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La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire

Article  in  Medécine et Armées · January 2009

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La prévention des risques liés à la préparation physique
du militaire.

J.-Y. Cravica, S. Banzetb.


a Centre national des sports de la Défense, camp Guynemer – 77307 Fontainebleau Cedex.
b Institut de recherche biomédicale des armées, Antenne Brétigny-sur-Orge, IMASSA, Base aérienne 217 – 91200 Brétigny sur Orge.

Introduction. Les pathologies les plus graves sont les pathologies


cardio-vasculaires, comme la mort subite du sportif,
Dans une armée professionnelle à format réduit et dans souvent qualifiée « d’imméritée » chez le sujet jeune.
un monde moderne où la sédentarité prédomine, la Les plus fréquentes sont les pathologies musculo-
préparation physique du militaire est une nécessité squelettiques liées aux activités physiques militaires
opérationnelle. Elle commence dès l’entrée dans la et sportives, si fréquentes qu’elles ont été qualifiées
carrière militaire pour acquérir l’aptitude physique et d’ « épidémie cachée » chez le militaire américain (1).
mentale permettant de faire face aux contraintes du L’analyse bibliographique exhaustive a été réalisée
métier de militaire. Cette aptitude physique, acquise dès grâce à des moteurs de recherche sur internet (PubMed et
la formation initiale, doit être maintenue tout au long de la Google Scholar), des recherches dans la bibliographie des
carrière, en dépit des vicissitudes rencontrées pour articles initiaux et dans des banques de données
maintenir un entraînement régulier et/ou adapté. épidémiologiques et rapports du service de santé des
Cette préparation physique militaire et sportive armées (SSA) et des armées. La recherche documentaire,
comporte des exercices aussi variés que la course à pied, la initialement limitée à 10 ans, s’est étendue à certains
natation, le tir, la marche-course, la marche avec sac à dos, articles plus anciens d’une part par manque de références
le parcours d’obstacles, le renforcement musculaire, le dans la littérature française et d’autre part car l’apport de
saut en parachute, les stages commandos… sans oublier certains articles était nécessaire pour comprendre tous les
les stages d’aguerrissement pouvant influer ainsi sur la aspects du problème.
qualité de la capacité opérationnelle des armées. La prévention des risques liés à la préparation physique
L’entraînement physique militaire et sportif, nécessaire du militaire passe par différentes étapes. Nous verrons
pour obtenir un certain niveau de condition physique d’abord dans la littérature la réalité du problème et son
contrôlé annuellement, a d’un côté des effets bénéfiques évaluation. Puis nous tâcherons d’en identifier les causes
sur le plan de la santé (diabète, hypertension artérielle, et les facteurs de risque de survenue en différenciant
capacité de gestion du stress, etc…) et voit d’un autre côté les pathologies à risque vital et les pathologies
la survenue de pathologies morbides diverses. musculosquelettiques. La troisième étape nous permettra
de déterminer les mesures à appliquer pour prévenir le
La littérature internationale rapporte que les bles-
problème. Enfin nous développerons les stratégies et
sures « hors-combat » sont la cause majeure de décès,
ses programmes de prévention sur le terrain ainsi que
de réformes, d’hospitalisations, de consultations
la nécessaire évaluation de la réalité de leur impact.
et d’indisponibilités des personnels et ce dans toutes
les armes.
La préparation physique du militaire.
J.-Y. CRAVIC, médecin en chef, praticien certifié. S. BANZET, médecin en chef,
praticien certifié.
L’instruction ministérielle N° 126/DEF/EMA/
Correspondance : J.-Y. CRAVIC, Centre national des sports de la Défense, camp EMP.3/NP relative au contrôle de la condition physique
Guynemer – 77307 Fontainebleau Cedex. nous rappelle en préambule l’utilité d’une bonne

médecine et armées, 2009, 37, 5, 465-488 465


préparation physique pour le militaire et définit le rôle des conduire une séance d’entraînement physique
acteurs en présence. généraliste. Cette formation doit être poursuivie en
L’aptitude des militaires d’active et de la réserve unité sous la responsabilité des spécialistes EPMS et/
opérationnelle à faire face aux contraintes physiques et ou du médecin d’unité. Les cadres, dans un souci
psychologiques inhérentes aux emplois et missions d’exemplarité, doivent s’impliquer dans la préparation
qu’ils assument est directement liée à leur capacité des programmes d’APMS et participer aux séances
physiologique ainsi qu’au niveau de leur entraînement de sport de leur personnel.
physique.
Partie intégrante de la formation militaire générale,
l’entraînement physique militaire et sportif est une État des lieux concernant la pré-
nécessité professionnelle et opérationnelle qui contribue paration physique des militaires.
efficacement à la préservation du potentiel humain,
facteur essentiel dans la résolution des conflits modernes. L’enquête réalisée par Guezennec en 1997 (2) a montré
Vécu et parfois subi par l’ensemble du personnel militaire que 79 % des militaires pratiquaient une activité sportive
tout au long de sa carrière, il doit être organisé et contrôlé versus 48 % de la population française qui a déclaré
avec le même souci d’eff icacité que les autres pratiquer au moins une activité sportive dans l’année.
composantes de l’instruction militaire. Ces chiffres sont identiques dans la population civile en
Réalité de la vie militaire, l’entraînement physique 2005 (Escalon H., Baromètre Santé 2005.)
nécessite pour être rationnellement conduit une Les militaires de carrière avaient un niveau de pratique
collaboration étroite entre le commandement, le Service sportive plus important que les appelés du contingent.
de santé des armées (SSA) et la chaîne technique Les militaires par rapport à d’autres groupes pratiquent
Éducation physique militaire et sportive (EPMS). plus de sport d’endurance et de sports collectifs. Environ
Par ailleurs, l’EPMS procède d’une responsabilité 60 % des militaires pratiquaient en 1997 plus de
partagée entre le militaire qui doit se maintenir en 200 heures de sport par an soit une moyenne de plus de
condition physique et l’institution, qui assure la formation 4 heures par semaine.
en école, le suivi et le contrôle de l’entraînement et met en Une disparité de pratique sportive peut être constatée en
place des moyens. fonction des armées et des emplois avec une charge
Cette préparation physique du militaire s’appuie sur physique plus ou moins importante. Mais l’étude
des programmes d’Activités physiques militaires et souligne bien que la pratique sportive est importante dans
sportives (APMS) établis en collaboration étroite avec les les emplois les plus sédentaires pour améliorer la
spécialistes EPMS et en liaison avec les médecins. condition physique et équilibrer la balance énergétique.
Véritables plans d’entraînement, ces programmes
Un point est à mettre en exergue : le caractère discontinu
doivent mettre en place des activités sportives attrayantes
et imposé de l’entraînement du aux missions extérieures
qui favoriseront l’assiduité, l’émulation et l’adhésion du
personnel. Outre les disciplines socles qu’il convient de ou intérieures qui ne permettent pas au militaire de suivre
préserver (course à pied, natation, musculation), les un entraînement régulier pour maintenir un niveau de
sports de combat et des sports présentant un intérêt direct condition physique minimal.
pour la capacité opérationnelle (tir, course d’orientation, Par ailleurs, en 2008, seulement 60 % des personnels
parcours d’obstacles) doivent être privilégiés et ont effectué le contrôle annuel de la condition physique
développés. La pratique de sports collectifs et d’équipe qui vient de remplacer les épreuves du COVAPI (Compte
doit être poursuivie car elle constitue un excellent moyen rendu annuel de l’entraînement physique et sportif 2008).
de cohésion et d’échange. Depuis 1997, aucune enquête n’a été menée pour
Des activités militaires dites de préparation caractériser la pratique sportive dans les armées et/
opérationnelle, différenciées en fonction du lieu ou recenser les accidents liés à la préparation physique
d’opération achèveront cette préparation physique du militaire.
du militaire, comme l’a indiqué le général Irastorzza dans
le journal « Terre information magazine » de mars 2009.
La directive ministérielle N° 17615 du 23 décembre Les risques de la préparation
2003 rappelle la nécessaire collaboration étroite entre physique du militaire.
le Centre national des sports de la Défense (regroupant
le Commissariat aux sports militaires et l’École
interarmées des sports) et la Direction centrale du Service Les pathologies liées à l’EPMS chez le
de santé des armées, le rappel périodique des textes militaire : une épidémie cachée (1).
en vigueur à tous les acteurs (cadres de contact
commandement, médecins d’unité) et insiste sur Voyons une première définition des pathologies liées à
une veille particulière concernant la catégorisation la pratique de l’EPMS : ce peut être une atteinte physique
médico-physiologique du personnel et la prévention des ou organique du corps, pour laquelle le militaire consulte
accidents liés à la préparation physique. et pour laquelle il est hospitalisé, a des jours d’arrêt de
À cet effet, tous les cadres doivent recevoir en école la travail, ou des exemptions ou des restrictions d’emploi
formation technique et pédagogique nécessaire pour temporaires ou définitives.

466 j.-y. cravic


Une autre définition, rapportée par Van Mechelen un traumatisme en relation avec une activité sportive et
peut être plus appropriée et plus démonstrative dans 26 % des arrêts de travail étaient en relation avec les
le cadre d’une stratégie de prévention des blessures (3) : activités sportives.
il propose de déf inir une blessure sportive comme Plus récemment, 50 % des arrêts de travail délivrés par
toute blessure résultant de la participation à une activité les médecins militaires de la Région Terre Sud-Est sont
sportive avec une ou plusieurs des conséquences liés à la traumatologie (Enquête réalisée de mars à
suivantes : 1) diminution de la quantité ou du niveau de juin 2007, Doc N° 6476/DRSSA LYON/DIR).
la pratique sportive ; 2) nécessité d’un avis médical Enf in le bureau prévention et maîtrise des risques
ou d’un traitement ; 3) des conséquences adverses de l’État major de l’armées de Terre (EMAT) a fourni
sociales ou économiques. les chiffres disponibles pour l’accidentologie (registre
Peu ou pas de données récentes sont disponibles des accidents en service) dans l’armée de Terre en
concernant les accidents liés à l’entraînement physique métropole au titre de l’année 2007 et 2008. Ceux-ci
dans l’armée française. montrent que les activités sportives sont responsables
Les données rassemblées par l’armée américaine, de 38 % des accidents en service et que les activités
des années quatre-vingt-dix jusqu’à nos jours indiquent typiquement militaires sont du même ordre de grandeur
que les blessures non intentionnelles sont la première (37 %) (tab. I).
cause de décès, de séquelles fonctionnelles,
d’hospitalisations, de consultations et de réformes parmi
les militaires (4). Elles seraient en cause dans 30 % des Tableau I. Accidentologie du personnel militaire de l’armée de Terre
en métropole.
hospitalisations (5, 6) et dans 51 % de cas de réformes et
de séquelles fonctionnelles (7, 8). Dans l’armée
américaine, le pourcentage de consultations pour nombre de Nombre de
% %
maladies est égal au pourcentage de consultations pour cas 2007 cas 2008
blessures lors de la période des classes, ainsi que dans
les unités d’infanterie (80 à 100 consultations pour Activité
433 12 339 12
blessure pour 100 soldats par an) (5). professionnelle
En reprenant les chiffres de Jones (9), un quart des
décès survenus en 1994 serait liés à l’entraînement ou au Activité typiquement
sport (60/240), la moitié des incapacités serait lié à ces militaire
1 201 34 1 013 37
mêmes accidents (2 400/4 500) de même que la moitié
des consultations (240 000/440 000).
Concours divers 3 0 0
Épidémiologie des risques vitaux.
En dehors de toute notion d’accident ou de traumatisme, Déplacement en
191 5 117 4
la pratique d’activités physique est connue pour être service
pourvoyeuse de décès au cours ou au décours immédiat
de l’effort, y compris chez des sujets jeunes, entraînés et
Déplacement sans
sans aucune pathologie connue. Ces décès ont représenté lien avec le service
8 0 8 0
6 % de l’ensemble des décès recensés dans les forces
armées américaines entre 1996 et 1999 (10) ; aucune
donnée récente n’est disponible pour l’armée française. Missions de police 1 0 2 0
Les causes les plus fréquentes sont les accidents
cardiovasculaires, les coups de chaleur d’exercice et
les noyades.
Sport 1 396 40 1 061 38

