Vous êtes sur la page 1sur 13

LE REGARD DE PYGMALION

Bernard Baas

ERES | « Savoirs et clinique »

2006/1 no 7 | pages 83 à 94
ISSN 1634-3298
ISBN 2749204267
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-savoirs-et-cliniques-2006-1-page-83.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour ERES.


© ERES. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)


Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 83

Le regard de Pygmalion

Bernard Baas

« Il y a toujours eu du regard là-derrière.


Mais – c’est là le point le plus subtil – ce regard, d’où vient-il ? »
J. Lacan
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


Bien que le mythe de Pygmalion soit connu de tous, on permet-
tra toutefois ce rappel des principaux traits du récit d’Ovide 1 : Pyg-
malion, qui jusque là n’avait aimé aucune femme, réussit à sculpter
« dans l’ivoire blanc comme la neige » la statue d’une femme plus
belle que n’en avait jamais faite la nature. Émerveillé par cette beauté
presque charnelle, Pygmalion s’éprit d’amour pour elle, jusqu’à la
caresser, la serrer dans ses bras, la couvrir de baisers. Il obtint de
Vénus que « la vierge d’ivoire » fût transformée en une vierge de
Bernard Baas est docteur en phi- chair, dont il fit son épouse.
losophie, professeur agrégé. Ses
publications : Le désir pur, éd.
Si la création des œuvres de l’art plastique a quelque chose à voir
Peeters, Louvain, 1992 ; L’adora- avec le désir, on comprend qu’on ait fait de Pygmalion la figure
tion des bergers, éd. Peeters, Lou- emblématique de l’artiste – tout au moins de l’artiste plasticien. Non
vain, Paris, 1994 ; De la chose à
l’objet, éd. Peeters & Vrin, Lou-
pas tant parce que l’œuvre créée par art parvient à égaler la réalité
vain, Paris, 1998 ; Le rire inextin- vivante d’un produit de la nature – pour signifier cette égalité du
guible des dieux, éd. Peeters & représentant et du représenté, il y a d’autres mythes, comme l’histoire
Vrin, Louvain, Paris, 2003.
de Zeuxis et Parrhasios –, mais bien parce que le facteur déterminant
1. Ovide, Métamorphoses, X, 243- de la création est ici le désir érotique de l’artiste pour le corps qui est
297. à la fois son modèle et son œuvre.

83
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 84

Art et psychanalyse

Le mythe de Pygmalion n’est donc pas concerné par la problé-


matique philosophique classique – principalement platonicienne – de
la mimèsis (sur la fidélité de la copie à son modèle). Et il ne l’est pas
davantage par la problématique de l’esthétique moderne sur la beauté
idéale du corps humain. Car l’une et l’autre se fondent sur l’annula-
tion de tout désir dans le rapport de l’art à la forme plastique du corps
humain. Certes, Platon reconnaissait la beauté de cette autre « vierge
d’ivoire » qu’était la statue chryséléphantine d’Athéna Parthénos par
Phidias 2 ; mais peut-être était-ce davantage pour le « plaisir pur » de
la « pure blancheur 3 » de l’ivoire, que pour la beauté de la vierge elle-
même. Preuve en est la réplique de Socrate à Hippias qui définissait
le beau par une belle vierge (parthénos kalè kalon) : à ce compte-là,
répond Socrate, autant dire du beau qu’il est « une belle jument » ou
« une belle marmite 4 ». Si l’on songe que le propre d’une jument est
d’être montée et que dans une marmite on agite la cuillère (dont il est
d’ailleurs question un peu plus loin dans le texte 5), on prend la
mesure de ce qu’aurait été le jugement de Platon sur la sublimation
esthétique… De même, lorsque Kant affirmait qu’« on ne peut trou-
ver l’idéal du beau que dans la forme humaine », c’était pour préciser
aussitôt que cet idéal « ne permet à aucun attrait des sens de se mêler
à la satisfaction résultant de son objet 6 ». Car, pour Kant, il n’était pas
même imaginable qu’un authentique jugement esthétique puisse pro-
céder d’un désir érotique. Et c’est pourquoi Nietzsche pouvait s’amu-
ser de la naïveté de Kant et des kantiens – « une naïveté de pasteur de
campagne » – pour lesquels il est possible de « contempler “sans inté-
rêt” même des statues féminines dévêtues » ; et il ajoutait : « Les
expériences des artistes sur ce point délicat sont “plus intéressantes”
et Pygmalion n’était en tout cas pas forcément un homme dépourvu
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


