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Fièvre

en zone tropicale

Professeur Fabrice SIMON


Service de pathologie infectieuse et tropicale
Hôpital militaire Laveran - Marseille 13013 - France
simon-f@wanadoo.fr
Dans un petit village d’Afrique de l’ouest

• Salim, 17 ans
• 4ème enfant d’un famille de paysans
• Vaccins BCG, DTP, FJ
• Antécédents : rougeole, accès de fièvre présumés liés
au paludisme, hématurie vers l’âge de 7 ans

• Accès fébrile depuis 4 jours, céphalées, nausées

• Consultation en case de santé communautaire

Que faire ?
Alerte
Les pièges à éviter

• Oublier de chercher la fièvre !!!!

• Approche clinique insuffisante


– Interrogatoire : risques, lieux…
– Examen non dénudé
– Absence de réévaluation clinique

• Cibler uniquement les infections tropicales


– Infections cosmopolites
– Fièvres non infectieuses : thrombose veineuse…

• Méconnaissance des outils diagnostiques

• Infections multiples +++


Les deux pièges qui tuent

• Le tout « paludisme »
– Rater une méningite, une fièvre typhoïde
– Les associations
• Portage + autre infection
• Co-infection

• Le paludisme de sortie
– Toute maladie : intoxication, appendicite…
Trois types de fièvre

• Fièvre aggravative
– Paludisme à P falciparum
– Infections bactériennes d’organe, septicémies
– Amibiase hépatique…
– Tumeurs, maladies inflammatoires

• Fièvre de guérison spontanée sans conséquence


– Infections virales communes

• Fièvre de résolution spontanée mais conséquence


différée
– Paludisme à P ovale, P vivax
– Primo-infection VIH, primo-infection bilharzienne
– Fièvre Q, borréliose à tiques
1° - Urgence ?

2° - Maladie contagieuse ?

3° - Cosmopolite ou tropicale ?
Urgence ?

APPRECIER LA TOLERANCE DE LA FIEVRE

S. hémodynamiques Paludisme
S. respiratoires Méningite
Forme grave d’une
S. neuropsychiatriques
infection cosmopolite
S. hémorragiques
… Fièvre hémorragique
Terrain sous-jacent Hépatite grave

Conditionnement
Traitement probabiliste
Évacuation
Maladie contagieuse ?

MESURES D’ISOLEMENT

Rougeole
Tuberculose
Fièvre typhoïde

Fièvre hémorragique ++
Cosmopolite ou tropicale ?

ORIENTATION DIAGNOSTIQUE

Interrogatoire :
 EPIDEMIOLOGIE
Examen clinique :
 SIGNES CLINIQUES
Examens paracliniques :
 SIGNES BIOLOGIQUES
AMERIQUE AFRIQUE ASIE
Paludisme + +++ +
Fièvre typhoïde + ++ (Nord) +++
Amibiase + +++ ++
Hépatite A + ++ ++
Dengue +++ + +++
Bilharziose + +++ +
MST – VIH + ++ +
Rickettsioses + ++ +
Paludisme

Plasmodium falciparum Zone tropicale (Afrique +++)

Plasmodium vivax Afrique du Nord


Afrique de l’Est
Asie
Amérique Centrale et du Sud

Plasmodium ovale Afrique intertropicale

Plasmodium malariae Idem Plasmodium falciparum


mais rare
Endémie du paludisme
Cadre clinique


• Fièvre aiguë / Fièvre prolongée (type)

• Fièvre nue / Fièvre accompagnée


Fièvre nue, analyse clinique
Paludisme (invasion),
Paludisme (invasion),
En plateau typhoïde, fièvre Q,
fièvre typhoïde, fièvre Q,
amibiase hépatique
amibiase hépatique

Ondulante Brucellose, abcès profond

Récurrente Borréliose africaine

Rythmée Paludisme

Leishmaniose viscérale,
Anarchique
ou rémittente trypanosomose (1ère phase)
ICTERE

