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À jeun Paroles: Jacques Brel.

Musique: Mitch Leigh   1968


note: de la comédie musicale "L'homme de la Mancha"

Je suis née comme une chienne une nuit où il pleuvait


Je suis née et ma mère est partie en chantant
Parfaitement à jeun
Et je ne sais rien d'elle que la haine que j'en ai
Vous me voyez surpris
J'aurais dû venir au monde en mourant
De ne pas trouver mon lit ici
Eh bien sûr, il y a mon père, on dit, on dit souvent
Parfaitement à jeun
Que les filles gardent leur père au profond de leur cœur
Je le vois qui recule
Mais je n'ai pas su mon père, mon père était plusieurs
Je le vois qui bascule aussi
Car mon père était un régiment
Je ne peux même pas dire s'ils étaient andalous ou prussiens
Guili guili guili
Sont-ils morts vers le nord, sont-ils morts vers le sud
Je n'en sais rien !
Viens-là mon petit lit
Si tu ne viens pas t'a moi
Une Dame, et comment veut-il que je sois une Dame ?
Ce n'est pas moi qui irai t'à toi
Mais qui n'avance pas recule
J'ai grandi comme une chienne de carrefour en carrefour
Comme dit Monsieur Dupneu
J'ai grandi et trop tôt sur la paille des mules
Un mec qui articule
De soldat en soldat, de crapule en crapule
Et qui est chef du contentieux
J'ai connu les bienfaits de l'amour
Et je vis comme une bête, je fais ça comme on se mouche
Parfaitement à jeun
Et je vis sans savoir ni pour qui ni pour quoi
Je reviens d'une belle fête
Pour un sou je me lève, pour deux sous je me couche
J'ai enterré Huguette ce matin
Pour trois sous je fais n'importe quoi !
Si vous ne me croyez guère, pour trois sous venez voir le
Parfaitement à jeun
restant
J'ai fait semblant d'pleurer
De la plus folle des fiancés au plus crapuleux des brigands de la
Pour ne pas faire rater la fête
terre
Z'étaient deux cents noirs
Mais chassez donc vos nuages et regardez-moi telle que je suis
Les voisins les amis
Une Dame, une vraie Dame a une vertu, a une âme
Y avait qu'moi qu'était gris
Dieu de Dieu, de tous les pires salauds que j'ai connus
Dans cette foire
Vous qui parlez d'étoile, vous qui montrez le ciel,
Y avait beau-maman belle-papa
Vous êtes bien le plus infâme, le plus cruel
Z'avez pas vu Mirza
Frappez-moi, je préfère le fouet à vos chimères,
Et puis Monsieur Dupneu
Frappez-moi jusqu'au feu, jusqu'au sol, jusqu'à terre
Qu'est chef du contentieux
Mais gardez votre tendresse, rendez-moi mon désespoir
Je suis née sur le fumier et j'y repars,
Parfaitement à jeun
Mais je vous en supplie, ne me parlez plus de Dulcinéa
En enterrant ma femme
Vous voyez bien que je ne suis rien, je ne suis qu'Aldonza la
J'ai surtout enterré
putain.
la maitresse d'André

Je n'l'ai su que c'matin


Et par un enfant de chœur
Qui m'racontait qu'sa sœur ah ça
Il me reste deux solutions Amsterdam
Ou bien frapper André
Ou bien gnougnougnafié
La femme d'André Paroles et Musique: Jacques Brel   1964  "Olympia 64"
Sur son balcon autres interprètes: Isabelle Boulay
Ou bien rester chez moi
Feu-cocu mais joyeux
C'est ce que me conseille André Dans le port d'Amsterdam
André André Dupneu Y a des marins qui chantent
Qu'est mon chef du contentieux Les rêves qui les hantent
Au large d'Amsterdam
Parfaitement à jeun Dans le port d'Amsterdam
Vous me voyez surpris Y a des marins qui dorment
De ne pas trouver mon lit Comme des oriflammes
Le long des berges mornes
Dans le port d'Amsterdam
Y a des marins qui meurent
Pleins de bière et de drames
Aldonza Aux premières lueurs
Mais dans le port d'Amsterdam
Y a des marins qui naissent
1
Dans la chaleur épaisse Au printemps au printemps
Des langueurs océanes Les amants vont prier
Notre-Dame du bon temps
Dans le port d'Amsterdam Au printemps
Y a des marins qui mangent Pour une fleur un sourire un serment
Sur des nappes trop blanches Pour l'ombre d'un regard en riant
Des poissons ruisselants
Ils vous montrent des dents Toutes les filles
A croquer la fortune Vous donneront leurs baisers
A décroisser la lune Puis tous leurs espoirs
A bouffer des haubans Vois tous ces cœurs
Et ça sent la morue Comme des artichauts
Jusque dans le cœur des frites Qui s'effeuillent en battant
Que leurs grosses mains invitent Pour s'offrir aux badauds
A revenir en peu plus Vois tous ces cœurs
Puis se lèvent en riant Comme de gentils mégots
Dans un bruit de tempête Qui s'enflamment en riant
Referment leur braguette Pour les filles du métro
Et sortent en rotant
Au printemps au printemps
Dans le port d'Amsterdam Et mon cœur et ton cœur
Y a des marins qui dansent Sont repeints au vin blanc
En se frottant la panse Au printemps au printemps
Sur la panse des femmes Les amants vont prier
Et ils tournent et ils dansent Notre-Dame du bon temps
Comme des soleils crachés Au printemps
Dans le son déchiré Pour une fleur un sourire un serment
D'un accordéon rance Pour l'ombre d'un regard en riant
Ils se tordent le cou
Pour mieux s'entendre rire Tout Paris
Jusqu'à ce que tout à coup Se changera en baisers
L'accordéon expire Parfois même en grand soir
Alors le geste grave Vois tout Paris
Alors le regard fier Se change en pâturage
Ils ramènent leur batave Pour troupeaux d'amoureux
Jusqu'en pleine lumière Aux bergères peu sages
Vois tout Paris
Dans le port d'Amsterdam Joue la fête au village
Y a des marins qui boivent Pour bénir au soleil
Et qui boivent et reboivent Ces nouveaux mariages
Et qui reboivent encore
Ils boivent à la santé Au printemps au printemps
Des putains d'Amsterdam Et mon cœur et ton cœur
De Hambourg ou d'ailleurs Sont repeints au vin blanc
Enfin ils boivent aux dames Au printemps au printemps
Qui leur donnent leur joli corps Les amants vont prier
Qui leur donnent leur vertu Notre-Dame du bon temps
Pour une pièce en or Au printemps
Et quand ils ont bien bu Pour une fleur un sourire un serment
Se plantent le nez au ciel Pour l'ombre d'un regard en riant
Se mouchent dans les étoiles
Et ils pissent comme je pleure Toute la Terre
Sur les femmes infidèles Se changera en baisers
Dans le port d'Amsterdam Qui parleront d'espoir
Dans le port d'Amsterdam. Vois ce miracle
Car c'est bien le dernier
Qui s'offre encore à nous
Sans avoir à l'appeler
Vois ce miracle
Qui devait arriver
C'est la première chance
Au printemps La seule de l'année
Paroles et Musique: Jacques Brel   1958
Au printemps au printemps
Et mon cœur et ton cœur
Sont repeints au vin blanc
Au printemps au printemps Au printemps au printemps
Et mon cœur et ton cœur Les amants vont prier
Sont repeints au vin blanc Notre-Dame du bon temps
2
Au printemps Et sur l'impériale
Le cœur dans les étoiles
Au printemps Il y avait mon grand-père
Au printemps Il y avait ma grand-mère
Il était militaire
Elle était fonctionnaire
Il pensait pas elle pensait rien
Et on voudrait que je sois malin
Au suivant
C'était au temps où Bruxelles chantait
Paroles et Musique: Jacques Brel   1964
C'était au temps du cinéma muet
C'était au temps où Bruxelles rêvait
Tout nu dans ma serviette qui me servait de pagne
C'était au temps où Bruxelles bruxellait
J'avais le rouge au front et le savon à la main
Au suivant au suivant
Sur les pavés de la place Sainte-Catherine
J'avais juste vingt ans et nous étions cent vingt
Dansaient les hommes les femmes en crinoline
A être le suivant de celui qu'on suivait
Sur les pavés dansaient les omnibus
Au suivant au suivant
Avec des femmes des messieurs en gibus
J'avais juste vingt ans et je me déniaisais
Et sur l'impériale
Au bordel ambulant d'une armée en campagne
Le cœur dans les étoiles
Au suivant au suivant
Il y avait mon grand-père
Il y avait ma grand-mère
Moi j'aurais bien aimé un peu plus de tendresse
Il avait su y faire
Ou alors un sourire ou bien avoir le temps
Elle l'avait laissé faire
Mais au suivant au suivant
Ils l'avaient donc fait tous les deux
Ce ne fut pas Waterloo mais ce ne fut pas Arcole
Et on voudrait que je sois sérieux
Ce fut l'heure où l'on regrette d'avoir manqué l'école
Au suivant au suivant
C'était au temps où Bruxelles rêvait
Mais je jure que d'entendre cet adjudant de mes fesses
C'était au temps du cinéma muet
C'est des coups à vous faire des armées d'impuissants
C'était au temps où Bruxelles dansait
Au suivant au suivant
C'était au temps où Bruxelles bruxellait
Je jure sur la tête de ma première vérole
Sous les lampions de la place Sainte-Justine
Que cette voix depuis je l'entends tout le temps
Chantaient les hommes les femmes en crinoline
Au suivant au suivant
Sous les lampions dansaient les omnibus
Cette voix qui sentait l'ail et le mauvais alcool
Avec des femmes des messieurs en gibus
C'est la voix des nations et c'est la voix du sang
Et sur l'impériale
Au suivant au suivant
Le cœur dans les étoiles
Et depuis chaque femme à l'heure de succomber
Il y avait mon grand-père
Entre mes bras trop maigres semble me murmurer
Il y avait ma grand-mère
Au suivant au suivant
Il attendait la guerre
Elle attendait mon père
Tous les suivants du monde devraient se donner la main
Ils étaient gais comme le canal
Voilà ce que la nuit je crie dans mon délire
Et on voudrait que j'aie le moral
Au suivant au suivant
Et quand je ne délire pas j'en arrive à me dire
C'était au temps où Bruxelles rêvait
Qu'il est plus humiliant d'être suivi que suivant
C'était au temps du cinéma muet
Au suivant au suivant
C'était au temps où Bruxelles chantait
Un jour je me ferai cul-de-jatte ou bonne sœur ou pendu
C'était au temps où Bruxelles bruxellait
Enfin un de ces machins où je ne serai jamais plus
Le suivant le suivant

C'est comme ça
Paroles et Musique: Jacques Brel   1955

Bruxelles
Paroles et Musique: J. Brel/G Jouannest   1962 Dans les campagnes y a les filles
Les filles qui vont chercher l'eau
A tire larigot
C'était au temps où Bruxelles rêvait
Les filles font la file gentille
C'était au temps du cinéma muet
Et tout en parlant tout haut
C'était au temps où Bruxelles chantait
Les filles font la file gentille
C'était au temps où Bruxelles bruxellait
Et tout en parlant tout haut
Du feu et de l'eau
Place de Broukère on voyait des vitrines
Avec des hommes des femmes en crinoline
C'est comme ça depuis que le monde tourne
Place de Broukère on voyait l'omnibus
Y a rien à faire pour y changer
Avec des femmes des messieurs en gibus
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C'est comme ça depuis que le monde tourne Musique: Jacques Brel   1966
Et il vaut mieux ne pas y toucher

Près des filles ya les garçons D'abord il y a l'aîné


Les longs les minces et les gras Lui qui est comme un melon
Qui rigolent tout bas Lui qui a un gros nez
Les noirs les roses et les blonds Lui qui sait plus son nom
Qui parlent de leur papa Monsieur tellement qui boit
Les noirs les roses et les blonds Ou tellement qu'il a bu
Qui parlent de leur papa Qui fait rien de ses dix doigts
Et des yeux doux d'Isa Mais lui qui n'en peut plus
Lui qui est complètement cuit
Y a les garçons y a les papas Et qui se prend pour le roi
Qui ont l'air graves et sévères Qui se saoule toutes les nuits
Et qui sentent la bière Avec du mauvais vin
Ils crient pour n'importe quoi Mais qu'on retrouve matin
Et sortent le soir par derrière Dans l'église qui roupille
Ils crient pour n'importe quoi Raide comme une saillie
Et sortent le soir par derrière Blanc comme un cierge de Pâques
Pour jouer au poker Et puis qui balbutie
Et qui a l'œil qui divague
C'est comme ça depuis que le monde tourne Faut vous dire Monsieur
Y a rien à faire pour y changer Que chez ces gens-là
C'est comme ça depuis que le monde tourne On ne pense pas Monsieur
Et il vaut mieux ne pas y toucher On ne pense pas on prie

Dans les cafés y a les copains Et puis, il y a l'autre


Et tous les verres qu'on boit à vide Des carottes dans les cheveux
Y a aussi les verres vides Qu'a jamais vu un peigne
Et les copains qu'on aime bien Ouest méchant comme une teigne
Vous font rentrer à l'aube livide Même qu'il donnerait sa chemise
Et les copains qu'on aime bien A des pauvres gens heureux
Vous font rentrer à l'aube livide Qui a marié la Denise
Toutes les poches vides Une fille de la ville
Enfin d'une autre ville
Près des copains il y a la ville Et que c'est pas fini
La ville immense et inutile Qui fait ses petites affaires
Où je me fais de la bile Avec son petit chapeau
La ville avec ses plaisirs vils Avec son petit manteau
Qui pue l'essence d'automobile Avec sa petite auto
La ville avec ses plaisirs vils Qu'aimerait bien avoir l'air
Qui pue l'essence d'automobile Mais qui n'a pas l'air du tout
Ou la guerre civile Faut pas jouer les riches
Quand on n'a pas le sou
C'est comme ça depuis que le monde tourne Faut vous dire Monsieur
Y a rien à faire pour y changer Que chez ces gens-là
C'est comme ça depuis que le monde tourne On ne vit pas Monsieur
Et il vaut mieux ne pas y toucher On ne vit pas on triche

Près de la ville il y a la campagne Et puis, il y a les autres


Où les filles brunes ou blondes La mère qui ne dit rien
Dansent à la ronde Ou bien n'importe quoi
Et par la plaine par la montagne Et du soir au matin
Laissons-les fermer la ronde Sous sa belle gueule d'apôtre
Et par la plaine par la montagne Et dans son cadre en bois
Laissons-les fermer la ronde Il y a la moustache du père
Des braves gens du monde Qui est mort d'une glissade
Et qui recarde son troupeau
C'est comme ça depuis que le monde tourne Bouffer la soupe froide
Y a rien à faire pour y changer Et ça fait des grands flchss
C'est comme ça depuis que le monde tourne Et ça fait des grands flchss
Et il vaut mieux ne pas y toucher Et puis il y a la toute vieille
Et il vaut mieux ne pas y toucher Qu'en finit pas de vibrer
Et il vaut mieux ne pas y toucher Et qu'on attend qu'elle crève
Vu que c'est elle qu'a l'oseille
Et qu'on écoute même pas
Ce que ses pauvres mains racontent
Ces gens-là Faut vous dire Monsieur
Que chez ces gens-là
4
On ne cause pas Monsieur
On ne cause pas on compte Mais le temps que s'allume
L'idée sur le papier
Et puis et puis Le temps de prendre une plume
Et puis il y a Frida Le temps de la tailler
Qui est belle comme un soleil Mais le temps de me dire
Et qui m'aime pareil Comment vais-je l'écrire
Que moi j'aime Frida Et le temps est venu
Même qu'on se dit souvent Où tu ne m'aimais plus
Qu'on aura une maison {2x}
Avec des tas de fenêtres
Avec presque pas de murs
Et qu'on vivra dedans
Et qu'il fera bon y être Clara
Et que si c'est pas sûr Paroles et Musique: Jacques Brel   1961
C'est quand même peut-être
Parce que les autres veulent pas Je t'aimais tant, Clara
Parce que les autres veulent pas Je t'aimais tant
Les autres ils disent comme ça Je t'aimais tant, Clara
Qu'elle est trop belle pour moi Je t'aimais tant
Que je suis tout juste bon
A égorger les chats Carnaval à Rio
J'ai jamais tué de chats Tu peux toujours danser
Ou alors y a longtemps Carnaval à Rio
Ou bien j'ai oublié Tu n'y peux rien changer
Ou ils sentaient pas bon Je suis mort à Paris
Enfin ils ne veulent pas Il y a longtemps déjà
Parfois quand on se voit Il y a longtemps d'ennui
Semblant que c'est pas exprès Il y a longtemps de toi
Avec ses yeux mouillants
Elle dit qu'elle partira Je t'aimais tant, Clara
Elle dit qu'elle me suivra Je t'aimais tant
Alors pour un instant Je t'aimais tant, Clara
Pour un instant seulement Je t'aimais tant
Alors moi je la crois Monsieur
Pour un instant Carnaval à Rio
Pour un instant seulement Tu peux toujours chanter
Parce que chez ces gens-là Carnaval à Rio
Monsieur on ne s'en va pas Tu n'y peux rien changer
On ne s'en va pas Monsieur Je suis mort à Paris
On ne s'en va pas Tombé au champ d'amour
Mais il est tard Monsieur Pour un prénom de fille
Il faut que je rentre chez moi. Qui m'avait dit toujours

Je t'aimais tant, Clara


Je t'aimais tant
Chanson sans paroles Je t'aimais
Je t'aimais
tant, Clara
tant
Paroles et Musique: J. Brel/F Rauber   1962
Carnaval à Rio
Tu peux toujours tourner
J'aurais aimé ma belle Carnaval à Rio
T'écrire une chanson Tu n'y peux rien changer
Sur cette mélodie Je suis mort à Paris
Rencontrée une nuit De m'être trop trompé
J'aurais aimé ma belle De m'être trop meurtri
Rien qu'au point d'Alençon De m'être trop donné
T'écrire un long poème
T'écrire un long " je t'aime " Je t'aimais tant, Clara
Je t'aimais tant
Je t'aurais dit " amour " Je t'aimais tant, Clara
Je t'aurais dit " toujours " Je t'aimais tant
Mais de mille façons
Mais par mille détours Carnaval à Rio
Je t'aurais dit " partons " Tu peux me bousculer
Je t'aurais dit " brûlons Carnaval à Rio
Brûlons de jour en jour Tu n'y peux rien changer
De saisons en saisons " Je suis mort à Paris
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Fusillé par une fleur La nuit je veille de nuit
Au poteau de son lit Le jour je veille de jour
De douze rires dans le cœur Le dimanche je fais des extras.
Et même si j'étais moins lâche
Je t'aimais tant, Clara Je touve que ce serait dommage
Je t'aimais tant De salir ma réputation.
Je t'aimais tant, Clara Bien sûr je dors dans le garage.
Je t'aimais tant Bien sûr il dort dans mon lit.
Bien sûr c'est moi qui fait l'ménage.
Carnaval à Rio Mais qui n'a pas ses p'tits soucis?
Tu peux toujours crier
Carnaval à Rio Comment tuer l'amant de sa femme
Tu n'y peux rien changer Quand on a été comme moi élevé
Je suis mort à Paris Dans les traditions?
Il y a mille soirs Il y a l'arsenic ouais
Il y a mille nuits C'est trop long.
Il n'y a plus d'espoir Il y a le révolver
Mais c'est trop court.
Je t'aimais tant, Clara Il y a l'amitié
Je t'aimais tant C'est trop cher.
Je t'aimais tant, Clara Il y a le mépris
Je t'aimais tant C'est un péché.
Comment tuer l'amant d'sa femme
Carnaval à Rio Quand on a reçu comme moi
Tu peux bien me saouler La croix d'honneur
Carnaval à Rio Chez les bonnes sœurs?
Tu n'y peux rien changer Comment tuer l'amant d'sa femme
Je suis mort à Paris Moi qui n'ose même pas
A Paris que j'enterre Le lui dire avec des fleurs?
Et depuis mille nuits Comme je n'ai pas l'courage
Dans le fond de mon verre De l'insulter tout l'temps
Il dit que l'amour me rend lâche.
Je t'aimais tant, Clara Comme il est en chômage
Je t'aimais tant Il dit en me frappant
Je t'aimais tant, Clara Que l'amour le rend imprévoyant.
Je t'aimais tant Il croit que c'est amusant
Pour un homme qui a mon âge
Carnaval à Rio Qui n'a plus de femme et onze enfants.
Tu peux carnavaler Bien sûr je leur fais la cuisine
Carnaval à Rio Je bats les chiens et les tapis
Tu n'y peux rien changer Le soir je leur chante "Nuit de Chine".
Je suis mort à Paris Mais qui n'a pas ses p'tits soucis?
Que la mort me console
La mort est par ici Pourquoi tuer l'amant d'sa femme
La mort est espagnole Puisque c'est à cause de moi
Qu'il est un peu vérolé?
Je t'aimais tant, Clara Pourquoi tuer l'amant d'ma femme
Je t'aimais tant Puisque c'est à cause de moi
Je t'aimais tant, Clara Qu'il est péniciliné?
Je t'aimais tant

De burgerij (Les Bourgeois)


Comment tuer l'amant de sa Paroles: Jacques Brel, adap: Ernst van Altena. Musique: Jean
femme ... Corti   1965  "J'arrive"

Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1968 Dronken, dol en dwaas


note: Titre exact: "Comment tuer l'amant de sa femme quand Beet ik in mijn bier
on a été élevé comme moi dans la tradition" Bij de dikke Siaam uit Monverland
Ik dronk een glas met Klaas
Comment tuer l'amant de sa femme Ik dronk een glas met Peer
Quand on a été comme moi élevé En sprong er aardig uit de band
Dans les traditions? Die klaas hij voelde zich een Dante
Comment tuer l'amant de sa femme Die Peer wou Casanova zijn
Quand on a été comme moi élevé En ik de superarrogante
Dans la religion? Ik dacht dat ik mezelf kon zijn
Il me faudrait du temps En om twaalf uur als de burgertroep
Et du temps j'en ai pas. Huisging uit hotel de Goudfazant
Pour elle je travaille tout l'temps
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Dan scholden wij ze poep Ze gaan uit omdat er thuis niets wacht
En zongen vol vuur De nuttelozen van de nacht
pet in de hand Zij gedraagt zich arrogant omdat ze mooie borsten heeft
Hij is zeker en charmant omdat Papa hem centen geeft
Burgerij, mannen van het jaar nul Hun onmacht is hun hoogste macht
Vette burgerklik De nuttelozen van de nacht
Vette vieze varkens
Burgerij tamme zwijnenspul Kom dans met mij
Al die burger is is een ouwe ... Vriendin, kom hier, vriendin, kom hier, kom Hier; nee, nee
blijf!
Dronken, dol en dwaas Kom dans met mij, laat ons dansen lijf aan lijf
Beet ik in mijn bier
Bij de dikke Siaam uit Monverland Ze braken zonder ziek te zijn
Ik dronk een vat met Klaas Ze braken zacht en zonder pijn
Ik dronk een fust met Peer Ze nemen zich bedroefd de nacht
En sprong er heftig uit de band De nuttelozen van de nacht
Klaas Dante danste als mijn tante Ze bespreken zonder end
En Casanova was te bang De poezie die geen van hen kent
Maar ik de superarrogante De romans die geen van hen schreef
Was zelfs voor mezelf niet bang De vrouw die bij geen van hen bleef
De grap waarom geen van hen om lacht
En om twaalf uur als de burgertroep De nuttelozen van de nacht
Huisging uit hotel de Goudfazant Kom dans met mij
Dan scholden wij ze poep Vriendin, kom hier, vriendin, kom hier, kom hier; nee, nee
En zongen vol vuur blijf!
pet in de hand Kom dans met mij, laat ons dansen lijf aan lijf