de sens esthétique 8. »
Tout cela nous permet de comprendre qu’au XVIIe siècle on ait pu 2. Platon, Hippias Majeur, 290ab.
donner pour titre La statue de Pygmalion à une gravure de Rembrandt,
3. Platon, Philèbe, 53ab.
dont une épreuve est exposée au musée des Beaux-Arts de Tour-
coing 9 (ill. 1). 4. Platon, Hippias Majeur, 287e
sqq.
On y voit en effet un artiste contemplant un corps de femme
dévêtu, un corps blanc comme l’ivoire. Assurément, rien n’autorise à 5. Ibid., 290d sqq.
identifier cette scène à celle de Pygmalion, puisqu’il n’y a là aucun
6. E. Kant, Critique de la faculté
élément évoquant un atelier de sculpture ; au contraire, tout, dans la de juger, § 17.
gravure, fait signe vers l’art du dessin et de la peinture, notamment le
papier que semble tenir sur ses genoux le personnage assis, la toile 8. F. Nietzsche, Généalogie de la
morale, III, § 6.
posée sur le chevalet, la palme… Dans le catalogue du musée 10,
Sophie Raux rapporte que, selon l’historien d’art Emmens, la confu- 9. N° 192 dans le catalogue
sion de la scène représentée par cette gravure avec la légende de Pyg- d’Adam Bartsch (n° 1771 dans
l’inventaire du musée de Tour-
malion vient de ce que le surnom de « Pygmalion » était alors coing).
appliqué à des artistes immodestes, comme était réputé l’être Rem-
brandt lui-même, immodestie qui se rapporte bien sûr à ce que, dans 10. Collection d’estampes du
musée des Beaux-Arts de Tour-
le mythe, Pygmalion prétend avoir produit par art une beauté supé- coing, 1998, p. 41.

84
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 85

Le regard de Pygmalion
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

ill. 1 : Rembrandt (Leyde, 1606 – Amsterdam, 1669), Le dessinateur et son modèle,


Eau-forte, burin et pointe-sèche sur papier vergé 2e état/2,
Collection Musée des Beaux-Arts de Tourcoing
© Musée des Beaux-Arts de Tourcoing

85
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 86

Art et psychanalyse

rieure à ce que produit la nature. Le titre sous lequel le musée de Tour-


coing expose la gravure, Le dessinateur et son modèle, est donc sans
doute plus adéquat à ce qu’elle représente ; et il est assurément plus
judicieux que le titre proposé par Karel Boon dans son édition de
l’œuvre complète des gravures de Rembrandt : Le peintre dessinant la
vertu 11 – comme s’il fallait sauver l’indécence apparente du tableau
par un petit supplément moral ! Car si la scène représentée ne saurait
être strictement identifiée à la légende de Pygmalion, il n’en reste pas
moins que cette jeune fille, blanche comme la vierge d’ivoire et de
chair, qui s’offre au regard du dessinateur fait de ce tableau une sorte
d’allégorie – comme l’est le mythe de Pygmalion 12 – de la relation
énigmatique entre l’artiste et sa création. Et, de ce point de vue, la for-
mule le dessinateur et son modèle a au moins le mérite de maintenir
l’indécision sur l’intérêt que peut prêter l’artiste à la jeune fille dévê-
tue qui s’offre à son regard.
De fait, on ne saurait distinguer, dans la gravure de Rembrandt,
quel regard l’artiste porte sur son modèle. Il n’y a là que quelques
traits imprécis qui marquent l’emplacement des yeux. Cela n’est pas
dû à la défectuosité de l’épreuve exposée au musée de Tourcoing ; la
même imprécision est manifeste dans les tirages antérieurs de la gra-
vure. En revanche, ces premières éditions permettent de mieux saisir
la physionomie de la jeune fille : la tête légèrement tournée vers la
gauche fait voir un visage discrètement souriant ; mais, là encore, on 11. K. G. Boon, Rembrandt, gra-
ne saurait dire si le trait de l’œil n’est pas plutôt le signe d’une pau- vures, œuvre complète, traduc-
tion Van Hermijnen, Paris, Flam-
pière fermée, comme par pudeur – cette pudeur serait confirmée par marion, 1978, n° 150.
le drapé qui retombe sur le bras gauche de la jeune fille et cache son
sexe aux yeux du dessinateur. Une seule chose est sûre : elle ne dirige 12. À dire vrai, le mythe de Pyg-
malion a d’abord été lu, et pen-
pas son regard vers le dessinateur qui lui fait face. C’est dire que le dant longtemps, comme une allé-
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


