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COURS DE DROIT FISCAL GENERAL

INTRODUCTION GENERALE :

Le droit fiscal peut être défini comme l’ensemble des règles juridiques relatives aux
impositions. Son champ d’application recouvre la notion d’imposition, le régime
juridique de la loi fiscale, les administrations compétentes en matière fiscale, les
prérogatives de ces administrations, les obligations des contribuables et les garanties
qui leur sont accordées, et enfin le contentieux fiscal.

Le droit fiscal organise la participation financière des particuliers, personnes


physiques et morales, à l’expression de la politique économique et sociale de l’Etat.
Les impôts se caractérisent par leur double nature juridique et économique. Au plan
juridique ; ils procèdent du pouvoir de contrainte dont l’autorité étatique est
légalement détentrice. Ce pouvoir s’exprime dans le droit fiscal qui s’articule autour
d’un ensemble de règles, dont la combinaison détermine la portée des contributions.
Du point de vue économique, l’impôt soustrait du pouvoir d’achat aux agents privés
de sorte qu’il modifie la répartition des revenus exerce une influence sur l’activité
globale et affecte les comportements.

Le droit fiscal est une discipline juridique transversale, parce que par certains
aspects, il peut être rattaché au droit public, par d’autres au droit privé. En effet, le
droit fiscal est une branche du droit public, dans la mesure où il régit les rapports
financiers entre l’Etat et les particuliers. La variable fiscale est cependant intrinsèque
à la décision des personnes privées. Les particuliers, personnes physiques ou
morales, sont le sujet par excellence du droit fiscal. Sous ce rapport, le droit fiscal est
une partie intégrante du droit privé.

Les vocables « droit fiscal » et « fiscalité » sont souvent utilisés comme synonymes.
Mais la fiscalité est plutôt perçue comme une technique, alors que le droit fiscal est
une science, donc il est plutôt théorique. La fiscalité, sur la base des règles du droit
fiscal, élabore les méthodes de calcul pour la détermination du montant de l’impôt
dû par les contribuables. Au demeurant, droit fiscal et fiscalité peuvent être utilisés
indifféremment.

La fiscalité procure à l’Etat une partie des ressources financières. Elle traduit aussi la
politique économique et sociale de l’Etat à travers les subventions et les mesures
incitatives.

Le choix des modalités d’imposition adopté par un Etat prend en compte


l’environnement économique et social. Les techniques d’imposition découlant du
système fiscal sont appliquées par les contribuables et l’administration fiscale sous le
contrôle du juge de l’impôt. Ainsi entendu dans un sens large, le droit fiscal regroupe
les règles relatives à la politique fiscale, à l’Administration de l’impôt et au système
fiscal.

Mais le choix des modalités d’imposition ne peut faire fi de ses représentations


sociologiques, de ses fonctions socio-politiques et de ses représentations sociales.

Les représentations sociologiques de l’impôt :

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- L’impôt indolore (TVA) ;
- L’impôt tribut (insupportable) ;
- L’impôt contrainte (trop lourd) ;
- L’impôt obligation (conception juridique) ;
- L’impôt échange (conception économique) ;
- L’impôt contribution (forme politique du consentement à l’impôt).

La typologie de l’Etat fiscal :

- L’Etat libéral ;
- L’Etat gaspilleur ;
- L’Etat fiscal ;
- L’Etat interventionniste.

Les fonctions de l’impôt :

- La fonction financière ;
- La fonction de régulation économique ;
- La fonction sociale ;
- La fonction territoriale et environnementale ;
- La fonction politique.

Tous ces éléments influent sur le système fiscal. Le Sénégal ne déroge pas à la règle.
Ainsi il oscille entre l’impôt obligation et l’impôt contrainte, justifié par sa typologie
d’Etat interventionniste et fiscal qui confère différentes fonctions de régulation
économique, sociale, territoriale et politique. C’est pourquoi le cadre juridique de
l’impôt, le statut du contribuable et les pouvoirs de l’administration fiscale en
constituent les manifestations.

CHAPITRE I LE CADRE JURIDIQUE DE L’IMPÔT

INTRODUCTION
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La théorie économique attribue à l’Etat trois fonctions : l’allocation et la production
de biens publics visant à améliorer le fonctionnement des marchés ; l’équité et la
justice distributive consistant à corriger les inégalités engendrées par la répartition
primaire des revenus et la stabilisation tendant à lutter contre l’inflation, le chômage
et à relancer l’activité économique.

Pour remplir ces fonctions, l’Etat utilise trois leviers : la politique budgétaire, la


politique monétaire et la politique fiscale. Les pays de l’UEMOA ont renoncé à leur
souveraineté en matière monétaire au profit de la BCEAO. Contrairement à la
politique budgétaire, la politique fiscale a un impact à la fois sur la conjoncture et la
structure économiques. La politique fiscale est un instrument de régulation de
l’activité économique et de correction des défaillances du marché. Elle est également
un instrument de redistribution des richesses. A ce titre, elle représente un volet de la
politique sociale de l’Etat.

La politique budgétaire représente l’ensemble des actions menées par les pouvoirs
publics ayant un support financier, qu’il s’agisse de dépenses ou de recettes. La
politique fiscale est l’une des dimensions de cet ensemble. La notion de politique
fiscale s’entend de l’ensemble des choix qui concourent à fixer les caractéristiques
d’un système fiscal. La doctrine apprécie la politique fiscale comme se trouvant à la
frontière entre la politique budgétaire et la technique fiscale. La politique fiscale
articule les aspects économiques et les dimensions juridiques des impôts. Elle
s’inscrit dans un cadre juridique qui traduit en droit les choix stratégiques de l’Etat
en matière d’imposition. Elle définit l’impôt, analyse ses éléments constitutifs,
procède aux classifications des différents types d’impôts, examine les caractéristiques
de chacun pour aboutir à la notion de système fiscal. Dès lors, il convient de préciser
l’objet de la politique fiscale, à savoir l’impôt en déterminant la nature juridique de
l’impôt et son régime juridique.

I- LA NATURE JURIDIQUE DE L’IMPÔT

L’impôt est une réalité sociologique et économique. Il s’agit d’une notion juridique
qui recouvre ainsi plusieurs réalités. D’où la nécessité de procéder à des
classifications des différents impôts. L’impôt étant une notion plus opérationnelle
que théorique, il convient de le définir ainsi que les éléments qui le caractérisent.

A- LA DEFINITION DES ELEMENTS DE L’IMPÔT

L’impôt peut être défini comme «  un prélèvement pécuniaire, de caractère obligatoire,


effectué en vertu de prérogatives de puissance publique, à titre définitif, sans contrepartie
déterminée, en vue d’assurer le financement des charges publiques de l’Etat, des collectivités
territoriales et des établissements publics administratifs ».

Cette définition ne prend pas en compte l’idée de la capacité contributive et donc


celle de justice ou d’égalité fiscale. En fait, au Sénégal, tous les impôts ne respectent
pas le principe de progressivité comme l’impôt sur le revenu à la différence de la taxe
sur la valeur ajoutée avec son taux unique (TVA). Enfin le terme impôt est synonyme
de droit entendu non pas au sens de droit objectif ou subjectif, mais comme
prélèvement obligatoire.

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1- Le caractère pécuniaire

Le caractère pécuniaire peut être examiné au niveau de l’assiette et du recouvrement.


L’assiette (ou base de l’impôt) est le plus souvent constituée elle-même d’éléments
monétaires. C’est ainsi que l’impôt est assis sur un revenu, un bénéfice ou alors sur
un avantage en nature évalué en valeur monétaire, tel que la jouissance d’un
logement de logement en matière de traitements et salaires. L’impôt peut être aussi
établi sur des éléments matériels. La taxe spécifique sur les produits pétroliers, par
exemple, est calculée sur le nombre d’hectolitres de carburant et non pas sur la
valeur pécuniaire ; la contribution foncière est calculée sur la valeur locative de
l’immeuble.

C’est surtout au stade du recouvrement que le caractère pécuniaire de l’impôt prend


sa signification. L’impôt est perçu en argent. La dation en paiement est généralement
citée comme une limitation à ce principe. Elle constitue la faculté de régler une dette
fiscale par la remise en contrepartie de biens immeubles ou meubles de valeur.
L’article 51 du Règlement général sur la comptabilité publique dispose en effet que
les redevables peuvent s’acquitter par remise d’effets de commerce ou d’obligations
cautionnées. La dation en paiement est généralement admise en matière de droits
d’enregistrement.

2- Un prélèvement à caractère obligatoire

L’impôt est obligatoire. Le contribuable doit payer l’impôt ; l’Administration doit le


percevoir. L’impôt fait l’objet d’un prélèvement par voie d’autorité. Le lien de droit
en vertu duquel le contribuable peut être contraint par l’Etat de payer sa dette fiscale
découle directement de la loi qui le constitue débiteur. Le caractère obligatoire de
l’impôt est lié à la légitimité de la puissance publique. Le caractère obligatoire est en
liaison avec le principe de l’égalité fiscale. Il connaît des exceptions ou des
tempéraments liés à une demande (exonérations) ou à la liberté de choix laissée au
contribuable (options fiscales). Toutefois, ces aménagements atténuent seulement le
caractère contraignant de l’impôt. Toujours est-il que le contribuable ne peut se
soustraire de l’obligation fiscale. L’impôt est voulu par le législateur. Celui-ci crée
l’impôt par une loi ordinaire ou une loi de finances. Il en autorise le recouvrement.

3- Un prélèvement effectué en vertu de prérogatives de puissance


publique

L’impôt est un prélèvement effectué en vertu de prérogatives de puissance publique


qui n’ont pas d’équivalent ni en droit privé, ni même pour certaines d’entre elles, en
droit administratif. La généralisation de la formule de la déclaration contrôlée et des
régimes d’imposition d’après le bénéfice réel a entraîné un accroissement et un
extension des prérogatives conférées à l’administration fiscale pour contrôler les
déclarations et évaluer elle-même les bases d’imposition en cas de carence du
contribuable.

Ces pouvoirs sont exorbitants du droit commun : droit de communication,


vérification de comptabilité, examen contradictoire de la situation fiscale personnelle
combiné avec la procédure de la demande de justifications sur l’origine des crédits
portés aux comptes bancaires, droit de perquisition des locaux professionnels ou

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même du domicile avec la visite des coffres bancaires, procédures d’imposition
d’office, pouvoir de sanction, etc. Le contribuable est constitué débiteur par voie de
décision unilatérale ; l’administration se délivre à elle-même un titre exécutoire.

Ce caractère justifie le principe de la légalité de l’impôt qui est une réalité politique et
juridique. Politique, parce que la légalité exprime le consentement de l’impôt, c’est-à-
dire l’intervention nécessaire du Parlement représentant des contribuables pour
l’établissement de l’impôt. Juridique, il existe une liaison entre le pouvoir d’imposer
et le pouvoir de légiférer. La Constitution sénégalaise confère à l’Assemblée
Nationale le pouvoir expresse de fixer « l’assiette, le taux et les modalités de
recouvrement des impôts ».

4- Un prélèvement effectué sans contrepartie déterminée

De même, il constitue un prélèvement sans contrepartie déterminée. Le caractère


opérant de ce critère ne peut pas être remis en cause pour la majeure partie des
impôts. L’impôt ne peut faire l’objet d’une restitution de la part de la personne
publique qui en est bénéficiaire, c’est un prélèvement effectué à titre définitif.
L’absence de contrepartie entraîne une conséquence importante : à savoir que les
conditions dans lesquelles le produit des impôts est utilisé ne peuvent être utilement
contestées devant le juge de l’impôt.

B- LA DISTINCTION DE L’IMPÔT AVEC LES NOTIONS VOISINES :

Deux éléments de la définition de l’impôt revêtent une importance particulière d’une


part le caractère obligatoire, d’autre part l’absence de contrepartie. Ils permettent la
distinction de l’impôt des autres types de prélèvement.

1- La Taxe

Il faut distinguer l’impôt de la taxe qui s’analyse comme un prélèvement tout aussi
obligatoire mais perçu à l’occasion de la prestation d’un service par la collectivité
publique. Contrairement à l’impôt, elle est requise des particuliers à l’occasion d’un
service rendu.

La taxe peut être définie comme la somme exigée en contrepartie des prestations
offertes par un service public ou de la possibilité d’utiliser un ouvrage public.
L’existence d’une contrepartie est l’élément qui différencie fondamentalement la taxe
de l’impôt. On retrouve dans la notion de taxe l’idée d’un service rendu, d’une
contrepartie. Il en résulte que la taxe doit être payée par celui qui est susceptible de
profiter du service. Ainsi le critère de la contrepartie distingue l’impôt de la taxe.

2- La redevance

L’impôt doit être distingué de la redevance. La redevance ou rémunération d’un


service rendu peut être définie comme la somme versée par l’usager d’un service
public ou d’un ouvrage public déterminé et qui trouve sa contrepartie directe et
immédiate dans les prestations fournies par ce service ou dans l’utilisation de
l’ouvrage. On peut dire que la redevance présente un caractère facultatif puisqu’elle
n’est due que par l’usager qui utilise effectivement le service. C’est ce qui la
différencie de l’impôt.

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Aux termes de l’article 10 de la loi organique relative aux lois de finances, la
procédure de rémunération pour services rendus relève du domaine du règlement :
un décret en autorise la perception. Le produit des rémunérations pour services
rendus doit faire l’objet d’une évaluation dans la loi de finances de l’année.

3- La taxe parafiscale

La taxe parafiscale est un prélèvement perçu dans un intérêt économique et social au


profit d’une personne morale de droit public ou privé autre que l’Etat et ses
démembrements. Ainsi la taxe parafiscale se distingue de l’impôt et de la taxe qui
sont perçus dans un intérêt purement budgétaire au profit de l’Etat et des
collectivités locales.

Conformément à l’article 9 de la loi organique 2011-15 relative aux lois de finances,


les taxes parafiscales sont du domaine du règlement et sont créées par décret ; la loi
de finances doit chaque année en autoriser la perception au même titre que les
impôts. L’impôt par contre, est institué par la loi.

4- Les cotisations sociales

Les cotisations de sécurité sociale peuvent être obligatoires ou volontaires et être


versées par les employés, les employeurs au nom de leurs employés, et les
travailleurs indépendants ou les personnes sans emploi. Comme l’impôt, les
cotisations sociales obligatoires constituent un prélèvement forcé. Elles
correspondent à l’ensemble des charges salariales supportées par l’employeur ou par
le salarié et servent à financer les divers dispositifs et organismes publics chargés de
la protection sociale : sécurité sociale, accidents du travail, allocations familiales,
retraite complémentaire, mutuelle, etc.

Les cotisations sécurité sociale obligatoire diffèrent des impôts dans la mesure où
elles ouvrent droit, pour les cotisants et les autres bénéficiaires, à certaines
prestations sociales liées à des faits générateurs déterminés, tels que la maladie ou la
vieillesse. Ainsi, contrairement à l’impôt, les prélèvements sociaux donnent droit à
une contrepartie directe telle que le remboursement des soins ou le versement d’une
pension de retraite.

C- LA CLASSIFICATION DES IMPÔTS

Il existe différents types de prélèvements fiscaux. Les impôts font ainsi l’objet de
classifications. Ils peuvent être classés suivant des critères économique, budgétaire
ou administratif.

1- La distinction impôt sur le revenu, impôt sur la dépense et impôt sur


le capital

L’impôt suppose une valeur économique : le revenu, la dépense ou le capital.