Épidémiologie des blessures musculo-


squelettiques. Tâches de sécurité
20 1 19 1
ou de sûreté
Les blessures liées à l’entraînement militaire, à la
pratique sportive, aux chutes et aux accidents de véhicules
à moteur sont parmi les plus importantes causes Trajet 112 3 93 3
de morbidité pour le personnel militaire (4). Il peut être
retenu que 20 % des hospitalisations sont liées à
des problèmes musculo-squelettiques dans l’armée Vie courante 137 4 108 4
américaine (de 14 % pour l’armée de l’Air à 21 % pour
la Marine).
Cette responsabilité du sport comme premier
pourvoyeur de traumatismes a été rapportée dans l’armée Somme : 3 502 100 2 760 100

française en 1997 (11) où 28 % des militaires ont déclaré

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 467
Ainsi, en corollaire des bienfaits pour la santé d’une Les accidents cardiovasculaires à l’effort chez les
activité physique régulière existent des risques liés à la sportifs sont classiquement repartis en deux grandes
préparation physique, en particulier dans les armées. catégories. La première correspond à une tranche d’âge
Nous scinderons de manière didactique les risques liés de 18 à 35 ans dans laquelle sont décrits des accidents
à cette préparation physique en risques vitaux majeurs survenant chez des sujets sans antécédents ni facteurs de
mais rares et des risques fonctionnels plus bénins, mais risques, le plus souvent sur un cœur présentant une
extrêmement fréquents. anomalie constitutive. Le mode de révélation est
majoritairement la mort subite au cours ou au décours
Les risques vitaux. immédiat d’une activité physique. La seconde correspond
aux personnes de plus de 35 ans, présentant un ou
La pratique d’activités physiques intenses est connue plusieurs facteurs de risques cardiovasculaires, chez
depuis longtemps pour être parfois responsable de décès qui la pathologie athéromateuse est la plus fréquente.
(le cas du soldat de marathon est fréquemment cité), Cette classif ication sera appliquée à la population
même si on exclut les causes traumatiques qui ne militaire dans cette revue parce que d’une part les
seront pas envisagées dans ce chapitre. La survenue données épidémiologiques suggèrent qu’elle est
d’un décès au sein d’une population militaire majo- applicable au sein des armées et d’autre part les actions de
ritairement jeune et considérée comme saine est prévention à proposer sont très différentes. La première
toujours traumatisante pour la famille, les camarades, catégorie relève d’une prévention dite « de masse »
le commandement et les intervenants médicaux. Le alors que la seconde relève plus d’une prévention
militaire sportif véhicule une image de bonne santé, médicale individualisée.
de force voire d’ « invulnérabilité » cultivée par la
communauté militaire, aussi l’impact émotionnel d’un
accident grave ou d’un décès, vécu comme inexplicable et La mort subite d’origine cardiaque du
injuste, est considérable. L’importance des décès non sujet jeune.
traumatiques liés à l’exercice dans les armées n’est pas
connue en France. Leur incidence dans les forces armées La littérature portant sur la mort subite du jeune sportif
américaines entre 1996 et 1999 était de 4,3/100 000 en relation avec l’activité physique repose principalement
personnes année (10). Les causes les plus fréquentes sont sur des études menées à l’étranger sur des populations très
les accidents cardiovasculaires, les coups de chaleur variées. La mort subite se définit comme un décès non
d’exercice et les noyades. traumatique, inattendu, résultant d’une cause naturelle, et
Les accidents cardiovasculaires à l’exercice représentent ayant lieu dans l’heure suivant l’apparition du premier
un groupe polymorphe de symptômes et de pathologies symptôme (15). Elle est considérée comme étant liée à
révélées par l’exercice, qui ont en commun une potentielle l’exercice quand elle survient au cours d’un exercice, ou
dans l’heure qui suit l’arrêt de l’exercice (16). Certains
gravité extrême, puisqu’ils sont les plus grands
auteurs considèrent cependant que le lien à l’exercice
pourvoyeurs de décès d’origine non traumatique au cours
peut-être retenu si le décès a lieu dans les 24 heures
de la pratique sportive.
suivant un exercice très intense (17, 18). La majorité de
Les accidents cardiovasculaires à l’effort ne font pas ces décès sont d’origine cardiovasculaire.
l’objet d’une surveillance épidémiologique spécifique
dans les armées françaises et leur incidence actuelle est
mal connue. Ils sont déclarés au sein des « accidents
Épidémiologie dans la population générale.
cardiovasculaires » qui ont pour critères de déclaration : Les études rétrospectives ou prospectives menées sur
« Premier épisode d'une affection aiguë de type de grandes populations de sportifs estiment l’incidence
angor, syndrome de menace, infarctus constitué, trouble de la mort subite d’origine cardiaque à 1 à 5 pour 100 000
du rythme ventriculaire ou rupture d'anévrisme cérébral, sportifs (15, 16), ce qui représente un risque 2 à 3 fois plus
quelles que soient les circonstances de survenue (au repos important que dans une population non sportive (19). Ces
ou à l'effort) ». Des études portant sur la population décès surviennent le plus souvent chez les hommes (sex-
militaire française ont envisagé ces pathologies, ratio : 10/1), au cours de la deuxième décennie. Dans ces
spécifiquement ou au sein d’études plus larges dans études portant sur la mort subite du sportif, environ 80 %
les années quatre-vingt (12-14). Cependant aucune des décès ont lieu pendant l’effort ou dans l’heure qui suit
étude n’a été publiée depuis la professionnalisation (15). Les étiologies retrouvées dans la population
des armées. Les données bibliographiques les plus générale sont bien décrites, reposent en majorité sur des
récentes reposent donc sur des études de populations anomalies cardiaques congénitales ou acquises non
de sportifs civils ou de militaires étrangers. Cette dépistées, mais leur fréquence dépend de la population
bibliographie est partielle dans la mesure où elle étudiée. Les données américaines rapportent une
s’intéresse majoritairement à la mort subite du sportif, et majorité (environ 35 %) de décès en relation avec des
ne rend pas compte d’un certain nombre d’autres cardiomyopathies hypertrophiques (CMH) (20), les
événements pathologiques (en particulier ischémiques), études italiennes décrivent elles une prédominance des
qui ne sont pas recensés ou qui se limitent à des symptômes dysplasies arythmogènes du ventricule droit et des
que les sujets ne déclarent pas. anomalies congénitales des artères coronaires (15). Les

468 j.-y. cravic


autres pathologies pourvoyeuses de mort subites à Épidémiologie dans la population militaire
l’exercice sont bien décrites : les myocardites, les française.
cardiomyopathies dilatées, les anomalies valvulaires, les
troubles de la conduction, les troubles du rythme de tous Les études publiées sur des militaires français
types et les ruptures aortiques dans les syndromes de remontent toutes aux années quatre-vingt. Deux d’entre
Marfan (15, 20-24). Il faut noter que selon les études, le elles portent spécif iquement sur les pathologies
pourcentage des cas de mort subite restant inexpliquées médicales observées dans les armées au cours de la
après autopsie varie de 5 % à 35 % (25), différences pratique sportive (13, 14). Ces études portent sur des
s’expliquant à la fois par des procédures d’autopsie durées courtes (1 et 3 ans respectivement) et ne permettent
différentes (en particulier en termes d’anatomo- pas de dégager clairement les étiologies en cause dans les
pathologie) ou des pathologies survenant sur cœur cas de mort subite. Elles fournissent cependant des
« sain » (26). Les activités physiques en cause dans les informations importantes quant aux circonstances de
morts subites sont variées et dépendent principalement survenue des accidents cardiovasculaires : 1) ils
du pays d’origine de l’étude (27, 28), aussi il faut surviennent quel que soit le niveau d’entraînement des
considérer que toute activité sportive d’intensité sujets ; 2) tous les types d’activités physiques sont
moyenne à importante peut être pourvoyeuse de mort pourvoyeurs de mort subite ; 3) les marches, marches
subite du sujet jeune (29). course et course à pied, activités physiques intenses très
pratiquées dans les armées, sont les principaux
Épidémiologie dans la population militaire. pourvoyeurs d’accidents.
Ces notions sont retrouvées dans des études menées à
Dans une étude rétrospective portant sur dix années
l’étranger (30, 33). Des données récentes partielles
(1968-1977), 56 cas de mort subites ont été rapportés
(données non publiées Département d’Epidémiologie et
dans l’armée Britannique au cours de la pratique sportive
de Santé Publique (DESP) nord) suggèrent qu’environ 30
(incidence 3,5 pour 100 000) (30). Seuls sept cas
décès, dont cinq d’origine cardiovasculaire chez des
concernaient des causes cardiaques chez des sujets jeunes
sujets jeunes, sont survenus dans les armées au cours
(principalement anomalies congénitales des coronaires),
d’exercices physiques entre 2005 et 2008. Ces chiffres ne
neuf autres cas étaient des hémorragies cérébrales.
L’incidence des décès au sein de la population militaire de sont que des données brutes non traitées et ne permettent
moins de 40 ans était plus importante que dans la pas d’analyser plus finement les conditions de survenue
population civile (31). Deux importants travaux portant ou les caractéristiques des sujets. Aucune étude
sur la mort subite des jeunes militaires dans l’armée rétrospective ou prospective complète n’a été publiée
israélienne ont été publiées (17, 32). La première recense sur la population militaire française actuelle, de plus en
tous les décès par mort subite chez les jeunes militaires plus féminisée (environ 15 % en 2009), composée de
(17-30 ans), porte sur 12 ans et montre une prédominance militaires professionnels issus de classes sociales
des CMH et des myocardites dans les décès d’origine moins variées que lors de la conscription et soumis à
cardiaque, sans qu’un lien avec l’exercice ne soit précisé un rythme d’entraînement et de missions très différent
(17). La seconde étude porte sur les décès observés de celui des années quatre-vingt.
parmi les recrues de l’armée israélienne de 1974 à 2002,
elle montre aussi une prédominance des causes Les facteurs de risques.
cardiovasculaires (CMH, myocardites et troubles du
rythme). Dans les deux cas, l’incidence de ces accidents La mort subite cardiaque survient sur un cœur ou des
cardiovasculaires dans les populations militaires coronaires pathologiques. Les facteurs de risques
observées n’est pas connue. intrinsèques sont le sexe, avec une prédominance de
L’étude la plus récente et la plus complète est issue la mort subite chez l’homme, et les antécédents
de l’armée américaine (33). Elle porte sur tous les décès familiaux proches de mort subite inexpliquée avant
d’origine non traumatiques parmi les recrues de toutes 35-45 ans. Le rôle du tabagisme chronique n’est
les forces armées américaines entre 1977 et 2001, pas avéré, la consommation aiguë pouvant être à
soit 276 cas, en identifiant clairement les cas liés à la l’origine d’un spasme coronarien au décours de
pratique de l’exercice physique. Les décès d’origine l’exercice. Enf in l’existence d’un état grippal dans
cardiovasculaires au cours et au décours d’un exercice la semaine précédant un exercice intense est un facteur
représentent 49 % du nombre total des décès non de survenue de myocardite.
traumatiques, avec une prédominance des anomalies des
artères coronaires (27 %) et des myocardites (12 %). Prévention de la mort subite du sujet jeune.
L’armée de Terre et les Marines ont des taux d’incidence
plus importants de ces décès non traumatiques que la En l’absence de données portant sur des populations
Marine et l’armée de l’Air. Le taux d’incidence rapporté militaires, les moyens de prévention de la mort subite
pour les femmes est plus faible, confirmant les données ont été analysés dans la littérature portant sur les athlètes
d’une autre étude (34). Chez ces dernières, le faible et sportifs civils.
nombre de cas ne permet pas de dégager de pathologies La mort subite est souvent la première et dernière
plus fréquentes que d’autres. manifestation d’une pathologie cardiaque survenant