tableau n’explicite aucun regard. Il ne fait qu’indiquer, vectorielle- gorie de l’amour ; ce n’est qu’à
ment, le regard que l’artiste porte sur son modèle ; et ce n’est qu’au partir de la version qu’en a don-
née Rousseau, qu’il est devenu
motif que ce modèle est un nu féminin qu’on s’autorise à en déduire l’allégorie de la création artis-
que le regard de l’artiste se soutient d’un désir semblable à celui qui tique. Dans la petite pièce de
est réputé avoir animé le regard de Pygmalion. Mais, assurément, on Rousseau (Pygmalion, dans Œuvre
complète, t. 2, Paris, Gallimard,
ne saurait réduire la scène que représente la gravure à une relation « Bibliothèque de la Pléiade »,
entre deux regards où se jouerait – comme dans le vol du désir, que 1964, p. 1224 sqq.), le miracle de
décrit Platon, entre les yeux de l’amant et de l’aimé 13 – l’avènement l’animation de la statue (alors
nommée « Galathée », par réfé-
d’un désir réciproque. La dualité des personnages représentés ne suf- rence étymologique au signifiant
fit pas à rendre compte de la composition de ce tableau. de la blancheur) advient au mo-
Autre chose est ici en jeu ; et qui concerne pourtant le regard ; ou ment où le sculpteur, en pleine
crise de sa création, se désespère
plutôt d’abord notre regard. Car à considérer la composition, le regard de son génie. Sur cette transfor-
du spectateur est d’abord arrêté par l’opposition et l’hétérogénéité des mation du sens du mythe, voir
deux plans. Le premier plan est le plan de la représentation, le plan qui A. Geisler-Szmulewicz, Le mythe
de Pygmalion au XIXe siècle (Pour
met en scène l’artiste et son modèle. La clarté du blanc y domine à tel une approche de la coalescence
point qu’elle agresse l’œil du spectateur. Mais ce n’est pas la scène des mythes), Paris, Honoré Cham-
représentée qui est claire ou lumineuse ; cette clarté est celle du des- pion, 1999, p. 39 sqq.
sin lui-même qui ne tient qu’à quelques traits rapides, esquissés sur le 13. Platon, Phèdre, 251b sqq.

86
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 87

Le regard de Pygmalion

ill. 2 : Rembrandt,
Aspect de l’atelier
de Rembrandt,
dessin à la plume
et à l’aquarelle, 1648,
musée du Louvre, Paris

fond blanc du papier, et qui ne requiert donc qu’un travail élémentaire


de gravure – juste quelques tracés de la pointe sur le cuivre. Ce pre-
mier plan, ce plan de la représentation, n’est ainsi fait que de quelques
ébauches et repentirs, sans précision des contours, sans distinction des
objets représentés (on ne reconnaît rien dans le fouillis du dessin en
bas à droite, et les objets suspendus au-dessus du dessinateur ne sont
pas clairement identifiables, même si on semble y reconnaître un bou-
clier, un fourreau, un chapeau à plumes, que l’on retrouve dans un
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


autre dessin de Rembrandt représentant son atelier 14 (ill. 2). Il n’y a
là que le minimum nécessaire à signifier la scène. En revanche, le
deuxième plan suppose, de la part du graveur, un travail très élaboré
pour obtenir cette couleur sombre, cette densité de noirs, cette épais-
seur d’ombres, d’où émerge seulement un buste de femme posé sur ce
qui semble être un coin de cheminée (certains y voient un buste d’en-
fant – on se demande bien pourquoi – posé sur un piédestal 15). À l’ex-
ception de ce buste, cet arrière plan, cette arrière scène, ne représente
rien. La conjonction de ces deux plans, absolument hétérogènes, pro-
duit ainsi un paradoxe évident : du point de vue du dessin et de la tech-
nique de la gravure, le plan le moins travaillé est le plan lumineux de
14. Dessin à la plume et à l’aqua- la représentation, le plan de la scène manifeste ; et le plan le plus tra-
relle (±1648), Musée du Louvre,
Paris.
vaillé est l’arrière plan, le plan le plus obscur, le plan – si l’on ose
dire – de l’autre scène, celle où, pour nous spectateurs, il ne se passe
15. S. de Bussierre, Rembrandt rien et où, hormis le buste, rien n’est représenté. Mais si rien ne nous
Eaux-fortes (collection Dutuit),
catalogue de l’exposition du
est accessible de cette autre scène, c’est parce qu’elle nous est cachée
musée du Petit Palais, Paris, 1986, par la grande toile blanche, posée sur le chevalet, au centre de la com-
p. 123. position. C’est cette toile vide, ce blanc pur de toute représentation,

