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pHarMaColoGie
Effet placebo
et médicaments placebo
I-11-168
Dr Mohamed-Rida BENISSA
Interne
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Effet p lac ebo et mé d icament s pla ce bo I-11-168
effet placebo
et médicaments placebo
Objectifs :
– Expliquer l’importance de l’effet placebo en pratique médicale
– Argumenter l’utilisation des médicaments placebo en recherche
clinique et en pratique médicale.
INTRODUCTION
En recherche clinique, la place du placebo est acquise à toutes les phases de l’évaluation d’un
nouveau traitement : les modalités techniques de son emploi sont claires et sa nécessité
méthodologique reconnue par les experts et les autorités réglementaires d’enregistrement des
médicaments. En revanche, en pratique médicale, l’effet placebo est difficilement évaluable,
celui-ci étant estimé responsable d’une amélioration clinique chez près de 30% des patients
traités avec cette substance médicamenteuse sans action pharmacologique sur la pathologie
traitée.
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l Sortis de leur contexte (l’évaluation de l’efficacité d’un traitement versus placebo), de nom-
breux facteurs peuvent donner l’impression d’un effet placebo :
– Le plus important est lié à l’évolution naturelle de la maladie :
* Guérison spontanée des pathologies aiguës (ex : grippe, otite).
* Rémissions des pathologies chroniques (ex : ulcère, migraine, douleur chronique).
* Plus généralement, ces phénomènes « naturels « font partie d’un phénomène général
purement statistique dit de régression vers la moyenne.
l Il est impossible de prédire avec certitude si un effet placebo surviendra pour un individu
donné à un moment donné. De nombreux facteurs conditionnent l’effet placebo en pratique
médicale et sont susceptibles de le renforcer ou le diminuer. Les plus fréquemment retrouvés
sont ceux en relation avec le médicament, le comportement des soignants, la maladie et le
malade :
– Le médicament : présentation du placebo (nom, taille, prix, taux de remboursement par
l’Assurance Maladie), voie d’administration du placebo (injection > gouttes > comprimés).
On peut observer un effet placebo dose-dépendant, un effet cumulatif voire un état de
dépendance au placebo.
– Le comportement des soignants : relation patient - médecin de confiance, notoriété du
médecin, conviction du médecin concernant l’efficacité thérapeutique du placebo.
– La maladie : pathologie bénigne et psychosomatique plus susceptible de variations, de
rémission ou de guérison spontanée. Dans les essais thérapeutiques, l’effet placebo est d’au-
tant moins marqué qu’il s’agit d’une pathologie grave et que le placebo est administré sur
une longue période.
– Le patient : patient conformiste, forte attente envers le médicament.
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l Le placebo a une place méthodologique indiscutable en recherche clinique. Au cours des dif-
férentes phases des essais cliniques (cf.tableau ci-dessous), seule la comparaison au placebo
permet de s’assurer qu’un médicament à une réelle efficacité pharmacologique et permet de
mesurer l’intérêt thérapeutique d’une nouvelle molécule.
Essais précliniques
Essais de Phase I
l Sur volontaires sains
Essais de Phase II
Dans les études de phase II randomisées, la présence d’un groupe contrôle placebo permet de
démontrer l’effet pharmacologique du traitement étudié et de déterminer la dose minimale
efficace en référence au placebo lors des études de relation dose-effet.
Dans les essais de phase III, l’essai thérapeutique contrôlé contre placebo avec allocation aléa-
toire (randomisation) des patients dans les deux groupes de traitement (placebo ou traitement
à l’étude), en double aveugle (le patient et le médecin ignorent dans quel groupe se trouve le
patient), donne le niveau de preuve le plus élevé de l’efficacité d’un traitement (cf. item n° 3 et
n°169). Il permet aussi la meilleure évaluation de la tolérance clinique et biologique du traite-
ment à l’étude.
