pour qu'il
d'abord, et bien évidemment, qu'il y ait une agression, et que cette
agression soit mesurée.

' - Mikael AENT LOUC}IE : « Leçons de droit pénale généml » Ellipses, 2009, p.195
2
- La personne qui se défend (ontre une agresiion lnluste se substitue à la défaillance de fautorité
publique. car, au fond, à travers facte de défense Cest toute la société qui en profhe.

tt4
Cours de droit p6nal général

a.Nécessité d'une agression

Il est certain que l'acte réactif droit ête commandé par la


nécessité de la de défense. Il faut donc une agression telle que l'on
puisse craindre pour se personne ou pour ses biens.

Si le droit français, en ce qui conceme la légitime défense des


biens, l'article 122-5 alnéa 2 exclut tout acte de défense consistant
t
dans un homicide volontaire . C"t acte droit être strictement
nécessaire au but poursuivi2 ; le droit marocain quant à lü réserve à la

légitime défense un domaine large puisque l'agression peut porter


aussi bien sur les personnes que sur la propriété (les biens).

Ainsi donc, ce droit naît au Maroc pour se protéger contre une


agression contre soi-même ou un tiers, contre les biens appartement à

l'agressé ou un tiers, à condiüon que cette agression soit injuste,

actuelle et grave.

ol'agression droit être injuste :

Cela suppose que l'agression n'est pas fondée en droit et n'est pas

ni autorisée, ni ordonnée par la loi. Lorsqu'elle est opérée sur I'ordre


de la loi ou le commandement de I'autorité légitime ou lorsqu'elle est

conforme au droit, I'agression est juste et la défense n'est plus


légitime.
I
- selon I'alinéa 2 de I'article 122-5 du code frnal français, la légitime défense Mnéficie
à celui qui,
*uin introorrre I'exécution d,un crime oü d'* aglit oonûe un biên" accompli un acte de défense
,"r"""ii. moyens employés sonr proportionnés à la gravié
iï.;r:;ffii;üà i...1dès lors que tes

de I'infraction ».
i- Bemard BOULOC , Droit Snal général, Op'oit , P'350
115
Cours de droit pénal g6néral

N'est donc pas en état de légitime défense celui qui résiste à une
arrestation ou à une perquisition effectuées par un agent de la police
judicaire en vertu d'un mandat du juge d'instruction, ou encore celui
du bourreau ou du peleton d'exécution qui exécute un ordre des

autorités compétentes pour appliquer la peine de mortt.

rl'agression doit être actuelle ou imminente :

IL découle des dispositions de I'article 124 CP que l'infraction


fait défaut lorsqu'elle était commandée par la nécessité actuelle de la
légitime défense.

L'étude des nuances de cette « nécessité actuelle » nous posse à


des exemples tirés de la réalité.

Exemplel : Deux automobilistes sont anêtés à un feu rouge. Au


feu vert celui qui est en état de stationnement ne libère pas la
circulation, I'autre qui est bloqué denière, s'impatiente, commence à
crier, fait des gestes, insulte. Pris de rage, le premier descend de sa

voiture, ouvre son coffre et en sort une matraque, tente d'en faire
usage. L'autre esquive le coup et lui assène un coup de poing.

Toutefois, I'acte de défense perd son caractère légitime si entre


I'agression et la riposte s'est écoulé un intervalle de temps qui
réduirait la défense à un acte de pure vengeance.

I Dans le demier cæ, ta violation de I'article 393 du c.p réprimant I'assassinat reçoit une spparcnte
violation,,car_sa justification procédé d'un ordre (oi/ jugement), venant ainsi faire diiiaraltre
l'élernent légal de I'infraction.

116
Gours tle droit pénal g6néral

Exemple2 : une personne se fait attaquer regagne sa maisor;


ressort, armée ou nom, pour aller retrouver son agresseur.

Exemple 3 : quelqu'un frappe une personne dans la rue, des

passants maîtrisent I'agresseur et la victime de l'agression profitant de

I'immobilisation de son agresseur lui assène des coups.

Dans ces deux exemples, nous ne sonrmes pas face à une riposte

commandée par l'actualité de I'agression' En effet, I'actualité de


I'agression est étroitement liée à la réalité du danger encouru par
I'auteur de la riposte. C'est I'analyse du déroulement des faits qui
pennet aux magistrats d'apprécier le danger de l'agression et le poids
de la riposte : si le mal a déjà été accompli et que le danger a cessé, la

violence privée est condamnable.

Reste à mentionner que I'article 125 du C.P prévoit des


présomptions de légitime défense en disposant que : « sont présumées

accomplies dans un cas de nécessité actuelle de légitime défense :

1-L'homicide commis et les blessures faites ou les coups portés


en repoussant, pendant la nuit, I'escalade ou I'effraction des clôtures,

murs ou entrée d'une maison ou d'un appartement habité ou de leurs


dépendance

2- L'infraction commise en défendant soi-même ou autrui contre

I'auteur de vols ou de pillages exécutés avec violence'

tt7
Gours de rlroit p6nal g6néral

b- Défense nécessaire et mesurée :

Pour ête légitime, la défense doit répondre à deux conditions : la

nécessité et la mesure.

.Déîense nécessahe: selon I'article 124(a1.3) pour que

I'infrâction soit justifiée elle faut qu'elle soit commandée par la


nécessité actuelle de la légitime défense. L'expression <mécessité
-
actuelle » signifie que la défense était nécessaire, indispensable et que

la personne qui se défend n'a aucun moyen que de éagir, contre


I'agresseur ; par une autre agression, soit pour répondre à une attage

actuelle soit pour prévenir une aüaque imminente.

La légilime défense ne pôürrait pas êhe invoquée si la personne

attaquée pouvait objectivement trouver une autrc issue de secours, en

se mettant, par exempl€, sous la protection des autorités.

c Délense mcsurée: la défense droit également être mesurée :

c'est à dire proportionnée à la gavité de l'attaquer.

La proportionnalité envisagée par I'article 124(a1.3) C.P ne doit


pas être comprise cornme une propotionnalité religieuse, renvoyant à

la fameuse loi du talion, C'est une proportionnalité mesüée, adâptée,


à la limite réfléchie. Il ne fâut pas donc que le mal infligé à I'agresseur

soit sans proportion avec le mal auquel on était exposé, et qu'on a

fdsîs un srrêt tr'15-86.481, du l7 isnvier 21l?,la cour d. cassalion ftaqâisr â décidé quê
« pùisqu'il n'existait pas de dispmpodion cnùE I'sgrÉssion er les moyers d€ défensÊ .mployés, peu
impon€ à cet égârd le résultât de I'agression ». Voir Rcru€ « Ls semainc juddhue », n' I 5 dù I0
awil20l7.
118
Goun rlc droit pénal général

voulu éviter. L'appréciation de la proportion est une question de fait,


tranchée par le juge en considération du péril qui pounait être

redoutér. Ainsi, on ne peut répondre par un coup de feu ou de


matraque devant un coup de poing ou une gifle; pas plus que face à

un acte violant émanent d'un enfant on ne pourrait répondre par une

riposte violente.

En effet, le cadre juridique dans lequel fonctionnent les conditions

d'admission de la légitime défense au tihe d'un fait justificatif, fait


l'objet d'un débat doctrinal. La question est de savoir à qui incombe la

charge de la preuve : le mis en cause on bien le ministère public ?

Le législateur pénal marocain, à travers les dispositions de


I'article L25 CP, s'inspire du courant selon lequel les faits justificatifs
sont des circonstances exceptionnelles qui suppriment l'infraction et
qu'il incombe donc à la personne qui se prévaut du bénéfice de la
légitime défense de démontrer les conditions non moins
exceptionnelles de sa réalisation.

B.L'état de nécessité et la contrainte

Les dispositions de l'article 124 (a1.2) régissent comme faits


justificatifs, à la fois l'état de nécessité et la contrainte: << lorsque

l'auteur a été matériellement forcé d'accomplir ou a été

I
- en dmit 6nal ftançais, en cas d'attaque contre les biens, la proportion entre la défense et I'attaque
doit êhe plus rigoureuse, car la défense d'unc propriété, pour légitime qu'elles soit ne saurait justifter
le sacrifrce d'une vie humaine, ni des blessures gaves et inéparablæ. Telle est la solution que
consacre I'afiicle 122-3, alinéa2 du code pénal. Selon la conception frangaise, la défens€ des bien§ ne
permet pas dejustifier un homicide volontaire.

119
Gours de droit pénal général

matériellement placé dans I'impossibilité d'éviter I'infraction par un


évènement provenant d'une cause étrangère auquel il n'a pu resisten»

La remarque soulevée par une partie de la doctrine concemant cet

article porte sur la confusion entre ses éléments, du fait que la


contrainte constitue dans la majorité des systèmes juridiques ainsi que
par sa nature objective, un élément subjectif qui se rapporte à
l'imputabilité et donc à l'élément moral et non à l'élément légal de

l'infractionl.

L'état de nécessité comme cause justificative n'est pas pour


autant prévue par la législateur marocain. Mais, cette cause de
justification qü ne s'analyse pas intégralement comme I'obéissance à

un devoir ou à la l'exercice d'un droit peut néanmoins être élevée au


rang de principe général du droif.

a- L'état de nécesslté

L'impunité subordonnée à la nécessité de I'infraction ne date pas


d'aujourd'hui, En effet, I'histoire musulmane nous enseigle que
l'état de nécessité était considéré comme une cause d'irresponsabilité.
La période du khalif Omar bnou al khatab en est l'exemple ÿpe
püsque le vol d'aliments en cas de famine était impuni. En droit

I -Mohieddine
AMZAZI, précis de droit criminel, Dar Nachr Al Maarifâ, 1994, l&' édüion, p.?0
' -En Fmnce, c'est la j urispndence qui a été amenée à admettre comme cause de justilicâtioq l'étât
de néccssité, les édacteurs du noweau code p&ral ont expressénrent admis cetts cause de justification
à I'article 122-? qt,, empnmte pour partie à la légitime défense et à la contrainte. Voir Bemard
BOULOC, Droit peral général, Op, cit., P,357

120
Gours üe droit pénal géaéral

romaiq ce principe est formulé en adage : « nécessité n'a point de


loi ».

En effet, quel que soit I'endroit de la planète ou l'époque où l'on

vit, dans plusieurs cas, il arrive qu'une personne ne peut sauvegarder


un bien ou un droit qu'en accomplissant un acte déiictueux qui porte

atteinte aux biens ou aux droits d'une autre personne.

En droit marocain, de nombreux textes font de l'état de nécessité


une cause d'impunité et partant un fait justificatif' On peut notamment
citer :

-L'article 222 C.P qui reprime la rupture du jeune en public, sauf


si la rupture est religieusement autorisé.

-L'article 261 C.P qui réprime l'erercice de I'autorité publique


illégalement anticipée lorsque l'autorité est soumise à la prestation
d'un serment. L'absence de serment peut êüe couverte en << cas de

nécessité ».

-L'article 435 C.P qui sanctionne l'avortement perd sa nature

d'infraction pénale lorsqu'il constitue une mesure thérapeutique


nécessaire pour sauvegarder la vie de la mère.

Ceci dit" la recherche pour l'état de nécessité d'un principe


général de justification au plan du droit pénal général nous pousse de

s'interroger sur son fondement et ses conditions.

t2!
Gours de droit pélal gén6ral æ
1- Justilication de l'état de nécessité

Pour justifier I'impunité du délit nécessaire, la dochine a fait


appel à des considérations subjectives, puis objectives.

.Courant subjectif de la justilication

Dans un premier temps, on a lu dans l'état de necessité qu'un cas

particulier d'application de la containte morale ce qui le ramène à une

cause de non- imputabilité.

Certes, les limites entre un cas de nécessite et un cas de contrainte

sont parfois délicates à poser: le cas du naufragé qui pousse à la mer


son compagnon peul tout âussi se prévaloir de l'état de nécessité que

de la contrainte.

Mais, par nature les deux concepts sont différents. Si la


contrainte altère la liberté en ce qu'elle oblige I'agent à commettre
l'infraction et détermine son choix, l'état de nécessité se présente
comme l'expression d'une option de I'auteur vis à vis de ce qui

caractérise ce fait justihcatif. C'est l'exemple de I'automobilisle qui


choisit délibérément pour éviter un péril de s'encastrer dans une autre
voitüe appartenant à ull tiers.

Une deuxième varianle explicative procédait de « l'absence


d'intention coupable » pour faire échapper I'auteur du délit nécessaire
à la répression. Les actes de celui qü, pour ne pas mourir de faim,
vole un pain ou encore du docteur qui, pour sauvegarder la vie de la

122
Gourc de drolt pénal gfuéral

mère, tue I'enfant qui allait naître sont justifiés. Cette justification
tirée du défaut d'intention délictueuse, ne vaut que pour les

infractions non intentionnelles; elle laisse inexpliquée l'impunité


pour les infractions non intentionnelles, Mais surtout, elle a le défaut
de confondre l'intention et le mobile. Or, le mobil que qu'il soit, ne

fait pas disparaître l' intentionl.

ol,e courant objectif de I'impunité

Généralement, c'est à travers les considérations objectives que la

doctrine motive I'impunité du délit nécessaire. L'état de nécessité est


coülme l'état de légitime défense, un fait justificatif fondé sur
l'intérêt social. La société semble- t-il, de raison de punir, dans le cas

où 1e bien saoifié avait une valeur moindre que le bien sauvegardé


(propriété sacrifiée pour le salut d'une vie humaine). Et même,

lorsque les intérêts en conflit sont d'égale valeur (vie deux individus),

le délit nécessaire est socialement indifÏérent, car la société r'a aucun

intérêt à préférer la vie de l'un à celle de l'aufre. On I'exprime parfois


en disant que l'acte necessaire est extra-pénal. Le droit pénal

n'impose, ni le sacrifice, ni l'héroisme2.

2- Conditions de justilication de I'état de nécessité

L'état de nécessité procède d'une idée simple : entre deux maux,


il faut choisir le moindre. Il s'ensuit que I'agent qui prétend pouvoir

I-
Bemard BOULOC, Droit trnal effia\Dalloa24tu Ediüon,2015, P.35E

2
-Ibid, p.359.
tzl
Gours üe droit péml gén6ral

en bénéficier soit devant un danger actuel ou imminent et que

l'infraction comporte une dimension de nécessite et d'utilité.

oConditions tenant au danger :

L'état de nécessité n'a de raison d'être que si la personne se

trouve devant « un danger actuel ou imminent » ; danger le menaçant,


menaçant autrui ou les biens.

L'actualité s'entend d'un danger présent, et donc certain, et non


d'une simple crainte. Cette question de I'imminence est une question
de fait que les juges du fond apprécient souverainemeff.

Si le danger doit être actuel, le péril doit être injuste, c'est-à-dire


contraire au droit. Si la personne avait une obligation de subir le

danger, elle ne peut invoquer pour sa défense l'état de nécessité: le

soldat sur le champ de bataille ne pourra invoquer le danger de mort


représenté par le conflit pour se soushaire à ses obligations militairesr.

Il semble cependant que l'absence de faute est nécessaire. L'étzt


de nécessité pour produire unejustification ne doit pas être le résultat

d'une faute antérieure, c'est le cas de celui qui après avoir brisé une
clôture se trouve dans I'obligation d'abatte un animal qui présente un
danger réel.

'- AbdalilBh BOULAICH, Cours de droit pénal général, Librairie Al Maarif Al Jamiiya-Fès-, Année
univenitaire 1 997-1998, P. 189

t24
Cours rle ilroit pénal génétd

rConditions tenant à l'acte justifié :

En plus du caractère actuel du danger, il faut encore qu'il se

présente comme une nécessité de commettre I'infraction, autrement dit

une nécessité à la sauvegarde de la personne et du bien. Cela


implique que si I'agent pouvait par un autre moyen éviter le danger
encouru et ne I'a pas utilisé, il sera condamné.

Si l'automobiliste qui franchit une ligrre continue, parce qui c'est

Ie seule moyen d'éviter un piéton imprudent peut invoquer l'état de

nécessité, l'automobiliste qui pour éviter l'endommagement de son

véhicule blesserait un piéton ne pourrait s'abriter denière l'état de


nécessité.

En effet, la loi requiert une proportionnalité entre les moyens


employés et la gavité de la menace. Le délit nécessaire n'est jrxüfiée
que dans la mesure où il a permis de sauvegarder un bien ou un
intérêt de valeur supérieure ou équivalente à celle du bien ou à

l'intérêt sacrifié.

Pour conclure, on peut dire que si celui qui invoque la légitime


défense est une victime, celui qui s'abrite derrière l'état de nécessite

est un agresseur, En effe! le premier répond à un acte dirigé contre


lui, ses biens ou ses proches; le second réagit aux évènements en
mettant en cause un tiers qui y est à priori étranger. L'infraction

t25
Gours rle droit p6nal gén6ral

semble donc « méritée » par autrui dans le premier cas mais pas dans

le secondl.

b. La contrainte

Tout comme l'état de nécessité, la contrainte couvre des

hypothèses différentes où la volonté de I'agent est affectée par une

cause à laquelle il ne peut résister; cela se déduit des dispositions de

I'article Da @1.2) du code penal: «...I1 n'y a ni crime, ni délit, ni


conhavention lorsque I'auteur a été matériellement forcé d'accomplir
ou a été matériellement placé dans l'impossibilité d'éviter I'infraction
par un événement provenant d'une cause étrangère auquel il n'a pu
résister ».

En effel de cet article découlent les formes et les conditions de la

contrainte.

1- Formes de contrainte

Globalement la contrainte peut se présenter sous deux formes


principales2: physique ou morale

- La contrainte physique: c'est le cas où I'agent est

matériellement placé dans I'impossibilité d'éviter la commission de


l'infraction (force de la nature, fait de l'homme, fait de l'animal, fait
de I'administration...).

I
- Emmanuel DREYER, Droit pénal général, Lcxis Nexis, 2æ édition, 2012, P.?E4
2
- Mohieddine AMZAZI, Précis de &oit criminel, Op.cit., p.72.
t26
Gours de droit p6nal g6néral

- La contrainte morale : Elle consiste dans le fait de déterminer


psychologiquement I'agent à commettre l'infraction. Cette forme de
conûainte s'exprime par la menace pressante ou par une suggestion.

Toutefois, dans le premier cas coûrme dans le second, la


contrainte ne peut être retenue corlm€ fait justificatif que si elle est
inésistible et étrangère à une faute étrangère à l'agent.

2-Conditions de validité de la contrainte

Pour qu'elle soit une cause valable de justification, la


contrainte doit être à la fois irrésistible et imprévisible.

-L'irrésistibilite : le deuxième alinéa de l'articleL24 du cods pénal


précité renvoie purement et simplement à la notion de contrainte à la
force majeure: I'agent est soit forcé d'accomplir l'infraction, soit il
est dans I'impossibilité de l'éviter. Il n'était pas possible humainement

de conjurer le sort.

-L'imprévisibilité: pour que la contminte supprime l'élément


légal, il faut encore que le comportement que l'on reproohe à l'agent
n'est pas à rattacher à une conduite fautive et antérieure à la

commission de l'infraction. En revanche, l'agent ne poüra pas par la


suite réclamer le bénéfice de la contrainte s'il pouvait ou devait

prévoir les conséquences de ses actes.

127
\

Gours rle droit p6nal g6néral

Chapiüe 2 : L'élément matéilel

Pour qu'une poursuite soit possible, il faut que I'infraction se soit


révélée à l'efiérieur par un fait matériel objectivement constatable. En

effet, à I'exigence formelle d'un e loi s'est donc ajoutée une exigence
matérielle.

A la différence donc de la morale, qui scrute les consciences et

sanctionne les mauvaises pensées et les intentions coupables, le droit


pénal qui protège la société ne réprime les manières de penser, mais
seulement les manières d'agir. Il ne les punit que lorsqu'elles se sont
manifestées extérieurement par un fait ou un actel. La nécessité d'une

extériorisation de Ia volonté coupable se justifie à la fois par la


difficulté qu'il y a à prouver une donnée uniquement interne,
psychologique, et par cette considération que les simples tentations
criminelles ne troublent pas I'ordre social2. En effet, s'il est des

hypothèses oùr ce trouble peut être commis par une personne isolée, il

1
- La volonté crlmlnelle échappe à toute répresslon, tant qu'elle ne s'est pas trirdulte extérleurement
par un acte ou une néBllgence prévus et incrlminés par la loi pénale. Voir P.Cuchg Précis de droit
criminel, Oalloz, 5" édltlon, 1934, P.58
2
- L'anclen code civil françals de 1810 admettrâlt des présomptlons qui facilitalent le travail de
l'accusatlon, ainsl son artlcle 278 dlsposait que:( tout mendlant ou vagabond qul sera trouvé
porteur d'un ou de plusieurs effets d'une valeur supérleure à 1ü).F, et qui ne Justlfiera polnt doù lls
lul provlennent, sera punl de(...|. Ce qui permettalt de punlr le mendlant pour vol sans étabtlr aucune
soustraction.
Cette présomptlon a été supprlmée, mals le code actuel en a rélntrodult d'autres. Alnsl, est asslmllé
au proxénétisme lè fâlt « de ne pouvolr lustifier de ressources conespondant à son traln de vie tout
en vivant avec une personne qul se lfure habhuellement à la prostltutlon ou tout en étant en
reletions hebituelles avec un ou plusleurs p€rsonnes se livrant à la prostltution»(art.225-5, 3'l , D€
même a été érigé ên lnfraction le fait d'être en relations habltuelles avec un ou plusieurs personnes
se livrant à la mendlclté laft.225-L2,5'1. à la vente de la sauvette 1eft225-12,8]|. Volr Emmanuel
DREYER, Droit pénal général, Lexis Nexis, Op.clt., P.32

t28
Cours rle droit pénal général

en est beaucoup d'autres où la participation d'une pluralité de

personnes à la commission de I'infraction est soit possible, soit


nécessaire.

Ainsi, on étudiera dans une première section l'élément matériel de


la responsabilité pénale pour aborder dans une seconde, l'élément

matériel dans l'infraction commise à plusieurs.

L29
Gours de droit pénal gén6ral

§octon I r l'6l6nrrnt mülrlrl dr h rupolrcbllltl


parch

Si un acte est toujours requis pour qu'il y ait infraction, il n'est


pas nécessaire que cet acte ait laissé des traces matérielles, ou
provoqué une conséquence nuisible. La question qui se pose à ce
niveau est de savoir à partir de quel moment la volonté coupable d'un

agent se sera manifestée de manière suffisamment nette pour que les


pouvoirs publics puissent mettre la répression en mouvement. La
réponse à cette question nous conduit à étudier successivement le

comportement et le résultat.

§1- le comportement

A la base de toute poursuite pénale, on trouve un véritable


comportement qui peut prendre ou la forme d'une action ou d'une
omission. La distinction entre ces deux modalites d'expression
matérielle de l'infraction ne pose aucun problème. En revanche, le
point délicat est de savoir si une simple omission est en mesure de
constituer un délit de commission.

I.te délit d'action fou de commission) et délit d'omission

La loi pénale d'incrimination vise le plus souvent un acte positif


pour défrnir l'élément matériel. La loi interdit le meurtre qui se réalise
par I'accomplissement d'un acte homicide (art. 400 C.P) ou de

l'escroquerie qui s'analyse en I'emploi de moyens frauduleux dans le

130
toun de üroit pénal général

dessein d'obtenir la remise d'une chose appartement à aufui (art.392


C.P). Ce §pe d'infraction qui consiste à faire ce que la loi interdit de
faire, constitue par excellence le délit d'action ou de commission.

En effet, dans le souci de protéger la liberté individuelle, les


législations pénales classiques entendaient que les infractions ne
soient en principe que de commission car la liberté souf&e moins de

l'interdiction d'une action positive que de celle d'un comportement


passif.

Aujourd'hui cependant, un sens plus affirmé de la solidarité


humaine et un interventionnisme croissant de l'Etat ont conduit à
I
incriminer plus frquemment qu'autrefois des abstentions
Constituent donc des délits d'omission: l'abandon de famille, la non

dénonciation d'un crime, l'omission de porter secours à une personne

en péril. Dans certains autres sectews du droit pénal, les infractions

d'omission sont très nombreuses. C'est le cas en droit routier (défaut


de casque, de ceinture ou d'assurance, délit de fuite...). Dans tous ces
cas, l'élément matériel réside dans un acte'négatif qui consiste à ne
pas accomplir ce qui la loi commande de faire.