87
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 88

Art et psychanalyse

qui sépare les deux plans du tableau et qui, pour nous, fait écran, nous
interdisant de voir au-delà d’elle. Certes, l’histoire de la peinture a
souvent joué de ce motif d’une toile posée sur un chevalet et venant
faire écran au regard du spectateur ; Rembrandt lui-même a servi ce
motif dans un petit tableau intitulé Le chevalet 16 (voir hors-texte,
p. 2 : Rembrandt, Le chevalet, huile sur toile, Museum of Fine Arts,
Boston)
Mais c’est alors l’envers de la toile qui fait écran, interdisant au
spectateur de voir la peinture dont elle est le support. En revanche,
dans la gravure qui nous intéresse ici – et c’est là ce qui fait son ori-
ginalité –, c’est bien le recto de la toile qui est présenté, c’est la face
visible du tableau qui, en tant que vide, vient faire écran au regard du
spectateur. Il y a là quelque chose d’essentiel qu’on ne retrouve pas
dans le dessin préparatoire à cette gravure, où le jeu de clair-obscur a
pour fonction de faire ressortir le seul personnage de la jeune fille sur
le fond obscur dans lequel disparaît presque le dessinateur lui-
16. Ce tableau est également
même 17 (ill. 3). Entre ce dessin préparatoire et la gravure finale, Rem- connu sous le titre Le peintre
brandt aura radicalement modifié la structure de sa composition ; il dans son atelier ; Museum of Fine
aura délibérément choisi d’opposer le clair et l’obscur non plus Arts, Boston.
comme la figure et le fond, mais comme deux plans radicalement dis- 17. Dessinateur et modèle ; British
tincts, séparés par l’écran de la toile vide. Museum, Londres.
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

ill. 3 : Rembrandt,
Dessinateur et modèle,
dessin à la plume, 1647,
British Museum, Londres

88
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 89

Le regard de Pygmalion

À ce titre, cette gravure de Rembrandt peut nous permettre de


mieux comprendre les réflexions de Lacan sur « l’écran » constitutif,
selon lui, de tout tableau. Dans sa célèbre leçon sur le tableau 18 (les
chapitres VIII et IX de son séminaire Les quatre concepts fondamen-
taux de la psychanalyse), Lacan explique, en effet, que, dans tout
tableau, le champ où la perception visuelle exerce sa plus grande
acuité est justement marqué par un certain manque, une certaine
absence :
« Il y a quelque chose dont toujours, dans un tableau, on peut
noter l’absence – au contraire de ce qu’il en est dans la per-
ception. C’est le champ central, où le pouvoir séparatif de
l’œil s’exerce au maximum dans la vision. Dans tout tableau,
il ne peut qu’être absent, et remplacé par un trou – reflet, en
somme, de la pupille derrière laquelle est le regard. Par
conséquent, et pour autant que le tableau entre dans un rap-
port au désir, la place d’un écran central est toujours mar-
quée, qui est justement ce par quoi, devant le tableau, je suis
élidé comme sujet du plan géométral 19 ».
C’est en ce sens que tout tableau peut être qualifié de « piège à
regard 20 ». Car, si le sujet-spectateur, face au tableau, est toujours
appelé « à se repérer comme tel 21 », c’est-à-dire à situer sa propre
place par rapport aux coordonnées spatiales de la représentation (le
« plan géométral »), il ne peut toutefois déterminer cette place ; car
c’est le propre du tableau de ne pouvoir inclure le sujet qui le
contemple. À cette impossible assignation de la place du sujet corres-
pond, dans le tableau, cette « absence », ce « trou », cet « écran » par
lequel le sujet est « élidé » du plan géométral. C’est pourquoi Lacan
pouvait dire : « Moi, si je suis quelque chose dans le tableau, c’est
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


