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« la division du travail, la ville, des institutions nouvelles, un espace culturel commun à toute
la chrétienté et non plus incarné dans le morcellement géographique et politique du Haut
Moyen Age, voilà les traits essentiels du nouveau paysage intellectuel de la chrétienté
occidentale au tournant du XII au XIII e siècle. » p.III
Le lien avec la ville : essentiel pour la construction du modèle de cet intellectuel médiéval.
Clivage entre école monastique et école urbaine ouverte à tous, en principe.
Cite Rutebeuf à l’époque de Saint Louis « Je ne suis pas ouvrier des mains ».
Avoue avoir privilégié les figures de proue et avoir écarté les compilateurs, les vulgarisateurs.
Explique ses limites et justifie ses choix – qui sont pour lui ces intellectuels médiévaux ? A
écarté ceux qui ont compilé, ceux qui ont créé des universités comme Robert de Sorbon (qui
lègue sa bibliothèque, la plus importante du 13e) . Regertte de ne pas avoir pu parler de Dante
ou de Chaucer.
Regrette aussi de ne pas avoir parlé du bas de l’échelle sociale ; des notaires, des
grammairiens, des avocats, des juges, de certains hommes d’Église, qui ont été les artisans de
la révolution de l’écrit et de la montée en puissance des villes.
Parle aussi des travaux de Jacques Verger sur les universités à la fin du Moyen Age – qui
amènent à réviser l’idée de l’opposition trop tranchée développée par Le Goff entre la
scolastique et l’humanisme. Se rend compte des nouveaux travaux qui soulignent le rôle des
universités dans la diffusion de l’imprimerie.
Introduction de 1957 :
Définition de l’intellectuel : « désigne un milieu aux contours bien définis : les maîtres des
écoles. Il s’annonce dans le Haut Moyen Age, se développe dans les écoles urbaines du XIIe
siècle, s’épanouit à partir du XIIIe dans les universités. »
« Il désigne ceux qui font métier de penser et d’enseigner leur pensée. »
Écarte les mots « clerc », mais aussi « Philosophe » – terme utilisé pourtant à l’époque.
Du coup ni les mystiques enfermés dans les cloitres, ni les chroniqueurs éloignés du monde
des écoles ne vont apparaitre dans ce livre.
Dans la fin de l’introduction, il cite Dante pour montrer que la fin du Moyen Age, comme la
Renaissance et l’humanisme, vont puiser à toutes les sources des courants de pensées
développées par les intellectuels médiévaux : « D’horizons différents, Dante les réconcilie, en
mettant dans son Paradis les 3 figures d’intellectuels du XIIIe : Saint Thomas, Saint
Bonaventure, et Siger de Brabant. »
En 1118 l’aventure avec Héloïse, l’émasculation lui font trouver refuge à l’abbaye de Saint
Denis puis à Nogent-sur -Seine où il donne des cours.
Figure opposée : Saint Bernard – mystique, reclus, choix de la force et de la croisade, voix de
la Chrétienté à la fin de sa vie, donne les ordres aux Papes, grand inquisiteur avant la date.
Son second : Guillaume de Saint Thierry. Condamnent Abélard dont les livres sont brûlés.
Abélard a d’abord été le grand champion de la dialectique avec son Manuel de Logique pour
débutants. C’est aussi un moraliste avec son Éthique ou connais-toi toi-même. Voudrait allier
la foi à la raison.
Chartres : le grand centre scientifique du siècle. « esprit de curiosité,
d’observation, d’investigation qui, alimenté par la science gréco-arabe, va rayonner ».
p.53 Le représentant le plus célèbre de cette école : vulgarisateur talentueux – Honorius
dit d’Autun, résume l’esprit chartrain : « L’exil de l’homme, c’est l’ignorance ; sa patrie,
c’est la science. » Se mettent en place des mythes des savants : Salomon le sage, Alexandre le
Chercheur, Virgile qui aurait annoncé le Christ. Esprit de recherche qui s’oppose selon Le
Goff à l’esprit rationnel, un divorce qui pèsera lourd sur la science médiévale. Esprit
rationnel : la base est la foi en la toute-puissance de la Nature. L’esprit chartrain place
l’homme au cœur de sa science, de sa philosophie et presque de sa théologie. C’est en
l’homme que s’opère l’union active de la raison et de la foi. Ex d’Adélard de Bath qui avoue
même se cacher sous les prétendus auteurs arabes quand une idée trop révolutionnaire lui
vient. Renouvellement de l’image de l’homme – microcosme, l’analogie entre l’univers et
l’homme. Le Goff cite D’Auluncomme exemple mais aussi Hildegarde de Bingen.
