Le royaume d’Aerenwe

Rapport de Cole Alwier
L’accueil dans les docks
« Désolé de devoir vous rendre compte dans de
telles circonstances, dame Arielle. Je suppose que
lorsque vous êtes revenue à Calrie, vous espériez
trouver Liliene Swordwraith, votre mère adoptive,
encore vivante… Et un royaume fier et uni,
attendant que vous le guidiez à travers les dangers.
Hélas ! La monarchie est victime des pires
manipulations. De puissants régents tirent les
ficelles des complots sur Aerenwe.
Mais prenez ma main. Descendons sur le quai.
Votre périple sur le Cheval d’Ecume touche à sa
fin.
Des complots, disais-je ? Oui. Pour l’heure,
l’ennemi est à l’intérieur. De tout le pays, seule la
province de Calrie répond à votre autorité directe.
Le reste du territoire est manipulé par des agents
de Thalien, votre propre frère - et nous supposons
qu’il a des appuis avec l’étranger. Au sud, les
Elfes d’Erebannien ont tourné l’agitation
conséquente à la disparition de l’ancienne
souveraine à leur avantage, pour reconquérir leurs
terres.
L’anarchie vous a forcé à rentrer au pays sous le
couvert des étoiles… Je pense que cette première
nuit en tant que reine d’Aerenwe vous laissera un
souvenir impérissable. Tirez-en la conclusion
amère : en Anuire, une mère ne peut faire
confiance à personne. Pas même à son propre fils.
Pas lorsqu’on est reine…
Quittons le port, vous serez plus en sécurité au
château de Caer Callin. Les feux qui embrasent
l’horizon ne viennent pas de la capitale ; c’est le
faubourg de Danig qui est la proie des flammes, à
l’extérieur des murailles. Des agents de Thalien
ont tenté de s’infiltrer en se faisant passer pour des
marchands, mais la garde royale les a démasqués.
Une partie de la milice lutte contre les flammes, le
reste met en déroute les guerriers déguisés.
Le danger est partout. Les hommes et les femmes
en qui vous pouvez avoir toute confiance sont peu
nombreux ; l’intrigue, l’espionnage et les
infiltrations ont amené des agents ennemis à tous
les niveaux de la hiérarchie du royaume. Beaucoup
se sont dévoilés au moment opportun, lorsque
Liliene disparut, pour joindre la fronde de
Thalien ; mais il doit en rester pour attendre
encore avant de se révéler.
Ne vous dévoilez pas avant que nous ne soyons
arrivé dans la cour intérieure de la forteresse.
Pendant que ce carrosse discret vous y amène,
jetez un œil sur mon rapport pour rafraîchir votre
mémoire sur les événements récents. J’essayerai de
rejoindre Caer Callin par mes propres moyens,
plus tard. Pour l’instant, je dois patrouiller dans les
rues pour tenter de retrouver les agents de Thalien
qui auraient pu parvenir à franchir les herses.
Votre intuition et votre volonté pourront nous tirer
de ce mauvais pas. Vos partisans caressent cet
espoir. Nous sommes peu nombreux, mais fidèles
et loyaux aux dernières volontés de la bonne reine,
dont nous avons eu connaissance avant que
Thalien ne les falsifie, avant de les présenter à la
population. J’espère vous revoir au château… »
L’étrange disparition de Liliene
Swordwraith
Liliene Swordwraith était depuis longtemps
affectée par un mal étrange. Magie, disait-on. Les
guérisseurs royaux semblaient incapables de
mettre fin à sa lassitude et à sa fatigue sans cesse
croissante. Liliene était âgée, mais son mal était
sans commune mesure avec une maladie naturelle
- il empirait régulièrement, plongeant la
souveraine dans un sommeil surnaturellement
long. Les traits tirés, le teint pâle, la reine
d’Aerenwe ne sortait plus guère du palais ; mais
elle ne se laissait pas gagner par le désespoir, et
ses yeux bleu acier pétillaient toujours
d’intelligence. Elle se savait condamnée, mais
semblait en savoir plus que ses médecins sur
l’origine de son étrange maladie - comme si elle
savait quelle était sa provenance, comme si elle
l’avait toujours attendu.
Personne ne pouvait s’attendre à ce qui arriva la
nuit du 2 Haelynir 553 MR, cependant. Une
femme de chambre qui passait dans le couloir,
après la tombée de la nuit, près de la chambre de
la reine, entendit des bruits étranges et aperçut une
lumière bleutée sous le seuil de la porte. La
servante courut avertir la garde - les soldats eurent
tôt fait d’enfoncer la porte des appartements
royaux avec leurs hallebardes, prêt à en découdre
avec tout ce qu’ils pourraient trouver de l’autre
côté.
Lorsqu’ils entrèrent dans la chambre, il y régnait
un silence surnaturel. L’atmosphère était
étrangement oppressante, et les guerriers durent se
faire violence pour ne pas paniquer. Liliene

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Le royaume d’Aerenwe
Swordwraith avait disparu ; il n’y avait aucune
trace de lutte, aucune trace de sang, rien. Portes et
fenêtres étaient fermées. Son lit n’était même pas
défait. Mais ce qui intrigua le plus les gardes, fut
cette étrange pellicule de cristal bleuté, légèrement
luminescente, qui recouvrait le sol et le mobilier -
d’où provenait cette poussière ? Etait-ce là tout ce
qui restait de la reine ?
Le Haut Mage Aelies lui-même fut dépêché par le
grand chambellan, Saerik Bhannor, pour tenter de
percer le mystère. Rien n’y fit. Il confirma que la
poudre de cristal était éminemment magique, ce
dont tout le monde se doutait, et qu’une puissante
magie englobait la pièce - mais se dissipait
rapidement. Les divinations de Maire Cwillmie se
révélèrent également infructueuses : elle annonça
qu’un voile de pouvoir obscurcissait ses visions
aux alentours du palais.
Certains des nobles les plus puissants, résidents
dans les provinces éloignées, sentirent la
disparition du lien reliant la terre d’Aerenwe à sa
reine, et dépêchèrent des émissaires au palais de
Calrie dans les délais les plus brefs.
L’émergence du félon
L’enquête pour tenter de découvrir le corps de la
reine, ou au moins quelques explications sur sa
disparition, ne donna rien. Officiellement, la reine
mourut de maladie, et son corps était trop pénible
à voir pour être montré à la population lors du
cortège funèbre ; un enterrement par contumace
eut lieu, et les choses en restèrent là. Les obsèques
eurent lieu deux jours après la disparition
seulement ; le grand chambellan ne souhaitait pas
que la situation dégénère avec les requêtes un peu
trop pressantes des nobles et l’entourage indiscret
des pages et des serviteurs du palais.
Thalien Aeren fut le premier prévenu, car il
revenait de Roesone à ce moment, par le plus
grand des hasards, et avait décidé de faire passage
à Calrie. Il fut reconnu par les gardes de la Porte
de l’Ecorce, et promptement conduit au palais.
Saerik Bhannor espérait encore secrètement que la
reine reviendrait d’une façon ou d’une autre ; il ne
pouvait se résoudre à la croire réellement disparue,
et était, il faut l’avouer, un peu dépassé par les
événements.
Thalien Aeren demanda à examiner la chambre de
la souveraine, seul, pour mener sa propre enquête ;
le chef de la garde du palais, Sire Moskal,
craignant un danger, refusa de le laisser pénétrer
dans les appartements royaux sans une escorte. Il
pensait de toutes façons que le jeune homme ne
trouverait rien de plus malgré toute sa
détermination. Deux gardes l’accompagnèrent.
Mais le fils de Liliene n’allait pas dans la chambre
royale pour enquêter. Pressant le pas, il sema ses
gardes ; mais ceux-ci le rattrapèrent juste à temps
pour le surprendre. Il était allé directement vers la
cheminée : au moment où les gardes pénétrèrent
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dans la pièce, une pierre de l’âtre gisait par terre,
descellée, et Thalien avait dans sa main un rouleau
de parchemin, probablement récupéré dans la
cache secrète. Le feuillet de vélin était porteur du
Sceau Royal d’Aerenwe. Il le rangea prestement
dans son pourpoint et congédia les gardes avec un
rugissement de colère. Il ne montra le contenu du
parchemin à personne et partit aussi vite qu’il était
venu, laissant sur place les gardes interloqués par
sa conduite étrange. Thalien quitta précipitamment
Caer Callin - certains auraient utilisé le terme
“fuite” pour décrire son départ - et son carrosse
rejoint Château Halried, le manoir de son ami
Whilelm Halried, dans la province du même nom.
Le lendemain, une campagne d’agitation
soigneusement orchestrée commença à monter
dans toutes les provinces du royaume : Thalien
Aeren était l’héritier légitime de la reine disparue,
et possédait les dernières volontés de la régente
comme preuve de ses dires. Les patriarches des
familles nobles des provinces de l’ouest du
royaume s’agenouillèrent devant le nouveau roi,
avec une ferveur d’une intensité suspecte.
Saerik Bhannor, le grand chambellan, lança Cole
et Cale Alwier, les deux lieutenants de Dame
Liliene, à travers Anuire pour trouver la sœur
jumelle de Thalien. Le manœuvre de Thalien ne
l’abusa pas un instant - s’il était vraiment l’héritier
de la régente, il ne se serait pas enfui sans montrer
à personne ce qu’il y avait sur le parchemin, en
supposant que ce feuillet contenait bien les
dernières volontés de Liliene Swordwraith. Il y
avait une autre particularité troublante dans cette
affaire : le lien entre Thalien et les holdings et les
provinces d’Aerenwe ne se fit pas correctement.
Arielle Aeren a été finalement ramenée à Calrie,
mais les forces de Thalien ont déjà commencé à
tourner le pays contre la nouvelle reine légitime -
seule la province de Calrie reste loyale au grand
chambellan, et l’agitation du peuple manipulé
menace plus que jamais de dégénérer en guerre
civile.
La rébellion d’Erebannien
Profitant de l’agitation ambiante, les populations
de l’ancien royaume elfique d’Erebannien tentent
de faire sécession d’Aerenwe. Ils pointent du doigt
les divisions entre les humains comme une preuve
de leur incapacité à gouverner. Les bûcherons
d’Erebannien ont été massacrés dans la plus
grande sauvagerie, et les fermes voisines de la
forêt ont été pillées et brûlées jusqu’aux
fondations. Les Elfes tentent de restaurer la
grandeur passée du royaume forestier en
commençant par passer tous les humains au fil de
l’épée. Le Haut Mage Aelies clame avec la plus
ferme conviction qu’il n’est pour rien dans ces
troubles et qu’il ne souhaite pas que la guerre
civile déborde sur la forêt, mais il a jusqu’ici
Le royaume d’Aerenwe
refusé de prendre les armes pour un camp ou
l’autre.
Le maître de l’insurrection n’est pas le prince
Corristen d’Erebannien comme la rumeur l’a un
instant désigné ; le prince elfique disparut peu
après la bataille du Mont Deismaar, des mains du
Diabolyk. Les agents de la couronne pensent qu’il
s’agit plutôt de Phasiphiel Shywnnd (M½E ; R4 ;
Br, minor, 23). Le Demi-Elfe reste introuvable,
caché au plus profond de la forêt. Les soldats du
royaume n’ont pas pu traquer les rebelles dans la
mesure où Thalien représente une menace bien
plus grande à l’heure actuelle. Le chef des
patrouilles, Quorus Trievin (MA ; F4 ; An, tainted,
8), est tombé aux mains des insurgés à la suite
d’une embuscade. On ne sait pas s’il a été exécuté
ou s’il est gardé comme monnaie d’échange.
Les Nobles
Les Nobles d’Aerenwe sont divisés. Ceux de
l’ouest ont ouvertement pris position en faveur de
Thalien, jurant allégeance à celui qu’ils
considèrent comme le nouveau roi légitime
d’Aerenwe. Que cette ferveur soit sincère, ou juste
la partie visible d’un odieux complot, le résultat
est le même : les provinces de l’ouest, Halried et
Dhoenel, ne répondent pratiquement plus aux
requêtes de la couronne de Calrie. La population
commence même à se détourner de la capitale,
malgré les efforts désespérés du Grand
Chambellan de sauvegarder l’intégrité du royaume
en attendant le retour de la fille de Liliene
Swordwraith, qu’il estime la seule héritière
légitime. Thalien a promis aux nobles qui le
soutenaient des terres à Calrie et en Erebannien
dès que la révolte serait matée ; la “révolte” à
laquelle il fait référence est évidemment l’unité
légitime du peuple derrière l’héritière de plein
droit, Arielle Aeren.
Les nobles de Calrie ne sont pas plus fidèles à la
couronne ; mais par chance, ils ont accepté
d’attendre le retour d'Arielle avant de prendre
position. Ils ont foi en la parole du Grand
Chambellan, et les rumeurs lancées par les gardes
du palais qui ont assisté à l’étrange comportement
de Thalien ont grandement contribué à leur attente.
Ils prendront une attitude d’observation et de
jugement envers les premiers pas de la nouvelle
reine. Ils n’ont pas une grande conviction dans les
dernières volontés de Liliene Swordwraith, quelles
qu'elles puissent être ; avec pragmatisme, ils
estiment que dans une confusion comme celle qui
règne actuellement, personne ne pourra vraiment
désigner qui mérite la couronne, et sont prêt à
soutenir celui des deux prétendants qui se montrera
le plus capable. Ils réservent leur soutien à celui
des jumeaux qui remportera la lutte.
Au sud, les nobles ne sont plus là pour prendre
position - ils ont été massacrés par des
détachements d’Elfes, agissant par surprise et avec
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une concertation qui en dit long sur leur degré
d’organisation. La barbarie et la confusion règnent.
La population humaine est malmenée par des
Elfes, et l’ombre menaçante de la gheallie Sidhe
plane sur les bois.
Les royaumes voisins
Les pays voisins ont été pris par surprise par les
événements qui secouent Aerenwe - du moins,
telle est leur position officielle. Osoerde est en
proie à sa propre guerre civile depuis bientôt trois
ans ; la population au nord du Callin, le fleuve
frontière, fait preuve d’humour et de compassion
envers la situation que traverse le pays, comme
s’ils revivaient les funestes événements qui ont
marqués l’histoire récente d’Osoerde. Néanmoins,
ils ont leurs propres adversaires à combattre et
n’éprouvent ni pitié ni ambition pour Aerenwe. Si
la situation se stabilise là-bas, la situation pourrait
changer.
L’attitude de Roesone est distante. Marlae
Roesone prétend n’avoir aucun rapport avec les
troubles que traverse Aerenwe, mais on raconte
qu’elle se réjouit des troubles que traverse son
voisin. Cela sécurise sa frontière est, et permet
d’assigner davantage de troupes en garnison contre
Ghoere au nord et l'alliance du cercle d'argent à
l'ouest. La proximité des provinces rebelles avec la
frontière de Roesone est toutefois troublante. Des
observateurs loyaux à Arielle font étant
d’abondants convois à travers la frontière. Il
semble que des agents en Roesone procurent armes
et nourritures aux rebelles inféodés à Thalien. Il
faut juste savoir si ces échanges se font avec l’aval
de la baronne de Roesone, et si oui, quelle est sa
part de responsabilité dans les troubles du pays. Ce
n’est un secret pour personne que Marlae Roesone
ambitionne de capturer les provinces de l’ouest
d’Aerenwe ; seule la crainte qu’elle éprouve
envers le Haut Mage Aelies retarde ses plans
d’invasion.
Le royaume insulaire de Nesirian, fondé il y a
moins d’un an par Maire Cwillmie, est un allié
sincère d’Aerenwe ; les deux pays ont signé un
accord d’entraide, et la Gardienne des Eaux a
immédiatement rejoint la cour de Calrie lorsque
les premiers troubles sont apparus, pour offrir
spontanément son aide et son assistance.
Malheureusement, Nesirian n’est pas très puissant
militairement et n’a certainement pas les moyens
d’aider à une reconquête des terres d'Arielle
Aeren. Il y a sans doute de meilleurs moyens
d’utiliser la puissance des temples de Nesirie
installés sur le territoire d’Aerenwe.
La situation du pays
Aerenwe traverse les heures les plus sombres de
son histoire. La lutte entre les prétendants au trône
sera intense. Beaucoup craignent qu’elle ne soit
Le royaume d’Aerenwe
aussi violente, et ravage les provinces du pays dans
une guerre fratricide. Quels que soient les moyens
employés, la lutte devra être brève : si elle dure,
les voisins du royaume et les autres puissances
d’Anuire commenceront à tourner leurs yeux
avides sur le royaume d’Aerenwe, et la couronne
n’a pas les ressources suffisantes pour juguler les
troubles internes tout en protégeant le royaume de
l’avidité de ses voisins. Arielle est reine
d’Aerenwe ; pour l’heure, ce titre n’est guère que
nominal, et c’est à la force du poignet qu’elle
gagnera sa régence.
Histoire d’Aerenwe
Aerenwe est un domaine très ancien, un des tout
premiers d’Anuire. En fait, l’histoire du pays
remonte à une époque antérieure à l’arrivée de
l’homme sur Cerilia : la forêt d’Erebannien, au
sud, est restée pendant des siècles une contrée
elfique unie.
Tout régent à la tête du domaine se doit de
connaître son histoire, pour comprendre la vie des
habitants, le tracé des frontières, et comment le
pays, à travers les crises que l’histoire lui a
réservées, a su vaincre et se développer pour
arriver à ce qu’il est aujourd’hui.
Aerenwe, plus que tout autre pays d’Anuire, est
une terre chargée de légendes. Mis à part
l’Erebannien, bois sacré protégé autant que
possible des méfaits de la guerre, la terre du pays
fut souvent tachée de sang, le sang de vaillants
soldats qui donnèrent jusqu’à leur vie pour
défendre ce pays qu’ils aimaient.
Fondations et premières luttes
Les Sidhelien d’Erebannien furent les premiers de
leur race à rencontrer les humains. En ce temps-là,
les peuples qui fuyaient Aduria pour atteindre
Cerilia arrivaient par un isthme rocheux qui reliait
les deux continents ; bien que situé plus à l’ouest,
ce pont de terre naturel arrivait à la lisière d’une
forêt alors beaucoup plus étendue.
En un demi-siècle seulement, les humains
colonisèrent la plus grande partie d’Anuire. Bien
que peu nombreuses, les tribus se dispersèrent pour
ne pas interférer les unes avec les autres, et pour
disposer du maximum d’espace pour leur
croissance future. Au début, les Elfes accueillirent
les humains comme des libérateurs et des alliés
précieux dans leur lutte contre les humanoïdes de
Cerilia. Les Gobelins, les Trolls et les Orogs
étaient ennemis des deux peuples. Le Noble
Peuple fournit à ces premiers humains une aide
amicale et bienveillante.
Rapidement cependant, les tensions entre les
peuples se mirent à croître lorsque les humains et
les Elfes se mirent à rentrer en compétition pour le
contrôle des ressources d’Anuire. La population
grandissante des humains ne pouvait survivre en
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appliquant le mode de vie elfique. Ce dernier
consistait essentiellement, au nom du respect de la
terre, à ne pas la cultiver. Les frictions apparurent
alors que les humains se détournèrent des Lois
elfiques et des affrontements sporadiques
commencèrent à éclater entre des tribus humaines
et des royaumes forestiers.
Les affrontements dégénérèrent, donnèrent lieu à
la gheallie Sidhe - la Grande Chasse des Elfes, un
massacre systématique des humains - et se
terminèrent dans le paroxysme de la bataille du
Mont Deismaar et l’effondrement de la plupart des
royaumes Elfiques. Ceci, comme on dit, appartient
à l’histoire.
Peu après la Bataille du Mont Deismaar, les
Porteurs de Sang émergèrent des ruines dévastées
de nombreuses civilisations. Roele, le plus
puissant d’entre eux, fonda l’Empire d’Anuire. Il y
consacra sa vie. Il mena sous sa bannière les
différents peuples de Cerilia. Certains furent matés
par la force; d'autres furent gagnés à la cause de
l’unité avec des dons et des gestes diplomatiques.
Le seul échec de Roele fut pour les Vos vivant à
l’est de Cerilia. Ces barbares préférèrent encore
s’allier aux Gobelins, aux Orogs et même aux
Awnshegliens - les horreurs torturées par le Sang
d’Azrai - plutôt que d’intégrer la lumière de
l’Empire d’Anuire. Cet échec laissa une profonde
trace dans le coeur de Roele, et il ne fut plus
jamais le même.
Pendant les mille ans de son existence, l’Empire
fonctionna avec une organisation pyramidale. Au
plus bas niveau se trouvaient des Comtes qui
contrôlaient une seule province. Au-dessus, un
Baron contrôlait trois ou quatre provinces en étant
le suzerain des comtes locaux. Enfin, un Duc
dominait un duché d’une dizaine de provinces. En
fait, les terres d’un Duc étaient composées de deux
ou trois baronnies en plus de ses terres propres.
C’était là l’organisation générale de l’Empire dans
ses grandes lignes. La réalité du terrain rendait
souvent les choses bien différentes. Par exemple,
en Khinasi, à l’est, des cités-états obtinrent de
l’Empereur des mesures d’indépendance relative
grâce aux habiles négociations d’un puissant
Mage, el-Arrasi.
A cette époque Anuire était divisé en douze duchés
mythiques dont onze existent encore aujourd’hui.
Deux de ces duchés - Avanil et Boeruine - étaient
dirigés par des Princes et non des Ducs et sont
encore aujourd’hui les plus puissants pays
d’Anuire. Aerenwe était également un duché.
Sa superficie et sa répartition d’alors était très
différente de ce qu’elle est aujourd’hui. Si le pays
comportait bien les trois provinces de plaines de
Calrie, Dhoenel et Halried, la forêt d’Erebannien
était à cette époque un royaume elfique défendant
un isolement farouche d’avec les humains.
Aerenwe comportait également d’autres
provinces : Edlin, Duerlin, Fairfield et Bellam,
Le royaume d’Aerenwe
aujourd’hui possédées par Roesone. Cette dernière
province changea de mains de nombreuses fois aux
cours des multiples guerres qui émaillèrent les
relations entre Aerenwe et les pays plus à l’ouest.
