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Economie et statistique

Les mots et les chiffres : les nomenclatures socio-professionnelles


Monsieur Alain Desrosières, Laurent Thévenot

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Desrosières Alain, Thévenot Laurent. Les mots et les chiffres : les nomenclatures socio-professionnelles. In: Economie et
statistique, n°110, Avril 1979. L'intérim dans l'industrie / Qualifications ouvrières / Une réalité: le pays / La percée de la télé-
couleur / Comprendre une nomenclature. pp. 49-65 ;

doi : https://doi.org/10.3406/estat.1979.4260

https://www.persee.fr/doc/estat_0336-1454_1979_num_110_1_4260

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Résumé
Les études socio-économiques françaises font un large usage, non seulement de variables explicatives
économiques classiques comme le revenu, mais aussi de découpages en catégories
socioprofessionnelles lesquelles constituent une approche empirique de la notion usuelle de milieu
social. La réflexion sur les nomenclatures et en particulier sur celle des catégories
socioprofessionnelles est tout d'abord un rappel : tout classement est une construction, et comme telle,
il a des répercussions sur les analyses que l'on peut faire dans le cadre qu'il détermine. A cette
occasion il est montré que la nomenclature des catégories socioprofessionnelles n'est ni un reflet
naturel de la réalité, ni une construction totalement logique. Elle est ancrée sur des archétypes de
profession et de ce fait chaque rubrique cristallise un jeu d'attitudes et de situations originales. Ce
faisant, ce découpage conduit plutôt à envisager une juxtaposition de zones présentant des logiques
locales assez spécifiques et à étudier des systèmes de différences ou d'inégalités et non des pratiques
isolées. Enfin il est nécessaire de bien connaître les méthodes de collecte, de traitement et d'analyse
des informations aboutissant à ces catégories pour apprécier la portée des études qui les utilisent :
fécondité, mobilité, comportements de consommation...

Abstract
Words and figures : social and professional classification - French social and economic studies are
using not only classical explanatory variables, such as income, but also social and professional
categories which constitute an empirical approach of the common idea of social background. This
thincking over of classifications and, in particular, socio-professional categories is first and foremost a
reminder that any classification is an artificial building up and, as such, will inevitably have
repercussions upon the analyses performed within the framework which it defines. On such occasion, it
is pointed out that socio-professional categories classification is neither a natural reflection of reality,
nor a complete logic design. Classifications are inevitably rooted in archetypical notions about jobs
and, thus, each category invariably gives structure to an integrated pattern of unique attitudes and
situations, and thus reminds us of the multidimensional nature of all social phenomena. In such a
manner that this distribution leads rather to contemplate a juxtaposition of areas which present rather
specifical local logics and to examine differential or inequalities systems and not independent
applications. Finally, it is convenient to be properly acquainted with data collection, processing and
analysis resulting in these categories which allow estimating the value of the studies which make use
of them : fertility, mobility, consumers' behaviour.

Resumen
Palabras y cifras : las nomenclaturas socio profesionales - Los estudios socio-econômicos en Francia
utilizan no tan solo variables explicativas económicas de tipo clásico tal como el ingreso, sino también
de distribución por categorías socioprofesionales, las que constituyen un aproche emplrico del
concepto sumamente corriente de ambiente social. El considerar las nomenclaturas, en especial la de
categorías socioprofesionales constituye, en primer lugar, una evocación: toda clasificación es una
edificación, y como tal, repercute en los análisis que es factible elaborar dentro del marco que
determina. Con este motivo queda demostrado que la nomenclatura de categorías socioprofesionales
no es ni un reflejo natural de la realidad, ni tampoco una edificación plenamente logica. Esta aferrada
en arquetipos de empleo y por esta razón cada rûbrica materializa un juego de actitudes y posiciones
originales. Al procdder así, esta distribución encarrila más pronto a considerar una yuxtaposición de
zonas que presentan lógicas locales bastante específicas y al estudiar sistemas de diferencias o de
desigualdades y no de prácticas aisladas. Finalmente, es preciso conocer convenientemente los
métodos de recogida, tratamiento y análisis de la información, lo cual remata en estas categorías, las
que permiten apreciar el alcance de los estudios que los utilizan: fecundidad, mobilidad,
comportamientos en materia de consumo,...
MÉTHODES

Les mots et les chiPres


: les nomenclatures
socioprofessionnell es
Alain Desrosières et Laurent Thévenot°

l‘ar une tradition qui remonte au début du aiècle, et dans ccttc production. Alors que n’importe quelle étude
•.irtout aux annéea 50, les études socio-économiques économétrique consacre d’importants développements à
*rançaiaes font un usage de plus en plua large, en plua tenter de prouver la validité de la méthode employée, l’étape
le i « variables explicatives » économiques classiques préliminaire de la démarche, et fondamentale à ce titre, qui
*mme le revenu, de découpages on eatégoriee socio- a consisté à construire les « données », c’est-à-dire à coder
professionnelles constituant une approche empirique de et à classer les informations élémentaires à l’aide d’outils
îa notion usuelle de milieu social. appropriés, est er. général passee sous silence.
Oct instrument eat trèa familier, mais on s’interroge
r arement aur aa construction et sa logique : il n’est ni
ion reflet naturel de la réalité, ni une construction tota•
lement logique mettant en œuvre quelques critères sim-
ples. Chaque rubrique, ancrée sur des archétypes sociaux,
eriatalliae un jeu intégré d’attitudes et de situations
originales. D’autres critères de tri, plua linéaires et quan- Voir les nomenclatures
titatifs comme le revenu, poussent à assimiler l’espace
aocial à une échelle ordonnée et continue, et à supposer des
relntions cauaalcs de meme type tout le long de cet axe. Le
découpage aocioprofesaionnel, en revanche, conduit plutôt
à envisager une juxtaposition de zones présentant des Parce qu’on les tient volontiers Pour surgies du réel,
logiques locales aasez spécifiques, et à étudier des aystèmee parce qu’on est porté à leur conférer une évidence indubi- table
de différences ou d’inégalités plutôt que des pratiques ou — ce qui revient au même — des défauts incorri- gibles,
isolées. Il eat nécessaire de bien connai- tre les méthodes de bref parce qu’on les confond avec l’objet à etudier,
collecte, de traitement et d’analyse des informations on n’accorde pas aux classifications les faveure dont jouissent
conduisant à ces catégories, pour appré- cier la portée des d’autres instruments statistiques plus complaisamment
nombreuses étudea qui les utilisent. mis en avant dans les développements méthodologiques.
Comme il l’a été dit à propos des nomenclatures industrielles,
l’économiste ne s’intéresse pas « aux lunettes à travers les-
quelles il voit l’économie : il s’intéresse par contre fortement à
ce qu’il voit. Pour voir les lunettes que l’on porte, il faut d’abord
les ôter et cela brouille la vue » [1].
Premier maillon de”1a chaine statistique, la nomenclature
est sans doute le moins apparent, celui qui est te plus souvent
escamoté dans la présentation du produit finat. Certes, les
listes des intitulés des lignes et des colonnes encadrant les * z¥lain Desrosières ct Laurent Thûvenot font J›artie de la ‹divi-
tableaux de chiffres viennent rappeler l’existence des nomen- sion « Emploi » de département « Population et ménages » tl‹
clatures, par l’énumération de leurs rubriques, mais rares l’INSEE.
Les chiffres entre crochets [ ], renvoient à la bibliographie,
sont les travaux qui leur reconnaissent un rôle spécifique
p. 64.

49
On no peut attendre des gens qui portent des lunettes qu’ils les otent sans réticence, et il n’y a guère que les
moments pénibles où l’on est contraint de les remplacer pour
les plus manifestes, qu’elles illustrent « l’empirisme évident
faire sentir brutalement leur présence par la nécessité d’une
et foncier » que décrit Baehelard. évoquant l’état de la
acco- modation nouvelle. Aussi faut-it tirer profit des
opérations en cours de refonte des nomenclatures d’emploi science mondaine du xviiie siècle, il désigne par ces termes le
et de forma- premier obstacle à l’esprit scientifique, l’expérience première,
qua- lifiée aussi d’« empirisme coloré », épithète bien
tion Pour s interroger sur leur ‹construction, et en tirer
des leçons sur leur bon usage. adapté à ces classifications qui tirent justement leur force
persuasive de l’apparence concrète et opératoire — voire
Pour rentlre c•' l '* dD ‹liffèrents modes d’élaboration des pittoresque — qu’elles affichent [3-p. 30]. Mais les
nomenclatures, il est commode de les organiser autour d’une classements « naturels » modernes sont légion et ils
distinction provisoire et schématique, opposant classifica- n’échappent pas à ces défauts, qu’il s’agisse des classements
tions « naturelles » et classifications « logiques ». de produits de consommation reposant sur une grille des «
besoins naturels » [4J, ou des classements professionnels «
bricolés » à partir de fragments de nomenclatures de
formation. Et si ces derniers classe- ments, où toutes les
Classifications naturelles... profeesions sont triées au vu du diplôme qu’elles exigeraient
dans leur exercice, paraissent aussi naturels à leurs
Les classifications « naturelles » sont certainement les utilisateurs contemporains que celui de Tolosan autrefois, ce
moins visibles sinon les moins répandues. Elles séduisant par n’est que parce que la représentation qui les sous-tend, ‹celle
l’apparence d’une appréhension immédiate du domaine d’un espace social uniquement structuré par les niveaux
et sont souvent fondées sur des qualités sensibles de l’objet scolaires, est partagée par leurs principaux utilisateurs, tous
à classer. Ce sont, soit des classements « indigènes » récoltés impliqués à un titre ou à un autre dans le développement du
auprès ‹l’informateurs influents capables de les imposer système scolaire (prévi- sionnistes de l’appareil éducatif,
au statisticien, soit des classements « bricolés », c’est-à-dire orienteurs scolaires, etc.).
ayant fait leur J rei i x e rt ans nn domaine et utilisés par ana- Et les assimilations de la classification de Tolosan qui fait
* 6ie sur un nouvel espace à défricher, soit les deux à la fois, figurer dans .a meme rubrique les industries du sel gemme
car les classements indigènes sont souvent bricolés. Ainsi et de la porcelaine, sont à peine plus grossières atix yeux
C. Levi-Strauss, évoquant les classements mythiques, les d’un économiste que certains regroupements du code PJ
rapproche des travaux du bricoleur décrits en ces termes qui, dans son détail le plus fin, range les industriels dans
« L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas défi- la meme rubrique que les techniciens et les petits com-
nissable par un projet [...], il se définit seulement par son merçants avec les vendeurs salariés [36].
instrumentalité. [Mais ses possibilités] demeurent toujours
Ce sont ces fausses évidences ayant présidé à la construc-
limitées par l’histoire particulière de chaque pièce, et par
tion de la nomenclature, qui doivent être débusquées; faute
ce qui subsiste en elle de prédéterminé, du à l’usage originel
de quoi on les retrouvera sans s’en rendre compte systémati-
pour lequel elle a été conçue ou par les adaptations qu’elle
quement incorporées aux produits du classement, et on
a subies en vue d’autres emplois. [...). C’est de la méme façon
participera inconsciemment à leur naturalisation.
que les éléments de la réflexion mythique se situent toujours
à mi-chemin entre des precepts et des concepts » [2, p. 27-29]. On peut, à titre d’illustration de cette démarche critique,
montrer comment la position sociale du taxinomiste se
La première nomenclature de l’industrie, élaborée par
reflète dans la classification qu’il produit. Un regard sur les
Tolosan en 1788 et utilisée pendant un demi-siècle, se rat-
classi- fications doit impliquer un regard sur le classificateur
tache ù ces représentations naturalistes, puisqu’elle divise
lui- même. On verra dans les deux exemples suivants, deux
l’industrie en trois grandes rubriques calquées sur l’ordre
maux dont il risque de souffrir : être myope et être
du monde naturel. On y distingue les industries travaillant
inelassable.
les produits minéraux, celle transformant les produits
végétaux et celles qui traitent l*s produits animaux [1]. Dans une nomenclature comme celle des activités indivi-
C’est parce que ces classements sont anciens qu’on voit duelles, utilisée pour classer des appellations
clairement que leur « naturel » masque une représentation professionnelles, l’affectation à une rubrique résulte r • r une
implicite de l’objet à classer, une idéologie, ici celle des large part d’une assimilation aux appellations y figurant à
physiocrates se fondant sur la primauté des ressources de la titre exemplaire.
nature dans l’analyse du fonctionnement du système produc- Les intitulés énumérés dans la rubrique ont donc un eñet
tif. Dans la nomenclature des activités individuelles de déterminant sur le classement final. Opérant comme tes
1947 on rencontre de ces fragments de classements pratiques pointes d’un rateau, ces cas-types permettent de récolter
venus d’ailleurs, cousus dans un patchwork pittoresque d’autant plus d’appellations qu’ils sont nombreux ; aussi
ainsi le groupe 57 « Travail du cheveu », qui ne rassemble doivent-ils etre choisis avec discernement. Or, si on
‹ ie 689 r ersonnes, n’est séparé du groupe 51 « Vannerie, considère les rubriques adjacentes du code des métiers de
crins » que par une référence implicite à la distinction dans 1968 [32], 79.91 « Fonctionliaire supérieur et assimilés »,
la matière ouvréG entre l’humain, l’animal et le végétal *. 80.92,
« Fonctionnaire des cadres moyens », et les rubriques de
On pourrait dire de ces nomenclatures que par leur voca-
cadres supérieurs du secteur privé (79.71; 79.72 ; 79.73),
tion purement descriptive, par leur absence de prétention
on constate que la première rubrique comporte 168
ù une explication du matériel classé autre que celle — im-
exemples, la deuxième 72 et la troisième 37. On pourrait
médiate reposant sur des différences dans les caractères
imaginer que ce rapport de 1 à 4 est justifié par la taille
50 différente des