Reprise de la métaphore stoïcienne du monde-fabrique au sein de ce monde en plein
chantier urbain. L’homme est l’artisan qui transforme et crée : homo faber. Réhabilitation du
travail.
P.69 : « A ces artisans de l’esprit entraînés dans l’essor urbain du XIIe s, il reste
de s’organiser, au sein du grand mouvement corporatif couronné par le mouvement
communal. Ces corporations de maîtres et d’étudiants, ce seront, au sens strict du mot,
des universités. Ce sera l’œuvre du XIIIe s. »
2. LE XIIIe SIÈCLE. LA MATURITÉ ET SES PROBLÈMES – APOGÉE DES
UNIVERSITÉS
« Le XIIIe siècle est le siècle des universités parce qu’il est le siècle des
corporations. » p.73 On fixe les acquis, on s’associe pour protéger les nouveaux métiers. Les
universités par leur nombre et leur force inquiètent les autres pouvoirs. C’est en luttant contre
le pouvoir ecclésiastique ou laïc qu’elles acquièrent leur autonomie.
a) lutte contre l’église, au niveau local : les universitaires sont des clercs, sujets de l’évêque,
représenté par l’écolâtre puis chancelier qui ne veulent abandonner leur pouvoir. Sinon ce
sont les abbayes qui détiennent ce droit.
Ex à Paris, en 1213 le chancelier perd le privilège de conférer la licence, ce droit passe aux
maîtres de l’université. 1219-1231 après la grève, l’université soustraite à la juridiction de
l’évêque. A Bologne, le droit était considéré par l’Église comme activité séculière. Elle s’en
est désintéressée au départ.
c) allié puissant : le Pape. A Paris Célestin III accorde à la corporation ses premiers
privilèges en 1194. Intervention en 1231 du pape Grégoire IX et sa bulle Parens scientarum, –
considérée comme la première Grande Charte de l’Université. Une politique intéressée de la
part du Saint-Siège– il veut soustraire les universités aux pouvoir local de l’Église, mais c’est
pour les soumettre au Saint-Siège.p.79 « On favorise les intellectuels pour les domestiquer. »
L’université de Toulouse créée en 1229 à la requête des papes pour lutter contre l’hérésie
albigeoise. Les intellectuels des universités gagnent en indépendance en devenant les agents
pontificaux.
p. 81 exemple – dominicain Thomas d’Irlande décrit Paris fin 13 e comme divisée en 3 : la
grande ville constituée des marchands, artisans et peuple, la Cité composée des nobles, roi et
sa cour, ainsi que de l’église et la troisième partie : l’Université composée des étudiants et des
collèges.
S’attache à expliquer l’organisation des universités en prenant à chaque fois l’exemple de
Paris, d’Oxford et de Bologne. Dans les statuts universitaires étaient précisés : la durée des
études et les programmes. – essentiellement l’explication des textes, ainsi que les examens.
Mais aussi le climat religieux et moral – c’est-à-dire les fêtes et les divertissements collectifs
(bals en Italie, courses de taureaux en Espagne). Le Goff décrit les rites de bizutage comme
un passage de la bestialité à la civilisation.
Les statuts précisent aussi la piété des étudiants – les œuvres de bienfaisance, les prières, les
offices, les processions. Culte marial en plein essor – poème de Jean de Garlande – Stella
Maris.
Les outils : les livres, les pupitres, lampe de nuit, chandelier entonnoir avec de l’encre, une
plume, grattoirs pour le parchemin.
Révolution : « si les exercices oraux demeurent essentiels dans la vie universitaire, le livre est
devenu la base de l’enseignement. » p.95
Le Goff se base sur les travaux de paléographie de Père Destrez – qui souligne la
généralisation de l’utilisation de la cursive et surtout de la pecia – manière de copier par
cahier sur une pièce – la pecia. Le livre devient plus petit car doit être transportable.
L’abandon du roseau pour la plume d’oiseau, d’oie en général.
p.97 « Le livre n’est plus objet de luxe, il est devenu instrument ». L’ornementation diminue,
de plus en plus d’abréviations, rubrication, table des matières, liste d’abréviations, ordre
alphabétique dans la présentation. L’ère des manuels arrive. D’instrument, le livre devient un
produit industriel et objet commercial.