DIARRHEE SPLENOMEGALIE

ADENOPATHIES FIEVRE EXANTHEME

HEMORRAGIES
HEPATOMEGALIE

SIGNES
NEURO-PSYCHIQUES
DIARRHEE

Salmonelloses
Shigelloses
Campylobactériose

Virales (rotavirus)
SIDA

Paludisme
ICTERE

Paludisme

Leptospirose

Fièvre jaune

Hépatites virales
SPLENOMEGALIE

Paludisme
Typhoïde
Borréliose
Brucellose
Leishmaniose viscérale
Trypanosomose africaine

Hémopathies
ADENOPATHIES

Dengue

VIH-SIDA

Trypanosomose africaine

Tuberculose

Lymphangite filarienne

Lymphomes
HEMORRAGIES

Arboviroses (Dengue)

Typhoïde

Leptospirose

Fièvres hémorragiques virales

Hépatites virales

Leucémies
HEPATOMEGALIE

Amoebose hépatique

Bilharziose

Paludisme

Leishmaniose

Cirrhoses
SIGNES NEURO-PSYCHIQUES
Paludisme

Méningites et méningo-encéphalites

Typhoïde

VIH-SIDA

Leptospirose

Trypanosomiase africaine
EXANTHEME
Rickettsioses

Arboviroses

Typhoïde

Primo-infection VIH

Leptospirose

Syphilis secondaire
Tout accès fébrile, tout état patraque
survenant en zone d’endémie palustre
est un accès palustre
jusqu’à preuve du contraire

Arguments épidémiologiques + cliniques +


biologiques
Bilan d’une fièvre

• BU
• Recherche de paludisme ++++
• NFS
• Transaminases
• Indication exceptionnelle des sérologies

• Radiographie pulmonaire
• +/- Échographie abdominale
Résultat à obtenir en urgence
Recherche de paludisme

• Méthodes directes
Goutte épaisse Frottis sanguin

20 HPM 100 à 200 HPM


Le paludisme
Paludisme, diagnostic biologique

Frottis sanguin et goutte épaisse


Présence ? espèce(s) ? parasitémie si P.f ?

Si suspicion clinique
avec 1ère recherche négative
 refaire l’examen ou traiter +++
Paludisme, tests diagnostiques rapides

• Recherches d’antigènes spécifiques


– Spécificité pour P. falciparum
– Positivité persistante après traitement
– Mauvaise sensibilité pour P. ovale

– Utilisés dans certaines régions


– Usage communautaire

– Pertinence variable selon le niveau d’endémie


ANEMIE

LEUCONEUTROPENIE LEUCOPOLYNUCLEOSE

FIEVRE

THROMBOPENIE
HYPEREOSINOPHILIE

LYMPHOMONOCYTOSE
LEUCONEUTROPENIE

Paludisme

Typhoïde

Viroses aiguës

Brucellose

Leishmaniose viscérale
ANEMIE

Paludisme

Leishmaniose viscérale

Toute infection chronique


LEUCOPOLYNUCLEOSE

Infections bactériennes pyogènes

Amibiase hépatique

Leptospirose
THROMBOPENIE

Paludisme

Arboviroses

Leptospirose (PN )

Leishmaniose virale
LYMPHOMONOCYTOSE

Primo-infection virale

Toxoplasmose

Trypanosomose
HYPEREOSINOPHILIE

Association fortuite helminthiose et autre infection +++

Helminthiose en phase invasive


Sérologies

Bactériennes Parasitaires Virales

Rickettsioses Amibiase (latex) Hépatites


Brucellose Bilharziose VIH (AgP24)
Leptospirose Arboviroses
Fièvre Q (<J5, >J5)
(Fièvre typhoïde) (paludisme)

En urgence ?
Amibiase latex
MNI-test
VIH si sida
Fièvre nue précoce

NFS + recherche de paludisme n°1, CRP,


transaminases, BU, hémocultures

Paludisme Hyperleucocytose
Infection pyogène,
amibiase hépatique
Hémogramme normal, ou leucopénie et/ou thrombopénie
Paludisme pauciparasitaire ?
virose ? bactérie intracellulaire ?


