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République du Bénin

UNIVERSITE D’ABOMEY-CALAVI

Revue semestrielle de Géographie du Bénin


ISSN 1840-5800
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SOMMAIRE
AKOUEHOU S. Gaston, ASSOGBA O. Doris, SINSIN Brice : Agrosystèmes à palmier à 3
huile (Elaeis guineensis ) une stratégie paysanne d’adaptation aux changements
climatiques et aux pressions socio-foncières dans le Département de l’Atlantique au
sud du Bénin
GNELE E. José, ODJOUBERE Jules, ALI K. F. M. Rachad, TENTE H. A. Brice: 20
Aménagement participatif et gestion des plantations domaniales de la foret classée
de Tchaourou- Toui-Kilibo (TTK) au Bénin: Bilan et Perspectives
FANGNON Bernard, TOHOZIN Antoine Yves, VIGNINOU Toussaint, BABADJIDE 41
Charles, AYITCHEHOU Lambert:Impacts socioéconomiques des principales
activités agricoles dans le département du Couffo au Bénin
YABI Ibouraïma: Excédents pluvio-hydrologiques et incidences sur la production agricole 58
dans la Commune d’Athiémé
OGOUWALE Romaric, GOMEZ Ansèque, ABDOULAYE Djafarou, VISSIN W. 76
Expédit: Impact de la dynamique des états de surface sur les écoulements dans le
bassin béninois de l’Okpara
MOLLI B. Agathe, HOUINSOU Auguste, GIBIGAYE Moussa, DOSSOU GUEDEGBE 90
Odile: Transport et développement dans l’espace 2kp (Kérou- Kouandé- Péhunco)
GONZALLO Germain: Activités économiques informelles dans la Commune de Ouaké 110
(Bénin, Afrique de l’ouest)
BIO BIGOU B. Léon, KISSIRA Aboubakar, OUIDONOU A. René: Pratiques des 128
peulhs de la commune de comé : Caractéristiques et incidences socioéconomiques
ATCHOLE Eyanah:: Facteurs et problèmes de l’extension spatiale de la ville de Lomé 147
MIGNANWANDE H. Hubert: Rôle de la famille dans la socialisation différenciée des 171
enfants chez les nago de Bantè
CAPO-CHICHI épouse ZANOU L. C.: Narrative Techniques in Purple Hibiscus by 187
Chimamanda Ngozi Adichie
Directeur de publication
Odile DOSSOU-GUEDEGBE,
Chef du Département de Géographie et
Aménagement du Territoire

Rédacteur en Chef
Eustache B. BOKONON-GANTA
Rédacteur-Adjoint
Vincent OREKAN

Comité de Rédaction :
Drs Brice Tenté, Joseph Akpaki, Ibouraima Yabi, Moussa Gibigaye,
Eric Tchibozo, José Gnélé, Expédit Vissin, Omer Thomas, Thiéry
Azonhê, Paulin Dossou, Henri Totin, Cyr Gervais Eténé
M. Norbert Agoïnon, M. Auguste Houinsou, Mama Djaouga, Abdoulaye
Djafarou
Comité Scientifique
Prs Michel Boko, Élisabeth Dorier-Apprill, Tiou Tchamié, Tanga-Pierre
Zoungrana, Robert Ziavoula, Benoît N’Bessa, Henri K. Motcho, Etienne
Domingo, Christophe Houssou, Constant Houndénou, Noukpo Agossou,
Fulgence Afouda
Drs Jean Cossi Houndagba, Christophe Okou, Francois–José Quenum,
Léon Okioh.
Correspondance
Comité de Rédaction de la Revue de Géographie BenGéO
Département de Géographie et Aménagement du Territoire,
01 BP 526 COTONOU (République du Bénin)
Tél. : 00 229 21042909 GSM : 00 229 96 159897 // 95142480
E-mail : dgatflash.uac@gmail.com