Pendant des siècles, Aerenwe fut un des plus
puissants duchés. Il rivalisait avec Diemed et
même avec Alamie, le plus vaste de tous. Tout
ceci changea avec la mort de Michael Roele, le
dernier Empereur de la dynastie des Roele. Sa
disparition marqua la fin de l’Empire et le début
d’une époque de guerre de succession qui ne s’est
toujours pas achevée.
La guerre d’Erebannien
L’Erebannien était une nation elfique développée
mais malheureusement très hostile aux humains.
Les Sidhelien d’Erebannien furent les premiers à
subir les ravages naturels qui suivirent l’arrivée
des humains; ils en gardèrent un profond
ressentiment et furent de farouches partisans de
l’éradication radicale - la gheallie Sidhe, comme
ils le dirent dans leur langue.
Les frontières de l’immense forêt délimitaient la
limite entre humains et Elfes. Les humains qui y
pénétraient étaient impitoyablement abattus. Les
Elfes qui surgissaient des frondaisons forestières
pour incendier des villages et piller des récoltes
étaient parfois interceptés par de puissantes
garnisons humaines, et tués jusqu’au dernier.
Des tactiques furent mises au point pour se
débarrasser des Elfes; mais de puissants
enchantements défendaient les bois, et le feu ou
l’empoisonnement des arbres ne donnèrent rien.
Cette situation détestable de raids,
d’escarmouches, de vendettas et d’expéditions
punitives aurait pu durer éternellement, mais la
mort de Michael Roele marqua le tournant du
destin pour les humains d’Aerenwe et les Elfes
d’Erebannien.
Les Roele n’étaient pas de fervents défenseurs des
Elfes, loin de là. Cependant, à cause des bonnes
relations qu’il tenait à entretenir avec Sielwode et
Thuarievel, il avait toujours interdit aux Ducs
successifs du domaine de régler la question Elfique
de l’Erebannien une bonne fois pour toutes. Bien
sûr, personne ne fut jamais mis au courant des
raisons profondes de cette interdiction.
Certains avancèrent que le Collège de Magie de la
Cité d’Anuire tirait une grande force de la
mebhaighl - le fluide magique - qui imprégnait les
bois. D’autres affirmaient que l’Erebannien cachait
un terrible secret que les Elfes devaient protéger à
tous prix. D’autres enfin répandaient des rumeurs
comme quoi cette interdiction était formulée dans
le seul but de gêner le Duc d’Aerenwe, qui n’avait
pas faveur à la Cour Impériale.
La désagrégation de l’Empire d’Anuire donna
l’occasion au Duc Ottilheim d’Aerenwe de lever
une puissante armée pour mater les Elfes de la
forêt. Le Duc pensait sincèrement que les
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généalogistes impériaux trouveraient rapidement
un successeur à l’Empereur. Après tout, si Michael
Roele n’avait pas d’enfants, il avait quatre soeurs.
Et son père Hadrian, fils de Shaene II, en avait
sept ! Le maître d’Aerenwe d’alors en avait conclu
que la période de trouble était l’occasion ou jamais
d’outrepasser des édits impériaux décidément bien
gênants. De plus, la guerre civile se généralisait
dans la plus grande confusion, tous les nobles
essayant à leur façon de récupérer un peu de
puissance aux dépens de leurs voisins, juste avant
l’avènement d’un nouvel Empereur qui marquerait
une trêve. L’arrivée inopinée d'Hialmair poussa
Ottilheim à prendre sa décision. Hialmair était un
bâtard du Prince Corristen d’Erebannien ; sachant
que sa naissance hors mariage le couperait à
jamais du trône, il vint à Calrie pour offrir ses
services au roi. Il préférait régner en tant que noble
d’un pays humain à la cour de Calrie plutôt que de
passer une éternité misérable à vivre en pensant à
ce qu’il aurait pu devenir si le destin lui avait
donné le jour autrement.
Une puissante force de cinq mille hommes fut
assemblée aux pieds de Château Calrie. Une armée
colossale qui marcha sur le pays Elfique
d’Erebannien, la forêt habituellement menaçante
s’ouvrant devant Hialmair. Balayant toute
opposition comme le vent disperse les fétus de
paille, la forêt fut rapidement contrôlée. Seuls
quelques petits îlots de résistance Elfiques
refusaient de s’avouer vaincus et livraient une
guérilla farouche contre l’envahisseur. Donnant
libre court à leur vengeance contre ces Elfes qui
avaient massacré leurs familles, les soldats
humains firent preuve de la plus grande sauvagerie
envers les Elfes qu’ils trouvaient. Hommes,
femmes, enfants étaient torturés de la façon la plus
abjecte, devant leur famille, avant d’être passés au
fil de l’épée. La dépouille du Prince Corristen ne
fut jamais retrouvée.
Le pays d’Erebannien n’était plus. La forêt était
désormais une partie d’Aerenwe. Ce fut le seul
conflit à jamais avoir lieu dans ces bois. Chaque
soldat, chaque artisan, chaque habitant du pays
poussa un immense soupir de soulagement alors
que la nouvelle de la victoire se répandait.
C’est le moment que choisit Diemed pour frapper.
L’assaut de Diemed
Diemed, en ce temps-là, était un des plus puissants
duchés d’Anuire. Le pays de Roesone n’existait
pas; ses provinces étaient réparties sous les
souverainetés de Diemed et d’Aerenwe. Le Baron
Diem (le vassal qui avait réussi à renverser le Duc
en place à la faveur de la guerre civile) avait pensé
qu’Aerenwe serait une proie facile. Il jeta des
hordes de paysans, de cavalerie légère et de
mercenaires sur les provinces de l’ouest.
Ottilheim réagit rapidement. Les armées ducales
sortirent de la forêt pour repousser l’envahisseur.
Le royaume d’Aerenwe
Elles étaient diminuées en force, mais aguerries
par une lutte sauvage, et les troupes étaient des
vétérans.
Ce fut lorsque les armées se rencontrèrent en Edlin
que le désastre frappa. Les Elfes survivants
déchaînèrent le pouvoir de leur magie contre les
humains. Le Baron Diem, avec une grande
habileté, avait passé un accord avec la population
meurtrie d’Erebannien pour dévaster un maximum
de troupes ennemies. Les Mages Elfes, alors au
faîte de leur puissance, accueillir les soldats de
Diemed comme des libérateurs et lâchèrent des
sortilèges interdits sur les guerriers d’Aerenwe.
Des langues de feu jaillirent de terre. Des morts-
vivants surgirent pour lutter avec leurs épées
rouillées. Des créatures des ténèbres furent
invoquées du Monde des Ombres à l’aide de pactes
mystérieux pour semer la mort et la terreur.
Les Elfes, dans leur désir de vengeance, avaient
outrepassé tous les interdits que leur race défendait
depuis des millénaires. Ils avaient cédé à la haine
la plus pure et ne cherchaient que la destruction
aveugle.
L’armée d’Aerenwe subit le choc de plein fouet,
mais tint bon. Il en fallait plus pour glacer le coeur
d’un soldat qui défendait son pays.
Malgré tout, les pertes subies par les sortilèges
furent telles que Diemed obtint un avantage
numérique très net. Les forces du Duc se replièrent
pour panser leurs plaies, laissant le contrôle du
terrain à Diemed. Durant ce jour de malheur,
Aerenwe perdit les provinces d’Edlin, Duerlin, et
Fairfield.
Bien sur, le Baron Diem n’avait pas fait la guerre
pour venir secourir les Elfes; il s’était juste
contenté de faire miroiter de belles promesses pour
obtenir un soutien à peu de frais. Lorsque la
bataille fut terminée, il convoqua les derniers
nobles et mages Elfiques dans sa tente d’état-
major pour “décider de la suite des opérations pour
la reconquête de la forêt”. Pas un Elfe n’en
ressortit vivant. C’est dans le sang misérable d’une
trahison que s’acheva l’histoire du pays
d’Erebannien, le premier royaume Elfique
rencontré par l’homme. Hialmair fut retrouvé mort
empoisonné à la cour de Calrie. Personne n’arriva
à savoir s’il s’agissait d’un suicide ou d’un
meurtre.
Le chaos
Diemed aussi fut très affecté par la guerre, et ne
poussa pas plus loin son invasion. Pendant les
siècles qui suivirent, les relations entre les pays se
détendirent. Les successeurs du Baron ne furent
pas aussi agressifs et maléfiques, et grâce à
quelques dons de Diemed, et un mariage entre les
deux familles dans la Cité Libre d’Ilien, les
querelles s’apaisèrent.
~6~
Aerenwe avait perdu trois provinces contre
Diemed, certes, mais d’un autre côté il en avait
gagné cinq avec la conquête de la forêt Elfique.
Ce fut une époque de grand développement pour
Aerenwe. Lassés de la guerre civile, des Anuiréens
vinrent par familles entières s’installer dans le
havre de paix que représentait Aerenwe dans la
tourmente des conflits qui embrasaient l’ancien
Empire. Nombre de ces colons venaient de l’ouest,
des terres perdues dans la guerre d’avec Diemed.
Diemed passa par des temps troublés. La dynastie
des Barons qui se succédèrent à la tête du domaine
fut faible et incapable. Tantôt pusillanimes, tantôt
aveuglés et inflexibles, les dirigeants de Diemed
ne fructifièrent pas leur héritage aussi bien que les
Rois et Reines d’Aerenwe.
En 299 MR, Endier déclara son indépendance au
nez et à la barbe du baron Naele Diem, une pâle
figure manipulée comme une marionnette par les
guildes installées sur ses terres. Simultanément,
peut-être par hasard, ou peut-être en raison de plus
sombres desseins, une gigantesque horde de
Gobelins jaillit de Spiderfell et dévasta l’est de
Diemed. Cependant, aucune incursion n’eut lieu
sur les terres d’Aerenwe - les Gobelins semblèrent
avoir reçu des ordres a ce sujet, et les respecter à la
lettre.
A peine six ans plus tard, le régent de la Cité
d’Ilien déclara sa ville Cité Libre, et proclama
l’indépendance de sa riche province. Diemed, trop
occupé à panser ses plaies, laissa la mutinerie
suivre son cours, mais la situation se dégrada
rapidement.
Les provinces de l’est de Diemed - celles-là même
qui avaient été prises à Aerenwe - sombrèrent dans
la barbarie. La faiblesse du pouvoir central en
Aerele laissa libre cours aux bandes de pillards de
caravanes, et aux tribus de Gnolls et de Gobelins
qui purent piller en toute impunité.
Aerenwe fut face à des troubles sérieux, car les
malandrins ne respectaient pas les frontières. Des
hordes de bandits, vives comme l’éclair,
franchissaient la limite entre les deux pays,
dévastaient les fermes et s’emparaient des récoltes,
avant de repasser en territoire de Diemed lorsque
les forces militaires d’Aerenwe finissaient enfin
par arriver. Insaisissables, les pillards - humains et
Gnolls - avaient un effet déplorable sur le moral de
la population, cette dernière quittant massivement
les provinces frontalières pour s’installer plus au
coeur du pays.
C’est à cette époque que le Haut Mage Aelies
émergea sur le devant de la scène. Le Mage
contrôlait la magie de l’Erebannien depuis des
décennies, mais ce fut à ce moment qu’il choisit de
poser ses conditions - tout bandit, tout pillard qui
s’attaquerait à l’Erebannien serait tué.
Simplement. C’était la seule clause de son
ultimatum ; le Haut Mage n'avait jamais été avare
de paroles, mais la simplicité de sa déclaration ne
Le royaume d’Aerenwe
laissait pas de marge à l’interprétation. Les
brigands qui passèrent outre l’avertissement ne
ressortirent jamais de la forêt. Les autres
comprirent rapidement que les paroles du Haut
Mage n’étaient pas pour plaisanter, et évitèrent de
le confronter.
En 429 MR, Ghoere, face à d’importantes
difficultés financières, décida de s’emparer de ces
territoires incontrôlés au sud - et de davantage, si
possible. Commandée par Daelan Thurienne, la
force militaire s’empara de Bellam dans une
attaque surprise, et poursuivi dans les territoires de
l’est de Diemed dans un mouvement de grande
ampleur destiné à aboutir en Ilien.
Les forces d’Aerenwe combattirent vaillamment et
repoussèrent les envahisseurs de Ghoere. Six mille
hommes aux couleurs d’Aerenwe tombèrent au
champ d’honneur en défendant la province, et la
puissante forteresse qui la défendait fut rasée. Les
pertes de Ghoere furent aussi terribles. La victoire
ne suffit pas à détruire l’armée ennemie, mais
repoussa l’envahisseur dans les provinces sauvages
de Diemed. Les restes des unités furent anéantit
par la magie de la sorcière d’Ilien d’alors, Axlea
Aglondier, aux pieds de la Cité Libre.
La province de Bellam avait été sauvée, mais à
quel prix ! L’armée du royaume n’était plus que
l’ombre d’elle-même, et les caisses du royaume
étaient vides. Les provinces avaient été saignées à
blanc de leurs forces vives pour l’effort de guerre.
Le tribut en homme que le conflit avait exigé
laisserait des traces pendant des décennies.
La guerre d’indépendance de Roesone
Après cette guerre, Diemed et Aerenwe firent de
gros efforts pour reconstruire leurs pays. Des
accords de paix et d’entraide furent signés. Un des
principaux points de ces traités concerna la
stabilisation des frontières et la pacification des
territoires chaotiques.
Vers 470 MR, une opération militaire conjointe
visa à briser une bonne fois pour toute la puissance
des Rois brigands qui s’étaient arrogés les
provinces d’Edlin, Fairfield, Duerlin, et quelques
autres. Diemed envoya une puissante force armée
pour mater les rebelles. Aerenwe, de son côté,
donna une contribution plus modeste de cavaliers.
L’armée, dirigée par Daen Roesone, vassal du
Baron et stratège prometteur, n’eut pas trop de mal
à éradiquer les hordes désorganisées qui avaient
fait régner la terreur sur le territoire. La puissance
militaire sous ses ordres était sans proportion avec
ce que ses adversaires étaient en mesure
d’opposer. Daen Roesone gagna un prestige
énorme auprès de la population des provinces
libérées, mais également auprès des hommes qui
servirent sous ses ordres.
Daen Roesone avait su cacher les ténèbres qui
entouraient son coeur, car le stratège aguerri avait
~7~
de l’ambition. Il voulait régner comme Roi, et non
comme vassal. Utilisant ses troupes fanatisées et le
soutien des paysans locaux, Daen déclara
l’indépendance des territoires libérés, et proclama
qu’ils appartenaient à un nouveau pays du nom de
Roesone.
Cette guerre n’aurait pu concerner que Diemed si
le premier mouvement de Daen n’avait été de
s’attaquer aux troupes d’Aerenwe ! On raconte que
celui qui se fit appeler le Baron Noir craignait ces
soldats, car ils restaient loyaux a Aerenwe, et
constituaient la seule force militaire présente dans
la région avant la réplique de Diemed.
Les forces d’Aerenwe se replièrent dans la
province de Bellam, mais cela n’arrêta pas Daen
Roesone qui franchit allègrement la frontière à la
tête de ses troupes. Il s’empara de la province.
Le déroulement de la guerre qui s’ensuivit est
confus, et les sources sont parfois discordantes.
Diemed et Aerenwe luttèrent côte à côte pour faire
payer aux traîtres leur outrecuidance, mais
échouèrent face à la vindicte populaire qui
soutenait Daen Roesone, au terme d’un conflit qui
dura trois ans. La guerre d’indépendance mit les
trois pays - Aerenwe, Diemed, et dorénavant
Roesone - à genoux. Craignant une défaite
probable, Solienne III, Reine d’Aerenwe,
abandonna la province d’Abbatuor en échange de
la paix - en plus de Bellam, qui avait été capturée
au tout début. La reine d’alors avait préféré céder
un pan de l’Erebannien plutôt que de jouer la
survie même de son royaume.
Nombreux furent ceux qui doutèrent de la façon
dont Daen Roesone respecterait le traité de paix,
considérant la manoeuvre insidieuse qui lui permit
de se tailler son royaume. Pourtant, contre toute
attente, le Baron Noir n’eut qu’une parole. Il fut
même un bon dirigeant, rendant parfois la justice
avec une main un peu lourde, et ramena la
civilisation dans une terre abandonnée aux
brigands depuis des siècles.
Aerenwe, bon perdant, et incapable de prendre sa
revanche, fit de son mieux pour avoir de bonnes
relations avec le jeune royaume.
Fhaelan Aeren
En 526 MR, suite à un accident de chasse, le trône
échut au frère du Roi défunt. A trente-deux ans,
Fhaelan Aeren se retrouva à la tête d’un puissant
pays. Les nobles se méfièrent, cependant, car le
nouveau Roi était précédé d’une réputation qui
sentait le soufre. Ivre de pouvoir, égocentrique,
violent lorsque quelqu’un n’était pas de son avis,
et enfin paranoïaque, le Comte de Dhoenel était
autant que possible gardé loin de la Cour de
Calrie. En fait, on murmurait que le Comte était
mentalement dérangé et ce depuis sa naissance. Au
moins, lorsqu’il restait dans son manoir, il n’était
la cause d’aucun scandale et n’interférait pas avec
la bonne marche de l’état.
Le royaume d’Aerenwe
Aucun noble n’osa cependant s’opposer à la
nomination du nouveau Roi, car cela sous-
entendait qu’il aurait fallu prendre les armes.
Fhaelan pris donc ses fonctions un mois après la
mort de son frère. L’ensemble du pays retenait son
souffle en attendant de voir comment le souverain
orienterait la politique de la contrée, dans une
attention soutenue mêlée d’une certaine crainte.
Malheureusement, les premières décisions de
Fhaelan allèrent au-delà des prévisions les plus
pessimistes. Le Roi déclara immédiatement la Loi
martiale dans le royaume, pour “lutter contre les
espions et les ennemis du royaume à l’oeuvre à
l’intérieur des frontières”, comme purent le lire les
habitants du royaume sur les avis placardés dans
toutes les villes.
Des milices armées sillonnaient le royaume,
dispensant une justice rapide à ceux qui avaient le
malheur de leur déplaire. La corruption fit son
apparition et prit rapidement une grande ampleur,
alors que chaque petit chef militaire pouvait abuser
de son pouvoir sur sa juridiction.
La baisse des revenus de la couronne, suite à des
détournements de plus en plus importants, fit
réagir Fhaelan. Mais il préféra lever davantage
d’impôts pour compenser les pertes, plutôt que de
s’attaquer à la source du problème. Il faut dire
aussi que l’idée de la conquête avait germé dans
son esprit, et qu’il avait besoin d’une armée digne
de ce nom pour assouvir ses désirs guerriers.
Pressurée par des impôts iniques, mise à mal par
des soldats qui abusaient de leur autorité, la
population se détourna du Roi. Certains nobles
tentèrent de se rebeller, mais furent écrasés dans le
sang et leurs dépouilles exposées devant leurs
manoirs. D’autres nobles commencèrent à lutter
entre eux dans des vendettas publiques, utilisant
les troupes sous leurs ordres, et payant grassement
les officiels pour qu’ils ferment les yeux sur les
bandes armées qui s’affrontaient au coeur même
des villes.
Le pillage fit son apparition. Une partie de la
population décida de vivre clandestinement, et se
réfugia dans l’Erebannien pour y trouver de quoi
subsister, alors que leurs maisons et leurs terres
étaient confisquées par les hommes de main de
Fhaelan.
Liliene Swordwraith
La situation risquait de virer à la guerre civile
lorsque Liliene Swordwraith apparut. Née dans
une ville mineure du royaume, Liliene était une
noble de second plan. Elle ne disposait que de peu
de ressources, mais les utilisa exclusivement au
bénéfice de ses gens, et à la défense de leurs
maisons. Ce geste d’une grande générosité dans
cette période d’incertitude gagna le peuple de la
région à sa cause.
Les nobles furent divisés face à l’émergence de
cette championne qui pourrait s’opposer à la
~8~
poigne de fer de Fhaelan. Une partie d’entre eux
décida de la soutenir, mais ils furent plus
nombreux à ne pas prendre position, et à attendre
de voir comment Liliene se comporterait face aux
armées Royales.
La riposte de Calrie ne se fit guère attendre, et les
milices de tout le pays convergèrent vers
Khanesburg, où Liliene Swordwraith avait établi
son camp, et atteignirent leur objectif au
crépuscule. Alors que les commandants ennemis,
des lieutenants à la solde de Fhaelan, s’attendaient
à livrer bataille en arrivant, ils ne rencontrèrent
aucune opposition. Une fois en vue du campement,
Liliene s’avança vers eux, une femme face à une
armée. Arrivée à bonne distance, elle leur parla.
« Vous êtes venus de Calrie pour me tuer. Je ne
sais depuis combien de temps vous servez sous le
fou sanguinaire qui nous sert de Roi, mais je pense
qu’il vous reste une once de bon sens. Je respecte
ma parole - allons discuter de ma reddition sans
avoir à verser le sang, sur cette terre qui en a déjà
trop reçu.
- Où sont vos troupes ? demanda d’une forte voix
le chef d’une unité de chevaliers.
- Les vrais nobles n’ont pas besoin de gros bras
pour assurer leur légitimité. Je n’ai pas de soldats.
Les seules troupes des environs sont celles de
familles qui me soutiennent. Je leur ai demandé de
se replier pour notre entretien.
- C’est un piège ! Elle tente de nous duper ! hurla
l’aide de camp à son général.
- N’avez-vous donc point d’éclaireurs ? Ne vous
ont-ils rien dit ? De toutes les personnes à l’abri
dans ce camp, je suis la seule à porter une épée.
Mais il suffit. Si vous avez encore de l’honneur,
mettez pied à terre et venez négocier au nom de
votre sombre maître. »
Des murmures parcoururent les rangs de l’armée
qui faisait face à Liliene, alors que les soldats se
demandaient s’ils suivraient l’ordre de tuer des
innocents, dans l’hypothèse où on leur donnerait
cet ordre. Heureusement, les envoyés de Fhaelan
Aeren descendirent de cheval et rejoignirent
Liliene dans sa tente d’état-major. Là, les chefs
des familles nobles en guérilla les attendaient. La
toile de la tente se referma alors que les ténèbres
de la nuit envahissaient le ciel.
