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Purpuras vasculaires
E Hachulla
Résumé. – Le purpura non thrombopénique témoigne d’une atteinte des petits vaisseaux du derme,
voire de l’hypoderme. Le plus souvent, il s’agit d’une vascularite leucocytoclasique. Les vascularites
d’hypersensibilité sont souvent purement cutanées et surviennent après l’exposition à un agent
infectieux ou à un médicament. L’éviction de l’allergène est le plus souvent le seul traitement nécessaire.
Le purpura rhumatoïde est la première cause du purpura de l’enfant, mais il est possible chez le sujet
âgé. Les corticoïdes n’ont pas d’effet démontré sauf en cas d’atteinte abdominale sévère ou dans
certaines atteintes rénales. On peut observer un purpura vasculaire au cours des vascularites
systémiques comme la maladie de Wegener ou la périartérite noueuse. Les corticoïdes sont alors
nécessaires du fait du caractère multiviscéral de la vascularite. Plus rarement, un purpura peut être en
rapport avec une vasculopathie comme l’amylose, le purpura sénile, la carence en vitamine C ou, plus
rarement, une pathomimie. La biopsie de peau aide au diagnostic de ces situations difficiles.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Hachulla E. Purpuras vasculaires. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Angéiologie, 19-2560, 2002, 7 p.
19-2560 Purpuras vasculaires Angéiologie
Purpuras emboliques1
2 Purpura pétéchial confluant aux membres inférieurs s’étendant aux cuisses. 1 parfois accompagnés d’une authentique vascularite des vaisseaux du derme.
Aspects histologiques
Pour avoir un prélèvement histologique de qualité, il est préférable
de faire une biopsie au bistouri, en « boutonnière », pour emporter
du derme et de l’hypoderme. Le prélèvement a ainsi toutes les
4 Purpura nécrotique évoluant vers l’ulcération superficielle.
chances d’emporter des éléments artériolaires, veinulaires et
capillaires.
Classification des purpuras
vasculaires PURPURA DES VASCULOPATHIES
Le purpura vasculaire témoigne d’une anomalie de la paroi La paroi vasculaire peut être normale à l’examen histologique
vasculaire des artérioles, veinules ou capillaires du derme, le plus standard. En cas d’amylose, les dépôts amyloïdes siègent dans un
souvent liée à une vascularite, parfois secondaire à une premier temps avec prédilection en périvasculaire [14] et peuvent
vasculopathie ou à une fragilité vasculaire (tableau I). Les passer inaperçus. Aussi est-il nécessaire de faire une coloration
vascularites d’hypersensibilité constituent l’étiologie la plus spécifique par le rouge Congo. Pour le purpura de Bateman, il
fréquente des purpuras vasculaires. existe toujours des altérations dermiques tout à fait suggestives.
Le purpura thrombotique se situe à la frontière entre le diagnostic Quant à l’eczématide-like purpura, il existe à l’histologie des lésions
différentiel et le diagnostic étiologique des purpuras vasculaires. Il évocatrices mais non spécifiques.
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Angéiologie Purpuras vasculaires 19-2560
thrombotique purpura
● syndrome myéloprolifératif
● syndrome des antiphospholipides
● cryoprotéine
● traitement antivitamine K héparine…
● fragilités vasculaires
● traumatisme vasculaire
des vascularites ● amylose
● carence en vitamine C
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Capillaire
Artériole Veinule
Petite artère Veine
Artères de moyen et
grand calibres
Vascularite leucocytoclasique
Aorte
Purpura rhumatoïde et
cryoglobulinémies
Polyangéite microscopique
7 Purpura vasculaire au cours d’une carence en vitamine C. Noter les éléments pé-
téchiaux au membre inférieur gauche accompagnés d’ecchymoses de la jambe droite Maladie de Horton et maladie de Takayasu
et de la cuisse gauche.
9 Classification des vascularites selon le calibre des vaisseaux atteints : nomencla-
ture proposée par la conférence de consensus de Chapel Hill sur les vascularites sys-
témiques [20].
Les artères de grand calibre correspondent à l’aorte et ses principales branches (mem-
bres et vaisseaux du cou), les artères de moyen calibre sont les artères viscérales (ré-
nales, tronc coeliaque, coronaires, mésentériques) et les petites artères sont les artères
distales intraparenchymateuses reliant les artérioles.
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Angéiologie Purpuras vasculaires 19-2560
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Angéiologie Purpuras vasculaires 19-2560
purpurique ou sur une zone infiltrée du livedo : on observe des Traitement des purpuras vasculaires
images d’obstruction des artérioles par les cristaux de cholestérol
avec parfois des aspects de vascularite ou de thrombose.
Le traitement étiologique constitue la base même du traitement.
L’évolution peut être spontanément favorable après éviction de
Myxome de l’oreillette gauche
l’antigène en cause (médicaments autotoxiques). Il n’y a pas
Le myxome de l’oreillette gauche est une tumeur rare donnant d’indication des corticoïdes en cas d’atteinte cutanée isolée. Même
parfois un tableau de vascularite systémique avec altération de dans les formes avec nécrose cutanée, l’évolution se fait souvent
l’état général, syndrome inflammatoire, arthralgies, myalgies, sans séquelle, laissant rarement des cicatrices pigmentées. Le repos
livedo, purpura vasculaire parfois nécrotique. Si ces signes peuvent au lit suffit souvent pour soulager rapidement les formes aiguës
être la conséquence d’embolies myxomateuses, celles-ci sont ou évoluant par poussées. Les antalgiques ou les anti-
rarement retrouvées à la biopsie cutanée dont l’aspect peut être inflammatoires non stéroïdiens peuvent soulager les formes
celui d’une vascularite leucocytoclasique [4]. douloureuses articulaires ou musculaires. En cas de rechute sont
prescrits la colchicine, la dapsone puis éventuellement les
Embolie graisseuse antipaludéens de synthèse.
Les embolies graisseuses surviennent dans un contexte aigu Les purpuras avec atteinte viscérale justifient d’un traitement
traumatique. Elles peuvent induire une vascularite toxique qui corticoïde par voie générale, voire des immunosuppresseurs [7].
s’accompagne souvent de thrombopénie, et donnent un purpura Dans certaines formes corticodépendantes, les immunoglobulines
pétéchial prédominant sur la moitié supérieure du thorax et sur polyvalentes peuvent permettre une épargne cortisonique [16]. Dans
les bras. Le tableau clinique est particulier, fait de détresse les formes cutanées isolées, la corticothérapie est souvent inefficace,
cardiopulmonaire et neurologique survenant le plus souvent après les antipaludéens de synthèse ou la colchicine peuvent être
un polytraumatisme. utiles [29].
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