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et sémiologie -
Macleod
Interrogatoire et examen clinique –
Sémiologie par appareil – Situations
particulières
Chez le même éditeur
Autres ouvrages :
Examen clinique et sémiologie : l'essentiel, par N. Talley et S. O'Connor. 2017, 400 pages.
Sémiologie clinique, par J. Bariéty. 2017, 520 pages, 8e édition.
Examen clinique de l'appareil locomoteur, par J. Cleland. Traduit par M. Pillu 2018, 3e édition, 656 pages.
Maîtriser l'examen clinique en ostéopathie, par P. Gadet. 2018, 216 pages.
Examen clinique des membres et du rachis, par S. Hoppenfeld. 2016, 2e édition, 320 pages.
Guide de l'examen clinique et du diagnostic en dermatologie, D. Lipsker. 2016, 304 pages.
L'examen neurologique facile, par G. Fuller. Traduit par C. Masson 2015, 2e édition, 264 pages.
Gray's Atlas d'anatomie humaine, par R. L. Drake, A. W. Vogl, A. V. W. Mitchell, R. M. Tibbitts, P. E. Richardson.
Traduit par F. Duparc. 2017, 648 pages.
Examen clinique
et sémiologie
Traduit de la 14e édition originale
Macleod
Coordonné par
J Alastair Innes
BSc PhD FRCP(Ed)
Consultant Physician Respiratory Unit,
Western General Hospital, Edinburgh ;
Honorary Reader in Respiratory Medicine,
University of Edinburgh, Royaume-Uni
Anna R Dover
PhD FRCP(Ed)
Consultant in Diabetes, Endocrinology and General
Medicine, Edinburgh Centre for Endocrinology and Diabetes,
Royal Infirmary of Edinburgh ; Honorary Clinical Senior
Lecturer, University of Edinburgh, Royaume-Uni
Karen Fairhurst
PhD FRCGP
General Practitioner, Mackenzie Medical Centre, Edinburgh ;
Clinical Senior Lecturer, Centre for Population Health
Sciences, University of Edinburgh, Royaume-Uni
Matthieu Ponsoye
Praticien, service de Médecine interne,
Hôpital Foch de Suresnes
This translation of Macleod's Clinical Examination. 14th Edition, by J Alastair Innes, Anna R Dover and Karen Fairhurst, was under-
taken by Elsevier Masson SAS and is published by arrangement with Elsevier Ltd.
Cette traduction de Macleod's Examen clinique et sémiologie 14ème édition, de J Alastair Innes, Anna R Dover et Karen Fairhurst,
a été réalisée par Elsevier Masson SAS et est publiée avec l'accord d'Elsevier Ltd.
Macleod's Examen clinique et sémiologie, de J Alastair Innes, Anna R Dover et Karen Fairhurst. © 2019, Elsevier Masson SAS.
ISBN : 978-2-294-75853-9
e-ISBN : 978-2-294-75936-9
Tous droits réservés.
La traduction a été réalisée par Elsevier Masson SAS sous sa seule responsabilité.
Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances pour évaluer et utiliser toute
information, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l'avancement rapide des sciences médicales, en particulier,
une vérification indépendante des diagnostics et dosages des médicaments doit être effectuée. Dans toute la mesure permise par la
loi, Elsevier, les auteurs, collaborateurs ou autres contributeurs déclinent toute responsabilité pour ce qui concerne la traduction ou
pour tout préjudice et/ou dommages aux personnes ou aux biens, que cela résulte de la responsabilité du fait des produits, d'une
négligence ou autre, ou de l'utilisation ou de l'application de toutes les méthodes, les produits, les instructions ou les idées contenus
dans la présente publication.
Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. Toute reproduction ou
représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans
l'autorisation de l'éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d'une part, les reproductions strictement
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caractère scientifique ou d'information de l'œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code
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DANGER Ce logo a pour objet d'alerter le lecteur sur la menace que représente pour l'avenir de l'écrit, tout
particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copillage ».
Cette pratique qui s'est généralisée, notamment dans les établissements d'enseignement, pro-
voque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs
de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd'hui menacée. Nous
rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont passibles
LE
de poursuites. Les demandes d'autorisation de photocopier doivent être adressées à l'éditeur ou
PHOTOCOPILLAGE au Centre français d'exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.
TUE LE LIVRE Tél. 01 44 07 47 70.
John Macleod (1915–2006)
John Macleod a été nommé médecin consultant au Western General Hospital, à
Édimbourg, en 1950. Il portait un intérêt majeur à la rhumatologie et à l'enseigne-
ment de la médecine. Les étudiants en médecine qui ont assisté à ses séances
d'enseignement clinique se souviennent de lui comme d'un enseignant inspirant,
ayant la capacité de présenter des problèmes complexes avec une grande clarté.
Il était invariablement courtois envers ses patients et ses étudiants. Il avait un talent
hors du commun pour impliquer tous les étudiants à parts égales dans les discus-
sions cliniques et privilégier le compliment plutôt que la critique. Il accordait une
grande attention à la valeur du recueil de l'anamnèse et, à partir de celle-ci, atten-
dait des étudiants qu'ils identifient les aspects particuliers de l'examen physique
qui permettraient de préciser les hypothèses diagnostiques.
Ses collègues du Western General Hospital ont été heureux de contribuer, à
sa demande, à la rédaction d'un manuel d'enseignement de l'examen clinique.
Ce livre a été publié pour la première fois en 1964, et John Macleod en a coor-
donné les sept premières éditions. Avec sa modestie caractéristique, il fut très
gêné lorsque la huitième édition fut rebaptisée Macleod's Clinical Examination.
Toutefois, ce geste demeure une faible reconnaissance pour son immense contri-
bution à l'enseignement de la médecine.
Il possédait une qualité essentielle pour un coordinateur d'ouvrages à succès :
la capacité d'agencer, dans un style et un format homogènes, différentes contri-
butions hétéroclites sans pour autant offenser les auteurs ; chacun acceptait son
autorité. Il évitait d'être dogmatique ou condescendant. Il était généreux en trans-
mettant aux autres ses compétences éditoriales, qui ont été reconnues lorsqu'il a
été invité à coordonner le Davidson's Principles and Practice of Medicine.
Préface
Malgré la richesse des outils diagnostiques disponibles pour le jusqu'à l'utilisation de tableaux cliniques pour identifier
médecin moderne, l'acquisition d'informations, par une inte certains diagnostics. La deuxième partie traite des symp
raction directe avec le patient au travers de l'anamnèse et de tômes et des signes dans des systèmes spécifiques et la
l'examen physique, reste le principe fondamental de l'art du troisième partie illustre l'application de ces compétences
médecin. Ces compétences ancestrales permettent souvent à des situations cliniques particulières. Le dernier chapitre
aux cliniciens de poser un diagnostic clair sans avoir recours s'intéresse à l'utilisation de ces compétences dans la pra
à des explorations coûteuses et potentiellement dangereuses. tique quotidienne.
Ce livre vise à aider le clinicien à développer les compétences Une anamnèse et un examen physique réalisés avec com
cliniques nécessaires pour obtenir une anamnèse claire et pétence permettent au médecin de détecter la maladie et de
les compétences pratiques indispensables à la détection des prédire son pronostic. Ils sont essentiels au principe fondamen
signes cliniques de maladie. Lorsque cela est possible, l'origine tal consistant à placer le patient et ses préoccupations au cœur
physiologique des signes cliniques est expliquée afin de faciliter du processus de soins, mais permettent aussi d'éviter les effets
la compréhension. La notion de formulation d'hypothèses diag délétères induits par des explorations inutiles ou injustifiées.
nostiques à partir des informations obtenues est introduite, et Nous espérons que si les jeunes cliniciens sont encouragés à
les explorations logiques de première intention sont expliquées adopter et adapter ces compétences, ils seront non seulement
pour chaque système. Le Macleod's Examen clinique et sémio- au service de leurs patients en tant que diagnosticiens, mais
logie est conçu pour être utilisé conjointement avec des textes contribueront eux aussi à développer des techniques d'examen
plus détaillés sur la physiopathologie, les diagnostics différen clinique ainsi qu'une meilleure compréhension de leurs méca
tiels et la médecine clinique, illustrant spécifiquement comment nismes et de leurs utilisations diagnostiques.
l'anamnèse et l'examen physique peuvent éclairer le processus La 14e édition du Macleod's Examen clinique et sémiologie
diagnostique. contient un ensemble de vidéos d'accompagnement dispo
Dans cette édition, les contenus ont été restructurés et le nibles en ligne sur le Student Consult electronic library1. Ce
texte entièrement mis à jour par une équipe mixte d'auteurs livre est étroitement lié au Davidson's Principles and Practice of
anciens et nouveaux, dans le but de créer un texte accessible et Medicine et sera mieux apprécié par une lecture conjointe des
facile à utiliser, adapté à l'exercice de la médecine du XXIe siècle. deux textes.