L’impôt sur le revenu concerne les particuliers (impôt sur le revenu proprement dit)
et les sociétés (impôt sur les sociétés). Il vise des bénéfices, des gains ou résultats
acquis. Le revenu est constitué par l’ensemble des sommes perçues par un individu

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pendant une année. Il provient soit du travail, soit du capital. C’est le cas de l’impôt
sur le revenu des personnes physiques ou de l’impôt sur les sociétés. L’impôt sur le
revenu est peu sensible à la conjoncture économique.

L’impôt sur la dépense frappe un bien ou un service au moment de son acquisition. Il


vise un revenu au moment de sa consommation. C’est le cas de la taxe sur la valeur
ajoutée (TVA). Mais, en pratique l’impôt sur le revenu et l’impôt sur la dépense sont
les deux faces d’une même pièce. Le même revenu est imposé au moment de son
acquisition et au moment de son utilisation. Il se présente sous deux formes
traditionnelles :

- Il frappe la consommation d’une taxe unique. Il s’agit d’un impôt général sur
la dépense comme la taxe sur le chiffre d’affaires.
- Il ne taxe que la consommation de certains produits. Les contributions
indirectes sont applicables sur l’alcool et le tabac.

L’impôt sur la dépense est sensible à la conjoncture économique. Il a une incidence


sur le niveau des prix.

L’impôt sur le capital taxe le patrimoine mobilier ou immobilier de manière


permanente ou de manière occasionnelle. La taxation permanente se matérialise par
l’impôt qui frappe la matière mobilière ou immobilière. La taxation occasionnelle est
applicable à la transmission du patrimoine à titre gratuit (droits de succession) ou à
titre onéreux (droits d’enregistrement). Une fois la matière imposable déterminée, il
convient ensuite de l’évaluer.

2- La distinction entre impôts réels et impôts personnels

La distinction entre impôts réels et impôts personnes privilégie la philosophie de


l’approche fiscale. L’impôt personnel se préoccupe d’envisager les facultés
contributives du contribuable, ses charges de famille par exemple (marié ou
célibataire, nombre d’enfants à charge) afin de personnaliser la charge fiscale qu’il
devra assumer. L’impôt réel appréhende une chose, envisagée dans sa dimension
strictement économique, sans se préoccuper du statut du contribuable ni de sa
dimension personnelle. L’impôt sur la consommation (comme la TVA qui est payée
par tous les consommateurs) est l’exemple type de l’impôt réel tandis que l’impôt sur
le revenu (l’impôt payé par toutes les personnes physique) incarne l’impôt personnel.

3- La distinction entre impôts synthétiques (généraux) et impôts


analytiques (particuliers)

Cette distinction privilégie le critère de la sélectivité. L’impôt synthétique


appréhende une situation globale. Par exemple, la Contribution Globale Foncière
(c’est l’impôt payé par toutes les personnes physiques titulaires de revenus fonciers
donc tirés de la location d’immeubles dont le montant brut n’excède pas 3 millions
de FCFA) est synthétique, elle est représentative ou regroupe les impôts et taxes
suivants (Impôt sur les revenus fonciers; Impôt du minimum fiscal; Contribution

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Foncière des propriétés bâties; Contribution Foncière des propriétés non bâties; Taxe
sur la Valeur Ajoutée (TVA) ; Contribution forfaitaire à la charge des employeurs.
Donc l’impôt synthétique consiste à regrouper un ensemble d’impôts en un seul.

L’impôt analytique ne retient qu’un élément et le met à contribution chaque fois qu’il
apparaît, exemple l’impôt sur les sociétés.

4- La distinction entre impôts directs et impôts indirects

Les impôts directs sont perçus « directement » sur le contribuable tel l’impôt sur le
revenu tandis que les impôts indirects sont perçus par la collectivité publique auprès
de collecteurs qui assument un rôle d’intermédiaire entre l’Etat et le contribuable
effectif. La TVA appartient à cette catégorie.

Le redevable est celui qui est soumis à l’impôt et qui doit le payer. Le contribuable
est celui qui paie effectivement l’impôt. L’Administration fiscale inscrit les
contribuables dans un « rôle ». Parfois, le redevable et le contribuable sont confondus
: c’est le cas pour les impôts directs. Parfois, ils sont distincts : c’est le cas pour les
impôts indirects. Prenons l’exemple de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). En effet,
l’entreprise (le redevable de l’impôt) verse la taxe sur la valeur ajoutée au Trésor
public et le consommateur (le contribuable) la paie lorsqu’il achète le produit ou le
service.

Pour l’impôt direct, le contribuable et le redevable constituent la même personne. Par


exemple dans le cadre de l’impôt sur le revenu (l’impôt payé par les personnes
physiques), les deux qualités de redevable légal et redevable effectif sont confondues.
Pour l’impôt indirect, il est supporté par le contribuable mais est versé par le
redevable. Par exemple pour la TVA, le redevable légal est le commerçant, mais le
redevable effectif est le consommateur.

Cette distinction permet de mesurer l’incidence de l’impôt c’est-à-dire de localiser


son poids réel en séparant le redevable légal du redevable effectif. Le redevable légal
est celui qui, aux yeux de la collectivité publique, doit acquitter l’impôt, mais par le
jeu économique de la répercussion, que ce soit dans la vente ou dans la prestation de
services, il parvient à le refacturer au redevable effectif qui en supporte vraiment et
définitivement le poids.

5- Les impôts d’Etat, les impôts locaux et les impôts mixtes

Cette classification est qualifiée de budgétaire puisqu’elle distingue les impôts en


fonction de la collectivité publique qui en bénéficie. L’impôt est destiné soit au
budget de l’Etat, soit au budget des collectivités locales.

Les impôts d’Etat sont perçus au profit du budget de l’Etat. C’est le cas de l’impôt sur
le revenu, l’impôt sur les sociétés, les taxes indirectes, les droits d’enregistrement, les
droits de timbre, etc.

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Les impôts locaux sont perçus au profit du budget des collectivités territoriales ou
locales qui est alimenté par des impôts tels que les contributions foncières, la patente,
la licence, etc.

Il existe des impôts qui sont perçus à la fois au profit de l’Etat et des collectivités
locales. Dans ces cas, la loi fixe une clé de répartition, généralement un pourcentage
des recettes tirées la catégorie d’impôt en question. C’est ainsi que 40% des recettes
de la contribution globale unique vont au budget de l’Etat, alors que les 60% sont
reversés aux collectivités locales. La raison en est que cette contribution est
représentative d’impôts d’Etat et d’impôts locaux. Il en est de même de la
contribution foncière globale.

II- LE REGIME JURIDIQUE DE L’IMPÔT

Le régime juridique de l’impôt détermine la source normative du droit fiscal ainsi


que les principes régissant son fonctionnement.

A- LES SOURCES DU DROIT FISCAL

Le pouvoir d’imposer ainsi que les modalités de l’imposition découlent de plusieurs


normes juridiques. Certaines sources sont nationales, d’autres supra nationales.

1- Les sources nationales

La loi est la source principale de la norme fiscale. Les règlements en assurent


l’application. Mais c’est la Constitution qui en pose le principe.

a- La Constitution

La Constitution est la charte fondamentale de l’Etat. Elle consacre le principe de


l’impôt et attribue à la loi le pouvoir d’en déterminer les modalités. L’article 67 de la
Constitution, d’une portée générale, précise que « la loi fixe les règles concernant….
l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes
natures ». Cet article pose le principe de la légalité de l’impôt, dans les
prolongements de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

b- La loi fiscale

La source est la source fondamentale en droit fiscal. La plupart des textes législatifs
sont rassemblés dans le code général des impôts. Le principe de base est celui de la
légalité de l’impôt, il n’y a pas d’impôts sans loi.

Aux termes de l’article 3 de la loi organique relative aux lois de finances, les
dispositions portant sur l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des
impositions de toute nature sont du domaine de la loi. Mais comme les lois
organiques sont soumises à un calendrier précis et contraignant, ce sont souvent des
lois ordinaires qui interviennent. Cette possibilité est largement utilisée. Les
dispositions fiscales ne sont pas au nombre des celles qui sont exclusivement
réservées à la compétence des lois de finances, elles peuvent par conséquent figurer
dans une loi ordinaire.

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Par ailleurs, le législateur peut seul autoriser l’impôt. L’impôt ne peut être recouvré
que dans la mesure où il a fait l’objet d’une autorisation. En l’absence d’une telle
autorisation, le comptable public commettrait le délit de concussion. L’autorisation
est donnée par la loi de finances de l’année. C’est pourquoi l’autorisation de
percevoir les impôts est annuelle.

c- Le règlement

Les règlements en matière fiscale sont pour l’essentiel des règlements d’application.
La technicité de la matière fiscale et la lenteur de la procédure nécessitent
l’intervention législative du pouvoir réglementaire.

En ce qui concerne les mesures détachables du règle d’assiette, de liquidation et de


recouvrement, elles entrent dans le champ du pouvoir réglementaire de l’article 67
de la Constitution. Le pouvoir fiscal peut aussi se développer dans le domaine fiscal
en période exceptionnelle. En effet, sur la base de l’article 77 de la Constitution, le
législateur peut déléguer de manière ponctuelle son pouvoir législatif au
gouvernement. Celui-ci prendra par ordonnance les dispositions en matière
législative.

d- La doctrine administrative

La doctrine administrative est le produit de l’interprétation des textes fiscaux. Il


s’agit des instructions ou mesures d’ordre intérieur à l’Administration fiscale. Même
si la doctrine administrative n’a pas force de la loi, elle s’impose en vertu du principe
hiérarchique aux agents de l’Administration fiscale. En revanche, elle n’a pas de
caractère contraignant pour les contribuables qui peuvent, néanmoins, s’en prévaloir.

En pratique, la doctrine a une portée considérable, car elle vient parfois compléter la
loi fiscale. Elle œuvre directement à la formation et à l’enrichissement du droit voire,
à sa rectification. La doctrine administrative permet de disposer d’une
réglementation détaillée à travers une procédure plus simple et moins contraignante.
Par ailleurs les contribuables, sont souvent demandeurs de renseignements détaillés
sur la manière dont ils doivent se conformer à la loi afin de bénéficier d’une plus
grande certitude dans leur approche. Mais il convient d’utiliser conjointement la
législation primaire, à savoir le CGI et la législation secondaire notamment la
doctrine administrative, afin d’apporter le maximum de précisions aux modalités de
détermination et de contrôle des impôts.

e- La jurisprudence

En principe le juge ne crée pas de droit. Dans la pratique, il dispose d’un pouvoir de
création du droit, soit en l’absence des textes, soit pour compléter les textes. La
mission du juge est de trancher les litiges. Il est tenu de donner des solutions aux
litiges qui lui sont soumis, même en cas de silence de la loi. Ce faisant le juge
participe à la création de la règle de droit par le seul fait qu’il l’applique. Il y a
souvent des imprécisions ou des contradictions de certains textes. Mais il faut
souligner que la jurisprudence fiscale sénégalaise ne joue pas encore ce rôle essentiel.

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En effet, la technicité de la matière et la non-spécialisation des magistrats limitent la
portée de leurs décisions.

1- Les sources extérieures

Le droit fiscal admet des sources juridiques extérieures. Il s‘agit des normes dégagées
à travers les conventions fiscales internationales et des normes du droit
communautaire.

a- Les conventions internationales

Une convention fiscale est un traité international liant deux ou plusieurs Etats. Des
accords internationaux, notamment les conventions relatives à la protection des
investissements, peuvent comporter des dispositions fiscales, alors que les
conventions de non double imposition ont un objet purement fiscal.

Les conventions fiscales sont directement applicables dans l’ordre interne par les
tribunaux, en particulier sans requérir à cet effet d’autre intervention législateur que
celle que nécessite leur ratification. Elles entrent dans la catégorie des self executing
treaties ». Elles constituent « la loi supérieure » des Etats. En droit sénégalais, les
traités ou accords régulièrement ratifiés ont une autorité supérieure à celle des lois à
partir de leur ratification et sous réserve de réciprocité, c’est-à-dire de son application
par l’autre Etat.

Dans l’hypothèse où un conflit s’élève entre une convention fiscale et une loi
ultérieure, l’application de la première s’impose. Ce qui revient à reconnaître la
supériorité de la convention sur le droit interne jusqu’à ce que le législateur exprime
clairement son intention d’y mettre fin. Mais si leur nature de traités internationaux
confère aux normes conventionnelles fiscales une valeur juridique généralement
supérieure à celles des lois fiscales internes, leur objet principal limité à l’élimination
de la double imposition les maintient dans un rôle subsidiaire par rapport à celui des
dispositifs fiscaux internes.

Une convention internationale contre la double imposition est « un pont jeté entre
deux systèmes fiscaux ». Concrètement, la convention se trouve à la fois superposée à
une partie du droit interne et juxtaposée à l’autre partie. Elle n’est pas elle- même un
système fiscal complet. Son champ d’application est étroitement circonscrit. Et à
l’intérieur même de son champ d’application, elle ne substitue ses dispositions qu’à
un nombre limité de règles de droit interne.

b- Les normes communautaires

Le droit fiscal sénégalais est aujourd’hui fortement marqué par le droit


communautaire. Le Sénégal est membre d’organisations internationales telles que la
Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’UEMOA.
Ces organisations ont pour but de réaliser l’intégration économique de la sous-
région. Sur le plan de l’harmonisation des fiscalités nationales, l’UEMOA est en
avance sur la CEDEAO.

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L’un des principes directeurs de la politique fiscale de l’UEMOA consiste à
supprimer les disparités de la fiscalité intérieure des différents Etats, afin de mettre
les produits et les activités de l’Union dans les mêmes conditions de concurrence. Le
droit communautaire distingue entre les règlements qui sont des mesures générales
directement applicables dans le droit interne des Etats membres, les directives, qui
fixent un objectif à atteindre dans un délai déterminé en laissant les Etats membres,
maîtres des mesures de mise en œuvre, les décisions impératives mais adressées à un
ou plusieurs Etats ou particuliers et les recommandations et avis, sans portée
juridique contraignante.

Il existe un ordre juridique communautaire à la fois indépendant de la législation des


Etats membres et intégré à leur système juridique. Le droit communautaire crée, à
l’égard des particuliers, des droits et des obligations susceptibles d’une sanction
juridictionnelle nationale. Tout juge national, saisi dans le cadre de sa compétence, a
l’obligation d’appliquer intégralement le droit communautaire et de protéger les
droits que celui-ci confère aux particuliers. Il ne doit pas appliquer une disposition
de la loi nationale contraire, que celle-ci soit antérieure ou postérieure à la règle
communautaire. La force normative du droit communautaire varie en fonction de la
nature de la règle considérée : traité, règlement ou directive.

Eu égard aux priorités définies par la conférence des Chefs d’Etat et de


Gouvernement de l’UEMOA, la Commission avait d’abord entrepris des actions en
vue de l’harmonisation d’abord des fiscalités indirectes intérieures, ensuite de la
fiscalité directe des Etats membres.

De fait, l’harmonisation de la fiscalité indirecte intérieure apparaît comme un


complément indispensable aux réformes tarifaires prévues dans le cadre de
l’unification des espaces économiques nationaux. C’est ainsi que la directive numéro
02-98 du 22 décembre 1998, portant harmonisation des législations des Etats
membres en matière de TVA a permis de généraliser cet impôt et d’instituer un taux
d’imposition unique. La directive 03-98 du 22 décembre 1998, portant harmonisation
des législations des Etats membres en matière de droits d’accises a permis de limiter,
pour chaque Etat membre, le nombre de produits imposables, de fixer une méthode
commune de détermination de la base, et de fixer les taux applicables. D’autres
directives ont été adoptées en matière de fiscalité indirecte, notamment la directive
numéro 06-2001 du 26 novembre 2001, portant harmonisation de la taxation des
produits pétroliers. La mise en œuvre du programme d’harmonisation des fiscalités
indirectes intérieures se poursuit avec le suivi de l’application par les Etats membres
des directives communautaires.

