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MOOC

: Comprendre les nanosciences


4.4d – Boîtes quantiques, nanofils et composants semiconducteurs.


Dans la séquence d'avant, nous avons parlé des émetteurs macroscopiques où on introduit des nanostructures
dans la région active, notamment des puits quantiques.
Dans un puits quantique, les porteurs ne sont confinés que dans une direction de l'espace, et peuvent se
déplacer dans les deux autres directions.
Qu'est-ce qui se passe si les autres dimensions deviennent aussi nanométriques ? D'abord on passe vers le cas
d'un fil quantique, où les porteurs sont confinés dans deux directions, mais bougent encore dans la troisième.
Finalement si les trois directions sont nanométriques, les porteurs ne peuvent plus se déplacer, on parle de
confinement tridimensionnel de type boîte quantique.
Ici il faut introduire la notion de confinement quantique. Dans les semiconducteurs, les électrons et les trous
forment des quasi-particules par interaction coulombienne, qu'on appelle des excitons. La taille de l'exciton, ou
son rayon de Bohr, définit la taille caractéristique pour le confinement quantique.
Si la taille des nanostructures est inférieure au rayon de Bohr de l'exciton, on parle de confinement.
Dans le cas des boîtes quantiques, les niveaux d'énergie sont décalés vers les grandes énergies par rapport à la
largeur de bande interdite. Les luminescences sont aussi décalées vers le bleu.
Ainsi, les spectres de luminescence des boîtes quantiques sont composés des raies spectralement étroites
correspondant aux transitions entre les niveaux discrets.
Les boîtes quantiques sont des objets quasi zéro-dimensionnels, qu'on appelle aussi des atomes artificiels, parce
que leur spectre ressemble à celui d'un atome. On peut les synthétiser par différentes méthodes. par exemple par
la synthèse chimique on peut obtenir des nanocristaux de quelques nanomètres de diamètre, qu'on appelle des
boîtes colloïdales. Ces nanocristaux sont en solution. A gauche vous voyez une image de microscopie
électronique en transmission d'une boîte quantique colloïdale qui a une forme sphérique avec une structure
cristalline. Elle est prise dans une matrice amorphe.
On peut également former des nanostructures de type boîte quantique par épitaxie. Ici l'idée c'est qu'on dépose
des matériaux à fort désaccord de maille, qui vont spontanément former des ilots nanométriques. On appelle ces
ilots des boîtes Stranski-Krastanov suivant le nom des deux chercheurs qui ont décrit pour la première fois leur
mécanisme de formation.
Les boîtes quantiques Stranski-Krastanov sont des objets aplatis, avec la hauteur plus petite que le diamètre.
Par rapport aux boîtes quantiques colloïdales, les boîtes Stranski-Krastanov ne sont pas dans un solvant, mais
dans une matrice solide, typiquement un semiconducteur qui a une bande interdite supérieure au matériau de la
boîte quantique.
Quelles sont les applications des boîtes quantiques ? Les boîtes colloïdales sont beaucoup utilisées comme
marqueurs de luminescence. On peut fonctionnaliser des boîtes colloïdales avec des ligands pour qu'elles
puissent se lier spécifiquement avec certaines espèces, et on les injecte dans l'objet d'intérêt, par exemple dans
une cellule vivante.
Les boîtes quantiques vont aller se lier avec des endroits spécifiques de cette cellule. En formant l'image de
luminescence, on peut visualiser la cellule, avec différentes couleurs de luminescence si on prend des boîtes
émettant dans différents domaines spectraux. On parle ainsi de l'imagerie multispectrale.
Pour les boîtes Stranski-Krastanov, elles sont utilisées dans des composants optoélectroniques comme des
lasers. Vous avez à droite une image d'un laser à ruban comme vous l'avez vu dans la séquence précédente. La
différence, c'est que cette fois-ci, dans la région active nous avons des couches de boîtes quantiques, et pas des
puits quantiques.
En réalité, nous mettons d'habitude les boîtes quantiques dans un puits, pour faciliter la capture des porteurs
injectés. L'intérêt d'utiliser des boîtes quantiques, c'est que leur spectre est très étroit, donc ça permet de
concentrer le gain laser et de réduire le courant de seuil.
On peut aussi utiliser les boîtes quantiques pour la cryptographie. En fait l'enjeu majeur de la cryptographie, c'est
la transmission de clés de codage. EN 84, il y avait un protocole qui était proposé pour coder l'information sur la
polarisation de photons uniques. Il faut donc disposer de photons uniques, et pour les produire il faut un système
avec des niveaux d'énergie discrets, comme une boîte quantique.