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2
Revue de Géographie du Bénin
Université d’Abomey-Calavi (Bénin)
N°12, décembre 2012, pp. 41-57

IMPACTS SOCIOECONOMIQUES DES PRINCIPALES


ACTIVITES AGRICOLES DANS LE DEPARTEMENT
DU COUFFO AU BENIN
FANGNON Bernard1, TOHOZIN Antoine Yves 2, VIGNINOU
Toussaint 3, BABADJIDE Charles 4, AYITCHEHOU Lambert5
* Laboratoire d’Etudes des Dynamiques Urbaines et Régionales (LEDUR)
** Laboratoire Pierre PAGNEY-Climat, Eau, Ecosystèmes et Développement
(LACEEDE)
1 bfangnon@ymail.com 2 atohozin@yahoo.fr 3 tousvigni@yahoo.fr
4
charlesbab@yahoo.fr 5ayitchehou@yahoo.fr

Résumé
Cette étude est réalisée pour apprécier l’impact de la production des
principales cultures sur les conditions socioéconomiques des
producteurs du département du Couffo. Pour y parvenir, un
diagnostic participatif a été fait avec 313 chefs d’exploitation répartis
dans les six communes du département.
Les résultats ont montré que les revenus des exploitants agricoles
sont compris entre 0 et 50 000 pour 41,85 % ; 50 000 et 100 000
pour 22,36 % ; 100 000 et 200 000 pour 15.26 % ; 200 000 et
300 000 pour 7,35 % ; 300 000 et 400 000 pour 5,43% ; 400 000 et
500 000 pour 4,15 % et plus de 500 000 pour 3,2 % de l’échantillon
considéré. Ces revenus par rapport au travail abattu durant toute une
saison sont insuffisants. Cette situation est à l’origine des migrations
des jeunes qu’il faut limiter en créant des conditions favorables à
leur maintien dans le département.
Mots-clés : Couffo (Bénin), production agricole, impacts
socioéconomiques.

Abstract
This survey is achieved to appreciate the impact of the production of
the main cultures on the socio-economic conditions of the producers
of the department of Couffo. To arrive there, a diagnosis of

41
involvement has been made with 313 chiefs of exploitation
distributed in the six townships of the department.
The results showed that agricultural operator incomes are consisted
between 0 and 50 000 for 41.85%; 50 000 and 100 000 for 22.36%;
100 000 and 200 000 for 15.26%; 200 000 and 300 000 for 7.35%;
300 000 and 400 000 for 5.43%; 400 000 and 500 000 for 4.15% and
more of 500 000 for 3.2% of the sample considered. These incomes
in relation to work cut down during a whole season are insufficient.
This situation is the origin of the migrations of the young that it is
necessary to limit while creating some conditions favorable to their
maintenance in the department.
Key words : Couffo (Benin), agricultural production, socio-economic
impacts.

Introduction

L es activités agricoles permettent aux producteurs de répondre à


leurs besoins pécuniaires et d’autoconsommation. Mais, la baisse
de la fertilité des sols entraîne la chute des rendements et par
conséquent celle des revenus des producteurs (Fangnon, 2012). Dans
les pays sous développés, la production agricole demeure la base
nourricière de la majeure partie des populations. Elle joue un rôle
stratégique dans la croissance économique et la réduction de la
pauvreté et représente 38 % du produit intérieur brut (PIB) (Izf, 2004
cité par Tossou et Sinsin, 2007).
La diversification des cultures dans les économies agricoles a pour
objectif principal de varier les ressources des producteurs et restaurer
la fertilité des sols. Le maïs, le niébé, la tomate, l’arachide, le
manioc, le piment et dans une certaine mesure le coton constituent
aujourd’hui les principales cultures pratiquées dans le département
du Couffo. En dehors du coton, les autres cultures servent à la fois de
cultures vivrières et de cultures de rente. L’adoption des cultures
vivrières comme celles de rente constitue une alternative dans ledit
département où la dégradation avancée des terres de barre porte un
coup au rendement du coton qui en 2009 a donné en moyenne un
rendement de 369,63 kg / ha (CeRPA/Service
Statistique/DPP/MAEP, 2010). Cette baisse drastique n’épargne
guère les cultures vivrières dont les rendements évoluent en dents de