A la suite de la fiscalité indirecte, la Commission s’attelle à la mise en place d’un


programme d’harmonisation de la fiscalité directe au sein de l’Union. La réalisation
de ce programme permet d’identifier les besoins de convergence et de procéder à
l’harmonisation des modalités de certaines impositions directes dans la perspective
de la réalisation du marché commun.

B- LES PRINCIPES DU DROIT FISCAL

Ces principes mettent en lumière ceux d’origine juridique d’une part, et fiscale
d’autre part. Il existe plusieurs principes juridiques en matière fiscale. Certains de ces

12
principes sont relatifs à la validité même de l’impôt, alors que d’autres tendent à
protéger les contribuables.

1- Le principe de la légalité de l’impôt

Le principe de la légalité des impôts est affirmé avec force et solennité dans la
Déclaration des droits de l’homme à laquelle renvoie le préambule de la
Constitution. L’article 14 de cette déclaration dispose que « tous citoyens ont le droit
de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution
publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la
quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée ».

En vertu du principe de la légalité, seul le législateur peut créer l’impôt. Toutefois, le


principe de légalité ne s’oppose pas à ce que les mesures nécessaires à la loi fiscale
soient fixées par voie réglementaire. L’article 67 confirme le principe. Concrètement,
cela signifie la nécessité d’une intervention formelle du Parlement pour toute
création ou toute suppression d’impôt, toute modification des modalités d’un impôt
existant. Cette intervention du législateur peut prendre deux formes : celle d’une loi
de finances ou celle d’une loi ordinaire.

L’article 67 de la Constitution précise également que « les lois de finances


déterminent les ressources et les charges de l’Etat dans les conditions et sous réserves
prévues par la loi organique ». La loi n°2001-09 du 15 octobre 2001 portant loi
organique sur les lois de finances précise en son article premier que « les lois de
finances déterminent la nature, le montant et l’affectation des ressources ». Dans les
faits, les impôts sont souvent modifiés et créés par une loi de finances.

2- Le principe de l’égalité devant l’impôt

Le principe de l’égalité devant l’impôt est aussi appelé principe d’égalité devant les
charges publiques. Il s’agit d’un corollaire du principe d’égalité des citoyens devant
la loi et une manifestation de l’égalité devant les citoyens. Après avoir annoncé
l’égalité de tous les hommes, la Déclaration des droits de l’homme précise dans son
article 13 que « pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses
d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être
également être répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Cet
article pose à la fois la nécessité de l’impôt conçu comme instrument privilégié de
financement des dépenses publiques, mais aussi de l’obligation de répartir sa charge
de façon égalitaire en fonction des facultés contributives de chaque citoyen.

En vertu de ce principe, les contribuables doivent être soumis au même régime fiscal.
Toutefois, l’égalité devant l’impôt ne signifie pas « uniformité de traitement fiscal ».
En effet, l’égalité devant l’impôt n’interdit pas des différenciations de traitement
pour des situations économiques ou sociales différentes.

3- Le principe de non-rétroactivité

La non-rétroactivité signifie l’interdiction de faire produire à une loi des effets à une
date antérieure à son entrée en vigueur. C’est un principe fondamental du droit
pénal. Et parce qu’il est plutôt favorable au contribuable, il semble être transposable
en droit fiscal.

13
Lorsque, à l’égard d’une situation juridique déterminée survient un changement de
législation, il peut y avoir conflit entre la loi ancienne et la loi nouvelle si des mesures
transitoires ne sont pas prévues. C’est pour écarter ce conflit que le principe de non-
rétroactivité a été posé.

En matière fiscale, un impôt nouveau ne peut être perçu que si le fait générateur s’est
produit sous le régime de la loi nouvelle. Cette règle de non-rétroactivité de la loi
nouvelle s’applique également en matière de déchéance d’un régime de faveur.
Inversement, lorsqu’un impôt se trouve réduit ou supprimé, les droits qui étaient
devenus légalement exigibles sous le régime de la loi ancienne restent acquis au
Trésor.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’existe aucun principe ou règle de


valeur constitutionnelle consacrant la non-rétroactivité de la loi. En effet, cette règle
n’a qu’une valeur législative, ce qui signifie que la loi peut y déroger et donc disposer
tant pour l’avenir que pour le passé. En droit fiscal, la rétroactivité peut d’abord être
de fait : c’est, par exemple, le cas de la loi de finances de l’année N qui a vocation à
régir l’imposition des revenus de l’année N-1. S’agissant, cette fois-ci de la
rétroactivité de droit, c’est bien une dizaine de dispositions législatives qui
présentent, chaque année, ce caractère. Deux hypothèses peuvent être évoquées.
Ainsi, la loi fiscale peut être rétroactive pour éviter des effets d’aubaine au profit ou
au détriment du contribuable : ainsi, entre l’annonce d’un texte de loi et son
adoption, il existe un certain délai qui pourrait permettre, en cas de durcissement de
la législation, au contribuable de précipiter son opération pour échapper à la loi
nouvelle ; la rétroactivité permet d’éviter cet écueil. Mais, elle peut aussi jouer en
faveur du contribuable lorsqu’il s’agit d’appliquer pour le passé des dispositifs plus
avantageux. Autre hypothèse, la loi fiscale peut être rétroactive pour légaliser en
quelque sorte un acte administratif dont la légalité pouvait prêter à question ou pour
préciser un précédent dispositif en lui donnant un sens différent de celui qu’un juge
aura pu lui donner : c’est ce que l’on appelle les lois de validation.

On le comprend, la rétroactivité de la loi fiscale peut avoir des effets conséquents sur
la situation des contribuables : ainsi s’explique que, bien que le juge fiscal se refuse à
consacrer un principe général de sécurité juridique ou de confiance légitime qui
interdirait toute rétroactivité en la matière, celui-ci se soit attaché à encadrer cette
rétroactivité de manière à faire respecter les exigences du principe de nécessité, et
cela de deux manières. D’une part, les sanctions fiscales doivent respecter l’ensemble
des prescriptions applicables en matière pénale : elles ne peuvent, alors, comme les
sanctions pénales, être rétroactives. Par ailleurs, le juge vérifie que la loi rétroactive
n’ait pas pour objet de porter atteinte à une décision de justice revêtue de l’autorité
de la chose jugée, ce qui n’interdit pas de remettre en cause la situation des
contribuables dont la situation n’a pas encore été jugée définitivement. En revanche,
le législateur ne peut remettre en cause une solution valant à l’égard de tous, telle
que les annulations prononcées par le juge administratif dans le cadre d’un recours
pour excès de pouvoir. D’autre part, il est exigé que la loi rétroactive poursuive un
intérêt général suffisant : concrètement, le juge met en balance l’importance pour le
fonctionnement de l’Etat de la loi rétroactive et les atteintes à la sécurité juridique des
contribuables que cette dernière implique.

14
4- Le principe du contradictoire

Le principe du contradictoire est une modalité d’exercice des droits de la défense.


Selon ce principe, nul ne peut être mis en cause sans avoir été en mesure de répondre
aux faits qui lui sont reprochés. En matière fiscale, le principe du contradictoire se
manifeste durant toutes les phases de la procédure : au niveau de l’imposition, du
contrôle fiscal et du contentieux.

Le principe du contradictoire s’applique partiellement à l’occasion de l’établissement


des impositions. L’imposition est établie sur la base du principe déclaratif. C’est le
contribuable lui-même qui détermine la matière imposable, sous le contrôle de
l’Administration. Toutefois, une procédure de taxation d’office est prévue à
l’encontre des contribuables qui n’ont pas respecté leurs obligations déclaratives ou
de tenue de comptabilité régulière. Ainsi l’article 606 du CGI prévoit que la
procédure de redressement contradictoire n’est pas applicable dans les cas de
taxation d’office. Elle n’est pas, non plus, applicable aux cas de rectification par
l’Administration d’erreurs matérielles évidentes constatées sur les déclarations
souscrites par les contribuables, sans application de sanction.

Au moment du contrôle, le principe du contradictoire se manifeste à travers la


possibilité pour le contribuable de répondre aux actes de l’Administration et de
produire ses moyens de preuve. Le droit de réponse peut être écrit ou oral.

15
16
CHAPITRE II LA SITUATION JURIDIQUE DU CONTRIBUABLE

Introduction

Dominé par le principe constitutionnel de légalité fiscale, la matière fiscale est


gouvernée par une exigence fondamentale : l’obligation fiscale individualisée ne peut
trouver sa source que dans la loi. Sur le plan des principes, le contribuable se trouve
placé dans une situation objective qui, générale et impersonnelle, doit exclusivement
découler de la loi organique d’impôt. Toutefois, paradoxalement la situation
juridique du contribuable subit les influences des actes de l’administration qui,
normalement dépourvus de toute incidence juridique directe, viennent perturber la
hiérarchie classique des sources du droit et les principes ordinaires gouvernant
l’activité du juge. En effet, le droit fiscal positif fait produire des effets juridiques
importants et particulièrement originaux à certains aménagements que
l’administration peut concevoir dans le cadre de l’application du statut du
contribuable. Aussi le statut du contribuable connaît des aménagements.

I- LE STATUT DU CONTRIBUABLE

Ce statut repose sur des caractéristiques essentielles qui se prolongent au niveau de


ses conditions d’application.

A- Les caractères du statut du contribuable

Ces caractères sont d’abord objectifs et modifiables, ensuite exclusifs de tout élément
contractuel.

1- Le caractère objectif et modifiable

Le contribuable est placé dans une situation objective déterminée par la loi organique
d’impôt. Celle-ci s’entend de l’ensemble des règles de droit objectif devant, pour
chaque impôt, définir son régime juridique :

- Champ d’application et personnes assujetties ;


- Détermination de la matière imposable et règles d’assiette ;
- Modalités de liquidation et recouvrement.

L’obligation fiscale individualisée procède directement dans son principe de


l’application de ces règles objectives. Dans ce cadre, la créance fiscale découle de la
réalisation du fait générateur. Toutefois, la simple réalisation du fait générateur
donne naissance à une créance juridiquement imparfaite. En effet, à ce stade la
créance fiscale, qui n’est pas toujours liquide ou exigible, est surtout insusceptible
d’exécution forcée. Néanmoins, cette imperfection ne s’oppose pas, à ce qu’elle fasse
l’objet d’une exécution spontanée par le contribuable. C’est d’ailleurs dans ces
circonstances que s’éteignent la majorité des créances fiscales.

Le plus souvent, le fait générateur de l’impôt n’est pas expressément défini par la loi
fiscale mais doit se déduire des règles d’assiette posée à l’égard de l’impôt considéré.
De manière générale, le fait générateur d’un impôt est réalisé dès l’instant où la
matière imposable brute frappée par le prélèvement est entièrement constituée.

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Souvent éventuel, l’acte individuel d’imposition n’a pas de rôle créateur de la dette
fiscale. Il constate l’application individuelle de la loi d’impôt au contribuable et
authentifie la créance fiscale. Il lui confère, à le supposer régulier, l’ensemble des
attributs lui permettant d’accéder à une forme de perfection juridique. En particulier,
c’est à la suite de cet acte que l’obligation fiscale individualisée devient susceptible
d’exécution forcée.

L’édiction des actes d’imposition est enfermée dans un délai de prescription (article
646 du CGI). La prescription du pouvoir d’imposition de l’administration fiscale ne
saurait, elle-même, empêcher l’apparition de l’obligation fiscale. Celle-ci procède de
la seule réalisation du fait générateur de l’impôt. La survenance de la prescription
interdit seulement que l’obligation fiscale individualisée puisse accéder à la
perfection juridique.

Cependant, le fait que le contribuable soit dans une situation statutaire ne signifie
pas que les règles composant ce statut, ne puissent en aucun cas se référer à des
éléments subjectifs, propres au contribuable. Dans son état actuel, la législation
fiscale sénégalaise présente au contraire les caractères d’un corpus fortement
personnalisé. Cette personnalisation revêt des formes diverses.

- De très nombreux dispositifs tendent d’abord à adapter les cotisations


individuelles d’impôt à la situation personnelle du contribuable. La fiscalité
des particuliers (et spécialement l’impôt sur le revenu) sont la terre d’élection
de ces mesures fiscales personnalisées qui prennent en compte la condition
particulière du contribuable, en se référant, inévitablement, à des éléments de
nature subjective.
- De très nombreux mécanismes fiscaux font intervenir des options ou des
engagements particuliers du contribuable (par exemple les associés d’une
société de personnes peuvent opter pour sa soumission à l’impôt sur les
sociétés au lieu de l’impôt sur le revenu). Dans toutes ces hypothèses, la
volonté « fiscale » du contribuable influera légalement sur les conditions
d’établissement ou de recouvrement de l’impôt ou même parfois, sur le
principe de son exigibilité.
- La teneur des procédures fiscales applicables à un contribuable est étroitement
liée à son comportement et, spécialement, à la qualité de sa collaboration
personnelle à l’établissement ou au contrôle de l’impôt.
- Certaines sanctions fiscales ne sont légalement encourues que lorsque
l’absence de bonne foi ou l’intention frauduleuse du contribuable est établie.
Dès lors, des éléments subjectifs sont la condition de l’application au fond de
certains éléments de la législation fiscale.

Le contribuable est placé dans une situation essentiellement modifiable. Il n’a aucun
droit acquis au maintien du statut légal et réglementaire dont il a précédemment
relevé. Tout au contraire, il se trouve soumis à toutes les évolutions de ce statut, sans
distinguer selon qu’elles lui sont favorables ou défavorables. En vertu du principe de
parallélisme des formes, le législateur a normalement toute liberté pour prononcer à
tout moment l’abrogation de dispositions législatives antérieures. C’est donc
vainement qu’un contribuable, qui ne saurait se voir reconnaître de manière générale

18
aucun droit au maintien d’une disposition législative, tenterait de s’opposer à son
abrogation régulière d’où le recours aux clauses de stabilisation par les investisseurs.

2- Le statut exclusif d’éléments contractuels

Le principe d’exclusion du contrat comme source des obligations fiscales est


parfaitement établi. Fondée sur le caractère d’ordre public de la loi fiscale, ce principe
ne résulte d’aucun texte. Et pourtant son existence ne fait aucun doute.

L’impôt ne peut jamais procéder directement d’un contrat entre le contribuable et le


fisc. L’origine contractuelle d’un prélèvement est, en d’autres termes, exclusive de
son caractère fiscal. Sans doute, le droit fiscal sénégalais s’approprie le principe
constitutionnel du consentement à travers l’article 4 de la déclaration universelle des
droits de l’homme de 1789. Mais le consentement dont il s’agit ne peut être regardé
que comme le consentement de la communauté des citoyens à travers leurs
représentants que sont leurs députés. C’est pourquoi seul leur consentement est
requis à travers le principe de légalité en matière fiscale.

Le statut du contribuable ne peut être modifié par voie conventionnelle. La


prohibition vaut aussi bien l’établissement et le recouvrement de l’impôt. Toutefois,
même réfractaire à l’institution du contrat, le droit fiscal n’échappe pas à une grande
tendance du droit contemporain : celle consistant à identifier dans des rapports de
droit public des contrats qui, à la vérité, ne sont souvent qu’hypothétiques. Ce
mouvement trouve une explication. Il est souvent difficile de distinguer les contrats
véritables des actes unilatéraux négociés, en particulier lorsque ces actes comportent
des engagements « parallèles ». Ces difficultés de qualification se rencontrent en
droit fiscal.