En effet, entre le délit de commission et celui d'omissiotl existe-

t-il une catégorie intermédiaire, celle du délit de commission par


omission ?

,- Jean PRADEL, Histoire des docfiines pénales, presses universitaires do Paris, 2* éditioq 1991,
P.356

131
Gours tle droit pénal générd

II.Le délit de commission par omission

Le même résultat pénal peut avoir pour origine un acte positif


(une commission), mais il peut aussi être rattaché à une omission.
Toutefois, entre ces deux hypothèses, un délit de commission peut-il
résulter d'une simple abstention selon la formule célèbre de Loysell
« celui qui peut et n'empêche pèche »'

Exemplest i

- Celui qui sans tuer sa victime par un geste positif la laisse


néanmoins mourir en lui refusant volontairement tout secours.

- Une personne est en rain de se noyer alors qu'une autre reste

spectatrice devant cette noYade.

- Celui qui laisse périr une personne en la privant d'aliments ou


en ne lui en portent pas secours.

Dans ces exemples, on imagine que ce sont ces omissions qui sont

en tout ou partie la cause d'un décès. On peut donc se demander à cet

égard si une omission volontaire et génératrice des mêmes

corséquences peut-elle êfre assimilée à l'acüon positive prévue par le

texte2.

'- Antoine loysel (1536-1617), est un jEifggâüIts ftançais resté célèbre parmi les juri§te§ pour
avoir collecté les principes géneraux de I'ancien droit coutumier ftançais.
2 -L'ancien droit français, sous I'influence de§ canonistes, admettait que celui qü laisse
volontâirement s'accomplir un résultat analogue à celü d'une infraction de commission e§t aussi
coupable que I'auteur de celle- ci, cette solution ne saurait être admise aujourd'hui. Voir Jean
PRÀDEL, Droit pénal géneral, Op.cit., P.356
L32
Gours rle droit p6nal général

En effet, la règle de l'interprétation sticte interdit toute

assimilation d'une omission à une action positive seule prévue par la


loi. Décider le conhaire serait raisonné par analogie. C'est seulement,
dans les hypothèses où la loi I'a expressément prévu que I'omission
peut avoir la valeur d'une commission et exposer son auteur aux
peines édictées pour le délit de commission. Il en est ainsi de l'article

408 et suivant du code pénal qui prévoit en principe les mêmes peines
pour « privations de soins et d'aliments » imputables aux parents ou
gardiens que pour les coups à enfants de moins de 15 ans. La
jurisprudence française a considéré comme complice « celui qui à

favorisé des blessures par imprudence en s'abstenant d'intervenir


coflrme il en avait I'obligation »1.

§ 2- te résultat

Toute infraction suppose en principe un résultat : cette proposition

découle de la conception utilitariste de notre droit. Mais qu'est-ce que

le résultat?

En effet, selon une partie de la doctrine, le résultat pénal peut être

défini comme (( un houble social ou privé partrculièment grave en


relation causale avec le comportement du décliquant ». ll faut utiliser

le concept de résultat dans son sens ordinaire en n'envisagement ici


que la suite du comportement incriminé. Ainsi, le résultat pénal ne se

confond jamais avec le comportement incriminé; il en est la

1
- Cass. Crim., I 3 Sept. 2016, no I 5-85-046. Voir Revue « Droit pénal », n" I I Novembre 20 16, P
26.
133
Gours rle üroit pénal général

conséquencel. Le plus souvent, il est vrai, la loi définit l'infraction,


non seulement par les moyens utilisés, mais encore par le résultat qui
s'en est suivi. Dans ces infractions, appelées matérielles, le résultat
nuisible est élément constitutif de l'infraction. Il existe, toutefois, des

infractions dites formelles qui sont réalisées par les seuls moyens
employés, indépendamment de leur résultat, en I'absence même de
tout résultat2. Cette absence de résultat constitue souvent un problème
qui suscite des controverses doctrinales sur la question de la tentative.

III.Position du problème

Considérée dans son ensemble, l'activité criminelle, que l'on


compare volontiers dans son développement à un chemin (chemin de

crime), va de la simple pensée et représentation psychologique du


crime jusqu'à la production du résultat recherché, en passant par la
résolution, la préparation, le cofllmencement de I'exécution et

I'exécution elle-même. Il ne fait aucun doute, que lorsque I'infraction

a produit son résultat (infraction consommée), elle est punissable. Il


n'est pas moins certain, par ailleurs, que la simple pensée de

I'infraction, et même, la résolution prise de la commettre n'enteraient


aucune sanction.

La question est de savoir à quel moment, sur cette trajectoire, le


droit pénal affrchera ses prétentions pour saisir, analyser et tirer les
conséquences nécessairement attachées à la réalité de la volonté

i - Emmanuel
Dreyer, Doit penal général. Op.cit., P.465
'- Bemard BOULOC, Droit pénal général, Op.cit, P..226

134
Gours de rlroit pénal général

criminelle. Ou encore jusqu'à quel point ultime le droit pénal restera-


t-il dans l'ombre avant de frapper ? Ou autrement formulé à quel
moment la tentative devient punissable ?

Parfois, on constate que la loi intervient pour réprimer dès le


premier stade, c'est à dire celui de la résolution criminelle
(association de malfaiteurs, entente anarchiste, complot); ou dès le

deuxième stade qui punit les actes préparatoires (bris de clôture,


contrefaçons de clefs).

Mais dans ces hypothèses, fondées sur une politique criminelle


préventive, la résolution criminelle ou les actes préparatoires jouissent

d'une autonomie propre d'incrimination et ne sont pas punissable au


titre d'une tentative d'une autre infraction. Ce sont des infractions
spéciales ou autonomes, dotées d'un régime propre et punies en tant

que telles.

La question demeure donc entière : à partir de quel degré


d'expression matérielle de I'activité délictueuse la compétence pénale

s'affrrme, ou en d'autres termes, à partir de quel degré d'absence de


résultat ; cette même compétence s'afftrmera ? Deux théories
alimentent le débat doctrinal.

IV.Solution doctrinales

Du point de vue doctrinal, deux questions s'opposent qui


conespondent à deux conceptions di{férentes.

135
Gours rle droit pénal géuétal

A.La théorie Obiective :

D'inscription allemande, cette théorie subordonne la


conliguration de I'infraction à un préjudice pénal potentiellement
effectif.

Dans cette analyse, on part d'une approche matérialiste de


l'infraction et le résultat pénal est incorporé à la définition de

l'infraction. La peine qui dans ce système s'analyse à son tour comme


Ia compensation du désordre provoqué dans I'environnement pénal va

souligner cette dimension objective de l'infractionl. Ainsi, l'infraction

simplement tentée ne doit pas être punie puisqu'elle n'a causé aucun

houble à l'ordre social ou tout au moins un trouble moindre que


l' infraction consommée.

Exemple: - une personne exhibe une aûne, la pointe sur la


victime, mais ne tire pas, rentre dans une banque en déclarant son
intention de voler.

L'inconvénient majeur de cette approche est qu'elle laisse hors


champ de la répression des activités foncièrement dangereuses, d'où la

réaction de la tendance subjective.

I-
Abdalilah BOULAICH, Cours do droit pénal générat, Librairie Al Maarif At Jamiiya-F&-, Année
universitaire 1997-l 998, P.200

r.36
Cours dr droit péul général æ
B.La théorie subiective

Cette théorie s'écarte délibérément d'une analyse juridique et

appréhende la situation particulière de la tentâtive non à partir de la

recherche de la virtualité d'un résultat mais à partir de la volonté


délictueuse détachée d'un tel résultat. En efïet, ce courant prend en

considération non plus le resultat de I'acte, mais la perversité, la


« Îémébilité » de son auteur. Ainsi, lâ lenlative qui révèle l'intention
criminelle et le caractère dangereux de I'argent est socialemenl aussi
grave que l'infraction consommée ;elle doit dès lors, être sanctionnée,

et aussi sévèrement.

Ce courant a I'inconvénient de punir tous les délits tentés, sans


distinction, et de [a même peine que les délits consommés, dès

l'instant qu'ils manifestent une volonte criminelle.

CL'influence de ces théories sur le drolt marocain

Le droit pénal marocain est à la fois hostile à rme approche


purement objective de la tentative, tout en empruntant à celle-ci
quelques trails de son économie, mais aussi hostile à l'élection d'une

approche subjective exolusive, tout en ne rejetant pas ses avantages

repressifs. Il considère que l'approche subjective peut, dans certaine

forme d'harmonie, venir compléter les inconvénients attachés à [a


conception objective.

L37
Gours de droit pénal général

Cette solution est, en réalité, une synthèse des deux conceptions.

La tentative est toujours punissable en matière criminelle, elle ne l'est


qu'en vertu d'une disposition en matière de délit ; elle ne l'est jamais
en matière de contravention. De plus, la loi exige que la tentative se

soit manifestée par un commencement d'exécution. Ce sont là sans

nul doute, des solutions inspirées par la conception objective.

IIL La tentative

En vertu de l'article 114 du code pénal : « toute tentative de crime

qui a été manifestée par un commencement d'exécution ou par des


actes non équivoques tendant à le commethe, si elle n'a été suspendue

ou si elle n'a manqué son effet que par des circonstances


indépendances de la volonté de son auteur, est assimilée au crime
consommé, et réprimée comme tel ».

A travers les dispositions de cet article, on peut dire que le


tentative est << l'action d'essayer de commettre un délit ».lAinsi, notre
droit n'exige pas toujours la réalisation de résulta dommageable
coûlme base de l'existence de I'infraction ou de la possibilite d'une
condamnation pénal. Cette absence de résultat peut parvenir de deux

causes. Tantôt, les actes du malfaiteur ont été suspendus en cours

d'exécution et l'on peut pader de tentative interrompue, tantôt, l'agent


à mémé son action jusqu'à son terme, le résultat seul faisant défaut, et

l'onpeut alors parlerde tentative stérile ou infructueuse.

1 - Jean PRADEL, Droit Énal général, Cujas, tom I, 8* édition, 1992, P .37 I
138
Cours üe droit pénal g6néral

ÀLa tentaüve interromPue

L'articlell4 du code pénal soumet le régime juridique de la


tentative à la réunion de deux conditions. Il s'agit du commencement
d'exécution et I'absence de désistement volontaire.

a.Le commencent d'exécution

il
est d'abord intéressent de distinguer le commencement
d'exécution de certraines notions voisines désignant certaines
situations qui, elles aussi, précèdent l'accomplissement effectif de

I'infiraction.

Le commencement d'exécution, acte matériel, se distingue

nettement de la résolution criminelle qui est purement psychologique

et n'est pas en principe punissable en raison de son caractère interne.

Toutefois, il est plus difficile de la distinguer des actes préparatoires


qui sont, etx aussi, matériels. Que décider par exemple dans le cas de
I'individu s'apprêtant à commettre un vol dans une maison et qui, par
une ultime précautiorq sonne à la porte d'entrer avant de fracturer
celle-ci et, croyant sa victime absente, la voit apparaltre ? Le coup de
sonnette n'est-il qu'un acte préparaÛoire non répréhensible ou
constitue-t-il le commencement d'exécution ?

De même, I'achat d'un revolver est-il un acte préparatoire ou le


commencement d'exécution d'un meurtre ? On peut acheter un

139
Cours de droit pénal génétal

revoler, non seulement pour tuer quelqu'un mais peut-être pour se

défendre ou se suicider.

Pour distinguer I'acte préparatoire du commencement

d'exécution, la doctrine a proposé deux conceptions. Aux critères


doctrinaux, suivra le choix fait par le droit positif.

1.Les propositions doctrinales

Il y a lieu de distinguer entre la conception objective et celle


subjective.

Suivant une conception objective, I'acte préparatoire ne rentre pas

dans la définition légale de I'infraction tentée, tandis que le


commencement d'exécution est un acte qui en fait partie, soit comme

élément constitutif, soit comme ne. situation aggravante.

Cette théorie objective, top « juridique » est jugée incapable de

réaliser une défense satisfaisante de la société.r L'inconvénient majeur

réside d'une part, dans le fait qu'on laissera impunis des actes qui
révèlent chez leurs auteurs une intenüon criminelle bien arrêtee. Le
vol, par exemple, étant la sousüaction frauduleuse de la chose

d'autrui, ne pouvait être poursuivie que lorsque le valeur a mis la


main sur I'objet convoité, mais pas encore lorsqu'il a percé le mur
pour arriverjusqu'à la selle des coffres d'une banque ou encore le cas

I- et procédure penale, Dalloa 1999,


C.Levasseu, AChavonne, J.Moltreuil, B.Bouloc, Droit Snal
P95

140
Cours r[e droit pénal général

où le voleur est surpris au moment où il tend la main vers la caisse;


et d'autre part, on punira comme coupable d'une tentative de vol et

non de meurtre, celui qui aura pénétré, amlé, dans une maison par
escalade ou par effiaction, puisque I'escalade et I'effiaction ne sont
pas des circonstances aggravantes que pour le vol.l

En effet, Si cette théorie s'attache exclusivement aux actes déjà


commis, la conception subjective, qui s'attache au contraire à
I'intention de I'auteur, sujet actif de I'infraction" considère qu'il y a
commencement d'exécution dès qu'on se trouve en présence d'un acte
positif qui révèle la volonté définitive et arrêtée de commethe telle
infraction, ce qu'on appelle acte univoque par opposition à I'acte
équivoque. Il en est ainsi lorsqu'il existe entre le mal qu'a commis
I'agent et le but qu'il se proposait une distance morale si faible que,
laissé à la rnême, il I'aurait presque certainement franchie.

En effet, selon cette conception, est considéré comme coupable


d'une tentative d'avortement, le médecin qui, après avoir accepté de
faire avorter une femme et fixé le montant de ses honoraires pour

cette opération, s'est rendu au domicile de la clientèle, muni d'une


trousse contenant les instrumenh appropriés, bien que l'avortement

lui-même n'ait pas été commencé. De même, est admis comme


constituait un commencement d'exécution d'une tromperie, le fait
pour un vendeur d'automobiles, d'exposer à la vente des véhicules

I
- Bemard BOULOC, Droit général,Op.crt.,P.229

L4t
Gours de droit pénal général

dont le compteur kilométrique, à la suite de manipulations, affichait


un kilométrage inférieur à la distance réellement parcourue.

Toutefois, ce critère qui met en avant la puissance de nuire de


l'agent, le danger futur qu'il représente, assure évidemment de
manière efficace la défense de la société. Mais il est assez vague et
difficile à manier, d'autant plus qu'il méconnait la lettre de l'article
I 14 du code pénal qui exige « un commencement d'exécution >r, alors

qu'on se contente ici d'une résolution irrévocable.

2- La position du droit positif

A bien lire l'article 114 du code pénal, on constate que le droit


positif a opté pour une approche mixte dans le choix juridique de la
solution à donner au commencement d'exécution. En effet, la tentative
punissable est subordonnée à :

l-Un corset matériel qui se confond avec le commencent

d'exécution,

2-Des actes non équivoques tendant directement à commettre le


crime.

Le tout naturellement plaqué sur un environnement

psychologique.

En effet, dominé par le souci d'évider I'arbitraire dans la


répression de la tentative, le droit marocain objectivise d'une certaine

manière l'intention irrévocable du délinquant en se basant sur la


L42
Cours de rilrolt p6nal général

lature de la matérialité des actes accomplis au moment où il constate


I'intemrption.l

C'est à cette conception clæsique doctrinale que se rattache la


distinction classique entre « acte univoque » et acte « équivoque »
utilisée par le code pénal italien. Le commencement d'exécution
présente un caractère univoque car il ne peut s'expliquer que par
I'intention criminelle de son auteur, tandis que les actes préparatoires
ont un caractère équivoque, car ils sont susceptibles de plusieurs
interprétations (ex. l'escalade d'un mur, acte ne révélant pas lui-même

son objet)2.

En droiq c'est la recherche d'un lien de causalité directe qui sert


de critère correctif afin de mieux cerner le commencement

d'exécution, et donc situer ce commencement dans un temps très


proche de I'exécution de l'infraction. Derrière cette causalité se

présente la notion du « passage à I'action ».

D'une manièr€ générale, la cour de cassation en partant de

l'analyse de la structure de la matérialité des actes accomplis, cherche


à y déceler une volonté, une intention caractérisée et tendue à la
réalisation de l'entreprise agressive3.

' - AbdelilahBOIILAICH, Cous dê dloit pénal génénl, Op.cit, P. 206


2
- Jean PADEL, Droit penale gérærale, Op.cit., P.374
'- AMellah BOULAICH, Coun de droit pénal générol, Op.cit, P.206
143
Gours rle droit pénal gén6tal

b- L'absence de désistement volontaire

Le commencement d'exécution, ne suffrt pas à constituer la


tentative. La notion de tentative suppose que la per§onne, ayant la
volonté bien arrêtée de parvenir à ses fins et déployant pour cela tous
ses efforts, échoue néanmoins. Par conséquent, l'agent ne commet pas

de tentative lorsque, ayant d'avoir consommé l'infraction, il y

renonce : c'est le désistement volontairel. Il faut donc que I'exécution


ait été « suspendue ou ait manqué son effet pour suite de circonstances
indépendantes de la volonté de son auteun» (art. ll4 C.P). Ainsi, pour

entrainer l'impunité, il faut que le désistement soit, cettes, volontaire,


mais il doit aussi être antérieur à la consommation de l'infraction.

l.Le désistement doit être volontaire

Dans un but de politique criminelle, la loi décide que I'agent,


même s'il a franchi le seuil du commencement d'exécution, échappera

à toute sanction s'il s'est volontairement désisté. C'est une demière


chance que la loi offre de rentrer impunément dans le chemin de la
légalité.2

Le désistement est sans aucun doute volontaire lorsqu'il n'a été


déterminé par aucune cause extérieure à l'agent, mais par la seule

1
{hristophe PAULIN, Droit penal général, Lexis Nexis, 4e e édiüon,2005, P.48
2-
G.Levasseur, A.Chavonne, J.Montseuil, ts.Bouloc, Droit penal a procédure rtnale, Dalloz, 1999,
P.60

lM
Gours tle droit pénal génétal

décision de celui-ci, quel qu'en ait été le motif (pitié, remords, crainte

du châtiment, peur physique).

Il est certainement involontaire le désistement dt à un élément


étranger à I'agent, telle que I'arrivée inopinée d'un témoin ou de la
poüce que aurait empêché l'agent de consommer son infraction; ou
encore le désistement dt à un élément extérieure purement matériel,

par exemple, le fait que l'arme de I'agent se soit enrayée.

2.Le moment du désistement volontaire

Il n'y pas de tentative punissable, lorsque après commencement

de I'exécution, I'auteur a décidé volontairement de désister avant que

I'infraction ne soit consommée. Si, par exemple, après avoir jeté


quelqu'un à I'eaq on le retire avant que le mort n'ait été fait son
æuvïe ; il y a désistement volontaire et, par suite, pas de tentative. Au

contraire, I'infraction une fois consommée, si l'auteur essaie d'en

réparer les conséquences du désistement il n'y a plus désistement,


mais repentir actif. or, à la différence du désistement qui est antérieur

à la consommation de l'infraction, le repentir actif qui lui est

postérieur, ne produit pas d'effet en ce qui conceme les conséquences


juridiques de l'acte, il n'en efface pas le caractère délictueux' C'est
ainsi que celui qui a volé la chose d'autrui, puis, pris de remords, va la

restituer, peut faire I'objet de poursuites pour vol, de même le délit


d'émission de chèque sans provision demeure punissable alors même
que l'auteur de l'infraction a désintéressé sa victime' Le juge peut,

145
Gours rle droit pénal g6nétal

cependant, tenir compte du repentir actifpour accorder au repenti une

peine atténuée.

Si pour les infractions matérielles, le désistement est possible tant


que le résultat n'est pas réalisé, il n'y a pas de désistement possible
pour les infractions formelles : dès I'administration d'un poison à la
victime, il y a empoisonnement consommé, même si on lui administre

aussitôt un antidote (confrepoison). En France, en matière

d'urbanisme, l'obtention d'un permis de construire n'efface pas le


délit de construction sans permis, antérieurement consommél.

B- La tentative achevée

Il y a tentative achevée ou stérile lorsque le résultat recherché par

l'agent ne se produit pas, bien que tous les actes d'exécution aient été
accomplis. Or, il peut en être ainsi dans deux séries d'hypothèses :

I' infraction manquée et I' infraction impossible.

a.L'infraction manquée

Dans cette hypothèse, I'agent ayant accompli tous les actes

extérieurs nécessaires à l'exécution de f infraction, celle-ci a manqué

son effet indépendamment de sa volonté. C'est parfois à cause de


l'étourderie or de la maladresse de I'agent que le résultat n'est pas
atteint. L'exemple classique est celui du criminel qui vise mal sa cible,

tel est le cas de I'individu tirant un coup de feu sur un adversaire qui
s'est brusquement écarté et l'ayant ainsi manqué.
t -Bemæd
BOULOC, Droit 24b
$nal générai, Dalloz, édiüorl 2015, P. 233-234

146
Gonrs de rlroit pénal général

Juridiquement, ce ÿpe d'infraction ne pose aucune difficulté


particulière sur le plan de son traitement pénal, car selon les termes de
I'article 114 du code pénal((toute tentative de crime (...) si elle n'a
manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la
volonté de son auteur est assimilé au crime. '. ».

L'absence de résultat ne diminue en rien la culpabilité de I'auteur

de ce type de tentative. La victime si elle a bénéficié de la maladresse,

de latourderie ou du cas fortuit; en aucune manière ces circonstances

ne sont de nature à mettre à l'abri l'agent. Cet agent reste pénalement


responsable. Le délit manqué implique une activité coupable plus
poussé que le simple commencement d'exécution.

b.L'infraction imPossible

C'est le penaliste allemand Feuerbach qui, en1808 pose la


question de l?infraction impossible. Il ne s'agit pas à proprement
parler d'un acte inachevé mais bien d'un acte entièrement consommé
qui ne pouvait en aucune manière produire le résultat escompté. c'est
le cas lorsque la réalisation de l'infraction est impossible soit faute de
moyens appropriés, normalement ou légalement requis, soit faute
d'objet. L'essentiel est que l'auteur ignore I'existence de cette

impossibilité.

C'est le fait par exemple de tenter de tuer quelqu'un qui est déjà
mort, de tuer avec un fusil qui n'est pas chargé, d'empoisonner avec

t47
Gours ile rlrolt p6nal général

une substance non toxique, de faire Avorter une femme qui n'est pas

enceinte ou avec une substance sans vertu abortive.

Dans tous ces exemples, l'auteur peut-il être considéré comme


coupable de tentative ?

-Selon conception objective, le délit impossible ne saurait être


assimilé au délit tenté. Il doit rester impuni pour cette double raison

qu'il n'a causé aucun trouble social ou en tout cas un trouble social

moindre que le délit tenté et qu'il ne peut être comnnencé dans son
exécution puisque celle-ci est impossible.

-Quant à la conception subjective, elle est en faveur de


I'assimilation du délit impossible au délit tenté, on n'a pas manqué de
faire observer que la répression du délit tenté ne dépend pas du
résultat mais de l'intention réelle de celui qui l'a tenté ne dépend pas
du résultat mais de I'intention réelle de celui qui l'a tenté.

Entre ces deux thèses qui ont paru excessives, une thèse
transactionnelle a été proposée. Elle repose sur une distinction entre
I'impossibilite absolue qui entraine I'impunité du délit impossible
(inexistence de I'objet ou des moyens). L'impossibilité est relative
lorsque I'objet existe mais ne se trouve pas là ou l'agent croyait qu'il
se trouvai! ou lorsque les moyens employés, efficaces en eux-mêmes,
ne l'ont pas été par suite de leur utilisation maladroite.

148
Cours de rkoit p6nal g6néral æ
Si la confusion dont témoigne L'article ll4 du code pénal ne
permet pas d'identifier nettement la position du droit marocain à

l'égard de I'infraction imposibleri I'article 1l? du même code a une


position que l'on pouvait qualifier de radicaliste dans la mesure où il
ne se préoccupe pas de ces distinctions et fait de la répression de
l'infraction impossible un principe général2.