Burgerij, mannen van het jaar nul In de liefde zijn ze zo berooid


Vette burgerklik 't Was, 't was, ze was zo zacht
Vette vieze varkens Ze was, ach, dat begrijp u nooit
Burgerij tamme zwijnenspul De nuttelozen van de nacht
Al die burger is is een ouwe ... Ze nemen nog een laatste glas
Vertellen nog een laatste grap
Elk instinct dwaas En met een allerlaatste glas
Zoek ik mijn vertier De laatste dans
's Avonds in hotel de Goudfazant De laatste stap
Met meester-facteur Klaas Het laatste verdriet
En met notaris Peer bespreek ik daar de avondkrant De laatste klacht
De nuttelozen van de nacht
En Klaas citeert eens wat uit Dante
Of Peer haalt Casanova aan Kom, kom, kom huil met mij
En ik ik bleef de superarrogante Vriendin, kom hier, vriendin, kom hier, kom hier, nee blijf
Ik haal nog steeds mijn eigen woorden aan Kom, kom huil met mij
Laat ons huilen lijf aan lijf
Maar gaan wij naar huis De nuttelozen van de nacht
Meneer de brigadier
Dan staat daar bij die Siaam uit Monverland
Een hele troep gespuis
Dronken van al het bier
Dat zingt dan van
Demain l'on se marie
Paroles et Musique: Jacques Brel   1958
Burgerij, mannen van het jaar nul
Vette burgerklik Puisque demain l'on se marie
Vette vieze varkens Apprenons la même chanson
Ja meneer de brigadier Puisque demain s'ouvre la vie
Ja dat zijn ze Dis-moi ce que nous chanterons
Burgerij tamme zwijnenspul
Al die burger is is een ouwe ... Nous forcerons l'amour
A bercer notre vie
D'une chanson jolie
Qu'à deux nous chanterons
De nuttelozen van de nacht (Les Nous forcerons l'amour
Si tu le veux, ma mie
paumés du petit matin) A n'être de nos vies
Paroles: Jacques Brel, adapt: Ernst van Altena. Musique: Que l'humble forgeron
François Rauber   1965  "J'arrive"
Puisque demain l'on se marie
Ze ontwaken om een uur om vier Apprenons la même chanson
Ze ontbijten met een kleintje bier Puisque demain s'ouvre la vie
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Dis-moi ce que nous y verrons Dors ma mie
C'est notre dernier soir
Nous forcerons nos yeux Dors ma mie bonsoir
A ne jamais rien voir Sur les fleurs qui ferment leurs paupières
Que la chose jolie Pleure la pluie légère
Qui vit en chaque chose Et l'oiseau qui chantera l'aurore
Nous forcerons nos yeux Dors et rêve encor'
A n'être qu'un espoir Ainsi demain déjà
A deux nous offrirons Serai seul à nouveau
Comme on offre une rose Et tu m'auras perdu
Rien qu'en me voulant trop
Puisque demain l'on se marie Tu m'auras gaspillé
Apprenons la même chanson A te vouloir bâtir
Puisque demain s'ouvre la vie Un bonheur éternel
Dis-moi encore où nous irons Ennuyeux à périr
Au lieu de te pencher
Nous forcerons les portes Vers moi tout simplement
Des pays d'orient Moi qui avais besoin
A s'ouvrir devant nous Si fort de ton printemps
Devant notre sourire Non les filles que l'on aime
Nous forcerons, ma mie Ne comprendront jamais
Le sourire des gens Qu'elles sont à chaque fois
A n'être plus jamais Notre dernier muguet
Une joie qui soupire Notre dernière chance
Notre dernier sursaut
Puisque demain s'ouvre la vie Notre dernier départ notre dernier bateau
Ouvrons la porte à ces chansons Dors ma mie
Puisque demain l'on se marie Dehors la nuit est noire
Apprenons la même chanson Dors ma mie bonsoir
Dors ma mie c'est notre dernier soir
Dors ma mie je pars

Dites, si c'était vrai


1958
© 1958 Editions musicales Pouchenel Fernand
1966

Dites, dites, si c'était vrai Dire que Fernand est mort


S'il était né vraiment à Bethléem, dans une étable Dire qu'il est mort Fernand
Dites, si c'était vrai Dire que je suis seul derrière
Si les rois Mages étaient vraiment venus de loin, de fort loin Dire qu'il est seul devant
Pour lui porter l'or, la myrrhe, l'encens Lui dans sa dernière bière
Dites, si c'était vrai Moi dans mon brouillard
Si c'était vrai tout ce qu'ils ont écrit Luc, Matthieu Lui dans son corbillard
Et les deux autres, Moi dans mon désert
Dites, si c'était vrai Devant y a qu'un cheval blanc
Si c'était vrai le coup des Noces de Cana Derrière y a que moi qui pleure
Et le coup de Lazare Dire qu' a même pas de vent
Dites, si c'était vrai Pour agiter mes fleurs
Si c'était vrai ce qu'ils racontent les petits enfants Moi si j'étais l'Bon Dieu
Le soir avant d'aller dormir Je crois qu'j'aurais des remords
Vous savez bien, quand ils disent Notre Père, quand ils disent Dire que maintenant il pleut
Notre Mère Dire que Fernand est mort
Si c'était vrai tout cela
Je dirais oui Dire qu'on traverse Paris
Oh, sûrement je dirais oui Dans le tout p'tit matin
Parce que c'est tellement beau tout cela Dire qu'on traverse paris
Quand on croit que c'est vrai. Et qu'on dirait Berlin
Toi, toi, toi tu sais pas
Tu dors mais c'est triste à mourir
D'être obligé d'partir
Dors ma mie Quand Paris dort encore
Paroles et Musique: F. Rauber/J. Brel   1958 Moi je crève d'envie
De réveiller des gens
J't'inventerai une famille
Juste pour ton enterrement
Dors ma mie Et puis si j'étais l'Bon Dieu
Dehors la nuit est noire Je crois que je ne serais pas fier
Dors ma mie bonsoir
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Je sais on fait ce qu'on peut Fils de l'amour
Mais il y a la manière Fils d'amourettes
Tous les enfants
Tu sais je reviendrai Sont des poètes
Je reviendrai souvent Ils sont bergers
Dans ce putain de champ Ils sont rois mages
Où tu dois te reposer Font des nuages
L'été je ferai de l'ombre Pour mieux voler
On boira du silence Mais fils de bon fils
À la santé d'Constance Ou fils d'étranger
Qui se fout bien d'ton ombre Tous les enfants
Et puis les adultes sont tellement cons Sont des sorciers
Qu'ils nous feront bien une guerre Ce n'est qu'après
Alors je viendrai pour de bon Longtemps après
Dormir dans ton cimetière
Et maintenant bon Dieu Mais fils de bourgeois
Tu as bien rigolé Ou fils d'apôtres
Et maintenant bon Dieu Tous les enfants
Et maintenant j'vais pleurer Sont comme les vôtres
Fils de César
Ou fils de rien
Tous les enfants
Sont comme le tien
Fils de ... Le même sourire
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1967 Les mêmes larmes
Les mêmes alarmes
Fils de bourgeois Les mêmes soupirs
Ou fils d'apôtres Fils de César
Tous les enfants Ou fils de rien
Sont comme les vôtres Tous les enfants
Fils de César Sont comme le tien
Ou fils de rien
Tous les enfants
Sont comme le tien
Le même sourire Grand Jacques (C'est trop facile)
Les mêmes larmes Paroles et Musique: Jacques Brel   1955
Les mêmes alarmes
Les mêmes soupirs C'est trop facile d'entrer aux églises
Fils de César De déverser toutes ses saletés
Ou fils de rien Face au curé qui dans la lumière grise
Tous les enfants Ferme les yeux pour mieux nous pardonner
Sont comme le tien
Ce n'est qu'après Tais-toi donc Grand Jacques
Longtemps après Que connais-tu du Bon Dieu
Un cantique une image
Mais fils de sultan Tu n'en connais rien de mieux
Fils de fakir
Tous les enfants C'est trop facile quand les guerres sont finies
Ont un empire D'aller gueuler que c'était la dernière
Sous voutes d'or Ami bourgeois vous me faites envie
Sous toits de chaumes Vous ne voyez donc point vos cimetières
Tous les enfants
Ont un royaume Tais-toi donc Grand Jacques
Un coin de vague Et laisse-les donc crier
Une fleur qui tremble Laisse-les pleurer de joie
Un oiseau mort Toi qui ne fus même pas soldat
Qui leur ressemble
Fils de sultan C'est trop facile quand un amour se meurt
Fils de fakir Qu'il craque en deux parce qu'on l'a trop plié
Tous les enfants D'aller pleurer comme les hommes pleurent
Ont un empire Comme si l'amour durait l'éternité
Ce n'est qu'après
Longtemps après Tais-toi donc Grand Jacques
Que connais-tu de l'amour
Mais fils de bon fils Des yeux bleus des cheveux fous
Ou fils d'étranger Tu n'en connais rien du tout
Tous les enfants
Sont des sorciers Et dis-toi donc Grand Jacques {2x}

9
Dis-le-toi bien souvent
C'est trop facile Faut voir grand-mère
De faire semblant. {2x} Quand elle se croit pécheresse
Un grand verre de grand-messe
Et un doigt de couvent

Mais pendant c'temps-là


Grand'Mère Grand-père court après la bonne
Paroles et Musique: Jacques Brel   1966 En lui disant que les curés
Sont farceurs
Comment voulez-vous bonnes gens
Faut voir grand-mère Que nos bonnes bonnes
Grand-mère et sa poitrine Et nos petits incroyants
Grand-mère et ses usines Aient le sens des valeurs
Et ses vingt secrétaires
Mais il faut voir grand-père
Faut voir mère-grand Dans les bistrots bavards
Diriger ses affaires Où claquent les billards
Elle vend des courants d'air Et les chopes de bière
Déguisés en coups de vent
Faut voir père-grand
Faut voir grand-mère Caresser les roseaux
Quand elle compte son magot Effeuiller les étangs
Ça fait des tas de zéros Et pleurer du Rimbaud
Pointés comme son derrière
Faut voir grand-père
Mais pendant c'temps-là Dimanche finissant
Grand-père court après la bonne Honteux et regretant
En lui disant que l'argent D'avoir trompé grand-mère
Ne fait pas le bonheur
Comment voulez-vous bonnes gens Mais pendant c'temps-là
Que nos bonnes bonnes Grand-mère se tape la bonne
Et nos petits épargnants En lui disant que les hommes
Aient le sens des valeurs Sont menteurs
Comment voulez-vous bonnes gens
Faut voir grand-mère Que nos bonnes bonnes
C'est une tramontane Et notre belle jeunesse
Qui fume le Havane Aient le sens des valeurs
Et fait trembler la Terre

Faut voir grand-mère


Cerclée de généraux
Heureux
Être culotte de peau © Éditions Tropicales
Et gagner leur guèguerre

Faut voir grand-mère Heureux qui chante pour l'enfant


Dressée sous son chapeau Et qui sans jamais rien lui dire
C'est Waterloo Le guide au chemin triomphant
Où s'rait pas venu Blucher Heureux qui chante pour l'enfant
Heureux qui sanglote de joie
Mais pendant c'temps-là Pour s'être enfin donné d'amour
Grand-père court après la bonne Ou pour un baiser que l'on boit
En lui disant que l'armée Heureux qui sanglote de joie
Elle bat l'beure
Comment voulez-vous bonnes gens Heureux les amants séparés
Que nos bonnes bonnes Et qui ne savent pas encor'
Et nos chers piou-pious Qu'ils vont demain se retrouver
Aient le sens des valeurs Heureux les amants séparés
Heureux les amants épargnés
Faut voir grand-mère Et dont la force de vingt ans
S'assure sur la mort Ne sert à rien qu'à bien s'aimer
Un p'tit coup d'presbytère Heureux les amants épargnés
Un p'tit coup de r'mords
Heureux les amants que nous sommes
Faut voir grand-mère Et qui demain loin l'un de l'autre
Et ses ligues de vertu S'aimeront s'aimeront
Ses anciens combattants Par-dessus les hommes
Ses anciens combattus

10
Des hommes qui ont peur
Par delà le vacarme
Des rues et des chantiers
Il neige sur Liège Des sirènes d’alarme
Des jurons de charretier
Paroles et Musique: Jacques Brel   1963
Plus fort que les enfants
note: du film "Belgique vue du ciel"
Qui racontent les guerres
Et plus fort que les grands
Qui nous les ont fait faire
Il neige il neige sur Liège
Et la neige sur Liège pour neiger met des gants Il nous faut regarder
Il neige il neige sur Liège L’oiseau au fond des bois
Croissant noir de la Meuse sur le front d'un clown blanc Le murmure de l’été
Il est brisé le cri Le sang qui monte en soi
Des heures et des oiseaux Les berceuses de mères
Des enfants à cerceaux Les prières des enfants
Et du noir et du gris Et le bruit de la terre
Il neige il neige sur Liège Qui s’endort doucement
Que le fleuve traverse sans bruit Les berceuses de mères
Les prières des enfants
Il neige il neige sur Liège Et le bruit de la terre
Et tant tourne la neige entre le ciel et Liège Qui s’endort doucement
Qu'on ne sait plus s'il neige s'il neige sur Liège
Ou si c'est Liège qui neige vers le ciel
Et la neige marie
Les amants débutants
Les amants promenant Il peut pleuvoir
Sur le carré blanchi Paroles et Musique: J. Brel/G. Powell   1955
Il neige il neige sur Liège
Que le fleuve transporte sans bruit Il peut pleuvoir
Sur les trottoirs
Ce soir ce soir il neige sur mes rêves et sur Liège Des grands boulevards
Que le fleuve transperce sans bruit Moi j'm'en fiche
J'ai ma mie
Auprès de moi
Il nous faut regarder Il peut pleuvoir
Sur les trottoirs
© Éditions Tropicales Des grands boulevards
Moi j'm'en fiche
Car ma mie
Derrière la saleté C'est toi
S’étalant devant nous
Derrière les yeux plissés Et au soleil là-haut
Et les visages mous Qui nous tourne le dos
Au-delà de ces mains Dans son halo de nuages
Ouvertes ou fermées Et au soleil là-haut
Qui se tendent en vain Qui nous tourne le dos
Ou qui sont poing levé Moi je crie bon voyage
Plus loin que les frontières
Qui sont de barbelés Il peut pleuvoir
Plus loin que la misère Sur les trottoirs
Il nous faut regarder Des grands boulevards
Moi j'm'en fiche
Il nous faut regarder J'ai ma mie
Ce qu’il y a de beau Auprès de moi
Le ciel gris ou bleuté Il peut pleuvoir
Les filles au bord de l’eau Sur les trottoirs
L’ami qu’on sait fidèle Des grands boulevards
Le soleil de demain Moi j'm'en fiche
Le vol d’une hirondelle Car ma mie
Le bateau qui revient C'est toi
L’ami qu’on sait fidèle
Le soleil de demain Aux flaques d'eau qui brillent
Le vol d’une hirondelle Sous les jambes des filles
Le bateau qui revient Aux néons étincellants
Qui lancent dans la vie
Par-delà le concert Leur postillons de pluie
Des sanglots et des pleurs Je crie en rigolant:
Et des cris de colère
11
Et aux gens qui s'en viennent Je m'y plonge le soir
Et aux gens qui s'en vont Et j'y plonge ma peine
Jour et nuit tournez en rond
Et aux gens qui s'en viennent Il pleut
Et aux gens qui s'en vont Et c'est ma faute à moi
Moi je crie à pleins poumons Les carreaux des usines
Sont toujours mal lavés
Y a plein d'espoir Il pleut
Sur les trottoirs Les carreaux des usines
Des grands boulevards Moi j'irai les casser
Et j'en suis riche
J'ai ma mie
Auprès de moi
Y a plein d'espoir Il y a
Sur les trottoirs
Des grands boulevards Il y a tant de brouillard dans les ports, au matin
Et j'en suis riche Qu'il n'y a de filles dans le cœur des marins
Car ma mie Il y a tant de nuages qui voyagent là-haut
C'est toi Qu'il n'y a d'oiseaux
C'est toi ... Il y a tant de labours il y a tant de semences
Qu'il n'y a de joie d'espérance
Il y a tant de ruisseaux il y a tant de rivières
Qu'il n'y a de cimetières
Il pleut (Les Carreaux)
Paroles et Musique: J. Brel/G. Powell   1955 Mais il y a tant de bleu dans les yeux de ma mie
Il y a dans ses yeux tant de vie
Il pleut Il y a dans ses cheveux un peu d'éternité
C'est pas ma faute à moi Sur sa lèvre tant de gaieté
Les carreaux des usines
Sont toujours mal lavés Il y a tant de lumières dans les rues des citées
Il pleut Qu'il n'y a d'enfants désolés
Les carreaux des usines Il y a tant de chansons perdues dans le vent
Y en beaucoup d'cassés Qu'il n'y a d'enfants
Il y a tant de vitraux, il y a tant de clochers
Les filles qui vont danser Qu'il n'y a de voix qui nous disent d'aimer
Ne me regardent pas Il y a tant de canaux qui traversent la terre
Car elles s'en vont danser Qu'il n'y a de rides au visage des mères
Avec tous ceux là
Qui savent leur payer
Pour pouvoir s'amuser
Des fleurs de papier
Ou de l'au parfumée Isabelle
Les filles qui vont danser Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel-F. Rauber   1959
Ne me regardent pas
Car elles s'en vont danser
Avec tous ceux là Quand Isabelle dort plus rien ne bouge
Quand Isabelle dort au berceau de sa joie
Il pleut Sais-tu qu'elle vole la coquine
C'est pas ma faute à moi Les oasis du Sahara
Les carreaux des usines Les poissons dorés de la Chine
Sont toujours mal lavés Et les jardins de l'Alhambra
Les corridors crasseux Quand Isabelle dort plus rien ne bouge
Sont les seuls que je vois Quand Isabelle dort au berceau de sa joie
Les escaliers qui montent Elle vole les rêves et les jeux
Ils sont toujours pour moi D'une rose et d'un bouton d'or
Mais quand je suis Pour se les poser dans les yeux
Seul sous les toits Belle Isabelle quand elle dort
Avec le soleil
Et avec les nuages Quand Isabelle rit plus rien ne bouge
J'entends la rue pleurer Quand Isabelle rit au berceau de sa joie
Je vois les cheminées Sais-tu qu'elle vole la cruelle
De la ville fumer Le rire des cascades sauvages
Doucement dans mon ciel à moi Qui remplacent les escarcelles
La lune danse Des rois qui n'ont pas d'équipages
Pour moi le soir Quand Isabelle rit plus rien ne bouge
Elle danse danse Quand Isabelle rit au berceau de sa joie
Elle danse danse Elle vole les fenêtres de l'heure
Et son haleine Qui s'ouvrent sur le paradis
Immense halo me caresse
12
Pour se les poser dans le cœur De chrysanthèmes en chrysanthèmes
Belle Isabelle quand elle rit Les hommes pleurent les femmes pleuvent

Quand Isabelle chante plus rien ne bouge J'arrive j'arrive


Quand Isabelle chante au berceau de sa joie Mais qu'est-ce que j'aurais bien aimé
Sais-tu qu'elle vole la dentelle Encore une fois traîner mes os
Tissée au cœur de rossignol Jusqu'au soleil jusqu'à l'été
Et les baisers que les ombrelles Jusqu'à demain jusqu'au printemps
Empêchent de prendre leur vol J'arrive, j'arrive
Quand Isabelle chante plus rien ne bouge Mais qu'est-ce que j'aurais bien aimé
Quand Isabelle chante au berceau de sa joie Encore une fois voir si le fleuve
Elle vole le velours et la soie Est encore fleuve voir si le port
Qu'offre la guitare à l'infante Est encore port m'y voir encore
Pour se les poser dans la voix J'arrive j'arrive
Belle Isabelle quand elle chante Mais pourquoi moi pourquoi maintenant
Pourquoi déjà et où aller
J'arrive bien sûr, j'arrive
N'ai-je jamais rien fait d'autre qu'arriver
J'aimais De chrysanthèmes en chrysanthèmes
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest/F. Rauber   1963 A chaque fois plus solitaire
De chrysanthèmes en chrysanthèmes
J'aimais les fées et les princesses A chaque fois surnuméraire
Qu'on me disait n'exister pas J'arrive j'arrive
J'aimais le feu et la tendresse Mais qu'est-ce que j'aurais bien aimé
Tu vois je vous rêvais déjà Encore une fois prendre un amour
Comme on prend le train pour plus être seul
J'aimais les tours hautes et larges Pour être ailleurs pour être bien
Pour voir au large venir l'amour J'arrive j'arrive
J'aimais les tours de cœur de garde Mais qu'est-ce que j'aurais bien aimé
Tu vois je vous guettais déjà Encore une fois remplir d'étoiles
Un corps qui tremble et tomber mort
J'aimais le col ondoyant des vagues Brûlé d'amour le cœur en cendres
Les saules nobles languissant vers moi J'arrive j'arrive
J'aimais la ligne tournante des algues C'est même pas toi qui est en avance
Tu vois je vous savais déjà C'est déjà moi qui suis en retard
J'arrive, bien sûr j'arrive
J'aimais courir jusqu'à tomber N'ai-je jamais rien fait d'autre qu'arriver.
J'aimais la nuit jusqu'au matin
Je n'aimais rien non j'ai adoré
Tu vois je vous aimais déjà
J'en appelle
J'aimais l'été pour ses orages Paroles et Musique: Jacques Brel   1957
Et pour la foudre sur le toit
J'aimais l'éclair sur ton visage
Tu vois je vous brûlais déjà J'en appelle aux maisons
Écrasées de lumière
J'aimais la pluie noyant l'espace J'en appelle aux amours
Au long des brumes du pays plat Que chantent les rivières
J'aimais la brume que le vent chasse A l'éclatement bleu
Tu vois je vous pleurais déjà Des matins de printemps
A la force jolie des filles
J'aimais la vigne et le houblon Qui ont vingt ans
Les villes du Nord les laides de nuit A la fraicheur certaine
Les fleuves profonds m'appelant au lit D'un vieux puit de désert
Tu vois je vous oubliais déjà A l'étoile qu'attend
Le vieil homme qui se perd
Pour que monte de nous
Et plus fort qu'un désir
J'arrive Le désir incroyable
De se vouloir construire
En se désirant faible
Et plutôt qu'orgueilleux
De chrysanthèmes en chrysanthèmes En se désirant lâche
Nos amitiés sont en partance Plutôt que monstrueux
De chrysanthèmes en chrysanthèmes
La mort potence nos dulcinées J'en appelle à ton rire
De chrysanthèmes en chrysanthèmes Que tu croques au soleil
Les autres fleurs font ce qu'elles peuvent
13
J'en appelle à ton cri
À nul autre pareil
Au silence joyeux
Qui parle doucement
A ces mots que l'on dit Je ne sais pas
Rien qu'en se regardant 1958
A la pesante main
De notre amour sincère
A nos vingt ans trouvés Je ne sais pas pourquoi la pluie
À tout ce qu'ils espèrent Quitte là-haut ses oripeaux
Pour que monte de nous Que sont les lourds nuages gris
Et plus fort qu'un désir Pour se coucher sur nos coteaux
Le désir incroyable Je ne sais pas pourquoi le vent
De se vouloir construire S'amuse dans les matins clairs
En préférant plutôt A colporter les rires d'enfants
Que la gloire inutile Carillons frêles de l'hiver
Et le bonheur profond Je ne sais rien de tout cela
Et puis la joie tranquille Mais je sais que je t'aime encor'

