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Le développement embryonnaire

chez les Vertébrés

On va principalement étudier l'embryogenèse à partir de 3 modèles que sont le Xénope, le


Poulet et la Souris. On s'attachera surtout à montrer la ressemblance entre ces 3 types d'organismes,
à la fois avant et après la segmentation. On étudiera ensuite les différentes étapes de développement
chez les Vertébrés, en se basant toujours sur les 3 modèle…
L'établissement des axes est très précoce chez les Vertébrés, qui sont des animaux avec des
axes très bien définis. En 1870, Geoffroy St-Hilaire a observé qu'un homard à l'envers ressemble
fortement à un Vertébré, avec un SN dorsal et un TD ventral. Cette ressemblance l'a mené à dire
qu'au cours de l'évolution, on a eu inversion de l'axe DV, mais cet axe est défini à partir de la
position de la bouche : c'est donc qu'on aura également modification de l'emplacement de la bouche.
A la suite d'expériences génétiques, anatomiques, on a pu montrer que l'on a effectivement de
très grandes ressemblances ans le plan d'organisation des Vertébrés et des Invertébrés, et les
molécules engagées dans l'embryogenèse semblent conservées, tout comme les principaux
mécanismes.
Les Vertébrés et les Invertébrés supérieurs présentent quelques particularités . ainsi, les
animaux supérieurs ont tout de même développé des structures complexes : ainsi le pôle antérieur est
bien développé : il est orienté dans le sens de la marche, et il est en général spécialisé dans la
perception sensorielle. Les têtes que l'on peut observer sont très différentes chez ces individus
(baleine, souris, hominidés…), mais la différence se fait plus encore sentir ave les Invertébrés (dont
les Insectes ) : cela est en réalité dû à une implication différente des crêtes neurales.
De plus, ces individus présentent une asymétrie dans tous les plans, mais cette asymétrie des
Vertébrés est toujours précédée d'une asymétrie moléculaire initiale. Cela implique que l'on doit
avoir des composants maternels disposés de manière ordonnée dans l'ovocyte et des facteurs
externes qui pourront leur donner un "coup de pouce". A partir de cette asymétrie moléculaire; on
peut comprendre pourquoi on obtient des cellules très différentes, et un organisme complexe formé
d'entités différentes.
Une fois les groupes de cellules déterminées, des signaux pourront être échangés : ce sont des
voies toujours adaptées aux interactions au sein de l'embryon. Cependant, au cours du
développement embryonnaire, on a beaucoup plus de signalisation que de nature de signaux
différentes : c'est donc qu'à plusieurs reprises on retrouve les mêmes types de molécules. C'est par
exemple le cas des membres de la famille des TGFβ, fortement impliqués dans la mise en place de
l'axe DV, mais aussi des membres de la famille des Wnt et shh : dans tous les cas, une même
molécule pourra avoir plusieurs fonctions.
On a coutume de considérer qu'un ligand intervient avec un récepteur, mais en réalité, les
communications sont beaucoup plus complexes : en effet, on aura intervention de plusieurs types de
molécules pour assurer une seule différenciation : on aura par exemple des activations et facteurs
puis des inhibitions.

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I) Les modèles animaux

1) Description

a) Les Amphibiens
Le Xénope est une grenouille sud-américaine, possédant des griffes. L'adulte est obtenu après
différentes phases de développement : fécondation, segmentation, gastrulation pour la mise en place
des 3 feuillets… A ce stade, l'embryon n'a toujours pas changé de volume : toutes les cellules, sauf
peut-être les cellules les plus végétatives remplies de vitellus (elles seront digérées après formation
du TD) contribuent à la formation de l'individu. On obtient alors un têtard, qui devra subir une
métamorphose pour donner la grenouille adulte comme on peut l'observer.

Cet animal est assez facilement manipulable, et on a pu développer de très nombreux outils
moléculaires : anticorps dirigés contre certaines protéines, banque de cDNA… Cependant, ce sont
des animaux quasiment tétraploïdes, et c'est pourquoi il est très difficile d'intervenir directement sur
les gènes. On peut tout de même très facilement faire des manipulations sur les stades de
développement précoce.

b) Le Poulet
c'est un animal très employé depuis Aristote, et ce dans de très nombreux domaines de la
biologie. L'œuf est très différent de celui que l'on connaît chez les xénopes, et la quantité de vitellus
est telle que l'on ne peut imaginer les mêmes mécanismes développementaux que chez l'amphibien.
La segmentation va ainsi créer des cellules peu séparées les unes des autres (on a uniquement des
cloisons transversales), juste à la surface du jaune. A partir de cette population de cellules, on aura
formation à la fois de l'embryon et de toutes les annexes embryonnaires (allantoïde, amnios…).
Tout comme chez l'Amphibien, on assistera ensuite à une gastrulation et à une neurulation,
mais aucune métamorphose ne sera nécessaire. Le nombre de chromosomes est très élevé chez les
poulets, ce qui rend l'analyse très complexe et la transgenèse presque impossible. Cependant, c'est un
animal très robuste, et les manipulations sur l'œuf (greffes, ablation…) sont assez faciles.

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c) La Souris
Elle est apparu asse tard dans les laboratoires ;: en effet, les embryons sont assez difficilement
accessibles, et les expériences menées sur les Amphibiens ne sont pas reproductibles. De plus,
comme chez les Poulet, on a formation d'annexes embryonnaires et bon nombre de cellules formées
au cours de la segmentation ne participeront pas à la formation de l'embryon.

Au terme des processus d'embryogenèse, on va obtenir un adulte, et si dans leur globalité ils
sont très comparables à ce que l'on a vu précédemment, la gastrulation en détail est très particulière.
En effet, à l'opposé du poulet et de nombreux Mammifères, elle se fait non pas à plat , mais sous la
forme d'un s'un dé à coudre, ce qui rend son étude beaucoup plus complexe.
Les transplantations et greffons sont assez difficiles réaliser chez les souris, et notamment du
fait que le développement est interne. Par contre, chez les souris, les manipulations génétiques sont
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très faciles : on connaît de nombreux mutants naturels, et la génétique a pu créer encore d'autre types
de mutants, que l'on appelle KO. De plus, les cultures de cellules de souris ont été bien développées,
et on peut facilement étudier la différenciation d'un tissu.
Finalement, on peut voir que chaque modèle présente des avantages, et selon le type
d'expérience que l'on veut réaliser, on choisira plutôt l'un ou l'autre. On doit également avoir des
considérations logistiques et scientifiques, qui favoriseront tel ou tel modèle d'étude…

2) Le stade phylotypique

Les différents cycles de développement des 3 modèles étudiés présentent une certaine parenté
malgré les différence, et on l'a remarqué depuis assez longtemps. Cependant, les stades précoces
restent très différents : ainsi la segmentation est régie par des mécanismes plus ou moins différents,
et la gastrulation semble également engager des processus différents. Les stades fœtaux contribuent à
l'installation des particularité de chaque espèce (poil, plumes, ailes…), et c'est pourquoi il est
difficile de les comparer.
Cependant, il existe un stade où tous les Vertébrés sont très comparables : c'est ce qu'on
appelle stade phylotypique ou pharyngula. On y retrouve une grosse tête, une queue, des somites, un
système nerveux creux et des arcs branchiaux ou poches pharyngiennes (dont la présence a donné le
nom à ce stade).

C'est à partir de cette observation que Haeckel a émis la théorie de la récapitulation dans les
années 1870 : il a supposé que l'on aurait une succession linéaire de l'évolution au cours de
l'embryogenèse. Par exemple si on considère le développement de l'homme, on retrouve un protiste
(zygote), un protiste colonial (blastula), un poisson (pharyngula)… C'est bien entendu une théorie
très différente de celle de Darwin, puisque Haeckel suppose que l'évolution de l'individu nécessite
l'ajout d'une étape du développement.
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En réalité, même si on a effectivement des similarités, il existe beaucoup de différences entre
les 3 modèles. De plus, la théorie de Haeckel a été très exploitée par les racistes, qui pensent alors
que certains peuples du 1/3monde auraient un stade de développement en moins… Mais tout de
même, il existe des similarités que l'on doit expliquer. C'est pour cela que Von Baer a émis une
hypothèse tout à fait opposés à celle de Haeckel : il suppose que ce sont les formes embryonnaires
des ancêtres communs qu sont récapitulés. A partir de là, un développement post-phylotypique est
possible pour chaque embranchement, et l'embryogenèse ne récapitule pas la phylogenèse.
Le développement des Vertébrés semble montrer comme un goulot d'étranglement : en effet,
les stades précoces comme les stades tardifs présentent de nombreuses variantes, alors que le stade
phylotypique est unique. Apparemment, ce serait un stade où aucune variation ne serait possible, et
aucune mutation n'a pu apporter de nouvelles capacités… A partir du stade phylotypique, les arcs
branchiaux qui représentent une constante pourront avoir des devenirs très différents : fentes
branchiales, mâchoires, glandes (thymus par exemple), osselets de l'oreille interne…
Chez certains individus, on a pu observer certains caractères très étonnants : par exemple, on
peut trouver des traces d'organes normalement absentes, mais présents chez les ancêtres… Ainsi on
aura apparition d'une queue ou de tétons surnuméraires sur le ventre des hommes, de pattes arrières
chez les baleines, de 5e doigt chez les poulets. Dans tous les cas, les structures que l'on aurait dû
observer sont absentes : on pense que c'est une inhibition d'un caractère ancestral qui favorise la
formation des organes spécifiques, et l'absence d'inhibition provoque l'apparition de ces structures
ancestrales.

II) La spécification initiale du plan d'organisation

1) Chez le Xénope

Les ovocytes des Amphibiens sont de grande taille et le vitellus y est très abondant : le pôle
végétatif est caractérisé par la présence abondante de plaquettes vitellines, mais le pôle animal
contient la vésicule germinative. Dans l'oviducte, les différents ovocytes sont orientés n'importe
comment (à la différence des drosophiles), alors comment expliquer la localisation précise du
vitellus ?
La vitellogénine sécrète par le fois de la mère est endocytée par toute la surface de l'ovocyte,
mais elle est ensuite accumulée au pôle végétatif. Cela est peut-être dû à l'organisation elle-même de
la cellule : on a souvent l'habitude d'orienter les cellules, quelles qu'elle soient, selon un axe noyau-
centrosome, et la formation des microtubules se ferait donc de manières orientée.
A la fin de l'ovogenèse, on obtient alors une asymétrie moléculaire très bien dessinée : on a
accumulation de certains ARNm au pôle végétatif ou au pôle animale. Cela correspond aux prémices
de l'axe animal-végétatif et on pourrait même délimiter les futurs territoires : ectoderme au pôle
animal, mésoderme autour de l'équateur et endoderme au pôle végétatif. On peut également dire que
le pôle animal préfigure le futur pôle antérieur, mais à ce stade, l'axe DV n'est pas encore déterminé.

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Ce sera la fécondation ou n'importe quel artifice mimant la pénétration du spermatozoïde qui
déterminera l'axe DV. En effet, cela provoque la rotation d'une mince couche de cytoplasme au pôle
opposé au point d'entrée, mais cela ne concerne que la partie superficielle. Cela va également
intervenir sur la disposition des ARNm : certains molécules qui étaient végétatives se retrouvent plus
concentrées au futur pôle dorsal.

2) Chez le Poulet

Le vitellus se dépose successivement au cours du développement de l'ovocyte ;: il occupe alors


la presque totalité de l'œuf et le noyau est repoussé vers le pôle animal. Les déterminants maternels
sont là encore essentiels puisque l'expression de génome zygotique ne commence qu'après 10 ou 11
divisions. Au moment de la fécondation, la segmentation ne se fera qu'au pôle animal, là où le
vitellus est le moins abondant. Cependant, contrairement aux amphibiens, on a une forte
polyspermie: les spermatozoïdes peuvent donc entrer à n'importe quel endroit de l'ovocyte. De plus,
la cellule est de grande taille, donc on peut difficilement imaginer un réseau microtubulaire qui ferait
tourner le cytoplasme → les mécanismes seront donc très différents.
A l'issue de la segmentation, on a formation d'un blastodisque, et lorsque l'œuf est pondu,
l'embryon compte 60 000 cellules. Cependant, seules 500 participeront à la formation de l'embryon.
Dans ce disque, on a pu établir que le pôle postérieur du futur embryon se trouve en périphérie, alors
que le pôle antérieur se trouve plutôt vers le centre. De plus, même si on a une seule couche de
cellule dans le disque, on suppose que la face vitelline sera la face dorsale.

Lors de la progression de l'ovocyte dans l'oviducte, il se déroule un évènement très important :


l'œuf va entrer en rotation et effectue ainsi de 10 à 12 tours par heures (un témoignage de cette
rotation est l'aspect des chalazes). Le blanc et la coquille peuvent très facilement tourner, mais le
vitellus étant trop lourd, l'embryon ne pourra que s'incliner. C'est à ce moment-là que le véritable axe
antéro-postérieur est déterminé : le pôle postérieur est dans la partie haute du disque.

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Suite à la ponte, on va assister à une prolifération cellulaire accrue dans la zone postérieur, ce
qui permet de mieux caractériser encore cette zone. C'est Von Baer qui a établi une règle sur
l'orientation de l'embryon dans l'œuf : en effet, il a remarqué que plus de 9 fois sur 10, l'embryon se
dispose perpendiculairement au grand axe de l'œuf, et il semble regarder vers la petite pointe. Tout
cela serait apparemment régi par la rotation de l'œuf dans l'oviducte.

3) Chez la souris

a) La détermination des axes


L'œuf de souris ne renferme pas de vitellus : l'embryon doit donc se suffire à lui-même assez
rapidement, et c'est pour cela eu le génome zygotique s'exprime dès le stade 2 cellules. Cela entraîne
également le fait que les déterminants maternels sont assez rares : l'asymétrie moléculaire est donc
très peu développée. Les cycles cellulaires sont très longs (entre 12 et 24h), et les divisions sont très
rapidement asynchrones.

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Après un certain nombre de divisions, on obtient une morula où toutes les cellules sont
capables de redonner un embryon entier : ce sont donc des cellules totipotentes. Après ce stade, on
assiste à une association très forte des cellules entre elles : c'est le phénomène de compaction, qui est
principalement dû à la synthèse accrue d'E-cadhérine (ou uvomoruline). A l'issu de cela, les cellules
deviennent polarisées.

Les divisions cellulaires vont ensuite adopter des plans de divisions au hasard, qui seront
verticaux ou horizontaux : on obtient alors des cellules externes ciliées et des cellules internes non
ciliées. Seul un effet de position pourra expliquer le devenir différent des cellules externes et
internes… En effet, les cellules internes donneront les cellules de la masse interne, alors que les
cellules externes donneront le trophoblaste extracellulaire (ou trophectoderme).

L'embryon lui-même sera issu de la masse cellulaire interne, mais les annexes embryonnaires
seront issues à la fois de cette masse (cas pour le chorion et l'amnios) et du trophectoderme. Cette 1e
différenciation des cellules semble irréversible puisque les cellules du trophoblaste ne peuvent pas
redonner l'embryon. Cependant, on ne peut toujours pas déterminer d'axe au sein de cet embryon…
Le blastocyste que l'on obtient alors est creusé par un blastocœle, et composé de 2 populations
très différentes de cellules. On peut observer qu'une partie des cellules de la masse interne s'étale le
long du trophoblaste : elles donneront la partie interne du sac vitellin. Dans le trophectoderme, on
peut là aussi différencier 2 types de cellules : des cellules polaires et des cellules de très grande taille
et polyploïdes suite à des caryocinèse sans cytodiérèse.
C'est au stade blastula que l'embryon va s'implanter et se libérer de sa gangue protectrice de
cellules folliculaires. L'embryon est alors sous forme d'une couche unicellulaire, et la gastrulation
mettra en jeu des processus très particuliers.

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Lors de la fécondation, on va assister à l'achèvement de la méiose, et le second globule polaire
se forme exactement à l'opposé du point d'entrée du spermatozoïde. On peut marquer ce point à
l'aide d'une bille fluorescente, et cela permet de mieux matérialiser le 1e axe animal-végétatif.