La première partie aborde les principes généraux d'une
bonne interaction avec le patient, depuis les bases du recueil JAI, ARD, KF
de l'anamnèse et de la réalisation d'un examen physique Édimbourg, 2018
www.em-consulte.com/e-complement/475853
Avant-propos
à l'édition française
En 60 ans et quatorze éditions, le Macleods clinical examination moins à enrichir sa « culture » médicale. Les notions qui diffèrent
est devenu, dans les pays anglo-saxons, le manuel de réfé- trop de la « culture » médicale francophone font l'objet d'anno-
rence pour l'enseignement et l'apprentissage de la sémiologie tations relatives aux pratiques habituelles en France. Toutefois la
médicale. Son auteur, John Macleod, passionné tant par la très grande majorité des éléments décrits dans ce livre est com-
médecine que par l'enseignement, a souhaité créer un ouvrage mune aux pratiques médicales anglo-saxonnes et françaises.
destiné aux étudiants visant à transmettre l'essence même de Culturellement, les études en France et tout particulièrement
la médecine : l'art d'interroger et d'examiner un patient. Les édi- en médecine, valorisent l'étendue des connaissances. Cette
tions successives ont permis à son œuvre d'évoluer au rythme importance du « savoir-faire » qui fait de nous de bons « tech-
de la médecine et de bénéficier de remarques et relectures, y niciens » peut parfois se faire au détriment du « savoir-être » qui
compris de la part d'étudiants. fait de nous des médecins. La culture anglo-saxonne place ce
Il ne suffit pas d'apprendre encore faut-il comprendre. Ce « savoir-être » beaucoup plus en avant au cours des études.
manuel accompagne de manière pragmatique l'étudiant tout au Ainsi, le comportement et l'attitude de chaque étudiant sont spé-
long de son processus d'apprentissage de la sémiologie pour cifiquement évalués au cours de son apprentissage. Ce manuel
chaque système par le biais de supports variés qui convien- en est l'illustration. Certaines formules ou répétitions pourront
dront au plus grand nombre. Cet ouvrage ne se contente pas paraître saugrenues à l'étudiant français (« Saluez le patient »,
de proposer une liste successive des signes à rechercher en « lavez-vous les mains », « remerciez le patient », « demandez
fonction de chaque atteinte, il en explique également l'origine au patient l'autorisation de… ») pourtant il ne paraît pas inutile
physiopathologique et les interprétations que l'on peut en faire. de rappeler que nous pratiquons un métier où « l'humain » est
Ces explications sont illustrées par des schémas, des tableaux primordial et qu'à chaque instant le « savoir-être » est au moins
mais également par des vidéos qui permettent une visualisation aussi important que le « savoir-faire
». Prenant conscience
pratique des méthodes d'interrogatoire et d'examen physique. de nos lacunes, notre système d'enseignement médical est
Les pratiques médicales anglo-saxonnes et françaises sont actuellement en cours d'évolution avec la disparition annoncée
extrêmement proches cependant il peut exister des différences des iECN pour des contrôles continus où le « savoir-être » pren-
dans l'approche qui relèvent souvent plus de la tradition que de dra une place plus importante. Ainsi, bénéficiant de son origine
la pertinence clinique. Si certaines notions pourraient paraître anglo-saxonne le Macleod's paraît adapté aux nouveaux enjeux
surprenantes au lecteur francophone, elles contribuent néan- susceptibles d'intéresser les étudiants français.
Remerciements
Les coordinateurs souhaiteraient saluer l'immense contribution Md. Habibullah, Kareem Haloub, Akar Jamal Hamasalih, James
de Graham Douglas, Fiona Nicol et Colin Robertson, qui ont Harper, Bruce Harper-McDonald, Jon Harvey, Alexandra Hawker,
dirigé les trois éditions précédentes du Macleod's Examen cli- Raja K Haynes, Emma Hendry, Malik Hina, Bianca Honnekeri,
nique et sémiologie. Ensemble, ils ont réagencé le format de ce Justina Igwe, Chisom Ikeji, Sushrut Ingawale, Mohammad Yousuf
manuel et leurs efforts ont été récompensés par une hausse ul Islam, Sneha Jain, Maria Javed, Ravin Jegathnathan, Helge
significative des ventes et de sa notoriété internationale. Leander B Jensen, Li Jie, Ali Al Joboory, Asia Joseph, Christopher
Les coordinateurs aimeraient manifester leur gratitude à Teow Kang Jun, Janpreet Kainth, Ayush Karmacharya,
tous les contributeurs des précédentes éditions, sans qui cette JS Karthik, Aneesh Karwande, Adhishesh Kaul, Alper Kaymak,
nouvelle édition n'aurait pas été possible. En particulier, nous Ali Kenawi, Abdullah Al Arefin Khadem, Haania Khan, Muhammad
sommes redevables aux anciens auteurs qui ont renoncé à Hassan Khan, Sehrish Khan, Shrayash Khare, Laith Khweir, Ankit
participer à cette nouvelle édition, que sont : Elaine Anderson, Kumar, Vinay Kumar, Ibrahim Lafi, Armeen Lakhani, Christopher
John Bevan, Andrew Bradbury, Nicki Colledge, Allan Cumming, Lee, David Lee, Benjamin Leeves, Soo Ting Joyce Lim, Chun
Graham Devereux, Jamie Douglas, Rebecca Ford, David Hin Lo, Lai Hing Loi, Chathura Mihiran Maddumabandara,
Gawkrodger, Neil Grubb, James Huntley, John Iredale, Robert Joana Sousa Magalhães, Aditya Mahajan, Mahabubul Islam
Laing, Andrew Longmate, Alastair MacGilchrist, Dilip Nathwani, Majumder, Aaditya Mallik, Mithilesh Chandra Malviya, Santosh
Jane Norman, John Olson, Paul O'Neill, Stephen Payne, Laura Banadahally Manjegowda, Jill Marshall, Balanuj Mazumdar, Alan
Robertson, David Snadden, James C Spratt, Kum-Ying Tham, David McCrorie, Paras Mehmood, Kartik Mittal, Mahmood Kazi
Steve Turner et Janet Wilson. Mohammed, Amber Moorcroft, Jayne Murphy, Sana Mustafa,
Nous sommes particulièrement reconnaissants envers les Arvi Nahar, Akshay Prakash Narad, Shehzina Nawal, Namia Nazir,
étudiants en médecine qui ont entrepris des relectures détail- Viswanathan Neelakantan, Albero Nieto, Angelina Choong Kin
lées du livre et nous ont donné de nombreuses suggestions Ning, Faizul Nordin, Mairead O'Donoghue, Joey O'Halloran, Amit
dans le cadre de la mise en œuvre de cette dernière édition. Kumar Ojha, Ifeolu James Oyedele, Anik Pal, Vidit Panchal, Asha
Nous pensons avoir énuméré tous ceux qui y ont contribué, et Pandu, Bishal Panthi, Jacob Parker, Ujjawal Paudel, Tanmoy
nous vous prions de nous excuser si des noms ont été malen- Kumar Paul, Kate Perry, Daniel Pisaru, David Potter, Dipesh
contreusement omis : Layla Raad Abd Al-Majeed, Ali Adel Ne'ma Poudel, Arijalu Syaram Putra, Janine Qasim, Muhammad
Abdullah, Aanchal Agarwal, Hend Almazroa, Alhan Alqinai, Amjed Qaunayn Qays, Mohammad Qudah, Jacqueline Quinn, Varun MS
Alyasseen, Chidatma Arampady, Christian Børde Arkteg, Maha Venkat Raghavan, Md. Rahmatullah, Ankit Raj, Jerin Joseph Raju,
Arnaout, Rashmi Arora, Daniel Ashrafi, Herry Asnawi, Hemant Atri, Prasanna A Ramana, Ashwini Dhanraj Rangari, Anurag Ramesh
Ahmed Ayyad, Kainath N Azad, Sadaf Azam, Arghya Bandhu, Rathi, Anam Raza, Rakesh Reddy, Sudip Regmi, Amgad Riad,
Jamie Barclay, Prithiv Siddarth Saravana Bavan, Rajarshi Bera, Patel Riya, Emily Robins, Grace Robinson, Muhammad'Azam
Craig Betton, Apoorva Bhagat, Prachi Bhageria, Geethanjali Paku Rozi, Cosmin Rusneac, Ahmed Sabra, Anupama Sahu,
Bhas, Navin Bhatt, Shahzadi Nisar Bhutto, Abhishek Ghosh Mohammad Saleh, Manjiri Saoji, Saumyadip Sarkar, Rakesh
Biswas, Tamoghna Biswas, Debbie Bolton, Claude Borg, Daniel Kumar Shah, Basil Al Shammaa, Sazzad Sharhiar, Anmol Sharma,
Buxton, Anup Chalise, Amitesh Kumar Chatterjee, Subhankar Homdutt Sharma, Shivani Sharma, Shobhit Sharma, Johannes
Chatterjee, Farhan Ashraf Chaudhary, Aalia Chaudhry, Jessalynn Iikuyu Shilongo, Dhan Bahadur Shrestha, Pratima Shrestha,
Chia, Bhaswati Chowdhury, Robin Chowdhury, Marshall Colin, Anurag Singh, Kareshma Kaur Ranjit Singh, Nishansh Singh,
Michael Collins, Margaret Cooper, Barbara Corke, Andrea Culmer, Aparna Sinha, Liam Skoda, Ethan-Dean Smith, Prithviraj Solanki,
Gowtham Varma Dantuluri, Abhishek Das, Sonali Das, Aziz Dauti, Meenakshi Sonnilal, Soundarya Soundararajan, Morshedul
Mark Davies, Adam Denton, Muinul Islam Dewan, Greg Dickman, Islam Sowrav, Kayleigh Spellar, Siddharth Srinivasan, Pradeep
Hengameh Ahmad Dokhtjavaherian, Amy Edwards, Muhammad Srivastava, Anthony Starr, Michael Suryadisastra, Louisa Sutton,
Eimaduddin, Laith Al Ejeilat, Divya G Eluru, Emmanuel Ernest, Komal Ashok Tapadiya, Areeba Tariq, Imran Tariq, Jia Chyi Tay,
El Bushra El Fadil, Fathima Ashfa Mohamed Faleel, Malcolm Javaria Tehzeeb, Daniel Theron, Michele Tosi, Pagavathbharathi
Falzon, Emma Farrington, Noor Fazal, Sultana Ferdous, Sri Balaji Vidyapeeth, Amarjit Singh Vij, Cathrine Vincent, Ghassan
Matthew Formosa, Brian Forsyth, David Fotheringham, Bhargav Wadi, Amirah Abdul Wahab, James Warrington, Luke Watson,
Gajula, Dariimaa Ganbat, Lauren Gault, Michaela Goodson, Federico Ivan Weckesser, Ben Williamson, Kevin Winston, Kyi
Mounika Gopalam, Ciaran Grafton-Clarke, Anthony Gunawan, Phyu Wint, Harsh Yadav, Saroj Kumar Yadav, Amelia Yong, Awais
Aditya Gupta, Digvijay Gupta, Kshitij Gupta, Sonakshi Gupta, Zaka et Nuzhat Zehra.
