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MAT361 (Yvan Martel) 1.

5 Produit d’espaces métriques compacts, preuve


Cours 2 : Compacité, connexité, complétude Soit ((x1 (n), x2 (n))n>0 une suite dans X1 × X2 .
— La compacité de (X1 , d1 ) permet d’extraire de la suite
1. Compacité (x1 (n))n>0 , une sous-suite (x1 (ϕ(n)))n>0 qui converge
vers x1 dans X1 .
1.1 Espaces métriques compacts — La compacité de (X2 , d2 ) permet d’extraire de la suite
(x2 (ϕ(n)))n>0 , une sous-suite (x2 (ϕ(ψ(n))))n>0 qui
Définition 1.1 Un espace métrique (X, d) est compact si toute
converge vers x2 dans X2 .
suite de points de X a au moins une valeur d’adhérence.
En particulier, (x1 , x2 ) est une valeur d’adhérence de la suite
Remarque : Une partie Y d’un espace métrique (X, d) est ((x1 (n), x2 (n)))n>0 .
dite compacte si l’espace métrique (Y, d) est compact (ici, d
Remarque : Par récurrence, la propriété s’entend au produit
désigne en fait la restriction de d à Y ×Y , dont on vérifie aisé-
de k espaces métriques compacts, pour tout k > 2.
ment qu’elle est une distance sur Y ).
À la différence de la propriété d’être un ouvert (ou un fermé)
qui dépend de l’espace métrique ambiant X, la propriété de 1.6 Compacité de [0, 1]
compacité est intrinsèque, c’est-à-dire qu’elle ne dépend que
de (Y, d). Théorème 1.1 (Bolzano-Weierstrass) Muni de la topologie
usuelle, l’intervalle [0, 1] est compact.
1.2 Images continues d’espaces compacts
Preuve. Soit (xn )n>0 une suite de [0, 1]. On définit deux
Proposition 1.1 Soient (X1 , d1 ), (X2 , d2 ) des espaces mé- suites (a ) , (b )
n n>0 n n>0 en posant a0 = 0, b0 = 1, et ensuite par
triques. Soit f : X1 → X2 une application continue. Si X1 est récurrence sur n ≥ 0 :
compact, alors f (X1 ), l’image de X1 par f , est une partie com-
— Si l’ensemble des k ≥ 0 tels que an ≤ xk ≤ 21 (an + bn ) est
pacte de X2 .
infini, alors on choisit an+1 = an et bn+1 = 21 (an + bn ).
Preuve. Soit (yn )n>0 une suite de f (X1 ) : pour tout n > 0, — Sinon, on choisit an+1 = 21 (an + bn ) et bn+1 = bn .
il existe xn ∈ X1 tel que yn = f (xn ). Comme X1 est compact, il On observe que les suites (a )
n n>0 et (bn )n>0 sont adjacentes.
existe une suite extraite de (xϕ(n) )n>0 qui converge vers une li- En effet, la suite (a )
n n>0 est croissante, la suite (bn )n>0 est dé-
mite a ∈ X1 . Comme f est continue, la suite (yϕ(n) )n> converge croissante et on a b − a = 2−n .
n n
vers f (a) ∈ f (X1 ). Par le théorème des suites adjacentes, les suites (an )n>0 et
On a bien montré la propriété de compacité pour f (X1 ). (bn )n>0 convergent vers une même limite x ∈ [0, 1].

