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Traitement chirurgical des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin

(Rectocolite hémorragique et Maladie de Crohn) : bases du traitement, indications et


principales méthodes chirurgicales

Traitement chirurgical de la RCH

Introduction
 RCH = maladie inflam chronique de la muqueuse rectale pouvant toucher une partie ou la totalité du colon.
 Le traitement de 1ère intention est habituellement médical, sauf dans les cas ou une complication inaugurale
nécessite un traitement chirurgical en urgence. En dehors de ce contexte d’urgence le chirurgien peut être
amené à intervenir lorsque le contrôle médical n’est plus possible : cas désespérés.

Bases du traitement chirurgical


Les bases anatomiques et fonctionnelles
 Le colon-rectum est le support anatomique de la maladie, il doit en principe être réséqué en totalité par
l’opération chir. Mais de part son importance fonctionnelle comme réservoir fécal il peut être parfois épargné.
 L’anatomie des deux dernières anses iléales bien que non concernées par le processus inflammatoire est
importante à connaître car elles peuvent être utilisées comme réservoir fécal du rectum réséqué.
 L’artère mésentérique supérieure se termine par l’axe iléo-coeco-appendiculaire dans l’espace du mésentère
entre le colon droit et la dernière anse grêle: la conservation de cet axe est essentielle au cours de la colectomie
Les bases étiologiques
 Plusieurs étiologies sont évoquées : infection, allergie….etc.
 Mais aucune n’a engendré une thérapeutique à visée pathogénique donnant une guérison définitive, et
tant qu’il en sera ainsi, la chirurgie se trouvera largement justifiée car elle est la seule capable d’éradiquer
toute la muqueuse malade et de mettre le malade à l’abri des rechutes.
Les bases anatomo pathologiques
 La RCH est une affection qui touche le rectum et gagne au cours des poussées successives le colon qu’elle
peut toucher en partie réalisant une colite segmentaire ou en totalité réalisant une pancolite.
 Cette atteinte se fait de manière ascendante et continue, la rectite isolée est rare ;
 Seule la résection du colon et du rectum : la coloproctectomie assure l’ablation totale de la muqueuse
malade.
 Si une colectomie isolée est décidée elle doit être totale.
Les bases évolutives
 Le risque relatif d’apparition d’un cancer recto colique est estimé dans certaines études occidentales à 19%
 Il apparaît plus tôt que les cancers sporadiques ; il prédomine sur le recto sigmoïde mais volontiers multiple.
 Ce risque est majeur pour les pancolite anciennes ou diagnostiquées avant l’âge de 15 ans
Les bases cliniques
 Le diagnostique positif de la RCH doit être aussi précis que possible et fait appel à un faisceau d’argument
cliniques, radiologiques, endoscopiques et anatomopathologiques.
 Le Dc différentiel se fait avec les colites aiguës non spécifiques mais surtout avec la maladie de Crohn, la
distinction entre cette dernière et la RCH est cruciale, en effet la maladie de Crohn n’est du sort de la chirurgie
qu’en cas de complications et certaines opérations faites pour RCH sont contre indiquées en cas de Crohn
 Si une intervention est faite en urgence sans qu’un diagnostic ne soit établi au préalable il faut réaliser une
colectomie subtotale avec une double stomie et réadapter le traitement ultérieurement.

Les différentes techniques utilisées


Coloproctectomie avec anastomose iléoanale sur réservoir en J = intervention idéale +++
 Colectomie totale + Proctectomie (résection du rectum et sa muqueuse)
 Anastomose iléoanale sur réservoir iléal + Iléostomie temporaire de protection.
Coloproctectomie avec iléostomie définitive (rare)
 En cas d’incontinence sphinctérienne
Colectomie totale avec anastomose iléorectale
 N’est possible que si le rectum est sain (exceptionnel)
 Impose une surveillance endoscopique du rectum en raison du risque de récidive et de dégénérescence.
Colectomie subtotale avec iléostomie et sigmoïdostomie

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 Intervention adaptée à l’urgence, sera complétée à froid
Les indications opératoires
On peut schématiquement regrouper les indications opératoires dans la RCH en 4 groupes
1-Menace vitale, sans recours médical possible : Ici la chirurgie est impérative
Perforation colique
 Evoquée sur les signes cliniques d’une péritonite, affirmée par la présence d’un pneumopéritoine sur l’ASP
 C’est une urgence chirurgicale absolue.
 Il faut faire une colectomie subtotale avec iléostomie et sigmoïdostomie, le ttt définitif sera décidé ds
3mois.
 Si la perforation est basse et le moignon sigmoïdien est trop court pour réaliser une sigmoïdostomie il faut
faire une opération de Hartman. Si cette op n’est pas possible ; il est logique de réaliser une coloproctectomie.