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Sur le schéma, vous avez une boîte quantique où on excite un exciton avec une impulsion laser. L'exciton se
recombine de façon radiative, il émet un et un seul photon. En fait la probabilité qu'un exciton émette deux ou
plusieurs photons est strictement nulle, donc on parle d'une source de photons uniques.
Là, je vous ai donné quelques applications des boîtes quantiques, cependant aujourd'hui ça reste des
applications de niche. Les difficultés avec les boîtes quantiques sont par exemple l'injection de porteurs dans ces
nano-objets, mais surtout la grande dispersion de leur taille et donc de leurs propriétés.
Dans les années 2000, les chercheurs se sont orientés vers de nouveaux types de nanostructures, qu'on appelle
des nanofils.
Les nanofils sont des cristaux de semiconducteur avec un grand rapport d'aspect, c'est-à-dire la langueur
beaucoup plus grande que le diamètre. Sur ces images de microscopie électronique, vous avez trois exemples
de nanofils de différentes morphologies. Les nanofils peuvent être complètement aléatoires, comme sur l'image
de gauche. Ou la taille peut être aléatoire mais les nanofils peuvent avoir une direction de croissance privilégiée,
comme sur l'image de droite. Ou finalement on peut avoir un ensemble parfaitement ordonné de nanocristaux.
Le nanofil, typiquement, a un diamètre entre quelques dizaines et quelques centaines de nanomètres. Donc en
soit le nanofil n'est pas un objet quantique. Cependant on peut lui incorporer des nanostructures, par exemple
dans son axe, ou dans son diamètre. Dans le premier cas, on forme des disques quantiques et ces disques
quantiques, pour des nanofils fins, peuvent présenter un confinement quasi-tridimensionnel comme les boîtes
quantiques. Pour les hétérostructures radiales, on forme des puits quantiques cylindriques, et les propriétés de
ces nano-objets sont assez similaires aux propriétés des puits quantiques planaires.
L'intérêt du nanofil, c'est qu'il fournit une connexion entre un objet quantique et le monde extérieur. Sur l'image de
gauche vous avez un exemple d'un photodétecteur à nanofil unique contenant des disques quantiques. Les
extrémités du nanofil sont métallisées pour ainsi récupérer de façon efficace le courant électrique généré dans les
disques.
Sur l'image de droite on utilise le nanofil comme un guide d'onde. Il y a un disque quantique placé dans un
nanofil, qui sert de source de photons uniques. L'intérêt du nanofil, dans ce cas, est qu'on peut bénéficier d'une
meilleure extraction et d'une meilleure directivité de cette source de photons uniques.
Quels sont d'autres intérêts des nanofils pour les applications optoélectroniques ? Tout d'abord, grâce à leur
petite section, on peut relaxer de façon très efficace les contraintes, et former des cristaux sans dislocation sur
des substrats fortement désaccordés en maille, bon marché, par exemple des substrats de verre ou de métal.
On peut égaler incorporer des hétérostructures désaccordées en maille sans formation de dislocations.
Les nanofils ont une grande surface spécifique, on parle aussi de grand rapport surface sur volume. A cause de
ça, ils sont très sensibles à l'environnement. Par exemple les propriétés de conduction des nanofils dépendent
fortement des molécules adsorbées sur leur surface, ce qui est très intéressant pour former des capteurs
chimiques de grande sensibilité.
Les nanofils réagissent aussi fortement à l'illumination. Ceci est dû au fait que les porteurs photo-générés sont
séparés spatialement : les trous sont piégés sur la surface et la recombinaison est inhibée.
Dans les ensembles de nanofils, nous avons une très forte absorption. En fait ces ensembles ont une surface
naturellement rugueuse, donc qui forme une sorte de traitement antireflets.
On a aussi des propriétés de diffusions multiples dans la couche de nanofils, qui permet d'avoir un piégeage de la
lumière et une absorption très efficace.
Pour illustrer ces propriétés, je vous montre sur cette image les photos de GaAs, arséniure de gallium, avec une
surface plane et une surface couverte de nanofils. Vous voyez que dans le cas des nanofils, l'échantillon apparait
complètement noir.
Finalement, avec les nanofils, on peut aussi exploiter la troisième dimension. Avec des structures dites "cœur-
coquille", on peut augmenter beaucoup la surface active du dispositif par rapport à son empreinte au sol. Ici, on
peut tirer l'analogie avec des gratte-ciel, où la surface habitable augmente fortement par rapport à l'empreinte au
sol, justement parce qu'on utilise la troisième dimension.
Je vais maintenant illustrer les avantages des nanofils sur l'exemple des diodes électroluminescentes.
Vous avez vu dans la première séquence que les DELs, aujourd'hui, sont beaucoup utilisées pour l'éclairage à
l'état solide, parce qu'elles permettent de fortes économies d'énergie. En fait la technologie existante n'est pas
optimale. Dans les DELs commerciales, il y a beaucoup de défauts, comme dans l'exemple à droite, de photo de