1.3 Parties fermées et compacité


1.7 Suite de la preuve de la compacité de [0, 1]
Proposition 1.2 Soit Y une partie d’un espace métrique (X, d).
— Si (Y, d) est compacte, alors Y est fermée dans (X, d). Il nous reste à montrer que x est une valeur d’adhérence de
— Si (X, d) est compact et Y est fermée dans (X, d), alors la suite (xn )n>0 .
(Y, d) est compacte. Par construction des suites (an )n>0 et (bn )n>0 , l’ensemble
Preuve. On utilise la caractérisation séquentielle des fermés. des indices k tels que an 6 xk 6 bn est infini. Par récurrence
Considérons une suite de points de Y qui converge dans X. sur n, on peut donc construire une application ϕ : N → N, stric-
Si Y est compacte, cette suite a une valeur d’adhérence dans Y . tement croissante, telle que pour tout n > 0, an 6 xϕ(n) 6 bn .
Ainsi, sa limite est dans Y , ce qui prouve que Y est fermée. Fixons ε > 0. Par définition de la limite, il existe n0 > 0 tel
Pour la deuxième propriété, on suppose que X est compact que x − ε 6 an 6 bn 6 x + ε pour tout n > n0 . Ainsi, pour de
et Y est fermée dans X. Soit (yn )n> une suite de points de Y . tels n, x − ε 6 xϕ(n) 6 x + ε, ce qui prouve la convergence de la
Comme X est compact, cette suite possède une suite extraite suite (xϕ(n) )n>0 vers x.
qui converge dans X. Comme Y est fermée, cette suite extraite
converge dans Y , ce qui prouve que Y est compacte.
1.8 Compacts de (RN , k · k∞ )
1.4 Produit d’espaces métriques compacts Proposition 1.4 On munit RN de la norme k·k∞ . Une partie de
Soient (X1 , d1 ), (X2 , d2 ) deux espaces métriques. On munit RN est compacte si, et seulement si, elle est fermée et bornée.
l’espace produit X1 × X2 de la distance somme :
 Remarque : Une partie Y d’un espace vectoriel normé
Ds (x1 , x2 ), (y1 , y2 ) := d1 (x1 , y1 ) + d2 (x2 , y2 ),
(E, k · k) est bornée, s’il existe R > 0 tel que, pour tout y ∈ Y ,
ou bien de la distance produit (Lipschitz-équivalente à la pré- kyk ≤ R.
cédente) :
 Preuve. Soit Y une partie compacte de (RN , k · k∞ ). Alors,
D p (x1 , x2 ), (y1 , y2 ) := max(d1 (x1 , y1 ), d2 (x2 , y2 )). on sait que Y est fermée par les résultats précédents.
Proposition 1.3 Le produit X1 × X2 de deux espaces métriques Si Y n’était pas bornée, on pourrait construire une suite
compacts (X1 , d1 ) et (X2 , d2 ), muni de la distance produit ou de (yn )n>0 d’éléments de Y telle que kyn k > n. Or une telle suite
la distance somme, est un espace métrique compact. ne peut pas admettre de sous-suite convergente dans RN .

1
1.9 Compacts de (RN , k · k∞ ), suite de la preuve 1.13 Les parties compactes de RN
Réciproquement, commençons par remarquer que pour tout On peut vérifier de façon générale que deux normes équi-
R > 0 l’intervalle [−R, R] est compact, comme image de [0, 1] valentes donnent lieu à la même topologie : cela signifie que
par une fonction affine. De plus, le pavé [−R, R]N est un com- sur un espace vectoriel normé E, muni de deux normes équiva-
pact comme produit d’espaces compacts. lentes N1 et N2 , Y ⊂ E est un ouvert de (E, N1 ), si et seule-
Par définition de k · k∞ , une partie Y de R est bornée si elle ment si, c’est un ouvert de (E, N2 ).
N