1. « iloconsement général de la population de 1946 », vol. III,


l’opulation ac‘ive, Imprimerie nationale, PUF 1952, p. 274-275.
postes. Or c’est tout l’inverse qui est observé, et ce sont 000 cadres supérieurs du secteur privč) qui en com- portent le
justement les rubriques qui rassemblent les effectifs les plus plus grand nombre.
faibles (128 000 fonctionnaires supérieurs en 1968, contre 284
Si on fait le rapport entre les effectifs et le nombre d’appel- d’emploi américain DOT (Dictionary of Occupational
Nations, on trouve respectivement 760, 2 700 et 7 700 : il Titles), qui reste un modèle de référence pour certains
varie done de 1 à 10. et qui, à défaut d’avoir suscité en France aucune imitation,
D'autre part, si on tente de classer le classîficateur, on sera continue, quarante ans après sa création, d’inspirer des
surpris de constater que l’on ne compte pas moins de trois recommandations pour l’élaboration de nomenclatures *.
rubriques du code des métiers qui peuvent l’accueillir, elles- Les trois dernicrs chiffres du code cloixent permettre
mûmes situées dans trois catégories socioprofession- nelles de mesurer la complexité de l’emploi à l’aide ale trois
différentes « 32, professeurs; professions littéraires et critères, « la relation aux données, la relation aux per-
scientifiques », « 33, ingénieurs », « 34, cadres administra- tifs sonnes et la relation aux choses », repérés sur des écheltes
supérieurs ». Certes, cette ambiguité traduit bien la diversité graduées. Ainsi la position 1 du premier critère « coordi-
des róles du statisticien d’État, parfois chercheur, ouvent nating », se caractérise de la manière suivante : « determine
ingénieur, toujours fonctionnaire, mais on y retrouve aussi le temps, l’endroit et la succession des opérations oti rles
l’atopie caractéristique du théoricien qui refuse de se actions, décidées sur la base du traitement des données.
reeonnaitre dans sa production, de se situer par rapport à Execute les decisions on rend compte des événements ».
l’objet qu’i1 étudie. La position 6 dans la deuxième échelle « speaking, signa-
ling » se définit ainsi « parle, on fait signe à des gens d’en-
voyer on d’échanger des informations. Sont inclues les opé-
rations de transmission ou de contrôle des taches confides
.. ou classiŃcations logiques à des assistants ». Enfin la position 7 « handling » de la troi-
sième echelle est décrite en ces termes : « utilise ses membres,
A cette démarche du taxinomiste :‹ vulgaire », d’autant des outils et des instruments spéciaux pour travailler, remuer
plus enclin à entériner des classements indigènes ou à oti porter des objets on des matériaux. Implique peu ou pas
reprendre à son compte des taxinomies communes qu’il est rle latitude de jugement par rapport au but défini, au clioix
peu averti de l’otitil, ou du matériel approprié » *. On se rend aisément
sur l’objet à classer, s’opr ose celle du taxinomiste « savant ». compte, au wi cÎe ces critères, de la marge de liberté laissée
A la différence ‹lu précédent, ce dernier prend soin de pro- ù l'utilisateur lors ale leur application et la rigueur logique
poser, préalablement à toute mise en ordre, des critères de du système proposé risque de tenir lieu de paravent ù Yes
classement explicites et efficaces. II n’est pas d’utilisateur usages pratiques tout à fait inconstants. En outre, on peiit se
excédé par le vague des rubriques d’une nomenclature ou demander comment un tel classement poiirra rendre compte
de taxinomiste pointilleux aspirant à la cohérence parfaite des differences entre professions et il ne faudra pas s’étonner
de sa construction, qui n’ait revé un jour ou l’autre de sem- de trouver places dans la meme rubrique, parce qu”ds
btable système logique. De plus, parce que ces classifications impliquent les memes « relations aux donnćes, aux
logiques présentent tous tes signes extérieurs de la personnel, et aux choses », les gardes-champetres, les
modernité, qu’e1les se pretent à l’élaboration de distances opératrices 3e radio-taxi, les chefs euisiniers... L’ordre mrme
entre emplois et done à un traitement automatisé, elles qui est implicite dans cette combinaison d’échelles n’est
connaissent de nos jours un développement considerable. II d’ailleurs pas toujours sans surprise; ainsi le chercheur en
ne faut pas oublier pour autant qu’e1les portent en elles tes physique théoriquC est situe en dessous de tous les autres
traces de leur ori- gine commune, la classification botanique métiers de la physique parce qu’il se situe au plus bas dans
dont Linné a proposé la théorie dans sa « Philosophie l’échelle des relations aux ehoses 4.
botanique ». Certes, la mise en avant de traits distinctifs, de « Pour les classifications de ce type, à la différence des pré-
caractères » (cri- tères) dans la constitution d’espèces, le cédentes, le moment crucial et douloureux est celui de leur
principe suivant lequel « toute note doit être tirée du mise en œuvre. En eífet, si lbs taxinomies naturelles s’ap-
nombre, de la figure, de la proportion, de la situation » pliquent sans heurt sur leur domaine de validité,
marquaient une rupture par rapport à une compilation puisqu’e1les épousent des ctassements usuels, la mise en
indi8éreneiée où se melaient description de la plante, de ses pratique de cri- tères logiques préétablis n’est pas toujours
vertus, tégendes auxquelles elle était mêlée, blasons où elle aussi aisée.
figurait, histoires rapportées par des voyageurs, etc. Mais si Si les presupposes implieites doivent être recherchés par
ce progrès s’est fait dans te l’analyse interne des classifications naturelles, c’est plus
encore t’utilisation (collecte et codage de l’information)
que l’on doit mettre en question dans le cas de nomencla-
tures à prétention logique. Ainsi dans la nomenclature
des emplois, la distinction entre ouvriers qualifies et ouvriers
cadre de classements botaniques, c’est justement parce qtie
les organes constitutifs sont plus visibles chez les plantes 2. A. D IRIB.inNF : « La nécessitć d’un système de repéra¡p•e
que chez les animaux, et done que les critères sont plus des emplois con:me prćalable à l’ćlaboration des nomenclatures »
immédiatement perceptibles [5, p. 149-152]. in I’analUsr. des quct lifications ct les classifications d’emploi,
Ces premières classifications logiques étaient done en CEREQ, la Dortimciitation française, Paris, 1974.
même temp6 des classificntions naturelles; mois lc classifi- 3. « I.a nomenclature du ministèrc du Travail ainüricain
cateur contemporain incline encore ù considérer les (DOE“) », CEREQ, oj . r.it.
4. S. C. kxri.Fv, T. N. CH 1 HlKt›s : « manpower forccasting
critères comme des érrianations de la matière à classer, in the- United States, an Evaluation of the State of the Art »,
an lieu de les regarder comme ses propres constructions. (“.olumbus Olii‹i ; (Center for Human Ress‹iurce 11c.search, ’fine
En guise d’itlustration, on peut ćvoquer la nomenclature Ohio State University, 1975, p. 95-119.
.WËTHODES 51
non quatifiés reposait à l’origine sur un classement classement au profit d’un autre plus logique reposant sur le
«indigène», eelui pratiqué par les entreprises à l’aide des temps de formation. La nomenclature a été modifiée dans ce sens,
grilles de conven- tions collectives [34]. Tirant argument de mais l’examen des structures d’emp1oi élaborées à l’aide de cet
la distance entre ces grilles conventionnelles et le contenu outil ne fait apparaitre aueune discontinuité dans les séries en
réel des tàches, on a proposé en 1970 d’abandonner cc 1970. Ceci suggère que t’imposition d’un critère logique a été sans
effet sur la pratique de classement des entreprises. De mème, même s’ils se donnent pour des nomenclatures d’emploi,
la codification des troisième et quatrième chiífres de la
les classements professionnels prennent nécessairement
nomen- clature d’activités individueltes à partir du temps de
en compte les individus distribués dans ces emplois, acteurs
forma- tion jugé nécessaire pour l’exercice d’un emploi a été
sociaux capables, à la différence des roses ou des papillons,
aban- donnée en 1968, parce que cette apparente articulation
d’agir et de réagir à leur classement. Comme le soulignent
logique était un leurre compte tenu de l’indétermination
E. Durkheim et U. Mauss à propos des classifications toté-
pratique du critère.
miques
Les plus farouehes partisans des classifications logiques « Bien loin que, comme semble d’admettre M. Frazer,
nourrissent leur conviction de l’espoir qu’il est possible de ce soient les relations Îogiqries de.s fhosen qui aient servi
mettre en wuvre un nombre restreint de critères, de sorte de base aux relations sociales des hommes, en réalité ce sont
que l’architecture de la nomenclature soit aussi claire qu’ex- celles-ci qui ont servi de prototype à celles-là. Selon lui,
plicite. Force est de constater au contraire que l’espace les hommes se seraient partagés en clans suivant une classi-
social est loin d’ètre homogène, que les critères les plus perti- fication préalable des choses; or, tout au contraire, ils ont
nents pour rendre compte des frontières entre professions classé les choses parce qu’ils étaient partagés en clans » [6-
varient d’un bout à l’autre de cet espace, et que cette p. 224].
diversité pose nécessairement la question de leur hiérarehie.
Ainsi, dans la nomenclature des emplois qui repose pour Classer des emplois, voire, produire la définition des
partie sur un enclievetrement de critères, on peut, faute de les postes de travail en oubliant les personnes qui les occupent,
avoir hiérarchisés, affecter à deux rubriques diíférentes un c’est s’interdire de comprendre les conditions sociales de
chef de service informatique titulaire d’un diplóme défini-
d’ingénieur. Si on s’attache en premier lieu à le caractériser tion de ces emplois qui r ur une part tiennent aux attributs
commc ingénieur ou cadre technique, on cherchera à le de leurs titulaires (sexe, âge, diplôme, origine sociale...) [7].
ranger dans les sons-groupes 20 à 22; dans ce cas, le niveau Les luttes de classement, qu’elles s’exercent à titre indi-
de diplóme du titulaire oriente le choix (notons dès mainte- viduel ou qu’elles s’organisent plus collectivement autour
nant le formalisme d’une démarche, qui opposerait le classe- d’une catégorie professionnelle, se traduisent nécessairement
ment des emplois à celui des individus qui les occupent). par une action sur les appellations de professions, terme
Pour l’aífectation à une rubrique particulière du sous-groupe d’échange entre l’employeur et le travailleur. Ces pressions
20, on s’appuiera sur la spécialité exercée et on choisira la sur les intitulés se manifestent, par exemple, à l’Agence
rubrique 207 : « ingenieurs spécialistes de l’application des nationale pour l’emploi lors de la mise en correspondance
sciences mathématiques, de l’organisation, des méthodes des offres et des demandeurs d’emploi ou encore dans
administratives, de la gestion, de l’inforinatique, des sciences l’intervention d'organisations corporatives, de syndicats
économiques et humaines ». Mais, si on privilegie la ou des travailleurs eux-mêmes '. Or la matière que le code
spécialité informatique du métier, on le classera dans le des catégories socioprofessionnelles vise à ordonner est
groupe 6 constituée des déclarations d’individus enquêtés, c’est-à-
dire pour l’essentiel d’appellations d’emploi. Ce lien originel
« métiers des services administratifs du traitement électro-
entre classement et appellations ne devrait pas etre oublié
mécanique » puis dans le sous-groupe 62 « métiers du traite-
lorsqu’on en arrive à l’étape finale de l’interprétation d’un
ment électromécanique et électronique de l’information ».
tableau statistique. Le terrain sur lequel opèrent ces classe-
Enfin, on suivra la filière hiérarchique des opérateurs (622)
ments est celui des mots qui n’est pas un simple reflet d’un
aux programmeurs (621), pour aboutir finalement aux
hypothétique espace réel des emplois et pas davantage un
« cadres responsables du traitement électromécanique et
espace purement arbitraire, mais le lieu où s’aÏfrontent les
électronique de l’information » [34].
acteurs sociaux intéressés par ces classements. Le taxino-
miste enregistre l’état de ces luttes, avec des déformations
qui tiennent à la position qu’il occupe. Les difficultés aux-
quelles il est confronté, les zones de flou qu’il rencontre,
La construction des catégories loin de n’etre que des tracas techniques, méritent un examen
socioprofessionnelles attentif car elles sont les signes d’enjeux sociaux.