Comment tirer le meilleur parti
de ce livre
Le but de ce livre est de montrer et d'expliquer comment : complexes, des savoir-faire et savoir-être, par des mises en
• interagir avec un patient en tant que médecin ; situations cliniques avec présence de patients simulés, et
• recueillir l'anamnèse d'un patient ; pratiqués en particulier dans les pays anglo-saxons).
• examiner un patient ; • Séquence d'examen intégré : une liste structurée des
• formuler vos constatations en proposant des hypothèses étapes à suivre lors de l'examen d'un système, prévue
diagnostiques ; comme une aide de révision rapide.
• classer celles-ci par ordre de probabilité ; Revenez à ce livre pour vous remémorer les techniques si
• utiliser des explorations pour confirmer ou infirmer votre vous n'avez pas été confronté à une thématique pendant un
hypothèse diagnostique. certain temps. Il est surprenant de constater à quel point votre
Pour commencer, lorsque vous aborderez une partie, nous technique se détériore rapidement si vous ne la pratiquez pas
vous suggérons de la parcourir rapidement, en regardant les régulièrement. Pratiquez chaque fois qu'une opportunité se pré-
en-têtes et la façon dont celle-ci est organisée. Cela vous aidera sente afin de devenir compétent dans les techniques d'examen
à avoir sa structure à l'esprit. et d'acquérir une vision complète de l'amplitude des normalités.
Apprenez à lire rapidement. Cela est une aide précieuse en Demandez régulièrement à un médecin sénior de vérifier votre
médecine et dans la vie en général. La dernière leçon de lecture technique d'examen ; il n'y a pas de substitut à cela et à la pra-
qui vous a été dispensée remonte probablement à l'école pri- tique régulière. Écoutez aussi ce que les patients disent – pas
maire. La plupart des gens peuvent améliorer considérablement seulement sur eux-mêmes, mais aussi sur d'autres profession-
leur vitesse de lecture et augmenter leur compréhension en uti- nels de santé – et apprenez de ces commentaires. Piochez-y ce
lisant et en pratiquant des techniques simples. que vous voudrez imiter ou éviter.
Essayez de cartographier mentalement les détails pour Enfin, profitez de vos compétences. Après tout, vous êtes
vous aider à mémoriser et conserver les informations au fur et en train d'apprendre à comprendre, diagnostiquer et aider les
à mesure que vous progressez dans le chapitre. Chacun des gens. Pour la plupart d'entre nous, c'est la raison pour laquelle
chapitres de systèmes est présenté dans le même ordre : nous sommes devenus médecins.
• Introduction : anatomie et physiologie.
• Anamnèse : symptômes fréquents, quelles questions poser
et quelles suites leurs donner. 1. Étapes de l'examen
• Examen physique : quoi et comment examiner.
• Explorations : comment sélectionner les examens de Tout au long du livre, il vous est proposé les grandes lignes
première intention les plus pertinents et informatifs, et en de techniques que vous devriez suivre lors de l'examen d'un
quoi ceux-ci clarifient le diagnostic. patient. Celles-ci sont identifiées par une rubrique en rouge
• Exemples d'examen clinique objectif structuré (ECOS) : intitulée « Étapes de l'examen ». La liste à puce fournit l'ordre
quelques scénarios cliniques courts pour illustrer le type exact dans lequel vous devriez entreprendre l'examen. Pour
de situations auxquelles l'étudiant peut être confronté vous aider à comprendre comment exécuter ces techniques,
lors d'une évaluation de ce système (les ECOS sont de nombreuses séquences d'examen ont été filmées et sont
une méthode d'évaluation classique des compétences marquées d'une tête de flèche.
Vidéos : compétences
cliniques
Des vidéos d'examen clinique, conçues sur mesure pour ce • Examen de la pression artérielle
manuel, sont incluses avec votre achat. Elles sont filmées avec
des médecins qualifiés, associées à des conseils pratiques
de l'équipe d'auteurs, et narrées par l'ancien coordinateur, le
Pr Colin Robertson. Ces vidéos vous offrent l'opportunité de
voir des professionnels expérimentés effectuer plusieurs des
examens de routine décrits dans le livre. Ces vidéos devraient
constituer un pont important entre l'apprentissage théorique • Examen du système respiratoire
via des manuels scolaires et l'enseignement pratique au lit du
patient, en vous aidant à mémoriser les étapes essentielles de
l'examen requises pour chaque système majeur tout en mon-
trant la technique clinique appropriée. Les vidéos seront à votre
disposition pour que vous puissiez les consulter à plusieurs
reprises au fur et à mesure que vos compétences cliniques se
développeront et se révéleront précieuses lorsque vous vous
• Examen du système gastro-intestinal
préparerez à vos évaluations cliniques de type ECOS.
Chaque examen de routine est associé à un récit explica-
tif détaillé, mais, pour un bénéfice optimal, il est conseillé de
visionner ces vidéos en parallèle de votre travail sur le livre. Voir
sur la page 2 de couverture comment y accéder.
A. Points clés des examens : • Examen des nerfs optique (II), oculomoteur (III), trochléaire (IV)
galeries de photographies et abducens (VI)
• Examen de l’épaule
• Examen de sensibilité des membres inférieurs
Examinateurs
Dr Amy Robb
Dr Ben Waterson
• Examen du genou Patients
Abby Cooke
Omar Ali
• Examen de la thyroïde
Producteur
Dr Alan G Japp
Collaborateurs
Anthony Bateman MD MRCP FRCA FFICM Kirsty Dundas DCH FRCOG
Consultant in Critical Care and Long Term Ventilation, Critical Consultant Obstetrician, Royal Infirmary of Edinburgh ;
Care NHS Lothian, Edinburgh, Royaume-Uni Honorary Senior Lecturer and Associate Senior Tutor,
University of Edinburgh, Royaume-Uni
Shyamanga Borooah MRCP(UK) MRCS(Ed)
FRCOphth PhD Andrew Elder FRCP(Ed) FRCPSG FRCP FACP FICP(Hon)
Fulbright Fight for Sight Scholar, Shiley Eye Institute, University Consultant in Acute Medicine for the Elderly, Western General
of California, San Diego, États-Unis Hospital, Edinburgh ; Honorary Professor, University of Edinburgh,
Royaume-Uni
Kirsty Boyd PhD FRCP
Consultant in Palliative Medicine, Royal Infirmary of Karen Fairhurst PhD FRCGP
Edinburgh ; Honorary Clinical Senior Lecturer, Primary General Practitioner, Mackenzie Medical Centre, Edinburgh
Palliative Care Research Group, University of Edinburgh, Clinical Senior Lecturer, Centre for Population Health Sciences,
Royaume-Uni University of Edinburgh, Royaume-Uni
Aborder la consultation
1
avec un patient
1. La consultation 4 2. Les alternatives à une consultation en « face à face » 6
A. Le motif de consultation 4 3. Les responsabilités professionnelles 6
B. L'environnement clinique 4 A. Confidentialité et consentement 7
C. Débuter la consultation 5 B. Médias sociaux 7
D. Recueillir des informations 5
4. Les responsabilités individuelles 8
E. Obtenir des informations sensibles et tierces personnes 5
F. Gérer les préoccupations du patient 5
G. Montrer de l'empathie 6
H. Montrer une sensibilité à la culture du patient 6
I. Aborder le problème 6
J. Conclure la consultation 6
pour les conversations personnelles. Si votre patient est mobile, Une écoute active est une des clés stratégiques de toute
essayez d'utiliser une pièce adjacente ou un box de consulta- consultation car elle encourage le patient à expliquer son his- 1
tion. Si vous n'avez pas d'autres alternatives que de parler au toire. Les médecins qui exploiteront chaque pause du patient
lit du patient, faites-lui savoir que vous comprenez le manque en posant une nouvelle question spécifique passeront à côté
d'intimité liée à cette conversation et qu'il peut se permettre de réflexions profondes et très informatives ou d'autres ques-
de ne pas répondre à certaines questions qui pourraient être tions hésitantes mais qui révèlent en fait les préoccupations
embarrassantes. intérieures du patient. Au contraire, encouragez-le à libérer sa
parole par des commentaires intéressés ou de petits bruits
comme : « Dites m'en un peu plus » ou « hum hum ». Montrez-
C. Débuter la consultation
leur que vous avez compris le sens de ce qu'ils ont exprimé
Dés le début de l'entretien, il est important de commencer à éta- en revenant sur certaines réflexions et en leur résumant ce que
blir un lien avec le patient. Ce lien aide le patient à se détendre vous pensez avoir compris de leur histoire.
et à s'engager dans un dialogue utile. Cela implique d'accueillir La communication non verbale est également importante.
le patient et de se présenter en décrivant clairement votre rôle. Cherchez des indices non verbaux indiquant le niveau d'anxiété
Une bonne entrée en matière pour toute consultation serait : du patient ou son état d'esprit global. Des modifications d'at-
« Bonjour, je suis le docteur… ». Vous devez porter un badge titude ou de postures durant la consultation peuvent être des
avec votre nom inscrit lisiblement. Un sourire amical contribue indices de difficultés qu'il ne peut pas exprimer verbalement.