L’identification d’un rapport contractuel suppose la réunion de deux conditions :

- Le rapport doit procéder d’un acte qui, généralement exprès, intervient à la


suite d’une phase de négociation entre les parties ;
- Surtout les obligations résultant d’un acte contractuel régulièrement formé
sont immédiatement intangibles, sauf accord mutuel des parties. En d’autres
termes, l’intangibilité du rapport de droit ne procède pas de l’exécution de
certains engagements (ce qui se rencontre pour certains actes unilatéraux)
mais de la formation régulière de l’acte lui-même.

Dans l’état actuel du droit fiscal sénégalais, deux hypothèses semblent correspondre
à un contrat authentique alors que les autres faisant intervenir un accord sont plutôt
des situations contractuelles factices.

Les exceptions réelles à l’exclusion du contrat en matière fiscale sont relatives à la


transaction fiscale et les accords préalables concernant les méthodes de
détermination des prix de transfert.

La première exception concernant l’exclusion du contrat dans les rapports entre le


fisc et le contribuable tient au mécanisme de la transaction fiscale. Ce mécanisme est
directement inspiré de la transaction civile qui est elle-même définie dans le COCC
comme « le contrat par lequel les parties mettent fin à une contestation par les concession
mutuelles  » (article 756).

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San doute la transaction fiscale possède-t-elle un objet plus limité que la transaction
civile. Mais ses effets particulièrement radicaux ne trouvent une explication
convaincante qu’à raison de leur nature contractuelle. Légalement, l’objet que peut
avoir la transaction fiscale est marqué par une certaine ambigüité. L’article 671 III VI
prévoit que «  les amendes, pénalités, majorations et intérêts de retards visés au présent code
lorsqu’ils sont définitivement fixés, ne peuvent faire l’objet d’aucune transaction ». Il résulte
des termes de cette disposition qu’une transaction ne peut pas porter sur des
sanctions fiscales puisque l’article 672 précise à nouveau sa portée en fixant un
régime général.

Lorsqu’une imposition est devenue définitive, l’administration (qui n’est plus


légalement en droit de transiger) peut toutefois accorder au contribuable sur sa
demande, la remise ou la modération des sanctions et intérêts de retard dont elle a
été assortie. Symétriquement, la remise ou modération ne peut normalement
intervenir qu’autant que la créance fiscale est devenue définitive.

L’administration ne peut donc renoncer à la perception de l’impôt lui-même par voie


de transaction. Au demeurant, la conclusion d’une transaction fiscale influe dans une
certaine mesure sur l’impôt en principal : lorsqu’une transaction est devenue
définitive, aucune procédure contentieuse ne peut plus être engagée ou reprise pour
remettre en cause les sanctions fiscales ou les intérêts de retard qui ont fait l’objet
d’une transaction ou les droits en principal eux-mêmes. Cette exclusion s’applique
aussi bien au contribuable qu’à l’administration.

La conclusion d’une transaction fiscale repose sur des concessions réciproques :


l’administration consent au redevable une atténuation des sanctions et intérêts de
retards prononcés ou simplement encourus et renonce à porter l’affaire devant les
tribunaux. En contrepartie, le contribuable bénéficiaire de la transaction s’engage à
verser au Trésor (en sus de l’impôt dû) une somme fixée par le service, inférieure aux
pénalités encourues et intérêts exigible (ou déjà mis à sa charge) et renonce à toute
procédure contentieuse (née ou à naître) visant ces majorations ou les droits qu’elles
concernent.

C’est cet effet extinctif du droit au recours qui (particulièrement grave) conduit à
reconnaître un caractère authentiquement contractuel de la transaction.

La seconde exception concerne les accords préalables concernant les méthodes de


détermination des prix de transfert. L’article 638 du CGI prévoit la possibilité d’un
accord préalable en vue de définir les méthodes à retenir lors de la détermination des
prix de transfert. Ces accords tendent à garantir que les méthodes utilisées lors de la
détermination des prix pratiqués dans les relations intragroupes sont bien conformes
au principe de pleine concurrence (c’est-à-dire que les prix en cause sont déterminés
dans les mêmes conditions qu’entre entreprises indépendantes pour des transactions
identiques) et n’entrent pas en conséquence, dans les prévisions du dispositif relatif
aux transferts indirects de bénéfices entre entreprises.

La conclusion de l’accord préalable, qui a lieu à l’initiative du contribuable, suppose


une coopération entre l’entreprise et l’administration lors de sa phase d’instruction.
L’administration doit tenir informée l’entreprise des progrès réalisés lors des
négociations. En cas d’accord avec les autorités fiscales, le contribuable est invité à

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s’engager à respecter les conditions d’application de l’accord. L’accord comporte
enfin un fort élément d’intangibilité qui permet de conclure à sa nature contractuelle.

Dans certaines situations, on a pu s’interroger sur le point de savoir sir tel ou tel
mécanisme de droit fiscal ne conduisait pas à la formation d’un contrat véritable
entre le contribuable et le fisc.

C’est le cas de l’agrément fiscal. Présentant le caractère d’un acte-condition, son


édiction permet l’application au contribuable d’un statut particulier sans modifier la
nature réglementaire de la situation juridique. La circonstance qu’un agrément
comporte des engagements de la part du contribuable et soit pris à la suite d’un
processus de négociation est sans incidence sur cette qualification. Il s’agit d’un acte
administratif unilatéral et non d’un contrat.

B- L’application du statut du contribuable

Le droit fiscal livre une image empreinte d’un déséquilibre marqué. Les sujets du
droit fiscal sont placés dans une situation de profonde inégalité : le contribuable,
assujetti à la loi d’impôt, doit se soumettre aux décisions d’une administration fiscale
forte de prérogatives puissantes. Cette appréciation mérite d’être nuancée en
examinant la condition de l’administration puis celle du contribuable.

1- La condition de l’administration

La doctrine retient volontiers que l’administration fiscale est en situation de


compétence liée dans l’application de la loi de l’impôt. A l’évidence, cette idée mérite
d’être, sinon combattue du moins précisée sur le plan juridique. Il existe en effet, en
la matière, un grand décalage entre les conceptions du droit fiscal et celles, plus
restrictives, du droit administratif.

En droit administratif, la situation de compétence liée signifie que l’autorité


administrative est tenue d’édicter un acte en étant privée, à l’égard des faits qui en
sont à l’origine, de tout pouvoir d’appréciation. Sur le plan fiscal, cette grille de
lecture est inopérante. La compétence liée entendue au sens précis du droit
administratif ne se rencontre jamais dans les relations du contribuable et du fisc. En
effet, la compétence liée de l’administration fiscale est une compétence liée
« affaiblie ». Elle signifie seulement que l’application de la loi fiscale présente pour
l’administration, un caractère obligatoire. Sur le plan théorique, celle-ci n’a pas le
choix d’appliquer la loi fiscale dans tous ses éléments, sans avoir la faculté d’y
renoncer. A cet égard, l’autorisation administrative annuelle permettant à
l’administration de percevoir l’impôt ne lui ouvre pas une simple faculté : la
perception de l’impôt conformément à la loi présente tout au contraire un caractère
juridiquement obligatoire.

De ce principe découle le caractère d’ordre public de la loi d’impôt et


corrélativement, la prohibition pesant sur l’administration de renoncer à l’application
de la loi fiscale par voie contractuelle.

Pourtant la question de la compétence liée ne saurait occulter un point fondamental :


l’étendue du pouvoir discrétionnaire souvent reconnu à l’administration fiscale. De
nombreux exemples font ressortir l’existence de ce pouvoir discrétionnaire :

21
- Le contenu de la doctrine administrative fiscale ;
- L’ouverture et la conduite des opérations de contrôle fiscal à travers la mise en
œuvre des procédures de rectification ;
- L’infliction des sanctions fiscales et le déclenchement des poursuites pénales
contre le contribuable suspecté de fraude fiscale.
- Il en va de même des actes pris dans le cadre de la juridiction gracieuse.

Le devoir le plus général de l’administration fiscale est naturellement de se


conformer à la loi d’impôt. Elle ne peut établir, contrôler et recouvrer l’impôt que
dans le respect de la loi fiscale et dans les limites qu’elle pose.

Le droit fiscal ne comporte pas de particularités fondamentales dans la mise en


œuvre du principe de légalité et dans la vérification de son respect dans l’action
administrative :

- L’application individuelle de la loi d’impôt est susceptible d’être discutée


devant le juge ;
- Les illégalités commises par les services fiscaux à l’occasion de l’application de
la loi d’impôt peuvent entraîner la mise en cause de la responsabilité de
l’administration.

2- La condition du contribuable 

Soumis au statut dont il relève, le contribuable est placé dans une situation de
sujétion. Le contribuable est d’abord tenu de supporter le prélèvement fiscal mis à sa
charge en vertu de la loi. Cette solution se rattache au caractère normalement
impératif de la loi d’impôt. Ensuite, le contribuable est assujetti à la loi d’impôt,
indépendamment du point de savoir si sa situation ou les faits qui sont à l’origine de
son imposition sont, ou non, licites au regard d’une autre législation. Enfin le
contribuable est tenu de collaborer à l’établissement de l’impôt, dès lors que celui-ci
est perçu selon un procédé déclaratif. Même si sa collaboration est imposée au
contribuable à peine de sanction.

Toutefois la sujétion du contribuable n’est pas exclusive du maintien à son profit de


quelques espaces de liberté et de protection entre les options fiscales et le libre choix
de la voie la moins imposée.

La loi fiscale sénégalaise comporte de très nombreux mécanismes optionnels.


L’option se définit comme l’acte de volonté par lequel le contribuable exerce, sur le
fondement d’un texte fiscal, un choix juridique conduisant à écarter l’application de
la règle fiscale qui lui serait normalement applicable au profit de celle d’une autre
règle fiscale. Pour être régulier, l’exercice d’une option suppose généralement
l’accomplissement d’un acte positif obéissant à certaines formes. Le régime
d’opposabilité de l’option dépend de son caractère régulier ou irrégulier. L’option, à
la supposer régulière, est opposable à l’administration comme au contribuable.
L’option irrégulière peut se définir comme l’option contraire à la loi.

Les options fiscales produisent des effets pendant des durées variables. Certaines
options sont dites irrévocables. Présentant un caractère irréversible, elles placent
définitivement le contribuable dans un statut dérogatoire (article 4 III 2, article 353

22
option à la TVA). D’autres options sont permanentes, c’est-à-dire produisent leurs
effets sans limitation de durée déterminée ou une durée minimale. Dans le silence de
la loi, de telles options à durée indéterminée doivent être regardées comme
révocables. D’autres enfin produisent leurs effets pendant une durée déterminée ou
une durée minimale. Dans les deux cas, l’option ne peut être révoquée avant
l’expiration de la période considérée (article 26.2 du CGI lors de l’option pour le
régime du bénéfice réel normal, article 77, option de non assujettissement à la
CGF).

« Tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être
contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas » (article 5 déclaration de 1789). Ce principe
de liberté s’applique en matière fiscale. En effet, le contribuable n’est jamais tenu de
tirer le maximum de profit que les circonstances lui auraient permis de réaliser. Il en
résulte que le fisc ne saurait, de manière générale, s’immiscer dans la gestion des
entreprises ni critiquer les solutions retenues par un particulier dans la gestion de ses
affaires ou de son patrimoine privés. En réalité, la liberté de gestion apparaît plus
réelle que celle des entreprises, dans la mesure où la notion d’acte anormal de gestion
ne s’applique à leur égard que dans des hypothèses très limitées. Le principe du libre
choix de la voie la moins imposée profite au contribuable tant qu’il ne méconnaît pas
des obligations légales. Toutefois, la libre gestion fiscale et le libre choix de la voie la
moins imposée ne sont pas absolus. Certains abus éventuels commis dans leur
exercice peuvent être sanctionnés à travers la théorie de l’abus de droit et de l’acte
anormal de gestion.

La théorie de l’abus de droit permet à l’administration de requalifier les faits


contenus dans un acte et fixe ainsi une limite à la liberté de gestion. Le contribuable
est libre de sa gestion, mais cette liberté ne peut être utilisée pour frauder la loi. Cette
théorie repose sur l’article 610 du CGI en vertu duquel « toute opération conclue sous la
forme d’un contrat ou d’un acte juridique quelconque et dissimulant ou déguisant une
réalisation ou un transfert de bénéfices ou de revenus, effectuée directement ou par personnes
interposées n’est pas opposable à l’administration » sachant qu’« il en est également ainsi
des actes donnant ouverture à des droits d’enregistrement moins élevés ou permettant
d’éviter en totalité ou en partie le paiement des taxes sur le chiffre d’affaires ».

Les actes constitutifs d’un abus de droit sont frappés d’inefficacité juridique,
l’administration fiscale est en droit de restituer le véritable caractère et d’imposer le
contribuable :

- En cas de simulation, à raison de sa situation réelle ou de l’opération qu’il a


réellement effectuée ;
- En cas de fraude à la loi, en faisant abstraction des textes dont l’application a
été frauduleusement recherchée ou obtenue.

Les opérations constitutives d’un abus de droit sont celles conclues sous la forme
d’actes présentant un caractère fictif ou celles n’ayant pour but que d’éluder ou
d’atténuer les charges fiscales normalement supportées.

La procédure de l’abus de droit concerne tous les impôts et peut être mise en œuvre
indifféremment lorsque la situation constitutive de l’abus porte sur l’assiette, la
liquidation de l’impôt ou son paiement. Le caractère fictif est constitué par la

23
différence objective existant entre l’apparence juridique créée par l’acte en cause et la
réalité, en particulier économique, sous-jacente à cet acte.

La recherche d’un but exclusivement fiscal consistant à éluder ou atténuer les


charges fiscales peut notamment prendre la forme d’une réduction de l’impôt à
payer ou la perception indue d’un crédit d’impôt ou encore de l’augmentation
abusive d’une situation déficitaire. Les actes que l’administration peut écarter en
démontrant un abus de droit sont des actes écrits ou non écrits ainsi que tout
document ou fait qui manifeste l’intention de son auteur et produit des effets de
droit.

Essentiellement lié à l’imposition des résultats des entreprises, l’autre mécanisme


purement prétorien réside dans l’inopposabilité au fisc des actes anormaux de
gestion. Fondée un peu artificiellement sur les textes généraux définissant le bénéfice
imposable (article 8 II du CGI), dans la catégorie des Bénéfices Industriels et
Commerciaux, la théorie de l’acte anormal de gestion est reçue en premier lieu dans
le cadre de l’imposition des résultats des exploitations industrielles, commerciales ou
artisanales que ces entreprises relèvent de l’IR ou soient passibles de l’IS.

L’acte anormal s’y définit de manière générale comme celui qui indépendamment de
son caractère licite ou illicite est contraire aux intérêts de l’entreprise. Nécessairement
intentionnel, l’acte anormal de gestion peut revêtir différentes formes. Dans sa forme
la plus usuelle, l’acte anormal de gestion est celui qui, diminuant le résultat
imposable ne comporte pas de contrepartie suffisante pour l’entreprise.

Les principes de liberté et de responsabilité sont indissociables. Le droit fiscal ne


déroge pas à cette solution générale : deux théories importantes en sont des
conséquences directes.