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 469
chez un sujet apparemment sain. La prévention de des patients décédés ont un ECG normal au repos (37).
ces accidents repose sur la sélection médicale et la Les pathologies ayant entraîné une interdiction de
diffusion de messages sur les règles de pratique de compétition dans l’étude italienne sont rapportées (15).
l’activité physique. Les troubles du rythme et les anomalies de la conduction
L’efficacité de la prévention par la sélection médicale a représentent 39 % des inaptitudes, suivis de
été bien démontrée dans une vaste étude prospective l’hypertension artérielle (23%) des anomalies valvulaires
italienne portant sur 25 ans et regroupant 42 386 jeunes (21 %) et des cardiomyopathies (principalement
sportifs (15, 35). La mise en place d’une sélection hypertrophiantes) (7 %).
médicale obligatoire pour l’inscription à un sport en Dans l’armée française ou les armées étrangères,
compétition a fait reculer l’incidence des morts subites aucune donnée sur l’efficacité de la sélection médicale
d’origine cardiovasculaire de 4,19/100 000 à n’est disponible. Cependant, en comparaison des sujets
2,35/100 000 sur les 12 premières années de l’étude, puis de la même classe d’âge de la population générale,
0,87/100 000 sur les 13 dernières années d’étude. La l’incidence de l’ensemble des décès d’origine non
visite médicale d’aptitude comporte un interrogatoire traumatiques est plus faible chez les recrues des armées
très ciblé sur les antécédents cardiovasculaires familiaux américaines, ce qui suggère que la sélection médicale
et personnels, un examen clinique et un ECG de repos 12 dépiste efficacement une partie des sujets à risques (33).
pistes. Les critères de positivité (en particulier électriques) Cependant ces données prennent en compte des
sont clairement codifiés et conduisent à une inaptitude pathologies non cardiovasculaires (infectieuses en
temporaire et un bilan cardiologique orienté pour particulier) et doivent être interprétées avec prudence.
décision (fig. 1). L’intérêt de l’ECG de repos a été très Les modalités de sélection et les critères d’aptitude
discuté par certains auteurs qui considèrent son rapport cardiovasculaire à la pratique du sport ont fait l’objet
coût/efficacité comme faible (20, 36), alors que d’autres de propositions détaillées (35), voire de consensus, et
le préconisent, tout en reconnaissant les limites car 90 % sont disponibles dans la littérature. Il faut citer les

Histoire et examen physique Électrocardiogramme à 12 dérivations

Histoire familiale ! Élargissement atrial gauche : portion négative de l’onde P


! Parent proche atteint victime d’un accident cardiaque en position V1 ≥ 0,1 mV de profondeur et ≥ 0,04 secondes
prématuré ou d’une mort subite à moins de 50 ans. en durée.
! Histoire familiale de cardiomyopathie, de maladie ! Élargissement atrial droit : pics de l’onde P dans les
coronaire, de syndrome de Marfan, de syndrome du QT long dérivations II, III ou V1 ≥ 0,25 mV.
! Déviation frontale de l’axe QRS : droite ≥ +120° ou gauche
congénital, d’arythmies sévères ou d’autres maladies cardio-
-30° à – 60°.
vasculaires invalidantes.
! Voltage augmenté : amplitude de l’onde R ou S en
Histoire personnelle dérivation standard ≥ 2 mV, de l’onde S en dérivation V1 ou
! Syncope ou pré-syncope. V2 ≥ 3 mV, ou de l’onde R en dérivation V5 ou V6 ≥ 3 mV.
! Ondes Q anormales ≥ 0,04 s en durée ou ≥ 25 % de la
! Douleur ou gène thoracique à l’effort.
durée de l’onde r suivante, ou motif QS dans au moins 2
! Dyspnée ou fatigue hors de proportion avec l’intensité de dérivations.
l’effort physique. ! Bloc de branche droit ou gauche avec durée QRS ≥ 0,12 s.
! Palpitations ou battements cardiaques irréguliers. ! Onde R ou R’ d’amplitude ≥ 0,5 mV dans la dérivation V1
et ratio R/S ≥ 1.
Examen physique ! Sous-décalage du segment ST, ou aplatissement ou
! Signes musculo-squelettiques et oculaires évoquant un inversion de l’onde T dans au moins deux dérivations.
syndrome de Marfan. ! Prolongation de l’intervalle QT ≥ 0,44 s chez les hommes
! Pouls artériels fémoraux diminués et retardés. et ≥ à 46 s chez les femmes.
! Battements ventriculaires prématurés ou arythmie
! Clicks en milieu ou fin de systole.
ventriculaire.
! Dédoublements pathologiques du second bruit du cœur. ! Tachycardie supra-ventriculaire, flutter ou fibrillation
! Souffles cardiaques (systoliques ≥ 2/6 et tous les souffles auriculaire.
diastoliques quel que soit leur intensité). ! Pré-excitation ventriculaire : intervalle PR court (< 0,12 s)
avec ou sans onde delta.
! Rythme cardiaque irrégulier.
! Bloc auriculo-ventriculaire du premier degré (PR ≥ 0,21 s,
! Pression artérielle au bras ≥ 140/90 mmHg constatée à qui ne diminue pas avec l’hyperventilation), second degré ou
plus d’une mesure. troisième degré.

Figure 1. Antécédents, examen clinique et ECG justifiant une consultation cardiologique dans le cadre d’une aptitude préalable à la compétition (adapté d’après 15).

470 j.-y. cravic


recommandations de l’American College of Cardiology milieu militaire, insistent sur l’importance des
(Bethesda 2004) qui proposent des critères d’aptitude prodromes, en particulier ceux qui apparaissent
et d’inaptitude à la pratique d’activités sportives pour à l’exercice. Les syncopes et douleurs thoraciques sont
les sujets présumés sains, mais qui entrent également les plus évocatrices et sont les plus fréquemment citées
dans le détail des modalités de pratique de l’exercice (18), mais des symptômes plus frustres tels que des
pour chaque pathologie cardiovasculaire (29, 38-46). Ces essoufflements inhabituels et palpitations doivent attirer
recommandations, ainsi que les recommandations de l’attention de l’individu et des médecins (17, 25, 32, 47).
Lausanne (2004) qui proposent un examen médical type Les individus et l’encadrement doivent être clairement
ciblé sur la prévention de la mort subite cardiovasculaire informés et sensibilisés. À cet égard, le club des
au cours de la pratique sportive (fig. 2, 3). cardiologues du sport recommande depuis 2006 la
Le second axe de prévention repose sur une prévention diffusion très large des « Dix règles d’or de la bonne
de masse. De nombreuses études, menées notamment en pratique sportive » (fig. 3). Ces règles simples ont pour

Histoire familiale
! Mort soudaine prématurée d’origine cardiaque
! Maladie cardiaque chez un parent proche de moins de 50 ans

Histoire personnelle
! Souffle cardiaque.
! Hypertension artérielle systémique.
! Fatigue.
! Syncope/pré-syncope.
! Dyspnée excessive/inexpliquée à l’exercice.
! Douleur thoracique à l’effort.

Examen physique
! Souffle cardiaque (allongé/debout : identifier en particulier un souffle évoquant une obstruction de l’éjection ventriculaire
gauche).
! Pouls artériels fémoraux (exclure une coarctation de l’aorte).
! Signes évoquant le syndrome de Marfan.
! Mesure de la tension artérielle au bras (position assise).

Figure 2. Recommandations consensus de l’American Hearth Association pour la visite médicale d’aptitude des athlètes avant la participation à une compétition
(adapté d’après 161).

Cœur et Activité sportive :


« Absolument, pas n’importe comment »
LES 10 RÈGLES D’OR

Recommandations édictées par le Club


des Cardiologues du Sport :

1/ Je respecte toujours un échauffement et une récupération de 10 minutes lors de mes activités sportives.
2/ Je bois 3 à 4 gorgées d’eau toutes les 30 minutes d’exercice à l’entraînement comme en compétition.
3/ J’évite les activités intenses par des températures extérieures inférieures à -5 °C ou supérieures à 30 °C.
4/ Je ne fume jamais 1 heure avant ni 2 heures après une pratique sportive.
5/ Je ne prends pas de douche dans les 15 minutes qui suivent l’effort.
6/ Je ne fais pas de sport intense si j’ai de la fièvre, ni dans les 8 jours qui suivent un épisode grippal (fièvre + courbatures).
7/ Je pratique un bilan médical avant de reprendre une activité sportive intense si j’ai plus de 35 ans pour les hommes et 45 ans pour
les femmes.
8/ Je signale à mon médecin toute douleur dans la poitrine ou essoufflement anormal survenant à l’effort.*
9/ Je signale à mon médecin toute palpitation cardiaque survenant à l’effort ou juste après l’effort.*
10/ Je signale à mon médecin tout malaise survenant à l’effort ou juste après l’effort.*
* quels que soient mon âge, mes niveaux d’entraînement et de performance, ou les résultats d’un précédent bilan cardiologique.

Figure 3. Les « dix règle d’or » diffusées par le Club des Cardiologues du Sport dans le cadre d’un programme de prévention des accidents
cardiovasculaires à l’exercice.

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 471
but de sensibiliser la population sportive aux bonnes et représenté plus de 50 % des décès par mort subite liée à
mauvaises habitudes dans leur pratique sportive, avec l’exercice (10, 58). Cependant ces études ne prennent en
pour objectif de réduire la survenue d’accidents compte que les décès et ne rendent pas compte de tous les
cardiovasculaires en relation avec l’exercice. Cette IDM et autres accidents ischémiques. Dans l’armée
campagne de prévention s’appuie sur de nombreux française, l’incidence des IDM au cours de la pratique
supports tels que conférences, spots vidéo impliquant des sportive a été étudiée dans les années quatre-vingt avec
sportifs connus, affichage dans les structures sportives et des taux d’incidence rapportés variant de 3/100 000 (14) à
parcours sportifs publics, fiches personnelles et diffusion 43/100 000 (Hiltenbrand 1983, cité par Seigneuric (57)).
par voie de presse. Aucune statistique récente n’a été publiée, mais le
recueil épidémiologique du SSA a recensé dix décès par
La pathologie ischémique. IDM survenu au cours ou au décours d’un effort chez
les militaires français sur la période 2005 et 2008
La pratique régulière d’une activité sportive diminue (données DESP nord).
significativement le risque de survenue d’accidents Dans tous les cas étudiés, l’intensité de l’effort pratiqué
cardiovasculaire chez le sujet sain et la mortalité chez les semble plus déterminant que le type d’exercice ou de
patients présentant une coronaropathie (48). Cependant, sport en cause, ce dernier n’étant probablement qu’un
l’exercice physique intense peut aussi être un déclencheur reflet de la fréquence de pratique des disciplines dans les
d’infarctus du myocarde (IDM) conduisant parfois à la populations observées (52). Ainsi dans les armées,
mort subite (49-51). Les mécanismes physiopathologiques françaises ou étrangères, les sports individuels, collectifs
retrouvés sont classiquement la rupture de plaque avec et les activités physiques militaires (marche, marche
thrombose et spasme coronaire, mais aussi des spasmes commando, parcours d’obstacle) sont diversement
coronaires seuls, qui pourraient être plus fréquents chez représentés (10, 14, 30). En l’absence de surveillance
les sportifs que chez les sujets sédentaires (52). En effet, épidémiologique spécif ique, les circonstances de
les lésions identif iées sont le plus souvent mono- survenue sont le plus souvent mal définies, en particulier
tronculaires et près de 20 % des coronarographies sont les notions de séance à caractère obligatoire ou relevant
négatives, suggérant une fréquence accrue des IDM sur d’un examen ne sont pas connues.
artères coronaires saines.
Facteurs de risques.
Épidémiologie.
Les facteurs de risques intrinsèques sont tout d’abord
L’incidence des IDM au cours ou au décours immédiat les facteurs de risques cardiovasculaires (FRCV)
de l’exercice est mal connue et n’a pas fait l’objet d’étude classiques, cependant chez des patients ayant présenté
à grande échelle publiée. Les IDM liés à l’exercice un IDM à l’effort, le tabagisme, les dyslipidémies et
semblent représenter une faible proportion de la totalité l’obésité sont plus fréquemment retrouvés que dans une
des IDM recensés dans la population générale (53), le population ayant présenté un IDM « au repos » (49). Par
chiffre de 4,4 % a été rapporté par Mittleman (50). Il s’agit ailleurs le risque relatif d’IDM à l’effort est très supérieur
très majoritairement de sujets sportifs de sexe masculin chez les sujets peu entraînés (50).
âgés de 35 ans et plus, population dans laquelle la maladie Enfin la prise d’une douche chaude ou l’inhalation
athéromateuse est responsable de 80 % des morts subites de fumée de tabac immédiatement après l’effort
aux USA (54). En France, deux études prospectives sont retrouvés dans plus de 10 % des cas d’IDM
régionales, menées dans le Dauphiné et en Aquitaine, au décours de l’effort. Ces pratiques favoriseraient
permettent d’avoir des taux d’incidence dans la les spasmes coronaires et limiteraient l’apport en
population générale (55, 56). Les IDM non mortels oxygène, la diminution de la pression artérielle et de
survenus lors d’une activité sportive avaient une la fréquence cardiaque.
incidence respectivement de 2,17/100 000 et 2,4/100 000 Les facteurs de risques extrinsèques rapportés dans
habitants/an, avec un pic de fréquence entre 45 et 64 ans. la littérature sont le stress, la pollution atmosphérique et
Les incidences d’IDM mortels rapportées étaient de les conditions climatiques défavorables, comme le froid
0,85/100 000 habitants/an en Dauphiné versus intense ou la chaleur excessive qui par des mécanismes
1,74/100 000 habitants/an en Aquitaine. Bien que portant physiopathologiques différents augmentent la charge de
sur des périodes et des régions restreintes, ces données travail cardiaque à l’exercice (52).
permettent d’apprécier la fréquence de survenue de ces En l’absence d’études spécif iquement militaire
accidents dans la population générale en France. Comme récente, il n’est pas possible de définir des facteurs de
le notent les auteurs, le nombre croissant de personnes risques plus typiquement militaires.
pratiquant des activités sportives de loisir laisse présager
un nombre de cas d’IDM d’effort important dans la Prévention.
population française.
La survenue de ces accidents dans la population La prévention des accidents cardiovasculaires
militaire est connue et rapportée depuis longtemps (57). ischémiques repose trois types d’actions :
Dans deux études portant sur plus 10 ans et sur 3 ans, – la sélection médicale et la définition de l’aptitude
(armées britannique et américaine), les IDM ont est un point clé de la prévention. Les recommandations

