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Filière 

: Droit en langue française.


Option : Droit privé.
Projet de fin d’étude pour l’obtention de la licence.

Sous le thème :

L’élément moral dans l’infraction

Réalisé par :

 MAJD Chaimae
 NAJAH Omar

Encadré par :

 Mme. KHALLOUFI Amina

Année universitaire 2019/2020.


Dédicace :

À nos chers parents, pour tous leurs sacrifices, leur grand amour et

tendresse, leur soutien et leurs prières tout au long de nos études.

À nos familles pour leurs encouragements permanents, leur appui

et leur soutien moral.

À nos amis et camarades pour leurs supports et soutien mutuel.

À vous cher lecteur.

On vous dédie ce modeste travail avec amour, sincérité et fierté, et

qu’il soit le fruit de votre soutien infaillible.


Remerciements :

On profite par le biais de ce travail, pour exprimer nos vifs


remerciements, et notre profonde gratitude à notre chère professeur
Amina KHALLOUFI, d’avoir encadré notre projet de fin d’études, ainsi
que son énorme soutien, pour l’effort fourni, les conseils prodigués et
aussi sa vaillance pour notre encadrement, merci d’être toujours là
pour nous.

Nos remerciements vont à tous nos enseignants, qui nous ont


éduqués sur les bases de la science juridique, et aux membres du jury
qui ont accepté de siéger cette soutenance.

Nous remercions également toute personne qui nous a aidé de


prés ou de loin à l’accomplissement de ce modeste travail.
Sommaire :

Introduction 

Première partie : L’intention criminelle : Un facteur de pénalisation :


Chapitre 1 : le concept de l’intention criminelle :
 Section 1 : Une étude approfondie de l’intention criminelle  
 Section 2 : La théorie de l’intention criminelle dans la doctrine 

Chapitre 2 : Les divers aspects de l’intention criminelle : 


 Section 1 : Une analyse du dol général
 Section 2 : Une analyse du dol spécial

Deuxième partie : La faute non intentionnelle : Un facteur de


dépénalisation modérée :
Chapitre 1 : Le concept et la structure de la faute non intentionnelle :
 Section 1 : La notion de la faute non intentionnelle
 Section 2 : La structure de la faute non intentionnelle

Chapitre 2 : La faute quasi-délictuelle et la faute contraventionnelle :


 Section 1 : La faute quasi-délictuelle
 Section 2 : La faute contraventionnelle

Conclusion
Liste des abréviations :

 CPM : Code Pénal Marocain 

 CPF : Code Pénal Français

 Crim. : Cour de cassation, Chambre criminelle

 CP : Code Pénal

 P. : Page 

 Ed. : Édition 

 Art : Article

 Arr. : Arrêt

 Bull : Bulletin

 NCP : Nouveau Code Pénal

 DOC : Dahir Des Obligations et Contrats


Introduction :

1
La criminalité est inhérente à toute société quelle que soit sa
forme, dés qu’il y a constitution d’un groupe, cela induit des
comportements criminels. Face à cette criminalité, on va voir le groupe
se préparer sa protection et sa défense pour pouvoir le contrer. Il s’agit
tout d’abord d’une réalité humaine dans la mesure où la violation de la
norme est le fait d’un individu qui, pour diverses raisons, ne va pas
percevoir l’intérêt à respecter la règle, et donc l’intérêt à venir protéger
la valeur à laquelle il porte atteinte à travers la violation du texte
pénal. Le droit pénal en s’intéressant à la criminalité, il ne saisit que
partiellement l’individu, sa construction fait qu’il saisit en premier
l’acte avant le criminel.

Tout d’abord, le droit pénal est une branche des sciences


juridiques, il est définit comme : « l’ensemble des règles juridiques1 qui
organisent la réaction de l’Etat vis-à-vis des infractions et des
délinquants », ou comme « le droit de l’infraction et de la réaction
sociale qu’elle engendre»2, ou encore comme « l’ensemble des normes
juridiques qui réglementent le recours de l’Etat à la sanction pénale »3.

Au sens plus étroit, le droit pénal désigne « l’ensemble des règles


ayant pour objet de déterminer les actes antisociaux, de désigner les
personnes pouvant en être déclarées responsables et de fixer les peines
1
- Il se sépare par là des sciences et disciplines humaines non juridiques, tout en entretenant avec celles-ci des
rapports qu’il convient de souligner. Les sciences philosophiques pénètrent profondément le droit, chaque fois
qu’elles s’appliquent au phénomène criminel, et, depuis l’antiquité, bien des philosophes ont écrit sur le droit
pénal. La métaphysique peut éclairer le fondement reconnu au droit de punir. La conception que l’on admet
sur l’origine et le rôle de l’Homme, sur sa liberté, etc., commandent la partie à prendre sur sa responsabilité et
sur ses droits et devoirs à l’égard de l’état. La morale a souvent été considérée comme ayant fourni les
premières dispositions pénales et comme contenant aujourd’hui encore le résumé de ses prescriptions. La
psychologie, de son coté, a toujours été nécessaire au législateur et au juge, mais elle l’est devenu encore
depuis que la considération de la personnalité du coupable apparait être l’élément dominant de la répression.
Les progrès considérables des sciences psychologiques depuis le début de ce siècle, joints au développement
pris par la sociologie, apportent à l’heure actuelle une aide de premier plan à l’élaboration du droit pénal et à
son application.
2
- P.KOLB, L.LETURMY, « Droit pénal général », Lextenso, 5éme éd., 2010, p.20.
3
- J.H.ROBERT, « droit pénal général », PUF, 3e éd., 1998, p. 53.

2
qui leur sont applicables »4. A la lecture d’une telle définition5, il est
tentant d’admettre le droit pénal dans la cohorte des matières formant
le droit public. Personne ne le conteste, c’est bien l’Etat, et seulement à
celui-ci, que revient de fixer la liste des interdits, d’organiser la
poursuite et d’assurer la répression des comportements prohibés 6.
Néanmoins le droit pénal par sa technique, présente les
caractéristiques d’une branche appartenant, sans conteste au droit
privé. En réalité, l’analyse ne permet pas de rattacher entièrement le
droit pénal à l’une ou l’autre des deux grandes catégories du droit
dans la mesure où il entretient des rapports étroits avec chacune
d’entre elles et quels que soient ces rapports, le droit pénal en tant que
branche juridique, a une autonomie indiscutable7.

Le droit pénal, de façon juridique, il est divisé en deux grandes


branches : le droit pénal général et le droit pénal spécial.

Le droit pénal général est définit comme l’ensemble de règles de


fond applicables, quelle que soit la nature particulière des infractions
en cause, c’est la branche qui regroupe les principes généraux de
l’incrimination et de la répression, il envisage de façon plus
synthétique, les questions qui concernent l’ensemble des infractions.
D’une part, le droit pénal général étudie les grandes catégories
d’infractions8 en fonction de leurs caractères essentiels ou de leur
gravité relative, les éléments généraux de toute infraction punissable,
enfin les personnages qu’elle concerne9. D’autre part, il s’attache aux
diverses sanctions et à leur régime10.

A la différence du droit pénal général, le droit pénal spécial ne


s’intéresse plus à l’infraction mais à la théorie de chaque infraction
particulière11. Pour chacune d’elles, il décrit et définit les éléments
4
- F.Desportes, F. Le Gunehec, « Droit pénal général », 8éme éd., économica, 2001.p 1.
5
- Cette définition reflète la dimension « sanctionnatrice » du droit pénal. Ce dernier s’articule autour de deux
notions clés : l’incrimination et la sanction.
6
- P.KOLB, L.LETURMY, « Droit pénal général », Lextenso, 5éme éd., 2010, p.20.
7
- Pour plus de détail sur cette question d’autonomie du droit pénal v, P.Bonfils, «  l’autonomie du juge pénal »,
Mélanges Bouloc, Dalloz, 2006, p. 47.
8
- Le droit pénal général définit l’infraction pénale dans l’absolu, dans chacune des sous-catégories qui peuvent
justifier des différences de traitement, dans les éléments que chacune d’elle doit comporter pour donner lieu à
la répression pénale.
9
- Le droit pénal général précise à quelles personnes (auteurs principaux, coauteurs, complices…) et dans
quelles conditions éventuellement particulière (pour les démens, les mineurs…) la répression peut s’appliquer.
10
- J.PRADEL, « Droit pénal général » CUJAS, 2001, p.56.
11
- Le premier souci du législateur étant de déterminer la nature des agissements qu’il estime dangereux pour
l’ordre public. Il établi ainsi un catalogue des incriminations. Cette détermination des incriminations dans leurs
conséquences juridiques constitue l’objet du droit pénal spécial.

3
constitutifs, les sanctions prévues et les particularités procédurales
dont sa poursuite spécifique peut être affectée. Le droit pénal spécial
est historiquement et rationnellement la première des disciplines du
droit pénal, de même que le droit pénal et la procédure pénale
coexistent entre eux, ils coexistent toujours avec le droit pénal
spécial12.

D’un point de vue théorique, le terme « pénal » est issu du latin


« poena » qui signifie peine, punir, il serait donc le droit de punir
autrui, or, la punition repose sur l’idée qu’il est nécessaire d’infliger un
mal que le coupable a infligé à autrui. Il existait donc une forme de
punition légitime13 en ce qu’elle émanerait de l’Etat, seul détenteur du
pouvoir de punir, mais aussi parce qu’elle serait prévue par le droit.
En se fondant sur deux critères, la punition serait juste. Quelle est
alors l’utilité de la punition ? Elle viserait pour un nombre d’auteurs,
comme LOCKE ou HOBBES, à protéger la société, à conserver la cité 14.
Pour PLATON15, la punition est présentée comme un remède, chez lui,
l’analogie entre la punition et le remède est plus poussée encore : il est
possible que le malade trouve le remède désagréable, mais pourtant, il
est nécessaire pour son guérison, punition est donc un mal
nécessaire. Ce fondement théorique est basé sur la théologie puisqu’il
vise le salut de l’âme en la purgeant de ses vices 16. BECCARIA semble
nier l’existence d’une quelconque théorie des peines, il serait inutile de
rechercher les fondements théoriques du droit pénal, il rappelle que le
droit de punir relève de la compétence exclusive de l’Etat 17, LOCKE
partage cette idée, il reconnait l’utilité sociale de punir, si l’Etat puni,
c’est afin de protéger ses citoyens et la société toute entière, et en
punissant l’Etat empêche la récidive du coupable et par son caractère
symbolique incitatif18, le droit pénal indique aux autres citoyens que
l’imitation de l’agissement criminel commis entrainera une sanction.

12
- M.RASSAT, « Droit pénal général » Elllipses, 2éme éd, 2006, p.63.
13
- M.BENILLOUCHE, « Leçons de droit pénal général », Ellipses, 2ème édition, 2012, p.9.
14
- Pour plus de détails v, Pradel, Histoire des doctrines pénales, que sais-je ?, 1989.
15
- M.ENILLOUCHE, « Leçons de droit pénal général », Ellipses, 2ème édition, 2012 p.9.
16
- ibid.,
17
- C. BECCARIA, « Traité des délits et des peines ». La version en langue italienne date de 1764. Sa première
traduction en langue française remonte à 1766. A l’occasion de la célébration du bicentenaire de ce grand
événement, les éditions Cujas ont publié en 1966 une version française améliorée précédée d’une introduction
consignée par G. STEFANI et M. ANCEL et des contributions de G. LEVASSEUR, p.1 et s.  ; G. VASSALI, p. 19 et s.
G. VEDEL, p.55 et 56 notamment.
18
- M.BENILLOUCHE, « Leçons de droit pénal général », Ellipses, 2ème édition, 2012p.10.

4
Avant l’islamisation du Maroc : la coutume exerçait son pouvoir,
sans aucune concurrence dans le cadre de la jouissance par les tribus
d’une réelle liberté dans la définition des réponses à la délinquance et
dans leur application19. A cette époque, seules les normes produites, in
situ (sur place) déterminaient les comportements humains prohibés
ainsi que la nature et la forme de la réaction que les entités tribales
mettaient en œuvre. Ces coutumes n’avaient d’autorité que dans le
périmètre d’influence de la tribu qui lui donnait naissance et la
développait20.

Avec l’arrivé de l’Islam : sa normativité pénale cherché à


supplanter le droit de souche et la légitimité sociologique que la
coutume avait acquise auprès des membres des tribus. Cependant,
cette dernière était si fortement enracinée dans les consciences et les
pratiques qu’elle ne risquait point d’être déstabilisée par les assauts
d’un système de droit et de justice venu d’ailleurs et auquel manquait
l’indispensable structure de mise en œuvre sur le terrain 21. Le Maroc
se trouvait alors devant deux systèmes de répression en compétition.
De ce fait, les jurisconsultes marocains, se sont engagés dans un
processus d’harmonisation et d’hybridation des solutions répressives
provenant de sources différentes. Ainsi, à l’Islam était reconnu le
statut de référent, mais la répression s’organisait concrètement autour
des règles coutumières22, la réception de la législation pénale islamique
par la coutume s’effectuait donc selon un processus pragmatique
d’échange qui tenait compte de la vivacité de la coutume et permettait
d’éviter tout conflit entre la foi des marocains et les solutions qu’ils
appliquaient. L’Islam servait de couverture idéologique à la coutume,
ses principes juridiques et ses valeurs étaient protégés : la coutume ne
pouvait interdire les comportements que l’islam recommande, ni
autoriser les actes qu’il couvre d’illicéité 23.

Durant la période du protectorat, au lieu de s’instruire de cette


longue expérience24, le protectorat a préféré user des moyens à sa
disposition pour introduire son droit et en étendre le régime aux

19
- M. AMZAZI, « Essai sur le systéme pénal marocain », Centre Jacques-Berques, 2013, p.7.
20
- G. SALMON et L. BRUZEAUX, « Contribution à l’étude du droit coutumier du Nord Marocain », Archives
Marocaines, 1905, p.303.
21
- M. AMZAZI, « Essai sur le systéme pénal marocain » Centre Jacques-Berques, 2013, p. 7.
22
- J .BERQUE, Essai sur la méthode juridique maghrébine, Le Forestier, 1944. Cité par M. AMZAZI, op.cit., p.11.
23
- M. AMZAZI, « Essai sur le systéme pénal marocain » Centre Jacques-Berques, 2013, p. 5.
24
- Pour plus de détails v, B. BOTIVOU, « Droit islamique, du politique à l’anthropologie », Revue Droit et
société, n°15, 1990.

5
nationaux. Cependant, le protectorat ne parvint à imposer sa
législation aux nationaux qu’au moyen d’une réforme dite de la justice
Makhzen porter par quartes dahirs promulgués en 1953 25 dont le
Dahir du 24 Octobre 1953 formant code pénal marocain 26. Cette
réforme constituait l’acte final de tout un processus d’acculturation
juridique. La technique utilisé consistait à déclarer impropre à la
consommation les sources coutumières et islamique du « système
pénal marocain » taxées de s’alimenter dans la théocratie de la justice
retenue27. Lorsque le code pénal annonça que la loi était seule fondé à
créer les infractions et à édicter les peines, il fallait comprendre que les
autres normes étaient disqualifiées28.

Apres l’indépendance : le maintien du statu quo29 juridique sert


à préparer le terrain à la pérennisation de la validité du modèle
transposé par la France au Maroc30. Ce qui s’est manifesté par la
promulgation en 1959 du code de procédure pénale et en 1962 du
code pénal.

Le droit pénal marocain est un droit hérité du colonisateur


français et qui a été adopté par le législateur marocain en 1962 par le
dahir n°1-59-143 du 28 Joumada II 1382 (26 novembre 1962) qui
comprend 612 articles, depuis sa promulgation, le code pénal a subi
plusieurs réformes du fait son inadéquation avec le contexte actuel et
la nécessité de son adaptation avec les exigences des conventions
internationales des droits de l’Homme ratifiées par le Maroc. Parmi ces
réformes, on peut citer : l’introduction de certaines dispositions
relatives à la lutte contre le terrorisme 31, des dispositions relatives à la
lutte contre le blanchiment des capitaux 32, de la torture (la loi N°43-04
25
- Dahir du 24 octobre 1953 formant Code pénal marocain, B.O., n°2142 bis du 19 novembre 1953, p. 1677  ;
dahir du 24 octobre 1953 formant code de procédure pénale, B.O., n°2142 bis du 19 novembre 1953, p.1697  ;
dahir du 24 octobre 1953 relatif à l’organisation de la justice makhzen, B.O., n° 2142 bis du 19 novembre 1953,
p.1700 ; dahir du 24 octobre 1953 fixant le statut des magistrats des tribunaux makhzen, B.O., n°2142 bis du 19
novembre 1953, p. 1708.

26
- L. MALAVAL, « la réforme de la justice pénale au Maroc », Revue de sciences criminelles et de droit pénal
comparé, 1954, p. 299 et s.
27
- Ibid.,
28
- M. AMZAZI, « Essai sur le systéme pénal marocain » Centre Jacques-Berques, 2013, p. 17.
29
- Le statu quo fut maintenu au moyen de la décision de proroger la durée de vie des codifications de 1953 au-
delà du jour de la déclaration du retour à l’indépendance.
30
- M. AMZAZI, « Essai sur le systéme pénal marocain » Centre Jacques-Berques, 2013, p.20.
31
- Dahir n° 1-03-140 du 26 Rabii I 1424 (28mai 2003) portant promulgation de la loi n° 03-03 relative à la lutte
contre le terrorisme.
32
- Dahir n° 1-07-79 du 28 Rabii I 1428 (17avril 2007) portant promulgation de la loi n°43-05 relative à la lutte
contre le blanchiment des capitaux.

6
promulguée en 2006), sur les violences faites aux femmes (la loi 103-
13 promulguée le 03 septembre 2018) et l’introduction des infractions
relatives au systéme du traitement automatisé des données 33.

De même, on ne peut pas parler sur le droit criminel sans parler


du phénomène criminel, autrement dénommé criminalité ou
délinquance, correspond à une somme d’événements à laquelle la
population est confrontée de manière habituelle, soit en tant qu’acteur,
soit en tant que spectateur. Pour les citoyens, en effet, la vie
quotidienne offre son lot de rencontres avec la législation pénale qui
pose des interdits, de ce fait, toute personne appartenant à une société
a-t-elle une idée de ce qu’est le droit pénal. Mais, il convient de
devancer les idées préétablies car l’Homme se trouve au cœur dudit
phénomène et, par ricochet, de cette discipline juridique, attribuant à
cette dernière toute sa richesse mais aussi sa complexité. Cette notion
n’est pas nouvelle, le phénomène criminel est apparu avec l’apparition
des êtres humains sur la Terre, selon le Coran, le premier meurtrier de
l’humanité est Caïn, fils aîné d'Adam et Ève, tue son frère cadet Abel.
Donc le premier crime du monde est le meurtre d’un frère par son
frère.