Le cancer rectocolique
 L’indication de la chirurgie est évidente. Si le cancer est colique il est préférable de ne pas laisser le rectum
en place, car le risque de kc sur le moignon restant est élevé : ici la coloproctectomie avec anastomose
iléoanale sur réservoir est indiquée
 Si le cancer est rectal bas, l’anastomose iléoanale est déconseillée et l’iléostomie abd définitive est justifiée

2-Menace vitale mais recours médical possible


Les poussées de colites graves
La définition la plus utilisée des colites aiguës graves est celle de Truelove et Witts ; 6 selles sanglantes ou +/24h,
T° > à 37,5°, tachycardie > à 90/min, anémie avec une Hb < 75% de la normale et VS > à 30mm à la 1 ère heure

La stratégie classique comporte chez ces patients :


 Un traitement médical intensif de 5 jours à l’hôpital :
o Correction des anomalies hydro-ioniques et de l’anémie
o Corticothérapie parentérale : hydrocortisone IV 400mg/j ou corticoïdes IM 60mg d’équivalent prednisone
o Corticothérapie rectale : 2 lavements par jour de 100mg d’hydrocortisone
o Antibiothérapie ?
o Surveillance médico-chirurgicale biquotidienne
 La survenue d’une complication ou l’absence d’amélioration à la fin des 5 jours indique un ttt chirurgical.
 La technique indiquée ici est une colectomie subtotale soit parce que le diagnostic n’est pas encore établi ou
que les conditions d’urgence ou le mauvais état général du malade ne permettent pas des sutures digestives.

D’autres stratégies sont basées sur les données de la colonoscopie au cours d’une poussée : sont considérés
comme suffisants pour indiquer une colectomie dans l’immédiat les signes endoscopiques suivants :
 Ulcérations profondes couvrant au moins 10% du recto-colon pathologique.
 Décollement des bords des ulcérations.
 Abrasion muqueuse et sous muqueuse étendue respectant de petits îlots.
 Ulcérations en puits très profondes communiquant par des décollements sous muq larges et confluents, en
pont

La ciclosporine à la dose 4mg /j à pu être utilisée avec succès dans les malades résistant au traitement médical sus
cité avec rémission totale chez 80% des malades (contre 10% pour le groupe placebo)

Le mégacôlon toxique
 Le développement d’un mégacôlon toxique au cours d’une RCH traitée est un signe requérant la chirurgie.
 Si le mégacôlon est présent avant le traitement le traitement médical sus cité est essayé pendant 48h sous
surveillance médico-chirurgicale ; si le mégacôlon persiste à la 48ème heure, la colectomie doit être faite

Hémorragie massive (rare)


 Elle est définie par l’association à la colite aiguë grave d’une anémie aiguë (Hb < à6g/100ml ou nécessité de
transfuser 8 unités de sang avec persistance du saignement).
 La aussi la colectomie est indiquée, le saignement d’origine rectale peut être contrôlé par le traitement local
mais une proctectomie secondaire peut être nécessaire

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3- Pas de menace vitale mais forte morbidité
Corticorésistance
 La non rémission sous corticothérapie prescrite à dose suffisante (1 mg/kg d’équivalent prednisone) et
pendant 1mois est une indication à la chirurgie, sauf si les résultats de la ciclosporine se confirment ce qui
bouleversera les attitudes établies.
Corticodépendance
 Peut être définie comme la nécessité d’une dose > à10mg/j d’équivalent prednisone à défaut de quoi les
signes cliniques reprennent, il s’agie d’une indication du traitement chirurgical sauf si le malade refuse
l’intervention dans ce cas les immunosuppresseurs seront prescrits.
Poussées fréquentes et durables
 Peuvent se voir parfois malgré 1 traitement bien suivi ou à cause d’une mauvaise compliance ou
d’intolérance aux médicaments. Ces poussées fréquentes sont causes d’une qualité de vie médiocre,
d’hospitalisations fréquentes, d’une corticothérapie itérative et d’une gêne fonctionnelle considérable.
 Dans tous ces cas ou existe une morbidité importante malgré l’absence d’une menace vitale la décision
opératoire bien que justifiée est difficile à prendre. C’est dans ces cas aussi que le choix entre la colectomie +
l’anastomose iléorectale ou la coloproctectomie est difficile à faire.
 Néanmoins il faut faire une coloproctectomie chaque fois qu’existe une microrectite, un cancer colique ou
une dysplasie du colon ou du rectum.
 L’anastomose colorectale sera préférée qd le rectum semble être peu atteint à l’endoscopie et au LB, quand
on découvre des lésions proctologiques (fissures, fistules), ou chez le sujet âgé où les troubles sphinctériens
sont à craindre.
Chez l’enfant
 L’existence d’un retard de croissance, de la puberté ou des deux est une indication au traitement chirurgical

4- Détection d’une dysplasie au cours de la surveillance


 Muqueuse plane ou aspect saillant + dysplasie de haut grade = entraîne chirurgie
 Sténose, aspect polypoïde ou surélevé + dysplasie (DALM) = chirurgie quelque soit le grade de la dysplasie
 Dysplasie de bas grade contrôlée, quand elle est multi focale = chirurgie

En pratique : quand proposer la chirurgie


 Complications et colite aigues grave
 Quand le diagnostic de cancer est posé
 Devant une sténose qui est un cancer jusqu’à preuve de contraire
 Dysplasie haut grade
 Dysplasie bas grade : malade jeune, RCH précoce
 Mauvaise qualité de vie sous traitement médical
 Corticodépendance
 Dysplasie associé à des lésions ou des masses
 Certaines manifestations extradigestives
 Corticorésistance pour 2 raisons (non compliance et intolérance au ttt)
 Pancolite chez le sujet jeune et pancolite ancienne.

