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Chapitre 17

Intégrales à paramètres

1
2 CHAPITRE 17. INTÉGRALES À PARAMÈTRES

Soit I et J deux intervalles de R. Soit f :


I × J → ou . R C
(x, t ) 7→ f (x, t )
Z
Lorsque c’est possible, on définit alors la fonction g : x 7→ f (x, t )dt . On parle alors d’intégrale à paramètre x.
J
Lorsque l’on définit une fonction g de ce type avec une intégrale de paramètre x. La première chose
Z à faire est
d’étudier l’ensemble de définition de g en cherchant les valeurs de x pour lesquelles l’intégrale f (x, t )dt est
J
convergente. On a déjà fait ceci à de nombreuses occasions dans le chapitre sur les intégrales généralisées.
L’objet de ce chapitre est maintenant d’étudier la régularité de cette fonction g , c’est à dire si elle est continue,
dérivable, de classe C k sur son ensemble de définition ou sur une partie de celui-ci.
Z +∞
Exemple: x 7→ e−xt dt est une intégrale à paramètre.
0
Justifier qu’elle est définie sur R∗+ et reconnaître cette fonction.
17.1 Continuité
Théorème 17.1 Soit I et J deux intervalles de R, soit f :
I × J → ou R C
(x, t ) 7→ f (x, t )
Si • ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ) est continue par morceaux sur J (pour pouvoir définir l’intégrale),
• ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ) est continue sur I (pour assurer la continuité de g ),
• ∃ϕ : J → positive, R
¯ continue par morceaux et intégrable sur J telle que
¯ f (x, t )¯ 6 ϕ(t ) (hypothèse de domination indépendante de x) ;
¯
∀x ∈
Z I , ∀t ∈ J ,
alors g : x 7→ f (x, t )dt est continue sur I .
J

Démonstration: Soit x 0 ∈ I . Montrons que g est continue en x 0 .


N
On considère une suite (x n ) d’éléments de I qui converge vers x 0 et pour tout n ∈ soit ϕn la fonction définie sur
J par : ∀t ∈ J , ϕn (t ) = f (x n , t ).
D’après les hypothèses de l’énoncé, on a :
N
• ∀n ∈ , ϕn est continue par morceaux et intégrable sur J .
• Comme ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ) est continue sur I , on a lim ϕn (t ) = f (x 0 , t ) par composition d’une suite
n→+∞
convergente vers x 0 avec une fonction continue en x.
Donc (ϕn ) converge simplement ¯ J vers t 7→ f (x 0 , t ) qui est bien continue par morceaux sur J .
sur
N
• ∀n ∈ , ∀t ∈ J , |ϕn (t )| = f (x n , t )¯ 6 ϕ(t )
¯
¯
Ainsi d’après
Z le théorème
Z de convergence dominée de Lebesgue (cf chapitre suites et séries de fonctions),
lim f (x 0 , t )dt , et comme ceci est vrai pour toute suite (x n ) convergeant vers x 0 , par caractéri-
f (x n , t )dt =
n→+∞ J J Z Z
sation séquentielle de la limite, on en déduit que lim f (y, t )dt = f (x 0 , t )dt et donc f est continue en x 0 .
y→x 0 J J
Ceci étant vrai pour tout x 0 dans I , f est continue sur I .

Remarque:
• C’est un théorème d’interversion limite/intégrale (car la continuité d’une fonction est en x est définie par
lim f (y))
y→x
• le fait que ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ) soit continue par morceaux sur J et dominée par ϕ intégrable sur J assure
l’intégrabilité de f (x, t ) sur J pour tout x de I , et donc assure le fait que g soit bien définie sur I , (toutefois
cette question de l’ensemble de définition de g est en général posée avant la question de la continuité,
mais ce théorème assure en fait les deux d’un coup).