à mettre votre patient à l'aise. Votre tenue est importante. Votre Si le langage corporel devient « fermé » – par exemple, si les
style vestimentaire et votre comportement ne devraient jamais patients croisent les bras et les jambes, se détournent ou évitent
rendre vos patients mal à l'aise ou les distraire. Un style élégant le contact visuel –, cela peut indiquer un malaise.
et simple est approprié. Les chemises doivent être à manches
courtes ou à manches longues remontées au-dessus des E. Obtenir des informations sensibles
coudes, particulièrement en prévision de l'examen clinique ou et tierces personnes
de la réalisation de certains gestes. Évitez le port de bijoux afin
de permettre un lavage efficace des mains et de réduire le risque La confidentialité est votre priorité absolue. Demandez l'autori-
de transmission d'infections (voir fig. 3.1). Attachez les cheveux sation de votre patient si vous avez besoin d'obtenir des infor-
longs en arrière. Vous devez vous assurer que le patient est mations de quelqu'un d'autre – généralement un parent, mais
confortablement installé et globalement à son aise. parfois un ami ou un soignant. S'il ne peut pas communiquer,
La façon de vous adresser à votre patient doit être adaptée vous aurez peut-être à contacter sa famille ou un autre soignant
à son âge, son vécu et son milieu socioculturel. Certaines per- afin de comprendre son histoire. Une tierce personne peut aussi
sonnes âgées préfèrent ne pas être appelées par leur prénom être amenée à vous contacter à son insu. Essayez de déterminer
et il est préférable de demander au patient comment il préfère qui elle est, son lien avec le patient et si celui-ci sait que cette
être nommé. Débutez en demandant au patient le motif de personne est en train d'échanger avec vous. Vous devez expli-
sa venue et les problèmes ou questions qu'il souhaite abor- quer à cette personne que vous êtes à son écoute mais qu'en
der. Commencez en lui posant une question ouverte, ce qui aucun cas vous ne pourrez lui divulguer d'informations cliniques
l'encouragera à s'exprimer. Par exemple : « Comment puis-je sans l'accord explicite du patient. Cette personne abordera
vous aider ? » ou « Qu'est-ce-qui vous a amené à venir me voir parfois des questions extrêmement sensibles telles que des
aujourd'hui ? ». troubles psychologiques, des abus sexuels ou des addictions
à l'alcool ou aux drogues. Ces informations seront ensuite abor-
dées prudemment avec votre patient afin de les confirmer.
D. Recueillir des informations
L'étape suivante de la consultation est de comprendre la cause F. Gérer les préoccupations du patient
de la maladie, c'est-à-dire d'obtenir un diagnostic. Pour ce faire,
vous devez déterminer si le patient souffre ou non d'une mala- Le patient n'est pas simplement l'« expression corporelle »
die ou d'une affection identifiable, ce qui nécessite une étude d'une maladie, mais un individu unique expérimentant un état
plus approfondie du patient par le recueil d'une anamnèse, de faiblesse vécu de façon personnelle. Établir un diagnostic
la réalisation d'un examen physique et d'explorations, le cas suffit rarement à permettre une compréhension complète des
échéant. Les chapitres 2 et 3 vous aideront à vous guider dans problèmes inhérents à chaque patient. Ainsi, à chaque consul-
la construction de l'interrogatoire et de l'examen physique ; des tation, vous devez chercher à comprendre clairement le ressenti
guides détaillés sur l'anamnèse et l'examen physique spéci- personnel du patient sur sa maladie. Cela implique d'explorer
fiques à chaque organe sont proposés dans les parties 2 et 3. les idées et les sentiments que le patient porte sur sa maladie,
La peur de l'inconnu et la crainte d'une maladie sévère le retentissement sur son quotidien et son fonctionnement ainsi
concernent beaucoup de patients se présentant en consul- que ses attentes quant au traitement et à son avenir.
tation. Les réactions face à cela varient considérablement, Les patients peuvent également être si inquiets de la sévé-
mais peuvent clairement interférer avec une description claire rité de l'atteinte qu'ils préfèrent occulter leurs préoccupations.
de l'histoire de la maladie. Un langage clair est essentiel à Un patient craignant un diagnostic de cancer pourrait montrer,
chaque entretien. L'utilisation d'un jargon médical est rarement comme seul signe de sa fébrilité durant l'interrogatoire, une
appropriée, car le risque est important que le médecin et le attitude assise les doigts croisés, en espérant intérieurement
patient aient une compréhension différente des mêmes mots. que le cancer ne sera pas évoqué. Inversement, ne présumez
Cela s'applique aussi à des mots du langage courant pouvant pas que le diagnostic est systématiquement la préoccupation
s'interpréter différemment (« indigestion » ou « vertiges »). Ces principale du patient. Les inquiétudes liées à une inaptitude au
termes doivent toujours être définis précisément au cours de travail ou à s'occuper d'un proche dépendant sont également
la discussion. des éléments de stress.
6 • ABORDER LA CONSULTATION AVEC UN PATIENT
Les idées, les préoccupations et les attentes du patient options thérapeutiques sont parfois à envisager et à discuter en
concernant son état de santé sont aussi en rapport avec des fonction de leurs balances bénéfice/risque, des incertitudes et
croyances personnelles ainsi qu'avec l'image sociale et cultu- des précautions à envisager.
relle renvoyée par son état de santé. Ces croyances peuvent
influencer quels symptômes les patients choisissent de présen- J. Conclure la consultation
ter au médecin et le moment où les présenter. Dans certains
cas, le discours est fortement influencé par un savoir antérieur Conclure une consultation consiste généralement à résumer
sur la santé et les maladies venu des médias ou d'internet. En les points importants abordés durant celle-ci. Cela permet au
effet, bien souvent, les patients seront allés chercher les expli- patient de mieux retenir ce qui a été évoqué et contribue à
cations de leurs symptômes sur internet (ou toute autre source une meilleure compliance aux traitements. Il peut encore avoir
d'information) avant de consulter le médecin, et y retourneront quelques questions à vous poser. Vérifiez que vous êtes bien en
probablement pour un deuxième avis une fois la consultation accord sur la suite du projet thérapeutique et convenez de la
finie. Il est donc important d'établir les connaissances précises prochaine date de suivi.
que le patient possède déjà sur ses problèmes. Cela vous per-
met, ainsi qu'au patient, de progresser vers une compréhension
mutuelle de la maladie. 2. Les alternatives à une consultation
en « face à face »
G. Montrer de l'empathie
L'utilisation du téléphone comme méthode alternative à la
Se montrer empathique est un moyen puissant de construire
consultation en face à face est devenue une pratique acceptée
une relation avec un patient. L'empathie est la capacité d'identi-
dans certains domaines de certains systèmes de soins de santé,
fier et de comprendre le ressenti du patient, ses pensées et ses
comme la médecine générale. Toutefois, les études suggèrent
sentiments afin de voir le monde tel qu'il le voit. Être empathique
que, en comparaison à une consultation « en face à face », les
implique d'être capable de le faire comprendre au patient en
consultations téléphoniques sont plus courtes, couvrent moins
prononçant certaines phrases du type : « Je peux comprendre
de problèmes, et limitent le recueil d'informations, l'adminis-
que vous devez vous sentir très inquiet de ce que cela pourrait
tration de conseils et la création d'un lien. Malgré tout, elles
signifier ». L'empathie diffère de la sympathie, qui se manifeste-
peuvent être très bénéfiques dans le cas de problèmes simples.
rait chez le médecin par des sentiments de compassion ou de
Au cours d'une consultation téléphonique, l'absence d'indices
tristesse en rapport avec les épreuves vécues par le patient.
visuels liés au langage corporel ou à l'attitude augmente les
chances d'incompréhensions. Le téléphone ne permettant pas
H. Montrer une sensibilité à la culture d'évaluer les réactions ou d'apporter une aide immédiate adap-
du patient tée, il ne doit pas être utilisé pour les annonces graves ou déli-
cates. En cas d'utilisation du téléphone, votre écoute doit être
Des patients d'autres cultures peuvent avoir des règles sociales encore plus active et nécessite de vérifier régulièrement votre
qui diffèrent concernant le contact visuel, le toucher et l'intimité. niveau de compréhension mutuelle.