La Papauté décrète une série de mesures. 1179 lors du 3e concile de Latran, le pape
Alexandre III proclame la gratuité des études. Incite à créer près de chaque église paroissiale
une école où les maîtres ont leur existence assurée grâce à un bénéfice. – le Pape s’attache
ainsi les intellectuels et ralentit la laïcisation de l’enseignement. L’enseignement technique en
revanche – laïque.
La querelle des réguliers et des séculiers. Crise au XIIIe s. Opposition des séculiers
aux nouveaux ordres mendiants (surtout les dominicains et franciscains). Dominicains – lutte
contre l’hérésie. La plus violente crise à Paris entre 1252 et 1259. C’est l’affaire de Guillaume
de Saint Amour, un maître séculier, qui publie une attaque contre les frères – Les Périls des
Temps Nouveaux. Condamné par le pape et banni de l’université. Les griefs de Guillaume :
les ordres mendiants ne respectent pas les statuts de l’université et rompent la solidarité en ne
se mettant pas en grève. Prise de conscience de l’incompatibilité entre appartenance à une
corporation (même si elle est d’origine cléricale) et un ordre.
Les ordres mendiants sont défendus par les papes. La crise se durcit et devient
dogmatique, doctrinale à partir de 1265 : Guillaume de Saint Amour, Rutebeuf, Jean de
Meung défendent le statut des séculiers. Ceux qui défendent les Mendiants : Saint Thomas
d’Aquin et Saint Bonaventure.
« La lutte révèle tout ce que l’esprit universitaire avait d’opposé à tout un aspect de
l’idéal monastique, repris, revivifié mais porté aussi à son comble par les Mendiants. » p.113
La question de la mendicité et de la pauvreté les oppose – pour les intellectuels universitaires
on ne peut vivre que de son travail.
Trois étapes de cette crise : opposition universitaire, crise doctrinale (1265-1271), crise
épiscopale (1282-1290).
Mais c’est la fin des averroïstes. Siger de Brabant emprisonné en Italie est
probablement assassiné. Il a représenté la Faculté des Arts de l’université de Paris, où s’est
élaboré l’idéal le plus rigoureux de l’intellectuel.
Fin du XIIIe : les maîtres universitaires accaparent les hautes charges ecclésiastiques
et laïques : ils sont archidiacres, chanoines, conseillers, ministres, docteurs, théologiens,
légistes.
3. De l’universitaire à l’humanisme, le XIV e siècle
Le Goff parle du déclin du Moyen Age au XIV e : « une période de mue » – l’arrêt de l’essor
démographique, famines, les guerres transforment les structures sociales et politiques. C’est
l’ère du Prince.
Thèse : L’intellectuel du Moyen Age va disparaître au profit de l’humaniste. Une thèse très
inspirée par le marxime – dénigre les humanistes au nom de leur prétention à la noblesse et
l’éloignement des milieux populaires.
Évolution sociale :
P.139 « Il n’y a plus, avant des siècles en Occident, de travailleur intellectuel. » Se font
encore payer et de plus en plus cher. Du coup le nombre d’étudiants pauvres diminue
drastiquement dans les facultés. Désormais les universitaires vivent des bénéfices
ecclésiastiques et des placements de la fortune en biens immobiliers : maisons et terres, ainsi
que de l’usure. Ils essaient aussi de transmettre leurs chairs à leurs enfants. Constitution d’une
oligarchie universitaire. Cherchent les sources de revenus à la cour et auprès des mécènes. Se
mettent à mener un train de vie comparable aux nobles. Les maîtres sont appelés « dominus »
– « seigneurs ». Réclament les mêmes droits que les chevaliers. L’intellectuel s’éloigne de
l’ouvrier.
Évolution de la scolastique :
Les universités perdent leur caractère international : de plus en plus nombreuses, elles
commencent à recruter nationalement et même localement. Les écoles qui suivent la
Reconquista ne sont plus des créations spontanées mais œuvres des rois et des papes. A partir
du XIV e ce sont les pays du centre, de l’est et du nord de l’Europe qui sont gagnés par le
mouvement de l’essor universitaire.
Retour à la campagne
Selon Le Goff, les humanistes abandonnent une des tâches capitales de l’intellectuel :
le contact avec la masse, le lien entre science et enseignement. Image de Saint Augustin seul
dans son cabinet contre les représentations des maîtres d’école entourés par leurs étudiants.