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ISBN : 978-2-8041-8035-5
www.deboeck.com
P U B CAR PACK lapub.deboeck.com
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consultez notre site web: www.deboeck.com
Imprimé en Belgique
Dépôt légal :
Bibliothèque nationale, Paris: décembre 2013
Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles: 2013/0074/088 ISBN 978-2-8041-8035-5
REMERCIEMENTS
En l’an 2000, je débutais mes études en Sciences de l’Information et de
la Communication (SIC) à l’université de Nice-Sophia Antipolis, dans le sud de la
France. Après un DEUG arts, j’avais décidé d’opérer un changement de cursus, au
vu notamment des mes aspirations professionnelles. En effet, le milieu de la publi-
cité et des agences de communication me faisait déjà rêver. Ce que j’admirais par-
dessus tout, c’était la capacité des publicitaires à communiquer à des milliers de
personnes un message identique et à faire en sorte que tous le comprennent de
la même manière, de façon à ce que, in fine, les marques soient puissamment
ancrées dans l’esprit des consommateurs… Je n’avais aucune idée des mécanismes
d’influence et je ne savais pas que, treize ans plus tard, j’en ferais mon domaine
d’expertise. Avant de vous expliquer comment l’idée d’un livre sur les techniques
de persuasion dans la publicité m’est venue, il est important de souligner que cet
ouvrage est le fruit de rencontres humaines toutes plus enrichissantes les unes que
les autres.
J’aime à penser que nous avons tous besoin d’un mentor ou d’un modèle pour
avancer dans nos propres vies. Celui-ci peut se trouver dans le noyau familial,
un cercle d’amis, le couple ou encore parmi des personnes qui vont croiser votre
chemin. Mes premiers remerciements vont tout naturellement à Didier Courbet,
Professeur ordinaire en Sciences de l’Information et de la Communication à l’uni-
versité d’Aix-Marseille qui a su, dès mon inscription en SIC, me transmettre sa
passion pour la communication d’entreprise. Je me considère comme un de ses
« disciples », et il est évident que mes réflexions dans cet ouvrage sont souvent l’ex-
pression d’une influence « courbetienne ». Merci à lui également d’avoir consacré
un peu de son temps à signer la postface de ce livre.
Concernant l’idée de cet ouvrage, comment m’est-elle venue ? On m’a demandé
d’intervenir sur une chaîne régionale suisse en tant que décrypteur de publicité.
Je devais vulgariser les connaissances scientifiques permettant de déchiffrer la
publicité et ses mécanismes d’influence, et animer la rubrique « conso » du jour-
nal télévisé. Au-delà d’une appréciation basique des publicités, je me suis rapide-
ment dirigé vers un décodage plus scientifique. Ainsi, pendant un an, j’ai mis en
place des expériences auprès de centaines de consommateurs en Suisse pour tester
divers mécanismes de communication de la publicité mass media et évaluer leur
impact sur des scores marketing traditionnels (agrément, reconnaissance, mémori-
sation, etc.). Je tiens donc à remercier chaleureusement le rédacteur en chef adjoint
6 LA PUB QUI CARTONNE
labrador noir rythmaient en toile de fond notre discussion. Ainsi, je remercie sin-
cèrement Étienne Francey, CEO de l’agence Etienne & Etienne de Genève, recon-
nue en Suisse comme le partenaire dans la communication pour les organisations
à but non lucratif.
Pour que je puisse analyser ce corpus de connaissances sereinement et respecter
toute la rigueur méthodologique d’un bon qualitatif, un acteur de l’ombre m’a
aidé en retranscrivant ces entretiens, dont la durée variait de 55 minutes à deux
heures. Au total, il s’agissait de plus d’une centaine de page de données brutes. Je
remercie Valentino Scarcia pour la qualité de son implication dans ce projet.
Enfin, le « coin des consommateurs » n’aurait pu voir le jour sans les quelques cen-
taines de participants à mes expériences marketing : merci à vous, chers cobayes.