Chacun le souligne, le droit pénal gouverne les comportements.


L’infraction est tout fait contraire à l’ordre social, qui expose celui qui
l’a commis à une peine et ou à une mesure de sureté, mais la société
ne pouvant imposer une mesure quelconque à un individu, sous
prétexte qu’il s’est révélé dangereux ou qu’elle le considère tel, le
législateur est intervenu pour déterminer les actes qu’elle a le droit de
réprimer34. L’infraction consiste en un comportement prévu et
incriminé par la loi pénale, et qui autorise l’application d’une sanction
à son auteur.

D’un point de vue juridique, l’infraction est définie comme


« l’action ou l’omission, imputable à son auteur, prévue ou punie par la
loi d’une sanction pénale »35, c’est le facteur déclenchant du droit
pénal, puisque c’est le soupçon de commission d’une infraction qui va
conduire à en rechercher la réalité, puis à en apprécier les
caractéristiques. Qui entreprend aujourd'hui d'expliquer à un quidam
33
- Loi n° 07-03 complétant le code pénal en ce qui concerne les infractions relatives aux systèmes de
traitement automatisé des données, promulgué par le Dahir n° 1-03-197 du 16 Ramadan 1424 (11 novembre
2003).
34
- B.BOULAC, « Droit pénal général », Dalloz, 22éme édition, 2011, p.93.
35
- B.BOULAC, « Droit pénal général » Dalloz, 22éme éd, 2011, p.94.

7
la manière dont le crime est saisi par le droit, ne peut le faire sans
recourir à la théorie générale de l'infraction qui se considère comme le
fruit d'une construction intellectuelle à mettre au crédit d'un progrès
de la rationalité juridique. Toute infraction présente des caractères
semblables, ainsi, pour qu’une infraction existe, il est nécessaire que
trois éléments traditionnels soient réunis : un élément légal, un
élément matériel et un élément moral. Ce sont les éléments constitutifs
de l’infraction.36

Ces éléments constitutifs sont déterminés par le droit pénal qui


fixe les composantes globales de l’infraction pénale, ces conditions sont
de telle généralité qu’elles sont communes à l’ensemble des
incriminations pénales érigées par le législateur 37.

Premièrement, l’élément légal correspond au principe de la


légalité des incriminations et des peines, il est issu d’un vieil adage
selon lequel « nullum crimen, nulla puena, sine lege », c'est-à-dire « ni
infraction, ni peines, sans texte légal », l’Art 3 du code pénale marocain
consacre, à son tour, le principe en disposant que « nul ne peut être
condamné pour un fait qui n’est pas expressément prévu comme
infraction par la loi, ni puni des peines que la loi n’a pas édictée », de
la nécessité de l’existence d’un texte légal pour qu’il y ait infraction et
que cette dernière soit punissable, résulte la conséquence importante
que la loi pénale est d’interprétation stricte.

Deuxièmement, l’élément matériel correspond aux modalités de


la réalisation des agissements incriminés, suppose donc
l’accomplissement d’un acte (action ou omission) manifesté par une
attitude extérieure, c'est-à-dire que la loi définit les comportements
matériellement prohibées. Aussi l’infraction ne peut être constituée si
l’élément matériel prévu dans le texte d’incrimination fait défaut, il
traduit en gestes l’intention délictueuse, cette dernière ne pouvant être
suffisante à elle seule pour autoriser le déclenchement de la répression
au regard des libertés individuelles.

Dernièrement vient l’élément moral qui nécessite que la


survenance matérielle de l’infraction soit l’œuvre de la volonté de son

36
- V. BOUCHARD, « Droit pénal », éditions Foucher, 2009, p.16.
37
- Quant au droit pénal spécial, il précise les détails des composantes de l’infraction. En effet, pour chaque
infraction, le droit pénal spécial présente de quelle manière le comportement puni par la loi, correspond à celui
adopté par le délinquant. Par conséquent, le droit pénal spécial, s’attache davantage aux conditions
particulières de chaque infraction pénale.

8
auteur38 ; En effet, pour que l’infraction pénal commise, soit
punissable pénalement, il ne suffit pas que le comportement incriminé
(élément légal) ait été perpétré par le sujet (élément matériel), il faut
également que l’auteur de l’acte ait voulu réaliser cet acte, que la
survenance matérielle soit l’œuvre de sa volonté. C’est la raison pour
laquelle le législateur s’est attaché à incriminer et à sanctionner les
infractions pénales intentionnelles, cependant devant la multiplication
des dommages résultant des fautes par imprudence ou négligence, le
législateur reconnait aujourd’hui qu’il peut y avoir infraction pénale
même en présence d’une infraction pénale non intentionnelle et il
adapte ainsi la sanction en ce sens, comme par exemple les violences
involontaires ou les homicides involontaires 39.

L’intérêt de ce sujet se visualise théoriquement sur la complexité


de l’élément moral « stricto sensu », il existe sur ce point, depuis cent
cinquante ans, d’infinies controverses doctrinales et jurisprudentielles
concernant cet élément intellectuel. C’est un facteur psychologique
dont la notion est plus délicate à cerner que l’élément matériel 40.
Lorsqu'on aborde le sujet de ce qu'on appelle la question
intentionnelle, la première difficulté que l'on rencontre est d'ordre
terminologique, qui parcourt en effet la législation et les décisions des
tribunaux est amené à rencontrer une multitude de vocables qui
appartiennent au champ lexical de ce qu'on théorisera plus tard
comme constituant l'élément moral de l'infraction. Les occurrences,
telles que « volontairement », « méchamment et à dessein », « sciemment
», « à dessein de nuire » sont légion et elles semblent naturellement
tomber dans le champ de l'expression tout aussi courante de « moralité
des faits », cette indécision terminologique n'est toutefois qu'apparente
car les vocables précités n'ont pas tous la même destination
processuelle.

L’expression de l’élément moral reste vague et aucune définition


claire de l'intention criminelle n'est donnée, a cette fin il est opportun
pour le législateur de viser l’élément moral de l’infraction comme vient
dans l’Art 133 du Code pénal marocain qui dispose que : « les crimes
et les délits ne sont punissable que lorsqu’ils ont été commis
intentionnellement. Les délits commis par imprudence sont
exceptionnellement punissables dans les cas spécialement prévus par
38
- V. BOUCHARD, « Droit pénal », éditions Foucher, 2009, p.16
39
- ibid.,
40
- P. CONTE, P. Maitre du Chambon, « Droit pénal général », Dalloz, 2014, p.349.

9
la loi. Les contraventions sont punissables même lorsqu’elles ont été
commises par imprudence, exception faite des cas où la loi exige
expressément l’intention de nuire ». A la lecture de cet article, il est
aisé de distinguer les différentes formes de l’élément moral. L’article
établit en effet, une hiérarchie des fautes pénales 41, entre d’abord la
faute intentionnelle et ensuite la faute non intentionnelle. Ce qui nous
mène à poser les deux questions suivantes : Quelles sont les
différentes formes de l’élément moral ? Et comment peut-on décider la
pénalisation ou la dépénalisation modérée d’après les composantes de
l’élément moral ?

Pour répondre à cette problématique, nous avons choisis de


traiter les deux parties suivantes : La première partie concernera
l’intention criminelle en tant qu’un facteur de pénalisation, où on va
traiter le concept de l’intention criminelle et ses divers aspects. Dans
une deuxième partie, on est amené à parler sur la faute non
intentionnelle en tant qu’un facteur de dépénalisation modérée, dans
laquelle on va traiter le concept et la structure de la faute non
intentionnelle, et on va traiter la faute quasi-délictuelle et la faute
contraventionnelle.

41
- A.D’HAUTEVILLE, « la gradation des fautes pénales », in réflexions sur le nouveau code pénal, ouvrage
collectif de l’E.R.P.C., Pédone, 1995, p.31.

10
Partie 1: l’intention criminelle :
Un facteur de pénalisation :

11
« Les crimes et les délits ne sont punissables que lorsqu’ils ont été
commis intentionnellement » comme l’énonce clairement l’article 133
du C.P. En principe, l’intention reste une notion vague et complexe qui
nécessite la connaissance de son concept (chapitre1) et ses divers
aspects (chapitre2).

12
Chapitre I : Le concept de l’intention criminelle :
Dans ce chapitre, nous procéderons à une étude approfondie de
l’intention criminelle (section1), pour ensuite connaitre la théorie de
l’intention criminelle dans la doctrine (section2).

Section 1 : Une étude approfondie de l’intention criminelle  :


On traitera dans un premier paragraphe une définition large de
l’intention criminelle, alors que dans un deuxième paragraphe on
traitera la confusion de l’intention criminelle avec la préméditation.

Paragraphe 1 : Définition de l’intention criminelle :


Pour commencer, étymologiquement la notion d’intention vient
du latin « intentio »42 qui signifie action de diriger, c’est une application
de l’esprit à un objet de connaissance, comprenons par là qu’il s’agit
d’une volonté tendue vers un résultat et un but interdit par la loi
pénale. C’est une notion difficile à définir ; le législateur lui-même a
démissionné et ne lui a pas donné de définition, pourtant il faut bien
dégager une définition de l’intention, si la loi a démissionné, ce n’est
pas pour autant que le concept d’intention n’existe pas.

Les rédacteurs du code pénal usèrent de termes différents pour


définir l'élément moral de l'infraction. On retrouve, par exemple, les
expressions telles que « mauvaise foi », « volontairement », « sciemment », «
frauduleusement », mais le mot « intention » n'apparaît pas, Parce
qu’aucun texte ne l’a jamais défini, il n’a vu le jour qu'avec la loi du 19
avril 1898, modifiant les articles 309 et 312 du C.P « coups volontaires
ayant entraîné la mort sans intention de la donner ou privation d’aliments à
enfant avec ou sans intention ».

Ainsi, le projet de C.P.F de 1934 ne précise pas la notion


d'intention criminelle. Pourtant, elle est l'élément constitutif d'un
grand nombre d'infractions. C’est le code pénal de 1994 qui va être le
premier à exiger une intention criminelle pour tous les crimes et les
délits dans son article 121-3 alinéa 1, il pose trois règles à valeur de
principes directeurs du droit pénal. En premier lieu, il énonce que
s’agissant des crimes, l’intention est toujours requise. En second lieu,
le texte énonce que la faute contraventionnelle suffit en principe à

42
- « intentio », dans Félix GAFFIOT, Dictionnaire latin français, Hachette, 1934.

13
caractériser l’élément coupable des contraventions. Toutefois, par
exception, sur prévision expresse du pouvoir réglementaire au titre de
la contravention considérée, l’élément coupable de certaines
contraventions peut consister soit dans la faute intentionnelle, soit
dans la faute d’imprudence. Enfin, en troisième et dernier lieu, l’article
121-3 CP prévoit que, s’agissant des délits, la faute intentionnelle est
en principe requise. Toutefois, par exception, sur prévision expresse du
législateur au titre du délit considéré, l’élément coupable de certains
délits peut consister en une faute d’imprudence.

Quant à l’intention criminelle, « Mens rea » est une locution


juridique signifiant l'intention coupable, ou l'esprit criminel. La
locution est connue dans l'Antiquité, à la fois latine et grecque. Il n'est
pas impossible que le concept soit élaboré dans des temps plus
anciens. La culpabilité morale d'un individu est un élément essentiel
d'un crime dans les juridictions de Common Law. Le test de la
responsabilité criminelle d'un individu est exprimé par la phrase latine
: « Actus non facit reum nisi mens sit rea », ce qui signifie que l'acte de
culpabilité ne rend pas un individu criminel à moins que l'esprit de cet
individu soit aussi coupable . En effet, cette notion est souvent utilisée
par les juristes pour qualifier la volonté d'une personne de commettre
un acte ou un comportement avec la conscience qu’il est défendu par
la loi pénale, ou encore de s’abstenir d’un acte avec la conscience qu’il
est ordonné par cette même loi. L’idée de l’intention est donc le pivot
de l’élément moral.

Le droit pénal canadien distingue entre la mens rea subjective et


la mens rea objective43. La mens rea subjective existe dans des
infractions criminelles où le texte de loi indique par des mots-clés qu'il
y a l'intention, la connaissance, l'aveuglement volontaire ou
l'insouciance. La mens rea objective existe essentiellement dans les
infractions de négligence criminelle et de négligence pénale. Il y a une
différence de degré dans la mens rea; elle seule fait la différence entre
les infractions négligence pénale et négligence criminelle, cette dernière
étant plus lourdement punie. Par exemple, l'infraction de conduite
dangereuse est visée par la mens rea objective

Il est à noter que l’intention criminelle est un élément essentiel


dans toute infraction commise, pour le juge, point de condamnation
43
- A.M. BOISVERT, « La constitutionnalisation de la mens rea et l’émergence d’une nouvelle théorie de la
responsabilité pénale ». 1998.

14
sans le constater ou à tout le moins le présumer, il veille
précieusement à relever cette intention dans chaque action du
criminel. A cet égard, on peut poser une question très importante :
Quelle est l’intention inconsciente dans la psychologie du criminel ?
Pour répondre à cette question, nous invoquons César LOMBROSO,
l’un des fondateurs de l’école italienne de criminologie 44. Tout d’abord,
on peut définir la psychologie de l’auteur tel son état d’esprit au
moment de la réalisation de l’acte incriminé par la loi, alors la théorie
de LOMBROSO concernant l’intention inconsciente est basée sur la
prémisse qu’il existe des personnes ayant des caractéristiques
psychologiques, et que ces personnes sont poussées au crime par
l’influence des facteurs génétiques et se précipitent au crime en raison
de leur formation biologique, selon LOMBROSO, l’intention criminelle
est avec le coupable génétiquement et depuis sa naissance, ce qui
influence sa psychologie est devient criminel sans le décider.

Concrètement, l’intention criminelle réside dans la connaissance


et la volonté que l’auteur a de commettre un agissement qu’il
sait contraire à la loi pénale.

Paragraphe 2 : la distinction entre l’intention criminelle et la


préméditation :
Tout d’abord, comme la définit l’article 394 du Code pénal
marocain « La préméditation consiste dans le dessein, formé avant l'action,
d'attenter à la personne d'un individu déterminé, ou même de celui qui sera
trouvé ou rencontré, quand même ce dessein dépendrait de quelque
circonstance ou de quelque condition ».

D’un point de vue doctrinal, la préméditation, est la volonté qui


se manifeste de façon durable et organisée avant l’action, c'est-à-dire
qu’elle est formée un certain temps avant le fait d’attenter à la vie
d’autrui. En effet, Le législateur n’a pas précisé la durée de ce temps,
ce sont donc les juges qui apprécient si l’intervalle de temps entre les
circonstances et l’acte est suffisant pour que la préméditation soit
constituée.

Il est à noter que l’intention criminelle et la préméditation


peuvent faire l’objet d’une confusion dans les débats au cours d’un

44
- E. CLEMENT, F.GUILLAUME, G.TIBERGHIEN & B. VIVICORSI, «  Le cerveau ne pense pas tout seul», Le Monde
diplomatique, septembre 2014, p. 27.

15
procès pénal même s’il y a une différence fondamentale qui oppose la
notion d’intention criminelle et la question juridique de la
préméditation, l’intention comme on l’a déjà traité, est une
détermination précise et requise par la loi comme élément moral
constitutif de l’infraction, alors que la préméditation est une
circonstance aggravante qui fait du meurtre un assassinat, dans ce
cas, la loi prévoit que celui qui a prémédité son crime est considéré
plus coupable que le celui dont le comportement a été impulsif et
brutal sans être préparé d’avance d’une façon organisée et durable,
donc elle suppose nécessairement la volonté criminelle réfléchie et
mûre.

Cet élément purement psychologique, ne peut être établi que par


les circonstances du fait qui ont entouré la commission du meurtre.
Par exemple, le guet-apens ou le fait que l’arme du crime ait été
acquise quelque temps avant le passage à l’acte et de menaces de mort
proférées quelques heures avant le rendez-vous fixé avec la victime,
permettant d’établir la préméditation. L’infraction préméditée est en
fait le synonyme du dol aggravé.45

Il doit être démontré par le ministère public, et le juge du fond 46


apprécie la présence ou non de la préméditation. Il doit construire sa
conviction sur les éléments matériels de l’infraction. C’est dans ce sens
que se penche la Cour suprême dans son arrêt du 9 mars 1959 en
relevant que : « si la juridiction a été convaincue à partir des
investigations et plaidoiries que la preuve est suffisante pour établir la
préméditation, mais sans démontrer les circonstances de fait qui ont
entouré la commission du meurtre, qui vont permettre à la Cour suprême
d’exercer son contrôle, l’arrêt encourt donc la cassation pour défaut de
motifs ».47

De ce qui précède, on peut déduire que la préméditation est le


comportement qui fait la différence entre l’assassinat et le meurtre, ces
deux notions qui sont bien souvent confondues, donc pour qu’un
homicide soit qualifié de meurtre, il suppose l’existence d’une intention
criminelle avant la commission de l’acte criminel, et d’assassinat s’il
est de plus précédé d’une préméditation, donc elle est à distinguer de

45
- V. BOUCHARD, « Droit pénal » Editions Foucher, 2009, p.38.
46
- Crim. 29 octobre 1969 : Bull. Crim. N°271.
47
- Arr. première chambre N° 287.

16
l’intention coupable puisqu’elle vient de s’y ajouter, elle lui donne une
coloration particulière

En clair, personne ne peut donc accepter logiquement cette


confusion entretenue artificiellement entre la notion psychologique
d'intention criminelle et la question juridique de la préméditation.

De façon générale, si la préméditation est réellement la marque


d’une intention criminelle longuement mûrie et réfléchie, l’existence
d’une intention criminelle ne signifie pas l’existence d’une
préméditation, par contre, l’existence d’une préméditation est toujours
précédée d’une intention criminelle.

Section 2 : la théorie de l’intention criminelle dans la


doctrine :
Plusieurs manières de concevoir l’intention criminelle
s’affrontent, tant les rebondissements judiciaires que les controverses
doctrinales sur cette affaire démontrent à quel point il est difficile de
définir explicitement la notion d’intention coupable. La doctrine a
développé une théorie de l'intention, une politique criminelle de
l'intention. Il y a trois tendances fondamentales. Certains auteurs ont
voulu, dans les infractions, donner toute son importance aux éléments
extérieurs, aux éléments matériels ; c'est la doctrine classique
(paragraphe1). D'autres auteurs, donnant plus d'importance aux
éléments subjectifs, à ce qui est interne, aux valeurs psychologiques
veulent tout situer sur le plan de la responsabilité morale, c’est le
raisonnement de la doctrine néo-classique (paragraphe2). La troisième
tendance se présente sur le plan plus moderne de la défense sociale et
de la politique criminelle, c’est l’école positiviste (paragraphe3).