42
scie. Devant cette situation, certains jeunes optent pour la migration
vers les autres régions du Bénin ou des pays de la sous région. On se
demande si les revenus moyens obtenus par les exploitants agricoles
à la fin de chaque saison culturale arrivent t-ils à couvrir les dépenses
effectuées et satisfaire les besoins fondamentaux.

1-Données et méthodes
Les informations relatives aux prix des différentes spéculations sont
collectées auprès du Centre Régional pour la Promotion Agricole du
Mono-Couffo, des producteurs et dans les marchés d’Azovè, de
Dogbo et Klouékanmè. Ces informations ont permis d’évaluer les
dépenses et les revenus obtenus sur un hectare de production des
cultures choisies (coton, arachide, niébé, manioc, piment et tomate).
Les données démographiques (INSAE, 1992 et 2002) ont été
recueillies à l’Institut National de la Statistique et de l'Analyse
Economique.
Les données recueillies pendant la recherche documentaire ont été
complétées par celles du terrain. En effet, une enquête par
questionnaire a été effectuée en 2010 avec 313 chefs d’exploitation
choisis de façon raisonnée dans les six communes du département du
Couffo (toutes les communes ont eu la chance d’être sélectionnées
au moins une fois).
En outre, 13 groupements et 42 personnes ressources ont été
interviewés.
Suivant le niveau de production agricole, les enquêtés ont été répartis
dans les arrondissements à faible, moyenne et forte production.
L’enquête s’est réalisée à partir des entretiens semi directifs, de
groupe, d’observations qui ont permis de collecter des informations
sur les conditions sociales et économiques qui découlent de la
production agricole. Les données collectées ont été traitées avec des
logiciels appropriés pour sortir des tableaux qui ont fait objet
d’analyse.

2- Résultats et analyse
2.1.- Incidences socioéconomiques
2.1.1- Au niveau des producteurs du coton

43
Après la vente du coton, les revenus servent à l’achat du matériel
roulant (des vélos, motos) et des matériaux de construction (feuilles
de tôle pour les toitures des habitations autrefois couvertes
d’Imperata cylindrica). Ces revenus permettent aussi de préparer
facilement la dot et le mariage des futures épouses ou de celles des
enfants de sexe masculin en âge de se mettre en couple selon la
coutume.
Mais, au milieu des années 1980, la filière coton a connu des
difficultés de divers ordres. Par exemple, au niveau national, il y a eu
des difficultés liées à l’insuffisance des infrastructures d’égrenage et
de stockage, à la gestion peu orthodoxe de ladite filière. Les
différentes difficultés sont intervenues pendant la conjoncture
économique internationale : fluctuation du taux de change du dollar
et accroissement du niveau mondial de la production (Kissira, 2010).
Ces diverses situations ont fait que le paiement après vente a
commencé par accuser de retard. Les différentes réformes entreprises
n’ont pu trouver les solutions adéquates.
Les producteurs se plaignent toujours du retard dans le paiement des
arriérés de coton graine. Les plaintes sont encore plus intenses au
niveau des producteurs qui attendent en vain leurs revenus pour les
besoins les plus urgents : les soins de santé, la scolarité des enfants,
les cas de décès, etc.
Tous ces problèmes ont entraîné le découragement au sein des
producteurs de coton. Les lourds investissements effectués dans la
filière par l’Etat béninois en 2006, pour relever la culture du coton en
baisse au plan national, n’ont pu motiver les producteurs du
département du Couffo qui se réduisent aujourd’hui dans le nord de
la commune d’Aplahoué.
Les producteurs "fidèles" à la filière (peut-être nostalgiques du
passé) continuent d’en faire les frais. En effet, lorsqu’on considère
les crédits intrants rapportés à la valeur de la production, on dirait
qu’à la fin de la campagne, plus rien ne revient aux producteurs
(tableau I).

