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Cours Introduction au Management – ENCG Dakhla Pr H.

AMAAZOUL

IV- Les Écoles de Management


Jusqu’à la fin du XIXème siècle, les dirigeants d’entreprise se préoccupèrent surtout d’agrandir
leurs usines, d’acheter de l’outillage et d’accumuler des capitaux ; leur but principal était de
posséder une entreprise très vaste afin d’impressionner leurs concurrents. Vers le début de XX ème
siècle, on vit apparaître une nouvelle orientation : les dirigeants d’entreprise commençaient à
penser en fonction du rendement c’est-à-dire l’utilisation optimale des ressources. Cette période
fut celle du déclenchement de la seconde révolution industrielle caractérisée par :
 Le passage d'une économie fondée traditionnellement sur l'agriculture à une
économie reposant sur la production mécanisée;
 L’intégration de nombreuse main-d’œuvre peu adaptée à la production technique;
 L’apparition des grandes entreprises industrielles fabriquant des produits de masse
(bénéficier des économies d’échelle) et l’accélération du progrès technologique.
Les fondements du management moderne sont issus des travaux d’un groupe d’auteurs, de
professionnels et des hommes de terrain qui ont formulé certains principes rationnels (logiques),
pour mieux appréhender les conditions de réussite de l’entreprise et susceptibles d’améliorer
l’efficacité de l’organisation et de manière générale la performance de l’entreprise.
A- L’ÉCOLE CLASSIQUE
Les principaux représentants de cette école sont les américains Frederick TAYLOR &
Henry FORD (courant scientifique), le français Henri FAYOL (courant administratif) et
l’allemand Max WEBER (courant bureaucratique).
1. Frederick Winslow TAYLOR (1856-1915) et sa fameuse O.S.T.
Né en 1856 dans une vieille famille de Philadelphie, Frederick Winslow TAYLOR est
promis à une carrière de juriste, comme son père, mais il ne s’intéresse guère au droit. Admis
à l’Université d’Harvard, il a interrompu brusquement ses études. À l’âge de 18 ans, par goût
de la mécanique, il préfère entrer comme apprentis dans l’usine de la Midvale Steel Company
qui appartenait à des amis de sa famille, puis ouvrier, chef d’équipe, contremaître (chef
d’atelier) et enfin ingénieur en chef toujours dans la même entreprise. Dès ses premiers mois
d’atelier, TAYLOR est choqué par le faible rendement de ses camarades, qui s’organisent
entre eux pour limiter leurs efforts et ne travailler le plus souvent qu’au tiers de leur capacité.
Leur raisonnement est logique : s’ils sont payés à la journée, ils ne gagnent rien à en faire
plus, et s’ils sont payés aux pièces ils savent que s’ils dépassent trop facilement les quotas de
production, le chef d’atelier fera revoir les taux. Ils travailleront alors plus pour le même
salaire. Ils s’arrangent donc pour freiner la production et ralentir les machines. Le souci de
Taylor à l’époque consiste à trouver une solution au problème de la flânerie qui est à
l’origine de la non-rentabilité et de la perte de l’efficacité.
Après quatre années d’apprentissage passées dans une petite usine de pompes, Frederick
Taylor devient ouvrier tourneur, en 1878, à la Midvale Steel Company et gravit tous les
échelons pour obtenir, en 1883, après des cours du soir, son diplôme d’ingénieur mécanicien.
En 1884, nommé ingénieur en chef à la Midvale Steel Company, il conçoit un nouvel atelier
d’usinage. C’est là qu’il engage son combat pour la productivité. Frederick Taylor
deviendra, en 1890, directeur de la Manufacturing Investment, une usine de pâte à papier, avant
de se consacrer, dès 1893, au conseil en organisation industrielle.
En 1903, ses recherches le conduisent à exprimer ses vues dans Shop Management (La
gestion des ateliers). En 1911, il publie un ouvrage célèbre, traduit en plusieurs langues, qui
fera date et qui aura un retentissement très important: The Principles of Scientific Management.
1.1. L’Organisation Scientifique du Travail (O.S.T.)
Frederick Winslow TAYLOR est le fondateur de l’organisation scientifique du travail
(O.S.T.). Son analyse porte avant tout sur l’organisation de l’atelier. Son idée de base est que la
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réussite de la firme dépend de sa prospérité. Ceci dépend d’une bonne organisation qui améliore
la productivité. Pour lui, la prospérité des employeurs et celle des employés vont de pair : le
profit pour l’entreprise implique la hausse des salaires pour les employés grâce à la productivité.
L’apport considérable de Frederick W. Taylor est d’avoir associé la science à l’industrie et
d’avoir codifié le monde de la production industrielle en ne laissant plus de place aux anciennes
procédures empiriques des ouvriers. Il utilisera les mathématiques dans la gestion (abaques) et
mettra en place un système de contrôle et de gestion de la production (ingénieurs des méthodes).
L’industrie quitte une certaine improvisation pour adopter une structuration rationnelle de la
production avec l’application de l’OST, érigée pour la première fois en système vers 1880. Cette
structuration rationnelle de la production observe les quatre principes développés ci-dessous.
a) La division verticale du travail
C’est mettre la bonne personne à la bonne place («the right man on the right place»), en
séparant le travail intellectuel de conception des ingénieurs du «bureau des méthodes» qui
organisent la production et attribuent, pour chacune des taches, une durée standard, du travail
d’exécution des ouvriers qui doivent appliquer les consignes spécifiées. Cette séparation implique
une division sociale entre les ingénieurs (les «cols blancs») et les ouvriers (les «cols bleus»). On
codifie le travail par des instructions qui sont données par la hiérarchie à des exécutants.
b) La division horizontale du travail
On décompose le travail en tâches élémentaires et en gestes élémentaires, en supprimant
les gestes inutiles. On introduit le chronométrage, non pour connaître le temps d’exécution
d’une tâche, mais pour attribuer à chacune d’elles la durée optimum d’exécution et obtenir
ainsi la meilleure façon de faire : «The One Best Way». Ce principe, illustré par Charlie
Chaplin dans son célèbre film Les Temps modernes, est fondé sur la parcellisation des tâches.
c) Le salaire au rendement (piece rate pay system)
Frederick W. Taylor constate la «flânerie» systématique qui conduit les meilleurs ouvriers
à ralentir leur vitesse d’exécution au niveau des moins productifs, en raison d’une rétribution
journalière identique. Aussi préconisera-t- il comme moyen de lutte: le système de salaire
différentiel. Constatant que le caractère aliénant du travail de l’ouvrier ne peut être compensé
que par l’argent qui est, dans ces conditions, la seule motivation, il attribuera, pour une tâche
donnée, un temps d’exécution (temps opératoires optimaux). Le chronométrage déterminera
alors la rémunération (boni) par rapport au temps de référence.
d) Le contrôle du travail, la hiérarchie fonctionnelle
Frederick W. Taylor, pour lutter contre le «gaspillage», optimisera le temps consacré au travail
en procédant à une analyse détaillée des gestes des ouvriers et en rationalisant le poste de travail
de l’individu. Il met en place une organisation représentée par des contremaîtres chargés de
réaliser des contrôles. L’efficacité passant par la spécialisation des tâches, un subordonné
dépendra de plusieurs chefs en fonction du problème posé. Il n’y a pas d’unicité de
commandement (voir Henri Fayol), mais une multiplicité de lignes hiérarchiques. L’ouvrier
aura autant de chefs spécialisés (hiérarchie fonctionnelle) qu’il y a de fonctions différentes
nécessaires à l’exécution de son travail. L’organisation prônée par Frederick W. Taylor est une
organisation dans laquelle on rajoute, à la ligne hiérarchique (commandement) «line», un «staff»
(le corps des experts) pour créer une organisation de type «staff and line» que l’on traduit par
«hiérarchie linéaire et fonctionnelle» ou encore «hiérarchico-fonctionnelle».
1.2. Les limites de l’OST : les dysfonctionnements sociaux
Les cadences imposées à l’homme par la machine ou par le chronométrage, la monotonie
du travail, la négation de l’initiative individuelle, engendrent à terme des dysfonctionnements
sociaux (turnover, absentéisme, accidents du travail…) traduisant la démotivation des salariés.