En effet, selon les termes de cet article: « la tentative est


punissable alors même que le bü recherché ne pouvait etre atteint en

raison d'une circonstance de fait ignorée par I'auæu ». Cet arlicle est

claire et dont on trouve un cas d'application à travers l'article 449 du

code penal réprimant I'vertement, mais aussi un contre-exemple

fourmi pæ I'a*icle 398 du code pénal réprimant I'empoisonnement3.

r-
lrohieddinê A\I4ZAZI, !tréci§ dc &oit crininel' Dar l'Ilch Al Miâtiîâ' le éditior! 1994' P 84
cour è drcn pâsl g&énl, Ôp.cit' P.21 I
'- Abdrlihb BoUALÀlcrq e que
françafu, pûfoi3 tê délit impossibl. n'êrt pts punissablc; c'est ca! de l'empoilonne
'- En drôtt « àh üe daÛui par lemploi ou
l'!ÎîiclE 221-5 du cod€ Énsl défiîit commê stlcntat
t'administrâtion de grbslanc€s dc nÀtüe À êr§dner ls morbr'
149
Cours de droit pénal gén6tal

Socllor I il'ôllmrnt notfrbl dlnl I'lnfnrillon comrh


ù pludrun

La pluralité des participants à une action criminelle est un


phénomène qui a depuis longtemps suscité I'intention des chercheurs

en matière pénale. En effet, riche est la palette des personnes qui


peuvent participer à une action délictueuse. Ainsi, lorsque l'existence

d'une responsabilité pénale est établie, il est nécessaire de s'interroger


sur la forme empruntée par I'activité criminelle.

S'il est des hypothèses ou l'infracüon peut être commise par une
personne isolée (infraction d'imprudence notamment), il en est

beaucoup d'autres ou la plrticipation d'une pluralite de personnes soit

possible.

L'article 132 du code pénal dispose que : « la personne physique


ne peut répondre que des infractions qu'elle commet et des crimes et

délit dont elle se rend complice. Il en découle que le droit criminel

ne reconnaît que deux situations sous lesquelles se présent la


participation à I'action criminelle, à savoir : la coaction et la
complicité.

§-1 lacoaction

La qualité du coauteur qui est assimilée, comme son nom


I'indique, à celle de l'auteur ne pose pas de difficultés. Pas plus qu'il

1s0
Gours de ürolt pénal général

n'y a de difliculté lorsqu'il s'agit de rechercher la peine à appliquer à

ces protagonistes principaux.

I.L'auteur et le coauteur

L'auteur d'une infraction se définit comme la personne qui a eu,


ou tenté d'avoir, un comportement conforme à celui que décrit un
texte d'incrimination. Cette personne a agi, ou s'est abstenue,

conformément aux prévisions de ce texte: avec intention ou par

négligence et imprudencet.

La détermination de I'auteur de l'infraction présente d'importants

intérêts pratiques, C'est dans la personne qui commet les faits


incriminés que sera appréciée l'existence des autres éléments
constitutifs de l'infraction (ainsi, pour l'élément légal, I'existence de
la légitime défense, ou du caractère manifestement illégal du
commandent, pour l'élément moral, la recherche du trouble mental)2.

Le colateur, quant à lui, est tout simplement << I'auteur d'une


infraction qui a commis celle-ci avec d'autres auteurs », il encourt la

peine prevue par la loi à I'encontre de l'auteur isolé, saufdisposition

spéciale de la loi aggravant I'infraction considéree eu égard à la


pluralité d'auteurs (les circonstances aggmvantes du vql par

exemple)3. L'article 128 du code pénal dispos que << sont considérés

I
- Emmanuel DREYER, Droit Énd général, Op.cit., P.631
-Chdstophe PAULIN, Droit penal genéral, Op.cit, P'85
2
j.u-i*it, et Focedure Snate, Dalloz, l3e
'C.l,*Grr. eCt""L*., É.Bouloc, Droit Snal
édition, 1999, P.80.

151
Gours de droit p6nal génétal

cofirme coauteurs, tous ceux qui, personnellement, ont pris part à


l'exécution matérielle de I'infraction ». Cette formule condensée ne
foumit pas l'ensemble des indications nécessaires à l'identification du
coauteur. D'autres textes contenus dans la partie spéciale du même
code fouissent de plus amples précisions sur cette nationl, ce qui
permet de relever les differents cas (modalités) de la coaction.

II.Cas de coaction

A partir de l'articlel28 C.P précité et des dispositions de la partie


spéciale de code pénal, on peut se trouver en présence de la coaction

dans les cas suivants :

-Lorsque la personne a pris part à l'exécution matérielle de


I'infraction. Peu importe que l'accord entre les auteurs principaux soit
expresse ou tacite puisque l'intention tendue vers un même but est

existante chez tous les participants. Peu importe également que I'acte

de participation soit principal ou simplement accessoire2.

-Lorsqu'après un accord entre une ou plusieurs personnes pour


accomplir un acte susceptible de tomber sous une qualification pénale,
il devient difficile de déterminer celui qui a effectivement réalisé
l'actp.La coaction peut également être retenue même si l'une d'entrc
elles n'a pas participé à Ia perpétration matérielle de I'infraction.

I-
Mohieddino AMZAZI, précis de droit criminel, Dar Nachr Al Maarifq l* éditiorl 1994, p.85
2
- L'article l7l du code penal énonce que « dans le cæ où t'un de.ç crimcs préws aux artioles 163,
I 65 , 167 et I 69 a été executé ou simplemort tenté par une bande, les peines édictées à oes artioles
sont appliquées à tous les individus, sans distinction de gmdes, faisant partre de bande et qui ont été
appréhendés sur le lieu de la réunion séditieuse »

tsz
Gours de droit pénal général

-Lorsque certains faits sont considérés par la loi comme une


coaction bien qu'ils ne font pas partie de l'élément matériel de
I'infraction. En effet, en vertu de I'article 304 du code pénal « est
considéré comme coauteur de la rébellion et puni comme tel
quiconque I'a provoquée soit par des discours tenus dans des lieux
publics ou lors de réunion publiques, soit par placards, affiches, tracts
ou écrits ».1

Ceci dit, la responsabilité pénale du coauteur est purement


personnelle et ne dépend en aucune façon de celle des autres
coauteurs, il peut être poursuivi seul, et il doit et condamné dès lors
que le fait qui lui est reproché est punissable à son égard. La peine qui

peut être prononcée conhe lui est tout à fait indépendante de celle qui

peut l'être contre son coauteur, en ce sens que les causes d'atténuation

et d'aggravation de la peine sont propres à chaque coauteur et n'ont


aucun effet sur la peine de I'autre.

Le coauteur étant un auteur « à part enüère »>, il en résulte que sa

situation juridique est différente de celle du complice.

I-
Les articlcs 405 et 406 du code penal disposeu! dans leurs deroiième alinéss rÈspectifs, que « les
che8, auteurs, insrigateurs, plovocateurs de la rixe, rébellion ou réunion seditieuse sontpunis comrne
s'ils avaient personnellernert commis les dites violences»,
153
Cours de droit p6nal général

§2- La complicité

Le droit pénal marocain distingue entre les participants directs à


I'infraction, auteur ou coauteurs s'il y en a plusieurs, et les

participants secondaire ou complices.

Le complice est celui qui, sans avoir participé personnellement


aux éléments constitutifs de I'infraction imputable à un aut'eur

principal, a par son action facilité ou provoqué I'infraction principale'


La complicité est susceptible de prendre quatre forrnes mmenées
traditionnellement deux à deux : I'aide et I'assistance, d'une part,la
provocation et les instructions, d'autre part.

En effet, l'étude de cette forme de participation secondaire


nécessite, d'abord, de se poser la question sur le sort réservé au

complice ; autrement dit, doit-on réserver un traitement particulier au


complice par rapport à l'auteur principal ?

. La réponse à cette question nécessite que soit examinés les

différentes conceptions doctrinales de la complicité puis, par rapport à

elles, les choix effectués par le droit marocain.

154
Gours rle droit pénal général

I.Les différentes conceptions de Ia complicité

Il existe principalement deux systèmes : tantôt la responsabilité

de complice est envisagée en liaison avec celle de l'auteur (système de

criminalité d'emprunt), tantôt au contraire elle l'est de manière


indépendante (système du délit distinct)l.

A-Le système de la crlminallté d'emprunt

Selon la théorie de la criminalité d'emprunt ou système de délit

unique, les actes accomplis par le complice son généralement


dépourvus de criminalité propre et ne prennent un caractère pénal que
par référence à l'infraction commise par I'au1eur.2

Autrement dit, les actes qui sont accomplis dans le cadre de la


complicité « empruntent », par voie de contagion, la criminalité de
I'acte réalisé par I'auteur principal. Sans cet emprunt, les actes
accomplis par le complice ne constituent pas réellement des actes
punissables. Ainsi, la fourniture de moyens, la surveillance du théâhe

des opérations, la conduite d'un véhicule qui amène l'auteur principal

sur le lieu du crime sont des actes qui ne peuvent constituer en eux-
mêmes des infractions autonomes. Tous ces actes ne prennent la
dimension d'infraction que par I'effet que réalise sur eux I'acte
principal.

t 993' p. E7
- Philippesatvaç, &oit pénal général, presses univcrsiuire de grenable, I
1
-lvtwaei Benillouch e, lecons de &oit frnal général, Ellipses,20§9,p.92
155
Gours üe droit pénal général

Par conséquent, le complice tombe sons le, coup des mêmes


qualifications et encourt les mêmes peines que l'auteur, et ce, même

dans l'hypothèse oùr I'acte principalement accompli dépassé les


prévisions de I'auteur. En revanche, si I'acte principal échappé à la
répression, le fait de complicité, n'a pas d'existence propre, puisqu'il

est conditionné à la qualification du fait principal.

Ce système de l'emprunt de criminalite a été critiqué dans la

mesure où il ramène le complice au râng de l'auteur principale en se

débarrassant des psychologies particulières de I'auteur et de son

complice. Sans doute est-ce pour tenir compte de cette critique que ce

système est tempéré par l'emprunt relatif de criminalité qui signifie

que le complice, tout en tombant le coup des mêmes qualifications, ne

devrait encourir qu'une peine atténuée.

B- Le système du délit distinct

La théorie du délit distinct appelée encore théorie de la pluralité


d'infractions, analyse la complicité comme une infraction distincte de
celle accomplie pour I'auteur principal. La responsabilité de chaque
participant esf par conséquent, indépendante de celle des aufres. Le
complice est punissable pour le fait qu'il a accompli dès lors que ce
fait est prévu et puni par la loi penale.

Ce système a pour inconvénient de faire purement et simplement

de la complicité un délit spécial alors que celle-ci se caractérise avec

l'acte principal par I'interêt de but et d'une interdépendance

156
Gours üe droit p6nal général

psychologique de I'auteur et de son complice, Enfin, il a été proposé

de faire de la complicité une cause d'aggravation de la responsabilité.

C- La position du droit positif marocain

Le droit pénal marocain opte pour la théorie de l'emprunt de

criminalité. Cette position ressort clairement des termes de I'article


130 du même code: <« le complice d'un crime ou d'un délit est

punissable de la peine réprimant ce crime ou ce délit»

La combinaison des articles 129 et 130 du code pénal permet de


tirer les conclusions suivantes :

-L'acte de complicité n'est punissable que dans la mesure où


I'acte principal tombe lui-même sous le coup de la loi pénale.

- Les modalités d'expression matérielle des formes de complicité

édictées par l'article 129 du C.P sont à interpréter restrictivement.

Ainsi, seules les formes prévues par cet article peuvent servir de base

aux poursuites. En dehors de ces formes, il n'y a point d'acte de


complicité.

II- Les conditions de Ia complicité punissable

L'existence de la complicité nécessite la réunion de trois


éléments : légal, matériel et moral.

t37
Gours üe droit pénal général

A-L'élémentlégal de la complicité

Le système de la miminalité d'emprunt exige que la participation


du complice soit rattasluble à un fait principal punissable qualifié
crime ou délit.

En effet, l'acte de complicite est conditionné tant pour sa

qualification que pour sa répression à I'acte principal, il est nécessaire

que cet acte principal soit lui-même constitutif d'une infraction


pénale. C'est ce qui ressort de l'article 130 du code pénal: «le
complice d'un crime ou d'un délit est punissable de la peine réprimant

ce crime ou ce délit ».

Cetk subordination juridique de I'acte de complicité à l'acte


principal engendre quatre séries de conséquencesr :

l-On ne peut poursuivre les agissements au titre de la complicité


si I'acte principal générateur ne tombe pas lui-même sous le coup
d'une loi pénale. Ce n'est que l'un des aspects de l'application saine
du principe de la légalité.

2- Le fait de complicité exige une qualification propre du fait


principal. Celui-ci doit être soit un crime, soit un délit. L'article 129
du code pénal le précise dans son sixième alinéa en soulignant que:
« la complicité n'estjamais punissable en matière de contravention >»

'-Abdelilah bouchaib, cours de droit pénal général, librairie el maarifal Jadida, année universitaire
1997-1998,p.217
, 158
Gours dc drolt pénal gér6ral

3-L'empreint de criminalité produit naturellement l'emprunt de


qualification. Le fait principal produit un effet de même nature sur le
fait de complicité (complicité de meurtre ou d'assassinat, complicité
de vol, complicité d'abus de confiance...).

4-Le complice est théoriquement passible d'une peine de même


nature et même taux, dans les limites du maximum et du minimum
légal, que celle encourue par I'auteur principal : le complice d'un
homicide volontaire est passible de la réclusion criminelle à
perpétuité, la même que celle encourue par l'auteur de l'homicide.
Cette identité de traitement formulée par I'article 130 du Cod pénâl
sus-indiqué ne doit pas être comprise selon une lecture exégétique du

texte, s'agissant de la sanction à infliger à I'auteur et au complice.


L'emprunt de pénalité articulé sur l'emprunt de criminalite ne signifie
pas une identité stricte dans la quantité de la peine à appliquer à I'un et

à I'auhe. Ce n'est pas donc une identité de fait. Elle signifie seulement

une identité de droit. En d'autres termes, la peine applicable à l'acte

de complicité est précisément celle que la loi attache à la commission


du fait principal avec un régime de fonctionnement particulier des

causes d'aggravatiorg d'atténuation ou de suspension de la peine.

B.L'élément matériel de la complicité

Ce n'est pas n'importe quelle sorte d'aide apportée à l'infraction

principale qui permet de poursuiwe quelqu'un comme complice' Il


faut que cette aide ait revêtu I'une des formes limitativement

159
Gours de droit pénal général

énumérés par la loi. L'article L29 du code pénal dispose que : sont
considérés comme complices d'une infraction qualifiée crime ou délit,
ceux qü, sans participation directe à cette infraction, ont :

1- Par dons, promesses, menaces, abus d'autorité ou de pouvoir,

machination ou artifices coupables, provoqué à cette action ou donné


des instructions pour la commettre ;

2- Procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui


aura servi à I'action sachant qu'ils devaient y servir;

3-Avec connaissance, aidé ou assisté l'auteur ou les auteurs de

l'action, dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée ;

4-En connaissance de leur conduit criminelle, habituellement


foumi logement lieu de retraite ou de réunions à un ou plusieurs
malfaiteurs exerçant des brigandages ou des violences contre la sûreté
de I'Etat, la paix publique, les personnes ou les propriétés.

De cet article, on peut relever quatre formes constitutives de


complicité:

-L'instigationr,

-L'a fourniture de moyens,

-L'aide ou l'assistance,

I -L'instigaleur
est celui qui sans participer physiquement à I'infraction a suggéré à l'auteur principal
l'idée de I'action principale. Il en est le«cerveau». Il est appelé aussi «l'autcur moralde
l'infraction,,
,.aO
Gours rlc droit pénal gfuéral

-Fourniture de logement de retraita.

C-L'élément moral de la compllclté

Il suffrt pour caractériser cet élément que soit établie la


connaissance chez le complice du p§et délictueux et l'intention de
s'y associer, de le provoquer ou d'en favoriser la réalisation. Ainsi,
l'élément moral vient en quelque sorte confirmer I'adhésion morale du
complice à I'action entreprise matériellement par I'auûeur principal.

L'article 123 du code pénal à propos des cas énumérés de


complicité souligne cette dimension psychologique de participation
1
chez le complice : il
que par dons, promesses... que le
faut
complice « provoque »> I'action (àrt.l2g-l), ou que le complice
procure des armes, des instruments... « Sachant qu'il devait y servir »
(art.l29-2), ou que le complice avec « connaissance » a aidé, assisté
l'auteur (art129-3).

En revanche, il n'est pas nécessaire que le complice ait une


connaissance de l'ensemble des circonstances réelles de l'infraction
projetée ni de sa nature exacte, dès lors que ne lui échappait pas le
caractère délictueux de I'acte2.

l-L'article l3l du Cod pénal ne fait que renvoyer à oette dimension morale à propos de la
participæion du complicc iorsqu'il stipule que celui qui détermine une persoilrê non punissableen
raison'd'une conditiÀn ou d'une qualité personnelle à commettre une inliaction est punissable des
peins répdmant I'infraction commise par cette personne. Ici, le complice endosse la rnstéridité de
principal.
I'acte accompli par I'auleur
e
i
,-
ft4ofrijaii. ÀrnfZeZl précis de &oit criminel, Dar Nachr Al Maarifa, I édition, 1994, P.88

161
Gours de droit pénal g6néral

Ghaplüe 3 : L'élémert moral de l'infiac{ion

Dans les sociétés primitives, l'application de la sanction se faisait

d'une façon strictement objective sans prendre en considération l'état


d'esprit de son auteur. Aujourd'hui, le droit pénal est devenu
sanctionnateur et réadapteur. Il ne conçoit l'application de la sanction
que dans la mesure où elle est susceptible de s'appliquer à un être doté

d'une liberté et animé par une volonté. L'association de cette liberté et


de cette volonté forrne ce qui est d'usage d'appeler « l'élément
psychologique » ou (( l'élément moral » de la responsabilité pénale et

d'une façon extensive de l'infractionr.

En effet, on ne peut parler d'inûaction qu'à partir du moment où


le comportement dans sa dimension matérielle mais aussi dans sa
dimension psychologique2, correspond entièrement aux prévisions du
texte servant de base à la poursuite. Ainsi, le tribunal répressif doit
chercher si les faits reprochés ont é1é accomplis avec l'état d'esprit
que requiert un texte d'incrimination

I
-L'expression suivante « élérneni moral de I'infraction » semble mauvaise car elle donne
I'impression que cet «élément» fait partie de I'infraction, de sa constitution rnême, alors qu'il
appaiient à la personne du délinquant. Ce prétendu « élément moral » est donc une composante de la
responsabilité du délinquant, non une composante de I'inftactio[ Pourtânt, dans le langage courant,
notarunent en droit pénal special, on parle de « l'élément moral de l'infraotion » ou de « l'élément
psychologique de I'infraction ». On peut certes admettre cette formulation, par commodité, mais elle
necoræspondpasàladéfinition objectivedel'infraction. VoirJeanPRADEL,Droitpénalgénéral,
.Cujas, Tom I, E* édition 1992,P.433
'- Le doyen Decocq a préci# qu'« il semble, conformément lux vues de la tendance subjeclive
contemporaine, quel'élémentmoral«soitl'esencedel'acteinfractionnel, etquel'élément matériel
en soit la simple manifestation extérieure », Voir G.Levasseur, A.Chavonne, J.Monteuil, B.Bouloc,
Droit pénal et procedure pénale, Dalloz, l3e édition, 1999, P.64.

162
Gours rle droit pénal g6n6ral

En d'autres termes, l'agent doit avoir été engagé par une liberté
d'action et de décision. Il doit donc avoir la faculté de comprendre et

de vouloir ce qu'il faisait. C'est cette double faculté qui permet de

fixer I'imputabilité appelée également « la volonté infractionnelle ».

Le comportement de I'agent doit donc mettre en relief une conduite


intellectuellement blâmable, c'est à dire la recherche d'un
comportement fautif. La faute apparalt comme le centre de la

responsabilité pénale (pas d'infraction sans faute).

L'élément moral n'est pas le même pour toutes les infractions. Il


varie selon le ÿpe de ces dernières et permet de les classer en
fonction du rapport existant entre la volonté de l'agent et la
commission des faits, on parle donc des degres de l'élément moral
(sectionl). Toutefois, certains événements sont de nature à faire
disparaltre cet élément, on parle à ce niveaux des causes de non

imputabilité (section 2).

163
Cours rle droit péml g6néral

§ætlcn I r lcr ùgrlr dr l'Slflrrü noral


En principe l'élément moral requis pour engager la responsabilité

d'une personne en matière de oimes et de délits est le << dol général »

ou « la faute intentionnelle » (§1). En matière de contravention, la


faute contraventionnelle (ou faute pénale) est requise. (§2).

§l-La faute intentionnelle

L'intention est la volonté dirigée vers un but' L'infraction est

donc inlentionnelle lorsque le législateur exige, pour qu'elle soit


constituée, qu'elle soit accomplie avec I'intention de la commettre. Il
faudra donc que I'auteur ait eu la volonté de fransgresser la loi
édictant I'infractionl. Cptte volonté est appelée «dol général» à

distinguer du « sol spécial » caracterisé par la recherche d'un résultat

déterminé.

A- Le dol général

L'intention du dol général consacrée par la doctrine comporte


deux propositions : d'abord « la volonté de l'agent de commettre le
rlélit tel qu'il est déterminé par la loi »r, ensuite << la conscience clrcz

le coupable d'enfreindre les prohibitions légales »2. Or, la première de

ces propositions aboutit à confondre le dol général de la volonté de

réaliser l'élément matériel de l'infraction; la seconde, à confondre dol

t
:
t'nat général, Lexis Nexis, 4tu édition, 2005, P.52
-Christophe PAuLlN, droit
-Andrien-Charles DANA, Essai sur la notion d'infraclion pénale, LGDJ, 1 982, P.455
164
Gours de droit p6nal géléral

général et légalité pénale. Une troisième confusion peut également


avoir lieu avec le mobile.

a- Le dol général et la structure matérielle de l'infraction

Dire que le dol général est la « volonté de l'agent de commethe le


délit tel qulil est déterminé par la loi » est traduit par les auteurs
comme était « Ia volonté de réaliser l'élément matériel » I . lls
vérifient, ainsi, s'il y a une concordance entre les faits tels que I'agent
les a accomplis et ceux décrits par la loi penale d'incrimination. C'est

ce rapport de concordance qui doit être mis en valeur entre le ÿpe


légal et sa description matérielle et l'activité concrète du délinquant.

Exemples

- A propos du vol, savoir seulement si on est en présence d'une


personne qui s'approprie une chose qui ne lui appartient pas et sur
laquelle il n'a reçu aucun consentement.

-La non-assistance à une personne en danger consistera seulement


à connaître qu'une personne est en danger et connaissant ce danger on

a rien fait pour le sauver.

Dans ces exemples, I'agent a une représentation matérielle dans


l'accomplissement du délit et à cetüe représentation il donne corps en

r-D'anciens
auteurs définissâient le dol géûéral, synonyme d'inlention, comme la conscience de mâl
faire et la volonté d'agir. Comme même une ælle définition confondait imputabilité et intention. ; elle
n'est plus acceptable aujourd'hui. En effel s'assurer de la volonté de l'agent (du moins de sa capacité
de vouloir) est désormais un préalable à I'examen de sa responsabilité pénale. Voir Emmanuel
DREYER" Droit pénal général, Lexis Nexis 2* édition, 2005, P.566.
165
Cours de droit pénal géuéral

allant précisément contre la loi. L'agent est coupable précisément


parce qu'il a voulu accomplir ce que la loi interdit. C'est ce qui ressort
de certaines expressions employées par la loi telles que

« sciemment », « volontairement », « de mauvaise foi », (( avec

connaissance r»1...

Mais le dol général qui est l'intention de violer la loi pénale peut,
par le jeu de l'erreur de fait, disparaître car l'intention fait ici défaut.

C'est le cas où I'agent tout en accomplissant un acte que la loi


objectivement prohibe n'a pas conscience ou ne se rend pas compte
qu'il est en train de commettre une infraction.