Paludisme Infections d’organe
Bactérioses
(seul ?) Amibiase hépatique

Fièvres « Plus » Fièvres « nues »


+/- leucopénie
Fièvre + éruption (rash, escarre)
+/- thrombopénie
Fièvre + atteinte cérébrale
Fièvre typhoïde, borréliose,
Fièvre + ictère
arboviroses…
Fièvre + éosinophilie
Paludisme
Infections patentes d’organe
Amibiase hépatique
Rickettsiose africaine à tiques Typhoïde
Borréliose Foyers profonds
SIDA PIVIH,
H4 autres primo-infections
Typhoïde
(virales, toxoplasmose)
Foyers profonds
Paludisme pauciparasitémique
PIVIH et autres primo-infections
(virales, toxoplasmose)
J4

Rickettsioses
J7 Bilharziose d’invasion

Maladies inflammatoires
J21 Aucun diagnostic
Le paludisme
Paludisme non compliqué
P. falciparum, P. vivax, P. ovale, P. malariae, P. knowlesi

Maladie parasitaire
érythrocytopathie acquise
 anémie hémolytique fébrile

Paludisme grave
= P. falciparum

Maladie parasitaire
érythrocytopathie acquise
 anémie hémolytique fébrile
(à part P. knolewsi)
Maladie dysimmunitaire
orage cytokinique
« endothélite » capillaire profonde
 défaillance d’organes nobles
Évolution clinique naturelle

MORT

R
E
Formes A S
typiques, Formes
Formes N é
1ers signes trompeuses sévères I q
ou
négligées graves M u
e
pré-perniciosité A
T l
(accès pernicieux,
I l
neuropaludisme)
O e
N s
J0 J2 J4 J6
Défaillance multiviscérale
+/- SDRAA
+/- Collapsus
+/- I. rénale aiguë

Neuropaludisme
Co-morbidité

Décompensation
d’une tare
Stratégie pour le paludisme

1 – Évoquer le paludisme de principe

2 – Affirmer le paludisme en urgence

3 – P. falciparum ou non ?

4 – Évaluation du patient (gravité, sévérité, terrain)

5 – Infection associée ?

6 – Thérapeutique en urgence
Traitement
du paludisme
=
Urgence
Cibler P. falciparum
P. falciparum

>=1 critère de gravité


Terrain fragile Nausées,
 vomissements
Gravité

Urgence thérapeutique parentérale


Critères de décision thérapeutique

• P. falciparum prouvé ou doute : traitement identique


• Possibilité de résistance à la quinine ?

• Gravité clinique et biologique, sévérité (retard)


• Traitement antérieur (= échec)
• Terrain Transfert ?
• Troubles digestifs ++

• Accès immédiat au traitement efficace


• Possibilité d’hospitalisation ou non APPLIQUER LES
SCHEMAS
NATIONAUX
La jungle des médicaments antipaludiques

• Les historiques
• Les modernes
• Les médicaments commerciaux
• Les génériques
• Les périmés
• Les contrefaçons
• …
CHLOROQUINE AMODIAQUINE DIHYDRO- ARTEMETHER
ARTEMISININE
Aralen® Amodiaquine Bas ® Amether® Artemedine®
Alexin®
Chloroquine® Amodiaquine Ccp ®
Artemax® Artemotil® Artemos®
Ciphaquin® Amodiaquine Qt ®
Cotecxin® Artenam® Artésiane®
Malaquin® Amoquin ®
Malaxin® Ather® Artemether®
Palutop® Amovax ®
Odytazomoka® Camoquin ® ARTEMISININE Gvither forte kit® Larither®
Arte-Biosorp®
Malaviron® Camoren ® Paluther® G-vither®
Maxipal® Flavoquine ® ARTEETHER Capsulae Artemetheri®
Artecef®
Quinnox® QUININE E mal® Injectio artemetheri®
Nuquine® Arsiquinoforme®
Résochine® Malarix® Paluject® ASSOCIATIONS A BASE DE DERIVES DE
Siroquine® L’ARTEMISININE
Quinimax® Quininat®
Artekin® Arterakine® Duo cotecxin® Eurartekin®
Nivaquine® Quinine chl. Lafran® Riamet® Coartem® Co-Artesiane® Lufanter®
MEFLOQUINE Quinine sulf. Lafran ® Arsucam® Arsudar® Artequin® ASAQ Winthrop®
Lariam® Quinoforme® Co-Arinate® Coarsucam® Combisunat® Falcimon
Mephaquin® Surquina® kit® Larimal® Malarin®
Mevax®
ARTESUNATE PYRIMETHAMINE-SULFADOXINE
PYRONARIDINE Arenax® Arinate® Amalar® Antimal® Combimal® Fansidar®
Malaridine ® Arsumax® Artenex®
Fralomin® Malanil® Malareich® Malastop®
Lonaiding ® Artesunate® Artesunat®
Arthesis® Askasunate® Maloxine® Maxinfen® Melofan® Sulfaxine®
HALOFANTRINE ArsunateDenk® Vitadar® Fansimef®
Halfan®
Haftrine® G-sunate® Lever®
Malartin® Plasmotrim®