Paragraphe 1 : l’intention criminelle selon l’école classique:


En criminologie, l'école classique se réfère généralement aux
travaux du XVIII e   siècle au cours du siècle des Lumières, de
nombreux professionnels, chacun dans leur spécialité, se sont
intéressés au phénomène criminel. Leurs travaux forment le terreau à
partir duquel ceux que l’on considérera plus tard comme les
fondateurs de la criminologie ont posé les premiers jalons de la
discipline que nous connaissons aujourd’hui, ce sont CESARE

17
BECCARIA (1738-1794)48 et JEREMY BENTHAM (1748-1932), les
principaux représentants de l’Ecole classique, ont menés leurs
réflexions sur le crime et sa prévention, en se basant sur l'idée de
« l'homme est un animal calcul », dans les causes du comportement
criminel. Il faut savoir que « la représentation sociale de l'infracteur
change profondément à partir du 18e siècle avec le mouvement de
relecture anthropologique entamée par C.BECCARIA avec son livre
Délit et des peines (1764), qui rompt avec la lecture mythique du
crime »49 , avec l'idée de contrat social de J.J. Rousseau50 , il développe
une théorie originale de la peine qui a changé les données des sciences
autour du problème de l'infraction et de son auteur.

Selon la doctrine classique, l’intention résulte de la volonté de


l’auteur de commettre l’acte illégal publié par la loi, ce qui recoupe
d’une part la connaissance du caractère illégal de l’acte et d’autre part,
la volonté de perpétrer en dehors de cette illégalité. Cette théorie  se
fonde sur une présomption irréfragable de connaissance 51 de loi «
nemo censetur ignorare legem », c'est-à-dire « nul n’est censé ignorer la loi »,
sachant que la connaissance de la loi est présumée, la preuve de
l’intention est facile à rapporter. Il s’agit d’une conception abstraite de
l’intention retenue par le code pénal.

Les tenants de la doctrine classique ont négligé le criminel et ses


caractéristiques individuelles. Leur raisonnement était le suivant :
puisque le code pénal, lui-même, n'était pas favorable à
l'épanouissement d'une théorie de l'intention pourquoi ne pas se
limiter à l'acte commis ?
Selon CHARLES-ALFRED BERTAULD 52, un avocat, magistrat et
homme politique français, « l’intention doit être présumée chez l’auteur de
l’acte matériel », l’homme lui apparaît comme étant un être
normalement intelligent et libre, il a forcément conscience de ses actes
et il est libre de les commettre ou non. Cette tendance classique laisse
de coté toute appréciation humaine.

48
- Cesare Beccaria. 1738-1794, juriste & philosophe, il à été l'un des partisans de la peine proportionnée au
délit et fixée par la loi. Économiste, fondateur de droit pénal.
49
- A.HIRSCHELMANN-AMBROSI. « Cours magistral. Analyse psycho-criminologique du passage à l'acte  ». 2007.
2008.
50
- Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) un écrivain, philosophe et musicien genevois de langue française, J.J
Rousseau cherche par ce contrat social de définir à quelles conditions l'homme peut se soumettre à une
autorité légitime, car pour lui l'homme est libre naturellement...
51
- X. Labbée, «  Introduction générale au droit » : Pour une approche éthique, Presses universitaires de
Septentrion 2010, p. 223.
52
- C.A.BERTAULD, « Cours de droit pénal », 3éme édit., 1964

18
Paragraphe 2 : l’intention criminelle selon l’école néo-classique :
L’école néo-classique est aussi connue sous le nom du nouveau
réalisme droit, néoclassicisme, néo-positivisme, est l’idéologique
opposé du réalisme gauche. Elle considère le phénomène de la
criminalité du point de vue politique et affirme qu'il faut une vision
plus réaliste des causes de la criminalité et la déviance 53, et identifie
les meilleurs mécanismes de son contrôle.

Contrairement aux autres écoles de criminologie, il y a moins


l'accent sur le développement des théories de la causalité par rapport à
la criminalité et la déviance (la tendance est d'examiner
scientifiquement les statistiques officielles comme preuve). L'école
emploie un rationaliste, approche directe et scientifique à l'élaboration
des politiques de prévention et de lutte contre la criminalité. Certains
politiciens qui attribuent à la perspective peuvent aborder les aspects
de la politique de la criminalité en termes idéologiques en se référant à
la liberté, la justice et la responsabilité. Par exemple, ils peuvent être
affirmés que la liberté individuelle ne devrait être limitée par
l'obligation de ne pas utiliser la force contre les autres. Toutefois, cela
ne reflète pas la véritable qualité du travail théorique et académique et
la contribution réelle apportée à la nature du comportement criminel
par les criminologues de l'école.

Notons enfin que la doctrine néo-classique reconnaît la


responsabilité, non plus dans tous les cas où il y aurait quelque lueur
de conscience ou de volonté, mais seulement dans ceux où il existerait
une volonté libre, acte accompli avec le libre arbitre. Elle veut éviter
que la volonté libre, mise à la base de l'intention, ne soit trop volontiers
et trop facilement présumée. Ce courant donne plus d'importance aux
éléments subjectifs, à ce qui est interne et aux valeurs psychologiques.

Paragraphe 3 : l’intention criminelle selon l’école positiviste :


Cette école principalement représentée par CESARE
LOMBROSO et par ses deux disciples ENRICO FERRI et RAFFAELE
GAROFALO. LOMBROSO (1835- 1909), médecin légiste italien, inspiré

53
- « La déviance, c'est la transgression d'une norme sociale, les sociologues utilisent ce terme pour désigner les
états et les conduites qui violent les normes auxquelles les membres d'un groupe tiennent au point de punir
ceux qui les violent (...) les sociologues ont réalisés de fascinantes recherches sur plusieurs formes de déviance,
notamment sur le suicide, la consommation de la drogue, la sorcellerie et les maladies mentales  » M. CUSSON.
1998. La criminologie. HACHETTE. P8.

19
par la théorie évolutionniste de CHARLES DARWIN et par la
physiognomonie, est convaincu que l’homme criminel représente un
type particulier, moins avancé dans son évolution que ses
contemporains. Il a donc cherché à identifier les signes qui
permettraient de témoigner de cet état de fait. Ces signes peuvent être
d’ordres anatomiques mais aussi comportementaux.

Fort de ses recherches sur des milliers d’individus, il publie en


1876 son principal ouvrage « l’Uomo delinquente », dans lequel il expose
sa théorie du criminel-né, il y défend l’idée de caractère inné de la
criminalité, qui résulterait donc selon lui d’un processus d’atavisme,
c’est-à-dire de la résurgence de caractéristiques archaïques chez ces
individus. Appliquant la méthode scientifique à l’étude du criminel,
C.LOMBROSO est souvent considéré comme le fondateur de la
criminologie scientifique54.

Selon la doctrine positiviste, l’intention consistera, pour un


délinquant donné, dans son état dangereux même, cela ne heurte pas
le sens grammatical, étymologique du mot « intention » dans la mesure
où l’état dangereux tend vers le crime, vers une certaine forme de
criminalité, « in tendere » (tendre vers). Ainsi, ENRICO FERRI 55 a cru
que l’environnement social et les facteurs biologiques jouaient un rôle
prédominant et que l’accumulation de tous ces facteurs rendaient le
criminel irresponsable de ses actes car hors de sa volonté, et sur ce,
l’intention coupable est donc déterminée par un motif précis et que la
volonté de commettre un acte illégal ne repose pas sur une conception
abstraite de l’intention, mais sur une volonté déterminée et orientée,
qualifiée de mobile. Cette école s’est enrichi des apports de la
médecine, de la biologie et de l’anthropologie.

Dans le cadre de ce sujet, nous procéderons à l’étude des divers


aspects de l’intention criminelle. Il est nécessaire donc d’analyser le dol
général ainsi que le dol spécial.

54
- M.KALUSZYNSKI « Quand est née la criminologie ? Ou la criminologie avant les archives… » Dossier
thématique : histoire de la criminologie. Autour des archives d’anthropologie criminelle, 2005, P. 11.
55
- E.FERRI (1856-1929), était un criminologue et homme politique italien. Il est considéré comme l'un des
fondateurs de la criminologie moderne. Cofondateur de l’École italienne de criminologie
avec C.LOMBROSO et R.GAROFALO.

20
Chapitre II : Les divers aspects de l’intention
criminelle:
Dans ce chapitre, nous tenons d’aborder les divers aspects de
l’intention criminelle dans la faute intentionnelle, il importe donc
d’apporter quelques précisions à ce propos en analysant les notions
suivantes : Le dol général (section 1), et le dol spécial (sections 2).

Section 1 : une analyse du dol général :


La faute intentionnelle est une notion d’ordre moral, elle
déclenche la responsabilité pénale, selon l’article 133 du code pénal
marocain, l’auteur de l’infraction ne peut engager sa responsabilité
pénale que lorsqu’il l’a commis intentionnellement 56.

Il est important de mentionner que la notion du dol général n’est


pas définie par le législateur, c’est donc naturellement vers la doctrine
qu’il faut porter le regard et prêter toute l’attention nécessaire à ce
terme, alors il sera malaisé d’analyser le dol général sans apporter ce
que les théories réalistes (paragraphe1) et les théories classiques
(paragraphe2) ont menés sur cette notion.

Paragraphe 1 : Les théories réalistes sur le dol général:


Il est à noter que les écoles réalistes ont cru que l’intention
coupable est déterminée et orientée par un motif précis qualifié de
mobile, on doit donc prendre en considération soit les mobiles, soit
l’intention frauduleuse pour justifier l’élément moral dans les actes
illégaux commis.

Le dol général, également appelé mauvaise foi, est considérée


comme équivalente à l’intention générale, c’est l’intention minimum de
base requise en matière d’infraction intentionnelle pour qu’on puisse
dire qu’il y ait ce dol général.

Le mobile se définit comme l’intérêt ou le sentiment


conditionnant le passage à l’acte du délinquant, c’est une donnée
purement subjective, qui est la cause impulsive et déterminante de
l’acte criminel. Le mobile est donc variable, sa cause peut être
56
- La faute intentionnelle représente l’élément moral de plus de 90% des infractions contenues dans le code
pénal, puisqu’elle est nécessaire à la constitution de tous les crimes, la plupart des délits et de quelques
contraventions.

21
honorable ou perverse. Si l’on veut subordonner la répression à l’état
dangereux, il faut admettre que le droit pénal doit tenir compte de la
qualité du mobile pour exclure ou atténuer la responsabilité pénale si
les mobiles sont honorables.

Le dol général se confond ici avec la perversité du mobile, la


sanction applicable étant proportionnée au degré de cette perversité.

En droit pénal marocain, le mobile n’influence pas sur


l’existence de l’infraction qui demeure punissable, même si le mobile
de l’agent était honorable.

La règle de l’indifférence des mobiles n’est pas absolue : les


tribunaux leur accordent attention, ils servent souvent de base à
l’attribution du bénéfice des circonstances atténuantes. En droit, le
législateur lui apporte certains tempéraments.

Pourtant, le mobile peut être important car il peut permettre de


démontrer le caractère plus ou moins intentionnel de l’auteur. Si
l’intention détermine l’élément moral, et si c’est elle qui est
sanctionnée, les mobiles peuvent néanmoins être pris en compte.

En effet, même si le mobile n’apporte pas d’éléments nécessaires


au jugement de l’infraction, il peut exceptionnellement avoir pour effet
d'aggraver la peine, ou au contraire, seulement demeurer un élément
constitutif de l’infraction. On peut prendre l’exemple du mobile raciste,
ou du mobile terroriste, qui constituent des mobiles importants à
prendre en compte dans la détermination de la peine par le juge.

Reste cependant, le CPM ne tient pas compte en principe des


mobiles, qui sont les raisons personnelles ayant conduit le délinquant
à commettre l’infraction, tant en ce qui concerne l’existence de
l’infraction que sa répression. Peu importe que ce dernier soit
honorable ou honteux, les magistrats n’ont pas à chercher les raisons
qui ont conduit le délinquant à avoir le comportement incriminé.

De manière exceptionnelle, la loi prend en considération les


mobiles de l’auteur comme circonstance atténuante d’une infraction.
C’est l’exemple de l’article 418 du CP qui dispose que : « le meurtre, les
blessures et les coups sont excusables s’ils sont commis par l’un des
époux sur la personne de l’autre, ainsi que sur le complice, à l’instant
où il les surprend en flagrant délit d’adultère».

22
On présente ainsi l’intention frauduleuse, cette notion ne se
confond pas nécessairement avec le mobile, en clair, c’est l’intention de
tromper en ayant la volonté de frauder.

Paragraphe 2 : Les théories classiques sur le dol général:


Sur un plan purement intellectuel, cette théorie définit le dol
général comme un souhait de commettre un acte prohibé par la loi
pénale. Il comprend deux éléments qui sont d’une part, la
connaissance et la conscience du caractère interdit du comportement
et d’autre part la volonté de réaliser ce comportement 57. Selon la
célèbre formule de J.H.ROBERT : « dans l’esprit de l’agent doué de
discernement et de liberté, la représentation exacte du monde
environnant et de l’impact qu’y imprime son geste »58. Le dol général
est donc volonté et conscience, existe dans toutes les infractions
intentionnelles, c’est en quelque sorte l’élément intentionnel de base.

A- L’élément de connaissance et conscience :

Le dol général se caractérise par la connaissance de l’illégalité


des faits, ce qui n’inclut pas l’intention de nuire, c’est-à-dire « le désir
du résultat redouté ».

En effet, selon J.H.ROBERT « le dol est parfait dés lors que


l’auteur a conscience de réaliser la situation infractionnelle décrite par
l’incrimination »59.

En outre, la conscience ou la connaissance signifie que l’agent a


une connaissance du texte d’incrimination, il sait que son
comportement est interdit par la loi. Son importance en droit marocain
est purement théorique puisqu’aux termes de l’article 2 du CPM « nul
ne peut invoquer pour son excuse l’ignorance de la loi pénale ».

Ainsi, cette conscience consiste à avoir connaissance des


éléments matériels de l’infraction, tels qu’ils sont incriminés par la loi
pénale, est en revanche essentielle.

Cette deuxième composante du dol général est toujours


présumée, dans la mesure où « nul n’est censé ignorer la loi ».
57
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Dalloz, 22ém éd, 2011. p.86.
58
- J.H.ROBERT, « droit pénal général », Thémis droit, 6éme édition, 2005.
59
- J.H.ROBERT., op.cit., p.317.

23
B- L’élément de volonté :

La volonté désigne généralement la faculté d'exercer un libre


choix gouverné par la raison, et en particulier en philosophie morale la
faculté qu'a la raison de déterminer une action d'après des « normes »
ou des principes (moraux, notamment). En cela elle peut être
considérée comme une vertu. Elle se distingue du désir qui peut être
incontrôlé ou irrationnel, et de la spontanéité des instincts naturels
dont la réalisation ne fait appel à aucune délibération. La volonté est
vue par certains philosophes comme l'expression d'un libre arbitre
chez un sujet, par exemple entre ses désirs actuels et ses souhaits
futurs ; d'autres considèrent néanmoins qu'elle est elle-même
déterminée. Le mot désigne aussi la manifestation de sa capacité de
choisir par lui-même sans coercition particulière.

Le dol général se caractérise aussi par la volonté d’accomplir


l’élément matériel de l’infraction tel qu’il est décrit par le texte de
qualification60.

Il s’agit de démontrer que l’agent qui avait connaissance du


caractère illicite de son acte, a eu aussi la volonté de faire ce que la loi
interdit et donc a eu la volonté d’obtenir le résultat incriminé. C’est
cette volonté qui manifeste l’intention de nuire, c’est-à-dire « le désir
du résultat redouté ».

Cette consécration du caractère abstrait de l’intention, est


retenue par le CP, explique la négation du mobile comme explication
du phénomène criminel. Et chacun de reprendre la célèbre formule 
« le mobile ne sauve ni ne nuit ».

Véhicule de l'intention coupable, la volonté était la clé de voûte


de l'ancien droit pénal de la responsabilité. Grimaudet exprimait donc
l'opinion commune en écrivant que « l'homme, seul animal capable de
raison, est aussi le seul à distinguer le bien du mal. Toute action qui résulte ni
de la contrainte ni de l'ignorance procède donc la volonté  »61. La doctrine
avait en effet érigé le dol en élément constitutif du crime et avait pris
soin de déterminer les circonstances susceptibles d'atténuer la
responsabilité62. Appréciée de manière conjointe avec la matérialité des
faits, la question de leur moralité permettait alors au juge de
60
- Le passage à l’acte du sujet révèle une contradiction avec les règles maintenant la paix sociale et préservant
les valeurs morales.
61
- Cité par A.LAINGUI, « la responsabilité pénale dans l’ancien droit ». p.27.
62
- JOUSSE, « Traité de la justice criminelle », Paris, 1771, t. II, p. 605 s.

24
déterminer le degré de culpabilité et, par conséquent, le niveau de la
peine. Structurée autour de la recherche de l'intention, la procédure
criminelle et la doctrine consacraient les noces d'or du droit, de la
morale et de la religion.

Section 2 : une analyse du dol spécial :


En sus du dol général, le législateur exige parfois pour la
constitution de l’infraction et pour déclencher la responsabilité pénale
de l’agent, une intention de parvenir à un résultat et qui s’appelle le
dol spécial ou spécifique.

En effet, la doctrine présent plusieurs distinctions, d’abord entre


le dol simple et le dol aggravé (paragraphe1), ensuite le dol concernant
l’intensité de la volonté (paragraphe2) et le dol concernant le résultat
(paragraphe3).

Paragraphe 1 : Le dol simple et aggravé:


La volonté de produire le résultat interdit par la loi qui
caractérise le dol spécial ne se présente pas toujours d’une manière
uniforme. Elle peut comporter diverses modalités.

A- Le dol simple :

Le dol est simple lorsqu’il résulte d’une détermination spontanée


et quasi-immédiate.

En d’autres termes, l’intention criminelle apparait au moment


de l’acte. L’infraction se réalise sur le fait spontanément. Le passage à
l’acte et l’extériorisation de la volonté criminelle sont simultanés 63.
Dans ce cas, la peine encourue est celle normalement prévue dans le
texte d’incrimination, il n’entraine pas de conséquence particulière
tant au plan de la qualification, que de la répression et il conduira au
prononcé d’une peine ordinaire.

B- Le dol aggravé :

Il se peut que le dol soit aggravé, en ce sens que l’expression de


la volonté criminelle précède le passage à l’acte du délinquant.

63
- V. BOUCHARD, « Droit pénal » éditions Foucher, 2009, p.38.

25
L’intention criminelle est antérieure, de sorte que le sujet a le temps de
laisser mûrir sa réflexion, de s’organiser et de préparer l’infraction.

Dan la hiérarchie des diverses variétés du dol, il se situe au


niveau, à la fois le plus élevé de l’élément moral, et le plus dangereux
sur le plan social.