En cherchant à caractériser les classifications pour faire


ressortir les différences dans leur élalioration et dans leur De I’appeIlation contrôlée...
usage, on a laissé dans l’ombre te défaut le plus grave dans
de telles constructions, l’absence de prise en compte de la
spécificité des objets à classer, ici les professions. En effet, Le regroupement de professions en catégories sociopro-
fessionnelles repose donc sur l’hypothèse que ces catégories
S2 fonctionnent déjà en tant que telles dans la conscience
sociale. Les auteurs du code soulignent que les personnes
classées sont presumées « se considérer elles-memes » et
« etre considérées par les autres comme appartenant à une

t›. Sur la définition de la qualification des ouvriers et ses


usages sociaux, voir dans le même numéro M. CÉZ6RD « Les
qualifications ouvrières en question ».
même catégorie » [35]. Des ensembles tels que les profes- avoir des caractéristiques et des intérêts communs ne Plate que
sions libérales, les cadres, les professeurs, les employés ou de la fin des années trente : dans son ouvrage sur la « psy-
lls ouvriers, par exemple, évoquent des images relativement chologie des classes sociales », Halbwaclis [8], traitant des
typées. De fait, l’existence mûme de ces systèmes de repré- classes moyennes, évoque d’une part des non-salariés
sentation contribue à donner uno consistance particulière (artisans, commerçants), et d’autre part des employés parmi
à l’ensemble socialement nommé. Ainsi, l’utilisation du lesquels semblent figurer la plupart des cadres actuels, parfois
terme cadre pour désigner un ensemble dc salariés supposés sous l’intitulé vague d’employé supérieur. La figure sociale du
cadre n’existait pas alors de façon distincte. C’est seulement
assurer à la catégorie un grand « pouvoir explicatif ». Mais
vers 1950 que cette catégorie socioprofessionnelle de cadre
ce pouvoir explicatif ne peut ûtre réduit ù celui d’une
apparaîtra, c’est-à-dire quand le type social sera assez large- variable puisqu’il repose dans la plupart des cas sur un
ment diffusé [9, 10]. système, une constellation de variables r as toujours
La réalité sociale de l’appellation et le lien entre le nom apparentes. Comme l’obsorve Pareto
et le groupe professionnel qu’il « signifie », sont particulière- « On s’est trop liatè de vouloir déterminer rigoureusement
ment sensibles dans le cas d’un titre comme celui de les caractères qui différencient les genres et les espèces que
médecin, soumis à une législation stricte et au droit de l’on établissait dans la société. C’est le défaut habituel de
regard des professionnels eux-mêmes, ou ingénieur, trop vouloir préciser, que nous avons déjà rencontré en
fortement légitimée par l’existence de titres scolaires délivrés beaucoup d’autres théories. Reconnaitre l’existence de
par des écoles spécifiques. On peut illustrer la mise en certaines variétés et déterminer d’une manière rigoureuse
œuvre de cette logique de l’appellation contrôlée par tous les caractères qui les différencient, sont deux choses
l’exemple du traite- ment des ingénieurs dans le code des essentiellement différentes. Tout le monde reconnait que le
métiers. En étudiant les rubriques d’ingénieurs de l’édition liquide appelé vin ne forme pas un tout homogène, qu’il
de 1962 de ce code on constate que, sauf rares exceptions, présente un très grand nombre de variétés; pourtant, nous
l’appellation ingénieur fait oïlice de laissez-passer dans ne saurions, au moyen de l’analyse chimique, séparer des
l’accès à ces catégories [31]. On remarque que ce sont les variétés que le goût nous fait connaitre comme étant abso-
rubriques où la correspon- dance poste-titre est la moins ri lument distinctes. » [12, p. 351.]
ide, qui comportent une référence au diplôme dans leur
définition » : ingénieur Mais la référence à ces types ne se rencontre dans la pra-
horticole, agricole, agronome, ingénieur de menuiserie, tique des agents sociaux que sous la forme d’oppositions,
ingénieur commercial. L’usage d’un critère explicite est donc limitées à des domaines restreints. Toute tentative d’exten-
limité aux abords de la frontière du groupe; ailleurs il est sion systématique de l’usage de ces oppositions (par
fait crédit au nom. Si on examine l’utilisation de ces exemple : manuel/intellectuel) à l’espace social entier,
rubriques dans la version modifiée du code de 1975 [33], on comme S’impose un projet de nomenclature exhaustive et
vérifie que ce sont les métiers les plus récents, à ta frange du cohérente, se heurte nécessairement à des contradictions et à
groupe des ingénieurs, dont les appellations ne sont pas des manques.
tégitimées par les titres que distribuent les écoles Ainsi on ne s’étonnera de l’apparente contradiction dans
d’ingénieurs, les ingénieurs informaticiens, les ingénieurs en le code des métiers de 1968 [32], qui classe la rubrique
organisation, qui souffrent de la plus grande « 77.77 ingénieur (SNCF) » dans le groupe « 77 technicien
indétermination dans leur classement. Ces écarts tiennent des transports », que si l’on oublie la pluralité des opposi-
surtout à des variations dans tions que peut engendrer le terme technicien. S’it peut être
les déclarations des individus . 6 opposé en effet à «ingénieur» lorsqu’il décrit celui qui
l’assiste et remplacer le terme « sous-ingénieur », il peut
aussi etre opposé à profane pour évoquer la maitrise d’une
technique ou à savant pour désigner celui qui applique un
...à la notion d’archétype savoir théorique, et dans ces ceux derniers cas on pourra
rapprocher technicien et ingénieur. De meme, au nom de
C’est en prenant appui sur ces appellations de profession logiques différentes, certaines professions peuvent être «
et en les agrégeant autour de cas modaux que les auteurs du disputées » entre plusieurs types : boulanger, entre artisan et
code des catégories socioprofessionnelles ont progressive- commer- çant; contremaître, entre ouvrier et cadre;
ment élaboré le contour des catégories [11]. Cette procédure perforatrice, entre employee et ouvrière, etc.
d’assimilation à un type, qui est en fait le nom de la caté- D’autre part, c’est parce que tes diverses professions ne
gorie, est d’autant plus aisée dans sa réalisation pratique, sont que très inégalement rattachées à des types sociaux
et permet la constitution de catégories d’autant plus cohé- clairs qu’ont été prévues des catégories « fourre-tout »,
rentes, que le type peut jouer le rôle d’arcltetyfie. Autrement « autres... » ou « divers... », conçues pour améliorer l’homo-
dit, lorsqu’une appellation modale cristallise un grand généité et la signification des catégories centrales (ouvriers,
nombre d’atWibuts (sexe, àge, diplôme, urbanisation...)
largement reconnus (ouvrier par exempte) ou contrôlés
(ingénieur...) ces attributs concourent à travers le nom à
6. On a rapproché 17 000 bulletins individuels du
recensement de mars 1975 avec les questionnaires de
l’enquête kmploi effec- tuée à une date voisine, en se limitant
aux personnes actives dont on était assuré qu’elles n’avaient
pas changé d’emploi entre les deux interrogations. Cette
confrontation montre que
39 OJ des individus classés au recensement dans la rubrique
« 78.09 — Ingénieur et cadre technique supérieur spécialiste
de l’informatique » et 31 % de ceux placés dans la rubrique «
78.10— Ingénieur et cadre supérieur spér:ia1iste de l’organisation
et de la gestion, ingénieur conseil » ont été affectés à d’autres
rubriques à l’enquête Emploi; ces taux sont les plus élevés de toutes
les spécialités d’ingénieur. Les variations dans les déclarations des
mêmes individus touchent 33 % des bulletins affectés à la
première rubrique et 57 %\ de ceux qui ont été placés dans la
seconde.

METHODES 53
employés, carlres, patrons...). I)ans Îes projections d’emploi freuses du recensement et des enquctes de l’INSEE, parce
par Pl ’ofessions à l’horizon 1980, élaborćcs par le bureau Knelles n’appartiennont pas aux mrmes couches sociales,
amérieain de statistiques du travail (BLS) •a l’ai‹le t1’une ne pourront faire l’usage attendu de ee reperage scrupuleux.
nomenclature typotogique (« census classification »), 39 % Aussi observe-t-on que 43 % des individus classés dans la
du totaÎ des besoins en main-d’œuvre sont classes parmi les rubrique « fonctionnaire supérieur › an recensements sont
postes rebuts (« not elsewhere classified ») 7 . affected à une autre rubrique dans t’enquète emploi, effec-
Ainsi la taxinomie « chinoise » des animaux de Borges tuée sensiblement à la mûme date; 13 % ont places dans la
ne constitue qu’un cas extreme d’assemblage hétéroclite rubrique «cadre moyen», 9 % dans les rubriques «employés»,
de classements pratiques olieissant ù des logiques variées. 6 % dans les rubriques de cadres supérieurs du secteur
Elle ne tient son absurdité burlesque que de sa prétention privc.
à la coliérence et à l’exhaustivité. Les animaux s’y trouvent De plus, l’examen des problèmes de frontières qui surgis-
divisés en : sent nécessairement lors de l’utilisation d’une nomenclature
« o. Appartenant à l’Empereur; b. embaumés; c. appri- typotogique doit permettre de faire le partage entre les cas
voisés; d. cochon de fait; e. sirènes ; J. fabuleux; g. chiens frontières artificiels résultant du caractère totalisant de la
en liberté; ń. inclus dans Îa présente classification; i. qui IlomenclaturG, et ceux qui révèlent des déformations de la
s’agitent comme des fous ; y. innornbrables; ś. dessinés structure sociale. Cet examen doit etre l’occasion d’une
avec un pinceau très fin en poils de chameau ; /. et cœtera; confrontation entre l’archétype et le contenu de la eaté6orie
m. qui viennent de casser la cruche; n. qui de loin semblent qu’i1 condense.
des mouches » [5-p. 7].

Une nomenclature qui « travaille »