Lors de la 1e division cellulaire, on observe que la bille se retrouve exactement au centre du


plan de clivage. La 2e division est ensuite diachrone : elle se fait d'abord dans l'un des 2 premiers
blastomères (donc on aura un stade 3 cellules), et la bille est intégrée dans l'une des 2 cellules ainsi
obtenues. Au stade blastocyste, on peut repérer l'emplacement du futur embryon par rapport au
trophectoblaste : cela détermine un axe embryonnaire/abembryonnaire. De plus, la bille que l'on peut
toujours repérer marque le pôle animal…

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Au stade épiblaste, on retrouve des cellules de l'endoderme viscéral : elles n'interviennent pas
dans la formation de l'embryon mais jouent un rôle essentiel dans la détermination de l'axe AP. Si on
déplie l'épiblaste, on peut former un disque plus ou moins plat, que l'on peut comparer avec le disque
du poulet : par analogie, la partie postérieure de l'embryon se trouve donc en périphérie…

Chez le poulet, c'est l'inclinaison de l'embryon qui pouvait localiser avec précision de pôle
postérieur : chez la souris, l'axe sera simplement déterminé selon l'axe proximo-distal et selon
l'endoderme viscéral… L'axe AP aura donc globalement la même orientation que l'axe proximo-
distal, avec une légère rotation… De plus, comme chez le poulet, on suppose que la future face
dorsale est à l'intérieur du cylindre de l'épiblaste.

b) Détermination des blastomères


Dans un morula, les blastomères sont tous identiques : ce sera simplement une information de
position qui déterminera leur devenir. Millman a prélevé des blastomères indifférenciés de morula et
il les a réimplanté à différents endroits d'une autre morula. Si l'implantation se fait en périphérie, le
blastomère participe à la formation du trophectoderme, mais si elle se fait au centre, alors il participe
à la formation du bouton embryonnaire (= masse cellulaire interne). Il semble donc que c'est bien la
seule position qui indique la destinée.

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On a également pu réaliser des chimères d'agrégation à partir de 2 morula : on obtient donc une
morula chimérique 2 fois plus grande que la normale. Cependant, on obtient une souris de taille
normale, qui sera tétraparentale : c'est donc que les différents blastomères subissent une forte
régulation…

c) Les cellules souches


Les cellules souche sont toujours prélevées à partir du blastocyste, mais elles ne peuvent se
maintenir en culture qu'en présence de LIF (Leukemia inhibitory factor). A partir de ces cultures, on
obtient des cellules souches embryonnaires ES, que l'on peut conserver pendant très longtemps (elles
peuvent se diviser de manière presque infinie).

Cependant, si on enlève le LIF, les cellules ES se différencient, et on obtient alors de très


nombreux types cellulaires : os, cardiomyocyte, adipocyte, neurone… Les travaux actuels les plus
importants consistent à connaître dans quel environnement telle différenciation sera favorisée : cela
permettrait une utilisation des cellules ES en thérapie cellulaire.
Les cellule souches ES peuvent être modifiées pour certains gènes et réimplantées ensuite dans
un blastocyste : on obtient alors des souris chimériques, dont la plupart des lignées cellulaires seront
génétiquement modifiées.

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On peut tout de même obtenir des cellules similaires à partir de cellules germinales
primordiales d'un fœtus : elles sont alors appelées cellules EG et peuvent là encore donner toutes les
cellules possible (totipotence). Chez les adultes, on retrouve des cellules souches dans des
tératocarcinomes (cancer des testicules), capables de se diviser ou de se différencier.

III) La gastrulation

1) Les mouvements cellulaires

La gastrulation est une phase qui permet aux différents feuillets embryonnaires d'arriver à leur
disposition finale. Elle s'accompagne de différents mouvements cellulaires : des ensembles
cellulaires assez éloignés pourront alors entrer en contact, ce qui permettra des induction entre les
différents tissus. A la fin de la gastrulation, les organes sont plus ou moins en place, de même que les
axes AP et DV (on peut retrouver une tête, un dos…).
Un des éléments cruciaux de la gastrulation est le blastopore : sa destinée finale permet de
séparer les protostomiens (c'est la bouche qui se creuse en 1e : Annélides, Mollusques et
Arthropodes) des deutérostomiens (Chordés et Echinodermes).

Chez les Protostomiens, le blastopore donne à la fois la bouche et l'anus, alors que chez les
Deutérostomiens il ne donnera que l'anus. Chez ces derniers, la bouche ne sera qu'un orifice
secondaire : elle se perce à l'extrémité du tube digestif mais n'aura pas la même origine que l'anus.

Malgré les différences entre les organismes, la gastrulation s'accompagne toujours des mêmes
types de mouvements cellulaires :
- l'invagination : cela permet de creuser un tube à l'intérieur de l'embryon. C'est la forme la
plus simple de la gastrulation, que l'on retrouve chez l'Oursin.

- l'involution : c'est un phénomène très similaire à l'invagination, mais les cellules vont
migrer sur la face interne des cellules constituant la couche externe. L'épithélium va rester cohérent,
et seuls les contact cellule/cellule se défont entre la couche interne et la couche externe : cela permet
une progression plus importante vers l'intérieur de l'embryon.
- l'extension convergente : les cellules ne vont pas migrer, mais simplement changer de
forme. Le plus souvent, les cellules vont s'allonger, ce qui assure un rétrécissement en épaisseur des
structures. Ce type de mouvement cellulaire peut également s'accompagner de l'intercalation de
cellules parmi d'autres : par exemple on peut passer de 4 couches de cellules à seulement 2 couches,
tout cela en ne rompant que les contact cellule/cellule.
- l'épibolie : une couche cellulaire va s'étaler, ce qui lui permet de recouvrir puis d'englober
d'autres cellules, souvent plus grandes.

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- la délamination : à partir d'un population hétéroclite, on va avoir ségrégation de 2 couches
cellulaires individualisées par rupture des contacts cellule/cellule.

2) La gastrulation chez l'amphibien

Pendant longtemps, c'est le Triton qui a été utilisé comme modèle d'étude, mais il a été
remplacé par le Xénope. Cependant, il existe une différence essentielle entre ces 2 Amphibiens :
chez les Triton, le mésoderme en fin de segmentation représente une ceinture équatoriale assez
épaisse formée de 2 couches cellulaires (une interne et une externe).

Par contre chez le Xénope (que l'on va étudier), si la disposition du mésoderme est
sensiblement la même, seules les cellules internes ont une nature mésodermique, alors que les
cellules équatoriales externes sont ectodermiques. Cependant, une partie de ces cellules (groupe dit
MIZ) va tout de même être engagé dans la gastrulation : elles tapisseront l'archentéron.
La gastrulation est plus complexe que ce qu'on pouvait imaginer chez l'oursin, car les cellules
du pôle végétatif sont de très grande taille et chargées de vitellus. Elles représentent un obstacle à la
gastrulation et le blastopore va se creuser dans la zone sub-équatoriale, là où les cellules animales
rencontrent les 1e cellules végétatives.
A ce niveau , on a apparition de cellules en bouteille : ce sont des cellules qui ont subi une
constriction apicale, par modification du cytosquelette. Cela a pour conséquence de tirer les cellules
plus animales vers le pôle végétatif, et c'est ainsi que se creuse le blastopore.

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Les cellules vont alors progressivement rentrer dans l'embryon, et le mésoderme qui se trouve
déjà à l'intérieur va tirer l'ectoderme externe. On peut observer une épibolie au niveau de l'ectoderme
animal, alors que l'on a formation d'un archentéron, qui remplace au fur et à mesure le blastocœle.
Grâce à une involution (elle prend le relais de l'invagination), le mésoderme pré-chordal va migrer
jusqu'à la tête, et les cellules en bouteille qui ont initié la gastrulation jusqu'au pharynx.

L'archentéron a tendance à s'allonger, et les cellules qui pénètrent petit à petit dans l'embryon
contribuent à élargir le blastopore. A un moment donné, on a même formation d'une lèvre ventrale
du blastopore, mais les mouvements y seront beaucoup plus restreints. Cependant, cela permet aux
cellules les plus riches en vitellus de pénétrer également à l'intérieur de l'embryon, mais elles
n'auront ensuite qu'un rôle nutritif, puisqu'elles seront digérées. Elles joueront tout de même un rôle
important de signalisation dans les stades précoces du développement…
A part ces cellules particulières, toutes les cellules de la blastula contribueront à la formation
de l'embryon, puisqu'on n'a pas d'annexes embryonnaires. Au cours de la gastrulation, l'embryon va
subir une rotation de 90° et il va légèrement s'allonger : c'est alors que l'on peut reconnaître les
principaux axes.

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Finalement, au début de la gastrulation, on peut repérer plusieurs zones dans la blastula :
certaines cellules ne migrent ainsi pas à l'intérieur, et subissent uniquement des mouvements
d'épibolie.

Au fur et à mesure que la gastrulation avance, on a formation de cellules en bouteille côté


ventral, ce qui permet de créer un blastopore plus large, renfermant au centre le bouchon vitellin,
formé par des cellules très riches en vitellus. De plus, on peut voit que toutes les cellules migrent
sous forme de couche : elles ne se dissocient pas, et les liens cellule/cellule sont maintenues tout au
long du processus.

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Les modèles Amphibiens se prêtent bien aux expériences et on a essayer de mettre en évidence
les principaux mécanismes de la gastrulation. Les cellules en bouteille semblent essentielles pour
initier la gastrulation, mais à un stade plus avancé, leur absence ne constitue plus un obstacle à la
gastrulation.
Par contre, on a pu constater que la fibronectine avait un rôle essentiel : elles permet en effet la
migration des cellules sur le toit du blastocœle par le phénomène d'involution. Ainsi, si on injecte
des anticorps anti-fibronectine, on ne bloque pas totalement la gastrulation, mas elle est fortement
altérée (cf TD1 reproduction). On a même pu montrer qu'à la surface du blastopore, les molécules de
fibronectine se disposent en fibrilles, orientées dans le sens de la migration.
Lors de la gastrulation, on a également pu mettre en évidence des phénomènes d'intercalation
cellulaire : dans le sens radial, cela permet à des cellules profondes de remonter vers la surface; dans
le sens longitudinal, cela provoque un élargissement, et notamment dans la partie antérieure.

3) La gastrulation chez le Poulet

Chez le Poulet, la gastrulation est difficile à étudier car elle se déroule peu après la ponte. Du
fait de l'organisation de l'œuf, on ne peut pas imaginer d'involution depuis le pôle végétatif :
d'ailleurs à ce stade on ne parle pas de pôle végétatif ou animal, puisqu'on n'a qu'une couche
monocellulaire au-dessus d'une cavité sous-germinative.

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A partir de cette unique couche appelée épiblaste, on va avoir formation d'une 2e couche, et
notamment grâce à des cellules de la future zone postérieure : cela se comprend puisqu'on a vu que
la prolifération y était plus intense, et cette zone est donc un peu plus épaisse. Elle correspond à ce
qu'on appelle l'aire opaque , et la population de cellules qui en est issue va peu à peu créer
l'hypoblaste.
La formation de cet hypoblaste se fait en 2 temps : tout d'abord, certaines cellules de l'épiblaste
vont perdre leurs contacts. Elles deviennent alors plus arrondies et forment de petits agrégats dans la
cavité sous-germinale : c'est l'hypoblaste primaire. Ces différents amas seront ensuite réunis par les
cellules qui se développent depuis la zone marginale postérieure, formant l'hypoblaste secondaire.
Ces 2 populations ensemble formeront l'hypoblaste, qui délimite alors avec l'épiblaste un
blastocœle. Finalement, on obtient un pseudo-embryon ovale formé uniquement par l'hypoblaste et
l'épiblaste, que l'on peut comparer à la blastula d'oursin. Cependant, l'hypoblaste ne participe
absolument pas à la formation de l'embryon, et les territoires présomptifs que l'on pourrait décrire
n'intéressent que l'épiblaste.

C'est la zone marginale postérieure qui est le point de départ de la gastrulation au sens strict :
on l'appelle aussi croissant de Köller, et son absence n'empêche pas la gastrulation (le point de départ
se situera simplement ailleurs). On assiste à une mise en mouvement de cellules antérieures vers ce
croissant de Köller, puis de nouveau vers le pôle antérieur.

Grâce à ces phénomènes, on a formation de 2 petits monticules délimitant au centre une petite
dépression : c'est la ligne primitive. Lorsque cette ligne arrive à peu près au milieu du blastodisque,
on voit que la partie antérieure s'épaissit : c'est le futur nœud de Hensen, qui est l'équivalent de la
lèvre du blastopore des Amphibiens.
A 24h, l'extension de la ligne primitive vers le pôle antérieur est maximale, mais pendant les 2
jours suivants, elle va régresser. Lors de cette régression, on assiste à la mise en place de structures
de type somite, repli céphalique vers le pôle antérieur. Ces différentes formations ont pu se
développer car pendant l'extension de la ligne primitive, on a eu des mouvements cellulaires actifs.
En effet, l'épiblaste va progressivement passer par la ligne primitive et rejoindre l'hypoblaste,
progressivement rejeté vers la périphérie du blastodisque. Dès que les cellules épiblastique ont passé
la ligne, elles se dissocient et se différencient en cellule du mésoderme et de l'endoderme, mais on ne
connaît pas encore le déterminisme de ces différenciations. On a simplement pu montrer que les 1e
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cellules qui passent par la ligne primitive sont des cellules endodermiques, et que le mésoderme se
forme dans un 2e temps.

A la fin de la gastrulation, toutes les cellules en surface font partie de l'ectoderme, alors que
toutes les cellules qui ont involué font partie du mésoderme et de l'endoderme. Les mouvements
d'involution se font toujours de manière perpen,diculaire à l'axe de la ligne primitive, sauf pour les
cellules qui ont involué au niveau du nœud de Hensen. En effet, ces cellules ont migré vers le pôle
antérieur, et elles donneront le mésoderme de la tête.
Toutes les involutions se font tant lors de l'extension que lors de la régression de la ligne
primitive : on comprend donc bien que les structures antérieures soient celles qui apparaissent en 1e.
Cela explique également que la zone antérieure subisse la neurulation alors que la zone postérieure
soit encore dans une phase de gastrulation.

détail

Finalement, on voit bien que le Poulet est un modèle assez complexe, et notamment du fait de
la dissociation des cellules. Ce phénomène est d'ailleurs dû au "scatter factor", qui est une cytokine
favorisant également la prolifération des hépatocytes. Chez le Poulet, on connaît très peu les
mécanismes de migration cellulaire, et les modes de différenciation sont encore inconnus…
18
4) La gastrulation chez les Mammifères

a) Chez l'homme
A partir de la masse interne (= bouton embryonnaire), on assiste à la ségrégation de 2 couches
de cellules, tout comme chez le Poulet. On a ainsi formation d'un épiblaste et d'un hypoblaste, qui ne
participera pas à la formation de l'embryon. L'épiblaste forme un blastodisque plat, et la gastrulation
va se faire comme si on avait du vitellus sous l'hypoblaste : elle est très comparable à celle du
Poulet.

La gastrulation va commencer dans la zone postérieure, mais on ne sait pas encore comment
cette zone est déterminée, puisque apparemment rien ne la différencie du reste… La ligne primitive
va alors se former vers la partie antérieure et le nœud de Hensen est formé par un épaississement de
la ligne primitive lorsque cette dernière a progressé de moitié. Les cellules de l'épiblaste vont alors
involuer soit vers les côtés soit vers le pôle antérieur : elles constitueront le futur mésoderme et
endoderme, et elles repoussent dans tous les cas les cellules de l'hypoblaste vers la périphérie.

b) Chez la souris
Chez la souris, le blastodisque forme par l'épiblaste n'est plus du tout plat : il se replie en forme
de coupe, avec l'hypoblaste à l'extérieur (on l'appelle alors endoderme viscéral). Avant que la
gastrulation commence, on peut observer un mouvement des cellules de l'endoderme viscéral distal :
elles vont migrer, s'étaler vers la futures partie antérieure de la souris. Elles envoient alors des
signaux vers l'épiblaste, et ce dernier deviendra en réponse la tête.

19
Après cela, on a formation d'un sillon perpendiculaire au grand axe de l'embryon : c'est la
ligne primitive. L'involution va alors faire "sortir" les futures cellules de l'endoderme et du
mésoderme vers l'extérieur de la coupe : elles vont progressivement déplacer les cellules de
l'hypoblaste, qui sont rejetées vers la périphérie. Cette ligne primitive va s'étendre d'abord vers le
pôle distal de l'embryon, puis remonter vers l'autre face de l'embryon, et donc vers la zone
antérieure.

En réalité, tout se passe globalement comme chez le Poulet, mais il faut raisonner dans l'espace
puisque le blastodisque est replié (on a étudié le poulet en vue de dessus : il faut alors l'imaginer de
profil et le replier).

IV) Les mécanismes moléculaires de la mise en place des axes

1) La mise en place de l'axe dorso-ventral

a) L'organisateur de la blastula : le centre de Nieuwkoop


On a vu que chez l'Amphibien, la gastrulation commence dans la zone dorsale, qui est
déterminée à l'opposé du point d'entrée du spermatozoïde. On va essayer de comprendre quels sont
les mécanismes moléculaires qui permettent d'expliquer la liaison entre la fécondation et la
gastrulation. A priori, dans une coupe de blastula, rien ne permet de différencier la face dorsale de la
face ventrale. En réalité, on a déjà des différences et notamment au niveau moléculaire, ce qui
permettra ensuite de différencier des structures typiques de l'une ou l'autre face.