J'en appelle aux maisons Je ne sais pas pourquoi la route


Écrasées de lumière Qui me pousse vers la cité
J'en appelle à ton cri A l'odeur froide des déroutes
À nul autre pareil De peuplier en peuplier
Jaurès Je ne sais pas pourquoi le voile
Du brouillard glacé qui m'escorte
Paroles et Musique: Jacques Brel   1977 Me fait penser aux cathédrales
Où l'on prie pour les amours mortes
Ils étaient usés à quinze ans Je ne sais rien de tout cela
Ils finissaient en débutant Mais je sais que je t'aime encor'
Les douze mois s'appelaient décembre
Quelle vie ont eu nos grand-parents Je ne sais pas pourquoi la ville
Entre l'absinthe et les grand-messes M'ouvre ses remparts de faubourgs
Ils étaient vieux avant que d'être Pour me laisser glisser fragile
Quinze heures par jour le corps en laisse Sous la pluie parmi ses amours
Laissent au visage un teint de cendres Je ne sais pas pourquoi ces gens
Oui notre Monsieur, oui notre bon Maître Pour mieux célébrer ma défaite
Pour mieux suivre l'enterrement
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? Ont le nez collé aux fenêtres
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? Je ne sais rien de tout cela
Mais je sais que je t'aime encor'
On ne peut pas dire qu'ils furent esclaves
De là à dire qu'ils ont vécu Je ne sais pas pourquoi ces rues
Lorsque l'on part aussi vaincu S'ouvrent devant moi une à une
C'est dur de sortir de l'enclave Vierges et froides froides et nues
Et pourtant l'espoir fleurissait Rien que mes pas et pas de lune
Dans les rêves qui montaient aux cieux Je ne sais pas pourquoi la nuit
Des quelques ceux qui refusaient Jouant de moi comme guitare
De ramper jusqu'à la vieillesse M'a forcé à venir ici
Oui notre bon Maître, oui notre Monsieur Pour pleurer devant cette gare
Je ne sais rien de tout cela
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? Mais je sais que je t'aime encor'
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
Je ne sais pas à quelle heure part
Si par malheur ils survivaient Ce triste train pour Amsterdam
C'était pour partir à la guerre Qu'un couple doit prendre ce soir
C'était pour finir à la guerre Un couple dont tu es la femme
Aux ordres de quelque sabreur Et je ne sais pas pour quel port
Qui exigeait du bout des lèvres Part d'Amsterdam ce grand navire
Qu'ils aillent ouvrir au champ d'horreur Qui brise mon cœur et mon corps
Leurs vingt ans qui n'avaient pu naître Notre amour et mon avenir
Et ils mouraient à pleine peur Je ne sais rien de tout cela
Tout miséreux oui notre bon Maître Mais je sais que je t'aime encor'
Couverts de prèles oui notre Monsieur Mais je sais que je t'aime encor'
Demandez-vous belle jeunesse
Le temps de l'ombre d'un souvenir
Le temps de souffle d'un soupir
Je prendrai
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
14
Je prendrai Je suis un soir d'été
Dans les yeux d'un ami Aux terrasses brouillées
Ce qu'il y a de plus chaud de plus beau Quelques buveurs humides
Et de plus tendre aussi Parlent de haridelles
Qu'on ne voit que deux ou trois fois Et de vieilles perfides
Durant toute une vie C'est l'heure où les bretelles
Et qui fait que cet ami est notre ami Soutiennent le présent
Des passants répandus
Je prendrai Et des alcoolisants
Un nuage de ma jeunesse
Qui passait rond et blanc Je suis un soir d'été
Par-dessus ma tête et souvent De lourdes amoureuses
Et qui aux jours de faiblesse Aux odeurs de cuisine
Ressemblait à ma mère Promènent leur poitrine
Et aux jours de colère à un lion Sur les flancs de la Meuse
Un beau nuage douillet et rond et confortable Il leur manque un soldat
Pour que l'été ripaille
Je prendrai Et monte vaille que vaille
Ce ruisseau clair et frêle d'avril Jusqu'en haut de leurs bas
Qui disparaît aux premiers froids
Qui disparaît tout l'hiver Je suis un soir d'été
Et coule alors paraît-il sur la table des Noces de Cana Aux fontaines les vieux
Bardés de références
Je prendrai Rebroussent leur enfance
Ma lampe ma meilleure A petits pas pluvieux
Pas celle qui éclaire Ils rient de toute une dent
Non celle qui illumine Pour croquer le silence
Et rend joli et appelle de loin Autour des filles qui dansent
A la mort d'un printemps
Je prendrai
Un lit un grand le mien Je suis un soir d'été
Et qui sait ce que c'est qu'un homme La chaleur se vertèbre
Et son chagrin Il fleuve des ivresses
Un grand lit d'être humain L'été a ses grand-messes
Et la nuit les célèbre
Je prendrai tout cela La ville aux quatre vents
Et puis je bâtirai Clignote le remords
Je bâtirai et j'appellerai les gens Inutile et passant
Qui passeront dans la rue De n'être pas un port
Et je leur montrerai
Ma crèche de Noël Je suis un soir d'été

Je suis un soir d'été Je t'aime


Paroles et Musique: Jacques Brel   1968 Paroles et Musique: F. Bauber/J. Brel   1959
© 1968 Editions Pouchenel Bruxelles

Pour la rosée qui tremble au calice des fleurs


Et la sous-préfecture De n'être pas aimée et ressemble à ton cœur
Fête la sous-préfète Je t'aime
Sous le lustre à facettes Pour le noir de la pluie au clavecin de l'étang
Il pleur des orangeades Jouant page de lune et ressemble à ton chant
Et des champagnes tièdes Je t'aime
Et les propos glacés Pour l'aube qui balance sur le fil d'horizon
Des femelles maussades Lumineuse et fragile et ressemble à ton front
De fonctionnarisés Je t'aime

Je suis un soir d'été À l'aurore légère qu'un oiseau fait frémir


Aux fenêtres ouvertes En la battant de l'aile et ressembles à ton rire
Les dîneurs familiaux Je t'aime
Repoussent leurs assiettes Pour le jour qui se lève et dentelles de bois
Et disent qu'il fait chaud Au point de la lumière et ressemble à ta joie
Les hommes lancent des rots Je t'aime
De chevaliers teutons Pour le jour qui revient d'une nuit sans amour
Les nappes tombent en miettes Et ressemble déjà, ressemble à ton retour
Par-dessus les balcons
15
Je t'aime {Refrain}
Pour la porte qui s'ouvre pour le cri qui jaillit
Ensemble de deux cœurs et ressemble à ce cri Viens il me reste ma guitare
Je t'aime... Je t'aime Je t'aime Je l'allumerai pour toi
Et on sera espagnols
Comme quand on était mômes
Jef Même que j'aimais pas ça
T'imiteras le rossignol
Paroles et Musique: Jacques Brel   1964 Puis on se trouvera un banc
On parlera de l'Amérique
Où c'est qu'on va aller
Non Jef t'es pas tout seul Quand on aura du fric
Mais arrête de pleurer Et si t'es encore triste
Comme ça devant tout le monde Ou rien que si t'en as l'air
Parce qu'une demi-vieille Je te raconterai comment
Parce qu'une fausse blonde Tu deviendras Rockfeller
T'a relaissé tomber On sera bien tous les deux
Non Jef t'es pas tout seul On rechantera comme avant
Mais tu sais que tu me fais honte Comme quand on était beaux
A sangloter comme ça Comme quand c'était le temps
Bêtement devant tout le monde D'avant qu'on soit poivrots
Parce qu'une trois quarts putain
T'a claqué dans les mains Allez viens Jef viens viens
Non Jef t'es pas tout seul Oui oui Jef oui viens.
Mais tu fais honte à voir
Les gens se paient notre tête
Foutons le camp de ce trottoir
Allez viens Jef viens viens

{Refrain:} Jojo
Musique: Jacques Brel
Viens il me reste trois sous
On va aller se les boire Jojo,
Chez la mère Françoise Voici donc quelques rires
Viens il me reste trois sous Quelques vins quelques blondes
Et si c'est pas assez J'ai plaisir à te dire
Ben il me restera l'ardoise Que la nuit sera longue
Puis on ira manger A devenir demain
Des moules et puis des frites Jojo,
Des frites et puis des moules Moi je t'entends rugir
Et du vin de Moselle Quelques chansons marines
Et si t'es encore triste Où des Bretons devinent
On ira voir les filles Que Saint-Cast doit dormir
Chez la madame Andrée Tout au fond du brouillard
Parait qu'y en a de nouvelles
On rechantera comme avant Six pieds sous terre Jojo tu chantes encore
On sera bien tous les deux Six pieds sous terre tu n'es pas mort
Comme quand on était jeunes
Comme quand c'était le temps Jojo,
Que j'avais de l'argent Ce soir comme chaque soir
Nous refaisons nos guerres
Non Jef t'es pas tout seul Tu reprends Saint-Nazaire
Mais arrête tes grimaces Je refais l'Olympia
Soulève tes cent kilos Au fond du cimetière Jojo,
Fais bouger ta carcasse Nous parlons en silence
Je sais que t'as le cœur gros D'une jeunesse vieille
Mais il faut le soulever Nous savons tous les deux
Non Jef t'es pas tout seul Que le monde sommeille
Mais arrête de sangloter Par manque d'imprudence
Arrête de te répandre
Arrête de répéter Six pieds sous terre Jojo tu espères encore
Que t'es bon à te foutre à l'eau Six pieds sous terre tu n'es pas mort
Que t'es bon à te pendre
Non Jef t'es pas tout seul Jojo,
Mais c'est plus un trottoir Tu me donnes en riant
ça devient un cinéma Des nouvelles d'en bas
Où les gens viennent te voir Je te dis mort aux cons
Allez viens Jef viens viens Bien plus cons que toi

16
Mais qui sont mieux portants Que Franco est tout à fait mort
Jojo,
Tu sais le nom des fleurs Mais ce soir
Tu vois que mes mains tremblent Y a pas d'espagnoles
Et je te sais qui pleure Y a pas de casseroles
Pour noyer de pudeur Y pas de doute
Mes pauvres lieux communs Non ce soir
Il pleut sur Knokke-le-Zoute
Six pieds sous terre Jojo tu frères encore Ce soir comme tous les soirs
Six pieds sous terre tu n'es pas mort Je me rentre chez moi
Le cœur en déroute
Jojo. Et la bitte sous l'bras
Je te quitte au matin
Pour de vagues besognes Les soirs depuis Caracas
Parmi quelques ivrognes Je panama je partaguasse
Des amputés du cœur Je suis l'plus beau
Qui ont trop ouvert les mains Je pars en chasse
Jojo, Je glisse de palace en palace
Je ne rentre plus nulle part Pour y dénicher le gros lot
Je m'habille de nos rêves Qui n'attend que mon coup de grâce
Orphelin jusqu'aux lèvres Je la veux folle comme un travelo
Mais heureux de savoir Découverte de vieux rideaux
Que je te viens déjà Mais cependant "dévanescente"
Elle m'attendrait depuis toujours
Six pieds sous terre Jojo tu n'es pas mort Cerclée de serpents et de plantes
Six pieds sous terre Jojo je t'aime encore. Parmi les livres de Dufour

Mais ce soir
Y a pas de Caracas
Y a pas de dévanescentes
Knokke-le-Zoute Y a pas de doute
Paroles et Musique: Jacques Brel   1977 Mais ce soir
Il pleut sur Knokke-le-Zoute
Les soirs où je suis argentin Ce soir comme tous les soirs
Je m'offre quelques argentines Je me rentre chez moi
Quite à cueillir dans les vitrines Le cœur en déroute
Des jolis quartiers d'Amsterdam Et la bitte sous l'bras
Des lianes qui auraient ce teint de femme
Qu'exporte vos cités latines Demain oui
Ces soirs-là je les veux félines Peut être que ...
Avec un rien de brillantine Peut être que demain je serai argentin ... oui
Collé aux cheveux de la langue Je m'offrai des argentines
Elles seraient fraiches comme des mangues Quite à cueillir dans les vitrines
Et compenseraient leur maladresse Des jolis quartiers d'Amsterdam
À coups de poitrine et de fesses Des lianes qui auraient ce teint de femme
Qu'exporte vos cités latines
Ah mais ce soir Demain je les voudrai félines
Y a pas d'argentines Avec ce rien de brillantine
Y a pas d'espoir Collé aux cheveux de la langue
Y a pas de doute Elles seront fraiches comme des mangues
Non ce soir Et compenseront leur maladresse
Il pleut sur Knokke-le-Zoute À coups de poitrine et de fesses
Ce soir comme tous les soirs
Je me rentre chez moi Demain je serai espagnol
Le cœur en déroute Petites fesses grande bagnole
Et la bitte sous l'bras Elles passeront toutes à la casserole
Quite à pourchasser dans Hambourg
Les jours où je suis espagnol Des Carmencitas de faubourg
Petites fesses grande bagnole Qui nous reviendront de vérole
Elles passent toutes à la casserole Je les voudrai fraiches et joyeuses
Quite à pourchasser dans Hambourg Bonnes travailleuses sans parlotes
Des carmencitas de faubourg Mi andalouses mi anguleuses
Qui nous reviennent de vérole De ces femelles qu'on gestapote
Je me les veux fraiches et joyeuses Parce qu'elles ne savent pas encore
Bonnes travailleuse sans parlotes Que Franco est tout à fait mort
Mi andalouses mi anguleuses
De ces femelles qu'on gestapote Les soirs depuis Caracas
Parce qu'elles ne savent pas encore Je panama je partaguasse
Je suis l'plus beau
17
Je pars en chasse Qu'on regarde la lumière
Je glisse de palace en palace Et ses nuages pendus
Pour y dénicher le gros lot L'âge d'or c'est après l'enfer
Qui n'attend que mon coup de grâce C'est après l'âge d'argent
Je la veux folle comme un travelo On redevient petit enfant
Découverte de vieux rideaux Dedans le ventre de la terre
Mais cependant dévanescente L'âge d'or c'est quand on dort
Elle m'attendrait depuis toujours Dans sa dernière caserne
Cerclée de serpents et de plantes
Parmi les livres de "Dufour"

L'Air de la Bêtise
Paroles et Musique: Jacques Brel   1957
L'âge idiot
1966  "Jef"
Mère des gens sans inquiétude
Mère de ceux que l'on dit forts
L'âge idiot, c'est à vingt fleurs Mère des saintes habitudes
Quand le ventre brûle de faim Princesse des gens sans remords
Qu'on croit se laver le cœur Salut à toi, dame Bêtise
Rien qu'en se lavant les mains Toi dont le règne est méconnu
Qu'on a les yeux plus grands que le ventre Salut à toi, Dame Bêtise
Qu'on a les yeux plus grands que le cœur Mais dis-le moi: "Comment fais-tu
Qu'on a le cœur encore trop tendre Pour avoir tant d'amants,
Qu'on a les yeux encore pleins de fleurs Et tant de fiancés,
Mais qu'on sent bon les champs de luzerne Tant de représentants
L'odeur des tambours mal battus Et tant de prisonniers
Qu'on sent les clairons refroidis Pour tisser de tes mains
Et les lits de petite vertu Tant de malentendus
Et qu'on s'endort toutes les nuits Et faire croire au crétin
Dans les casernes Que nous sommes vaincus
Pour fleurir notre vie
L'âge idiot, c'est à trente fleurs De basses révérences
Quand le ventre prend naissance De mesquines envies
Quand le ventre prend puissance De nobles intolérances
Qu'il vous grignote le cœur De mesquines envies
Quand les yeux se font plus lourds De nobles intolérances
Quand les yeux marquent les heures De mesquines envies
Eux qui savent qu'à trente fleurs De nobles intolérances
Commence le compte à rebours
Qu'on rejette les vieux dans leur caverne Mère de nos femmes fatales
Qu'on offre à Dieu des bonnets d'âne Mère des mariages de raison
Mais que le soir on s'allume des feux Mère des filles à succursales
En frottant deux cœurs de femmes Princesse pâle du vison
Et qu'on regrette déjà un peu Salut à toi, Dame Bêtise
Le temps des casernes Toi dont le règne est méconnu
Salut à toi, Dame Bêtise
L'âge idiot c'est soixante fleurs Mais dis moi: "Comment fais-tu
Quand le ventre se ballotte Pour que point l'on ne voit
Quand le ventre ventripote Le sourire entendu
Qu'il vous a bouffé le cœur Qui fera de vous et moi
Quand les yeux n'ont plus de larmes De très nobles cocus cocus
Quand les yeux tombent en neige Pour me faire oublier
Quand les yeux perdent leurs pièges Que les putains les vraies
Quand les yeux rendent les armes Sont celles qui font payer
Qu'on se ressent de ses amours Pas avant mais après
Mais qu'on se sent des patiences Pour qu'il puisse m'arriver
Pour de vieilles sur le retour De croiser certains soirs
Ou des trop jeunes en partance Ton regard familier
Et qu'on se croit protégé Au fond de mon miroir
Par les casernes Ton regard familier
Au fond de mon miroir
L'âge d'or c'est quand on meurt Ton regard familier
Qu'on se couche sous son ventre Au fond de mon miroir.
Qu'on se cache sous son ventre
Les mains protégeant le cœur
Qu'on a les yeux enfin ouverts
Mais qu'on ne se regarde plus

18
L'aventure Et l'aurore nous guide en chemin
L'aventure c'est le trésor
Que l'on découvre à chaque matin
Pour Martin c'est le fer sur l'enclume
L'aventure commence à l'aurore Pour César le vin qui chantera
A l'aurore de chaque matin Pour Yvon c'est la mer qu'il écume
L'aventure commence alors C'est le jour qui s'allume
Que la lumière nous lave les mains C'est le blé que l'on bat

L'aventure commence à l'aurore L'aventure commence à l'aurore


Et l'aurore nous guide en chemin A l'aurore de mille chemins (?)
L'aventure c'est le trésor L'aventure c'est le trésor
Que l'on découvre à chaque matin Que l'on découvre à chaque matin matin

Pour Martin c'est le fer sur l'enclume


Pour César le vin qui chantera
Pour Yvon c'est la mer qu'il écume
C'est le jour qui s'allume L'Éclusier
C'est le blé que l'on bat Paroles et Musique: Jacques Brel   1968

L'aventure commence à l'aurore


A l'aurore de chaque matin Les mariniers
L'aventure commence alors Me voient vieillir
Que la lumière nous lave les mains Je vois vieillir
Les mariniers
Tout ce que l'on cherche à redécouvrir On joue au jeu
Fleurit chaque jour au coin de l'oubli (?) Des imbéciles
La grande aventure il faut la cueillir Où l'immobile
Entre notre église et notre mairie Est le plus vieux
Entre la barrière du Père Machin Dans mon métier
Et le bois joli de monsieur le Baron Même en été
Et entre la vigne de notre voisin Faut voyager
Et le doux sourire de la Madelon Les yeux fermés.

L'aventure commence à l'aurore Ce n'est pas rien d'être éclusier


A l'aurore de chaque matin
L'aventure commence alors Les mariniers
Que la lumière nous lave les mains Savent ma trogne
L'aventure commence à l'aurore Ils me plaisantent
Et l'aurore nous guide en chemin Et ils ont tort
L'aventure c'est le trésor Moitié sorcier
Que l'on découvre à chaque matin Moitié ivrogne
Je jette un sort
Pour Martin c'est le fer sur l'enclume À tout c'qui chante
Pour César le vin qui chantera Dans mon métier
Pour Yvon c'est la mer qu'il écume C'est en automne
C'est le jour qui s'allume Qu'on cueille les pommes
C'est le blé que l'on bat Et les noyés

L'aventure commence à l'aurore Ce n'est pas rien d'être éclusier


A l'aurore de chaque matin
L'aventure commence alors Dans son panier
Que la lumière nous lave les mains Un enfant louche
Pour voir la mouche
Tous ceux que l'on cherche à pouvoir aimer Qui est sur son nez
Sont auprès de nous et à chaque instant Maman ronronne
Dans le creux des rues dans l'ombre des près Le temps soupire
Au bout du chemin au milieu des champs Le chou transpire
Debouts dans le vent et semant le blé Le feu ronchonne
Pliés vers le sol saluant la terre Dans mon métier
Assis près des vieux et tressant l'osier C'est en hiver
Couchés au soleil et buvant la lumière (dans la lumière?) Qu'on pense au père
Qui s'est noyé
L'aventure commence à l'aurore
A l'aurore de chaque matin Ce n'est pas rien d'être éclusier
L'aventure commence alors
Que la lumière nous lave les mains Vers le printemps
L'aventure commence à l'aurore Les marinières

19
M'font des manières Pourvu que nous vienne un homme
De leur chaland Aux portes de la cité
J'aimerais leur jeu Que l'amour soit son royaume
Sans cette guerre Et l'espoir son invité
Qui m'a un peu Et qu'il soit pareil aux arbres
Trop abimé Que mon père avait plantés
Dans mon métier Fiers et nobles comme soir d'été
C'est au printemps Et que les rires d'enfants
Qu'on prend le temps Qui lui tintent dans la tête
De se noyer L'éclaboussent d'un reflet de fête

Pourvu que nous vienne un homme


Aux portes de la cité
Que son regard soit un psaume
L'Enfance Fait de soleils éclatés
Paroles et Musique: Jacques Brel Qu'il ne s'agenouille pas
note: du film "Le Far West" Devant tout l'or d'un seigneur
Mais parfois pour cueillir une fleur
Et qu'il chasse de la main
L'enfance À jamais et pour toujours
Qui peut nous dire quand ça finit Les solutions qui seraient sans amour
Qui peut nous dire quand ça commence
C'est rien avec de l'imprudence Pourvu que nous vienne un homme
C'est tout ce qui n'est pas écrit Aux portes de la cité
Et qui ne soit pas une baume
L'enfance Mais une force une clarté
Qui nous empêche de la vivre Et que sa colère soit juste
De la revivre infiniment Jeune et belle comme l'orage
De vivre à remonter le temps Qu'il ne soit jamais ni vieux ni sage
De déchirer la fin du livre Et qu'il rechasse du temple
L' écrivain sans opinion
L'enfance Marchand de rien
Qui se dépose sur nos rides Marchand d'évotions
Pour faire de nous de vieux enfants
Nous revoilà jeunes amants Pourvu que nous vienne un homme
Le cœur est plein la tête est vide Aux portes de la cité
L'enfance l'enfance Avant que les autre hommes
Qui vivent dans la cité
L'enfance Humiliés l'espoir meurtri
C'est encore le droit de rêver Et lourds de leur colère froide
Et le droit de rêver encore Ne dressent au creux des nuits
Mon père était un chercheur d'or De nouvelles barricades
L'ennui c'est qu'il en a trouvé
L'ivrogne
L'enfance Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest-F. Rauber   1961
Il est midi tous les quart d'heure
Il est jeudi tous les matins
Les adultes sont déserteurs Ami remplis mon verre
Tous les bourgeois sont des Indiens Encore un et je vas
Encore un et je vais
L'enfance Non je ne pleure pas
L'enfance Je chante et je suis gai
Mais j'ai mal d'être moi
{+ couplet isolé :} Ami remplis mon verre
Ami remplis mon verre
Si les parents savaient l'enfance
Si les moindres amants savaient Buvons à ta santé
Si par chance ils savaient l'enfance Toi qui sais si bien dire
Il n'y aurait plus d'enfants jamais. Que tout peut s'arranger
Qu'elle va revenir
Tant pis si tu es menteur
Tavernier sans tendresse
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans tristesse
L'Homme dans la cité
Paroles et Musique: Jacques Brel   1958 Buvons à la santé
Des amis et des rires
Que je vais retrouver