Le dol aggravé est en fait synonyme d’infraction préméditée 64,


qui réunit la froideur du calcul et la persévérance dans la volonté
mauvaise, grâce au laps de temps qui s'écoule entre la détermination
et l'action. Selon les cas, et selon les prévisions établies par la loi,
certains actes verront leur peine aggravée suivant les circonstances.
Cela peut donc conduire à une aggravation de l’homicide volontaire.

Par exemple, en présence du dol aggravé (préméditation), le


meurtre puni de la réclusion perpétuelle, est qualifié assassinat et fait
encourir à son auteur la peine de mort (Article 393 de CP).

De ce fait, on déduit que la distinction entre dol simple et dol


aggravé repose ainsi sur une différence de degré dans l’intention. Dans
le dol aggravé le délinquant est potentiellement plus dangereux que
dans le dol simple.

Paragraphe 2 : Le dol concernant l’intensité de la volonté:


Le dol concernant l’intensité de la volonté est un dol dont
l’élément de l’intention qui règne est celui de la volonté, c’est ce qui
caractérise le dol général65. C’est le fait de vouloir faire du mal à une
personne, cette personne est parfois déterminée et parfois
indéterminée. On distingue alors deux degrés de ce type du dol : le dol
déterminé et le dol indéterminé.

A- Le dol déterminé :

Le dol est déterminé lorsque le résultat effectivement produit par


l’acte correspond à ce que l’agent recherchait 66, ainsi les conséquences
préjudiciables de l’infraction appréciées, au moment de l’action, étaient
nettement prévues.

En d’autres termes, l’auteur veut effectuer de manière


rigoureuse une infraction donnée et atteindre les conséquences
64
- Ibid.,
65
- G.CLEMENT. J.P.VICENTINI, « fiches de droit pénal général », éd Ellipses, 2009. p.71.
66
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.89.

26
recherchées. En clair, la commission d’une infraction précise tend à un
résultat précis67.

C’est le cas du meurtre et du viol, l’auteur a précisément atteint


son but, l’infraction a été commise exactement telle qu’elle devait l’être,
et que le résultat obtenu est exactement ce qu’il recherchait.

B- Le dol indéterminé :

Le résultat d’une action délictueuse ou criminelle n’est pas


toujours bien connu à l’avance. Il peut y avoir une part
d’indétermination. Cette indétermination peut porter soit sur le
dommage, on ne sait pas quel dommage il va causer, ou elle peut
porter sur la victime elle-même . Donc, le dol indéterminé, ou encore
imprécis, est une variété de l’élément moral de l’infraction ; il consiste
en l’acceptation par l’auteur d’un acte prohibé de tous les dommages
que cet acte pourra causer.

Plus précisément, l’agent a voulu causer un préjudice à autrui,


mais sans poursuivre, au départ un objectif précis ; l’agent n’a pas une
claire vue du résultat qu’il entend produire car le dommage envisagé
est imprécis dans la gravité ou bien la victime des actes n’est pas
précisément déterminée68.

S’agissant de la gravité du résultat, le délinquant veut causer un


résultat mais, il ignore sa nature et son intensité. Il y a des cas où
l’infraction existe, même lorsque l’intention de l’agent n’est pas tout à
fait précise quant au mal qu’il désire causer.

En fait, l’auteur cherche l’effet délictueux, mais il lui est


impossible d’en déterminer avec exactitude toutes les conséquences ; Il
en est ainsi lorsqu’il tire dans la foule sans viser des personnes
précises. C’est le cas de quelqu’un qui frappe sa victime sans connaitre
à l’avance l’importance exacte des blessures qui résulteront de ses
coups.

Dans ce cas, le législateur considère que cette personne doit être


punie en fonction du résultat qui s’est effectivement produit et non en
fonction du résultat qu’elle avait l’intention de provoquer, elle est
censée l’avoir voulu et l’infraction reste intentionnelle 69. En effet, le
67
- V. BOUCHARD, « Droit pénal » éditions Foucher, 2009, p. 38.
68
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002,
69
- G.CLEMENT, J.P.VICENTINI, « fiches de droit pénal général », éd Ellipses, 2009. p..72.

27
droit pénal part du principe que l’agent doit assumer le risque crée. Le
sujet pouvait abstraitement prévoir les conséquences de son acte et il
laisse le hasard choisir le résultat se produire de manière effective
parmi toutes les conséquences prévisibles.

Paragraphe 3 : Le dol concernant le résultat:


Contrairement au dol concernant la volonté, ce dol consiste sur
le résultat que cherche l’auteur d’une infraction. On distingue de ce
type du dol deux degrés : Le dol dépassé et le dol éventuel.

A- Le dol dépassé :

Lorsque le résultat obtenu va au-delà de l’intention du


délinquant, il y a dol dépassé ou encore dol praeter intentionnel.

L’agent avait une intention criminelle bien déterminée, il


recherchait un résultat bien précis, mais il se trouve
qu’indépendamment de sa volonté, le résultat atteint a été plus grave
que celui voulu et a dépassé son souhait, c’est le cas d’un individu qui
allume un incendie avec l’intention de provoquer des dégâts matériels
alors qu’il croyait la maison est vide.

L’exemple classique à ce sujet est celui des coups donnés à une


femme en ignorant qu’elle était enceinte et qui provoquent de ce fait un
avortement, dans ce cas là il y a le dol dépassé, seul un lien de
causalité matérielle permet de relier ce résultat non voulu à l’acte
commis par l’agent, ce dernier tombera-t-il sous le coup de l’article
44970 du CPM réprimant l’avortement ? En principe, le lien de
causalité subjective faisant défaut, alors on doit admettre que l’agent
ne sera punissable au pénal que sur la base de l’article 400 du CPM 71.

70
- Quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violences ou par tout autre moyen, a
procuré ou tenté de procurer l'avortement d'une femme enceinte ou supposée enceinte, qu'elle y ait consenti
ou non, est puni de l'emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 200 à 500 dirhams. Si la mort en est
résultée, la peine est la réclusion de dix à vingt ans.

71
- Quiconque, volontairement, fait des blessures ou porte des coups à autrui ou commet toutes autres
violences ou voies de fait, soit qu'ils n'ont causé ni maladie, ni incapacité, soit qu'ils ont entraîné une maladie
ou une incapacité de travail personnel n'excédant pas vingt jours, est puni d'un emprisonnement d'un mois à
un an et d'une amende de 200 à 500 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement. Lorsqu'il y a eu
préméditation ou guet-apens ou emploi d'une arme, la peine est l'emprisonnement de six mois à deux ans et
l'amende de 200 à 1.000 dirhams.

28
B- Le dol éventuel :

Ce dol revient au fait que l’agent, sans rechercher le résultat


dommageable qui s’est produit, avait cependant envisagé qu’il pouvait
intervenir. L’auteur de ce comportement savait qu’il prenait un risque,
en espérant que ce risque n’aboutirait pas à un dommage grave.
Prenons comme exemple le cas de l’automobiliste qui dépasse un autre
sans visibilité et provoque la mort des occupants d’une voiture
survenant en sens inverse.

Autrement dit, c’est la faute de celui qui prend délibérément le


risque de causer un dommage à autrui, sans pour autant avoir voulu
que le résultat dommageable se produise. On peut dire que c’est une
sorte de faute intermédiaire entre la faute intentionnelle et la faute non
intentionnelle.

Contrairement, à l’auteur du dol dépassé ou indéterminé, la


sanction est différente puisque l’auteur n’a pas l’intention de réaliser le
dommage.

La justice sanctionne le dol éventuel nettement plus sévèrement


que la négligence, puisqu'elle y associe le fait que la personne avait
conscience du risque encouru même si le contrevenant ne souhaitait
pas l'occurrence de l'accident.

29
Partie 2: la faute non
intentionnelle : Un facteur de
dépénalisation modérée:

30
Par rapport à l’infraction intentionnelle dont l’élément moral est
l’infraction est l’intention ou le dol criminel, l’élément moral de
l’infraction non intentionnelle est une faute pénale différente détachée
de l’intention, c'est-à-dire de la recherche du résultat incriminé par le
texte. Pour tracer les contours de la notion de la faute non
intentionnelle, il est utile de traiter le concept et la structure de cette
notion (Chapitre 1), ensuite nous procédons à l’étude de la faute quasi-
délictuelle et la faute contraventionnelle (Chapitre 2).

31
Chapitre I : Le concept et la structure de la faute
non intentionnelle :
Dans ce chapitre, nous procéderons à une étude approfondie de
la notion de la faute non intentionnelle (section 1), pour qu’on traite
ensuite sa structure (section 2).

Section 1 : la notion de la faute non intentionnelle :


On traitera dans un premier paragraphe une définition large de
la notion de la faute non intentionnelle, alors que dans un deuxième
paragraphe on traitera son évolution, pour qu’on précise ensuite son
contenu dans un troisième paragraphe.

Paragraphe 1 : Définition de la faute non intentionnelle :


Tout d’abord, la notion de la faute peut être vue comme le fait de
commettre ce que l’on n’avait pas le droit de faire, ou de ne pas faire ce
que l’on aurait dû faire. Ainsi, une omission ou une négligence peuvent

32
constituer une faute72. Cette notion peut être définie de plusieurs
façons. En droit pénal, on peut distinguer la faute intentionnelle et la
faute non intentionnelle à l’instar de plusieurs manuels. 73

Il existe une définition commune de la faute à laquelle renvoient


l’ensemble des textes d’incrimination, tandis que les autres éléments
de chaque délit non intentionnel figurent dans chaque texte. La faute
serait le dénominateur commun des délits non intentionnels. Il ya
donc une conception unitaire de la faute et diversifiée des autres
éléments des délits non intentionnels.

La faute non intentionnelle est définie par le code pénal


marocain avec le maximum de précision, dans les aspects divers
qu’elle est susceptible de revêtir, dans le cadre de l’homicide
involontaire. Cette conduite blâmable peut prendre les formes prévues
par le législateur dans les articles 432 74, 43375, 43476 et 43577 du CPM.
L’article 432 du CPM incrimine le fait de causer la mort d’une
personne par « maladresse, imprudence, inattention, négligence ou
inobservation des règlements ». De même, la synthèse des différentes
incriminations prévues aux articles 432 à 435 montre qu’il n’y pas, en
droit marocain, une répression générale de l’imprudence. La faute non
intentionnelle n’est retenue que lorsqu’une imprudence a été commise
dans deux cas, le premier est celui dans lequel l’imprudence a eu des
résultats graves (homicide, blessures, incendies), le second cas est
celui où l’imprudence a été commise par des personnes tenues à une
vigilance particulière.

D’une façon générale, la faute non intentionnelle est une


conduite blâmable se traduisant par une indifférence de l’agent aux

72
- Vasnier, Félix, [Jus romanum : De operis novi nuntiatione. - Droit français : Des délits et des quasi-délits] :
thèse pour la licence... Faculté de droit de Paris / par Félix Vasnier,..., impr. de Vinchon (Paris), 1854, 39 p. ; in-4
73
- M.BENILLOUCHE, « La faute et les délits non intentionnels », .p.2.
74
- Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements, commet
involontairement un homicide ou en est involontairement la cause est punie de l'emprisonnement de trois
mois à cinq ans et d'une amende de 250 à 1.000 dirhams.
75
- Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements, cause
involontairement des blessures, coups ou maladies entraînant une incapacité de travail personnel de plus de six
jours est puni de l'emprisonnement d'un mois à deux ans et d'une amende de 200 à 500 dirhams ou de l'une de
ces deux peines seulement.
76
- Les peines prévues aux deux articles précédents sont portées au double lorsque l'auteur du délit a agi en
état d'ivresse, ou a tenté, soit en prenant la fuite, soit en modifiant l'état des lieux, soit par tout autre moyen,
d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il pouvait encourir.
77
- Quiconque dans les cas prévus aux articles 607 et 608, 5°, provoque involontairement un incendie qui
entraîne la mort d'une ou de plusieurs personnes ou leur cause des blessures, est coupable d'homicide ou de
blessures involontaires et puni comme tel en application des trois articles précédents.

33
valeurs du groupe social dans lequel il vit puisqu’il crée des dangers
pour les autres citoyens qui gravitent autour de lui sans le souhaiter,
l’agent adopte un comportement qui ne respecte pas les valeurs
sociales protégées, sans se soucier, ni même prévoir qu’un résultat
peut se produire du fait de ses actes 78. Autrement dit, l’agent a
consciemment commis un comportement anormal par rapport à celui
qu’il devrait commettre dans l’activité à laquelle il se livre, mais il ne
cherche en se faisant aucun résultat dommageable. Il veut son acte
mais il n’a pas voulu les conséquences dommageables qui vont en
résulter79.

De même, la notion de faute non intentionnelle appelle quelques


précisions. Les infractions non intentionnelles sont parfois désignées
sous la forme « d’infractions involontaires », il faut se méfier de cet
écart de langage, car avec l’infraction non intentionnelle, la volonté ne
fait pas défaut, ce qui manque c’est la recherche consciente de tel ou
tel résultat prohibé par la loi pénale. Dans le cas de la faute
intentionnelle, la volonté porte sur la commission de l’acte et la
réalisation des conséquences de cet acte, par contre dans le cas de la
faute non intentionnelle, la volonté n’a pas la même consistance et se
limite à la survenance d’un acte aboutissant à un résultat non voulu.

Paragraphe 2 : L’évolution de la faute non intentionnelle :


La faute non intentionnelle est le domaine du droit pénal qui a
connu le plus d’évolutions ces dernières années, Le nouveau CPF a
défini pour la première fois la faute non intentionnelle. Le principe en
la matière est que les délits sont intentionnels (article 121-3 alinéa 1 er
du CPF). Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a également délit en cas
de faute non intentionnelle. Le NCP a donc également supprimé la
catégorie des délits matériels caractérisés sans que n’existe un
quelconque élément moral. Or, si l’ensemble des infractions prévues
par le CPF ont été réécrites pour tenir compte de ces modifications.
S’agissant des délits incriminés en dehors du CPF, il a été nécessaire
d’adopter une disposition susceptible de s’appliquer à l’ensemble des
anciens délits matériels. Ainsi, l'article 339 de la loi n° 92-1336 du 16
décembre 1992 relative à l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal et
à la modification de certaines dispositions de droit pénal et de
procédure pénale dispose que « tous les délits non intentionnels
78
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.90.
79
- M.RASSAT, « Droit pénal général », Ellipses, 2éme éd, 2006, p.340.

34
réprimés par des textes antérieurs à l'entrée en vigueur de la présente
loi demeurent constitués en cas d'imprudence, de négligence ou de mise
en danger délibérée de la personne d'autrui, même lorsque la loi ne le
prévoit pas expressément ». La faute simple était alors définie comme
l’imprudence, la négligence ou le manquement à une obligation de
prudence ou de sécurité imposée par la loi ou les règlements. Or, le
reproche fait au droit positif résidait dans son trop grande efficacité 80.

En effet, comme le rappelle l’avocat général à la Chambre


criminelle de la Cour de cassation COMMARET, de simples «
poussières de faute » permettaient de retenir la responsabilité pénale
des personnes physiques81.

La loi n° 96-393 du 13 mai 1996 relative à la responsabilité


pénale pour des faits d’imprudence et de négligence était censée
remédier à cette difficulté. La réforme a été adoptée suite au rapport
du Sénat sur la responsabilité des élus locaux 82 et devait substituer à
l’appréciation in abstracto de la faute, une appréciation in concreto
«cassant» ainsi la jurisprudence de la Cour de cassation a eu une
interprétation neutralisante du texte ne modifiant pas son critère
d’appréciation de la faute83.

L’absence d’efficacité de la loi du 13 mai 1996 a conduit à


l’adoption de la loi n° 2000-647 du10 juillet 2000 tendant à préciser la
définition des délits non intentionnels. La loi du 10juillet 2000 rappelle
qu’il appartient au Ministère public de prouver l’absence de diligences
normales. Depuis cette loi, la faute a fait l’objet d’une appréciation in
concreto, donc subjective84.

L'étude comparée des droits français et marocain en matière


d'infractions non intentionnelles s'impose pour plusieurs raisons. Au-
delà du lien historique qui unit les deux pays, cette étude est dictée
également par l'évolution importante de l'imprudence en droit français
depuis 1994. La volonté de dépénaliser les fautes légères côtoie celle de
surpénaliser les négligences les plus graves, notamment en matière de
circulation routière et d'environnement. En revanche, si la faute non
80
- M.BENILLOUCHE, «  La faute et les délits non intentionnels », p .2.
81
- D. COMMARET, « La loi Fauchon, cinq ans après, Droit pénal » n° 4, avril 2006, étude 7.

82
- P. FAUCHON, « Rapport au nom de la commission des lois », Sénat, 1995-1996, n° 32.
83
- Crim., 2 avril 1997, Bull. n° 132.
84
- M.BENILLOUCHE, «  la faute et les délits non intentionnels ».

35
intentionnelle ne cesse de monopoliser l'attention du législateur
français, la situation est totalement différente en droit marocain,
appelant une interrogation sur sa remise en cause et son éventuelle
évolution85.

Le Code pénal marocain est une transcription quasi identique


du Code pénal de 1810, même s'il demeure avancé à certains égards,
sur l'élément moral et sur la responsabilité pénale des personnes
morales. Cependant, il est aujourd'hui dépassé, le faisant passer d'une
relation de proximité relative avec le droit français à une rupture
inévitable. Appréhender les infractions non intentionnelles en droit
marocain en disséquant les textes et les décisions de justice constitue
une démarche fondamentale. La finalité de cette étude est de
déterminer si la réforme du droit marocain est nécessaire et si
« l'acculturation » juridique devrait se perpétuer dans le domaine de
l'imprudence. Le modèle français se doit alors d'être analysé, en
précisant ses divers bouleversements, afin d'en constater les forces et
les faiblesses. Partant du postulat qu'une évolution du droit marocain
est essentielle, l'inspiration du droit français s'avère une hypothèse
séduisante. D'ailleurs, les réformes que l'imprudence routière a
connues dans le nouveau Code de la route marocain témoignent d'une
influence remarquable de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte
contre la violence routière. Toutefois, la recherche d'une efficacité et
d'une effectivité du droit marocain fait douter de l'intérêt d'une
transposition intégrale de la réforme française en matière d'infractions
non intentionnelles86.

En effet, l’attachement des sociétés démocratiques aux valeurs


des droits de l’homme a conduit depuis une cinquante d’années à
mettre l’accent sur la vie et l’intégrité de la personne. Ce souci se
traduit dans la politique criminelle d’un pays par la création
d’incriminations de nouveaux délits non intentionnels et par
l’accroissement de la sévérité des peines attachées aux délits non
intentionnels déjà présents dans la législation pénale. C’est le cas en
droit pénal de la circulation routière où l’augmentation inquiétante du
nombre des accidents de la circulation à l’origine de graves lésions
85
- A.SLIMANI, « Les infractions non intentionnelles : étude comparée des droits français et marocain », Thés
de Doctorat en Droit, 2010 0 Poitiers, dans le cadre de Ecole doctorale Droit et Science Politique Pierre Couvrat
(Poitiers).
86
- A.SLIMANI, « Les infractions non intentionnelles : étude comparée des droits français et marocain », Thés
de Doctorat en Droit, 2010 0 Poitiers, dans le cadre de Ecole doctorale Droit et Science Politique Pierre Couvrat
(Poitiers).