Personne ne sait exactement ce qui fut dit lors de
cette réunion. Une chose est certaine, les
lieutenants envoyés pour capturer Liliene se
rangèrent à son côté. Certains attribuèrent ce
revirement à Nesirie, qui, disent-ils, apparut en
personne pour sauver le pays du chaos, et fit de
Liliene sa championne. D’autres racontèrent que
ce furent de simples mots de bon sens de Liliene
qui amenèrent les généraux de Calrie à réfléchir
sur leur position. Des sages clamèrent que Liliene
avait des dons de sorcière, et qu’elle avait fait
appel à un être venu d’un autre monde pour
accomplir son destin, et qu’elle aurait à en payer le
Le royaume d’Aerenwe
prix un jour. D’autres enfin répandirent des
histoires comme quoi Aelies aurait été le
responsable. Soutenant la rébellion mais absent de
la réunion, il aurait lancé un sort de royaume de
Démagogue pour ensorceler magiquement les
commandants et leurs soldats et les ramener à la
cause de Liliene Swordwraith.
Toujours est-il que lorsque l’aube se leva le
lendemain, l’équilibre des forces avait changé.
Liliene Swordwraith et ses troupes marchèrent sur
Calrie, et le petit peuple se joignit à l’armée alors
qu’elle traversait Aerenwe. Lorsque, dans la liesse
populaire, Liliene arriva aux portes de Caer Callin,
les portes s’ouvrirent grâce à des gardes heureux
de pouvoir enfin se débarrasser du tyran.
Fhaelan Aeren fut finalement retrouvé dans ses
appartements. Cédant à la panique, il s’était
suicidé. Il avait préféré se donner la mort plutôt
que d’avoir à regarder Liliene Swordwraith en
face, et d’entendre prononcés contre lui les
abominables crimes qu’il avait commis contre son
peuple, au cours de cinq années de règne sanglant.
En 531 MR, Liliene Swordwraith devint Reine
d’Aerenwe.
La succession
Le règne de Liliene Swordwraith fut long et
heureux. La souveraine gardait cependant une aura
de mystère et cultivait le secret. Certaines choses
finirent tout de même par transpirer des alcôves du
palais de Calrie : Liliene ne pouvait avoir de
descendance, et était atteinte d’une maladie
magique incurable. La façon dont elle avait
contracté cette maladie resta inconnue.
Liliene adopta les enfants de Fhaelan Aeren, alors
en bas âge, et les éleva comme les siens propres.
Elle s’estimait responsable de leur avenir après la
mort de leur père. La souveraine décida également
de réserver le trône à la famille régnante légitime,
pour assurer la légitimité du domaine ; étant
devenu ses enfants adoptifs, les dynasties des
Swordwraith et des Aeren se mêlèrent dans le frère
et la sœur, les jumeaux royaux, Thalien et Arielle.
Bien qu’identiques en apparence, leur façon d’être
était aussi contrastée que le jour et la nuit. Thalien
était ambitieux, calculateur et opportuniste ; il
aimait les combats à l’épée, cherchait à deviner les
pensées des autres en lisant sur leur visage, et
faisait preuve d’une grande popularité parmi les
nobles, dès son plus jeune âge, grâce à son sens de
la répartie et à son intelligence supérieure. Arielle,
tout en contraste, était calme et secrète. Son regard
pénétrant semblait percer à jour l’esprit de celui
qui lui faisait face, et son étrange clairvoyance,
alliée à des dons de prémonition, finirent de lui
donner une réputation étrange à la cour. Les autres
enfants se méfiaient d’elle. Elle comprit que
certains sujets devaient rester voilés. Elle garda
pour elle son ambition envers la couronne, sa
volonté de restaurer Aerenwe dans sa grandeur
~9~
passée, et son mépris pour la vanité des nobles qui
ne semblaient comprendre que le langage de la
flatterie. Arielle souhaitait le pouvoir, mais savait
masquer ses désirs. Le fossé se creusa entre elle et
son frère lorsqu’ils réalisèrent qu’ils voulaient
chacun le trône, sans le partager. Fier et vaniteux,
Thalien déclara que sa sœur, frêle comme le
roseau, n’aurait jamais la force de s’y opposer.
Arielle sourit et s’effaça - la réplique viendrait en
temps et en heure, et la jeune femme n’avait pas
l’intention de se dévoiler simplement pour garder
la face dans une discussion secondaire.
Alors que les jumeaux grandirent, il devint
rapidement évident, au moins aux yeux du grand
chambellan, que Liliene avait porté son choix sur
Arielle. Elle resta au palais pour comprendre le
fonctionnement du royaume, et assister la
souveraine. Son frère ne l’entendait pas de cette
oreille ; il clama qu’il ferait ses preuves et
mériterait le trône. Thalien quitta Calrie et
parcourut Anuire pour y lier des contacts et y
apprendre la politique. Son chemin le porta en
Mieres, en Osoerde, en Chimaeron et même au
delà. Il ne revint qu’en 551 MR, mais ne resta
jamais longtemps au palais - il allait fréquemment
dans la cité de Proudglaive, en Roesone, où il avait
des amis parmi les nobles de la cour.
L’état de santé de la souveraine empira. Liliene
était condamnée, mais s’efforçait de ne rien en
laisser paraître. Elle se contenta de ne plus
apparaître que rarement en public, ayant l’air en
bonne santé dans ces moments grâce à l’aide de
soins prodigués par les prêtresses de Nesirie.
Arielle ne voulait pas quitter Calrie ; mais son
entourage se fit insistant pour qu’elle acquière
quelque expérience sur Cerilia en visitant d’autres
horizons. Apaisée par les paroles rassurantes de sa
mère adoptive et des guérisseurs du palais, Arielle
Aeren fit son premier voyage d’importance, dans
les terres Khinasies, en Binsada.
Malheureusement, cela se révéla une erreur. L’état
de la souveraine empira peu après le départ de la
jeune femme. Elle disparut mystérieusement trois
jours plus tard, sans avoir pu annoncer son
successeur officiel, et alors que chacun des deux
jumeaux était hors des frontières - Thalien à
Proudglaive, et Arielle à Andujar.
Le pays se trouva sans contrôle, et la nature réelle
de Thalien se révéla. Manipulant les nobles les uns
contre les autres, usant de son apparence pour
semer le doute, et tirant les ficelles qu’il avait pu
tisser à l’étranger, Thalien Aeren se déclara
légitime héritier de Liliene Swordwraith. Le
guerrier avait visiblement prémédité son affaire,
même s’il semble probable qu’il ait été lui aussi
pris de vitesse par la disparition subite de la
souveraine. Il savait où Liliene avait caché ses
dernières volontés et s’en empara.
Le royaume d’Aerenwe
Le Pays
Aerenwe est une nation riche et étendue. Le
domaine comporte sept provinces. Au nord, le
Callin trace une frontière naturelle avec Osoerde ;
à l’ouest, aucune limite évidente ne distingue le
Informations générales
Climat
Le climat d’Aerenwe est très doux. Grâce à la
présence des courants marins, l’été est frais et
l’hiver à peine plus froid que l’automne. Les pluies
sont abondantes au printemps, mais moins
fréquentes le reste de l’année. Aerenwe est protégé
par deux vents saisonniers contraires, qui limitent
l’abondance des précipitations malgré la proximité
de la mer : un vent sec et mordant venu du nord,
qui souffle plutôt du côté de Roesone, et un vent
humide et constant qui remonte le golfe de
Coeranys. Les tourbillons engendrés par les
courants aériens protègent le domaine du pire des
nuages, et la terre n’est pas lavée par les averses
comme chez les autres royaumes de la côte sud.
Certains avancent que c’est le culte de Nesirie qui
protège le pays des mauvais côtés de la mer. Peut-
être y a-t-il une part de vérité dans cette légende.
Néanmoins, la forêt d’Erebannien existe depuis
~ 10 ~
franchissement de la limite entre Roesone et
Aerenwe, une limite qui a d’ailleurs bien souvent
évolué au cours de l’histoire. Au sud et à l’est,
enfin, la Suidemiere - la Grande Mer du Sud -
étend son horizon infini, jusque vers les terres
mystérieuses du continent d’Aduria.
une époque très antérieure à l’arrivée des humains,
et n’aurait pas pu se développer dans un climat
différent. Si la déesse de la mer veille
effectivement sur ce domaine, c’est une charge
dont elle a hérité et qui remonte plus haut que la
bataille du Mont Deismaar.
Topographie
Dernier prolongement de la grande plaine
d’Anuire, Aerenwe est aussi éloigné des
montagnes qu’il est possible de l’être sur le
continent. Il n’y a pas le moindre relief rocheux
dans le pays, et même les collines sont rares. Au
cours des millénaires, toutefois, l’érosion de la mer
a découpé le contour des côtes et rogne chaque
année le flanc sud-est du royaume. Les assauts des
vagues ont peu à peu échancré les côtes, creusant
nombre de petites criques rocheuses plus ou moins
abritées des colères du large. L’écoulement de
l’eau a aussi emporté la terre meuble pour révéler
les pierres afférentes. La forêt d’Erebannien se
noie dans la mer, et un voyageur de passage est
Le royaume d’Aerenwe

souvent émerveillé d’apercevoir, au détour d’un passionnés s’adonnent à la fauconnerie et chassent

chemin forestier, les reflets éblouissants du soleil le lièvre dans les prés.
sur les vagues, à quelques mètres de là. Au sud, le bois d’Erebannien étend son voile de
Au nord, la végétation s’est effacée devant le verdure. Beaucoup de gens considèrent que c’est la
travail industrieux des hommes. Les champs de plus belle forêt de Cerilia. Les bois sont
blés et de maïs s’étendent à perte de vue, en accueillants, verts et dorés sous le soleil ; des
l’absence de toute aspérité pour la stopper. La terre clairières cachées abritent des sources d’eau
est très riche. Les fermiers d’Aerenwe s’autorisent cristalline et des chutes d’eau. Le terrain est plus
parfois deux récoltes par an lorsque accidenté qu’ailleurs en Aerenwe, et les racines
l’ensoleillement est suffisant. Des décrets anciens des arbres s’emmêlent autour de grosses pierres
ont néanmoins limité cette pratique pour empêcher couvertes de mousses, à l’abri desquelles poussent
l’épuisement de la terre. Toujours est-il que les des champignons. Une légende raconte que
champs fournissent leur lot de grain, et le pays en lorsqu’on se promène dans la forêt en automne, on
exporte depuis toujours vers ses voisins bien moins y laisse à jamais une partie de son cœur.
lotis.
Le Callin est responsable d’une partie de cette Les provinces du Nord
fertilité ; il s’enrichit de minerai à sa source, dans
Les provinces de plaine, Dhoenel, Halried et
les collines de Bellam, et les déverse tout au long
Calrie, sont les seules où habite réellement la
de son parcours. Le fleuve est large mais son cours
population du domaine. 95 % des humains
est lent et régulier. Les cultivateurs détournent une
d’Aerenwe vivent dans la grande plaine d’Anuire,
partie de son flot paresseux pour irriguer leurs
tirant une existence confortable de leur vie de
cultures. Les berges du fleuve sont les terres les
paysans. Le tableau est parfois moins idyllique
plus riches et les plus convoitées du domaine. Des
qu’il n’y paraît : dans la mesure où toutes les terres
fortunes changent de main pour simplement les
sont aussi riches, la concurrence est rude et les prix
louer, et pour permettre à tous de pouvoir en
tirés vers le bas. Cette compétition est un véritable
profiter, les concessions ne sont que de cinq ans,
bonheur pour les négociants étrangers qui viennent
non renouvelables.
dans le domaine pour y acquérir des chargements
Près de la mer à quelques kilomètres de Calrie, la
de grain de qualité, à bas prix. Evidemment, ce
capitale, le Callin s’épanche dans l’absence de
transfert amène de confortables sommes d’or dans
relief et se divise en un delta qui baigne les terres
les caisses du maître du royaume.
jusqu’au golfe de Coeranys. La zone est toujours
aussi riche, mais moins cotée en raison des
Dhoenel
moustiques et des maladies qui frappent ceux qui
travaillent dans les étangs. Au bout du delta, Dhoenel vit paisiblement sous le soleil. Cette
quelques familles fortunées se partagent le marché image d’Epinal subsista longtemps dans l’esprit de
convoité du sel, exploitant de vastes marais salins la population ; ils allèrent à Dhoenel pour son
naturel. calme. Les choses sont en train de changer avec la
rébellion de Thalien, et le souffle du vent dans les
Flore et Faune épis ne suffit plus à couvrir les bruits de lutte et de
massacre qui ont lieu dans les villages.
Au nord, les plaines sont civilisées et cultivées. Il
La population de la province vit de la pêche dans
ne reste aucune place pour la vie sauvage. Hors
le Callin, de cueillette et de culture. Les arbres
des bosquets, les espèces végétales se limitent
fruitiers de la province sont étonnamment
essentiellement au blé, au maïs, à l’orge, au
productifs, étant les premiers d’Anuire à offrir
houblon, aux betteraves et d’autres plantes
leurs fruits aux maraîchers. Dès qu’ils sont
récoltées par les fermiers. Les seuls animaux sont
disponibles, ils sont embarqués sur des goélettes
des animaux de ferme : veaux, cochons, volaille.
spéciales, taillées pour la vitesse, qui les emportent
Les moutons et les chèvres sont plus rares, car les
jusque dans la Cité d’Anuire. Les primeurs
éleveurs considèrent comme du gâchis que
s’arrachent, et les compagnies de goélettes se
d’élever des créatures aussi robustes dans un
battent pour le contrôle de ce juteux commerce.
environnement aussi riche. Ils préfèrent laisser la
Chaque capitaine rivalise d’audace et de voilure
laine et le lait de chèvre à ceux à qui il ne reste
pour aller plus vite en descendant le fleuve ; cela
que des pans de montagne pour faire paître leurs
donne lieu à des joutes nautiques en basse saison.
bêtes, et concentrer leurs efforts sur les bovins.
La concurrence s’est un peu amolli, cependant,
Bien que les sillons recouvrent la terre, quelques
depuis que Spider River Traders règne en maître
îlots de verdure naturelle subsistent. Ces bocages
sur le transport. Les bateliers indépendants ne
sont préservés avec le sens du sacré. Ils servent de
peuvent lutter contre la puissance financière de la
réserve de chasse aux nobles locaux, mais la
guilde, et n’ont pas d’autre choix que d’y adhérer
chasse est très réglementée pour permettre au
ou de faire faillite. L’ambiance s’en ressent et les
gibier - sangliers, daims - de se régénérer dans son
environnement réduit. Le reste du temps, les

~ 11 ~
Le royaume d’Aerenwe
relations entre les flottes de goélettes sont de plus
en plus tendues.
Dhoenel comporte trois villes d’importance, et des
dizaines de villages. Depuis son manoir familial, la
comtesse Dienna dirige la province et n’a de
comptes à rendre qu’au maître d’Aerenwe. Depuis
la lutte entre le frère et la sœur, cependant, Dienna
refuse de prendre position. Des rumeurs évoquent
une liaison entre la comtesse et Thalien Aeren,
mais l’aristocrate a toujours nié. Vrai ou faux, il
faut reconnaître que les agents de Thalien ont carte
blanche dans la province, alors que les
missionnaires royaux ont tendance à périr dans des
embuscades. L’hypothèse de la neutralité de la
maison Dhoenel semble douteuse.
Halried
Halried n’a pas d’accès au Callin, mais la région
est constellée de petits étangs naturels et de
ruisseaux sauvages. Les paysans locaux ont mis au
point un ingénieux système d’assèchement régulier
de ces marécages. Une fois asséché, il ne reste plus
qu’à ramasser les poissons à la main, dans les
derniers trous d’eau. Le limon fertile qui recouvre
le sol des étangs permet une culture facile et une
prise rapide des semailles. Pour éviter de trop
assécher de lacs, une politique stricte de
renflouement est mise en œuvre, comprenant la
réintroduction d’alevins dans les zones de nouveau
immergées.
Près de la frontière avec Roesone, un ensemble de
petites sources chaudes jaillit de la plaine. Cette
chaleur tellurique est très agréable, et des stations
thermales se sont formées. Les riches s’y rendent,
tant pour soigner leur goutte que pour jouer aux
cartes et passer du bon temps. C’est un lieu
privilégié pour qui sait laisser traîner ses oreilles.
Le comte Whilelm Halried domine la province. Il
est complètement inféodé à Thalien, le soutenant
avec une intensité proche du fanatisme. Il prétend
que seul le frère d’Arielle pourra restaurer le
royaume dans sa grandeur passée, que la reine est
faible et molle. La couronne de Calrie devra se
charger de lui faire ravaler ces paroles. Whilelm
est un partisan de la guerre ; son premier rêve
serait de voir son ami Thalien restauré sur le trône.
Le second serait de reconquérir les terres perdues
par sa famille en Roesone, chevauchant à la tête
des armées d’Aerenwe lors de leur invasion. C’est
peut-être avec ce genre d’arguments que Thalien le
félon a réussi à le convaincre ; le comte a été
aveuglé par sa volonté de revanche, croyant
qu’Arielle serait incapable de le lui apporter. C’est
regrettable, car le noble est un homme rempli de
qualités, et sa franchise de paroles est son seul
défaut. Le patriarche des Halried devra tout de
même être remplacé si la reine accède au pouvoir
sur la province, car il a bien trop fortement pris
position contre Calrie, et pardonner cette attitude
~ 12 ~
affaiblirait le respect dû à la couronne dans les
autres provinces.
Calrie
La province de Calrie est la plus riche et la plus
peuplée du royaume. Les champs s’étendent à
perte de vue. Les fermes sont très nombreuses ; la
province est sillonnée de chemins de terre et de
sentiers aux ornières creusées par les charrettes qui
vont en ville.
Les villages sont peu nombreux ; la population est
répartie dans les exploitations agricoles, et se rend
à Calrie, la capitale, lorsque le jour du marché est
venu. Hormis ces grosses fermes, il y a peu de
villages. Les gens se connaissent malgré tout ;
chaque exploitant tisse des relations avec ses
voisins, et de proche en proche, les habitants
connaissent à peu près toutes les fermes, au moins
de réputation.
La plupart des métairies sont des entreprises
importantes, abritant chacune une trentaine de
personnes, réparties en quatre ou cinq familles,
dont une seule possède généralement la propriété.
Les autres sont des ouvriers ou des artisans -
menuisiers, maréchal ferrant, herboristes. La
densité de population ne permet pas des cultures
aussi extensives que dans les autres provinces ; les
producteurs se rabattent sur l’élevage de basse-
cour et d’animaux de ferme - porcs, dindes, oies.
La charcuterie de la province est prisée ; avec les
plumes de la volaille, les fermiers font des
édredons et des oreillers confortables pour eux ou
pour leurs clients bourgeois.
Au nord de la province, on aperçoit de très loin les
hautes tours de Caer Callin. L’antique forteresse
est bâtie sur une des seules collines du royaume ;
ses flèches blanches et ses toits en ardoise se
voient de loin. Le capitaine de la garde, le comte
Viktor Moskal (MV ; F4 ; unblooded) est un Vos
en exil qui a décidé de refaire sa vie en Aerenwe.
Cela remonte à plus de vingt ans. Depuis, Sire
Moskal n’a pas adoucit d’une once son autorité
inflexible. Il connaît chaque garde
personnellement, de même que chaque recoin de la
citadelle.
Le château de Caer Callin (du vieil Anuiréen :
Caer, point fortifié, et Callin, le nom du fleuve sur
qui il veille) surplombe Calrie, la capitale du
domaine, et la cité la plus peuplée. Des terrasses
de la forteresse, on aperçoit la ville qui brille de
mille feux, et l’air résonne des discussions
pléthoriques qui animent cette cité cosmopolite.
Les provinces du Sud
Aerenwe est une terre de contrastes. Là où les
provinces du nord sont riches et peuplées, celles du
sud sont pauvres et presque inhabitées. Là où au
nord les prés et les champs se succèdent, au sud
Le royaume d’Aerenwe
règne sans partage la forêt d’Erebannien et ses
charmantes clairières.
Westmarch
La province de Westmarch est la plus proche de
Roesone, et la nombreuse population de la
province voisine d’Abbatuor n’hésite pas à
traverser la frontière pour venir chasser l’abondant
gibier qui subsiste dans les espaces boisés de la
forêt préservée d’Aerenwe. Les gardes-chasse sont
engagés dans une lutte sans merci contre les
braconniers, mais c’est un emploi dangereux. Les
vieux gardes-chasse sont rares. Dans le silence de
la forêt, ils ne peuvent s’attendre au secours de
personne, et les braconniers de Roesone n’hésitent
pas à tuer pour éliminer les témoins de leurs
agissements.
La province est faiblement peuplée. Quelques
villages forestiers apparaissent ça et là, dans de
petites clairières ; leurs habitants coupent le bois,
en prenant bien soin de le replanter, et fabriquent
du charbon dans des fourneaux de terre. Leur
production est vendue en hiver, dans les villes du
nord. Les Elfes de Westmarch sont farouchement
attachés à leur mode de vie ; ils érigent des
villages aériens, et en refusent l’accès aux
étrangers humains. Ceux qui veulent passer outre
les avertissements sont criblés de flèches.
Shadowgreen
Shadowgreen s’enfonce au sud jusqu’au cap de
Falasmiere, la pointe de terre la plus au sud de tout
le royaume d’Aerenwe. Comme son nom
l’indique, Shadowgreen est aussi belle que le reste
de la forêt, mais plus contrastée et plus
mélancolique. Les hauts arbres ont des feuillages
plus épais qu’ailleurs, et leurs ombres semblent
plus marquées. De jour, la forêt est aussi
resplendissante que le reste d’Erebannien.
En revanche, dès la nuit tombée, des bruits
étranges résonnent dans les bois. Quelquefois, un
hurlement à glacer le sang retentit, empêchant
quiconque l’ayant entendu de dormir cette nuit-là.