Il faut imaginer que cette partie représente l’équivalent de plus de 5000 question-
naires, qui ont dû être administrés et analysés avec le logiciel SPSS.
Si vous avez acheté ce livre et que vous le consultez, c’est aussi grâce à mon éditeur
De Boeck ; je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont fait confiance.
Merci aussi aux collègues de la HEG Arc, qui m’ont témoigné leur soutien durant
l’écriture de l’ouvrage, ainsi qu’aux étudiants, qui se sont intéressé régulièrement à
l’état d’avancement de ce livre. Merci en particulier à Olivier Kubli, Directeur de la
HEG Arc à Neuchâtel et à François Petitpierre, Responsable de la R&D pour m’avoir
permis de concilier le travail et l’écriture de ce livre. J’adresse des pensées toutes
chaleureuses à ma mère Annie, mon grand frère Fabrice et mon père André qui
m’ont toujours suivi de près ou de loin dans mes activités professionnelles !
Si, tout à l’heure, je vous ai parlé de l’importance de la relation entre le mentor
et son disciple, je dois en dernier lieu rendre hommage à celle qui m’accompagne
depuis quelques années, dans les bons comme dans les mauvais moments, celle qui
me donne une force incroyable, une envie de déplacer les montagnes, celle qui tire
le meilleur de moi-même… merci à Karin Masselink, tout simplement.
Chers lecteurs, êtes-vous prêts à voyager dans l’univers merveilleux des techniques
de la persuasion publicitaire ? Vous êtes étudiant en communication et marketing,
professionnel de la communication, professeur en école de commerce ou à l’uni-
versité ou encore chef d’entreprise ? Ce livre vous invite à visiter les arcanes de la
communication et ses techniques d’influence avec un regard neuf et acéré.
Je vous remercie d’avoir acheté ce livre et vous rappelle que le site compagnon,
lapub.deboeck.com, sera animé régulièrement par mes soins avec de nouveaux
contenus et que vous pouvez partagez vos réflexions sur mon blog personnel,
www.julienintartaglia.com.
PRÉFACE
Si vous pensez que vous avez tout lu sur la publicité et les leviers de son
efficacité. Si vous pensez que les discours sur l’art publicitaire sont convenus, dépas-
sés ou encore arrogants et que parfois même ils cumulent tous ces défauts. Si vous
pensez que réfléchir sur la publicité n’est qu’une tentative de manipulation de plus.
Si vous pensez au contraire que nous ne sommes pas aliénés et que la publicité
nous laisse libres de nos choix et de nos pensées. Si vous pensez que la publicité
est une affaire de savants. Si vous pensez que la publicité est une affaire d’artistes.
Si vous pensez que la publicité est une affaire de magiciens. Et si vous pensez tout
court… alors ce livre est pour vous ! Car La pub qui cartonne vous fera reconsidé-
rer toutes vos certitudes en vous ouvrant un champ de perspectives multiples qui
ont rarement été conjuguées ainsi.
L’ouvrage de Julien Intartaglia va vous agacer par moments, car il vous semblera
avoir omis un point important, mais vous découvrirez que c’est afin de mieux
vous faire comprendre les ressorts de la publicité qu’il a choisi de l’évoquer plus
tard… pratiquant en cela l’art de la persuasion qu’il décode si bien dans ce livre. Il
vous captivera en vous apprenant des concepts nouveaux, issus du marketing, des
sciences cognitives, des neurosciences. Enfin, il vous surprendra par ses positions
parfois ambivalentes, mais toujours nuancées sur la publicité. Bref, vous allez faire
fonctionner vos neurones, votre sens critique et les papilles du plaisir de la décou-
verte seront maintes fois activées. Vous saurez même pourquoi votre cerveau est
satisfait de ces lectures.