20
Qui vont me revenir
Tant pis si ces seigneurs
Me laissent à terre
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans colère L'Ostendaise
Paroles et Musique: J. Brel/F. Rauber   1968
Ami remplis mon verre
Encore un et je vas
Encore un et je vais Une Ostendaise
Non je ne pleure pas Pleure sur sa chaise
Je chante et je suis gai Le chat soupèse
Mais j'ai mal d'être moi Son poids d'amour
Ami remplis mon verre Dans le silence
Ami remplis mon verre Son chagrin danse
Et les vieux pensent
Buvons à ma santé Chacun son tour
Que l'on boive avec moi À la cuisine
Que l'on vienne danser Quelques voisines
Qu'on partage ma joie Parlent de Chine
Tant pis si les danseurs Et d'un retour
Me laissent sous la lune À Singapore
Je serai saoul dans une heure Une Javanaise
Je serai sans rancune Devient belle-sœur
De l'Ostendaise
Buvons aux jeunes filles
Qu'il me reste à aimer Il y a deux sortes de temps
Buvons déjà aux filles Il y a le temps qui attend
Que je vais faire pleurer Et le temps qui espère
Et tant pis pour les fleurs Il y a deux sortes de gens
Qu'elles me refuseront Il y a les vivants
Je serai saoul dans une heure Et ceux qui sont en mer
Je serai sans passion
Notre Ostendaise
Ami remplis mon verre Que rien n'abaise
Encore un et je vas De chaise en chaise
Encore un et je vais Va sa blessure
Non je ne pleure pas Quelques commères
Je chante et je suis gai Quelques compères
Mais j'ai mal d'être moi Battent le fer
Ami remplis mon verre De sa blessure
Ami remplis mon verre Son capitaine
Sous sa bedaine
Buvons à la putain De bière pleine
Qui m'a tordu le cœur Bat le tambour
Buvons à plein chagrin Homme de devoir
Buvons à pleines pleurs Homme d'étoiles
Et tant pis pour les pleurs Il prend l'escale
Qui me pleuvent ce soir Pour un détour
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans mémoire Il y a deux sortes de temps
Il y a le temps qui attend
Buvons nuit après nuit Et le temps qui espère
Puisque je serai trop laid Il y a deux sortes de gens
Pour la moindre Sylvie Il y a les vivants
Pour le moindre regret Et ceux qui sont en mer
Buvons puisqu'il est l'heure
Buvons rien que pour boire Notre Ostendaise
Je serai bien dans une heure Au temps des fraises
Je serai sans espoir Devient maîtresse
D'un pharmacien
Ami remplis mon verre Son capitaine
Encore un et je vas Mort sous bedaine
Encore un et je vais Joue les baleines
Non je ne pleure pas Les sous-marins
Je chante et je suis gai Pourquoi ma douce
Tout s'arrange déjà Moi le faux mousse
Ami remplis mon verre Que le temps pousse
Ami remplis mon verre T'écrire de loin
Ami remplis mon verre
21
C'est que je t'aime
Et tant je t'aime
Qu'ai peur ma reine
D'un pharmacien La bière
Paroles et Musique: Jacques Brel
Il y a deux sortes de temps
Il y a le temps qui attend
Et le temps qui espère Ça sent la bière
Il y a deux sortes de gens De Londres à Berlin
Il y a les vivants Ça sent la bière
Et moi je suis en mer Dieu qu'on est bien
Ça sent la bière
De Londres à Berlin
Ça sent la bière
La Bastille Donne-moi la main

Paroles et Musique: Jacques Brel   1955 C'est plein d'Uilenspieghel


Et de ses cousins et d'arrière-cousins
De Breughel l'Ancien
Mon ami, qui croit que tout doit changer C'est plein de gens du nord
Crois-tu le droit d'aller tuer les bourgeois Qui mord comme un chien
Si tu crois encore qu'il nous faut descendre Le porc qui dort le ventre plein
Dans le creux des rues pour monter au pouvoir
Si tu crois encore au rêve du grand soir Ça sent la bière
Et que nos ennemis, il faut aller les pendre De Londres à Berlin
Ça sent la bière
Dis-le toi désormais Dieu qu'on est bien
Même s'il est sincère Ça sent la bière
Aucun rêve jamais De Londres à Berlin
Ne mérite une guerre Ça sent la bière
On a détruit la Bastille Donne-moi la main
Et ça n'a rien arrangé
On a détruit la Bastille C'est plein de verres pleins
Quand il fallait nous aimer Qui vont à kermesse comme vont à messe
Vieilles au matin
Mon ami, qui croit, que rien ne doit changer C'est plein de jours morts
Te crois-tu le droit de vivre et de penser en bourgeois Et d'amours gelés
Si tu crois encore qu'il nous faut défendre Chez nous y a qu'l'été
Un bonheur acquis au prix d'autres bonheurs Que les filles aient un corps
Si tu crois encore que c'est parce qu'ils ont tort
Que les gens te saluent plutôt que de te pendre Ça sent la bière
De Londres à Berlin
Dis-le toi désormais Ça sent la bière
Même s'il est sincère Dieu qu'on est bien
Aucun rêve jamais Ça sent la bière
Ne mérite une guerre De Londres à Berlin
On a détruit la Bastille Ça sent la bière
Et ça n'a rien arrangé Donne-moi la main
On a détruit la Bastille
Quand il fallait nous aimer C'est plein de finissants
Qui soignent leurs souvenirs
Mon ami, je crois que tout peut s'arranger En mouillant de rires
Sans cris sans effroi même sans insulter les bourgeois Leurs poiluchons blancs
L'avenir dépend des révolutionnaires C'est plein de débutants
Mais se moque bien des petits révoltés Qui soignent leur vérole
L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre En caracolant de Prosit en Skoll
Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner
Ça sent la bière
Hâtons-nous d'espérer De Londres à Berlin
Marchons aux lendemains Ça sent la bière
Tendons une main Dieu qu'on est bien
Qui ne soit pas fermée Ça sent la bière
On a détruit la Bastille De Londres à Berlin
Et ça n'a rien arrangé Ça sent la bière
On a détruit la Bastille Donne-moi la main
Ne pourrait-on pas s'aimer
C'est plein de "Godferdom"
C'est plein d'Amsterdam

22
C'est plein de mains d'hommes Et nous nous offrirons
Aux croupes des femmes Tout l'amour que l'on a
C'est plein de mèmères Pavoiserons tous deux
Qui ont depuis toujours Notre vie de soleil
Un sein pour la bière Avant que d'être vieux
Un sein pour l'amour Avant que d'être vieille
Non ce n'est pas toi
Ça sent la bière La fille que j'aimerons
De Londres à Berlin Non ce n'est pas toi
Ça sent la bière La fille que j'aimera
Dieu qu'on est bien
Ça sent la bière La fille que j'aimera
De Londres à Berlin Vieillira sans tristesse
Ça sent la bière Entre son feu de bois
Donne-moi la main Et ma grande tendresse
La fille que j'aimera
C'est plein d'horizons Sera comme bon vin
À vous rendre fous Qui se bonifiera
Mais l'alcool est blond Un peu chaque matin
Et le diable est à nous Et moi je l'aimerons
Les gens sans Espagne Et elle m'aimera
Ont besoin des deux Et ferons des chansons
On fait des montagnes De nos anciennes joies
Avec ce qu'on peut Et quitterons la terre
Les yeux pleins l'un de l'autre
Ça sent la bière Pour fleurir tout l'enfer
De Londres à Berlin Du bonheur qui est nôtre
Ça sent la bière Ah qu'elle vienne à moi
Donne-moi la main La fille que j'aimerons
Ah qu'elle vienne à moi
La fille que j'aimera

La bourrée du célibataire
Paroles et Musique: Jacques Brel   1957
La chanson de Jacky
Paroles et Musique: J. Brel, G. Jouannest   1966
La fille que j'aimera
Aura le cœur si sage
Qu'au creux de son visage Même si un jour à Knocke-le-Zoute
Mon cœur s'arrêtera Je deviens comme je le redoute
La fille que j'aimera Chanteur pour femmes finissantes
Je lui veux la peau tendre Que je leur chante " Mi Corazón "
Pour qu'aux nuits de décembre Avec la voix bandonéante
S'y réchauffent mes doigts D'un Argentin de Carcassonne
Et moi je l'aimerons Même si on m'appelle Antonio
Et elle m'aimera Que je brûle mes derniers feux
Et nos cœurs brûleront En échange de quelques cadeaux
Du même feu de joie Madame je fais ce que je peux
Entrerons en chantant Même si je me saoule à l'hydromel
Dans les murs de la vie Pour mieux parler de virilité
En offrant nos vingt ans A des mémères décorées
Pour qu'elle nous soit jolie Comme des arbres de Noël
Non ce n'est pas toi Je sais qu' dans ma saoulographie
La fille que j'aimerons Chaque nuit pour des éléphants roses
Non ce n'est pas toi Je chanterai la chanson morose
La fille que j'aimera Celle du temps où je m'appelais Jacky

La fille que j'aimera {Refrain:}


Aura sa maison basse Etre une heure, une heure seulement
Blanche et simple à la fois Etre une heure, une heure quelquefois
Comme un état de grâce Etre une heure, rien qu'une heure durant
La fille que j'aimera Beau, beau, beau et con à la fois
Aura des soirs de veille
Où elle me parlera Même si un jour à Macao
Des enfants qui sommeillent Je deviens gouverneur de tripot
Et moi je l'aimerons Cerclé de femmes languissantes
Et elle m'aimera Même si lassé d'être chanteur

23
J'y sois devenu maître chanteur
Et que ce soit les autres qui chantent Mais de bière en bière
Même si on m'appelle le beau Serge De foire en foire
Que je vende des bateaux d'opium De verre en verre
Du whisky de Clermont-Ferrand De boire en boire
De vrais pédés de fausses vierges Je mords encore
Que j'aie une banque à chaque doigt À pleines dents
Et un doigt dans chaque pays Je suis un mort
Que chaque pays soit à moi Encore vivant
Je sais quand même que chaque nuit
Tout seul au fond de ma fumerie
Pour un public de vieux Chinois
Je rechanterai ma chanson à moi
Celle du temps où je m'appelais Jacky La chanson des vieux amants
Paroles et Musique: Jacques Brel
{au Refrain} autres interprètes: Luce Dufault (2000)

Même si un jour au Paradis


Je deviens comme j'en serais surpris Bien sûr, nous eûmes des orages
Chanteur pour femmes à ailes blanches Vingt ans d'amour, c'est l'amour fol
Que je leur chante Alléluia Mille fois tu pris ton bagage
En regrettant le temps d'en bas Mille fois je pris mon envol
Où c'est pas tous les jours dimanche Et chaque meuble se souvient
Même si on m'appelle Dieu le Père Dans cette chambre sans berceau
Celui qui est dans l'annuaire Des éclats des vieilles tempêtes
Entre Dieulefit et Dieu vous garde Plus rien ne ressemblait à rien
Même si je me laisse pousser la barbe Tu avais perdu le goût de l'eau
Même si toujours trop bonne pomme Et moi celui de la conquête
Je me crève le cœur et le pur esprit
A vouloir consoler les hommes {Refrain:}
Je sais quand même que chaque nuit Mais mon amour
J'entendrai dans mon Mon doux mon tendre mon merveilleux amour
Paradis Les anges, les Saints et Lucifer De l'aube claire jusqu'à la fin du jour
Me chanter la chanson de naguère Je t'aime encore tu sais je t'aime
Celle du temps où je m'appelais Jacky.
Moi, je sais tous tes sortilèges
{au Refrain} Tu sais tous mes envoûtements
Tu m'as gardé de pièges en pièges
Je t'ai perdue de temps en temps
Bien sûr tu pris quelques amants
La chanson de Van Horst Il fallait bien passer le temps
Il faut bien que le corps exulte
Paroles: Jacques Brel. Musique: Jacques Brel, Gérard Finalement finalement
Jouannest   1972  "Jef" Il nous fallut bien du talent
note: du film "Le Bar de la Fourche" Pour être vieux sans être adultes

De Rotterdam à Santiago {Refrain}


Et d'Amsterdam à Varsovie
De Cracovie à San Diego Oh, mon amour
De drame en dame Mon doux mon tendre mon merveilleux amour
Passe la vie De l'aube claire jusqu'à la fin du jour
De peu à peu Je t'aime encore, tu sais, je t'aime
De cœur en cœur
De peur en peur Et plus le temps nous fait cortège
De port en port Et plus le temps nous fait tourment
Le temps d'une fleur Mais n'est-ce pas le pire piège
Et l'on s'endort Que vivre en paix pour des amants
Le temps d'un rêve Bien sûr tu pleures un peu moins tôt
Et l'on est mort Je me déchire un peu plus tard
Nous protégeons moins nos mystères
De terre en terre On laisse moins faire le hasard
De place en place On se méfie du fil de l'eau
De jeune vieille Mais c'est toujours la tendre guerre
En vieille grasse
De guerre en guerre {Refrain}
De guerre lasse
La mort nous veille Oh, mon amour...
La mort nous glace Mon doux mon tendre mon merveilleux amour

24
De l'aube claire jusqu'à la fin du jour Que d'une moitié d'amour
Je t'aime encore tu sais je t'aime.
Nous n'irons plus au bois la colombe est blessée
Nous n'allons pas au bois nous allons la tuer

La colombe
Paroles et Musique: Jacques Brel   1959

La dame patronnesse
Pourquoi cette fanfare © Éditions Musicales Tutti
Quand les soldats par quatre
Attendent les massacres
Sur le quai d'une gare Pour faire une bonne dame patronnesse
Pourquoi ce train ventru Il faut avoir l'œil vigilant
Qui ronronne et soupire Car comme le prouvent les événements
Avant de nous conduire Quatre-vingt-neuf tue la noblesse
Jusqu'au malentendu Car comme le prouvent les événements
Pourquoi les chants les cris Quatre-vingt-neuf tue la noblesse
Des foules venues fleurir
Ceux qui ont le droit de partir Et un point à l'envers et un point à l'endroit
Au nom de leurs conneries Un point pour saint Joseph un point pour saint Thomas

Nous n'irons plus au bois la colombe est blessée Pour faire une bonne dame patronnesse
Nous n'allons pas au bois nous allons la tuer Il faut organiser ses largesses
Car comme disait le duc d'Elbeuf
Pourquoi l'heure que voilà " C'est avec du vieux qu'on fait du neuf "
Où finit notre enfance Car comme disait le duc d'Elbeuf
Où finit notre chance " C'est avec du vieux qu'on fait du neuf "
Où notre train s'en va
Pourquoi ce lourd convoi Et un point à l'envers et un point à l'endroit
Chargé d'hommes en gris Un point pour saint Joseph un point pour saint Thomas
Repeints en une nuit
Pour partir en soldats Pour faire une bonne dame patronnesse
Pourquoi ce train de pluie C'est qu'il faut faire très attention
Pourquoi ce train de guerre A ne pas se laisser voler ses pauvresses
Pourquoi ce cimetière C'est qu'on serait sans situation
En marche vers la nuit A ne pas se laisser voler ses pauvresses
C'est qu'on serait sans situation
Nous n'irons plus au bois la colombe est blessée
Nous n'allons pas au bois nous allons la tuer Et un point à l'envers et un point à l'endroit
Un point pour saint Joseph un point pour saint Thomas
Pourquoi les monuments
Qu'offriront les défaites Pour faire une bonne dame patronnesse
Les phrases déjà faites Il faut être bonne mais sans faiblesse
Qui suivront l'enterrement Ainsi j'ai dû rayer de ma liste
Pourquoi l'enfant mort-né Une pauvresse qui fréquentait un socialiste
Que sera la victoire Ainsi j'ai dû rayer de ma liste
Pourquoi les jours de gloire Une pauvresse qui fréquentait un socialiste
Que d'autres auront payés
Pourquoi ces coins de terre Et un point à l'envers et un point à l'endroit
Que l'on va peindre en gris Un point pour saint Joseph un point pour saint Thomas
Puisque c'est au fusil
Qu'on éteint la lumière Pour faire une bonne dame patronnesse
Tricotez tout en couleur caca d'oie
Nous n'irons plus au bois la colombe est blessée Ce qui permet le dimanche à la grand-messe
Nous n'allons pas au bois nous allons la tuer De reconnaître ses pauvres à soi
Ce qui permet le dimanche à la grand-messe
Pourquoi ton cher visage De reconnaître ses pauvres à soi
Dégrafé par les larmes
Qui me rendait les armes Et un point à l'envers et un point à l'endroit
Aux sources du voyage Un point pour saint Joseph un point pour saint Thomas
Pourquoi ton corps qui sombre
Ton corps qui disparaît La Fanette
Et n'est plus sur le quai Paroles et Musique: Jacques Brel   1963
Qu'une fleur sur une tombe
Pourquoi ces prochains jours
Où je devrais penser Nous étions deux amis et Fanette m'aimait
A ne plus m'habiller La plage était déserte et dormait sous juillet

25
Si elles s'en souviennent les vagues vous diront Comme des sourcils de géant
Combien pour la Fanette j'ai chanté de chansons Leurs crachats de lumière
Les moulins tournent, tournent sans trêve
Faut dire Emportant tout notre argent
Faut dire qu'elle était belle Et nous donnant un peu de rêve
Comme une perle d'eau Pour que les hommes soient contents
Faut dire qu'elle était belle
Et je ne suis pas beau Ça sent la graisse où dansent les frites
Faut dire Ça sent les frites dans les papiers
Faut dire qu'elle était brune Ça sent les beignets qu'on mange vite
Tant la dune était blonde Ça sent les hommes qui les ont mangés
Et tenant l'autre et l'une Partout je vois à petits pas
Moi je tenais le monde Des couples qui s'en vont danser
Faut dire Mais moi sûrement je n'irai pas
Faut dire que j'étais fou Grand-mère m'a dit de me méfier
De croire à tout cela
Je le croyais à nous Et lorsque l'on n'a plus de sous
Je la croyais à moi Pour se faire tourner la tête
Faut dire Sur les manèges aux chevaux roux
Qu'on ne nous apprend pas Au son d'une musique bête
A se méfier de tout On rentre chez soi lentement
Et tout en regardant les cieux
Nous étions deux amis et Fanette m'aimait On se demande simplement
La plage était déserte et mentait sous juillet S'il n'existe rien de mieux
Si elles s'en souviennent les vagues vous diront
Comment pour la Fanette s'arrêta la chanson J'aimais la foire où pour trois sous
L'on pouvait se faire tourner la tête
Faut dire Sur les manèges aux chevaux roux
Faut dire qu'en sortant Au son d'une musique bête
D'une vague mourante
Je les vis s'en allant Il nous faut regarder
Comme amant et amante Derrière la saleté
Faut dire S'étalant devant nous
Faut dire qu'ils ont ri Derrière les yeux plissés
Quand ils m'ont vu pleurer Et les visages mous
Faut dire qu'ils ont chanté Au-delà de ces mains
Quand je les ai maudits Ouvertes ou fermées
Faut dire Qui se tendent en vain
Que c'est bien ce jour-là Ou qui sont poings levés
Qu'ils ont nagé si loin Plus loin que les frontières
Qu'ils ont nagé si bien Qui sont de barbelés
Qu'on ne les revit pas Plus loin que la misère
Faut dire Il nous faut regarder
Qu'on ne nous apprend pas
Mais parlons d'autre chose Il nous faut regarder
Ce qu'il y a de beau
Nous étions deux amis et Fanette l'aimait Le ciel gris ou bleuté
La place est déserte et pleure sous juillet Les filles au bord de l'eau
Et le soir quelquefois L'ami qu'on sait fidèle
Quand les vagues s'arrêtent Le soleil de demain
J'entends comme une voix Le vol d'une hirondelle
J'entends... c'est la Fanette Le bateau qui revient
Par-delà le concert
Des sanglots et des pleurs
Et des cris de colère
Des hommes qui ont peur
La foire Par-delà le vacarme
Paroles: Jacques Brel. Musique: Jacques Brel, Lou Logist   Des rues et des chantiers
1953  "Le Plat Pays" Des sirènes d'alarme
Des jurons de charretier
Plus forts que les enfants
J'aime la foire où pour trois sous Qui racontent les guerres
L'on peut se faire tourner la tête Et plus forts que les grands
Sur les manèges aux chevaux roux Qui nous les ont fait faire
Au son d'une musique bête
Il nous faut écouter
Les lampions jettent au firmament L'oiseau au fond des bois
Alignés en nombre pair Le murmure de l'été
Le sang qui monte en soi
26
Les berceuses des mères
Les prières des enfants La lumière jaillira
Et le bruit de la terre Et la reconnaîtrai
Qui s'endort doucement Pour l'avoir tant de fois
Chaque jour espérée

La lumière jaillira
Et de la voir si belle
La haine Je connaîtrai pourquoi
Paroles et Musique: Jacques Brel   1955 J'avais tant besoin d'elle

La lumière jaillira
Comme un marin je partirai Et nous nous marierons
Pour aller rire chez les filles Pour n'être qu'un combat
Et si jamais tu en pleurais Pour n'être qu'une chanson
Moi j'en aurais l'âme ravie
La lumière jaillira
Comme un novice je partirai Et je l'inviterai
Pour aller prier le bon Dieu A venir sous mon toit
Et si jamais tu en souffrais Pour y tout transformer
Je n'en prierais que mieux
La lumière jaillira
Tu n'as commis d'autre péché Et déjà modifié
Que de distiller chaque jour Lui avouerai du doigt
L'ennui et la banalite Les meubles du passé
Quand d'autres distillent l'amour
La lumière jaillira
Et mille jours pour une nuit Et j'aurai un palais
Voilà ce que tu m'as donné Tout ne change-t-il pas
Tu as peint notre amour en gris Au soleil de juillet
Terminé notre éternité
La lumière jaillira
Comme un ivrogne je partirai Et toute ma maison
Pour aller gueuler ma chanson Assise au feu de bois
Et si jamais tu l'entendais Apprendra ces chansons
J'en remercierais le Démon
La lumière jaillira
Comme un soldat je partirai Parsemant mes silences
Mourir comme meurent les enfants De sourires de joie
Et si jamais tu en mourais Qui meurent et recommencent
J'en voudrais revenir vivant
La lumière jaillira
Et toi tu pries et toi tu pleures Qu'éternel voyageur
Au long des jours au long des ans Mon cœur en vain chercha
C'est comme si avec des fleurs Mais qui était en mon cœur
On ressoudait deux continents
La lumière jaillira
L'amour est mort vive la haine Reculant l'horizon
Et toi matériel déclassé La lumière jaillira
Va-t-en donc accrocher Et portera ton nom
Ta peine au musée
Des amours ratées

Comme un ivrogne je partirai La mort


Pour aller gueuler ma chanson Paroles et Musique: Jacques Brel   1959
Et si jamais tu l'entendais
J'en remercierais le Démon
La mort m'attend comme une vieille fille
Au rendez-vous de la faucille
Pour mieux cueillir le temps qui passe
La mort m'attend comme une princesse
La lumière jaillira A l'enterrement de ma jeunesse
Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel-F. Rauber   1958 Pour mieux pleurer le temps qui passe
La mort m'attend comme Carabosse
La lumière jaillira A l'incendie de nos noces
Claire et blanche un matin Pour mieux rire du temps qui passe
Brusquement devant moi
Quelque part en chemin Mais qu'y a-t-il derrière la porte

27
Et qui m'attend déjà Mais c'est par elle que l'amour en fleurs
Ange ou démon qu'importe Souvent se meurt dans les salades
Au devant de la porte il y a toi La parlote la parlote