est incluse dans le pavé [−R, R]N , pour un certain R > 0. Si de En outre, par définition, les parties bornées dans RN sont les
plus Y est fermée dans RN , c’est aussi une partie fermée du mêmes pour deux normes équivalentes.
compact [−R, R]N , et donc Y est compacte. Par conséquent, l’équivalence de toutes les normes sur RN
implique que le fait d’être fermé ou compact ne dépend pas
1.10 Bornes supérieure et inférieure d’une fonction conti- non plus de la norme choisie.
nue Corollaire 1.1 Pour toute norme, les parties compactes de RN
N
Théorème 1.2 Une fonction continue à valeurs réelles, définie sont les parties fermées et bornées de R .
sur un espace métrique compact (X, d), est bornée et atteint ses
bornes, c’est-à-dire qu’il existe a, b dans X tels que, pour tout 1.14 Équivalence des normes et parties compactes en di-
x ∈ X, f (a) ≤ f (x) ≤ f (b). mension finie
Ces résultats se généralisent de la façon suivante :
Preuve. L’image d’un compact X par une application conti-
— sur un K-espace vectoriel de dimension finie, toutes les
nue est une partie compacte de R, donc une partie fermée et
normes sont équivalentes ;
bornée de R.
— dans un K-espace vectoriel de dimension finie, les par-
En particulier, l’image étant fermée, infX f et supX f appar- ties compactes sont les parties fermées et bornées. (Il
tiennent à l’image de X par f . n’est pas utile de préciser la norme utilisée.)
Remarque. Ces propriétés ne sont pas vraies en dimension
1.11 Équivalence des normes sur RN infinie. Par exemple, on vérifie que la boule unité fermée de
(`∞ (N; K), k · k∞ ) n’est pas compacte. Pour tout n > 0, on dé-
Théorème 1.3 Toutes les normes sur RN sont équivalentes. finit la suite xn := (0, . . . , 0, 1, 0, . . .), avec 1 seule valeur non
nulle, pour l’indice n exactement. On a alors :
Preuve. Il suffit de montrer que toute norme sur RN est équi-
valente à la norme k · k∞ . On note (e1 , . . . , eN ) la base cano- kxn k∞ = 1 et kxn − xm k∞ = 1 si n 6= m.
N N
nique de R et S := {x ∈ R : kxk∞ = 1} la sphère unité de
(RN , k · k∞ ). La suite (xn )n>0 n’admet pas de sous-suite convergente.
Soit N une norme sur RN . Pour x = (x1 , . . . , xN ) ∈ RN , on a
1.15 Continuité automatique d’applications linéaires
N
Proposition 1.5 Si E est un espace vectoriel normé de dimen-
N (x) 6 ∑ |xi | N (ei ) 6 Ckxk∞ ,
i=1
sion finie et F est un espace vectoriel normé, alors toute appli-
cation linéaire de E dans F est continue.
avec C = ∑Ni=1 N (ei ). Ainsi, pour tout x, y ∈ RN ,
Preuve. Soit (e1 , . . . , eN ) une base de E. On définit la norme
suivante sur E : pour x = ∑Ni=1 xi ei ,
|N (x) − N (y)| 6 N (x − y) 6 Ckx − yk∞ ,
kxkE := sup |xi |.
ce qui prouve que N : (RN , k · k∞ ) → (R, | · |) est C- i=1,...,N
lipschitzienne donc continue.
L’inégalité triangulaire et la linéarité de L impliquent :
!
1.12 Équivalence des normes sur RN , fin de la preuve N N
kL(x)kF 6 ∑ |xi | kL(ei )kF 6 ∑ kL(ei )kF
kxkE ,
Comme image réciproque de {1}, fermé de (R, | · |) par l’ap- i=1 i=1
plication continue k · k∞ , S est une partie fermée de RN . Par d’où la continuité de L.
définition, S est aussi une partie bornée, donc c’est une partie
compacte.
1.16 Compacité et recouvrements
Par le théorème qui précède, N atteint ses bornes sur S : il
existe donc a ∈ S tel que pour tout x ∈ S, N (x) > N (a) > 0. Définition 1.2 Une famille (Ai )i∈I de parties d’un ensemble X
est un recouvrement de X si ∪i∈I Ai = X.
Pour tout x non nul dans RN , par homogénéité de la norme Un sous-recouvrement est une sous-famille (A j ) j∈J , J ⊂ I
et kxkx ∞ ∈ S, on a telle que ∪ j∈J A j = X.
 
x Théorème 1.4 (La preuve est laissée en exercice) Soit
N (x) = kxk∞ N > N (a)kxk∞ . (Ui )i∈I un recouvrement par parties ouvertes d’un espace
kxk∞
métrique compact (X, d). Alors, il existe r > 0 tel que toute
On a bien prouvé que les normes N et k · k∞ sont équivalentes. boule ouverte de rayon r soit contenue dans l’un des Ui .

