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Eléments importants

Objectif : Faire une distinction très fine de suites apparemment identiques

1. Problème
Différence entre instant et moment

Ça fait un moment est naturel, Ça fait un instant ne l’est pas

a. Je l’ai vu ça fait un moment. b. ??Je l’ai vu ça fait un instant.

Dans les grammaires ce « présentatif » est mis en parallèle avec voici/voilà, il y a

a. J’ai fait sa connaissance voici/voilà trois mois.

b. J’ai fait sa connaissance il y a une dizaine de jours.

c. J’ai fait sa connaissance ça fait (trois mois + une dizaine de jours).

Sauf : Restriction avec instant

a. J’ai fait sa connaissance voici/voilà (un moment + un instant)


b. . b. J’ai fait sa connaissance il y a (un moment + un instant)

La différence intuitive est que un moment induit une durée, contrairement à un instant, qui
implique l’immédiateté. L’incompatibilité dans *Ça fait un instant viendrait de ce que cela/ça fait
est connoté quantitativement comme exprimant le « + d’où l’inacceptabilité de combinaisons
avec des noms véhiculant « le peu » comme instant. Cependant, la plausibilité de l’explication
selon laquelle ce serait l’orientation de cela/ça fait vers le quantitatif qui justifierait l’exclusion
de instant – puisque cela/ça fait peut introduire aussi bien des périodes interprétées comme
longues (5) que des périodes interprétées comme courtes

2. Hypothèse de résolution
Deux observations qui permettent une explication :

1/ Le SN temporel est commutable avec un seul adverbe je le connais ça fait longtemps/un


moment

2/ existence d’expression figées sur le modèle qui exprime une durée longue ça fait un bail, ça
fait une éternité, ça fait une sacrée paye, ça fait des lustres, ça fait un siècle, ça fait des siècles, ça
fait un (bon + petit) bout de temps

Caractérisation de « constructions » dans un cadre syntaxique corrélable à des « contraintes


sémantiques », basée sur les travaux de N.Furukawa

Deux phrases peuvent se rattacher à un même type structural sans relever de la même structure

a. Elle a les yeux bleus


b. Elle a les yeux qui sont bleus

L’hypothèse de l’auteur est que la structure cela/ça fait SN tps où tps signale un nom de temps connait
moins de contrainte, a une interprétation plus générale
3. Observations
Différents tests montent une différence de comportement entre la construction ça fait SN Tps
et ça fait un moment
Cela/Ça fait un moment.
Cela/Ça fait (quelques jours + plusieurs semaines + un mois + cinq minutes.
Test de la question
Elles répondent toutes les deux à la question quand
La question combien de temps qui révèle une étendu temporelle :
Elle localise plus moins l’événement rapporté
Alors qu’elle constitue une façon d’éviter de répondre
Cela fait combien de temps que tu es mariée ? – Cela fait un moment.
b. ??Ça fait combien de temps que tu le sais ? – Ça fait un moment.
c. Cela fait combien de temps que tu es mariée ? – Cela fait (un mois + quelques jours +
plusieurs semaines + des années).
Construction syntaxico-lexicale comparaison formelle pour étayer ce constat
• Le pronom démonstratif Présentatif temporel sous déterminé : le pronom accepte
l’alternance cela/ça, ne se prête pas à la question ni à l’extraction, il est postérieur à
l’événement qu’il présente
Il est mort ça fait plus de dix ans.
a. *Qu’il est mort fait plus de dix ans.
b. *Sa mort fait plus de dix ans.
c. *Il est mort ceci fait plus de dix ans.

• Le verbe : Le verbe en se met à tous les temps sauf au passé simple pour ça fait SN tps

Temps verbaux présent et imparfait, semi auxiliaire devoir

Il fait des études de Droit (ça fait un moment / *ça a fait un moment / *ça

fera un moment / *ça vient de faire un moment / ?ça va faire un moment /

ça doit faire un moment).

Il faisait des études de Droit (ça faisait un moment / *ça allait faire un moment / *ça venait
de faire un moment / *ça pouvait faire un moment /ça devait faire un moment).

• Le déterminant : Le déterminant ne se prête pas à l’alternance du nombre un indéfini (non


numéral)

Il n’a pas donné de nouvelles

a. ça fait un moment / *ça fait des moments.

b. *ça fait un ou deux moments.

c. *ça fait quelques moments / plusieurs moments.

d. *ça fait des moments et des moments.

e. *ça fait (exactement + précisément + juste + environ + à peu près + seulement) un moment.
• Le test de la négation

L’apport sémantique est celui d’une restriction à la durée temporelle évoquée

Il est mort

a. ça ne fait pas deux jours. (= ‘ça ne fait même pas deux jours’, ‘ça ne fait pas deux jours
entiers’, ‘ça fait moins de deux jours’)

La négation, même dans son interprétation, est inacceptable avec

*Il est mort ça ne fait pas un moment. (= *‘ça ne fait même pas un moment’, *‘c’est plus
court qu’un moment : un instant seulement’)

• La modalisation Le test des modalisations, selon qu’elles argumentent vers le « + » ou vers le


« – » va dans le même sens Cela/Ça fait SNtps permet une inflexion argumentant dans le
sens de la quantité aussi bien que dans celui de la minoration

Cela/Ça fait (déjà + quand même + presque + bien) (un mois + quelques

jours + plusieurs heures + deux semaines + des années).

b. Cela/Ça fait (seulement + juste + à peine) (un mois + quelques jours + deux

semaines).

c. Cela/Ça ne fait que (un mois + quelques jours + deux semaines)

Mais avec un moment, l’énoncé ne se prête pas à l’atténuation, elle est restreinte à
l’orientation vers le « + »

Cela/Ça fait (déjà + quand même + bien) un moment.

b. *Cela/Ça fait (seulement + juste + à peine) un moment 13.

c. *Cela/Ça ne fait qu’un moment.

• Les variantes

4. Conclusion
On a là une nouvelle différence permettant de considérer que (6) Cela/Ça fait un moment est un
cas particulier (une « construction ») du schéma général <Cela/Ça + faire + Détindéf + Ntps>.

Projection du travail :

en somme, pourquoi cela/ça fait est-il susceptible d’entrer dans cette construction : qu’est-ce
qui, dans l’identité du démonstratif et dans celle de faire, prédispose leur association pour
exprimer ce type de conceptualisation de la durée ? Nous

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