Indications thérapeutiques, Afrique

• Accès grave
– parentéral
– artésunate IV ou quinine IV +dose de charge (adulte)
Apport
de
• Accès simple, avec trouble digestif glucosé
– parentéral et relais oral rapide
– quinine IV

• Accès simple, sans aucun trouble digestif, ni terrain


– traitement oral
– association à base de dérivés de l’artémisinine ++++
Protocoles du traitement par quinine

• Accès simple
• traitement oral ou parentéral (IV ++)
• 8 mg/kg toutes les 8 h, pendant 7 jours

• Accès grave
• traitement toujours parentéral (IV ++)
• dose de charge de 16 mg/kg en 4 h,
(en l’absence de CI : traitement préalable par
quinine, méfloquine ou halofantrine, QTc >25%)
• puis 4 heures plus tard, relais par 8 mg/kg
toutes les 8h, pendant 7 jours
Les ACT, en pratique

• Principe de l’association :
2,5 à 4 mg/kg/j d’un dérivé de l’artémisinine x 3 j
+ une molécule à demi-vie plus longue
- luméfantrine
ou amodiaquine
ou méfloquine
ou sulfadoxine-pyriméthamine (mais…)
(autres : chlorproguanil-dapsone, atovaquone-
proguanil, pyronaridine, piperaquine)
Paludisme non compliqué, non vomisseur

Exemple :
amodiaquine-artésunate = ASAQ

1 comprimé par jour pendant 3 jours chez le


nourrisson, le petit enfant et l’enfant

 2 comprimés par jour en une prise pendant 3 jours


chez l’adolescent et l’adulte
Traitements déconseillés en Afrique
dans le paludisme à P. f. de l’adulte

• Chloroquine (NIVAQUINE ®)
• Sulfadoxine – pyriméthamine (FANSIDAR ®) +++

• Dérivés de l’artémisinine en monothérapie +++++

• Médicaments de qualité incertaine


Fièvre nue, autres causes
Fièvre typhoïde
Borréliose africaine à tiques
Arboviroses
La fièvre typhoïde
Borréliose à tiques, épidémiologie
Borréliose à tiques, clinique

• Fièvre à 39-40°C, frissons, évolution rémittente, myalgies,


régression spontanée en quelques jours

• Récidives fébriles de quelques jours tous les 7j


• SM accordéon

• Céphalées avec possible méningite à liquide clair


Borréliose à tiques, incidence
Borréliose à tiques, clinique
Borréliose à tiques, diagnostic

Frottis sanguin et goutte épaisse

Pas de place pour la sérologie sur le terrain !


Borréliose à tiques, traitement
• Doxycycline : 100 mg x2j x 5- 10j

• En cas de contre-indication (<8 ans, grossesse)


- érythromycine 500mg x 4/j x 10 j

• En cas de méningite :
- Doxycycline
- Ceftriaxone

• Inefficaces :
- fluroquinolone, rifampicine, sulfamide, métronidazole
Principales arboviroses africaines

Flavivirus Alphavirus Bunyaviridae


fièvre jaune chikungunya fièvre de la Vallée du Rift
dengue O'Nyong-nyong fièvre de Crimée-Congo
West-Nile
Fièvre nue, traitements d’épreuve ?

- Antipaludique : ACT ou quinine

- Puis en cas d’échec, discuter C3G et/ou doxycycline


Suivi clinique

• Efficacité & tolérance

• Réévaluation régulière
– Apparition d’un signe nouveau
– Examens complémentaires

• Si échec, transfert vers secteur hospitalier

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