Exemple: la personne qui confond à la sortie d'une


représentation son manteau avec celui d'un auhe spectateur.

Toutefois, la structure du dol général doit également être


regardée par rapport à la dimension légale de I'infraction.

b- Le dol général et la structure légale de l'infraction

L'article 2 du code pénal pose une règle d'ordre général : « nul


ne peut invoquer pour son excuse l'ignorance de la loi pénale ». Ce
faisant, le droit pénal semble fermer toute porte à la discussion sur une

éventuelle prise en considération de l'erreur de droit, car toute


ignorance par le prévenu de l'existence ou du contenu réel d'une

'- Abdelilah BOIJLAICH, Cours de droit Énal général, Librairie Al Maarif Al Jamiiya-Fès', Amée
universitaire 1997 - lÿ 8, P .225

166
Gours tlc rkoit pénal géléral æ
incrimination serait incompatible avec la définition reconnue du dol
général.

En effet, la connaissancs de la qualification légal constitue un


élément de l'intention, puisque celle-ci consiste dans la volonlé de

commettre l'infraction « telle qu'elle est définie par la loi », c'est à


dire « la conscience chez le délinquant d'enfreindre les dispositions
légales ».

Les règles édictees par I'article 2 précité du code pénal posent


une présomption ou une obligation de connaissance de la loi. Cette
présomption est irréfragable ; c'est à dire que la personne poursuivie

n'est pas en mesure de démontrer la pr€uve conhaire. L'erreur de droit

est difficile à prouver.

Le dol général est, ainsi, « le dénominateur commun des

infractions intentionnelles ». Il s'agit de I'aspect objectif de l'élément

moral de I'infraction; c'est pourquoi il se distingue et est totâ.lement

éloigné du mobile qui constitue la raison personnelle de I'action.

C- Le dol général et le moblle

L'intention qui n'est autre que la volonté consciente d'accomplir


un acte illicite est toujours la même pour une incriminalion donnée.
Ainsi, tous les meurtriers ont eu, par définitiorL le dessein de tuer
autrui: pour autant de meurhes, une seule intention. Le mobile, c'est
à dire I'intérêt ou le sentiment qui a déterminé l'action, ou encort

L67
Cours de üroit p6nal géléral

«la cause impüsive et déterminante de l'acte criminel » est, par


contre, essentiellement variable avec les individus et les
circonstances'. Les mobiles sont aussi nombreux que divers même
pour une incrimination donnée. Tel aura commis son meurtre par
cupidité, tel par vengeance, tel par pitié, tel par amour paroxystique,

tel par dépit, tel par colère, etc... : pour autant de meurtres, beaucoup
de mobiles distincts.

En principe, au regard du droit seul compte l'intention2. Les

motivations profondes qui peuvent expliquer la violation de la loi


pénale sont insusceptibles de produire un résultat dans la technique
pure d'incrimination et particulièrement au regard du couple :

infraction /responsabilité. En effet, le mobile n'est pas un élément


constitutif de I'infraction. C'est ainsi qu'une infraction commise dans
un but licite n'en reste pas moins une infraction3. Tel est le cas du
meurtre accompli dans un but généreux ; de I'escroquerie commise en

vue d'alimenter la trésorerie d'une æuwe de bienfaisance, du vol

ayant pour objet de récupérer un bien iqjustement acquis par un tiers

ou la violation du domicile effectuée par le bénéficiaire d'une


décision d'expulsion.

t-
Berrard BOULOC, Droit Énal général, Dalloz, 24tu éditioq 2015, P.246
2
- Jean- Claude SOYER, Droit Énal et Procédure penale, LGDJ, l8* éditiotL 2004, P'99
3
-Dans la conception posithiste, l'lntention criminelle se confond avec h motlfou tout au moins est
conditlonnée par lui. D'après la conceptlon classique eu contraite, qui ne volt dans l'intentlon
criminelle qu'une volonté àbstraite, l'intention et le mobile sont nettement distincts. Voir Bernand
BOUtOC, Op. cit., P. 246. Toutefois,, les auteurs néoclasslques et les tenants de lécole de défense
sociale nouvelle s'accordent pour « intégrer les mobiles dans le dol criminel » (R'Merle et A.Vitu)'
Voir Jean PRADEL, Op.cit., P'435

168
Gours dc drolt pénal gén6ral

Dans tous ces cas, le mobile explique psychologiquement


I'infraction, mais ne la fait pas disparaîhe. D'ailleurs pour certains
auteurs; consid&er le mobile comme élément constitutif de

I'infraction c'est mener les individus à se faire justice à eux-mêmesl.

Ainsi, à I'instar des auhes systèmes répressifs2, te droit pénal


marocain ne prend pas en considération la notion de mobile pour
apprecier la culpabiiité de I'auteur de I'infraction3.

Parallèlement à cette position de principe, le droit pénal marocain

connalt néanmoins quelques exceptions. La lecture de certains textes


invitant le juge à attribuer un rôle non négligeable au mobile (atteintes
à la sûreté de I'Etaq article 181 -al. I et 2- relatif à la trahison en

temps de paix et de guerre ne réprime cette infraction que si les

intelligences avec les autorités éhangères ont été effectuées en vue de

leur donner une position de force)4.

Il découle de ces idées avancées que I'intention et le mobile sont

deux notions différentes. Toutefois, tenir compte de I'intention


spécifique de I'auteur peut résulter de I'exigence d'un dol spécial ou
d'un dol aggravé.

r -rbtd.
P.436
l -ll s'eglt par exemple de l'artlcle 63 du code pénal suisse et dc l'anlcle 133 al. 2 du code pénal
Italien âinsl que le code pénal françals
t -Cela
ne slgnille pas qu'au nlveau de la pratlque Judiclalre, les trlbunaux restent insensibles à la
prlse en consldératlon de l'lmpact du moblle dans la recherche de le culpablllté.
a
Jl en est de même des ffticles ZOI et 206 du code pénal. La docûine enseigne que les textes qui
incriminent un but particulier (attcinte à I'ordre public par la æneur) dérogent à la règle selon laquelle
le mobile est indiffèrent. Voir Michèle-Laure RASSAT, Droit pénat général, Ellipses, 2004, P.333

169
Gours de üroit pénal général

B- Le dol spécial

Outre l?existence d'un dol général, le législateur exige aussi


parfois que le délinquaflt ait recherché tur résultat déterminé, c'est-à-
dire que soit également caractérisé un dol spécial.

Pour être coupable de meurtre, il ne suffit pas d'avoir voulu faire

mal à la üctime et que celle-ci soit effectivement morte; il faut, dès


l'origine, avoir eu l'intention de la tuer. Ce dol spécial, élément

constitr,rtif particulier de ,l'infraction, devra être distinctement établi

par le ministère public pour que la qualification de meurtre puisse être

retenue. A défaut de cette preuve, la personne poursuivie pourra faire

éventuellement I'objet dnunc condamnation sous une autre

qualihcation (dans l'exemple retenu, coups et blessures volontaires


ayant entrainé la mort sans intention de la donner).

Si à propos du dol général, il a été mentionné que l'eneur de fait a

un effet d'exonération, au regard du dol spécial, ce type d'erreur n'a


aucun efflet. Certes, une ereur de fait qui supprime le dol général
supprime du même coup le dol spécial. En effet, celui par exemple
qui utilisé par imprudence le véhicule appartenant à un tiers de
même couleur, de même marque n'a aucunement I'intention de se

comporter en voleur. Il n'a aucune conscience qu'il est entrain de


violer la loi.

Mais si le dol général existe, une ereur sur les éléments


constitutifs du dol spécial n'a aucune incidence sur la réalité de la

L70
Cours rle droit pénal général

responsabilité de l'agent. Par exemple, l'agent tout en croyant tuer


une personne déterminée, il tire sur une autre.

Reste à signaler que le dol est par ailleurs susceptible de degrés,

dont la considération peut influer sur la qualification et la répression.


A cet égard, l'objet et l'intensité peuvent servir de critères pour
distinguer entre les différents ÿpes de dol.

a-Distinction selon I'obiet recherché

Selon ce critère, il est classique de distinguer entre les dols


simple, aggravé et atténué.

Dans le dol simple, le délinquant peut vouloir rechercher


immédiatement le résultat pénal. Il peut par exemple vouloir tuer,
voler, violer ... et par conséquent il sera passible d'une peine
ordinaire. On oppose le dol simple qui est caractérisé par une

détermination spontanée au dol aggravé ou prémédité.

C'est la préméditation qui aggrave le dol simple. L'intention de


I'auteur révèle non seulement le désir du résultat mais pour y parvenir
I'auteur surcharge le résultat par une épaisseur psychologique

supplémentaire'. En matière d'homicide volontaire, par exemple, la


circonstance tirée de la préméditation aggrave l'homicide et nous

serions en face d'un assassinat passible de la peine de mort.

l-Pour certains auteurs, le dol aggravé pcü êtrc défini comme unÊ intention allmt audelÈ du résultat
recherohé. Si ryant son procès, un accusé tue un ÎémoirL it est possible de dire que la volonté de
l'aüeu. n'était pas uniquement le meurtre, mais aussi le fait d'empêcher le témoin de se pré§enter à
l'audience. Le criminel sera donC poursUivi non pas pour meuttre simPle, mais pour meurtre aggravé.
Voir Benoit CHABERT, Pierrc- Oliüer SUR, Dmit pénal goréral, Dalloz, 2* éditioD, 1997, P 50

L7t
Gours de droit péral général

1l ya des cas o{ le délinquant bénéficie d'une excuse de

provocation lorsque la condüte est déterminée en partie par

I'excitation causée par un tiersl. On parle du dol atténué qui s'oppose


au dol simple caractérisé par une détermination libre.

b-Distinction selon l'intensité du résultat recherché

Si on envisage l'intensité du résultat recherché, on peut distinguer

entre le dol indéterminé, le dol pmeter intentionnel et celui éventuel'

On parle du dol indéterminé lorsque l'agent tout en recherchant


un résultat pénal ne peut à la l'avance réaliser I'exactitude et

l'intensité de ce résultat. Il peut s'agir par exemple du fait de porter

volontairement des coups tout en ne sachant pas exactement leurs


conséquences dans la mesure où celles-ci dépendent non seulement

des coups portés, mais aussi de la résistance physique de la victime.

Dans cette hypothèse, le législateur considère que cette personne doit


être punie en fonction du résultat finalement obtenu (articles de 400

du Cod pénal).

Dans le dol praeter inlentionnel2 dit encore dol dépassé, le


résultat obtenu dépasse (d'où le terme dol dépassé) I'intention de
I'auteur des faits : il est plus grave que celui prévu ou prévisible par le
délinquant. Par exemple, le prévenu qui a donné des coups à une
femme dont il ignorait qu'elle firt enceinte et provoque son

|
-Voir
les articles 416 é1413 ducode pénal.
2
-Pour certains pnalistes, il s'agit du « délit » et non du « dol » praeter- intentionnel.
l Voir Jacqrcs-
Henri ROBERT, Droit Énal général, Presses universitaires de Francæ,2* éditioq 1992, P. 351
t72
Gours üe droit p6nal g6réral

avortement; ou bien encore, la destruction d'une ligne téléphonique


empêche un malade d'appeler son médecin et il en meurtl.

Toutefois, lorsque I'agent sans vouloir en aucune façon le résultat


dommageable qui s'est produit ou même aucun résultat, l'a
simplement préw comme possible, on parle alots de dol éventuel.
C'est le cas du directeur d'une compagnie de transport aérien qui fait
partir un avion qu'il sait ne pas être en parfait état de navigabilité' Si
des passagers sont tués au cours de ce fansport, peut-on dire qu'il soit
coupable d'un homicide volontaire? C'est également le cas de
l'automobiliste imprudent qui double d'autres voitures au sommet
d'une cote et provoque la mort d'un automobiliste venant en sens
inverse. Certes, le premier automobiliste commet une imprudence,
mais une imprudence d'une telle gravite qu'elle révèle une faute
intentionnelle assimilée au dol éventuel. La doctrine dominante veut
que le dol éventuel ne puisse être assimilé à un dol général ou spécial.

En droit pénal marocain, pour ce type de faute c'est seulement une


faute d'imprudence qui lui sera imputée2.

C'est là une porte grande ouverte pour aborder la faute non


intentionnelle.

I Selon la rerommandation 4b du XII e eongrès intemational de droit pénal d'tlambourg en 1979


« personne ne devmit étrc puni à raison des conséquences nort int€ntionn€lles de son acto, frt-il une
infioction que daûs la mesure oû il les aura pévus ou aura pu les prévoir »'
, - i;rrti"f. +fZ du code pénal dispose qui: « quiconqu§, p8r mala&esse, imprudence, inattention,
négligence ou inobservotion des êglements, commet involontairement un homicide ou en est

iniolintairement la câuse est puni dei'ernprisonnemont de trois mois à cinq âns et d'une amende de
250 à 1000 dirhams »
L7l
Gours ûe droit pénal géréral

§2- La faute non intentionnelle

Dans I'hypothèse de la faute non intentionnelle, I'agent a


consciemment un comportement anormal par rapport à celü qu'il
devrait avoir dans I'activité à laquelle il se livre, mais il ne recherche,

ce faisant, aucun résultat dommageable. Il a voulu son acte mais il n'a


pas voulu les conséquences dommageables qui vont en résulter.

La faute dite non intentionnelle est définie avec le muimum de

précision, dans les aspects divers qu'elle est susceptible de revêtir,


dans le cadre de I'homicide dit involontaire (article 432 du code
pénal). Ce texte incrimine, en effet, le fait de causer la mort d'une
personne par « maladresse, imprudence, inattention, négligence ou

inobservation des règlements »r. Malgré la diversité de la terminologie

utilisée, ce qui est incriminé dans l'infraction de ce type, c'est


essentiellement I'imprudence ou la négligence (à laquelle

s'apparentent l'inattention, la maladresse, le défaut de précautions ou

d'entretien, et même I'inobservation des règlements). Autrement dit


I'imprévoyance2.on ne l'a donc pas « fait exprès »3. La faute non
intentionnelle est donc ramenée « à ne pas prévoir les conséquences
dommageables de I'acte que l'on accomplit ou à ne pas croire qu'elles

pourraient se produire ou à ne pas prendre les précautions nécessaires


l - Ces dispositions sont également prewes par I'article 433 du code pénal concernûrt les coups et
blessures ou maladies entraiment une capacité de travail petsonnel de plus de sixjours.
2
- R. MERI,E et A- VIfu, « Traité de droit crimioel », CUJAS, -?@ éditior T.I, 1978, P. 693
'- GARCON qui defend avec rigueur le contelru psychologique de le faut€ noo-intentionnelle, admet
parfaitement que la maladresse, la négligence, l'inatæntion et même I'inobservation des règlements
mnstituent dans la plupart des cæ uhe imprudence. Voir Adrien- Charles DÀNA, Ëssai sur la noüon
de I'infraction pénale, L.O.D.J , 1982, P.3 l0

774
Cour de r[roit pénal gén6ral

pour les empêcher de survenir ». L'essentiel est que cette faute


constitue une « défaillance par rapport à une norme de conduiter».
Cette appréciation objective, qui permet de déduire la faute du résultat

dommageable sauf à I'intéressé à prouver qu'il n'a en rien failli, ne

signifie pas pour autant que cette faute est dénuée de la moindre
coloration psychologique (exemple de l'automobiliste qui prend un
grand risque au volant); ce qui nous mène à distinguer la faute

consciente de la faute inconsciente.

A-La faute consciente

Pour certains auteurs, il n'y a pas de différence entre infraction

volontaire et infraction involontaire2 tânt que I'agent pouvait prévoir


les conséquences de son action et si il ne I'a pas fait c'est parce que
qu'il a voulu ; on se rapprocherait du délit volontaire. La gravité de la
conduite est fonction de son résultat, le lêgislateur établissant un
rapport obligé entre l'étendue de celui-ci et I'importance de la faute
d'imprudence. La négation de la norrne estià inscrire au passif d'un
être imputable doué de raison et de volonté, qui a agi en pleine
possession de ses facultés et dont le comportement a été taxé par un

auteur de «sub-socialité»3.

p.32q
'-Iuid,
2
- Les expressions « infractions intentionnetles », « infractions non intentionnelles » sont des ellipses
commodes dont on doit éüter qu'elles ne soient trompeuses. L:automobiliste çi va plus vite qu'il
n'cst pss permis commet une « infraction non intentionnelle » mêmc quand c'est déliberément et potu
sc donner du plaisir qu'il se comporte ainsi. Voir Jacques-Hend ROBERT, Dtoit Énal général,
Montchrestien, 2* édition" I 988, P.342
- wilfrid JEÀNDIDIER, Droil général, Montchrestien, 2* édition, 1991, P.366.
3

L75
Gours de droit p6nal g6n6ral

Exemples:

- le conducteur qui brule le feu rouge,

- Le chercheur.qui ouwe le feu sans prendre la moindre


précaution.

Toutes ces personnes agissent sciemment même s'elles n'ont pas

voulu le résultat, l'essentiel c'est qu'elles ont conscience du danger


qu'elles prennent et du risque qu'elles font courir aux autres. En effet,
si l'acte générateur est volontaire et délibéré (excès de vitesse) on ne
peut pas réellement avancer à propos du résultat que celui-ci ne soit
pas vraiment involontaire. La gravité de la faute est telle qu'elle se

rapproche plus du dol qué d'une conduite vraiment non intentionnelle:

Il y a dol éventuel et la question est de savoir si de ce dol doit dégager


une répression spéciale.l

En droit marocain, lorsque l'ordre public n'est pas menacé, c'est


la tendance vers une atténuation de la peine (décès ou coups et
blessures consécutifs à tur accident de la circulation- articles 432 et

433ducode pénal)

B-La faute inconsciente

A la difiérence de la faute consciente, la faute inconsciente serait


totalement involontaire dans son processus comme dans son résultat,
l'agent n'a voulu ni le résultat ni même I'acte qui l'a immédiatement
t
- Abdelilah BOULAICH, Cours de droir Én l général, Librairie Al Maarif Al Jamiiya-f'ès-, An és
universiteire 1997 -1998, P.237.

t76
Cours de drott p6nal général

engendré,il a suivi une ligne de conduite qui le portait en filigrane.


Cet écart du droit chemin est pour certains auteurs une faute
normative: I'intéressé a eu un comportement aufe que celui d'un
homme avisé et pruden! s'est éloigné de la norme de ce modèle!.

Exemples:

- le chasseur qui nettoie son fusil et blesse un tiers,

-L'automobiliste qui confond la pédale de l'accélérateur avec


celle du frein.

Dans tous ces cas le résultat est imputable à une erreur de fait.
Mais, si I'erreur démontre une négligence, elle ne peut effacer la
responsabilité de son auteur. Dans I'imprevoyance dite inconsciente,

on reproche au délinquant de ne pas avoir eu I'attention que la


situaüon exigeait. Ce défaut de précautions, cÆtte légèreté dans le
comportement traduisent une psychologie d'où la volonté est loin
d'être absente. La volonté de I'imprudent << inconscient >» n'est
nullement annihilée et il n'agit pas comme un somnambule.
L'expérience montre que c'est I'imprudence qui est la cause de

certains drames. Seule donc la force majeure ou I'erreur commune


seraient de nature à faire obstacle à la responsabilité. Cette idée laisse

la porte grande ouverte pour traiter les causes de non imputabilité


autrement dit les cas où l'élément psychologique disparaît.

'- wilfrid JEANDIDIER" Droit pénal général, op.cit., P.366'

L77
tours rle droit pénal géléral

Srcllon 2 : l.l dhporlllon dc l'ôllnrnl rerul r llr


clcto! dr mr-laputrbllffi

La personne qui a commis un acte dans des conditions telles que


l'élément moral défini par la loi paraît s'être manifesté en est
responsable. Il y a cependant des hypothèses dans lesquelles la

responsabilité pénale est écartée.

Contrairement aux faits justificatifs qui suppriment l'infraction


(elle perd objectivement son caractère délictueux), les causes de non
imputabilité(ou ce que la doctrine classique appelle lcs causes

subjectives de non responsabilité) agissent « in personam »» et ne

s'étendent pas aux participants à l'activité délictuelle. Tout en étant

criminel, I'acte n'est pas subjectivement imputable à son auteur. Au


regard donc de l'élément subjecüf l'acte est dépouillé de sa coloration

pénale.

Ainsi, au moment de la violation de la loi pénale, il faut vérifier si


I'agent jouissait d'une liberté et d'une volonté capable de lui faire

comprendre le sens et la portée et de son acte. C'est la question

fondamentale en droit pénal de l'imputabilité,laquelle parachève avec

la culpabilité le régime juridique de la responsabilité. L'article 132 du


code pénal dispose que: « toute personne saine d'esprit et capable de

discernement est personnellement responsable ». L'imputabilité est

donc la condition plus générale de comprendre et de vouloir ou encore

une « capacité de comprendre et de vouloir ». C'est encore la faculté

178
Gous te rlrolt p6lal général æ
du libre-arbitre qui constitue la clé de votte du droit pénal

classique: « Nullum crimen sine libertas ».

Les causes de non imputabilité se rapportent soit à la capacitL


pénalel soit à I'exercice par I'agent de ses facultés. Dans [a première

catégorie, sont traditionnellement englobées, les questions relatives à

la minorité et celles qui concement l'altération mentale. Dâns la


seconde catégorie entre la contrainte (déjà étudiée dans le cadre de

l'éat de nécessité) et les eneurs (également traité dans le cadre du dol

spécial). On va donc se limiler à l'étude de la première catégorie.

§1- L'altéraüon mentâle

La répression pénale classique ne peut s'exercer qu'à propos d'un

coupable conscient de ses actes, auhement dit une personne ayant la

capacité de diriger son intelligence et traduhe cette volonté éclairée

dans I'exécution des actes ainsi librement choisis. Ce n'est


évidemment pæ le cas si l'auteur de I'infraction est un malade mental.

En effet, la démence (ou le aouble des facultés mentales) détruit la


qualité d'être juridiquement responsable(A). Celle-ci a pour effet

radical la suppression de I'imputabilité subjective du délinquaflt tandis


que I'affaiblissement des facultés mentales entralne une atténuation de

-'- frqns la pousrée dê la ctiminologre montanL et mili6irE, d€6 âuteùs ont donlÉ ur conlmu
nouveau à l'impùtabilité. Med€ .t VllU ont svânoé l. rr& séduisant clncrpt de « cÂpâoilé Énâle »,
noiion « criminolo8iqu. qui résid. dans I'aptitudc d'ü délinqùrnt À binéficiêr dc lâ sÙlction sPrès
son jugpm*rt" cette aptitudc peut d'aillêurs §r colnbiner avêô 14 volonté libre et l'inlelllgence hrid€'
voii Jean PRADEL, Droit pénal g&énl, Cuj$, lom I.8* éditioq 1992' P.49

179
Gours r[e droit pénal gélérd

la responsabilité pénale(B), mais dans les deux cas, le fait généraæur


infractionnel demeure.

A-Le trouble des facultés mentales

L'article 13a(a1.1) du code pénal dispose que: << n'est pas

responsable et droit être absous celui qui, ou moment des faits qui lui
sont imputés, se trouvait par suite de foubles de ses facultés mentales

dans l'impossibilité de comprendre et de vouloir »

Le contenu de ces dispositions est très large et vise des

hypothèses très variées. En effet, le terme de « houble des facultés


mentales » désigne en droit pénal toutes les formes de I'aliénation
mentales qui enlèvent à I'individu le contrôle de ses actes au moment

même où il les a commis. Il s'applique aux affections de


I'intelligence, aussi bien congénitales (crétin, idiot, imbécile)
qu'acquises par I'effet d'une maladie (paralysie générale, démence
précoce).