Des forestiers racontent des légendes effrayantes
au sujet de la forêt, sur des arbres qui auraient
engendré des créatures d’un autre monde. Un
pisteur détecte quelque fois des traces de pas
étranges laissées dans la glaise, ne correspondant à
aucune espèce connue.
La province n’est pas habitée par les humains. Les
Elfes sont relativement nombreux ; mais les seuls
humains qui se trouvent à Shadowgreen ne sont
pas originaires de la province. Ils y travaillent
seulement. Ce sont des forestiers employés par
Mourde Alondir ; eux seuls ont le courage de
s’aventurer dans la forêt et d’y rester la nuit.
Malgré les patrouilles autour des camps de
bûcherons, il arrive que des sections entières
disparaissent sans laisser de traces. On retrouve
leurs couvertures, leurs affaires, et même des
~ 13 ~
tasses encore remplies de thé froid ; mais plus
aucune présence humaine. Les forestiers accusent
les Elfes d’être responsables de ces enlèvements,
mais sans conviction. Tous savent bien que même
si les Elfes sont habiles dans l’art de tendre des
embuscades, il y aurait eu des traces de sang ou de
lutte au moins une fois.
Banien’s Deep
Banien était un des plus courageux explorateurs
humains, lors des premiers âges, et on nomma la
province à sa mémoire. Il entra dans les
profondeurs inconnues et interdites de la forêt
elfique avec douze de ses compagnons, bravant
l’interdit des Sidhelien. Le reste appartient à la
légende.
Le Haut Mage Aelies (M½E ; W17 ; Vo, major,
36) vivrait dans la province, mais personne ne sait
où. En fait, on dénombre pas moins d’une dizaine
de lieux étranges ou inhabituels où le sorcier est
sensé avoir élu domicile ; des cascades, des
cavernes, l’intérieur du tronc de chênes
millénaires, voire un palais marin sous la surface
des eaux du détroit d’Aerele. Personne n’en sait
rien, mais cela donne des sujets de discussion à
tout le monde autour des feux de camp. C’est en
tout cas depuis la province que le mage envoie ou
reçoit les émissaires des régents.
Si la province de Banien’s Deep sert de base à
quelqu’un de façon certaine, ce n’est pas à Aelies.
Phasiphiel Shywnnd (M½E ; R4 ; Br, minor, 23),
le chef des dissidents elfes, a son campement
quelque part dans les bois. La rumeur vient du
témoignage d’un évadé de ce camp, qui put
expliquer vaguement où il était détenu, avant de
mourir de ses blessures. L’endroit est fortement
protégé ; les habitations sont mêlées au feuillage
des arbres, protégées par des enchantements de
camouflage, et une centaine d’archers elfe
patrouille en permanence dans les environs,
réservant un sort atroce aux humains qu’ils
rencontrent.
Northvale
La vallée du nord est la partie la plus extrême de la
forêt d’Erebannien. Les arbres s’espacent peu à
peu, devenant plus chétifs, leur feuillage moins
vert et moins dense. La population dispersée élève
de la volaille dans de petites fermes indépendantes
blotties dans la forêt. Le sous-bois est inexistant ;
les troncs des arbres semblent jaillir du sol nu. La
visibilité est meilleure à Northvale que dans
d’autres parties de la forêt, à cause de l’absence de
sous-bois. La chasse est plus facile, notamment
contre les sangliers qui font des ravages dans les
quelques cultures. La vie dans la province est un
peu moins précaire qu’ailleurs dans l’Erebannien,
et la population un peu plus accueillante. Aucun
forestier ne refuserait l’hospitalité à un voyageur
Le royaume d’Aerenwe
de passage, même s’il doit pour cela donner la
moitié de son maigre repas.
La province est la plus sauvage de tout
l’Erebannien, et de loin. C’est la seule région où la
vie des voyageurs est en danger même sur les
sentiers. La forêt est resplendissante et
enchanteresse, mais abrite des animaux
dangereux : ours et loups. On raconte que des
Géants des Forêts vivent quelque part, près de la
côte.
Les ruines d’une ancienne civilisation elfique
subsistent quelque part dans les bois. Des
parchemins anciens racontent que les Elfes
enfouirent leurs trésors avant de livrer leur
dernière bataille ; les chercheurs de trésors
pénètrent parfois en Northvale pour découvrir des
coffres remplis de gemmes et de bijoux, souvent
sur la foi d’un parchemin dessiné par un aigrefin
dans les faubourgs de Calrie. Ils rentrent
invariablement bredouille. Des rumeurs racontent
que le Haut Mage Aelies vit dans la province et
que son laboratoire est caché en plein cœur d’une
cité elfique cachée, abritant des richesses
fabuleuses ; la puissance de l’enchanteur viendrait
des reliques qu’il y aurait trouvées. Si cette théorie
est exacte, ce qui paraît peu vraisemblable, alors
les pièges elfiques ont sans doute été renforcés par
des charmes de défense du Haut Mage, et les
prospecteurs feraient bien d’abandonner leur vaine
quête avant d’y laisser leur peau.
La Cité de Calrie
De toutes les villes d’Aerenwe, Calrie est la plus
puissante et la plus peuplée. La cité est un fier
témoignage de la puissance de l’Empire d’Anuire -
les plus vieux quartiers furent rénovés sous sa
majesté Caercuillen, et portent la marque de
l’architecture de l’époque. Les fondations
remontent à une époque très antérieure ; du temps
de la grandeur des Elfes, le site était déjà occupé
par des familles du Noble Peuple. Leurs
habitations d’alors, faites de bois et de matériaux
friables, ne résistèrent pas au temps et il n’en reste
pratiquement plus aucune trace aujourd’hui.
La population abondante de la cité vit à l’abri des
murailles, elles-mêmes rénovées en 526 MR.
Malgré la superficie protégée par les hauts murs de
pierre, la croissance de la capitale s’est avérée trop
forte pour permettre à tous de trouver une place
derrière les portes. Il faut aussi reconnaître que
vivre à Calrie, dans les beaux quartiers au moins,
est source de prestige pour une famille ; les loyers
tiennent compte de ce snobisme et seuls les plus
fortunés peuvent vraiment se payer un habitat
permanent dans une des maisons à colombages de
la ville. Le reste s’entasse dans un des faubourgs
temporaires qui s’élèvent à l’ombre des remparts,
ou se contente d’habiter en ville sur une base
saisonnière.
~ 14 ~
Les quartiers
On dénombre près de 32 000 citadins ; ils sont
irrégulièrement répartis dans les quatre quartiers
principaux de la cité. En fait, le découpage en
quartier est purement administratif et les habitants
dénomment eux-mêmes près d’une cinquantaine
de zones différentes, selon les figures locales, les
monuments, des confréries d’artisans et
l’animation générale de l’endroit. Les noms vont
de la “place de la fontaine” à “l’impasse du gros
Egbert”.
Le môle des bateliers
La proximité de la mer et la profondeur du Callin
permettent l’accès au port des navires de haute
mer, et la cité est un lieu privilégié pour le
débarquement des marchandises. La population du
môle des bateliers est fraîche et cosmopolite, et les
promeneurs venus admirer l’architecture navale
entendent souvent de nombreux accents régionaux
dans les paroles des marins. Le port est l’âme du
quartier. Il n’est pas très grand, mais permet
d’accueillir dix navires de fort tirant d’eau, et des
centaines d’embarcations plus petites. Les navires
qui ne parviennent pas à trouver une place
attendent leur tour à l’extérieur, s’amarrant
directement sur les berges du Callin. Osoerde
profite de l’engorgement du port de Calrie, et les
habitants n’ont pas hésité à construire leur propre
petit port, au nord, pour accueillir les capitaines
excédés par leur attente.
La pêche est une activité importante ; deux places
sont réservées au marché au poisson, où les
pêcheurs locaux viennent écouler le produit de leur
travail. Ce sont des poissons pêchés en amont de la
ville, dans un des méandres du Callin, ou le
produit de l’équipage d’un petit bateau de pêche
parti en mer le long des côtes du Golfe de
Coeranys.
Sur les quais, l’activité est frénétique : des
amendes attendent les équipages qui ne débarquent
pas assez vite leur cargaison. Les marchandises
sont stockées dans de grands entrepôts fortement
gardés. Devant le volume de fret, l’attribution des
entrepôts se fait un peu au hasard - les officiels
sont notoirement débordés. Quelques pièces d’or
discrètement versées permettent souvent de faire
de la place dans un hangar de bois pourtant réputé
plein jusqu’à la gorge.
Une fois les ballots et les tonneaux déchargés, il
faut encore les acheminer jusqu’à leur destination
finale, et les carrioles vont et viennent sans cesse.
Les rues menant au port sont étroites et
encombrées ; les disputes entre conducteurs de
chariot sont fréquentes. Chacune donne lieu à une
véritable joute oratoire dont le vainqueur est celui
qui réussit à clouer le bec à l’autre par une
réplique bien sentie. Celui des conducteurs qui a
eu le dessous doit alors se débrouiller pour laisser
Le royaume d’Aerenwe
le passage à son vainqueur. La population adore
ces sérénades et se presse pour les écouter - surtout
les enfants. Les marins étrangers viennent y
parfaire leur connaissance de l’Anuiréen. Pour
éviter les ennuis dus au trafic, certaines livraisons
ont lieu de nuit. Le port ne semble ne jamais
dormir.
Ceux qui vont dans le quartier savent bien que le
môle des bateliers ne se repose jamais, et c’est ce
qu’ils cherchent. Il n’y a pas beaucoup d’auberges,
sauf peut-être vers chez les tanneurs à l’est, mais
une profusion de tavernes. Chacune tente d’avoir
un nom plus original que la voisine : le Tabouret
de Sable, l’Etroit Capitaine, la Voile de la Mariée,
le Sens Dessus Dessous ou la Sirène à la Voix
Rauque. Peu importe l’enseigne, elles sont toutes
très fréquentées. Dans les établissements de basse
extraction, les marins viennent surtout
s’encanailler et se saouler ; on reconnaît ces
tavernes à leurs fenêtres de bois, leur mobilier
robuste et leur porte à toute épreuve. Les bagarres
sont fréquentes, mais la garde n’intervient
pratiquement jamais lorsque personne ne sort une
arme - lorsque des miliciens tentaient d’arrêter les
bagarres, ils étaient pris à partie par les clients.
Le quartier n’est pas tout entier dévolu à la
dépravation et à l’alcool fort. Un peu plus loin du
port, se trouvent des cabarets et des estaminets
bien plus prestigieux, aux tarifs en accord avec une
décoration intérieure soignée, à base de boiseries
et de velours. Ils offrent à leur clientèle des repas
de qualité, plats de fruits de mer et vins fins.
Souvent, la grande salle comporte une estrade où
joue un orchestre, une troupe de théâtre, ou
quelques bateleurs. Ces établissements ont aussi
des alcôves que louent les fils des nobles, et des
salons privés où un bourgeois fortuné peut recevoir
ses invités de marque. Viennent y manger de
jeunes nobles et leurs conquêtes, des bourgeois, ou
les capitaines des navires dont l’équipage se saoule
à deux rues de là.
La porte des marais
A l’est de la cité, les rues deviennent
progressivement des ruelles, le linge pend aux
fenêtres, et le voyageur est pris à la gorge par une
ignoble puanteur, alors que ses bottes s’enfoncent
dans la rue fangeuse. C’est à ce moment qu’il sait
qu’il vient de rentrer dans le quartier de la porte
des marais.
Le nom de cette partie de Calrie ne vient pas de sa
saleté, ni de l’eau ruisselante sur les murs couverts
de mousse à la moindre pluie, ni de l’état de
délabrement général et du manque de style des
façades, ni des flaques de boue qui jonchent un sol
jamais pavé. C’est simplement que les remparts
sont percés d’une lourde porte, à l’est, qui donne
sur les marais du delta du Callin. Personne ne sait
au juste pourquoi, historiquement, les couches les
plus laborieuses de la population sont venues
~ 15 ~
s’installer là. Certains pensent que c’est parce que
le quartier est le plus éloigné possible des maisons
des nobles, et peut-être ont-ils raison.
Les masures délabrées du voisinage abritent une
population plus nombreuse que celle d’aucun autre
quartier, et de loin. L’espace semble manquer, sauf
au pied des remparts où subsiste un chemin pavé
de trois mètres de large, la voie de pierre (la “voie
des riches”, voire “la voie des impôts gâchés”,
selon les habitants).
Les maçons venus s’installer ont fait preuve d’une
ingéniosité rare pour construire leurs demeures.
Elles ne sont pas toujours belles, mais très
fonctionnelles. De nombreuses maisons enjambent
la ruelle, tel un pont au premier étage. D’autres
s’agrémentent d’une tour. Comme la construction
en pleine rue est interdite, les architectes ont fait
s’avancer la façade au fur et à mesure que les
étages s’ajoutent, chacun empiétant sur le
précédent. Le résultat est impressionnant et
oppressant, les maisons semblant se refermer sur la
rue comme pour ensevelir le passant. Les escaliers
sont étroits et parfois réduits à une simple échelle.
Les loyers les plus élevés correspondent au rez-de-
chaussée ; plus on s’élève dans les étages, plus les
tarifs sont modestes. Les vieux et les plus pauvres
vivent dans les combes et les greniers.
L’air n’est empuanti que lorsqu’il n’y a pas de
vent ; si la brise souffle, l’atmosphère est tout à
fait respirable. Malheureusement, il n’y a pas de
vent tous les jours. Contre toute attente, les
habitants aiment cet endroit où ils vivent. Ils
décorent volontiers leurs fenêtres avec des pots
débordants de fleurs, et des plantes grimpantes
courent sur les pierres mal ajustées des murs.
Malgré sa saleté, l’inextricable fouillis de ruelles
et d’escaliers, de cours et d’allées, de passages
couverts et de portes cochères, la Porte des Marais
possède un charme indéniable. Au détour d’un
chemin, alors qu’on croyait tomber sur une
impasse, on peut découvrir une charmante petite
place, avec une fontaine cernée de fleurs ; parfois,
l’encadrement des portes et des fenêtres d’un logis
est orné de sculptures habilement taillées par un
artiste anonyme.
Les échoppes ne sont pas moins nombreuses dans
ce quartier, mais les tarifs sont modelés à la tête du
client (ou selon le souvenir que son visage évoque
chez le boutiquier) et il ne fait pas bon
marchander. Les commerçants ont leur clientèle
locale et n’ont que faire des étrangers, même si
cela doit les faire passer pour des rustres. Dans
certaines ruelles étroites, circuler est difficile à
cause de la foule animée et des échoppes qui
déversent leur étal jusque dans la rue. Circuler à
cheval ou en carriole est absolument impossible.
Les livraisons se font à dos d’homme, dans de
volumineux paniers d’osier rembourrés de mauvais
tissus. Le voyageur rencontre parfois des prêtresses
de Nesirie, venues dans le quartier populaire pour
Le royaume d’Aerenwe
soigner les malades et enseigner les connaissances
de base aux enfants.
Curieusement, certains des meilleurs artisans de
Calrie ont élu domicile à la porte des marais, et
rien ne semble pouvoir les faire déménager, même
si leur fortune est faite. Harrick le martelier (MR ;
F6 ; unblooded) est le plus fameux forgeron de
Calrie, et de loin. Cet ancien mercenaire Rjurik a
parcouru tout Cerilia pour perfectionner son art, et
s’installa dans la capitale pour y prendre sa
retraite. Il égaye la vie de sa ruelle en chantant les
mélodies incompréhensibles de son pays,
ponctuées par le tintement régulier du marteau de
forge sur l’enclume. Son visage souriant et sa
barbe poivre et sel sont connus de tous les citadins,
bien que ceux ayant les moyens de s’offrir ses
services soient peu nombreux.
Les pentes fertiles
Au cours des premiers âges de l’occupation
humaine, les colons les plus riches - ou les plus
agressifs - s’approprièrent les terres les plus
fertiles autour du village de Calrie, les petites
collines au sud. Ils érigèrent les murs de leurs
demeures près de leurs terres. Ils s’enrichirent vite,
et achetèrent d’autres arpents plus loin ; autour de
leurs maisons, on traça des routes, et en quelques
générations les champs avaient disparu, laissant
place à un village, puis une agglomération qui fut
absorbée par Calrie.
Les pentes fertiles gardent leur nom de cette
époque. Il n’y a plus guère de pentes dans le
quartier, ni même de terre fertile ; seules les
grandes demeures de familles bourgeoises
poussent à cet endroit. Ces maisons n’ont pas le
luxe des quartiers nobles, mais sont réputées pour
leur confort et la joie de vivre de leurs locataires.
Contre toute attente, la population du cru est
affable, discrète et amicale. Les parents vaquent à
leurs occupations pendant la journée - travaillant
au port, dans une échoppe de qualité, ou dans des
activités à l’extérieur de l’enceinte de la cité. Les
domestiques font leurs courses, et les enfants
apprennent à lire et à écrire.
Les jardins sont peu nombreux, mais les plus
grandes habitations possèdent une cour intérieur,
avec un puits et un petit potager où l’on voit que la
réputation de terre fertile n’est pas une légende.
Les maisons sont aussi hautes que possibles,
atteignant souvent quatre étages. Comme une
famille ne suffit pas à la remplir, le reste est
réservé à des amis de passage, ou loué à des
artisans saisonniers qui trouvent là une alternative
agréable aux auberges, moins familiales. La
clientèle est régulière, et les liens se tissent entre
les familles de bourgeois et les voyageurs de
passage. Souvent, un benjamin de la famille repart
avec un artisan pour devenir son apprenti.
Les rues sont pavées, et il y a même des trottoirs.
La vie est plus calme que dans la porte des marais.
~ 16 ~
On peut croiser des acheteurs, des domestiques,
des cochers ou des tailleurs dans les rues ; ou
simplement une matrone lourdement chargée de
victuailles, aidée par un ou deux laquais.
La population vénère Nesirie avec ferveur. Les
portes ou les gouttières sont souvent rehaussées de
symboles marins discrets, sculptés dans la pierre -
ondines, tridents, coquillages. Lors des fêtes
religieuses, le quartier se couvre de décorations, de
lampions et de rubans. C’est l’occasion de faire la
fête, et les citadins s’y adonnent sans arrière-
pensées. Dans ce genre de moment, la foule
envahit les places et les rues, et le sourire est sur
tous les visages, comme une ode chantée à la
gloire de la déesse de la mer.
Les douze allées
Le quartier qui porte ce nom a toujours été la
partie la plus riche de la vieille ville. Lorsque les
murailles ont été refaites, d'autres bâtisses ont pu
venir se construire, prolongeant la gloire des
manoirs les plus prestigieux de Calrie. Les douze
allées tirent leur nom de l’ancien Empire
d’Anuire ; une allée par duché. Certains royaumes
sont tombés en désuétude, comme Bellamie,
vaincu par Ghoere, mais le nom est resté dans la
mémoire des citadins et sur les plaques gravées des
noms de rue. De nouvelles allées n’ont pas émergé
lorsque des royaumes ont été créés de toutes
pièces ; il n’y a pas d’allée pour Medoere ou
Nesirian, par exemple.
Les allées en question ne sont pas les seules voies
de communications de cette partie de la capitale,
mais ce sont les plus prestigieuses. Le pas de porte
se paie très cher. Le sol est soigneusement pavé
par des pierres taillées, alors qu’ailleurs dans la
capitale, le sol reste inégal jusqu’à ce qu’il soit usé
par les roues de chariots et les fers des chevaux.
Les trottoirs sont agrémentés d’acacias, croulant
sous les fleurs au printemps, embaumant l’air de
leur senteur enivrante et joyeuse. Les espaces sont
dégagés et les rues propres. Chaque maison a son
petit jardinet, plus symbolique qu’autre chose,
mais entourant tout de même la résidence d’un
anneau de verdure.
La garde est omniprésente mais fait des efforts
considérables pour rester discrète et courtoise.
Même un mendiant qui viendrait errer dans ce
quartier visiblement au-dessus de sa condition ne
serait pas rudoyé ; il serait renvoyé vers une zone
moins salubre, à la dérobée si possible.
Evidemment, les miliciens sont moins
complaisants envers les récidivistes. Après le
crépuscule, toute personne découverte dans les
rues finit sa nuit au poste, à moins qu’elle ne soit
un cadet de bonne famille à l’haleine chargée
d’alcool.
Chaque maison dispose de son petit jardin, et
depuis l’incendie de -432 MR, la construction de
maisons afférentes est interdite. L’incendie
Le royaume d’Aerenwe
détruisit quatre maisons seulement, et ne fit pas la
moindre victime, mais le feu s’était propagé grâce
au mur que des bâtisses adossées avaient en
commun. Le brasier reste célèbre, car les demeures
en question abritaient pour l’une la collection
complète des peintures de l’empereur Caercuillen
Roele, et pour l’autre les parchemins de Pellion
l’Alchimiste. Ce dernier était, disait-on, sur le
point de découvrir la pierre philosophale, et
mourut de dépit. La couronne de Calrie d’alors
décida de prendre le moindre risque en posant un
décret pour éviter que pareille catastrophe ne se
reproduise, mais par malchance personne n’arriva
si près du but que Pellion dans sa quête
alchimique.
L’accès au quartier n’est pas limité. Pour posséder
une habitation, il faut être noble ; mais pour être
locataire, il suffit juste d’avoir les moyens -
considérables - de s’offrir le loyer. La “noblesse”
requise pour le statut de propriétaire est aussi basse
que possible. N’importe quel aristocrate poudré,
même le plus mineur, a le droit d’acheter. Au
cours des siècles, un certain nombre d’aigrefins
fortunés mais sans manières arrivèrent de l’autre
bout d’Anuire avec des parchemins contrefaits
justifiant de leur condition ; dans certains cas, la
supercherie fut découverte, mais pas toujours. Un
décret créa une nouvelle catégorie de noble, les
marquis des douze allées, un titre dont le seul côté
aristocratique était de permettre la propriété dans
ce quartier. Il fut alloué, contre de fortes sommes
d’or, aux familles nobles d’origine douteuse, mais
installées depuis tellement longtemps que les
chasser aurait provoqué un tollé. Depuis, les
marquis se font rare, car ils sont sujets à des
quolibets continuels. L’expression désormais
consacrée désigne des nobliaux d’extraction
récente.