Dans certaines cultures, il est normal de maintenir un contact De même, les moyens de communications asynchrones,
visuel prolongé. Dans la plupart des autres cultures mondiales, comme les courriels ou les applications internet, sont de plus en
cela peut être considéré comme une attitude grossière ou plus utilisés par les médecins. Ils ne sont pas, pour le moment,
conflictuelle. Serrer la main à quelqu'un du sexe opposé est considérés comme des alternatives viables à une consultation
strictement interdit dans certaines cultures. La mort peut être en face à face ou comme une méthode sûre de transmission
abordée très différemment selon les attentes de la famille vis-à- d'informations confidentielles.
vis du médecin, les informations à partager, les personnes avec Malgré les limites de ces nouveaux moyens de communi-
qui les partager et les rites funéraires qui suivront. Évaluez et cations, la télémédecine (utilisant les télécommunications ou
respectez les différences de cultures et de croyances de votre d'autres technologies informatives) peut parfois être le seul
patient. En cas de doute, demandez-lui. Il comprendra que moyen d'accès aux soins pour les patients isolés ou vivant
vous êtes attentif et sensible à ses préoccupations. dans des régions reculées. Son utilisation présente également
l'avantage de faciliter la collecte et la transmission de données
I. Aborder le problème médicales.
4. Les responsabilités individuelles de vous. Si vous pensez que votre état de santé présente un
risque de contagiosité pour le patient, ou si votre capacité
de jugement ou de performance pourrait être altérée par une
Vous devez avoir conscience que vous êtes dans une situation
maladie ou des traitements, vous devez consulter votre propre
professionnelle dont vous ne devez pas abuser. Cessez toute
médecin généraliste. De telles situations pourraient survenir
relation inappropriée avec un patient et évitez de procurer des
au cours de maladies sévères ou contagieuses, de troubles
soins médicaux aux personnes avec lesquelles vous avez une
psychiatriques importants ou d'addiction à l'alcool ou aux
relation personnelle.
drogues.
Enfin, souvenez-vous que, pour être en mesure de prendre
soin de vos patients, vous devez commencer par prendre soin
Aspects généraux
J. Alastair Innes
Karen Fairhurst
Anna R. Dover
2
de l'interrogatoire d'un patient
1. L'importance d'une anamnèse claire 10 3. Situations difficiles 18
2. Collecter des informations 10 A. Patients ayant des difficultés de communication 18
A. Débuter le recueil de l'anamnèse 10 B. Patients ayant des troubles cognitifs 18
B. Anamnèse des symptômes actuels 11 C. Situations délicates 18
C. Antécédents 13 D. Patients émotifs ou en colère 18
D. Traitements habituels 14
E. Antécédents familiaux 14
F. Mode de vie 15
G. Recherches systématiques 17
H. Conclure l'entretien 18
Encadré 2.1 Exemples de termes utilisés par les patients nécessitant d'être précisés
Terme utilisé par le patient Problèmes sous-jacents habituels Éléments de différenciation utiles
Allergie Allergie vraie (médiée par les immunoglobulines E) Rash visible ou œdème, installation rapide
Intolérance alimentaire ou aux médicaments, souvent associée Symptômes gastro-intestinaux au premier plan
à des nausées ou d'autres troubles gastro-intestinaux
Indigestion Reflux gastro-œsophagien avec œsophagite Brûlures rétrosternales, goût acide
Douleur abdominale liée à : Localisation et nature de l'inconfort :
– ulcère gastroduodénal – épigastrique, augmenté à jeun
– gastrite – épigastrique, vomissement
– cholécystite – hypocondre droit, sensibilité
– pancréatite – épigastrique, douleur sévère
Rhumatisme Arthralgie Rougeur ou gonflement articulaire
Myalgies Douleur musculaire
Blocage lié à une fracture ostéoarticulaire ancienne Déformation
Rhume Expectorations purulentes bronchitiques Toux, crachats verdâtres ou jaunâtres
Écoulement nasosinusal Écoulement nasal vert ou jaune
Obstruction nasale Trouble olfactif, antécédent de traumatisme ou de polypes
nasaux
Crise Syncope d'origine cardiaque Pâleur objectivée durant la syncope
Épilepsie Mouvements tonicocloniques objectivés
Mouvements anormaux involontaires Absence de perte de conscience
Vertiges Labyrinthite Nystagmus, sensation que la pièce tourne autour, absence
de déficit neurologique autre
Hypotension orthostatique Antécédents de palpitations, maladies cardiaques ou lien
avec le changement de position
Accident vasculaire cérébral Début brutal, autres déficits neurologiques associés
12 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'INTERROGATOIRE D'UN PATIENT
bronchique due à un cancer pulmonaire. Une hémoptysie La douleur est un symptôme très important commun à de
depuis plus de 2 mois augmente considérablement le risque nombreux domaines de la médecine. Un schéma général décri-
cancéreux. Si le patient présente également une perte de poids, vant en détail les caractéristiques de la douleur est proposé
la valeur prédictive positive de toutes ces réponses est très éle- dans l'encadré 2.2.
vée pour le cancer du poumon. L'ensemble de ces éléments Après avoir clarifié les symptômes actuels, recherchez les
guidera votre examen et vos explorations. éléments cliniques associés. Utilisez pour cela votre impression
Quelle a été la première chose que vous avez initiale sur les pathologies les plus probables (cancer pulmo-
remarqué lorsque vous êtes tombé malade ? naire ou infection respiratoire chronique) et posez des questions
(Question ouverte) directes pertinentes :
J'avais cette toux dont je n'arrivais pas à me débarrasser. Vous sentez-vous parfois essoufflé du fait
Cela a commencé après une grippe que j'ai eue il y a de votre toux ?
2 mois. J'ai pensé que ça allait s'améliorer, mais ce n'est Un peu.
pas le cas et ça me rend fou. Combien de kilos avez-vous perdu ? (Confirmerait
Pouvez-vous m'en dire plus à propos de cette toux ? l'existence d'une pathologie grave)
(Question ouverte) J'ai perdu environ 6 kg depuis le début.
Eh bien, c'est permanent. Je tousse, je tousse puis Les questions nécessaires, une fois arrivé à ce point, varie-
j'évacue de gros crachats. Cela me réveille la nuit, du ront en fonction du système étudié. Un résumé des principales
coup je me sens mal le lendemain. Parfois, j'ai mal dans la questions introductives utiles pour chaque système est proposé
poitrine à force d'avoir toussé. dans l'encadré 2.3. Apprenez à penser, au fur et à mesure que
Vous avez déjà noté dans son histoire « toux », vous écoutez, aux grandes catégories de pathologies qu'il fau-
« crachats » et « douleur thoracique » comme points
fondamentaux de l'anamnèse. Poursuivez avec des
questions clés qui clarifieront chacun de ces points.
Toux : Toussez-vous pour essayer d'évacuer
quelque chose de votre poitrine ou cela survient-il Encadré 2.2 Caractéristiques de la douleur
sans prévenir ? (Question fermée, clarification)
Localisation
Oh, je ne peux pas l'arrêter, même quand je dors ça me • Douleur somatique, souvent bien localisée (entorse de cheville)
dérange. • Douleur viscérale, plus diffuse (angine de poitrine)
Avez-vous l'impression que la toux part de la gorge Début
ou de la poitrine ? Pouvez-vous me montrer d'où elle • Vitesse d'installation et circonstances associées
vous semble venir ?
Type
C'est comme un chatouillement ici (il montre le haut du • Décrivez-la plutôt par des adjectifs comme aiguë/latente, brûlante/
sternum). piquante, profonde/en coup de couteau, broyante/tiraillement ;
Crachats : De quelle couleur sont vos crachats ? préférez les termes utilisés par le patient au lieu de les lui suggérer
(Question fermée, focalisée sur un symptôme) Irradiations
Clairs. • À travers une extension locale
• En lien avec une atteinte neuropathique à distance comme une
Avez-vous déjà craché du sang ? (Question fermée)
douleur diaphragmatique et du sommet de l'épaule via le nerf
Oui, parfois. phrénique (C3, C4)
Quand est-ce arrivé pour la première fois et Symptômes associés
combien de fois cela s'est-il reproduit ? (Question • Aura visuelle accompagnant une migraine
fermée) • Paresthésies des membres inférieurs associées à une lombalgie
suggérant une radiculalgie
Oh, quasiment tous les jours. Je l'ai remarqué il y a
un mois. Rythme (durée, évolution, schéma)
Était-ce abondant ? (Question fermée, clarification • Constante depuis le début
• Épisodique ou continue :
d'un symptôme)
• si épisodique, durée et fréquence des attaques
Juste des traces. • si continue, décrivez tout changement d'intensité
Était-ce du sang pur ou était-ce mélangé à des Facteurs aggravants et améliorants
crachats jaunâtres ou verdâtres ? • Circonstances aggravant ou améliorant la douleur, par exemple
Juste des traces de sang dans des crachats clairs. l'alimentation
• Activités ou postures spécifiques ainsi que toutes les mesures
Douleur thoracique : Pouvez-vous me parler de d'évitement entreprises pour prévenir le déclenchement
cette douleur thoracique ? (Question ouverte) • Effets des activités ou postures spécifiques, incluant les effets
Eh bien, c'est sur le côté (en le montrant du doigt) quand médicamenteux et des médecines alternatives
je tousse. Sévérité
La douleur apparaît-elle à d'autres moments ? • Difficile à évaluer du fait de sa subjectivité
(Ouverte, clarification d'un symptôme) • Il est parfois utile de la comparer à une douleur plus habituelle
comme un mal de dent
Quand je prends des inspirations profondes. C'est • Variabilité diurne ou nocturne, durant la semaine ou le mois comme
vraiment très douloureux quand je tousse ou que les menstruations
j'éternue.