20
On a pu mettre en évidence un organisateur de la blastula, et notamment grâce aux expériences
de Nieuwkoop. Il a prélevé un blastomère dorsal et l'a ensuite transplanté sur la face ventrale d'une
autre blastula : il a alors obtenu 2 embryons siamois. C'est donc que dans le blastomère transplanté
on trouvait tout ce qui est nécessaire pour organiser un embryon.

On peut retrouver le même résultat sur on injecte le cytoplasme d'un blastomère dorsal dans un
blastomère ventral. On alors supposé qu'il existe des molécules cytoplasmiques capables de
provoquer les mêmes conséquences qu'une cellule entière, et ce même si on les injecte à l'état
purifié.

b) L'organisateur de la gastrula : l'organisateur de Spemann


L'activité organisatrice du centre du Nieuwkoop
persiste jusqu'au stade gastrula : en effet, si on greffe
une lèvre dorsale de blastopore côté ventral, on peut
également obtenir 2 embryons siamois (expérience de
Spemann et Mangold). C'est ainsi que l'on a mis en
évidence le centre organisateur de la gastrula, ou centre
de Spemann.
On est capable de repérer le lèvre dorsale et les
cellules qui en découlent par utilisation de colorants (ou
bien de cellules d'une autre espèce, qui ont
naturellement une coloration différente). Ainsi, une
partie de la corde et des somites présentent la coloration
de la lèvre dorsale greffée: c'est donc que le greffon a
participé à la formation de l'embryon, et qu'il a pu
recruter des cellules ventrales, initialement à destinée
ectodermique, sanguine ou mésonéphros pour les
convertir en cellules dorsales. C'est ainsi le cas des
cellules du nouveau tube neural, qui a été obtenu à
partir de cellules épidermiques…
21
Ce centre organisateur de Spemann n'est pas identique chez les différents Vertébrés : ainsi c'est
la lèvre dorsale du blastopore chez les Amphibiens, le nœud de Hensen chez les Oiseaux et les
Mammifères (et si on greffe un nœud de Hensen sur l'épiblaste, on obtient des siamois). Chez les
Poissons, il correspond à la zone d'initiation de la gastrulation, au niveau du bouclier (= shield =
écusson).
Les transplantations inter-espèces sont tout à fait possibles : ainsi le nœud de Hensen d'un
embryon de caille peut reconstituer un embryon siamois de poulet, et le nœud de la Caille ne
contribue que très peu à la formation du 2e embryon… On a même pu faire des transplantations entre
une grenouille et un poulet, ce qui prouve que les molécules impliquées doivent être relativement
conservées.

c) L'induction de l'organisateur de Spemann


Les 2 centres organisateurs que l'on vient de voir ont la même conséquence s'ils sont
transplantés en face ventrale soit d'une blastula, soit d'une gastrula. On peut donc supposer qu'il
existe un lien entre les 2, et on a pensé que le centre de Nieuwkoop induirait l'organisateur de
Spemann. Ce dernier permettrait ensuite l'organisation de l'embryon par une action dorsalisante…
Ces 2 structures sont tout de même différentes, et c'est pour cela qu'on ne peut les considérer
comme une seule et même structure. En effet, le centre de Nieuwkoop est actif dans les stades très
précoces, quand le génome zygotique ne s'exprime pas encore. Les molécules qui s'expriment donc
sont d'origine maternelle : ce sont soit directement des protéines, soit des ARNm. A l'opposé,
l'organisateur de Spemann engage des molécules zygotiques puisqu'il intervient bien après la
transition blastuléenne.
De plus, le blastomère transplanté est riche en vitellus et il ne participe pars à la formation de
l'embryon siamois : il est en fait digéré dans les phases plus tardives de l'embryogenèse et a un rôle
nutritif. A l'opposé, on a vu que l'organisateur de Spemann participe à la formation de 2e embryon,
au niveau de la corde et des somites.
Les molécules engagées ne sont donc pas les mêmes et tout cela nous pousse à penser que les 2
centres organisateurs ne sont pas 2 stades d'une même structure. Ce serait une séquence
d'évènements qui permettrait au centre de Nieuwkoop d'induire la formation de l'organisateur de
Spemann, par émission d'un ensemble de signaux.

• Un gradient d'inducteur du mésoderme ?


Dans une blastula d'Amphibien, le mésoderme se retrouve dans une ceinture équatoriale, et
parmi cette population de cellules, ce sont les plus dorsales (c'est le chordo-mésoderme) qui
constituent l'organisateur de Spemann. L'induction de cet organisateur par le centre de Nieuwkoop
serait donc le 1e stade de l'induction du mésoderme.
22
Dans des stades précoces du développement, on ne peut pas retrouver de cellules
mésodermiques : aucune cellule n'exprime en effet les facteurs caractéristiques, comme par exemple
la myosine ou l'actine. Cependant, à un moment donné, ces facteurs s'expriment : est-ce que ce
phénomène est dû à une induction ou à un programme génétique prédéterminé ?
Pour prouver que c'est une induction, on a mis en présence une calotte animale (futures cellules
ectodermiques) et une calotte végétative ( futures cellules endodermiques) : on a alors apparition de
cellules mésodermiques exprimant spécifiquement les molécules du mésoderme. C'est donc que l'on
a bien eu une induction (c'est la 1e dans l'embryon), et les signaux émaneraient de la calotte
végétative.
Nieuwkoop a beaucoup étudié ces signaux, et il pensait qu'un seul et même signal ne pouvait
expliquer la formation de tous les mésodermes différents. C'est pourquoi il a proposé un modèle
avec plusieurs signaux : l'un induirait le mésoderme ventro-latéral, l'autre le mésoderme dorsal ()
organisateur de Spemann) → c'est le modèle à 3 signaux. On parle de 2 signaux car dans un 2e
temps, on aurait émission d'un signal depuis l'organisateur de Spemann vers le mésoderme
intermédiaire, pour le rendre un peu plus dorsal…

Pour mieux comprendre la nature des signaux qui émanent de la calotte végétative, Nieuwkoop
a réalisé une série d'expériences : il a greffé une calotte animale sur un blastomère différent de la
calotte végétative, et il a ensuite analyser la nature des cellules au pôle animal. C'est ainsi qu'il a
remarqué que seul le blastomère le plus dorsal pouvait induire la formation de mésoderme dorsal :
c'est donc bien que l'on a des signaux différents selon la zone du pôle végétatif considérée.

A partir de la fin des années 70, on a essayer d'éprouver les molécules que l'on pensait
engagées dans l'induction du mésoderme. On va pour cela injecter l'ARNm de ces molécules au
stade 32 cellules et on regarde si on retrouve l'effet de l'organisateur lui-même. Ainsi, on a découvert
que certaines molécules assuraient la duplication totale ou partielle de l'axe dorso-ventral.

23
Une autre méthode consiste à empêcher le développement de l'axe DV normal : on focalise des
UV sur un œuf d'Amphibien, ce qui empêche la rotation de 30° du cytoplasme (on a détruit les
microtubules par les UV). L'embryon se développe alors comme un sac "ventralisé" car on n'a pas
accumulation de déterminants dorsaux : c'est un embryon composé uniquement de mésenchyme. On
va alors rechercher quel type de molécule peut rétablir un axe DV.

Si on trempe un embryon dans un bain de lithium concentré, alors l'embryon est totalement
dorsalisé, et on pourra essayer de rétablir l'organisation normale de l'embryon et connaître ainsi les
molécules ventralisantes.
Dans les 2 cas, le seul problème est qu'on ne sait pas si les molécules obtenues font partie du 1e
signal inducteur ou bien si ce sont les résultats de cette 1e induction. En effet, on arrive toujours au
même résultat, mais cela peut tout de même donner des pistes.

Il existe une 2e grande méthode d'étude : on prélève une calotte animale et on l'incube en
présence d'une protéine que l'on veut tester. On compare alors le résultat avec le témoin, cad une
calotte animale cultivée seule : elle donne systématiquement de l'épiderme, et c'est pourquoi on
pensait que le devenir normal du pôle animal était de l'épiderme.

Le pendant de cette expérience consiste à injecter un ARNm dans le pôle animal de l'œuf : il
sera surtout concentré dans la calotte animale de la blastula. En général, cet ARNm code pour une
protéine qui n'est habituellement pas exprimée dans cette partie de l'embryon.

• Rôle des molécules de la famille TGFβ


Grâce aux expériences précédentes, on a pensé que les molécules de la famille TGFβ étaient
fortement engagées dans l'induction du mésoderme. Dans cette famille, on retrouve un très grand
24
nombre de molécules : c'est par exemple le cas des activines (sous forme de dimère), de nodal, de
Vg1 et des molécules de la sous-famille des BMP (Bone morphogenetic protein).

Par exemple, l'activine et Vg1 sont capables de donner du mésoderme dorsal ou ventral selon
leur concentration quand on les injecte à des stades précoces du développement embryonnaire. De
plus, on a pu connaître le devenir des cellules animales par l'analyse quelques heures après l'injection
grâce à l'étude de l'expression de certains gènes caractéristiques. Ainsi, le gène goosecoïd gsc
s'exprime exclusivement au niveau de l'organisateur Spemann, que ce soit chez les amphibiens, les
Oiseaux ou les Mammifères. Cela permet d'éviter de tester fonctionnellement le mésoderme afin de
vérifier ses capacités organisatrices.
On voit que le devenir du mésoderme est différent selon la concentration de l'activine et Vg1 (à
faible concentration, on obtient du mésoderme dorsal), on a supposé que l'activine était un
morphogène. Cela suggère donc que l'on peut avoir simplement un gradient de molécules au sein de
la blastula, et qui expliquerait l'induction.

En réalité, Vg1 est réparti de manière uniforme dans la calotte végétative de l'embryon (on a
fait des test par hybridation in situ), de même que l'activine. C'est donc que ces 2 molécules ne sont
pas des morphogènes. Ces molécules agissent, elles existent bien in vivo, mais elles sont présentes
de manière symétrique et ne peuvent expliquer à elles seules l'induction de l'organisateur.
Vg1 et activine sont des ligands solubles qu peuvent diffuser vers leurs récepteurs, et la
formation de ce complexe permet la déclenchement d'une voie de transduction. Les récepteurs sont
de nature sérine-thréonine kinase : la fixation du ligand entraîne leur dimérisation, puis la voie de
25
transduction qui est déclenchée assure à terme l'expression de gènes caractéristiques du mésoderme.
Si on fait exprimer aux cellules de la calotte animale des récepteurs mutés (le domaine intracellulaire
est ronqué), alors la fixation du ligand n'entraîne aucun signal et on n'aura aucune expression
génique spécifique. Ce type d'expérience utilise des formes dominantes négatives : même;si les
protéines fonctionnelles sont présentes dans la cellules, leur action est toujours cachée par l'action
des protéines mutées.

On injecte donc de l'ARNm codant pour la forme tronquée du récepteur au stade 2 cellules : il
sera exprimé essentiellement sur la calotte animale. On va regarder si le développements est normal
lorsque la voie de transduction normalement lancée par l'activine et Vg1 est bloquée. On voit alors
que l'embryon est ventralisé : c'est donc bien que ces 2 molécules sont impliquées dans la mise en
place de l'axe DV.

On pense que Vg1 est une molécule d'origine maternelle qui a un rôle essentiel dans la mise en
place de cet axe, et elle constituerait le signal 1 ou 2 du modèle à 3 signaux de Nieuwkoop.

• Le rôle des molécules de la voie Wnt


On a vu que lorsque l'on bloque la rotation corticale de l'œuf après la pénétration du
spermatozoïde, on entraîne la formation d'un embryon ventralisé. Or, les UV ne modifient pas
l'organisation des molécules comme Vg1, donc c'est que d'autres types de molécules interviennent.
Ainsi, la molécule Wnt, apparentée à Wingless de la drosophile, a été largement étudiée. Le
problème est que l'on n'a pas encore réussi à la purifier, donc on doit toujours travailler sur à partir
de l'ARNm. La molécule Wnt est un proto-oncogène dérivé de la protéine viral Int…
26
Wnt possède un récepteur appelé frizzled, et la voie de transduction qui est déclenchée par la
fixation de Wnt fait intervenir la β-caténine. En temps normal, la β-caténine est reliée à de
nombreuses molécules : la GSK3 (Glycogène synthase kinase) qui vient phosphoryler la β-caténine,
l'axine, l'APC… Lorsque Wnt se fixe sur son récepteur, GSK3 est inhibée, mais on ne sait pas
encore comment : on pense que la protéine Dsh (disshevelled) intervient. Grâce à cela, la β-caténine
est libérée et peut alors entraîner l'expression de certains gènes.

N'importe lequel de ces acteurs peut provoquer la duplication parfaite des axes si on les injecte
sous forme d'ARNm ou de protéines côté ventral. De la même manière, si on ajoute des formes
dominantes négatives de ces molécules, on peut bloquer la formation de l'axe DV normal : c'est donc
que cette voie de transduction est engagée dans l'induction du mésoderme.

Cependant, si on injecte côté dorsal un dominant négatif de Wnt, cela n'empêche pas la
formation d'un embryon avec un axe DV normal. On obtient le même résultat avec une forme
dominante négative de Dsh, mais le résultat contraire pour GSK3. C'est donc bien que la voie de
transduction de Wnt est déclenchée, mais pas par son ligand naturel…
On a alors tenté d'expliquer ces données. Suite à la rotation corticale, un facteur à activité
dorsalisante passe côté dorsal et inhibe GSK3 : cela permet de stabiliser l'activité de la β-caténine.
On ne connaît pas encore la nature de ce facteur dorsalisant, mais c'est sûrement lui que l'on a mis en
évidence dans les expériences où on bloquait la rotation corticale par les UV…

27
On a alors pu établir un nouveau modèle : Vg1 est réparti de manière homogène, alors que la
β-caténine se trouve dans les noyaux des blastomères les plus dorsaux. C'est cette combinaison qui
permet de distinguer une zone dorsale et végétative qui serait le centre de Nieuwkoop, alors que les
cellules au-dessus seraient l'organisateur de Spemann.

Il existe cependant un autre acteur, le Xnr (Xenopus nodal related) : c'est une protéine
zygotique et on a constaté que l'injection d'un inhibiteur de nodal dans un embryon empêche
l'induction de l'organisateur. En plus, on a montré in vitro que la présence de la β-caténine et de Vg1
dans des blastomères entraîne l'expression de Xnr…
En fait, la combinaison de la β-caténine et de Vg1 dans le domaine dorsal permet une
expression plus importante de nodal que dans les domaines ventraux et intermédiaire. Ce serait
ensuite nodal qui serait à l'origine de l'induction de l'organisateur. On retrouve le modèle à 3 signaux
de Nieuwkoop, mais il a été complété.

A l'opposé, la protéine BMP4 est répartie de manière homogène dans tout l'embryon, sauf au
niveau de l'organisateur : elle permettrait l'induction du mésoderme ventral… Pour résumer, on a 3
types d'interactions qui se produisent :
- la présence de Vg1 et de la β-caténine entraîne une expression importante de Xnr, ce qui
assure la différenciation de l'organisateur
- la présence de Vg1 seul entraîne une expression faible de Xnr, ce qui provoque la
différenciation du mésoderme latéral
- la présence de BMP4 entraîne la différenciation du mésoderme ventral.

d) Les molécules impliquées dans l'activité de l'organisateur de Spemann


L'activité de l'organisateur de Spemann est principalement due à chordine (équivalent de sog
chez la drosophile) et noggine, qui inhibent la protéine BMP4. On a vu dans les expériences de
Spemann et Mangold que l'organisateur greffé de manière ectopique a une fonction dorsalisante : il

28
transforme le devenir des tissus a priori ventraux (l'ectoderme épidermique est transformé en
neurectoderme, le mésoderme latéral en corde).
L'organisateur doit certainement synthétiser des molécules très particulières : c'est par exemple
le cas de goosecoïd, qui est un facteur de transcription. La synthèse de gsc entraînerait l'expression
de facteurs diffusibles responsables de la dorsalisation. C'est par exemple le cas de noggine et de
chordine, qui sont induites à la suite de la signalisation de type Wnt, et quoi sont donc des produits
du génome zygotique.
Dès que la gastrulation commence, la lèvre dorsale du blastopore exprime la chordine. Quand
la gastrulation est étendue, le domaine d'expression de la chordine s'étend, et à la fin, son domaine
d'expression concorde parfaitement avec la future plaque neurale. Il faut savoir que le domaine
d'expression de noggine est très semblable…

A priori, ce protéines devraient avoir une fonction dorsalisante : pour montrer cela, on découpe
la zone marginale ventrale et on la met en culture en présence de chordine ou de noggine. On
s'attend à obtenir du mésoderme intermédiaire et donc du muscle, et c'est effectivement ce qu'on
trouve.