La mort attend sous l'oreiller Par elle j'ai changé le monde


Que j'oublie de me réveiller J'ai même fait battre tambour
Pour mieux glacer le temps qui passe Pour charger une Pompadour
La mort attend que mes amis Pas même belle pas même blonde
Me viennent voir en pleine nuit La parlote la parlote
Pour mieux se dire que le temps passe La parlote la parlote
La mort m'attend dans tes mains claires
Qui devront fermer mes paupières C'est au bistrot qu'elle rend ses sentences
Pour mieux quitter le temps qui passe Et nous rassure en nous assurant
Que ceux qu'on aime n'ont pas eu de chance
Mais qu'y a-t-il derrière la porte Que ceux qu'on n'aime pas en on tellement
Et qui m'attend déjà La parlote la parlote
Ange ou démon qu'importe La parlote la parlote
Au devant de la porte il y a toi
Si c'est elle qui sèche les yeux
La mort m'attend aux dernières feuilles Si c'est elle qui sèche les pleurs
De l'arbre qui fera mon cercueil C'est elle qui désèche les vieux
Pour mieux clouer le temps qui passe C'est elle qui désèche les cœurs
La mort m'attend dans les lilas Gna gna gna gna gna gna
Qu'un fossoyeur lancera sur moi Gna gna gna gna gna gna
Pour mieux fleurir le temps qui passe
La mort m'attend dans un grand lit C'est elle qui vraiment s'installe
Tendu aux toiles de l'oubli Quand on n'a plus rien à se dire
Pour mieux fermer le temps qui passe C'est l'épitaphe c'est la pierre tombale
Des amours qu'on a laissé mourir
Mais qu'y a-t-il derrière la porte La parlote la parlote
Et qui m'attend déjà La parlote la parlote
Ange ou démon qu'importe
Au devant de la porte il y a toi

La quête
Musique: Jacques Brel
La parlote
Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel/G. Jouannest   1963
Rêver un impossible rêve
Porter le chagrin des départs
C'est elle qui remplit d'espoir Brûler d'une possible fièvre
Les promenades les salons de thé Partir où personne ne part
C'est elle qui raconte l'histoire Aimer jusqu'à la déchirure
Quand elle ne l'a pas inventée Aimer, même trop, même mal,
C'est la parlote, la parlote Tenter, sans force et sans armure,
D'atteindre l'inaccessible étoile
C'est elle qui sort toutes les nuits Telle est ma quête,
Et ne s'apaise qu'au petit jour Suivre l'étoile
Pour s'éveiller après l'amour Peu m'importent mes chances
Pour entre deux amants éblouis Peu m'importe le temps
La parlote la parlote Ou ma désespérance
Et puis lutter toujours
C'est là qu'on dit qu'on a dit oui Sans questions ni repos
C'est là qu'on dit qu'on a dit non Se damner
C'est le support de l'assurance Pour l'or d'un mot d'amour
Et le premier apéritif de France Je ne sais si je serai ce héros
La parlote la parlote Mais mon cœur serait tranquille
La parlote la parlote Et les villes s'éclabousseraient de bleu
Parce qu'un malheureux
Marchant sur la pointe des lèvres Brûle encore, bien qu'ayant tout brûlé
Moitié fakir et moitié vandale Brûle encore, même trop, même mal
D'un faussaire elle fait un orfèvre Pour atteindre à s'en écarteler
D'un fifrelin elle fait un scandale Pour atteindre l'inaccessible étoile.
La parlote la parlote

C'est elle qui attire la candeur


Dans les filets d'une promenade

28
La statue Je changerais d'ivresse
Je changerais de langage
Paroles et Musique: J. Brel/F. Rauber   1962 Pourquoi crois-tu la belle
Qu'au sommet de leurs chants
Empereurs et ménestrels
J'aimerais tenir l'enfant de Marie Abandonnent souvent
Qui a fait graver sous ma statue Puissances et richesses
" Il a vécu toute sa vie Pour un peu de tendresse
Entre l'honneur et la vertu "
Moi qui ai trompé mes amis Pour un peu de tendresse
De faux serment en faux serment Je t'offrirais le temps
Moi qui ai trompé mes amis Qu'il reste de jeunesse
Du jour de l'An au jour de l'An A l'été finissant
Moi qui ai trompé mes maîtresses Pourquoi crois-tu la belle
De sentiment en sentiment Que monte ma chanson
Moi qui ai trompé mes maîtresses Vers la claire dentelle
Du printemps jusques au printemps Qui danse sur ton front
Cet enfant de Marie je l'aimerais là Penché vers ma détresse
Et j'aimerais que les enfants ne me regardent pas Pour un peu de tendresse

J'aimerais tenir l'enfant de carême


Qui a fait graver sous ma statue
" Les Dieux rappellent ceux qu'ils aiment,
Et c'était lui qu'ils aimaient le plus " La toison d'or
Moi qui n'ai jamais prié Dieu
Que lorsque j'avais mal aux dents
Moi qui n'ai jamais prié Dieu Et vous conquistadors navigateurs anciens
Que quand j'ai eu peur de Satan Hollandais téméraires et corsaires malouins
Moi qui n'ai prié Satan Cherchant des Amériques vous ne cherchâtes rien
Que lorsque j étais amoureux Que l'aventure de la Toison d'Or
Moi qui n'ai prié Satan
Que quand j'ai eu peur du Bon Dieu Et vous les philosophes vous sages d'Orient
Cet enfant de carême je l'aimerais là Alchimistes pointus et sorciers d'à présent
Et j'aimerais que les enfants ne me regardent pas En cherchant la sagesse vous n'avez rien cherché
J'aimerais tenir enfant de salaud Que les secrets de la Toison d'Or
Qui a fait graver sous ma statue
" Il est mort comme un héros Et vous les empereurs roitelets ou serins
Il est mort comme on ne meurt plus " Vous les vrais Charlemagne vous les faux Charles Quint
Moi qui suis parti faire la guerre En cherchant la puissance vous ne cherchâtes rien
Parce que je m'ennuyais tellement Que les reflets de la Toison d'Or
Moi qui suis parti faire la guerre
Pour voir si les femmes des Allemands Et vous preux chevaliers assoiffés de grandeur
Moi qui suis mort à la guerre Vous chasseurs de Saint-Graal d'oriflammes d'honneurs
Parce que les femmes des Allemands Cherchant la victoire vous ne cherchâtes rien
Moi qui suis mort à la guerre Que le panache de la Toison d'Or
De n'avoir pu faire autrement
Cet enfant de salaud je l'aimerais là Et vous tous les poètes les rêveurs mal debout
Et j'aimerais que mes enfants ne me regardent pas Discoureurs de l'amour pour des cieux andalous
En écoutant vos muses n'avez rien chanté d'autre
Que le vieux rêve de la Toison d'Or
La tendresse Et vous gens d'aujourd'hui d'aujourd'hui de demain
Paroles et Musique: Jacques Brel   1959 Vous balayeurs d'idoles de dieux de malins
Cherchant la vérité vous ne recherchez rien
Que la clarté de la Toison d'Or
Pour un peu de tendresse
Je donnerais les diamants
Que le diable caresse
Dans mes coffres d'argent La valse à mille temps
Pourquoi crois-tu la belle Paroles et Musique: Jacques Brel   1959
Que les marins au port
Vident leurs escarcelles
Pour offrir des trésors Au premier temps de la valse
A de fausses princesses Toute seule tu souris déjà
Pour un peu de tendresse Au premier temps de la valse
Je suis seul mais je t'aperçois
Pour un peu de tendresse Et Paris qui bat la mesure
Je changerais de visage Paris qui mesure notre émoi

29
Et Paris qui bat la mesure Sur le fleuve en amont
Me murmure murmure tout bas Un coin de ciel brûlait
La ville s'endormait
{refrain:} Et j'en oublie le nom
Une valse à trois temps Et la nuit peu à peu
Qui s'offre encore le temps Et le temps arrêté
Qui s'offre encore le temps Et mon cheval boueux
De s'offrir des détours Et mon corps fatigué
Du côté de l'amour Et la nuit bleu à bleu
Comme c'est charmant Et l'eau d'une fontaine
Une valse à quatre temps Et quelques cris de haine
C'est beaucoup moins dansant Versés par quelques vieux
C'est beaucoup moins dansant Sur de plus vieilles qu'eux
Mais tout aussi charmant Dont le corps s'ensommeille
Qu'une valse à trois temps
Une valse à quatre temps La ville s'endormait
Une valse à vingt ans Et j'en oublie le nom
C'est beaucoup plus troublant Sur le fleuve en amont
C'est beaucoup plus troublant Un coin de ciel brûlait
Mais beaucoup plus charmant La ville s'endormait
Qu'une valse à trois temps Et j'en oublie le nom
Une valse à vingt ans Et mon cheval qui boit
Une valse à cent temps Et moi qui le regarde
Une valse à cent ans Et ma soif qui prend garde
Une valse ça s'entend Qu'elle ne se voit pas
A chaque carrefour Et la fontaine chante
Dans Paris que l'amour Et la fatigue plante
Rafraîchit au printemps Son couteau dans mes reins
Une valse à mille temps Et je fais celui-là
Une valse à mille temps Qui est son souverain
Une valse a mis le temps On m'attend quelque part
De patienter vingt ans Comme on attend le roi
Pour que tu aies vingt ans Mais on ne m'attend point
Et pour que j'aie vingt ans Je sais depuis déjà
Une valse à mille temps Que l'on meurt de hasard
Une valse à mille temps En allongeant les pas
Une valse à mille temps
Offre seule aux amants La ville s'endormait
Trois cent trente-trois fois le temps Et j'en oublie le nom
De bâtir un roman Sur le fleuve en amont
Un coin de ciel brûlait
Au deuxième temps de la valse La ville s'endormait
On est deux tu es dans mes bras Et j'en oublie le nom
Au deuxième temps de la valse Il est vrai que parfois près du soir
Nous comptons tous les deux une deux trois Les oiseaux ressemblent à des vagues
Et Paris qui bat la mesure Et les vagues aux oiseaux
Paris qui mesure notre émoi Et les hommes aux rires
Et Paris qui bat la mesure Et les rires aux sanglots
Nous fredonne fredonne déjà Il est vrai que souvent
La mère se désenchante
{refrain} Je veux dire en cela
Qu'elle chante
Au troisième temps de la valse D'autres chants
Nous valsons enfin tous les trois Que ceux que la mère chante
Au troisième temps de la valse Dans les livres d'enfants
Il y a toi y a l'amour et y a moi Mais les femmes toujours
Et Paris qui bat la mesure Ne ressemblent qu'aux femmes
Paris qui mesure notre émoi Et d'entre elles les connes
Et Paris qui bat la mesure Ne ressemblent qu'aux connes
Laisse enfin éclater sa joie. Et je ne suis pas bien sûr
Comme chante un certain
Qu'elles soient l'avenir de l'homme

La Ville s'endormait La ville s'endormait


Paroles et Musique: Jacques Brel   1977 Et j'en oublie le nom
Sur le fleuve en amont
La ville s'endormait Un coin de ciel brûlait
Et j'en oublie le nom La ville s'endormait
Et j'en oublie le nom
30
Et vous êtes passée
Demoiselle inconnue Le Bon Dieu
À deux doigts d'être nue 1977
Sous le lin qui dansait

La, la, la Moi, moi, si t'étais l' Bon Dieu


Tu f'rais valser les vieux
Paroles et Musique: Jacques Brel   1967 Aux étoiles
Toi, toi, si t'étais l'Bon Dieu
Tu rallumerais des vagues
Quand je s'rai vieux Pour les gueux
Je s'rai insup' portable
Sauf pour mon lit Moi, moi, si t'étais l'Bon Dieu
Et mon maigre passé Tu n'serais pas économe
Mon chien s'ra mort De ciel bleu
Ma barbe sera minable Mais tu n'es pas le Bon Dieu
Toutes mes morues Toi, tu es beaucoup mieux
M'auront laissé tomber Tu es un homme
J'habiterai
Une quelconque Belgique Tu es un homme
Qui m'insult'ra Tu es un homme
Tout autant que maint'nant
Quand je lui chanterai
Vive la république
Vive les Belgiens Le caporal casse-pompon
Merde pour les flamingants Paroles et Musique: Jacques Brel   1962

La la la
La la la Mon ami est un type énorme
Il aime la trompette et le clairon
Je serai fui Tout en préférant le clairon
Comme un vieil hôpital Qu'est une trompette en uniforme
Par tous les ventres Mon ami est une valeur sûre
D'autres sociétés Qui dit souvent sans prétention
J'boirai donc seul ma pension de cigale Qu'à la minceur des épluchures
Il faut bien être lorsque l'on a été On voit la grandeur des nations
Je n'serai reçu que par les chats du quartier
À leur festin pour qu'ils ne soient pas treize Subséquemment subséquemment
Mais j'y chanterai Subséquemment que je ne comprends pas
Sur une simple chaise Pourquoi souvent ses compagnons
J'y chanterai L'appellent
Après le rat crevé L'appellent
Messieurs dans le lit de la Marquise Caporal casse-pompon
C'était moi les 80 chasseurs
La la la Mon ami est un vrai poète
Dans son jardin, quand vient l'été
Et quand viendra l'heure imbécile et fatale Faut le voir planter ses mitraillettes
Où il paraît que quelqu'un nous appelle Ou bien creuser ses petites tranchées
J'insulterai le flic sacerdotal Mon ami est homme plein d'humour
Penché vers moi comme un larbin du ciel C'est lui qu'a trouvé ce bon mot
Et je mourirai cerné de rigolos Que je vous raconte à mon tour
En me disant qu'il était chouette Voltaire Ich slaffen at si auuz wihr prellen zie
Et qu'si en a des qui ont une plume au chapeau
Y en a des qui ont une plume dans l' derrière Subséquemment subséquemment
La la la Subséquemment que je ne comprends pas
La la la Pourquoi souvent ses compagnons
L'appellent
Quand je s'rai vieux L'appellent
Je s'rai insup' portable Caporal casse-pompon
Sauf pour mon lit
Et mon maigre passé Mon ami est un doux rêveur
Mon chien s'ra mort Pour lui Paris c'est une caserne
Ma barbe sera minable Et Berlin un petit champ de fleurs
Toutes mes morues Qui va de Moscou à l'Auvergne
M'auront laissé tomber Son rêve revoir Paris au printemps
Redéfiler en tête de son groupe
En chantant comme tous les vingt-cinq ans
Baisse ta gaine Gretchen que je baise ta croupe (ein zwei)

31
je me suis variété
Subséquemment subséquemment Et depuis
Subséquemment que nous ne comprenons toutes les nuits
Comment nos amis les Franzosen Quand je chante: "Ne me quitte pas"
Ils osent ils osent l'appeler Je regrette mon écurie
Caporal casse-pompon (ein zwei) Et mes silences d'autrefois

Et puis et puis tu es partie radicale


Avec un zèbre un zèbre mal rayé
Le cheval Le jour madame où je t'ai refusé
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1967 D'apprendre à monter à cheval
Et tu m'avais pris ma jument
Mon silence mes sabots
J'étais vraiment j'étais bien plus heureux Mon écurie mon galop
Bien plus heureux avant Tu ne m'as laissé que mes dents
Quand j'étais ch'val Et voilà pourquoi je cours je cours
Que je trainais Madame votre landeau Je cours le monde en hennissant
Jolie Madame dans les rues de Bordeaux Me voyant refuser l'amour
Mais t'as voulu Par les femmes et par les juments
Que je sois ton amant
T'as même voulu J'étais vraiment vraiment bien plus heureux
Que je quitte ma jument Bien plus heureux avant
Je n'étais qu'un ch'val oui oui Quand j'étais ch'val
Mas t'en as profité Que je promenais madame votre landeau
Par amour pour toi Quand j'étais ch'val
Je m'suis déjumenté Et quand tu étais chameau
Et depuis
Toutes les nuits
Dans ton lit
De satin blanc
Je regrette mon écurie Le colonel
Mon écurie et ma jument Paroles et Musique: J.Brel/G. Wagenheim   1958

J'étais vraiment vraiment bien plus heureux


Bien plus heureux avant Colonel, faut-il,
Quand j'étais ch'val Puisque se lève le jour
Que tu te foutais Madame Faire battre tous les tambours
La gueule par terre Pour éveiller tous les pandoures?
Jolie madame Colonel, faut-il
Quand tu forcais le cerf Faire sonner tous les clairons
Mais tu as voulu Pour rassembler les escadrons?
Que j'apprenne les bonnes manières Colonel, Colonel, nous attendons
T'as voulu
Que j'marche sur les pattes de derrière Le Colonel s'ennuie.
Je n'étais qu'un ch'val oui ouais Il effeuille une fleur
Mais tu m'as couillonné hein Et rêve à son amie
Par amour pour toi Qui lui a pris son cœur.
Je m'suis derrièrisé Son amie est si douce et belle
Et depuis Dans sa robe au soleil
Toutes les nuits Que chaque jour passé près d'elle
Quand nous dansons le tango Se meuble de merveilles.
Je regrette mon écurie
Mon écurie et mon galop Colonel, faut-il,
Puisque voilà notre ennemi,
J'étais vraiment vraiment bien plus heureux Faire tirer notre artillerie
Bien plus heureux avant Disposer notre infanterie?
Quand j'étais ch'val Colonel, faut-il,
Que je te promenais Charger tous comme des fous
Madame sur mon dos Ou partir à pas de loup ?
Jolie madame en forêt Colonel, Colonel, dites-le nous
De Fontainebleau
Mais tu as voulu Le Colonel s'ennuie.
Que je sois ton banquier Il effeuille une fleur
Tu as même voulu Et rêve à son amie
Que je me mette à chanter Qui lui a pris son cœur.
J'n'étais qu'un ch'val oui oui Ses baisers doux comme velours
Mais tu en as abusé Tendrement ont conduit
Par amour pour toi A l'état-major de l'amour
Le Colonel ravi
32
Je briserai mon verre
Colonel, faut-il, Pour faire le silence
Puisque vous êtes blessé Et chanterai à tue-tête
Faut-il donc nous occuper A la mort qui s'avance
De vous trouver un abbé ? Les paillardes romances
Colonel, faut-il, Qui font peur aux nonnettes
Puisqu'est mort l'apothicaire Puis je veux qu'on m'emmène
Chercher le vétérinaire ? En haut de ma colline
Colonel, Colonel, que faut-il faire ? Voir le soir qui chemine
Lentement vers la plaine
Le Colonel s'ennuie. Et là debout encore
Il effeuille une fleur J'insulterai les bourgeois
Et rêve à son amie Sans crainte et sans remords
Qui lui a pris son cœur. Une dernière fois
Il la voit et lui tend les bras
Il la voit et l'appelle Après mon dernier repas
Et c'est en lui parlant tout bas Je veux que l'on s'en aille
Qu'il entre dans le ciel Qu'on finisse ripaille
Ailleurs que sous mon toit
Ce Colonel qui meurt Après mon dernier repas
Et qui meurt de chagrin Je veux que l'on m'installe
Blessé d'une fille dans le cœur Assis seul comme un roi
Ce colonel loin de sa belle Accueillant ses vestales
C'est mon cœur loin du tien Dans ma pipe je brûlerai
C'est mon cœur loin du tien Mes souvenirs d'enfance
Mes rêves inachevés
Mes restes d'espérance
Et je ne garderai
Pour habiller mon âme
Le dernier repas Que l'idée d'un rosier
Paroles et Musique: Jacques Brel   1964 Et qu'un prénom de femme
Puis je regarderai
Le haut de ma colline
A mon dernier repas Qui danse qui se devine
Je veux voir mes frères Qui finit par sombrer
Et mes chiens et mes chats Et dans l'odeur des fleurs
Et le bord de la mer Qui bientôt s'éteindra
A mon dernier repas Je sais que j'aurai peur
Je veux voir mes voisins Une dernière fois
Et puis quelques Chinois
En guise de cousins .
Et je veux qu'on y boive
En plus du vin de messe
De ce vin si joli Le diable (Ça va)
Qu'on buvait en Arbois © Éditions Tropicales
Je veux qu'on y dévore
Après quelques soutanes
Une poule faisane {Prologue:}
Venue du Périgord Un jour le Diable vint sur terre, un jour le Diable vint sur terre
Puis je veux qu'on m'emmène pour surveiller ses intérêts, il a tout vu le Diable, il a tout
En haut de ma colline entendu
Voir les arbres dormir et après avoir tout vu, après avoir tout entendu, il est retourné
En refermant leurs bras chez
Et puis je veux encore lui, là-bas.
Lancer des pierres au ciel Et là-bas on avait fait un grand banquet, à la fin du banquet, il
En criant Dieu est mort s'est
Une dernière fois levé le Diable, il a prononcé un discours et en substance il a dit
ceci,
A mon dernier repas il a dit:
Je veux voir mon âne
Mes poules et mes oies Il y a toujours un peu partout
Mes vaches et mes femmes Des feux illuminant la terre ça va
A mon dernier repas Les hommes s'amusent comme des fous
Je veux voir ces drôlesses Aux dangereux jeux de la guerre ça va
Dont je fus maître et roi Les trains déraillent avec fracas
Ou qui furent mes maîtresses Parce que des gars pleins d'idéal
Quand j'aurai dans la panse Mettent des bombes sur les voies
De quoi noyer la terre Ça fait des morts originales

33
Ça fait des morts sans confession Et c'est le fou qu'on pendit
Des confessions sans rémission ça va
{au Refrain}
Rien ne se vend mais tout s'achète
L'honneur et même la sainteté ça va
Les États se muent en cachette
En anonymes sociétés ça va
Les grands s'arrachent les dollars Le gaz
Venus du pays des enfants
L'Europe répète l'Avare
Dans un décor de mil neuf cent Tu habites rue de la Madone
Ça fait des morts d'inanition Une maison qui se déhanche
Et l'inanition des nations ça va Une maison qui se tire-bouchone
Et qui pleure à grosses planches
Les hommes ils en ont tant vu L'escalier colimaçone
Que leurs yeux sont devenus gris ça va C'est pas grand non
Et l'on ne chante même plus Mais y a d'la place
Dans toutes les rues de Paris ça va
On traite les braves de fous Tu habites rue de la Madone
Et les poètes de nigauds Et moi je viens pour le gaz
Mais dans les journaux de partout Tu as un boudoir plein de boudhas
Tous les salauds ont leur photo Les bougies dansent dans leurs bougeoirs
Ça fait mal aux honnêtes gens Ça sent bon c'est sans histoire
Et rire les malhonnêtes gens. Ça ruiselle de tafetas
Ça va ça va ça va ça va C'est rempli de photos d'toi
Qui sommeillent devant la glace
Tu as un boudoir plein d'boudhas
Et moi et moi et moi
Le Fou du Roi Je viens pour le gaz

Tu as un vrai divan de roi


Un vrai divan de diva
Il était un fou du roi Du porto qu'tu rapportas
Qui vivait l'âme sereine De la Porte des Lilas
Dans un château d'autrefois T'as un p'tit chien et un grand chat
Pour l'amour d'une reine Un phono qui joue du jazz
Tu as un vrai divan de roi
{Refrain:} Et moi et moi et moi
Et vive les bossus, Je viens pour le gaz
Ma mère
Et vive les pendus Tu as des seins comme des soleils
Et vive les bossus, Comme des fruits comme des reposoirs
Ma mère Tu as des seins comme des miroirs
Et vive les pendus Comme des fruits comme du miel
Tu les recouvres tout devient noir
Il y eut une grande chasse Tu les découvres et je deviens Pégase
Où les nobles deux par deux Tu as des seins comme des trottoirs
Tous les dix mètres s'embrassent Et moi et moi et moi
Dans les chemins qu'on dit creux Je viens pour le gaz

{au Refrain} Et puis chez toi ya l'plombier


Et y l'bedeauet y a l'facteur
Lorsque le fou vit la reine Le docteur qui fait le café
Courtisée par un beau comte Le notaire qui sert les liqueurs
Il s'en fut le cœur en peine Ya la moitié d'un artilleur
Dans un bois pleurer de honte Y a un poète de Carpentras
Il y a quelques flics oui
{au Refrain} Et puis y a même ma sœur
Et tout ça est là pour le gaz
Lorsque trois jours furent passés
Il revint vers le château Allez allez-y donc tous rue de la Madone
Et alla tout raconter C'est pas grand non
Dans sa tour au roi la-haut Mais y a d'la place
Allez allez-y donc tous rue de la Madone
{au Refrain} Et dites bien que c'est pour le gaz