2
Proposition 1.6 Soient (X, d) un espace métrique compact, et 2.2 Connexité et applications continues
r > 0. Il existe un recouvrement fini de X par des boules ou-
Proposition 2.1 Un espace métrique (X, d) est connexe si, et
vertes de rayon r.
seulement si, toute application continue sur X à valeurs dans
Preuve. Sinon, on pourrait construire une suite (xn )n>0 de X tel {0, 1} est constante.
que d(xn , xm ) > r pour tout n 6= m. Une telle suite ne possède La preuve est laissée en exercice.
pas de valeur d’adhérence.
Proposition 2.2 Soient (X1 , d1 ) et (X2 , d2 ) des espaces mé-
1.17 Compacité et recouvrements, suite triques. On suppose que (X1 , d1 ) est connexe. Soit f : X1 → X2
une application continue. Alors, f (X1 ) est connexe.
Théorème 1.5 Un espace métrique (X, d) est compact si, et
seulement si tout recouvrement de X par parties ouvertes pos- Preuve. Si f (X1 ) n’est pas connexe, il existe une applica-
sède un sous-recouvrement fini. tion continue non constante g de f (X1 ) dans {0, 1}. L’applica-
tion composée g ◦ f : X1 → {0, 1} est continue et non constante.
Preuve. Soit (X, d) un espace métrique compact et (Ui )i∈I un Ainsi, X1 n’est pas connexe.
recouvrement par parties ouvertes de X. Soit r > 0 donné par le
théorème précédent et B1 , . . . , BK des boules de rayon r telles 2.3 Parties connexes de R et théorème des valeurs inter-
que X = ∪Kk=1 Bk . Chacune des boules Bk étant incluse dans l’un médiaires
des ouverts (Uik ), on a X = ∪Kk=1Uik .
Inversement, si (X, d) n’est pas compact, il existe une suite Proposition 2.3 Les parties connexes de R sont les intervalles
(xn )n>0 dans X sans valeur d’adhérence. Cela signifie que pour de R.
tout x ∈ X, il existe une boule ouverte Bx centrée en x et ne La preuve est laissée en exercice.
contenant au plus qu’un nombre fini de valeurs de la suite
(xn )n>0 . La famille (Bx )x∈X est un recouvrement de X par par- Corollaire 2.1 Soit (X, d) un espace métrique connexe et f :
ties ouvertes, mais l’union de toute sous-famille finie ne peut X → R une application continue. Alors, f (X) est un intervalle.
contenir qu’un nombre fini de valeurs de la suite (xn )n>0 . En particulier, si a, b sont des points de X, et z est un nombre
réel tel que f (a) 6 z 6 f (b), alors il existe un point c de X tel
que f (c) = z.
1.18 Théorème de Heine
Théorème 1.6 Soit f une application continue d’un espace 2.4 Notion de connexité par arcs
métrique compact (X1 , d1 ) dans un espace métrique (X2 , d2 ).
Alors, f est uniformément continue. Définition 2.2 Un espace métrique (X, d) est dit connexe par
arcs si pour tout x, y ∈ X, il existe une application continue
Preuve. Soit ε > 0. Comme f est continue, il existe, en tout γ : [0, 1] → X telle que γ(0) = x et γ(1) = y, appelée chemin
point x ∈ X1 , une boule ouverte Bx centrée en x, dont l’image de x à y.
est contenue dans B( f (x), ε/2).
Proposition 2.4 Si (X, d) est connexe par arcs alors (X, d) est
On a X1 = ∪x∈X1 Bx , et X1 étant compact, par un résultat pré- connexe.
cédent, il existe r > 0 tel que toute boule ouverte de rayon r est
contenue dans l’une des boules Bx . Preuve. Soit f : X → {0, 1} une application continue. On
Cela entraîne que si y, z ∈ X1 vérifient d1 (y, z) < r, alors par considère x, y ∈ X arbitraires. D’après l’hypothèse, x et y sont
l’inégalité triangulaire d2 ( f (y), f (z)) < ε. Ainsi, f est unifor- reliés par un chemin γ. Le théorème des valeurs intermédiaires
mément continue. (ou la connexité de l’intervale [0, 1]) impose à l’application
continue f ◦ γ : [0, 1] → {0, 1} de prendre la même valeur en
0 et 1. Donc f (x) = f (y) et f est constante.
2. Connexité Remarque : Toute partie ouverte connexe d’un espace vec-
toriel normé est connexe par arcs.
2.1 Notion de connexité
Définition 2.1 On dit qu’un espace métrique (X, d) est 3. Complétude et espaces de Banach
connexe s’il n’existe pas de partie de X autre que la partie
vide ∅ et la partie totale X qui soit à la fois ouverte et fermée. 3.1 Notion de suite de Cauchy
Remarque : Une partie Y d’un espace métrique (X, d) est Définition 3.1 Une suite (xn )n>0 d’un espace métrique (X, d)
connexe si l’espace métrique (Y, d) est connexe. Comme la est appelée suite de Cauchy si
compacité, la connexité est une propriété intrinsèque.
∀ε > 0, ∃n0 ∈ N, tel que, ∀n, m > n0 , d(xn , xm ) < ε.
Méthodologie : Supposons qu’on ait à vérifier une certaine
propriété, disons (P), pour tous les points d’un espace métrique Remarques.
connexe X. Un raisonnement de connexité consiste à montrer — Toute suite de Cauchy est bornée.
que l’ensemble des points de X qui satisfont (P) est à la fois — Soient d1 et d2 deux distances Lipschitz-équivalentes sur
non vide, ouvert et fermé. X. Une suite dans X est de Cauchy pour la distance d1 si,
Exemple. On peut prouver de cette façon que dans tout ou- et seulement si, elle est de Cauchy pour la distance d2 .
N
vert connexe non vide de R , deux points sont toujours reliés — L’image d’une suite de Cauchy par une application uni-
par une ligne polygonale par morceaux. formément continue est de Cauchy.