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Traitement chirurgical de la maladie de Crohn
Les bases du traitement
Les bases étiologiques
 L’étiologie de la maladie reste inconnue : l’intervention d’un facteur génétique et d’un facteur infectieux
sont les plus discutés, mais aucun n’a débouché sur un traitement définitif, et tant qu’il en sera ainsi, la
place de la chirurgie se trouve légitimée.
Les bases anatomo-pathologiques
 La distribution de la maladie de Crohn est caractérisée par son caractère discontinu, segmentaire et multiple
sur plusieurs segments du tube digestif : réséquer tous les tissus malades entraînerait un sacrifice important du
tube digestif, aussi la chirurgie doit être très économe et réservée aux complications et aux F. invalidantes
Les bases cliniques
 La diarrhée et la douleur abdominale sont 2 signes fréquents de la maladie mais sont rarement à eux seuls
une indication à la chirurgie. Néanmoins certaines formes pseudo-appendiculaires sont opérées pour le Dc
erroné d’appendicite : se pose alors le problème de légitimité de l’appendicectomie en urgence.
 L’évolution clinique de la maladie est surtout émaillée par des complications graves qui, à défaut d’une
chirurgie précoce le pronostic vital est mis en jeu : hémorragie, perforation, fistules …cancérisation parfois ; la
chirurgie est donc souvent une « chirurgie de nécessité ».
Le géni évolutif
 Le recours à la chirurgie est d’autant plus important que le géni évolutif de la maladie est important.
 Globalement après 10 ans d’évolution 50% des malades sont opérés.
 La récidive après résection intestinale est caractéristique de la maladie de Crohn. Le taux de récidive après
résection est de 35% après 5 ans et passe à 65% après 15 ans, ce taux est encore plus important après ré
intervention : il résulte de cela que la chirurgie doit être reportée à des dates aussi loin que possible.
 = «  Economie des interventions »

Les méthodes
Les dérivations digestives
 Court-circuitent l’intestin pathologique (anastomoses iléo-iléales, iléo-coliques)
 Les lésions laissées en place continuent à évoluer et obligent le plus souvent à réintervenir
Les exérèses
 Doivent passer en zones saines, sans être très loin de la zone pathologique : « économie des tissus »
 Les fistules et les abcès sont les principales causes de décès post-opératoire
La stricturoplastie
 Plus économique que les résections ; c’est une plastie d’élargissement sans résection
 Les indications sont donc les sténoses irréductibles
 (Incision dans le sens longitudinale, + suture dans le sens transversal → élargissement)

Les indications : échec du traitement médical et/ou complications (abcès, fistules, sténose…)
Les formes perforatives
 La perforation en péritoine libre est peu fréquente mais implique une chirurgie d’urgence : la résection de la
zone perforée peut être suivie d’anastomose protégée par une stomie de proche amont
 L’abcès enclos en voie de perforation , le drainage percutané ou chirurgical est possible mais expose au
risque de fistules, aussi le drainage chirurgical de l’abcès + résection de la zone pathologique sont indiqués
 Les fistules internes proviennent de perforations chroniques mettant en contact deux ou plusieurs segments
intestinaux. On distingue les fistules unissant deux anses grêles ou une anse grêle avec le colon. Il existe des
fistules complexes unissant plusieurs anses ; résection + anastomose (sans protection)
 Les fistules post-opératoires : il faut attendre un délai de 6 semaines
Les formes non perforatives
 Les obstructions aiguës secondaires à l’œdème et à l’infiltration de la zone pathologique avec adhérence
et/ou coudure de l’anse répondent svt favorablement au traitement médical par aspiration digestive et
réhydratation
 Les obstructions chroniques avec douleur et distension à chaque repas, il est nécessaire d’intervenir pour
réaliser une résection intestinale rétrécie et fixée, il faut explorer la totalité de l’intestin : la découverte de
sténoses étagées indique des stricturoplasties.

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 Les hémorragies massives (rares); après échec du traitement médical la résection intestinale peut
s’imposer
 Les complications péri-anales (fistules, sténose, fissures) : Il faut sauvegarder l’intégrité du sphincter anal en
réalisant interventions conservatrices : mise à plat des trajets fistuleux en respectant les fibres du sphincter.
 Le cancer : incidence bien moindre que la RCH ?

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