36
corporelles constitue l’une des préoccupations majeures des pouvoirs
publics87.

Paragraphe 3 : Le contenu de la faute non intentionnelle :


Les formes de fautes non intentionnelles prévues par le code
pénal (La maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence ou
l’inobservation des règlements), présentent trois éléments communs
notamment, l’absence d’intention de violer la loi, la survenance d’un
dommage et l’inobservation d’une règle de prudence sociale.

L’absence d’intention de violer la loi pénale caractérise la faute


non intentionnelle sous toutes ses formes. En effet, ni le dol général ni
le dol spécial n’existe au moment où l’intéressé accomplit les faits
généralement du délit. Il ne désire ni violer le texte, ni produire le
résultat. Il peut cependant avoir volontairement accomplit l’acte. Ceci
s’explique par la différence de signification entre volonté et intention,
celle-ci désignant le souhait d’obtenir le résultat et celle-là visant la
résolution du comportement88. Il convient donc de prendre garde aux
expressions telles que « homicide involontaire » ou « atteinte volontaires
à l’intégrité » qui désignent des délits non intentionnels mais qui
procèdent parfois d’actes volontaires.

La survenance d’un dommage est un élément indispensable à la


caractérisation de la faute non intentionnelle, si par exemple un
accident de la circulation se produit causant des blessures au
passager d’un véhicule, l’enquête doit établir l’origine de l’accident et
montrer le lien de causalité entre la faute et le dommage, l’étendue du
dommage provoqué par la faute sert de plus à qualifier le délit et à
fixer la peine. En effet, c’est justement en raison de la survenance de
ce résultat lésionnaire que le juge s’interroge sur l’existence en amont
d’une faute préalable d’imprudence, de négligence ou de manquement
à une obligation qui en serait la cause89.

Le dernier élément commun aux formes de la faute simple est


l’inobservation des règles de prudence sociale. La prise en
considération de cet élément change et impose des éléments
spécifiques selon qu’il s’agit d’imprudence, de négligence ou d’un
manquement à une obligation.
87
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.90.
88
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p. 91.
89
- Ibid.,

37
Lorsque la faute simple consiste en une maladresse,
imprudence, inattention ou négligence90, l’agent n’a pas méconnu un
texte législatif ou réglementaire qui imposait une conduite donné, mais
ne s’est pas comporté comme cela était attendu de lui en égard à son
secteur d’activité. La preuve de son indiscipline doit être rapportée par
comparaison avec l’attitude « normale » d’un individu prudent et
diligent91.

Si la faute réside dans un manquement à une obligation de


prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement (cette notion
englobe aussi les règlements d’origine privée, comme les règlements
intérieurs des entreprises), sa preuve est établie dés lors que le juge
constate la violation de ladite obligation 92. A ce titre, de nombreux
textes contiennent des obligations de ce type, qui imposent un modèle
de conduite. Il en est ainsi, des dispositions contenues dans le droit du
travail ainsi que dans le droit pénal de la circulation routière.

Section 2 : la structure de la faute non intentionnelle  :


La faute non intentionnelle est une faute commise par le
délinquant qui ne cherche pas un résultat dommageable, elle se
présente sous deux formes. Il est donc utile donc de traiter les fautes
simples dans un premier paragraphe, les fautes qualifiées dans un
deuxième paragraphe, et puis, de préciser les principes qui encadrent
son appréciation par le juge pénal dans un troisième paragraphe.

Paragraphe 1 : Les fautes simples :


En clair, la faute est l’élément indispensable à l’imputabilité.
Cependant la notion de faute pénale est une notion très complexe.
Devant cette difficulté d’appréciation de la faute, c’est l’article 121-3 du
Code pénal Français qui énonce les diverses hypothèses et fonde une
graduation des fautes pénales en s’appuyant sur différents degrés
d’attitude psychologique de l’agent, cet article dispose dans son alinéa
3 que : « Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute
d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de
prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement… ». Cet article
a subi deux réformes importantes depuis la rédaction du Code pénal
90
- Cette formule est synthétisée par M.MERLE et Vitu en « Faute d’imprévoyance ». Pour plus de détails sur
cette notion, v. M.MERLE et Vitu, Traité de droit criminel, Cujus, 7éme édition, Paris, 1997.
91
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p. 91.
92
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p. 92.

38
de 1994, la première par la loi du 13 mai 1996, relative à la loi
d’imprudence ou de négligence, la seconde par la loi Fauchon 93 du
10juillet 2000, qui tend à préciser la définition des délits non
intentionnels en modifiant le lien de causalité et la portée de cette loi a
été étendue aux contraventions non intentionnelles avec un décret
n°2001-883 du 20 septembre modifiant le code pénal (deuxième
partie : Décrets en Conseil d’état) , cette loi a eu un double apport, elle
a diversifié les fautes pénales d’imprudences, et par ailleurs elle a très
largement consacré la dualité des fautes pénales et civiles
d’imprudence, elle a donc redonner à la faute pénale l’identité qu’elle
avait perdue en matière d’imprudence face à la faute civile, le
législateur diversifie et précise les fautes pénales en établissant une
hiérarchie.

D’une part, le code pénal français dans son article 121-3 utilise
les termes « imprudence » et « négligence » sans les définir, c’est donc
la jurisprudence qui a dû définir le faute d’imprudence ou de
négligence que le ministère public devra trouver pour établir l’élément
intentionnel de l’infraction. D’autre part, le législateur marocain, lui-
même, n’a pas définit la faute non intentionnelle mais il a délimité ses
aspects dans l’article 43294 du CPM.

A cet égard, la jurisprudence désigne indifféremment cette faute


par les termes : imprudence, négligence, maladresse et inattention. On
les appelle fautes simples ou ordinaires qui entraînent la
responsabilité de son auteur, mais seulement s’ils ont causé
directement le dommage à autrui. Alors comment peut-on définir ces
formes de faute simple non intentionnelle ?

A- l’imprudence :

On peut définir l’imprudence comme un relâchement de la


vigilance par lequel l’auteur des faits réalise l’élément matériel de
l’infraction sans l’avoir prévu. Cette infraction consiste dans un défaut
de prudence, dans une imprévoyance ou un audace non contrôlé, ainsi
on peut la définir par opposition avec l’intention, cette dernière
93
- La loi Fauchon du 10 juillet 2000 impose notamment au juge : d'établir une distinction entre personne
physique et personne morale auteur d'un délit non intentionnel ; de qualifier le lien de causalité : est-il direct
ou indirect entre la faute et le dommage subi ; de vérifier s'il existe une faute caractérisée commise.
94
- L’article 432 du Code pénal marocain dispose que : « Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention,
négligence ou inobservation des règlements, commet involontairement un homicide ou en est
involontairement la cause est puni de l’emprisonnement de trois mois à cinq ans et d’une amende de 250 à
1000 dirhams ».

39
suppose une tension de volonté alors que l’imprudence est une volonté
qui n’est pas tendue.

L’imprudence, c’est la non prévision du résultat, autrement dit,


cet état psychologique particulier, d’absence de vigilance, va expliquer
le comportement de l’agent, qui ne va pas se comporter comme l’aurait
fait l’homme avisé : médecin idéal, père idéal, conducteur idéal… Donc
on met le point sur ce que l'agent pouvait ou devait prévoir et faire,
pour scruter sa conscience et rechercher ce qu'il savait et voulait
réellement ou, à tout le moins, ce dont il avait effectivement
conscience95.

Mais l’imprudence n’est pas en elle-même fautive : alors à partir


de quand ce relâchement de vigilance constitue-il une faute
d’imprudence ? Pour répondre à cette question on peut dire que
l’imprudence apparait lorsque l’acte imprudent va provoquer un
résultat illicite, c’est-à-dire prohibé par la loi, ce caractère fautif
dépend entièrement du résultat de l’imprudence. Prenons comme
exemple un pot de fleurs en équilibre instable sur bord d’une fenêtre,
si ce pot ne tombe jamais, il n’y a pas de faute, mais s’il tombe et tue
quelqu’un, dans ce cas on a une faute d’imprudence parce que le
comportement imprudent a causé un résultat illicite (mort d’autrui).

De ce fait, la Cour de cassation jugeait que, pour qu’il y ait


homicide par imprudence, il fallait un lien de causalité entre faute et
dommage (mort), causalité qui n’avait besoin ni d’être directe, ni d’être
immédiate.

Selon l’article 121-3 dans l’alinéa 4, le législateur définit ce qu’il


faut entendre par la causalité indirecte, a contrario on peut déduire
qu’est ce que c’est une causalité directe. La causalité indirecte est une
causalité dont le pouvoir causal est faible ; La causalité directe est une
causalité dont le pouvoir causal est fort. En clair, lorsque la causalité
est indirecte (faible) et pour que l’agent soit auteur d’une faute
d’imprudence il va falloir que la faute soit grave, en revanche, lorsque
la causalité est directe (forte) et pour que l’agent soit auteur d’une
faute d’imprudence, il faudra n’importe quelle faute même qu’elle soit
très légère.

95
- A.SERIAUX, « La faute de transporteur » Economica, 2éme éd., 1998. Dans la foulée de la thèse de
N.DEJEAN DE LA BATIE (appréciation in abstracto et appréciation in concreto en droit civil français, Bill.dr.privé,
t.57, LGDJ, 1965, préf. H.MAZEAUD).

40
De ce qui précède, on résulte que la force de causalité va
compenser la faiblesse de la faute, et la faiblesse de causalité va être
compensée par la force de la faute. Donc l’imprudence va être
dépénalisée, chaque fois que la faute est simple, dont le lien de
causalité a été indirect.

Selon le code pénal marocain, le législateur marocain était clair


dans l’article 133 lorsqu’il dispose que : « … les délits commis par
imprudence sont exceptionnellement punissables que dans les cas
prévus par la loi ». D’après les dispositions de cet article, l’homicide
involontaire ne doit pas être pénalisé par l’absence de l’élément moral
ou bien de la volonté ferme de transgresser la loi (dol général), et
d’atteindre un résultat criminel (dol spécial). Pour dépasser cette
contradiction, on doit se mettre d’accord que dans les incriminations
involontaires nous ne cherchons pas le dol spécial ou général, il suffit
l’existence de l’erreur pour que l’infraction sera sanctionné. Sauf que
dans certains cas, cette erreur peut être accompagnée du dol général
(Transgression de la loi). L’exemple pour illustrer ce cas est celui d’un
automobiliste qui double un endroit interdit alors il a commis l’erreur,
sans avoir la volonté de blesser les passagers ou les tuer, mais il a
volontairement doublé dans un endroit interdit. Ces incriminations et
notamment l’homicide involontaire sont commises par défaut de
prévoyance ou de précaution. L’élément moral de l’intention ici ne
consiste pas dans l’intention coupable (faute intentionnelle) mais
plutôt en une faute non intentionnelle car il ne s’agit pas de
sanctionner un état d’esprit mais un comportement ou une attitude
inconvenable.

B- la négligence :

La négligence consiste dans l’insouciance, le manque de soin


d’application, d’exactitude ou plus généralement dans les imprudences
caractérisées par l’inaction, l’abstention ou l’omission, par exemple le
fait pour un infirmier de négliger de prévenir le médecin de la gravité
de l’état de santé d’un malade, négligence ayant entrainé la mort du
patient ; Ou bien le fait pour une mère de laisser entre les mains d’un
tout jeune enfant un objet perçant ou tranchant à l’aide duquel, en
jouant avec ses camarades, il blesse l’un d’eux.

De manière générale, la jurisprudence considère qu’il y a


négligence lorsqu’un individu n’a pas prévu les conséquences de ses

41
actes ou n’a pas pris les dispositions nécessaires pour les éviter.
L’article 121-3 sanctionne la négligence « sauf si l’auteur des faits
accomplit les diligences normales compte tenue de ses fonctions, de ses
compétences, ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ». Ce
texte a été adopté à l’initiative des députés-maires et des sénateurs-
maires en 1996 pour se protéger eux-mêmes contre la très grande
facilité avec laquelle les juges correctionnels risquaient de rendre les
élus locaux, qu’ils étaient souvent eux-mêmes, pénalement
responsable des homicides ou des blessures involontaires dus aux
défauts de sécurité d’ouvrages ou d’activités publiques juridiquement
placés sous leur contrôle96.

C- la maladresse :

La faute simple de maladresse consiste dans un défaut


d’adresse, dans un manque d’habileté ou de dextérité corporelle. C’est
le cas d’un ouvrier qui laisse tomber une pierre et tue un passant, ou
celui d’un chasseur qui atteint mortellement une personne humaine
en visant un gibier.

On peut dire que cette faute est due à l’ignorance d’un


professionnel de son art.

D- l’inattention:

Cette faute vise plus spécialement le manque d’attention ou une


inexcusable légèreté.

L’étourderie marquant un manque de concentration, elle est


considérée comme l’extrême inattention. Prenons comme exemple le
cas pour un médecin de prescrire par inattention à un malade un
produit toxique qui provoque sa mort, ou bien le fait pour un infirmier,
d’administrer un autre médicament que celui prescrit par le médecin,
erreur ayant entrainé la mort de la patiente.

96
- S. JACOPIN,  « Mise au point sur la responsabilité pénale des élus et des agents publics : limitation ou
élargissement des responsabilités ? », D. 2002. 507 ; Y. MONNET, « Regards sur la nature de la faute civile et
celle de la faute pénale dans les infractions non intentionnelles », Mélanges J. BUFFET ; LPA 2004. 335 s. « Des
décisions alors récentes des juges du fond les avaient alertés » : Grenoble 5 août 1992, JCP 1992. II. 21959,
note P. SARRAZ-BOURNET (responsabilité pénale d'un maire d'une commune sur laquelle se trouvait une
station de sports d'hiver, pour n'avoir pas pris les mesures visant à sécuriser les pistes de ski pour le cas
d'avalanche).

42
De ce fait, même si le dommage en lui-même n’a pas été
intentionnellement prévu, une faute a été constatée, elle est donc
punissable. Il s’agit donc d’un manquement à une obligation, ou d’une
simple conduite peu prudente.

Paragraphe 2 : Les fautes qualifiées :


A coté de la faute pénale simple, il existe une faute plus grave
dénommée faute qualifiée.

La notion de causalité a conduit le juge pénal à explorer une


distinction entre auteur direct et indirect d’un homicide ou de coups et
blessures, ce à quoi la chambre criminelle de la Cour de cassation
s’était toujours opposée sous l’empire des textes antérieurs 97. Cette
discrétion contraste avec le soin que le législateur a mis à définir la
faute aggravée susceptible d’engager la responsabilité pénale de
l’auteur indirect du dommage. En fait, ce n’est pas une mais deux
fautes aggravées qui viennent se superposer à un aspect de la faute
d’imprudence de base telle que définie l’alinéa 3 de l’article 121-3 du
code pénal français.

Pour le « manquement à une obligation de prudence ou de


sécurité prévue par la loi ou le règlement » de ce genre d’obligation » ;
pour la « faute d’imprudence ou de négligence », la faute non
intentionnelle aggravée ou qualifiée, se caractérise par le fait d’exposer
autrui « à un risque d’une particulière gravité que l’agent ne pouvait
ignorer ». Se trouve ainsi scindé par l’alinéa 4 ce que l’alinéa 3 tache
tant bien que mal de préserver uni.

La faute qualifiée est soit une violation manifestement délibérée


d’une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le
règlement, soit une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque
grave que l’auteur ne pouvait ignorer. Alors comment peut-on définir
ces deux formes que peut revêtir la faute qualifiée ?

A- la faute de mise en danger délibérée :

97
- V. entre autres : Crim. 30 janv. 1913, Bull. crim. N° 53 ; Crim. 27 mai 1948, Bull. crim. N° 145 ; Crim. 17 déc.
1953, Bull. crim. N° 347 ; Crim. 3 nov. 1955, Bull. crim. N° 447 ; Crim. 9 mai 1956, Bull. crim. N° 355 ; Crim. 14
févr. 1996, Bull. crim. N° 78. Sur ce sujet, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 10 juillet. 2000, cf. en particulier
: PH. CONTE, « L'obscur article 121-3 du code pénal », D. 2014. 1137.

43
Tout d’abord, la faute de mise en danger délibérée concerne
celui qui, sachant pertinemment qu'il désobéit à la loi ou au règlement,
prend ainsi le risque - qui, de fait, s'est bel et bien réalisé - de causer
un dommage à autrui. Une violation par simple maladresse ou
inattention ne suffit donc pas ; il faut une transgression consciente.
Un tel comportement s'apprécie toujours in concreto : il doit être établi
que l'auteur savait effectivement qu'il enfreignait des règles précises
que lui imposaient la loi ou le règlement. Même si elle est encore peu
abondante, la jurisprudence s'est d'ores et déjà fixée en ce sens. Un
arrêt a ainsi relaxé un prévenu parce qu'il « ignorait effectivement » les
mesures qui auraient dû être prises98 ; à l'inverse, diverses personnes
ont été condamnées car les faits démontraient qu'elles avaient
volontairement décidé d'enfreindre telle ou telle règle de sécurité 99, ou
encore parce que leur attention avait été attirée à de multiples reprises
sur l'absence de telles mesures 100. Çà et là, c'est toujours la conscience
effective de la transgression qui est recherchée. Cette conscience doit
être « manifeste », est-il précisé. Il faut, en d'autres termes qu'elle
résulte à l'évidence des faits de l'espèce 101. État psychologique, la
conscience de l'agent doit être suffisamment claire : le doute sur ce
point profite à l'accusé. Il va cependant de soi que, plus la norme
transgressée est fondamentale pour la sécurité des personnes, plus le
caractère délibéré de cette transgression sera facilement admis 102.

Ainsi, le terme « manifestement » qu’emploie le législateur


montre une insistance, c’est à dire qu’il ne doit y avoir aucun doute
sur le caractère intentionnel de la violation. Cependant, cette faute de
mise en danger d’autrui ne peut être qualifiée au sens stricto sensu de
faute intentionnelle puisque l’auteur ne souhaite pas le dommage
causé.

