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a) Le site d’Abobo-Doumé
Le site d’Abobo-Doumé initialement prévu comme site pilote du projet a été délocalisé
à Locodjro où a été inauguré le débarcadère de pêche par le Roi du Maroc Mohammed 6. Ce
changement de site s’explique par le fait que les populations du village d’Abobodoumé à cette
période ont refusé que le quai de débarquement soit construit au sein de leur village. Une
portion de femmes de la CMATPHA s’est déplacée sur le site de Locodjro tandis qu’une
grande partie d’entre elles ont préféré rester à Abobodoumé pour des raisons qui seront
développées dans les prochaines lignes du mémoire. Les fours FTT se trouvent sur le site de
Locodjro.
Au vu des résultats des enquêtes et des analyses qui en découlent, nous sommes emmenés
à nous interroger sur certains aspects du projet. De façon générale :
Les premiers témoignages et reportages après la mise en œuvre du projet laissaient croire
que cette innovation serait un succès. Malheureusement aujourd’hui, près de 4 ans après la fin
du projet, les réalités du terrain nous démontrent le contraire. Le site de Guessabo,
complètement fermé, celui de Braffédon à Grand-Lahou devenu un débarras, le site
d’Anoumanbo à peine fonctionnel et enfin celui de Locodjro qui avec son petit noyau de
femmes, continue malgré tout de fonctionner et de fumer le poisson seulement sur commande.
Avec de tels constats, l’on peut sous tendre que l’approche et/ou la stratégie de sortie mise
en œuvre au niveau de la FAO a été ratée car si des infrastructures ont été mises en place
dans le cadre d’un projet et que 70% d’entre elles ne sont pas utilisées voire même
abandonnées, il faut se poser des questions. Le projet s’est en effet plus focalisé sur les
aspects techniques notamment les pertes poste captures bien vrai que leurs réductions
favoriseraient une augmentation des revenus des femmes et une amélioration des conditions
de vie des bénéficiaires.
Néanmoins, dans la gestion du projet et pour une meilleure approche, les aspects sociaux
et culturels auraient dû être bien analysés et devraient l’être pour une relance du projet qui
favoriserait de façon durable, l’autonomisation véritable des femmes bénéficiaires.
En Côte d’ivoire, on note aussi une forte participation des femmes dans le projet du
nouveau débarcadère de Locodjro. Il reste cependant des efforts d’amélioration dans la
gestion des financements.
Les fours en eux ne présentent pas de problèmes de fabrication. Bien au contraire, ils ont
une capacité de 3tonnes/jour pour le traitement de produits.
Le problème dans la gestion de ce projet est simplement dû au fait que tous les besoins des
femmes n’ont pas été vite perçus. Celles-ci étant habituées à recevoir de l’aide financière, sont
donc devenues dépendantes sans avoir développé en elle l’esprit d’initiative, la conquête du
marché, la gestion de leurs finances. Elles n’ont pas été responsabilisées dès la conception du
projet sur l’utilisation des fours, les nombreuses opportunités qu’ils présentent et les
implications qui en ressortent sachant que ce sont elles, les utilisatrices de fours.
Les problèmes de leadership, de mauvaise gestion des fonds etc… sont les résultantes de
cette faille ou ce manque dans la gestion du projet.
Tableau 10 : Matrice des forces, faiblesses, opportunités et menaces des deux systèmes de
fumage
Dans le secteur de la pêche artisanale, les femmes jouent un rôle clé en gérant les
finances au niveau des ménages ainsi que les ressources aquatiques au niveau communautaire.
Cela ne leur confère pas nécessairement de pouvoir de décision, car ces fonctions sont
généralement ignorées et sous-estimées.
La présente étude a porté sur « titre » et avait pour objectif « objet ». A partir d’une
évaluation participative, nous avons pu faire l’état des lieux des sites cinq (5) ans après la fin
du projet et par cette occasion apprécié la situation des femmes bénéficiaires à ce jour et leur
autonomisation par l’introduction d’une innovation en matière de fumage, les FTT.
Les résultats sont en effet probants. Il ressort des enquêtes de terrain que sur l’ensemble des
sites appuyés par le projet, seuls deux d’entre eux, Locodjro et Anoumanbo, continuent de
fonctionner. L’analyse laisse voir que (28%) des femmes continuent d’utiliser les fours FTT
contre (72%) des femmes ayant carrément abandonné. En effet, plusieurs raisons justifient ce
faible taux d’adoption pour une technologie innovante sensée apporter une solution durable
aux problèmes des femmes qui bravent en longueur de journées des tonnes de fumées pour
s’assumer financièrement et prendre en charge leur famille. Parmi ces raisons, nous avons :
Quant au revenu, l’analyse montre qu’il n’y a pas assez d’évidences pour conclure que le
revenu net moyen mensuel que les femmes gagnent avec les fours FTT soit statistiquement
différent de celui de celles ayant abandonné le projet et utilisant les fours traditionnels. La
marge reste faible voire insignifiante. Il n’ya donc pas une incitation financière suffisante
pour créer une ruée des femmes vers les Fours FTT ou les maintenir pour celles qui ont eu le
privilège d’être touchée par le projet. De ce fait, pouvons-nous parler d’impacts positifs de ce
projet et de sa durabilité vu le taux d’adoption ?
L’étude comparée de Monney Monney Jean Ernest sur la «comparaison de deux systèmes de
fumage (traditionnel et amélioré) de poissons au débarcadère d’Abobo-Doumé » montre que
les fours FTT présentent plus d’avantages que les fours traditionnels en termes de quantités et
couts relatifs aux combustibles.
En effet, le coût de fumage avec le bois rouge, est plus faible au niveau des fours FTT qu’au
niveau des fours traditionnels. De même, le charbon de bois utilisé uniquement au niveau des
fours FTT est plus économique par rapport au bois d’hévéa utilisé au niveau des fours
traditionnels. Ces résultats montreraient que 1’utilisation de ces nouveaux fours engendre une
économie d’échelle par un taux de réduction du coût de fumage de l 6,5% par rapport au
système traditionnel.
Tous les problèmes décelés par la présente étude ne doivent pas uniquement reposer
sur les femmes. Un regard critique est aussi tourné à l’endroit des acteurs au développement
que sont la FAO soutenue par le Ministère de tutelle pour ce projet, qu’est le MIRAH.
En effet, bien avant la mise en œuvre du projet, certaines questions auraient dues être
étudiées notamment les aspects sociologiques et culturels des femmes bénéficiaires.
Aussi, lorsque les investissements sont accordés aux Etats dans le cadre de projets de
développement, il appartient à ces Etats de mettre en place un mécanisme de suivi de ces
financements ou investissements de sorte à assurer leur durabilité et pérennité quant aux
actions menées dans les projets une fois le retrait des bailleurs. Car tout compte fait, les
investissements reçus pour de tels projets restent non seulement profitables aux bénéficiaires
directes mais également à l’ensemble du pays qui peut se positionner à une échelle importante
dans la lutte contre les pertes post-capture, favorisant ainsi l’autonomisation complète des
femmes et leur sortie de la marginalisation de façon durable.