Il vise non seulement la folie gén&ale, mais aussi la folie


spécialisée ou localisée, comme la folie de la persécution qui consiste

à se croire persécution qui consiste à se croire persécuté par telle ou

telle personne et qui peut pousser au meurtre de celle-ci.l

En effet, la rédaction de l'article 134 du code pénal sur-visé


ressemble à celle de l'article 122-1 du code pénal français de 1992
regroupan! lui aussi, des états intermédiaires qui, sans recouper [a
I- 24e édition, 2015, P.369.
Bemard BOULOC, Droit pénal général, Dalloz,

180
Courr rle drolt pénal g6néral

démence médicalement entendue, ont également un effet


d'irresponsabilité. Aux termes de cet article << n'est pas pénalement
responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un

trouble psychique ou neuro-psychique ayant aboli son discernement


ou le contrôle de ses actes r». Cet article, tout en tenant des

connaissances actuelles de la science, ne prend plus en considération

la démence.l

Comme c'était le cas pour I'article 64 de l'ancien code français


qui indiquant « qu'il n'y avait ni crime ni délit si I'auteur était en état
2
de démence au moment des faits » , I'article 122-1 prend en
considération le trouble psychique ou neuro-psychique, Dans le même

sens l'article 134 du code pénal marocain vise le trouble mental qui

fait disparaltre la responsabilité pénale de la personne qui en était


atteinte lorsqu'il répond à certaines conditions.

a.Les conditions du trouble mental

A la lecture de l'article 134 du code pénal, deux conditions


composent l'économie de validité juridique à l'admission du trouble

mental cornme cause d'irresponsabilité: d'une part l'actualité du


frouble et d'autre part son exclusivité.

r-
Cette Édaction de I'anoien code $nal français comportait des lacunes: la notion de démence
n'était pas précisée, la oontravention semblait excluo de son applicdion et le texte disait que
l'infraction n'existait pas, ce qui était en conbrdiction avec les poursuites du complice, Voir Benoit
CIIABERT, Pierre- oiivier SU& Droitpénal général, Daltoz,2e éditioru 1997, P.79.
2. Le vocable de démence a un sens médical précis, celui d'une déchéance progrtssive et irréversible
de la vie psychiqtæ. Vot Jean hadel, Droit Snal général, CUJÀS, 8ème édttion, T' 1,1992,P.465.

181
Gours rle droit pénal g6néral

1.L'actualité du trouble mental

La première condition est relative au moment où le trouble


mental doit existerl. La loi prend en considération le moment de la
commission de l'infraction. Cet état mental doit exister au « temps de
l'action >r. L'expression a un sens temporel de sorte que le lrouble des
facultés mentales doit être contemporain de I'action pour entralner
I'irresponsabilité, Par conséquent on ne devrait pas tenir compte de
celle qui lü est antérieuie ou postérieure2. Le trouble des facultés
menüales est une question de fait laissée à l'appréciation souveraine
desjuges du fond.

Généralcment, pour ne pas dire toujours, lorsqu'il y a doute sur


l'état mental du délinquant, le juge le fait examiner par des médecins
psychiatres, experts près des tribunaux. Mais le rôle de ces experts est

purement consultatif et les conclusions de leurs rapports ne lient plus

le juge répressif que le juge civil.3 En tout état de cause, le recours à

ces experts pernet de s'assurer du fait que I'absence de discemement

au moment de la commission de l'infraction résultat d'une altération

mental naturelle et non provoquée. L'article 137 du code pénal

énonce que: « l'ivresse, les états passionnels ou ceux résultant de

I-
Cette coihcidenc€ est parfois difflcite à prouver, car ta perte du discernement reqüse par le code est
souvent d'une datation floue. Il s'agit lâ d'une quostion de fait qræ les psychiatres auront pour tâche
d'élucider. Jean-Claude SOYER, Droit penal et procédure pénale, L.G.D, I 8* édition, 2004, P.1 I L
2 - Le bon sens
commande urr applicarion souple de cæ corotaire: malgé le pincipe de la
responsabilité, lesjuges font preuve d'indulgence. En effet, lorsqw le troubls menbl est suwenu Bvant
I'inûactior; les juges accordent souvent les circonstanc.es atténuantes car ils ont un doute sur la réalité
de la guérison. Le problème se pos€ surtout dans les css de folie intermittenæ. Voir Jean PRÂDEL,
Op.cit. P.468.
3
- Bemard BOULOC, droit pénal général, Op.cit. P.3?0.

182
Gourr ûe rholt pénal gén6ral æ
I'emploi volontaires de substances stupéfiants ne p€uvent en auc[m
cas exclure ou diminuer responsabililé ». C'est donc au temps de

l'action délictueuse que I'on doit regarder et vérifier les conditions de


réalisation du trouble mental.

2,L'excluslvlté du trouble mental

Dès I'instant que I'acte délictueux a été eommis sous l'influence

d'un trouble mental, il est considéré comme celui d'rur inesponsable;


peu comporte, d'ailleurs, que le trouble soit continu ou intermittent.

Ce que Ia loi met en évidence, c'est que I'inesponsabilite découle de

la perte du libre arbitre, quelle que soit la nature qui en est à l'origine.

Ainsi, I'article 134 du code pénal exige que le trouble des facultés
mentales soit total par l'emploi de I'expression « impossibilité de

comprendre et de vouloir », Seul donc est inesponsable pénalement

celui qui a perdu penalement le sens de la raison; I'aliéné total dont le


comportem€nt souligne manifestement son exclusion, du registre des

conduiles dites normales.

b.Les effets du trouble mental

Les effets du trouble me al doivent être appréciés à deux


niveaux: pénal et civil.

183
Gours rle droit pénal générd

l-Les effets au niveau pénal: principe d'irresponsabilité

En supprimant le discernement, le trouble des facultés mentales


détruit « l'élément moral » de l'infracüon et, par conséquent, exclut la
responsabilité pénale.

En effet, étant une cause subjective d'irresponsabilité et non une


cause objective de justification, le trouble mental fait disparaître

seulement la responsabilité pénale de la personne qui en est atteinte de

sorte que ses coauteurs el complices demeurent responsables. Ainsi,


celui qui a commis une infraction en état de trouble mental doit donc
bénéficier d'une décision de non-lieu rendue par la juridiction
d'instruction
I ou d'unê décision de relaxe ou d'acquittement
prononcée par la juridiction de jugement.

3.Les effets au niveau civil

En droit fiançais, le trouble mental ne supprime pas la


responsabilité civile. L'article 474 (a1.2) du code de procédure pénale
française prévoit que le prévenu acquitté peut se voir condamner à tout

ou partie des frais du procès-verbal, et surtout, I'important article 489-

2 du code civil(L. du 3 janvier 1968) dispose que: « celui qui a causé


un dommage à autrui, alors qu'il était sous l'empire d'un trouble
mental, n'en est pas moins obligé à réparation ».

I-
Si laluridi"tio, d'instructioD estime qu'un inculpé pésente des signes manifest* d'une aliénalion
mentale, elle ordonnera son placement provisoire dans un établissernent psychiarique en we de son
observation et éventuellemeût de son hospitalisæion dans les conditions prévues par le dahir 30 awil
1959 relatifà la pÉvention et âu traitement des maladies mentales et à lê proteotion des malades
menlaux. AMâlilah BOLJLAICH, Cours de droit pénal général, Librairie EL Maârif AL Jamiiya,
Annee universitaire 1997 -1998, P.246.

184
Gourr tle drolt pénal général

En droit marocain, la disparition de la responsabilité pénale suite


à un état de trouble mental entraîne une disparation de la
responsabilité civile de celui qui en est atteint. Le préjudice causé à la

victime et qui trouve à sa source un fait pénal ne sera pas réparé.

Les pénalistes sont unanimes pour dénoncer ce vide juridique


qu'il faut combler. En effet, si la société bénéficie d'une protection
certaine à üavers les mesures d'incarcération ou celles de
I'intemement dans un établissement psychiatrique prévues par la loi
pénale, en revanche, la victime se trouve privée de toute mesure de

réparation du dommage qu'elle a subi.

B-L'affaibllssement des facultés mentales

Selon l'article 135 du code pénal: « est partiellement

irresponsable celui qui, au moment où il a commis l'infraction, se

houvait atteint d'un affaiblissement de ses facultés mentales de nature


à réduire sa compréhension ou sa volonté et entralnant une diminution
partielle de sa responsabilité »

Cet article prévoit une cause d'atténuation de la responsabilité si

I'auteur de l'infraction a eu son discemement altéré ou le contrôle de


ses âctes entravé en raison d'un affaiblissement de ses facultés
mentales.

I s'agit dans ce cas, non pas d'une maladie, ou d'un trouble


mental grave, mais d'une I'aliénation mentale partielle qui se traduit

185
Gours de droit pénal g6néral

par un obscurcissement moins complet des facultés intellectuelles.l


C'est, en fait, une forme d'atteinte de la personnalite qui permettra au
juge de considérer sa responsabilité pénale atténuée par rapport au
même acte commis par un individu normal.

En effet, le cas d'un affaiblissement des facultés mentales qui


débouche sur une responsabilité partielle est sans doute le cas le plus

diffrcile à traiter parmi les questions pénales. La frontière enhe


l'abolition totale du discemement et son alteration est diffrcile à

tracer. La jurisprudence devra se prononcer.

Ainsi, lorsqu'une juridiction de jugement estime, après expertise


médicale, que I'auteur d'un crime ou d'un délit était atteint lors des

faits qui lui sont imputes d'un affaiblissement de ses facultés


mentales, I'article 78 du code pénale l'oblige à prononcer la peine et

déclarer le cordonné partiellement responsable.

Dans la mesure où I'internement s'avère nécessaire, ce demier


sera hospitalisé dans un établissement psychiatrique, préalablement à

l'exécution de toute peine privative de liberté. L'internement


judiciaire se prolonge aussi longtemps que l'exigent la sécurité
publique et la guérison de I'inteme (article 77 du code pénal) et
I'hospitalisation s'importe sur la durée de la peine.

De ce qui précede, on déduit que tant que l'éclosion de

I'intelligence n'est pas acquise, le seuil d'intervention du droit pénal,

t-
Philippe SALVAGE, Droit Snal générat, PUG, 1993,P.44.

186
Gours de droit p6lal g6n6ral

n'est pas atteint car, faute de pouvoir dépasser << l'évènement


matériel » pour constater une action humaine imputable, aucune
infraction ne peut être commise. Dire cela revient à poser le problème
de la minorité pénale.

§2- ta minorité pénale

La question de l'enfance a toujours constitué un domaine


spécifique pour toutes les branches de droit, et particulièrement au
droit pénal, l'enfance pose la difliculté de la majorité et ou de la
minorité pénale.

La solution retenue est qu'une infraction ne peut être commise


par un mineur non encore sorti de l'enfancel. La responsabilité pénale

de ce demier est inexistante. Ethiquement, c'est la notion d'action


humaine imputable qui explique cette solution. Historiquement avec la

disparition de la conception objective (matérialiste) de I'infraction, il a


été généralement admis qu'aucune coloration pénale ne pouvait être

accordée au comportement d'un enfant.

En effet, la responsabilité pénale des mineurs pose, à priori, le


principe de la fixation d'un âge à partir duquel on doit répondre de ses
actes.

L'article 13 du code pénal2 dispose que « les peines et mesures


de streté édictées au présent code sont applicables aux majeurs de

r-
Adrien-Charles DANA, Essai sur la notion d'infraction pénale, L.G.D.J, 1982, P.75.
2-
Modlfié en vertu de la loi n' 2rl-03 promulguée par le dahir n' 1{3-207 du 11 novembre 2003.
L87
Gours rle drolt péral général

dix-huit aux grégoriens révolus ». Ce faisant, cet article pose le


principe que l'âgé de l8 ans constitue la majorité pénale en droit
répressif marocain,

Si le mineur de 12 ans est considéré comme inesponsable par


défaut de discemement (article 138 du code pénal), celui de 12 à 18

ans, en raison d'une insuffisance de de discernement est


partiellement irresponsable.
!
Il bénéficie ainsi d'une excuse de

minorité.
A-L'irresponsabilité du mineur de 12 ans

En vertu de I'article 138 du code pénal, « le mineur de moins de


douze ans est considéré comme irresponsable pénalement par défaut

de discemement ».

Jusqu' à douze ans, le mineur est donc pénalement considéré


comme inesponsable de ses actes délictueux. Le « défaut de
discemement » qui s'analyse coûrme développement insuffisant de
son appareil psycho-mental, fait que le mineur de cet âge sort de la

sphère pénale. En effet, on ne peut imputer d'infraction au tout jeune


enfant encore dépourvu d'un minimum de raison car << cette

imputation »» n'est concevable que si la question préalable de raison


suffisante et d'éveil de la conscienc€ a été posée, implicitement tout

au moins, et que si elle a reçu une réponse affrmativel. Encore faut-il

conformément aux principes généraux du droit que le mineur dont la

r-
Jean PRADELN, Droit pénal général, CUJAS, Sé* éditiorl T.l, 1992,p.460.
188
Gours rle droit pénal g6nérat

commission de l'acte matériel à lui reprocher est établie, ait compris et

voulu cet acte car toute infraction même non intentionnelle supposant
en effet que son auteur ait agi avec intelligence et volonté.

Ainsi, à côté de l'âge, le législateur pose le discemement comme

critère supplémentaire d'appréciation de l'irresponsabilité. Cette


solution n'était pas le fruit du hasard, le droit pénal s'est inspiré des
écrits de certains psychopédagoguesr.

I.Fondement doctrlnal

A s'en tenir aux écrits de Piaget 2 , ce dernier découpe le


développement intellectuel de I'enfant en quatre stades : le premier
dure jusqu'à 2-3 ans, le second s'étend de 2-3 ans à 7-8 ans, le

troisième vadeT-B ans à l1-12 ans et le quatrième commençant à cet


âge englobe I'adolescent et l'adulte. Si le premier stade est dominé par

la « loi du plaisir », le second par « le jeu et l'observation », c'est au


cours du troisième que s'élabore « un début de hiérarchie >r, et celle-ci

est achevée à partir de l'âgé de I l-12 ans grâce à « la pensée iogique


et aux « assomptions logiques » qui deviennent accessibles à
l'enfa#.

1- pour plus d,lnformations, volr B.VO|ZOf, « Le développement de l'intelliBence chez l'enfant »,


Armand colin Ed, coll u prisme 1973. ou encore H.WAILON, « févolution psychÔloglque de
I'enfant », Armand Colln Ed. 1973.
Jean Wllllam Frltr PfAGEf (né ên 1896 en sulsse el mort en 1980 à Genève) est un blologlste,
2-

psychologue, loglcien et épistémolo8ue connu pour se§ travaux en psycholoBle du développement


et
en éplstémologle génétlque.
t- làpflCsl,rilejugementetleraisonnementchezl'enfant»,DelochauxetNiesté'8tu
édition,
1978, p. 194 et S.

189
Gours rle drolt pénal général

Entre 7-8 ans et 1l'12 ans, selon Piage! I'enfant qui comprend
déjà la réversibilité des opérations, la notion de causalité et de hasard,
la sériation, les classifications, les notions de poids, de volume, de
temps, ne peut cependant exercer sa compréhension que sur des
données concrètes, « réalistes r». C'est par ses sens et son expérience

matérielle qu'il saisit le monde qui l'entoure beaucoup plus que par
son intelligence et sa faculté d'abstraction. Au cours de ce stade,
l'enfant qui «< prend peu à peu conscience de la définition des concepts

qu'il emploie », qui « devient partiellement apte à l'introspection de


ses propres expériences mentales », n'est pas « pour autant apte au

raisonnement formel ». S?il réalise à cet âge l'idée du nécessaire, c'est

à la nécessité physique, concrète, qu'il est sensible et non à la

« nécessité morale ». Au fond, son raisonnement reste intimement lié


à l'expérimentation matérielle, à « la croyance réelle », à

« I'observation directe ».

Il.Dispositif de protection

Le mineur âgé de moins de douze ans et qui ne jouit pas du


discemement échappe à toute condamnation pénale.

*En matière de crimes et de délits, il ne peut faire I'objet que

des mesures de protection et de rééducation prévues à l'article 516 du

code de la procédure pénale :

-Remise à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la


garde ou à rure personn. üign. de confiance,

190
Gours rle ilroit péral général

-Application du régime de la liberté surveillée, placement dans


un intemat ou un établissement public ou privé d'éducation ou de
formation professionnelle,

-Placement dans un établissement médical ou médico


psychologique,

-Placement dans un service public d'assistance ou dans un

établissement apte à recevoir des mineurs délinquants d'âge scolaire.

*En matière de contravention, cette catégorie de mineur ne peut

faire I'objet que d'une admonestation.

*La responsabilité civile est évidemment maintenue; mais, en

raison de la minorité de I'auteur de l'infraction, les parents sont en


général civilement responsables.

Le complice majeur sera jugé selon les dispositions prévues par le

code pénal pour les majeurs, la minorité étant, en effet, une cause
subjective, car entièrement liée à la personne, le complice ne poulra en

bénéficier.

B-L'excuse de minorité

L'intelligence de l'enfant qui commence à s'épanouir dès l'âge de


sept ans, ne semble pas atteindre avant l'âge de 11-12 ans un
développement sufftsant pour permethe à !'enfant de comprendre la

portée abstraite de ses actes, les jugements de valeur qu'ils appellent.

Mais à partir de cet âge, la logique et la compréhension, le


191
Gours de drolt pénal général

discernement, sont suffisamment mtrs pour que l'enfant perçoive la

signification abstraite et sociale de ses agissements. A cet âge, écrit


Piaget, « la vie sociale prend un essor nouveaq ce qui a évidemment

pour effet de conduire les enfants à une compréhension mutuelle plus


grande et, dès lors, de les habituer à se placer incessamment à des
points de vue qu'ils ne partagent pas eux-mêmes »1.

A transposer ces données en droit pénal marocai& afin de

déterminer l'âge à partir duquel un mineur peut commettre une


infraction, l'article 139 du code penal pose le principe de la
responsabilité partielle du mineur de 12 à l8 ans, ce qui aura des effets

spécifiques au niveau de l'application de la peine.

I.Le principe: une responsabilité partielle

L'article 139 (a1,1) du code penal prévoit que « le mineur de


douze ans qui pas atteint dix-huit ans est, pénalement, considéré
cofllme partiellement inesponsable en raison d'une insufÏisance de
discemement ».

Le principe d'une irresponsabilité partielle prévu par cet article


signifie à contrario une responsabilité partielle. Le mineur qui vient de
dépasser des 12 ans mais qui n'a pas encore atteint les l8 ans n'est pas

totalement responsable puisqu'on parle dans ce cas d'une


« insuffisance de discemement » et non pas « un défaut de

'- Jesn PLAGET, « Le jugement et le raisonnement chez I'enfant 4 Dehchrux et Niesté, S* éditior'
1978, p.199.

192
Goun rle rkoit pénal général

discemement », c'est pourquoi le mineur de cette catégorie bénéficie


d'un régime particulier de sanction. Il ne s'agit pas d'une peine entière
mais une peine atténuée.

II.Les effets de la responsabilité partlelle

Le deuxième alinéa de I'article 139 du code pénal dispose que


« le mineur bénéficie dans le cas prévu au premier alinéa du présent

article de I'excuse de minorité, et ne peut faire I'objet que des

dispositions du livre III de la loi relative à la procédure civile ».

La loi institue donc au profit du mineur de 12 à l8 ans une excuse

de minorité qui donne au juge le choix entre I'application des mesures

de protection ou de rééducation prévues à I'article 516 du code de


la

procédure pénale, ou ta condamnation à des peines atténuées prévues

à I'article 517 du même code'

En effet, lorsque le tribunal le juge indispensable en raison des

circonstances ou de la personnalité du délinquan! il peut,


par décision

spécialement motivée, remplacer ou compléter les mesures de


rééducation ou de protection par une peine d'amende ou
d'emprisonnementl.

Ainsi, en matière de crime§ :

.Silemineurestpassibledelapeinedemortoudelaréclusion
20 ans'
perpétuelle, il droit être condamné à une peine de 10 à

r- Mohieddine AMZAZI, précis de &oit oriminel' Dar Nachr Al Maarifa, th éditioq 1994' P lol.

193
Gourr de droit pénal g6néral

-Si I'infraction est passible de la réclusion à ùemps, le mineur


subiraune peine de 3 à l0 ans.

En matière de délits, la peine normalement encourue est rédüte


de moitié.

En matière de contraventions, le mineur peut soit être


condamné à I'amende, soit faire l'objet d'une admonestation
uniquement.

En effet, de ce qui précède, on déduit qu'avec la notion de

discernement, la loi pénale semble donc faire dépendre lnexisûence

d'une infraction du développement suffrsant de l'intelligence. C'est


cette idée qui explique la rigueur des dispositions de I'article 140 du

code pénal vis-à-vis des délinquants majeurs: « les délinquants ayant

atteint la majorité pénale de dix-huit ans révolus, sont réputés


pleinement responsables »». C'est justement en s'articulant sur la
responsabilité pénale du délinquant que le juge pourra lui appliquer la

sanction appropriée.

Corolaire de la responsabilité pénale et but du pénal, la sanction


présente de nombreux visages extrêmement variés. Son étude fera

I'objet d'un deuxième Tome.

L94
Goun rle ûroit pélal général

nfth$illh
OuvraEes

. Bemard BOULOC, Droit pénal général, Dall o2,24tu" édition,


2015.
. Emmanuel DREYER, Droit pénal général, Lexis Nexis, 2*"
édition,2012.
. Mohammed JALAL ESSAID, Infoduction à l'étude du droit, 4hu

édition 2010. -/
. Mikaël BEMLLOUCFIE : << Leçons de droit pénale général »
Ellipses,2009.
. Christophe PAULIN, Droit pénal général, Lexis Nexis , 4h'

édition,2005.

' Michèle-Laure RASSAT, Droit pénal général, Ellipses, 2004.

' Jean- Claude SOYER, Droit pénal et Procédure pénale, LGDJ,

18"" édition,20A4.
. Marc SEGONDS, Droit pénal général, ellipses,2004.
. Jean LARGTI& Droit pénal général, Dalloz, l8h'édition, 2001'
. Gaston STEFANI, Georges LEVASSEUR, Bernard BOULOC'

Droit pénal général, Dalloz, l7*" édition, 2000


r G.Levasseur, A.Chavonne, J.Montreuil, B.Bouloc, Droit pénal et

procédure pénale, Dalloz, 13h' édition, 1999.


. Abdelilah BOLJLAICH' Cours de droit penal général, Librairie
Al Maarif Al Jamiiya-Fès-, Année universitaire 1997-1998'

195
Gours rle rlroit pénal général

r Benoit CHABERT, Pierre- Olivier SUR, Droit pénal général,


Dalloz, 2é- édition. lggT .
. Mohieddine A\vIZAZL précis de droit criminel, Dar Nachr Al
Maarifa, læ édition, 1994.
r Jacques VERIN, Pour une nouvelle politique pénale, L.G.D.J ,

1994

' Frédéric-Jérôme PANSIER, La peine et le droit, Presses

universitaires de France, 1994


. Philippe SALVAGE, Droit pénal général, PUG, 1993.

. Philippe SALVAGE, Droit pénal général, presses universitaires


de Grenoble, 1993.

. Jean PRADEL, Droit'pénal général, Cujas, Tome I, 8"'éditiorL


1992.

r Jacques- Henri ROBERT, Droit pénal général, Presses

universitaires de France, 2é'i" édrtioî, lgg2.

' GARCON, << Le droit pénal général», Payot" 1992.

. Wilfrid JEANDIDIER, Droit général, Montchrestieî,2é^"


édition, 1991.
. Jean PRADEL, Histoire des doctrines pénales, presses
universitaires de Paris, 2*e .édition, 1991.
r Jean- Marie CARBA§SE, lntroduction historique au droit pénal,

PUF, lè'u édition, 1gg0.

195
Gours rle droit pénal général

. Jaques -Henri ROBERT, Droit pénal général, presses

univesitaires de France, 2"*" Edition 1988.


, R MERLE et A. VITU, « Traité de droit criminel », CUJAS,
3h" édition, T.l, t978,
. Andrien-Charles DANA, Essai sur la notion d'infraction pénale,
LGDJ, 1982.
r Jean PIAGET, « Le jugement et le raisonnement chez l'enfant »r,

Delachaux et Niesté, 8è'" édition, 1978.


. Gabriel TARDE, La philosophie pénale, CUJAS,I972
. Charles-Robert AGERON, Revue d'histoire moderne et

contemporaine, tome l8 nol, Janvier-mars 1971,


r P.CUCHE, précis de droit criminel, Dalloz, 5" édition, 1934.