Les auberges et les tavernes du quartier sont d’une
qualité absolue. Des gardes à l’entrée refoulent les
clients qui n’adhèrent pas aux règles très strictes
de l’établissement sur l’habillement. Pour les
hommes, le pourpoint est de rigueur, ainsi que les
manches bouffantes à jabot. Les femmes ne
sauraient venir sans une toilette de soie ou de
satin, et un cavalier à leur bras ganté jusqu’au
coude. La cuisine est luxueuse : foie gras, truffes,
et même des spécialités d’ailleurs en Anuire. Le
Bon Vivant sert des chapeaux d’argent, de grands
champignons à larges corolles. Importés de
Medoere, ils sont juteux et d’une incomparable
saveur. La cave du Ciel de Feu cache, dit-on, un
tonneau entier d’essence-de-vin de Sielwode. Cette
boisson est plus merveilleuse que ce que peut
produire n’importe quel brasseur humain, mais le
patron nie toutes les rumeurs au sujet de son
tonneau d’un revers de la main. Les caves de la
taverne font partie des trésors légendaires des
douze allées : beaucoup en parlent, mais ils ne sont
~ 17 ~
qu’une poignée de privilégiés à les avoir jamais
vues.
Le faubourg de l’Epée et les environs
Les murailles de Calrie ne suffisent pas à contenir
la population grandissante de ceux qui viennent en
ville chercher une fortune facile. Ceux qui en ont
les moyens sont hébergés à l’intérieur des murs ;
les autres rejoignent un des faubourgs adossés aux
remparts et se débrouillent comme ils le peuvent.
La solidarité n’est pas de mise ; c’est du chacun
pour soi. Face aux habitants des faubourgs, les
véritables citadins ont une attitude hautaine, se
considérant comme une sorte d’aristocratie dans la
pyramide sociale de la cité. Il ne fait pas bon pour
eux de traîner dans ces zones la nuit tombée, car
des bandes de malandrins se chargeront de leur
faire ravaler leurs paroles méprisantes, avec
quelques dents au passage.
Le faubourg de l’Epée est le premier et le plus
peuplé des quartiers hors-ville. Il fut nommé ainsi
à la mémoire de Liliene Swordwraith. Le nom
n’était qu’un présage de paix et de fierté, qui ne
fut, hélas !, pas suivi sur le terrain. La violence
règne et la nuit, et la garde préfère laisser les
citadins régler eux-mêmes leurs querelles. Au petit
matin, un détachement des missionnaires royaux
vient ramasser les cadavres des pauvres hères
assassinés. Comme la vie ne vaut pas cher, les
mercenaires sont faciles à trouver. A la lumière
des lanternes et des lampes à huiles, des
silhouettes sombres se retrouvent et négocient dans
les ombres. On raconte que c’est là que les
guilders de Spider River Traders viennent recruter
les hommes de main dont ils ont besoin pour faire
respecter leur monopole et "réprimander" ceux qui
ne se comportent pas “comme il faudrait” avec
eux. Les personnes recrutées sont souvent des
fermiers pauvres mais musclés, qui ne
comprennent pas bien dans quoi ils s’engagent, et
dont les économies ont fondu comme neige au
soleil face aux mirages de la première cité
d’Aerenwe.
On ne dénombre pas moins de onze faubourgs
autour de Calrie, mais beaucoup ne sont que des
zones résidentielles sans histoire. La Porte de
l’Ecorce est nommée ainsi à cause des portes de la
cité à laquelle la localité fait face. C’est le lieu de
passage obligé des voyageurs venus de l’ouest, et
la Porte fait office de caravansérail, avec ses
entrepôts, ses écuries et ses comptoirs où il est
facile de rejoindre une escorte. Trou-en-terre
abrite la population des Hobbits ; c’est un endroit
où il fait bon vivre, percé de tunnels et envahi par
les tumulus. Le petit peuple assure lui-même sa
police, et les crimes sont rares.
Le royaume d’Aerenwe
L’organisation de la ville
Economie
Calrie ne comporte pas moins de huit places de
marché ; chacune officie deux fois par semaine (la
semaine Anuiréenne comportant huit jours) et
chaque matin deux marchés s’ouvrent donc.
L’attribution des emplacements se fait selon
l’ordre d’arrivée ; les négociants se lèvent très tôt
pour monter leurs estrades et leurs tables. Des
négociations âpres ont lieu avant même le lever du
soleil. Les riverains voisins des places prennent
avec philosophie l’impossibilité de dormir deux
matins par semaine - lorsqu’ils ne sont pas, eux
aussi, sur l’esplanade pour installer trépieds et
planches. Les portes de la cité restent fermées
pendant seulement quatre heures chaque nuit, tant
l’activité est importance. Cette liberté est remise
en question lorsque des dangers planent sur les
murailles, bien sûr ; depuis la disparition de
Liliene Swordwraith, les lourds battants ne sont
déverrouillés qu’à l’aube. L’inquiétude étend son
voile terne et déprimant sur les habitants, et dans
les tavernes les discussions tournent toutes autour
du même sujet : la succession d’Aerenwe, et le
risque de dégénérescence en guerre civile.
Les artisans se regroupent en confréries. Chaque
confrérie est plus ou moins ouvertement manipulée
par les holdings de guilde. Les bâtiments qui
servent de lieux de réunion varient énormément,
selon le prestige de la profession et la richesse de
ses membres. Les brasseurs et les orfèvres
disposent d’une luxueuse bâtisse dans le quartier
des douze allées, alors que les chandelons tiennent
leurs rares réunions dans la masure d’un de leurs
membres, apportant chaises et tabourets lorsque
leur hôte en manque.
Souvent, les professions se regroupent
géographiquement, mais tout dépend de l’artisanat
considéré. Pour les tanneurs par exemple, la
proximité de l’eau courante est obligatoire. Les
établissements de tannerie ont leur siège dans les
entrepôts en aval du port, où la puanteur de leurs
travaux n’incommode guère que les marins de
passage. Evidemment, les auberges du quartier
sont les moins chères de la cité - quand elles sont
ouvertes. D’autres métiers sont plus dispersés,
comme les barbiers, les potiers et les métiers de
bouche ; ils offrent un travail de proximité et
cherchent à s’implanter dans des lieux éloignés de
la concurrence, pour limiter la tentation de leurs
clients potentiels à courir les rues pavées pour
s’approvisionner ailleurs.
Il arrive souvent que quelques familles se
partagent la jouissance d’un petit appartement ou
d’une échoppe : elles s’organisent selon leurs
activités respectives pour occuper les locaux
pendant le temps nécessaire pour écouler leur
production, et ensuite laissent la place au suivant,
~ 18 ~
le temps de se reconstituer une réserve de produits.
Considérant que le loyer est payé chaque jour, les
négociants tentent de vendre le plus possible en un
minimum de temps. Cela garantit à la fois de bons
prix et une bonne qualité pour ce qui se vend sur
les étals. Les familles arrivent avec leurs mules
chargées de gros sac, posent leur enseigne, et
ouvrent boutique. Cette économie “saisonnière”
n’est pas sans poser de sérieux problèmes aux
voyageurs, qui ne retrouvent parfois jamais
l’échoppe où ils se sont rendu la veille.
Il y a bien trop de métiers pour qu’il soit possible
de tous les citer. Guérisseurs, tisserands, écrivains
publics, souffleurs de verre, cordonniers,
maréchaux ferrants, brasseurs, menuisiers,
apothicaires, maroquiniers, rémouleurs… Chaque
comptoir, chaque atelier, chaque échoppe n’est
que la partie émergée d’une organisation qui prend
ses racines aux quatre coins d’Aerenwe et parfois
au delà. Les apprentis, les livreurs, les coursiers,
les acheteurs sont autant de rouages d’une
économie complexe, le poumon qui fait battre le
cœur de la ville.
Les régents successifs d’Aerenwe ont toujours
libéralisé le commerce au maximum, pour
permettre au petit peuple de s’enrichir et d’accéder
à ses rêves de fortune. Même un marchand ruiné
ou un manoeuvrier jeté à la rue pourra s’en sortir
en acceptant un poste d’apprenti qu’il trouvera
dans les heures suivantes. L’industrie manque de
bras, et les marins de passage se font aussi de
l’argent dans un boulot occasionnel lorsque les
délais entre deux chargements dépassent la
semaine. Si ce n’était le coût des loyers à
l’intérieur des murs, la population exploserait. La
location est bien plus abordable, pour une période
courte. L’hébergement dans une auberge constitue
encore une autre alternative, laissant une bourse
bien remplie à celui qui accepte d’aller dans les
établissements les moins chers. A défaut, on peut
louer chez l’habitant.
Toute cité comporte une économie occulte,
malheureusement. Les bateleurs, les mendiants et
les voleurs sont nombreux, chacun cherchant à
gagner son pain aux dépens d’autrui. Beaucoup de
marginaux ne sont que d’honnêtes gens, peintres
des rues ou aventuriers dans le creux de la vague ;
mais le reste dispose d’une activité de façade et
s’adonne à des tâches plus répréhensibles lorsque
la nuit est tombée. On raconte que des autels
dédiés à Eloéle sont dressés sous la lune, officiant
comme lieux de rencontre entre les bandes de
cambrioleurs. Un boutiquier pillé a parfois la
surprise de retrouver certaines de ses affaires en
vente dans une foire quelques semaines plus tard,
chez un marchand replet à la réputation pourtant
sans taches. Malgré la vigilance de la garde, les
crimes et les délits sont en progression constante,
et l’impunité de certains voleurs célèbres en dit
long sur l’impuissance des forces de l’ordre. Des
Le royaume d’Aerenwe
victimes clament que la corruption s’étend
jusqu’aux plus haut niveaux de la garde. Que la
hausse de la criminalité soit due à l’augmentation
sans contrôle de la population, ou à la part
croissante de la guilde Spider River Traders dans
les affaires de la ville, la sécurité est en train de
devenir une préoccupation majeure des citadins.
Milice et Administration
Chaque corps de métier élit un connétable pour
une durée de cinq ans, ou jusqu’à sa démission, sa
mort, son déménagement hors des limites de la
cité, ou sa répudiation par le maître du royaume.
Ces connétables sont les représentants légaux des
artisans apparentés ; selon une organisation proche
de celle des guildes, ils assurent la loi envers les
membres de leurs corporations respectives, et
interviennent lors de la nomination des
compagnons au titre de maître-artisan. Néanmoins,
la guilde Spider River Traders fait de plus en plus
sentir son influence, et les élections récentes
désignent souvent un membre de cette guilde.
Certains connétables véreux utilisent leurs
pouvoirs pour faire régner la terreur, exigeant des
contreparties financières contre des fautes
imaginaires de certains artisans qui n’ont pas agit
“selon les convenances” envers les guildes
marchandes. Ces dernières exigent des prix de
40 % inférieurs à la normale pour leur circuit
interne, et quelques “services” occasionnels ; ceux
qui refusent ont intérêt à faire leurs valises au plus
vite. Des contestataires ont disparu sans laisser de
traces. La milice parvient parfois à jeter un
exécutant en prison, mais la prise sur le fait d’un
connétable corrompu est exceptionnelle. Le
maître-tonnelier Hoenberg (MA ; T0 ; Br, tainted,
13) a été jeté dans un cachot grâce à un
témoignage courageux, mais la femme qui brisa la
loi du silence fut retrouvée égorgée le lendemain,
alors qu’elle était - soi-disant - sous bonne garde.
Hoenberg jure qu’il s’agit d’un complot pour faire
de lui un bouc émissaire. Le maire de Calrie ne
sait pas quoi faire au juste, lorsque tout le monde
est suspect. Dans le doute, il préfère encore laisser
moisir le connétable en prison, eu égard à la
femme décédée.
Les membres de la milice sont choisis parmi les
habitants permanents de chaque quartier, qui
doivent servir pendant un mois tous les trois ans.
Ce cycle permet de “sensibiliser” les citadins aux
questions d’ordre et de morale. Toujours est-il que
le recensement est assez mal fait : des
déménagements impromptus permettent d’éviter le
service, tout comme les changements de noms, ou
le fait d’envoyer un autre à sa place. Les sergents
recruteurs chargés du recoupement ne semblent
pas non plus d’une moralité à toute épreuve.
Même si techniquement la garde de la ville assure
la nourriture et le logement pendant le mois de
milice, beaucoup continuent à vivre chez eux et
~ 19 ~
travaillent encore à leurs boutiques après les
heures de service. D’autres graissent la patte du
responsable qui vient les chercher, préférant payer
une somme d’or pour continuer à profiter de leur
commerce et esquiver un mois de corvée.
Les miliciens occasionnels n’occupent que les
postes subalternes. Les grades de sergent et de
capitaine sont l’apanage des engagés, et des fils de
bonne famille qui ont de quoi se payer un haubert
de mailles et une hallebarde. Les soldats doivent
acheter leur propre équipement, à un meilleur prix
que celui du commerce, mais il est souvent de
qualité inférieure. Le nombre de sergents est
variable, selon la population de chaque quartier.
Les capitaines sont une trentaine ; ils sont nommés
par le maire. Le dernier capitaine en date est
Lienna Dhoegandal (FA ; P3, Nesirie ;
unblooded), un paladin de Nesirie prompt à la
colère, qui voue une lutte contre le crime à la
limite du fanatisme. Elle a perdu sa main gauche,
mais il n’est ni convenable, ni sage de chercher à
savoir dans quelles circonstances cette mutilation a
eu lieu.
La collecte des impôts, le recensement des
citoyens, la réparation des remparts, l’attribution
des licences de vente sont autant d’activités
dépendant du corps des veilleurs. Leur nom vient
du fond des âges, lorsque les humains désignaient
l’un d’entre eux pour patrouiller à l’extérieur du
camp la nuit, de façon à prévenir les embuscades.
C’était une époque difficile et les veilleurs qui
vivaient longtemps avaient de bons yeux ; ils
assuraient la survie de leur communauté, et les
veilleurs actuels portent encore une partie de cette
charge, même si la menace d’une attaque des
Humanoïdes a beaucoup perdu de son sens. Les
veilleurs s’organisent en un système complexe,
dépendant de l’âge, de la condition sociale et de la
familiarité avec les mathématiques et les lettres.
Beaucoup des meilleurs veilleurs sont en fait des
veilleuses, issues des temples de Nesirie où elles
officient en tant qu’enseignantes pour les couches
les plus basses de la société.
Affaires religieuses
Calrie obéit à la loi d’Aerenwe : seuls les temples
de Nesirie sont autorisés. La vénération du peuple
envers la déesse de la mer est totale. Cette
adoration se fait au travers du Palais Ondin de
Nesirie, une cathédrale aux proportions immenses,
bâtie sur les berges du Callin. Le grand temple est
le siège du pouvoir du culte. Il est réputé dans tout
l’est d’Anuire.
La bâtisse est une merveille d’architecture. C’est
un palais splendide, couvert de nacre et de marbre,
aux fines colonnes et aux murs incurvés. On peut y
voir des torrents artificiels, des étangs et des
chutes d’eau, ainsi que de petits jardins parcourus
de sentiers en marbre strié. Les fresques
dépeignant des paysages marins sont faites de
Le royaume d’Aerenwe
pierres bleues, vertes et grises et sont mises en
valeur par la luminosité que dégage l’albâtre des
murs de la cathédrale. Les prêtresses, vêtues de
simples robes de lumière bleue et verte s’y
promènent. Même si l’on y éprouve aucune
difficulté de visibilité, l’air y prend souvent une
qualité miroitante, comme si l’on regardait au
travers d’une eau cristalline.
Au coeur de l’édifice se trouve une immense salle,
décorée des plus belles fresques murales, et au
centre de laquelle se trouve une représentation de
Nesirie elle-même. Au pied de la statue se trouve
point d’eau central de deux mètres de profondeur,
donnant directement sur le fleuve. Les services
importants sont conduits dans cette salle.
La décoration de la cathédrale est typique des
églises dédiées à Nesirie; des perles, du corail, de
la nacre se retrouvent dans tous les bas-reliefs, et,
parfois, un visiteur peut même découvrir des os
étrangement sculptés provenant du corps de
mystérieuses créatures marines.
Les autres cultes d’Anuire n’ont pas le moindre
temple dans la capitale. Cela n’est pas pour leur
plaire, et des tentatives d’implantation ont
régulièrement lieu. Les prêtres et les agents des
autres dieux du panthéon peuvent agir et circuler
librement dans les rues de Calrie ; ils peuvent
même officier, si leurs cérémonies n’interfèrent
pas avec l’ordre public. De petits autels sont
parfois installés sur les quais du port pour donner
un meilleur support aux prières de l’équipage d’un
navire de passage.
En secret, la situation est plus tendue. La nuit, des
sociétés de voleurs et d’assassins rendent leurs
hommages à Eloéle, la Sœur des Voleurs. Dans les
égouts creusés sur la ville, on entend parfois des
chants et on aperçoit des lumières. Des rumeurs
persistantes évoquent un culte maléfique dédié à
Kriesha derrière les murs tranquilles de certaines
maisons à colombages ; les officiels discréditent
ces racontars, les qualifiant de diffamation lorsque
les rumeurs désignent des nobles.
Les habitants
Le peuple de la cité est aussi diversifié qu’on est
en droit de l’attendre de la population d’une ville
de cette importance. La majeure partie habite à
Calrie depuis toujours ; mais un nombre
grandissant de familles est installé depuis peu. Ce
sont des fermiers ruinés par les guerres, des
forestiers qui ont peur de s’aventurer dans les bois,
et en général de pauvres gens dont l’existence a été
mise à mal à cause des troubles que traverse le
pays, ou les pays voisins. Nombre d’entre eux
viennent d’Osoerde en traversant le Callin la nuit -
lorsque les patrouilles fluviales et les gardes
frontaliers sont impuissants face à l’obscurité.
Liliene Swordwraith refusait qu’Aerenwe soit un
refuge pour les gens venus d’Osoerde : la plupart
étaient pauvres, et ajoutaient à la misère des
~ 20 ~
quartiers où ils s’installaient, plutôt que de
contribuer à la richesse du pays par leurs
compétences. En outre, il y avait parmi eux des
agents inféodés à l’un des deux héritiers, venus en
Aerenwe pour trouver du soutien à leur cause, ou
fomenter des troubles pour forcer le pays à prendre
position dans la guerre civile au nord. Mais malgré
la volonté des décrets de l’ancienne reine, la
surveillance vigilante des rives du Callin sur toute
sa longueur et en toutes saisons s’est avéré une
tâche impossible. Il doit encore rester des réseaux
d’espions et de démagogues à l’abri des remparts,
placardant leurs affiches et dissertant dans les
tavernes pour amener les citadins à réclamer une
intervention d’Aerenwe au nord du fleuve
frontière.
La population est fière et travailleuse. Les
échoppes des artisans sont le siège d’une activité
industrieuse, et certaines corporations détiennent
des entrepôts près du port, où elles expérimentent
de nouvelles méthodes de travail avec leurs
manœuvres - dans certains secteurs comme le
textile ou la menuiserie, Calrie s’apprête à rentrer
dans l’ère industrielle.
Bien que les humains constituent 99 % des
citadins, il existe quelques Elfes en ville - officiant
comme bardes dans les auberges de luxe du
quartier noble. Mais ils ne restent jamais très
longtemps. Les Nains et les Hobbits font meilleure
figure. Les Hobbits ont tendance à se regrouper
entre eux, et habitent à l’extérieur de l’enceinte
des fortifications, près du faubourg de l’Epée. Ils
ont creusé des terriers confortablement aménagés,
et s’occupent de leurs propres affaires - ils
préservent les racines de leur culture et vivent en
paix avec le voisinage. Les Nains sont davantage
mélangés au reste de la population : ils sont
présents dans tous les artisanats où le métal est
fondu ou travaillé, bien qu’on compte aussi
quelques brasseurs fameux. Il existe une taverne
exclusivement naine, le Tablier de Pierre, dans le
quartier des Pentes Fertiles ; ce sont des Naines qui
assurent le service. L’emplacement exact de
l’établissement n’est connu que des habitués.
L’entrée est secrète. Tout individu de plus d’un
mètre cinquante n’est pas le bienvenu à la table
des Nains.
Malgré la disparité de richesse et de situation entre
les habitants, tous partagent des traits de caractère
communs : ils s’estiment les légataires d’un
héritage précieux et ancien, et s’efforcent de
préserver les traditions du folklore local. Les
étrangers de passage sont accueillis avec
bienveillance ; les habitants ne profitent pas de
leur ignorance pour les détrousser ou les escroquer.
Les nouveaux arrivants qui souhaitent s’installer,
en revanche, devront faire preuve d’opiniâtreté et
de persévérance pour gagner la confiance des
citadins ; rien ne leur sera épargné. Ce n’est
qu’une fois tombé une fois dans chaque piège
Le royaume d’Aerenwe
qu’ils deviendront de véritables habitants de
Calrie, connaissant les moindres recoins de leur
quartier et ayant leur réseau de relations. Et ce
n’est qu’à l’issue de ce parcours initiatique qu’ils
seront pleinement acceptés par la population, au
même titre que les natifs de la cité.
Personnalités
Arielle Aeren, reine d’Aerenwe
Arielle (FA ; F3 ; Ma, minor, 28 ; N) hérita du
domaine d’Aerenwe alors qu’elle avait vingt ans.
La princesse passa pratiquement toute son enfance
à Calrie et dans le reste du royaume. Elle en
connaît mieux que personne les régions. Sa
connaissance de la capitale est tout aussi
étonnante ; la reine sort parfois en ville, sans la
moindre escorte, le visage à peine caché,
simplement pour pouvoir apprécier d’abandonner
pour un instant le royaume dont elle a la charge, et
vivre de nouveau quelques moments fugaces avec
son peuple.
