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DOMINIQUE
INTRODUCTION GENERALE
Le régime juridique des contrats, c'est-à-dire l’ensemble des règles qui régit les
contrats, dépend soit des seules règles issues de la théorie générale des obligations,
soit pour partie au moins de règles propres qui tiennent à leur nature juridique.
En effet, afin de donner plus de sécurité juridique aux parties, et parfois aussi
pour édicter certains principes impératifs, le législateur est venu préciser la manière
dont se concluent et s’exécutent les contrats les plus importants. De ce fait, au corps
des règles générales applicables à tous les contrats, qu’énoncent les articles 1101 et
suivants du code civil français tels qu’applicables en Côte-d’Ivoire (formation :
consentement, forme, cause, objet, ordre public… ; exécution : en nature, résolution,
risques, dommages-intérêts…), s’ajoutent des régimes spécifiques, adaptées aux
principales opérations concrètes que les contrats servent à organiser : vente, bail ou
location, louage d’ouvrage, mandat, contrat d’entreprise ou de prêt, etc. Ces règles,
ou du moins ces contrats, constituent ce qu’il convient d’appeler les contrats spéciaux
ou principaux contrats usuels. Ainsi, le droit des contrats spéciaux s’analyse en une
branche du droit qui étudie des contrats ayant un régime juridique dérogatoire au
droit commun des contrats.
Toutefois, il faudra auparavant mettre en relief les liens entre les contrats
spéciaux et la théorie générale des contrats (Para 1), l’importance des contrats
spéciaux (Para 2), les sources des contrats spéciaux (Para 3) et les subdivisions des
contrats spéciaux (Para 4).
Paragraphe I : Les liens entre les contrats spéciaux et la théorie générale des
contrats : l’objet d’un contrat spécial
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Institut Universitaire d’Abidjan_2020-2021_Vente, Louage et Mandat_Par M. DJAKO G. DOMINIQUE
Appartenant au genre des contrats, le droit des contrats spéciaux est influencé par
la théorie générale des contrats dont il est le complément nécessaire. Il adapte la théorie
générale abstraite aux situations concrètes.
C’est dire qu’un contrat spécial est un contrat nommé1 qui fait l’objet d’une
législation particulière (exemples : la vente ; le louage ; le mandat ; l’échange ; la
donation ; le mariage). Le droit des contrats spéciaux2 vient s’ajouter au droit commun des
contrats et n’est pas nécessairement impératif ou d’ordre public. En effet, le principe de la
liberté contractuelle conduit au contraire à regarder comme seulement supplétives
les règles relatives à chaque espèce de contrat. Ainsi, elles s’appliqueront alors
chaque fois qu’elles n’auront pas été expressément écartées ; ce qui leur confère une
portée pratique considérable.
La théorie générale des contrats apparaît donc constamment dans l’étude des contrats
spéciaux, à la fois par son application de principe et comme référence aux dérogations que
peuvent apporter certaines de ces règles particulières.
A titre d’exemple, l’article 1108 du code civil énonce que le contrat exige le
consentement, la capacité, un objet, une cause ; les textes sur la vente préciseront le
consentement de l’acquéreur notamment.
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Un contrat désigné par un nom. Se dit notamment, par opposition aux contrats inommés, des contrats qui, sous
une appellation consacrée par la loi (ou au moins par l’usage), correspondent chacun, à une espèce particulière
de convention soumise, en tant que telle, à certaines règles spéciales.
2 Ce droit est tiré d’articles du Code civil ou d’autres codes, du droit communautaire, de conventions internationales ratifiées
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Institut Universitaire d’Abidjan_2020-2021_Vente, Louage et Mandat_Par M. DJAKO G. DOMINIQUE
L’étude des contrats spéciaux est donc concrète : elle s’attache à définir le
régime de chaque type de contrat. Ces contrats sont dits ‘‘spéciaux’’ parce que la loi
ou les usages les règlementent précisément : vente, louage, mandat, entreprise, etc.
En réalité, il vaudrait mieux parler de droit spécial des contrats, car les
contrats ne sont pas spéciaux mais spécialement réglementés. Quoiqu’il en soit de la
terminologie retenue, ce droit des contrats spéciaux par rapport à la théorie générale
des contrats, est un droit complémentaire et un droit dépendant.
Mais, les rapports entre la théorie générale et les contrats spéciaux ont évolué
de sorte que les contrats spéciaux ont acquis une grande importance.
Importance pratique : ce sont ces contrats qui régissent notre vie quotidienne.
Dans nos activités professionnelles ou pour des besoins d’ordre privé, nous passons
quotidiennement les contrats les plus divers. Chacun d’entre nous se trouve à un
moment donné dans la situation d’un acheteur ou d’un vendeur ; souvent dans celle
d’un emprunteur ou d’un locataire. Diverses manifestations de notre vie prennent
donc le moule des contrats spéciaux.