Etre ottenti¢ à l’usage des cotégories
Dans le eas d’uno nomenclature logique, la frontière est
Cette présentation du mode de construction du code des sans ćpaisseur, par construction; un oÒjet est dans une case,
categories socioprofessionnełles peut conduire te Secteur il ne peut être dans aucune autre. Lorsqu’on utilise une à
s’interroger sur ee qui sépare ce code d’autres classifications nomenclature de ce type, on ne récolte aucune trace de cette dites
« naturelles › et sur le risque qu il y aurait à enrcgistrer utilisation. Dans le cas de la nomenclature typologique, de purs
stereotypes issus de Îa sociołogie spontanée. En eífet, en revanche, cette trace constituée par l’ensemble des zones s’il est
important d’insister sur la nécessité de prendre en frontalières produit comme une ombre de l’ossature de la compte les
classements indigènes en tisage dans les pratique9 nomenclature, et nous renseigne sur tes cłassements sociaux sociales —
faute de quoi on tes retrouvera iinplicitement et sur leur dynamique. En 1887 déjà, Alfred de Foville incorporés aux
nomenclatures d’apparence logique —, note, dans « la France économique, statistique renommée il reste que leur
utilisation devrait être empreinte de circon- et comparative » [14)
speetion. On peut proposer, dans le cas du code des « Le problème de la classification professionnelle d’une
categories socioprofessionnelles des illustrations de cette population noinbreuse est par lui-meme très compliqué,
démarehe prudente. attendu que d’une profession à l’autre, la limite est souvent
Il faut d’abord rappeler que l’architecture générale de la assez indécise et, que, en outre, une fois les categories faites,
nomenclature ne repose pas uniquement sur la mise en œtivre la meme r ersonne appartient à plusieurs. L’épicier du village
de ces assimilations à des types sociaux; elle reste structurée qui a un morceau de terre sera-t-il compté comme boutiquier
autour de deux principes : partake du salariat et du non- ou comme propriétaire? Le précepteur ecclésiastique se
salariat, mise en evidence de hiérarchies sociales plutót dira-t-i1 prêtre oa professeur? Il y a ainsi une foule de cas
liées au niveau de formation pour let salaries, et à la taille douteux. »
de l’entreprise pour les non-sa.ariés. C’est justement l’orga-
Ainsi tes difficultés croissantes à classer certains métiers
nisation autour de ces deux principes qui rend cet instru- clans les categories d’ouvriers ou d’emptoyés nous signalent
ment different des nomenclatures adininistrativcs de profes-
que cette frontière « travaille ». Ce type de classement
sions ou d’emplois que l’on trouve dans de noinbreux pays.
impose done unc observation régulière du rapport entre
A mi-chemin entre un instrument de gestion on de comptage
l’archétype ct le contenu des catćgories, souvent aussi
et un système théorique de classes complètement construites,
importante que l’étude de l’évolution de ta catégorie [15].
sans doute imr ossible à mettre en œuvre, il se présente
L’épaississement de la frontière ouvrier/emptoyé qui résulte
comme un système empirique raisonné.
de la multiplication des « pools » (ateliers d’employés) par
exemple, et traduit
Mais l’examen des classifications ne doit pas se limiter l’extension aux métiers tertiaires de la division du travail
aux conditions de leur production; il doit s’étendre aux empruntée an secteur industriel, ébranle les archétypes de
modalités de leur utilisation. En effet, tout an long de la ces categories, ce qui n’implique pas pour autant qu’e11e
chaine statistique, depuis ł’élaboration de la nomenclature rende caduque l’opposition entre elles. Si on se réfère à
jusqu’à l’interprétation des résultats par l’utilisateur, en l’archétype de l’ouvrier homme, aneien dans sa elasse, et
passant par la codification des declarations des enquetés ancien dans le salariat, on risque de ma1 interpreter la
phrase qu’opère la chiffreuse, des schèmes de classements implicites « le nombre d’ouvriers s’est accru de 500 000
personnes sont à l’œuvre. II est indispensable de les mettre en évidence entre 196b et 1975 ». En eífet cet accroissement
repose pour pour en comprendre les effets sur te produit final. Ainsi
on a noté précédemment l’attention portće par le taxino-
miste à une description fine de l’espace social qui lui est
familier, celui des fonctionnaires supérieurs. Mais les chif- 7. Op. cix., note 4.
S4
Plus ‹le la moitié sur l’arrivée de femmes jctmcs 100 000 percsonne.) l’ensemlile bles cadres au sens bles conven-
pratiquement toutes non qualifiées, qui possèdent donc
des attributs tions collectives (1,3 million en 1976) éventuellement étendu
opposés à ceux de la fraction morlale. Même lorsqu’elle» à l’ensemble des cotisants à une caisse Ile retraite de cadres,
sont qualifiées, ce qui est le fait d’une proportion beaucou P quand on n’y adjoint pas les voyageurs et représentants de
plus faible d’ouvrières (22 %) que d’ouvriers (42 %), l’appar- commerce. Enfin il n’est pas rare de trouver sous co label
tenance ù cette catégorie socioprofessionnelle n’a pas le les effectifs des CS réunies de cadres supérieurs et professions
méme sens pour les femmes puisqu’elle se traduit plus sou- libérales et de cadres moyens (4,2 millions). Il est probable
vent par une fonction de contrôle sur les autres ouvrières que la catégorie de « cadre administratif supérieur » elle-
(« polyvalentes », « monitrices ») que par la reconnaissance même (650 000 personnes) est soumise à pareille distorsion et
d’un métier ®. De même l’image traditionnelle de l’employé il serait nécessaire de procéder à une
de bureau, homme, fonctionnaire, encore présente derrière « réévaluation » de cette catégorie. Quoi qu’il en soit ces
l’appellation de ta catégorie, est remise en cause par la crois- catégories de cadres moyens et supérieurs qui n’étaient
sance plus rapide des employés du secteur privé et par initialement que des artefacts de statisticien ont été ren-
l’apport considérable de la main-d’œuvre féminine, respon- forcées et entérinées par leur usage, et créent une situation
sable des trois quarts de la croissance des employés de spécifique à la France : le terme de « cadre » n’a pas
bureau entre 1968 et 1975. d’équivalent exact dans les langues anglaiSC Otl allemande,
et il est probable que les structures sociales, c’est-à-dire
Une nomenclature adéquate porte la trace de cette évolu- tion les positions sociales relatives des diverses professions ne
historique qui laisse subsister des d5coupages archaiques, qui en sont pas tout ù fait identiques [16].
forge de nouveaux. Ainsi dans le cadre des petites entreprises La nomenclature des catégories socioprofessionnelles est
agricoles, artisanales ou commerciales, les membres de la donc construite autour de quelques archetypes historique-
famille qui aident sans être salariés (« les aides-familiaux ») sont ment datés, relevant de logiques locales, tout en étant
classés dans la méme catégorie que le chef de famille, par structurée selon deux principes centraux : distinction entre
une confusion traditionnelle qui assimile l’individu à la salariat et non salariat et mise en évidence d’une hiérarchie
famille ou au « foyer ». De même les rhets d’entr• r rises sont à l’intérieur de ces groupes. L’usage qui en est fait prend-il
répartis selon l’activité de leur entre- en compte les caracté.ristiques propres ‹a cette nomenclature?
prise et les deux notions d’activité individuelle et d’activité
collective se trouvent superposées comme elles N’étaient
jusqu’en 1936 sur tout l’espace de la nomenclature.

A l’inverse, le code a entéririé l’émergence de nouvelles


catégories à un moment où le découpage du salariat se pré-
cisait. La mise en place progressive depuis 1936 des conven- Un espace multidimensionnel
tions collectives a abouti en 1950 à une généralisation des
« catégories Parodi », instituées d’abord dans l’industrie
métallurgique, puis progressivement dans toutes les
branches : cadres, employés, ouvriers qualifiés, ouvriers
spécialisés, manœuvres. Les auteurs du code en créant les
catégories de « cadres supérieurs » et de « cadres moyens » Dans un premier temps, certains utilisateurs du code des
produisaient un découpage supplémentaire sur un champ categories socioprofessionnelles ont pu etre tentés d’y voir
plus large et visaient à caractériser les cadres salariés dispo- un substitut commode à une échelle de niveau de vie, ou de
sant d’un pouvoir économique (cadres administratifs supé- statut éco noOnù‹ et social, dans les cas d’enquetes ou
rieurs) ou culturel (professeurs, ingénieurs) importants, de fichiers administratifs où te revenu n’est pas directe-
ainsi que les couches intermédiaires dépendant des précé- ment appréhendable : les résultats des recensements de
dentes liiérarchiquemeni (cadres administratifs moyens) population decrivant la structure Par catégories socio-
ou par l’intermédiaire du savoir (techniciens, instituteurs), professionnelles d’une commune ou d’un quartier sont
ou encore par le controle exercé sur ce savoir et sur l’accès souvent utilisés comme indicateur de pouvoir d’achat, dans
à la profession (services médicaux et sociaux). La catégorie des études en vue d’implantations d’équipements commer-
des cadres sup‹irieurs appelle elle aussi une confrontation ciaux. De même des travaux sur la mobilité sociale, n’envi-
entre son contenu et le stéréotype qu’est devenu son intitulé. sageant celle-ci que comme ascension ou descente le long
Les auteurs du co‹ie des catégories socioprofessionnelles d’une échelle « rabattent » la nomenclature sur un seul axe
avaient l’intention d’isoler la couche dirigeante des salariés le long duquel les diverses catégories sont situées au moyen
avec laquelle ils regroupaient les titulaires d’emploi néces- d’indicateurs quantitatifs pondérant de façons variées le
sitant un diplome de l’enseignement supérieur, salaries revenu, le diplome, l’âge do fin d’études, ou le prestige
(professeurs) ou non (professions libérales). On voit que résultant d’enquetes d’opinion : on le qualifiera de « grand
cette couche qui repose largement sur le pouvoir du diplôme axe » dans ce qui suit.
ne se confond pas avec la catégorie des cadres au sens des Mais le fait que les indicateurs ci-dessus entrent en concur-
conventions collectives, à la fois limitée au secteur privé et rence, ou bien qu’ils ne soient manifestement pas aussi
élargie à des niveaux hiérarchiques inférieurs. Cependant le pertinents pour les salariés ct les non-salariés, montre
groupe des cadres constitue un tel enjeu dans le debat
social que les définitions de cadre se sont multipliées,
rendant possible un jeu 9ur les mots qui permet d’associer 8. D. KERr.oxz : « Ouvriers = ouvrières? » Critiques de l’éco-
à l’image du cadre dirigeant d’entreprise (à peine nomie politique n° S, octobre-décembre 1978.

METHODES 55
qu’à l›eaucoup d’égards il est r lus füconrl de ne }ias projeter tout l’espace social le long de ce « granil axe », certes décisif,
mai.s rl’envisager tous les débats et conflits résultant de ce ‹lonner 1 iITl*6* *t un esl' ace titopique (et en quelque sorte
qwe les critères permettant de définir ou d’apprécier ta
« sphérique ») ou les divers atouts sociaux seraient répartis
position
‹le façon à ce qu‹• chacun bénéficie de telle ou telle mortalité,
dans t’êchelle sociale sont multiples, et que letir importance
rattrapant en 1»restige ou en savoir ce qui lui manquerait
et leur légitimité ne sont pas évalués de la meme façon dans
tous les groupes sociaux : la corrélation entre par exemple en revenu, ou inversement; ou bien, dans une variante un
peu moins utopiqtio, la ‹distribution dos atouts totaux ne
le revenu et le niveau de diplome n’est pas absolue et leur
serait pas égalitaire, mais leurs diverses composantes
écart a une signification sociologique.
seraient
La construction meme de la nomenclature, par regroupe- relativement indépendantes les unes des autres, ce qui n’est
ment d’intitulés de professions autour d’archétypes, suggère pas davantage le ca9. Ceci peut étre illustré par des représen-
que les catégories sont toujours des ensembles extremement tations graphiques permettant de situer les catégories
hétérogènes, des espaces dont l’étude interne révèle un four- sociales
millement de situations, qui peuvent parfois etre fort éloi- ‹le façon plus complexe que le long d’une simple échelle :
gnées de 1’« image modale implicite » évoquée par l’intitulé ‹les études portant sur des objets assez variés (consommations
de la catégorie. Il peut etre utile d’étudier localement ces -•t pratiques culturelles, marché matrimonial, structures
sous-espaces sociaux comme des « champs » ayant des spéci- sociales des quartiers urbains) permettent de dégager 3es
ficités, des critères de référence, des enjeux propres. Pour topographies des catégories sociales, relativement stables
chacun des groupes sociaux, une telle étude peut être menée, d’une étude à l’autre (Encadré p. 57). Mais il est alors souhai-
décrivant les grands axes par rapport auxquels se réfèrent, table d’utiliser le découpage le plus fin : la relative opposition
explicitement ou implicitement, les membres du groupe; entre catégories « cultivées » et « fortunées », déjà perceptible
de surcroît ces travaux sont précieux pour construire la avec la distinction entre salariés et non-salariés, est encore
nomenclature selon les principes analysés ci-dessus °. Tout plus visible si on utilise une décomposition assez fine du
cela pousse à étendre à l’espace social entier cette perspective salariat, altant au-delà de la simple hiérarchie.
multidimensionnelle, et l’articulation de la nomenclature
fine, en trente postes, suggère plutot une telle utilisation.
L’accent iris ainsi sur la multidimensionnalité ne saurait Courbes (‹ en U » et cohérences locales
bien sûr faire oublier que l’univers social est fortement
polarisé le long d’un « grand axe », mais on vise surtout ici
à nuancer [et diversifier les analyses des mécanismes Il est une autre façon de décelergqueq1’univers social est
complexes par lesquels les différences ou les inégalités se loin d"etre unidimensionnel et que maints comportements
manifestent ou se reproduisent. On peut comparer cette obéissent plus à des logiques locales, spécifiques à tel ou tel
démarche à celle de G. Lenski [19] sur 1’« ineohérence du milieu social, qu’à une logique universelle ou à la maximi-
statut » (status inconsistency) : constatant la forte corréla- sation sous contrainte de fonctions d’utilité générale : il
tion entre le revenu, le niveau scolaire, le « prestige », suffit pour cela d’étudier systématiquement les cas où des
observés sur une population d’individus, il s’intéressait à phénomènes ne varient pas de façon uniformément
ceux d’entre eux qui présentaient justement une « croissante ou décroissante le long du « grand axe » de
incohérence » entre les divers indicateurs et cherchait leurs l’espace social. S’il est clair que bon nombre des
caractéristiques spéci- fiques. Mais ces cas apparaissaier.t phénomènes sociaux liés 5 la distribution du pouvoir social
comme des exceptions, souvent liés à une forte mobilité, et de la richesse, varient de façon uniforme (comme par
ascendante ou descendante, et non comme des situations exemple les probabilités d’accéder aux grandes école ou aux
pouvant avoir des logiques propres de catégories, filières « nobles » de l’enseignement secondaire, ou les taux
suffisamment marquées pour pouvoir se reproduire en tant de possession de nom- breux biens), il n’est pas moins vrai
que telles. C’est ainsi qu’une analyse portant sur des que d’autres ne sont pas dans ce cas, et présentent un
catégories sociales fines peut faire apparaitre que des groupes minimum (ou un maximum) pour les catégories moyennes
sociaux entiers sont incohérents du point de vue du statut : des codrcs moyens ou dcs employés, au moins si on examine
artistes, clergé, enseignants, au savoir ou au prestige élèves, la hiérarchie du salariat : cadres supérieurs, cadres moyens,
mais au revenu souvent bas, commer- çants, au revenu élevé, employés, ouvriers. On dira que ces phénomènes présentent
mais au savoir plus l›as. On ne peut plus alors parler des variations
d’ineohérence, mais on doit au contraire chercher à « en U ».
comprendre les cohérences spécifiques de te.lles catégories. Une recension de ces cas fait apparaitre qu’ils sont souvent
Une démarche uniquement axée sur les notions de (mais non toujours) liés au fonctionnement de la cellule
corrélations, de cumul d’inégalités, aurait interdit de voir familiale. Ainsi, sont minima pour les catégories
ces situations, ou les aurait fait considérer comme des moyennes : la fécondité, l’âge au mariage des hommes, le
exceptions ne relevant pas d’une logique sociale, c’est-à-dire logement en maison individuelle, tandis que sont maxima
de catégorie 10.
Non seulement les indicateurs de revenu, de niveau
scolaire et culturel, ne sont pas parfaitement corrélés, mais 9. Parmi celles-ci on peut citer par exemple l’étude de P.
leur écart est à l’origine d’innombrables enjeux et luttes, Bour- dieu sur le pationat des grandes entreprises [17], celle de J.
portant sur la légitimité et la reproduction du « grand axe » Verdes- Leroux sur les travailleurs sociaux [18], et les travaux, à
de l’espace social : c’est donc sous ce rapport qu’il est utite paraître, de R. Zerre sur l’artisanat, nu de. I.. Thévenrit sirr les
de prendre en compte la multidimensionnalité, et non pour professions de la santé.
10. Ceci n’empeclie par que l’étude des trajectoires indivi-
56 duelles peu banales présente le plus vif intéret : elles sont souvent
révélatrices de cas frontières de catégories, et du fait que la
nomcn- clature « travaille », comme il a été vu ci-dessus.
DES TECHłgIQUES D’ANALYSE ET DE CUŁ•ł UL DES OBSERYATIONS
SUR LES RELATIONS ENTRE CATEGORIES