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2. Henry FORD (1863-1947): 1er producteur de voitures à la chaîne


Henry Ford (1863-1947), aîné de 6 enfants, est né aux États-Unis à Dearborn au Michigan.
Passionné de mécanique, il construit dès l’âge de 15 ans son premier moteur à vapeur et
découvre avec enthousiasme le tout nouveau moteur à explosion. Après avoir été apprenti
mécanicien à Detroit, Henry Ford devient ingénieur- mécanicien et entre en 1891, à la société
Edison Company de Detroit. Nommé ingénieur en chef en 1893, il consacre son temps libre,
cette même année, à la construction d’une automobile bicylindre.
Henry Ford démissionne en 1899 de l’Edison Company et vouera quelques années de sa
vie à la conception et à la construction de plusieurs voitures de course. Le 16 juin 1903, il crée
la Ford Motor Company et commercialise sa première voiture le 15 juillet 1903. Le 1er
octobre 1908, il présente le célèbre modèle T destiné à un grand public. Celui-ci sera
commercialisé pendant 19 ans et diffusé à 15millions d’exemplaires. Grâce à ses méthodes de
travail, le temps de production de ce modèle sera considérablement réduit. Il passera de 6
heures à 1 h 30. La productivité est donc multipliée par 4. Henry Ford, considéré comme l’un
des fondateurs de l’industrie du XXe siècle, est l’un des premiers à appliquer et à développer
les préceptes du Taylorisme. Ses méthodes, adoptées par toutes les grandes entreprises,
représentent un mode d’organisation du travail qui fera triompher la société industrielle du
XXe siècle en créant une forte croissance économique.
Le Fordisme est défini dans le Lexique de gestion Dalloz comme : «Doctrine et théorie
économique inspirées des méthodes de Henry Ford suivant laquelle la production en grande
série et à la chaîne abaisse les coûts de production et les prix de vente, ce qui augmente la
demande et permet une nouvelle augmentation du niveau de production.»
Ce modèle industriel complétant l’œuvre de Taylor est fondé sur les trois grands
principes suivants :
a) Premier principe : le travail à la chaîne continue
S’inspirant du principe de la division horizontale du travail de Frederick W. Taylor, Henry
Ford approfondit ce concept qui débouchera sur le travail à la chaîne continue : le travail est dit
posté car l’ouvrier est «statique». Ce mode de fonctionnement aurait été pratiqué, pour la première
fois, dans les abattoirs de Chicago et la visite de ces lieux aurait influencé Henry Ford. Il aurait
alors décidé d’appliquer ce principe dans ses usines. Le travail à la chaîne est caractérisé par une
mécanisation de l’usine qui utilise des convoyeurs pour assurer la circulation des pièces leur
permettant de se déplacer automatiquement, à flux continu, devant des ouvriers. Ces derniers sont
fixés à leur poste de travail et répètent inlassablement les mêmes gestes tout au long de la journée.
Cette «parcellisation» du travail a engendré une déqualification du travail ouvrier. Le rythme du
travail n’est plus sous le contrôle de l’ouvrier, mais dicté par la machine.
b) Deuxième principe : la standardisation
Elle permet une baisse du coût de production unitaire rendue possible grâce au concept
d’interchangeabilité et de standardisation des pièces. Témoin le modèle voiture unique, la Ford
T noire: «Mes clients peuvent choisir la couleur de leur voiture pourvu qu’elle soit noire.» La
standardisation va favoriser le développement de la production en grandes séries, engendrer la
production de masse et une consommation de masse qui sera à l’origine du mode de croissance
économique fordiste des pays occidentaux entre 1945 et 1975 (les Trente Glorieuses).
c) Troisième principe : five dollars a day
Au 1er janvier 1914, la décision est prise de porter la rémunération journalière à cinq
dollars par jour. Cette nouvelle rémunération, qui représente un salaire important par rapport
aux moyennes pratiquées dans l’industrie de l’époque, permet d’atteindre un double objectif :
d’une part, de fidéliser les ouvriers et, d’autre part, de redistribuer des gains de productivité
sous forme de pouvoir d’achat, compensant ainsi la difficulté du travail en assurant la paix
sociale. Cette redistribution de pouvoir d’achat permettra de stimuler l’offre et la demande en
donnant aux ouvriers la possibilité d’acquérir les voitures qu’ils produisent.
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3. Henri FAYOL (1841-1925) et l’Organisation Administrative de Travail


Henri FAYOL, ingénieur et grand chef d’entreprise, a été le pilier de la pensée
administrative moderne basée sur la systématisation du travail de dirigeant, depuis la prévision
jusqu’au contrôle en passant par la décision. Le management lui doit, jusqu’à aujourd’hui, à peu
près tout ce qui constitue son contenu pratique et également presque tout ce qui en fait matière à
enseignement. À côté de TAYLOR, FAYOL constitue le second pilier fondamental de la
pensée administrative. FAYOL est connu surtout pour son ouvrage « Administration
industrielle et générale », publié pour la première fois en 1916, le premier traitant de gestion
globale de l’entreprise et de tâches des dirigeants. Son livre avait un caractère unique à double
titre : c’était la toute première ébauche d’une pensée englobant l’acte gestionnaire comme un
processus à la fois varié et intégré, et c’était aussi la toute première fois qu’un haut dirigeant
prenait le temps de réfléchir sur son action et d’en faire une présentation articulée.
Partant du constat que la fonction ou les opérations administratives sont négligées, FAYOL
analyse et classe les activités de l’entreprise en 6 groupes de fonctions :
1 – Une fonction technique (ou de « production ») : la transformation de
matières premières en produits finis.
2 – Une fonction commerciale : l’achat des matières premières et la vente
de produits finis. 6 – Une fonction
3 – Une fonction financière : la gestion des ressources financières de administrative
l’entreprise (capitaux investis et emprunts). «transversale» :
4 – Une fonction de sécurité : la protection des ressources humaines et POCCC.
matérielles de l’entreprise.
5 – Une fonction de comptabilité : la gestion des paies et les statistiques de
production.

Alors que les cinq premières fonctions sont des fonctions spécifiques, car liées à des
domaines de compétence particuliers, la fonction administrative est une fonction
transversale, qui assure la coordination entre les cinq autres fonctions.
La fonction administrative se décompose en cinq tâches essentielles :
L’administrateur anticipe l’avenir, fixe des objectifs et planifie l’activité de
Prévision
l’entreprise sur le long terme.
L’administrateur répartit les différentes ressources (matérielles, humaines et
Organisation
financières) entre les cinq fonctions spécifiques de l’entreprise.
L’administrateur indique aux salariés les tâches à accomplir et donne les
Commandement
instructions sur la manière de les accomplir.
L’administrateur assure une cohérence entre les différentes activités de
Coordination
l’entreprise.
L’administrateur vérifie que le fonctionnement réel de l’entreprise est conforme
Contrôle
à ce qui a été ordonné et rectifie les erreurs éventuelles.

Pour compléter le contenu de la fonction ad ministrative, FAYOL préconise, dans un


chapitre, 14 principes à respecter quand on est administrateur :
1 - Principe de division du travail : il a pour but essentiel de « produire plus et mieux
avec le même effort ». Il permet la spécialisation des fonctions et la séparation des pouvoirs.
2 - Principe d’autorité et de responsabilité : «L’autorité, souligne FAYOL c’est le droit
de commander et le pouvoir de se faire obéir». Ce droit et ce pouvoir doivent cependant
s’accompagner d’une nécessaire responsabilité, c’est-à-dire d’une «sanction» qui récompense
ou pénalise l’exercice du pouvoir.

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3 - Principe de discipline : Par discipline, il entend «obéissance, l’assiduité, l’activité, la