472 j.-y. cravic


citées plus haut (recommandations de Bethesda et publications émanent de l’armée américaine et de
recommandations de Lausanne) s’appliquent pleinement l’armée israélienne qui ont réalisé un très grand nombre
et insistent sur la détection par interrogatoire des FRCV. d’études et travaux sur les pathologies liées à la chaleur en
Le recours à une consultation cardiologique pour des milieu militaire (62-67). Les pathologies liées à la chaleur
examens complémentaires est recommandé devant toute ont été à l’origine de 5 246 hospitalisations dans l’armée
anomalie à l’examen clinique ou l’ECG de repos, ainsi américaine en 23 ans (68) et les CCE sont responsable de
que pour tout homme de plus de 40 ans ou toute femme de 16 % des décès non traumatiques parmi les recrues
plus de 55 ans présentant 2 FRCV (45). À noter que pour américaine dans l’étude de Scoville (33). L’entraînement
les athlètes de haut niveau, le suivi longitudinal impose physique et les opérations menées en climat chaud sont
une échographie au début de la carrière sportive ; fréquents et le port de tenues militaires (treillis,
– la prise en charge personnalisée des patients à FRCV protections balistiques et dans le pire des cas protection
avérés s’entend à la fois sur le plan médical et sur le plan NRBC) représente une contrainte pour la dissipation de la
des conseils dans les modalités de pratique des activités chaleur, augmentant le risque de CCE (69-71).
physiques. Les recommandations de Bethesda permettent L’épidémiologie de cette pathologie dans l’armée
à la fois une évaluation du risque et des règles de pratique française est bien connue car elle fait l’objet d’une
sportive adaptées, surtout en termes d’intensité d’exercice surveillance épidémiologique spécifique depuis 1995.
(46). Elles prévoient par ailleurs une information Dans un rapport récent portant sur trois années (2005-
concernant les symptômes qui doivent alerter l’individu 2007), 322 cas de CCE ont été rapportés, avec pour
et l’amener à consulter au plus vite ;
critères de déclaration « hyperthermie ≥ 39 °C au
– enf in la prévention repose sur des actions de
masse avec sensibilisation des individus sur des règles moment du malaise (thermomètre tympanique) et
d’hygiène de vie (lutte contre les FRCV) et sur des règles troubles neurologiques survenus au cours ou au décours
de bonne pratique du sport. La encore, la diffusion immédiat d’un effort musculaire intense et prolongé »
large des « Dix règles d’or de la bonne pratique sportive » (72). L’incidence du CCE était de 31,2/100 000 en
a tout son intérêt. Un enseignement large des gestes moyenne, l’incidence outre-mer étant 2,5 fois plus élevée
de premier secours et de l’utilisation du défibrillateur qu’en métropole, et plus importante chez les hommes que
semi-automatique pourrait être utile dans ces actions chez les femmes. Enfin le nombre de cas et l’incidence
de masse (41). étaient plus élevés dans l’armée de Terre que dans les
Aucune action de prévention des accidents autres armées, la marche-course étant à elle seule
cardiovasculaire à l’exercice en milieu militaire n’a été responsable de 60 % des cas déclarés. Vingt-quatre
trouvée dans la littérature, en dehors de la sélection patients ont présenté un coma et deux sont décédés,
médicale initiale et du contrôle de l’aptitude. En somme, soulignant la gravité potentielle du CEE.
l’incidence des accidents cardiovasculaires liés à
l’exercice dans les armées est mal connue car seuls les Les facteurs de risques.
accidents les plus dramatiques sont recensés et étudiés. Si
la sélection médicale initiale est une mesure de prévention Les facteurs de risques de survenue d’un CCE sont
efficace en place dans les armées, la potentielle gravité de nombreux et pour l’essentiel bien documentés. Ce sont
ces accidents doit poser la question d’autres actions de principalement les facteurs climatiques, les facteurs de
prévention spécifiques. moins bonne tolérance à la chaleur, auxquels s’ajoutent
des facteurs plus circonstanciels. Ils ont été largement
repris dans des revues générales récentes (64, 67).
Le coup de chaleur d’exercice. Les facteurs intrinsèques sont l’âge (> 40 ans), une
petite taille, une faible capacité aérobie. Le rôle du
Le coup de chaleur d’exercice est la forme la plus grave surpoids ou d’un index de masse corporelle élevé a été
de pathologies liées à la chaleur et fait courir un risque discuté, mais n’est pas toujours retrouvé (73, 74). Les
important de décès. Depuis la conférence de Sydney antécédents personnels d’intolérance à la chaleur, de
(1987) consacrée aux pathologies liées à la chaleur, le pathologie cardiovasculaire, d’anomalie métabolique ou
coup de chaleur d’exercice (CCE) se déf init par
maladie cutanée compromettant la sudation constituent
l’association d’une hyperthermie supérieure à 40 °C, de
signes neurologiques centraux et d’une rhabdomyolyse un risque supplémentaire (75). Les risques surajoutés
d’intensité variable, survenant chez des sujets sains, sont une prise médicamenteuse ou une vaccination
pendant ou au décours immédiat d’un effort physique récente. Les risques intrinsèques circonstanciels
intense et prolongé dans une ambiance plus ou moins sont extrêmement importants dans la genèse du CCE, les
défavorable (cité par Carpentier (59)). plus importants étant la déshydratation, la fatigue, la
privation de sommeil, l’absence d’acclimatation à la
Épidémiologie. chaleur ou une forte motivation. Des données sug-
gérant des susceptibilités ethniques émanent d’une
Il s’agit d’une pathologie fréquente dans le monde étude américaine qui montre que les africains-américains
sportif (60) qui a fait l’objet d’un intérêt croissant ces et les hispaniques sont moins souvent victimes de
quinze dernières années, en particulier dans la pathologies liées à la chaleur, cependant, le facteur
communauté militaire (61). Les plus importantes acclimatation pourrait être un facteur confondant car ces

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 473
populations sont plus souvent issues des états chauds Un grand nombre de ces outils de prévention sont
du sud des États-Unis (68). disponibles en ligne sur le site de l’U.S. Army Center for
Les facteurs extrinsèques sont des facteurs d’ambiance Health Promotion and Preventive Medicine (http://
climatique qui compromettent la thermorégulation ou chppm-www.apgea.army.mil/heat).
augmentent la charge thermique (76). La température En somme le CCE est une pathologie potentiellement
ambiante élevée, une charge radiante importante (soleil, mortelle et fréquente dans les armées. L’efficacité d’une
sol restituant ou réfléchissant les radiations solaires), prévention bien menée à été montrée (33) et une large
hygrométrie élevée et absence de vent (60, 65, 77, 78). information est déjà délivrée dans l’armée française.
Cependant, bien que la survenue de CCE connaisse des En particulier l’éducation sanitaire portant sur la prise
pics saisonniers durant les mois chauds de l’année (78, en charge initiale semble bien acquise, car 96 % des
79), il ne faut pas méconnaître d’authentiques CCE en patients victimes de CCE dans les armées ont été
ambiance neutre ou froide (80), dans lesquels le rôle du refroidis précocement (72). Pourtant l’incidence de
vêtement porté est parfois déterminant (70). cette pathologie reste élevée, en particulier outre-mer
et l’existence d’un état des lieux précis et récent est un
Prévention. atout pour envisager la mise en place d’une stratégie de
prévention plus large.
La grande fréquence des pathologies liées à la chaleur
dans le monde sportif et dans les armées a fait développer
depuis longtemps des stratégies de prévention visant Les autres causes de mort subite et
à en limiter la survenue et la gravité (81-83). Le décès liés à la pratique d’un exercice
programme de prévention le plus développé est celui de physique.
l’armée américaine qui sera présenté ici. Les bases de la
prévention des pathologies liées à la chaleur dans l’armée
américaine sont 1) la sélection médicale, 2) l’amélioration Épidémiologie.
de la tolérance individuelle à la chaleur (entraînement,
acclimatation, hydratation), 3) la réduction de la charge Les autres causes de décès liés à l’exercice sont plus
thermique (se protéger de la chaleur ambiante, adapter rares et leur incidence n’est pas rapportée dans la
l’exercice et les vêtements) (66, 84). littérature. Les causes neurologiques, avec l’épilepsie et
La sélection médicale est incontournable et repose les hémorragies cérébrales par rupture d’anévrysme, sont
sur la recherche de facteurs de risques constitutifs ou régulièrement rapportées dans les études militaires (14,
passagers (vaccinations, état infectieux…) qui 17, 30, 33). Les autres étiologies rapportées sont l’asthme
contre-indiqueraient la pratique sportive en ambiance lié à l’effort, la crise drépanocytaire, les noyades, la prise
climatique à risque. Un aspect particulier est l’aptitude de stimulants (25, 32, 33).
future des patients victimes d’un CCE, pour qui il Les décès par noyades rapportées dans la littérature
faut caractériser la tolérance à la chaleur par des tests militaire représentent parfois un pourcentage
physiologiques (85, 86). important des décès recensés. Une étude américaine
Les autres aspects de la prévention s’appuient sur une récente les chiffrait à 20 % des décès non trauma-
éducation sanitaire adaptée à tous les militaires et une tiques liés à l’exercice (10). En France, la surveillance
éducation sanitaire ciblée visant le commandement et épidémiologique du SSA a sept décès par noyade sur
les cadres de contact. Les messages délivrés concernent la période 2005-2008 (données DESP nord). Bien
la connaissance des pathologies liées à la chaleur qu’elles ne fassent pas l’objet d’études publiées,
l’évaluation du risque sur le plan individuel et collectif, l’incidence des noyades en milieu militaire semble
l’adaptation de l’effort, des périodes de repos et des donc élevée, cependant elles arrivent dans des
vêtements en fonction du risque, enf in les règles circonstances très différentes, souvent diff iciles à
d’hydratation. L’enseignement porte par ailleurs sur la déterminer avec précision, et qui rendent l’analyse des
connaissance des symptômes de CCE et des gestes de cas diff icile. En effet, les causes ou circonstances
prise en charge initiale des patients. L’armée américaine a rapportées sont aussi variées que l’épuisement, les
développé des supports variés pour la prévention des malaises, les chocs thermiques en eau froide,
pathologies liées à la chaleur, avec la mise en œuvre l’alcoolisation aiguë, les crises comitiales… (10, 87).
d’outils prédictifs basés sur une mesure objective simple,
celle de la température WBGT (Wet Bulb Globe Prévention.
Temperature) qui permet de caractériser l’ambiance
thermique. En se référant à des abaques, cette mesure Étant donné la rareté de ces accidents durant la pratique
permet alors au commandement d’adapter les activités, sportive, aucune prévention spécifique n’est proposée
les périodes de repos et les apports hydriques. Par ailleurs, dans la littérature. Seule l’anamnèse lors d’une visite
l’armée distribue largement des brochures, des posters et médicale d’aptitude peut amener à diagnostiquer une
des cartes individuelles qui synthétisent les informations pathologie avérée qui contre-indique la pratique sportive
clés et constituent une aide claire et objective pour ou nécessite une adaptation des modalités de cette
chacun. Il faut noter que la surveillance épidémiologique pratique. La prévention des noyades n’est pas traitée dans
constitue un élément clé de ce dispositif de prévention. la littérature militaire.