44
Tableau I : Crédits intrants coton rapportés à la valeur de
la production (campagne 2007-2008).
Régions Production Valeurs Montants crédits %
en tonnes productions en FCFA
Atacora-Donga 50013 8502210 3721286 43,77
Borgou-Alibori 193540 32901800 16456765 50,02
Mono-Couffo 3134 532780 657532 123,42
Ouémé-Plateau 1305 221850 144425 65,1
Zou-Collines 20664 3512880 2833642 80,66
Bénin 268656 45671520 23813650 52,14
Source : AIC, 2008

L’analyse du tableau I montre que, rapporté à la valeur de la


production, le montant du crédit intrant dans les départements du
Mono-Couffo est de 123,42 %. Ce qui montre que tout le revenu de
la production du coton est consacré à l’achat des intrants. Cette
situation peut s’expliquer par le fait que les producteurs font de
fausses déclarations pour prendre une quantité importante d’intrants
pour les revendre dans le circuit informel et régler les "problèmes de
l’heure" (nutrition, soins médicaux, etc.). De même, la baisse sans
cesse de la fertilité des terres ne permet plus d’obtenir de bons
rendements. En outre, la main-d’œuvre devenant rare et
excessivement chère ne favorise plus la tâche aux producteurs
(tableau II).
Tableau II: Coût moyen de production d’un hectare de coton
dans le département du Couffo.
Opérations Coût
Labour 37 500 F
1er tour de sarclage 12 500 F
2ème tour de sarclage 10 000 F
3ème tour de sarclage 10 000 F
Epandage d’engrais 3 750 F
Traitement phytosanitaire 15 000 F (2 500 x 6)
Récolte 50 000 F
Transport du champ vers la maison ou au 7 000 F
poste de vente
Autres dépenses 10 000 F
Total main-d’œuvre 155 250 F
Intrants (engrais + insecticide) 80 000 F
Dépenses totales 235 250 F
Source : Résultats d’enquête de terrain, 2010

45
Le rendement le plus élevé du département est une (1) tonne à
l’hectare (DPP/MAEP, 2010). Le producteur modèle, avec le prix du
coton graine fixé à 190 F le kilogramme (campagne agricole 2009-
2010), fait une recette de 190 000 F. Il se dégage un déficit de 45
250 F. Mais comme c’est le producteur lui-même qui fait l’essentiel
des travaux de la main-d’œuvre, il déduit seulement le coût des
intrants et pense se retrouver avec 110 000 F. C’est quand le
producteur se trouve dans une situation où il ne peut plus faire les
travaux lui-même, qu’il se rend véritablement compte de la perte.
Le revenu est encore plus faible ou n’existe même pas quand le
producteur prend plus d’intrants qu’il ne le faut, dans le souci de les
revendre pour régler d’autres problèmes.
Les dépenses exorbitantes engagées dans l’entretien d’un champ de
coton, comparées aux revenus devenant parfois insignifiants, sont les
premiers indicateurs de l’appauvrissement des producteurs au profit
des opérateurs économiques privés de la filière. Selon les
producteurs enquêtés (50 %), la caution solidaire, la cherté des
intrants agricoles, et le retard accusé par les structures chargées de la
commercialisation du coton graine dans le paiement des frais de
coton aux producteurs ne sont pas de nature à améliorer leurs
conditions de vie. Cette réaction des producteurs s’explique par le
fait qu’ils s’endettent sans cesse au point qu’il leur est difficile de
sortir de cette situation dégradante.
La baisse de revenus des producteurs est l’un des facteurs qui
influent négativement sur le développement de l’agriculture et par
conséquent sur le bien-être des producteurs.
La culture cotonnière est donc moins satisfaisante pour le
producteur. Le phénomène le plus remarquable est la baisse du
rendement au fil des années. La campagne 2008-2009 par exemple a
fourni comme rendement 122 Kg/ha (CeRPA Mono-Couffo, 2009).
Dans ces conditions, les producteurs ne peuvent plus assurer
convenablement leurs besoins vitaux, et c’est la paupérisation
continue malgré les mesures prises par l’Etat pour subventionner les
intrants coton.