tenue, les signes extérieurs de respect réalisés conformément aux conventions établies entre
l’entreprise et ses agents».
4 - Principe d’unité de commandement : FAYOL s’est opposé au modèle fonctionnel
proposé par TAYLOR. Il considère que la multiplicité des chefs est néfaste au bon
fonctionnement des entreprises. Pour une action q uelconque, un agent ne doit recevoir des
ordres que d’un seul chef (les similitudes avec l'armée).
5 - Principe d’unité de direction : «Ce principe, précise-t-il, a pour expression : un seul
chef et un seul programme pour un ensemble d’opérations visant le même but». Il ne doit pas
être confondu avec le principe d’unité de commandement, mais ce dernier ne peut exister sans
lui. La direction doit faire un effort de coordination de tous les services ayant un même
objectif.
6 - Principe de subordination de l’intérêt particulier à l’inté rêt général : Il faut
entendre par ce principe la nécessité que, « dans une entreprise l’intérêt d’un agent, ou d’un
groupe d’agents » ne puisse en aucun cas « prévaloir contre l’intérêt de l’entreprise ».
7 - Principe de ré muné ration du personnel : Ce principe consiste simplement à donner
au personnel « le prix du service rendu ». La rémunération « doit être équitable », et « donner
satisfaction » à la fois pour les salariés et pour l’employeur.
8 - Principe de centralisation : FAYOL considère qu’il s’agit d’un phénomène naturel.
Selon lui, la taille de l’entreprise, le caractère du chef et la valeur des subordonnées
déterminent le degré de centralisation.
9 - Principe de hié rarchie : Il s’agit de « la série de chefs qui va de l’autorité supérieure
aux agents inférieurs ». Chaque personne doit connaître sa position dans la hiérarchie de
l’entreprise. Les ordres et les informations suivent la ligne hiérarchique qui est un circuit
imposé par l’unité de commandement.
10 - Principe d’ordre : Ici, FAYOL fait un parallèle entre deux types d’ordres aussi
nécessaires, selon lui, l’un que l’autre : « une place pour chaque chose et chaque chose à sa
place » (l’ordre maté riel) et « une place pour chaque personne et chaque personne à sa
place » (l’ordre social). Cet ordre aurait pour vertu « éviter les pertes de matières et les
pertes de temps » et ferait que « chaque agent soit à sa place qui lui a été assignée ».
11 - Principe d’équité : traiter les subordonnés sans aucune préférence personnelle.
FAYOL explique qu’il faut distinguer l’équité de la justice qui n’est que « la réalisation des
conventions établies » ; alors que l’équité permet d’aller au-delà de la lettre des textes et
« d’interpréter ». L’équité pour lui « la combinaison de la bienveillance avec la justice ».
12 - Principe de stabilité du personnel : Partant du constat qu’il faut du temps pour qu’un
agent s’initie à une tâche et soit apte à la remplir adéquatement, toute instabilité du personnel,
ne peut qu’être néfaste et coûteuse ; cependant, « les changements de personnel à l’âge, la
maladie, les retraites, la mort » sont tolérés.
13 - Principe d’initiative : C’est « la possibilité de concevoir et d’exécuter ». FAYOL met
aussi sous la rubrique « initiative » la « liberté de proposer » et la « liberté d‘exécuter ». Un
responsable qui accorde de l’initiative à ses salariés est supérieur à celui qui ne le fait pas.
14 - Principe d’union du personnel : FAYOL a fait appel au proverbe "l’union fait la
force". C’est « l’harmonie » entre les agents de l’entreprise qui ferait cette union. Trois
moyens permettent de réaliser cette harmonie : respecter le principe d’unité de
commandement, éviter la mauvaise interprétation du dicton "diviser pour régner" (s’il
convient de diviser les forces l’adversaire pour s’assurer la victoire, il faut à l’inverse
favoriser l’union du personnel, l’harmonie des relations) et d’éviter d’abuser des
communications écrites (source de conflits).

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4. Max WEBER (1864-1920) et l’Organisation Bureaucratique


Contrairement aux apports de Taylor et de Fayol, les travaux du sociologue et philosophe
allemand Max WEBER, père fondateur de la sociologie des organisations, sont essentiellement
théoriques. La bureaucratie weberienne constitue une réponse au développement de
l’organisation administrative étatique à la fin du XIXème et au début de XXème siècle. WEBER
dégage une typologie des organisations fondée sur l’origine de l’autorité (aptitude à faire
observer volontairement des ordres) qu’il distingue du pouvoir (aptitude à forcer l’obéissance).
Le pouvoir appartient aux propriétaires, l’autorité quant à elle, légitime les dirigeants.
Tout leader cherche à légitimer sa domination. Il distingue trois types d’autorité :
 L’autorité charis matique repose sur la personnalité du leader (Ex.: Henry FORD,
Marcel DASSAULT, Francis BOUYGUES, Bill GATES).
 L’autorité traditionnelle est fondée sur les précédents et les usages. «le leader tient
son autorité de son statut social dont il a hérité, et l’extension de cette autorité est fixée
par la coutume». C’est le cas par exemple des entreprises familiales qui se transmettent
sur plusieurs générations.
 L’autorité bureaucratique (autorité rationnelle et légale) repose sur des protections
juridiques formalisées. Le terme de bureaucratie n’est pas péjoratif pour M. WEBER au
contraire la bureaucratie est pour lui la forme la plus efficace d’organisation.
Les 6 principes bureaucratiques :
 Existence de services spécialisés  Recrutement sur concours ;
déterminés par la loi ;  Possibilité d'avancement sur la base de
 Protection des fonctionnaires dans critères objectifs ;
l'exercice de leurs fonctions ;  Séparation complète entre la fonction et
 Hiérarchie des fonctions ; l'homme qui l'occupe.
La légitimité de cette organisation repose sur le droit et les règlements. Le meilleur
exemple d’organisation bureaucratique est celui de la fonction publique. Aujourd’hui, le New
Public Management qui se fonde sur la responsabilisation du management de la fonction
publique (autonomy and accountability), de la discipline budgétaire en matière d’utilisation
des ressources, de la quantification des performances, d’une évaluation des résultats. Les deux
derniers principes sont en rupture avec l’organisation bureaucratique qui encadre les activités
des agents par un contrôle de conformité par apport aux procédures et aux normes.
5. Les limites de l’approche classique
Les travaux de l’école classique ont permis d’initier la réflexion sur le monde des organisations.
En mettant en évidence des concepts clés (pouvoir, information, contrôle...), ils ont posé la première
pierre d’un édifice toujours en construction. Ils présentent toutefois trois types de limites :
► ils ont un caractère prescriptif. Cela signifie qu’ils posent leurs conclusions comme
des principes universels de gestion, des normes à respecter. Fayol estime qu’il faut
respecter ses quatorze principes, Taylor considère que toute organisation doit répondre
aux principes de l’OST, et Weber ne voit pas de salut hors de l’organisation
bureaucratique. Or, cette posture ne permet pas de comprendre les organisations et leur
fonctionnement. De plus, elle nie la complexité et la variété des organisations ;
► ils ont une vision qui ignore l’être humain en tant que tel. Fayol ne reconnaît pas de
vie psychique interne aux individus, Taylor ignore les potentielles logiques d’actions
propres, et Weber aspire à l’impersonnalité maximale des règles ;
► ils ne prennent pas en compte l’influence de l’environne ment. Pour les auteurs de
l’école classique, tout se passe comme si l’organisation vivait en système clos, selon
des règles prédéfinies, et ceci quels que soient les secteurs d’activité.
Ces limites ne signifient pas que les travaux dont il est question ici fassent fausse route.
Simplement, il est nécessaire de les compléter sur les limites constatées. Ainsi, l’école des
relations humaines remet l’individu au cœur de l’analyse.
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B- L’ÉCOLE DES RELATIONS HUMAINES


L’école des relations humaines vise à combler les limites de l’école classique et plus
particulièrement avec l’analyse taylorienne qui considère l’homme comme une machine d’une
part, et qu’il est motivé uniquement par l’argent d’autre part. Le contexte dans lequel se
développera cette école est celui de la crise économique de 1929 et le développement des
idées socialistes qui ont conduit à contester les principes de l’école classique.
Par ailleurs, les progrès de la psychologie appliquée (Sigmund FREUD) ont montré
l’importance des facteurs physiologiques liés à l’environnement physique du travail et
l’importance des conditions de travail sur la productivité des entreprises. Ce contexte a été
marqué aussi par les débuts de l’ergonomie : adaptation des outils de travail à l’homme.
Les principaux représentants de ce courant théorique sont l’australien E. MAYO, les
américains A. MASLOW et F. HERZBERG, et l’allemand K. LEWIN.

1. Elton MAYO (1880-1949) et l’expérience d’Hawthorne


Elton MAYO est d’origine australienne (1880-1949), il a immigré aux USA en 1922. Il a
été professeur et chercheur.
a- L’expérience d’Hawthorne et ses résultats
Une enquête s’effectua dans les ateliers de la "Western Electric" (1927-1932), une usine de
fabrication de téléphone. Cette enquête se déroula en 2 principales phases :
Pour la pre miè re phase de l’enquête, les chercheurs ont constitué deux groupes composés
d’ouvrières : un groupe expérimental, sur lequel ont été testés certaines modifications et un
groupe témoin, pour lequel aucun changement n’est intervenu.
 La première étape de l’expérience a consisté à mesurer l’impact des améliorations des
conditions de travail (éclairage, niveau de la température…) sur la productivité du
travail. La production du groupe expérimental a augmenté, mais celle du groupe
témoin également.
 Pour la deuxième étape, ils introduisent d’autres stimulants tels que l’introduction des
pauses, la distribution de boissons pendant les pauses, attribution de primes. La
production des deux groupes a continué à progresser.
 Les chercheurs ont alors décidé d’observer le comportement des ouvrières du groupe
expérimental en proposant un retour aux conditions initiales de travail (suppression
des pauses, etc.). Ils ont constaté que la production augmentait toujours.
 L’équipe d’Elton MAYO a mis en évidence les effets positifs du travail en groupe. Les
groupes observés étaient devenus homogènes et avaient leur propre logique de
fonctionnement. La satisfaction au travail, et par conséquent l’évolution de la
production, était d’abord associée à la nouvelle forme d’organisation sociale du travail
plutôt qu'à l'organisation en elle- même.
La motivation psychologique des salariés dans l'entreprise est aussi importante que la
motivation matérielle.
La deuxième phase des enquêtes s’est réalisée sous la forme d’interviews auprès de 2000
salariés pour connaître le type de contrôle souhaité dans les ateliers et le niveau des conditions
de travail. Les enquêteurs sont arrivés à la conclusion que la plupart des problèmes des
ouvriers entre eux et entre les ouvriers et les contremaîtres dépendaient de leurs attitudes
émotionnelles et non des conditions matérielles.
La dernière phase des recherches a consisté à observer le comportement des o uvrières
d’un atelier d’assemblage. Les chercheurs ont ainsi pu mettre en évidence le système de
valeurs du groupe et les symboles partagés par ses membres.