La perspective ndoptée ici, mvliidimensionnalitë de l’espoce sociol, remarqvob/e que ces diverres analyses conduisent toutes è situer /es
hèłêrogênêite interne des cotégories, nêcessitt du cumul des obser- cotégories dans un schèma dont /e grand axe est celui du stotot social
vations, est bien illustrée per des méthodes de stotistique et dont /e devxième axe oppose /es cotégories « è capita/ ct//ture/ »
descriptive tel/es qve l’analyse des données ’. Analysant (enseignonts, inte//ectue/s}, aux cotégories ‹ ö capita/ êconomique »
simultanêment de nombreuses caractêristiques observ4es svr des (patrons de l’industrie et du commerce).
nombreUses cotégories (ou miet/x, de nom6reux individus), celles-ci L’analyse des données peat donner lieu ö d’autres app/icotions, dont
permettent souvent de dégoger des oxes, et en porticulier le premier, l’usage est pectacu/oire moir tin peu trompeur : /es ana/yses de
qualiȘe ici de « grand axe », relotivement invorionts d’vne êtude b typ»/ogie construisent, ô portir des résu/tots d’une enqt/ête, des groupes
l’aotre, et /e long desqoe/s re situent les di/Țérentr gravies sociaux, d’individus tels qt/e /es variances soient minimales â /’inté- riet/r des
oo plutôt les centres de grovitć des sous-nuoges de points que groupes, et maximales entre /es groupes, qoi sont done /es plus
chocun constitue : une repré- sentotion de la dispersion de la homogènes possibles. Si /es regroopements ainsi opêrês sont cet/x qui
cotégorie outovr de ce p«i»t moyen peUt même être donnée. Un permettent de grčsenter av mieux /es rést//tots d*une enqt/ête, d’autont
avantage de ces mëthodes est de permettre de considérer plus qu’on /es a dotér d’intitu/és crées pour l’occasion, ils ont
simoltonément l’espace des individus (ou des catégories les l’inconvênient de ne pouvoir être cvmu/és d’une étude à /’outre,
regrovpant) et celni de levrs propriétés, et donc d’embrosser d’on puisqve /es regrot/Cements sont di/Țérents ô chaque (ois. Les réso/tots
see/ regord un ossez grand nombre de traits caractêrisant la cohe- ğrésentés par catë$ories socio-p oĘessionne//es en revonche sont
rence spéciȘque de chaque catégorie : /es frontières entre cotégories moins « Variants », car les inégalitês entre ces catêgories sont moins
et entre sşstemes de propriétés sont bien svr zones, et il (oudrail, en importantes qu’entre groupes conrtrui‹ i•stement pour maximises
toute rigueur, roisonner en termes de distribution de probability de ces inêgalitès, mois peuvent être intëgrés à d’ontres trovoux rèalisès
prtsence de telle on telle propriété autour du point moyen ovec /es mêmes déconpages. On conçoit que ces mét/iodes d’analyse
représentotiĘ de la catègorie, mois ce/o n’empêche pos les di}Țérences type/»gique aient grand succès par exemp/e aupr”es de boreoox
entre obser- motions re/olives aux diverses cotégories d’être d’études de marchè, dont /e souci principal est de (ournir à /evr c/ient
signi#cotives stotis- tiquement et pertinenter sociolo$iquemeni si on la typologie la plus pertinente pour son objet portico/ier (et sons dot/te
les envisage comme système. la plus e/Țicoce pour cet obi et I . mais qu*e/fes entrainent une certoine
Cette mèthode permet en portico//ier de préciser selon que/Ies carac- déperdition de /*énergie consacrée ô la co//ecte de I’in(ormation s*il
téristiqties s’opposent le plus /es cotégories fe long dev divers axes. n’est pos possible de mettre en relation ces enquêtes les unes avec
Le système des di/Țérences entre e//es opporoit alors comme relati( les autres, par l’intermédioire d’un découpage stable d’une enquête ü
ö te/ ou te/ sous-espoce, et non was valable pour l’espace entier . l’ovtre, que pourrait constituer /e découpoge socio-pro(essionnel.
tous les indicateurs d’inêgolitês ne sont pos uni%rmèment pertinents
pour toutes /es catégories. Des exemples d’un te/ usage de l’ono/yse
des données sont présentées per Pierre Bourdieu, dans t/ne ano/yse der
goûts et protiqi/es cv/ture//es des diverses catégories socio/es [25],
par X. Oebonneuil et ń4. Gollac [26], 1. Lebcrt et N. Tabard [27],
présentant la rłportition des cotégories se/on les qt/ortiers urbains, 1. U ne présentation claire et succincte de l’analyse des données est fournie
par M. Volle [29]. Un exposé plus complet eC des programmes informatiques
de villes moyennes [26] ou de Paris et de sa banfieue [27], et par peuvent être trouvés dans [30].
A. Oesrosières dons une analyse du marchê matrimonial [28]. II est

pour ces categories, dans le second, un retard du mariage,


pour ces mèmes catégories : le taux de divorce, l’activité dû aux études et à 1’ « établissement » plus tardif. Ceci est
des femmes selon la catégorie sociale du mari, la féminisa- prouvé par le fait que le taux de eélibat définitif (à 50 ans
tion des professions, les consommations médicales, ou des par exemple) est lui, monotone décroissant en fonction
variables lies aux systèmes culturels, tels que l’autorita- du statut social. La forme « en U » joue plus ici le róle de
risme moral à l’égard des adolescents, on les attentes par l’anomalie expérimentale eonstatée par le physicien qui, en
rapport au système scolaire. Cette convergence est trop face d’un résultat imprévu, est poussé à approfondir son
systématique pour que l’on ne eherche pas, au moins dans le schéma explicatif, que celui d’un modèle sous-jacent de
domaine de la reproduction de la famille, des logiques spé- portée plus générale.
cifiques diíférentes pour les categories (salariées)
supérieures, moyennes et populaires. Par ailleurs, les Dans ce qui précède, İes catégories sociales étaient uti-
variations énumérées ci-dessus sont surtout valables pour les lisées « à plat » et on comparait des variables mesurées pour
quatre groupes de salaries, et les variables mesurées chacunes d’entre elles, par exemple le long du grand axe.
(toujours dans ces cas) sont très diíférentes pour les non- D’autres « anomalies expérimentales » peuvent etre révélées
salaries et les salariés dont le niveau social pourrait etre par le eroisement de la catégorie sociale avee des variables
considéré comme comparable le long du « grand axe » : pour plus « simples » : te revenu, le diplóme, le sexe, l’âge, etc.
les non-salaries (industriels, artisans, gros et petits
commerçants, agrieulteurs), la repro- duction du statut
familial passe plutôt par la transmission du capital
économique, tandis qu’el1e semble plus tiée an sys- tème Une variable peut en cacher une autre:
scolaire pour les salariés, en particulier dans les classes
moyennes. l’exemple du café
11 ne faut évidemment pas voir dans cette forme « en U »
Une des grandes diífieultés du travail du statisticien,
un queleonque modèle de portée générale, impliquant
habitué à manipuler de gros fichiers de données, munis
correlation ou causalité entre des phénomènes éloignés
de categories, critères de tri et autres « variables explicatives
les uns des autres, mais plutôt, dans chaque cas, une incita-
», est de penser concrètement l’artieulation entre les diverses
tion à rechercher, localement, pourquoi les sens de variation
categories, et non de la façon mécanique et formelle à
s’inversent vers le milieu de l’échelle sociale. Ainsi par
laquelle peuvent conduire facilement tes techniques
exemple, une variable telte que l’age au mariage des
statistiques, et cela d’autant plus qu’elles sont sophistiquées
hommes, maximum d’une part pour les paysans et les
et absorbent done l’essentiel de l’énergie et de l’imagination
ouvriers non qualifiés, et d’autre part pour les professions
du chereheur.
libérales, reflète, dans le premier cas, une difhculté relative à
se marier MÉTHODES 57
Comment ne pas considérer les catégories ou les variables on appartient ». Ainsi, en milieu populaire, oú les normes
comme des sortes d’abstractions agissant on ne sait comment iinpliqueraient davantage la fréquentation du café,
ni pourquoi, et ne pas succomber au fétichisme de la caté- l’augmen- tation du revenu permettrait de se rapproeher de
gorie ou de la variable explicative? cette règle, tandis que l’augmentation du diplóme éloignerait
Plus précisément, on peut être tenté, dans l’analyse des les indi- vidus de la norme « populaire » pour les rapproeher
résultats d’une enquête, de multiplier les critères de tri, de celle des « classes moyennes » (à égalité de revenu, celles-
en espérant à chaque fois améliorer la variance expliquée, ci sont toujours « en dessous » des classes populaires). Enfin,
ou faire apparaitre des enchaînements de causalité dissi- dans les petites villes, il n’y aurait pas sufhsamment de cafés
mulés si on n’utilise qu’un petit nombre de critères. Mais, adaptés aux membres des classes supérieures, qui ne pour-
ce faisant, il arrive qu’on multiplie en apparence les diffi- raient se retrouver « entre eux » alors que ees cafés
cultés, et que, loin d’améliorer l’explication, les critères existeraient dans les grandes villes, ee qui expliquerait la
supplémentaires fassent apparaitre des questions de plus diíférenee entre les catégories de communes. Ceci est
en plus nombreuses. On voudrait montrer ici, par quelques eonfirmé par les acti- vités pratiquees au café :
détours, que l’usa6e de la catégorie sociale comme lieu de consommation, discussions ou jeux. Les personnes de
cohérence entre des pratiques variées peut constituer un classes populaires pratiquent surtout di cussions et jeux
fil conducteur de la recherche. Mais il faut alors les utiliser dans les petits bourgs, mais se limitent à la consommation
non plus seulement « à plat », mais en étudiant comment dans les villes. En revanche les personnes aisées vont peu au
les variables sont, à l’intérieur même des catégories, influen- café en petites communes, et seulement pour consommer,
cées par l’age, le diplôme ou le sexe. Ainsi il faudra voir alors qu’en ville elles s’y retrouvent pour discuter, mais non
comment hommes et femmes, jeunes et vieux, diplômés pour jouer, qui est une pratique popu- faire dans toutes les
et non diplomes, par exemple, s’opposent à l’intérieur des communes.
diverses catégories, et vérifier si ces oppositions sont analo-
gues de l’une à l’autre, c’est-à-dire travailler sur des diffé-
rences de différences, des différences du second ordre.
Un exemple emprunté à Y. Lemel et C. Paradeise 11 sera Arbitraire du commentaire
développé un peu longuement, afin de faire sentir la com- et critêres de preuve
plexité de cette démarche.
L’enquête « Loisirs » faite par l’INSEE en 1967 a permis Les explications précédentes éclairent le phénomène assez
de mesurer, entre autres variables, la fréquentation du café. simple en apparenee de la fréquentation du café, mais elles
Si 58 % des hommes actifs déclarent aller au café au moins sont loin d’en rendre totalement compte, et n’y prétendent
une ou deux fois par mois, cette proportion est de 62 O en d’ai1leurs pas. Pourquoi par exemple, parmi les personnes
milieu « populaire », 58 % en milieu « moyen » et de 50 % de classes movennes, celles au revenu et au diplóme les plus
en milieu « supérieur ». Le découpage socioprofessionnel élovés ont-elle» une fréquentation du café très basse, en
est à dessein peu détaillé, afin de pouvoir ètre croisé avec parti- culier dans les villes de plus de 100 000 habitants
d’autres critères et de dégager des « différences de diffé- autres que París? It semble que l’on pourrait trouver, au cas
rences ». On verra successivement l’effet, au sein de ces trois par cas, des explications à toutes les variations, et Ïe
grands ensembles, du revenu, du diplôme, de la taille de la statisticien commentateur de tableaux peut devenir un
commune, du sexe : à chaque étape, de nouvelles questions virtuose de cet exercice. Dans le cas présent, on pourrait dire
surgissent. que ces per- sonnes de classes moyennes ont fourni des
Alors ‹¡ue, en milieu populaire, la fréquentation du café eíforts tout parti- euliers pour « s’élever » (revenu et diplóme
augmente avec le revenu, elle diminue avec ce mème revenu élevés) et sont
en milieu supérieur, et semble etre d’abord croissante puis « en tète » de leurs catégories, ce qui suppose un style de vie
‹décroissante, en milieu moyen. En revanche, cette pratique particulièrement vertueux et ascétique et done une faible
semble presque toujours décroissante, dans les trois milieux fréquentation du café. De plus, dans les grandes villes, ces
quand augmente le niveau du diplôme. Ce phénomène est classes, coincées entre les classes populaires et des classes
particulièrement paradoxal en milieu populaire, puisque supérieures plus nombreuses et plu visibles que dans les
la même variable (fréquentation du café) croît avec le revenu, petites, auraient plus de difficultés à « tenir leur rang » et
mais déeroit avec le diplôme, alors que revenus et diplômes s’abstiendraient done de fréqtienter des cafés oú elles ne
sont en général assez étroitement corrélés. Enfin les se sentiraient jamais « à leur place ». Ceci serait particulière-
variations de la fréquentation du café selon les classes ment net en province oú les formes de la respeetabilité sont
diffèrent forte- ment dans les communes petites et moyennes plus importantes qu’à Paris.
d’une part (moins de 100 000 habitants), où les classes Ce genre de commentaire est à la fois séduisant (il n’est
supérieures sont isolées par rapport aux autres en pas complètement absurde) et peu convaincant : d’autres
fréquentant beaucoup moins le café, et les villes de plus de chiffres auraient suscité d’autres commentaires. Cependant
100 000 habitants où ce sont au contraire ces memes classes une première limite est déjà introduite par la taille des
supérieures qui le fréquentent le plus, tandis que les classes regroupements effectués : si les classes populaires
moyennes le font nettement moins, regroupent surtout des ouvriers et, aceessoirement, des
On peut imaginer nombre d’explications à ces diverses salariés agricoles et des personnels de service (domestiques
différences, et les auteurs en proposent plusieurs, centrées et petits métiers, peu fréquents chez les hommes), les classes
sur l’idée que « la fréquentation du café parait dépendre moyennes rassemblent les agriculteurs, les petits patrons, les
étroitement des normes culturelles du groupe social auquel techniciens