46
2.1.2- Au niveau des producteurs de l’arachide, du niébé, du piment
et de la tomate
La majorité des producteurs du département du Couffo s’adonnent
aujourd’hui à des cultures autres que le coton. Signalons qu’à la
première saison (la grande saison des pluies), presque tous les
producteurs font du maïs qui sert d’aliment de base pour les
populations. C’est à la seconde saison (petite saison pluvieuse) que
les nouvelles cultures de rente telles que l’arachide, le niébé, la
tomate et le piment sont mises en terre. Les dépenses liées à ces
travaux de labour jusqu’à la vente ne permettent pas toujours de
réaliser des bénéfices à la hauteur des efforts fournis.
* Producteurs de l’arachide
Les coûts des travaux liés à la culture de l’arachide sont consignés
dans le Tableau III.
Tableau III : Coût moyen de production d’un hectare d’arachide
dans le département du Couffo.
Opérations Coût Observations
Labour 37 500 F
Sarclage (un seul tour) 15 000 F
Récolte 8 000F
Transport du champ vers la maison
5 000 F
ou au poste de vente
Autres dépenses 10 000 F
Total main-d’œuvre 75 500F
Usage rare
Intrants (engrais) - d’intrants
chimiques
Dépenses totales 75 500 F
Source: Résultats d’enquête de terrain, 2010

Le rendement moyen de cette culture dans le département est 700 Kg


à l’hectare (CeRPA Mono-Couffo, 2009). Le prix moyen de
l’arachide étant 150 F le kilogramme, le producteur fait une recette
de 105 000 F à l’hectare. Il se dégage donc un bénéfice de 29 500 F.
Mais comme c’est le producteur lui-même (aidé de ses enfants et
femmes et parfois même ses frères et sœurs) qui fait l’essentiel des
travaux de la main-d’œuvre, il n’arrive pas à déduire ce qui devrait
revenir à la main-d’œuvre. Il fait un geste symbolique à ceux qui

47
l’ont aidé. Cette solidarité familiale disparaît de plus en plus et
contraint le producteur à recourir à la main-d’œuvre hors de la
famille qui devient rare et très onéreuse.
Le faible rendement fait que le producteur ne jouit pas des fruits de
ses efforts.
* Producteurs du niébé
Les coûts des travaux liés à la culture du niébé sont consignés dans
le tableau IV.
Tableau IV: Coût moyen de production d’un hectare de niébé dans
le département du Couffo.
Opérations Coût Observations
Labour 37 500 F
1er tour de sarclage 12 500 F
2ème tour de sarclage 10 000 F
Traitement phytosanitaire 7 500 F (2.500 x 3)
Récolte 6 000 F
Entretien (séchage, …) 13 500 F
Autres dépenses (transport 10 000 F
…)
Total main-d’œuvre 97 000 F
Intrants (insecticide) 9 000 F
Dépenses totales 106 000 F
Source : Résultats d’enquête de terrain, 2010

Le rendement moyen du niébé dans le département est 600 Kg à


l’hectare (CeRPA Mono-Couffo, 2009). Le prix moyen du niébé
étant 300 F le kilogramme, le producteur fait une recette de 180 000
F, ce qui lui permet de réaliser un bénéfice de 74 000 F après trois
(3) mois de dur labeur.
* Producteurs de la tomate
Les coûts des travaux liés à la culture de la tomate sont consignés
dans le tableau V.