474 j.-y. cravic


Pour conclure ce chapitre il faut évoquer la prise de sexe, mais à un niveau plus faible de condition physique
substances illicites pouvant être impliquées aussi bien au moment de l’incorporation (96, 97).
dans la survenue d’accidents vitaux (IDM, CCE) que Le taux de blessures lors de l’entraînement militaire
dans la survenue de blessures musculo-squelettiques. peut être comparé à celui survenant chez des sportifs
Les substances dopantes les plus fréquemment utilisées civils et des athlètes. Les études montrent que le taux de
par les sportifs sont les anabolisants, les corticostéroïdes, blessures, pour les jeunes recrues ou pour les fantassins,
les stimulants (amphétamines, éphédrine, cocaïne), apparaît comme identique ou légèrement plus élevé que
l’érythropoïtine, l’hormone de croissance. Nombre de celui observé chez des coureurs à pied dans le monde
ces substances ont des effets soupçonnés ou démontrés civil, mais plus faible que celui observé dans des sports de
sur les fonctions cardiovasculaires, tant dans le cadre contact (football américain, rugby…) (93).
d’une prise aiguë (cocaïne, amphétamines) que d’une Dans les indicateurs retenus, le taux de consultations
consommation chronique (stéroïdes anabolisants) (39, chez les jeunes recrues est identique pour les blessures et
88, 89). Dans les armées françaises, une augmentation de les maladies en termes de morbidité. Mais ce taux de
la déclaration de consommation de certains médicaments consultation ne donne qu’un tableau partiel de la
sous l’effet d’un accroissement de l’activité physique a morbidité, car il ne prend pas en compte les journées de
été rapportée (11). Cette consommation concernait des travail perdues (tab.II).
« fortif iants » et des « produits pour augmenter les Les exemptions partielles de service (« limited
performances », posant bien sûr la question du dopage duty days») pour les jeunes recrues de l’armée américaine
dans certains cas. Le dopage dans les armées reste se révèlent être de 5 à 22 fois plus importantes
cependant un phénomène très peu connu en termes à la pour les blessures musculo-squelettiques que pour
fois de fréquence et de substances utilisées. les autres maladies.
D’autres études ont par la suite concerné des militaires
américains de différents âges, grades ou spécialités tout
Les affections concernant l’appareil au long de leur carrière. Pour les unités du Train, le taux de
musculo-squelettique. blessures (hommes et femmes confondus) est de 127
blessures/100 personnes-années, avec une moyenne de
Quelle est l’incidence du problème dans les populations 20 jours d’exemptions de service dans l’année. Les
militaires ? La majorité des articles trouvés lors de la principales localisations anatomiques des lésions étaient
recherche bibliographique concerne les militaires le rachis lombaire, le genou et la cheville. L’entraînement
américains des différentes armes. Quelques études
donnent des résultats concernant l’armée australienne
(90), britannique (91) ou norvégienne (92). Tableau II. Taux de blessures et de maladies pour 100 recrues/mois parmi les
La survenue de blessures musculosquelettiques liées jeunes recrues de l’armée américaine (D’après Jones, cité par Kaufman) (93).
à l’entraînement militaire est un problème majeur
en termes de coûts (hospitalisations, consultations,
réformes), de journées de travail perdues et de baisse de Taux de Taux de
Rate ratio (taux
la capacité opérationnelle dansl’armée américaine (93). Sexe blessure/
blessure maladie
taux maladie)
Le taux de blessures liées à l’entraînement physique peut
être estimé à 10 à 15 pour 100 recrues par mois pour les
sujets masculins, et 15 à 25 pour 100 pour les sujets
féminins. Ce taux peut varier par ailleurs de 6 à 12 % pour Toutes
l’infanterie à 30 à 35 % pour les commandos marine. Ce Consultations catégories 32.6 32.9 1.0
taux de blessure semble constant dans différentes confondues
populations, ainsi, Heir constate dans une population
d’appelés qu’un conscrit sur quatre a subi au moins une
blessure pendant sa période de classes (94). Une autre Homme 22,2 26,2 0,8
étude effectuée chez des officiers à l’École de guerre aux
États-Unis (moyenne d’âge de 43 ans) trouve un
Femme 39,5 37,4 1,1
pourcentage de blessures aux alentours de 50 % pour les
hommes en 1999 et 2000 (95).
L’incidence cumulée des blessures durant l’en-
Journées Toutes
traînement militaire de durées diverses varie de 8 % à de travail catégories 93,4 6,8 13,7
51 % pour les sujets masculins. Les recrues féminines perdues confondues
souffrent de presque deux fois plus de traumatismes
musculosquelettiques que leurs homologues masculins.
En particulier, les sujets féminins ont un risque de 1,2 à Homme 39,9 7,7 5,2
10 fois supérieur de souffrir de fracture de fatigue par
rapport à leurs homologues masculins (96).
Il faut noter dès maintenant que ce taux élevé de Femme 129,0 5,9 21,9
blessures chez les recrues féminines ne semble pas liée au

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 475
physique et le travail comme mécanicien étaient les deux Tableau III. Les blessures les plus fréquentes parmi les hommes et les femmes
principales causes de blessures. (98). lors du même programme d’entraînement physique militaire initial dans
l’armée américaine (96).
Une étude faite chez des militaires de l’infanterie
légère (99) rapporte que l’entraînement physique était
en cause dans 50 % des cas de blessures avec comme
cause la plus fréquente la course à pied, incriminée Classement
dans 30 % des cas. La lésion la plus fréquente concernait en Hommes Femmes
fréquence
le genou, puis le pied et la cheville. Dans une population
de parachutistes (100), un taux de 1,2 blessures par s
oldat par an est retrouvé, avec une moyenne de 13 jours
d’exemptions de service par soldat. Les fractures
par lésions traumatiques et les fractures de fatigue sont 1 Lombalgies (7,3 %) Lésions musculaires (15,6 %)
les blessures responsables de la plupart des jours de
travail perdus. Les blessures traumatiques chez ces
parachutistes militaires entraînés sont pour 30 % liées
à l’hypersollicitation et pour 60 % des lésions 2 Tendinopathies (6,5 %) Fracture de fatigue (12,3 %)
aiguës traumatiques.
Des études effectuées dans des unités du Génie et
de l’Artillerie ont montré un taux de blessures légèrement 3 Entorses (4,8 %) Entorses (5,9 %)
supérieur à ceux observés dans des unités d’Infanterie
(64 % pour le Génie, 56 % pour l’Artillerie comparé à
des taux de 51 %-55 % dans l’Infanterie) (101). Le type
de blessure le plus fréquent concerne le dos et les 4 Lésions musculaires (3,2 %) Tendinopathies (5,5 %)
membres inférieurs, en relation avec une hypersolli-
citation. Une explication envisagée est que les tâches
journalières de ces personnels comportent le port répété
5 Fracture de fatigue (2,4 %) « Genou forcé » (2,1 %)
de charges lourdes.
Un point intéressant à rapporter dans l’expérience
américaine est que les quatre principaux diagnostics
rapportés sur les théâtres d’opérations extérieures comme l’armée australienne ou britannique. Bien que les
ces quinze dernières années (dont Irak et Afghanistan) lombalgies soient citées comme première cause de
sont les lésions orthopédiques survenant en dehors blessures dans les différentes études, nous avons pris le
des opérations de combat, les affections respiratoires, parti de ne pas aborder le sujet car les lombalgies font
les affections cutanées (leishmanioses) et les affections l’objet d’un autre thème de prévention retenu cette année.
gastro-intestinales. (102). Durant la guerre du Golfe, Une étude concernant les nageurs de combat peut
la seconde cause d’hospitalisation sur le théâtre être citée, car elle implique un entraînement physique
d’opération était une lésion de l’appareil musculo- plus poussé : le taux de blessures chez ces stagiaires
squelettique (13 %), trois fois plus fréquente que le masculins est de 33 % sur une période d’entraînement
taux d’admission pour des blessures liées au combat. de 25 semaines, avec une répartition présentée sur le
Les fractures représentaient la première cause, suivies tableau IV. Ces blessures sont importantes en termes
des entorses. Dans les principales étiologies, la pratique
sportive était la troisième cause de traumatismes
Tableau IV. Les blessures les plus fréquentes (%) lors d’un entraînement
juste derrière les accidents de véhicules à moteur (18 %) intensif chez les fusiliers marins commandos (105).
et les chutes (19 %) (103).

Classement par
Les différents types de blessures fréquence
Type de blessure

musculo-squelettiques.
La littérature recense deux types de blessures musculo- 1 Fracture de fatigue (13,4 %)
squelettiques : celles survenant de manière aiguë, comme
les entorses de cheville ou de genou et celles survenant de
2 Syndrome bandelette ilio-tibiale (10,9 %)
manière plus insidieuse par hypersollicitation, comme les
tendinopathies (tab. III).
Les blessures les plus fréquentes lors de l’entraînement 3 Syndrome fémoro-patellaire (9,4 %)

physique sont les atteintes microtraumatologiques par


hypersollicitation (60 % à 80 % chez les recrues de l’US 4 Tendinite d’Achille (6,7 %)
Army) (104). Des atteintes préférentielles du pied et de la
cheville sont constatées dans l’armée américaine, alors 5 Périostite (3,1 %)
que le genou est plutôt atteint dans les autres armées,

476 j.-y. cravic


de journées de travail perdues, de diminution Les différences dans le taux et la distribution des
des capacités d’entraînement et de diminution de blessures recueillies dans la littérature peuvent dépendre
la capacité opérationnelle des troupes, comme le montre de différences importantes dans les programmes
le tableau V. d’entraînement, ainsi que des déf initions et
classifications des blessures musculo-squelettiques. En
effet, certaines études américaines incluent des
Tableau V. Nombre de jours de travail limité par type de blessure musculo- pathologies de lésions cutanées, comme les phlyctènes au
squelettique chez des militaires appartenant à une unité d’infanterie (106). pied, qui peuvent entraîner des exemptions partielles
d’entraînement.
Nombres de jours perdus Enfin, une étude britannique a permis de définir les
Type de Blessure
par blessure
principales blessures dans des unités constituées, qui ont
Fractures 103,2 achevé l’entraînement physique de base, et dont l’âge
Entorses 16,7
s’étend de 17 ans à 55 ans (17-24 ans 41 %, 25-35 ans
43 %, au-dessus de 35 ans 16 %) (tab. VI) (91).
Autres blessures traumatiques 7,6 Au vu de toutes ces études, certaines localisations
Tendinites 7 anatomiques méritent quelques commentaires :
Foulures 3
– les lésions du membre supérieur :
elles sont peu citées dans les études, peut-être en raison
Douleurs musculosquelettiques 2,8 du faible nombre d’exemption totale de service que ces

Tableau VI. Répartition des principales blessures dans des unités britanniques constituées, qui ont achevé l’entraînement physique de base, et dont l’âge
s’étend de 17 ans à 55 ans (91).