Devant tout ce qu'on lui raconte


Tout un jour le roi a ri
Il fit décorer le comte
34
Un qui que quand elle veut
Lui offrira la lune
Le lion
Paroles et Musique: Jacques Brel   1977 Ça fait une heure et vingt minutes
Qu'au-delà du fleuve qui bouillonne
Appelle appelle la lionne
Ça fait cinq jours Ça fait une heure et vingt minutes
Ça fait cinq nuits Que dans le fleuve qui bouillonne
Qu'au-delà du fleuve qui bouillonne Un lion est mort pour une lionne
Appelle appelle la lionne
Ça fait cinq jours
Ça fait cinq nuits
Qu'en-deçà du fleuve qui bouillonne
Répond le lion à la lionne Le moribond
Paroles et Musique: Jacques Brel   1961
Vas-y pas Gaston
Même si elle te raconte
Que sa mère est gentille Adieu l'Émile je t'aimais bien
Vas-y va Gaston Adieu l'Émile je t'aimais bien tu sais
Même si elle ose te dire On a chanté les mêmes vins
Qu'elle t'aime pour la vie On a chanté les mêmes filles
Même si elle te supplie On a chanté les mêmes chagrins
De l'amener à la ville Adieu l'Émile je vais mourir
Elle sera ta Manon C'est dur de mourir au printemps tu sais
Tu sera son Dequerieux Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Vous serez deux imbéciles Car vu que tu es bon comme du pain blanc
Je sais que tu prendras soin de ma femme
Ça fait dix jours Je veux qu'on rie
Ça fait dix nuits Je veux qu'on danse
Qu'au-delà du fleuve qui bouillonne Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Appelle appelle la lionne Je veux qu'on rie
Ça fait dix jours Je veux qu'on danse
Ça fait dix nuits Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
Qu'en-deça du fleuve qui bouillonne
Répond le lion à la lionne Adieu Curé je t'aimais bien
Adieu Curé je t'aimais bien tu sais
Vas-y va Gaston On n'était pas du même bord
Arrête de remuer la queue On n'était pas du même chemin
Il faut qu'elle s'impatiente Mais on cherchait le même port
Fais celui qu'a le temps Adieu Curé je vais mourir
Celui qui est débordé C'est dur de mourir au printemps tu sais
Mets-la en liste d'attente Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Vas-y va Gaston Car vu que tu étais son confident
Un lion doit être vache Je sais que tu prendras soin de ma femme
Dis-lui que t'es en plein rush Je veux qu'on rie
Souviens-toi de Polo Je veux qu'on danse
Qui nous disait toujours Je veux qu'on s'amuse comme des fous
"Too much is too much" Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Ça fait vingt jours Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
Ça fait vingt nuits
Qu'au-delà du fleuve qui bouillonne Adieu l'Antoine je t'aimais pas bien
Appelle appelle la lionne Adieu l'Antoine je t'aimais pas bien tu sais
Ça fait vingt jours J'en crève de crever aujourd'hui
Ça fait vingt nuits Alors que toi tu es bien vivant
Qu'en-deça du fleuve qui bouillonne Et même plus solide que l'ennui
Répond le lion à la lionne Adieu l'Antoine je vais mourir
C'est dur de mourir au printemps tu sais
Vas-y va Gaston Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Même si elle te signale Car vu que tu étais son amant
Qu'il y en a un autre en vue Je sais que tu prendras soin de ma femme
Un qui est jeune qui est beau Je veux qu'on rie
Qui danse comme un dieu Je veux qu'on danse
Qui a de la tenue Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Un qui a de la crinière Je veux qu'on rie
Qui est très intelligent Je veux qu'on danse
Et qui va faire fortune Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
Un qui est généreux

35
Adieu ma femme je t'aimais bien Ça fait du bien d'être amoureux
Adieu ma femme je t'aimais bien tu sais
Mais je prends le train pour le Bon Dieu Je sais je sais que ce prochain amour
Je prends le train qui est avant le tien Sera pour moi la prochaine défaite
Mais on prend tous le train qu'on peut Je sais déjà à l'entrée de la fête
Adieu ma femme je vais mourir La feuille morte que sera le petit jour
C'est dur de mourir au printemps tu sais Je sais je sais sans savoir ton prénom
Mais je pars aux fleurs les yeux fermés ma femme Que je serai ta prochaine capture
Car vu que je les ai fermés souvent Je sais déjà que c'est par leur murmure
Je sais que tu prendras soin de mon âme Que les étangs mettent les fleuves en prison
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse Mais on a beau faire on a beau dire
Je veux qu'on s'amuse comme des fous Qu'un homme averti en vaut deux
Je veux qu'on rie On a beau faire on a beau dire
Je veux qu'on danse Ça fait du bien d'être amoureux
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
Je sais je sais que ce prochain amour
Ne vivra pas jusqu'au prochain été
Je sais déjà que le temps des baisers
Pour deux chemins ne dure qu'un carrefour
Je sais je sais que ce prochain bonheur
Sera pour moi la prochaine des guerres
Le plat pays Je sais déjà cette affreuse prière
Paroles et Musique: Jacques Brel   1962 Qu'il faut pleurer quand l'autre est le vainqueur
© 1964 Barclay - Ed. Semi/Plouchenel
Mais on a beau faire on a beau dire
Qu'un homme averti en vaut deux
Avec la mer du Nord pour dernier terrain vague On a beau faire on a beau dire
Et des vagues de dunes pour arrêter les vagues Ça fait du bien d'être amoureux
Et de vagues rochers que les marées dépassent
Et qui ont à jamais le cœur à marée basse Je sais je sais que ce prochain amour
Avec infiniment de brumes à venir Sera pour nous de vivre un nouveau règne
Avec le vent de l'est écoutez-le tenir Dont nous croirons tous deux porter les chaînes
Le plat pays qui est le mien Dont nous croirons que l'autre a le velours
Je sais je sais que ma tendre faiblesse
Avec des cathédrales pour uniques montagnes Fera de nous des navires ennemis
Et de noirs clochers comme mâts de cocagne Mais mon cœur sait des navires ennemis
Où des diables en pierre décrochent les nuages Partant ensemble pour pêcher la tendresse
Avec le fil des jours pour unique voyage
Et des chemins de pluie pour unique bonsoir Car on a beau faire car on a beau dire
Avec le vent d'ouest écoutez-le vouloir Qu'un homme averti en vaut deux
Le plat pays qui est le mien On a beau faire on a beau dire
Ça fait du bien d'être amoureux
Avec un ciel si bas qu'un canal s'est perdu
Avec un ciel si bas qu'il fait l'humilité
Avec un ciel si gris qu'un canal s'est pendu
Avec un ciel si gris qu'il faut lui pardonner
Avec le vent du nord qui vient s'écarteler
Le tango funèbre
Avec le vent du nord écoutez-le craquer Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1964
Le plat pays qui est le mien

Avec de l'Italie qui descendrait l'Escaut Ah je les vois déjà


Avec Frida la Blonde quand elle devient Margot Me couvrant de baisers
Quand les fils de novembre nous reviennent en mai Et s'arrachant mes mains
Quand la plaine est fumante et tremble sous juillet Et demandant tout bas
Quand le vent est au rire quand le vent est au blé Est-ce que la mort s'en vient
Quand le vent est au sud écoutez-le chanter Est-ce que la mort s'en va
Le plat pays qui est le mien. Est-ce qu'il est encore chaud
Est-ce qu'il est déjà froid
Ils ouvrent mes armoires
Ils tâtent mes faïences
Le prochain amour Ils fouillent mes tiroirs
Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel-G. Jouannest   1961 Se régalant d'avance
De mes lettres d'amour
Enrubannées par deux
On a beau faire on a beau dire Qu'ils liront près du feu
Qu'un homme averti en vaut deux En riant aux éclats
On a beau faire on a beau dire Ah Ah Ah Ah Ah Ah

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Des anges fous se protégeant
Ah je les vois déjà Quand se retrouvent en courant
Compassés et frileux Les amants
Suivant comme des artistes Les amants de cœur
Mon costume de bois Les amants
Ils se poussent du cœur
Pour être le plus triste Ils s'aiment s'aiment à la folie
Ils se poussent du bras S'effeuillant à l'ombre des feux
Pour être le premier Se découvrant comme deux fruits
Z'ont amené des vieilles Puis se trouvant n'être plus deux
Qui ne me connaissaient plus Se dénouant comme velours
Z'ont amené des enfants Se reprenant au petit jour
Qui ne me connaissaient pas Et s'endormant les plus heureux
Pensent aux prix des fleurs Les amants
Et trouvent indécent Les amants de cœur
De ne pas mourir au printemps Les amants
Quand on aime le lilas
Ah Ah Ah Ah Ah Ah Ils s'aiment s'aiment en tremblant
Le cœur mouillé le cœur battant
Ah je les vois déjà Chaque seconde est une peur
Tous mes chers faux amis Qui croque le cœur entre ses dents
Souriant sous le poids Ils savent trop de rendez-vous
Du devoir accompli Où ne vinrent que des facteurs
Ah je te vois déjà Pour n'avoir pas peur du loup
Trop triste trop à l'aise Les amants
Protégeant sous le drap Les amants de cœur
Tes larmes lyonnaises Les amants
Tu ne sais même pas
Sortant de mon cimetière Ils s'aiment s'aiment en pleurant
Que tu entres en ton enfer Chaque jour un peu moins amants
Quand s'accroche à ton bras Quand ils ont bu tout leur mystère
Le bras de ton quelconque Deviennent comme sœur et frère
Le bras de ton dernier Brûlent leurs ailes d'inquiétude
Qui te fera pleurer Redeviennent deux habitudes
Bien autrement que moi Alors changent de partenaire
Ah Ah Ah Ah Ah Ah Les amants
Les amants de cœur
Ah je me vois déjà Les amants
M'installant à jamais
Bien triste bien au froid Qui s'aiment s'aiment en riant
Dans mon champ d'osselets Qui s'aiment s'aiment pour toujours
Ah je me vois déjà Qui s'aiment tout au long du jour
Je me vois tout au bout Qui s'aiment s'aiment s'aiment tant
De ce voyage-là Qu'on dirait des anges d'amour
D'où l'on revient de tout Des anges fous se protégeant
Je vois déjà tout ça Quand ils se retrouvent en courant
Et on a le brave culot Les amants
D'oser me demander Les amants de cœur
De ne plus boire que de l'eau Les amants
De ne plus trousser les filles
De mettre de l'argent de côté
D'aimer le filet de maquereau
Et de crier vive le roi
Ah Ah Ah Ah Ah Ah Les bergers
Paroles et Musique: Jacques Brel   1964

Les amants de cœur Parfois ils nous arrivent avec leurs grands chapeaux
Et leurs manteaux de laine que suivent leurs troupeaux
Paroles et Musique: Jacques Brel   1964 Les bergers
© Éditions Musicales Eddie Barclay Ils montent du printemps quand s'allongent les jours
Ou brûlés par l'été descendent vers les bourgs
Les bergers
Ils s'aiment s'aiment en riant Quand leurs bêtes s'arrêtent pour nous boire de l'eau
Ils s'aiment s'aiment pour toujours Se mettent à danser à l'ombre d'un pipeau
Ils s'aiment tout au long du jour Les bergers
Ils s'aiment s'aiment s'aiment tant
Qu'on dirait des anges d'amour Entre l'en est de vieux entre l'en est de sages

37
Qui appellent au puits tous les vieux du village Alors que c'est de tout leur cœur
Les bergers Alors que c'est de tout leur corps
Ceux-là ont des histoires à nous faire telles peurs Qu'elles trichent
Que pour trois nuits au moins nous rêvons des frayeurs Lorsqu'elles broutent le mari
Des bergers Ou lorsqu'elles broutent le diamant
Ils ont les mêmes rides et les mêmes compagnes Sur l'asphalte bleu de Paris
Et les mêmes senteurs que leurs vieilles montagnes Les biches
Les bergers Qu'on les chasse à coups de rubis
Ou qu'elles nous chassent au sentiment
Entre l'en est de jeunes entre l'en est de beaux Elles sont notre plus bel ennemi
Qui appellent les filles à faire le gros dos Les biches de vingt ans
Les bergers
Ceux-là ont des sourires qu'on dirait une fleur Elles sont notre pire ennemi
Et des éclats de rire à faire jaillir de l'eau Lorsqu'elles savent leur pouvoir
Les bergers Mais qu'elles savent leur sursis
Ceux-là ont des regards à vous brûler la peau Les biches
A vous défiancer à vous clouer le cœur Quand un chasseur est une chance
Les bergers Quand leur beauté se lève tard
Quand c'est avec toute leur science
Mais tous ils nous bousculent qu'on soit filles ou garçons Qu'elles trichent
Les garçons dans leurs rêves les filles dans leurs frissons Trompant l'ennui plus que le cerf
Les bergers Et l'amant avec l'autre amant
Alors nous partageons le vin et le fromage Et l'autre amant avec le cerf
Et nous croyons une heure faire partie du voyage Qui biche
Des bergers Mais qu'on les chasse à la folie
C'est un peu comme Noël Noël et ses trésors Ou qu'elles nous chassent du bout des gants
Qui s'arrêteraient chez nous aux Équinoxes d'or Elles sont notre pire ennemi
Les bergers Les biches d'après vingt ans

Après ça ils s'en vont avec leurs grands chapeaux Elles sont notre dernier ennemi
Et leurs manteaux de laine que suivent leurs troupeaux Quand leurs seins tombent de sommeil
Les bergers Pour avoir veillé trop de nuits
Ils montent du printemps quand s'allongent les jours Les biches
Ou brûlés par l'été descendent vers les bourgs Quand elles ont le pas résigné
Les bergers Des pèlerins qui s'en reviennent
Quand leurs bêtes ont fini de nous boire notre eau Quand c'est avec tout leur passé
Se remettent en route à l'ombre d'un pipeau Qu'elles trichent
Les bergers les bergers les bergers Afin de mieux nous retenir
Nous qui ne servons à ce temps
Qu'à les empêcher de vieillir
Les biches
Mais qu'on les chasse de notre vie
Les biches Ou qu'elles nous chassent parce qu'il est temps
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1962 Elles restent notre dernier ennemi
Les biches de trop longtemps

Elles sont notre premier ennemi


Quand elles s'échappent en riant
Des pâturages de l'ennui
Les biches Les bigotes
Avec des cils comme des cheveux Paroles et Musique: Jacques Brel   1963
Des cheveux en accroche-faon
Et seulement le bout des yeux
Qui triche Elles vieillissent à petits pas
Si bien que le chasseur s'arrête De petits chiens en petits chats
Et que je sais des ouragans Les bigotes
Qu'elles ont changés en poètes Elles vieillissent d'autant plus vite
Les biches Qu'elles confondent l'amour et l'eau bénite
Et qu'on les chasse de notre esprit Comme toutes les bigotes
Ou qu'elles nous chassent en rougissant
Elles sont notre premier ennemi Si j'étais diable en les voyant parfois
Les biches de quinze ans Je crois que je me ferais châtrer
Si j'étais Dieu en les voyant prier
Elles sont notre plus bel ennemi Je crois que je perdrais la foi
Quand elles ont l'éclat de la fleur Par les bigotes
Et déjà la saveur du fruit
Les biches Elles processionnent à petits pas
Qui passent toute vertu dehors De bénitier en bénitier

38
Les bigotes Il a fait jaillir des jets d'eau
Et patati et patata Qui mieux qu'un geste
Mes oreilles commencent à siffler Mieux qu'un mot
Les bigotes Rafraichiront ton amoureux
Penchée vers le sol
Vêtues de noir comme Monsieur le Curé Tu gerbes le blé
Qui est trop bon avec les créatures Et si parfois ton jupon vole
Elles s'embigotent les yeux baissés Pardonne-moide regarder
Comme si Dieu dormait sous leurs chaussures Les trésors que vient dévoiler
De bigotes Pour mon plaisir le vent frivole

Le samedi soir après le turbin Les blés sont pour la faucille


On voit l'ouvrier parisien Les soleils pour l'horizon
Mais pas de bigotes Les garçons sont pour les filles
Car c'est au fond de leur maison Et les filles pour les garçons
Qu'elles se préservent des garçons Les blés sont pour la faucille
Les bigotes Les soleils pour l'horizon
Les garçons sont pour les filles
Qui préfèrent se ratatiner Et les filles pour les garçons
De vêpres en vêpres de messe en messe
Toutes fières d'avoir pu conserver Donne-moi ton cœur
Le diamant qui dort entre leurs f...s Le soleil fatigué
De bigotes S'en est allé
Chanter ailleurs
Puis elles meurent à petits pas La chanson des blés moisonnés
A petit feu en petit tas Venu est le tempsde s'aimer
Les bigotes Il nous faut glaner le bonheur
Qui cimetièrent à petits pas Ecrasés d'amour éblouis de joie
Au petit jour d'un petit froid Je saluerai la fin du jour
De bigotes En te serrant tout contre moi
Et tu combleras mon émoi
Et dans le ciel qui n'existe pas En me disant que pour toujours
Les anges font vite un paradis pour elles
Une auréole et deux bouts d'ailes Les blés sont pour la faucille
Et elles s'envolent... à petits pas Les soleils pour l'horizon
De bigotes Les garçons sont pour les filles
Et les filles pour les garçons
Les blés sont pour la faucille
Les soleils pour l'horizon
Les blés Les garçons sont pour les filles
Et les filles pour les garçons

Donne-moi la main
Le soleil a paru
Il nous faut prendre le chemin Les bonbons (version 1964)
Le temps des moissons est venu Paroles et Musique: Jacques Brel   1964
Le blé nous a tant attendu
Et nous attendons trop de pain
Ta main sur mon bras Je vous ai apporté des bonbons
Pleine de douceur Parce que les fleurs c'est périssable
Bien gentiment demandera Puis les bonbons c'est tellement bon
De vouloir épargner les fleurs Bien que les fleurs soient plus présentables
Ma faucille les évitera Surtout quand elles sont en boutons
Pour éviter que tu ne pleures Mais je vous ai apporté des bonbons

Les blés sont pour la faucille J'espère qu'on pourra se promener


Les soleils pour l'horizon Que madame votre mère ne dira rien
Les garçons sont pour les filles On ira voir passer les trains
Et les filles pour les garçons A huit heures je vous ramènerai
Les blés sont pour la faucille Quel beau dimanche pour la saison
Les soleils pour l'horizon Je vous ai apporté des bonbons
Les garçons sont pour les filles
Et les filles pour les garçons Si vous saviez ce que je suis fier
De vous voir pendue à mon bras
Donne-moi tes yeux Les gens me regardent de travers
Le soleil est chaud Y en a même qui rient derrière moi
Et dans ton regard lumineux Le monde est plein de polissons

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Je vous ai apporté des bonbons

Oh oui Germaine est moins bien que vous


Oh oui Germaine elle est moins belle
C'est vrai que Germaine a des cheveux roux Les bourgeois
C'est vrai que Germaine elle est cruelle Paroles et Musique: J. Brel, J. Corti   1962
Ça vous avez mille fois raison
Je vous ai apporté des bonbons
Le cœur bien au chaud
Et nous voilà sur la Grand' Place Les yeux dans la bière
Sur le kiosque on joue Mozart Chez la grosse Adrienne de Montalant
Mais dites-moi que c'est par hasard Avec l'ami Jojo
Qu'il y a là votre ami Léon Et avec l'ami Pierre
Si vous voulez que je cède ma place On allait boire nos vingt ans
J'avais apporté des bonbons Jojo se prenait pour Voltaire
Et Pierre pour Casanova
Mais bonjour mademoiselle Germaine Et moi, moi qui étais le plus fier
Moi, moi je me prenais pour moi
Je vous ai apporté des bonbons Et quand vers minuit passaient les notaires
Parce que les fleurs c'est périssable Qui sortaient de l'hôtel des "Trois Faisans"
Puis les bonbons c'est tellement bon On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
Bien que les fleurs soient plus présentables... En leur chantant

Les bourgeois c'est comme les cochons


Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Les bonbons (version 1967) Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient c...
Paroles et Musique: Jacques Brel   1967
Le cœur bien au chaud
Les yeux dans la bière
Je viens rechercher mes bonbons Chez la grosse Adrienne de Montalant
Vois-tu, Germaine, j'ai eu trop mal Avec l'ami Jojo
Quand tu m'as fait cette réflexion Et avec l'ami Pierre
Au sujet de mes cheveux et longs On allait brûler nos vingt ans
C'est la rupture bête et brutale Voltaire dansait comme un vicaire
Et Casanova n'osait pas
Je viens rechercher mes bonbons Et moi, moi qui restait le plus fier
Maintenant je suis un autre garçon Moi j'étais presque aussi saoul que moi
J'habite à l'Hôtel Georges Vé Et quand vers minuit passaient les notaires
J'ai perdu l'accent bruxellois Qui sortaient de l'hôtel des "Trois Faisans"
D'ailleurs plus personne n'a cet accent-là On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
Sauf Brel à la télévision En leur chantant

Je viens rechercher mes bonbons Les bourgeois c'est comme les cochons
Quand père m'agace moi je lui fais zop la Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Je traite ma mère de névropathe Les bourgeois c'est comme les cochons
Faut dire que père est vachement bat Plus ça devient vieux plus ça devient c...
Alors que mère est un peu snob
Enfin tout ça c'est le conflit des générations Le cœur au repos
Les yeux bien sur terre
Je viens rechercher mes bonbons Au bar de l'hôtel des "Trois Faisans"
Et tous les samedis soir que j'peux Avec maître Jojo
Germaine, j'écoute pousser mes ch'veux Et avec maître Pierre
Je fais glou glou je fais miam miam Entre notaires on passe le temps
Je défile criant: paix au Vietnam Jojo parle de Voltaire
Parce qu'enfin enfin j'ai des opinions Et Pierre de Casanova
Et moi, moi qui suis resté le plus fier
Je viens rechercher mes bonbons Moi, moi je parle encore de moi
Mais c'est ça votre jeune frère Et c'est en sortant vers minuit Monsieur le Commissaire
Mademoiselle Germaine, c'est celui qu'est flamingant Que tous les soirs de chez la Montalant
De jeunes "peigne-culs" nous montrent leur derrière
Je vous ai apporté des bonbons En nous chantant
Parce que les fleurs c'est périssable
Les bonbons c'est tellement bon Les bourgeois c'est comme les cochons
Bien que les fleurs soient plus présentables Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Surtout quand elles sont en boutons Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient c...
Je vous ai apporté des bonbons ...