Toute fois, la qualification de la faute délibérée conduit à une


répression plus sévère, en effet, celle-ci peut être source d’engagement

98
- Douai, 26 mars 2002, JCP 2003. IV. 1041.
99
- Crim. 12 sept. 2000, Bull. crim. N° 268 ; D. 2000. 282, et les obs. ; RDI 2001. 67, obs. M. SEGONDS ; Dr. soc.
2000. 1075, note P. MORVAN ; RSC 2001. 154, obs. B. BOULOC ; ibid. 156, obs. Y. MAYAUD ; ibid. 399, obs. A.
CERF-HOLLENDER ; ibid. 824, obs. G. GIUDICELLI-DELAGE ; RTD com. 2001. 259, obs. B. BOULOC ; Dr. pénal
2001, comm. 3, obs. M. VERON ; Crim. 24 mai 2016, n° 14-88.401 (inédit). Dans le même sens : Rennes, 6 mars
2003, JurisData n° 2003-216059.
100
- Crim. 12 juin 2007, Bull. crim. N° 156.
101
- E. DREYER, «  Droit pénal général », Litec, 4 éd., 2016, n° 860.
102
- V. Crim. 18 nov. 2008, Bull. crim. N° 232 : non-respect, par le propriétaire d'un aéronef, des dispositions
d'arrêtés relatifs au maintien de l'aptitude en vol des aéronefs (tenue du livret-moteur et du livret de
l'aéronef).

44
de la responsabilité pénale lorsque le dommage s’est réalisé à
l’évidence mais aussi lorsque la faute n’a causé aucun dommage. Cette
situation est prévue à l’article 223-1 du code pénal français en ces
termes « Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de
mort ou de blessures… ». Le législateur sanctionne donc l’individu qui «
expose » délibérément autrui à un risque immédiat de mort ou de
blessures, même si le « risque » auquel il est exposé ne se réalise pas.

Cette faute délibérée ou dol éventuel se situe entre la faute


intentionnelle et la faute d’imprudence. Cette dernière fut définit par le
législateur par la réforme du 13 mai 1996 et fut affinée par la seconde
réforme en 2000. Dans cette hypothèse, l’auteur ne montre pas de
l’hostilité envers la norme pénale mais de l’indifférence. La doctrine
parle alors de faute d’imprudence « inconsciente », contrairement à la
faute délibérée qui se définit par une faute d’imprudence «consciente ».

Ces solutions méritent d'être rapprochées de celles que retient


l'article 223-1 du code pénal français au sujet du délit de mise en
danger de la personne d'autrui. Certes, il ne s'agit alors que d'une
infraction-obstacle, qui ne trouve à s'appliquer que si, par chance,
aucun dommage n'est résulté pour autrui du comportement de
l'auteur. Mais l'on retrouve ici le même élément moral tiré de la «
violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de
prudence ou de sécurité ». Dans les deux cas il s'agit de sanctionner
celui ou celle qui, faisant fi des risques de mort ou de blessures qu'il
est susceptible de faire courir à autrui, accepte consciemment de
transgresser une règle de prudence ou de sécurité. Ici encore cette
attitude s'apprécie in concreto. La Cour de cassation a pu ainsi
censurer des juges du fond pour avoir condamné un chasseur qui
avait tiré un coup de fusil à 143 mètres d'une maison alors qu'un
arrêté préfectoral interdisait l'usage d'armes à feu à moins de 150
mètres des habitations : rien n'établissant que le prévenu avait
effectivement conscience de la distance où il se trouvait par rapport
aux maisons, son comportement relevait tout au plus de la simple
négligence103.

Avec les mêmes critères, la haute juridiction a pu cette fois


approuver d'autres juges qui, pour déclarer pénalement responsables
des skieurs ayant causé une avalanche, ont notamment constaté que
lesdits skieurs avaient pratiqué le surf sur une piste interdite par un
103
- Crim. 16 oct. 2007, Bull. crim. N° 246 ; Dr. pénal 2008, n° 3 (2e esp.), obs. M. VERON.

45
arrêté municipal, que l'un deux avait récidivé deux jours plus tard, et
que les prévenus, qui étaient des pratiquants expérimentés, s'étaient
engagés sur une piste barrée par une corde et signalée par des
anneaux d'interdiction réglementaires, en dépit d'une mise en garde du
conducteur du télésiège104. La seule transgression consciente d'une
règle de prudence ou de sécurité suffit. Nul besoin que cette
transgression soit intentionnelle105. Nul besoin non plus que le prévenu
soit en outre conscient des risques que sa transgression fait courir à
autrui106 , même s'il est vrai que la conscience d'un tel risque est
implicitement comprise dans le fait de la transgression.

B- la faute caractérisée :

La notion de faute caractérisée n’a pas été définie par le


législateur. Toutefois, la doctrine s’est également attachée à définir
cette faute. Ainsi, pour le professeur MAYAUD, il s’agit d’ « une
défaillance inadmissible [dans une] situation qui mérite une attention
soutenue, en raison des dangers ou des risques qu'elle génère »107. Plus
encore, la jurisprudence, dès les premières applications de la loi s’est
attachée à cerner la notion. Pour le Tribunal de La Rochelle, la faute
caractérisée est « une faute dont les éléments sont bien marqués et
d’une certaine gravité, ce qui indique que l’imprudence ou la négligence
doit présenter une particulière évidence, elle consiste à exposer autrui,
en toute connaissance de cause, que ce soit par un acte positif ou par
une abstention grave à un danger »108.

Suite à la modification de l’article 121-3, le nouvel alinéa 4


prévoit que la responsabilité pénale des personnes physiques,
indirectement liées au dommage causé, peut être engagée pour une
infraction non intentionnelle qu’en cas de violation manifestement
délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence
prévue par la loi ou le règlement ou en cas de faute caractérisée

104
- Crim. 9 mars 1999, D. 2000. 81, note M.-C. SORDINO et A. PONSEILLE ; ibid. 227, obs. J. MOULY; RSC 1999.
581, obs. Y. MAYAUD ; ibid. 808, obs. B. Bouloc ; JCP 1999. II. 10188, note J.-M. Do CARMO SILVA.
105
- Contra : TGI Saint-Etienne, 10 août 1994, Gaz. Pal. 1994. 2. 775, RSC 1995. 575, obs. Y. MAYAUD.
106
- Crim. 16 févr. 1999, D. 2000. 9, note A. Cerf. Adde : TGI Saint-Etienne, 10 août 1994, préc. ; Angers, 27 nov.
2001, JCP 2002. IV. 2843. Contra : Grenoble 19 févr. 1999, D. 1999. 480, note M. Redon ; JCP 1999. II. 10171,
note P. Le Bas.
107
- Y. MAYAUD, « Retour sur la culpabilité non intentionnelle en droit pénal », D., 2000, chron, p. 603.
108
- TGI, La Rochelle, 7 septembre 2000, RSC, 2001, p. 159, obs. Y. MAYAUD.

46
exposant autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne
pouvaient ignorer.

Ce texte est plus explicite que les alinéas 2 et 3, en effet, le


législateur utilise le mot « faute » mais plus précisément « d’une faute
caractérisée ». Il ne s’agit plus d’une faute simple ou légère, mais d’une
faute d’un certain degré de gravité, une faute d’une densité avérée.
Cette précision afin de faire la distinction avec la faute de mise en
danger délibérée qui ne peut être retenue que lorsque le lien de
causalité est direct. En déterminant le concept « d’une faute d’une
exceptionnelle gravité », la responsabilité pénale de l’auteur indirect
d’un dommage peut être engagée.

Autrement dit, cette qualification de faute caractérisée,


dénommée aussi inexcusable, concerne l'individu qui, par son
comportement, a exposé autrui à un risque d'une particulière gravité
qu'il ne pouvait ignorer. Une telle faute doit être « caractérisée », nous
dit-on. Entendons par là non seulement l'obligation, pour le juge, de
relever avec soin les éléments qui la caractérisent, mais encore la
nécessaire gravité du comportement adopté par l'individu fautif. En
l'occurrence, cette gravité résulte du fait que l'agent « ne pouvait
ignorer » l'importance du risque qu'il faisait courir à autrui, risque qui,
une fois de plus, s'est finalement réalisé. Nous sommes ici pleinement
sur le terrain d'une appréciation in abstracto. De l'examen des faits, il
doit ressortir que l'agent aurait dû savoir, compte tenu de ses
compétences réelles ou supposées, compte tenu aussi de la
dangerosité particulière de son action, qu'en agissant comme il l'a fait
il risquait de causer des blessures ou d'enlever une vie. La persistance
dans son action démontre alors une grave incurie qui mérite d'être
sanctionnée pénalement. Faute « lourde », « grossière et inacceptable »,
relève-t-on en doctrine109. Pour fustiger ce comportement. L'agent n'a
sans doute pas pris délibérément le risque de causer le dommage,
mais son manque total de clairvoyance compte tenu des circonstances
de temps, de lieux et de personnes l'accuse tout autant ; nul besoin de
creuser davantage.

Ainsi conçue, cette faute suppose chez qui l'a commise un


comportement d'une gravité supérieure à celui requis pour la faute
d'imprudence simple qui sert de plancher à la répression. L'une et

109
- E. DREYER, «  Droit pénal général », Litec, 4 éd., 2016, n° 843.

47
l'autre sont certes de même nature 110. Ce sont des fautes d'imprudence
qui, comme telles, s'apprécient in abstracto, par rapport au
comportement qu'auraient pu ou dû avoir une personne normalement
prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances. Mais, si les
mots ont un sens, de l'une à l'autre devrait exister une différence de
degré.

La faute caractérisée est a priori plus lourde que la faute simple


en ce que le risque de survenance du dommage est ici particulièrement
prévisible, au point que, selon les termes mêmes de la loi, le prévenu «
ne peut l'ignorer ». De la prévisibilité ordinaire (ce que l'on peut prévoir)
à la prévisibilité particulière (ce que l'on ne peut pas ne pas prévoir), la
distance s'avère néanmoins des plus ténues et l'on conçoit fort bien
que, d'une juridiction correctionnelle à l'autre, la ligne de partage entre
les deux sortes de fautes tende naturellement à s'estomper.

La doctrine en a conscience, qui tantôt relève « l'irrésistible


ascension de la faute caractérisée »111, tantôt dénonce la « grande
illusion »112 que représente en définitive la dépénalisation partielle des
infractions d'homicide ou de blessures par imprudence opérée par la
loi du 10 juillet 2000. Ce flou est d'autant plus prégnant que la Cour
de cassation l'encourage. Si elle paraît bien admettre que la faute
caractérisée est plus que la faute simple 113, elle s'exempte de tout
contrôle en la matière par l'abandon de la question aux lumières des
juges du fond114, Seules sont censurées les motivations insuffisantes
ou contradictoires115.

De fait, à l'abri de cette relative impunité, nombre d'arrêts


d'appel ou de jugements franchissent sans difficulté l'écueil de la
110
- A. PONSEILLE, « La faute caractérisée en droit pénal », RSC 2003. 79 ; A. d'HAUTEVILLE, «  La gradation des
fautes pénales en matière d'atteinte à la vie et à l'intégrité physique », in Réflexions sur le Nouveau code pénal,
Pédone, 1995, p. 31.
111
- P. MORVAN, « l'irrésistible ascension de la faute caractérisée : l'assaut avorté du législateur contre l'échelle
de la culpabilité », in Mélanges PRADEL, éd. Cujas, 2006, p. 461.
112
- F. ALT-MAES, « La grande illusion : la dépénalisation attachée à l'application de la loi du 10 juillet 2000 au
médecin », in Mélanges BOULOC, Dalloz, 2006, p. 1 s.
113
- V. not. Crim. 16 mai 2006, deux arrêts, Bull. crim. N° 136 et 137.
114
- Solution constante. V. par ex. : Crim. 5 déc. 2000, Bull. crim. N° 363 : « en l'état de ces motifs exempts
d'insuffisance ou de contradiction et procédant de son appréciation souveraine... » ; Crim. 9 juin 2015, n° 14-
86.469 (inédit) : « en l'état de ces énonciations exemptes d'insuffisance comme de contradiction [...] les
moyens qui reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et
circonstances de la cause [...] ne sauraient être admis ».
115
- V. par ex. : Crim. 11 févr. 2003, n° 02-85.810, Bull. crim. N° 28, RSC 2003. 801, obs. C. Giudicelli-Delage.

48
censure de la haute juridiction, alors que l'on ne sait pas très bien en
quoi les fautes qu'ils retiennent sont d'une intensité particulière 116. La
Cour de cassation a d'ailleurs prêté la main à ce mouvement en
requalifiant motu propio en fautes caractérisées des comportements où
les juges du fond n'avaient vu au départ que des fautes simples 117.

De ce fait, la plupart des arrêts rendus par notre cour


régulatrice savent toutefois se montrer plus sourcilleux. Par divers
biais, ils s'efforcent de montrer en quoi l'agent « ne pouvait ignorer » le
risque d'une particulière gravité auquel, tantôt par son activité, tantôt
par sa passivité, il exposait autrui. Cette impossible ignorance tient à
la combinaison entre, d'une part, les compétences attendues de l'agent
compte tenu de ses qualités ou de ses fonctions 118 et, d'autre part, les
circonstances connues de lui qui auraient dû l'alerter sur les risques
qu'il faisait courir à autrui.

C'est ce cumul de compétences réelles ou supposées et


d'informations effectives119 qui justifie en dernière analyse,
explicitement ou implicitement, la condamnation du prévenu pour
faute caractérisée. Les rares décisions de relaxe insistent au contraire
sur le fait que le prévenu ignorait tout du danger couru par la victime
et ne pouvait par conséquent pas y remédier, même en agissant au
mieux de ses compétences120.

Paragraphe 3 : L’appréciation de la faute non intentionnelle par le


juge pénal :
Classiquement lorsque le juge cherche à établir la preuve d’une
faute pénale intentionnelle, il se réfère au comportement d’une
personne prudente et diligente placée dans les conditions identiques à

116
- V. Crim. 27 mars 2001, n° 00-83.799, inédit, RDI 2001. 509, obs. M. SEGONDS ; Crim. 22 mai 2001, n° 00-
86.692, inédit ; Crim. 6 juin 2001, n° 00-86.683, inédit. Un arrêt pourtant publié paraît même confondre faute
caractérisée et faute simple : Crim. 11 juin 2003, Bull. crim. N° 121.
117
- V. Crim. 12 sept. 2006, Bull. crim. N° 219 ; Crim. 18 nov. 2008, Bull. crim. N° 233. La requalification était
nécessitée par le fait que, selon la Cour de cassation, les juges du fond avaient considéré à tort que les
prévenus étaient les auteurs directs des coups et blessures ou de l'homicide.
118
- Crim. 20 févr. 2001, n° 00-83.880, inédit : « Claude X., compte tenu de ses qualifications, ne pouvait
ignorer... ».
119
- Crim. 2 déc. 2003, Bull. crim. N° 226 ; Dr. pénal 2004, comm. 17, obs. M. VERON : « Claude X. [...] ne
pouvait ignorer eu égard à son expérience de praticien et aux informations qui lui étaient communiquées... ».
120
- Crim. 10 déc. 2002, Bull. crim. N° 223 : « l'institutrice, qui ignorait que (l'enfant) se livrait depuis peu au jeu
dangereux dont il a été victime, n'a pas [...] commis de faute caractérisée exposant la victime à un risque
qu'elle ne pouvait envisager ».

49
celle qui est l’objet de la poursuite, sans toutefois se fier à son aptitude
psychologique121.

Selon cette conception, le juge devait se borner à retenir un


comportement animé des plus hautes vertus, sans se soucier outre
mesure des circonstances extérieures ayant pu peser sur le
comportement de l’agent122.

En effet, avant la loi de 1996, il s’agissait de l’appréciation in


abstracto, qui est le mode d’appréciation adopté par la jurisprudence et
la doctrine marocaine. Les juges imaginaient une sorte d’individu idéal,
abstrait, normalement prudent, et ils se demandaient quel
comportement aurait eu cet individu s’il avait été placé dans les
mêmes circonstances que l’agent ? S’il apparait que cet individu aurait
eu le même comportement que la personne poursuivie, donc on peut
conclure que l’agent a eu un comportement prudent, donc la faute ne
sera pas établie. En revanche, si les juges considèrent que cet individu
normal aurait eu un autre comportement plus prudent, cela veut dire
que la personne poursuivie n’a pas été prudente, donc la faute sera
appréciée et, en effet, sa responsabilité pénale sera engagée.

Certes, ce mode s’appréciation a été modifié par le législateur


français qui a consacré l’appréciation in concreto, notamment par la loi
du 13 mai 1996 réformant la responsabilité pénale pour des faits
d’imprudence ou de négligence123.

Selon le mode d’appréciation in concreto, il convient pour le juge


de tenir compte des seules circonstances de la cause pour apprécier la
faute de l’auteur du dommage. En d’autres termes, l’écart de conduite
sera apprécié en considération des seules aptitudes propres de la
personne mise en cause. Le juge doit dans ce cas comparer la conduite
de l’agent qui a causé le dommage à celle que l’on était légitimement en
droit d’attendre de sa part, eu égard à ce dont il est usuellement
capable. On ne raisonne plus dans l’abstrait mais on va raisonner à
partir de la situation concrète, particulière de l’individu.

En effet cette nouvelle rédaction de l’article 121-3 de loi du 13


mai 1996, écarte le délit d’imprudence, de négligence ou de

121
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.127.
122
- P.KOLB.L.LETURMY, « Droit pénal général », Lextenso.5éme éd 2010.p.127.
123
- C.RUET, « commentaire de la loi du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits
d’imprudence ou de négligence », RSC.1998, P.23.

50
manquement, lorsque « l’auteur des faits a accompli les diligences
normales compte tenu, le cas échéant, la nature de ses missions ou des
ses fonctions, de ses compétences 124 ainsi que du pouvoir et des moyens
dont il disposait ». Une partie de la doctrine française n’a pas hésité à
fustiger la rédaction retenue par cet article. Que la négligence puisse
être excusée par des diligences normales est une donnée qui peut
paraitre au premier abord assez cocasse. D’autres ont vu dans les
circonstances évoquées de simples exemples qui ne liaient les juges. A
charge donc pour certains de motiver leur décision pour établir la
réalité de la faute et, le cas échéant, permettre à certains prévenus de
s’exonérer s’ils ont pris toutes les précautions. Ainsi tous les individus
exerçant une profession qui implique des responsabilités importantes
attendaient des conséquences favorables du mode d’appréciation in
concreto. Ils espéraient qu’il entrainerait des condamnations moins
fréquentes à leur endroit. Cependant, les premières décisions rendues
sous l’empire des dispositions rendues de cette loi montrent au
contraire une particulière à leur encontre. C’est ainsi que
l’accomplissement des diligences normales est rarement retenu comme
moyen d’exonération, que l’affaire concerne des chefs d’entreprises ou
de médecins ou les décideurs notamment publics.

Il est à mentionner que les juges sont ainsi invités à pratiquer


une appréciation in concreto de la faute simple (ordinaire), en se
fondant sur une liste de critères objectifs indiquée à l’art 121-3 al 3 du
code pénal125.