De la même manière, une calotte animale mise en culture avec les 2 facteurs donne du
neurectoderme (alors que la calotte animale seule donne de l'épiderme). C'est donc bien que chordine
et noggine sont des facteurs dorsalisants, qui convertissent l'ectoderme et le mésoderme n structures
dorsales.
On a recherché activement les récepteurs de noggine et chordine, et donc les voies de
transduction déclenchées. En effet, on pensait que les signaux émis depuis la lèvre dorsale du
blastopore permettaient la différenciation de l'ectoderme en neurectoderme, puisque l'épiblaste
donne du neurectoderme côté dorsal : on supposait que la transformation en tissu neural était active.

29
Le problème est que l'on n'a jamais trouvé de récepteurs à noggine et chordine, puisqu'ils
n'existent pas. Par contre, BMP4 est réparti de manière homogène dans la blastula, mais dès que la
gastrulation commence, il est exclus de la zone où la plaque neurale va se développer. Si on fait
exprimer côté ventral des formes dominantes négatives des récepteurs à BMP4, alors on voit que l'on
a dorsalisation de l'embryon, ou bien duplication de l'axe DV…

A l'opposé, si on ajoute un excès d'ARNm de BMP4 côté dorsal, alors on obtient un embryon
ventralisé : c'est donc que BMP4 est capable de ventraliser un embryon s'il n'est pas inhibé, et qu'elle
a un rôle dans la mise en place de l'axe DV…
On sait qu'une calotte animale mise en culture seule donne systématiquement de l'épiderme.
Par contre, si on dissocie les cellules et qu'on les cultive, alors on obtient du neurectoderme. Si on
ajoute du BMP4 à cette culture de cellules dissociées, alors on obtient de nouveau de l'épiderme.

A partir de ces données, on a dû reconsidérer l'induction neural comme un système passif et


non plus actif : ce serait BMP4 qui airait pour différencier l'ectoderme en épiderme.

Le rôle de chordine et noggine est simplement de se lier à BMP4 : cette molécule est donc
séquestrée et son activité est limitée à la zone ventrale. Cela permet donc la différenciation par
défaut de l'ectoderme en neurectoderme côté dorsal. En fait, la dissociation des cellules de la calotte
animale revient à diluer à outrance le BMP4, ce qui bloque son action. Cette dernière ne sera
restaurée que par l'ajout de BMP4 exogène. On a donc établi un nouveau modèle qui prend en
compte ces nouvelles données.

30
Ceci dit, ce modèle s'applique très bien pour l'Amphibien, peut-être moins pour les autre
Vertébrés : chez les Oiseaux et les Mammifères, le neurectoderme se différencie bien en l'absence de
BMP4, mais c'est peut-être la stratégie pour l'éliminer qui est différente.

Mis à part noggine, on connaît des équivalents de toutes les molécules engagées dans
l'induction neural chez la drosophile : on peut donc essayer de comparer les 2 systèmes de
différenciation de l'axe DV. Dans les 2 situations, on retrouve des molécules diffusibles (sog et
31
chordine) qui se lient physiquement à d'autres
molécules (dpp = décapentaplegic et BMP4) dans le
but de bloquer leur action. La limite entre le
domaine dorsal et ventral se fait donc par un
"combat" entre 2 molécules.
Cependant, si on compare réellement ces 2
organismes, on voit que l'axe DV est inversé, et que
le système nerveux est ventrale ou dorsale. Pour
vérifier si les molécules avaient le même rôle, on les
a utilisé de manière croisée : c'est alors qu'on s'est
rendu compte que dpp exprimée de manière dorsale
chez le Xénope conduit à la ventralisation de
l'embryon…
Pour cela, on a supposé que l'on a eu inversion
de axes pendant l'évolution, mais que les molécules
ont gardé la même fonction. Par contre, cette
rotation a nécessité que la bouche soit perce à un
endroit différent, afin que sa fonction soit assurée
(et c'est la bouche qui détermine la face ventrale…).

2) La mise en place de l'axe antéro-postérieur

Dans les expériences de Spemann et Mangold, la greffe de la lèvre dorsale du blastopore côté
ventral permettait l'obtention d'embryons siamois : cela signifie que l'on a restauration à ma fois d'un
axe DV et d'un axe AP → on peut donc penser que les 2 systèmes sont liés, mais que l'axe AP se met
en place plus tardivement…

a) Les expériences anciennes


• Les expériences de Spemann et Mangold.
Spemann a prélevé une lèvre dorsale et il l'a piqué dans le blastocœle côté ventral (c'est plus
facile qu'une greffe), et ce à différents stades de la gastrulation. En effet, la lèvre dorsale n'est pas
une entité fixe et n'est pas toujours constituée par les mêmes cellules : on peut donc avoir une action
différente. Ainsi, une jeune lèvre dorsale permet la formation d'une 2e tête mais cet embryon siamois
n'aura ni tronc ni queue. A l'opposé, une lèvre dorsale plus âgée permet la formation d'un embryon
siamois constitué uniquement d'un tronc ou d'une queue.

32
Spemann a alors supposé qu'il existe 2 organisateurs, un pour la tête et un pour la queue. C'st
alors que Mangold a réalisé une autre expérience pour montrer que le mésendoderme envoie des
signaux différents. Il prélève le mésendoderme d'une gastrula à différents niveaux et il le greffe dans
le blastocœle d'une blastula âgée. On voit alors que le mésendoderme le plus animal (le plus
antérieur) forme la structure la plus antérieure du siamois, alors que le mésendoderme le plus
postérieur forme les structures plus postérieurs. Le mésendoderme serait donc composé de plusieurs
régions, dont le rôle serait également différent.

• Les expériences de Nieuwkoop


Nieuwkoop a implanté de l'ectoderme encore indifférencié (il a les 2 potentialités) d'une
blastula sur différents sites d'une jeune neurula, de la zone antérieure vers la zone postérieure. Il a
ensuite prélevé les "crêtes" qu'il avait implanté et a analysé la nature des cellules.

Il a alors remarqué que l'ectoderme naïf implanté au pôle antérieur a donné du neuroderme
antérieur, alors que l'ectoderme un peu plus postérieur a donné du neuroderme moyen. On a donc
une différenciation qui correspond à l'emplacement du greffon, au moins dans la zone proximale. En
effet, on observe que l'extrémité distale des crêtes a subi une différenciation qui correspond à des
structures toujours plus antérieures.
Nieuwkoop a alors établi un modèle où il montre que l'on peut avoir induction dans le sens du
tissu, puisque le signal s'est transmis jusqu'en haut du greffon. De plus, on trouve toujours des
structures plus antérieures dans la zone distale : il a donc supposé que l'on a une induction en 2
temps. On aurait en 1e des signaux antérieurs, puis des signaux postérieurs viennent parachever la
différenciation.
Nieuwkoop a donc proposé un modèle à 2 signaux : il suppose finalement que le mésoderme
antérieur active l'ectoderme alors que le mésoderme postérieur assure la différenciation des
structures les plus postérieures.

33
b) L'importance des anti-BMP et des anti-Wnt
A partir des données moléculaires plus récentes, on a pu renouveler le même type
d'expériences que celles menées par Spemann ou Nieuwkoop. Si on injecte un anti-BMP dans la face
ventrale, alors on obtient un siamois composé d'un tronc sans tête. Si on injecte des anti-noggine ou
anti-chordine (l'action de BMP n'est donc plus bloquée), alors on obtient un siamois composé
seulement d'une tête.
De la même manière, si on injecte la molécule Wnt ou la β-caténine avant la transition
blastuléenne, on obtient un embryon complet, mais si l'injection se fait après la transition, alors on
n'obtient que des troncs… Finalement, pour que les embryons aient 2 têtes, on doit obligatoirement
bloquer l'action des BMP et l'activité de Wnt au moment de la transition blastuléenne.
L'inhibition de la BMP va se faire directement par les molécules de type chordine et noggine,
mais l'inhibition de Wnt fait intervenir 3 types de molécules :
- le gène dkk (dickkopf) mais dans ce cas, un anti-BMP est également nécessaire pour que les
embryons aient une tête : en effet, si on injecte au stade 4 cellules une forme dominante négative du
récepteur à BMP4 et le dkk, alors on observe la formation d'une tête (A). Par contre, si on empêche
dkk d'agir, alors malgré l'anti-BMP4, on n'observe pas de tête (B).

- la molécule cerberus intervient également : elle va bloquer Wnt en se liant physiquement à


elle. De plus, cerberus est capable de bloquer BMP4 : c'est donc une molécule plus efficace que dkk.
- la molécule frizbee est une petite molécule soluble qui mime le récepteur frizzled, et qui
capte donc Wnt dans l'espace intercellulaire (on a une compétition).
Ces 3 types de molécules interviennent toutes dans l'organisateur précoce, qui est destiné à se
retrouver au-dessus de la tête en fin de gastrulation. Grâce à ces expériences, on a pu établir un
nouveau modèle de Nieuwkoop : les 2 phases qu'il avait observé se traduisent de manière
moléculaire par la présence d'anti-Wnt et d'anti-BMP. L'absence d'anti-Wnt dans le 2e signal permet
le rétablissement d'un gradient de Wnt, ce qui assure la différenciation postérieure.

34
c) Les gènes hox et le cerveau postérieur
Une fois l'axe AP général de l'animal installé, un certain nombre de molécules vont intervenir
sur les différents organes, afin de peaufiner la polarité. C'est ainsi le cas des gènes hox, qui
interviennent tardivement : ils sont regroupés dans 4 orthologues, mais ils codent tous pour des
facteurs de transcription avec des homéodomaines.
Chez la drosophile, on compte 8 gènes hom : ils se trouvent tous le même chromosome, et leur
disposition reflète leur fonction et leur ordre d'expression. Chez les Vertébrés, on compte 39 gènes
hox : ils se disposent en 13 paralogues A, B, C et D pour chaque orthologue, mais leur organisation
reflète là encore leur action. Ainsi, les gènes situés en 3' ont un domaine d'expression antérieur alors
que les gènes en 5' sont postérieurs.
Les domaines d'expression des gènes hoxB commencent toujours dans la partie postérieure du
SNC, mais ils s'étendent plus ou moins vers la partie antérieure. Ces limitent définissent des
segments au niveau du cerveau postérieur (= rhombencéphale) : on appelle ces segments des
rhombomères, et ils ne seront véritablement visibles que pendant 3 ou 4 jours de développement
chez la souris.

Chaque rhombomère est caractérisé par une combinaison particulière de gènes hox, et cela
permet une différenciation complexe en structures nerveuses, sans que l'on n'ait jamais aucune
migration, aucune interactions entre différents rhombomères.
Le gène hoxB2 est le gène qui s'exprime le plus antérieurement chez la souris comme chez le
poulet : la spécificité des régions les plus antérieure du cerveau vont donc nécessiter l'intervention
d'autres types de gènes.

d) Les gènes Otx et le cerveau antérieur.


Il existe 2 paralogues pour les gènes Otx, appelés Otx1 et Otx2, qui codent pour des facteurs de
transcription à homéodomaines. Leur équivalent chez la drosophile correspondent au gène Otd
(orthodenticle). Otx2 est le gène à homéoboîte exprimé le plus précocement : il débute en effet avant
même la gastrulation, et il caractérise avec Otx1 la zone antérieure du cerveau.

35
Avant le début de la gastrulation, aucun gène typique des axes (goosecoïd, hox…) ne
s'exprime: on peut donc difficilement orienter l'embryon. Cependant, des événement précoces ont
lieu, et notamment le déplacement des cellules de l'endoderme viscéral distal.
Le sens de leur déplacement indique l'emplacement de la future tête, et ces cellules se mettent
assez rapidement à exprimer des gènes particuliers : goosecoïd (il n'est donc pas spécifique de
l'organisateur de Spemann), Otx2, dkk et EVA. Ces signaux vont ensuite passer vers l'épiblaste sous-
jacent et cela entraîne une polarisation, une organisation de l'épiblaste. Si on enlève l'endoderme
viscéral, alors l'épiblaste sera incapable de se différencier…
De manière à peu près concomitante, on a formation de la ligne primitive dans la zone
postérieure de l'embryon : on pense que les tissus extra-embryonnaires sont essentiels à
l'organisation de l'embryon, et l'expression des 4 gènes depuis l'endoderme viscéral est essentielle.
Ainsi, une souris KO pour Otx2 présente une tête incomplète (il manque toute la partie antérieure,
jusqu'au 2e rhombomère, ce qui correspond parfaitement au domaine d'expression d'Otx2).

On sait que les cellules ES peuvent être récupérées depuis les blastocystes, et si on les réinsère
dans un autre blastocyste, on peut obtenir des souris chimériques. On peut tout à fait réaliser des
manipulations génétiques sur ces cellules ES (recombinaisons, KO…), et ainsi suivre leur devenir.
C'est ainsi qu'on a remarqué qu'une majeure partie de l'embryon était formé par les cellules ES : c'est
donc que les cellules ES ne sont pas totipotentes puisqu'elle ne donnent pas d'annexes
embryonnaires.
Si on modifie les cellules ES pour les rendre KO pour Otx2, alors on pourra former un
embryon KO et des annexes embryonnaires sauvages. A l'opposé, on peut inclure des cellules ES
sauvages dans un blastocyste KO pour Otx2, auquel cas on aura uniquement des annexes mutées.
Dans les 2 cas, on obtient un embryon sans tête, ce qui prouve que l'expression de Otx2 est
nécessaire à la fois depuis l'endoderme viscéral et depuis l'embryon lui-même. Cela permet
également de montrer que les annexes embryonnaires ont un rôle essentiel pour l'embryon, outre les
fonctions de nutrition.

3) La mise en place de l'axe droite-gauche

L'existence de cet axe a toujours étonné et intrigué les chercheurs : ainsi, on s'est rendu compte
qu'un certain nombre d'organes sont asymétriques par rapport à cet axe (foie, cœur, pancréas, sens de
l'enroulement de l'intestin…). De plus, cet axe DG se met en place tardivement, bien après les axes
AP et DV.
Chez les hommes et les souris, il existe une mutation appelée situs inversus : les organes sont
alors placés du côté inverse à ce que l'on a l'habitude de voir. Ce sont des études récentes sur le
poulet et les différents organismes modèles qui ont permis de montrer que certains gènes
s'exprimaient de manière asymétrique et précoce, mais aussi que les cellules ciliées du nœud de
Hensen semblaient avoir un rôle essentiel.

36
a) Asymétrie des organes
Il existe des poissons, et notamment les flétans, qui présentent leurs 2 yeux du même côté :
c'est donc qu'au cours de la vie embryonnaire on a des remaniement internes, mais on ne connaît pas
encore les mécanismes moléculaires qui sous-tendent ce phénomène.
Chez un têtard, l'intestin doit s'enrouler dans le SIAM, mais on peut provoquer
expérimentalement un situs partiel ou total, ce qui n'a aucune conséquence sur le développement de
l'animal. On peut également provoquer des hétérotaxies : seul l'intestin sera à l'envers, alors que tous
les autres organes seront bien placés : cela provoque des pathologies beaucoup plus graves, car le
système sanguin ne pourra pas concorder parfaitement avec les organes… On peut enfin provoquer
des isoméries, auquel cas les organes deviennent tous symétriques par rapport à l'axe DG (le cœur va
notamment s'arrondir).

b) Modèle théorique de l'établissement de l'axe DG


C'est Wolpert en 1969 qui a essayé d'établir ce modèle, afin de tenter d'expliquer la mise en
place de l'axe DG. Il a imaginer une protéine asymétrique (par exemple F) organisée dans chaque
cellule de la même manière : cette protéine aurait la capacité de transporter de manière polarisée
d'autres molécules. Vu que cette protéine est organisée de la même manière dans toutes les cellules,
on aura accumulation de molécules de manière asymétrique.