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b- Les conclusions de l’expérience d’Hawthorne


 La quantité de travail accomplie par un ouvrier n’est pas seulement déterminée par sa
capacité physique, mais par sa capacité sociale, c’est-à-dire son intégration au groupe.
 Les paramètres non financiers (conditions de travail, relations sociales) jouent un rôle
capital dans la motivation et la cohésion du groupe.
 La spécialisation à outrance préconisée par l’OST n’est pas la forme la plus efficace de la
division du travail.
 Les salariés ne réagissent pas à la direction en tant qu’individus, mais en tant que membres
d’un groupe ayant sa propre logique de fonctionnement et son propre système de valeurs.
2. Abraham MASLOW (1908-1970) et la pyramide des besoins
Abraham MASLOW est un psychologue américain qui a élaboré la théorie des besoins (ou
des "motivations"). Il met en évidence les différents types de besoins de l’homme au travail.
MASLOW découvre, après des analyses et des observations cliniques, deux principes :
– les besoins humains peuvent être hiérarchisés ;
– un besoin d’ordre supérieur ne peut être satisfait que si le besoin d’ordre inférieur l’a été.
Selon lui, tous les individus souhaitent satisfaire cinq catégories de besoins :

1. Besoins physiologiques : ou besoins fondamentaux d’existence (se nourrir, se loger,


dormir, etc.); une fois satisfaits, ces besoins cessent d’être motivants.
2. Besoins de sécurité : ou de protection physique (avoir un abri, un emploi) et
projection du besoin de sécurité sur les enfants.
3. Besoins sociaux, d’appartenance ou d’affectation : besoin de s’identifier à un groupe,
être reconnu par les autres, être accepté, être compris, être aimé, donner, recevoir, etc.
4. Besoins d’estime et de reconnaissance : recherche d’un statut, autonomie, être utile,
être reconnu, être valorisé, être respecté.
5. Besoins de réalisation de soi et d’accomplissement : réaliser tout ce dont on est capable
(être créatif). Ces besoins seront à satisfaire que si les besoins précédents sont respectés.
Le besoin non satisfait est une source de motivation et, dès qu’il l’a été, c’est le besoin
supérieur qui est la nouvelle source de motivation. On n’écartera pas les possibilités «d’allers-
retours» entre les niveaux de la pyramide. La pyramide sera classée en deux groupes de besoins :
– les besoins primaires (niveaux 1 + 2) ou «avoir», dont les principes de Taylor en sont
une illustration, limitant les besoins de l’homme aux besoins matériels ;
– les besoins dits secondaires (ensemble des niveaux 3 à 5) ou «être».
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Pour l’entreprise, il y a une double utilité dans la théorie des besoins :


► Pour les responsables d’entreprises et les directeurs de GRH, cela les incite à
réfléchir sur le besoin du personnel.
► Fonction marketing (étude des besoins et désirs des consommateurs).

3. Frederick HERZBERG (1923-2000) et son modèle bi-factoriel


C’est un professeur et psychologue américain qui a conduit des recherches sur l’étude des
motivations de l’homme. Il a publié en 1959 son ouvrage de référence « Le travail et la nature
de l’homme ». Il a distingué deux types de facteurs :
a) les facteurs d’hygiène ou d’insatisfaction : sont les conditions de travail, les
relations avec la hiérarchie et entre salariés, les procédures de contrôle, le salaire et la
sécurité. Ces facteurs peuvent être une source d’insatisfaction, mais pas de satisfaction, car
l’hygiène est une condition nécessaire mais pas suffisante d’une bonne santé. De même,
l’absence d’insatisfaction dans le travail ne suffit pas pour qu’il y ait satisfaction.
b) les facteurs moteurs ou de satisfaction : sont l’intérêt et le contenu du travail, la
reconnaissance par les autres, les responsabilités, les possibilités de promotion et de
réalisation de soi. Ces facteurs peuvent être une source de satisfaction et sont donc les seuls
réels facteurs de motivation.
Le salaire est à part, car il peut dans certains cas être facteur d’hygiène (minimum
indispensable) et un facteur de satisfaction au-delà d’un certain niveau.
Afin de provoquer la satisfaction, Herzberg était à l’origine des concepts de :
- Élargissement des tâches : il s’agit de regrouper sur un même poste de travail des
tâches élémentaires, auparavant réparties entre plusieurs opérateurs.
- Enrichissement des tâches : il s’agit de restructurer les tâches qui visent à donner un
contenu plus qualifié au travail et à donner plus d’autonomie et de responsabilités aux
opérateurs (remise en cause la division verticale du travail chez Taylor).
Avec ces méthodes d’organisation du travail, il y a eu une amélioration de la satisfaction
des salariés sans réduire la productivité de l’entreprise.
4. Kurt LEWIN (1890-1947) et la dynamique de groupe
Né en Allemagne, ce docteur en philosophie va mener des recherches en psychologie à
l’Université de Berlin avant d’émigrer aux États-Unis. Ses travaux sont essentiellement
consacrés à l’analyse des phénomènes sociaux au sein de groupes humains restreints (« A
dynamic theory of personality » publié en 1935). Il s’intéressera en particulier aux modes
d’expression de l’autorité, du leadership et de leur interaction avec la « dynamique de
groupe ». À partir de recherches réalisées sur des groupes d’enfants chargés de fabriquer des
masques, il va tester trois modes de commandements (modes de leadership) différents :
► le style autoritaire (autocratique) qui répartit et distribue les tâches dans le groupe. Le
leader décide seul et dirige les travaux par ordre ;
► le style dé mocratique qui consulte, émet des suggestions, dialogue et encourage le groupe
avant de décider. Le leader est à l’écoute et participe à la vie de groupe ;
► le style permissif ou «laisser-faire», qui laisse au groupe toute initiative et ne participe
qu’au strict minimum aux activités par ses connaissances et n’intervient pas. Le leader ne
lie aucune relation affective avec le groupe et ce dernier est livré à lui- même. Kurt Lewin,
Lipitt et White démontrent que la productivité est légèrement supérieure avec le leadership
autoritaire, mais que la créativité, l’implication et le «climat» du groupe (satisfaction des
élèves) sont supérieurs avec le leadership démocratique et que le leadership «laisser- faire»
est la plus mauvaise des méthodes, ne permettant pas d’obtenir des résultats satisfaisants.
En termes de résultats, c’est le style dé mocratique qui est le plus performant mais il
soulignera l’importance d’une dynamique de groupe reposant sur le dialogue, la confiance et
la responsabilisation.

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C- L’ÉCOLE DES SYSTÈMES SOCIAUX


Les insuffisances de l’école des relations humaines vont conduire au développement de
nouvelles théories. Cette école se propose d’étudier les facteurs psychosociologiques et décisionnels
influençant l’efficacité de l’entreprise. Les principaux représentants de ce courant théorique sont les
américains D. MAC GREGOR, R. LIKERT, H. SIMON et R. CYERT & J. MARCH.
1- La psychologie « Post-Hawthornienne »
Les psychologues de l’école des relations humaines ont montré l’importance de la
satisfaction du groupe de travail pour l’atteinte des objectifs de l’entreprise sans toutefois tenir
compte du paramètre humain dans toute sa complexité. Les théories de D. MAC GREGOR et
R. LIKERT, notamment, prolongent et affinent cette approche.
1.1. Douglas MAC GREGOR (1906-1964) et les théories X et Y de management
Professeur de psychologie industrielle, D. MAC GREGOR, en examinant les
représentations des chefs d'entreprise, propose deux façons de gérer les Hommes au travail :
a. La théorie X: cette théorie pessimiste et négative est basée sur les postulats suivants :
 L’homme a une aversion innée pour le travail, il cherche donc à l’éviter ;
 Il convient alors de le commander, contrôler son travail et mettre en place des
mesures correctives (il est soumis à des sanctions) ;
 L’individu ordinaire aime se sentir dirigé, il fuit les responsabilités, il a peu
d’ambition et recherche avant tout la sécurité.
Autrement dit, la théorie X propose une hypothèse selon laquelle les hommes n'aiment pas
le travail mais y sont contraints. Ils évitent les re sponsabilités, n'ont pas d'ambition, n'aiment
pas le changement. Ils ne prennent pas d'initiatives et donc, ont besoin de consignes strictes,
de contrôles et de sanctions. L'organisation, dans ces conditions doit être contraignante et
mettre en place des procédures détaillées, une parcellisation des tâches, une sélection rigide et
un management autoritaire.
Critiques de la théorie X: MAC GRÉGOR reproche à cette théorie d’ignorer une partie
des besoins et des motivations de l'homme au travail. Les méthodes de conduite des groupes
fondées sur cette théorie sont peu efficaces, voire inadaptées aux regards des salariés.
b. La théorie Y: cette théorie optimiste et positive est basée sur les postulats suivants :
 Le travail n’est ni agréable ni déplaisant en soi : si l’homme n’aime pas son travail
c’est parce qu’il a été conduit à ne pas l’aimer ;
 L’individu au travail peut s’auto contrôler et se fixer ses propres objectifs ;
 Le salarié dispose d’un capital d’imagination et de créativité ;
 Le salarié ne craint pas les responsabilités, c’est pour lui un moyen d’enrichissement et
d’intérêt au travail lorsqu’il est placé dans des conditions favorables à accepter les
responsabilités mais aussi à les rechercher : droit à l’erreur (indulgence).
La théorie Y est le contraire de la première et suppose que les efforts physiques et
intellectuels nécessaires au travail sont consentis naturellement, que le personnel est capable
d'initiatives, d'auto-contrôle, et d’exercer à un niveau élevé (l’imagination, la créativité,
l’ingéniosité). L'organisation, dans ce cas, doit procéder à un regroupement des tâches, la
décentralisation des responsabilités, la délégation. La théorie Y annonce le courant de
l'excellence par la motivation : "amener des gens ordinaires à faire des choses
extraordinaires". Cette théorie, mieux adaptée et mieux acceptée, conduit à un style de
direction dont la tâche essentielle est d’organiser des conditions et des méthodes de travail
pour que le personnel puisse mieux atteindre ses propres buts en orientant se s efforts vers les
objectifs de l’organisation.