2. Collecter des informations • 13
dra évoquer et aux liens que vous pourriez établir avec l'histoire
Encadré 2.3 Questions à poser sur des symptômes communs racontée. Essayez, en particulier, de rattacher vos hypothèses
à la présentation initiale et au mode de progression des symp-
Système Question
tômes (encadré 2.4).
2
Cardiovasculaire Avez-vous déjà présenté une douleur Afin de compléter l'anamnèse, réalisez une évaluation ini-
thoracique ? tiale du retentissement de la pathologie sur la vie de votre
Vous réveillez-vous parfois en pleine nuit avec
patient. Par exemple, une dyspnée pour des efforts intenses
une sensation d'essoufflement ?
Avez-vous déjà senti votre cœur battre peut empêcher un maçon de travailler, mais aura un reten-
rapidement ou très fort ? tissement moindre pour un retraité sédentaire. « Pouvez-vous
me dire la distance que vous étiez capable de parcourir à pied
Respiratoire Êtes-vous parfois essoufflé(e) ?
Toussez-vous par moments ? Dans ce cas, cette auparavant ? » est une question qui peut vous aider à évaluer
toux est-elle productive ? son niveau habituel de fonctionnement ; et « Comment cela
De quelle couleur sont vos crachats ? a-t-il évolué depuis que vous êtes moins bien ? » peut vous
Avez-vous déjà craché du sang lors d'un épisode révéler l'impact de la maladie. Demandez-lui s'il a l'habitude
de toux ? de pratiquer un sport et s'il a dû modifier ses activités à cause
Gastro-intestinal Êtes-vous gêné(e) par des troubles digestifs ou de sa pathologie.
des brûlures d'estomac ?
Avez-vous remarqué des modifications de votre C. Antécédents
transit abdominal ?
Avez-vous déjà noté la présence de traces de
Les antécédents médicaux du patient peuvent avoir un lien avec
sang dans vos selles ?
sa plainte actuelle ; par exemple des épisodes antérieurs de
Urogénital Avez-vous déjà ressenti une douleur ou des migraine chez un patient se plaignant de céphalée ; une héma-
difficultés à uriner ?
témèse et de multiples petites ecchymoses chez un patient
Vous levez-vous la nuit pour uriner ? Si oui,
combien de fois par nuit ? suspecté d'alcoolisme chronique. Ils vous révéleront peut-être
Avez-vous des pertes urinaires en fin certaines pathologies sous-jacentes ou des facteurs de risque,
de miction ? comme un diabète chez un patient présentant une artérite des
Vos règles sont-elles régulières ? membres inférieurs, ou une coqueluche chez un patient avec
Musculosquelettique Avez-vous une douleur, une raideur ou des une dilatation des bronches.
gonflements articulaires ? La demande d'avis qui vous est adressée et les précé-
Avez-vous des difficultés à marcher ou à vous dents comptes-rendus contiennent souvent des informa-
habiller ? tions utiles, mais le patient reste généralement la meilleure
Endocrinien Avez-vous récemment constaté des sensations source d'informations. Les questions suivantes vous per-
inhabituelles de chaud ou de froid ? mettront d'obtenir les informations clés chez la plupart des
Avez-vous une sensation de soif ou buvez-vous patients :
plus que d'habitude ? • Quels problèmes de santé vous ont déjà amené à consulter
Neurologique Avez-vous déjà présenté une crise d'épilepsie, une par le passé ?
perte de connaissance ou des trous de mémoire ? • Avez-vous déjà été à l'hôpital ou eu un suivi médical
Avez-vous noté des fourmillements, une faiblesse, auparavant ?
une maladresse dans vos bras ou dans vos • Avez-vous déjà été opéré(e) ?
jambes ?
• Prenez-vous des traitements régulièrement ?
Encadré 2.4 Présentation typique des symptômes en lien avec la cause d'une maladie
Cause de Début des symptômes Évolution des symptômes Symptômes associés/présentation
maladie des symptômes
Infection En général en quelques heures, inopiné En général relativement rapide, en quelques Fièvre, frissons, symptôme localisateur
heures ou jours comme une douleur pleurale ou une toux
Inflammation Peut être aigu Fluctuations, semaines à mois Peut être plurifocal, souvent avec une
sensibilité localisée
Métabolique Très variable Heures, jours, mois Sévérité progressivement croissante sans
rémission
Tumeur maligne Progressif, insidieux Progression constante, semaines ou mois Perte de poids, fatigue
Toxique Brusque Rapide Symptômes initiaux menaçants, souvent
associés à des vomissements
Traumatique Brusque Varie peu Diagnostic généralement évident
Vasculaire Soudain Progression par étape avec épisodes aigus Développement rapide de signes
physiques associés
Dégénérative Progressif Mois à années Aggravation progressive avec des périodes
de détérioration accrue
14 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'INTERROGATOIRE D'UN PATIENT
Identification des I
individus en termes de
niveau générationnel II
(chiffres romains) et
de position dans la III
génération. Le proband
est la patiente III2 IV
Fig. 2.1 Symboles utilisés pour la construction d'un arbre généalogique et exemples. Le terme « proband » désigne l'homme ou la femme identifié
comme étant le cas index, autour duquel est construit l'arbre généalogique.
alcoolique, demandez-lui de décrire la quantité et le type d'alcool Demandez à chaque patient sa profession. Précisez sa
(bière, vin, spiritueux) consommés en une semaine. La quantité fonction au travail, en particulier dans le cas d'expositions à la
d'alcool consommée par semaine est mieux estimée en utilisant poussière ou à des produits chimiques. Si le patient travaille au
des unités, 1 unité correspondant à 10 g d'alcool contenu dans contact de produits nocifs (amiante ou poussière de minerais
un petit verre de vin, un demi de bière (250 ml) ou une mesure par exemple), une liste détaillée de ses différents emplois est
standard de spiritueux (25 ml). nécessaire, incluant le nom de l'employeur, la durée et l'im-
portance de l'exposition ainsi que les mesures préventives de
Problèmes d'alcool protection.
La consommation d'alcool est jugée excessive à partir de 14 uni- Des symptômes qui s'améliorent durant le week-end ou
tés par semaine pour l'homme et la femme. Une alcoolisation les vacances suggèrent un lien avec l'activité professionnelle.
aiguë massive (binge drinking) est plus délétère qu'une même L'environnement domestique ainsi que les loisirs peuvent
consommation répartie sur 4 à 5 jours. La plupart des autorités de aussi avoir un intérêt, comme pour les pneumopathies d'hy-
santé recommandent au moins 2 jours sans boire par semaine. persensibilité ou la psittacose chez les individus élevant des
La dépendance à l'alcool survient lorsque sa consommation oiseaux, ou l'asthme chez les propriétaires de chats ou de
devient prioritaire sur d'autres habitudes qui avaient aupara- rongeurs.
vant une plus grande importance. Les signes avant-coureurs
à détecter à l'interrogatoire sont résumés dans l'encadré 2.8.
Voyages
Activités professionnelles Les voyageurs de retour de séjours à l'étranger présentent fré-
et environnement domestique quemment certaines maladies. Ils sont à risque de pathologies
Le travail influence profondément la santé. Le chômage est infectieuses inhabituelles ou tropicales. Le vol en lui-même peut
associé à une augmentation de la morbidité et de la mortalité favoriser certaines atteintes, comme les thromboses veineuses
alors que certaines professions sont associées à des maladies profondes ou les pathologies de l'oreille moyenne. La période
particulières (encadré 2.9). d'incubation peut être indicative sur l'origine possible de mul-
tiples affections, mais certaines maladies comme le paludisme
Encadré 2.8 Caractéristiques de l'anamnèse ou le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) peuvent se
évocatrices d'une dépendance à l'alcool révéler plusieurs années après. Listez les lieux et dates des
séjours. Notez, en cas de voyage dans des zones à risque,
• Envie forte, parfois irrépressible, de consommer de l'alcool toutes les vaccinations réalisées et la prise d'une prophylaxie
• Inaptitude à contrôler le démarrage ou l'arrêt et la quantité antipaludéenne.
consommée
• Boit de l'alcool le matin
• Tolérance, lorsque des doses croissantes sont nécessaires pour Exposition sexuelle
obtenir les effets initialement présents
• Sevrage alcoolique à la diminution ou à l'arrêt, avec tremblements, Ne réalisez un interrogatoire complet sur les expositions
transpiration, tachycardie, anxiété, insomnie et parfois des états sexuelles que si le contexte ou les symptômes principaux
hallucinatoires ou de désorientation (delirium tremens) ; état soulagé suggèrent que cela est pertinent. Posez vos questions avec
par la reprise d'alcool tact et objectivité (voir plus loin). Expliquez vos intentions :
• Néglige ses autres plaisirs ou centres d'intérêt « Dans le cadre de vos antécédents médicaux, je dois
• Continue de boire malgré des avertissements quant aux dangers des
vous interroger sur vos partenaires. Cela vous pose-t-il un
conséquences
problème ? »
• chez un patient avec des palpitations : existe-t-il que vous allez lui poser des questions à ce sujet et assurez-vous
des symptômes évocateurs d'hyperthyroïdie ou des de la confidentialité de la conversation. Par exemple :
antécédents familiaux de pathologie thyroïdienne ? Le Du fait de votre histoire, j'aurais besoin d'aborder
patient est-il anxieux ou boit-il beaucoup de café ? avec vous certaines questions assez personnelles.