Total Pourcentage
Type de blessure
n %

Lombalgies 870 22,2

Entorses de la cheville et du pied 593 15,1

Pathologie du genou 470 12

Blessures de la hanche et du membre inférieur 462 11,8

Blessures de l’épaule et du membre supérieur 331 8,4

Douleurs du cou et du rachis cervical 319 8,1

Lésions ligamentaires et tendineuses du membre inférieur 173 4,4

Syndrome fémoro-patellaire 130 3,3

Syndrome tibial 124 3,2

Entorses et ruptures des ligaments du genou 119 3

Tendinites du talon d’Achille 117 3

Lésions thoraciques 55 1,4

Fractures 52 1,3

Autres lésions musculosquelettiques 47 1,2

Autres lésions ligamentaires et tendineuses 35 0,9

Fractures de fatigue 23 0,6

Fractures de fatigue 1 0

Total 3 921 100

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 477
lésions impliquent : entre 5 à 10 % des blessures vit sa blessure comme un drame, avec une sensation
d’hyperutilisation (107). L’étude de Germain en 2007 d’échec vis-à vis de lui-même et de son entourage, avec
montre pourtant des pathologies d’hyperutilisation en parallèle une sensation d’isolement et d’abandon,
(ténosynovites) des membres supérieurs, en partie dues en particulier lors d’un arrêt prolongé de l’activité.
selon l’auteur à un manque d’entraînement avant le stage À côté peut coexister une sensation d’atteinte du corps
commando (108) ; et de l’image qu’elle véhicule. D’où il ressort une notion
– les lésions du membre inférieur : fondamentale de prise en charge globale par le
la particulière fréquence des lésions de la cheville lors corps médical pour permettre au blessé de récupérer dans
des sauts chez le parachutiste dans l’armée de terre des conditions optimales.
américaine, a amené à rechercher des mesures de
prévention, que ce soit au niveau des bottes de saut ou des
orthèses de cheville portées par dessus la chaussure ; Les facteurs de risque de blessures
– les lésions orofaciales : musculo-squelettiques liés a la
elles ont été décrites dans beaucoup d’activités
militaires, dont le parcours d’obstacle et les entraînements
préparation physique dans une
au corps à corps (à main nues ou à la baïonnette) ainsi que population militaire.
chez les parachutistes israéliens (109, 110) ;
– les fractures de fatigue : Identif ier et comprendre les facteurs de risque
une attention particulière est portée à ce type d’affection est un des points clés pour développer des métho-
dans la littérature médico-militaire en raison de sa des de prévention et de lutte contre les blessures
fréquence et de son retentissement sur l’aptitude musculosquelettiques.
physique et le taux de réformes, en particulier chez le Peu de données sont disponibles dans la littérature
personnel féminin. Elles surviennent chez environ 3 % à de langue française concernant ce domaine de la
6 % des recrues masculines lors des classes dans l’armée prévention des accidents sportifs, même si Guezennec,
américaine. (111) et chez environ 3,4 à 21 % des recrues dès 1997, avait attiré l’attention sur l’intérêt de la
féminines, localisées au membre inférieur en particulier prévention de ces accidents (2).
au fémur ou au bassin (112). Ces fractures de contrainte Dans le monde sportif civil, des études comme celle de
peuvent conduire à des fractures vraies, qui consolident Parkkari (114) recensent in extenso les différents facteurs
lentement ou incomplètement. Elles sont une cause de risque de blessures (tab.VII). Dans les populations
d’indisponibilité majeure dans l’armée israélienne. militaires, les différentes études réalisées (115, 116) se
Pour conclure cette partie, Rochcongar (113) insiste centrent plus particulièrement sur les facteurs
sur le retentissement physique, mais aussi psychologique indiscutables. Selon Almeida, les blessures traumatiques
et sociologique de la blessure : le sportif (ou le militaire) (entorses de cheville) et microtraumatiques partageraient

Tableau VII. Facteurs de risque extrinsèques et intrinsèques dans les blessures sportives en milieu civil (114).

Facteurs extrinsèques Facteurs intrinsèques

Exposition Caractéristiques physiques


Type de sport Âge
Temps de pratique Sexe
Position dans l’équipe Somatotype
Niveau de compétition Antécédent de blessure
Niveau de condition physique
Entrainement Mobilité articulaire
Type Raideur musculaire, faiblesse
Durée Instabilité ligamentaire
Fréquence Anatomic abnormalities (malalignments)
Intensité Habiletés motrices
Habiletés techniques propres au sport
Environnement
Profil psychologique
Type de surface de jeu
Intérieur vs extérieur Motivation
Conditions climatiques Prise de risque
Moment de la saison Gestion du stress
Facteurs humains (coéquipiers, opposants, entraîneur, arbitres,
spectateurs)

Équipement
Équipement de protection
Équipement de jeu (raquette, bâton,…)
Chaussures, vêtements

478 j.-y. cravic


les mêmes facteurs de risque, avec pour corollaire les études de Jones et Knapik ne trouvent pas de relation entre
mêmes mesures de prévention (117). l’IMC et le risque de blessures. Quand une relation est
Voyons tout d’abord les facteurs intrinsèques plutôt trouvée entre la masse grasse et le risque de blessures, la
reliés à la personne, puis nous aborderons les facteurs relation est bimodale (en forme de U). Les femmes avec
extrinsèques plutôt reliés à l’environnement. le plus et le moins de masse grasse présentent le plus
de risque de présenter une blessure d’hypersollicitation
Facteurs intrinsèques. des membres inférieurs (104).

L’âge : Le niveau d’aptitude physique.


Le risque de blessure augmente généralement Le risque de blessure est généralement plus élevé pour
avec l’âge, même si les résultats sont discordants selon les individus ayant une moins bonne condition physique
les études (118). On peut retenir que lors de la formation ou ayant eu une vie sédentaire avant de rejoindre l’armée
militaire initiale, les individus les plus âgés (>23 ans) (96, 121, 122). L’endurance cardio-respiratoire semble
seraient les plus susceptibles d’être blessés (9). Mais être le meilleur facteur prédictif du risque de blessures,
chez les militaires plus âgés, une baisse du taux de avec le plus grand risque pour ceux qui ont les plus
blessures est constatée comme en milieu civil, car mauvais temps en course à pied (1,6 ou 2,4 km) et cela
d’une part ils peuvent gérer leur entraînement (à la aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Les
différence des jeunes recrues) et d’autre part, de par résultats les plus faibles obtenus dans les tests comportant
leur grade et leur emploi, ils sont moins soumis aux des « pompes » semblent être associés à un risque de
risques de blessures (9). blessure plus élevé. (118).
Le sexe : La souplesse.
Le risque est généralement plus élevé chez les individus
de sexe féminin. Chez les jeunes recrues, un taux de Le stretching, longtemps préconisé avant et après
blessures d’hypersollicitation de 1,5 à 2 fois supérieur l’effort, ne semble pas efficace dans un but de réduction
à celui des hommes a été constaté chez les femmes. des blessures (123). Mais il est maintenu dans tous les
Dans l’armée américaine, ce taux plus élevé de blessures programmes des armées américaines, britanniques et
peut être lié à une moins bonne condition physique (9). australiennes, en particulier pour le maintien des
En effet, à condition physique égale (même vitesse amplitudes articulaires. Les différentes études montrent
de course à pied et donc même niveau d’endurance des risques plus élevés de blessures chez les personnels
cardiorespiratoire), le risque de blessure est identique très raides ou très souples (relation bimodale). Cela
dans les deux populations. Une autre explication indiquerait que chez les sujets très raides, le stretching
avancée est que les personnels féminins ont plus pourrait être utile alors qu’il pourrait être néfaste chez
volontiers tendance à consulter que leurs homologues les sujets très souples (124).
masculins (117).
Le tabac.
Les facteurs anatomiques. La consommation de tabac (à fumer ou à chiquer) est un
De nombreuses variations anatomiques ont été facteur de risque reconnu dans la survenue de lésions
incriminées comme facteurs de risque de blessures par musculo-squelettiques (125), en particulier les fractures
hypersollicitation : ce sont parmi d’autres causes le de fatigue. Jones a montré que les recrues ayant une
genu-valgum ou varum, un angle Q > 15° (119). Mais les consommation supérieure à dix cigarettes par jour ou plus
données de la littérature sont contradictoires (120). Selon ont environ 50 % de risques en plus de contracter une
Rosenthal (120), le pied plat favorise le risque de blessure liée à l’exercice que les non-fumeurs (112).
survenue de fracture de fatigue du tibia et du scaphoïde Conway a montré chez les jeunes recrues que la
tarsien, alors que le pied creux favorise les fractures de consommation de tabac était corrélée à une moins bonne
fatigue des métatarsiens. Les genu varum et valgum sont condition physique, et que, par ailleurs, la pratique
également associés à un risque plus élevé de fractures de sportive pendant les classes pouvait être une motivation
fatigue (119). L’inégalité de longueur des membres pour l’arrêt du tabac. Pour lui, le faible niveau de
inférieurs ne serait pas associée à un risque accru de condition physique trouvé chez les fumeurs ne peut
blessures, alors qu’une rotation externe de hanche s’expliquer seulement en raison d’une pratique sportive
majorée (>65°) serait prédictive de la survenue de moins intense, mais par le fait que fumer entraîne une
fractures de fatigue (120). baisse de la condition physique. (126)

L’index de masse corporelle (IMC). Les antécédents de blessure avant


l’incorporation.
La relation entre la composition corporelle et le risque
de blessure est complexe et nécessite des études L’existence d’une blessure avant les classes est un
complémentaires selon tous les auteurs : certaines facteur de risque de survenue de blessures musculo-

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 479
squelettiques : Gilchrist rapporte que le facteur de risque traumatismes avec d’autres variables comme le type,
le plus communément identif ié pour les entorses de l’intensité, la fréquence, la durée et les variations brutales
cheville est une entorse de cheville dans les antécédents de programmes d’entraînement (127).
(104). Germain quant à lui rapporte que les blessures Le taux de blessures élevé dans les premières semaines
antérieures au stage commando sont en cause dans 40 % de classes indique que le changement brutal du niveau
des échecs à ce stage (108). d’activité physique est en cause, surtout si les jeunes
recrues n’ont pas d’expérience de la course à pied. Dans
Les facteurs psycho-comportementaux. les activités physiques doivent être également pris en
compte les déplacements entre les sites d’entraînement
Comme dans la population générale, la prise de risque effectués en marchant (ou en courant selon le bon vouloir
peut être majorée chez les jeunes militaires de moins de des cadres de contact) (127).
30 ans : des facteurs intra-personnels comme la recherche Le risque est beaucoup plus élevé pour une activité
de sensations, l’impulsivité, l’agressivité, la trop grande comme la course à pied (>25 miles par semaine) que pour
confiance en soi et l’instabilité émotionnelle sont liés la marche avec sac à dos ou l’ordre serré (128).
avec un risque accru de blessures. D’autres facteurs intra-
personnels existent comme la culture du risque et Le type d’activité.
l’acceptation de la blessure.
Des facteurs inter-personnels peuvent exister comme la Le port de charges lourdes (sac à dos, tâches de
pression des camarades, du modèle parental ou des manutention militaires) et/ou les marches sur de longues
normes sociales et sont à prendre en compte. Il en est de distances sont des facteurs de risque en cause dans la
même la manière de commander des cadres de contact. survenue de blessures musculo-squelettiques (129-131).
Une étude britannique chez les Bérets Verts recommande Une étude portant sur une marche de cinq jours et 160 km
pour ces cadres de contact une attitude plus positive vis à dans une unité d’infanterie américaine a montré un taux
vis des stagiaires en difficulté lors du stage, même si l’on de blessures de 36 % chez les participants. Les blessures
garde les mêmes exigences (91). les plus fréquentes étaient des rachialgies, des
tendinopathies d’Achille, des ampoules et cloques
aux pieds (129-131).
Facteurs extrinsèques.
Les chaussures.
Les modalités d’entraînement. Pour les orthèses plantaires, les conclusions des
différentes études sont variables. Le seul point acquis est
Il est à noter que la préparation physique lors des classes que les chaussures de sport usagées ou vieilles sont
doit augmenter rapidement le niveau de force et associées avec un risque accru de fractures de fatigue
d’endurance des militaires et doit être différenciée (Gardner cité par (132)). Le port de différentes chaussures
de la pratique sportive dans les unités spécialisées qui militaires (chaussures en cuir ou en toile plus légère) dans
doit maintenir un niveau physique en relation avec le l’armée américaine semble avoir peu d’effets sur la
type d’emploi (chasseurs alpins, unité du génie, survenue de fractures de fatigue (112). De même, les
parachutistes…). La progression rapide de la charge modif ications des chaussures et le port d’orthèses
d’entraînement lors des classes aura des répercussions plantaires dans l’armée israélienne ne semblent pas jouer
sur le taux de blessures. Le nombre de blessures est plus sur la survenue des fractures de fatigue (122).
important lors des classes avec une pratique imposée,
sans notion de sexe ou de niveau sportif préalable, que lors Les surfaces d’entraînement.
d’une pratique ultérieure pouvant être aménagée en
intensité et durée pour les militaires plus âgés ou plus Il ne semble pas y avoir d’études indiquant que le fait
élevés en grade. de courir sur des surfaces dures (macadam) par rapport à
Almeida a réalisé une des premières études mettant des surfaces souples (terre) soit un facteur de risque
en relation les plans d’entraînement et le taux de blessures. de blessures. Mais des études de l’armée australienne
Les facteurs qui permettent d’obtenir un effet mettent en exergue l’importance de l’interface sol-
d’entraînement (fréquence, durée et intensité de chaussure dans la survenue des accidents, en particulier
l’exercice) sont également en relation avec la survenue dans les chutes, glissades et faux-pas (133).
de blessures. (104).
Ce taux de blessure augmente en fonction du volume L’environnement.
d’activités physiques hebdomadaire, qui peut atteindre
15 heures par semaine, ce qui constitue une erreur Une étude a montré que les blessures musculo-
d’entraînement surtout dans les trois premières semaines squelettiques sont plus fréquentes en saison chaude et
de classe (127). Bien que le volume d’entraînement moins fréquente en automne. Plus les températures sont
physique hebdomadaire soit cité comme un facteur hautes et plus le taux de blessures est élevé avec des
prédictif de blessures, les résultats de l’étude d’Almeida implications sur le plan de l’entraînement et/ou de
sont en faveur d’une responsabilité multifactorielle l’hydratation (134). Par ailleurs l’entraînement par temps
de l’entraînement physique dans la survenue de froid favorise la survenue de péri-tendinites achilléennes