Revues

. Revue << La semaine juridique r» nol5, du10 awil 2017


r Revue « Droit pénal » no12, du décembre20l6
r Revue « Droit pénal », no I l, novembre20l6
r Revue « Droit pénal », n" l0 octobre 2016

' Revue « Droit pénal », no 9, septembre20l6


r Rewe « Droitpénal », n" 7-8,- juillet2016
r Revue « Droit pénal », no 6, juin 2016
. Revue « Droit pénal », no 5, mai 2016
. Revue « Droit pénal », no 4, avril 2016
r Revue « Droit pénal », no2, février 2016
r Revue« Droitpénal», no l, janvier2016
L97
Gours de droit pénal général

r Revue « Droit pénal », no 12, décembre 2016


. Revue « Droit pénal », no 2, février 2010
e
Journaux

' Le monde, paris, 14 avril 2015.

Sites

. wwwjeuneafrique.com

' www.LeMatin.ma

198
I

Gours ds drolt pélal g6néral

lmcmu

+ Loi 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme

* Avis du conseil national du droit de I'homme sur le projet de


loi 8G14

* La loi 8G14 modifiant et complétant la loi 03-03 relative à la


lutte contre le terrorisme

199
Gours rle droit pénal géléral

LOUANGE A DIEU SEUL!

(Grand Sceau de So Majesté Moharnmed VI)

Qte l'on sache par les présentes - puisse Dieu en élever et en

fortifier la teneur!

Que Notre Majesté Chéri/ienne,

Vu la Constitution, notamment ses articles 26 et 58,

A DECIDE CE gUI SUIT

Est pronulguée et sera publiée au Bulletin ofieiel, à la suite du


présent dahir, la lot no 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme,
telle qu'adoptée par la Chambre des représentants et la Chambre des
conseillers.

Fail à Casablanca, le 26 rabii I 1424 (28 mai 2003).

Pourconîreseing:

Le premier ministre,

DNSS JETTOU,

200
Gours dc droit pénal g6n6ral

Dahir no 1-03-1{0 du 26 rabii | 1424 (28 mai 2fi}3) portant


promulgation de Ia loi no 03-03 relative à la lutte contre le
terrorisme.

Titre Premier : Des dispositions pénales

Article Premier : Le titre premier du liwe III du code pénal approuvé


par le dahir n' l-59413 du 28 joumada Il 1382 (26 novembre 1962)

est complété par le chapitre premier âis suivant :

" Chapitre Premier bis : Le terrorisme

Article 218-1. - Constituent des actes de terrorisme, lorsqu'elles


sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou

collective ayant pour but I'atteinte grave à I'ordre public par


I'intimidation, la terreur ou la violence, les infractions suivantes :

l) I'atteinte volontaire à la vie des personnes ou à leur intégrité,

ou à leurs libertés, I'enlèvement ou la séquestration des personnes ;

2) la contrefaçon ou la falsification des monnaies ou effets de


crédit public, des sceaux de I'Etat et des poinçons, timbres et marques,

ou le faux ou la falsification visés dans les articles 360, 361 et 362 du


présent code ;

3) les destructions, dégradations ou détériorations ;

201
Gours de droit p6nal géréral

4) le détoumement, la dégradation d'aéronefs ou des navires ou de


tout autre moyen de transport, la dégradation des installations de

navigation aérienne, niraritime et terrestre et la destruction, la


dégradation ou la détérioration des moyens de communication ;

5) le vol et l'extorsion des biens ;

6) la fabrication, la détention, le transport la mise en circulation


ou I'utilisation illégale d'armes, d'explosifs ou de munitions ;

7) les infractions relatives aux systèmes de traitement automatisé


des données ;

8) le faux ou la falsification en matière de chèque ou de tout autre

moyen de paiement visés respectivement par les articles 3 16 et 331 du

code de commerce ;

9) la participation à une association formée ou à une entente

établie en vue de la préparation ou de la commission d'un des actes de

terrorisme;

l0) le recel sciemment du prodüt d'une infraction de terrorisme.

Article 218-2. - Est puni d'un emprisonnement de 2 à 6 ans et


d'une amende de 10.000 à 200.000 dirhams, quiconque fait I'apologie

d'actes constituant des infractions de terrorisme, par les discours, cris

ou menaces proférés dans les lieux ou les réunions publics ou par des
écrits, des imprimés vendus, distribués ou mis en vente ou exposés
dans les lieux ou réunions publics soit par des affiches exposées au
202
Gours de droit pénal général

regard du public par les différents moyens d'information audio-visuels

et électroniques. 1

" Article 218-3. - Constitue également un acte de terrorisme, au

sens du premier alinéa de I'article 218-l ci-dessus, Ie fait d'introduire


ou de mettre dans I'atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les

eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance qui met en

péril la santé de I'homme ou des animaux ou le milieu naturel.

Les faits prévus au premier alinéa ci-dessus sont punis de dix à


vingt ans de réclusion.

La peine est la réclusion à perpétuité, lorsque les faits ont entraîné


une mutilatiorq amputaüon ou privation de I'usage d'un membre,
cécité, perte d'un oeil ou toutes autres infirmités permanentes pour une

ou plusieurs personnes.

Le coupable est puni de mort lorsque les faits ont entralné la mort
d'une ou de plusieurs pef6ônnes. î

" Article 218-4. - Constituent des actes de terrorisme les

infractions ci-après :

- le fait de foumir, de réunir ou de gérer par quelque, moyen que


ce soit, directement ou indirectement, des fonds, des valeurs ou des
bierx dans I'intention de les voir utiliser ou en sachant qu'ils seront
utilisés, en tout ou en partie, en vtte de commettre un acte de
terrorisme, indépendamment de la survenance d'un tel acte ;

203
Gours de drolt p6nal général

- le fait d'apporter un concours ou de donner des conseils à cette


fin.

Les infractions visées au présent article sont punies :

* pour les personnes physiques, de cinq à vingt ans de réclusion et

d'une amende de 500.000 à 2.000.000 de dirhams ;

* pour les personnes morales, d'une amende de 1.000.000 à


5.000.000 de dirhams, sans préjudice des peines qui pourraient être
prononcées à I'encontre de leurs dirigeants ou agents impliqués dans

les infractions.

La peine est portée à dix ans et à trente ans de réclusion et

I'amende au double :

- lorsque les infractions sont commises en utilisant les facilités


que procure I'exercice d'une activité professionnelles ;

- lorsque les infractions sont commises en bande organiséeo ;


- en cus de récidive.

La personne coupable de financement du tenorisme encourt, en outre,

la confiscation de tout ou partie de ses biens. 1

" Article 218-5. - Quiconque, par quelque moyen que ce soit,


persuade, incite ou provoque auüü à commettre I'une des infractions,

prévues par le présent chapitre, est passible des peines prescrites pour

cette infraction. î

204
Cour de droit p6nal q6néral

" Article 218-6, - Outre les cas de complicité préws à l'article 129
du présent code, est puni de la réclusion de dix à vingt ans, quiconque,

sciemment, foumil à une personne auteur, coauteul ou complice d'un

acte terroriste, soit des armes, munitions ou insfuments de I'infraction,

soit des contibutions pécuniaires, des moyens de subsistance, de

correspondance ou de transport, soit un lieu de réunion, de logement

ou de rehaite ou qui les aide à disposer du produit de leurs méfaits, ou


-
qui, de toute autre manière, leut porte sciemment assistance.

Toutefois, la juridiction peut exempter de la peine encourue Ies


parents ou alliés jusqu'au quatrième degré, inclusivement de I'auteur,

du coauteur ou du complice d'un acte teroriste, lorsqu'ils ont


seulement foumi à ce demier logement ou moyens de subsistance

personnels. I

' Article 218-7. - Le maximum des peines prélues pour les


infractions visées à I'article 218-l ci-dessus, est relevé comme suit,

lorsque les faits commis con§ituent des infractions de terrorisme :

- la mort lorsque la peine préwe est la réclusion perpétuelle' ;

- la réclusion perpétuell€ lorsque le maximum de la peine prévue


est de 30 ans de réclusion ;

- le maximum des peines privatives de liberté est relevé au


double, sans dépasser trente ans lorsque la peine prévue est la

réclusion ou I'emprisonnement ;

20s
Gours rle droit pélal g6néral

- lonque la peine prévue est une amende, le maximum de la peine

est multiplié par cent sans être inférieur à 100.000 dirhams ;

- lorsque I'auteur est r]Ile persome morale, la dissolution de la


persorme morale ainsi que les deux mesures de streté préwes à
I'article 62 du code pénal doivent être prononcées sous réserve des

droits d'autrui. I
-
" Atlicle 218-8. - Est coupable de non-révélation d'infractions de

terrorisme et punie de la. réclusion de cinq à dix ans, toute personne


qui, ayânt connaissance de projets ou d'actes tendant à la perpÉtration
de faits constituant des infractions de tenorisme, n'en fait pas, dès le

moment oir elle les a connus, la déclaration aux autorités judiciaires,


de sécurité, adminishatives ou militaires.

Toutefois, lajuridiction peut, darrs le cas prévu au premier alinéa


du présent article, exempter de la peine encotuue les parents ou alliés
jusqu'au quatième degré, inclusivement, de l'auteur, du coauteur ou

du complice d'une infracüon de terrorisme.

Lorsqu'il s'agit d'une personne morale, la peine est l'amende de


100.000 à 1.000.000 de dirhams. I

" Article 218-9. - Bénéficie d'une excuse absolutoire, dans les

conditions prévues aux articles 143 à 145 du présent code, l'auteur, le


coauteur ou le complice qui, avant toute tentative de commettre une

infraction de terrorisme faisant I'objet d'une entente ou d'une


association et avant toute mise en mouvement de I'action publique, a
206
Cours tle rilroit pénal général

le premier, révélé aux autorités judiciaires, de sécurité, administratives

ou militaires I'entente établie ou I'existence de I'association.

Lorsque la dénonciation a eu lieu après I'infizction, la peine est


diminuée de moitié pour I'auteur, le coauteur ou le complice qui se

présente d'ofiice aux autorités ci-dessus mentionnées ou qui dénonce

les coauteurs ou complices dans I'infraction.

Lorsque la peine prévue est la mort, elle est commuée à la peine


de réclusion perpétuelle, lorsqu'il s'agit de la peine de la réclusion
perpétuelle, elle est commuée à la réclusion de20 à 30 ans. I

Article deux :Les articles 4A, 70, 72 et 86 (1" alinéa) du code


pénal précité sont complétés comme suit :

" Article 40 (2" alinéa ajouté) : Les juridictions peuvent également


appliquer les dispositions du premier alinéa du présent article
lorsqu'elles prononcent une peine délictuelle pour une infraction de
terrorisme.I

" Article 70. - Toute juridiction


à cinq ans.

" (2" alinéa aiouté). - Lorsque I'acte commis constitue une


infraction de terrorisme, la juridiction peut assigner au condamné un
lieu de résidence tel que prévu au premier alinéa ci-dessus dont il ne
pourra s'éloigner sans autorisation pendant la durée fixée dans le
jugement sans toutefois dépasser dix ans.

207
Gours de droit pénal gén6ral

La décision d'assignation de résidence t

(La suite sans modification.)

'Article 72.

L'interdiction. ..loi

Elle principale.

(4" alinéa ajouté). - Toutefois, I'interdiction de séjour peut toujours


être prononcée lorsque la juridiction applique ule peine

d'emprisonnement pour une infraction de terrorisme. î

" Article 86 (premier alinéa). - L'incapacité d'exercer toutes


fonctions ou emplois publics doit être prononcée par la juridiction
dans les cas édictés par la loi et lorsqu'il s'agit d'une infraction
constituant wl acte de terrorisme. î

Article trois :Le chapihe Il du titre I du livre premier du code


pénal précité est complété par I'article 44-l suivant :

""Article 44- 1. - Lorsqu'il s'agit d'un acte constituant une


infiaction de terrorisme, la juridiction peut prononcer la confiscation
prévue à I'article 42 du présent code.

208
Gours de drolt pénal géa6ral æ
La confiscation doit toujours être prononcée, dans les cas prélus
aux articles 43 et 44 du présent code, sous réserve des droils des tiers,

en cas de condamnation pour une infraction de terrorisme .1o

Titre Il : Des dispositions de procédure pénale

Article quâtre : Les dispositions des articles 59 (2ê alinéa),62,


79, lO2, IOB (3' et 4" alinéas) et I 15 de la loî n" 22-01 relative à la
procédure pénale promulguée par le dahir n" 1'02'255 du 25 rejeb

1423 (3 octobre 2002) sont complétées comme suit :

"'Arlicte 59 (t atinea,). - Sauf en matière d'atteinte à la streté de


l'Etat ou loNqu'il s'agit d'une infi'action de tenorisme, l'oIïicier de
policæ judiciaire a seul avec les personnes désignéæ à I'article 60, le
droit de prendre connaissance des papiers ou documents avant de
procéder à leur saisie.f

""Articte 62 (3" alinéa aiouté). 'Lorsqu'il s'agit d'une infraction


d€ tenorisme et si les nécessités de l'enquêter le cas d'extrême urgence

ou la crainte de disparition de preuves l'exigenl les perquisitions et les

visites domiciliaires peuvent avoir liei:, à tihe exceptionnel, avant six


heures du matin et après neuf heures du soir sur autorisation écrite du

ministèrc public. I

*Article 79. - L€s Perquisitions


..:..........'........."'.'...'..."'...' a lieu'

209
Gours de droit pénal fénéral

Cet assentiment
que de son assentiment.

Les dispositions ................ sont applicables.

(4' alinéa ajouté). - Lorsqu'il s'agit d'une infraction de terrorisme

et si la personne chez laquelle I'opération doit avoir lieu s'est abstenue

de donner son accord, ou lorsqu'il n'est pas possible d'obtenir cet


accord, les opérations prévues au premier alinéa du présent article
peuvent avoir lieu sur autorisation écrite du ministère public en
présence de la personne concemée, Lorsque ladite personne s'abstient

de donner son accord ou en cas d'empêchement, I'opération doit avoir

lieu en présence de deux personnes autres que les subordonnés de

I'offrcier de police judiciaire.T

"oArticle 102. - En matière de crime, ou lorsqu'il s'agit d'une


infraction de terrorisme, si la perquisition est effectuée au domicile de
I'inculpé, le juge d'instruction est habilité à y procéder, en dehors des
heures fixées à I'article 62, à condition de le faire personnellement et

en présence du représentarrt du ministère public.

Lorsqu'il s'agit d'unerinfraction de terrorisme, le juge d'instruction


peut, en cas d'extrême urgence, par décision motivée, requérir, par
commission rogatoire, un magistrat ou un ou plusieurs offrciers de
police judiciaire, pour effectuer la perquisition en dehors des heures
légales en présence du représentant du ministère public.I

zLo
Gours de droit pénal général

"oArticle j,08 (3" alinéa). - Le procureur général du Roi peut


également, si les nécessités de I'enquête I'exigent requérir par écri! du
premier président de la Cour d'appel, d'ordonner l'interception des

appels téléphoniques ou des communications effecfués par les moyens


de communication à dislance, de les enregistrer et d'en prendre copies

ou de les saisir, lorsque I'infraction objet de I'enquête porte atteinte à


la sûreté de I'Etat, lorsqu'il s'agit d'une infraction de tenorisme ou
lorsqu'elle est relative aux associations de malfaiteurs, à I'homicide, à
I'empoisonnement, à I'enlèvement des personnes et à la prise d'otages,

à la contrefaçon ou à la falsification de la monnaie ou des effets de


crédit public, aux stupéfiants et arx substances psychotropes, aux
,umes, munitions et explosifs ou à la protection de la santé.

({ alinéa). - Toutefois, le procureur général du Roi, peut,


exceptionnellement, en cas d'extrême urgence, lorsque les nécessités

de I'enquête exigent la célérité par uainte de disparition de moyens de

preuve, ordonner par écrit I'interception des appels téléphoniques ou

des communications effectués par les moyens de communication à


distance, de les enregistrer, d'en prendre copies et de les saisir, lorsque

l'infraction porte atteinte à la streté de I'Etat, lorsqu'il s'agit d'une


infraction de terrorisme ou lorsqu'elle est relative atx stupéfiants, aux
substances psychotropes, aux armes, munitions et explosifs, à

I'enlèvement des personnes ou à la prise d'otages."î

"oArticle 1 15 (2' alinéa ajouté). - Sans préjudice des dispositions


pénales plus sévères, la peine est de cinq à dix ans de réclusion
ztt
Gours rle rlroit pénal g6n6ral

lorsque les faiæ prévus au premier alinéa cidessus sont accomplis


pour des fTns de terorisme.oî

Article cinq : Les âispositions des articles 66 (4" et9" alinéas) et


80 (4'et l0'alinéas) de la loi relative à la procédure pénale précitée

sont modifiées et complétées comme süt :

"oArticle 66 (4" alinéa ajouté). - Lorsqu'il s'agit d'une infraction


de terrorisme, la durée de la garde à vue est fixée à quatre'vingt-seize

heures renouvelable deux fois pour une durée de quatre-vingt-seize


heures chaque fois sur autorisation écrite du ministère public.

(l alinéa). - En cas d'une infraction de terrorisme ou des

infractions visées à I'article 108 de la présente loi et si les nécessités


de I'enquête I'exigent, le representant du ministère public peut, à la
demande de I'officier de police judiciaire, retarder la communication

de I'avocat avec son client sans que ce retard ne dépasse quarante-huit

heures à compter de la première prolongation.oî

""Article 80 (4" alinéa). - Lorsqu'il s'agit d'une infraction de


tenorisme, la durée de la garde à vue est fxée à quatre-vingt-seize
heures renouvelable deux fois, pour une durée de quatre-vingt-seize

heures chaque fois sur autorisation écrite du ministère public.

(1ff alinéa). - En cas d'infractions de terrorisme ou des infractions

visées à I'article 108 de la présente loi et si les nécessités de I'enquête

l'exigent, le représentant du ministère public peut retarder la


communication de I'avocat avec son mandant à la demande de
2t2
Gours ie drott p6ml générd

I'offrcier de police judiciaire sens que ce retard ne dépasse quarante-


huit heures à compter de la première prolongation.ol

Article six : Le livre V de la loi relative à la procédure pénale

précitée est complétée par le titre IV suivant :

2L3
Gours rle droit pénal général

Titre IV : Procédure relative au financement du terrorisme

"oArticle 595-L - Le procureur général du Roi peut, à I'occasion


d'une enquête judiciaire, demander, aux banques soumises aux
dispositions du dahir portànt loi n" 1-93-14? du 15 moharrem 1414 (6
juillet 1993) relatif à I'exercice de I'activité des établissements de

crédit et de leur contrôle et aux banques offshore régies par la loi no


58-90 relative aux places financières offshore promulguée par le dahir

no l-93-l3l du 23 chaabane l4l2 (26 février 1992), des

renseignements sur des opérations ou des mouvements de fonds

soupçonnés d'être liés au financement du terrorisme.

Saisis d'une procédure en relation avec une infraction de


terrorisme, le juge d'instruction et la juridiction de jugement peuvent
également demander les renseignements prévus au premier alinéa du
présent article.oî

uoÀrticle 595-2. - Les autorités judiciaires prévues à I'article


précédent peuvent ordonner le gel ou la saisie des fonds soupçonnés

d'être liés au financement du tenorisme.

Elles peuvent demander I'assistance de Bank Al-Maghrib pour la


mise en exécution de ces mesures.

Elles notifient à Bank Al-Maglnib les mesures prises et la suite


qui leur a été donnée,oî

214
Goun de drolt p6lal gél6ral æ
'"Àfiicle 595-3. - on entend par le terme "ogelol l'interdiction
temporaire du transfert, de la conversion, de la disposition ou du
mouvement des biens ou le fait de les soumettre à la garde.

""Arricle 5954. - Les établissements bancaires visés à I'article


595-l ci-dessus, doivetu foumir les rerseignements demandés dans un
délai maximum de 30 jours à compter de la date de réception de la
demande.

Le secret professionnel ne peü être opposé aux autorités visées à

l'article 595-1 ci-dessus ou à Bank Al-Maghrib par les banques.

Pour tous faits et âctes accomplis à l'occasion de I'exercice des

missions qui sont dévolues à Bank Al-Maghrib ou aux banques par le


présent titre, aucu e poursuite fondée sur l'article z146 du code pénal et

aucune action en responsabilité civile ne peuvent être engaSées à


I'enconhe dê ces établissements ou de leurs dirigeants ou agents.ol

""Article 595-5. - Il est interdil d'utiliser les renseignements


recueillis à d'autres fins que celles prévues par le présent titre.'î

'Atticle 595-6. - Dans le cadre de I'application des conventions

intemationales en matière de lutte conhe le financement du tenorisme

auxquelles le Royaume du Maroc a adhéré et dtment publiées, le


gouvemement peut, à la demande d'un Etat étranger, saisir de la

demande le procureur général du Roi afin de prendre les mesures

suivantes :

215
Gourr tle droit pénal général

I - la recherche et I'identification du produit d'une infraction de

financement du terrorisme, des biens qui ont servi ou étaient destinés à


commettre cette infraction ou de tout bien dont la valeur conespond

au produit de cette infraction ;

2 - le gel ou la saisie des biens ;

3 - laprise de mesures conservatoires surces biens.

La demande est rejetée par le procureur général du Roi si :

- son exécution risque de porter atteinte à la souveraineté, à la


sécurité, aux intérêts essentiels de I'Etat ou à I'ordre public ;

- les faits sur lesquels elle porte ont fait I'objet d'une décision
judiciaire définitive sur le territoire national ;

- la décision judiciaire étrangère a été prononcée dans des

conditions n'offrant pas de garanties sufÏisantes au regard des droits de

la défense ;

- les faits à I'origine de la demande ne sont pæ liés au


o1
financement du terrorisme.

"oArticle 595-7. - L'exécution sur le tenitoire national d'une


décision de gel, de saisie ou de confiscation prononcee par une
autorité judiciaire étrangère et faisant I'objet d'une demande présentée
par ladite autorité, est subordonnée à I'autorisation du procureur
général du Roi.

2L6
Gours rle droit pélal général .

La décision de gel, de saisie ou de confiScation doit viser un bien


ayant servi ou qui était destiné à commettre I'infractio& et se trouvant

sur le territoire national, ou consister en I'obligation de payer une


somme d'argent correspondante à la valeur de ce bien.

L'exécution de la décision étrangère est subordonnée à la

satisfaction de la double condition suivante :

I - la décision judiciaire étrangère est définitive et exécutoire


selon la loi de I'Etat requérant ;

2 - les biens à geler, à saisir ou à conftsquer en vertu de cette


décision sont susceptibles d'êhe gelés, saisis ou confisqués dans des
circonstances analogues selon la législation marocaine.oî

""Article 595-8. - L'autorisation par le procureur général du Roi


de la confiscation enraîne, sans préjudice des droits des tiers, le
transfert à I'Etat marocain de la propriété des biens conftsqués, sauf
s'il en est convenu autrement avec I'Etat requérant ou dans le cadre de
l'application d'une convention intemationale ou du principe de la
réciprocité.

La décision d'autorisation du procureur général du Roi permettant


le gel ou la saisie n'entralne que I'indisponibilité des fonds objet de la
décision qui ne peuvent faire I'objet d'aucune aliénation pendant la
durée d'effet de Ia décision.'î

217
Gours de droit p6nal génénl

""Article 595-9. - Toutes les personnes qui participent au


traitement du renseignement financier et à I'action contre les circuits
liés au financement du terrorisme et plus généralement, toutes

personnes appelées, à un titre quelconque, à connaître ou à exploiter

de tels renseignements, sont strictement tenues au secret professionnel

sous peine de la sanction prévue à I'article 446 ducode pénal.oî

""Article 595-10. - Sont punis des peines prévues à I'article 446


du code pénal, les dirigeants ou agents des banques qui auront

sciemment porté à la connaissance de la personne en cal§e ou de toute

autre personne, par quelque moyen que ce soit, des renseignements sur

une enquête menée sur les mouvement§ de ses fonds soupçonnés d'être

liés au financement du tenorisme.

Est punie des mêmes peines toute personne qui aurait utilisé
sciemment les renseignements recueillis à d'autres fins que celles

prévues par le présent titre.ol

Article sept : Nonobstant les règles de compétence prévues par le


code de procédure pénale ou par d'autres textes, la Cour d'appel de
Rabat est compétente pour les poursuites, l'insfiuction et le jugement

des actes constituant des infractions de terrorisme.