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Cours Introduction au Management – ENCG Dakhla Pr H. AMAAZOUL

1.2. Rensis LIKERT (1903-1981) et les quatre styles de leadership


Professeur de psychologie industrielle à l’Université du Michigan aux États-Unis, R. LIKERT,
dans le prolongement des travaux d’E. MAYO et de K. LEWIN, s’interroge sur les facteurs qui
expliquent les différences de résultats entre des organisations similaires au plan des structures, du
process, des moyens et des technologies. Il va mener des recherches sur les comportements au
travail. Après avoir réalisé une enquête à l’aide de questionnaires auprès de directeurs de
compagnies, explique que les différences dans leurs résultats résultent de leur type de
management. Il en distingue quatre :
a) Le style autoritaire exploiteur (despotique)
C’est un management par la peur, les menaces et les sanctions.
b) Le style autoritaire paternaliste (bienveillant)
C’est le management de la «carotte et du bâton» qui infantilise les subordonnés à la recherche
d’une récompense. Les subordonnés remontent les informations qui plaisent au chef.
c) Le style consultatif
Ce management implique les subordonnés qui sont consultés, mais qui ont peu d’influence
sur les décisions.
d) Le style participatif
Ce management fixe les objectifs et s’appuie sur le travail du groupe avant de prendre des
décisions. Il repose sur :
– un rapport de coopération entre les membres ;
– une prise de décision et de contrôle par le groupe ;
– la détermination d’objectifs au sein du groupe. Ce mode de management est recommandé par
Rensis Likert. Il favorise la structure d’organisation matricielle permettant de gérer des projets.
Types 1. Autoritaire 2. Autoritaire
exploi teur paternaliste 3. Consultatif 4. Participati f
Caractéristi ques
Confi ance des Grande confiance
responsables en leurs Confiance mais pas totale,
subordonnés condescendante, souhaite se Confiance absolue à
Aucune relation maître - préserver le tous égards
serviteur contrôle des
décisions
Système de Craintes, Réco mpenses
Réco mpenses et Réco mpenses,
moti vation menaces, économiques par un
sanctions, éventuellement éventuellement système de
sanctions réelles sanctions, et une
éventuellement ou possibles certaine imp lication rémunération fondé sur
récompenses la participation
Attitude du personnel Parfo is hostile,
Généralement
à l'égard des objectifs parfois Favorable Extrêmement favorable
de l'organisati on hostile favorable
Es pri t d'équi pe Élevé dans toute
Nul faible Encouragé l'organisation
Communication Élevée tant entre les
interne : i mportance, Relativement faible, individus qu'entre les
Très faible, Faible, surtout
sens descendante descendante ascendante et groupes, ascendante,
descendante descendante,
horizontale
Ni veau de prise de Au sommet de Au sommet et Au sommet et au x L'ensemble de
décision aux échelons échelons
l'organisation l'organisation
subalternes subalternes
Partici pation Aucune Suggestions Consultation large Participation très large
Producti vité Assez bonne à
Médiocre bonne Bonne Excellente
Absentéisme et
rotati on du personnel Élevés Assez élevés Moyens Faibles

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Likert établit que le type de management participatif par groupe (les décisions sont prises
par le groupe pour fixer les objectifs et régler les conflits) est le plus efficace. À l'intérieur de
ce système, les individus sont motivés et ont des attitudes positives face à la direction. Il en
résulte une augmentation de la satisfaction, ainsi qu'une diminution du taux d'absentéisme et
du taux de roulement du personnel.
2. La théorie de la décision :
La notion de "prise de décision" a de tous temps fasciné les conseils en organisation : Quand,
comment, de quelle manière ...? Les économistes également se sont posés la question de savoir si
les choix exprimés à la majorité étaient optimaux : peut-on avoir seul raison contre la multitude ?
C'est dans cet esprit que s'inscrivent les travaux de SIMON, CYERT et MARCH.
2.1. H. A. SIMON (1916-2001) et la rationalité limitée :
Professeur d’administration et de psychologie à l’Université de Pittisburg, Herbert
Alexander SIMON (qui obtiendra le prix Nobel d’économie en 1978) va s’opposer au postulat
de la rationalité parfaite (illimitée) et proposer le concept de « rationalité limitée » dans son
ouvrage « Administrative behavior, a study of decision » (1945). "L'homme administratif" de
SIMON se distingue de "l'homo economicus", car il ne maximise pas, économiquement, son
utilité, il ne connaît pas tous les paramètres indispensables à la prise de position rationnelle, et
il n'a pas une fonction de préférence stable et durable.
Les classiques considéraient l’entreprise comme un ensemble d’activités composées de
processus stables. L’homme y occupe une place accessoire. Le dirigeant commande et le salarié
obéit. Pour SIMON, l’entreprise est principalement un lieu de problèmes, un lieu de décisions
individuelles. Pour lui, toute analyse de l’organisation passe par l’étude des choix individuels. Il
s’efforce d’analyser les décisions dans leur adaptation quant aux objectifs visés.
a- Le processus de décision :
Les décisions prises relevant d’un processus rationnel, H. SIMON va tenter d’en dégager
une logique procédurale qui suivra la mécanique suivante (Modèle IMC) :
- I Intelligence : processus de réflexion qui délimite le problème et qui situe les éléments
et facteurs à prendre en compte (phase de perception et d’identification du problème).
- M Modélisation : identification et évaluation des solutions alternatives envisageables
(phase de conception des solutions).
- C Choix : sélection, hiérarchisation des solutions et choix de la première solution
satisfaisante (phase de sélection de la meilleure solution).
b- Les limites de la rationalité
Le but de la théorie dite "de la rationalité limitée" est donc de mettre en lumière les limites
pratiques de la rationalité humaine et de s'efforcer de trouver les moyens (entraînement,
formation, adhésion à de nouvelles valeurs) de repousser ces limites.
Herbert SIMON a mis en évidence les limites de la rationalité des décisions :
► L’environnement est trop complexe pour être appréhendé dans sa globalité ;
► La connaissance des conséquences d’une décision est toujours partielle ;
► Il est difficile d’évaluer les conséquences futures d’une décision ;
► Souvent un individu, confronté à un choix, construit un modèle simplifié de la réalité
en se référant à sa propre expérience passée ;
► L’individu cherche à adopter une solution qui lui apporte un niveau minimum de
satisfaction et non pas une solution optimale ;
► La rationalité d’un individu est limitée faute de temps, faute de capacité, faute
d’informations.
► Dans son processus de décision, l’individu est fortement influencé par des émotions
et des événements extérieurs (professionnels ou privés), étrangers à la décision qu'il
doit prendre rationnellement.