3
3.2 Les suites convergentes sont de Cauchy 3.6 Parties fermées d’un espace métrique complet
Proposition 3.1 Toute suite convergente est une suite de Cau- Une partie Y de X est dite complète si l’espace métrique
chy. (Y, d) est complet.

Preuve. Soit (xn )n>0 une suite qui converge vers x dans un Proposition 3.3 Soit Y une partie d’un espace métrique (X, d).
espace métrique (X, d). — Si (Y, d) est complète, alors Y est fermée dans (X, d).
Pour tout ε > 0, il existe n0 ∈ N tel que — Si (X, d) est complet et Y est fermée dans (X, d), alors
(Y, d) est complète.
∀n > n0 , d(xn , x) < ε/2.
Preuve. Supposons que (Y, d) est complète. Si (yn )n>0 est
Par l’inégalité triangulaire,
une suite d’éléments de Y qui converge dans (X, d), alors c’est
∀n, m > n0 , d(xn , xm ) 6 d(xn , x) + d(x, xm ) < ε, une suite de Cauchy dans (Y, d). Elle converge donc dans Y et
par conséquent Y est fermé.
ce qui montre que la suite (xn )n>0 est une suite de Cauchy. Supposons maintenant que (X, d) est complet et Y fermée.
Soit (yn )n>0 une suite de Cauchy dans (Y, d). C’est une suite
3.3 Suites de Cauchy et valeur d’adhérence de Cauchy dans (X, d) donc elle converge dans (X, d). Comme
Proposition 3.2 Une suite de Cauchy qui possède une valeur Y est fermée, elle converge également dans (Y, d). Donc (Y, d)
d’adhérence est convergente. est complet.