480 j.-y. cravic


et il est utile d’insister sur l’intérêt de l’échauffement et du
port de vêtements adéquats (135).
Une revue des facteurs de risques est présentée sur les Étapes 1- à 5 =
tableaux VII et VIII. Étapes d’une démarche de santé publique

Prévention des facteurs de risque.


Étape 1 : Identification du problème
Une fois les facteurs de risque identifiés, il convient de
proposer des actions de prévention et de tester les résultats Étape 2 : Détermination des causes
de ces actions. Ces mesures de prévention peuvent
s’intégrer dans le schéma classique de prévention Étape 3 : Déterminer ce qui est efficace pour
primaire, secondaire et tertiaire tout en utilisant la matrice
prévenir le problème
de Haddon pour proposer des stratégies pré, pendant et
post-événement (fig. 4).
Voyons tout d’abord les textes militaires off iciels Étape 4 : Mise en œuvre du programme
concernant ce volet d’action : la Directive du SSA de 1984
(BOEM 683) relative à la prévention des accidents Étape 5 : Mise en œuvre de la surveillance et de
médicaux liés à l’entraînement physique et sportif est le l’évaluation de l’efficacité du
seul document dans les armées organisant la prévention programme
des accidents liés à l’entraînement militaire. Elle insiste
sur la sélection et la catégorisation médico-physiologique,
l’éducation des personnels (que ce soit les pratiquants Figure 4. Modèle intégré de surveillance et de prévention des blessures et
et/ou l’encadrement) ainsi que les mesures d’urgence maladies décrit par Haddon (adapté d’après158).
adaptées en cas d’accidents lors de la pratique sportive.
Cette directive souligne l’importance de la formation des
médecins d’unité dans le domaine du contrôle médico- Les modifications d’entraînement.
physiologique de l’entraînement physique et des sports.
Deux grandes catégories d’actions peuvent être mises Elles sont orientées d’une part sur la quantité et le
en œuvre : d’un côté des modifications des programmes niveau de l’entraînement physique, d’autre part sur la
d’entraînement, et de l’autre, des modif ications condition physique des militaires.
d’équipement. Les modifications d’équipement peuvent Pour les jeunes recrues, il est diff icile d’agir sur
être qualifiées de mesures passives et sont relativement l’entraînement physique avant les classes et il convient
faciles à mettre en œuvre par rapport aux modifications donc de les amener graduellement au niveau de condition
des programmes d’entraînement qui sont des mesures physique souhaité. Les modifications des programmes
actives, dépendant étroitement de la compliance des d’entraînement rapportées dans les études sur la
différents acteurs à ces programmes : cadres de contact, prévention des blessures chez des jeunes recrues pendant
commandement, médecins, moniteurs de sport. les classes étaient les suivantes (132) :

Tableau VIII. Facteurs de risque pour les blessures liées à l’entraînement physique dans des populations militaires (118).

Facteurs extrinsèques Facteurs intrinsèques

Augmentation du nombre de kilomètres parcourus à Âge (le risque augmente généralement avec l’âge)
l’entraînement (plus la distance parcourue augmente,
plus le risque augmente) Sexe (le risque est habituellement plus élevé pour
les femmes)
Type d’entraînement (le risque est plus élevé pour la
course que pour la marche) Anatomiques (le risque est associé à la foi avec la
morphologie des pieds et des jambes)
Augmentation brutale du niveau d’entraînement (le
risque est plus élevé si le niveau d’entraînement Souplesse (le risque apparaît être plus grand aux
augmente de manière trop rapide) deux extrêmes de la souplesse)

Chaussures et orthèses (données inconsistantes) Tabagisme (le risque est plus grand chez les
fumeurs
Surface d’entraînement (données inconsistantes)

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 481
Respecter un entraînement progressif pour permettre grande progressivité dans la charge emportée, avec
aux recrues de s’adapter aux nouveaux exercices (127). apprentissage de la répartition du poids dans le sac et
La charge d’entraînement ne doit pas dépasser 10 à 15 % augmentation lente du kilométrage réalisé lors des
d’augmentation par semaine. Il convient d’insister marches (131). Cet entraînement doit se poursuivre tout
d’abord sur les activités aérobies avant de passer aux au long de la carrière du militaire, lui permettant ainsi de
activités anaérobies et au renforcement musculaire (93). mieux tolérer le port de charges lourdes par un
Il faut faire particulièrement attention aux jeunes recrues entraînement régulier (deux séances par mois sont
pendant les trois premières semaines de classes. recommandées). Une étude de l’US ARMY n’a montré
L’alternance d’un jour de travail intense et d’un jour de aucun effet protecteur d’une période de récupération
travail léger doit être la règle (Hard day, Easy day) (136). pendant les classes, avec une semaine sans course à pied et
Les britanniques proposent dans la programmation marche à la 2e, 3e, 4e semaine des classes (107). Pour les
l’utilisation de drapeaux rouges (« Traffic lights ») pour jeunes recrues, ces auteurs proposent un programme de
les activités à haute intensité (sport, marche course,…) course à pied un jour sur deux, avec un repos de deux jours
pour éviter qu’elles ne se succèdent dans le planning et par semaine sans course à pied ou marche. Ces
augmentent ainsi le nombre de blessés. programmes ont fait l’objet de plusieurs études qui ont
Réduire le kilométrage en course à pied : différentes validés leur efficacité (137, 142, 143).
études civiles et militaires suggèrent que la réduction du Un programme de travail a été proposé avant les classes
kilométrage en course à pied diminue le taux de blessures aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Australie pour
avec peu d’effets sur la condition aérobie évaluée par les améliorer le niveau de condition physique des recrues et
résultats aux tests de contrôle biannuels (Army Physical diminuer le risque de survenue de blessure (132). Ce
Fitness Test) (2,4 km) (111). Il convient de noter que le programme a permit une diminution de 23 % du taux de
kilométrage non effectué en course à pied était remplacé blessures pendant les classes. Les tests d’entrée avant les
par de la marche avec sac à dos. classes (« Basic Combat Training ») ont été modifiés et
Pratiquer l’ « interval-training » (137) : les séances sont les tests physiques de l’armée américaine (APFT) ont été
réalisées une à deux fois par semaine et comprennent 6 à adoptés. Ceux-ci comportent des pompes, des relevés
10 répétitions de sprint de 30 secondes, alternant avec une de buste et une course d’un mile (1,6 km) avec des seuils
marches de 90 sec. minimaux à atteindre. Chaque personne ayant échoué
Respecter les groupes de niveau en course à pied (138), aux tests d’entrée, bénéf iciait d’un programme
ce qui permet aux jeunes recrues de courir à des vitesses d’entraînement particulier (« Remedial Physical
adaptées à leur faible niveau de condition physique et Training ») qui comportait de la course à pied, de la
d’éviter une fatigue excessive. Il est à noter que des musculation, des pompes et des relevés de buste, de la
diff icultés de gestion de la vitesse de course sont marche sur route et un programme d’étirement avant de
rencontrées dans le cas de groupes de niveau mixte repasser les tests. Une étude anglaise a mis en place un test
femmes-hommes et que dans ces groupes, les taux de de pré-recrutement (2,4 km de course à pied chronométré
blessure des personnels féminins sont plus élevés (139). avec un niveau seuil) en vertu du principe que un faible
Proposer des exercices différents tout au long de la niveau de condition physique est associé avec un risque
semaine (entraînement croisé ou « cross-training ») : plus élevé de blessures, et donc un taux d’attrition plus
aucune étude ne conf irme pour l’instant que des élevé pendant les classes (144).
entraînements différents chaque jour diminue la survenue
de blessures, mais les spécialistes de médecine du sport Les modifications d’équipement.
recommandent souvent ce type d’entraînement croisé
dans ce but (140). Il semble maintenant bien établi que le port d’une
Utiliser la natation comme élément de récupération ou orthèse de cheville par-dessus la chaussure chez
comme entraînement peut être utile (136). Les australiens les parachutistes permet de diminuer la survenue
proposent d’ailleurs la course en piscine (« deep water d’entorses de cheville. En effet, il a été constaté
running ») pour prévenir les blessures ou pour la dans l’armée américaine que 8 à 14 traumatismes
réhabilitation des personnels blessé. survenaient pour 1 000 sauts d’aéronefs, que de 30 % à
Pas d’étirement avant les exercices : cette position 60 % de ces traumatismes étaient des entorses de cheville
semble valide à ce jour au regard de l’analyse critique de la et que le port d’orthèses abaissait ce taux. (9, 145-147)
littérature faite (123, 124, 141). Pour la prévention des blessures du membre inférieur,
Éviter l’excès d’entraînement. À titre indicatif, les le port de semelles intérieures en Sorbothane ® ou
soldats qui s’entraînent 10 heures ou plus par semaine néoprène pour diminuer les chocs ne semble pas devoir
ont un risque de blessures augmenté et les femmes être retenu (118). De plus, une étude anglaise récente n’a
qui courent plus de 20 km par semaine ont un risque montré aucun avantage en termes de réduction des
plus important de traumatismes (93). Différentes blessures du membre inférieur pour le port de semelles
études militaires suggèrent qu’il existe un niveau seuil chez des militaires de l’armée de l’air (148). Pour les
de course à pied au-dessus duquel le taux de blessures jeunes recrues de sexe féminin, le port de chaussures avec
augmente (93, 111). semelles en polyuréthane s’est cependant révélé capable
La programmation de l’entraînement avec sac à de diminuer les blessures du membre inférieur, ainsi que
dos chez les jeunes recrues doit respecter une très le taux de consultations (149).