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c- Types de décisions
En expliquant comment son analyse allait servir aux entreprises, Herbert SIMON a distingué
deux types de décisions :
► Décisions programmables : relatives aux procédures répétitives et routinières
(Exemple : le traitement des commandes).
► Décisions non programmables : qui sont du ressort des responsables de l’entreprise
et relatives aux décisions politiques uniques pour lesquelles des problèmes non
formalisés ou de grande importance sont à résoudre (Exemple : lancement d’un
nouveau produit ou campagne de publicité).
2.2. R. CYERT (1921 ...) et J. MARCH (1928 ...) et la théorie comportementale :
Dans le prolongement de la réflexion d’Herbert SIMON, Richard CYERT et James
MARCH « A behavioral theory of the firm » (1963), se sont efforcés de donner un caractère
opératoire à ses idées. Ils décrivent toutes les organisations comme des processus dynamiques
et continus de prises de décisions. Ils remarquent que l'entreprise est "un groupe de
participants aux demandes disparates", bien que tous aient, in fine, intérêt à la bonne marche
du système. Il existe donc des négociations entre coalitions qui conduisent aux prises de
décision. Donc les buts poursuivis ne sont pas rationnels, mais représentent le meilleur
compromis possible. Ainsi, selon eux, la théorie du comportement de la firme peut être
résumée en quatre concepts fondamentaux :
1. La résolution des conflits : Une entreprise étant composée de coalitions de membres
ayant des buts différents, il est nécessaire de mettre au point des procédures de
résolution des conflits :
► Rationalité locale : chaque unité dans l’entreprise doit s’efforcer de résoudre son
problème pour elle- même à son niveau, à travers la délégation (de décisions) et la
spécialisation dans les buts et les décisions. Cela permet à l’entreprise de passer
d’une situation comportant de nombreux problèmes complexes et imbriqués, de
nombreux buts conflictuels, à une série de problèmes simples et localisés.
► Le traitement séquentiel des problè mes : c'est un traitement des problèmes les uns
après les autres sans chercher à les fusionner.
2. L'élimination de l'incertitude : Une firme cherche à éliminer progressivement les
multitudes d'incertitudes (exemple : le marché) qui l'entourent. Souvent, l'entreprise cherche
à éliminer les incertitudes en négociant avec son environnement.
3. La recherche de la problématique : Il est indispensable de rechercher les vraies causes
des problèmes posés dans l'entreprise sans utiliser de masques (indulgence pour les
"amis" et dénigrement des "ennemis") : Il faut voir les réalités en face.
4. L'apprentissage : Les entreprises adaptent leur comportement dans le temps à partir du
résultat des actions passées. Elles changent leur perception qu'elles ont des choses avec le
temps, et ce qui est vrai aujourd'hui ne sera peut-être pas vrai demain (vision systémique).

Conclusion : L’école des systèmes sociaux a fortement souligné l’importance des


différences perceptives dans l’origine des conflits. L’entreprise est un système social où
nombreux groupes interagissent et où se nouent des conflits de personnes et de groupes. Ces
conflits n’ont pas nécessairement pour origine de mauvaises relations humaines ou une
inadéquation entre les motivations personnelles et les objectifs de l’entreprise. Les conflits les
plus difficiles à résoudre sont dus à des différences dans la perception de l’environnement. En
outre, l’entreprise est considérée comme un lieu de problèmes et un processus dynamiques et
continus de prises de décisions.

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D- L’ÉCOLE SOCIO-TECHNIQUE
Contrairement aux écoles précédentes, l'école socio-technique n'est pas née aux États-Unis
mais en Europe. Si l'histoire de ce courant commence au tout début des années 50, ce n'est
que dans les années 60 qu'il commence à exercer une influence dans le monde du
management. Au début, il sert de cadre de référence aux expériences norvégiennes de
réorganisation et de démocratisation du travail. Toutefois, c'est en Suède que l'école socio-
technique trouve son principal champ d'application ainsi que sa vitrine la plus abo utie : Volvo
(usine de Kalmar). C'est aussi via ses réalisations suédoises que, vers la fin des années 60,
l'approche socio-technique gagne en notoriété dans le reste de l'Europe et aux États-Unis.
Sur le plan théorique, elle est en effet le produit des recherches du Tavistock Institute of
Human Relations de Londres. Parmi les chercheurs attachés à cet institut, Eric Lansdown
TRIST et Frederick Edmund EMERY vont conceptualiser cette approche. Tous deux
psychosociologues, ils se démarquent de leurs prédécesseurs en ne proposant pas une nouvelle
conception du travailleur. C'est en effet en partant de l'organisation qu'ils mènent leurs
réflexions sur l'épanouissement du travailleur. Ils ont travaillé essentiellement dans l'étude du
travail dans les mines de charbon. Toutefois, l’apport du français Hyacinthe DUBREUIL à
cette école ne doit pas être négligé.
1. L’analyse socio-technique (Eric Lansdown TRIST : 1909-1993)
Dans un premier temps, TRIST analyse les conséquences organisationnelles et
psychosociologiques de la mécanisation de l'abattage et du transport du charbon. Auparavant,
le travail était réalisé par de petites équipes bénéficiant d'une large autonomie. Avec la
mécanisation, les équipes s'élargissent et le travail se spécialise, entraînant une différ enciation
entre les mineurs. Si la mécanisation rend le travail physiquement moins pénible, les mineurs
vont cependant réagir négativement aux changements intervenus. Alors que l'ancienne
organisation du travail s'accompagnait d'une forte cohésion sociale, la nouvelle se traduit par
d'importantes tensions et l'absentéisme connaît une augmentation spectaculaire.
Les performances réalisées ne répondant pas aux attentes du management de l'entreprise,
une nouvelle organisation du travail est expérimentée avec l'aide du Tavistock Institute. Il
s'agit du "système composite". Dans celui-ci, les mineurs retrouvent une large autonomie. La
liberté de composer les groupes et de se répartir le travail leur est laissée. Concrètement, ce
nouveau système se traduit par une amélioration substantielle du climat social due notamment
au fait qu'il favorise l'entraide ouvrière en cas de problème. Parallèlement, l'absentéisme
régresse et la productivité s'améliore dans de façon substantielle.
De la première observation, TRIST tire l'idée du système socio-technique, c'est-à-dire de
l'interdépendance entre la dimension technique et sociale d'une organisation. Pour lui, ces deux
dimensions interagissent l'une sur l'autre. Dès lors, l'étude du comportement ne peut se limiter
au poste de travail ou aux caractéristiques intrinsèques des individus, comme le font
respectivement les tenants de l'Organisation Scientifique du Travail et ceux des Relations
humaines. Au contraire, dans la perspective de TRIST, elle implique la prise en compte
conjointe des composantes sociale et technique des organisations. Autrement dit, pour TRIST, il
est impossible d'optimiser le fonctionnement d'une organisation sans optimiser conjointement
ses dimensions sociale et technique.
En outre, les chercheurs du Tavistock Institute utiliseront le cas des charbonnages pour
s'opposer au dogme du déterminisme technologique régnant chez les organisateurs
"scientifiques" du travail. Pour eux, si la technologie exerce une forte pression sur
l'organisation du travail, elle ne la détermine pas pour autant. La mécanisation des mines s'est
en effet accommodée de deux organisations du travail radicalement différentes. Dès lors, pour
l'approche socio-technique, il ne fait pas de doute que les organisateurs du travail disposent

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d'une marge de manœuvre qui peut être mise à profit pour établir un compromis entre les
impératifs sociaux et techniques.
Enfin, aux yeux de l'école socio-technique, l'histoire des charbonnages démontre la
capacité d'auto-régulation des groupes. Dans le système composite 9 , comme on l'a vu,
l'autonomie laissée aux mineurs s'est avérée particulièrement payante. D'une part, elle s'est
traduite par un accroissement de la satisfaction des mineurs. D'autre part, ils ont répondu aux
attentes managériales par une plus grande productivité. Pour l'école socio-technique, le
comportement adopté par les mineurs est la preuve que, contrairement à ce que prétendait
TAYLOR, l'autonomie des collectifs n'est pas une entrave à l'efficacité. Mieux même, par
rapport à la taylorisation du travail résultant de la mécanisation, les mineurs ont fait la
démonstration de la supériorité des groupes semi-autonomes.
2. L’organisation des postes de travail (Frederick Edmund EMERY: 1925-1997)
À partir de 1962, par l'intermédiaire d'EMERY, le Tavistock Institute est associé aux
expériences norvégiennes de réorganisation et de démocratisation du travail. Ces expériences
sont nées d'une volonté commune aux organisations représentatives du patronat et des
travailleurs norvégiens de trouver de no uvelles formes d'organisation du travail répondant à
trois grands impératifs :
1) L'accroissement de la productivité,
2) L'amélioration de la démocratie industrielle,
3) L'amélioration des conditions de travail.
Après une première phase d'enquête, de laquelle émerge l'idée d'assurer l'essor de la
démocratie industrielle à partir des ateliers et non plus des sommets, quatre expériences pilotes
sont menées, de 1964 à 1968, dans des sites appartenant à autant de grandes entreprises.
Ces expériences ne seront pas toutes des succès. Ainsi, à la suite d’une demande ouvrière
de révision de la grille salariale, argumentée par la modification de l'organisation du travail et
les gains de productivité, la première expérience est arrêtée avant son terme.
Si cette réaction ouvrière est en soi riche d'enseignement, les trois autres expériences se
révèlent beaucoup plus positives par rapport à la problématique de la démocratie industrielle.
Ainsi, au sein de l’entreprise NOBO, la réorganisation du travail est le fruit d'une négociation
quasi permanente entre le management de l'entreprise, les syndicats et les ouvriers. En outre,
elle débouche sur l'élection d'un représentant par groupe semi-autonome chargé de discuter,
au sein d'un comité d'usine, des problèmes touchant la gestion de la production. Selon les
chercheurs, placés dans une dynamique d'apprentissage, les ouvriers de cette entreprise
cherchent à étendre leur sphère d'autonomie. Preuve que la démocratie industrielle peut être
efficace, cette expérience se solde par une amélioration de la productivité et du climat social.
Ainsi, EMERY expose ses principes dans l'organisation :
► Le poste doit comprendre des tâches différentes : il faut adjoindre des tâches
principales avec des tâches auxiliaires, alterner des tâches reposantes dans un cycle
de tâches absorbantes.
► Les diverses tâches d’un poste doivent constituer une unité de façon à ce que l’opérateur
comprenne mieux son travail et qu’il fasse preuve de responsabilité et d’initiative.
► Le cycle de travail doit avoir une durée optimale (ni trop courte ni trop longue).
► Une certaine liberté doit être laissée pour la fixation des normes de qualité et de quantité.
► Les résultats du travail doivent être communiqués aux ouvriers.
► Les tâches doivent faire appel à des difficultés valorisantes au regard des autres.