- La théorie de l’apparence permet à l’administration fiscale d’établir l’impôt, en


se fondant sur une situation apparente créée ou entretenue par le
contribuable, sans que celui-ci ne puisse soutenir utilement qu’elle est
différente de sa situation réelle résultant d’un acte resté occulte.
- La seconde de ces théories est celle des décisions de gestion. Le contribuable
prend une décision de gestion lorsque conformément à la loi fiscale, il exerce
un choix entre deux solutions également régulières. Ces décisions présentent
un caractère définitif (c’est le cas de l’option irrévocable pour l’IS).

En matière fiscale, la bonne foi du contribuable est présumée. Il s’agit naturellement


d’une présomption simple.

II- LES AMENAGEMENTS ADMINISTRATIFS DU STATUT

Le régime des sources du droit fiscal est dominé sur le plan théorique par le principe
de légalité fiscale. Paradoxalement, le droit fiscal se caractérise également par la
portée légalement reconnue à des actes ou décisions de l’administration fiscale, qui
par l’application des principes généraux du droit public être dépourvus de toute
incidence juridique directe. Ce paradoxe est lié à la consécration légale de deux
mécanismes hautement dérogatoires qui tendent à renforcer la sécurité juridique des

24
contribuables et protéger les attentes légitimes que l’administration fiscale a pu faire
naître à leur égard.

Ces mécanismes empruntent différentes formes qu’il est parfois difficile de


distinguer. Le plus important est posé à l’article 601 du CGI. Il consiste en
l’opposabilité à l’administration fiscale des interprétations des textes fiscaux qu’elle a
formellement admises. Les seconds, prévus à l’article 602 du CGI permettent
d’opposer à l’administration fiscale, dans de nombreuses hypothèses, ses prises de
position formelles concernant des situations de fait.

A – Les interprétations formelles et la doctrine administrative fiscale

La présentation générale de l’article 601 du CGI permet de mieux appréhender le


champ d’application de la garantie.

1- La définition générale de la doctrine administrative

La doctrine administrative de portée générale peut se définir comme « l’ensemble


des interprétations des textes fiscaux formulées par une autorité fiscale centrale en
direction de l’administration fiscale déconcentrée en vue, principalement d’assurer
une application uniforme de ces textes sur le territoire national ». Elle est contenue le
plus souvent dans des instructions.

En application des solutions du droit administratif général, le contribuable ne


pourrait utilement se prévaloir à l’encontre de l’administration de ses interprétations
« doctrinales ». Il le peut toutefois sur le fondement d’un dispositif légal propre au
droit fiscal, codifié à l’article 601 du CGI.

La doctrine administrative individuelle peut être définie comme « l’interprétation


d’un texte fiscal formulée par une autorité fiscale, centrale ou déconcentrée, à l’égard
d’un contribuable déterminé ». Ici encore, les dispositions de l’article 601 du CGI
confèrent à cette doctrine individuelle une portée qu’elle ne saurait revêtir en droit
administratif général.

2- La fonction générale des articles 601 et 602 du Code Général des Impôts

Les interprétations que donne l’administration de la loi fiscale ne sont pas


immuables. Elles peuvent être modifiées pour des raisons très variables et, en
particulier, par l’administration agissant proprio motu.

Toutes les évolutions dans l’interprétation administrative de la loi fiscale ne posent


pas les mêmes difficultés. Celle du durcissement de la doctrine est plus délicate. On
peut lui assimiler celle de l’abandon pur et simple d’une interprétation antérieure
favorable ou du revirement administratif dans son application. Avec la faculté
reconnue à l’administration d’exercer son droit de reprise, le risque est grand que
l’administration applique a posteriori au contribuable une interprétation nouvelle
moins favorable.

Le dispositif des deux articles est fréquemment désigné sous le nom de mécanisme
de « garantie contre les changements de doctrine ». Cette appellation est trompeuse.
En effet, sur le plan des principes, l’administration a au regard de ce dispositif, toute

25
latitude pour formuler une nouvelle interprétation, y mettre fin, adoucir ou durcir
une interprétation précédemment admise. Leur objectif est d’organiser un
mécanisme d’opposabilité à l’administration de ses propres interprétations, qui peut
constituer sous certaines conditions, un obstacle à des rehaussements décidés par
l’administration.

L’article 601 du CGI possède un champ d’application élargi mais un objet et des
effets limités.

D’abord, il autorise le contribuable à se prévaloir de toute «  interprétation (…)


formellement admise par l’administration ». La garantie porte donc aussi bien sur la
doctrine générale et impersonnelle que sur les interprétations délivrées à titre
individuel.

Ensuite, la garantie prévue à cet alinéa est toutefois très limitée dans sa portée. Ce
texte prévoit seulement que lorsqu’une imposition primitive a été étable par
l’administration conformément à un élément de doctrine contemporain de l’acte
initial d’imposition, celle-ci ne peut ultérieurement procéder à un rehaussement de
cette imposition initiale qui serait exclusivement motivée par la mise en œuvre d’une
interprétation différente. En d’autres termes, la garantie consiste ici dans un
mécanisme d’opposabilité de la doctrine administrative lorsqu’elle a précédemment
fait l’objet d’une application spontanée par l’administration. Il ne permet
aucunement en revanche de « forcer » l’application par l’administration de sa propre
doctrine.

L’article 601 alinéa1 du CGI, il possède un champ d’application réduit et une portée
plus vastes. Il permet uniquement au contribuable de se prévaloir des
« instructions ou circulaires publiées » et en aucun cas des interprétations données à
titre individuel.

Mais la portée de la garantie est ici d’une toute autre nature, en permettant au
contribuable de « forcer » l’application d’une interprétation formelle. Il aboutit en
effet à l’opposabilité d’un élément de doctrine à l’administration indépendamment
de son application spontanée par celle-ci. Il suffit pour cela u contribuable, toutes
autres conditions étant remplies, d’avoir appliqué « un texte fiscal selon
l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou
circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en
cause », c’est-à-dire de manière générale, de s’être conformé à la doctrine
administrative en souscrivant ses propres déclarations.

Actuellement la grande majorité des auteurs s’accordent pour considérer que l’article
601 du CGI, dont l’application peut conduire à une inversion de la hiérarchie des
normes appliquées par le juge fiscal, est contraire à la constitution. En outre, les
différences de traitement fondées sur la situation des contribuables constituent une
rupture d’égalité devant la doctrine administrative.

B- Les conditions liées à la garantie

Elles renvoient à son champ d’application et à ses conditions d’application.

1- Le champ d’application de la garantie

26
Le champ d’application de l’article 601 du CGI est étroitement limité. Ce texte, qui ne
saurait s’appliquer qu’au profit des contribuables, ne peut être utile invoqué qu’en
contentieux fiscal dans des litiges intéressant des prélèvements de nature fiscale.

Le champ d’application matériel de l’article 601 du CGI porte exclusivement sur les
prélèvements de nature fiscale. Il est sans incidence à l’égard des prélèvements non
fiscaux, alors même que, sous l’effet de textes en ce sens, le contentieux de ces
prélèvements serait porté devant le juge fiscal.

Le mécanisme d’opposabilité de la doctrine administrative s’applique exclusivement


dans les litiges fiscaux stricto sensu. Ainsi l’article 601 ne s’applique pas en revanche
dans les contentieux généraux de la responsabilité et de l’excès de pouvoir, alors
même que les litiges considérés, se rattachant à la perception de l’impôt,
présenteraient une « coloration fiscale »marquée. Il en est de même devant les
juridictions correctionnelles statuant en matière de fraude fiscale où ce dispositif est
inapplicable.

Le mécanisme d’opposabilité de la doctrine administrative est fondamentalement


dissymétrique. La doctrine administrative n’est susceptible de s’appliquer qu’au
profit du contribuable. L’administration ne peut, a fortiori, légalement établir une
imposition sur le fondement d’une instruction ministérielle.

Il est indiscutable que l’administration ne peut jamais opposer au contribuable le


contenu défavorable de sa doctrine administrative. Elle peut toutefois opposer au
contribuable le durcissement, l’abandon ou la caducité de ses interprétations
favorables antérieures. En d’autres termes, l’évolution défavorable de la doctrine
administrative peut être opposée au contribuable par l’administration, sous réserve,
bien évidemment, que le changement de doctrine ait reçu une publicité adéquate.

2- Les conditions d’application de la garantie

La notion d’interprétation formelle exigée par l’article 601 est difficile à préciser. Elle
comporte trois éléments :

- Il doit s’agir, en premier lieu, d’indications positives et explicites émanant


d’une autorité fiscale.
- Il doit s’agir, en second lieu, d’indications présentées sous une forme
impérative. En ce sens, l’interprétation formelle doit revêtir la forme d’une
expression normative et s’oppose à la « simple recommandation » donnée aux
agents subordonnés par l’administration supérieure.
- L’interprétation formelle doit, en dernier lieu, présenter un caractère
innovatoire. Elle ne doit pas se limiter à confirmer l’interprétation qui, aux
yeux du juge fiscal, découle « naturellement » du texte interprété.

Pour l’application de l’article 602 du CGI, la notion de texte fiscal, objet de


l’interprétation, est une notion strictement matérielle. U texte fiscal doit s’entendre de
toute norme de droit, qu’elle qu’en soit la nature formelle.

Il convient de distinguer les actes doctrinaux susceptibles d’être invoqués


indistinctement sur le fondement des articles 601 et 602 du CGI Pour l’application
des deux articles, la doctrine administrative peut être véhiculée par des instructions,

27
circulaires et notes administratives publiées auxquelles ont été assimilées les
réponses ministérielles à des questions écrites des parlementaires.

Pour l’application de l’article 602, une interprétation formelle peut également


ressortir d’un acte individuel et, spécialement, d’une réponse apportée par
l’administration à une demande exprimée par un contribuable déterminé.

La condition de conformité signifie que le contribuable ne peut utilement invoquer le


bénéfice d’une interprétation que s’il remplit l’ensemble des conditions qu’elle pose.
Ainsi, le contribuable doit « entrer dans les prévisions » de la doctrine qu’il invoque.
Donc il ne peut pas se prévaloir de l’analogie avec des situations voisines à celle dans
laquelle il se trouve, de même d’une interprétation a contrario de la doctrine
administrative.

La condition d’antériorité met en lumière l’application de la doctrine administrative


à compter du jour qui suit celui de la publication ou le cas échéant, à une date
ultérieure déterminée par l’administration. En revanche, elle ne peut, en principe
produire un quelconque effet pour la période antérieure à sa publication. En d’autres
termes, la doctrine administrative ne peut avoir normalement aucun effet rétroactif.
Il n’y a pas lieu à distinguer selon que la doctrine administrative nouvelle est plus
favorable ou non que celle qui aurait été le cas échéant, précédemment admise.

3- Les conditions de mise en œuvre de la garantie

En principe, le contribuable ne peut opposer une interprétation formelle à


l’administration sur les fondements des articles 601 et 602 que s’il en a lui-même dès
l’origine fait application. En d’autres termes, le contribuable doit avoir accompli ses
obligations déclaratives en se plaçant spontanément sous le régime prévu par la
doctrine. Cette solution générale connaît trois atténuations :

- Le contribuable peut d’abord opposer à l’administration ses interprétations


formelles en matière d’impôts non déclaratifs alors, pourtant, qu’il n’est pas
appelé, en la matière, à appliquer ce texte fiscal ;
- Ensuite, il est admis l’application de la garantie dans le cas où l’administration
met en œuvre une procédure d’imposition d’office ;
- Enfin, lorsque la doctrine administrative elle-même introduit expressément,
dans les cas qu’elle vise, une exception à l’obligation légale de déclarer.

Les garanties consacrées par les articles 601 et 602 du CGI ne présentent pas en elles-
mêmes un caractère d’ordre public, donc le juge n’est pas en droit de les soulever
d’office en faveur du contribuable.

28
CHAPITRE III LES PROCEDURES FISCALES

INTRODUCTION

Le droit fiscal n’est pas uniquement constitué de règles substantielles gouvernant


l’imposition dans son principe et dans son montant. Il est également le siège de
nombreuses règles de dimension procédurale. Ces règles de procédure, posées par
des textes ou dégagées de la jurisprudence, peuvent être rangées en deux groupes.

Les premières, les plus nombreuses, consacrent, en les encadrant, les prérogatives
reconnues à l’administration pour permettre l’établissement, le contrôle et le
recouvrement de l’imposition. Organisant parallèlement un certain nombre de
garanties au profit des contribuables, elles forment le droit de la procédure fiscale
non contentieuse.

Les secondes forment un ensemble moins dense mais tout aussi complexe. Relevant
de la procédure fiscale contentieuse, elles ont trait au mode de règlement des litiges
survenant en matière fiscale.

I- LES PROCEDURES NON CONTENTIEUSES

29
Les procédures non contentieuses peuvent être regroupées en deux catégories :

- Celles qui ont pour finalité de permettre ou d’établir ou de contrôler le bon


établissement de l’imposition des contribuables ;
- Celles qui offrent aux contribuables publics les moyens juridiques de s’assurer
du recouvrement des créances publiques ;

A- L’établissement de l’imposition

La plupart l’imposition est établie sur la base des seules énonciations contenues dans
la déclaration communiquée par le contribuable un tiers. Plusieurs procédures de
contrôle existent mais une distinction peut être établie entre les procédures
d’investigation et les procédures de vérification. Les procédures d’investigations, de
contrôle et de rectification en sont le corollaire.

1- Les procédures d’investigations

Plusieurs dispositions du CGI permettent à ces agents de recenser les informations


de nature à contrôler le bon établissement des bases imposables. La compétence des
agents des services fiscaux s’apprécie non seulement ratione materiae et rationae loci.
L’incompétence juridique des agents susceptibles d’entraîner la nullité des
procédures. Ce motif d’annulation est d’ordre public.

Les procédures d’investigation à la disposition de l’administration sont les d’abord


demandes de renseignements, d’éclaircissements ou de justifications, ensuite le droit
de communication, enfin les visites et la flagrance fiscale.

a- Les demandes de renseignements, d’éclaircissements ou de justifications

L’administration fiscale peut demander au contribuable, verbalement ou par écrit,


tous les renseignements, justifications ou éclaircissements qu’elle juge utile. Prévue à
l’article 569 I, ces différentes demandes ne sont pas contraignantes. Ce qui n’est pas
le cas pour les demandes de justifications ou d’éclaircissements prévues à l’alinéa III.
En effet, une distinction doit être établie entre les demandes d’éclaircissements et les
demandes de justifications. Les premières impliquent une clarification tandis que les
secondes requièrent une argumentation. En effet, les demandes d’éclaircissements
ont un contenu plus précis que celui des demandes de renseignements. A la
différence de la demande d’éclaircissements qui ne procure généralement que des
explications complémentaires à la déclaration, la demande de justifications appelle
des renseignements précis et directement utilisables. Les justifications exigent du
contribuable un commencement de preuve. Toutefois, la demande de justifications
est soumise, en principe, à une condition préalable mise à la charge de
l’Administration fiscale. En effet, l’Administration ne peut exiger de justifications
que si elle a réuni des éléments permettant d’établir que le contribuable peut avoir
des revenus plus importants que ceux qu’il a déclarés.

b- Le droit de communication

30
Le droit de communication est un moyen spécifique du contrôle fiscal. Il permet à
l’Administration de prendre connaissance de tous les documents dont la
conservation et la présentation sont rendues obligatoires par la loi.