58
11. Données sociales, édition 1978, I ESKL, Paris, p. 325 à
327.
les contremaltres, les employés et eadres moyens et lee supérieurs, de médecins et avocats, d’artistes, de pretres et
membres de l’armée et de la police, tandis que les classes d’instituteurs 1*. Or les proportions relatives de ces di- verses
supérieures sont eonstituees de gros patrons, de eadres sous-catégories sont três différentes selon les tailles de
communes : alors que les fractions à capital économique, ou
traditionnelles (patrons, professions libérales) sont plus Fécondité et travail fémínin
représentées dans tes petites villes, tes fraetions salariées et
intellectuelles (fonctionnaires, enseignants, cadres de Cette nécessité d’articuler entre elles les explications des
grandes organisations) le sont plus dans les grandes, et les comportement.e, et d’en reehereher la cohérence dans des
normes eulturelles de ces diverses catégories sont três logiques spécifiques aux divers milieux sociaux, apparait
différentes. Ainsi tout regroupement porte en fui le danger bien dans l’étude des relations entre fécondité des familles
du renvoi semi-conscient d’une catégorie à une image et activité professionnelle des femmes. Cet exemple, qui
modale implicite attirant l’attention et polarisant la leeture paraitra peut être moins anecdotique que celui du café,
du tableau, cette image pouvant d’ailleurs différer selon les montre aussi que, là encore, les differences de rôles sociau x
lecteurs. Mais ceci reste vrai même si on utilise un des hommes et des femmes constituent un des points forts
découpage plus fin. Cette difficulté ne condamne pas des logiques locales de classes. Divers travaux, entre autres
1’utilisation des nomenclatures socioprofessionnelles, mais de J.-C. Deville ([20] et [21]) et de N. Tabard [22], rapprochés
contraint le chercheur à une bonne eonnaissanee du contenu les uns des autres, permettent ce cumul.
des eatégories manipulées. Celui-ci est constitui non
seulement du détail des métiers et emplois regroupés dans Si, comme il a été montré depuis longtemps, la fécondité
chaque catégorie et de leur pro- portion, mais aussi est minimum dans les classes moyennes, et croit lorsqu’à
d’indications sur tes taux de féminisation de ces métiers, sur partir de ces classes, on suit l’échelle sociale vers le haut ou
les âges de leurs membres, etc., (tableau, p. 60 à 62). vers le bas, ces fécondités plus élevées des classes
supérieures et populaires ont des significations sans doute
Toutefois 1’exemple de la fréquentation du café montre fort différentes. Ainsi, interrogés sur le nombre idéal
aussi les limites de cette exigence : un échantillon plus gros d’enfants d’une famitle, les parente de milieu populaire
aurait permis de croiser plus finement les catégories indiquent des nombres en moyenne inférieurs aux nombres
socioprofes- sionnelles avee revenus, diplômes, tailles de réets d’enfants de teur catégorie, alors que c’est 1’inverse en
commune, age, sexe, etc., mais les difiicultés d’interprétation milieu aisé [22 - p. 107]. On le voit aussi en comparant, à
seraient sans doute allées en se multipliant, et le phénomêne l’intérieur des trois classe», 1’effet du diplôme de la femme
isolé ici, ta fréquentation du café, n’aurait pas permis de sur le nombre d’enfants ce nombre est décroissant avec le
com- prendre ce qui fait vraiment probléme : de quelle façon diplóme en milieu popu- laire, et croissant en milieu
s’articu1ent entre elles les diverses « variables explieatives »? supérieur [20]. Ces deux résultats : enquete d’opinion et effet
On ne peut commencer à répondre à cette question qu’en du diplôme, suggêrent que, en milieu populaire, la
cumulant des observations sur un grand nombre de fécondité serait relativement subie, et décroitrait quand
pratiques et en eherehant des régularités dans leurs croissent les possibilités d’information des femmes, alors
variations; une telle étude de diverses pratiques de que, en milieu aisé, la fécondité, plus voulue, sembíe liée au
sociabilité fait apparaitre des « différences de diíférenees » statut social de la famille, qui est fui-méme croissant avec le
importantes si on compare les hommes et les femmes diplôme de la femme. De plus, en mitieu populaire, la
successivement au sein des divers milieux : l’écart entre les probabilité pour que la femme tra- vaille eroit avec te
deux sexes est maximum en milieu populaire peu diplômé et diplôme, en meme temps que croit la possibilité d’une
dans les communes rurales. Dans ce milieu, l’image promotion sociale pour tes enfants, tous facteurs contribuant
traditionnelle et « publique » de l’homme virit, social, à limiter le nombre d’enfants et à fairG tendre vers un
s’oppose à eelle de la femme, privée, centrée sur sa maison, comportement du type « classe moyenne ». En revanche, en
archétype des soeiétés méditerranéennes. Cette forme est milieu supérieur, le diplôme de la femme fui permet
maximum dans les communes rurales, oú est aussi d’exercer un métier bien rémunéré, et dont le revenu, ajouté
maximum la part des hommes allant au café pour la « à eelui du mari, permet d’é1ever un plus grand nombre
discussion ». Dans un tel milieu, un revenu plus élevé (toutes d’enfants en recourunt à des services domestiques.
choses égales par ailleurs) ne peut que faciliter cette
Mais la prise en compte de 1’activité de la femme nécessité
extériorisation de la vie sociale des hommes. A l’autre póle,
une analyse des différenoes profondes de signification de
les hommes plus diplómés s’éloignent de ce type d’image et
cette activité, selon les milieux sociaux : diverses questions
ont incorporé d’autres exemples des rapports entre les sexes,
d’opí- nion sur le « travail des femmes » ont montré [22 - p.
entre la maison et l’extérieur, entre le privé et le public. La
157 à 168] que cette expression n’est pas entendue de la
fréquentation du café renvoie à 1’ensemb1e de ces
même façon par les femmes des divers milieux. Celles de
diehotomies, et ne peut etre analysée que par référenee à
classes populaires parlent du travail en termes de nécessité
d’autres pratiques liées au partage des rôles sexuels, ce
écono- mique, tandis que celles de milieu aisé se centrent sur
qu’une analyse de cette fréquentation par les seuls hommes
le role et 1’autonomie de la femme; les unes ont entende
ne pouvait suggérer. L’arbitraire du commentaire ne pouvait
« travail », les autres « femmes ». Ceci éelaire les liens
donc reculer dans ce cas que dans une analise plus globale,
observés par A. Lery et J.-C. Deville [21] entre fécondité et
portant sur un ensemble de pratiques pour lesquelles les
aetivité des femmes. Ceux-ci peuvent être vus dans deux
différenees entre les sexes sont marquées, et marquées soeia-
sens
lement de façon différente.

12. Cette remarquo no •’•r p1ique cl’ailleurs pu, ‹i l’cxcrcic‹i


proposé par « Données sociales » qui avait pour but, en croisant
les catégories sociales avec d’autres variables, de montrer les
diffi- cultés de l’interprétation : une nomenclature plus fine
dc ces catégories n’aurait pu etre croisée de façon significative
avec ces variables, en raison de la taille de l’échantillon.

MÉTHODES 59
be coritenu Yes catógories oocioprofeøølonnelleø err 1975

Effectifs Proportion Effectifs Proportion


Professions (P) Professions (P)
totaux de femmes totaux de femmes

CS 00 : exploitants agricoles CS 27 : petits commerçants

Entrepreneur de Cravau x agricoles (01.14) . . 5 680 4,6 Boulanger, pâtissier (+4.01) . . 39 360 4,6
An très tray. agri coles, ar bori c., hortic., mzrai• Boucher, charcutier (46.14, 46.16) . 52 180 3,2
chers (01.17) . . 1 636 140 34,4 Cad re sup. commercial. admin. (79.03, 14) . 10 980 18,4
one e ’b‘ tage (02.01) ......... 7 180 6,1 A gene d'assurances (80.03) .... 19 900 13,0
Buthå ‹es i%sd 2 720 57,4 Commerçant détaillan¢ et assimilés (84.16) . 516 040 53,7
— L ibraire, buraliste (84.17)..... 16 880 5S,8
Hötelier, restaurateur, cafetier (84.04) . 145 100 57,1
Total 1 6S1 720 34,2 Garagiste (19.16) ... 13 720 3,4
Coiffeur ec assimilés S3 53,9
Aucr uS proÎussiorts.................. 760 75,á
47 480

Total 40,3
9ł 5 400

Auy e 7 r availleur agricole, arboric., maraicher


11 337 420 12,7
n; entrep. d’abattage de” bois, ”sylvic.
02“ 1 32 160 ! 1,7
CS30 : professions libćrales
Inséminaceur, castreur ”(88:1”9)”. . 2.280 1,8
ł‘1údecin ec assimilés (88.06 à 88.09) ...... 104 160 22,6
37f 860 ... 28 900 11,3
J uriste (92.01 à 92.15) 16 880 5,1
Architec¢e et tingénieur (78 à 78.15)... 9 960 3.4
Ch

cdi ‹ ble chef’ esm78 be“ (81'.09). . ” S 860 28,0


Autres professions............. ........... 15 040 54,5
CS 21 : ind ustriels
Total 170 840 | 22,0
I“tźciers ouvriers (08.14 à 67.05). . . 3 2.0
Gúrant de sociétź (S.A.R.L.) (79.05).. . .. 940 127
Cad re supérieur administrati/ (79.14) ... 5040 7,8
6700
En(g neur du bâtiment et des Cravaux publics
: 01e 20 880 2,5
Entrepreneur de transports et assimilés (84.02) 2 980 7,4 CS 32 : professeurs, professions littéraires
Industriel et autre entrepreneur (84.14) . 12 940 9,9 et scientifiques
Autres professions ..... ..... . 7 920 61,1

áFI e 1 0 260640 51,2


edecn et il e*‹”88 0 Î 8 0990' . ) ' 66980 43,0
To Cal 60 400 13,4 Scien tifique (91.05, 91.06, 91.16) ..... 32220 29,9
Archicecce (78.15) 6 900 13,3
Homme de lettres, experts divers (91.03) ..... 3 540 2t.6
A utres professions . 1 220 541

Total 46,9
ł‘1éciers ouvriers : (06.15 à 73.01).. . 418 880 7,1
dont- métiers du bâtiment (09.01 à 11.02) .... 154 040 1,S
métiers des métaux (12.01 à 23.16) . 71 580 1,4
e e 2 30 500 1,4
mé:t ded tele.’“h:beII!1‘ź!4 ‹4 .o1, 45 960 4ü,3 CS 33 : I ngéneeurs
t oty
./ /: d., (57.01 à 62 440 1,8
60.15).
eur d’engins de transports Ingénieur (78.01 à 78.14) 238 500 4,1
°°:: 1 15 620 2,9 s s 01 7 12500 1,8
Cadre supérieu r administratif (79.14) . . 6440 14,3 ”duei dee statin i'cien {91.1 7)a 7 02... 1580 30,4
Gérant de soci eté (79.05) ... ............... 9880 15,4
lndustriel ec autre entrepreneur (84.14) .... 15 360 18,4 4,4
Eni en eur du bâtiment ec des travaux publics
4 1 ż3 ż80 6.3
Entre”preneur” de transports”ec” assimilés (84.02) 10 100 7.5
Autres professions . 47 2t0 55,6

CS 34 : cad res ad m inistratifs supérieurs


Total

CS 23 : patrons pêcheH rs

Pêcheurs en eau sal ée (04.14). . re erreu( istratif (79.14) 95 500 13,0


15 120 8.1 Be d h: : . 1: 1S›° 9380 84,0
..........
A ut res profess inns 80 | 50,0 Juriste, magisCrat (92.31, 92.03) .......... 1S 480 24.7
Officier (96.14, 97.02)....... .... .......... 42060 2,9
Au très professions . . 80420 12,9
Total ' î&200 8,3

To*al
6S4 760 17,4

CS 26 : gros commerçants

Boulanger, pâtissier (44.01) .