aussi sous cette forme de l’écran 22 », ce qui veut dire que « je » n’y
suis qu’en tant qu’absence.
Dans la gravure de Rembrandt, cet écran est tout à fait manifeste,
d’autant que la représentation semble le donner pour tel, puisque ce
que représente le « champ central » est ici précisément un panneau qui
masque l’arrière-plan. Mais c’est là ce qui fait la singularité de cette
18. J. Lacan, Le Séminaire, Livre
XI, Les quatre concepts fonda- gravure. Car il ne semble pas qu’il faille en général se focaliser sur ce
mentaux de la psychanalyse, qui, dans chaque représentation, joue cette fonction d’écran. D’autant
Paris, Le Seuil, 1973, p. 85 sqq. et qu’il n’est pas évident de désigner dans « tout » tableau le lieu qui
p. 97 sqq. ; le chapitre IX a reçu
pour titre de l’éditeur : « Qu’est- tient cette fonction. De plus, à considérer l’ensemble des réflexions de
ce qu’un tableau ? » Lacan dans ces deux chapitres du séminaire Les quatre concepts fon-
damentaux de la psychanalyse, il apparaît que cette fonction d’écran
19. Ibid., p. 99-100.
n’est pas tant tel élément du tableau que le tableau lui-même. En effet,
20. Ibid., p. 83. le tableau – et, pour le coup, on peut dire « tout tableau » – est lui-
21. Ibid., p. 93.
même ce qui marque la frontière entre le registre de la représentation,
où s’organise l’espace optique géométral, et l’au-delà de la représen-
22. Ibid., p. 90. tation. Mais s’il est frontière, limite, le tableau est aussi « ce qui fait

89
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 90

Art et psychanalyse

la médiation 23 » entre ce qui se donne à voir – c’est-à-dire l’espace


de la représentation – et ce qui ne se voit pas, ce qui excède la repré- 23. Ibid., p. 89.
sentation. Ce qu’il y a de véritablement singulier dans la gravure de 24. Ibid., p. 93.
Rembrandt, c’est qu’elle représente par un tableau la fonction d’écran
que joue tout tableau ; mais alors le tableau ainsi représenté est un 25. S. Freud, « La tête de
Méduse », traduction J. La-
tableau qui ne représente rien, puisque c’est un panneau vide, une planche, dans Résultats, idées,
toile blanche. Ce panneau vide est donc représenté comme tel ; mais problèmes, tome 2, Paris, PUF,
il est, du côté du plan de la représentation, ce qui est pur de toute 1985, p. 49 sqq. Sur l’intrication
des mythes de Pygmalion et de
représentation et qui fait écran à l’au-delà de la représentation. À celui Méduse, voir A. Geisler-Szmule-
qui voudrait regarder l’arrière scène de ce tableau, il n’est donné que wicz, op. cit., p. 166 sqq.
de « déposer là son regard comme on dépose les armes » : « Tu veux
26. Il s’agit du tableau de la col-
regarder ? Eh bien, vois donc ça 24. » « Ça », c’est-à-dire cet écran lection Gulbenkian. Il est aussi
blanc qui interdit d’accéder à l’au-delà de la représentation. connu sous le titre Alexandre le
Reste à expliciter ce qu’on entend par « l’au-delà de la représen- Grand ; mais le modelé décoratif
du bouclier suffit à justifier le
tation ». Si, dans la gravure de Rembrandt, cet au-delà est bien l’ar- titre Pallas Athéna. On remar-
rière-plan obscur et indistinct de la composition, s’il est cette autre quera que, dans la gravure que
scène que cache l’écran de la toile blanche, quel est le sens et le sta- nous étudions, de même que
dans le dessin représentant l’ate-
tut de cette autre scène ? Sans doute l’expression d’autre scène peut- lier de Rembrandt [ill. 2], les ob-
elle être entendue comme la scène de l’inconscient. Mais il ne faudrait jets suspendus semblent être un
pas se contenter de la comprendre comme la scène cachée des repré- bouclier, une lance, le fourreau
d’une épée… ; mais, outre la dis-
sentations refoulées, notamment sexuelles. La thèse psychanalytique semblance des visages, la
un peu naïve, selon laquelle le tableau en général est l’équivalent de confrontation des dates de ces
la fameuse feuille de vigne qui recouvre pudiquement les organes différentes compositions ne per-
met pas de conclure – et ce mal-
sexuels, ne trouverait son application, dans la gravure de Rembrandt, gré la présence de la palme de la
qu’à propos du drapé qui masque au regard du dessinateur le sexe de victoire – que la jeune fille qui
la jeune fille dévêtue. Certes, on pourrait ici établir quelque corres- pose aurait été le modèle de cette
Athéna.
pondance avec la remarque de Freud sur la tête de Méduse 25 ; ce qui
nous ferait retrouver notre Athéna Parthénos, puisque, comme on sait, 27. J. Lacan, le Séminaire, Livre X,
L’angoisse, Paris, Le Seuil, 2004,
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