Preuve. Si la suite (xn )n>0 est de Cauchy, alors pour tout 3.7 Produit d’espaces métriques complets
ε > 0, il existe n0 ∈ N tel que
Lemme 3.1 Le produit de deux espaces métriques complets
∀n, m > n0 , d(xn , xm ) < ε/2. (X1 , d1 ) et (X2 , d2 ) muni de la distance somme ou de la distance
produit est un espace métrique complet.
Soit x une valeur d’adhérence de la suite (xn )n>0 . Il existe
une sous-suite (xϕ(n) )n>0 qui converge vers x. Donc, il existe Preuve. Si ((x1 (n), x2 (n)))n>0 est une suite de Cauchy dans
n1 ∈ N tel que (X × X , d ), alors pour i = 1, 2, les suites (x (n)) sont des
1 2 p i n>0

∀n > n1 , d(xϕ(n) , x) < ε/2. suites de Cauchy dans (Xi , di ).


Ces deux suites convergent donc chacune vers des limites
Alors, pour tout n > max (n0 , n1 ), notées x1 et x2 et on vérifie que la suite ((x1 (n), x2 (n)))n>0
converge vers (x1 , x2 ), aussi bien pour la distance somme que
d(xn , x) 6 d(xn , xϕ(n) ) + d(xϕ(n) , x) < ε,
pour la distance produit.
ce qui montre que la suite converge.
3.8 Espaces vectoriels normés de dimension finie
3.4 Notion d’espace métrique complet
Comme pour la compacité, les espaces vectoriels normés de
Définition 3.2 Un espace métrique (X, d) est dit complet si dimension finie ont un bon comportement ; la nuance est que
toute suite de Cauchy dans X est convergente. cette fois, c’est l’espace tout entier, et donc aussi toute partie
fermée, qui ont la propriété de complétude.
L’intérêt des espaces métriques complets et que l’on peut véri-
fier la convergence d’une suite sans avoir à connaître a priori sa Théorème 3.1 Un K-espace vectoriel normé de dimension fi-
limite. nie, muni de la distance associée à la norme, est un espace
Exemples. métrique complet.
— Un espace métrique compact est complet.
— (]0, 1], | · |) n’est pas un espace métrique complet. Preuve. Soit (xn )n>0 une suite de Cauchy. Cette suite étant
— (Q, | · |) n’est pas un espace métrique complet. On peut bornée, elle est incluse dans un compact (prendre par exemple
définir R comme étant le « complété » de (Q, | · |). une boule fermée de rayon assez grand).
Remarque. La complétude est une propriété qui dépend de On peut donc extraire de la suite (xn )n>0 une sous-suite
la distance et pas seulement de la topologie sur l’ensemble X. qui converge. En particulier, la suite (xn )n>0 admet une valeur
d’adhérence, donc elle converge.
3.5 Non-exemple d’espace métrique complet
3.9 Notion d’espace de Banach
Considérons sur R la distance
Définition 3.3 On dit qu’un espace vectoriel normé est un es-
d(x, y) := |e−x − e−y |. pace de Banach s’il est un espace métrique complet pour la
distance issue de la norme.
Alors l’espace (R, d) n’est pas un espace métrique complet.
Justification. La suite (n)n>0 est une suite de Cauchy dans Remarques.
(R, d), pourtant elle ne converge pas dans R pour cette distance. — La structure d’un espace de Banach est très riche puis-
On remarque pourtant que la topologie associée à la distance qu’elle cumule de fortes propriétés algébriques et mé-
d est égale à la topologie associée à la distance usuelle triques, compatibles entre elles.

4
— Le théorème précédent affirme que tous les K-espaces 3.13 L’espace C ([0, 1]; R), k · k1 ) n’est pas complet
vectoriels normés de dimension finie sont des espaces de
L’espace C ([0, 1]; R) muni de la norme
Banach.
Z 1
— L’étape suivante consiste à étudier des K-espaces vecto-
k f k1 := | f (t)| dt,
riels de dimension infinie qui sont des espaces de Ba- 0
nach. n’est pas un espace vectoriel normé complet.
Éléments de preuve. Définissons pour tout n > 2
3.10 L’espace de Banach (`∞ (N; K), k · k∞ ) 
1
 si x ∈ [0, 1/2]
L’espace (` (N; K), k · k∞ ) est un espace de Banach.

fn (x) := 1 − n(x − 1/2) si x ∈ [1/2, 1/2 + 1/n]

Preuve. Soit (xm )m>0 une suite de Cauchy d’éléments de 0 si x ∈ [1/2 + 1/n, 1].