Chapitre II : La faute quasi-délictuelle et la faute


contraventionnelle :
La faute non intentionnelle s’identifie avec le quasi-délit. L’art
133 du code pénal marocain, alinéa 2 du Code pénal en fait une
catégorie spécifique présentée comme exceptionnelle : « Les délits
commis par imprudence sont exceptionnellement punissables dans les
cas spécialement prévus par la loi ». Dans le cadre de ce chapitre.

124
- Le terme de compétence, entendu au sens juridique, ne renvoie pas aux aptitudes psychologiques ou
techniques de la personne poursuivie.
125
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.94.

51
Il importe donc de distinguer la faute quasi-délictuelle (section 1)
de la faute contraventionnelle (section 2).

Section 1 : La faute quasi-délictuelle :


Un certain nombre d’infractions sont dites involontaires,
d’imprudence, de négligence ou d’inattention. Ce sont les quasi-délits
du droit pénal ; ces infractions sont effectivement dans la plupart des
cas des délits, exceptionnellement des crimes. Ces quasi-délits du droit
pénal sont-ils les mêmes que les quasi-délits du droit civil ?

Pour répondre à cette question, nous tenons d’aborder le


principe d’identité de la faute civile et la faute pénale (Paragraphe1) et
l’application de ce principe (Paragraphe2).

Paragraphe 1 : Le principe d’identité de la faute civile et la faute


pénale :
En droit pénal, le mot « faute » est réservé à la faute non
intentionnelle, c'est-à-dire à l’imprudence ou à la négligence. La faute
s’oppose ainsi à l’intention criminelle, notamment le fait d’avoir voulu
un acte et ses conséquences.

En droit civil, la faute est définie comme le fait de ne pas agir


avec la prudence, l’attention, l’habileté que l’on est en droit d’attendre
d’un homme normalement soigneux126. Peu importe, que cette faute
soit plus ou moins grave, peu importe même qu’elle soit volontaire,
qu’elle révèle une intention de nuire, un état d’esprit incompatible avec
la vie en société. Il faut et il suffit en droit civil qu’il y ait une faute 127.

Ces deux notions présentent une différence fonctionnelle.


L’objectif principal du droit civil est la défense des intérêts
particuliers : Il n’interviendra donc que quand un intérêt particulier
aura été lésé ; peu lui importeront les actes ou les attitudes révélant
chez leur auteur un état d’esprit anormal ou antisocial : Ce sont là les
domaines du droit pénal ou de la morale. Pour le droit civil, la question
se résout en un choix entre deux personnes : d’une part, celle par le

126
- L’article 78 du D.O.C dispose que : « chacun est responsable du dommage moral ou matériel qu’il a causé,
non seulement par son fait, mais par sa faute lorsqu’il est établi que cette faute en est la cause directe.
Toute stipulation contraire est sans effet.
La faute consiste soit à omettre ce qu’on était tenu de faire, soit à faire ce dont on était tenu de s’abstenir,
sans intention de causer un dommage. »
127
- J-C.SCHMIDT, « Faute civile et faut pénale », recueil Sirey, 1928, p.3.

52
fait de laquelle le dommage a été causé, et d’autre part la victime,
c’est-à-dire celle qui a subi le dommage128.

Au-delà de cette différence fonctionnelle, les deux notions


présentent une différence technique. D’une part, le délit pénal ne peut
résulter que d’une infraction à une loi qui interdit un acte sous la
sanction d’une peine tandis que le délit civil existe toutes les fois qu’il y
ait une faute, sans qu’il soit besoin d’en préciser des éléments
constitutifs et, d’autre part, le délit pénal existe même s’il n’a pas été
causé de dommage, la loi visant l’action coupable sans que l’on ait à
rechercher les conséquences de l’acte ; au contraire, le délit civil n’est
pris en considération que s’il a entrainé un préjudice pour une autre
personne.

Or, quand un dommage vient de se réaliser, le droit pénal


intervient à un point de vue très différent de celui du droit civil : Il ne
s’agit pas d’établir un équilibre entre deux patrimoines, mais bien de
réprimer un état d’esprit qui vient de se révéler. Tel est, en effet, le but
de tout droit pénal moderne : empêcher une infraction de se reproduire
en tachant d’avertir ou d’intimider129.

Toutefois, si le droit civil et le droit pénal, chacun dans son


domaine, seraient tous deux prêts à intervenir, l’un répare, l’autre
réprime130, la pratique ne permet pas de laisser une cloison étanche
entre la faute civile et la faute pénale.

En effet, la similitude des définitions des deux notions par le


texte pénal et civil a conduit la jurisprudence et la doctrine à se
demander si la notion d’imprudence et de négligence recouvraient ou
non le même domaine en droit civil et en droit pénal et s’il y avait par
conséquent, unité ou dualité de la faute pénale et civile. Alors
comment s’applique ce principe d’identité de la faute civile et pénale ?

Paragraphe 2 : L’application du principe d’identité de la faute


civile et la faute pénale :
C’est là une relation qui a fait couler beaucoup d’ancre. Il s’agit
en effet de savoir si les notions d’imprudence et de négligence du code
pénal ont le même sens que celles retenues par le dahir des obligations
128
- J-C.SCHMIDT, « Faute civile et faut pénale », recueil Sirey, 1928, p.2.
129
- J-C.SCHMIDT, « Faute civile et faut pénale », recueil Sirey, 1928, p.2.
130
- La faute pénale entraîne une punition, la faute civile une réparation.

53
et des contrats. En d’autres termes, la faute pénale se confond-t-elle
avec la faute civile ou bien sont-elles distinctes ?

La question loin d’être de pure théorie, a des intérêts pratiques


prononcés surtout au niveau procédural. La théorie de l’unité empêche
la victime d’obtenir réparation de son préjudice devant une juridiction
civile, lorsque la personne poursuivie pour une faute d’imprudence est
relaxée par la juridiction pénale. La décision pénale ayant autorité de
chose jugée sur le civil en vertu de l’adage « le pénal tient le civil en
l’état ». Alors que la théorie de la dualité des fautes permet au
contraire à une victime d’obtenir, devant une juridiction civile, la
condamnation à des dommages et intérêts d’une personne qui a été
relaxée par le juge pénal. Un autre effet procédural de l’unité des
fautes est celui de la solidarité des prescriptions publique et civile, qui
empêchait la victime d’une infraction d’imprudence de demander
réparation de son préjudice devant une juridiction civile dés lors que la
prescription de l’action publique était acquise.

La réponse apportée par la jurisprudence marocaine 131 plaide


en faveur de l’assimilation des deux fautes, c’est-à-dire de l’unité de la
faute pénale et de la faute civile 132. La conséquence de cette option
s’avère, à notre sens, assez inquiétante. Le défaut de condamnation
pénale rend impossible toute action ultérieure au civil. En effet, si à
l’origine, le but poursuivi par le législateur était de ne pas créer de
contradiction entre les décisions du juge civil et celles du juge pénal,
des abus ont très vite apparus conduisant à un engorgement entre des
tribunaux pénaux. Cette obligation faite au juge civil de surseoir à
statuer, constitue un moyen pour les personnes, souhaitant un gain
de temps, de retarder l’issue de leur procès.

Ainsi, lorsque le juge pénal ne retienne aucune faute, la victime


se trouve privée de toute action ultérieure au civil. La décision pénale
ayant autorité de la chose jugée selon l’article 10 al 2 du code de
procédure pénal. Si la juridiction pénale était saisie et que les deux
actions portaient sur les mêmes faits, le juge civil devait surseoir à
statuer. Il faut comprendre que le juge civil était donc obligé d’attendre
que le juge pénal se prononce sur l’action publique. La juridiction
pénale jouissait donc d’une suprématie sur le civil.
131
- Voir dans ce sens l’arrêt du 13 mai 1970 publié dans la revue « jurisprudence de la cour suprême », N°19,
p.10 ; l’arrêt de la Cour d’appel de Rabat du 29 avril 1930 publié dans la revue « jurisprudence de la cour
suprême », N°10, p.169.
132
- A.EL ALAMI, «‫القانون شرح‬ ‫الجنائي‬  ‫»المغربي‬, Annajah Aljadida, 2013, p.259 et s.

54
Cette même position a été adoptée par la jurisprudence
française au début du 20éme siècle en affirmant l’identité des fautes
pénales et civiles dans les arrêts de la Cour de cassation du 18
Décembre 1912 et Juin 1914. Certes, la loi Fauchon a remis en cause
cette assimilation en consacrant la dualité de la faute pénale et de la
faute civile d’imprudence. Mais, il ne s’agissait que d’une consécration
partielle. Cette possibilité ne vise que l’infraction qualifiée. Dans ce cas
seulement, une relaxe prononcée par le juge pénal n’empêche pas la
victime de saisir ultérieurement le juge civil pour obtenir
l’indemnisation de son préjudice133.

Depuis, une évolution jurisprudentielle se dessine. Cette dualité


a été consacrée également pour les infractions non intentionnelles
simples. Ainsi, la jurisprudence française reconnait que quelque soit la
faute pénale commise, la relax du juge répressif ne fait pas obstacle à
l’obtention d’une réparation au civil. La consécration est donc totale.
Cette tendance se confirme avec la loi du 5 Mars 2007 sur le
rééquilibrage de la procédure pénale qui abolit l’adage «  le pénal tient
le civil en l’état ». Par conséquent, le juge civil est libre de statuer
quelques soit l’instance pendante au pénal134.

L’harmonisation du procès pénal et du procès civil est la


conséquence du principe de l’identité des deux fautes lorsque les
procès sont engagés parallèlement ou concurremment à propos de la
même infraction. Cette harmonisation s’opère en fonction de la
primauté du criminel sur le civil, principe dégagé très tôt au Maroc sur
la base du Code d’instruction criminelle de 1913 et consacré par le
Code de procédure pénale de 2003. L’autorité sur le civil de la chose
jugée au pénal est la conséquence fondamentale de ce principe ; mais
l’harmonisation des deux procès s’arrête à ce niveau.

Section 2 : La faute contraventionnelle :


La faute contraventionnelle est la faute pénale la moins grave,
elle ne comporte aucune anti socialité volontaire, elle ne comporte non
plus une dimension d’imprudence grave, mais elle résulte seulement
du manquement à une règle de discipline collective que nécessite
l’organisation de la vie en société.

133
- V. BOUCHARD, « Droit pénal » éditions Foucher, 2009, p.45.
134
- Ibid.,

55
Dans le cadre de la faute contraventionnelle, nous nous limitons
à l’étude de cette notion et son domaine (Paragraphe1), et nous
précisons l’élément fautif et volonté de cette faute (Paragraphe2).

Paragraphe 1 : La notion et le domaine le faute


contraventionnelle :
Dans ce paragraphe, nous allons traiter la notion de la faute
contraventionnelle et son domaine sous l’empire du code pénal,
l’ancien et le nouveau.

A- La notion de la faute contraventionnelle :

Tout d’abord, la faute contraventionnelle est visée par l’article


121-3, elle correspond à l’incrimination d’une indiscipline sociale,
c'est-à-dire d’un manque de sens civique.

La seule démonstration de l’inobservation de la loi ou du


règlement est en général suffisante, sans qu’il soit besoin de constater
une imprudence ou une quelconque intention de violer le texte.
L’article 133 du code pénal dispose que : « les crimes et les délits ne
sont punissables que lorsqu’ils ont été commis intentionnellement. Les
délits commis par imprudence sont exceptionnellement punissables
dans les cas spécialement prévus par la loi. Les contraventions sont
punissables même lorsqu’elles ont été commises par imprudence,
exception faite des cas où la loi exige expressément l’intention de
nuire ». C’est donc l’aspect matériel qui domine la matière
contraventionnelle135.

La faute dite contraventionnelle est, dans son essence, de même


nature que la faute d’imprévoyance. C’est le plus souvent une
imprudence ou une inobservation des règles 136. Mais elle présente
certaine particularité par rapport à la faute d’imprévoyance.

En premier lieu, la particularité de la faute contraventionnelle


est que son existence est déduite de l’accomplissement matériel des
faits interdits. Si l’agent a accompli matériellement ces faits on en
déduit l’élément moral correspondant. On parle parfois à cet égard de
présomption d’élément moral, c'est-à-dire que cette faute
contraventionnelle est toujours présumée. Le ministère public qui doit,

135
- MC.SORDINO, « Droit pénal général », Ellipses, 2002, p.103.
136
- M.RASSAT, « Droit pénal général », Ellipses, 2éme éd, 2006, p.347.

56
en principe prouver l’existence de tous les éléments constitutifs des
infractions qu’il poursuit et donc l’élément moral des infractions
intentionnelles ou non intentionnelles est ici dispensé de cette preuve.
L’existence de l’élément moral est déduite de la seule constatation que
l’agent a matériellement commis les faits qui lui sont reprochés 137.
(Excès de vitesse, un stationnement irrégulier…etc.)

En second lieu, et une fois les faits constatés, la personne


poursuivie ne peut se dégager de l présomption d’élément moral qui
pèse sur elle en prouvant sa bonne foi. Elle ne peut être relaxée que
sur la preuve d’une force majeure, lorsque le fait était ordonné par la
loi t commandé par l’autorité légitime ou en cas de légitime défense 138.
Ainsi, la personne qui circule dans un sens interdit ne s’exonère pas
de sa responsabilité en prouvant qu’elle n’a pas vu le panneau, elle ne
pourra éventuellement se décharger qu’en établissant que le panneau
avait été arraché, c'est-à-dire en cas de force majeure.

B- Le domaine de la faute contraventionnelle  :

Le domaine de la faute contraventionnelle, ou bien présumée, a


évolué depuis le nouveau code pénal.

En premier lieu, sous l’empire de l’ancien code pénal, cette faute


contraventionnelle par respect pour les libertés individuelles n peut
concerner que les infractions les moins graves. Un auteur, le doyen
légal, avait dégagé les critères de la faute contraventionnelle, en disant
que cette faute ne devrait concerner que des infractions ayant un
simple but de police, c'est-à-dire celles qui visent à l’organisation d’un
discipline collective, des infractions n’entraînent qu’une faible
réprobation sociale et des infractions punies de peines de sanctions
légères.

Néanmoins sous l’empire de l’ancien code pénal, la chambre


criminelle est allée au-delà des contraventions et a retenu la faute
contraventionnelle dans le cadre de certains délits qu’on a appelé les
délits contraventionnels. Délits dont l’élément moral est constitué par
une simple faute contraventionnelle.

Cela, a été le cas pour le délit de pollution, à partir d’un arrêt du


28 avril 1977, puisque dans cet arrêt, la Cour de cassation affirme que

137
- M.RASSAT, « Droit pénal général », Ellipses, 2éme éd, 2006, p.347.
138
- L’article 124 du code pénal.

57
le délit de pollution a seulement le caractère d’une infraction
matérielle, que sa preuve n’a pas à être rapportée par le ministère
public et que le prévenu ne peut s’en exonérer que par la force
majeure. La chambre criminelle a également affirmé que le délit de
tenue d’un fichier informatique sans déclaration, sans autorisation de
la CNIL, était lui aussi un délit matériel. Ces délits étaient donc
relativement nombreux jusqu’à en vigueur du nouveau code pénal.

En second lieu, sous l’empire du nouveau code pénal et avec


son entrée en vigueur, ces délits ont été supprimés. En pratique c’est
moins vrai.

En théorie, cette suppression résulte des textes adoptés. En


effet, on a considéré que la présomption de faute contraventionnelle
heurtait le principe de la présomption d’innocence, qui est affirmé à
l’article 6-2 de la convention européenne des droits de l’homme. Par
ailleurs, la jurisprudence de la CEDH, dans l’arrêt « Salabiaku », du 7
Octobre 1988, ne prohibe pas de façon totale les présomptions mais
les encercle quand même dans certaines limites, notamment au regard
de la gravité de l’infraction commise. On voulait faire reculer cette
faute contraventionnelle. Dés lors deux textes doivent être pris en
considération. Tout d’abord, l’article 121-3 du code pénal, qui indique
que les délits sont soit intentionnels comme les crimes soit reposent
sur une faute non intentionnelle, ils ne peuvent plus se reposer sur
une simple faute matérielle.

La catégorie de ces délits aurait donc disparu. On en trouve


confirmation dans un autre texte, l’article 339 de la loi d’adaptation du
Nouveau code pénal, c'est-à-dire la loi du 16 Décembre 1992. D’après
ce texte tous les délits non intentionnels réprimés par des textes
antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi, demeurent constitués en cas
d’imprudence, de négligence ou de mise en danger délibérée, même
lorsque la loi ne le prévoit pas expressément.

On avait différents codes qui contenaient ces anciens délits


matériels. La catégorie est supprimé par le Nouveau code pénal,
l’article 339 dit que ces délits n’ont pas totalement disparus mais à
condition qu’on trouve une faute délibérée ou une faute d’imprudence.
En effet, la pratique est assez éloignée, elle résulte de la jurisprudence
de la chambre criminelle rendue sur la question depuis l’entrée en
vigueur du nouveau code pénal. Il en résulte que les anciens délits

58
matériels ont connus un double sort. Pour certains la jurisprudence a
appliqué le mécanisme de l’article 339 de la loi d’adaptation. Ces
anciens délits matériels sont donc devenus des délits non
intentionnels, la Loi Fauchon s’applique et en cas de causalité
indirecte pour une personne physique, il faudrait prouver que cette
personne physique a commis une faute pénale qualifiée. Mais d’autres
anciens délits matériels n’ont pas connus le même sort. D’autres
anciens délits matériels ont été transformés en délits intentionnels,
donc relevant de l’article 121-3 al 1, mais ce sont des délits
intentionnels particuliers, dans la mesure où la chambre criminelle
affirme que la seule constatation de la violation en connaissance de
cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de
son auteur l’intention exigée par l’article 121-3 du code pénal. En
théorie ces délits sont intentionnels, en pratique la présomption existe
toujours. C’est que la chambre criminelle a affirmé dans un arrêt du
12 Juillet 1994 à propos de la construction sans permis, cette formule
a deux conséquences, d’abord s’il s’agit d’un délit intentionnel le
mécanisme de la loi Fauchon ne joue pas, car cela ne joue que pour les
délits non intentionnels. De façon plus large, cette formule rend plus
facile l’établissement de la faute non intentionnelle alors que c’est
pourtant la faute la plus grave, C’est donc une formule et une
jurisprudence très contestable.

Paragraphe 2 : L’élément fautif et l’élément volonté dans les faits


contraventionnels :
Il est vrai que l’article 133, alinéa 3 du Code pénal marocain
semble poser le principe de la contravention infraction matérielle. Aux
termes de ce texte : « Les contraventions sont punissables même
lorsqu’elles ont été commises par imprudence… » ; L’article 116139 du
Code pénal marocain sur la tentative et l’article 129 140 sur la complicité
semblent par ailleurs confirmer la thèse de la contravention, une
infraction purement matérielle.