48
Tableau V : Coût moyen de production d’un hectare de tomate
dans le département du Couffo.
Opérations Coût Observations
Labour 37 500 F
Pépinière et arrosage 12 500F

Arrosage après mise en terre - Dépend de la


période.
- Dépend du
Réalisation de petites buttes producteur et de la
nature du sol.
Sarclage 12 500F
Epandage d’engrais 3 750F
Récolte 12 500 F
Transport du champ vers la 15 000 F
maison ou au poste de vente
Autres dépenses 10.000 F
Total main-d’œuvre 103 750 F
Intrants (engrais) 12 500 F
Dépenses totales 116 250 F
Source : Résultats d’enquête de terrain, 2010

Le rendement moyen du département est 6 000 Kg à l’hectare


(CeRPA Mono-Couffo, 2009). Le prix moyen d’une bassine (40 Kg)
variant entre 500 et 12 000 F selon la période, il se dégage plusieurs
cas de figures :
- période de 12 000 F la bassine : pour vendre à ce prix, il faut avoir
arrosé pendant la saison sèche. Le coût de cet arrosage évalué en
moyenne à 750 000 F (50 000 F x 15 j) fait monter les dépenses à
866 250 F. La vente fait obtenir une recette de 1 800 000 F
dégageant un solde de 933 750 F. Il est à signaler que le prix de
vente varie et tend à la baisse au fur et à mesure que le nombre de
champs de tomate arrivant à maturité augmente.
Les producteurs qui parviennent à arroser sont ceux qui sont proches
des cours d’eau ou qui disposent de puits dans leur champ.
- période de 2 000 F la bassine : la plupart des producteurs font leur
récolte dans cette période. Après la vente, ils font une recette
moyenne de 300 000 F (150 bassines x 2000) avec un solde de
183 750 F. Cette période passe vite et la bassine varie entre 1000 F et

49
500 F et dans le pire des cas à 0 F (c’est-à-dire pas d’acheteur et le
producteur regarde le produit pourri la mort dans l’âme). Il se pose
donc un véritable problème de conservation de ce produit.
* Producteurs du piment
Les coûts des travaux liés à la culture du piment sont consignés dans
le tableau VI.
Tableau VI : Coût moyen de production d’un hectare de piment
dans le département du Couffo.
Opérations Coût Observations
Labour 37 500 F
Pépinière et arrosage 15 000 F
1er tour de sarclage 12 500 F
2ème tour de sarclage 10 000 F
3ème tour de sarclage 10 000 F
Epandage d’engrais 3 750 F
Récolte 16 250 F
Transport du champ vers la 7 000 F
maison ou au poste de vente
Autres dépenses 10 000 F
Total main-d’œuvre 122 000 F
Intrants (engrais) 12 500 F
Dépenses totales 134 500 F
Source : Résultats d’enquête de terrain, 2010

Le rendement moyen du département est 650 Kg à l’hectare (CeRPA


Mono-Couffo, 2009). Le prix moyen étant de 250 F le kilogramme,
le producteur fait une recette de 162 000 F. Le solde donne 28 000 F.
Mais, les producteurs qui arrivent à sécher le piment pour le
conserver et le vendre plus tard, le cèdent à 500 F le kilogramme et
font donc un bénéfice de 165 500 F [(600 x 500 – (134500)]. Cette
production profite plus aux commerçants qui disposent de moyen
pour la spéculation. Cette situation explique la faiblesse des revenus
des producteurs (figure I).

50
350 313

Nombre de producteurs
300
250
200
150 131
100
100 70
41,85 49
50 22,36 15,66 23 17 134,15
7,35 5,43 10 3,2
0

0
50

l
]

ta
00

00

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00

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00

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]2

]3

]4
M

]
Revenus saisonniers (en 1000)

Nombre de producteurs Pourcentage (%)

Figure I : Revenus saisonniers moyens des producteurs


Source : Résultats d’enquêtes, 2010.