Ladite juridiction peut, pour des motifs de securité publique et


exceptionnellement, tenir ses audiences dans les sièges d'une autre
juridiction.

218
Gours rle droit p6nal général

Article huit : Sous réserve des dispositions de I'article 9 ci-


dessus, I'article 755 de la loi no 22-01 relative à la procédure pénale,

promulguée par le dahir no 1-02-255 du 25 rejeb 1423 (3 octobre


2002), est modifié ainsi qu'il suit :

""Article 755 (f' afinéa). - Les dispositions de la présente loi


entrent en vigueur à compter du premier octobre 2003.7

Article neuf : Les dispositions de la présente loi et celles du


chapitre V du titre III du livre premier de la loi n" 22-01relative à la
procédure pénale entrent en vigueur à compter de la date de sa

publication au Bullettn officiel.

2L9
Gours de droit pénal général

Avis du conseil national des droits de I'homme

sur le << projet » de loi E6.14 modiliant et complétant lm


dispositions du code pénal et de Ia procédure pénale relatives à la
lutte contre le terrorisme

Le Conseil national des droits de l'Homme,

Vu la demande d'avis formulée le 16 décembre 2014 par


Monsieur le Président de la Chambre des représentants et reçue le 16

décembre 2014;

Vu le Dahir N'1-l l-19 du 25 rabii I 1432 (ler mars 2011) portant


création du Conseil national des droits de I'Homme, notamment son
article 16;

Vu les principes de Belgrade sur la relation enhe les Institutions


naüonales des droits de l'Homme et les Parlements, notiamment les
principes 22, 24, 25 et 28 ;

Vu le mémorandum d'entente conclu le l0 décembre 2014 entre


la Chambre des représentants et le Conseil national des droits de

I'Homme, notamment I'article 2 ;

Vu la Constitution, notamment les articles 6(§2), 21, 22,23,38 et


son titre VII ;

220
Gours rle üroit pénal général

Vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques,


notamment ses articles 9, 14 et 15 ;

Vu les inshuments internationaux relatifs à la lutte contre le


terrorisme, notamment :

E La Convention relative aux infractions et à certâins autres actes


survenant à bord des aéronefsr, conclue à To§o le 14 septembre
1963;

D La Convention pour la répression de la capture illicite


d'aéronefs2, conclue à La Haye le 16 décembrc 1970

U La Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre

la sécurité de I'aviation civile3, conclue à Monhéal le 23 septembre


1971;

I La Convention sur la prévention et la repression des infractions


conhe les personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques
4, conclue à New York le 14

décembre 1973 ;

I La Convention internationale contre la prise d'otagess, conclue


à New York le l7 décembre 1979 ;

1
- Le Maroc a adhéré à ceücconvantion le 21 octobre 1975.
2
- Lc Maroc a adhéré à cette convention le 2l octobre 1975.
3
- Le Maroc a adhéé à cætte convention le 2 I oc*obre I 975
' - Le Maroc a adhéré à cette convention le gjanvier 2002.
5
- Le Maroc g adhéré à cette convention le 9 rui 2007.

221
Gours de ürolt p6nal générd

n La Convention sur la protection physique des matières

nucléairesl, adoptée à Vienne le 26 octobre 1979 ;

. Le Protocole pour la répression des actes illicites de violence


dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale2, conclu à
Montéal le 24 février 1988 ;

ü La Convention pour la répression d'actes illicites contre la


sécurité de la navigation maritime3, conclue à Rome le 10 mæs 1988 ;

D Le Protocole pour la répression d'actes illicites contre la

sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continentala,


conclu à Rome le l0 mars 1988 ;

E La Convention internationale pour la répression des attentats

terroristes à I'explosit', conclue à New York le l5 décembre 1977 ;

I Le Protocole pour la répression d'aotes illicites contre la


sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental6,
conclu à Rome le l0 mars 1988 ;

tr La Convention internationale pour la répression du


furancement du terrorismeT, Conclue à New York le 9 décembre 1999;

1
- Le Maroc a adhéré à cete convention le 23 aout 2002.
I- lcle Mamc a ratifié cctte oonvenüon le 15 fewier 2002.
Le Maroo a ratifié cette convention
3
- Le Maroc a ratifié cette convÊntion le tjanvier 2002.
'-5 Le Maroc a ratifié cette convention le 8 janvier 2002.
- Le Maroo a ratifié cetle convention le 9 mai 2007'
6
- Le Maroc a ralifié cette conventionle 8 janüer 2002.
7
- Le Maroc a rati{ié cette convention le 19 §eptembrc 2002.

222
Gours de rlroit p6nal général

D La Convention internationale pour la répression des actes de


termrisme nucléairer, conclue à New York le 14 septembre 2005.

Vu la résolution No 60/158, adoptée le 16 décembre 2005 par


l'Assernblée générale des Nations unies sur la protection des droits de
I'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste ;

Vu la Résolution No 61117l adoptée le 19 décembre 2006 par


l'Assemblée générale des Nations unies sur la protection des droits de
l'Homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste ;

Vu la Résolution No 681178 adoptée le 18 décembre 2013 par

l'Assemblée générale des Nations unies sur la protection des droits de


I'Homme et des libertés fondamentales dans la lutte antitenoriste ;

Vu la Stratégie antiterroriste mondiale et son plan d'action


adoptés le 8 septembre 2006 par I'Assemblée générale des Nations
unies en vertu de la Résolution No 60/288, notamment son quatrième
pilier intitulé << Mesures garantissant le respect des droits de l'Homme

et la primauté du droit en tant que base fondamentale de la lutte


antiterroriste ».

Le CNDH présente son avis sur le projet de loi 86.14 modifiant et


complétant les dispositions du code pénal et de la procédure pénale
relatives à la lutte contre le terorisme.

1
- Le Maroc a ratifié cette convention le 3l mars 2010.

223
Gours ûe üroit p6lal général

Par ce mémorandurn, le Conseil entend contribuer à la mise en


æuvre des observations finales et les recommandations adressées au
Maroc par les organes des traités, les titulaires de mandats au titre des
procédures spéciales, ou dans le cadre de I'examen périodique

universel.

n s'agit notamment des observations finales et des

recommandations portant notamment sur la loi 03.03 relative à la lutte

contre le terrorisme et adressées par le Comité des droits de I'Homme,


par le Comité contre la torture, par le Rapporteur spécial sur la torture

et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi


que par le Groupe de travail sur la détention arbitraire.

S'inscrivent dans ce cadre, les propositions du Conseil relatives à


la précision de l'objet des infractions terroristes, à la définition de

l'entraînement pour le tenorisme, ainsi que ses propositions


concemant la notion de « l'apologie du terrorisme » et la
proportionnalité des peines prévues dans le projet de loi 86.14 .

Considérant le statut de partenaire pour la démocratie, accordé au


Royaume du Maroc par l'Assemblée parlementaire du Conseil de
l'Europe en juin 2011, le CNOH a pris également en considération le

référentiel produit par les.différentes instances du Conseil de I'Europe

en matière de lutte contre le terrorisme. C'est ainsi qu'ont été

considérés certaines dispositions de la Convention du Conseil de


l'Europe pour la prévention du terrorisme.

224
Gourr rle rkoit pénal général

Rappel des caractéristiques à considérer pour une législation


anti-terroriste protectrice des droits de I'Homme et des libertés
fondamentales

1. Considérant qu'il incombe au législateur d'apprécier la


nécessité et I'utilité de modifier la législation pénale pour renforcer le
dispositif juridique de lutte contre le terrorisme, le CNDH tient à

rappeler quelques caractéristiques à considérer dans toute démarche


d'élaboration d'une législation anti-terroriste protectrice des droits de
I'Homme et des libertés fondamentales.

A, cet effet, le premier point de la Résolution de I'Assemblée


générale des Nations unies No 60/158, adoptée le 16 décembre 2005
réaffirme que « /es Énts doivent faire en sorte que toute mesure qu'ils
prennent pour combaltre Ie terrorisme respecte les obligations qui
leur incombent en vertu du droit international, en particulier le droit
international des droits de l'homme, le droit international des réfugiés
et le droit international humanitaire »»

Dans le même sens, le huitième point de la Résolution de

l'Assemblée générale des Nations unies No 61117l adoptée le 19

décembre 2006, « Désapprowe touteforme de privation de liberté qui

soustrait la personne détenue à la protection de la loi, et demande


instamment a* litatt de respecter les garanties relatives à la liberté,

la sécurité et la dignité de la persorme et de traiter tous les


prisonniers dans tous les lieux de détention conformément au droit

225
Gours de ûroit pénal géléral æ
internation{i, y compris le droit relatf aux droits de I'homme el le
droit intemational humanitaire » La meme résolution rappelle dars
son neuvième poînt qu'il est indispensable que tous les Ëtats
<<

s'efforcent de défendre 'et de protëgü la dignité et les libertés


fondanentales des individus, ainsi que les praliques ümocratiques et
l'état de droü dans la lutte antiterroriste » Concernant la législation
nationale antiterroriste, le CNDH rappelle le sixième point de la
résolution de l'Assemblée générale des Nations unies N" 68/178

adoptée le l8 décembre 2013 qui exhorte les Etats à<< l/eiller à ce que
les lois nstiorales qui érigenl en infractiolts les acles de lerrorisme
soient accessibles, formulées avec précision, non discriminatoires,
non rétroactives et con/ormes au droil inlemational, y compris le
ùoit des ùoits de I 'Homme. >»

2 .Le CNDH constate que plusieurs législations pénales dans des


pays démocratiques avandés

ont prévu des sanctions à l'égard des infractions teroristes


commises à l'étranger par leurs ressortissants ou pax les personnes
résidant habitucllcrncnt sur leurs territoires. Cette tendance instaure
une compétence judiciaire spécifiée qui permet de poursuivre et de
condamner les auteurs des infractions à caractère terroriste.

A titre de compæaison, au Royaume-Uni, I'article 54 de la loi de


2000 relative au terrorisme qualifie comme crimes liés au terrorisme
le fait de « dotmer ou reeevoir des instructiotts ou tme formation à la

226
Gours rle üroit pénal général

fabrication ou au maniement d'armes à feu, d'explosifs, de matières


radioactives ou d'armes conç'Ltes ou adaptées pour décharger des
matières radioactives, d'armes chimiques, btologiques ou nucléaires ;

ou inciter une outre personne à suiwe pareille formation au


Royaume-Uni ou à l'étrangert. »

Concernant le financement du terrorisme, la loi néerlandaise sur

la répression du financement du terrorisme, entrée en vigueur le ler


janvier 2002, prévoit dans I'article 46 du Code pénal des sanctions
pénales applicables au financement du terrorisme. Le 14ème

paragraphe de I'article 4 du Code pénal dispose que ces actes peuvent

êtrejugés en vertu du droit pénal néerlandais et devant lesjuridictions


néerlandaises lorsqu'ils sont commis à l'étranger et dirigés contre un

ressortissant néerlandais ou lorsque le suspect se houve aux Pays-


Bas2.

La législation pénale allemande permet, en vertu des articles 129a


et l29b du Code pénal, entré en vigueur en aott 2002, de poursuiwe
toute personne qui fonde une organisation criminelle ou terroriste à

I-
Conseil de I'Europo, Comité d'experts sur le terrorisme (Codexter), profils nationaux relatifs à la
capacité de
lutte contre le tenorisme (Foyaune-Uni), avril 2007.
r- Conseil de l'Eumpe, Comité d'experts sur le tonorisme (Codexter), profils nationaux rclatifs à la
capacité de
lutte conte le terrorisme (Pays-Bæ), novembre 2008.

227
tours de üroit Pénal général ærF
l'étranger ou qui est membre d'une telle organisation, la souüent ou
recrute des membres ou des adeptes pour son comptel.

En France, la loi N' 2012-1432 du 21 décembrc2012 relative à la

sécurité et à la lutte conte le terrorisme permet, en vertu de I'article


113-13 du Code pénal2, de poursuivre tout ressortissant français ou
personne résidant habituellement en France qui aurait commis un acte

de terrorisme à l'étranger, sans attendre une dénonciation ofTicielle


des faits par l'Etat éhanger, ou de déterminer une réciprocité
d'incrimination. Cette dispositiorq introduite en 2012, permet de
poursuivre et de condamner tous les Français ou résidents habituels en

Franee qui se rendraient à l'étranger, notamment pour participer à des

camps d'entraînement terroristes3.

La loi belge modifiant la loi du 17 awil 1878 contenant le titre


préliminaire du Code de procédure pénale permet, en ce qui conceme
la poursuite de certaines infractions commises à létrangera, et en vertu

de I'article 12 du titre préliminaire de ce Code, de poursuivre en


Belgique I'auteur d'une infraction terroriste commise à l'étranger et
ce, même lorsqu'il n'est pas en Belgique. La loi du l8 février5 a inséré

r- Conseil de I'Europe, Comité d'experts sur le terrorisme (Codexter), profils nalionaux reldifs à la
capacité de lutte contr€ le tenorismc (Allemagne), novembre 20 I I
1- - Art. 113-13 du Code pénal : « l"a loi
Jünalefrançaise s'appliqre au tirftes et délits qtulifiés
d'actes de lenorisme et réprimés por le tilre II du lûre IV commis à l'étanger pot n Frunçais ou par
une persorue rhifunt habituellement sur le teftiloirefranlais.»
3conseil d" I'Europe, Comilé d'exp€rts su le terorisme (Codexrer), profils ndionaux relatifs à la
capacité de lutte contre le tenorisme (France), septembre 2013'
4
- Publié au Moniteur belge du 7 mars 2012.
5
- Publié au Moniteur belge du 4 mars 2013.

228
Gours de drolt pénal g6néral

un article 140 quinquiesl qui sanctionne toute personne qui, en

Belgique ou à l'étranger, se fait donner des instnrctions ou suit une


formation en vue de commettre des infractions terroristes2.

En Autriche, I'article 64 (§l alinéa 9) du Code pénal érige la


participation à des camps terroristes à l'étranger en infraction
punissable en vertu du droit autrichien, et cela même si elle n'est pas

punissable dans le lieu de forrration à l'étranger3.

Les expériences comparées précitées montrent les tendances

actuelles en matière de criminalisation des actes terroristes commis à

l'étrnnger. Elles peuvent inspirer le législateur sur les stratégies de


qualification juridique de ces actes, stratégies qui s'inscrivent

généralement dans une logique prudentielle visant à définir, le plus

étroitement possible, les éléments constitutifs des infractions


terroristes.

3 .Le CNDH rappelle par ailleurs plusieurs recommandations


relatives à la législation antiterroriste adressées au Maroc par les
organes des traités et par les titulaires de mandats au titre des

procédures spéciales. Le Conseil invite le législateur à les mettre en


(Euvre, non seulement à I'occasion de la discussion du projet de loi

|- Art l4O qünquic ; « Sans préjudice de I'qpliution de lbrlicle 140, toute Wr§orrne qui, en
Belgique ou à l'élranger, se fait domer des insîttcrion§ ou suil ure îoûnalion visées à l'urticle
l41qrnter, enwe de commerlre l'rme des infraaions ÿisées à I'drticle 137, à l'excepfion de celle visée
à l'articte ti7, § 3, 6', wro pmie de la réelwion de cinq ans à dix aw et d'tme anende de ænt euros
à cinq mille ewos.»
r- Conseil de I'Europe, Comite d'experts sw le terrorisme (Codexter), profils nalionaux relatifs à la
capacité de lutæ conlre le terrorisme (Belgique), février 2014
I-
Conseil de I'Europe, Comité d'experts sur le termrisme (Codexter), pmfils nationaux relatifs à la
crpacité de lutte contrc le terrorisme (Aurriche), aott 201 2.
229
Goun rle droit pénal général

86.14 objet de ce mémorandum, mais également à l'occasion de la


révision prochaine du Code de procédure pénale et du Code pénal.

A cet effet, le Conseil rappelle que le Comité conffe la torture


s'est préoccupé du fait que « la loi N" 03-0i de 2003 contre le
terrorisme ne contient pas de définition précise du terrorisme,
pourtætt requise par Ie principe de légalité des infractioru. » ll a
recommandé au Maroc de « revoir sa loi antiterroriste no 03-0j afin

de mieux définir le terrorisme, de réduire la durée maximale de la


gorde à vue au strict minimum et de permettre I'aceès à un avocat dès
te début de la détention »1.

Dans le même sens, le Groupe de travail sur la détention arbitraire

a recornmandé au Maroc de << modifier la loi antiterroriste Qrlo B-A3)


en vue de remédier à la dëfinition vague du crime de terrorisme et de

réduire la durée de la gorde à vue. »>2 Le Rapporteur spécial sur la


tortue et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, a émis la même recommandatioq dans le 87ème

paragraphe (point e) de son rapport de mission au Maroc3.

1- 3l
Quarante-septièrne session, octobre-2S novembre 2011, exsmen des rapports pésentes par'les
Éats parties en application de I'artiole19 de Ia Convention, Obaervations linales du Comilé conte la
torture, Maroc, CATiCÀ,fARJCOi4 2l décembre 201 I (§8).
' - NI]FtC/27t48t 4 aott 2014, Rapport du Groupe de travail sur la détention uüitraire additi{, Mission
au Mlro€ (§83, point c).
'- Ruppo.t du Rapporteur spécial sur Ia torhre et âutr$ p€ines ou fsitements cruels, inhumains ou
dégradants, Juan E- Méndea A4IRC/22/531 Add.2, 30 avril 2013,
« modifi* la loi (no 03-03) conlre le lerrorisme de fapn ù rüuire le ülai de garde à vue de quutre-
ÿingt-seize heur6 (renonvlables detu fois). »»

230
Coun de rilroit pénal général

Il est à souligner également que le Comité des droits de I'enfant a

émis des recommandations en matière d'incrimination de recrutement

et de I'utilisation des enfants par les groupes armés non étatiquesl.

Le Comité a recommandé, par ailleurs, d'établir la compétence


extraterritoriale pour les actes prohibés par Ie Protocole facultatif à la
Convention relative aux droits de l'enfant, concemant l'implication
d'enfunts dans les conflits armés, y compris la conscription ou
I'enrôlement d'enfants dans les gloupes armés, ou leur utilisation aux
fins de participation active à des hostilités2.

4. Partant de ces éléments, le CNDH invite le législateur à


considérer dans toute démarche d'élaboration de la législation

antiterroriste les caractéristiques cumulatives définies par I'ancien


Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de
l'Homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, M.
Martin Scheinin.

1
- « 16. Le Conttê recommmde à l'Ént portie de prccéder à we étude ethsustive de sa législAion de
façon à la retdre ænforme aux principes et dispositions du Pruocole facttkUtf et' en prticulier _:^
a)'d'interdire et d'inirimfuer eiryessément le iecrttement et I'utilisation d'er{aas de moins de I8 aw
"

dans des hostilités par lesforces armées, des gtoupes armés non étatiques et des sociéres
de séctrité.»
CnClClOpeCnrfÂruCg/j, 13 novembre 20i4, Comité des droits de l'enfant, Observqtions finales
cancernant le
rapport soumis par le Maroc en application du paragaphe l- de. l'article 8 du Protocole facultatif à la
Convention rel*ive aux droits de i'Lnfant, concernant l'implication d'enfâDts dans les conJlits armés
2
- « IE. Le Comité recommande à l'Élal polte d'exercer sa comçÉlence erlrulefiitoriale pow let
ac,tes prohihés par le Pîolocole lacultatif, y compris la cowcription ou l'enrôlement
d'et{ants dans
les {orcet orrér, ou des gronpes armés, ou leur dili§aliofi aut liw de wticipotion
aetive à cles
petsonræ
hoititttés, si ces infractiot§ sont commise§ Por ou coilre un ressottissaü marocain ou une
qti entirîenr tm'lien érrott nec l'Éru pttie. » CRC/C/OPAC/MARICO/1, 13 novembre 2014,
ôomité des droits de I'enfant, observatlons finales concemant le rapport soumis par le Mùoc en
de
appti"*ion du paragraphe I de l'article E du Protocole factltâtif à la Convention relalive aux droits
l'âfant, concemant l'implication d'enfants dans les conflits armés'
ztL
Gonrs de rlroit pénal général æ
Ce demier a precise dans son rapport de 20051 les caractédstiques

auxquelles doivent obéir toute stratégie de rédaction des dispositions


pénales visant à criminaliser le§ actes tenorisles.

Selon lui, «L'aepression «infractions terroristes» ne dewait


s'entendre que des acles répondant aux trois coractétisriques

cumulstiÿes suiÿantes : a) commis dans l'inlention de causer la mort


ou des blessures graves, ou la prise d'otages ; b) ayant pour objet de

serner la lefleur, d'intimider une population ou de coüraindre un

gouverfiement ou tme orgonisation intenationale à accomplir un acte

ou à s'abstenir de le faire ; et c) constituanr des infractions ou regard

et selon les déJinitions des convention§ et protocoles internationaux


relatifs au terrorisme. De même, en ce qui concerne les

comportements constituafit un appui à des infractions terroristes seuls

devraient être inûiminés ceux qui présentenl toutes le§

caracléristiques susmentionnées. IJ esl important par ailleurs que les


Etats veillent à ce que les dispositions législatives interdisant le§ actes

terroristes soient accessibles, formulées avec précision, applicables


uniquement à la lutte conlre le terrorisme, non discriminatoires et non

rétroactives. »,

De l'avis, du CNDH, la prise en compte de ces caractéristiques,


retenues pü ailleurs par la résolution 1566 (2004) du Conseil de

pronotion et la P.olection
'E;/CN.4/2006D8, 28 dêc.mbre 200J, Rrpport dù Rspponeùr spécisl sÙr ls
des dmits dc I'Homme €d dls lib€rtés fordaûeniales drrs L luse a it€nori§&. Mariin Scheioin (§
72\.-
2t2
Gours de drolt p6nal g6n6ral

sécuritéI, permettra non seulement d'éviter d'étendre inutilement la


portée du droit pénal mais conhibuera également à la réduction des
risques juridiques inhérents à la qualification large des infractions à

caractère terroriste.

- S,nfSltSOO IZOOI), adoptée par te Conseil de sécuriæ à sa 5053ème #ance le 8 octobre 2004. (§3).
1

233
Gonrs dc rlrolt tr5lal g6léral æ
Recommandations concerncnt certaines dispositions du projet
de loi 86. 14

5. Le CNDH constale que la formulation de l'article ler du projet


de loi qui insère dans le Code pénal un nouvel article répond
globalement aux critères d'me législalion antiterroriste protectrice des

droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Le CNDH note


également que la formulation des dispositions relatives à la t€ntative

dans les trois premiers paragraphes de I'article 218-l n'a pas dérogé
aux dispositions génénles régissant la tentative dans la législation
pénale nationale (articles I l4- I l7 du Code pénal).

6. Le Conseil note toutefois la formulation hop générâl€ du terme

« quel que soit son objectif » Cette formulation risque de confondre


aux niveaux des mobiles, des caractéristiques €t des objectifs, les
infractions à caracêre terroriste avec les infractions commises par
d'autres groupes criminels organisés.

A ce titre, le Conseil rappelle que I'annexe à la rccommandation

Rec (2001)ll du Comité des ministres aux Etats membres du Conseil


de l'Europe' défrnit le « groupe criminel organisé » comme ëtant « un
gro pe sfrucluré de trois personnes ou plus existant depuis un certain

temps ef agissqnt de co eert dans le but de commettre tme ou


plusieurs infractions graÿes, pour en tirer, directement ou
indtreclement, un aÿantage /inancier ou matériel. ). Cette définition

' - Adopüj€ p3r le Comité d€s miristrcs le 19 septembrs 2001

234
Gours de ùrolt p6nal g6néral

présente une différence notoire par rapport à l'objet des infractions à

caractère terroriste. Le point (b) des caractéristiques données par


l'ancien Rapporteur spécial M. Martin Scheinin précise que les
infractions terroristes ont pour objet de << de semer la lerreur,
d'intimider une population ou de contraindre un gouÿernement ou une
organisation internationale à accomplir un acte ou à s'abstenir de le

faire, »

Partant de ces éléments, le CNDH propose d'introduire entre le

premier et le deuxième paragraphe de I'article 218-l-1 une disposition

qui définit clairement, aux fins de la législation antiterroriste, l'objet


des structures terroristes dans les limites données au point (b) des

caractéristiques précitées.