Il importe donc d’apporter l’élément volonté dans les faits


contraventionnels, ainsi que leur élément fautif.

139
-L’article 116 du Code pénal marocain dispose que : «  La tentative de contravention n’est jamais
punissable ».
140
- L’article 129 du Code pénal marocain : «… La complicité n’est jamais punissable en matière de
contravention ».

59
A- L’élément volonté dans les faits contraventionnels:

Le Code pénal marocain dans son article 134, alinéa 1


s’exprime en termes généraux à propos de l’aliénation mentale
exonératoire, dispose que : «  N’est pas responsable et doit être absous
celui qui, au moment des faits qui lui sont imputés, se trouvait par suite
de troubles de ses facultés mentales dans l’impossibilité de comprendre
ou de vouloir… », Ce texte exonère l’agent de toute faute
contraventionnelle.

En matière contraventionnelle l’individu absous, s’il est


dangereux pour l’ordre public est remis à l’autorité administrative,
énonce l’alinéa 3 de l’article 134 du code pénal marocain ; Il va de
même en cas d’irresponsabilité partielle : Si au moment des faits qui
lui sont imputés, l’agent se trouve seulement « atteint d’un
affaiblissement de ses facultés mentales », susceptible de « réduire sa
compréhension et sa volonté », la peine contraventionnelles est modérée
proportionnellement à la responsabilité qui lui est reconnue. (L’article
135 du Code pénal marocain, dernier alinéa)141.

B- L’élément fautif dans les faits contraventionnels:

Si l’article 133, alinéa 3 du Code pénal pose le principe de la


répression contraventionnelle de la simple imprudence, il souligne
cependant l’existence exceptionnelle «  des cas où la loi exige
expressément l’intention de nuire ».

1--Le principe  : la faute contraventionnelle d’imprudence  :

Comme dans les infractions quasi-délictuelles, la faute réside en


l’espèce dans une négligence, une imprudence ou une inobservation
des règlements. Deux différences fondamentales séparent cependant la
faute quasi-délictuelle et la faute contraventionnelle d’imprudence.

La faute contraventionnelle d’imprudence est nécessairement


présumée puisqu’elle est punissable dans tous les cas (article 133,
alinéa 2 du Code pénal marocain).

141
-L’article 135 du Code pénal marocain dispose que : « … En matière de contravention, il est fait application
de la peine, compte tenu de l'état mental du contrevenant ».

60
Pour renverser une telle présomption, l’agent se trouve dans la
position du responsable du fait des choses (article 88 du DOC 142). Il ne
peut qu’invoquer la force majeure que le CPM assimile à la contrainte,
fait justificatif.

2--L’exception  : la faute contraventionnelle intentionnelle

Lorsque la loi exige expressément l’intention de nuire, l’agent est


coupable d’une faute contraventionnelle intentionnelle.

Cette faute n’est pas présumée et obéit, dans son analyse, aux
normes dégagées à propos du dol général et du dol spécial. Seuls les
articles 116 et 129 du Code pénal marocain, remarquablement adaptés
à la faute contraventionnelle d’imprudence, viennent en matière de
tentative et de complicité conférer à la faute contraventionnelle
intentionnelle un aspect purement matériel : dans les deux cas il est
totalement fait abstraction de l’intention coupable.

142
- L’article 88 du DOC dispose que : « Chacun doit répondre du dommage causé par les choses qu'il a sous sa
garde, lorsqu'il est justifié que ces choses sont la cause directe du dommage, s'il ne démontre :
1° Qu'il a fait tout ce qui était nécessaire afin d'empêcher le dommage ;
2° Et que le dommage dépend, soit d'un cas fortuit, soit d'une force majeure, soit de la faute de celui qui en est
victime ».

61
Conclusion :

Pour conclure, on peut dire que le phénomène criminel,


dénommé ainsi la criminalité, correspond à une somme des
comportements à laquelle la société est confrontée de manière
habituelle, soit en tant qu’acteur, soit en tant que spectateur.

L’infraction est le facteur déclenchant du droit pénal qui, par


son rôle, gouverne ces comportements illicites. Pour qu’elle existe, il
faut la réunion de ses trois éléments constitutifs : L’élément légal,
l’élément matériel et l’élément moral.

L’élément moral, par sa nature obscure et intouchable, a fait


couler beaucoup d’ancre par des penseurs et des chercheurs pour
qu’ils parviennent à le déterminer et, par conséquent, à distinguer les
différentes formes qu’il peut revêtir, ainsi la notion de l’élément moral
a été en perpétuelle évolution depuis cent cinquante ans.

Ce facteur psychologique, dont la notion est assez délicate à


cerner, peut se présenter soit dans la forme d’une faute intentionnelle,
soit dans la forme d’une faute non intentionnelle.

On parle d’une faute pénale intentionnelle lorsque l’auteur a


commis des faits punissables par la loi intentionnellement, c'est-à-dire
que la survenance matérielle de l’infraction soit l’œuvre de sa volonté
et sa conscience. Il s’agit donc de l’intention criminelle, la base sur
laquelle se décide la pénalisation du crime et la responsabilité pénale
de l’auteur sera engagé devant la justice.

Lorsqu’on parle d’une faute non intentionnelle, on vise une


conduite blâmable commise par une personne qui ne cherche en se
faisant aucun résultat dommageable, elle veut son acte mais elle n’a
pas voulu les conséquences qui en résultent. Cette faute non
intentionnelle se divise en différentes 3 grandes catégories :
premièrement : les fautes simples ou dites ordinaires, elles se
présentent soit en une imprudence, négligence, inattention ou
maladresse. Deuxièmement : les fautes qualifiées, plus grave que les
fautes simples, elles comprennent la faute de mise en danger délibéré
et la faute caractérisée. Dernièrement : on parle de la faute quasi-
délictuelle et la faute contraventionnelle ou présumée, sur lesquelles

62
un problème d’identité entre la faute pénale et la faute civile se
superpose.

La non existence de l’intention coupable dans les fautes non


intentionnelle est à profit de l’accusé, elle lui accorde une exonération
partielle et une dépénalisation modérée devant la justice.

Le pouvoir d’appréciation des fautes pénales, qu’elles soient


intentionnelles ou non intentionnelles, appartient au juge, donc c’est à
lui de juger l’accusé soit d’innocent soit de coupable. En d’autres
termes, c’est lui qui décide soit la pénalisation ou la dépénalisation de
l’agent. A partir de ce point là, on commence à tracer les contours de la
problématique de l’élément moral, on peut ni le mesurer ni le toucher,
il est caché dans la psychologie de l’accusé, c’est pour cette raison, le
ministère public doit être très attentif dans l’analyse de l’affaire en
exploitant tous les cotés soigneusement et avec une grande précision,
afin d’établir l’élément intentionnel et décider si l’infraction commise
est un crime, délit ou contravention. Ainsi, pour garantir à l’accusé un
procès équitable et conforme aux droits de l’homme.

Dés lors, on ne peut pas nier que certaines questions


concernant l’élément moral restent complexe et difficile à traiter, parce
que la théorie reste plus simple que la pratique, et tant qu’une
harmonisation entre la loi et son application n’est pas bien réalisée
dans la vie réelle, le chiffre noir de la délinquance restera toujours dans un
écart entre la délinquance réelle et la délinquance à travers les statistiques
officielles.

63
Bibliographie :

Ouvrages généraux :

 Frédéric DESPORTES, Francis LE GUNEHEC, « DROIT PÉNAL


GÉNÉRAL », Economica, 8éme édition 2001.

 Bernard BOULOC, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Dalloz, 22éme


édition 2011.

 Patrick KOLB, Laurence Leturmy, «DROIT PÉNAL GÉNÉRAL » Lextenso,


5éme édition

 Jean PRADEL, «DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Cujas, 2001.

 Michèle-Laure RASSAT, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Ellipses, 2éme


édition, 2006.

 Marie-Christine SORDINO, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Ellipses,


2002.

 Jacques-Henri ROBERT, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Thémis, 5éme


édition, 2001.

 Valérie BOUCHARD, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Editons Foucher,


2009.

 Philippe CONTE, Patrick-Maitre DE CHAMBON, « DROIT PÉNAL


GÉNÉRAL », Dalloz, 2014.

 César BECCARIA : « TRAITÉ DES DÉLITS ET DES PEINES », 1764.

 M.CUSSON, « LA CRIMINOLOGIE », Hachette, 1998.

 E.DREYER, « DROIT PÉNAL GÉNÉRAL », Litec, 4éme édition. 2016.

64
Ouvrages spéciaux:

 Mikael BENILLOUCHE, « L ֔EÇONS DE DROIT PÉNAL GÉNÉRAL »,


Ellipses, 2éme édition, 2012.

 Mohieddine AMZAZI, « ESSAI SUR LE SYSTÉME PÉNAL MAROCAIN »,


Centre Jacques-Berque, 2013.

 Jacques BERQUE, « ESSAI DUR LA MÉTHODE JURIDIQUE


MAGHRÉBINE », Le Forestier, 1994.

 G.CLÉMENT, J.P.VICENTINI, « FICHES DE DROIT PÉNAL GÉNÉRAL »,


Ellipses, 2009.

 G.SALMON, L.BRUZEAUX, « CONTRIBUTION A L’ÉTUDE DU DROIT


COUTUMIER DU NORD MAROCAIN », Archives marocaines, 1905.

 A.M.BOISVERT, « LA CONSTITUTIONNALISATION DE LA MENS REA


ET L’EMERGENCE D’UNE NOUVELLE THÉORIE DE LA
RESPONSABILITÉ PÉNALE », 1998.

 E.CLÉMENT, F.GUILLAUME, G.TIBERGHIEN et B.VIVICORSI, «  LE


CERVEAU NE PENSE PAS TOUT SEUL », le monde diplomatique,
Septembre 2014.

 X-LABBÉE, « INTRODUCTION GÉNÉRALE AU DROIT » : Pour une


approche éthique, Presses universitaire de Septentrion 2010.

 C.A.BERTAULD, « COURS DE DROIT PÉNAL », 3éme édition, 1964.

 JOUSSE, « TRAITÉ DE LA JUSTICE CRIMINELLE », Paris, 1771.

 D.COMMARET, « LA LOI FAUCHON, CINQ ANS APRÉS, DROIT


PÉNAL », 2006.

 P.FAUCHON, « RAPPORT AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS »,


Sénat, 1995-1996.

65
 M.MERLE et VITU, « FAUTE D’IMPRÉVOYANCE », Cujas, 7éme édition,
Paris, 1997.

 A.SERIAUX, « LA FAUTE DE TRANSPORTEUR », Economica, 2éme


édition, 1998.

 A.MAYAUD, « RETOUR SUR LA CULPABILITÉ NON INTENTIONNELLE


EN DROIT PÉNAL », 2000.

 A.PONSEILLE, « LA FAUTE CARACTÉRISÉE EN DROIT PÉNAL », 2003.

 P.MORVAN, « L’IRRÉSISTIBLE ASCENSION DE LA FAUTE


CARACTÉRISÉE : L’ASSAUT AVORTÉ DU LÉGISLATEUR CONTRE
L’ÉCHELLE DE LA CULPABILITÉ », édition Cujas, 2006.

 F.ALT-MAES : « LA GRANDE ILLUSION : LA DÉPÉNALISATION


ATTACHÉE A L’APPLI DE LA LOI DU 10 JUILLET 2000 AU
MÉDECIN », Dalloz, 2006.

 J-C.SCHMIDT, « FAUTE CIVILE ET FAUTE PÉNALE », recueil Sirey,


1928.

 A.EL ALAMI,  « ‫المغربي القانون شرح‬ », Annajah Aljadida, 2013.

Les revues :

 L.MLAVAL, « LA RÉFORME DE LA JUSTICE PÉNAL AU MAROC »,


REVUE DE SCIENCES CRIMINELLES ET DE DROIT PÉNAL
COMPARÉ », 1954.

 A.D’HAUTEVILLE, « LA GRADATION DES FAUTES PÉNALES », « IN


RÉFLEXIONS SUR LE NOUVEAU CODE PÉNAL, OUVRAGE
COLLECTIF DE L’E.R.P.C., Pédone, 1995.

 M.KALUSZYNSKI, « QUAND EST NÉE LA CRIMINOLGIE ? OU LA


CRIMINOLOGIE AVANT LES ARCHIVES… », Dossier thématique :
HISTOIRE DE LA CRIMINOLOGIE AUTOUR DES ARCHIVES
D’ANTHROPOLOGIE CRIMINELLE, 2005.

 B.BOTIVOU, « DROIT ISLAMIQUE, DU POLITIQUE A


L’ANTHROPOLOGIE », REVUE DROIT ET SOCIÉTÉ N°15, 1990.

66
Textes législatifs :

 Dahir du 24 octobre 1953 formant Code pénal marocain, B.O., n°2142


bis du 19 novembre 1953, p. 1677 ; dahir du 24 octobre 1953 formant
code de procédure pénale, B.O., n°2142 bis du 19 novembre 1953,
p.1697 ; dahir du 24 octobre 1953 relatif à l’organisation de la justice
makhzen, B.O., n° 2142 bis du 19 novembre 1953, p.1700 ; dahir du
24 octobre 1953 fixant le statut des magistrats des tribunaux
makhzen, B.O., n°2142 bis du 19 novembre 1953, p. 1708.

 Dahir n° 1-03-140 du 26 Rabii I 1424 (28mai 2003) portant


promulgation de la loi n° 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme.
 Dahir n° 1-07-79 du 28 Rabii I 1428 (17avril 2007) portant
promulgation de la loi n°43-05 relative à la lutte contre le blanchiment
des capitaux.
 Loi n° 07-03 complétant le code pénal en ce qui concerne les
infractions relatives aux systèmes de traitement automatisé des
données, promulgué par le Dahir n° 1-03-197 du 16 Ramadan 1424
(11 novembre 2003).

 La loi Fauchon du 10 juillet 2000 impose notamment au juge :


d'établir une distinction entre personne physique et personne morale
auteur d'un délit non intentionnel ; de qualifier le lien de causalité :
est-il direct ou indirect entre la faute et le dommage subi ; de vérifier
s'il existe une faute caractérisée commise.

Les arrêts de juridictions : 

 L’arrêt du 13 mai 1970 publié dans la revue « jurisprudence de la cour


suprême », N°19.
 L’arrêt de la Cour d’appel de Rabat du 29 avril 1930 publié dans la
revue « jurisprudence de la cour suprême », N°10.
 Crim. 29 octobre 1969 : Bull. Crim. N°271.

 Arr. première chambre N° 287.


 Crim., 2 avril 1997, Bull. n° 132.
 Crim. 30 janv. 1913, Bull. crim. N° 53.
 Crim. 27 mai 1948, Bull. crim. N° 145.
 Crim. 17 déc. 1953, Bull. crim. N° 347.
 Crim. 3 nov. 1955, Bull. crim. N° 447.
 Crim. 9 mai 1956, Bull. crim. N° 355.
 Crim. 14 févr. 1996, Bull. crim. N° 78.

67
 Crim. 12 sept. 2000, Bull. crim. N° 268.
 Crim. 24 mai 2016, n° 14-88.401.
 Crim. 12 juin 2007, Bull. crim. N° 156.
 Crim. 16 oct. 2007, Bull. crim. N° 246.
 Crim. 9 mars 1999, D. 2000. 81.
 Crim. 16 févr. 1999, D. 2000. 9.
 Crim. 16 mai 2006, deux arrêts, Bull. crim. N° 136 et 137.
 Crim. 5 déc. 2000, Bull. crim. N° 363.
 Crim. 11 févr. 2003, n° 02-85.810, Bull. crim. N° 28.
 Crim. 27 mars 2001, n° 00-83.799.
 Crim. 12 sept. 2006, Bull. crim. N° 219.
 Crim. 20 févr. 2001, n° 00-83.880.
 Crim. 2 déc. 2003, Bull. crim. N° 226.

Source WEB :

 https://www.lepetitjuriste.fr/la-notion-de-faute-et-le-droit-penal-larticle-121-3-du-code-
penal-2/
 https://blogavocat.fr/space/icuilleretgauthier/content/theorie-sur-l-intention-element-
moral-de-l-infraction-penale_fb262be4-caa5-4514-acdb-31bd5d5524b2
 https://cours-de-droit.net/la-faute-penale-intentionnelle-imprudence-absence-de-faute-
a127983026/
 https://cours-de-droit.net/droit-penal-marocain-a126319460/

68
Table des matières

Dédicace
Remerciement

Liste des abréviations

Sommaire

Introduction 1

Partie 1 : L’intention criminelle : Un facteur de pénalisation 11


Chapitre 1 : Le concept de l’intention criminelle 13
Section 1 : Une étude approfondie de l’intention criminelle 13
Paragraphe 1 : Définition de l’intention criminelle 13
Paragraphe 2 : La distinction entre l’intention criminelle et la préméditation 15
Section 2 : La théorie de l’intention criminelle dans la doctrine 17
Paragraphe 1 : L’intention criminelle selon l’école classique 18
Paragraphe 2 : L’intention criminelle selon l’école néo-classique 19
Paragraphe 3 : L’intention criminelle selon l’école positiviste 20
Chapitre 2 : Les divers aspects de l’intention criminelle 21
Section 1 : Une analyse du dol général 21
Paragraphe 1 : Les théories réalistes sur le dol général 21
Paragraphe 2 : Les théories classiques sur le dol général 23
Section 2 : Une analyse du dol spécial 25
Paragraphe 1 : Le dol simple et aggravé 26
Paragraphe 2 : Le dol concernant l’intensité de volonté 27
Paragraphe 3 : Le dol concernant le résultat 28
Partie 2 : La faute non intentionnelle : Un facteur de dépénalisation modérée 31
Chapitre 1 : Le concept et la structure de la faute non intentionnelle 33
Section 1 : La notion de la faute non intentionnelle 33
Paragraphe 1 : Définition de la faute non intentionnelle 33
Paragraphe 2 : L’évolution de la faute non intentionnelle 35
Paragraphe 3 : Le contenu de la faute non intentionnelle 37
Section 2 : La structure de la faute non intentionnelle 39
Paragraphe 1 : Les fautes simples 39
Paragraphe 2 : Les fautes qualifiées 44

69
Paragraphe3 : L’appréciation de la faute non intentionnelle par le juge pénal 50
Chapitre 2 : La faute quasi-délictuelle et la faute contraventionnelle 52
Section1 : La faute quasi-délictuelle 52
Paragraphe 1 : Le principe d’identité de la faute civile et la faute pénale 53
Paragraphe 2 : L’application de ce principe 54
Section 2 : La faute contraventionnelle 56
Paragraphe1 : La notion et le domaine de la faute contraventionnelle 57
Paragraphe 2 : L’élément volonté et l’élément fautif dans les faits contraventionnels 60
Conclusion 63
Bibliographie 65
Table des matières 70

70
71

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