9 160 2.4
Bouch er, charcutier (•ł5.16, 46.14). CS 4ł : instituteurs, professions
5 120 1,2
Cad re sup. financier, commercial, admin. (79.02, intellectuegles diverses
9 000 15,1
G t3an! dc sociźté (79.05) : . 26,2 Enseignant et assimilés (90.02, 03; 93.21, 94.01) 604 140 65,4
Comm. grossiste, cheí d’en tr. de services (84.18,i 1S 820
59 660 19,7 Educaceur spécialisé, moniteur de centre social
Hôtelier, restaurateur et cafetier (84.04) .. ... 17 360 42,5 (89.17). ..... ................... . 54 920 63,9
Commerçant détaillant et assimilés (84.1A) A rès professions .... Total 45 140
G aragiste (19.16) .. .. ..................... u
Coiffeur et assim iIús (87.02) . t
46,7 30,7 Jour .. 22 180 29,7
2,8 nalis Professionnel de la publicité (91.07, 93.16) . . 26 400 41,7
49,8 te Bibliothécaire (91.15) . 7 380 77,5
52,4 (91. Autres professions .. . 20 040 58,2
08) .
. ... .
Total 63,3

60
Effectifs Proportion Effectifs Proportion
Professions (P) Professions (P)
totaux de fern mes totaux de femmes

CS 42 : services médicaux et sociaux


Ter rassier, carrier, tailleur de pierre (06.1S à '
Infirmier dipl. d’État, infirmier autorisé (88.14). . 203 340 84,9 3 760 0,S
Assistant social (89.16) . . 31 040 9t,0 NO "e4d”u ‘bati menc (€ł9:01” à” 11:02) .”“ ' " ” “ ” ” ” ” ” 33 640 0,4
K inésithérapeu¢e, pédicure, rééducateur 30 920 52,2 t 23 240 0,2
Professions de l’animation culturelle (89.04) . 13 960 47,7 Méciers des meca ”ț 12.01” à”24.01) * ” :” Ø9.3ąQ 1,4
Psychologue scolaire, indus¢riel (89.03) . . .. 13 700 49,9 dont : ajusteur, monteur, réparaceu r (19.14) . 3S 780 1,2
Autres professions . 8 880 93,9 l'ñé¢iers de I’électricitć (26.14 è 27.15) . . 25 120 2,7
” N étiers de la chi mie (37.01 à 38.16) 10 920 11,2
Total Mét ie rs des texti les, habil leme n t,
301 840 79,3
48.14 à S5.01). . ...................... 11 960 42j
Métiers du bois (57.01 à S9.0J )... 8 040 0.7
Contremaitre (s.a.i.).... 174 ż40 8,6
pn de n aux (BTP), [76.15].. . . . . . . . . . 71 440 0,6
utres' e JJ 180 B,4
CS 43 : tech niciens Total 441 640 5,8

Dessinateur (75.02, 75.03, 75.14, 93.18) . . 147380 6,8


Analyste, programmeur (76.10, 76.11) . . 45340 18,4
Agencs cechniques ec cechniciens (76.01 à 76.żż
sauf 76.10 ec 76.11) .... 517 640 12,6 CS GI : a uvriers qualifiés
dont Spécialiste de l’élevage, de l’agricul- Autres jardiniers, salinier (01.16). ...... 2ż 2,1
cure (76.01) 11 740 6,6 Passeur, marinier, batelier (04.16)....... 160 20,7
5 420
Sp tes métal., sidér. ind. mec. Terrassier, carrier, Cailleur de pierre
e76 4 50 540 18,5 07i 1’ S7 600 1,0
Spécialiste ”électronique (76.0S). ” ” S8 3.8 bâ/i ’en *et” assimiles (09.01 à 11:02): 630 660 1,0
Spécialiste électric., électromźca., élec- 260 364 100 0,4
trotec. (76.06) 35 680 2,1 *’ o uI e bi e r t(1 t0.01)s . . . .... US 060 0,5
S pécialiste organ. du travail,” ”gestlon . 10 ) / 106 320 1,0
prod. (76.09) . 33 500 13,5 e 2 24 862 520 1,7
sp de
métreur, agent tech. BTP, ° d:: uvrie de’ a ud o nerie’ (17.01) . 100 900 0,4
76 14: S3 820 3.0 ã 388 1,2
Gźomètre (76.16) . 12 840 2,2 pe ceu onee , décolleC ur, tou!neu r 4fX)
Technicien de la chimie et pétrochimie 0,6
(76.17) . . 38 900 39,7 aju eu4!outí lie ur, ” outilleur,”” fraiseur 56 S%
Préparaceur en pharmacie (88.11) 32920 59,7 0,7
Opérateur radiographe . 10120 601 o.’/’te de la'soudure'( 1:01). ' : 92 980 5,7
Autres professions . . 3320 42,2 N étiers de l’électricicé et de l’tlecCroniqu e 88 660
26 1 27 ) 5,7
4 d c: dc la cćramique (28.01, 275 180
Total 756 720 14,6 01 ! 13,2
23 820
I łéti !S’ de 1 raphie et impression (30.14
81 080 1 1,7
Nét32/1 du papie’r et carcon (33.01; 35.01) : : : 31 200 39,3
Métiers de la chimie ‹37.01 à 38.16).... .. 86 300 46,0
f‘łétiers de l’alimentacion (41.01 à 47.15) 185 740 18,3
....... 49 980 4,3
CS 44 : cad res ad m in is I ratifs moyens
dont : boulanger, pătissier (44.01) ...... ... 84 ł80 29,0
cuisinier d’établissement (45.16). . ...
Comptable, chef com pcable (81.09) cha u er, cripier, garçon-tripier
Fonctionnaire des cad res moyens (80.02) 270400 5ż,2 1 23 020 5,7
....... 260 620 55,S 48 4 a d 0 ! uri bri (4 4)t,t cumr (40.01 ,
Agent d’assurances (80.03) . 33 960 17,0 ż74 020 82,ż
Secrécaire de direction (81.05) . .. 818ż0 95,2 t e 47 960 82,9
Représen¢ant et cad re commercial (83.02, íł4, I“téciers du bois (S7.01 à 60.15)................ 161 500 1,7
14, 15) ż33 240 17,7 d e n e 139 640 1,6
Professions juridiques 23 660 35,7 C nducceur L ld * e t(r ort ” ”su r ” ”r”ail s
Autres professions ... 71000 23.9 iéb*de 29 560 0,9
(66.01). . . . . . . . 260 200 12,3
Autres professions ....
Total 974 700 44,7
Total I 3,3

CS 51 : employé de bureau
Jardinier, salinier (01.16). 5140
Employé de bureau non qualifié, adjoint Terrassier, carrier, tailleur de płerre (06.15;
admi- nistratif (81.02, 03) 07.01 ; 08.14, 15) ... 26140 1,0
................... 754 940 69,7 Néciers du batimenc et 1, ł
Secrétaire, dactylo, sténodactylo et assimilts dont OS du 8ros œuvre (09.01) 150 900 0,4
(81.04) . . 766 540 97,6 OS de la plomberie (10.01) .... 51 820 1,0
Encaisseur, caissier, aide-com ptable (81.06 214 420 78,1 peintre (11.02) 40 980 2,1
Opérateur, perforeur en trait. de l’inf. (81.10, 102 200 79,6 Ntcìers des métaux (12.01 à 24.01) . 360 560 1t
11)
Standardiste, cźlégraphiste manipulant (81.13). 49 36G 89,S done : ajusteur, monceur, répara¢eur... (19.14). 97 020 t ›
Emploi de bureau qualifié (81.14).. . . . . . . . . . . . . 44S 50,6 perceur, aff0teur, décolleteur, tourneur
120
Nagasinier (82.01).. . 20S 340 8,9 28 160 12,3
Préposé des PTT (82.03).. . .. . 78020 6,3 ouvrier de Ic soudure . 38 740 19,6
Ch d 3 6,6 I“łéciers de l’électricité (ż6.14 à ż7.15) . . 115 660 30,7
Clhecde, ’age/ t de eervice *'I (ser Î 17es publics) * l•łétiers du verre et de la céramique (28.01 ;
Autres rofes3tons .......................... 64,6 3 01 !
sso aøo
33 060 28,3
36,3 ł•łéti s* de raphie ec i mpression (30:14
à 32.16) . 22 620 22,6
.
65,0 Métiers du papier et du carton (33.01, 35.01) . . I"t4t de
Métiers de la chimie (37.01 ; 38.14, 15, 16) . . iers I’alimentation
(41.01 à 47.15). .... 27 140 4 9,7
done : boulanger, pâtissier (44.01)... . .... ... 43 140 9 36,0
aide de cuisine (45.15)... 88 140 , 10,1
bl 14 0ż0 ż 66,3
21 760 2
d sb’ 255 620 75,3
C é d I( 7n 1 67 960 /›,9
de s . ‘usr( route
Gérant de magasin à succursales multiples 37 460 46,3 5t01 499 400 1,1
(83.01).
Boucher. boucher-charcutier (46.14). ..... . 64 240 16ducteur de poids łourd (65.01) 472 440 0,8
Voyageur de commerce. inspecteur comm. 87 380 Conducteur d’appareil de levage (ś9.14) 2S 360 3,2
(83.16). 537 900 74,9 Garde-barrière (SNCF), éclusier (85.17) .. .. 12 480 70,8
Pompiste, vendeur, camelot... (83.05) . . . . . . . 10 680 45,3 Désinfecteur, plongeur (hôtel, restaurant). 13 900 26,9
Hôtelier, restao rateu r, cafetier (84.04). . Autres professions . 1 099 380 37,9

737 6G0 59,4 TotW ż P43 800 26,7


Total

MÉTHODES 61
Effectifs Proportion Effectifs Proporcion
Professions (P) Professions (P)
totaux de femmes totaux de femmes

CS GS : m ineurs
CS 7t : femmea de ménages
Nineur, foreur-sondeur, spécial isce de l'ext raC-
tion du pécrole (06.1'4)........... 75 100 0,5 Femme de ménaga (86.14) .. ................. 153 280 98,3

Total 7S ï 00 0,S Total î*3280 98,3

CS G6 : marins et pêcheurs
CS 72 : autres personnels de service
Pêcheur en eau salée (04.14). 19 180 82
Marin du commerce (04.15)..... 18 960 0,3 Jardinier chez un particulier (01.15) ..... 7 960 J,S
Chauffeur de Caxi, autre chauffeur d'auto
38 640 10,9
Totcl 38 140 4,3 Coursier, porteur (69.17, 82.15). . 11 700 10,9
Concierge e¢ assimilés (85.14)................. 80 660 75,7
Gardien (85.15 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 340 15,8
Personnel de servce dvers (86.01, 02, 15, 18, 21). 269 140 65,9
Nourrice, garde-malade (86.16, 17) ..... 6060 80,2
.......
CS 67 : apprentis ouvrière Coiffeur et assimilés (87.02, 03)....... ........ 83 SOO 80,4
Infirmier non diplômés et assimilés (87.01,88.01). . 272 460 8J,S
Méciers du bâtiment (09.01 au J 1.02) . ... 21 320 0,8 Alda maternelle (89.14). ..... .......... 38 540 98,9
dont : maçon (09.01) 7 240 0,8 Autres professions. ......................... 3 360 60,7
ouvrier de la couverture,
(10.01) 0,5
peintre en batiment, 8 0,4 Total
l'ñétiers des méCaux (15.15 à 21.01) . . s32 0 0,5
dont- ajusteur, monteur, réparateur Métiers
+ ‹o 0,2
de I’éleccricité (26.14 à 27.15). 29 840 4,7
Nétiers de la photographie et de l’impression 21 020
(30.14, 32.15) . 10 280 8,8
Métiers de l’alimentation (44.01, 45.16, 46.16) . 2,5
dont ' boulanger, boulanger-pâtissier (4'I.01). 2 940 1,6
I“tétiers du textile, habillement, cuir (49.14, 1S, 19 540
9 920 Artiste pein tre, sculpteur ec assimilés (93.15) .
2 860 76,9 lecteur en scène (93.22)..................... 4 880 25,4
Métiers du bois (58.01, 59.01). ........ 7 240 1.1 Professeur d’éducation physique, guide de mon- tagne,
Apprentis (s.a.ti.) [67.04]. 3 760 17,6 sportif professionnel (94.01, 02).. . . . . . 1S 460 22,4
Autres professions .......................... 8 820 17,9 Autres professions ............. 15 220 50,1

Total 06 600 5,3 Total 58 720 29,8

CS68 : manoeuvres

Pr8tre et ministre du culte (95.01) . 41 800 1,7


Terrassier, cantonnier et assimilés (07.0t). .. 14 460 0.2
Docker, manutentionnaire (69.18)............. 29,9 Religieux catholique (95.02) .... ......... 74 640 91,5
251 360
Femme de ménage, balayeur, nettoyeur (86.22) . 290 220 94,5 ...
Chômeur n’ayant (70.15)
Autre manœuvre pas dtclar6
. ... de mttier (99.17f. 914 780 22,0
”':'”“”"' ' 89 220 S7,9 ö9,2
Autres professions . . . . . .... .... 40 100 36,8

Total 1 G10 140 38,3

CS70: gens de maison Inspecteur de polica (96.15) .