(`∞ (N, ; K), k · k∞ ). On note On vérifie que ( fn )n>2 est une suite de Cauchy pour k · k1 ,
mais qu’elle ne converge pas vers une fonction continue.
xm := (xnm )n∈N ,
3.14 Applications linéaires continues dans un Banach
où xnm ∈ K. Par définition, pour tout ε > 0, il existe m0 > 0 tel
que, pour tous m, m0 > m0 , Une autre façon de construire des espaces de Banach consiste
à considérer des espaces d’applications linéaires continues à
0
sup |xnm − xnm | < ε. valeurs dans un espace de Banach.
n>0
Proposition 3.4 Soient (E, k · kE ) et (F, k · kF ) deux espaces
Donc, pour chaque n > 0, la suite (xnm )m>0 est une suite de Cau- vectoriels normés. On suppose que (F, k · kF ) est un espace de
chy dans (K, | · |), qui est un espace métrique complet. Cette Banach. Alors, l’espace L (E, F) muni de la norme k · kL (E,F)
suite converge vers une limite que l’on note zn ∈ K. est également un espace de Banach.
Preuve. Soit (Lm )m>0 une suite de Cauchy de
3.11 L’espace de Banach (`∞ (N; K), k · k∞ ), fin (L (E, F), k · kL (E,F) ). Par définition, pour tout ε > 0, il
existe n0 > 0 tel que, pour tous m, n > n0 , pour tout x ∈ E,
On note z := (zn )n>0 . Vérifions que z ∈ `∞ (N; K) et que
kLn (x) − Lm (x)kF < ε kxkE .
m
lim x = z. Ainsi, pour tout x ∈ E, la suite (Ln (x))n>0 est une suite de
m→+∞
Cauchy dans (F, k kF ), qui est un espace de Banach, donc elle
converge vers une limite que l’on note L(x) ∈ F.
Pour m > m0 , et à n fixé, en passant à la limite m0 → +∞ dans
0
l’estimation |xnm − xnm | < ε, on trouve
3.15 Applications linéaires continues dans un Banach,
sup |xnm − zn | 6 ε, suite
n>0
On vérifie que L est linéaire
pour tout m > m0 . L(λ x + µy) = lim Ln (λ x + µy)
m n→∞
En particulier, |zn | 6 |xn 0 | + ε, ce qui montre la suite z est = λ lim Ln (x) + µ lim Ln (y) = λ L(x) + µ L(y).
bornée et pour tout m > m0 , kxm − zk∞ 6 ε, ce qui montre que n→∞ n→∞
la suite (xm )m>0 converge vers z pour la norme k · k∞ . On sait que pour tout ε > 0, il existe n0 ∈ N tel que
kLn (x) − Lm (x)kF < ε kxkE .
3.12 L’espace de Banach C ([0, 1]; R), k · k∞ )
pour m, n > n0 , et tout x ∈ E.
L’espace C ([0, 1]; R) muni de la norme de la convergence Donc, en passant à la limite m → +∞, pour tout ε > 0, il
uniforme existe n0 ∈ N tel que
k f k∞ = sup | f (t)|, kLn (x) − L(x)kF 6 ε kxkE .
t∈[0,1]
pour tout n > n0 , et tout x ∈ E.
est un espace de Banach (exercice).
Plus généralement, on a le résultat suivant. 3.16 Applications linéaires continues dans un Banach, fin
En particulier,
Théorème 3.2 Soient (X1 , d1 ) un espace métrique compact, et
(X2 , k · k) un espace de Banach. Alors, C (X1 ; X2 ) muni de la

kL(x)kF 6 ε + kLn0 kL (E,F) kxkE ,
norme de la convergence uniforme
ce qui montre que L est continue et
k f k∞ = sup k f (x)kX2 , kLn − LkL (E,F) 6 ε,
x∈X1
pour tout n > n0 , ce qui signifie que la suite (Ln )n>0 converge
est un espace de Banach. vers L dans (L (E, F), k · kL (E,F) ).

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