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Ces contrats voient, d’autre part, leur importance accrue par suite de
l’évolution historique : le principe de l’autonomie de la volonté est en déclin et
l’interventionnisme étatique dans l’économie se prolonge dans le droit des contrats
par la multiplication des dispositions impératives : l’ordre public réduit la liberté
contractuelle. Il en résulte que s’accuse le particularisme de certains contrats. Les
règles propres à certains contrats sont devenues souvent plus importantes que les
règles générales. Par exemple, le louage du code civil est supplanté par les baux
spéciaux (bail d’habitation, bail commercial ou à usage professionnel, bail rural).
La loi constitue la source essentielle des contrats spéciaux. Mais, elle n’est pas
figée : son évolution est constante. En outre, sa portée est viable car elle peut
comporter des dispositions impératives et supplétives.
A côté du code civil, d’autres textes de sources légales sont applicables. Ainsi,
en ce qui concerne la vente d’immeuble, on peut citer entre autres, la loi ivoirienne n°
99-478 du 2 août 1999 portant organisation de la Vente d’immeuble à construire et de
3 La liste des contrats nommés n’a rien de rationnelle. Elle ne tient compte que des contrats les plus usuels à l’époque de la
rédaction du Code civil. Il existe aujourd’hui des contrats réglementés par le législateur qui ne figurent pas dans le Code civil et
qui pourtant sont de nos jours usuels et nommés : c’est le cas du bail à usage d’habitation, du bail commercial ou du crédit-bail
ou leasing.
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A ces sources légales internes, il faut ajouter des sources internationales (les
Conventions de Bruxelles sur les transports maritimes du 25 août 19245 et de
Varsovie sur les transports aériens ; les Conventions de Vienne du 11 avril 1980 sur la
vente internationale de marchandises et la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur
la loi applicable aux relations contractuelles) ou communautaires comme les Actes
uniformes de l’OHADA qui ont des répercussions sur le droit interne des contrats
(notamment l’AUDCG, l’AUTMR, AUDSCGIE…etc.).
A côté du Code civil et les autres sources légales, la jurisprudence joue un rôle
important en tant que source des contrats spéciaux ; elle y joue un rôle habituel de
suppléance et d’adaptation des textes en vigueur. Et à son sujet, on peut dire que
concernant la matière, la jurisprudence est abondante.
La pratique y joue également un rôle très important. Les contrats étant très
souvent l’œuvre de la pratique commerciale ou notariale, les contrats spéciaux sont
dans la plus part des cas pré-rédigés par des notaires ou des organismes
professionnels. Ceux-ci, dans leur rédaction, créent souvent de nouvelles formes
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Le droit des contrats spéciaux semble donc s’orienter vers un droit des
contrats « très spéciaux », ou plus exactement « sous spéciaux », car il s’agit de
subdivisions. Il n’est presque aucun contrat qui n’ait échappé à ce phénomène qui
conduit à une superposition verticale des règles applicables. Ainsi, à la base il y a le
droit commun de la théorie générale des contrats ; au stade intermédiaire, il y a le
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contrats nommés. Ils s’attachent à l’objet et au rôle de ces contrats, ce qui permet
d’en dégager cinq catégories essentielles : Contrats translatifs de propriété ; Contrats
portant sur l’usage des biens ; Contrats de service ; Contrats de crédit ; Contrats
aléatoires.
vente
Contrats translatifs de échange
propriété contrats de transfert temporaire
contrats de distribution
contrat d’entreprise
Contrats de service contrat de mandat
contrat de dépôt
théorie générale
Contrats aléatoires régimes spéciaux : jeux et paris ; rentes
viagères ; transaction
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10 Le panel des contrats spéciaux est vaste : on peut citer les contrats prévus par des dispositions légales (quelle qu’en soit la
forme) – contrats nommés – et ceux dont l’essentiel relève de la création de la pratique et des règles prétoriennes (pour en
assurer la sanction) – contrats innommés – destinées, si elles ont fait leur preuve, à être tôt ou tard intégrées dans une loi : le
contrat innommé est un contrat nommé en germe.
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REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
- ANTONMATTEI (Paul-Henri) et RAYNARD (Jacques), Contrats
spéciaux, 9ème éd. LITEC 2008
BENABENT (Alain), Contrats spéciaux civils et commerciaux,
Montchrestien coll. Précis Domat, 9ème edition.
COLLART DUTILLEUL (François) et DELEBECQUE (Philippe),
Contrats civils et commerciaux, Dalloz coll. Précis, 2007, 8ème édition.
LECLERC (Frédéric), Droit des contrats spéciaux, LGDJ, 2007.
HUET (Jérôme), Traité de droit civil, Les contrats spéciaux, LGDJ
2001.
