Vous êtes sur la page 1sur 2

PAT H O L O G I E D U B Â T I M E N T

30
Charpentes en lamellé-collé :
de la fissuration à la rupture
C’est au niveau des assemblages en particulier, que peuvent apparaître
certaines fissurations dans les poutres et poteaux en lamellé-collé.
Plusieurs causes peuvent être à l’origine de ce risque, depuis la conception elle-même
jusqu’aux sollicitations excessives de l’ouvrage.

Des fissurations au voisinage de goussets métalliques


(axiaux ou latéraux) ou de toutes autres pièces d’assem-
blages métalliques de grandes dimensions ne sont pas
rares, dues au fait que le retrait transversal du bois est gêné
par les pièces d’acier. Ces phénomènes, le plus souvent limi-
tés à une zone d’assemblage, sont habituellement sans
grande conséquence sur la sécurité. Ils doivent néanmoins
être considérés en fonction de l’intensité locale des efforts
tranchants, générateurs de contraintes de cisaillement longi-
tudinal.
Des fentes ou gerces en parties courantes de pièces sont
fréquentes, notamment dans les ouvrages intérieurs de
locaux chauffés. Souvent mises en avant dans les rapports
d’expertise, elles ne sont à considérer comme réellement
“pathologiques” que lorsqu’elles sont continues sur de très
grande longueurs (plus de 3 à 4 fois la hauteur de poutre par
exemple), ou qu’elles n’intéressent que des plans de collage
sans pratiquement s’en “évader” dans le bois environnant.
Ou bien encore, si leurs dimensions transversales sont très
importantes (pénétration supérieure à 1/3 de l’épaisseur de
poutre et ouverture supérieure à 2 mm).

Deux configurations ayant conduit à la rupture


Les charpentes en lamellé-collé sont souvent mises en traction transversale
en œuvre dans des bâtiments de grandes dimensions.
Poutre avec épure circulaire en zone de moment de flexion
tendant à un “dé-cintrage” de la poutre. Cette combinaison
conduit à des contraintes radiales induites qui peuvent faci-

L’ analyse des différents cas de fissuration sous l’effet de


contraintes transversales mécaniques ou physiques anor-
lement excéder la résistance en traction transversale du
bois. Outre le fait que certains projeteurs ignorent ce phéno-
mène et ne le vérifient donc pas, l’émergence de cette
males montre dans la très grande majorité des cas, que les pathologie a été, en grande partie, due à la forte contrainte
fentes apparaissent plus dans le bois lui-même que dans les admissible autorisée précédemment par les Règles CB71.
collages. La déficience de ceux-ci est très rare aujourd’hui. Apparemment correct en terme de coefficient de sécurité sur
les valeurs moyennes mesurées, ce calcul ne tient pas assez
Les zones d’assemblage sont propices à la fissuration compte de l’effet d’échelle et de la forte dispersion naturelle
Plusieurs types de fissurations peuvent apparaître sur les de cette résistance à la traction transverse. Cette dernière
bois, en fonction de leur sollicitation mécanique ou de leur cause de pathologie a été supprimée, la contrainte admis-
mode de mise en œuvre. sible ayant été ramenée à des valeurs de l’ordre de 0,15 à
Fissuration longitudinale de têtes de poteaux au niveau de 0,2 Mpa (soit environ le tiers des valeurs figurant dans les
leur assemblage, par couronne de boulons. Contrarié par la règles CB).
quasi absence de retrait longitudinal, le retrait transversal du Rupture d’une pièce (arbalétrier de ferme ou d’arc par
bois conduit à une rupture en traction transversale, lorsque exemple) en traction transversale et cisaillement au droit de
l’humidité ambiante de l’ouvrage est très inférieure à l’humi- l’assemblage avec une pièce tendue. Ce phénomène peut
dité du bois lors de l’assemblage. Une ou plusieurs fentes se produire lorsque la majorité ou la totalité des assembleurs
longitudinales peuvent ainsi apparaître, dont le cumul des se situent, par rapport à l’axe de la pièce receveuse, du côté
largeurs atteint couramment une valeur de l’ordre du centi- de la pièce tendue. Cette configuration fait naître, par l’écou-
mètre. Ces inconvénients sont plus d’ordre esthétique que lement interne des efforts, des contraintes de traction trans-
mécanique. Il faut cependant considérer que dans certaines versale et de cisaillement qui peuvent entraîner la ruine de
configurations géométriques telles que des poteaux courts l’assemblage et de la pièce receveuse. Pour éviter ce phé-
et/ou à forte décroissance de section, cette fissuration peut nomène, non prévu par la réglementation, on recommande
éventuellement se combiner à des efforts de cisaillement et habituellement de disposer une part substantielle des
de traction transversale avec des pertes de sécurité beau- assembleurs au delà de l’axe de la pièce receveuse par rap-
coup plus préoccupantes. port à la pièce tendue.
PAT H O L O G I E D U B Â T I M E N T 30
Grands arcs et surcharge : charge d’eau et finissent par rompre à la fin du processus
les risques de déformation itératif. Ce phénomène est sensible sur les pannes de gran-
Parmi un ensemble très diversifié de phénomènes de défor- de portée.
mations aux causes multiples, nous citerons deux cas de
pathologie caractéristiques : Conclusion : Ce qui ressort des problèmes évoqués nous
semble pouvoir être résumé en trois points :
• Affaissement accentué du faîte des arcs à reins courbes.
Le retrait transversal du bois dans une zone de rein courbe • La qualité de fabrication du matériau, mise en cause suite
conduit, par un simple effet géométrique, à une réduction du à certains sinistres, est globalement bien maîtrisée à l’heure
rayon de courbure de cette zone (de même qu’un gonfle- actuelle et plus facilement contrôlable (qualification profes-
ment induirait une augmentation de ce rayon). En pratique sionnelle, certification).
donc, si l’humidité de stabilisation de l’arc est sensiblement
inférieure à celle de la fabrication, l’épure finale s’en trouve • La plus “pathogène” des anomalies réglementaires (sur-
modifiée et, notamment, la flèche élastique calculée au faîta- évaluation de la contrainte admissible de traction perpendi-
ge est majorée de cet effet géométrique. Bien que la sécuri- culaire) a été corrigée. Toutefois la réglementation actuelle,
té ne soit, en général, pas affectée, il peut en résulter des souvent floue ou muette, est dispersée dans des documents
désagréments esthétiques ou fonctionnels, voire des aux statuts divers et laisse beaucoup de marge d’interpréta-
désordres de couverture. tion et d’initiative au concepteur.

• Surcharge d’eau cumulative sur des pannes de couvertu- • Enfin, il apparaît qu’une proportion notable des cas de
re à faible pente. Sur des couvertures à très faible pente pré- pathologies trouve son origine dans des erreurs de concep-
sentant quelques imperfections géométriques initiales, ou tion, souvent liées à une mauvaise prise en compte des spé-
lorsque les évacuations d’eau pluviales ne présentent pas un cificités du matériau ou de ses paramètres de calcul. Des
débit suffisant, il arrive que les pannes, prenant de la flèche formations spécifiques existent pour la familiarisation des
par une charge d’eau initiale, créent une poche qui accroît la concepteurs avec ce matériau.

9, boulevard Malesherbes
75008 Paris

114, avenue Émile Zola


75739 Paris Cedex 15

REPRODUCTION I N T E R D I T E S A N S A U T O R I S AT I O N D E S É D I T E U R S

Vous aimerez peut-être aussi