Cependant, cela ne suffit pas pour expliquer la mise en place de l'axe DG puisque toutes les
cellules sont semblables : pour cela, il faut que l'on ait mise en place d'une orientation par rapport à
la ligne médiane. Pour cela, Wolpert a fait intervenir une autre molécule qui s'accumule au niveau du
pôle le plus éloigné de la ligne primitive de chaque cellule. Ce serait alors la combinatoire de ces 2
facteurs qui permettrait une asymétrie DG, et qui provoquerait une différence de croissance entre les
2 côtés…

c) Les mutations affectant le situs


On connaît actuellement 2 mutations qui affectent le situs chez la souris :
- la mutation iv (inversus viscerum) : dans 50% des cas, on btient des individus normaux
mais dans 50% des cas, on obtient des individus avec des inversions totales ou partielles.
- la mutation inv (inversion of embryonic turning) : lors du développement embryonnaire, on
assiste toujours à une rotation de l'embryon dans les annexes embryonnaires, et dans le cas de cette
mutation, la rotation se fait dans le sens contraire à ce que l'on observe d'habitude. Cela conduit à
l'obtention de 100% d'individus avec des inversions.
Chez l'homme, on connaît actuellement une seule mutation qui affecte le situs : c'est le
syndrome de Kartagener. Les individus atteints montrent des phénotypes comparables à ceux
observés dans le cas de la mutation iv. On a pu montrer que ce syndrome s'accompagne toujours d'un
problème au niveau des bronches, car les cils de toutes les cellules ciliées de l'organisme sont
immobiles.

d) Asymétrie précoce de l'expression génique


Il y a 10 ans, on a découvert que l'activine ainsi que son récepteur avaient une expression
asymétrique, et ce dès le début de la formation de la ligne primitive chez le poulet. L'activine a la
capacité d'inhiber l'expression de Shh : or, l'activine s'exprime majoritairement à droite de l'embryon.
Cela signifie donc que l'on n'aura pas de Shh dans la partie droite de l'embryon.
37
Par contre, dans la partie gauche de l'embryon, Shh peut s'exprimer librement : il peut alors
activer l'expression plus tardive de cNR1 (équivalent de Nodal) : on voit donc que l'on a toute une
séquence d'évènements qui mènent à une expression asymétrique autour de noue de Hensen.
L'expression de Nodal va entraîner encre plus tard l'expression de Caronte (molécule de la
famille des anti-BMP), puis de Pitx, qui est un facteur de transcription. A partir de tous ces gènes
exprimés uniquement du côté gauche, on pourra avoir développement d'organes asymétriques, mais
on ne connaît pas encore le lien direct entre l'expression génique et l'organogenèse.
Cependant, chez la souris et l'amphibien, Shh ne semble pas intervenir de manière
asymétrique: ainsi, chez l'amphibien, c'est Vg1 qui semble intervenir à la place de l'activine. En fait,
il existe des variantes selon les espèces, mais on retrouve toujours 3 éléments qui semblent donc
avoir été conservés : c'est le cas de nodal, de Caronte et de Pitx. Par des expériences d'hybridation in
situ, on a en effet pu montrer que leur expression est très comparable chez l'embryon de poulet et
chez les autres espèces.

38
On est capable de modifier les domaines d'expression de ces différents gènes par des implants
ectopiques de cellules exprimant Shh. On voit alors que cela provoque une expression ectopique
notamment de nodal (on le retrouve donc à droite) : les embryons montrent alors des inversions de
polarité dans leur développement tardif.

Dans le cas des mutants iv, on a montré que l'expression de nodal était très variable : soit il est
exprimé normalement à gauche, soit il est exprimé à droite, soit on le retrouve des 2 côtés. Cela
explique donc l'apparition de phénotypes différents, allant du phénotype sauvage au phénotype
"inversion totale".

e) Rôle des cils du nœud de Hensen en tant que "briseurs de symétrie"


Il y a 3 ou 4 ans, une équipe de Japonais a essayé d'expliquer le syndrome de Kartagener.
Ainsi, ils ont observé les cellules du nœud de Hensen au microscope électronique et ils se sont ainsi
rendu compte que les cellules portaient un cil assez particulier (on ne retrouve pas de doublet central
au centre du tubule).
Après cette observations, ils ont isolé des "cylindres" de souris et on réalisé des cultures in
vitro des cellules ciliées. Afin de matérialiser le mouvement des cils, ils ont placé dans la culture
liquide des billes de polystyrène : c'est ainsi qu'ils se sont aperçu que le battement des cils entraîne
toujours l'accumulation des billes à gauche. Par contre, ces mêmes cellules ciliées extraites d'un
embryon iv ne montrent pas les mêmes résultats : ainsi, les cils ne semblent pas battre, et les billes
restent dans leur disposition initiale → on retrouve l'un des phénotypes du syndrome de
Kartagener…
Pour cela, on a établi un modèle faisant intervenir le mouvement : ce serait les cellules ciliées
du nœud de Hensen qui entraîneraient l'expression asymétrique de molécules de signalisation, et
donc la mise en place de l'axe DG…
Chez des souris KO pour le gène de la kinésine KIF3, on observe systématiquement un situs :
or, cette kinésine est exprimée spécifiquement dans les cellules ciliées du nœud de Hensen… On voit
donc là encore que le battement des cils, provoqué entre autre par la kinésine, a une importance
considérable. On a pu montrer que ces cils existent également au niveau du nœud de Hensen du
poulet, mais on n'a pas encore prouvé leur rôle dans cet organisme.
D'autre part, le gène iv responsable de la mutation iv code pour une protéine appelée "left-right
dynein", exprimée spécifiquement dans les cellules ciliées du nœud de Hensen. L'absence de cette
protéine conduit à la situation où les cils ne battent pas du tout : on a donc une très bonne corrélation
entre le génotype et le phénotype. En revanche, le gène inv code pour une protéine cytoplasmique
appelée inversine, et son rôle n'a pas été encore clairement établi. On sait que dans ce type de
mutation les cils battent de manière désordonnée, mais on ne connaît pas encore le lien entre
génotype et phénotype.

39
f) Situs et siamois
Les 1e siamois qui ont été recensés sont nés en Thaïlande (appelée alors Siam) : ils étaient
reliés par le thorax, et ils ont pu avoir une descendance → c'est donc que dans ce cas le métabolisme
n'est absolument pas perturbé… Par des études plus récentes, on a pu montrer que chez la plupart
des siamois reliés par le thorax, le jumeau de droite présente des problèmes de situs. On a alors établi
un modèle pour expliquer de phénomène, et il a été prouvé expérimentalement chez le poulet.
Les siamois auraient pour origine 2 lignes primitives très porches, et chacune présente une
expression asymétrique de l'activine. Cependant, du fait de la proximité des 2 lignes, l'activine
synthétisée à droite par l'embryon de gauche peut inhiber l'expression de Shh à gauche de l'embryon
de droite : l'embryon de droite va donc se développer en l'absence de nodal… Chez le poulet, on a pu
montrer par des hybridations in situ que nodal n'était effectivement exprimé qu'à gauche de
l'embryon de gauche…

Ceci dit, dans ce modèle, on suppose que l'activine peut migrer vers l'autre embryon : on
pourrait donc imaginer qu'elle pourrait migrer de l'autre côté de la ligne primitive (la distance est
aussi faible). Pourtant, cela ne s'observe jamais : on a donc supposé que l'on a synthèse de molécules
particulières au niveau de la ligne primitive, qui empêcheraient le transfert de l'activité inhibitrice de
l'activine de l'autre côté de la ligne médiane…

V) La neurulation et le développement du système nerveux central

La neurulation est un processus au cours duquel on observe de très nombreux mouvements


cellulaires. On a l'habitude de la découper en plusieurs étapes, et on parle alors de neurulation
primaire et secondaire. Cela mène à la formation du tube neural, mais ce dernier va devoir subir
encore de nombreuses modifications pour former le SNC final. Notamment, le cerveau est une
structure très contournée, et on va donc forcément avoir une phase de multiplication cellulaire
intense…

1) La neurulation primaire et secondaire

a) Description morphologique
Quelque soit le Vertébré que l'on étudie, on peut apercevoir à la fin de la gastrulation des
bourrelets qui délimitent la plaque neurale. Ces événement simultanés permettent le rapprochement
de ces bourrelets, et ces derniers finiront par se souder. Cette soudure commence au niveau du
cerveau moyen, puis elle se transmet à la fois vers le cerveau antérieur et le cerveau postérieur →
c'est un phénomène très rapide chez l'Amphibien.

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Chez le poulet, la neurulation est beaucoup moins rapide, et elle ne se fait pas de manière
simultanée dans toutes les zones de l'embryon. Ainsi, à un moment donné, le tube neural est
quasiment fermé dans la partie antérieure alors que la zone la plus caudale de l'embryon est encore
en gastrulation → sur un même embryon, on peut donc étudier à la fois la gastrulation et tous les
phénomènes conduisant à la fermeture du tube neural.

Chez l'homme, la plaque neurale est constituée par des cellules relativement aplaties, et la
neurulation va se faire à plat (à la différence de la souris). La soudure des 2 bourrelets va se faire à
partir de a soudure entre cerveau et moelle épinière, et elle va se transmettre vers l'avant et l'arrière.
Cependant, on a pu remarqué que l'on a plusieurs points de départ de cette soudure : cela explique

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que l'on peut avoir des défauts de fermeture très localisés… A la fin de la neurulation, on ne trouvera
plus que 2 petits neuropores à chaque extrémité du tube neural.

Au cours de la neurulation, on passe d'une structure quasiment plane à une structure circulaire :
cette transition se fait très rapidement et on ne connaît pas encore tous les éléments pour l'expliquer.
De plus, la plaque neural est apparemment formée d'un seul type cellulaire, mais très rapidement lors
de la soudure, on a apparition de 3 structures très différentes, et ce de manière simultanée : crête
neurale, tube neural et épiderme…

b) Description cellulaire
Lors de la neurulation, on peut observer un allongement des cellules au niveau du neuro-
épithélium (= plaque neural), alors que l'épiderme plus latéral est constitué de cellules qui restent
plus ou moins cubiques.

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On pense que la fermeture du tube neural serait en partie assurée par une modification de la
forme des cellules par constriction apicale. Cependant, toutes les cellules de la plaque ne subissent
pas cette constriction : on ne l'observer qu'au niveau de 3 charnières.

On pense que ce phénomène n'est pas suffisant : ainsi, les cellules de l'épiderme plus latéral
contribueraient également au rapprochement, grâce à une cohésion très forte entre les 2 types
d'épiderme…
Enfin, on a pu montrer que l'on a des proliférations cellulaires dans le sens de l'axe AP : si on
ajoute à cela une certaine élongation des cellules au fond du tube, alors cela favoriserait le
creusement du tube, et donc le rapprochement des crêtes.
Chez les Poissons, on ne peut observer aucune neurulation comparable : en effet, la plaque
neural va s'épaissir en forme de quille, puis en forme de cylindre. Au cours de ce phénomène, on va
de plus assister à la soudure des 2 crêtes formées par l'épiderme latéral, mais là encore on ne connaît
pas tous les mécanismes. A partir de la masse formée depuis la plaque neural, on va observer un
phénomène de cavitation : on assiste à une mort des cellules centrales et sécrétion de molécules
extracellulaires dans cette cavité, ce qui expliquerait le creusement secondaire du tube.

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Chez les Mammifères, la neurulation primaire que l'on a vu ne se déroule que jusqu'à la 30e
somite (au niveau des lombaires) : au-delà, on assiste à une neurulation secondaire, très comparable
à ce que l'on observe chez les Poissons. Cela signifie que dans la régions sacro-iliaque, on a
formation d'une masse compacte de cellule puis cavitation qui permet le creusement du tube neural.
Cette neurulation secondaire est encore très peu connue, et pourtant c'est dans la région sacro-
iliaque que l'on observe le plus d'anomalies. Ainsi, il existe plusieurs types de spina bifida, qui se
traduisent de différentes manières :
- formation de kystes remplis de moelle épinière
- formation de kystes remplis de liquide céphalo-rachidien
- absence de fermeture de l'arc vertébral : la moelle épinière est donc mises à nue…
Ces différents syndromes affectent près de 10% de la population, mais cela n'a aucune
conséquence sur le fonctionnement du système nerveux. Le plus souvent, on ne repère cette mutation
que par la présence d'une petite touffe de poils ou d'une zone pigmentée dans la zone la plus caudale
de la colonne vertébrale.

2) La formation des vésicules du cerveau

A partir du tube neural antérieur, on va avoir formation de 3 vésicules : cela fait appel à une
prolifération cellulaire différentielle entre les zones larges et les zones plus étroites permettant de
délimiter les différentes vésicules. De plus, une fois cette prolifération avancée, on va assister au
remplissage des cavités ainsi formées par du liquide céphalo-rachidien : ce dernier exerce une
certaine pression du les tissus, ce qui permet l'écartement des parois…

A partir de ces 3 vésicules primaires appelées prosencéphale, mésencéphale et


rhombencéphale, on passe presque imperceptiblement à une cerveau à 5 vésicules secondaires
(télencéphale, diencéphale, mésencéphale, métencéphale et myélencéphale). Ces différentes
vésicules vont ensuite se différencier pour former toutes les structures sensorielles mais aussi toutes
les zones du cerveau : chez les Primates, on assiste à un hyper-développement du cortex cérébral,
cad du télencéphale.

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Le creusement de ces vésicules antérieure nécessite la présence de liquide céphalo-rachidien
sous pression : cette pression doit être relativement élevée. On ne peut l'atteindre que si tout le
liquide du tube neural est concentré dans les vésicules : cela signifie donc que le tube de la moelle
épinière doit être obstrué… D'ailleurs, si on empêche l'obstruction de la moelle épinière, alors on
empêche dans le même temps la vésiculisation.

3) La prolifération des cellules neuro-épithéliales

Au cours de la différenciation des organes du cerveau, on va assister à une intense prolifération


cellulaire : en effet, on passe d'un neuro-épithélium constitué par une monocouche cellulaire refermé
en tube à des structures nerveuses complexes formées par de très nombreuses couches cellulaires.
Lorsqu'on regarde le neuro-épithélium en microscopie électronique, on n'a pas l'impression de
voir une monocouche : on a plutôt l'impression de voir un épithélium pseudo-stratifié. En effet, le
corps cellulaire des cellules se trouve à un niveau variable, et seuls les bras de cytoplasme font la
jonction entre le ventricule et la zone marginale.

En fait, on a pu montrer que le niveau du corps cellulaire dans le neuro-épithélium illustre


parfaitement l'état du cycle cellulaire dans lequel la cellule se trouve. Ainsi, toutes les cellules en
mitose se trouvent vers le ventricule (elles ne sont plus attachées à la zone marginale), mais le corps
cellulaire de ces cellules va ensuite monter puis redescendre pendant l'interphase. Ces mouvements
restent pour l'instant inexpliqués, mais ils semblent spécifiques du neuro-épithélium. Les divisions
sont de plus assez rapides, et cela mène à l'augmentation de la circonférence du tube.

Dans la population de cellules neuro-épithéliales, on peut observer des cellules souches : elles
peuvent subir des disions symétriques, ce qui permet d'augmenter le nombre de cellules. Pendant
cette phase de prolifération, on a élaboration de tous les futurs types de cellules neurales et gliales.
Au bout d'un moment, on a apparition de plans de clivage horizontaux et non plus radiaires :
les divisions ne sont alors plus égales. Les cellules qui restent côté ventricule sont en fait des cellules
souches, alors que les cellules qui migrent vers la zone marginale se différencieront en neurones (ce
sont donc des neuroblastes).

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Finalement, cela signifie qu'après une phase d'amplification, on a une phase de différenciation,
et ce sont d'ailleurs 2 caractéristiques primordiales. En effet, cela permet de conserver un pool de
cellules non différenciées qui peuvent se diviser d manière symétrique pendant très longtemps, mais
aussi de former des cellules différenciées à partir de divisions asymétriques.
Comment expliquer qu'une seule et même cellule puisse donner 2 cellules très différentes selon
le plan de clivage ?
On peut imaginer que la cellule souche contient une protéine répartie de manière asymétrique
vers le ventricule. Lorsque l'on a des clivages radiaires, les 2 cellules filles vont hériter de cette
protéine et on aura donc 2 cellules identiques. Par contre, lorsque l'on a des clivages tangentiels,
seule l'une des 2 cellule héritera de la protéine : cela explique pourquoi on a formation de cellules
différentes. On a alors recherché une telle protéine : c'est ainsi que l'on a mis en évidence une
protéine de la voie de signalisation de Notch…

De par leur multipotence, les cellules souche sont d'actualité dans les perspectives
thérapeutiques : on utilise ainsi des cellules souche neurales prélevées à partir d'embryons avortés,
pour les réinjecter chez des Parkinsoniens par exemple. Cela permet de contrer la dégénérescence
des neurones dopaminergiques ; avant, on injectait de la L-DOPA, transformée ensuite en dopamine,
mais actuellement, les recherches tendent plutôt vers un remplacement des cellules défectueuses.
Les cellules souche neurales ne donnent pas le même type cellulaire dans le temps : ainsi, les 1e
cellules obtenues sont des neurones. Vers la mi-gestation, les cellules souches vont générer des
astrocytes (cellules gliales), et vers la naissance, ce sont des oligodendrocytes qui sont formés.
On a donc une séquence d'évènements très précis, et il semble qu'elle soit toujours la même,
bien qu'on n'en connaisse pas encre les causes (infime modification de la cellule souche ? signaux
extérieurs ?). Enfin, quelques jours avant la naissance, le prélèvement des cellules souche neurales
devient impossible : on pense qu'elles dégénèrent par apoptose ou bien qu'elles se différencient en
cellules gliales.
Chez l'adulte, il existe cependant 2 zones du cerveau où la neurogenèse continue au-delà de la
naissance : c'est le striatum et l'hippocampe (cerveau antérieur). Cette neurogenèse a d'abord été
observée chez le rat, mais on a également pu la mettre en évidence chez des patients atteints d'un
cancer. En effet, on injecte toujours du BrdU chez ces personnes afin de vérifier la prolifération
anarchique du cancer, et c'est ainsi que l'on a pu repérer des zones du cerveau ayant intégré ce
produit…

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L'hippocampe est une structure engagée dans certains processus de la mémoire, et la
différenciation de cellules nouvellement créées se fait sur place. La prolifération dans l'hippocampe
montre que le souvenir de choses très anciennes va se faire grâce à des neurones qui n'existaient pas
alors… Les cellules formées dans le striatum vont quant à elles migrer dans le bulbe olfactif avant de
s'y différencier.