Aux termes de l’article 571 du CGI, le droit de communication permet à


l’Administration de disposer des documents comptables, inventaires, copies de
lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l’exactitude des résultats
indiqués dans la déclaration du contribuable, et d’une façon générale, tous
documents nécessaires au contrôle et la détermination de l’assiette des impôts. Le
droit de communication ne peut porter que sur des documents comptables. Il peut
être exercé activement par l’Administration fiscale. Il peut aussi être spontanément
mis en œuvre par d’autres institutions ou entreprises détenant des renseignements
pertinents au regard de l’article 573 du CGI. Cependant l’Administration fiscale ne
peut pas exercer ce droit sur des particuliers qui n’ont aucune activité économique
indépendante.

c- Le droit de visite

Le droit de visite constitue un véritable pouvoir de perquisition. La lutte contre le


marché noir justifie le fait que l’administration fiscale soit habilitée à rechercher et à
sanctionner des infractions économiques, en pratiquant des perquisitions. Aux
termes de l’article 576 du CGI, le droit de visite permet aux agents assermentés de
l’Administration fiscale de procéder à des visites en tous lieux même privés. Le droit
de visite permet à l’Administration de s’introduire chez le contribuable qu’elle
soupçonne de fraude afin de saisir les documents nécessaires à son enquête. Cette
procédure a pour but de procéder à la saisie des pièces, documents, objets ou
marchandises se rapportant à des infractions en matière fiscale, ainsi que les biens et
avoirs en provenant. Il concerne les impôts directs et indirects.

L’exercice du droit de visite est encadré, afin de concilier l’efficacité de l’action


administrative et le respect de la liberté individuelle. Conformément à l’article 576 du
CGI, les agents du fisc sont accompagnés d’un officier de police judiciaire, sauf en cas
de flagrance. Dans le cadre de l’exercice de la visite, le juge désigne également
l’officier de police judiciaire chargé d’assister à ces opérations et de le tenir informé
de leur déroulement. En plus, la visite doit être autorisée par une ordonnance du
président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux
à visiter, hormis les cas de flagrance.

La visite ne peut débuter avant 6 heures ni après 21 heures. Toutefois pour les lieux
ouverts au public, la visite peut intervenir pendant les heures d’ouverture de
l’établissement. Et elle est opérée en présence de l’occupant des lieux ou de son
représentant (sinon l’officier de police judiciaire requiert deux témoins choisis en
dehors des personnes relevant de son autorité).

La visite est sanctionnée par l’établissement d’un procès-verbal. Le PV de visite relate


les modalités et le déroulement de l’opération. Il est dressé sur-le-champ par les
agents de l’administration fiscale avec un inventaire des pièces et documents saisis,
ainsi que des biens et avoirs provenant directement ou indirectement des infractions
dont la preuve est recherchée, est annexé au procès-verbal.

31
Les informations recueillies dans le cadre du droit de visite ne peuvent être
exploitées dans le cadre d’une procédure de vérification de comptabilité ou de
contrôle de revenu qu’après restitution des pièces ou de leur reproduction.

d- La flagrance fiscale

En principe, un contrôle fiscal ne peut être effectué que sur une période pour laquelle
les obligations déclaratives sont échues. Mais pour lutter contre les comportements
frauduleux, le législateur a institué une procédure dérogatoire au droit commun,
visant à sécuriser immédiatement le recouvrement futur des impositions dues.

La procédure de flagrance ne concerne que les contribuables se livrant à une activité


professionnelle. Elle ne s’applique qu’aux revenus professionnels soumis à l’impôt
sur le revenu, à l’impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée. L’article 614
du CGI indique que les agissements fautifs pouvant donner lieu à l’établissement
d’un PV de flagrance avant même les échéances déclaratives. Il s’agit de l’exercice
d’une activité occulte, de la délivrance ou de la comptabilisation de factures fictives,
de la réalisation d’opérations commerciales sans facture et non comptabilisées, de
l‘utilisation de logiciels de comptabilité frauduleux ou encore du recours au travail
dissimulé.

La flagrance fiscale est une procédure dérogatoire. Mais, elle n’est pas pour autant un
dispositif autonome de contrôle. Elle doit être exercée dans le cadre de procédure
classique de contrôle : droit de visite et de saisie, contrôle inopiné, droit d’enquête,
vérification sur place.

Lorsqu’au cours de ces procédures régulières de contrôle, l’Administration fiscale


constate l’exercice par le contribuable d’une activité entrant dans le champ
d’application de la flagrance fiscale, au titre de la période pour laquelle l’une des
obligations déclaratives n’est pas échue, elle peut, en cas de circonstances
susceptibles de menacer le recouvrement de la créance fiscale, dresser à l’encontre de
contribuable un PV de flagrance.

L’établissement d’un PV de flagrance permet à l’administration fiscale de disposer de


pouvoirs étendus pour recouvrer les créances dues au Trésor. La flagrance fiscale
permet à l’Administration de procéder à des saisies conservatoires et d’infliger une
amende au contribuable, au titre d’un exercice d’ayant pas encore donné lieu à
l’établissement d’une déclaration.

Lorsque l’administration a dressé un PV de flagrance, la déchéance de certains


régimes d’imposition à la taxe sur la valeur ajoutée peut être prononcée, s’il y a lieu.
La notification du PV de flagrance aura pour conséquence de faire échec au principe
non-réitération d »un contrôle fiscal au titre d’une période déjà vérifiée. Dès lors,
l’administration est en droit de contrôler à nouveau le contribuable au titre du même
impôt et de la même période. Elle a aussi la possibilité de rouvrir un contrôle fiscal
sur une même période sur une même période et pour un même impôt après
l’achèvement d’un premier contrôle fiscal. L’article 667 a aussi prévu une amende de
500.000 FCFA en cas de flagrance fiscale. Cette amende ne fait pas obstacle à
l’application d’autres sanctions, par exemple pour activité occulte ou manœuvres
frauduleuses.

32
e- Le droit d’enquête

La loi permet à l’administration d’intervenir de manière inopinée dans les entreprises


pour s’assurer du respect des règles relatives à la facturation. Cette procédure
confère des pouvoirs importants à l’administration sans toujours offrir au
contribuable les garanties correspondantes.

Le droit d’enquête consiste à vérifier la conformité des factures émises et reçues aux
règles de forme édictées par la loi, et d’apprécier leur sincérité. En effet, aux termes
de l’article 577 du CGI, le droit d’enquête a pour objet la recherche de manquements
aux règles de facturation.

Le droit d’enquête s’exerce sur place, dans les locaux professionnels de l’assujetti ou
sur convocation dans les bureaux de l’administration. Il est précédé par la remise
préalable d’un avis d’enquête. Conformément à l’article 577, lors de la première
intervention ou convocation au titre du droit d’enquête, un avis d’enquête est remis à
l’assujetti ou à son représentant lorsqu’il s’agit d’une personne morale. En l’absence
du contribuable, l’avis est remis à la personne qui reçoit les enquêteurs. En tout état
de cause, l’exercice du droit d’enquête devrait être soumis à une autorisation
préalable du Directeur de la DGID.

A la fin des activités de recherche, un PV est dressé, qui constate les manquements
aux règles de facturation ou l’absence de tels manquements. Les constatations du PV
ne peuvent être opposées à l’assujetti ainsi qu’aux tiers concernés par la facturation
que dans le cadre de la vérification de comptabilité l’examen de la situation fiscale
personnelle. Elles peuvent aussi être invoquées à l’occasion de l’exercice du droit de
visite.

f- Les vérifications ponctuelles

Dans le cadre de la recherche de renseignements, l’Administration pour procéder à


des interventions ponctuelles.

La vérification ponctuelle de comptabilité est une procédure de contrôle ciblé, moins


exhaustive, plus rapide et de moindre amplitude que la vérification de comptabilité.
Le contrôle ponctuel est un procédé qui permet de porter un diagnostic rapide et
donc d’éviter le cas échéant, l’opportunité de prolonger les investigations. Il porte sur
l’examen des pièces justificatives et comptables de quelques rubriques d’impôts et
sur une période limitée qui peut même être inférieure à un exercice comptable.

Le contrôle inopiné représente le droit de constatation de l’administration des actes


matériels liés à l’exploitation. Il permet de relever des éléments importants dans
l’entreprise qui pourraient être dissimulés si le contribuable était informé des
intentions administratives à l’occasion d’une vérification classique. En cas de contrôle
inopiné, l’avis de passage doit être remis au début des opérations constatations
matérielles. Prévu à l’article 581 du CGI, il consiste à procéder à des constatations
matérielles, notamment la constatation de l’existence des moyens de production, des
matières et éléments de stocks, l’existence et l’état des documents comptables,
l’inventaire des valeurs en caisse ou encore le relevé des prix pratiqués. Les
opérations effectuées dans le cadre du contrôle inopiné doivent strictement se limiter

33
à des constatations matérielles. Donc les agents de l’administration doivent se limiter
à dresser un inventaire des moyens de production utilisés.

Au terme de l’intervention, un PV est dressé contradictoirement, contre le


contribuable et le vérificateur. Du fait du caractère professionnel de la vérification,
toute visite de lieux privés ou n’ayant aucun rapport avec l’activité professionnelle
est interdite. Le contrôle inopiné est une procédure quelque peu hybride, car elle
débute comme une enquête par une intervention à l’improviste et se poursuit comme
une vérification de comptabilité. L’examen au fond des documents comptables ne
peut commencer qu’à l’issue d’un délai raisonnable permettant au contribuable de se
faire assister par un conseil.

g- Les interventions à l’étranger

Les contrôles fiscaux à l’étranger sont une forme d’assistance mutuelle. La plupart
des conventions contre la double imposition signées par le Sénégal prévoient une
coopération entre les autorités compétentes sous forme d’échanges des
renseignements nécessaires pour appliquer les dispositions conventionnelles, ou
celles de leur législation interne. La loi prévoit le cadre légal pour l’application des
interventions fiscales à l’étranger. Concrètement, la coordination des contrôles
fiscaux se fait à travers des deux procédés dont l’intensité dans la coopération est
variable : les contrôles simultanés qui sont concomitants, mais séparés et les contrôles
que nous disons « conjoints », qui supposent le déplacement d’agents de
l’administration fiscale dans le pays partenaire.

Le contrôle fiscal simultané est un contrôle entrepris en vertu d’un accord par lequel
deux ou plusieurs Etats conviennent de contrôler simultanément et de manière
indépendante, chacun sur son territoire, la situation fiscale d’un ou plusieurs
contribuables. Il est prévu à l’article 579 du CGI. Il est mis en œuvre en matière
d’impôts directs, lorsque la situation d’un ou plusieurs contribuables présente un
intérêt commun ou complémentaire pour un ou plusieurs Etats ayant conclu avec le
Sénégal une convention. Les contrôles fiscaux simultanés contribuent à mettre en
lumière la manipulation ou l’abus des lois et procédures en vigueur dans chaque
pays.

Le contrôle simultané facilite l’échange de renseignements entre les administrations.


Les contribuables peuvent également tirer avantage d’un contrôle fiscal simultané, en
ce qu’il leur fait gagner du et économiser des ressources, en raison de la coordination
des enquêtes des administrations fiscales concernées et de l’élimination de doubles
emplois.

Le contrôle conjoint est mené de concert par deux ou plusieurs administrations


fiscales. Il suppose que les vérificateurs d’une administration se rendent auprès
d’une autre administration et avec les agents de celle-ci, ils exercent ensemble et sur
place le contrôle des opérations réalisées par les multinationales. La procédure de
contrôle fiscal à l’étranger permet aux administrations, lorsque la demande en a été
faite et dans les limites imposées par les lois de leur pays, à autoriser les agents des
impôts d’un pays étranger à participer à des contrôles fiscaux menés par le pays
requis. Les agents des impôts autorisés peuvent participer de manière passive ou

34
active au contrôle ainsi effectué. Certains pays n’autorisent qu’une participation
passive des agents étrangers.

Mais, de par sa nature, ce type de contrôle peut mettre en péril les droits et garanties
des contribuables, surtout pour ce qui concerne le secret professionnel. Toutefois,
s’ils sont bien menés, les contrôles conjoints seraient particulièrement efficaces, dans
la mesure où, l’administration qui se déplace dispose de la presque totalité des
renseignements relatifs à un contribuable. Les limites de l’échange de
renseignements par voie épistolaire se trouveraient neutralisées. En effet, il peut
parfois s’avérer utile de se rendre dans un pays étranger pour y recueillir des
renseignements relatifs à une affaire donnée.

La particularité du contrôle conjoint par rapport aux contrôles simultanés est qu’il y
a une confusion de procédure dans le premier cas. Il constitue un frein orchestré
contre la souveraineté fiscale des Etats, en ce qu’il autorise les agents d’une
administration étrangère d’avoir directement accès à la comptabilité d’une entreprise
ne relevant pas de leur compétence. Alors que, pour ce qui concerne les contrôles
simultanés, une fois qu’un accord fixant les grandes lignes à suivre a été conclu et
que certaines affaires ont été sélectionnées, les agents des services fiscaux de chaque
Etat procèdent séparément à leurs contrôles dans leur propre juridiction,
conformément à leur droit et à leur pratique administrative.

2- L’exercice du contrôle

L’Administration peut approfondir les investigations à travers une procédure de


contrôle. Ce contrôle peut revêtir diverses formes, il peut être approfondi ou
sommaire. Le contrôle sommaire se fait à partir du bureau sur le dossier du
contribuable. Le contrôle approfondi se fait sur place en principe dans les locaux de
l’entreprise ou de son conseil et consiste en une vérification de comptabilité ou de la
vérification personnelle.

a- Le contrôle sur pièce

L’Administration a la possibilité de confronter les déclarations du contribuable avec


les données dont il dispose. Il s’agit du contrôle sur pièces. Il a pour objet de vérifier
si le contribuable a déposé ses déclarations, de rectifier les erreurs, insuffisances,
inexactitudes, omissions ou dissimulations dans les éléments servant de base au
calcul de l’impôt. L’article 580 du CGI, l’Administration fiscale contrôle sur pièces les
déclarations qui lui sont déposées en vue d’en vérifier l’exactitude et la sincérité. Elle
procède à la rectification des erreurs matérielles évidentes constatées dans les
déclarations souscrites. Elle peut également rapprocher les déclarations déposées par
un contribuable des renseignements figurant dans son dossier fiscal ou qu’elle peut
obtenir par la mise en œuvre de tout autre moyen de contrôle. Elle contrôle aussi les
documents déposés pour l’établissement des impôts ainsi que ceux présentés en vue
d’obtenir des déductions, restitutions, remboursements, exonérations ou d’acquitter
tout ou partie d’un impôt.

35
Le contrôle sur pièces aboutit soit au classement de la déclaration lorsqu’elle est
reconnue exacte, soit à des rectifications lorsqu’elle est inexacte sur certains points
particuliers, soit à la vérification de la comptabilité ou l’examen contradictoire de
situation fiscale personnelle. Par conséquent, la vérification sur place constitue le
prolongement logique et obligatoire du contrôle sur pièce si ce dernier n’a pas permis
de régulariser, sur pièces, la situation du contribuable.

b- La vérification de comptabilité

Elle se déroule sur place dans les locaux de l’entreprise. La vérification de


comptabilité permet à l’Administration de s’assurer de la sincérité d’une déclaration
fiscale en la confrontant à des éléments extérieurs. Elle consiste en l’examen et
l’exploitation des documents qui ont permis l’établissement des déclarations
déposées par les contribuables.

La vérification de comptabilité constitue donc l’ensemble des opérations ayant pour


objet d’examiner la comptabilité d’une entreprise et de la confronter à certaines
données matérielles ou des faits afin de contrôler l’exactitude et la sincérité des
déclarations souscrites.