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microscopie électronique en transmission. Là vous voyez des lignes sombres qui correspondent aux dislocations
traversantes, qui sont des centres de recombinaison non radiatifs, ils réduisent le rendement de luminescence.
On a aussi un deuxième problème, de chute d'efficacité à fort courant d'injection dans des DELs de puissance.
Quand on injecte beaucoup de porteurs, il y a des mécanismes d'échange d'énergie non radiatifs, type effet
Auger, qui réduit grandement le rendement de luminescence.
Dans le cas des nanofils, on peut résoudre les deux problèmes. Tout d'abord, on bénéficie d'une très grande
qualité de matériau, grâce à la relaxation des contraintes par les bords libres et l'élimination des dislocations.
Ensuite, pour la même surface de dispositif, et pour le même courant injecté, la densité de courant est moindre
dans le cadre des dispositifs à nanofils que dans les dispositifs bidimensionnels parce que la surface active est
plus grande.
On peut donc améliorer l'efficacité d'émission des DELs de puissance.
Il est possible avec des nanofils de fabriquer des dispositifs macroscopiques avec une luminescence quasi-
homogène. Vous voyez sur ces photos des DELs à base de nanofils de nitrures, fabriquées par GLO AB, où on
peut accorder la luminescence en changeant la composition d'indium dans les puits, de bleu jusqu'à rouge. La
luminescence apparait quasi-homogène mais en réalité elle est composée de la luminescence des nanofils
individuels au sein du dispositif.
Sur l'exemple d'avant, je vous ai montré que l'on peut utiliser des nanofils pour améliorer les propriétés de
dispositifs existants. Maintenant, je vais vous montrer que l'on peut également utiliser des nanofils pour créer des
nouvelles fonctionnalités, par exemple pour fabriquer des DELs inorganiques flexibles.
Actuellement, il y a beaucoup de demande pour des émetteurs flexibles pour les applications en affichage et en
éclairage. Actuellement, la technologie qui est utilisée est basée sur des semiconducteurs organiques. Or le
problème des semiconducteurs organiques, c'est la courte durée de vie et la faible brillance.
Si on compare un émetteur inorganique bleu avec un émetteur organique bleu, la différence sera de plusieurs
ordres de grandeur pour la durée de vie et la brillance. C'est donc intéressant d'essayer de combiner les
avantages des deux mondes, et avoir la bonne stabilité et la bonne brillance des matériaux inorganiques et
également la flexibilité, la transparence et le faible coût des matériaux polymères.
Ceci est possible grâce aux nanofils. Les nanofils sont des objets de toute petites dimensions, qui ont une bonne
flexibilité mécanique. On peut donc les incorporer dans des membranes de polymère pour former des dispositifs
inorganiques flexibles, efficaces et durables.
Sur l'image vous avez des photos de DELs à base de nanofils de nitrure émettant dans le bleu, le vert et le blanc.
Vous voyez qu'on peut plier ces dispositifs avec des rayons de courbure de quelques millimètres, sans que leurs
propriétés se dégradent. On peut en plus combiner des membranes polymère à nanofils émettant dans des
spectres différents pour former un émetteur multispectral. Donc il est possible dans ce cas d'utiliser des matériaux
qui ne sont pas compatibles du point de vue de l'épitaxie, mais qui ont des propriétés optimales pour chaque
gamme spectrale.
Les nanofils sont également très intéressants pour des applications de conversion de l'énergie, et notamment
pour les cellules solaires. Ici à gauche vous voyez un schéma d'un nanofil cœur-coquille avec une jonction
radiale. Sous illumination, les porteurs photo-générés sont séparés radialement, les électrons vont dans le cœur,
les trous vont dans la coquille. Ils sont ensuite collectés par les contacts. L'intérêt de cette géométrie est qu'avec
la structure cœur-coquille on peut optimiser séparément la collecte des porteurs dans la direction radiale et
l'absorption de lumière, qui est essentiellement donnée par la longueur du fil.
On peut également bénéficier du piégeage de lumière dans l'ensemble de nanofils, comme on l'a discuté avant,
pour avoir une bonne absorption.
Sur l'image de droite, vous avez un exemple de réalisation de ce concept. C'est une cellule solaire combinant des
nanofils de silicium pour le cœur avec une coquille de silicium amorphe.
On peut aussi proposer des concepts plus compliqués, où on combine en série une cellule solaire à nanofils avec
une cellule planaire. Cette architecture s'appelle une cellule tandem à deux jonctions. Ici on peut avoir un
matériau à bande interdite élevée pour les nanofils et ainsi convertir de façon efficace les photons énergétiques
du spectre solaire, sans avoir les pertes de thermalisation.
On peut également pousser le concept qu'on a introduit sur le slide d'avant, de cellules multi-jonctions avec des
membranes combinant des nanofils avec un matériau polymère. Ici sur le schéma vous voyez une cellule qui

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combine trois couches de nanofils de nature différente, chacune étant optimisée pour convertir la partie
respective du spectre solaire.
Dans cette séquence, nous avons vu les opportunités offertes par les nanotechnologies pour les dispositifs
optoélectroniques. Dans la suite vous allez voir comment ces nano-objets peuvent être utilisés pour des capteurs
et des microsystèmes.

Maria Tchernycheva

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