4) La migration radiale des neuroblastes du cortex cérébral

On a vu que les cellules souches peuvent donner à la fois de nouvelles cellules souches, et des
cellules qui vont se différencier. Selon leur période d'apparition, on aura des neurones ou des cellules
gliales. On a cependant une exception à ce schéma très précis : en effet, l'un des 1e types cellulaires
qui apparaît est la glie radiale. La glie radiale est formée par des cellules dont le corps cellulaire est
plaqué contre la zone ventriculaire, alors qu'un bras cytoplasmique (= prolongement radial) permet
de maintenir un contact avec la zone marginale, quelque soit l'épaisseur du cortex.

On a pu mettre en évidence chez les Primates le rôle de cette glie radiale : en effet, il
semblerait qu'elle servent de guide pour les neuroblastes qui vont ensuite migrer vers la périphérie
du cortex. Les neurones les plus jeunes vont toujours migrer plus loin que les neurones plus âgés : la
migration se fait toujours jusqu'à l'extrémité du prolongement radial, et du fait qu'il s'étend de plus
en plus, on a épaississement du cortex de l'intérieur vers l'extérieur. De plus, toutes les cellules issues
d'une même cellule souche se retrouvent sur une même verticale, mais elles adoptent tout de même:
des fonctions différentes selon leur emplacement dans le cortex.
On a pu montrer ce phénomène par des injections de BrdU, qui marque spécifiquement les
cellules en division, et on analyse ensuite le cerveau par des coupes. Si l'injection de BrdU s'est faite
de manière précoce, alors ce sont les zones les plus proches du ventricule qui sont marquées, alors
que si l'injection s'est fait un peu plus tard, le marquage se rapproche de la zone marginale. Certains
auteurs ont également réaliser des "tranches" de cerveau et ont alors pu observer les migrations de
visu…

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D'après des recherches récentes, on a de bonnes raisons de soupçonner que les cellules de la
glie radiales correspondent aux cellules souches. En effet, ces cellules se divisent sans tenir compte
de leur prolongement cellulaire et elles disparaissent après la naissance, tout comme les cellules
souches…

5) Etablissement du patron dorso-ventral du tube nerveux.

On a évidemment une différenciation AP, puisque le cerveau est bien plus développé que la
moelle épinière, mais on a également une différenciation DV. Le tube nerveux est constitué de
neurones qui s'organisent différemment selon leur fonction : ainsi, les motoneurones se retrouvent
toujours dans la zone ventrale. On peut donc se demander si on a des signaux qui permettent la
différenciation d'une population de neurone ou si une destinée cellulaire existe.

Pour mieux comprendre ces phénomènes, on a réalisé des expériences de greffe et excision. Au
niveau de la moelle épinière, on distingue notamment le plancher, en contact direct avec la corde :
c'est une zone qui ne se différencie jamais. Si on enlève la corde, alors on n'observe plus la
formation du plancher, ni même des motoneurones. A l'opposé, la zone intermédiaire de la moelle
épinière a tendance à s'étendre vers la partie ventrale : tout se passe comme si on avait une absence
d'inhibition ventrale, ce qui permettrait l'extension de la zone intermédiaire.

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On pourrait donc penser que la corde est indispensable à la différenciation à la fois du plancher
et des motoneurones. Pour vérifier cette hypothèse, on réalise une greffe ectopique de la corde à un
stade précoce (lorsque le SN est encore sous forme de plaque). On a alors apparition d'un plancher et
d'une colonne de motoneurones surnuméraires : finalement, on a une ventralisation du la zone
intermédiaire qui aurait normalement dû se développer… On obtient le même résultat si on greffe
non pas une corde mis un plancher surnuméraire.
Finalement, il semblerait que l'on ait un signal depuis la corde ou le plancher et qui induirait la
différenciation des cellules sus-jacentes. On peut tester expérimentalement cette hypothèse : on va
suivre le devenir des différentes régions de la plaque dorsale du tube nerveux. En temps normal, les
motoneurones se différencient à partir de la plaque basale, sous l'influence d'un facteur provenant de
la corde.

On prélève alors la région alaire et on la met en culture en présence de cellules de la corde : on


voit lors que l'on a induction de la différenciation de cellules de plancher ou de motoneurones. Grâce
à ce système expérimental (région alaire +…), on pourra tester différentes molécules, afin de mieux
connaître les mécanismes d'induction.
Par d'autres expériences, on a pu observer par des hybridations in situ que Shh est très
fortement exprimé à la fois dans la corde et le plancher. Cependant, cette expression se fait de
manière chronologique : ainsi, elle intervint 24h plus tard dans le plancher que dans la corde on
aurait donc un relais dans le plancher…
Par le même système que précédemment, on a pu tester le rôle de Shh dans la différenciation
des motoneurones. Ainsi, on a constaté que selon la concentration, on obtient soit des motoneurones
(faible concentration), soit des cellules du plancher (fortes concentrations) : Shh agirait donc comme
un morphogène.

49
On pense en réalité que le gradient de Shh permettrait d'expliquer la différenciation de tous les
neurones qui se retrouvent dans des régions stéréotypées de la moelle épinière. On a en effet pu
induire leur différenciation in vitro en utilisant des concentrations décroissantes de Shh…

VI) La biologie de la crête neurale

1) Matérialisation de la CN à partir du neuro-épithélium

A partir du neuro-épithélium, on va obtenir une structure mésenchymateuse : cela nécessite


donc des processus cellulaires assez particuliers. La CN se matérialise à partir des zones les plus
latérales de la plaque neurale, et au moment de la soudure du tube neural, les cellules vont
progressivement se dissocier pour former cette crête.
La CN est repérable par des hybridations in situ : on utilise un facteur de transcription exprimé
très tôt dans la plaque neurale, à savoir Slug (= limace = équivalent du gène Snail de la drosophile).
Grâce à ce type d'expérience, on a même pu mettre en évidence le décalage temporel de la
neurulation chez le poulet, puisque la zone antérieur présente des migrations de cellules de la plaque
neural, alors que la partie caudale est encore en train de se souder.
Comment peut-on expliquer le passage d'une nature épithéliale à une nature mésenchymateuse?
On sait que dans un épithélium, les cellules sont maintenues entre elles grâce à des CAM, et
notamment grâce à des cadhérines qui s'expriment à ce moment-là. Il existe plusieurs formes de
cadhérines qui interagissent de manière homophilique : N-cadhérine, E-cadhérine… Ainsi, toutes les
cellules de la plaque neurale expriment la N-cadhérine, ce qui permet de maintenir une cohésion
importante de toutes ces cellules.

On a pu étudier le niveau d'expression de la N-cadhérine à des stades d'évolutions différentes


de la CN. C'est ainsi que l'on a constaté que cette expression diminue pour arriver à un plancher au
moment où les cellules s'individualisent et où elles migrent. A l'opposé, elle augmente de nouveau
lorsque les cellules de la CN se condensent pour former les ganglions…On voit donc que ces

50
molécules sont exprimées de manière très dynamiques, et peuvent être synthétisées ou non dans des
espaces de temps très réduits.

On pense en fait que Slug réprime l'expression de la N-cadhérine :la transcription est donc
bloquée, et les cellules deviennent moins cohésives. De la même manière, l'arrêt d'expression de slug
correspond très bien avec l'association des cellules de la CN en ganglions.

2) Les dérivés de la crête neurale

a) Cellules nerveuses et non-nerveuses

La quasi-totalité des cellules du système nerveux périphériques proviennent de la crête


neurales, de même que tous les neurones et les cellules gliales qui ne font pas partie du cerveau. Ces
cellules vont simplement migrer ventralement pour former des chaînes de ganglions spinaux
sensoriels, de ganglions sympathiques…
Les cellules de la CN peuvent également se différencier en cellules endocrines : cependant,
dans tous les cas, les hormones sécrétées sont très proches des neurotransmetteurs. Ainsi, la
calcitonine est transcrite à partir du même gène qu'un neurotransmetteur grâce à un épissage
alternatif. On a encore différenciation de toutes les cellules pigmentées (sauf pour les cellules de la
rétine) : ces cellules sont caractérisées par la synthèse de mélanine, et certaines cellules nerveuses
peuvent également la synthétiser (substance noire notamment).
Les cellules de la CN appartenaient initialement au feuillet ectodermique, et on voit que le
devenir de la plupart des cellules dérivées est compatible avec cette nature…
51
b) Les cellules mésectodermiques de la tête.

A partir de la CN, on va obtenir en plus des cellules vues précédemment, des cellules qui n'ont
plus rien à voir avec les cellules nerveuses : on obtient ainsi du cartilage, de l'os, du tissu conjonctif,
des méninges… On voit donc que la CN joue le rôle de source de mésoderme antérieur, car on
constate qu'il y assez peu de mésoderme initialement au pôle antérieur de manière.
On pense en fait que la forme de la tête mais aussi que la formation des différentes
excroissances (bois des élans, crêtes des dinosaures…) sont dues à la biologie de la CN et au
comportement différent de la population cellulaires. C'est ainsi que l'on explique les différentes têtes
de chiens selon les espèces notamment…

c) Identification de l'origine des dérivés sur l'axe neural.


Il existe des systèmes qui permettent de déterminer avec plus ou moins de finesse les relations
entre précurseurs et produits. Au départ, on a souvent réalisé des ablations de la CN et observé
ensuite quelles structures manquaient. Ce système a été utilisé principalement pour connaître
l'origine des ganglions, mais cela reste assez grossiers : cela ne prouve pas la relations directe
puisqu'on pourrait imaginer des inductions. On peut juste dire que la CN est nécessaire à la
formation de ces structures, d'autant plus que l'on a souvent des processus de régulation (la partie
manquante est souvent remplacée…).
Plus tard, on a choisi de marquer les cellules par des injections de colorants ou par mise en
présence de thymidine*. Par exemple, on peut couper un bout du tube nerveux, et on le cultive sur
un milieu avec de la thymidine* : les cellules en division vont ainsi être marquées et on pourra suivre
leur devenir après avoir replacé le tronçon dans un nouvel embryon. Ceci dit, quelque soit le
processus, on rencontre un problème de dilution à chaque division cellulaire : c'est donc un
marquage non permanent, et l'observation à long terme est complexe (on ne pourra voir que les
différenciations précoces).
Une des méthodes les plus efficaces se base sur l'aspect du noyau des cellules : en effet,
l'hétérochromatine est facilement repérable (aspect très foncé). Or, elle prend une configuration très
différente chez la caille et chez le poulet : elle forme une masse compacte repérable en microscopie
optique chez la caille alors qu'elle forme des masses diffuses chez le poulet.

52
Cette apparence est valable quel que soit le tissu et quel que soit l'âge de l'embryon. Cette
observations a été réalisée par Nicole Le Douarin il y a 30 ans, et elle l'a exploité pour former des
animaux chimériques : cela permet des marquages à très long terme.
Aux différents stades embryonnaires, la caille et le poulet sont très semblables : il est donc très
facile de transférer un morceau de tube nerveux de caille dans un embryon de poulet, car on n'a
jamais de rejet et les 2 tubes peuvent se resouder. On a alors remarqué que lorsque l'on greffe de la
CN intermédiaire, on obtient un poussin avec toute la zone des ailes pigmentée. En réalité, les
cellules de caille que l'on a greffées ont donné des mélanocytes qui ont envahi tous les tissus… C'est
grâce à ce type d'expérience que l'on a pu connaître l'origine de toutes les cellules mésectodermiques
de la tête…

3) Les voies de migration

a) Les molécules impliquées


Avec les différentes techniques de marquage (caille-poulet, hybridations in situ…), on a pu
établir qu'il existe plusieurs voies de migration des cellules des cellules de la CN. Ainsi, les
mélanocytes semblent emprunter une voie juste sous l'épiderme, que l'on appelle voie latérale, alors
que d'autres types cellulaires ont tendance à migrer plus profondément, par la voie ventrale.

De plus, toutes les cellules ne s'arrêtent pas au même niveau : on pense en fait qu'en fonction
de leur ordre d'apparition, on a une migration différente les 1e cellules formées occuperaient les 1e
place et les suivantes devraient aller plus loin pour trouver d'autres places "libres".
On sait que les somites sont constituées par 2 moitiés (caudales et rostrales), et c'est
particulièrement vrai pour le sclérotome. On a remarqué grâce à des hybridations par anticorps que
les migrations cellulaires se faisaient presque essentiellement le long de la moitié rostrale.
53
On a pu trouver une explication partielle à ce phénomène : on a montré le rôle de certaines
molécules, et notamment de la fibronectine, des laminines et des collagènes. Par des méthodes
d'histochimie, on a observé que la fibronectine se dispose de manière équivalente sur le tube
nerveux, la corde et les somites lorsque les migrations cellulaires commencent. Dans la structure de
la fibronectine, on retrouve des sites d'interactions avec les intégrines (au niveau des motifs RGD)
mais aussi des sites spécifiques d'interaction avec les cellules de la CN.
On dépose dans une boîte de Pétri des stries de fibronectines puis on place un fragment de tube
neural et de CN perpendiculairement à ces stries. On voit alors que la migration se fait uniquement
selon les stries. Grâce au même type de procédé, on a pu comparer le comportement de la cellule
face à un choix entre la fibronectine ou du collagène. Grâce à tous ces éléments, on a pu montrer
l'importance de la fibronectine dans les migrations des cellules de la CN.

On a vu que cette substance se dispose de manière très homogène dans les somites, donc elle
ne peut expliquer à l'orientation des migrations. L'injection d'un anti-fibronectine d'un côté de la CN
avant le début de la migration empêche toute interaction du tube nerveux et des cellules de la CN.
On voit alors que la migration est complètement bloquée : on pourrait donc penser que la
fibronectine n'est qu'un substrat permissif.

54
En fait, il existe des molécules transmembranaires de la famille des éphrines qui assurent des
interactions entre plusieurs cellules grâce à leurs récepteurs eph.

En général, on considère que les éphrines ont un effet répulsif : en effet, la formation du
complexe éphrine/eph provoque le désassemblage des filaments d'actine. Lorsqu'une cellule émet
des lamellipodes vers une cellule portant des éphrines à sa surface, la destruction du réseau d'actine
entraîne systématiquement le retrait des lamellipodes…

Les cellules de la CN expriment effectivement les récepteurs eph, alors que les cellules des
somites caudales expriment le ligand éphrine. Finalement, ce qu'on a interprété comme une
préférence positive des cellules de la CN pour la zone rostrale est en fait un effet répulsif provoqué
par les éphrines des somites rostrales. Ce phénomène s'applique également à la migration des axones
: le développement de axones se fait effectivement dans la moitié rostrale des somites du fait de la
présence des éphrines.

b) Importance des voies de migration


L'existence des 2 voies de migration a une importance morphogénétique considérable. En effet,
on sait que la moelle épinière est une structure segmente, avec des séquences répétées : cette

55
situation est principalement due au fait que la migration ne peut se faire que d'une seule manière
cela assure la formation polarisée des ganglions.
On provoque par microchirurgie l'ablation de 4 somites d'un côté de la moelle épinière et on les
remplace par 8 moitiés rostrales de somites. On voit alors que l'on n'a pas formation de ganglions
individuels, mais d'un "boudin" qui occupe toute la longueur du tube. De plus, les motoneurones ont
développé des axones tout le long de la moelle épinière. On a donc une grande anarchie dans
l'organisation du tube nerveux : les voies de migration permettent donc de coordonner le nombre de
ganglions au nombre de somites.