la tête de Méduse figurait sur l’avers du bouclier d’Athéna – Rem-
p. 318.
brandt n’a pas manqué de la suggérer dans son tableau sur Pallas
Athéna 26. Mais si, dans la gravure qui nous intéresse, la scène que 28. J. Lacan, Le Séminaire, Livre
XI, Les quatre concepts fonda-
cache, aux yeux du spectateur, l’écran central de la toile blanche peut mentaux de la psychanalyse,
être dite l’autre scène, ce serait à l’entendre plutôt comme la scène de op. cit., p. 166.
l’Autre, au sens où Lacan parle du « champ de l’Autre ». Pour autant
29. Ibid., p. 65.
cette scène n’est pas celle des représentations inconscientes, puis-
qu’elle est vide de représentation ; ce qu’elle met en scène, c’est « le 30. Ibid., p. 74.
vide de l’Autre comme tel 27 », c’est-à-dire ce qui, de l’Autre, n’est
31. Pour une explicitation plus
réductible ni intégrable à aucune représentation (bien que toute repré- précise de cette leçon de Lacan
sentation en procède), ce qui n’est en aucune manière spécularisable ; sur le tableau et le regard comme
en un mot : ce qui ne peut pas se voir. Or « ce qui ne peut pas se objet a, on renverra à une étude
antérieure, déjà consacrée à une
voir 28 », c’est le regard lui-même. Voilà ce qui fait, selon la célèbre gravure de Rembrandt (L’adora-
formule de Lacan, « la schize de l’œil et du regard 29 », c’est-à-dire tion des bergers ; également ex-
l’impossibilité radicale de réduire le regard à la vision (Lacan parle posée au musée des Beaux-Arts
de Tourcoing) : B. Baas, L’adora-
d’ailleurs aussi bien de « la schize entre regard et vision 30 »). tion des bergers, ou de la dignité
Il serait trop long de reprendre ici toutes les explications de la d’un clair-obscur, Louvain, Pee-
thèse de Lacan sur le regard comme objet a 31. Mais il n’est pas indif- ters, 1994, p. 103 sqq.

90
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 91

Le regard de Pygmalion

férent que toute cette leçon sur le regard ait commencé par une reprise
de la thèse de Merleau-Ponty sur le regard comme cet invisible qui
hante le visible : le regard n’est pas la fonction visuelle ; mais il est
cet invisible qui revient du monde vers le sujet et qui ainsi ouvre l’es-
pace de la visibilité. C’est en quoi le sujet voyant est toujours déjà
regardé ; et il n’est voyant que pour autant qu’il est regardé. Le regard
comme objet a est ce qui soutient la vision du sujet sans que celui-ci
n’en sache ni même n’en perçoive rien. Dans le cas du tableau, ce
regard est ce qui, du tableau, revient sur le spectateur lui-même et le
fait être regardé. D’une certaine manière, le désir scopique du specta-
teur tend à voir ce regard invisible qui attire son œil sur la toile – c’est
ce que Lacan appelle « l’appétit de l’œil chez celui qui regarde 32 » ;
mais le tableau ne lui donne pas à voir ce regard : son œil est arrêté
par et sur « quelque chose au-delà de quoi il demande à voir 33 ». Et
ce qui arrête ainsi la vision, c’est justement l’écran. L’écran, comme
« lieu de la médiation 34 », est à la fois ce qui sépare et relie le plan du
sujet ou plan de la vision et le plan de l’Autre ou plan du regard :
« Quant à ce qui, de l’un à l’autre, fait la médiation, ce qui
est entre les deux, c’est quelque chose d’une autre nature que
l’espace optique géométral, quelque chose qui joue un rôle
exactement inverse, qui opère, non point d’être traversable,
mais au contraire d’être opaque – c’est l’écran 35 ».
Sur la gravure de Rembrandt, cet écran opaque est le panneau
blanc posé sur le chevalet ; c’est là que notre vision de spectateurs est
arrêtée. Mais, pour cette raison même, cet écran fait signe vers ce qu’il
cache : au-delà de lui, il n’y a que la masse sombre et indistincte d’où
nous sommes regardés par ce regard invisible qui nous attire et nous
fait être regardants. On l’a dit : l’originalité de cette gravure de Rem-
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