L’articulation très originale selon trois dimensions permet d’entrer de façon simple
(mais pas simpliste…) dans le monde de la publicité et des médias et précisément
d’en comprendre toute la complexité : conjugaison de la théorie avec l’approche
scientifique sur la persuasion, de la pratique avec les témoignages des profession-
nels et surtout l’analyse qui en est faite, et enfin de la sociologie avec un regard
particulier sur le consommateur. À aucun moment, le lecteur n’est laissé « sur le
pavé », grâce aux très nombreux exemples qui illustrent les propos de l’auteur.
En abordant ces points de vue différents, il nous fait comprendre ce qui marche
(ce qui cartonne), comment ça marche (comment ça cartonne), mais plus intéres-
sant encore et rarement traité avec cette rigueur pourquoi ça marche (pourquoi ça
cartonne). Ce sont donc toutes les clés de la compréhension qui nous sont livrées,
car le pourquoi permet d’être beaucoup plus efficace pour tout nouveau cas. Cela
10 LA PUB QUI CARTONNE
Zysla Belliat
Présidente de l’Institut de la Recherche
et des Études Publicitaires (IREP)
À Karin et à notre fils…
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
POSTFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
BIBLIOGRAPHIE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
1 L’adn du bon communicant, un mythe ? 18 Je veux une veste, pas chère, belle et confortable…
2 Quatorze ans de votre vie à regarder la télévision, ah ben tiens, H&M !
forcément ça marque ! 19 Quand la pub joue sur les attitudes
3 Communiquer avec ses consommateurs, du client, quelles sont les conséquences
un exercice complexe ! sur son comportement ?
4 Le couple scientifique-publicitaire : fuis-moi, je te suis ! 20 Des marques accros au neuromarketing :
5 Respectez-vous le contrat de communication quelle application pour la publicité ?
avec votre consommateur ? 21 La notion de « cerveau reptilien »
6 De 1930 à 1960 : des publicités 22 Avons-nous un bouton d’achat dans le cerveau ?
visant un consommateur très rationnel 23 Les origines du neuromarketing
7 Mais pourquoi les publicitaires utilisent-ils 24 Mmmh c’est bon Pepsi, mais je préfère Coca-cola !
des femmes nues pour vendre ? 25 Les arguments des anti-neuromarketing
8 Le mécanisme stimulus-réponse, l’approche 26 Le neuromarketing, un coup de pub ?
behavioriste en pub 27 Comment accéder à votre inconscient ?
9 Le B. A.-Ba de la communication, ne partez pas sans ! Présentation de trois méthodes
10 J’ai faim, je veux manger vite et pas cher… 28 L’électroencéphalogramme
Mcdonald’s ! 29 L’imagerie par résonance magnétique (IRM),
11 Le modèle du « two step flow of communication » un outil controversé
revisité 30 La cognition implicite, nouvel eldorado
12 1… 2… 3… 4… 5 Étapes pour persuader des publicitaires ?
votre consommateur 31 Les consommateurs allouent une attention faible
13 Quelle attention accordez-vous aux marques aux communications marketing
dans un james bond ? 32 L’approche psychosociocognitive de la réception
14 Quand le produit devient symbole de la pub
15 La familiarité en publicité, la clé de la réussite ? 33 Un peu de vocabulaire en cognition implicite…
16 Bienvenue sur l’autoroute de la persuasion, 34 Le questionnaire de temps de réaction, pas cher
choisissez votre voie ! et efficace
17 Quel profil pour un consommateur fortement 35 Zoom sur le modèle de la fluidité de traitement
ou faiblement impliqué ? 36 La douce persuasion implicite des advergames !
16 LA PUB QUI CARTONNE
Le problème, c’est qu’il existe une croyance selon laquelle tout le monde peut faire de
la communication. Tant de personnes pensent ainsi avoir la fibre du communicant ! En
effet, il n’est pas rare de voir des autodidactes monter leur agence de communication sans
pour autant disposer d’une culture approfondie de la communication et du marketing.