Remarque: On a de plus les cas suivants simplifiant les conditions à vérifier pour que le théorème de continuité
des intégrales à paramètres soit applicable.
1. Si f est continue sur I ×J , alors les deux premières conditions sont forcément vérifiées. Il reste alors à vérifier
uniquement l’hypothèse de domination. Donc si on sait par règles opératoires que f est continue sur I × J ,
on le dit directement et on écrit que cela implique que les deux premiers points sont vérifiés.
17.2. DÉRIVABILITÉ 3

R
2. Si I et J sont des segments de et f est continue sur I × J , alors f est bornée (théorème de la borne atteinte
vu au chapitre sur les espaces vectoriels normés),
Choisissons alors M un majorant de | f (x, t )| , il suffit de prendre ϕ la fonction constante égale à M . ϕ étant
R
constante, elle est continue par morceaux et intégrable sur tout segment de , donc l’hypothèse de domi-
nation est alors forcément vérifiée et g est continue sur I .
3. La continuité étant une propriété locale, si on n’arrive pas à dominer f pour tout x d’un intervalle ouvert ou
semi-ouvert I , il suffit de trouver une fonction intégrable dominant f sur [a; b] × J pour tout (a, b) ∈ I 2 tel
que a < b.
Ainsi, on peut appliquer ce théorème de continuité sur [a; b]× J , donc g est continue sur tout segment [a; b]
de I , et donc sur I (on raisonne en fait de la même manière qu’on l’a déjà fait dans le chapitre sur les suites
et séries de fonction).
4. Et si J est un segment [c; d ], on peut donc dans ce cas appliquer les remarques n°2 et n°3 et ainsi pour
Z d
toute fonction f continue sur I × [c; d ], I étant un intervalle quelconque, la fonction g : x 7→ f (x, t )dt est
£ ¤ c
alors forcément continue sur tout segment a; b de I (car [a; b]et J sont alors tout deux des segments et on
applique la méthode de la remarque n°2) et donc avec la remarque n°3, g est continue sur I .

Exercice:

R
Z 1 cos(xt )
1. Montrer que g : x 7→ p dt est continue sur .
0 t (1 − t )
Z b −λx 2
2. Soit (a, b) ∈ R 2
, a < b, soit I (λ) =
e
a 1+x
2
dx. Montrer que I est continue sur R.
2
e−t
R∗+.
Z +∞
3. Soit F (x) = dt , étudier la continuité de F sur
0 x +t

17.2 Dérivabilité

Théorème 17.2 Soit I et J deux intervalles de R, soit f : I × J → ou R C


(x, t ) 7→ f (x, t )
∂f
Si • ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ) et t 7→
(x, t ) existent et sont continues par morceaux sur J (pour
∂x
pouvoir définir les intégrales),
• ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ) est intégrable sur J . (ce qui assure en particulier l’existence de g (x) pour
tout x de I ).
∂f
• ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ) et x 7→ (x, t ) sont continues sur I , i.e. ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ) est C 1 sur
∂x
I (pour assurer la dérivabilité de g ),
R
• ∃ϕ : J → positive, ¯ continue par morceaux et intégrable sur J telle que
¯∂f
¯
∀x ∈ I , ∀t ∈ J , ¯ (x, t )¯ 6 ϕ(t ) (hypothèse de domination indépendante de x) ;
¯
¯ ¯
∂x
∂f
Z Z
alors g : x 7→ f (x, t )dt est C 1 sur I , et ∀x ∈ I , g 0 (x) = (x, t )dt .
J J ∂x

Remarque: On peut faire le même type de remarques que pour la continuité :


• C’est un théorème d’interversion dérivation/intégrale.
∂f
• Le fait que t 7→ (x, t ) soit continue par morceaux sur J et dominée par ϕ intégrable sur J assure l’inté-
∂x
∂f
grabilité de t 7→ (x, t ) sur J pour tout x de I .
∂x

Remarque: On a les mêmes cas que pour le théorème de continuité suivants, simplifiant les conditions à vérifier
pour appliquer ce théorème de dérivabilité :
4 CHAPITRE 17. INTÉGRALES À PARAMÈTRES

∂f
1. Si f et sont continues sur I × J , alors la première et troisième condition sont vérifiées. La deuxième
∂x
condition est en général vérifiée lorsque l’on détermine l’ensemble de définition de g (l’intégrabilité sur J
de t 7→ f (x, t ) pour tout x de I ). Il reste ensuite à vérifier l’hypothèse de domination.