brandt est d’inscrire explicitement et même littéralement, dans l’es-
pace de la représentation, cet écran qui marque la limite du
représentable et qui fait ainsi la « médiation » entre le représentable et
l’imprésentable. Le panneau blanc est donc bien écran au double sens
de ce mot : à la fois panneau de protection – en tant qu’il est intraver-
sable – et panneau de projection – en tant que s’y manifeste par l’ab-
sence de toute représentation l’imprésentabilité du regard comme
objet a.
Mais, comme ce tableau joue lui-même, dans le registre de la
représentation, sur l’opposition des deux plans – le plan lumineux et
32. J. Lacan, Le Séminaire, Livre
XI, Les quatre concepts fonda- l’arrière plan –, on ne sera pas étonné qu’il mette lui même en scène
mentaux de la psychanalyse, – en représentation – la schize de la vision et du regard. En effet, au
op. cit., p. 105. premier plan de la composition, l’artiste contemple son modèle dévêtu
33. Ibid., p. 102. – sa vierge d’ivoire et de chair –, et son regard est arrêté par la limite
du visible que constitue pour lui le drapé qui cache le sexe de la jeune
34. Ibid., p. 99.
fille ; mais, venant de l’arrière plan du tableau, du plan obscur, se pose
35. Ibid., p. 89. sur lui un autre regard : c’est le regard du buste, le regard de cette

91
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 92

Art et psychanalyse

jeune fille de pierre, des épaules de laquelle est tombée l’étoffe qui
pouvait la voiler. Cet autre regard, ce regard pétrifié, est le regard de
l’Autre, le regard comme objet a. De ce regard obscur procède le
regard que le dessinateur porte en toute clarté sur son modèle, mais
qui se heurte à la limite du visible. C’est là ce que notre Pygmalion ne
peut ni voir ni savoir : il n’est lui-même regardant que parce qu’il est
déjà regardé.
À cet égard, la composition de cette gravure fait apparaître
quelque chose de remarquable : c’est la ligne droite – parfaitement
droite – qui va de l’œil de l’artiste à l’œil du buste en passant exacte-
ment par l’œil de la jeune fille, comme pour signifier que l’artiste,
regardant son modèle, est lui-même déjà regardé par cet autre regard
qui lui revient d’au-delà de ce qu’il contemple. Sans qu’il en sache
rien, son regard est arrêté sur l’objet désirable de sa contemplation,
au-delà duquel advient l’autre regard qui se pose sur lui, le regard de
l’Autre qu’il ne peut pas voir et qui le fait être regardant.
Et, à ce titre, la position de l’artiste dans la scène représentée
36. N° 63 dans le catalogue
n’est pas indifférente : il est certes assis ; mais non assis sur le petit d’Adam Bartsch.
fauteuil – contrairement à la description qu’en donnent certaines
37. Sur la composition de cette
monographies. Peut-être même est-il seulement accroupi, mais assu- gravure, et notamment sur ce re-
rément à côté du siège. Or ce siège vide est, lui, tourné en direction gard, voir l’étude citée supra
non pas du modèle mais du buste. Si l’artiste était assis dans ce siège, note 31, p. 113. Peut-être est-ce
encore le même siège qu’on aper-
alors il verrait le regard qui se porte sur lui. Mais c’est ce qui est jus- çoit dans le dessin représentant
tement impossible. Et c’est pourquoi il est essentiel que ce siège reste l’atelier de Rembrandt [ill. 2]
vide (du reste, on retrouve exactement le même fauteuil dans une – mais là, c’est le modèle qui est
assis dans le fauteuil – et dans La
autre gravure de Rembrandt, La Vierge au chat 36 (ill. 4) : là aussi, le Sainte Famille du Musée de Kassel
siège est vide, et se porte sur lui le regard énigmatique d’un person- – c’est alors la Vierge qui occupe
nage venant de l’arrière-plan de la composition 37). la place.
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

ill. 4 : Rembrandt,
La Vierge au chat,
eau-forte et pointe-sèche,
1654, Rijksmuseum,
Amsterdam