La reine n’apprécie pas le protocole, et a plusieurs
fois tenté de le simplifier, au grand dam du
Chambellan. Celui-ci tient à tracer une limite nette
entre le petit peuple et la noblesse ; Arielle, par
goût du défi, aime se mêler au peuple, sans la
moindre protection. Néanmoins, elle n’est pas
stupide et a renoncé à ce petit jeu depuis la mort
de Liliene Swordwraith.
Arielle est aussi ambitieuse que son frère, mais sait
cacher son jeu sous des airs de faux semblant.
Personne ne peut voir son visage doux et
romantique, et imaginer le feu de la convoitise qui
brûle derrière ses yeux en amande. L’héritière
aime la compétition ; ce trait de caractère remonte
à l’enfance, où la princesse vivait très mal
l’interdiction qui lui était faite de participer aux
mêmes activités que son frère. Lorsque Thalien
s’adonnait à l’équitation et au combat, Arielle
subissait des cours de danse et de maintien.
Plusieurs fois, elle assista à des entretiens de
Liliene avec des nobles venus de pays lointains,
mais ils venaient plus pour demander que pour
offrir. Arielle se jura d’avoir un jour un royaume
assez grand pour que les nobles des autres pays
viennent se prosterner devant elle.
La reine d’Aerenwe expérimente un début de
règne difficile, qui sera riche de défis et
d’enseignements.
Thalien Aeren, prince rebelle
Le Prince Thalien (MA ; F6 ; Ma, minor, 28 ; NE)
est le jumeau d’Arielle. Les deux enfants adoptifs
de Liliene Swordwraith se ressemblent, mais
superficiellement. Thalien dispose d’une charpente
plus robuste, une musculature développée dans les
nombreux jeux physiques qu’il affectionnait de
~ 21 ~
pratiquer au cours de son adolescence. Thalien
voulait toujours avoir le dernier mot, voulait
toujours être le meilleur en tout. Il se lança dans
une exploration profonde d’Anuire et de Cerilia,
pour mieux se former à son rôle de futur roi - du
moins le croyait-il. Néanmoins, il semble avoir
saisi assez tôt que Liliene Swordwraith préférait sa
sœur, plus subtile et plus mesurée ; depuis ce
moment, il tourna toute son attention à fonder
parmi les aristocrates les fondations de sa future
rébellion. Il alla chercher à l’étranger le soutien
qu’il ne pouvait obtenir sur le sol d’Aerenwe. Son
habileté était aussi grande que celle de sa sœur, et
personne ne réussit à le mettre à jour. Si ce n’était
le retour précipité de sa jumelle, son plan aurait
été une réussite totale. L’arrivée d’Arielle, la
farouche opposition de Saerik Bhannor, le
commandement des armées loyalistes par les frères
Alwier furent autant de facteurs qu’il avait prévus
mais jamais envisagés tous ensemble.
Thalien est dévoré par l’ambition, préférant risquer
de tout perdre en se lançant tête baissée dans un
conflit plutôt que d’avoir à négocier, mais il n’est
pas entièrement mauvais. Jamais il ne fera de mal
à Arielle, car il apprécie sa sœur, et regrette
qu’elle se soit mise en travers de sa route - pense-t-
il. Ses hommes de mains, et les nobles qui le
soutiennent comme des valets risquent de ne pas
avoir la même compassion, malheureusement.
Nienna de Ruimache, prêtresse de
Laerme (lieutenant)
Laerme est la déesse de la beauté, de l’amour et
des arts. Nienna (FA ; Pr2, Laerme ; unblooded ;
CG) rend hommage à la divinité de part sa seule
beauté. Des cheveux roux et or tombent en cascade
autour d’un visage flamboyant, aux yeux verts et
aux lèvres pulpeuses. Nienna de Ruimache est tout
à fait consciente de sa beauté, et la cultive avec un
talent consommé. C’est un réel atout pour la reine
que de disposer de la jeune femme à la cour - non
seulement elle ensorcelle les hommes, mais elle
n’arrive même pas à se faire détester des femmes,
par sa gentillesse et sa serviabilité.
Comme toute servante de Laerme qui se respecte,
la prêtresse est experte dans l’art de la
manipulation, de la séduction et de la diplomatie
(Diplomatie : 20). Arielle rencontra la prêtresse -
alors itinérante - sur le bateau qui l’emmenait à
Andujar ; elles sympathisèrent, et après quelques
péripéties dans la cité Khinasie, Nienna découvrit
l’héritage d’Arielle Aeren et lui jura allégeance.
La prêtresse de Laerme n’est pas une fanatique ;
elle ne cherche pas les conflits avec les prêtresses
de Nesirie et s’entend bien avec ces dernières. La
seule concession que Nienna a faite sur ses vœux
consiste à rester à Aerenwe un mois par saison ;
mais le reste du temps, elle préfère voyager à
Le royaume d’Aerenwe
travers Anuire comme se doivent de le faire les
serviteurs de sa déesse.
Mourde Alondir, marchand (lieutenant)
Mourde Alondir (MA ; T2 ; Ma, minor, 15 ; LN)
est un ancien négociant de la guilde de Siele
Ghoried. Il vint offrir ses services à la couronne
après avoir été jeté comme un malpropre par Siele
Ghoried, soi-disant à cause de son âge avancé.
Après explications, la marchande déclara que c’est
tout ce qu’elle avait pu retenir contre l’employé,
mais que le motif réel était une sombre histoire de
corruption. Elle s’avéra néanmoins dans
l’impossibilité d’amener la moindre preuve.
Liliene Swordwraith fut émue par le pauvre
homme et décida de lui laisser sa chance. Elle eut
raison, car jusqu’ici il s’est révélé d’une honnêteté
digne d’éloges.
Le marchand a dépassé la soixantaine, mais reste
un expert dans l’art du commerce. C’est un
négociateur acharné et un juriste de talent,
connaissant les différences de législation
commerciales entre les principaux pays d’Anuire,
de mémoire. Son efficacité est frénétique, et
lorsqu’on lui demande de ralentir la cadence, il
réplique avec son humour pince-sans-rire
habituel : « Je me reposerai quand Haelyn me
convoquera devant lui ! ». (Intrigue : 14 ; Loi :
16 ; Diplomatie : 10)
Ses cheveux sont blancs, ses mains usées mais
toujours habiles. Mourde s’habille avec des étoffes
sombres et fonctionnelles, généralement du cuir, et
une toge noire qui cache une partie de sa bedaine.
Il fait des efforts les rares fois où on réussit à le
faire émerger de ses affaires pour le forcer à
rejoindre la cour. Le reste du temps, il affectionne
les tenues robustes pour superviser ses hommes
dans la forêt. Malgré les troubles d’Erebannien,
personne n’a jamais levé la main sur lui. De toutes
façons, il connaît la forêt mieux que n’importe
quel Elfe.
Cole et Cale Alwier, Serviteurs de la reine
défunte
Cole et Cale (chacun (F½E ; F4-W4 ; unblooded))
sont des jumeaux qui quittèrent la sécurité de
l’Aelvinnwode pour assister Liliene Swordwraith,
dès son accession au trône. Elle plaça une bonne
partie de la charge de la régence sur les épaules de
ses conseillers. Ils se chargèrent de
l’administration du royaume et du règlement des
affaires courantes lorsque Liliene devait se retirer
de la scène. Leur fidélité envers l’ancienne reine
était totale ; c’est encore elle qu’ils servent
aujourd’hui, et le respect de sa mémoire est la
seule chose qui les pousse à prendre position dans
le conflit entre Arielle et Thalien. Le souvenir de
Liliene est néanmoins suffisant pour qu’ils
s’adonnent à leur lourde tâche sans la moindre
~ 22 ~
arrière-pensée. Cole et Cale sont amicaux et
compétents, et la reine peut s’appuyer sur eux,
mais uniquement parce qu’elle a été choisie
comme héritière par la reine disparue.
Les jumeaux sont identiques en apparence et en
comportement. Seul Cale a une voix un peu plus
grave. Les Demi-Elfes sont des enchanteurs et des
archers accomplis ; ils sont formidables en combat,
ajoutant la puissance des chants magiques elfiques
à la précision mortelle de leurs lames.
Saerik Bhannor, Grand Chambellan
Le rôle de Grand Chambellan est surtout d’aider et
de conseiller le maître d’Aerenwe, et de le libérer
des tâches subalternes. Saerik (MA ; W0 ;
unblooded ; LG) occupe ce poste depuis plus de
cinquante ans, toujours avec la même dévotion
pour Aerenwe. Il ne fut pas répudié par Liliene
lorsqu’elle accéda au trône : elle avait vu dans les
yeux de l’administrateur le talent d’un homme qui
ne prête pas allégeance à un roi, mais à son pays.
Le seigneur Bhannor fit sauter Arielle et Thalien
sur ses genoux lorsqu’ils étaient enfants ;
maintenant, la situation est très différente, et le
vieil homme se désole de ce mauvais tour du
destin. La disparition subite de Liliene
Swordwraith lui porta un coup rude et son visage
s’est beaucoup assombri en quelques jours.
Le Grand Chambellan est un administrateur de la
plus haute compétence, qui connaît son métier
mieux que n’importe qui. Il accomplit
quotidiennement des tâches que d’autres jugeraient
impossibles. Son bureau est un fouillis de
paperasse, de parchemins et de registres ; Saerik
en a fait son repaire.
Le vieil homme est courbé par les ans. Il porte en
permanence une toge blanc cassé, ornée d’un
ruban insigne de sa fonction. Le sommet de son
crâne est chauve, mais il a encore une couronne de
cheveux blancs bouclés qui renforce l’aspect noble
de son visage ridé. Ses mains et sa démarche sont
alertes et sûres, ses paroles tranchantes et sa
franchise légendaire. Il se désole de ne pas avoir
compris plus tôt que Thalien était dévoré par
l’ambition au point de faire basculer le royaume
dans la guerre civile.
Holdings et Possessions
Arielle Aeren n’est pas la seule régente à disposer
du pouvoir en Aerenwe. Chaque province dispose
de ses propres holdings, et certains ne sont pas
contrôlés par la reine. Comme dans les autres
royaumes d’Anuire, celui qui contrôle le royaume
doit composer avec les autres puissances,
politiques ou magiques, de l’endroit.
Le royaume d’Aerenwe

seule qu’il qualifie de légitime dans les provinces

Aerenwe qu’il tente de contrôler, naturellement. Ils se
Province Loi Temple Guilde Source dénomment eux-mêmes les partisans de Thalien.
Banien’s PhS (1) MC (0) MA HMA (3) C’est une équipe de coupe-jarrets, de mercenaires,
Deep (1/6) (0) RA (3) de repris de justice et d’exilés, attirés par les
Calrie (6/0) AA (6) MC (6) SG (6) HMA (0) vaines promesses de leur maître. Ils prennent
MA plaisir à rudoyer le petit peuple, et n’ont pas plus
(0) de légitimité que des bandes de brigands qui
Dhoenel (5/0) ThA (5) MC (5) SG (5) HMA (0) pillent les fermes, et se payent en nature sur les
Halried (5/0) ThA (5) MC (5) SG (5) HMA (0)
femmes des villages qu’ils dévastent lorsqu’ils
Northvale PhS (1) MC (0) MA HMA (5)
(1/6) (1) RA (1) “collectent les impôts”.
Shadowgreen PhS (1) MC (1) MA(1) HMA (5) Chaque opération des partisans de Thalien laisse
(1/6) RA (1) son compte de cadavres et de fermes brûlées. Les
Westmarch PhS (1) MC (1) MA HMA (3) nobles locaux ferment les yeux sur ces actes
(1/6) (0) RA (1) criminels, car ils espèrent que les troubles ne sont
AA : Arielle Aeren (Aerenwe) que transitoires, et qu’ils se calmeront lorsque
ThA : Thalien Aeren Thalien régnera sur Aerenwe tout entier. Thalien
PhS : Phasiphiel Shywnnd lui-même clame que la violence de ses hommes de
MC : Maire Cwillmie (Nesirian) main n’est que de la légitime défense face à
SG : Siele Ghoried (Spider River Traders) l’oppression des missionnaires royaux sur la
MA : Mourde Alondir (Aerenwe Royal Guild) population. Ils se dénomment des libérateurs, et
HMA : High Mage Aelies
déclarent agir au nom du peuple, au bénéfice du
RA : Rogr Aglondier (Ilien)
peuple. Le “peuple” en question n’est évidemment
que la bande de mercenaires cosmopolite de brutes
La loi à la solde du frère d’Arielle.
Les holdings de Loi du royaume sont divisés entre
trois régents : Arielle Aeren, Thalien Aeren, et Les missionnaires royaux
Phasiphiel Shywnnd. Les holdings étaient Les missionnaires royaux forment le bras armé qui
entièrement possédés par Liliene Swordwraith un fait respecter les décisions de la couronne sur le
an plus tôt ; mais le transfert de régence entre la terrain. Les missionnaires sont des guerriers, des
reine et son héritière se fit suffisamment mal pour lettrés et des forestiers ; leur tâche comporte la
permettre à des prétendants de s’engouffrer dans charge de faire respecter la loi et de collecter les
les brèches. impôts, mais ne se limite pas à cela. Ils agissent au
Liliene Swordwraith croyait que la couronne se nom d’Arielle Aeren partout où la reine ne peut se
devait d’avoir une forte présence dans toutes les donner la peine d’intervenir personnellement. Ils
provinces ; elle s’assura donc du contrôle total de assument la transmission des messages
la loi. Malheureusement, depuis que le pays diplomatiques à la cour, s’assurent du bon
traverse des troubles, la majeure partie de ces ravitaillement des unités militaires, et supervisent
holdings s'est retrouvée dans les mains de régents l’autorité des responsables locaux.
qui les emploient activement contre le pouvoir Leurs travaux sont trop nombreux pour être tous
central. mentionnés ; ils sont indispensables à la bonne
marche de l’état, formant une équipe
Les milices d’Erebannien professionnelle d’agents prêts à répondre à toutes
Au sud, sous le couvert épais du feuillage des les urgences qui pourraient émerger, accomplissant
arbres millénaires d’Erebannien, les soldats de leur devoir avec responsabilité et diligence. Ils ont
Phasiphiel font régner leur terreur. Ils pressurent la un fort prestige au sein de la population, et
population et la massacre selon des rites surgis nombreux sont les adolescents qui tentent de faire
d’un autre âge. Ils prétendent restaurer le royaume carrière et de revêtir la toge des missionnaires.
d’Erebannien, mais n’ont aucune légitimité. Plus De toutes les couches de la société d’Aerenwe,
de la moitié des troupes qui ravagent l’Erebannien c’est dans les missionnaires royaux que l’on trouve
sont composées d’humains, dont une bonne part de le plus de personnages à niveaux, utilisés comme
mercenaires venus de Voosgard - et ces derniers rangers ou chefs de patrouille pour les guerriers.
n’ont évidemment jamais eu le moindre rapport Le corps des veilleurs qui administre les quartiers
avec le royaume Sidhelien qui s’abritait dans les de Calrie est une branche de cet ordre. Toutes les
bois, il y a des siècles. milices, tous les maires, tous les notaires, les
juges, les patrouilleurs, les gardes forestiers sont
Les partisans de Thalien des missionnaires royaux.
Les provinces de l’ouest se sont détournées de la
lumière de Calrie, et Thalien s’est empressé de
mettre en place une administration parallèle, la

~ 23 ~
Le royaume d’Aerenwe
Les Temples
Tous les peuples d’Anuire font preuve d’une
grande piété dans leur vénération, et la population
d’Aerenwe ne fait pas exception. Les temples et
les oratoires font partie intégrante du paysage, et
même les voyageurs de passage laissent leur obole
au prêtre local. Les dieux interviennent dans
chacun des stades de la vie d’un habitant du pays :
depuis le baptême jusqu’aux derniers sacrements,
en passant par le mariage et les cérémonies de
bénédiction des récoltes.
Le Temple de l’Est de Nesirie
Le temple de l’est est la seule congrégation
religieuse à posséder des holdings en Aerenwe.
C’est l’église la plus puissante et la mieux
organisée dédiée à Nesirie, et de loin.
L’enseignement prodigué par l’Eastern Temple of
Nesirie est juste et bon. L’église ne tente pas de
manipuler ses croyants comme d’autres clergés
d’Anuire, en tentant d’effrayer les ouailles, ou de
les rallier à des causes partisanes en jouant sur la
manipulation de leur ignorance.
A la place, les prêtresses maintiennent un strict
respect des dogmes de sagesse et de bonté que
défend Nesirie - de ce fait, les prêtresses du culte
sont écoutées des peuples et appréciées pour la
justesse et la pertinence de leurs conseils. Nesirie
est la Déesse de la Fertilité, de la Vie, de l’Eau et
de la Découverte; beaucoup de femmes, dont une
forte proportion de nobles, suivent ses
enseignements.
Les suivants du culte sont des gens du peuple, pas
particulièrement organisés ou influents. En
revanche, ils sont très nombreux, et l’influence du
culte vient de là. La paix de Nesirie est un idéal
auquel beaucoup aspirent, et entre en opposition
avec les intérêts de certains nobles avides de
pouvoir. Mais nul ne peut espérer ignorer le culte
de Nesirie dans les provinces où il est installé, car
il draine une très forte dévotion.
Les temples de Nesirie sont toujours liés à une
importante source d’eau vive - que ce soit les
rivages de l’océan, la source d’une rivière, ou ses
berges. Des bassins communiquants amènent l’eau
par différentes fontaines à toutes les salles, et des
cascades aux multiples jets d’eau ajoutent à la
splendeur des lieux. Des cornes de narval, des
coquillages précieux, sculptés de manière
splendide, du corail, des perles et d’autres trésors
de la mer assurent la décoration des temples.
Les prêtres de Nesirie sont par tradition les
gardiens de l’investiture, le sort qui permet de
modifier le pouvoir sur la terre, dans le royaume
d’Aerenwe.
La ligne de conduite de l’Eastern Temple of
Nesirie est remarquablement modérée, comprenant
le besoin que le peuple éprouve pour d’autres
cultes. L’essentiel des croisades et des luttes
~ 24 ~
politiques a pris la forme de mesures défensives.
Cependant, de temps en temps, mais avec
beaucoup de subtilité, l’église de Nesirie reprend
l’offensive et étend son influence sur de nouveaux
rivages d’Anuire.
En Aerenwe, les relations entre le temple et le
pouvoir ont toujours été excellentes. Le culte s’est
toujours révélé digne de confiance, et aida autant
que possible le pays dans toutes les périodes
troubles de son histoire. Aujourd’hui, grâce à
l’aide de Liliene Swordwraith, Maire Cwillmie a
réussi a coloniser l’île de Caelcorwynn pour y
forger un nouveau royaume. Peut-être que sur le
long terme, cela éloignera un peu la prêtresse de
Calrie ; mais pour l’heure, Maire est aussi présente
que possible et officie elle-même lors des services
quand elle en a l’occasion. C’est une des seules
régentes d’Anuire à oser se promener - n’importe
où dans la ville et même autour de la ville - sans la
moindre escorte. Le Temple de l’Est contribue
pour une part importante au budget du royaume,
en échange de la protection et du soutien de l’état.
C’est un bon accord, qu’il serait judicieux de
poursuivre. Le culte pourrait être la clef de la
victoire dans la lutte qui oppose Thalien et Arielle,
pouvant déterminer les investitures et se livrer à
l’agitation si besoin est.
Guildes
Les provinces d’Aerenwe sont source de profits
énormes pour ceux qui contrôlent le commerce. En
Aerenwe, deux guildes s’affrontent, mais elles ne
sont pas vraiment de la même taille.
Aerenwe Royal Guild
Maître de la petite guilde royale d’Aerenwe,
Mourde Alondir fait prospérer la petite affaire
grâce au privilège qui lui a été accordé d’exploiter
l’Erebannien. La concession fut accordée par
Liliene Swordwraith. Seule la protection de Calrie
empêcha l’établissement commercial de se faire
proprement absorber par Spider River Traders, la
guilde de Siele Ghoried. La situation a toujours été
délicate dans la mesure où la guilde étrangère est
un allié officieux du royaume, même si sa
présence hégémonique commence à devenir
pesante.
Mourde Alondier est un négociant âgé mais
particulièrement compétent. Il serait à même de
rivaliser avec les plus grandes guildes si ses
moyens n’avaient pas été aussi limités au départ.
La guilde royale manque de tout, et même ses
coursiers sont parfois en rupture d’encre et de
papier. Le marchand de défend avec un
acharnement rare, levé aux aurores et couché tard
dans la nuit. Il semble ne jamais dormir.
L’efficacité dans le travail est le dernier rempart
qui sauve la Guilde Royale de son concurrent
direct.
Le royaume d’Aerenwe

Spider River Traders routes de commerce afférentes - sous le contrôle

Comme beaucoup de Guildes d’Anuire, de la couronne.
l’organisation de Spider River Traders est Evidemment, cette nouvelle donne ne se fera pas
pyramidale. Dans chaque région, un certain sans heurts. Le royaume devra avoir les reins
nombre d’établissement mineurs sont contrôlés par solides pour s’attaquer à la marchande ; et ce
un ou deux établissements majeurs, qui organisent faisant, il risque de donner un allié privilégié à
les convois et détiennent les entrepôts. Dans Roesone.
chaque province, un responsable répond de
l’activité économique de la région devant Siele Sources
Ghoried. Chacun de ces individus a été placé à son Aucune nature sauvage n’a survécu à l’expansion
poste par la jeune femme, personnellement, et ils des provinces du nord. Du point de vue magique,
sont tous complètement dévoués à la régente. les provinces de plaine d’Aerenwe sont aussi
Le fonctionnement de la Guilde est un modèle de mortes qu’un caillou. Au sud, en revanche, les
précision. Rien n’est laissé au hasard. Un terres sauvages d’Erebannien laissent la mebhaighl
impressionnant système d’estafettes et de courir librement sur le sol, constituant une grande
messagers assure à chaque marchand la certitude source de puissance magique. Deux mages
de savoir si un convoi est arrivé à son but sans possèdent des sources en Erebannien ; mais ils
encombres, si un acheteur donné doit s’attendre à essayent de ne pas lutter entre eux, car ce sont des
recevoir une caravane, etc. êtres civilisés. Aucun d’eux ne souhaite briser le
Siele Ghoried hérita de l’établissement très jeune, pacte tacite qui protège leurs sources forestières.
après la mort violente de son père. Agissant avec
talent, la marchande gagna la confiance de Liliene Le Haut Mage Aelies
Swordwraith et reçut l’autorisation de s’implanter
Aelies veille sur l’Erebannien depuis de
dans le pays. Cette implantation ne devait
nombreuses générations humaines. Le Demi-Elfe a
cependant pas dépasser 50 % du commerce dans
un visage fin, presque émacié, et des traits tendus.
les provinces de plaine, et en aucun cas la guilde
Malgré son aspect frêle et les habits ternes et
ne devait investir l’Erebannien. La vieille reine ne
discrets qu’il affectionne, le mage a une aura et
voulait pas que n’importe qui puisse exploiter sans
une prestance qui force le respect. On sent
contrôle les richesses naturelles de la forêt.
l’influence de la mebhaighl en sa présence, comme
Les termes de l’échange ont été balayés depuis
si son enveloppe charnelle en était imprégnée, en
longtemps. La marchande contrôla rapidement
rayonnait.