• chez un patient dégageant une odeur d'alcool, Êtes-vous d'accord ?
renseignez-vous sur des symptômes associés comme
Puis-je vous demander si vous avez un partenaire
un engourdissement des pieds lié à une neuropathie
sexuel régulier ?
alcoolique.
Poursuivez avec :
2 3 4
8
frottez les mains paume Paume droite sur le dos Paume contre paume avec
contre paume de l'autre main avec les doigts les doigts entrelacés
entrelacés et vice versa
5 6 7
9
Dos des doigts contre Frottement rotatif du pouce Frottement rotatif, en avant
la paume opposée avec gauche serré dans et en arrière avec les doigts
les doigts interverrouillés la paume droite et vice versa joints de la main droite dans
la paume gauche et vice versa
Fig. 3.1 Techniques de lavage des mains. Source : WHO Guidelines on Hand Hygiene in Health Care First Global Patient Safety Challenge Clean Care is
Safer Care ; http://www.who.int/gpsc/clean_hands_protection/en/© World Health Organization 2009. Tous droits réservés.
un examen pulmonaire avant de procéder à l'examen abdomi- L'ampleur de l'examen dépendra des symptômes recherchés
nal. Restez à tout moment poli envers le patient et soyez vigi- et des circonstances de l'entretien. Souvent, durant une consul-
lant aux aspects de l'examen qui pourraient engendrer de la tation ciblée brève (une céphalée chez le médecin généraliste),
souffrance ou de l'inconfort. Tenez compte de toute anxiété ou un seul système (neurologique dans ce cas) sera examiné.
inquiétude signalée par le patient durant la consultation. Cependant, dans d'autres circonstances, un examen physique
détaillé sera nécessaire (voir chap. 20).
Il n'y a pas une façon unique de réaliser un examen phy-
3. Étapes pour effectuer un examen sique, mais une approche systématique standardisée permet de
s'assurer que rien n'est omis. L'expérience vous permettra de
physique développer votre style et une séquence d'examen personnalisée.
Dans l'ensemble, tout examen systématique implique d'observer
L'objectif de l'examen physique est de rechercher la présence, le patient (par exemple modification de la peau, cicatrices, respi-
ou l'absence, de signes physiques confirmant ou réfutant les ration ou pulsations anormales), de poser les mains sur le patient
hypothèses diagnostiques formulées suite à l'interrogatoire. pour palper (toucher), percuter (en tapant sur le corps) et, enfin,
22 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'EXAMEN CLINIQUE
d'utiliser un stéthoscope, si nécessaire, afin d'écouter l'organe Sa démarche est-elle normale ou présente-t-il des signes de
concerné. Cette approche structurée peut être résumée par : douleur, de limitation de la motricité ou de faiblesse ? Des ano-
• inspection ; malies de la marche sont parfois des signes pathognomoniques
• palpation ; de maladies neurologiques ou neuromusculaires, comme
• percussion ; une marche « fauchante » qui peut faire évoquer un accident
• auscultation. vasculaire cérébral, une marche pseudo-ébrieuse lors d'une
atteinte cérébelleuse, ou la marche dans les syndromes par-
kinsoniens (voir fig. 7.17D). Relevez tout mouvement anormal
4. Observations initiales comme un tremblement (par exemple dans le sevrage alcoo-
lique), une dystonie (pouvant être un effet secondaire potentiel
L'examen physique débute au moment où vous voyez le des neuroleptiques), ou une chorée (mouvements saccadés
patient. Débutez par une évaluation rapide de son état général. et involontaires, caractéristiques de la maladie de Huntington).
Votre évaluation clinique pourrait avoir à être adaptée devant
un patient présentant des signes cliniques de gravité ou mou-
rant. Ainsi, un patient présentant une défaillance grave d'organe
pourrait nécessiter d'être réorienté en urgence avant que le
diagnostic de fond ne soit trouvé (voir chap. 18). Des systèmes
d'alerte précoce (incluant l'évaluation des signes vitaux : pouls,
pression artérielle, fréquence respiratoire et saturation en oxy-
gène, température, niveau de conscience et échelle d'évalua-
tion de la douleur) sont utilisés en routine pour évaluer la gravité
Fig. 3.2 Les tatouages peuvent être révélateurs.
des patients et aider à déterminer la sévérité et l'urgence de
la pathologie (voir chap. 18). Si votre patient est anxieux ou
douloureux, la priorité sera de le soulager par un traitement effi-
cace avant une évaluation plus poussée, bien qu'une évaluation
simultanée de la cause de la douleur soit clairement importante.
Chez les patients stables ou en bon état général, une éva-
luation plus classique peut débuter. Observez le patient avant
que la consultation ne débute. Comment semble-t-il se porter ?
Quelle est son attitude ? Est-il assis confortablement à lire, à
téléphoner ou semble-t-il renfermé, anxieux ou confus ?
Observez sa tenue vestimentaire. Est-il habillé de façon
appropriée ? Les vêtements donnent des indices sur la person-
nalité, l'état d'esprit et la situation sociale au même titre que
l'état physique. Les patients présentant une perte de poids
récente porteront souvent des vêtements trop amples ou
lâches. Existe-t-il des signes de négligence de soi (qui peuvent
sous-tendre l'existence de facteurs favorisants tels que des
troubles cognitifs, une limitation de la motricité, une dépen-
dance à l'alcool ou aux drogues) ou une tenue inappropriée ?
Par exemple, un patient se présentant pour une hyperthyroïdie
pourrait porter des vêtements d'été malgré la saison hivernale
du fait d'une sensation de chaleur importante. Fig. 3.3 Marques linéaires d'injections intraveineuses
Certains accessoires du patient (par exemple un patient au pli du coude droit.
diabétique porteur d'une pompe à insuline, un patient insuf-
fisant respiratoire chronique avec une bouteille d'oxygène)
ou sur le côté du lit (prothèses auditives sur la table de nuit,
débitmètre de pointe ou inhalateurs), vous renseigneront sur
sa situation médicale. Notez les aides à la marche, une chaise
percée ou un fauteuil roulant qui vous indiquent ses capacités
fonctionnelles. Notez également tous les tatouages ou pier-
cings. Ceux-ci sont parfois associés à une exposition ancienne
à un risque infectieux, mais peuvent aussi renseigner sur les
antécédents du patient (fig. 3.2). Assurez-vous de repérer les
marques d'injections intraveineuses (consommateurs de dro-
gues intraveineuses) ou les cicatrices linéaires (généralement
transverses) récentes ou antérieures liées à une automutilation
(fig. 3.3 et 3.4).
A. Démarche et posture
Si le patient peut se déplacer, observez comment il se lève de sa
chaise et marche vers vous. Utilise-t-il des aides à la marche ? Fig. 3.4 Cicatrices d'automutilation (coupures).
5. Mains • 23
chaudes en raison de la vasodilatation liée à la concentration comme un shunt artérioveineux chez un patient dialysé. Il est
artérielle élevée en dioxyde de carbone. Lors d'une défaillance parfois d'origine congénitale
; cependant, dans 90 % des
cardiaque, les mains sont souvent froides et cyanosées du cas, il révèle une maladie sous-jacente sévère (encadré 3.5).
fait de la vascoconstriction périphérique en réponse à la dimi- L'hippocratisme peut régresser avec l'amélioration de la patho-
nution du débit cardiaque. En cas d'insuffisance cardiaque à logie sous-jacente.
débit élevé, comme dans une hyperthyroïdie, les mains peuvent
également être chaudes.
Étapes de l'examen
Peau
• Examinez le pourtour du lit de l'ongle sur le côté de chaque
Les modifications de la peau peuvent vous indiquer une maladie doigt. Observez la phalange distale, l'ongle et son lit :
systémique. Par exemple, une acromégalie peut se manifester • estimez l'épaisseur du doigt au niveau de l'articulation
par une peau épaissie et des mains larges (voir fig. 10.9), et une interphalangienne distale (celle-ci correspond à
sclérodermie systémique par une peau fine et tendue associée l'épaisseur antéropostérieure plutôt que la largeur du
à des dépôts calciques (calcinose sous-cutanée) (voir fig. 3.30C doigt). Répétez cela au niveau du lit de l'ongle ;
et 13.6). Les mains peuvent aussi vous donner des indices sur • évaluez l'angle du lit de l'ongle (fig. 3.9A).
le mode de vie du patient : les travailleurs manuels peuvent pré- • Demandez au patient de placer les ongles correspondants
senter des callosités spécifiques en raison de la pression sur de chaque doigts (annulaires) dos à dos et observez entre
des points caractéristiques, tandis que des mains peu utilisées les lits des ongles l'espace normal en forme de « diamant »
seront douces et lisses. (signe de la fenêtre de Schamroth ; fig. 3.9B).