92
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 93

Le regard de Pygmalion

Le tableau de Rembrandt fait ainsi se croiser l’axe qui va de l’œil


de l’artiste au buste qui le regarde et l’axe qui va du spectateur au fond
obscur de la gravure ; le point de croisement de ces deux axes est, au
centre de la composition, l’écran de la toile vide. Pour qui n’est pas
rebuté par l’algèbre lacanienne, on fera remarquer que aussi bien notre
position de spectateurs, en tant que, comme sujets, nous sommes « éli-
dés » du plan de la représentation, que celle du dessinateur assis à côté
du siège vide, est la position du sujet comme $ (« sujet barré du
désir ») ; et, pour le spectateur comme pour le dessinateur, cette éli-
sion ou cette destitution subjective tient au rapport impossible au
regard comme objet a. Dans les deux cas, ce rapport impossible est
marqué, dans le tableau, par l’écran vide. C’est dire que cet écran est
l’équivalent du symbole par lequel Lacan écrit ce rapport impos-
sible : ◊ (« poinçon ») ; de là le mathème : $ ◊ a. Du point de vue de
ce qu’il représente, le tableau de Rembrandt écrit ce mathème entre le
dessinateur et le regard du buste ; et, en tant qu’il se présente à nous,
le tableau vient en quelque sorte performer ce qu’écrit ce mathème.
On peut ainsi schématiser cette double écriture :
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)


La toile blanche – l’écran du poinçon – marque ainsi, pour le des-
sinateur comme pour le spectateur, ce qui fait à la fois barrière et
médiation entre le sujet voyant et le regard comme objet a ; elle
marque la limite où le regard du sujet est arrêté pour n’avoir pas à sou-
tenir l’autre regard, le regard invisible qui le fait être regardant. C’est
en quoi ce panneau blanc, au centre de la gravure, fait écran entre le
plan de la représentation et le plan de l’au-delà de la représentation.
La traversée des deux plans est ici signifiée et performée par la palme
qui, croisant ce qui dans la scène représentée est supposée être le
centre de la contemplation (la jeune fille), franchit le plan de la repré-
sentation et se perd dans l’arrière-plan ; elle trace ainsi la destination
de notre regard vers ce qui ne peut pas se voir. Et, ce faisant, elle
double de manière visible le tracé invisible qui va, en une ligne droite,
de l’œil de l’artiste à l’œil de la statue en passant par l’œil de la jeune

93
Savoirs et cliniques /7 25/09/06 13:45 Page 94

Art et psychanalyse

fille – preuve de ce que, pour Rembrandt lui-même, cette gravure était


avant tout une affaire d’yeux et de regards ?
Preuve, en tout cas, de ce que le mythe de Pygmalion, malgré les
nombreux avatars qu’il aura connu dans l’histoire – notamment chez
Rousseau 38 et G.B. Shaw 39 –, ne saurait être réduit à une relation
duelle. Certes, la gravure de Rembrandt n’est pas l’illustration,
comme telle, de la légende de Pygmalion. Mais s’il est vrai qu’elle
conserve quelque chose de cette figure mythique, c’est bien au sens 38. Voir supra, note 11.
où « le tableau », pour le spectateur comme pour l’artiste, « entre dans
39. Il s’agit de la fameuse pièce
un rapport au désir 40 ». Ce désir peut bien sembler ne procéder que qui deviendra, sous forme de co-
de la passion du sujet pour le bel objet qui se présente à lui – comme médie musicale, My Fair Lady.
Pygmalion pouvait croire que sa vierge d’ivoire était seule cause de Lacan, qui, dans toute son œuvre,
écrite et orale, ne fait aucune ré-
son désir ; il n’en reste pas moins qu’il requiert encore, comme sa férence au mythe de Pygmalion
véritable cause – son objet-cause –, cet autre regard, qui est à la fois – ce qui est tout de même bien
le principe et la fin de la pulsion scopique, ce regard qu’on ne peut pas étonnant –, glisse une allusion, au
demeurant insignifiante, à la
voir mais qui est ce qui donne à voir : pièce de Shaw ; Le Séminaire,
« Modifiant la formule qui est celle que je donne du désir en Livre XIV, La logique du
fantasme ; séminaire inédit,
tant qu’inconscient – le désir de l’homme est le désir de séance du 30 novembre 1966.
l’Autre – je dirai que c’est d’une sorte de désir à l’Autre qu’il
s’agit, au bout duquel est le donner-à-voir 41 ». 40. J. Lacan, Le Séminaire, Livre
XI, Les quatre concepts fonda-
mentaux de la psychanalyse,
op. cit., p. 100.
Merci à Rembrandt de nous avoir permis d’accueillir ce donner-
à-voir. 41. Ibid., p. 105.
© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

© ERES | Téléchargé le 08/01/2021 sur www.cairn.info (IP: 102.157.68.231)

94

Vous aimerez peut-être aussi