100 % du commerce des plaines, et s’implanta en
Le Haut Mage gère ses affaires sur une autre
Erebannien, où des bûcherons s’adonnèrent à cœur
échelle que les vies humaines. Lorsqu’on a la
joie à la coupe d’arbres millénaires. Liliene
durée de vie d’un Demi-Elfe, chaque saison qui
Swordwraith, affaiblie par la maladie, ne put guère
passe n’a pas la même importance que pour les
s’y opposer que verbalement, mais trouva la force
humains. Si Aelies a bien un défaut, c’est sa
d’ordonner un dernier décret pour interdire l’accès
concentration. Il peut passer des mois sur une
de l’Erebannien aux agents de l’établissement
tâche qu'il s'est fixé, allouant tout son temps à ses
marchand. Depuis, Siele Ghoried fit machine
recherches, complètement hermétique à ce qui
arrière : comprenant qu’elle allait trop loin, elle
peut se produire dans le monde extérieur. Pendant
ordonna la destruction de ses propres holdings
ce temps, il confie la gestion de son domaine à ses
forestiers. La marchande fait depuis des efforts
lieutenants, généralement des humains. Aelies
constant pour se faire bien voir, et ravale son
aime les humains, mais regrette qu’il faille tout
honneur derrière la volonté de rester en bons
réapprendre à leur descendance au bout de si peu
termes avec le maître du pays.
de temps.
La situation est complexe, dans la mesure où la
En politique, le Haut Mage est d’une loyauté
guilde est importante. Spider River Traders
totale. Il respecte les accords à la lettre, rien de
intervient par des dons réguliers dans le budget du
moins, rien de plus. Le mage n’aime pas se faire
royaume, et c’est donc un conflit d’intérêt unique
des amis ou des ennemis ; c’est pour cela qu’il
qui se présente à Arielle Aeren. Les dons de la
évite de prendre position, préférant s’allier avec un
guilde ne sont qu’une petite partie de ce qu’elle
camp seulement temporairement. Il n’est attiré ni
gagne dans la contrée ; en fait, les dons, en
par l’or, ni par le pouvoir, ni par quoi que ce soit
échange de la non-taxation, s’avèrent à peine
que les humains peuvent offrir ; il veut juste éviter
égaux à ce que Calrie gagnerait si elle taxait
de former des unions - seulement des alliances
normalement les revenus de la Guilde. Il faudrait
ponctuelles.
peut-être renégocier les termes de l’accord à court
D’un autre côté, tout le monde peut espérer
terme. A plus long terme, la nouvelle reine aura à
recevoir le soutien d’Aelies pour un temps. Cette
décider s’il faut sacrifier un allié du domaine pour
attitude le fait passer pour une puissance neutre,
faire retomber certains niveaux de holdings - et les
détachée des clivages, auprès du reste d’Anuire.

~ 25 ~
Le royaume d’Aerenwe
Personne n’est en mauvais termes avec Aelies. Il
est célèbre et tout Anuire le connaît et l’apprécie.
Le mage tient en haute estime les “concurrents
amicaux” (un concurrent amical, selon la
définition du mage, s’applique à tout régent qui ne
cherche pas à s’approprier ce qu’Aelies possède).
Ceux qui tentent de perturber ou d’attaquer le
domaine d’Aelies sont reçus comme des ennemis,
lorsque le mage a perçu leur présence - ce qui peut
prendre des années. Le Haut Mage n’aime pas
avoir des ennemis. Aelies se contente d’éliminer
ceux qui arrivent à ce jugement.
Rogr Aglondier d’Ilien
Rogr Aglondier règne sur le comté d’Ilien, un des
plus petits royaumes d’Anuire. La population est
concentrée dans la Cité Libre d’Ilien, une ville
gigantesque qui dépasse Calrie et dont la
population dépasse les 70 000 habitants. Cela fait
des siècles qu’Ilien s’est autoproclamé état neutre,
et les régents successifs du domaine essayent de ne
pas interférer avec le destin des pays voisins. La
charte de neutralité d’Ilien fut acceptée par tous les
pays d’Anuire ; seul Aerenwe refusa, car la reine
d’alors craignait de provoquer le courroux du Haut
Mage en signant un tel document.
Le mage d’Ilien est amical et sympathique. C’est
un homme âgé, qui sait qu’il n’aura jamais la
puissance d’Aelies ; mais il s’en moque. Il règne
sur ses gens, simplement, et pense que le prestige
ne vaut pas l’or qu’il nécessite. La cour d’Ilien est
rustre et le comte s’en moque.
Les relations diplomatiques entre Ilien et Aerenwe
ne sont pas très développées, mais cordiales. Ilien
n’a évidemment pas la moindre prétention
territoriale sur le royaume ; il se contente de saluer
la reine et de souhaiter que l’Erebannien reste
aussi longtemps que possible sauvage - pour
protéger ses sources. Rogr Aglondier ne prétend
pas être un requin dans les négociations ; il vit et il
laisse vivre. Il acceptera sans doute de rendre un
service occasionnel à Arielle Aeren si elle en fait
la demande, mais ne proposera pas son aide
spontanément.
Rogr Aglondier et Aelies se respectent et
s’apprécient ; ils ne cherchent pas à entrer en
conflit. Aelies n’est pas agressif ; quant au mage
d’Ilien, il sait ce qui est arrivé à ceux de ses
ancêtres dans la dynastie qui ont déterré la hache
de guerre contre le Haut Mage.
Situation générale du royaume
Si ce n’était l’affaiblissement général du royaume
miné par la guerre civile, Aerenwe serait un
royaume bien plus puissant qu’il n’est
actuellement - en mesure d’envisager son
expansion.
~ 26 ~
Loyauté et imposition
La loyauté de la population des provinces est haute
à Calrie et basse dans les autres provinces. A
Dhoenel et Halried, les manipulations de Thalien
ont porté leurs fruits ; dans l’Erebannien, les Elfes
rejettent la loi des humains et tentent de renverser
le pouvoir en place. La loyauté faible implique que
toutes les actions que tente Arielle Aeren dans les
provinces affectées coûtent 1 GB de plus. C’est
cher et la couronne doit en tenir compte.
L’imposition directe est faible à Dhoenel et
Halried, inexistante en Erebannien, et forte à
Calrie. C’est ce que la reine Arielle peut faire de
mieux sans tourner contre elle la population des
provinces. Les collecteurs d’impôts ramènent
13,5 GB au domaine.
Questions militaires
Les guerriers d’Aerenwe sont aguerris et dévoués.
Une unité de cavalerie est stationnée à Calrie,
pouvant rejoindre n’importe quelle partie du
royaume en un laps de temps très court. La garde
de la capitale est constituée d’un régiment
d’infanterie d’élite. D’autres baraquements près de
Caer Callin abritent une unité de piquiers, deux
d’infanterie, et une de scouts. Ces forces étaient
stationnées dans les provinces de l’ouest, mais ont
été repoussées par les sbires du frère de la reine.
Actuellement, ils servent comme force d’appoint
pour le service d’ordre qui a fort à faire pour
garder le calme dans les faubourgs.
La flotte comporte 2 galions, 6 caravelles et
2 goélettes. Les navires sont stationnés à Nesirian,
où ils aident Maire Cwillmie contre tout problème
venu de Mieres. Actuellement, ils ne pourraient
pas servir à grand-chose d’autre.
Infrastructures et places fortes
Les routes sont nombreuses, mais aucune ne porte
à l’extérieur du royaume. La route principale va de
Westmarch à Dhoenel, en passant par Halried, puis
repart jusqu’à Banien’s Deep en passant par
Calrie. Aucune route ne vient ni ne part de
Northvale ni de Shadowgreen.
Caer Callin protège la province de Calrie. Environ
5 000 habitants vivent à l’ombre des murailles du
château de niveau (6). Les holdings de Loi que
Thalien possède en Halried et Dhoenel sont
fortifiés chacun au niveau (5) ; cette protection
inopinée est un signe supplémentaire du caractère
prémédité de la trahison du frère d’Arielle.
Commerce
La petite guilde de Mourde Alondir n’est pas de
taille à lutter contre celle de Siele Ghoried, mais
fait de son mieux pour amener des devises à la
couronne. Les holdings ne rapportent rien, mais
permettent l’établissement d’une petite route
commerciale de Westmarch jusqu’à Calrie,
Le royaume d’Aerenwe
représentant l’approvisionnement en bois de
qualité des artisans en marqueterie. La route
rapporte 3 GB par saison.
Deux autres routes de commerce arrivent à Calrie ;
elle proviennent de la guilde de Siele Ghoried. Les
marchandises de Spider River Traders arrivent
jusqu'au port, mais ne sont pas taxées
actuellement. Arielle pourrait tenter de récupérer
1 GB sur chacune des routes qui en génèrent 5,
sans trop gêner la marchande. Taxer davantage ne
serait pas une bonne idée, car Siele Ghoried
n’hésiterait pas à se tourner vers une autre
destination et à abandonner le commerce avec la
capitale.
Siele Ghoried contribue aux finances du royaume,
avec 6 GB par saison. C’est plus que Maire
Cwillmie, mais en regard de la richesse de la
marchande, et de ce que lui rapportent ses holdings
en Aerenwe, c’est ridicule. Une goutte d’eau dans
la mer. Cet accord remonte à une époque ancienne,
où Liliene Swordwraith avait permis à
l’établissement marchand de s’implanter en
échange d’une partie de ses revenus. Depuis, la
guilde s’est appropriée bien plus que ce à quoi elle
avait droit et sa contribution n’a pas été réévaluée.
Récapitulatif des Finances
Le trésor du domaine se monte à 63 GB. C’est le
reste d’une époque faste, du pays uni sous la
bannière de Liliene Swordwraith. Des années de
gestion précise ont permis d’arriver à cette
somme ; si jamais le trésor devait être dépensé, ce
sera à bon escient.
La maintenance de base du royaume se monte à
2 GB. L’entretien de la flotte royale revient à
5 GB. Le château de Caer Callin coûte 1 GB ; la
cour d’Aerenwe, médiocre selon les critères des
diplomates, revient à 3 GB. L’armée revient à
10 GB.
Les impôts rapportent 13,5 GB ; à cela, il faut
rajouter 5 GB d’aide financière de Maire
Cwillmie, 6 GB de Siele Ghoried, ainsi que 3 GB
de Mourde Alondir, le lieutenant. En revanche, il
faut retrancher les ponctions des sbires de
Thalien : 2 GB, un dans chacune des provinces de
Dhoenel et d'Halried.
Les gains totaux du pays se montent à 25,5 GB.
La balance économique du royaume est donc de
21 GB de dépenses contre 25,5 GB de recettes.
Cela laisse à la reine Arielle à peine plus de 4 GB
chaque saison pour les dépenses du royaume. C’est
assez peu, compte tenu de la loyauté des
provinces, de la faiblesse des armées, et de
l’étendue du pays. Il n’y a pas longtemps, le
contrôle absolu de la loi dans l’Erebannien et dans
la plaine de Calrie laissait un budget de près de
35 GB à Liliene Swordwraith ; cette époque faste
semble révolue pour longtemps. Liliene
Swordwraith n’avait pas une marge bien meilleure
que celle d’Arielle ; mais à cette époque, l’armée
~ 27 ~
du pays était une véritable force, capable de
repousser une invasion majeure. Les quelques
forces stationnées à Calrie aujourd’hui sont loin de
suffire à la défense des frontières.
Relations étrangères
Aerenwe est dans une position excentrée, dos à la
mer, face à seulement deux voisins sur les terres
Anuiréennes. C’est à la fois un avantage et un
défaut ; un avantage, car les interlocuteurs du pays
sont limités, et les intérêts rarement
contradictoires. Si le royaume était entouré d’une
dizaine de voisins, il y aurait à craindre qu’un
accord avec l’un en vexe un autre ; mais avec
seulement deux pays frontaliers, le risque est
inexistant. Le défaut, c’est que si un problème
émerge, Aerenwe ne pourra se replier nulle part et
n’aura aucune aide à espérer.
Osoerde
Osoerde est dévasté par la guerre civile - un avant-
goût peu flatteur de ce qui attend Aerenwe si
Arielle ne mate pas au plus vite la rébellion de son
frère. Jaison Raenech, un ancien lieutenant du
vieux roi, assassina ce dernier pour prendre sa
place. William Moergen, l’héritier légitime, se
lança dans une guérilla désespérée pour tenter de
destituer l’usurpateur du trône. Aucun des deux
opposants ne fut en mesure de l’emporter ; le pire
arriva assez tôt. Ghoere tenta une annexion de la
terre divisée, incapable de se défendre. La
conquête réussit, mais le baron Tael préféra laisser
Jaison Raenech sur le trône, en faisant son vassal.
William Moergen, malgré l’aide financière et
militaire de l’Elinie et de Coeranys, ouvertement
opposés à Ghoere, dut chercher son salut auprès du
Prince Darien Avan d’Avanil.
Depuis, Osoerde est divisé, chacun des prétendants
ne contrôlant effectivement que la moitié du
royaume. Les grandes puissances d’Anuire s’en
sont mêlées, transformant une terre autrefois riche
et heureuse en un vaste échiquier où elles
déplacent leurs pions sans arrière-pensées.
Les relations entre Osoerde et Aerenwe sont
réduites au minimum. Les nobles de la région ont
fort à faire pour défendre leurs manoirs contre les
insurrections et les attentats, et n’ont pas le temps
de tourner leur regard à l’extérieur de frontières.
C’est une bonne chose, car personne ne connaît
exactement leurs sentiments envers la couronne de
Calrie. William Moergen semble un régent
pacifique, bien qu’il n’ait jamais vraiment
gouverné. Personne ne peut juger de la confiance
qu’il mérite, ou de son désir d’expansion. Jaison
Raenech, en revanche, est vil et maléfique. Ce
régent agressif n’hésite pas à recourir à la torture,
et pensait transformer Osoerde en une arme de
guerre tournée toute entière vers ses rêves déments
de conquête.
Le royaume d’Aerenwe

Néanmoins, Aerenwe n’a pour l’instant pas les Roesone imposa avec autorité - chacun
moyens de soutenir l’une ou l’autre des deux contredisant le précédent à un mois d’intervalle.
parties. C’est une bonne chose : si le pays prenait Marlae Roesone semble vouloir la paix. Par peur
position, il attirerait inévitablement le courroux de d’Aelies, cela ne fait pas de doutes. Le Haut Mage
Ghoere ou d’Avanil, et se mettre à dos l’un des possède des sources dans son domaine, et Dame
prétendants au trône de fer n’est jamais une très Marlae préféra se lancer dans une ambitieuse
bonne idée. Si Calrie peut maintenir une ambiguïté campagne de colonisation d’Aduria plutôt que
teintée de neutralité aussi longtemps que possible, d’insulter le magicien en développant ses
ce sera tout au bénéfice du domaine. provinces. Aelies est le principal obstacle qui
empêche Roesone de tourner son attention vers les
Nesirian frontières d’Aerenwe. Rien ne garantit que le
Demi-Elfe prendrait les armes pour le pays ; mais
Nesirian est le plus jeune des royaumes d’Anuire.
depuis son palais de Proudglaive, l’héritière du
Il fut taillé de toutes pièces sur la petite île de
Baron Noir de Roesone semble en être persuadée.
Caelcorwynn, par Maire Cwillmie et une poignée
Evidemment, si un jour cette certitude
de colons vénérant Nesirie. Ils érigèrent les bases
l’abandonne, personne ne pourra dire quels seront
de la civilisation sur le petit domaine, traçant les
ses plans.
premiers sillons dans la terre et bâtissant leurs
Les échanges diplomatiques entre Aerenwe et
maisons de leurs mains.
Roesone sont rares. Marlae envoya quelques
Le pays est petit (deux provinces) et encore
courriers complaisants pour affirmer que les deux
faiblement peuplé, mais nombreux sont les navires
royaumes devraient vivre en paix, puis plus rien.
qui viennent déverser leur cargaison de nouveaux
Ces quelques envois réglés, la reine de Roesone a
colons sur les terres.
du estimer que la cour de Calrie ne nécessitait pas
Nesirian est dirigé par Maire Cwillmie ; la
davantage d’efforts.
Gardienne des Eaux, guide suprême du Temple de
Avec les troubles conséquents à la disparition de
l’Est de Nesirie, est entièrement dévouée à sa
Liliene Swordwraith, cependant, les relations
déesse et a consacré la terre de son pays à la
pourraient devenir plus tendues, voire
divinité. En échange, jamais les côtes de Nesirian
conflictuelles. Marlae Roesone est réputée pour un
ne sont touchées par la tempête. Nesirie elle-même
opportunisme total ; elle sait que la couronne de
semble avoir pris le petit royaume insulaire sous sa
Calrie traverse des troubles graves. Hubaere
protection.
Armiendin, rival de Maire Cwillmie, pourrait la
Les relations entre Aerenwe et Nesirian sont
convaincre - comme il l’a déjà fait dans d’autres
excellentes. Si le pays a bien un allié fiable, c’est
domaines - qu’une offensive militaire serait une
celui-ci. Pour dire la vérité, c’est l’aide de Liliene
bonne idée. Cela lui permettrait d’affaiblir
Swordwraith qui permit la création du nouveau
Aerenwe et le Temple de l’Est de Nesirie.
royaume. La reine prêta certains des navires de la
Récemment, les troupes de Roesone se sont
marine royale pour les premières expéditions.
lancées dans un certain nombre de manœuvres près
Auparavant, Maire Cwillmie n’était pas encore la
de la frontière du royaume. C’est peut-être
reine d’une théocratie ; elle était juste la maîtresse
simplement pour s’assurer que la guerre civile, si
de son culte. Jusqu’à présent, la prêtresse n’a pas
elle éclate, ne débordera pas sur la baronnie ; c’est
renié ses engagements même sous l’effet de ses
peut-être pour de plus sombres desseins. Les
nouvelles responsabilités. Elle s’est montrée
relations entre Marlae et Thalien sont inconnues,
toujours aussi bienveillante et pleine de sollicitude
de même que les échanges qui ont pu avoir lieu
envers Aerenwe et sa population, restant
avec Phasiphiel Shywnnd.
disponible pour offrir son aide (que Liliene
Swordwraith avait l’habileté de ne pas solliciter
trop souvent). Mieres
La terre d’Aduria est étendue mais dangereuse.
Roesone Roele tenta d’implanter deux colonies sur l’autre
continent, après la formation de son empire. L’une
Les relations entre Roesone et Aerenwe sont
d’elle ne réussit jamais à survivre. L’autre, Mieres,
officiellement neutres, mêlées d’un zeste de
se développa et prospéra, dans une certaine
suspicion. Marlae Roesone a oublié la modestie de
mesure. Les terres d’Aduria sont loin d’être
son héritage depuis longtemps, et clame
désertes ; des monstres abjects hantent sa surface,
ouvertement qu’elle est la seule force capable de
créatures engendrées par le sacrifice des dieux lors
s’opposer à Ghoere dans le sud. Au nom de son
de la bataille du Mont Deismaar. Il existe aussi des
accord avec Hubaere Armiendin, le prêtre local du
peuples humains, de puissants empires maléfiques
culte d’Haelyn, elle se brouilla avec ses deux alliés
pratiquant l’esclavage, des citadelles de jade
les plus fidèles, Medoere et Ilien. Enfin, tous les
jaillissant du désert.
régents de la région ont encore à l’esprit les
Mieres ne doit sa survie continue qu’à l’emploi de
décrets chaotiques et incohérents que la reine de
tous les moyens possibles pour financer les

~ 28 ~
Le royaume d’Aerenwe
mercenaires nécessaires à sa défense. Le pays est
recouvert de guildes qui dévastent les bois pour
construire des forts, des palissades et des navires
de guerre. Aaron Vaumel gouvernait Mieres avec
une poigne de fer. Il vouait allégeance au prince
Avan d’Avanil, mais la sincérité de ses hommages
était aussi douteuse que la provenance du contenu
des coffres du gouverneur. Il y a moins d'un an,
son fils, Saeder, après une courte guerre civile, a
réussi à remplacer son père. Ce dernier s'est
réfugié en Boeruine, fuyant le pays avec une partie
du trésor royal. Immédiatement après son
accession au trône, Saeder Vaumel s'est empressé
de renouveler l'allégeance de son pays auprès de
Darien Avan, ce qui laisse supposer une possible
aide du Prince d'Avanil dans la rébellion.
Actuellement, personne ne connaît vraiment
Saeder, mais sa façon de prendre le pouvoir laisse
entendre que son caractère ne serait pas trop
éloigné de celui de son père…
Mieres n’a pas beaucoup de relations avec
Aerenwe, mais les échanges sont tendus, car le
pays s’adonne à la piraterie - officieusement,
évidemment. La flotte du royaume d’Aduria est
vaste et ponctionne allègrement tous les convois
marchands qui passent dans le détroit d’Aerele.