Combien de chefs d’entreprise ai-je rencontré pour qui communiquer se résume au simple
fait d’avoir un site internet, de distribuer des flyers ou d’organiser une campagne d’affi-
chage, sans avoir au préalable décidé d’un objectif de communication ou même défini son
public cible ! Combien investissent dans des campagnes d’« habillage bus » sans pour autant
comprendre les habitudes de consommation des médias du public de la ville en question ?
Combien d’entrepreneurs restent focalisés sur leur idée du produit et oublient de s’intéres-
ser à leurs clients ? Ils finissent par se retrouver dans une espèce de « Myopie marketing »
(Théodore Levitt, 1975). Comme le dit si bien Rémi Babinet (président de BETC Euro RSCG),
en publicité, « souvent on émerge par le talent ou par l’argent, mais il y a des gens qui
émergent très bien avec beaucoup d’argent sans beaucoup de talent ». En effet, combien
d’entreprises investissent des sommes colossales pour crier plus fort que la concurrence ?
Comprendre comment la publicité a un impact sur les pensées, les opinions, les atti-
tudes et les comportements des individus dans la vie de tous les jours, c’est faire le
grand écart en permanence entre divers champs disciplinaires tels que les sciences de
l’information et de la communication, les sciences de gestion, la psychologie sociale,
la psychologie cognitive, la sociologie de la communication, l’ethnologie et l’anthro-
pologie de la communication.
Nous avons une espérance de vie moyenne de 80 ans et, à partir de l’âge de
cinq ans, nous passons en moyenne trois heures trente par jour devant le petit écran,
ce qui représente 123 187 heures, soit quatorze années pleines à regarder la télévi-
sion, selon les données présentées dans le documentaire de Christophe Nick, Le jeu
de la mort 2. Si ce documentaire s’attache au final à démontrer l’emprise du média
2 Le jeu de la mort (2010) est un documentaire auquel une équipe de grands scientifiques (Jean-
Léon Beauvois, Dominique Oberlé et Didier Courbet) ont apporté leurs compétences pour
transposer la fameuse expérience de Milgram des années 1960 sur un plateau de jeu télévisé,
afin d’étudier le principe de soumission à l’autorité (l’autorité ici étant le système télévisuel,
représenté par l’animatrice Tania Young).
18 LA PUB QUI CARTONNE
télé sur nos vies, nos pensées et nos comportements, il importe de comprendre que
c’est à ce contexte d’exposition permanente aux médias (mass media 3, hors médias 4
et numérique) que le consommateur actuel est soumis, et que ce n’est pas sans consé-
quences sur son rapport à la communication des marques. Ce premier constat doit
être intégré en préambule à toute réflexion sur la communication.
En l’espace d’un siècle de réflexion sur la persuasion publicitaire, la manière de
voir le consommateur et sa réception des messages publicitaires dans les médias a
largement évolué.
3 Par mass media traditionnels, nous faisons référence à la télévision, l’affichage, la radio, la
presse écrite et le cinéma.
4 Derrière le terme de « hors médias » ou « below the line » se cachent les formes de commu-
nication suivantes : les relations publiques, les relations presse, le sponsoring, la communica-
tion événementielle, les foires et salons, la promotion des ventes et le marketing direct. Pour
avoir plus d’informations sur les hors médias, vous pouvez consulter Le Publicitor, l’ouvrage
généraliste sur la publicité (Lendrevie et coll, 2008).
5 Cette expression anglophone se traduit littéralement comme « pomme de terre de divan » et
fait référence à l’inactivité du spectateur avachi sur le canapé devant son poste de télévision.
6 Top Chef est un grand concours de cuisine réservé à des professionnels sur la chaîne M6. Pour
plus d’informations, se rendre directement sur le site www.m6.fr
LE COIN DES THÉORIES SUR LA PERSUASION 19
Nous voyons bien, au travers de cet exemple, que la nature du média, ici l’Internet,
bouleverse les modes d’influence de la publicité et place le consommateur face au
choix de rentrer ou non dans un échange avec la marque.
par exemple). En effet, un acheteur peut à la fois voir une publicité à la télévi-
sion pour le téléphone portable iPhone 5 de la marque Apple à l’occasion de
son lancement et être exposé, en même temps, à des forums de consomma-
teur donnant leurs opinions (positives ou négatives) sur le produit en question.