Autres pers. de la police, pompiers, douanes
Employé de maison (86.15) . . 169 200 97,5 (96.18). . . 13 640 2,2
Bonne d'enfants, nourrice (86.17) .. .......... 61 300 99,3 Homme de troupe (n.c. con timent), sous-officier
Autres professions . 5 720 41,3 (97.01). . 104 600 2,7
Autres professions ........... ..............
206 520 3,7
Total 96,5 23 860 2,8
Total

348 610 3,3

Source : Recensement de la population en t975. Sondage au 20º. Ce tableau décrit la population active, occupée ou non. Le code des metiers ayant subi
quelques modificat1ons encre 1 968 et 1 975, ce tableau n’est pas parfaitement comparable à celui figurant dans « Données sociales » édition 1978, INSEE,
p. 7S-79. II a été élabore par Nicole Schmitz.
62
« effet » différentiel du nombre d’enfants sur le taux d’acti- Ainsi les observations faites ci-dessus sur la signification du
vité (baisse plus grande de ce taux, quand croit le nombre travail des feninies perniettent d’iiiterprćter Inc augmen- tations
d’enfants, pour Îes femmes d’ouvriers que pour les femmes des taux de féminisation des deux catégories, de professeurs
de ca‹lres), ou bien « effet » diíférentiel de l’activité sur la d’une part, et d’ouvriers non qualifiés d’autre part. Le fait que les
fécondité : l’écart de fécondité entre actives et inaetives est eatégories professionnelles soient iné- galement féminisées, et que
plus grand chez les ouvriers que chez les cadres. Le fait leur féminisation augmente
que ces effets puissent etre lus dans les deux sens (influence
du nombre d’enfants sur le taux d’activité, influence de l’acti-
vité sur la fécondité) montre les dangers des interpretations
de type causal, en terme de variables « explicatives » et «
expli- quées », qui, en l’occurence, apparaissent comme de
simples artifices de presentation.
Mais, de ce que l’écart entre nombres moyens d’enfants
à charge des actives et des inactives est plus élevé en milieu
ouvrier qu’en milieu aisé, on peut déduire que si la fécondité
des femmes d’ouvriers est élevée, celle des ouvrières (et des
employees) est basse. II est peut-être possible de distinguer
au sein de la elasse ouvrière deux types de famille : celle
où la femme est inactive, peu ou non diplômée, le mari
plutôt ouvrier spécialisé 13 , à la fécondité élevée, et celle
où la femme est ouvrière ou employee, un peu plus
diplômée, le mari plutôt ouvrier qualifié, à la fécondité
plus basse. II est possible que les premières soient plus
proehes du modèle paysan, tandis que les secondes seraient
de milieu ouvrier plus ancien : il faudrait pour verifier cela,
eroiser ces informations avec les professions des pères des
deux conjoints, et en particulier de celui de la femme. Des
recher- ches actuelles, menées par C. Thélot, suggèrent une
telle interpretation *4. Là encore, un cumul d’informations
per- met de distinguer, au sein cette fois de la classe
ouvrière, des fractions relativement différentes . il est
probable par exemple que les probabilités de faire des études
sont plus élevées eliez les enfants de ta seconde fraction que
chez ceux de la première.

Des classes, des hommes et des femmes


Un problème elassique de l’utilisation des nomenclatures
soeioprofessionnelles est celui de l’unité statistique classée :
l’individu ou le ménage. Si les recensements ou les enquètes
destinés à classer la population active sont centrés sur l’indi-
vidu, les enquètes sur Îes conditions de vie et, de façon géné-
rale, les pratiques liées à la vie familiale, font l’hypothèse
que le milieu social est largement déterminé par la profes-
sion du mari, ou plutôt du chef de ménage. La prise en
compte de l’aetivité et de la profession de la femme
permettrait bien sûr déjà de nuancer te code des catégories
sociopro- fessionnelles mais ce serait succomber à une forme
du féti- chisme de la catégorie que de chercher à isoler l’ «
effet » de tels classements sur des variables diverses, sans
voir que l’aetivité de la femme résulte elle-mème de façon
complexe de l’ensemble des images liées aux róles respectifs
des hommes et des femmes. II est done particulièrement
difficile d’isoler les effets de l’activité et de la profession de la
femme, effets de toute façon largement ditférents d’un
milieu à l’autre.
SM 'ł 60 2,0
rapidement dans certains cas, contribue à compliquer les qualités, dites féminines, de la minutie et de49180
Cad re supérieur financier (79.02). .
l’attention).12,4
« images modules » dos categories qui sont à l’œuvre Cad re su périeur com
L’ensemble desmeremarques
rciz I (79.03) ..........
qui précèdent, tant sur l’exem-
177 680 14,5
Cadre su pèrieu r (persc nnel ou formation) (79.04) 8120 21,7
dans la presentation ou la lecture des tableaux ple de la fréquentation
Géran t de soci útó (79.05) . du café que sur celui de
37 200 la fécondité
20,4
Fonction nai re supérieu r et 139 740 26,6
statistiques. Ainsi par exemple, la proportion de et de l’activité feminine, montre que l’on ne peut isoler
femmes parmi les profec•seurs est croissante et est un « effet catégorie-soeiale » et un « effet sexe », que l’on
maintenant d’à peu près 50 %\ l’irriage modale de la pourrait, par des procedures statistiques adéquates, analyser
catégorie est pourtant encore largement mascu- line. De séparément. Ainsi, pour comparer les salaires des hommes et
meme, le fait que la part des femmes parmi les ouvriers des femmes, on est souvent tenté de raisonner pour un
specialises et les manœuvres se soit rapidement accrue emploi donné (« à travail égal, salaire égal »), alors que
(atteignant respectivement 27 % et 38 % en 1975), alors le problème de fond est que justement, non seulement les
qu’elle est décroissante parmi les ouvriers qualifies femmes n’oecupent pas les memes emplois que les hommes,
(:t3 % en 1975), est masquée par le fait que l’image mais que Îa définition, le poids social et done le salaire
modale de la classe ouvrière reste largement masculine correspondant aux emplois est fortement determine par ta
et française, alors que la main-d’œuvre ouvrière non proportion des femmes qui les occupent : à la limite, les
qualifiée est de plus en plus formée de femmes et salaires correspondant aux emplois exclusivement (ou quasi-
d’immigrés (45 % en tout en 1975). Ces augmentations exelusivement) masculins ou féminins ne peuvent faire
ne peuvent pas faire l’objct d’un commentaire unique et l’objet d’aucune comparaison entre hommes et femmes,
indifférencié sur l’évolution des mœurs : elles relùvent et ces emplois sont fort nombreux : un très grand nombre
de logiques totalement differentos. Celle des professeurs de catégories d’ouvriers on d’employés, les personnels de
est liée aux modifications des images relatives de service, tes infirmières, tes ingénieurs, les cadres dirigeants
l’homme et de la femme (en particulier de l’activité de la des administrations et des affaires, etc. Dans tous les cas,
femme) en milieu supérieur et moyen, et on ne peut ni étudier les inégalités entre categories en faisant
corrélativement, à t’extension rapide de l’enseignement abstraction de leur féminisation, ni analyser les inégalités
secondaire dans les années 60, ayant requis un entre les sexes en omettant let probabilités très différentes
recrutement large, mais impliquant une certaine baisse qu’ont les hommes et les femmes d’occuper tel ou tel emploi.
de la position sociale de eet enseignement. La croissance
de ta féminisation des ouvriers non qualifies en
revanche, ne peut etre séparée de la baisse de celle des 13. En 1975, étaient inactives 56 % des femmes d’ouvriers
specialists et manœuvres et seulement 50 % de celles d’ouvriers
ouvriers qualifiés (due en partie à la regression des
qualifiés.
industries textiles et de l’habillement) et de la 14. kn pays de Loire, en 1977, les ouvriers fils de paysans
tendanee à la bipolarisation des qualifications ouvrières, avaient en moyenne 3,2 enfants, et les ouvriers fils d’ouvriers
qui recoupe en partie l’opposition entre les emplois 2,9 enfants [23].
mascu- lins et féminins (ces derniers impliquant les

Systèmes complexes alors appuyer des analyses faites en termes relationnels,


c’est-à-dire mettant en relation des milieux sociaux, et
et principes générateurs de comportement compa- rant systématiquement des structures très complexes.
L’accumulation et )e croisement d’analyses portant sur des
Les analyses en termes de catégories socioprofessionnelles phénomènes i ariés, mais liés entre eux, pour un milieu
ont moins pour but de mesurer les inégalités, et encore moins social donné, par un principe générateur commun, permet
de fournir des comparaisons, d’une époque à l’autre ou d’un de donner sa vraisemblance à l’interprétation d’un phéno-
pays à l’autre, que de permettre de comprendre comment mène isolé; mais en revanche, l’analyse de n’importe quel
les différences entre les milieux sociaux s’articulent entre comportement ou pratique peut permettre de renvoyer
elles, se renforcent mutuellement, et pourquoi il est diffi- à l’ensemble des autres pratiques et à leur principe généra-
cile d’isoler tel ou tel « indicateur social », réputé quantifier, teur : chaque fil renvoie à l’ensemble du tricot.
de façon plus ou moins synthétique, les inégalités. Soit
par exemple deux mécanismes fondamentaux (parmi Ce principe générateur a été lui-même engendré par
d’autres) par lesquels les structures des inégalités se l’ensemble des pratiques antérieures de l’agent et de son
reproduisent et se transmettent : l’école et le mariage. Les environnement, et, incorporé aussi profondément que
processus par lesquels les enfants sont orientés vers telle ou peut l’etre le langage, lui permet de reproduire, et éventuelle-
telle filière scolaire, s’y maintiennent ou en sont éliminés, ment de modifier, des pratiques liées entre elles par une
résultent eux-mêmes de toute l’histoire sociale de leurs cohérence profonde [13 - p. 174 à 189] : antérieur, peut-être,
parents et de leurs ascendants plus lointains, qui imprime en à tout système normatif conscient, il est, de meme que le
eux l’idée, la possibilité, éventuellement l’ambition, de langage, une sorte de « programme », au sens de l’informa-
suivre telle ou telle scolarité : peut-on analyser des tique. Ceci ne signifie pas, bien sûr, que l’individu soit tota-
différences de proba- bilités d’accès aux diverses filières, en lement « programmé », mais que nombre de ses compor•
faisant abstraction des systèmes de références culturelles, tements, et en particulier les plus apparemment naturels,
professionnelles, éthiques, conscients et plus souvent encore peuvent etre étudiés en partant d’une telle hypothèse de
inconscients, des diverses catégories sociales? De meme le recherche, qui n’est pas un dogme, mais une manière de
mariage réunit deux indi- vidus dotés eux-memes d’histoire6 regarder le réel, un point de vue, au sens que Saussure donne
sociales et d’atouts variés. Peut-on analyser la fécondité du à cette expression '*.
couple, la gestion de son patrimoine, la manière d’éduquer
les enfants, la probabilité de divorce éventuel, sans prendre
en compte finement à la fois les milieux sociaux d’origine
des conjoints, leur milieu social actuel, les images
dominantes des roles masculins et féminins dans ces milieux 15. Û. DE S/.USSURE, Comm de linguistique générale, p. 23 :
d’origine et actuel? « Bien loin que l’objet précède le point de vue, on dirait que c’est
le point de vue qui crée l’objet, et d’ailleurs rien ne nous dit
Seules de telles analyses permettent de restituer aux des-
d’avance que l’une de ces manières de considérer le fait en ques-
criptions du système scolaire ou de la famille des principes ti‹in soit antérieure ou supérieure aux autres » [24],
d’intelligibilité : les divers indicateurs statistiques viendront
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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METHODES 65

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