9
Système composite : Il s’agit d’une nouvelle organisation du travail expérimentée avec l'aide du Tavistock
Institute consistant à laisser aux mineurs (travailleurs dans les mines de charbon) la liberté de composer les groupes
et de se répartir le travail entre eux. C’est un système qui favorise l’entraide ouvrière en cas de problème.

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Dans le cas où les tâches ne peuvent pas avoir ces caractéristiques, il faut organiser une
rotation des postes et regrouper ces postes par groupes de telle façon qu’il y ait une unité au
niveau du groupe, que le groupe dispose d’une certaine liberté quant à la fixation des normes,
tel que le travail de groupe permette une mesure des résultats obtenus, d’inclure dans les
tâches du groupe, des tâches auxiliaires (préparation du matériel).
Pour les socio-techniciens, les groupes semi-autonomes10 apparaissent en quelque sorte
comme la seule formule qui permet de concilier la satisfaction du travailleur et la performance
économique. À propos de ces groupes, soulignons qu'ils sont semi-autonomes et non autonomes
comme on peut parfois le lire. Comme le souligne François Petit, "les contraintes de production
exercées par l'organisation demeurent les mêmes; simplement, c'est au groupe, et non plus aux
responsables hiérarchiques, d'ajuster ses objectifs par rapport à elles" (1979).
3. Les groupes autonomes (Hyacinthe DUBREUIL : 1883-1971)
Hyacinthe DUBREUIL est un syndicaliste français a décrit le fonctionnement de groupes
autonomes (cellules de travail disposant de l’autonomie financière et organisationnelle). Ce
type d’organisation consiste à confier la totalité d’un processus technique ou administratif à
un groupe d’ouvriers ou d’employés, sans responsable hiérarchique désigné, le groupe est dès
lors responsable de sa production et doit s’organiser seul. Chaque unité achète les pièces à
l’unité précédente dans le cycle de fabrication et revend à la prochaine unité du cycle.
La création de groupes autonomes 11 favoriserait l'apprentissage de la gestion du travail et
donnerait à l'ouvrier « les moyens d'accomplir son existence sur les trois plans, économique,
intellectuel, et moral, faute de quoi il sera toujours vain d'espérer atteindre la paix sociale »
De 1930 à 1938, H. DUBREUIL siégea au Bureau International du Travail.
Il pensait que "Toute organisation sociale repose sur trois éléments : matériel et
économique (estomac) ; intellectuel (cerveau) ; moral et affectif (cœur). Or, avec le
taylorisme, le plan matériel et économique est l'affaire des syndicats ; le plan intellectuel est
annihilé ; de même, le plan moral et affectif est quasiment ignoré."
CONCLUSION :
Par rapport au passé, l'école socio-technique franchit un pas supplémentaire dans la critique de
l'organisation "scientifique" du travail. Pour elle, même si la technologie a un pouvoir
contraignant, elle ne détermine pas l'organisation du travail. Par la même occasion, elle rejette
également l'approche des relations humaines dont la seule ambition consistait à vouloir aider le
travailleur à supporter l'organisation classique du travail. Pour l'école socio-technique, il faut au
contraire privilégier l'ajustement, le compromis entre la variable technique et la variable sociale
des organisations. Le groupe semi-autonome se trouve à la base du modèle d'efficacité socio-
organisationnelle tel qu'il a été conceptualisé et testé par l'école socio-technique. Nouvelle forme
d'organisation du travail, le groupe semi-autonome intègre la rotation des tâches ainsi que
l'élargissement horizontal et vertical du travail tout en leur donnant une dimension collective et en
mettant l'accent sur les capacités d'autorégulation des collectifs.
Par rapport aux approches antérieures, une des spécificités de la démarche sociotechnique
réside dans son caractère participatif. Comme on l’a vu, la méthodologie socio-technique
accorde une place fondamentale à la négociation entre les différents acteurs : direction,
encadrement, syndicat, ouvrier et expert. Elle témoigne ainsi d'une "confiance" dans les
capacités d'analyse et de compromis entre les intéressés.
10
Groupe semi-autonome : Il s’agit là de constituer un groupe de travailleurs dont les membres sont chargés de
définir eu x mêmes les modalités de travail leur permettant d’atteindre les objectifs fixés par l’entreprise. Ce
mode d’organisation repose sur l’auto-organisation et l’auto-régulation du groupe, puisque le groupe est
responsable collect ivement de la production.
11
Groupe autonome : C’est un groupe, doté d’une autonomie financière et libéré en quelque sorte de la tutelle
directe d’un contremaître ou d’un chef de service, qui élit ses propres chefs d’atelier et accomplit ses tâches sous
sa propre responsabilité collective.

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E- L’ÉCOLE NÉO-CLASSIQUE
Cette école, développée grâce à l'apport de grands praticiens (Chefs d'entrepris es et
consultants dans des grands cabinets de conseil), se situe dans le prolongement de l’école
classique. Son approche est à la fois normative et pragmatique :
 Approche normative : elle consiste à poser des principes de gestion clairs et simples,
praticables et valables pour toute organisation.
 Approche pragmatique : elle est orientée vers l’action pratique et elle repose sur la
recherche de l’efficacité.
Par ailleurs, l’école néo-classique n’a pas échappé à l’influence de l’école des relations
humaines et de celle des systèmes sociaux, influence qui se traduit par une prise de
conscience aiguë du rôle de l’homme dans son milieu et de l’importance des conflits.
Les principaux représentants de cette école furent l’américain A. P. SLOAN, l’autrichien
P. F. DRUCKER, et le français O. GÉLINIER.
1. Alfred Pritchard SLOAN (1875-1966)
Il a passé 45 ans de sa carrière au service de la General Motors Company dont 33 ans comme
Directeur Général, puis il a été nommé Président du Conseil d’Administration (Chairman of the
Board en 1937). Dans son célèbre ouvrage "my years with General Motors" ("mes années à la
General Motors") raconte comment il réussit, progressivement, à diriger son entreprise de passer
d’un stade de constructeur automobiles de taille moyenne au rang d’une des premières entreprises
mondiales en appliquant des principes de décentralisation coordonnée :
 Décentralisation : la décentralisation de l’autorité entraîne initiative, responsabilité et
flexibilité. Les décisions sont proches des problèmes, par conséquent les réponses sont
mieux adaptées aux changements de situation (rapidité). Ainsi, la décentralisation
accroît la réactivité de l'entreprise et a pour corollaires : L'autonomie des décisions
dans les limites définies par la politique générale de l’entreprise ; Un contrôle
périodique des résultats.
 Coordination : parce qu’elle est source d’économie (elle évite les doublons) et
d’efficacité, la coordination est nécessaire. Elle se traduit par la mise en place de
structures sans responsabilité hiérarchique (structures consultatives : comités dans
lesquels sont réunis tous les services concernés). D'où, une uniformisation des
méthodes de gestion : Généralisation des budgets et des standards, centres de profit 12 ;
Centralisation des décisions financières ; Centralisation des informations à l’aide de
l’informatique pour une production rapide des résultats.
En rupture avec le modèle fordiste, qui appliquait les préceptes de l’OST, A. P. Sloan va
chercher à décentraliser l’acte de décision pour renforcer les prises d’initiative et de
responsabilité. Ainsi, chaque décision autonome mais dans le même temps, il convient de
centraliser des fonctions transversales (finances, publicité, etc.) et la Direction Générale ne
doit pas concentrer sa réflexion sur l’exploitation des divisions mais développer des
approches de politique générale.
Contrairement à H. Ford, il pensait que les clients cherchaient la diversité : "une voiture
pour chacun, selon ses moyens et selon ses besoins". Il multiplie les opérations de

12
Les centres de profit sont des entités de gestion autonomes, qui fonctionnent dans le cadre d'une procédure de
planification et de budgétisation. Le responsable du centre de profit doit réaliser un certain chiffre d'affaires et
dégager un certain résultat. Une très large responsabilité lu i est déléguée en matière d'engagement de dépenses,
de politique commerciale et industrielle, voire en mat ière d'investissement. La mise en place de centres de profit
nécessite une comptabilité analytique pointue, permettant d'affecter les coûts et les recettes à chacun d'eux et,
donc, de mesurer leur performance.