Quand il sort dans la rue, il verra également des dizaines d’utilisateurs télé-
phoner ou surfer sur le web grâce à l’iphone... il s’agit là encore d’un point de
contact ! Toute la difficulté pour une marque réside dans la cohérence entre
des flux de communication volontaires et involontaires 7.
2) Le nombre de communications marketing auxquelles le consommateur est
exposé en moyenne, du matin jusqu’au soir. Certains chercheurs (Galey in
Droulers, 2004) évaluent l’exposition aux marques quotidienne du consom-
mateur français à plus de 1500 contacts en moyenne ; des professionnels de
la branche avancent le chiffre de 3000 contacts (Stratégies, juin 2006). Morin
(2011), spécialiste du neuromarketing, parle même de 10 000 contacts par jour
avec des messages de marques !
3) L’attention du consommateur n’est pas dirigée sur la publicité. Au moment où
le consommateur voit une publicité, il alloue peu de ressources attentionnelles
au message commercial, puisqu’il est souvent occupé par d’autres tâches (McInnis
et coll, 1991). Prenons l’exemple suivant : quand un individu se rend sur Internet
pour aller chercher de l’information relative à son travail, il sera confronté à de
multiples messages commerciaux (AdWords8 de Google, bannières publicitaires
traditionnelles, etc.). Du point de vue cognitif, il focalise son attention sur sa
recherche, à tel point que, lorsque la publicité entre dans son champ visuel, elle
a une forte probabilité d’être « aussitôt vue, aussitôt oubliée ». Dans la partie de
ce livre sur les neurosciences et les modèles de persuasion issus de la psycholo-
gie sociale et cognitive, nous verrons que cette brève apparition peut avoir un
impact sur le opinions, pensées, jugements et comportements du consommateur.
4) Un rééquilibrage du pouvoir dans l’interaction marque-consommateur, grâce
au web. En ce sens, l’acheteur a la possibilité de prendre la parole, sur un
forum ou un blog, au sujet de l’annonceur et de ses produits et de toucher
des milliers de personnes une fois son opinion publiée en ligne.
7 Par défaut, la « communication d’entreprise », c’est avant tout les flux d’information volon-
tairement diffusés par un émetteur, ici la marque.
8 Selon Harold Davis (2006), la publicité AdWords de Google se définit comme une publicité
contextuelle, dans le sens ou la publicité proposée par le moteur de recherche est pertinente
en fonction de la recherche et des mots clés entrés par l’individu.
LE COIN DES THÉORIES SUR LA PERSUASION 21
Mon optique, dans la première partie de cet ouvrage, consiste à vulgariser les
modèles fondamentaux de la persuasion qui ont été, d’une part, utilisés ou vali-
dés scientifiquement et qui, d’autre part, sont facilement opérationnels pour une
marque souhaitant comprendre les enjeux de la réception en publicité et s’engager
sur la voie d’une communication plus efficace auprès de son public. Ces modèles sont
analysés et connectés avec d’autres concepts, et l’analyse ne suit pas forcément leur
ordre chronologique d’apparition.
Pourquoi cette notion du contrat est-elle essentielle dans un livre sur la persuasion
publicitaire ? De la petite enfance jusqu’à la fin du processus de socialisation du jeune
consommateur (Ward, 1974 ; Roedder, 1999 ; Intartaglia, 2013), nous acquérons des
13 La vente flash se caractérise par le fait de proposer aux consommateurs des rabais de 30 à
70 % pour diverses catégories de produit allant de l’électroménager aux produits high-tech
et aux montres de luxe, sur une période limitée (un ou deux jours).