La vérification de comptabilité peut être générale ou partielle. Le contrôle porte sur


l’ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent à
la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l’élaboration des déclarations
obligatoires ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la
programmation et à l’exécution des traitements. Elle peut être limitée à un ou
plusieurs impôts déterminés par mention expresse sur l’avis de vérification.

Dans le cadre de la vérification de comptabilité, les agents des impôts peuvent


prélever, pour copie, dans un délai de 2 jours, toute déclaration ou pièce comptable
nécessaire. Ce prélèvement donne lieu à une décharge ou un PV remis au
contribuable.

Lorsque la comptabilité de l’entreprise est tenue au moyen de systèmes informatisés,


le contribuable peut satisfaire à l’obligation de représentation des documents
comptables en remettant, sous forme dématérialisée une copie des fichiers des
écritures comptables. Toutefois, l’Administration ne devra, à la fin de l’intervention
sur place, conserver aucune copie des fichiers transmis.

Dans le cadre de la vérification de comptabilité, le contribuable doit être avisé au


minimum huit jours avant la première intervention. Cette information se fait par
lettre recommandée ou par remise directe avec accusé de réception d’un avis de
vérification accompagné de la charte du contribuable vérifié. Le délai de huit jours
court à compter de la date de la réception de l’avis de vérification. Cet avis doit
préciser les périodes et les impôts, droits et taxes soumis à vérification. En cas de
contrôle inopiné, l’avis de vérification est remis au début des opérations de
constatations matérielles.

Sous peine de nullité, l'avis de vérification transmis au contribuable doit mentionner


la faculté dont dispose ce dernier de se faire assister, au cours des opérations de
contrôle, d'un conseil de son choix.

36
c- L’examen de la situation fiscale personnelle (ESFP)

L’ESFP conduit l’Administration à s’immiscer dans la vie privée du contribuable


pour apprécier la conformité des déclarations souscrites avec les éléments de son
train de vie. Il s’entend des opérations de contrôle comportant la recherche d’une
cohérence entre, d’une part, les revenus déclarés au titre de l’impôt sur le revenu,
d’autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du
train de vie dont le contribuable a pu disposer. L’article 583 du CGI prévoit que
l’Administration peut procéder à l’examen contradictoire de l’ensemble de la
situation fiscale des personnes physiques au regard de l’impôt sur le revenu, qu’elles
aient ou non leur domicile fiscal au Sénégal. L’ESFP a pour but de vérifier la sincérité
des déclarations du revenu global au titre de l’impôt sur le revenu. Cette procédure
peut s’appliquer à un dirigeant de société, un membre d’une profession libérale, un
commerçant ou un salarié.

Au cours d’une procédure d’ESFP, l’Administration peut demander au contribuable


tous éclaircissements ou justifications sur les opérations figurant sur des comptes
financiers utilisés à la fois à titre privé et professionnel. D’après l’article 585 du CGI,
ces demandes ne peuvent pas être considérées comme constituant le début d’une
procédure de vérification de comptabilité. De la même manière, au cours d’une
procédure de vérification de comptabilité, l’Administration peut procéder aux
mêmes examens et demandes sans que ceux-ci constituent le début d’une procédure
d’ESFP.

3- Le pouvoir de rectification

A la suite de ses investigations et contrôles, l’Administration fiscale peut procéder à


une nouvelle évaluation de la matière imposable. Cette procédure de redressement
résulte du pouvoir de rectification de l’Administration. La mise en œuvre du droit de
rectification de l’Administration repose sur des moyens juridiques adaptés.

a- Les moyens de rectification

A l’occasion de l’exercice du pouvoir de rectification, les agents de l’Administration


peuvent être amenés à recourir à des moyens juridiques leur permettant de remettre
en cause les actes pris par le contribuable, notamment à travers le rejet de
comptabilité. Ils peuvent même revenir sur leurs propres actes, grâce à la
substitution de base légale.

Le CGI vise le rejet de comptabilité à l’article 613 relatif à l’établissement du PV, mais
n’en détermine ni les conditions encore moins les modalités de mise en œuvre. Le
rejet de comptabilité ne peut être envisagé que lorsque celle-ci n’a aucune valeur
probante. Une comptabilité ne doit pas être écartée si elle n’est entachée que
d’irrégularités insuffisantes pour lui enlever toute valeur probante. C’est dire que le
rejet de comptabilité suppose la violation de l’obligation faite au contribuable de
tenir une comptabilité régulière. En effet, les contribuables sont tenus de conserver
les pièces comptables pendant un délai de 10 ans à compter de la date de la dernière
opération mentionnée sur les livres ou registres ou de la date à laquelle les
documents ou pièces ont été établis.

37
b- L’exercice du pouvoir de rectification

L’exercice du pouvoir de rectification conduit l’Administration à opérer des


redressements nécessaires à la correcte imposition du contribuable. Il se traduit par la
réclamation des droits éludés. Il peut aussi conduire à l’application de sanctions.

La procédure suivie pour le rappel des droits est fonction de la bonne ou mauvaise
foi du contribuable. La procédure contradictoire offre plus de garanties. Elle est
réservée aux contribuables qui ont respecté leur obligation déclarative. La taxation
d’office permet à l’Administration de se substituer au contribuable qui n’a pas rempli
ses obligations déclaratives.

La procédure contradictoire offre les garanties du principe du contradictoire. En


effet, elle se traduit par le droit de réponse du contribuable et de l’Administration. La
notification de redressements ou le PV dressé par l’Administration doivent faire
l’objet d’une confirmation. Aux termes de l’article 606 du CGI lorsque
l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une
dissimulation ou une omission dans les éléments servant de base au calcul des
impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dus en vertu des
dispositions du code des impôts et du code de l'enregistrement, du timbre et de
l'impôt sur les valeurs mobilières ou de toute autre disposition législative à caractère
fiscal, les redressements correspondants sont effectués selon la procédure de
redressement contradictoire.

L'administration est tenue d'adresser au contribuable une notification de


redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses
observations ou de faire connaître, le cas échéant, son acceptation. La notification est
interruptive de prescription. La notification doit indiquer entre autres les impôts,
droits, taxes, périodes ainsi que les dispositions du code des impôts et du code de
l'enregistrement, du timbre et de l'impôt sur les valeurs mobilières ou de tout autre
texte légal.

La notification est effectuée par lettre recommandée ou remise directe avec accusé de
réception. Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la
réception de la notification pour faire connaître son acceptation ou présenter ses
observations. L'absence de réponse dans ce délai vaut acceptation.
Si le contribuable ne répond pas ou donne son accord dans le délai prescrit,
l'administration établit un avis de redressement sur les bases acceptées par l'intéressé
et lui adresse un avis de mise en recouvrement. Si l'administration rejette en tout ou
partie les observations du contribuable, elle doit par une lettre motivée confirmer les
redressements qu'elle maintient. Dans ce cas l'administration établit un avis de
redressement sur les bases qu'elle a arrêtées et adresse au contribuable un avis de
mise en recouvrement.

La taxation d’office est le contraire de la procédure de redressement contradictoire.


C’est une mesure prise par l’Administration fiscale à l’égard d’un contribuable
consistant à établir d’office le montant de l’imposition dont il devient redevable.
Cette procédure permet donc à l’Administration de fixer unilatéralement les bases de
l’imposition. Dans ce cas, l’imposition est établie par l’Administration en marge de

38
toute procédure contradictoire. La taxation d’office en peut cependant être appliquée
que dans des cas limitativement prévus par la loi à l’article 617 du CGI. Ainsi sont
taxés d'office :
- Les contribuables n'ayant pas souscrit et produit dans les délais légaux les
déclarations et tous les autres documents permettant d'appréhender le montant des
impôts et taxes à leur charge ;
- Les employeurs ou toute autre personne assujettie à ces taxes qui n'ont pas déposé
dans le délai légal les déclarations qu'ils sont tenues de souscrire ;
- Les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont
tenues de souscrire en leur qualité de redevable de ces taxes ;
- Les personnes qui n'ont pas déposé une déclaration ou qui n'ont pas présenté un
acte à la formalité de l'enregistrement dans les délais légaux ;
- Le contribuable qui s'est abstenu de répondre dans le délai fixé aux demandes de
renseignements, d'explications ou d'éclaircissements formulées par les services des
impôts ou dont la réponse équivaut à un refus de répondre ;
- Les contribuables qui n'ont pas fait connaître leur existence à l'administration
fiscale, ou en cas de flagrance fiscale.

La taxation d’office emporte des conséquences graves pour le contribuable. Elle


donne lieu à l’application de pénalités légales sur la notification de taxation d’office
et, le cas échéant, à la constatation des amendes dues sur le PV.

L’assujetti taxé d’office dispose d’un délai de 30 jours, à compter de la date de


réception de la notification pour apporter la preuve de l’exagération des bases
d’imposition retenues par l’Administration fiscale. Les impositions d’office ne
peuvent donc être recouvrées qu’après ce délai.

Lorsque l’imposition contestée est établie d’office, l’Administration n’a pas à établir
le bien-fondé de l’imposition. Le contribuable supporte la charge de la preuve.

c- L’application des sanctions

Dans le cadre de l’exercice du pouvoir de rectification, l’Administration est amenée à


mettre en œuvre son pouvoir de sanction. Elle dispose de sanctions fiscales et de
sanctions pénales appliquées en fonction de la gravité des manquements relevés.

Il existe diverses sanctions de nature fiscale qui sont à la disposition de


l’Administration dans le cadre de l’exercice du contrôle : les amendes, pénalités,
majorations et intérêts de retard. Lorsqu’elles sont définitivement fixées les sanctions
fiscales ne peuvent l’objet d’aucune transaction.

La dimension pénale des sanctions de la fraude fiscale est incontestable. La sanction


prend toujours en droit pénal la forme d’une peine infligée à l’auteur de l’infraction.
Les infractions fiscales étant des délits, les peines encourues sont de nature
correctionnelle : les peines principales d’amende et d’emprisonnement et les peines
accessoires ou complémentaires sont applicables. Ces peines sont alternatives ou

39
cumulatives. Les sanctions pénales fiscales peuvent aussi être cumulées aux
sanctions purement fiscales.

B- Le recouvrement

Le recouvrement est l’ultime étape du processus de l’imposition. Les redevables


d’une imposition sont les personnes, physiques ou morales tenues de régler la dette
fiscale au profit du trésor public. Une des obligations fiscales qui incombent aux
contribuables est d’acquitter leur dette fiscale.

Le recouvrement de l’impôt assure le transfert des espèces du contribuable vers le


Trésor public. Le Trésor public dispose de modes de recouvrement forcé et de
garanties spécifiques pour le recouvrement des impôts.

Cet encaissement est organisé par des procédures qui peuvent varier d’un impôt à
l’autre, mais la trame commune fait intervenir un comptable public pour gérer
l’ensemble du processus. Le paiement effectif de l’impôt intervient le plus souvent à
l’initiative de l’administration : sur la base de la déclaration du contribuable elle
liquide l’impôt et lui adresse un avis d’imposition.

1- La juridiction gracieuse

La juridiction gracieuse est une mesure de bienveillance de l’administration à l’égard


du contribuable. Tant qu’une imposition n’est pas devenue définitive, il demeure
possible au contribuable de solliciter l’administration d’une demande de transaction.
Toutefois, les amendes, pénalités, majorations et intérêts de retard ne peuvent faire
l’objet d’aucune transaction.

L’administration fiscale peut consentir une remise non seulement des droits en
principal, mais aussi des pénalités lorsque, tout du moins, l’imposition est devenue
définitive. La remise gracieuse des droits en principal, en totalité ou en partie, n’est
prévue qu’en matière d’impôt sur le revenu régulièrement établi lorsque le
contribuable est en situation de gêne ou d’indigence (besoin, dénuement, pauvreté,
misère, détresse). La remise des majorations et amendes, en totalité ou en partie, est
également possible.

2- Le paiement volontaire  

L’exécution de l’obligation fiscale est normalement réalisée par le redevable au


moyen de modes paiement classiques. Les différents modes paiement usuellement
utilisés sont admis en matière fiscale que ce soit les règlements en numéraires, par
chèque, par carte bancaire.

Il existe trois modes de perceptions de l’impôt sur la base d’un paiement volontaire.
Les impôts directs sont perçus en principe sur la base du rôle. Les impôts indirects
font l’objet d’une auto- liquidation et d’un paiement au comptant. Les droits
constatés sont payés sur la base d’un titre de paiement.

Aux termes de l’article 647 du CGI, les impôts directs enrôlés sont perçus sur la base
des rôles qui les constatent. Le rôle est un titre exécutoire en vertu duquel le
comptable public effectue et poursuit le recouvrement des impôts directs. Il se

40
présente sous la forme d’une liste de contribuables passibles de l’impôt établies par
l’Administration fiscale qui comporte pour chaque contribuable son identification, la
nature de l’impôt, les bases et les taux d’imposition, le montant à payer et le
bénéficiaire.

Les impôts directs enrôlés sont exigibles pour chaque contribuable dès le premier
jour ouvrable du mois suivant celui de la mise en recouvrement du rôle. Ils sont
directement liquidés et déclarés par le contribuable et font l’objet d’un paiement
comptant. Les impôts autoliquidés ne constituent donc pas des créances assimilées
en comptabilité privée à des opérations de crédit. En effet, l’impôt est perçu sans rôle
nominatif. Le paiement s’effectue volontairement par le contribuable après avoir
calculé le montant de l’impôt.

Dans certains cas, ces impôts peuvent faire l’objet d’un paiement fractionné ou
différé.

De plus en plus, les contribuables sont incités à régler leurs impositions au moyen
d’un prélèvement automatique. Cette voie présente un avantage pour l’Etat dès lors
qu’elle lui assure des rentrées régulières au même titre qu’elle permet aux
contribuables de lisser le paiement sur l’année.

3- Le recouvrement forcé

Si le contribuable ne s’exécute pas de manière spontanée, le comptable public doit


mettre en œuvre des procédures de recouvrement forcé pour obtenir le règlement de
l’impôt, en usant de moyens de contrainte liés au caractère exorbitant de cette
créance publique, mais sous le contrôle du juge.

Pour les impôts directs, lorsque l'impôt n'a pas été payé à la date prévue et à défaut
d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, le comptable du
Trésor doit envoyer au contribuable une lettre de rappel au moins vingt jours avant
la notification du premier acte de poursuites. Quand une majoration de droits ou des
intérêts de retard a été appliquée au contribuable pour non déclaration ou
déclaration tardive ou insuffisante, le comptable du Trésor peut faire signifier un
commandement dès l'exigibilité de l'impôt sans avoir à envoyer une lettre de rappel
préalable. La saisie peut alors être pratiquée un jour après la signification du
commandement.

Le contribuable peut émettre une « opposition à poursuite » et contester soit la


régularité formelle de l'acte, soit l'existence même ou l'exigibilité de la dette. Mais il
ne peut pas contester l'assiette et le calcul de l'impôt. Le Trésor dispose de quatre ans
après la mise en recouvrement pour entamer des poursuites. Ce délai de prescription
est interrompu si le contribuable reconnaît sa dette en demandant des délais de
paiement.

Les poursuites directes engagées contre le contribuable se traduisent par la mise en


oeuvre des procédures classiques de saisies. Les frais de poursuite sont mis à la
charge du contribuable et sont calculés en pourcentage du montant total de la dette

41
fiscale (y compris les majorations) : 3% pour le commandement, 5% pour la saisie,
2,5% sur une opposition sur saisie antérieure, 1,5% pour une signification de vente,
1% pour l'inventaire des biens saisis, 1,5% pour l'affichage, 1% pour le procès-verbal
de vente.