7. Dans le même sens, et a{in d'éviter toute limitation non

nécessaire au droit de circuler librement garanti par l'article 24 de la

constitution et I'article 12 du Pacte international relatif aux droits


civils et politiques, le CNDH propose d'introduire entre le deuxième
et le troisième paragraphe de l'article 218-l-1 une disposition qui
défrnit l'entraînement pour le terrorisme, comme étant le fait « de
donner des instructions pour lafabrication ou I'utilisation d'explosifs,

d'armes à feu ou d'autres afines ou substances nocives au


dongereuses, ou pour d'autres méthodes et techniques spécifiques en

vue de commettre une infraction terrori§te ou de contribuer à sa

23s
Gours de droit pénal g6néral

comrnission, sachætt que laformation dispensée a pour but de servir à


la réalisation d'un tel objectif, »l
I

8. Au-delà du projet de loi objet de ce mémorandum, et pour


rendre la législation antitenoriste uniquement applicable à la lutte
conhe le terrorisme, le CNDH propose au législateur d'amender le
premier paragraphe de I'article 218-l du Code pénal2 en vue de le
rendre conforme avec Ia définition de l'objet des infractions teroristes

donnée par I'ancien Rapporteur spécial.

9. Le CNDH, tout en reconnaissant les risques de confusion

sémantique entre les termes « groupes armés non étatiques )) et «


groupes terroristes » recommande au législateur de s'inspirer de la

recommandation du Comité des droits de l'enfant qui concerne


l'utilisation et le recrutement des enfants par les groupes armés non
étatiques, pour insérer enhe le quatrième et le cinquième paragraphe

de I'article 218-l-l du projet de loi, une disposition qui prévoit le


recrutement et l'utilisation des enfants par les structures terroristes
comme circonstance aggravante.

10. Concemant I'article 2 du projet de loi, le CNDH est préoccupé

par le fait que la formulation du deuxième paragraphe de l'article 218-

2 du p§et de loi tend à élargir la portée du crime d'apologie du


terrorisme, en y ajoutant d'autres synonymes (propagande, promotion)
I-
cette définition est prénæ à I'article 7 de la convention du conseil de l,Europe pour la prévcntion
du terrorisme.
2- Article
2ls-l (§l) du code péral æ:rlrr,l « constituent des actes de tenorisme, lorsqu,elles sonl
intenlionnelleftrenl en relaîion.Nec une entreprise individuelle ou collective ayant potr bu lhueinte
grave à l'ordre public par I'intimidarlon, la terrew ou la vlolerce, tes lnfrrctions suivantes : .., »

236
Gours üe rlroit pénal général

qui réduisent la clarté de la définition de cette infraction. Cette


tendance qui s'inscrit dans la logique de définition large de I'apologie

du terrorisme prévue au premier paragraphe de l'article 218-2, a été


critiquée régulièrement par les organes des traités et les titulaires des
mandats au titre des procédures spéciales. Le CNDH rappelle à cet

égard une des observations finales adressées au Maroc par le Comité

des droits I'Homme dans le cadre de I'examen de son rapport


I
périodique . Le Comité a recommandé au Maroc de modifier la

législation antiterroriste en définissant clairement sa portée.

A cet effet, le CNDH recommande au législateur de résoudre le

problème de formulation des infractions prévues à l'mticle 218-2 du


Code pénal et ce en remplaçant le terme apologie par le terme plus
précis de provocation publique à commetfe une infraction terroriste.
Le Conseil propose au législateur de s'inspirer des dispositions de

I'article 5 de la Convention du Conseil de I'Europe pour la prévention


du terrorisme qui définit la « provocation publique à commettre une
infraction terroriste )) comme étant : « la dffision ou toute autre

forme de mise à disposition du public d'un message, avec l'intention


d'inciter à la commission d'une infraction terroriste, lorsqu'un tel
comportement, qu'il préconise directement ou non la commission

d'infractions terroristes, crée un danger qu'une ou plusieurs de ces

Wactions puissent être commises ». Le même article recommande


atu Etats membres du Conseil de I'Europe d'adopter les mesures qui
1- Comité des dmits de I'Homme : CCPUCO/E2IMAR; I décembre 2004' obsorvation§ finales du

Comité des droits de I'Homme i Maroc'


237
Gourc de droit pénal général

s'svèrent nécessoires pour ériger en infraction pénale la provocation


publique à commettre une infraction terroriste « lorsqu'elle est

commtse illégalement et inlentionnellement. »

Dans le même cadre,'le CNDH propose de remplacer les termes r<

apologie », << propagande » et <t promotion » prévus au deuxième


paragraphe de I'article 218-2 par une disposition qui criminalise
I'utilisation des moyens prévus au premier paragmphe pour inciter
publiquement à rejoindre les groupes terroristes.

I l. Le même raisonnement s'applique aux dispositions de I'article

3 du projet de loi qui vise à modifier l'article 218-5 du Code pénal. Le

CNDH propose de remplacer l'expression « persuade auftui » par


deux expressions plw claires sur le plan normatif : l'incitation et la
provocation ainsi que le détoumement pour le cas des mineurs.

12. En attendant la refonte de la législation pénale matérielle et


procédurale, le CNDH invite le législateur à :

U Evaluer la proportionnalité des peines préwes aux articles I


(paragraphes 4 et 5) et 3 du projet de loi ;

! Etudier la possibiiité de délictualiser la tentative de rejoindre


des groupes terroristes, sachant que cette tentative est qualifiée comme

crime dans le projet de loi ;

tr Etudier la possibilité de prévoir des peines altematives et des


mesures de contrôle judiciaire (ex : bracelet électronique) pour

238
Gours de rLoit p6nal géaéral

sanctionner la tentative de rejoindre des groupes terroristes etlou de

suivre un entraînement pour le terorisme ;

! Etudier la possibilité de réduire la fourchette des peines


prévues aux articles 1 (paragraphes 4 et 5) et 3 du projet de loi afin de

mieux cadrer le pouvoir discrétionnaire du juge pénal.

13. Le CNDH rappelle enfin que l'élaboration d'une législalion

anlitenoriste protectric.e des droits


-de I'Homme et des libertés
fondamentales, nécessite, au{elà de projet de loi objet de
cemémorandum, la révision de plusieurs dispositions du Code pénal et

du Code de procédurepénale. A ce titre, le CNDH a l'honneur de

mettre à la disposition de la Chambrc des représentanls s€s

mémorandums sur I'avant-projet de Code de procédure pénale et sur

les peines altematives. Il attire également I'attention, dans le contexte

de lutte contre le terrorisme, sul la nécessité du renforcement de la


protection juridique des personnes placées en garde à vue, sur la
question de révision du régime d'établissement des preuves et la

procédure d'exhadition.

239
Gous rle rilroit pélal gél6ral

Dahir no l-1ÿ53 du 1" chaabane 1436 (20 mai 2015) portânt


. promulgrtion

de le loi no 86-14 modiliânt et complétânt certxines


dispositions du Code pénal

et de ls procédure pénale relatives à la lutte contre le


terrorisme.
-
Bulletin olliciel no 6366 du 16 chagbane 1436 (4-G2015)

LOUANGE A DIEU SËUL!


(Grand Sceau de Sa Maje*é Mohanned YI)
Que I'on sache par les présentes - puisse Dieu en élever el en
fortifier la teneur!
Que Notre Majesté Cherifienne,
Yu la Corufilution, notsnment ses articles 42 et 50,
A DECIDE CE QAI SUIT
Est promulguée et sera publiée au Bulletir oficiel, à la suire du
présent dahir, la loi n" 86J4 modifiant et complétafi certoines
disposilions du Code pénal et de Ia procédure p&ale relatives à la
Iutle contre Ie terrorisme, telle qu'adoptée par Ia Chambre des
représentants et la Chambre des conseillers.

Fait à Cqsablanca, le l" chaabane 1436 (20 mai 2015)


Pottcofltres eing:
Le Chef dugouvenæment,
ABDEL.ILAH BENK]RAN,

240
Gourr üe rilroit p6nal g6nérd

Loi no 8G14

modiJîant et complétant certaines dispositions du Code pénal

et de la procédure pénale relatives ù la lutle

contrc letenorkme

Afiicle I
Les dispositions du chapitre premier bis du titre premier du livre
III du Code pénal approuvé par le dahir n'l'59-413 du 28 joumada II
1382 Q6 novembre 1962) sont complétées comme szit'

Articte2tS-1-1. - Constituent des infractions de tetorisme les

actes suivonts:

- te fait de se rallier ou de tenter de se rallier


indiüduellement ou collectivement, dans un cadre organisé ou non, à
des entités, organisations, bandes ou groupes, tefforistes, quel que

soit leurforme, leur obiet, ou le lieu où ils se trowent situés, même si

les actes terroristes ne visent pas à porter préiudice au Royaume du


Maroc ou à ses intérêts;

_ le fait de recevoir ou de tenter de recevoir un entraînement


ou une formation quelle qu'en soit la forme,
la nature ou la durée à

l'intérieur ou à I'extérieur du Royaume du Maroc, en vue de


commettre un acte de terrorisme à I'in\érieur ou à l'actérieur du

Royaume, indépendamment de la surÿenance d'un tel acte;

24t
§ours de droit pénal général .

- le fait d'enrôler par quelque moyen que ce soit, d'entrsîner

ou de former ou de tenter d'enrôler, d'entraîner ou de former une ou


plusieurs personnes, en ÿue de leur ralliement à des entités,

organisations, bandes au groupes, terroristes à I'intérieur ou à


I'extérieur du territoire du Royaume du Maroc.

Les actes préci\és sont punis de la réclusion de cinq à dix ans et

d'une amende de 5.000 à 10.000 dirhams.

Les sanctions prévues à I'alinéa précédent sont portées au double

lorsqu'il s'agit d'enrôler, d'entraîner ou de former un mineur ou


lorsque, pour y procéder, la supervision des écoles, irntituts ou
centres d'éducation ou deformation, de quelque nature que ce soit, a
été exploitée.

Toutefois, lorsque I'auteur de I'infractian est une personne


rnorale, il est puni d'une amende de 1.000.000 à 10.000.000 dirhætts

en prononçant à son encontre la dissolution ainsi que les mesures de


sûreté prévues à l'article 62 du présent code, sous réserve des droits

des tiers et sans préjudice des sanctions qui pourraient être


prononcées à l'encontre de ses dirigeants ou agents ayant commis ou

lenté de commettre l'infraction.

Article 2

Les dispositions de l'article 218-2 du code pénal précilë sont


complétées par le deuxième alinéa suivanl:

242
Gours de droit pénal général

Artîcle 218-2 (deuxième alinéa).- Est'puni de la même peine,


quiconque fait, par I'un des moyens prevus au premier alinéa du
présent article, la propagande, I'apologie ou la promotion d'une
personne, entité, organisotion, bande ou groupe lerroristes.

Toutefois, lorsque l'auteur de l'infraction est une personne


morale, îl est puni d'une amende de 1.000.000 à 10.000.000 dirhams

en prononçant à son encantre la dissolution ainsi que les mesures de


sûreté prévues à I'article 62 du présent code, sous réserve des droits

des tiers et sans préjudice des sanctions qui pourraient être


prononcées à I'encontre de ses dirigeants ou agents ryant commis ou
renÉ de commetlre I'infraction.

Article 3

Les dispositions de I'article 218-5 du code pénal précité sont


modiJiées comme suit:

Arttcle2lS-5.- Quiconque, por quelque moyen que ce soit,


persuade, incite ou provoque autrui à commettre l'une des infractioru
prévues par le présent chapitre, est punî de la réclusion de cînq à dix

ans et d'une amende de 5.A00 à 10.000 dirhams.

Les sanctions prârues à I'alinéa précédent sont portées au double

lorsqu'il s'agit de persuader, d'inciter ou de provoquer un mineur ou

lorsque, pour y procéder, la supervision des écoles, instituts ou

centres d'éducation ou de formation, de qaelque rnture que ce soit, a

été exploitëe.
241
Gours de rilroit pénal générd

Toutefois, lorsque I'auteur de I'infraction est une personne


morale, il est puni d'une amende de 1.000.000 à 10.000.000 dirhams

en prononçant à son eniontre l.a dissolution ainsi que les mesures de

sûreté prevues à l'article 62 du présent Code, sous réserve des droits


des tiers et sans prëjudice des sanctions qui pourraient être
prononcées à I'encontre de ses dirigeants ou agents ayant commis ou

tenté de commettre I'infraction.

Articlc 4

Les dispositions de I'article 49 de la loi no 22-01 relative à la


procédure pénale promulguée par le dahir no 1-02-255 du 25 rejeb
1423 (3 octobre 2002) sont complétées ainsi qu'il suit:

Article49.- Le procureur général du Roi


d'appel.

Il exerce en ÿertu de I'article 17 ci-dessus de police


judiciaire.

Il a, dans l'exercice de ses fonctions ,..... .,,. directement


laforce publique.

Il reçoit les plaintes qu procureur du Roi


compétent.

Il procède à leurs poursuites,

2M
Cours rle iroit p6nal générd

Le procureur général du Roi saisit décision toujours


révocable.

Il saisit ces juridictions ...... aux mesures d'instruction.

Il a le droit.. et d'arrêt.

Il requiert l'application et d'y statuer,

Il utilise les décisions rendues,

Il peut ., ou son infirmation.

Il peut susceptibles de confiscation.

Il veille à I'exécution ... ... ... des juridictions de jugement.

Il o le droit du retard de I'enquête.

Toutefois, lorsqu'il s'agit des infractions de terorîsme, la durée

de retrait du passeport de la personne suspecte et la fermeture des

frontières à son encontre est portée à six mois prorogée une seulefois.

Ce délai peut être prorogé iusqu'à la clôture de l'enquête


préliminaire lorsque celle-ci accuse tm retard du fait de la personne
intéressée.

Dans tous les cas, les deux mesures précitées prennent fin
des deux mesures ont pris Jin.

Aa suite sans modiJication.)

245
Cours de droit pénal général æ
A icle 5

Les dispositions du türe II du livre VII de lq loi n" 22'01 relative

à la procédure pénale sasvisée sont complétées ainsi qu'il suit:

ArtieleTll-1.- Nonobstanl loule disposition lëgale contraire, est

pourstivi et jugé deÿqnl les juridictions marocaines compélenles tout


maroeain ou étranger qui, hors du Royaume, a commis comme auteur,

co-auteur ou eomplice, une infraction de terrorisme qu'elle vise ou


non à porter préjudice au Royaume du Mtoc ou à ses intérêts.

Toutefois, lorsque les actes de lerrorisrt e ne ÿisent pas à porter


prQudice au Royaume du Maroc ou à ses intérêts et lorsqu'ils sont
commis hors da Royautne par un étrang* comtne a leut, coauleur ou

complice, il ne pourra être poursuiÿi et jugé qte s'il se trorme sur le

tefiüoire nationql.

La poursuile ou le jugemert de I'occusé ne peut avoir lieu s'il


justifre aÿotr été jugé à l'étranger pour Ie même fait par une décision
c))qnt acquis la force de la chose jugée el, en cas de condamnation,

avoir subi sa peine ou s'iljustifie Ia prescrîplion de celle-ci,

Le terde en langue urabe a éU ptùlié daw l'éüf,an gén&ale du


«Buttetln offlcieb» no 6365 du 13 chaabane 1136 (14 juin 2015).

246
Gours rle droit pénal génétal

frma6rl[hm
Introductlon 3

Partle l: L'infraction: obiet du droit pénal.... 5

Cluplb 1- Cordd6rüom hlsbdquce cur le dnlt p6nal 6

§rcilool. I'&olullor dr dreh plml 8

A. De la vengeance privée à la justice privée 9

B. L'apparitiondelajusticepublique...... .,...................12
ll- L'influence des doctrines successives.................. ......14

B- L'école classique ........,,..... L5

C -L'école néo-classique................. ...........15

D- L'école positiviste .,...........18

E- L'école de la défense sociale nouvelle...... ...,.....,.......21

§2- Particularités du droit pénal marocain ....................22

l. La période pré-protectorale 23

A. Le droit pénal coutumier 23

ll. La pérlode protectorale 27

A. La survivance de la justice coutumière ..................,.28

247
Gours de rlroit pénal général

B. L'élargissement de la justice Makhzen .....,.......,......31

lll. La période de l'indépendance.......... 32

§ürlü 2r b tlrnclSrlrilôurr du ùoh pôrd 35

§1- Le droit pénal est positif et juridique 36

I - Le droit pénal est Positif.......... 36

ll -Le droit pénal est juridique ...,..... 36

§2 : Le droit pénal est répressif et préventif 37

| - Le caractère préventif du droit péna|........... 38

ll - Le caractère répressif de la loi pénale......,.. 38

§3 - Diversité du droit pénal 40

| -Les branches juridiques du droit pénal 40

A- le droit pénal de fond 40

B - Le droit pénal de forme........,. 42

ll- L'aspect scientifique du droit pénal 43

A- La criminalistique..,..... M
B - la criminologie,..,........ 45

C - La politique criminelle 46

§4 - Le particularisme du droit péna1..... 47

| -Le rattachement du droit pénal au droit public 47

ll- Le rattachement du droit pénal au droit privé 48

lll -La prétention autonomiste du droit pénal :..................................49

Chapltrc 2 : Ulnfiacüon pénale: dhtrlct6 dcompldtâ.................. s1


.28
Cours rile rilroit p6nal générd

S.Gtlon I r Dlnnlrt d'qproôr.. ...,............52

§1 - Renoncement aux définitions idéales de l'infraction....,............52


l. Définition morale de l'infraction.................. ......,.....53

ll. Définition sociologique de l'infraction .....;....................,..............54

§2- Spécificités de la définition juridlque de l'infraction 55

I civil.....
-Délit pénal et délit ...................,. 56

ll. Délit pénal et délit disciplinaire............ ..,.....,..........57


toctlcrt r b dlmrurdo lrlraaloo ........60

§1- Classifications fondées sur l'élément léga1......., ......60

l. La classiflcation fondée sur la gravité de l'infraction 60

A. lntérêts de la division tripartite de l'infraction 62

b. Du point de vue des règles de fond 53

B. Critiques de la distinction 63

a. L'i11ogisme.................. ......63

b. Le caractère artificiel .......64

C. Difficultés d'application:.........,...... ...,..64

a. Les peines hybrides ...........æ

b, La qualification de l'infraction .....,.........64

ll- Classifications fondées sur la natu re de l'infraction ...................... 66

A. lnfraction de droit commun et infractions politiques ..................65

a, Le débat doctrinal 66

249
Cours r e rLoit pSnal général æ
b. Critères de distinction......,,.......... 67

c. lntérêts de la distinction........,....' 68

B. lnfraction de droit commun et infraction mi1iteires.....................59

a. Notion de l'infradion militalre....".-.".'..'.. 70

b. lntérêts de la dislinction,...............,.. 7L

c- lnfrâction de droit commun et infraction terroriste......,.,,,,..,.......71

a. Critère de distinction

§2- Classifications fondées sur l'élément matériel 14

l. Le critère quant au mode d'exécution.............',.'.........'......'....'..74

A. lnfractions instantanés et infractions continues...... 74

a. Eléments de distinction ....,....'...". 75

b, lntérêts de la distinction ,............. ..,..............' 76

B. lnfraction simples et infractions d'habitude (acte unique ou


pluralité d'actes). 77

a. Critères de distinction............... 77

b-Effets de la distinction......,........ ...,..,79

ll. Le critère quant au résultat 80


tous rle rkoit p6ml gén6ral æ
lll.critèrê quant au moment de lâ constation de l'élément matérlel.81

§3 - Classifications fondées sur l'élémênt moral 81

B. Lâ qualification des faits 92

a. Les lnstances de qualification...... ..........'.....,.93

b. Les problèmes liés aux qualifications multiples ,.,........................94

1. Qualifications incompatibles......,... .........'......95

2. Qualiflcetlons alternatfues....... 95

25t
tours üe rlroit pénal général æ
Srilr tr t'ctf0tltlü .. h Ll railL...... ... .....',..98

l. fapplication de la loi pénale dans le temps .....,..,'.'.......'..'...'.....98

A. Le principe de non rétroactivité de la loi péna|e.........................' 98

B. Atténuations au principe ................ .'.'...........99

a. Rétroactivité au de la loi nouvelle plus douce 99

b- L'application immédiate des lois nouvelles de forme ....'....'..."..102

ll. L'application de la loi pénale dans l'espace ,..,..................'..'.'...103

A. Les infractions commises âu Maroc 103

a. L'étendue du territoire marocain... 103

b. faffirmation du prlncipe de la territorialité péna|e.,........'..,.'... 104

8. Les infractions commises à l'étranger.,............'.......".......',.......105

a. lnfraction commise par un mârocain ............,...............'........'... 105

b. lnfraction commise par un étranger 106

l«llon! r hl hlh lrrllf.ollft 108

b- Défense nécessaire et mesurée 118

B. L'état dê nécessité et la contrainte......'....'................ '.......,.'. '... 119


2s2
Goun rle rhoit pénal g6néral æ
â- L'état de nécessité 120

Cfiaplhe 2 : lJdlémoil maédd L28

Srcllor I r I'llln.trl rt&hl dr h nfombllltl p&dr,....,............. 130

§1- le comportement L30

l. [e délit d'action (ou de commission) et délit d'omission........... 130

ll. Le délit de commission par omission r32


§ Z- Le résultat.,... 133

lll, Position du problème.........,....... 134

lV. Solutiondoctrinales..,.,............. 135

A, La théorle Obiective 136

B. La théorie subjective..........,........... L37

C. lllnfluence de ces théories sur le droit marocain t37


lll. La tentative 138

A. Lâ tentative interrompue.......,..... 139

a. Le commèncentd'exécut1on...,.,.. ......,......... 139

1. Les propositions doctrinales.......,, .,.,,....,..,.. 140

2- La posltion du droit positif L42


Gourr de droit pénal général

a. L'infraction manquée 146

b, impossible
L'infraction ..............',.'.'..' 147

s.Glbr t rl'lllrul,ttofi.f dolr t'hftrralor ccoubr à pludrun.....150

§-1 la coaction 150

L L'auteur et le coauteur .,,...........,... .... 151

ll. coaction.
Cas de ........'.... 152

§2- La complicité.,.....,..... ...' 154

l. Les différentes conceptions de la complicité.............................155


A- Le système de la criminalité d'emprunt... ..............155

B- Le système du délit distinct........ .........156

C- La position du droit positif marocain L57

ll- punissable...
Les conditions de la complicité ...........L57

A-L'élément légal de la complicité ..........158

B. L'élément matérielde la complicité 159

C-L'élément moral de la complicité ....'...161.

Chaplue 3 : Uâément moraldo I'lnfracüon ................. ..................!62

§rrller I r ..,.......
lrl drgrtr dr l'flaü.il rnonl .............154

§1-La faute intentionnelle.....,........... ...,..164

A- Le dol général .................164

a- Le dol général et la structure matérielle de l'infraction ,.,,..........165

b- Le dol général et la structure légale de l'infraction.........,.,,........ 166

C- Le dol général et le mobile. .................167


254
Gours rle droit pénal g6n6ral

a-Distinction selon l'objet recherché.... .....,.................171

b-Distinction selon l'intensité du résultat recherché 172

§2- La faute non intentionnelle............ ............,..........174


A- La faute consciente... .....L75

B- La faute inconsciente .....t76


trclcr t r tr dbporhlon d. fallril rorul r he ourl dr nr-
hrprrrillltl, ..... 178

§1- L'altération mentale.. ..".L79

A- Le trouble des facultés mentales 180

a. Les conditions du trouble mental 181

1. L'actualité du trouble mental. L82

2. Uexcluslvité du trouble mental...... 183

b. Les effets du trouble menta1......... 183

3. Les effets au niveau civll t84


B- L'affaiblissement des facultés mentales 185

§2- La minorité pénale 187

A- tlirresponsabilité du mineur de 12 ans.... .............. 188

l. Fondement doctrinal 189

ll. Dispositif de protection ..................... 190

B- L'excuse de minorité 191

l. Le principe : une responsabilité partielle.... ........... 192

255
Goun rle droit p6nal g6n6ral

256

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