14 La Suisse romande est la partie francophone de la Suisse.
LE COIN DES THÉORIES SUR LA PERSUASION 23
connaissances sur les marques et la consommation et, plus spécifiquement, sur la publi-
cité et ses techniques d’influence. En effet, à cinq ans, nous savons différencier un pro-
gramme télévisé d’une publicité et nous pouvons ainsi identifier un espace publicitaire
payant (Palmer et coll, 1979 ; Butter, 1981 ; Achereiner, 2003). De sept à onze ans, nous
comprenons les intentions cachées derrière des messages commerciaux.
Nous avons vu que la notion et la signification de ce contrat de communication se
construisent au fur et à mesure que nous avançons en âge. D’une certaine manière,
si l’annonceur et le consommateur sont conscients de ces enjeux d’influence et
comprennent bien les règles liées au contrat de communication, alors le processus
de persuasion répond à une certaine éthique, puisque le consommateur peut faire
face cognitivement aux tentatives persuasives auxquelles il est exposé.
Il est essentiel d’élargir cette notion de contrat de communication (Chabrol, Courbet,
Fourquet-Courbet, 2004 ; Georget et Chabrol, 2000) à un champ plus large dans
le domaine de la communication publicitaire. Il apparaît que cette notion touche
d’une part les publicitaires et d’autre part les récepteurs de leurs campagnes.
Tout au long de cet ouvrage, gardez à l’esprit qu’il existe principalement deux
formes de communications marketing :
– la communication ou le récepteur n’est pas conscient 15 qu’une marque
cherche à le persuader ou ignore comment elle peut l’influencer. Dans ce
cas précis, le récepteur ne connaît pas les règles et les enjeux du contrat
liant l’émetteur au récepteur. Rappelez-vous de l’exemple, plus haut, du
placement de produit, où la marque est insérée dans un film, un jeu vidéo,
un livre, etc. ; ce qui fait que le degré de scepticisme du consommateur
baisse au point que ce dernier se laissera facilement influencer.
– la communication ou le récepteur est conscient que la marque cherche à
le persuader et sait exactement comment elle peut l’influencer. Rappelez
vous de l’exemple de la communication dans les mass media (télévision,
affichage, etc.), où le consommateur a intériorisé des connaissances sur la
publicité, ses techniques et ses intentions, si bien que dès que le contact se
produit avec une publicité à la télévision, par exemple, il sait que les inser-
tions publicitaires sont payantes et que les marques vont tenter de le per-
suader. C’est à cet instant que le degré de scepticisme augmente et fait
« buter » l’acte persuasif sur un obstacle de taille.
15 Voir plus loin la partie sur les neurosciences et l’apport de la cognition implicite dans l’étude
des effets de la publicité sur le comportement.
16 Voir Dayan, 1998.
24 LA PUB QUI CARTONNE
un individu ultra-rationnel qui ne prend pas ses décisions sous le coup d’une
émotion. En effet, le consommateur serait conscient des critères qui le pous-
sent à acheter et c’est pour cette raison précisément que, dans un souci d’ef-
ficacité, la publicité véhicule des informations sur l’utilité du produit et un
argumentaire concret avec le prix, la longévité d’un produit, etc. À l’instar de
la campagne ci-dessous pour la marque Cadum, la promesse faite au consom-
mateur est simple : utilisez notre savon et votre peau aura une douceur compa-
rable à celle d’un bébé ! Ce modèle de l’acheteur rationnel n’existe pas vraiment
dans la réalité, comme le souligne Armand Dayan (1998). Nous verrons effective-
ment que ce consommateur se situe au milieu d’un carrefour entre le rationnel
et l’émotionnel et que, bien souvent, il adopte un discours rationnel pour justi-
fier son comportement d’achat.