De plus, les voies de migration sont indispensables à la différenciation des cellules : en effet,
les cellules de la CN migrent plus ou moins loin et se différencient en conséquence. On va alors
bloquer l'une des 2 voies de migrations connues par insertion de filtres de nitrocellulose. Après 12h
de contact, on espère que les filtres se sont imprégnés des molécules de la matrice extracellulaire
environnante. On les utilise alors comme support de culture de cellules de CN d'un autre embryon :
les cellules cultivées sur le filtre de la voie dorsale ne donnent jamais de neurones, mais surtout des
cellules pigmentaires. A l'opposé, ces mêmes cellules cultivées sur le filtre de la voie ventrale ne
donnent que des cellules nerveuses…

56
C'est donc que la matrice considérée va orienter la différenciation des cellules qu empruntent la
voie de migration correspondante. On doit trouver dans cette matrice des facteurs particuliers qui
diffèrent selon la voie. Bien évidemment il ne s'agit pas de la fibronectine ou des molécules de la
matrice extracellulaire, mais plutôt de substances adsorbées sur cette matrice, type FGF, EGF…

4) La nature multipotente de la crête neurale

a) Plutipotentialité de la population
Les cellules de la CN sont apparemment identiques, et elles se différencient pourtant en une
multitude de types cellulaires, selon leur destination et selon le milieu dans lequel elles se retrouvent.
Outre l'expérience de Perris, de nombreuses données reposent sur des greffes caille/poulet : on
prélève un morceau de CN de poulet et on la transplante dans une caille au même endroit et dans un
embryon au même stade de développement (on parle de transplantation isotopique isochronique ; cf
supra).
Grâce à des expériences systématiques tout le long du TN, on a pu élaborer une carte des
territoires présomptifs un SN, et notamment pour les ganglions du système OS. Au niveau troncal
(somites 18 à 24), on trouve une population de cellules qui donne systématiquement la partie
médullaire de la cortico-surrénale. De la même manière, les cellules de la CN vont donner des
neurones entériques, entre les somites 1 à 7 puis entre le 28e et le dernier somite.

On a donc une régionalisation de l'axe nerveux en fonction de la position de la CN par rapport


aux somites. C'est donc que l'on a une hétérogénéité régionale que l'on peut interpréter de 2
manières. On va prendre l'exemple des précurseurs entériques et surrénaux :
- soit on a 2 précurseurs différents neurone entérique et cellule de la surrénales) qui se
localisent chacun dans une zone particulière de la CN
- soit les 2 précurseurs sont mélangés, et au cours de la migration, seuls l'un des 2 types se
différenciera, en réponse à un environnement particulier ou à des signaux de survie.
57
Pour résoudre ce problème, on transplante une partie de la CN à un autre endroit dans l'axe
nerveux : par exemple, on place de segment S18-S24 au niveau du segment S1-S7 d'un autre embryon.
Dans ce cas, on parle de transplantation hétérotopique et hétérochronique : en effet, les somites sont
des structures transitoires, donc on doit utiliser des embryons d'âges différents.

On constate alors que des précurseurs de la zone S18-S24 peuvent donner des neurones
identiques à ceux observés habituellement dans le segment S1-S7 (et inversement). C'est donc que les
précurseurs ne sont pas régionalisés, et seule leur différenciation assurera la formation de structures
régionalisées.

b) Pluripotentialité individuelle
Il existe cependant une faille dans le raisonnement ci-dessus : en effet, si les précurseurs de
tous les types cellulaires se retrouvent effectivement dans toutes les zones de la CN, les précurseurs
les plus antérieurs (cellules mésectodermiques de la tête) ne se trouvent que dans la région
céphalique.
Ainsi, quand on transplante la région antérieure dans une zone plus postérieure, on obtient des
os et des muscles ectopiques. A l'inverse, quand on transplante une région postérieure dans la zone la
plus antérieure, on a un développement très anormal, et la tête ne présente aucun os…
Le problème est que l'on transplante toujours une population de cellules : on pourrait donc
penser que l'on a des précurseurs à multiplies potentialités (e et s par exemple). Ce précurseur va
ensuite migrer par des voies différentes, et ce sera l'environnement rencontré qui orientera la
différenciation vers des neurones entériques ou des cellules de la surrénale. Dans cette situation,
tout"es les cellules qui migrent vont se différencier, et aucunes cellules ne resteraient indifférenciées
au milieu d'une population différenciée.

58
Pour déterminer lequel des 2 modèles est vrai, on doit étudier la potentialité de chaque cellule
en culture , et ce de manière isolée. On a alors 2 méthodes :
1. In vivo : on injecte un colorant dans les cellules que l'on étudie : on utilise le LRD (lysine
couplée à la rhodamine) car il peut s'intégrer dans les protéines et donc maintenu lors de la
réalisation des coupes. De plus, du fait de la taille importante de la rhodamine, il va rester dans les
cellules. On voit alors que la cellules dans laquelle on a injecté le colorant peur donner des cellules
de Schwann, des cellules de la surrénales, des neurones entériques… On peut donc comprendre que
les cellules sont multipotentes, mais on a peut-être plusieurs précurseurs différents afin d'obtenir la
totalité des types cellulaires.

2. In vitro : on dissèque u e partir du TN et on place les cellules sur un milieu permettant la


migration des cellules de la CN. On prélève alors les cellules qui ont migré et on les cultive de
manière isolée. Dans une même boîte, on obtient plusieurs types cellulaires : c'est donc que la cellule
initiale était pluripotente.
En réalité, toutes les cellules de la CN ne donnent pas forcément les mêmes types cellulaires :
on a donc plusieurs types de précurseurs, qui sont chacun pluripotents. En ajoutant des facteurs
spécifiques, on peut orienter la différenciation des cellules dans un sens ou dans l'autre : ainsi, la
présence de BMP dans une culture de cellules individuelles entraîne la différenciation exclusive de
neurone. Avec du TGFβ, on obtient des cellules musculaires lisses…
Dans cette population de cellules différentes, on peut également retrouver des cellules souches:
elles forment une population minoritaire, mais leur division asymétrique est tout à fait typique.

On a pu montrer leur existence par des expériences in vitro : une cellule en culture va donner
des colonies primaires de cellules de types différents.

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Si la cellule initiale était une cellule souche, alors c'est qu'au moins une cellule de la colonie
primaire est également une cellule souche. Pour vérifier cela, on dissocie cette colonie et on place
chaque cellule ainsi obtenue en culture isolée. Si cette cellule est une cellule différenciée, alors on
n'aura pas de division, mais si c'est une cellule souche, alors on devrait obtenir une colonie
secondaire à multiples phénotypes.
Ces cellules souches n'ont aucun intérêt pour la thérapeutique cellulaire puisque la CN est une
structure très éphémère : on ne retrouve donc aucune trace de ces cellules souches dans un embryon
âgé, et a fortiori dans un individu adulte…

VII) La formation des somites et de leurs dérivés

1) Segmentation du mésoderme paraxial

Les somites sont des dérivés mésodermiques, et on a coutume de diviser le mésoderme en


mésoderme axial (corde) et paraxial (ce terme est surtout représentatif pour les embryons qui se
développent à plat). Au départ, on s'intéressait peu à la corde car c'est une structure vouée à
disparaître, mis à part le nucleus pulposus, qui donnera une petite structure pulpeuse au centre des
disques inter-vertébraux. Cependant à l'état embryonnaire, la corde peut représenter une structure
assez volumineuse, et c'est notamment le cas chez les Vertébrés inférieurs : ainsi chez l'Amphibien,
la corde est un point d'attache pour certains muscles de la larve.

Aujourd'hui, on sait que la corde a un rôle supplémentaire qu'être la "colonne vertébrale " de
l'embryon : elle intervient en effet dans la différenciation DV du tube nerveux.
Outre la corde, le mésoderme forme des expansions latérales, qui donneront toutes les
structures squelettiques des membres, la somatopleure et la splanchnopleure ( à partir des lames
latérales), le cortex des surrénales, les gonades et les structures rénales (à partir des lames
mésodermiques).
Lors de la mogration du nœud de Hensen, on a formation des somites, qui correspondent à une
"épithélialisation" du mésoderme qui reste sur place. Le nombre de somites illustre une horloge
biologique très précise, et l'étude de l'mebryon de poulet fait souvent référence au nombre de
somites.

60
Le mésoderme paraxial non segmenté, souvent appelé plaque segmentaire, correspond à
l'espace entre le nœud de Hensen et la dernière somite formée : au fur et à mesure que les somites se
forment, on a donc différenciation de nouvelles cellules mésodermiques dans la partie la plus
postérieure de la plaque, car sa longueur est quasiment constante tout au long de la somitogenèse.
Grâce à ce processus, on obtient à la fin du développement un nombre fixe de somites pour une
espèce donnée : plus de 100 chez certains Reptiles, 50 chez le poulet, 65 chez la souris.

-Rm- On parle parfois de somitomères ; cela correspond à des groupes de cellules plus ou
moins circulaires qui ne sont pas véritablement indépendants les uns des autres. Les 8 premiers
somitomères formés ne se différencieront jamais, mais les somitomères suivants subiraient une
différenciation plus poussée menant à leur individualisation. Toute une école envisage la
somitogenèse ainsi, avec une 1e condensation de cellules mésenchymateuses. Cependant, pour la
plupart des embryologistes, ce processus ne reflète pas véritablement ce qui se passe…

La formation d'une somite parfaitement individualisée se fait toutes les 90mn : grâce à
l'expression périodique de N-CAM et de N-cadhérine, on a formation de sphères épithéliales
renfermant une petite zone de cellules restées mésenchymateuses.
De plus, on a remarqué que la formation d'une nouvelle somite s'accompagne de l'expression
du facteur répresseur de transcription hairy. Cette expression est dynamique puisqu'elle se fait de
manière cyclique. Au début du cycle, hairy va s'exprimer dans une zone sub-apicale limitée de la
plaque segmentaire (partie postérieure de la somite X+1) mais aussi dans tout la partie postérieur de
la plaque. Cette zone postérieure va progressivement migrer vers le pôle antérieur de la plaque, mais
dans le même temps, elle va se rétrécir et finit par correspondre à la zone postérieure de la future
somite (X+2)…

Le gène lunatic fringe est une protéine sécrétée, et elle semble également avoir une expression
plus ou moins cyclique. Ceci dit, on ne sait pas encore si cette expression en vague est le témoin
d'une horloge biologique ou si c'est la conséquence d'une horloge définie en amont.
Au fur et à mesure que les somites s'individualisent, l'expression de ces différents gènes finit
par disparaître. Par contre, on a apparition d'une expression différentielle des éphrines et des
récepteurs eph (cf supra) : on pense que cela a peut-être un rôle dans l'individualisation des somites,
mais on ne sait pas encore comment.

Du fait du décalage temporel de la gastrulation chez le poulet, il est facile d'étudier les
différentes étapes de la somitogenèse et donc de la différenciation de la plaque segmentaire au sein
d'un même embryon. Ainsi, on s'est rendu compte que les somites bien individualisés et de structure
épithéliales se divisent en 2 structures différentes : un sclérotome ventral plus ou moins
mésenchymateux et un dermomyotome dorsal épithélial. In fine, on obtiendra :

61
- le derme dorsal, des cellules de muscles lisses (muscles horripilateurs), les cellules des
muscles des membres et du squelette axial à partir du dermomyotome
- les vertèbres et les côtes à partir de sclérotome.

L'importance relative du dermomyotome et du sclérotome varie selon les espèces : ainsi chez
les Amphibiens et le Xénope en particulier, c'est le myotome qui est le plus volumineux, alors que
chez le Poulet, c'est le sclérotome qui prédomine.

62
2) Le devenir du sclérotome

a) La resegmentation
Entre 6 et 10h, la zone ventro-médiane des somites va se désolidariser de la zone dorsale :
grâce à la perte d'expression de la N-CAM, les cellules de cette dernière vont petit à petit
s'individualiser. Elles vont alors migrer autour de la corde, et elles finissent par entourer
complètement la moelle épinière.

Lors de la conversion du sclérotome en vertèbre, on assiste à un décalage des cellules : en


effet, une vertèbre est composée par la partie caudale du sclérotome n et de la partie rostrale du
sclérotome n+1. Ce processus a été observé depuis très longtemps, et c'est ce qu'on a appelé
resegmentation. La métamérisation persiste, mais elle est décalée d'½ somite : cela peut faire penser
aux segments et aux parasegments de la drosophile…

Ce phénomène de resegmentation a été prouvé avec certitude grâce aux transplantations


caille-poulet : on greffe des somites entières ou bien des ½ somites. On a alors suivi alors le devenir
de chaque cellule, et c'est ainsi qu'on s'est aperçu du décalage réel, puisque les vertèbres obtenues
étaient composées à la fois de cellules de poulet et de caille… Cependant, ce processus n'est pas
observé dans le cas du dermomyotome : cela permet la formation de muscles en phase avec les
somites, mais assurant une articulation correcte.
63
b) Le rôle des gènes Hox dans la spécification régionale des vertèbres
Chez les Vertébrés, on retrouve 39 gènes Hox, et on pense que tous les paralogues des 4
complexes sont engagés dans la différenciation de la colonne vertébrale. On retrouve une colinéarité
d'expression entre la localisation chromosomique des gènes et leur domaine d'expression : ainsi les
paralogues 1 sont les plus antérieurs, alors que les paralogues 13 correspondent aux zones
postérieures.

Le domaine d'expression du gène Hox-c6 varie dans l'absolu en fonction des espèces, mais on
peut remarquer que dans tous les cas, la limite antérieure de son domaine d'expression correspond à
la limite entre les vertèbres cervicales et thoraciques (-Rm- Tous les Mammifères ont le même
nombre de vertèbres cervicales, et seule la taille changera).

64
De plus, elle marque également la zone où se développera le bourgeon de membre antérieur,
qu'il donne une nageoire ou un membre. De la même manière, la transition entre occipital et
vertèbres cervicales est marquée par la limita antérieure du domaine d'expression de Hox-b3.

On réalise des souris KO pour le gène Hox-c8 : a priori, on s'attend à observer une mutation, à
une transformation d'une structure en une structure plus antérieure comme dans tout processus
d'homéose.

Hox-c8 s'exprime à la jonction entre vertèbres thoraciques et vertèbres lombaires : suite à la


mutation, on observe le développement d'une paire de côtes à partir d'une vertèbre théoriquement
lombaire. De la même manière, la mutation du gène Hox-d11 entraîne la formation d'une 7e lombaire
au détriment d'une vertèbre sacrée. Ceci dit, ce phénomène qui semble très général ne s'applique pas
à tous les gènes Hox : ainsi on peut observer des mutations non conformes avec ce que l'on
attendrait, comme des transformations postérieures…

3) Le devenir du dermomyotome

Le dermomyotome est une structure épithéliale, contrairement au sclérotome qui devient une
structure plus ou moins mésenchymateuse. Au bout d'un moment, on peut observer la formation
d'une lèvre par prolifération de la partie la plus dorsale du dermomyotome externe et le myotome
interne. Dans la plupart des somites, la prolifération va rapidement s'arrêter, mais au niveau des
futurs bourgeons de membres, la prolifération continue (cf supra).
Le dermotome va ensuite devenir une structure mésenchymateuse : il va se différencier en
derme dorsal et en muscles horripilateurs. Le myotome aura quant à lui 2 devenirs différents :
- les cellules médianes vont donner le mésoderme épaxial : ce dernier est à l'origine des
cellules musculaires striées associés au squelette axial, et la différenciation se fait sur place.
- les cellules ventro-distales vont donner le mésoderme hypaxial : les cellules le constituant
vont migrer vers le bourgeon puis elles se différencient en cellules musculaires striées des membres
et de la partie ventrale, mais aussi en diaphragme et en muscles de la langue.

65
4) Détermination des lignages somitiques

Afin de connaître le mode de détermination des cellules constituant les somites, on a réaliser
toute une série d'expériences modifiant la position des somites dans l'axe du corps. Dans un 1e
temps, on prend la dernière somite formée et on la fait tourner de 180° le long de l'axe : le côté
dorsal devient alors côté ventral, et inversement. On voit alors que la différenciation se fait
normalement : les cellules des somites n'ont donc pas encore reçu d'informations concernant leur
devenir.
On renouvelle l'expérience avec l'avant-dernière somite formée : on voit alors que la
différenciation est anormale. En effet, le côté ventral (initialement dorsal) se différencie en
dermomyotome : cela signifie que pendant les 90mn qui sépare la formation de 2 somites, on a
détermination des lignages somitiques de la somite qui vient de se former. On a eu émission de
signaux provenant de tissus et qui ont entraîné la différenciation.

Ceci dit on vient de montrer que la


différenciation dans l'axe DV se fait
dans les 90mn après la déformation des
somites. Par contre, la différenciation
dans l'axe AP est déjà mise en place : si
on transplante une somite postérieure
dans une position plus antérieure, elle
gardera sa destinée initiale. Ainsi une
somite thoracique donnera toujours des
vertèbres associées à des côtes, même si
elle est placée dans la zone des
cervicales. Cette détermination est en
fait très précoce, et elle ne sera donc pas
synchrone dans tous les axes.