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concentration du groupe et les marques proposées aux clients : Chevrolet, Oldsmobile,


Oakland, Pontiac, Buick, Cadillac. Ses réformes relatives au marketing et à la décentralisation
de l’organisation, furent des modèles pour de nombreuses entreprises en croissa nce.
2. Peter Ferdinand DRUCKER (1909-2005)
Né à Vienne en Autriche, il émigra aux USA en 1937 où il devint conseiller en
management de plusieurs grandes compagnies américaines. Avec une approche pragmatique,
il a écrit de nombreux ouvrages 13 depuis 1939. Pour ce praticien « le management est la
fonction essentielle et capitale de notre société ». Il a souligné que le management est un
travail spécifique qui requiert donc savoirs et outils particuliers. Ainsi, il a définit les tâches
majeures du management d’une part, et les rôles qui incombent aux managers d’autre part.
 Tâches majeures du management
► La fixation de la mission et la détermination d’objectifs clairs pour l’organisation. Pour
DRUCKER, l’objectif principal n’est pas la maximisation du profit qu’il perçoit comme
un concept minimal : il doit couvrir les risques de l’activité économique. L’objectif
principal de l’entreprise est de créer une clientèle, les fonctions de base sont donc le
marketing et l’innovation ; le profit est la mesure de la rentabilité de ces fonctions.
► L’établissement d’un travail productif et d’une satisfaction au travail. Pour lui, cela se
réalise à travers l’organisation de la responsabilité des employés (définition de
standards et l’autocontrôle) et par un processus d’apprentissage continu.
 Rôles des managers
DRUCKER définit le manager par les rôles qui lui incombent à savoir, fixe r les objectifs,
analyser et organiser le travail en une structure, motiver et communiquer, mesurer grâce à
des normes et forme r les employés.
En 1954, dans son ouvrage «The Practice of Management», P. DRUCKER a théorisé la
Direction Par Objectifs (DPO ou en anglais MBO : Management By Objectives) : un
système américain des années 60 qui consiste à donner des objectifs à atteindre et non pas des
tâches à accomplir ; on couple cela avec une politique de salaires (primes) et un affichage des
résultats. Il s’agit de motiver et de faire agir l’ensemble des salariés. Ce système de direction
se déroule en six phases : 1) Détermination des buts généraux, 2) Fixation des objectifs
individuels, 3) Action personnelle en vue de les atteindre, 4) contrôle des résultats, 5)
lancement des actions correctives et 6) appréciation des hommes.
3. Octave GÉLINIER (1916-2004)
Ingénieur français, fut directeur général du CEGOS 14 . Gélinier est considéré comme un
pionnier de la pensée managériale en France. Il a posé deux principes pour une plus grande
efficacité : Concurrence et innovation ; Finalité humaine de l’entreprise.
Il a défini deux tâches principales pour la direction générale :
 Définition de la politique générale : choix des buts de l’entreprise à l’aide d’objectifs,
de politiques sectorielles et organisation des moyens de l’entreprises par des
programmes et des budgets ;
 Définition de la structure des responsabilités : il a posé 3 principes :
- Cette structure doit être légère, d'où l'idée de réduire des niveaux hiérarchiques ;
- Minimiser le volume des communications : assurer la communication d’informations
pertinentes ;
- Mettre en place des organes pourvus d’objectifs mesurables.

13
L’ouvrage fondamental de P. F. DRUCKER, publié en 1954, a pou r tit re « The Practice of Management ».
14
CEGOS (Centre d'Étude et de Gestion d'Organisation Scientifique) est un grand cabinet de conseil français.

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Il a notamment travaillé sur la DPPO.


 Direction Participative Par Objectifs (DPPO)
Le système de DPO, inventé par P.F. DRUCKER, a été introduit et amélioré en France dès
le milieu des années 1960 par O. GÉLINIER 15 . La DPPO considère l'entreprise comme un
système d'objectifs. Tous les acteurs de l'unité économique sont cependant associés à la
négociation et à la fixation des objectifs.
Tableau. Comparaison entre DPO et DPPO
La Direction Par Objectifs (DPO) La Direction Participative Par Objectifs (DPPO)
« Peter F. DRUCKER » « Octave GÉLINIER »
- La DPO est une méthode de gestion - La DPPO considère l'entreprise comme un
décentralisée de l'entreprise, adoptée par système d'objectifs. Tous les acteurs de l'unité
les entreprises américaines durant les économique sont cependant associés à la
années 60. négociation et à la fixation des objectifs (il
- Les objectifs sont fixés par la Direction s'agit surtout d'objectifs tactiques).
Générale et ensuite confiés aux différents - Une direction plus souple et plus ouverte aux
responsables. Ceux-ci doivent propositions du personnel.
impérativement les atteindre. Ils peuvent - La DPPO favorise l'intégration et la
toutefois les discuter avec la hiérarchie responsabilisation du personnel autour des
s'ils estiment ne pas avoir tous les objectifs fixés.
moyens pour les réaliser.
- Ceci présente l'avantage de faciliter la
- La DPO permet d'accroître l'efficacité de communication interne et donc créer un climat
l'unité économique et la coordination de "Paix sociale".
entre les différents acteurs.

Selon O. GÉLINIER, les objectifs doivent être quantifiés et datés pour permettre :
- Une délégation réelle de l'autorité et des responsabilités ;
- Une intégration des services ;
- Une définition de la structure adéquate ;
- Une supervision hiérarchique ;
- Une motivation des collaborateurs.
Conscient du rôle de recherche de profit par l'entreprise, O. GÉLINIER n'en négligeait pas
pour autant, la finalité humaine directe. « Aujourd'hui, une entreprise ne peut être en accord avec
son environnement que si elle poursuit explicitement des objectifs d'utilité sociale », ce qui
signifie que l'action commerciale tournée vers l'extérieur par l'adéquation des produits/services
aux aspirations des clients doit être accompagnée d'une cohésion interne grâce à la satisfaction et à
la motivation des salariés d'accomplir ces actions commerciales externes.
4. Synthèse des postulats et principes de l’école néoclassique
Postulats Principes
- Le profit est le facteur essentiel de survie et de - Maximisation du profit.
développement de l’entreprise. - Décentralisation des responsabilités et des
- La prise de décision doit se situer aussi près décisions.
que possible du lieu de l’action. - DPO et DPPO
- Il faut faire coïncider l’objectif de l’entreprise - Contrôle par exception et autocontrôle des
et les objectifs de l’homme et donc s’appuyer unités autonomes.
sur ses motivations positives. - Motivation par la compétitivité.

15
GÉLINIER O. (1968), Direction participative par objectifs, Paris.

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5. Conséquences de ces postulats et principes


Les postulats et principes de l’école néo-classique ont des conséquences sur :
 Les structures : tous ces principes et postulats doivent conduire à mettre en place des
centres autonomes de profit et une structure (départementalisation) par produits.
 Les hommes :
- Nécessité d’assurer une formation des salariés, pour améliorer la prise de décision ;
- Nécessité de mettre en place un système de mesures objectives de résultats ;
- Mise en place d’un système de sanctions-récompenses avec droits à l’erreur ;
- Contrôle des résultats à l’aide d’analyse des écarts, de ratios.
 Les objectifs : définition d’objectifs principaux et secondaires. Autrement dit, ils
doivent être clairement définis au niveau opérationnel et être hiérarchisés.

6. Limites de l’école néo-classique


Cette école a des aspects positifs à travers sa simplicité, son réalisme, son efficacité. Les
limites tiennent à la complexité des entreprises et des marchés (la mondialisation, les
mouvements de taille des entreprises, l’instabilité de l’environnement, l'évolution rapide des
technologies et la complexité de ces technologies…).
Bruno LUSSATO 16 a énoncé cinq limites concernant l'école néo-classique :
► La compétitivité des grandes entreprises échappe en partie aux concepts des
théories néo-classiques ;
► Les "recettes" tirées de l'expérience passée ne sont pas toujours réutilisables ou
transposables ;
► L'application sans souplesse de maximisation du profit est source de déboires.
D'où, l'intérêt de la création de valeur ;
► Un régime de tension permanente et l'impression d'être jugé constamment peuvent
émousser, limiter les capacités créatrices de certains salariés ;
► Une théorie n'est pas toujours irréalisable…

16
LUSSATO B. (1977), Introduction critique aux théories d’organisation, Paris, Dunod.

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