40
Les désespérés

Ils ont brûlés leurs ailes


Les coeurs tendres Ils ont perdu leurs branches
Paroles et Musique: Jacques Brel   1967 Tellement naufragés
© 1967 Barclay - Ed. Famille Brel 3:27 Que la mort paraît blanche
note: du film "Un idiot à Paris" Ils reviennent d'amour
Ils se sont réveillés
Ils marchent en silence
Y en a qui ont le cœur si large Les désespérés
Qu'on y entre sans frapper
Y en a qui ont le cœur si large Et je sais leur chemin
Qu'on en voit que la moitié Pour l'avoir cheminé
Déjà plus de cent fois
Y en a qui ont le cœur si frêle Cent fois plus qu'à moitié
Qu'on le briserait du doigt Moins vieux ou plus meurtris
Y en qui ont le cœur trop frêle Ils vont terminer
Pour vivre comme toi et moi Partent en silence
Les désespérés
Z'ont pleins de fleurs dans les yeux
Les yeux à fleur de peur Lente sous le pont
De peur de manquer l'heure L'eau est douce et profonde
Qui conduit à Paris Voici la bonne hôtesse
Voici la fin du monde
Y en a qui ont le cœur si tendre Ils pleurent leurs prénoms
Qu'y reposent les mésanges Comme de jeunes mariés
Y en qui ont le cœur trop tendre Ils fondent en silence
Moitié hommes et moitié anges Les désespérés

Y en a qui ont le cœur si vaste Que se lève celui


Qu'ils sont toujours en voyage Qui leur lance la pierre
Y en a qui ont le cœur trop vaste Ils ne sait de l'amour
Pour se priver de mirages Que le verbe s'aimer
Sur le pont il n'est plus rien
Z'ont pleins de fleurs dans les yeux Qu'une brume légère
Les yeux à fleur de peur Ça s'oublie en silence
De peur de manquer l'heure Ceux qui ont espéré
Qui conduit à Paris

Y en a qui ont le cœur dehors


Et ne peuvent que l'offrir
Le cœur tellement dehors Les F...
Qu'ils sont tous à s'en servir Paroles et Musique: J. Brel/ J. Donato   1977
Les Flamingands, chanson comique !
Celui-là a le cœur dehors
Et si frèle et si tendre
Que maudit soient les arbres morts Messieurs les Flamingants
Qui ne pourraient point l'entendre J'ai deux mots à vous rire
Il y a trop longtemps
A pleins de fleurs dans les yeux Que vous me faites frire
Les yeux à fleur de peur À vous souffler dans le cul
De peur de manquer l'heure Pour devenir autobus
Qui conduit à Paris Vous voilà acrobates
Mais vraiment rien de plus

Nazis durant les guerres


Et catholiques entre elles
Les désespérés Vous oscillez sans cesse
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1966 Du fusil au missel
Vos regards sont lointains
Votre humour est exsangue
Se tiennent par la main Bien qu'y aient des rues à Gand
Et marchent en silence Qui pissent dans les deux langues
Dans ces villes éteintes Tu vois quand j'pense à vous
Que le crachin balance J'aime que rien ne se perde
Le sol que leur pas Messieurs les Flamingants
Pas à pas fredonné Je vous emmerde
Ils marchent en silence
Vous salissez la Flandre
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Mais la Flandre vous juge. Qui mouillent les adieux
Voyez la mer du nord Les fenêtres chantonnent
Elle s'est enfuie de Bruges. Quand se lève à l'automne
Cessez de me gonfler Le vent qui abandonne
Mes vieilles roubignoles Les rues aux amoureux
Avec votre art flamand-italo-espagnol. Les fenêtres se taisent
Vous êtes tellement tellement Quand l'hiver les apaise
Beaucoup trop lourds Et que la neige épaisse
Que quand les soirs d'orage Vient leur fermer les yeux
Des chinois cultivés Mais les fenêtres jacassent
Me demandent d'où je suis, Quand une femme passe
Je réponds fatigué Qui habite l'impasse
Et les larmes aux dents : Où passent les Messieurs
"Ik ben van Luxembourg".
Et si aux jeunes femmes, La fenêtre est un œuf
On ose un chant flamand, Quand elle est œil-de-bœuf
Elle s'envolent en rêvant Qui attend comme un veuf
Aux oiseaux roses et blancs Au coin d'un escalier
La fenêtre bataille
Et je vous interdis Quand elle est soupirail
D'espérer que jamais à Londres D'où le soldat mitraille
Sous la pluie on puisse Avant de succomber
Vous croire anglais Les fenêtres musardent
Et je vous interdis Quand elles sont mansardes
À New-York ou Milan Et abritent les hardes
D'éructer Messeigneurs D'un poète oublié
Autrement qu'en flamand Mais les fenêtres gentilles
Vous n'aurez pas l'air cons Se recouvrent de grilles
Vraiment pas cons du tout Si par malheur on crie
Et moi je m'interdis " Vive la liberté "
De dire que je m'en fous
Et je vous interdis Les fenêtres surveillent
D'obliger nos enfants L'enfant qui s'émerveille
Qui ne vous ont rien fait Dans un cercle de vieilles
À aboyer flamand A faire ses premiers pas
Et si mes frères se taisent Les fenêtres sourient
Et bien tant pis pour elles. Quand quinze ans trop jolis
Je chante persiste et signe : Ou quinze ans trop grandis
Je m'appelle Jacques Brel S'offrent un premier repas
Les fenêtres menacent
Les fenêtres grimacent
Quand parfois j'ai l'audace
D'appeler an chat un chat
Les fenêtres Les fenêtres me suivent
Paroles et Musique: Jacques Brel Me suivent et me poursuivent
© Éditions Musicales Pouchenel, Bruxelles Jusqu'à ce que peur s'ensuive
Tout au fond de mes draps

Les fenêtres nous guettent Les fenêtres souvent


Quand notre cœur s'arrête Traitent impunément
En croisant Louisette De voyous des enfants
Pour qui brûlent nos chairs Qui cherchent qui aimer
Les fenêtres rigolent Les fenêtres souvent
Quand elles voient la frivole Soupçonnent ces manants
Qui offre sa corolle Qui dorment sur les bancs
À un clerc de notaire Et parlent l'étranger
Les fenêtres sanglotent Les fenêtres souvent
Quand à l'aube falote Se ferment en riant
Un enterrement cahote Se ferment en criant
Jusqu'au vieux cimetière Quand on y va chanter
Mais les fenêtres froncent Ah je n'ose pas penser
Leurs corniches de bronze Qu'elles servent à voiler
Quand elles voient les ronces Plus qu'à laisser entrer
Envahir leur lumière La lumière de l'été

Les fenêtres murmurent Non je préfère penser


Quand tombent en chevelure Qu'une fenêtre fermée
Les pluies de la froidure Ça ne sert qu'à aider

42
Les amants à s'aimer Ça se joue de vous
{2x} Les filles
Ça joue à jouer
Ça joue à aimer
Ça joue pour gagner
Les filles
Qu'elles jouent les petites femmes
Les filles et les chiens Qu'elles jouent les grandes dames
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1963 Ça se joue en drames
Mais les chiens
Ça ne joue à rien
Les filles Parce que ça ne sait pas
C'est beau comme un jeu Comment faut tricher
C'est beau comme un feu Les chiens
C'est beaucoup trop peu Ça ne joue a rien
Les filles C'est peut-être pour ça
C'est beau comme un fruit Qu'on croit les aimer
C'est beau comme la nuit
C'est beaucoup d'ennuis Les filles
Les filles Ça donne à rêver
C'est beau comme un renard Ça donne à penser
C'est beau comme un retard Ça vous donne congé
C'est beaucoup trop tard Les filles
Les filles Ça se donne pourtant
C'est beau tant que ça peut Ça se donne un temps
C'est beau comme l'adieu Ça donnant donnant
Et c'est beaucoup mieux Les filles
Mais les chiens Ça donne de l'amour
C'est beau comme des chiens A chacun son tour
Et ça reste là Ça donne sur la cour
A nous voir pleurer Les filles
Les chiens Ça vous donne son corps
Ça ne nous dit rien Ça se donne si fort
C'est peut-être pour ça Que ça donne des remords
Qu'on croit les aimer Mais les chiens
Ça ne vous donne rien
Les filles Parce que ça ne sait pas
Ça vous pend au nez Faire semblant de donner
Ça vous prend au thé Les chiens
Ça vous prend les dés Ça ne vous donne rien
Les filles C'est peut-être pour ça
Ça vous pend au cou Qu'on doit les aimer
Ça vous pend au clou
Ça dépend de vous Et c'est pourtant pour les filles
Les filles Qu'au moindre matin
Ça vous pend au cœur Qu'au moindre chagrin
Ça se pend aux fleurs On renie ses chiens
Ça dépend des heures
Les filles
Ça dépend de tout
Ça dépend surtout
Ça dépend des sous
Les flamandes
Mais les chiens Paroles et Musique: Jacques Brel   1959
Ça ne dépend de rien
Et ça reste là
A nous voir pleurer Les Flamandes dansent sans rien dire
Les chiens Sans rien dire aux dimanches sonnants
Ça ne nous dit rien Les Flamandes dansent sans rien dire
C'est peut-être pour ça Les Flamandes ça n'est pas causant
Qu'on croit les aimer Si elles dansent c'est parce qu'elles ont vingt ans
Et qu'à vingt ans il faut se fiancer
Les filles Se fiancer pour pouvoir se marier
Ça joue au cerceau Et se marier pour avoir des enfants
Ça joue du cerveau C'est ce que leur ont dit leurs parents
Ça se joue tango Le bedeau et même Son Eminence
Les filles L'Archiprêtre qui prêche au couvent
Ça joue l'amadou Et c'est pour ça et c'est pour ça qu'elles dansent
Ça joue contre joue Les Flamandes
Les Flamandes
43
Les Fla - Les Fla - Les Flamandes L'érotisme et la gymnastique
Tout ça dresse une muraille de Chine
Les Flamandes dansent sans frémir Entre le pauvre ami Pierrot
Sans frémir aux dimanches sonnants Et sa fugace Colombine
Les Flamandes dansent sans frémir Dans les jardins du casino
Les Flamandes ça n'est pas frémissant
Si elles dansent c'est parce qu'elles ont trente ans Les musiciens frétillent des moustaches
Et qu'à trente ans il est bon de montrer Et du violon et du saxo
Que tout va bien que poussent les enfants Quand la polka guide la démarche
Et le houblon et le blé dans le pré De la beauté du casino
Elles font la fierté de leurs parents Quelques couples protubérants
Et du bedeau et de Son Eminence Dansent comme des escalopes
L'Archiprêtre qui prêche au couvent Avec des langueurs d'héliotropes
Et c'est pour ça et c'est pour ça qu'elles dansent Devant les faiseuses de cancan
Les Flamandes Un colonel encivilé présente
Les Flamandes À de fausses duchesses
Les Fla - Les Fla - Les Flamandes Compliments et civilités
Et baise-main et rond de fesses
Les Flamandes dansent sans sourire Tout ça n'arrange pas on le devine
Sans sourire aux dimanches sonnants Les affaires du pauvre Pierrot
Les Flamandes dansent sans sourire Cherchant fugace Colombine
Les Flamandes ça n'est pas souriant Dans les jardins du casino
Si elles dansent c'est qu'elles ont septante ans
Qu'à septante ans il est bon de montrer Et puis le soir tombe par taches
Que tout va bien que poussent les petits-enfants Les musiciens rangent leurs saxos
Et le houblon et le blé dans le pré Et leurs violons et leurs moustaches
Toutes vêtues de noir comme leurs parents Dans les jardins du casino
Comme le bedeau et comme Son Eminence Les jeunes filles rentrent aux tanières
L'Archiprêtre qui radote au couvent Sans ce jeune homme ou sans ce veuf
Elles héritent et c'est pour ça qu'elles dansent Qui devait leur offir la litière
Les Flamandes Où elles auraient pondu leur œuf
Les Flamandes Les vieux messieurs rentrent au bercail
Les Fla - Les Fla - Les Flamandes Retrouver le souvenir jauni
De leur madame Bovary
Les Flamandes dansent sans mollir Qu'ils entretiennent vaille que vaille
Sans mollir aux dimanches sonnants Il ne demeure que l'opaline
Les Flamandes dansent sans mollir De l'âme du pauvre Pierrot
Les Flamandes ça n'est pas mollissant Pleurant fugace colombine
Si elles dansent c'est parce qu'elles ont cent ans Dans les jardins du casino
Et qu'à cent ans il est bon de montrer Du casino
Que tout va bien qu'on a toujours bon pied
Et bon houblon et bon blé dans le pré
Elles s'en vont retrouver leurs parents
Et le bedeau et même Son Eminence
L'Archiprêtre qui repose au couvent Les Marquises
Et c'est pour ça qu'une dernière fois elles dansent Paroles et Musique: Jacques Brel   1977
Les Flamandes
Les Flamandes Ils parlent de la mort
Les Fla - Les Fla -Les Flamandes. Comme tu parles d'un fruit
Ils regardent la mer
Comme tu regardes un puit
Les femmes sont lascives
Les jardins du casino Au soleil redouté
Et s'il n'y a pas d'hiver
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1964 Cela n'est pas l'été
La pluie est traversière
Elle bat de grain en grain
Les musiciens sortent leurs moustaches Quelques vieux chevaux blancs
Et leurs violons et leurs saxos Qui fredonnent Gauguin
Et la polka se met en marche Et par manque de brise
Dans les jardins du casino Le temps s'immobilise
Où glandouillent en papotant Aux Marquises
De vieilles vieilles qui ont la galatouille
Et de moins vieilles qui ont la chatouille Du soir montent des feux
Et des messieurs qui ont le temps Et des pointes de silence
Passent aussi indifférents Qui vont s'élargissant
Quelques jeunes gens faméliques Et la lune s'avance
Qui sont encore confondant Et la mer se déchire

44
Infiniment brisée J'aime pas les troupeaux
Par des rochers qui prirent Qui ne voient pas plus loin
Des prénoms affolés Que le bout de leur coteau
Et puis plus loin des chiens Qui avancent en reculant
Des chants de repentance Qui se noient dans un verre d'eau bénite
Des quelques pas de deux Et dès que le vent se lève
Et quelques pas de danse Montrent le bas de leur dos
Et la nuit est soumise Désolé, bergère
Et l'alizé se brise J'aime pas les troupeaux
Aux Marquises
Désolé, bergère
Le rire est dans le cœur J'aime pas les bergers
Le mot dans le regard Désolé, bergère
Le cœur est voyageur J'aime pas les bergers
L'avenir est au hasard Il pleut, il pleut, bergère
Et passent des cocotiers Prends garde à te garder
Qui écrivent des chants d'amour Prends garde à te garder, bergère
Que les sœurs d'alentour Un jour tu vas bêler
Ignorent d'ignorer Désolé, bergère
Les pirogues s'en vont J'aime pas les bergers
Les pirogues s'en viennent
Et mes souvenirs deviennent
Ce que les vieux en font
Veux tu que je dise
Gémir n'est pas de mise Les paumés du petit matin
Aux Marquises Paroles et Musique: J. Brel/F. Rauber   1962

Ils s'éveillent à l'heure du berger


Les moutons Pour se lever à l'heure du thé
Et sortir à l'heure de plus rien
Paroles: Jacques Brel. Musique: Jacques Brel, Gérard Les paumés du petit matin
Jouannest   1967  "Les Marquises" Elles elles ont l'arrogance
Des filles qui ont de la poitrine
Eux ils ont cette assurance
Désolé, bergère Des hommes dont on devine
J'aime pas les moutons Que le papa a eu de la chance
Qu'ils soient pure laine Les paumés du petit matin
Ou en chapeau melon
Qu'ils broutent leur colline Venez venez danser
Qu'ils broutent le béton Copain copain copain copain
Menés par quelques chiens Copain copain copain
Et par quelques bâtons Venez danser
Désolé, bergère Et ça danse les yeux dans les seins
J'aime pas les moutons
Ils se blanchissent leurs nuits
Désolé, bergère, Au lavoir des mélancolies
J'aime pas les agneaux Qui lave sans salir les mains
Qui arrondissent le dos Les paumés du petit matin
De troupeau en troupeau Ils se racontent à minuit
De troupeau en étable Les poèmes qu'ils n'ont pas lus
Et d'étable en bureau Les romans qu'ils n'ont pas écrits
J'aime encore mieux les loups Les amours qu'ils n'ont pas vécues
J'aime mieux les moineaux Les vérités qui ne servent à rien
Désolé, bergère Les paumés du petit matin
J'aime pas les agneaux
Venez venez danser
Désolé, bergère, Copain copain copain copain
J'aime pas les brebis Copain copain copain
Ça arrive tout tordues Venez danser
Et ça dit déjà oui Et ça danse les yeux dans les seins
Ça se retrouve tondues
Et ça vous redit oui L'amour leur déchire le foie
Ça se balance en boucherie C'était c'était c'était si bien
Et ça re-redit oui C'était... vous ne comprendriez pas...
Désolé, bergère Les paumés du petit matin
J'aime pas les brebis Ils prennent le dernier whisky
Ils prennent le dernier bon mot
Désolé, bergère
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Ils reprennent le dernier whisky Sur ton cœur qui sourit
Ils prennent le dernier tango Et c'est Paris bonjour
Ils prennent le dernier chagrin Et ta main dans ma main
Les paumés du petit matin Qui me dit déjà oui
Et c'est Paris l'amour
Venez venez pleurer Le premier rendez-vous
Copain copain copain copain A l'Ile Saint-Louis
Copain copain copain C'est Paris qui commence
Venez pleurer Et le premier baiser
Et ça pleure les yeux dans les seins Volé aux Tuileries
Et c'est Paris la chance
Et le premier baiser
Reçu sous un portail
Et c'est Paris romance
Les pieds dans le ruisseau Et deux têtes qui se tournent
En regardant Versailles
Et c'est Paris la France
{Refrain:}
Des jours que l'on oublie
Les pieds dans le ruisseau
Qui oublient de nous voir
Moi je regarde couler la vie
Et c'est Paris l'espoir
Les pieds dans le ruisseau
Des heures où nos regards
Moi je regarde sans dire un mot
Ne sont qu'un seul regard
Et c'est Paris miroir
Les gentils poissons
Rien que des nuits encore
Me content leur vie
Qui séparent nos chansons
En faisant des ronds
Et c'est Paris bonsoir
Sur l'onde jolie
Et ce jour-là enfin
Et moi je réponds
Où tu ne dis plus non
En gravant dans l'eau
Et c'est Paris ce soir
Des mots jolis
Une chambre un peu triste
Mots de ma façon
Où s'arrête la ronde
Et c'est Paris nous deux
{au Refrain}
Un regard qui reçoit
La tendresse du monde
Au fil du courant
Et c'est Paris tes yeux
S'efface une lettre
Ce serment que je pleure
Lettre d'un amant
Plutôt que ne le dis
Disparu peut-être
C'est Paris si tu veux
Ah que je voudrais
Et savoir que demain
Trouver près de moi
Sera comme aujourd'hui
Une fille dont j'pourrais
C'est Paris merveilleux
Caresser les doigts
Mais la fin du voyage
{au Rferain}
La fin de la chanson
Et c'est Paris tout gris
Et quand le crapaud
Dernier jour, dernière heure
Berce au crépuscule
Première larme aussi
Parmi les roseaux
Et c'est Paris la pluie
Dame libellule
Ces jardins remontés
Penchant mon visage
Qui n'ont plus leur parure
Au dessus de l'eau
Et c'est Paris l'ennui
Je vois mon image
La gare où s'accomplit
Moi je vois l'idiot
La dernière déchirure
Et c'est Paris fini
Loin des yeux loin du cœur
Chassé du paradis
Les prénoms de Paris Et c'est Paris chagrin
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1961 Mais une lettre de toi
Une lettre qui dit oui
Et c'est Paris demain
Des villes et des villages
Le soleil qui se lève
Les roues tremblent de chance
Et caresse les toits
C'est Paris en chemin
Et c'est Paris le jour
Et toi qui m'attends là
La Seine qui se promène
Et tout qui recommence
Et me guide du doigt
Et c'est Paris je reviens.
Et c'est Paris toujours
Et mon cœur qui s'arrête
46
Je trouve Madame de circonstances

Les remparts de Varsovie Madame promène son chien un boudin noir nommé Byzance
Paroles et Musique: Jacques Brel   1977 Madame traîne son enfance et change selon les circonstances
Madame promène partout son accent russe avec aisance
C'est vrai que Madame est de Valence
Madame promène son cul sur les remparts de Varsovie
Madame promène son cœur sur les ringards de sa folie
Madame promène son ombre sur les grand-places de l'Italie
Je trouve que Madame vit sa vie
Les singes
Madame promène à l'aube les preuves de ses insomnies Paroles et Musique: Jacques Brel   1961
Madame promène à ch'val ses états d'âmes et ses lubies
Madame promène un con qu'assure que madame est jolie
Je trouve que Madame est servie Avant eux avant les culs pelés
La fleur l'oiseau et nous étions en liberté
Tandis que moi tous les soirs je suis vestiaire à l'Alcazar Mais ils sont arrivés et la fleur est en pot
Madame promène l'été jusque dans le midi d'la France Et l'oiseau est en cage et nous en numéro
Madame promène ses seins jusque dans le midi de la chance Car ils ont inventé prisons et condamnés
Madame promène son spleen jusqu'au bord du lac de Constance Et casiers judiciaires et trous dans la serrure
Je trouve Madame de circonstances Et les langues coupées des premières censures
Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Madame promène son chien un boudin noir nommé Byzance Les singes les singes les singes de mon quartier
Madame traîne son enfance et change selon les circonstances Les singes les singes les singes de mon quartier
Madame promène partout son accent russe avec aisance
C'est vrai que Madame est de Valence Avant eux il n'y avait pas de problème
Quand poussaient les bananes même pendant le Carême
Tandis que moi tous les soirs je suis barman à l'Alcazar Mais ils sont arrivés bardés d'intolérances
Madame promène son ch'veu qu'a la senteur des nuits de Chine Pour chasser en apôtres d'autres intolérances
Madame promène son regard sur tous les vieux qui ont des Car ils ont inventé la chasse aux Albigeois
usines La chasse aux infidèles et la chasse à ceux-là
Madame promène son rire comme d'autres promènent leur La chasse aux singes sages qui n'aiment pas chasser
vaseline Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Je trouve que Madame est coquine Les singes les singes les singes de mon quartier
Les singes les singes les singes de mon quartier
Madame promène ses cuites de verre en verre de fine en fine
Madame promène les gènes de vingt mille officiers de marine Avant eux l'homme était un prince
Madame raconte partout qu'on m'appelle Tata Jacqueline La femme une princesse l'amour une province
Je trouve Madame mauvaise copine Mais ils sont arrivés le prince est un mendiant
La province se meurt la princesse se vend
Tandis que moi tous les soirs je suis chanteuse légère à Car ils ont inventé l'amour qui est un péché
l'Alcazar L'amour qui est une affaire le marché aux pucelles
Madame promène ses mains dans les différents corps d'armée Le droit de courte-cuisse et les mères maquerelles
Madame promène mes sous chez des demi-selles de bas Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
quartiers Les singes les singes les singes de mon quartier
Madame promène carosse qu'elle voudrait bien me voir tirer Les singes les singes les singes de mon quartier
Je trouve que Madame est gonflée
Avant eux il y avait paix sur terre
Madame promène banco qu'elle veut bien me laisser régler Quand pour dix éléphants il n'y avait qu'un militaire
Madame promène bijoux qu'elle veut bien me laisser facturer Mais ils sont arrivés et c'est à coups de bâtons
Madame promène ma Rolls que pour suivre quelque huissier Que la raison d'État a chassé la raison
Je trouve que Madame est pressée Car ils ont inventé le fer à empaler
Et la chambre à gaz et la chaise électrique
Tandis que moi tous les soirs je fais la plonge à l'Alcazar Et la bombe au napalm et la bombe atomique
Madame promène son cul sur les remparts de Varsovie Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Madame promène son cœur sur les ringards de sa folie Les singes les singes les singes de mon quartier
Madame promène son ombre sur les grand-places de l'Italie Les singes les singes les singes de mon quartier
Je trouve que Madame vit sa vie

Madame promène à l'aube les preuves de ses insomnies


Madame promène à ch'val ses états d'âmes et ses lubies
Madame promène un con qu'assure que Madame est jolie Les timides
Je trouve que Madame est servie Paroles et Musique: Jacques Brel   1964

Tandis que moi tous les soirs je suis vestiaire à l'Alcazar


Madame promène l'été jusque dans le midi d'la France Les timides
Madame promène ses seins jusque dans le midi de la chance Ça se tortille
Madame promène son spleen jusqu'au bord du lac de Constance Ça s'entortille