66
-Rm- Ces données sont également valables pour le tube nerveux. On pense donc que ce
phénomène oit être dû à l'expression précoce des gènes Hox, qui est maintenue même après la
transplantation .

On peut se demander quels sont les signaux responsables de l'identité DV et médio-latérales


des somites. Si on greffe une corde ectopique en position latérale, on voit que l'on a formation d'un
nouveau plancher et d'un groupe de neurones ectopiques dans le tube nerveux. De plus, on assiste à
l'extension du domaine somitique du sclérotome : c'est donc qu'un signal provenant de la corde
assure la ventralisation des somites.

On obtient le résultat inverse si on enlève la corde : on a une extension importante du


dermomyotome au détriment du sclérotome (donc la détermination par défaut des somites est le
dermomyotome). On peut supposer que parmi les molécules produites de manière précoce par la
corde, Shh aura un rôle prépondérant. En effet, on a vérifié que l'on obtient le même type de résultats
par des greffes de fibroblastes sécrétant de manière constitutive Shh…
Un certain nombre de gènes sont exprimés spécifiquement dans la partie ventro-latérale des
somites, cad dans la région du futur sclérotome. C'est ainsi le cas de Pax-1 : c'est un gène à
homéoboîte qui possède des rôles très divers dans l'organogenèse, et il est régulé par Shh.

A l'opposé, le gène Pax-3 s'exprime spécifiquement dans le domaine du futur dermomyotome,


et notamment dans le domaine le plus latéral : cela correspond au domaine où les cellules vont
migrer vers les bourgeons de membres. On suppose que Pax-3 est stimulé par la sécrétion de Wnt,
qui provient de l'ectoderme et du tube nerveux dorsal.
En réalité, Wnt stimule la synthèse de facteurs de transcription de la famille bHLH (MyoD et
Myf5 par exemple) côté tube neural : l'expression de ces facteurs est nécessaire et suffisante pour
transformer des cellules indifférenciées en cellules musculaires. Ces 2 gènes sont en réalité
redondants : en effet, la mutation de MyoD n'entraîne pas l'absence totale de muscles…
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La zone où Pax-3 s'exprime correspond aux cellules qui vont migrer vers les bourgeons : elles
se différencieront beaucoup plus tard que les autres cellules du myotome. En effet, l'expression de
MyoD est plus tardive, et la migration pourra se faire avant la différenciation. Cela signifie que l'on a
un mécanisme qui empêche la différenciation musculaire : ce mécanisme est dû à une signalisation
provenant du mésoderme latéral. Si on enlève cette portion, alors le dermomyotome latéral se
différencie en même temps que la zone médiane. Tout cela est en réalité lié à la sécrétion de BMP4
par le mésoderme latéral.
BMP4 est une molécule diffusible : a priori, rien n'empêche qu'elle bloque également la
différenciation musculaire dans le dermomyotome médian. En réalité, la signalisation Wnt côté
médian assure la synthèse de Noggine : ce facteur peut alors se lier physiquement à BMP4, qui ne
peut pas agir… Finalement, cela permet la formation de 2 territoire musculaires différents, qui ne se
différencieront pas au même moment.

VIII) La néphrogenèse

1) Interactions épithélio-mésenchymateuses réciproque et modèle d'étude de la


tubulogenèse

Les reins se développent à partir du mésoderme intermédiaire, et leur différenciation a été très
étudiée. On sait que l'on peut facilement passer d'un mésenchyme à un épithélium grâce à
l'expression de CAM et de cadhérines, mais les cellules épithéliales acquièrent une polarité (on parle
de pôle basal et de pôle apical). Le passage entre ces 2 structures peut se faire dans les 2 sens in vivo
: ainsi l'ectoderme peut se dissocier pour donner les crêtes neurales, et le mésoderme latéral donnera
du mésoderme mésenchymateux qui se recondensera en vaisseaux sanguins…

C'est cette possibilité de transformation des structures dans les 2 sens que l'on appelle induction
réciproque : elles sont très nombreuses dans le développement embryonnaire, et notamment lors de
la différenciation des tubules rénaux. Dans tous les cas, le mésenchyme provient toujours du
mésoderme ou des crêtes neurales, mais jamais de l'endoderme. Par contre, on aura formation
d'épithélium appartenant aux 3 feuillets : on obtiendra ainsi le tube digestifs et différentes glandes
pour l'endoderme, les plumes, poils et glandes sébacées pour l'ectoderme…

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De plus, la néphrogenèse a été beaucoup étudiée car c'est l'un des modèles de formation des
tubes lors du développement embryonnaire. En effet, la formation des tubes peut se faire selon
différentes modalités :
- le tube nerveux se forme par une invagination de l'épithélium neural, et cette invagination
se poursuit jusqu'à la fermeture complète du tube → c'est la neurulation primaire

- la partie la plus postérieure du tube nerveux se forme à partir d'une "baguette" cellulaire
pleine : on observe un processus de cavitation, qui nécessite la réorganisation et la repolarisation des
cellules. Pour cela, on a sécrétion de glycoprotéines et de muccopolysaccharides au niveau du pôle
apical des cellules, puis apoptose des cellules les plus internes de la "baguette".

- dans le cas de la tubulogenèse rénale ou de la vasculogenèse, on a d'abord formation de


cordons très fins, constitués de 2 ou 3 cellules. On assiste ensuite à un processus de repolarisation,
qui permet de réorienter les cellules : cela permet de ménager un creux eu centre du cordon par
simple remaniement et sans processus apoptotique, mais le diamètre sera plus faible.

- dans le cas des microcapillaires et des microtubules (appareil respiratoire de la drosophile


par exemple), on d'abord un alignement de plusieurs cellules pour former une structure allongée. On
a ensuite production de vésicules intra-cytoplasmiques qui vont fusionner entre elles : cela crée des
cavités intracellulaires et si elles fusionnent avec la membrane plasmique, alors on a formation d'un
continuum.

A partir de tous ces tubes, quelque soit leur mode de formation, on aura apparition d'un réseau
secondaire ramifié à partir de ce réseau primaire rectiligne…

2) Développement du pronephros

Le mésoderme intermédiaire est constitué comme un amas de cellules de destinées variées : il


se forme grâce à la fusion du mésoderme latéral et des somites. Le pronephros est une structure qui
fonctionne chez quelques Vertébrés inférieurs : ainsi chez les Vertébrés, c'est la 1e structure rénale
qui se forme, mais elle sera remplacée chez les Vertébrés supérieurs.

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L'unité fonctionnelle du pronephros est le néphron : il correspond à une série de tubules qui
récupèrent du liquide à partir d'un glomérule (= glomus = pelote de vaisseaux sanguins) et qui, après
filtration, acheminent l'urine jusqu'au Canal de Wolff. L'urine va donc traverser le néphron, un tube
collecteur puis l'uretère primaire (= Canal de Wolff).
Le pronephros a une structure très simple : le liquide filtré est directement sécrété dans le
cœlome, et on n'a aucun intermédiaire entre le néphron et la cavité générale. C'est une structure très
antérieur,e puisqu'on la retrouve au niveau cervical, et il semble que le développement des néphrons
soit totalement indépendant de l'uretère primaire. On peut facilement dire que l'on n'a aucune
interaction, puisque le néphron apparaît plus tôt que le canal de Wolff…

On connaît assez mal les évènement qui président la formation de cette structure. Chez les
Amphibiens, c'est le mésoderme intermédiaire au niveau du somite 10 qui se développe en rein : si
on enlève cette partie du mésoderme, alors on n'obtient jamais de rein. On pense que la totalité du
pronephros a pour origine ce mésoderme intermédiaire "10", et le canal de Wolff se formera par
simple prolifération de la zone postérieur de ce mésoderme. Finalement, cela signifie que la plus
grande partie du mésoderme intermédiaire est incapable de se différencier en pronephros.

Les néphrons vont se différencier à partir de condensations de cellules appelées néphrotomes.


Après la formation de 5 ou 6 néphrons, on observe la fusion de ces différentes structures en un canal
collecteur qui se branche sur le canal de Wolff : ce dernier aboutit au niveau du cloaque, ce qui
permet l'expulsion de l'urine. Cette structure sera fonctionnelle chez les Myxines et les Cyclostomes
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adultes, mais aussi chez les larves de Poissons et d'Amphibiens, alors qu'elle dégénère chez la
plupart des Vertébrés.

3) Développement du mésonephros

La structure du mésonephros est assez semblable à celle du


pronephros, mais il s'étend un peu plus postérieurement. Ce sera par
contre un rein fonctionnel et définitif chez tous les Anamniotes (on
l'appelle alors parfois opisthonephros car il est plaqué contre le dos), et
il pourra éventuellement fonctionner de manière transitoire chez les
Mammifères et les Oiseaux.

Ce mésonephros se forme par une interaction inductible du canal de Wolff sur un mésenchyme
qui adopte alors une structure tubulaire. Il prend forme à partir du blastème mésonéphrogène, qui est
un cordon de mésoderme intermédiaire. Le signal provenant du canal de Wolff n'a pas été encore
identifié mais on sais que sa présence est nécessaire : en effet, si on coupe ce canal ou bien si on
place un obstacle physique entre le canal et le blastème, alors on n'obtient jamais de mésonephros.
Chez le poulet et les Mammifères, on a formation de 30 mésonéphrons, et au fur et à mesure de
leur apparition dans la zone postérieure, on a dégénérescence des pronephrons, plus antérieurs. De
plus, dans le même temps, le mésoderme intermédiaire va se différencier en tissu somatique des
gonades et en cortex surrénalien.
Dans la partie la plus caudale du canal de Wolff, on a formation d'un bourgeon par auto-
condensation du mésenchyme : c'est à partir de cette structure que le rein définitif des Amniotes se
formera. L'uretère va de plus en plus se ramifier et pénétrer dans ce bourgeon, alors que les cellules
du blastème métanéphrétique vont se condenser et former les tubules…
Cependant, bien que la formation du métanephros se fasse, le mésonephros continue de
s'étendre dans la partie antérieure de l'animal. A ce stade, on a de plus mise en place d'un système
tubulaire parallèle au canal de Wolff : c'est le canal de Muller. Le devenir de ces 2 canaux va ensuite
dépendre du sexe :
- chez la femelle, le canal de Wolff dégénère alors que le canal de Muller donne les oviductes
- chez le mâle, le canal de Wolff donne le canal déférent, et le canal de Muller dégénère.

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4) Développement du métanephros

Dans sa partie postérieure, on a vu que le can,al de Wolff a bourgeonné puis s'est ramifié en
pénétrant dans une masse métanéphrogène. Sur les pointes de ces ramifications, on observe la
condensation de cellules mésenchymateuses, et chaque amas va se creuser pour former un tube en
forme de virgule puis de S.

Ces tubes finissent par fusionner avec le tube collecteur et ils s'associent à des cellules très
plates, les podocytes. On a enfin recrutement de cellules endothéliales à partir du mésoderme
splanchique pour former le glomérule → c'est ainsi que se forme le néphron.

Au départ, le néphron est attaché aux 2 extrémités (glomérule et tube collecteur), mais il est
encore de petite taille. Grâce à des phénomènes de croissance très importants, on a formation de
circonvolutions, d'arcades et les néphrons peuvent acquérir progressivement leur structure finale. Ce
sont les néphrons les plus profonds qui sont formés les 1e, mais plus l'uretère se divise, plus on a
formation de néphrons. On peut ainsi arriver à la formation de plus d'un millions de néphrons qui se
branchent tous sur des tubes collecteurs.

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5) Les molécules impliquées dans la néphrogenèse

Lors de la formation du métanephros, 2 évènements majeurs doivent être expliqués : la


formation du bourgeon de l'uretère et la formation des néphrons à partir du mésenchyme. C'est
d'ailleurs dans le cadre de ces 2 processus que se mettent en place les interactions réciproques.
On isole le bourgeon de l'uretère et le mésenchyme métanéphrogène chez un poulet, puis on les
cultive ensemble ou séparément. Si on prélève l'uretère au moment où le bourgeon apparaît et qu'on
le cultive seul, alors on n'observe aucune ramification supplémentaire. Au même stade, si on prélève
le mésenchyme et qu'on le cultive seul, alors on assiste à des processus apoptotiques : c'est donc
qu'un signal de survie est nécessaire.
On place alors les 2 éléments ensemble : même si on place un filtre entre les 2, on assiste à la
ramification du bourgeon urétral et à la prolifération des cellules mésenchymateuses. C'est donc que
l'on a intervention de molécules diffusibles. On a pu remarquer par des expériences complémentaires
que l'on peut induire la formation du tubules en remplaçant le bourgeon par un morceau de moelle
épinière.
Finalement, on assiste ici à une induction "permissive" : en effet, le mésenchyme ne peut
donner que des tubules rénaux, mais cette différenciation nécessite l'intervention d'un élément
déclencheur : c'est un signal émis par le bourgeon de l'uretère, mais que l'on retrouve également dans
la moelle épinière. On a pu identifier plus de 200 molécules sécrétées dans le domaine du futur rein,
et on ne connaît le rôle que de quelques unes :
1. Pour la formation du pronephros : dans le mésoderme intermédiaire antérieur, un certain
nombre de gènes s'expriment spécifiquement : c'est notamment le cas le lim-1 et de Pax-2. La
molécule lim-1 semble indispensable car elle s'exprime avant la formation des pronéphrons. De plus,
son absence entraîne l'absence totale de rein. En réalité, lim-1 et Pax-2 constituent une base, sur
laquelle viennent se greffer des molécules supplémentaires assuran,t la différenciation du méso puis
du métanephros.
-Rm- Il existe un problème dans la réalisation des KO : on sait que les 3 reins sont formés au
cours du développement embryonnaire des Mammifères, même s'ils ne sont pas forcément
fonctionnels. Effectivement, l'absence de lim-1 entraîne l'absence du canal de Wolff et on ne pourra
pas savoir si cette molécule n'intervient qu'une fois ou si elle intervient également un peu plus tard…

2. Pour la formation du mésonephros : Pax-2 joue un rôle important dans cette formation,
mais WT-1 (Tumeur de Wilm's) est également essentiel. En effet, les souris KO pour ce gène ne

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peuvent pas former de mésonephros (et donc pas de métanephros) : c'est une molécule exprimée
dans le mésenchyme méso et métanéphrogène.

3. Pour la formation du métanephros : L'apparition du bourgeonnement se fait grâce à un


signal sécrété par le canal de Wolff, appelé GDNF (glial-derived neurotrophic factor → on l'a en 1e
mis en évidence comme un facteur stimulant la prolifération des cellules neurales, et notamment les
neurones du système nerveux entérique). Cette molécule fait partie de la
famille TGFβ, mais son récepteur a une structure différente de celle que l'on
voit habituellement dans cette famille. En effet, le récepteur à tyrosine-
kinase c-ret est associé à uN récepteur spécifique de GDNF, appelé
GDNFR-α1.

-Rm- On peut observer un effet phénotypique de la mutation de ces récepteurs même chez les
hétérozygotes : c'est souvent le cas pour les facteurs de croissance, car le dosage du gène nécessite
une régulation très fine qui met en oeuvre les 2 allèles.

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La différenciation des néphrons est réalisée grâce à un facteur qui provient des bourgeons de
l'uretère : cela provoque la condensation cellulaire puis la tubulogenèse, mais pour l"instant on est
assez peu sûr des données. On sait que WT-1 et Pax-2 sont nécessaires, mais ils interviennent en
réalité dans la production du GDNF (donc dans la formation du bourgeon). Ces gènes sont
également essentiels pour que la condensation se fasse.
On pense que Wnt-4 est essentiel pour la réponse du mésenchyme aux signaux émis par les
bourgeons de l'uretère. On ne connaît pas encore exactement la nature de ces signaux : ce serait
peuyt-être une cytokine LIF (Leukemia inhibitory factor), qui agirait sur son récepteur gp130. en
effet, des souris KO pour l'un de ces 2 éléments, forme moitié moins de tubules…

6) Aspect phylogénétique

Le rein primitif (= pronephros) était certainement une adaptation au passage des Vertébrés de
l'eau salée à l'eau douce. Il est effectivement fonctionnel à l'état adulte chez les Myxines et les
Lamproies, et dans ce cas le nombre de pronephrons est exceptionnellement élevé (jusqu'à 50).
Les modifications du milieu de vie (retour à l'eau salée, vie aérienne) ont provoqué des
remaniements dans le rein. Ceci dit, dans tous les cas on a réutilisation des facteurs mis en œuvre
dans la formation du pronephros, mais on a également utilisation de nouveaux gènes. Au cours de
l'ontogenèse, on a donc une récapitulation de la phylogenèse, mais le pronephros n'est que très
rarement fonctionnel. On aura tout de même réutilisation de structures primitives comme le canal de
Wolff, qui est différencié en canaux et glandes sexuelles.

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