l Toutefois, la mise en place d’essais thérapeutiques contrôlés avec un groupe placebo, notam-
ment pour les essais de phase III, pose des problèmes différents selon qu’il existe ou non un
traitement de référence dans la pathologie considérée. Lorsqu’il n’existe pas de vrai traite-
ment de référence ayant une activité thérapeutique clairement démontrée dans la pathologie
considérée, l’essai thérapeutique se doit d’être fait versus placebo, car c’est le seul moyen de
démontrer l’efficacité d’un nouveau traitement.
l Dans le cas où un traitement de référence existerait dans la pathologie étudiée, l’essai théra-
peutique contrôlé contre placebo est controversé, non acceptable éthiquement dans le cadre
de certaines pathologies étudiées:
– Certains prônent son avantage méthodologique et soulignent ses bénéfices en termes
collectifs.
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Contrairement aux essais de supériorité qui mesurent statistiquement le rejet d’une efficacité
identique du traitement actif et du médicament placebo, les essais d’équivalence mesurent le
non-rejet de l’infériorité du traitement actif versus le traitement de référence.
Or cette démarche statistique est beaucoup moins établie que la précédente. De plus, un essai
thérapeutique contre un traitement de référence nécessite l’inclusion d’un nombre de sujets
beaucoup plus important qu’un essai thérapeutique contrôlé contre placebo car la différence
d’efficacité attendue est beaucoup plus petite. Si le nouveau traitement est inefficace voire
toxique, un nombre supérieur de sujets aura été exposé au nouveau traitement dans l’essai
d’équivalence. Enfin, si l’essai conclut à une non-infériorité du traitement actif par rapport au
traitement de référence, cela ne permet pas de conclure directement à une supériorité par rap-
port à un traitement placebo.
– D’autres jugent les essais contre placebo non éthique lorsqu’il existe un traitement de réfé-
rence ayant une activité thérapeutique bien démontrée, dans la mesure où les patients subis-
sent une perte de chance thérapeutique.
Il existe dans chaque pays et à l’échelle européenne un organisme habilité à autoriser la mise
sur le marché des médicaments (l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé
ou AFSSAPS; the European Medicines Agency (EMA) ; the Food and Drug Administration
aux USA).
Ces organismes peuvent requérir des essais contre placebo pour la mise sur le marché d’un nou-
veau traitement, même lorsqu’il existe un traitement de référence. Bien que l’agence euro-
péenne du médicament ait récemment souligné sa prise en compte des recommandations
issues de la dernière version de la Déclaration d’Helsinki concernant l’utilisation d’un placebo,
elle note cependant que l’évaluation de la nécessité d’un essai contre placebo ou traitement de
référence doit se faire au cas par cas.
l Emanuel et Miller (2001) proposent des critères pour guider le choix entre un essai thérapeu-
tique contrôlé contre placebo ou un traitement de référence existant et dont l’efficacité a été
démontrée:
– D’abord les arguments en faveur d’un essai contrôlé contre placebo doivent être solides :
* Effet placebo important.
* Pathologie susceptible de variations, de rémission ou de guérison spontanée.
* Traitement de référence de faible efficacité ou comportant des effets secondaires impor-
tants.
* Faible prévalence de la pathologie rendant un essai d’équivalence impossible.
– Si ces arguments sont remplis, les risques associés au placebo sont évalués par rapport au
traitement existant, en fonction :
* Du risque de décès.
* Du risque d’invalidité permanente.
* Du risque d’inconfort ou de douleurs sévères et réversibles (par exemple nausées et
vomissements sous chimiothérapie).
l En contrepoint des querelles éthiques sur le placebo, le nombre d’essais cliniques randomisés
en double-aveugle contre placebo a augmenté.
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tement et ne pas laisser le malade sans traitement, ou lors d’une période de sevrage intermé-
diaire («wash-out») d’un essai croisé (« cross-over »). Cette période de sevrage sous placebo
permet d’étudier l’état de base des malades, leur stabilité et la comparabilité des groupes.
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