482 j.-y. cravic


La pratique du sport avec chaussures de sport usagées pour améliorer la prévention des accidents : une action
(> 600 km) est un facteur de risque de blessures du en amont pour optimiser la préparation des stagiaires ;
membre inférieur et un des objectifs d’un programme de une action interne pour informer le commandement et
prévention est de faire acheter des chaussures de sport les instructeurs des risques réels du stage et mettre
neuves avant de commencer les classes (132). en œuvre des actions de prévention adaptées ; enf in
Des études sur les traumatismes oro-faciaux menés une action concernant les besoins en personnel et en
dans l’armée américaine ont prouvé l’intérêt du port d’un matériel pour améliorer la sécurité des activités à risque
protège-dents lors d’activités comme le combat au bâton, traumatique important.
à la baïonnette, le corps à corps et le parcours d’obstacle Il convient de ne pas oublier l’existence des plans de
(150). Une étude israélienne chez les commandos et les prévention des risques liés à la pratique sportive établis
parachutistes est venue confirmer l’intérêt du port du dans chaque unité, impliquant le commandement, avec
protège-dents (109,110). les officiers des sports et les chargés de prévention.
Une piste intéressante proposée dans la prévention des Enfin, la législation française impose des vérifications
blessures est l’utilisation de programmes d’entraînement
annuelles ou tous les deux ans des installations sportives,
à visée proprioceptive, avec des planches instables dans
les différents plans de l’espace (plateau de Freemann y compris militaires (parcours d’obstacles.), sur le plan
utilisé en rééducation), qui permettent de diminuer sécurité. (153)
l’incidence des blessures de cheville et permettent de Deux autres moyens de prévention mis en œuvre dans
prévenir des blessures du genou comme la rupture du les autres armées peuvent être retenus : dans le « Marines
ligament croisé antéro-externe (151). Mais les données Corps » a été mis en place en 2003 un programme de
scientifiques actuelles demandent à être complétées, prévention des blessures impliquant des « athletic
avant la mise en œuvre de ces recommandations dans les trainer », personnels civils sous contrat dont le travail est à
programmes d’entraînement physique de masse (152). mi-chemin entre le travail d’un kinésithérapeute
Des interventions nutritionnelles ont été envisagées, (possibilités de soins de physiothérapie limités comme
mais non adoptées dans l’armée américaine, comme la l’utilisation des ultra-sons) et le travail d’un préparateur
prescription de calcium et vitamine D à titre préventif ou physique (remise sur le terrain du militaire après
bien la prise de contraceptifs oraux chez les femmes ayant blessure). Son travail est de s’occuper de toutes les
des cycles menstruels absents ou irréguliers. Il a été pathologies bénignes fonctionnelles survenant lors de la
proposé d’attirer l’attention des recrues sur la préparation physique du militaire et de la remise à
consommation exagérée de sel, phosphore dans les soft l’entraînement des militaires ayant été blessés pour éviter
drinks, fibres, protéines, caféine et alcool qui négativent les récidives (Concept du « Warrior athlete »). Ces
la balance calcique. (120) personnels de santé travaillent dans des salles proches des
bataillons dont ils dépendent pour une eff icacité
Programmes d’intervention en matière de immédiate et sont en liaison directe avec les services
prévention. médicaux de la base. Ceci peut être rapproché de ce qui se
fait dans l’armée anglaise, avec une possibilité
En réponse à ce qui avait été qualif ié d’épidémie d’évolution de carrière des moniteurs de sport vers un
cachée, l’armée américaine a institué un programme de emploi appelé « Remedial instructor » dont l’emploi
prévention des blessures liées à l’entraînement militaire ressemble fort à celui d’ « athletic trainer ».
et dont les résultats furent comparés au programme La « Royal Air Force » met à la disposition de ses
d’entraînement classique des jeunes recrues. militaires des brochures intitulées « Fit for life »
Ce programme de prévention comporte plusieurs (En forme pour la vie) sur l’entraînement physique,
volets (137) : un système informatique de surveillance axées sur la prévention, la santé et la surcharge pondérale.
des blessures, par recueil des données médicales, croisées Elles donnent aussi des programmes d’entraînement
avec les données du commandement (service médical personnel pour la réalisation des tests physiques annuels.
et/ou accidents en service). La mise en place de
Ces brochures sont délivrées par les bureaux des sports
modifications des procédés d’entraînement, de séances
d’éducation sanitaire visant à la prévention des blessures sur demande.
pour les sergents instructeurs et l’implication du Au total, il ressort que la prévention des blessures
commandement, c'est-à-dire une approche dite musculo-squelettiques passe par : l’enseignement des
« communautaire » (95). La mise en place d’un groupe de méthodes d’entraînement et de prévention des blessures
travail sur la prévention des blessures (« Injury Control aux cadres de contact, avec l’aide des moniteurs de
Advisory Committee »). sport, l’enseignement au corps médical de la médecine
Cette stratégie multifocale a été reprise dans le du sport orientée sur la prévention, le diagnostic des
programme de prévention réalisé en 2007 au Centre blessures et la rééducation fonctionnelle.
national d’entraînement commando (CNEC) (108) Une action coordonnée sur ces deux partenaires
et qui s’est traduit par une baisse du taux d’échec au doit permettre de réduire de manière optimale les
stage commando des stagiaires pour motif médical de blessures liées à l’entraînement militaire dans le
11,4/100 stagiaires/an en 2002 à 4,3/100 stagiaires/an cadre d’une politique initiée, adoptée et suivie par le
en 2004. Trois axes d’action ont été initiés par le CNEC Commandement. (154)

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 483
Stratégies de prévention. fournir des indicateurs de référence (pourcentages et
taux) permettant ultérieurement de vérifier la réalité de
À la lumière d’articles récents sur la prévention l’efficacité des programmes censés réduire les blessures.
des blessures sportives dans le monde civil, il parait Durant la seconde étape, les mécanismes et étiologies
opportun d’évoquer certaines stratégies d’intervention des traumatismes doivent être étudiés et les facteurs de
permettant une vision plus globale et pouvant limiter risque identifiés. Les facteurs de risque peuvent être
les résistances au changement individuelles et/ou intrinsèques comme l’âge, le sexe ou la condition
institutionnelles (155). physique, ou extrinsèques comme les programmes
Une première approche a été décrite par Van Mechelen d’entraînement, l’équipement ou le temps.
et al. au début des années quatre-vingt-dix (3). Son Une fois le problème reconnu et les facteurs de
modèle de santé publique propose une méthodologie risque identifiés, la troisième étape est l’intervention.
pour aborder la prévention des blessures qui comporte Cette étape implique de développer des stratégies
quatre étapes (fig. 5) : pratiques et créatives de réduction des blessures et puis
– déf inition du problème : incidence, gravité, de les tester pour vérifier leur efficacité. Ces stratégies
conséquence individuelle et sociale ; peuvent associer des modifications de l’équipement,
– étude des facteurs de risques : étiologies et des procédés d’entraînement ou des modifications de
mécanismes des traumatismes ; l’environnement d’entraînement par des mesures
– introduction des mesures de prévention ; techniques, l’éducation des personnels et la mise en
– évaluation de l’eff icacité des mesures et place ou le rappel des règlements.
actions d’adaptation. La dernière étape permet d’évaluer l’eff icacité
La première étape du processus est primordiale, car elle du programme de prévention dans l’environnement
permet de déf inir le problème et d’en déterminer opérationnel, puis de l’adapter si nécessaire. Ceci est
l’étendue. Une surveillance du problème doit être réalisé habituellement par la mesure et la comparaison
instituée et si cela n’est pas possible, des enquêtes des indicateurs avant et après la mise en œuvre
rétrospectives peuvent y pallier. Il est important de du programme.

Figure 5. Les quatre étapes de la prévention décrites par van Mechelen (adapté d’après 3).

484 j.-y. cravic


Cependant, la majorité des traumatismes liés à la a un succès limité. L’approche « communautaire »
préparation physique ont une origine multifactorielle semble avoir des résultats prometteurs car elle combine
rendant difficile l’identification des étiologies et des des approches d’éducation sanitaire, une participation
facteurs de risque. Ce modèle de Van Mechelen a montré des décideurs, des modif ications des attitudes, des
des limites car il ne prend pas en compte le modèle « bio- comportements et des changements dans l’environ-
psycho-social » et ses facteurs comme le comportement nement physique. Le reproche souvent fait à cette
du militaire, sa motivation ou son état d’esprit (113).
approche communautaire est qu’il est difficile de cerner
Certains auteurs parlent même de risque d’homéostasie
lors de la mise en œuvre de mesures de prévention. Cela quelle intervention individuelle a fonctionné et
signifie que par exemple que l’action de rouler en vélo d’identifier celles qui ont les meilleurs résultats. Mais
avec un casque peut entraîner l’apparition d’autres types d’un autre côté, une stratégie associant des approches
de blessures en raison d’une prise de risque accrue car la multiples peut fonctionner, car les individus répondent de
personne se sent protégé. façon différente aux différents aspects du programme.
D’autres auteurs (156) ont insisté sur le possible fossé
qui sépare les programmes d’intervention issus de la
recherche scientifique et leur mise en œuvre dans la « vie Conclusion.
de tous les jours ». La prise de risque individuelle et la
compliance au programme de prévention sont des La préparation physique du militaire est un impératif
facteurs limitants. Cela a amené à proposer une étape pour répondre aux exigences physiques et aux nécessités
intermédiaire entre la troisième et la quatrième étape du du métier militaire. Cette préparation physique peut être à
modèle de Van Mechelen, qui consiste à valider sur le l’origine d’accidents ayant un risque vital ou de lésions
terrain les mesures de prévention envisagées, avant de les musculo-squelettiques. Ces accidents ont des
proposer aux décideurs. Cela permet de prendre en implications économiques et sociales en termes de coût
compte la compliance aux mesures préconisées (157). En de soins médicaux et de journées de travail ou
effet, le fait qu’un individu soit conscient d’un problème d’entraînement perdues, obérant ainsi la capacité
n’est pas la garantie qu’il va modifier son comportement. opérationnelle des unités.
Deux points importants méritent d’être soulignés dans Les traumatismes liés à la préparation physique ont
la littérature concernant la prévention des accidents
sportifs en milieu civil et/ou militaire : plusieurs facteurs de risque identifiés sur lesquels il est
– le premier point concerne l’utilisation de la matrice de possible d’agir : par exemple le niveau de condition
Haddon (158). En 1970, W. Haddon, ingénieur et physique, le tabagisme et les programmes d’entraînement
médecin, a conçu un outil d’analyse des traumatismes ainsi que l’équipement ou l’environnement. Une
et d’aide aux choix des stratégies. Il s’agit d’une matrice prévention de ces risques peut être développée suivant le
qui permet de décomposer l’événement traumatique. modèle de santé publique proposé par Van Mechelen et
Cette matrice intègre (fig. 6) : la dimension temporelle amélioré en prenant en compte les aspects bio-psycho-
en distinguant trois phases : la phase pré-événement sociaux (160). L’utilisation de la matrice de Haddon peut
(qui précède la survenue de l’événement), la phase également permettre une meilleure créativité et efficacité
événement (période de contact entre l’hôte et l’agent), la dans les stratégies de prévention.
phase post-événement (réponse de l’hôte à l’événement) ; L’approche «communautaire» (WHO safe community)
le caractère multifactoriel de la genèse des traumatismes du problème est préconisée. Elle implique tous les acteurs
en distinguant l’hôte, le vecteur et l’environnement
physique et socio-économique. Ce modèle permet et décideurs qui dans le milieu militaire vont du cadre de
d’identifier les principaux déterminants de la survenue contact à l’ensemble de la chaîne de commandement, la
des traumatismes et des conséquences qui en découlent. chaîne EPMS et le Service de santé. L’implication du
La matrice de Haddon est très utile pour identifier les Service de santé des armées va du médecin d’unité dans sa
stratégies et les interventions à mettre en œuvre pratique quotidienne aux directions régionales et aux
pour prévenir les traumatismes ou en atténuer la gravité instituts de recherche au travers de leurs axes de travail et
ou les conséquences ; d’expertise au profit des armées.
– le deuxième point concerne l’approche « commu- Le médecin a une double responsabilité qui est d’une
nautaire » de la prévention des traumatismes, utilisée part de fournir au commandement les données médicales
au centre national d’entraînement commando de nécessaires pour agir sur les facteurs de risque, les
Montlouis (108). Celle-ci favorise une approche globale comportements et les mentalités et d’autre part d’assurer
de la sécurité qui permet d’éviter le cloisonnement
une prise en charge médicale efficace pour permettre au
des interventions et des intervenants. La collaboration
entre les différents intervenants, ainsi qu’une militaire blessé de reprendre son service le plus vite
coordination de leurs interventions sont indispensables possible (108). Il faut cependant rappeler que, sur le plan
pour assurer la réussite des programmes de promotion local, seule la prise en charge du problème par le
de la sécurité (95, 159). commandement peut permettre de prendre des mesures
La littérature indique que l’éducation sanitaire efficaces pour diminuer le risque de blessures liées à la
utilisée de façon isolée pour la prévention des accidents préparation physique du militaire (154).

La prévention des risques liés à la préparation physique du militaire.Étude sur les besoins de prévention des militaires et de leurs familles. Besoins de prévention des militaires d’active. 485
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488 j.-y. cravic

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