La figure I montre le nombre très réduit des producteurs ayant de


gros revenus et le caractère très faible des revenus de la grande
majorité des producteurs. En effet, la pression démographique ne
permet plus d’avoir de grandes superficies à exploiter. Les différents
problèmes liés à la production (aléas climatiques, pauvreté des sols,
etc.) amenuisent considérablement les revenus des producteurs.
Face à cette situation difficile à supporter, certains, notamment les
jeunes, optent pour l’"aventure".

2.2- Emigration des agriculteurs comme solution à la crise


Le flux et le reflux des populations du département du Couffo
s’observent entre le Nigéria, la Côte d’Ivoire, le Togo, le Gabon et
les villes du Sud-Bénin. En effet, les exploitants agricoles insatisfaits
du niveau de leur revenu ou désirant l’accroître de façon
substantielle, vont profiter des opportunités qui s’offrent dans
d’autres pays voisins de la sous région. L’exode rural hors du
département, même s’il existait depuis la période coloniale, s’est
considérablement amplifié avec la baisse croissante des revenus des
activités agricoles. Ce phénomène touche les jeunes de sexe

51
masculin surtout. Certains villages du secteur d’étude ont
particulièrement connu la diminution de l’effectif de population
contrairement à la tendance générale à la hausse observée entre 1992
et 2002 (tableau VII).
Tableau VII : Evolution de l’effectif de la population entre 1992 et
2002
Années de recensement
Localités Solde Pourcentage
1992 2002
Agnamè (Atomè) 2424 1740 -684 28,21
Adamè (Dékpo) 1865 1106 -759 40,69
Lonkly 1329 1051 -278 20,91
Houndromè
1298 867 -431 33,3
(Lokogohoué)
Segba (Lokogohoué) 877 822 -55 6,27
Dékandji (Djotto) 920 889 -31 3,36
Glolihoué(Djotto) 1163 1066 -97 8,34
Nigbogan(Djotto) 1040 1016 -24 2,3
Akouègbadja (Tchikpé) 2240 1873 -367 16,38
Kigninnouhoué
709 596 -113 15,93
(Adoukandji)
Aboeti (Tchito) 502 263 -239 47,6
Source : INSAE, 2003.

L’analyse du tableau VII montre que les milieux ruraux connaissent


un dépeuplement inquiétant. Les jeunes détenteurs de la force de
travail vont au Nigéria pour mener les activités agricoles (ils
estiment que le rendement est élevé car les terres sont encore fertiles)
et en Côte d’Ivoire pour travailler dans les plantations de cacao ou
pour la préparation de l’alcool (sodabi). A Aboeti par exemple, une
localité dont la population a chuté de près de 50 % entre 1992 et
2002, il est remarqué un nombre important de départs et dont
certains se sont installés définitivement au Nigéria, en Côte d’Ivoire
et au Gabon. Ceux qui sont revenus définitivement se sont adonnés
pour la plupart aux activités non agricoles. On note également les
migrations vers les départements du Zou, des Collines et de
l’Atlantique à la recherche de terres fertiles.
Parallèlement, depuis ces dix (10) dernières années, certains jeunes
se déplacent pour aller à Azovè, à Lokossa ou à Cotonou pour

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conduire le taxi-moto ("zémidjan") ou pour exercer d’autres
activités.
Par ailleurs, beaucoup de jeunes adolescents et même des fillettes
sont envoyés dans les grandes villes pour servir de "domestiques".
Leur rémunération est directement versée aux parents qui misent sur
ces "ristournes" pour compléter leurs revenus.
Cette tendance a été confirmée par le dénombrement systématique
de départ de jeunes que nous avons effectué dans certains villages.
Ainsi, nous avons recensé en décembre 2009 dans quelques localités
un certain nombre de départs (tableau VIII).
Tableau VIII : Recensement de nombre de jeunes partis en
"aventure"
Villages Nombre de jeunes partis
Agnamè (Atomè) 130
Adamè (Dékpo) 99
Aboeti (Tchito) 350
Houndromè (Lokogohoué) 30
Badjamè (Lonkly) 85
Nigbogan (Djotto) 15
Akouègbadja (Tchikpé) 28
Kigninnouhoué (Adoukandji) 36
Total 773
Source : Enquête de terrain, 2009