47
Ça sautille Juste un soupir
Ça se met en vrille Et ils meurent
Ça se recroqueville Une valise sur le cœur
Ça rêve d'être un lapin
Peu importe
D'où ils sortent
Mes feuilles mortes
Quand le vent les porte Les toros
Devant nos portes 1963
On dirait qu'ils portent © Éditions Musicales Pouchenel, Bruxelles
Une valise dans chaque main

Les timides Les toros s'ennuient le dimanche


Suivent l'ombre Quand il s'agit de courir pour nous
L'ombre sombre de leur ombre Un peu de sable du soleil et des planches
Seule la pénombre Un peu de sang pour faire un peu de boue
Sait le nombre C'est l'heure où les épiciers se prennent pour Don Juan
De leurs pudeurs de Levantin C'est l'heure où les Anglaises se prennent pour Montherlant
Ils se plissent Ah!
Ils palissent Qui nous dira à quoi ça pense
Ils jaunissent Un toro qui tourne et danse
Ils rosisent Et s'aperçoit soudain qu'il est tout nu
Ils rougissent Ah!
S'écrevissent Qui nous dira à quoi ça rêve
Une valise dans chaque main Un toro dont l'œil se lève
Et qui découvre les cornes des cocus
Mais les timides
Un soir d'audace Les toros s'ennuient le dimanche
Devant leur glace Quand il s'agit de souffrir pour nous
Rêvant d'espace Voici les picadors et la foule se venge
Mettent leur cuirasse Voici les toreros et la foule est à genoux
Et alors place C'est l'heure où les épiciers se prennent pour Garcia Lorca
Allons Paris C'est l'heure où les Anglaises se prennent pour la Carmencita
Tiens-toi bien
Et vive la gare Les toros s'ennuient le dimanche
Saint-Lazare Quand il s'agit de mourir pour nous
Mais on s'égare Mais l'épée va plonger et la foule se penche
On sépare Mais l'épée a plongé et la foule est debout
On s'désempare C'est l'instant de triomphe où les épiciers se prennent pour
Et on repart Néron
Une valise dans chaque main C'est l'instant de triomphe où les Anglaises se prennent pour
Wellington
Les timides Ah!
Quand ils chavirent Est-ce qu'en tombant à terre
Pour une Elvire Les toros rêvent d'un enfer
Ont des soupirs Où brûleraient hommes et toreros défunts
Ont des désirs Ah!
Qu'ils désirent dire Ou bien à l'heure du trépas
Mais ils n'osent pas bien Ne nous pardonneraient-ils pas
Et leur maîtresse En pensant à Carthage Waterloo et Verdun
Plus prêtresse Verdun
En ivresse
Qu'en tendresse
Un soir les laissent
Du bout des fesses
Une valise dans chaque main Les vieux
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1964
Les timides
Alors vieillissent
Alors finissent Les vieux ne parlent plus ou alors seulement parfois du bout
Se rapetissent des yeux
Quand ils glissent Même riches ils sont pauvres, ils n'ont plus d'illusions et n'ont
Dans les abysses qu'un cœur pour deux
Je veux dire Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande et le verbe
Quand ils meurent d'antan
N'osent rien dire Que l'on vive à Paris on vit tous en province quand on vit trop
Rien maudire longtemps
N'osent frémir Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde quand ils parlent
N'osent sourire
48
d'hier
Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore leur perlent aux
paupières Madeleine
Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir la pendule Paroles et Musique: J. Brel/J. Corti/G. Jouannest   1962
d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui dit : je vous
attends Ce soir j'attends Madeleine
J'ai apporté du lilas
Les vieux ne rêvent plus, leurs livres s'ensommeillent, leurs J'en apporte toutes les semaines
pianos sont fermés Madeleine elle aime bien ça
Le petit chat est mort, le muscat du dimanche ne les fait plus Ce soir j'attends Madeleine
chanter On prendra le tram trente-trois
Les vieux ne bougent plus leurs gestes ont trop de rides leur Pour manger des frites chez Eugène
monde est trop petit Madeleine elle aime tant ça
Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit Madeleine c'est mon Noël
Et s'ils sortent encore bras dessus bras dessous tout habillés de C'est mon Amérique à moi
raide Même qu'elle est trop bien pour moi
C'est pour suivre au soleil l'enterrement d'un plus vieux, Comme dit son cousin Joël
l'enterrement d'une plus laide Ce soir j'attends Madeleine
Et le temps d'un sanglot, oublier toute une heure la pendule On ira au cinéma
d'argent Je lui dirai des "je t'aime"
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui les Madeleine elle aime tant ça
attend
Elle est tellement jolie
Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment Elle est tellement tout ça
trop longtemps Elle est toute ma vie
Ils se tiennent par la main, ils ont peur de se perdre et se Madeleine que j'attends là
perdent pourtant
Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire, le doux ou le sévère Ce soir j'attends Madeleine
Cela n'importe pas, celui des deux qui reste se retrouve en enfer Mais il pleut sur mes lilas
Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en Il pleut comme toutes les semaines
chagrin Et Madeleine n'arrive pas
Traverser le présent en s'excusant déjà de n'être pas plus loin Ce soir j'attends Madeleine
Et fuir devant vous une dernière fois la pendule d'argent C'est trop tard pour le tram trente-trois
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui leur dit : je Trop tard pour les frites d'Eugène
t'attends Et Madeleine n'arrive pas
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non et puis qui nous Madeleine c'est mon horizon
attend. C'est mon Amérique à moi
Même qu'elle est trop bien pour moi
Comme dit son cousin Gaston
Mais ce soir j'attends Madeleine
Il me reste le cinéma
Je lui dirai des "je t'aime"
Madeleine elle aime tant ça
Litanies pour un retour
Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel-F. Rauber   1958 Elle est tellement jolie
Elle est tellement tout ça
Mon cœur ma mie mon âme Elle est toute ma vie
Mon ciel mon feu ma flamme Madeleine qui n'arrive pas
Mon puits ma source mon val
Mon miel mon baume mon Graal Ce soir j'attendais Madeleine
Mon blé mon or ma terre Mais j'ai jeté mes lilas
Mon soc mon roc ma pierre Je les ai jetés comme toutes les semaines
Ma nuit ma soif ma faim Madeleine ne viendra pas
Mon jour mon aube mon pain Ce soir j'attendais Madeleine
C'est fichu pour le cinéma
Ma voile ma vague mon guide ma voix Je reste avec mes "je t'aime"
Mon sang ma force ma fièvre mon moi Madeleine ne viendra pas
Mon chant mon rire mon vin ma joie Madeleine c'est mon espoir
Mon aube mon cri ma vie ma foi C'est mon Amérique à moi
Sûr qu'elle est trop bien pour moi
Mon cœur ma mie mon âme Comme dit son cousin Gaspard
Mon ciel mon feu ma flamme Ce soir j'attendais Madeleine
Mon corps ma chair mon bien Tiens le dernier tram s'en va
Voilà que tu reviens On doit fermer chez Eugène
Madeleine ne viendra pas

Elle est tellement jolie

49
Elle est tellement tout ça
Elle est toute ma vie Ay Marieke Marieke revienne le temps
Madeleine qui ne viendra pas Revienne le temps de Bruges et Gand
Ay Marieke Marieke revienne le temps
Demain j'attendrai Madeleine Où tu m'aimais de Bruges à Gand
Je rapporterai du lilas
J'en rapporterai toute la semaine Ay Marieke Marieke le soir souvent
Madeleine elle aimera ça Entre les tours de Bruges et Gand
Demain j'attendrai Madeleine Ay Marieke Marieke tous les étangs
On prendra le tram trente-trois M'ouvrent leurs bras de Bruges à Gand
Pour manger des frites chez Eugène De Bruges à Gand de Bruges à Gand
Madeleine elle aimera ça
Madeleine c'est mon espoir
C'est mon Amérique à moi
Tant pis si elle est trop bien pour moi
Comme dit son cousin Gaspard Mathilde
Demain j'attendrai Madeleine Paroles et Musique: J. Brel, G. Jouannest   1964
On ira au cinéma
Je lui dirai des "je t'aime"
Madeleine elle aimera ça Ma mère voici le temps venu
D'aller prier pour mon salut
Mathilde est revenue
Bougnat tu peux garder ton vin
Ce soir je boirai mon chagrin
Marieke Mathilde est revenue
Paroles et Musique: J. Brel/J. Brel-G. Jouannest   1961 Toi la servante toi la Maria
Vaudrait peut-être mieux changer nos draps
Mathilde est revenue
Ay Marieke Marieke je t'aimais tant Mes amis ne me laissez pas
Entre les tours de Bruges et Gand Ce soir je repars au combat
Ay Marieke Marieke il y a longtemps Maudite Mathilde puisque te v'là
Entre les tours de Bruges et Gand
Mon cœur mon cœur ne t'emballe pas
Zonder liefde warme liefde Fais comme si tu ne savais pas
Waait de wind de stomme wind Que la Mathilde est revenue
Zonder liefde warme liefde Mon cœur arrête de répéter
Weent de zee de grijze zee Qu'elle est plus belle qu'avant l'été
Zonder liefde warme liefde La Mathilde qui est revenue
Lijdt het licht het donk're licht Mon cœur arrête de bringuebaler
En schuurt het zand over mijn land Souviens-toi qu'elle t'a déchiré
Mijn platte land mijn Vlaanderland La Mathilde qui est revenue
Mes amis ne me laissez pas
Ay Marieke Marieke le ciel flamand Dites-moi dites-moi qu'il ne faut pas
Couleur des tours de Bruges et Gand Maudite Mathilde puisque te v'là
Ay Marieke Marieke le ciel flamand
Pleure avec moi de Bruges à Gand Et vous mes mains restez tranquilles
C'est un chien qui nous revient de la ville
Zonder liefde warme liefde Mathilde est revenue
Waait de wind c'est fini Et vous mes mains ne frappez pas
Zonder liefde warme liefde Tout ça ne vous regarde pas
Weent de zee déjà fini Mathilde est revenue
Zonder liefde warme liefde Et vous mes mains ne tremblez plus
Lijdt het licht tout est fini Souvenez-vous quand je vous pleurais dessus
En schuurt het zand over mijn land Mathilde est revenue
Mijn platte land mijn Vlaanderland Vous mes mains ne vous ouvrez pas
Ay Marieke Marieke le ciel flamand Vous mes bras ne vous tendez pas
Pesait-il trop de Bruges à Gand Sacrée Mathilde puisque te v'là
Ay Marieke Marieke sur tes vingt ans
Que j'aimais tant de Bruges à Gand Ma mère arrête tes prières
Ton Jacques retourne en enfer
Zonder liefde warme liefde Mathilde m'est revenue
Lacht de duivel de zwarte duivel Bougnat apporte-nous du vin
Zonder liefde warme liefde Celui des noces et des festins
Brandt mijn hart mijn oude hart Mathilde m'est revenue
Zonder liefde warme liefde Toi la servante toi la Maria
Sterft de zomer de droeve zomer Va tendre mon grand lit de draps
En schuurt het zand over mijn land Mathilde m'est revenue
Mijn platte land mijn Vlaanderland Amis ne comptez plus sur moi

50
Je crache au ciel encore une fois Et c'est Paris l'ennui
Ma belle Mathilde puisque te v'là te v'là La gare où s'accomplit
La dernière déchirure
Et c'est Paris fini
Loin des yeux loin du cœur
Chassé du paradis
Mes prénoms de Paris Et c'est Paris chagrin
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1961 Mais une lettre de toi
Une lettre qui dit oui
Et c'est Paris demain
Le soleil qui se lève Des villes et des villages
Et caresse les toits Les roues tremblent de chance
Et c'est Paris le jour C'est Paris en chemin
La Seine qui se promène Et toi qui m'attends là
Et me guide du doigt Et tout qui recommence
Et c'est Paris toujours Et c'est Paris je reviens.
Et mon cœur qui s'arrête
Sur ton cœur qui sourit
Et c'est Paris bonjour
Et ta main dans ma main
Qui me dit déjà oui Mon enfance
Et c'est Paris l'amour
Le premier rendez-vous
A l'Ile Saint-Louis Mon enfance passa
C'est Paris qui commence De grisailles en silences
Et le premier baiser De fausses révérences
Volé aux Tuileries En manque de batailles
Et c'est Paris la chance L'hiver j'étais au ventre
Et le premier baiser De la grande maison
Reçu sous un portail Qui avait jeté l'ancre
Et c'est Paris romance Au nord parmi les joncs
Et deux têtes qui se tournent L'été à moitié nu
En regardant Versailles Mais tout à fait modeste
Et c'est Paris la France Je devenais indien
Pourtant déjà certain
Des jours que l'on oublie Que mes oncles repus
Qui oublient de nous voir M'avaient volé le Far West
Et c'est Paris l'espoir
Des heures où nos regards Mon enfance passa
Ne sont qu'un seul regard Les femmes aux cuisines
Et c'est Paris miroir Où je rêvais de Chine
Rien que des nuits encore Vieillissaient en repas
Qui séparent nos chansons Les hommes au fromage
Et c'est Paris bonsoir S'enveloppaient de tabac
Et ce jour-là enfin Flamands taiseux et sages
Où tu ne dis plus non Et ne me savaient pas
Et c'est Paris ce soir Moi qui toutes les nuits
Une chambre un peu triste Agenouillé pour rien
Où s'arrête la ronde Arpégeais mon chagrin
Et c'est Paris nous deux Au pied du trop grand lit
Un regard qui reçoit Je voulais prendre un train
La tendresse du monde Que je n'ai jamais pris
Et c'est Paris tes yeux
Ce serment que je pleure Mon enfance passa
Plutôt que ne le dis De servante en servante
C'est Paris si tu veux Je m'étonnais déjà
Et savoir que demain Qu'elles ne fussent point plantes
Sera comme aujourd'hui Je m'étonnais encore
C'est Paris merveilleux De ces ronds de famille
Flânant de mort en mort
Mais la fin du voyage Et que le deuil habille
La fin de la chanson Je m'étonnais surtout
Et c'est Paris tout gris D'être de ce troupeau
Dernier jour, dernière heure Qui m'apprenait à pleurer
Première larme aussi Que je connaissais trop
Et c'est Paris la pluie J'avais L'œil du berger
Ces jardins remontés Mais le cœur de l'agneau
Qui n'ont plus leur parure

51
Mon enfance éclata Et Londres n'est plus
Ce fut l'adolescence Comme avant le déluge
Et le mur du silence Le poing de Bruges
Un matin se brisa Narguant la mer
Ce fut la première fleur Londres n'est plus
Et la première fille Que le faubourg de Bruges
La première gentille Perdu en mer
Et la première peur Perdu en mer
Je volais je le jure
Je jure que je volais Mais mon père disait
Mon cœur ouvrait les bras C'est le vent du nord
Je n'étais plus barbare Qui portera en terre
Mon corps sans âme
Et la guerre arriva Et sans colère
C'est le vent du nord
Et nous voilà ce soir. Qui portera en terre
Mon corps sans âme
Face à la mer
C'est le vent du nord
Qui me fera capitaine
Mon Père disait D'un brise-lames
Paroles et Musique: Jacques Brel   1967 Ou d'une baleine
C'est le vent du nord
Qui me fera capitaine
Mon père disait D'un brise-larmes
C'est l'vent du nord Pour ceux que j'aime
Qui fait craquer les digues
A Scheveningen
À Scheveningen, petit
Tellement fort
Qu'on ne sait plus qui navigue Ne me quitte pas
La mer du nord Paroles et Musique: Jacques Brel   1959
Ou bien les digues
C'est le vent du nord
Qui transperce les yeux Ne me quitte pas
Des hommes du nord Il faut oublier
Jeunes ou vieux Tout peut s'oublier
Pour faire chanter Qui s'enfuit déjà
Des carillons de bleus Oublier le temps
Venus du nord Des malentendus
Au fond de leurs yeux Et le temps perdu
A savoir comment
Mon père disait Oublier ces heures
C'est le vent du nord Qui tuaient parfois
Qui fait tourner la tête A coups de pourquoi
Autour de Bruges Le cœur du bonheur
Autour de bruges, petit Ne me quitte pas
C'est le vent du nord Ne me quitte pas
Qu'a raboté la terre Ne me quitte pas
Autour des tours Ne me quitte pas
Des tours de Bruges
Et qui fait qu'nos filles Moi je t'offrirai
Ont l'regard tranquille Des perles de pluie
Des vieilles villes Venues de pays
Des vieilles villes Où il ne pleut pas
Qui fait qu'nos belles Je creuserai la terre
Ont le cheveu fragile Jusqu'après ma mort
De nos dentelles Pour couvrir ton corps
De nos dentelles D'or et de lumière
Je ferai un domaine
Mon père disait Où l'amour sera roi
C'est le vent du nord Où l'amour sera loi
Qu'a fait craquer la terre Où tu seras reine
Entre Zeebruges Ne me quitte pas
Entre Zeebruges, petit Ne me quitte pas
C'est le vent du Nord Ne me quitte pas
Qu'a fait craquer la terre Ne me quitte pas
Entre Zeebruges et l'Angleterre
Ne me quitte pas
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Je t'inventerai Au cinéma de son whisky
Des mots insensés
Que tu comprendras Ni tout cela ni rien au monde
Je te parlerai Ne sait pas nous faire oublier
De ces amants-là Ne peut pas nous faire oublier
Qui ont vu deux fois Qu'aussi vrai que la terre est ronde
Leurs cœurs s'embraser On n'oublie rien de rien
Je te raconterai On n'oublie rien du tout
L'histoire de ce roi On n'oublie rien de rien
Mort de n'avoir pas On s'habitue c'est tout
Pu te rencontrer
Ne me quitte pas Ni ces jamais ni ces toujours
Ne me quitte pas Ni ces je t'aime ni ces amours
Ne me quitte pas Que l'on poursuit à travers cœurs
Ne me quitte pas De gris en gris de pleurs en pleurs
Ni ces bras blancs d'une seule nuit
On a vu souvent Collier de femme pour notre ennui
Rejaillir le feu Que l'on dénoue au petit jour
D'un ancien volcan Par des promesses de retour
Qu'on croyait trop vieux
Il est paraît-il Ni tout cela ni rien au monde
Des terres brûlées Ne sait pas nous faire oublier
Donnant plus de blé Ne peut pas nous faire oublier
Qu'un meilleur avril Qu'aussi vrai que la terre est ronde
Et quand vient le soir On n'oublie rien de rien
Pour qu'un ciel flamboie On n'oublie rien du tout
Le rouge et le noir On n'oublie rien de rien
Ne s'épousent-ils pas On s'habitue c'est tout
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas Ni même ce temps où j'aurais fait
Ne me quitte pas Mille chansons de mes regrets
Ne me quitte pas Ni même ce temps où mes souvenirs
Prendront mes rides pour un sourire
Ne me quitte pas Ni ce grand lit où mes remords
Je ne vais plus pleurer Ont rendez-vous avec la mort
Je ne vais plus parler Ni ce grand lit que je souhaite
Je me cacherai là A certains jours comme une fête
A te regarder
Danser et sourire Ni tout cela ni rien au monde
Et à t'écouter Ne sait pas nous faire oublier
Chanter et puis rire Ne peut pas nous faire oublier
Laisse-moi devenir Qu'aussi vrai que la terre est ronde
L'ombre de ton ombre On n'oublie rien de rien
L'ombre de ta main On n'oublie rien du tout
L'ombre de ton chien On n'oublie rien de rien
Ne me quitte pas On s'habitue c'est tout
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas
Ne me quitte pas.

Orly
Paroles et Musique: Jacques Brel   1977

On n'oublie rien
Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest   1961 Ils sont plus de deux mille
Et je ne vois qu'eux deux
On n'oublie rien de rien La pluie les a soudés
On n'oublie rien du tout Semble-t-il l'un à l'autre
On n'oublie rien de rien Ils sont plus de deux mille
On s'habitue c'est tout Et je ne vois qu'eux deux
Et je les sais qui parlent
Ni ces départs ni ces navires Il doit lui dire: je t'aime
Ni ces voyages qui nous chavirent Elle doit lui dire: je t'aime
De paysages en paysages Je crois qu'ils sont en train
Et de visages en visages De ne rien se promettre
Ni tous ces ports ni tous ces bars C'est deux-là sont trop maigres
Ni tous ces attrape-cafard Pour être malhonnêtes
Où l'on attend le matin gris

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Ils sont plus de deux mille L'amour le lui a dit
Et je ne vois qu'eux deux Revoilà l'inutile
Et brusquement ils pleurent Elle vivra ses projets
Ils pleurent à gros bouillons Qui ne feront qu'attendre
Tout entourésqu'ils sont La revoilà fragile
D'adipeux en sueur Avant que d'être à vendre
Et de bouffeurs d'espoir Je suis là je le suis
Qui les montrent du nez Je n'ose rien pour elle
Mais ces deux déchirés Que la foule grignote
Superbes de chagrin Comme un quelconque fruit
Abandonnent aux chiens
L'exploir de les juger

Mais la vie ne fait pas de cadeau!


Et nom de dieu! Pardons
C'est triste Orly le dimanche
Avec ou sans Bécaud
Pardon pour cette fille
Que l'on a fait pleurer
Et maintenant ils pleurent
Pardon pour ce regard
Je veux dire tous les deux
Que l'on quitte en riant
Tout à l'heure c'était lui
Lorsque je disais il
Pardon pour ce visage
Tout encastrés qu'ils sont
Qu'une larme a changé
Ils n'entendent plus rien
Pardon pour ces maisons
Que les sanglots de l'autre
Où quelqu'un nous attend
Et puis infiniment
Comme deux corps qui prient
Et puis pour tous ces mots
Infiniment lentement ces deux corps
Que l'on dit mots d'amour
Se séparent et en se séparant
Et que nous employons
Ces deux corps se déchirent
En guise de monnaie
Et je vous jure qu'ils crient
Et puis ils se reprennent
Pour tous les serments
Redeviennent un seul
Qui meurent au petit jour
Redeviennent le feu
Pardon pour les jamais
Et puis se redéchirent
Pardon pour les toujours
Se tiennent par les yeux
Et puis en reculant
Pardon pour pour les hameaux
Comme la mer se retire
Qui ne chantent jamais
Ils consomment l'adieu
Pardon pour les villages
Ils bavent quelques mots
Que l'on a oubliés
Agitent une vague main
Et brusquement ils fuient
Et pardon pour les cités
Fuient sans se retourner
Où nul ne se connaît
Et puis il disparaît
Pardon pour les pays
Bouffé par l'escalier
Faits de sous-officiers
La vie ne fait pas de cadeau!
Pardon d'être de ceux
Et nom de dieu!
Qui se foutent de tout
C'est triste Orly le dimanche
Et de ne pas avoir
Avec ou sans Bécaud
Chaque jour essayé
Et puis il disparaît
Et puis pardon encore
Bouffé par l'escalier
Et puis pardon surtout
Et elle elle reste là
De ne jamais savoir
Cœur en croix bouche ouverte
Qui doit nous pardonner
Sans un cri sans un mot
Elle connaît sa mort
Elle vient de la croiser
Voilà qu'elle se retourne
Et se retourne encore Pourquoi faut-il que les hommes
Ses bras vont jusqu'a terre
Ça y est elle a mille ans s'ennuient ?
La porte est refermée 1963
La voilà sans lumière note: complainte du film "un roi sans divertissement"
Elle tourne sur elle-même
Et déjà elle sait
Qu'elle tournera toujours Pourtant les hôtesses sont douces
Elle a perdu des hommes Aux auberges bordées de neige
Mais là elle perd l'amour
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Pourtant patientent les épouses
Que les enfants ont pris au piège Qu'avons-nous fait, bonnes gens
Pourtant les auberges sont douces Paroles et Musique: Jacques Brel   1955
Où le vin fait tourner manège
Pourquoi faut-il que les hommes s&