2. Si I et J sont des segments de et f etR ∂f


∂x
sont continues sur I × J , alors t 7→ f (x, t ) est intégrable sur J pour
¯∂f
¯ ¯
¯
tout x de I , et la dérivée partielle de f selon x est de plus bornée, soit M un majorant de ¯ (x, t )¯¯, il suffit
¯
∂x
de prendre ϕ la fonction constante égale à M , l’hypothèse de domination est alors forcément vérifiée. Ainsi
dans ce cas, g est nécessairement de classe C 1 sur I (on applique la même méthode que pour la continuité).
∂f
3. La classe C 1 étant une propriété locale, si on n’arrive pas à dominer pour tout x d’un intervalle ouvert
∂x
∂f
ou semi-ouvert I , il suffit de trouver une fonction intégrable dominant sur tout segment de I pour que
∂x
1
g soit C sur tout segment de I , et donc sur I (on applique la même méthode que pour la continuité)..
4. Et si J est un segment [c; d ], on peut donc dans ce cas appliquer les remarques n°2 et n°3
∂f
et ainsi pour toute fonction f et sont continues sur I ×[c; d ], I étant un intervalle quelconque, la fonction
Z d ∂x
f (x, t )dt est alors forcément de classe C 1 sur tout segment a; b de I (car [a; b]et J sont alors
£ ¤
g : x 7→
c
tout deux des segments et on applique la méthode de la remarque n°2) et donc avec la remarque n°3, g est
de classe C 1 sur I .

Exercice:
+∞ e−t sin(xt )
Z
1. Étudier la dérivabilité de F définie par F (x) = dt .
t
Z0+∞
2
2. Étudier la dérivabilité de F définie par F (x) = e−t ch(2xt )dt .
0

17.3 Dérivée n-ième


On peut par récurrence généraliser le théorème précédent au cas des dérivées n-ième :

Théorème 17.3 Soit I et J deux intervalles de R, soit f : I × J → ou R C


(x, t ) 7→ f (x, t )
∂f ∂n f
Si • ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ), t 7→ (x, t ), · · · , t 7→ n (x, t ) existent et sont continues par morceaux sur
∂x ∂x
J (pour pouvoir définir les intégrales),
∂k f
• ∀x ∈ I , t 7→ f (x, t ) est intégrable sur J et ∀k ∈ J1; n − 1K, t 7→ (x, t ) est intégrable sur J .
∂x k Z
∂k f
(ceci assure en particulier pour tout x de I l’existence de g (x) et de (x, t )dt pour tout
J ∂x
k
k ∈ J1; n − 1K)
∂f ∂n f
• ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ), x 7→ (x, t ), · · · , x 7→ n (x, t ) sont continues sur I ,
∂x ∂x
i.e. ∀t ∈ J , x 7→ f (x, t ) est C n sur I (pour assurer la dérivabilité n fois de g ),
R
• ∃ϕ : J → positive, ¯ n continue par morceaux et intégrable sur J telle que
¯∂ f
¯
∀x ∈ I , ∀t ∈ J , ¯¯ n (x, t )¯¯ 6 ϕ(t ) (hypothèse de domination indépendante de x) ;
¯
∂x
Z k
∂ f
Z
alors g : x 7→ f (x, t )dt est C n sur I , et ∀k ∈ J1; n K, ∀x ∈ I , g (k) (x) = (x, t )dt .
J ∂x
k
J

Remarque: On observe évidemment des remarques analogues au cas de la dérivabilité simple.

R∗+.
Z +∞
Exemple: Montrer que la fonction Γ définie par Γ(x) = e−t t x−1 dt est C ∞ sur
0

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