Pire encore, le Serpent de Mer, un awnsheg qui vit
dans la mer, semble avoir passé un pacte avec les
marins de Mieres, car il épargne les navires des
pirates. Aerenwe et Mieres ont été à deux doigts
d’entrer en guerre sous le règne de Liliene
Swordwraith, lorsque deux caravelles basées à
Calrie ont été envoyées par le fond alors qu’elles
faisaient voile vers la Cité d’Anuire.
Rumeurs, Complots et Secrets
Les rumeurs, les complots et les secrets font partie
de la vie de toutes les cours, et la forêt de Aerenwe
ne fait pas exception. Que le gouvernement soit
Elfique au lieu d’être dirigé par des humains ne
l’immunise pas aux intrigues et aux subterfuges
qui sont le pain quotidien des régents.
Rumeurs et complots
Même les pires colportages détiennent une part de
vérité, et un régent se doit d’étudier les histoires
qui se racontent dans sa cour. Bien que les contacts
avec les autres cours d’Anuire soient rares, les
Elfes sont observateurs et curieux, et nombreux
sont les sorciers qui utilisent des sorts de
divination pour en apprendre plus sur le monde
extérieur, et lorsqu’ils trouvent quelque chose, leur
village est rapidement au courant. Il ne faut dès
lors que quelques jours avant que les nouvelles ne
rejoignent Caer Callin.
Alliance impie en Mieres
Mieres sort à peine d'une guerre civile - une
variante de celle qui s’apprête à secouer Aerenwe.
~ 29 ~
Le fils d’Aaron Vaumel a tenté de destituer son
père, le gouverneur, pour le remplacer. Ses
chances étaient maigres, mais il avait des atouts
cachés. Darien Avan a finalement eu vent des
malversations et des violences perpétrées par le
seigneur de Seaward ; et il a apparemment choisi
son parti. En agissant de la sorte, il a prit position
contre un de ses vassaux officiels ! Taeghas et
Brosengae risquent de ne pas apprécier, ainsi que
les autres candidats au trône de fer, mais pour
l'instant aucun n'a profité de cette occasion de
dénoncer la traîtrise du Prince Avan.
Mais il y a pire. Le rebelle de Mieres a passé une
alliance avec les forces occultes d’Aduria… Et a
offert à ces puissances les royaumes en train de se
former sur ce continent ! Des marins de Calrie,
faisant voile vers le sud lointain, ont vu des
colonnes immenses d’humanoïdes, d’éléphants de
guerre, et d’Aduriens. Les soldats étaient
typiquement armés de lances, de boucliers et de
casques de bronze. En tentant de s’approcher pour
tenter de décrypter les bannières, le navire fut pris
pour cible et le capitaine périt d’un trait à la
poitrine.
Les échos de cette histoire viennent juste d’arriver
à Caer Callin, et personne ne sait au juste quelle
est la véracité du récit. Il y a quelques zones
d’ombres. Certes, Prestige de l’Ecume II, le navire
dont l’équipage a fait la découverte, avait bien des
flèches plantées à l’extérieur de la coque.
L’empennage de ces dernières n’est pas Anuiréen.
De plus, le capitaine est effectivement mort d’une
flèche, mais Olgar Drakkhen n’avait jamais été
populaire au sein de son équipage. Les flèches
auraient pu être bricolées, ou provenir de Khinasi
ou de Rjurik. Et si tout ceci n’était qu’un coup
monté pour camoufler une mutinerie ?
La disparition de Liliene Swordwraith
La reine a disparu de la façon la plus mystérieuse
qui soit ; malgré toute tentative d’étouffement de
l’affaire, et l’enterrement de la reine par
contumace, le peuple n’est pas dupe et les rumeurs
les plus folles circulent. Que celles-ci viennent des
individus qui ont examiné la chambre tour à tour
dans l’espoir de trouver une clef à l’énigme, ou
soient les élucubrations d’ivrognes, elles génèrent
une agitation malvenue au sein du petit peuple,
dans un moment où le royaume a besoin d’unité.
Quelques hypothèses émergent de la masse des
racontars :
 Liliene Swordwraith se serait enfui en
Coeranys, avec une bonne partie du trésor
royal, et le reste ne serait que mise en scène.
Peu accordent du crédit à cette version.
 La reine aurait contracté la même maladie -
fatale - que le Roi des Elfes qui disparut,
paraît-il, de la même manière. Pourquoi pas…
 C’est un puissant démon du monde des Ombres
qui a emporté la régente, laissant simplement
Le royaume d’Aerenwe
des traces de son monde derrière lui. Pour
quelle raison, cela reste un mystère.
 L’un des deux mages du royaume, Aelies ou
Rogr Aglondier, a utilisé un puissant charme
pour désintégrer la régente parce qu’elle
envisageait de favoriser l’autre. Comme ce sont
eux qui ont ensuite enquêté sur sa disparition,
ils affirment évidemment que l’affaire les
dépasse.
 Liliene Swordwraith n’avait pas d’enfant, parce
qu’elle était un Golem de cristal doué de
conscience. Lorsque le charme d’animation
arriva à terme, le Golem explosa et se répandit
en poussière. Bien sûr, cela explique aussi
pourquoi la reine avait cette faiblesse durant les
derniers mois de son règne : la magie
s’amenuisait…
 La reine aurait passé un pacte avec Kriesha et
Belinik en échange du pouvoir - leur
demandant la force de renverser le tyran sur le
trône. Evidemment, un tel pacte avait son prix,
et elle se sacrifia personnellement plutôt que de
donner la vie de ses enfants naturels, comme
elle aurait dû le faire. Les dieux maléfiques
sont venus se venger de la plus horrible façon,
mais Liliene se défendit avec courage, les
blessant au cours de son combat, d’où la
poudre retrouvée, qui ne serait autre que le
sang des divinités.
Arielle peut donc constater à quel point les
suppositions les plus ahurissantes circulent. La
vérité ne sera vraisemblablement jamais connue
sur cette affaire. Il est à noter que toutes les
hypothèses n’impliquent pas forcément que la
reine soit décédée. La reine d’Aerenwe devrait
chercher à calmer ces rumeurs ; soit en espérant
qu’elles se tassent, soit en présentant une version
officielle plausible (mais pourquoi avoir fait un
enterrement par contumace dans ce cas ?), soit en
enquêtant sur la disparition, avec le maigre espoir
d’apprendre quelque chose de nouveau. La
méfiance est de mise toutefois, car d’autres
hypothèses pourraient finir par émerger, mettant
en jeu la responsabilité de Thalien ou d’Arielle.
La menace venue des Elfes
Quelque chose se prépare entre les royaumes
elfiques d’Anuire. La rébellion de la forêt
d’Erebannien n’est peut-être pas seulement due
aux circonstances de la succession de Liliene
Swordwraith.
En Thuarievel, Savane Mhoried est entrée en
guerre contre la Gorgone. En Sielwode, la reine
d’Emeraude, Isaelie, a abdiqué en faveur de son
fils.
Rhuobe Manslayer s’est engagé dans de grandes
négociations avec Sielwode, allant jusqu’à
remettre en question ses raids quotidiens sur les
provinces environnantes. Finalement, en
Erebannien, la rébellion gronde.
~ 30 ~
Visiblement, les royaumes Sidhelien du continent
s’agitent beaucoup ces derniers temps. Ils semblent
chercher à accomplir quelque chose. Des rumeurs
évoquent la venue d’un roi qui unira les Elfes sous
sa bannière. Si les pays elfiques d’Anuire
réussissent enfin à mettre de côté leurs différends
pour s’unir, ils constitueront un danger réel pour
tous les humains.
Il faut espérer que la révolte forestière d’Aerenwe
n’attirera pas trop l’attention des autres puissantes
elfiques du continent sur le domaine. Si les terres
d’Arielle sont à l’abri des armées de ces régents,
elles ne sont pas protégées de leur magie. Rhuobe
Manslayer et Isaelie étaient parmi les plus grands
mages de leur temps - qui sait jusqu’où s’étendent
encore leurs Ley Lines ?
Secrets
Tout régent appuie son pouvoir à l’aide de
quelques secrets enfouis grâce auxquels il peut
tourner les chemins du destin à son avantage. La
princesse Arielle Aeren accéda au trône
rapidement et à la faveur d’une certaine agitation ;
mais malgré cela, elle acquit en un temps très
court une poignée de secrets qui pourraient l’aider
au cours de son expérience de reine. Certains
pourront peut-être s’utiliser un jour ; d’autres sont
parfois lourds à porter.
L’ascendance de la maison Swordwraith
Arielle Aeren n’est que la fille adoptive de
Liliene ; mais elle a pourtant un peu de son sang
en elle, car les travaux des généalogistes ont révélé
que les maisons Aeren et Swordwraith ont des
ancêtres en commun.
Le recoupement des archives révéla une
ascendance bien plus prestigieuse. Arielle et
Thalien, par le biais de la famille de leur mère
adoptive, sont des descendants indirects de la
maison régnante de l’Empire d’Anuire. Une partie
du sang des Roele coule dans leurs veines.
Ce secret assure à Arielle une légitimité suffisante
pour prétendre au trône de fer, rien de moins. Il
faudra pourtant jouer serré pour que le destin
balbutiant de la jeune reine d’Aerenwe ne se
dérobe pas dans les premiers mois. Mais si jamais
Aerenwe parvient à devenir une grande puissance
d’Anuire, alors la candidature d’Arielle sera
crédible grâce à son héritage. Et si le prochain
Empereur d’Anuire était une Impératrice ?
Trois ambitions masquées
Roesone est le voisin le plus dangereux
d’Aerenwe. Pas une semaine ne passe sans que des
mouvements de troupes soient détectés près de la
frontière. Fréquemment, des convois fortement
protégés la franchissent, amenant des caisses aux
châteaux des nobles soutenant Thalien. Ce n’est
Le royaume d’Aerenwe
probablement pas le champagne pour fêter la
victoire… Alors quoi ? Personne n’en sait rien.
De plus, lors d’une embuscade, des scouts ont
réussi à tuer l’un des escorteurs d’un convoi. Il
s’est avéré que l’individu portait la toge des
soldats de Roesone sous des vêtements de cuir
recouvrant le tout - un camouflage hâtif. Se
pourrait-il que des guerriers de l’armée régulière
arrondissent leur solde avec de sombres trafics ?
Ou Marlae Roesone a-t-elle véritablement des
ambitions sur Aerenwe ? La dernière hypothèse est
vraisemblable. La baronne s'est plusieurs fois
ouvertement exprimée sur la nécessité d’étendre
son domaine sans amenuiser les sources. Pour cela,
il faut annexer des provinces. La colonisation
d’Aduria est un choix… Mais il semble difficile.
Evidemment, si la colonie de Roesone, Danaelos,
se fait finalement détruire, dame Marlae cherchera
ailleurs une voie d’expansion. Si elle ne l’a pas
déjà trouvée.
La baronnie de Roesone pourrait bien avoir plus
d’ennemis qu’elle ne le pense, néanmoins.
Medoere, un petit pays frontalier, dirigé par Suris
Enlien, était allié avec la maîtresse de Proudglaive.
Marlae trahit l’accord diplomatique et permit à
Hubaere Armiendin, le maître du culte officiel, de
s’emparer d’un temple que Medoere possédait sur
le territoire de Roesone, à Caercas. Peut-être que
les membres de la théocratie ont encore une dent
contre Marlae suite à cette félonie. Le pays de
Medoere est peu étendu, mais a récemment fait
preuve d’une puissance économique remarquable,
recrutant une armée qui a fait peur même à Marlae
Roesone. Le prodige pourrait se répéter.
De même, l’alliance sacrée des frontaliers de
Ghoere pour contenir les visées expansionnistes du
baron arrivent à terme fin 553 MR. Même avant
cette date, le seigneur de Mhoried s’est montré peu
enclin à respecter sa signature. Principal pilier de
l’alliance, sa réluctance à s’engager dans un conflit
menace l’intégrité de la défense contre le baron
Tael. Le seigneur de Ghoere est notoirement
agressif et expansionniste.
Peut-être serait-il possible de négocier un accord
avec l’une de ces deux puissances, voire les deux,
pour s’approprier certaines provinces de Roesone.
Les prétentions de Medoere sont inconnues ;
personne ne sait comment Suris Enlien réagirait
face à une proposition de guerre de conquête
contre un ancien allié. En revanche, une attaque de
ce côté surprendrait tout le monde. Ghoere, quant
à lui, clame depuis toujours les provinces de
Ghoried, Fairfield et Bellam. Si Aerenwe est prêt à
assumer le partage des provinces - et des frais de
conquête - il aura toutes les chances d’agrandir son
domaine.
Le pouvoir caché de l’Erebannien
La forêt splendide qui couvre le sud d’Aerenwe est
d’une beauté sans limites, mais cache un secret à
~ 31 ~
la mesure de sa beauté. Ottilheim d’Aerenwe
l’apprit dans des circonstances étranges : de la
bouche d’un des Hobbits qui émergèrent en
quantité de la forêt après sa conquête par les
humains.
« D’où venez-vous ? » s’enquit le roi, du haut de
son destrier, s’adressant à un des membres du petit
peuple qui sortait de la forêt. Evidemment, les
scouts d’Aerenwe n’avaient pas repéré la présence
de tant de Hobbits dans les sous-bois. « Je viens du
Monde des Ombres, et mon nom est Grôtalon.
- Seigneur Grôtalon, s’enquit le roi avec un zeste
d’amusement dans le ton, pourquoi les membres
de ton peuple sont-ils si nombreux à sortir de la
forêt ?
- Le passage est plus facile.
- Peux-tu t’expliquer davantage ?
- Pour fuir notre monde, nous devons emprunter
des… Portes. Et les portes dans les bois sont
nombreuses. Pléthoriques. Presque dans chaque
arbre. Les portes sont solides, aussi. Elles restent
longtemps ouvertes, trop longtemps. C’est pour
cela que nous fuyons la forêt. Nous ne voulons pas
rester ici, ceux qui nous poursuivent pourraient
aussi franchir les passages béants qui mènent au
Monde de la Lumière. »
Grôtalon partit ensuite avec son paquetage sur
l’épaule, sans autres explications.
Intrigué, le roi fit appel aux plus grands mages de
l’époque pour qu’ils examinent les particularités
de la forêt. Shaefpaete l’Archimage découvrit la
vérité. L’Erebannien est sur le point de s’ouvrir sur
le monde des Ombres. Les massacres ayant eu lieu
dans la forêt au cours des âges ont eu une telle
ampleur sur la frontière entre les mondes que le
voile qui les sépare s’est déchiré en de nombreux
endroits.
Toute bataille qui se déroule dans l’Erebannien
risque de rompre l’équilibre instable, et de
permettre au Monde des Ombres de déverser ses
légions de mort sur Anuire. Aucun conflit ne doit
avoir lieu en Erebannien, aucune armée ne doit
même y pénétrer. La déchirure pourrait être fatale
à Cerilia. Les forces de l’autre côté du voile de la
réalité sont d’une puissance qui dépasse
l’imagination. Ces forces, menées par
l’Usurpateur, une divinité qui n’a rien à envier à
Azrai l’Ombre, sont assoiffées de sang, et
cherchent désespérément à rejoindre le Monde de
la Lumière - Aebrynis.
Seuls les régents d’Aerenwe connaissent la vérité
sur la forêt d’Erebannien et le terrible danger
qu’elle abrite. Le reste d’Anuire ne connaît que le
pacte officieux qui protège les bois de la guerre,
mais ils ne savent pas vraiment pourquoi. Ces
ignorants pensent que c’est pour préserver la
beauté de la forêt… Evidemment, Aelies connaît
la vérité, et c’est pour cela qu’il défend avec
acharnement toute colonisation de l’Erebannien.
Car chaque ville, humaine ou elfique, amène avec
Le royaume d’Aerenwe
elle son lot de corruption, de malveillance et de
crimes.
En outre, ce secret empêche Arielle Aeren
d’employer la force pour résoudre la question de la
rébellion des Elfes. Le soulèvement devra être
résolu pacifiquement ; tout autre moyen risquerait
d’entraîner la chute du pays et peut-être d’Anuire.
Rien de moins.
Stratégie et conseils
Les troubles sont à la porte du domaine, mais il
devrait être possible de s’en affranchir. La priorité,
c’est d’agir vite : si les perturbations s’éternisent,
la réputation de la reine sera faite vis-à-vis des
autres rois d’Anuire, qui ne manqueront pas
d’observer le déroulement des opérations.
Le premier objectif est de restaurer la popularité
dans les provinces. Pour l’Erebannien, l’absence
d’impôts semble évidente. Pour les provinces de
plaine, des actions d’Agitation seront nécessaires,
car Calrie ne peut pas se permettre de ne pas lever
d’impôts. Peut-être que le clergé, par Maire
Cwillmie, acceptera de se charger des actions en
échange d’une compensation ; cela gagnera du
temps.
Pour récupérer la loi, il n’y a qu’une seule
méthode : la contestation, encore et encore,
jusqu’à ce que la capture soit possible.
La solution militaire est possible (sauf en
Erebannien), mais Arielle devra prendre garde à ne
pas plonger dans l’engrenage de la violence :
personne à Calrie ne connaît exactement les
relations entre Thalien Aeren et Roesone, et les
holdings de loi de ce dernier sont fortifiés. Le
conflit durera, sera mal perçu par les autres
puissances d’Anuire, et coûtera de l’or et des vies.
Tout doit être fait pour que la reine légitime
récupère le contrôle de la loi. C’est la priorité la
plus absolue, même si les dépenses du royaume
doivent temporairement en pâtir. Evidemment,
pendant ce temps, il faudra rester aussi courtois et
complaisant que possible avec tous les régents
installés sur le domaine et les pays voisins.
Arielle devrait chercher à obtenir le soutien d’au
moins un des deux mages présents sur le domaine.
Ce sera un allié de poids, valant bien des armées
en simple dissuasion. Aelies est le meilleur choix,
car il est présent depuis des siècles. Le Haut Mage
et Rogr Aglondier sont en bons termes ; semer la
zizanie risque de se retourner contre la reine. La
reine ne doit pas proposer l’aide de la couronne à
l’un dans sa lutte contre l’autre, mais offrir
quelque chose de plus neutre - de l’argent, une
reconnaissante politique, ou une offre équivalente.
Les relations avec Siele Ghoried sont complexes.
Actuellement, la guilde gagne énormément
d’argent sur le dos de la couronne. Arielle dispose
en revanche d’un lieutenant régent qui pourrait
~ 32 ~
s’occuper un peu des guildes. La capture directe
présente des avantages et des inconvénients par
rapport au partenariat.
Si Arielle décide de s’attaquer à Siele Ghoried,
elle gagnera de riches holdings de guilde, une
fortune en routes commerciales, et fournira un
allié à de choix à Roesone en cas de conflit.
Si Arielle décide de ne rien faire, elle se privera
d’une manne d’or considérable, qui tombera dans
l’escarcelle de la marchande. Evidemment, en
étant en bons termes avec elle, il sera peut-être
possible d’en récupérer une partie de façon
ponctuelle, mais ce ne sera jamais aussi profitable
que si une partie des guildes était directement
possédée par Mourde Alondir. En revanche, Siele
sera plutôt du côté d’Aerenwe en cas de conflit -
du moins faut-il l’espérer - car c’est dans ce pays
qu’elle aura le plus d’intérêts.
Peut-être est-il possible de négocier avec la
marchande pour l’abandon de quelques niveaux de
holdings de guilde, ou leur non-progression si les
provinces viennent à se développer encore. Les
chances de réussite de la manœuvre sont maigres,
et il faut bien comprendre que le simple fait
d’entamer le dialogue à ce sujet intriguera la
marchande, et altérera à jamais les rapports entre
elle et la couronne de Calrie.
En tous cas, il paraît indispensable d’attendre le
retour à la stabilité du royaume avant de tenter
quoi que ce soit dans le domaine des guildes. Agir
trop tôt, c’est donner le soutien de Siele Ghoried à
Thalien Aeren et à Roesone, et cela pourrait
changer dramatiquement le rapport de force.
Lorsque le royaume d’Aerenwe sera réunifié, la loi
et les provinces sous le contrôle absolu d’Arielle
Aeren, certaines des guildes et des routes
commerciales contrôlées par Mourde Alondir, et
que les coffres du trône déborderont d’or, alors le
pays devra trouver la voie de son expansion. Il n’y
a pas beaucoup de choix : Nesirian, Osoerde ou
Roesone.
Nesirian ne comporte que deux provinces, et Maire
Cwillmie est une alliée sincère d’Aerenwe : une
telle annexion d’un pays ouvert et pacifique
déclenchera le tollé en Anuire, pour un maigre
gain. De plus, le débarquement par navire sera
risqué et imprévisible, personne ne connaissant la
flotte de Nesirian. Les forces d’attaque seront
limitées à la contenance de la flotte de Calrie,
c’est-à-dire pas grand-chose.
Osoerde n’est pas un meilleur choix :
actuellement, le pays est divisé, et attire toute
l’attention de deux des plus puissants pays
d’Anuire. Unifié, il sera toujours allié à l’un ou
l’autre. Enfin, il est protégé par une rivière, donc
facile à défendre.
Finalement, Roesone est le dernier choix. Le pays
dépense de grosses sommes pour développer des
colonies en Aduria, colonies qui doivent être
fortement défendues. Roesone n’a pas une flotte
Le royaume d’Aerenwe
suffisante pour amener des troupes en renfort, et
doit donc maintenir sur place un contingent
important. Mais Roesone est un pays riche et uni,
disposant de nombreuses guildes qui sont en bons
termes avec le pouvoir en place. Briser cette union
ou trouver des alliés pour la conquête semble être
obligatoire.
En conclusion, le royaume d’Aerenwe est en
difficulté, mais avec un minimum de compétence
Stephane Montabert
~ 33 ~
elles ne devraient être que passagère. Le domaine
a été prématurément placé dans les mains d’Arielle
Aeren ; à elle maintenant de l’aider à grandir et à
trouver son but. Arielle et Aerenwe sont détenteurs
d’un pouvoir énorme, bien plus grand que le pays
ne le laisse présager. La monarchie doit gagner en
puissance et en superficie pour prendre la place qui
lui revient dans la politique d’Anuire.