Le tableau VIII montre le départ des jeunes à la recherche du bien-


être à cause de la dégradation des conditions de vie de leur milieu.
Somme toute, la stratégie complémentaire adoptée pour compléter
les revenus ou pour contourner la précarité des activités agricoles a
été l’émigration. La solution à la crise a été trouvée entre temps à
l’extérieur du pays : c’est le Nigéria et la Côte d’Ivoire qui répondent
à l’attente des jeunes cultivateurs, déscolarisés ou démunis de terre
pendant une période assez longue. La fortune amassée au Nigéria ou
en Côte d’Ivoire est diversement utilisée. Certains reviennent avec de
nouvelles motos (marque Jencheng surtout), d’autres construisent ou
se marient.
Il est donc clair que ce départ massif de la main-d’œuvre potentielle
porte un coup très dur aux activités agricoles dans le département.

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Plusieurs champs mal entretenus observés lors des enquêtes le sont
par manque de main-d’œuvre (photo 1).

Photo 1 : Champ non entretenu faute de main-d’œuvre à Adamè


Source : Cliché Fangnon, mai 2010.

La photo 1 illustre un champ que le propriétaire n’a pu entretenir


pour raison de maladie. Mais, la recherche de la main-d’œuvre a été
vaine. Le travail effectué jusqu’à cette étape est devenu nul. Ce
producteur sera confronté au problème alimentaire et ne pourra pas
s’assurer les soins de santé. Cette situation montre la disparition de la
solidarité communautaire jadis agissante.

3- Discussions
Le montant du crédit intrant trouvé lors des enquêtes n’est pas
forcément le besoin. Les producteurs surestiment le besoin pour le
surplus. Dans ces conditions, en fin de campagne agricole, certains
se retrouvent endettés. Ce qui justifie les résultats des travaux de
Matthess et al. (2005) qui ont trouvé que la culture du coton donne
une marge nette moyenne nationale négative de 692 FCFA/ha. Cette
marge négative se fait plus sentir au sud à cause de l’état de
dégradation avancé des sols.
Pour rechercher d’autres terres fertiles, les producteurs notamment
les jeunes vont dans d’autres départements du pays ou dans les pays
voisins. C’est ce que BOKONON GANTA (1995) a constaté chez

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les communautés rurales loukpa de Ouaké, qui, en quête de terres
fertiles, ont été amenées à se disperser dans plusieurs directions. Ce
sont généralement les jeunes de 15 à 30 ans qui partent pour la
colonisation pionnière.
Les mêmes observations sont faites par Tohozin (1999) qui a
mentionné les migrations des jeunes dans la basse vallée de l’Ouémé
au Bénin et la Volta au Ghana suite à la déclinaison des activités
rurales.
Mais, l’émigration n’est pas systématiquement le seul facteur de
baisse de la population. Il y a aussi les décès, les migrations
temporaires, les maladies-décès, les biais d’enquêtes, etc.

Conclusion
Les revenus issus des activités agricoles restent encore insuffisants
pour couvrir les besoins essentiels. Les pratiques agricoles liées au
traitement phytosanitaire, à l’épandage d’engrais et constituent
aujourd’hui d’importantes dépenses pour les exploitants agricoles. Il
s’avère donc nécessaire de trouver des alternatives pour la
fertilisation des sols et limiter l’utilisation des intrants chimiques
pour faire accroître de façon significative les revenus des
producteurs. Ce qui va encourager les jeunes à rester sur place pour
travailler et créer de la richesse.

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