Il peut arriver que des tiers doivent des sommes d'argent au contribuable concerné.
L'administration peut engager des procédures de saisies sur ces créances afin de
récupérer directement ces sommes auprès de ces tiers. Si les sommes en jeu sont
immédiatement exigibles et si elles sont couvertes par le privilège général du Trésor,
l'administration fiscale bénéficie d'une procédure simplifiée : « l'avis à tiers détenteur
». La créance du contribuable est alors immédiatement transférée à l'administration,
dans la limite de la somme qui lui est due.

Les voies d’exécution de droit commun permettent de faire vendre les biens
appartenant au débiteur. Il s’agit de la saisie-vente pour les meubles et de la saisie
immobilière. Comme tous les créanciers, le Trésor peut aussi faire saisir les sommes
figurant sur un compte bancaire ou postal (qui restent alors indisponibles pendant
quinze jours pour régularisation des opérations antérieures).

Pour les impôts indirects, lorsque l'impôt n'a pas été payé à la date prévue et à défaut
d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, le receveur adresse
(par lettre recommandée avec accusé de réception) un avis de mise en recouvrement
au contribuable. Celui-ci peut alors formuler une réclamation contentieuse jusqu'au
31 décembre de la deuxième année qui suit cette notification.

Le Trésor dispose de quatre ans après l'envoi de la mise en recouvrement pour


entamer des poursuites. Après la notification, l'administration envoie une mise en
demeure (par lettre recommandée avec accusé de réception) et peut engager des
poursuites vingt jours après la réception de cette mise en demeure. Les procédures
sont identiques à celles précisées ci-dessus, pour les impôts directs.

Les modes de recouvrement forcé sont l’avis à tiers détenteur, la saisie des
rémunérations, les voies d’exécution de droit commun, et la contrainte judiciaire.

Dans le cadre de l’avis à tiers détenteur, les dépositaires, détenteurs ou débiteurs de


sommes appartenant aux redevables de l’impôt, sont tenus de verser au lieu et place
des redevables, les fonds qu’ils détiennent. Ce dispositif ne porte que sur des
sommes d’argent et entraîne une attribution immédiate de la créance saisie.

II- LES PROCEDURES CONTENTIEUSES

Les procédures contentieuses en matière fiscale comportent une phase administrative


d’une part et une phase juridictionnelle de l’autre.

A- La phase administrative du contentieux fiscal


42
La phase administrative est constituée de plusieurs recours devant l’administration
elle-même avant toute saisine du juge. La phase administrative permet la
modification de l’acte ou sa suppression pour des raisons liées à son irrégularité ou
simplement pour inopportunité.

L’importance croissante des recours administratifs est due à plusieurs facteurs : le


désencombrement de la justice administrative, la nécessité de tenir compte dans le
règlement de certains litiges de principes d’équité, le gain de temps réalisé par un
règlement préalable, le souci de rapprocher l’administration des administrés en
permettant un dialogue direct susceptible de générer des conciliations.

La notion de recours administratif n’est définie par aucun texte. Elle renferme des
variétés de recours forts différents. Il en est ainsi notamment des demandes
« initiales » antérieures à tout acte qui peuvent par exemple viser à susciter une
décision préalable nécessaire pour lier le contentieux ou celles qui visent un acte
juridique de l’administration sans en contester la légalité ou l’opportunité, par
exemple pour en connaitre des motifs ou pour demander le sursis à exécution.

C’est également le cas des demandes « réitérées », renouvelant une précédente


demande sans se rattacher à elle.

Parmi les demandes adressées à l’administration, les recours administratifs sont


habituellement définis par la doctrine en fonction de deux éléments.

IL s’agit d’abord de recours exercés, non devant le juge, mais devant une autorité
administrative qui statue en tant que telle, c’est à dire par un acte administratif.

Il s’agit ensuite de recours mettant en jeu la légalité ou l’opportunité d’un acte


juridique de l’administration.

Les recours sont donc d’une utilité certaine pour le règlement de litiges fiscaux. Leur
utilisation obéit à des règles particulières fixées par la loi.

Pour mieux appréhender la phase administrative du contentieux fiscal, il faut


s’intéresser au contenu du recours et aux effets du recours administratifs.

1- Le contenu du recours administratif

Dans la réalité, les réclamations tendant à obtenir une décharge ou une réduction des
impôts auprès du MEF, sont le plus souvent adressés directement au Directeur des
Impôts. Celles-ci sont réceptionnées au niveau du CSF compétent, instruites par
l’agent assurant l’assiette de l’imposition avant la décision du ministre.

a- Réception des demandes au CSF compétent

Les réclamations sont d’abord réceptionnées au niveau du CSF avant d’être


acheminées vers les structures compétentes pour instruction. Dès leur réception, les
demandes des contribuables sont annotées à l’aide d’un timbre spécial de la date

43
d’arrivée. Si elles parviennent par la poste, les enveloppes qui les contiennent
doivent être conservées et annexées aux réclamations. Un récépissé est délivré aux
contribuables qui le demandent.

Les pétitions font l’objet d’une lecture attentive. Ce premier examen est
indispensable pour les analyser et préparer les travaux matériels d’enregistrement et
l’établissement des feuilles d’instruction. C’est une opération qui consiste à inscrire
les réclamations sur des registres spéciaux. Sur ces feuilles sont conciliées des
données relatives à la réclamation elle-même (numéro d’enregistrement, nature de
l’impôt, nom et adresse du contribuable, etc.) et aux cotisations contestées (base et
montant de l’impôt, etc.)

Il doit être établi en principe une feuille d’instruction par pétition. Toutefois, lorsque
la demande est complexe, on doit, dans certains cas, (notamment si elle vise à la fois
les impôts locaux et les impôts sur les revenus) ouvrir plusieurs feuilles d’instruction.

Les réclamations doivent être normalement instruites par l’agent qui a établi
l’imposition ou à défaut par celui qui l’a remplacé à son poste. En règle générale,
c’est aux inspecteurs ou aux contrôleurs que ce travail incombe. Les demandes sont
donc transmises par le chef du CSF aux agents et aux autres structures compétentes
qui en assurent eux même l’instruction.

b- Instruction par l’agent assurant l’assiette de l’imposition

Lors de la réception des demandes, il est précédé à un examen sommaire des dossiers
par l’inspecteur ou le contrôleur. Cet examen est indispensable pour cerner
exactement la portée de la réclamation.

En outre, il doit permettre de procéder aux renvois de dossiers à d’autres agents ou


services, de demander des précisions aux contribuables, de les convoquer le cas
échéant, d’échanger des communications nécessaire avec d’autres agents, etc.

Enfin, à cette occasion, on s’assure que les dégrèvements sollicités n’ont pas déjà été
proposés ou accordés, soit d’office, soit à la suite d’une demande antérieure.

En définitive, ce premier examen sommaire prépare l’examen détaillé, accélère


l’instruction et réduit au minimum les erreurs d’interprétation des demandes.

L’inspecteur ou le contrôleur procède à l’instruction proprement dite. Pour se faire


des règles précises doivent être observées dans la procédure. Les réclamations, pour
être recevables, doivent être présentées dans un délai fixé par l’article 61 du Décret n°
2011-1880 du 24 novembre 2011 portant règlement général de la comptabilité
publique).

En matière d'impôts directs et de taxes assimilées, le délai de réclamation est de trois


3 mois à compter du jour où le contribuable a eu connaissance de son imposition ou à
défaut, du jour où ont été exercées les premières poursuites avec frais. En matière

44
d'impôts indirects et taxes assimilées, de droits d'enregistrement et de droits de
publicité foncière.

L ‘action en restitution des assujettis est introduite par voie de réclamation dans un
délai de deux (2) ans lorsque les droits, taxes, redevances et autres impôts ont été
irrégulièrement ou indûment perçus ou versés à la suite d'une erreur des assujettis
ou de I ‘administration. Le point de départ de ce délai est constitué par la date du
paiement. La réclamation doit être établie par écrit sous forme d'une simple lettre sur
papier libre. Elle est individuelle. Tout particulier peut présenter une réclamation
pour son compte personnel. Lorsqu'une personne introduit une réclamation pour le
compte d'autrui, elle doit justifier d'un mandat régulier délivré par le contribuable
lui-même ou par un mandataire expressément habilité à se substituer à lui.

Toute réclamation, pour être recevable au cours de la phase administrative doit


satisfaire à un ensemble de conditions de formes. Parmi les conditions de forme, on
distingue celles affectant les indications générales que la demande doit contenir et
c’est relatif à la qualité du pétitionnaire.

Ainsi, toute réclamation pour être valable doit être produite sur papier libre,
mentionner la ou les contributions concernées, être accompagnée soit de
l’avertissement soit d’une pièce justifiant le montant de la retenue.

De même, elle doit contenir l’exposé sommaire des moyens par lesquels son auteur
entend la justifier, les conclusions de la partie (décharge, réduction…) et porter la
signature de son auteur. Elle doit être individuelle.

Toutefois, les membres des sociétés de personne qui conteste les impôts à la charge
de la société sont habilités à déposer une réclamation au nom de la collectivité pour
laquelle ils agissent (article 60 du décret n° 2011-1880 du 24 novembre 2011).

Tout particulier peut introduire une réclamation pour le compte d’autrui en se


conformant aux deux règles suivantes :

- Nul n’est admis à introduire ou à soutenir une réclamation pour autrui s’il ne
justifie d’un mandant régulier délivré par le contribuable lui-même ou pour
un mandataire habilité expressément à se substituer à lui. Mais l’article 61 du
décret n° 2011-1880 du 24 novembre 2011 prévoit que Toutefois, la production
d’un mandat n’est pas exigée des avocats régulièrement inscrits au barreau et
des personnes qui tiennent de leurs fonctions ou qualité le droit d’agir au nom
du contribuable. Il en est de même si le signataire a été mis personnellement
en demeure d’acquitter les contributions visées dans la réclamation.

- Lorsqu’un mandat est exigé, il doit, à peine de nullité, être rédigé sur papier
timbré et enregistré avant l’exécution de l’acte qu’il autorise, c'est-à-dire avant
la date de présentation de la demande.

L’inspecteur ou le contrôleur chargé de l’assiette de l’impôt contesté, examine les


motifs de droit et les circonstances de fait évoqué à l’appui des demandes. Il doit

45
faire une appréciation objective de la procédure d’établissement de l’impôt
(notification, délai de réponse, acceptation ou observation, etc.). Ensuite, il désigne la
partie à qui incombe la charge de la preuve suivant les règles propres à chaque
catégorie de revenus et les conditions de fait particulières à chaque espèce. Lorsque
cette preuve doit être apportée par le contribuable, l’agent instructeur examine dans
les détails les justifications produites par le contribuable.

Lorsque la charge de la preuve incombe à l’administration, l’agent doit montrer que


la base d’imposition retenue n’est pas exagérée, à l’aide d’éléments précis. Pour cela,
il lui faudra produire non de simples présomptions, mais des justifications.

Après avoir étudié attentivement les demandes des contribuables, l’agent


instructeur rédige son avis dans un rapport appelé rapport d’instruction. Ce dernier
comprend deux parties : l’examen de la demande en la forme d’une part et l’exposé
au fond d’autre part.

L’examen de la demande renvoie à l’examen des conditions de forme proprement


dite (qualité du réclamant, production de l’avertissement, etc.) et de l’examen des
conditions de délai. Si une demande est irrecevable en la forme, il y’a lieu cependant
de l’instruire au fond, lorsque, en raison de la nature du dégrèvement solliciter, le
ministre peut faire application de son droit de décision d’office.

L’objet principal de cet exposé est d’éclairer l’opinion du ministre sur l’affaire qui lui
est soumise. Or, celui-ci ne dispose, pour former son jugement, que de la demande
elle-même, des pièces qui peuvent être y jointes et des avis auxquels elle a donné
lieu, celui de l’agent compétent ayant u, intérêt particulier.

L’envoi des dossiers instruits doit être effectué sans retard au service du contentieux
pour permettre au directeur général au ministre des finances de statuer dans le délai
légal.

c- Décision du Ministre de l’économie et des finances

Arrivés à la division du contentieux de la DGID, les résultats d’instructions sont


examinés par le chef du contentieux.

L’inspecteur du contentieux rédige la décision. Celle-ci est portée sur la feuille


d’instruction. Elle comprend d’une part les motifs qui la justifient et d’autre part la
décision proprement dite, à savoir le rejet pur et simple, ou la décharge totale ou la
mention de la réduction. Le pouvoir de décision appartient normalement au MEF
(article 60 du décret n° 2011-1880 du 24 novembre 2011). Selon son article 63, « Le
Ministre chargé des Finances statue sur les réclamations dans un délai de six (6) mois
à compter de la date de leur présentation dans les conditions prévues par le Code de
Procédure civile.

Il a la faculté de déléguer en totalité ou en partie son pouvoir de décision l’octroi de


la décharge ou de la réduction entraîne l’annulation des pénalités ou majorations

46
correspondantes ». L’exécution des décisions incombe au service du contentieux et
revêt deux aspects :

- Ordonnancement des dégrèvements et établissement des certificats correspondants


transmis au comptable du trésor public.

- Application de ces décisions pour les années suivantes en annotant les documents
d’assiette, si ce travail n’a pas déjà été fait.

La notification des décisions doit se faire à trois niveaux :

- Au réclamant : La notification doit reproduire d’une façon sommaire les motifs


de la décision, sauf si cette décision fait entièrement droit à la demande. Toutes les
notifications qui ont pour effet de faire courir un délai de recours sont acheminés
sous plis recommandés avec accusé de réception.

- Au service de recouvrement : Les décisions prononçant décharge ou réduction


donnent lieu à l’envoi au service du recouvrement de certificats de dégrèvement.

- A l’agent chargé de l’instruction : Le service du contentieux doit tenir au courant


l’inspecteur ou le contrôleur chargé de l’assiette de l’impôt contesté, afin que celui-ci
puisse annoter son registre des décisions intervenues.

La décision du ministre des finances ou du DG des impôts et domaines qui est une
décision exécutoire, est susceptible de recours devant le juge judiciaire si elle ne
donne pas satisfaction à la partie intéressée.

2- Les effets du recours administratif

Aucune forme n’est requise pour la présentation de la réclamation préalable.


L’instruction se caractérise par l’examen en la forme de la réclamation du point de
vue des conditions de délai et des conditions de recevabilité. L’instruction comporte
aussi et surtout un examen au fond de l’affaire, touchant à la fois aux motifs de fait et
de droit invoqués par le réclamant et la recherche éventuelle de compensation à
opérer entre des insuffisances d’imposition et la « surtaxation » contestée.

Les décisions qui peuvent être prises sur les réclamations peuvent être classées en
deux catégories : celles ne tranchant pas le fond du litige et celles statuant sur le fond.
Parmi les décisions ne tranchant pas le fond du litige, il y’a celles qui donnent acte du
désistement du contribuable, celles qui rejettent la réclamation pour une
irrecevabilité tirée d’un vice de forme.

L’autorité visée à l’article 707 notifie sa décision au contribuable dans le délai de


quatre (4) mois à compter de la réception de la demande. Le défaut de réponse dans
le délai de quatre (4) mois, à compter du dépôt de la demande, équivaut à un rejet
implicite.

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De même, tout réclamant qui n’a pas reçu l’avis de la décision du ministre dans le
délai de six mois suivant la date de présentation de sa demande peut soumettre le
litige au tribunal régional, dans le délai de trois mois qui suit l’expiration du délai ci-
dessus. C’est à partir de ce moment que débute la phase dite juridictionnelle.

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