EXERCICES D’ASSIMILATION
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11 Avant tout, il convient de préciser qu’il ne sera traité dans ce cours que de la vente civile proprement dite, la vente
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La vente est, selon les termes de l’article 1582 du code civil, « une convention
par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose et l’autre à la payer ». En prenant à la lettre
cette définition, il en résulterait que la vente ne fait naître qu’une obligation de livrer
à la charge du vendeur et une obligation de payer à la charge de l’acheteur.
En effet, la vente met en présence, d’un côté, le vendeur qui cède un bien lui
appartenant, et, de l’autre, l’acheteur, ou acquéreur, qui acquitte un prix pour en
devenir propriétaire. Les deux parties sont donc successivement propriétaires du
même bien. Aussi, s’il vrai que l’article 1582 du C. civ. définit la vente par les
obligations du vendeur et de l’acheteur, qui sont, pour le premier, de « livrer une
chose » et pour le second, « la payer ». Mais, l’article 1583 du C. civ. complète-t-elle la
définition donnée de la vente en déclarant que « la propriété est acquise de plein droit à
l’acheteur à l’égard du vendeur ». Il est donc important de souligner que la vente ne se
caractérise pas comme étant, simplement, génératrice d’obligations personnelles, et
portant sur une chose et son prix. L’intérêt principal de ce contrat est qu’il opère un
transfert de propriété. Qui plus est, ce transfert de propriété s’effectue en principe de
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manière automatique, c’est-à-dire sans que le vendeur ait à exécuter une opération
positive à cette fin ; la propriété est transmise par le seul échange des consentements,
solo consensu, dès que la vente est parfaite. Il est donc clair qu’on a voulu faire de la
vente un contrat translatif de propriété.
On peut dès lors définir la vente comme l’opération juridique qui a pour objet
de transférer la propriété d’une chose, que le vendeur s’engage à mettre à la
disposition de l’acheteur, moyennant le payement d’un prix par ce dernier.
Il faut le souligner, la relative ambiguïté que laissent planer les articles 1582 et
1583 du C. civ. tient à ce que sous l’ancien droit, comme à Rome, on tenait avant tout
le vendeur obligé de livrer la chose, et d’en assurer à l’acheteur la jouissance paisible.
On n’insistait pas tant sur le transfert de propriété en tant que tel et l’on admettait la
vente de la chose d’autrui, car on considérait que l’acheteur n’avait pas à se plaindre
tant qu’il n’était pas troublé dans sa possession par le véritable propriétaire.
La vente est un contrat nommé : Les contrats nommés sont ceux dont la
définition et le régime ont été précisés par la loi14. Ce sont par exemple les
contrats régis par le Code Civil dans les articles 1582 et suivants et en
particulier la vente.
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(le contrat est conclu par le seul échange des consentements) s’oppose au
caractère réel (où en plus de l’échange des consentements, la remise effective
de la chose est nécessaire à la conclusion du contrat) ou formel, solennel (où en
plus de l’échange des consentements, le respect d’une formalité est nécessaire
à la conclusion du contrat).
Le contrat consensuel est formé par le seul échange des consentements sans
qu’aucune condition de forme ne soit imposée. Au contraire, la formation du contrat
non consensuel ou formaliste requiert en plus de l’accord des volontés,
l’accomplissement d’une formalité déterminée. Par exemple, les contrats solennels
exigent pour être valables la rédaction d’un acte écrit. Les contrats réels ne sont
formés que par remise de la chose qui en est l’objet.
La vente civile se forme donc en principe par le seul consentement des parties
et n’exige, pour sa validité, aucune forme solennelle. Elle existe dès que les parties se
sont mises d’accord sur la chose et sur le prix.
Il est de principe qu’il n’y a pas de place dans le contrat de vente pour
l’intention libérale. La vente est un contrat à titre onéreux car l’avantage qu’elle
procure à chacune des parties ne lui est concédé que moyennant une prestation
qu’elle a fournie ou à laquelle elle s’oblige.
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V. en ce sens les articles 1612 et 1653 du code civil.
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Toutefois, les parties peuvent aménager la vente afin d’en faire un contrat
aléatoire, la majorité des règles du Code civil concernant le contrat de vente étant
simplement supplétives de volonté et non impératives. Dès lors, le contrat de vente
peut avoir un caractère aléatoire, lorsque, selon la définition qu’en propose l’article
1104, alinéa 2, du code civil, « l’équivalent consiste dans la chance de gain ou de perte pour
chacune des parties d’après un événement incertain » ; ainsi, le contrat de vente est
aléatoire au cas où la chose vendue consiste en un usufruit ou lorsque le prix est une
rente viagère ou encore lorsque la vente est une vente sur souche. C’est dire que
l’aléa peut porter sur l’existence de l’une des prestations (Ex : un pari,…) ou
l’étendue de la prestation (Ex : la vente en viager…).
L’intérêt pour les parties de conclure un contrat de vente aléatoire réside alors
dans le fait que dans un contrat aléatoire, on ne peut jamais contester la validité d’un
contrat aléatoire en se fondant sur la lésion : « l’aléa chasse la lésion ».
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