Quelques années plus tard, c’est une vraie révolution qui s’opère avec la
psychanalyse. Finalement, le consommateur ne serait pas conscient des raisons
qui lui permettent de prendre ses décisions. Ces mêmes raisons se situeraient
dans le ça, autrement dit dans ce que les psychanalystes appellent le « réser-
voir des pulsions profondes de l’individu ». Tout le travail du publicitaire rési-
dera dans l’identification et l’utilisation de ces désirs enfouis profondément
dans l’esprit du consommateur. Le problème, c’est que ces désirs sont en conflit
avec le surmoi. Ainsi, la publicité va devoir « feinter » et donner des arguments
qui seront perçus comme socialement acceptables. Après le contact publicitaire,
l’individu se trouve dans un « conflit intrapsychique » qui ne peut être résolu
que par l’achat du produit en question. Dans l’ouvrage La persuasion clandes-
tine (V. Packard, 1958), l’auteur indique bien que la psychanalyse des foules
joue un rôle fondamental dans les campagnes de persuasion pour inciter les
LE COIN DES THÉORIES SUR LA PERSUASION 25
individus à acheter des produits, adopter des idées, changer d’opinion ou modi-
fier un comportement, etc.
Dans La stratégie du désir, Ernest Dichter (1961) évoque des motivations incons-
cientes, comme par exemple la peur du changement ou le besoin d’être traité de
manière égale, et tout ceci finit par se retrouver dans le discours publicitaire des
marques de l’époque 17 ! C’est donc dans cette période de recherches sur les moti-
vations profondes que des messages publicitaires vont commencer à véhiculer des
contenus érotiques ostentatoires ou plus discrets.
L’érotisme dans la publicité est par ailleurs souvent sans lien avec le produit ou
le service publicisé. Diffusé pendant plus de deux ans dans le cinéma CGR d’An-
goulême, un spot pour l’annonceur Digital 18 (ci-dessus) proposait une vision de la
« femme objet » pas du tout au goût d’une association féministe, ce qui a finale-
ment conduit le patron de l’entreprise à retirer cette publicité.
En effet, sans lien apparent avec le produit, la femme cachait son pubis avec
divers appareils électroménagers pour promouvoir la marque Digital. Des exemples
comme celui-ci, où la nudité du corps de la femme est utilisée à des fins mercan-
tiles sans pour autant que cet usage soit justifié par la catégorie de produit qu’on
cherche à vendre, il en existe pléthore.
17 Pour approfondir le sujet, je vous conseille de lire l’article « Les années 50 dans les recherches
en communication » de Jules Gritti (1999).
18 Pour lire toute l’histoire, rendez-vous sur www.europe1.fr.
26 LA PUB QUI CARTONNE
19 Le modèle behavioriste de Pavlov (cf. Fourquet, 1999) suggère qu’il est possible de condition-
ner un chien avec un stimulus (os), qui va à son tour engendrer une réponse comportementale
(salivation). Pavlov présente un os à un chien, ce qui entraîne un comportement de salivation.
Lorsque Pavlov secoue une clochette devant le chien, ce dernier ne réagit pas. Quand Pavlov
associe la clochette et l’os, alors le chien salive. Il répète l’expérience avec la clochette seule,
et le chien salive en l’absence d’os.
LE COIN DES THÉORIES SUR LA PERSUASION 27
souvent impliqués dans d’autres tâches prioritaires et nous n’avons par for-
cément besoin d’acheter le produit publicisé. À ce niveau, la difficulté est
de suciter l’intérêt d’un consommateur pour un produit, un service, une
cause dont il n’a peut être pas besoin au moment où il entre en contact
avec la communication.
3) Désir : À ce stade, l’objectif est de créer ou de maintenir le désir pour le
produit, le service ou la marque publicisés.
4) Achat : Il s’agit de « transformer l’essai » et de conduire le consommateur à
l’acte d’achat. C’est l’étape ultime que tout annonceur souhaite atteindre.
REMERCIEMENTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
SOMMAIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
PARTIE 1
Le coin des théories sur la persuasion ................................. 15
28. L’électroencéphalogramme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
PARTIE 2
Le coin des pros de la communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
1. Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
PARTIE 3
Le coin des consommateurs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
1. Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
POSTFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
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