• Placez vos pouces sous la pulpe de la phalange distale
Ongles et utilisez alternativement vos index pour rechercher des
mouvements des ongles sur le lit de l'ongle (fig. 3.9C).
Les ongles peuvent être affectés dans de multiples maladies
systémiques. L'encadré 3.4 et la figure 3.7 résument les modifi-
cations des ongles observables lors de l'examen clinique et les
maladies systémiques à suspecter. Un hippocratisme digital est probable si :
L'hippocratisme digital est un gonflement non douloureux • le rapport d'épaisseur interphalangien est > 1 (c'est-à-dire
des tissus mous des phalanges terminales associé à une aug- que le doigt est plus épais au niveau du lit de l'ongle qu'au
mentation de la convexité des ongles (fig. 3.8). L'hippocratisme niveau de l'articulation interphalangienne distale ; fig. 3.9A) ;
est généralement symétrique, peut toucher les orteils et être • l'angle du lit de l'ongle est > 190° (fig. 3.9A) ;
unilatéral dans le cas d'une atteinte vasculaire proximale, • le signe de la fenêtre de Schamroth est absent (fig. 3.9B).
A B C
Fig. 3.7 Anomalies des ongles au cours de maladies systémiques. A Onycholyse avec ponctuations
en dé à coudre au cours d'un psoriasis. B Lignes de Beau après un épisode de pathologie aiguë sévère. C
Leuconychie. D Koïlonychie. (A) Source : Innes JA. Davidson's Essentials of Medicine. 2nd edn. Edinburgh :
D Churchill Livingstone ; 2016.
A
Fig. 3.8 Hippocratisme digital. A Vue antérieure. B Vue latérale.
Normal 3
1 2
Fenêtre
de Schamroth
présente
Hippocratisme
Hippocratisme 3
1 2
Fenêtre
de Schamroth
A B absente C
Fig. 3.9 Examen d'un hippocratisme digital. A Évaluation de l'épaisseur interphalangienne de l'articulation interphalangienne (1), du lit de l'ongle (2) et
de l'angle du lit de l'ongle (3). B Signe de la fenêtre de Schamroth. C Rechercher une fluctuation du lit de l'ongle.
bilatérales et symétriques, généralement sur le visage, la nuque pigmentation des aréoles, des aisselles, des aires génitales et
et les faces d'extension des membres, ce qui entraîne des de la ligne blanche (provoquant une coloration foncée de la ligne
plaques pâles et irrégulières de la peau (fig. 3.10). Un vitiligo peut médiane du bas abdomen, appelée « linea nigra »).
aussi être observé dans d'autres pathologies auto-immunes
comme le diabète de type 1, les pathologies thyroïdiennes ou
Hémochromatose
surrénaliennes et la maladie de Biermer. Un hypopituitarisme se L'hémochromatose est une maladie génétique liée à une
manifeste également par une peau pâle en raison de la dimi- absorption excessive de fer, induisant une hyperpigmentation
nution de la production de peptides mélanotropes. L'albinisme liée aux dépôts de fer et à une hyperproduction de mélanine
est une maladie génétique responsable d'une présence minime (fig. 3.11). L'atteinte du pancréas par les dépôts de fer est res-
voire nulle de mélanine dans la peau ou les cheveux. La quantité ponsable d'un diabète de type 1 aussi appelé « diabète bronzé ».
de pigments dans l'iris varie. Certains auront les yeux rouges,
mais la plupart auront des yeux bleus. Hémosidérine
Une production excessive de l'hormone adrénocorticotrope
L'hémosidérine est un produit de dégradation de l'hémoglo-
(ACTH), qui est une hormone antéhypophysaire, entraîne une
bine, qui peut se déposer dans la peau des jambes suite à une
hyperpigmentation observée au cours de l'insuffisance surré-
extravasation sanguine sous-cutanée liée à une insuffisance vei-
nalienne (ou dans l'entité rare qu'est le syndrome de Nelson,
neuse. Une exposition prolongée de la peau à la chaleur comme
caractérisée par une hyperproduction d'ACTH suivant une
un feu ou une bouillote appliquée sur une zone douloureuse
surrénalectomie bilatérale effectuée suite à un syndrome de
peut provoquer un dépôt local d'hémosidérine appelé erythema
Cushing). Elle est responsable d'une pigmentation brune, en
ab igne ou « dermite des chaufferettes » (fig. 3.12).
particulier des plis cutanés, des cicatrices récentes, des reliefs
osseux, des zones exposées à la pression, comme les cein-
Ecchymoses
tures et les bretelles de soutien-gorge, et de la muqueuse des
lèvres et de la bouche, résultant en des plaques brunes cou- Des ecchymoses peuvent être le reflet d'une fragilité de la peau
leur boue (voir fig. 10.12B). La grossesse et la contraception ou des tissus conjonctifs en raison d'un âge avancé, de l'uti-
orale peuvent aussi entraîner une hyperpigmentation tachetée lisation de glucocorticoïdes ou d'un trouble de la coagulation
de la face appelée chloasma. La grossesse peut induire une plus sévère.
6. Peau • 27
Cyanose
La cyanose est une coloration bleue anormale de la peau et
des muqueuses survenant lorsque la concentration absolue
de désoxyhémoglobine est augmentée. Elle peut être difficile
à observer, en particulier chez les patients noirs ou asiatiques ;
toutefois, elle sera plus facilement détectable dans les zones
où les vaisseaux sous-épidermiques sont les plus proches
de la peau (lèvres, muqueuses, nez, joues, oreilles, mains et
pieds). Rarement, la cyanose peut être due à une concentration
sanguine élevée de méthémoglobine (congénitale ou acquise,
le plus souvent due à un traitement médicamenteux) ou de
sulfhémoglobine (généralement due à certains médicaments)
et ne disparaît généralement pas sous oxygénothérapie.
Cyanose centrale
Une cyanose centrale peut être observée sur les lèvres, la
langue, la muqueuse buccale ou sublinguale (fig. 3.18 ; voir
fig. 5.12) et peut accompagner toute pathologie (générale-
ment cardiaque ou respiratoire) responsable d'une hypoxé-
mie suffisamment sévère pour induire une augmentation de
la concentration sanguine de désoxyhémoglobine au-dessus
de 5 g/dl. L'observation d'une cyanose nécessitant une
augmentation de la concentration absolue de désoxyhémo-
globine, de fait elle peut être absente en cas d'anémie ou d'hy-
B povolémie malgré l'existence d'une hypoxémie. Inversement,
Fig. 3.17 Bouffée vasomotrice au cours d'un syndrome carcinoïde. une cyanose peut être manifeste dans des cas d'hypoxémie
A Bouffée carcinoïde aiguë. B Télangiectasie chronique. relativement faible chez les patients polyglobuliques.
8. Odeurs • 29
A
Cyanose périphérique
Une cyanose périphérique s'observe au niveau des extrémités
distales et peut survenir simplement chez des patients ayant
froid. Le ralentissement du flux sanguin capillaire périphérique
permet alors une augmentation de l'extraction de l'oxygène
sanguin se traduisant automatiquement par une élévation de
la désoxyhémoglobine. Une fois le patient réchauffé et la cir-
culation rétablie, la cyanose disparaît. Les causes de cyanoses
périphériques comprennent les insuffisances cardiaques à bas
débit, les artériopathies et les anomalies de la circulation vei-
neuse (stases ou obstructions).
7. Langue
En plus de révéler une cyanose centrale, l'examen peut
révéler une langue dépapillée en cas de carence martiale
(voir fig. 3.16), élargie en cas d'acromégalie ou amyotro-
phique avec des fasciculations en cas de sclérose latérale
amyotrophique.
8. Odeurs
Les odeurs peuvent vous donner des indices sur les habi-
tudes sociales et comportementales du patient. Une odeur
d'alcool, de tabac ou de cannabis peut être facilement iden-
tifiable. Une infection urinaire ou de la peau à des germes
anaérobies produit des odeurs spécifiques. L'halitose (mau-
vaise haleine) peut être due à une mauvaise hygiène dentaire,
une gingivite, une stomatite, une rhinite croûteuse atrophique,
une tumeur des voies aériennes supérieures ou une patholo-
gie pulmonaire purulente comme un abcès pulmonaire ou une
bronchiectasie.
Exemples d'autres odeurs caractéristiques : Fig. 3.20 Neurofibromatose.
• les cétones : odeur douce (dissolvant de vernis à ongles)
due à la production d'acétone durant l'acidocétose
diabétique ou le jeûne ; • odeur putride ou fétide liée à une suppuration chronique
• fœtor hepaticus : odeur de fruit moisi liée à l'amine de germes anaérobies dans des cas de bronchiectasie ou
volatile diméthylsulfide, chez les patients insuffisants d'abcès pulmonaire ;
hépatiques ; • éructations nauséabondes en cas d'obstruction digestive
• fœtor urémique : odeur de poisson ou d'ammoniac expirée haute ;
en cas d'hyperurémie ; • odeurs fécales en cas de fistule gastrocolique.
30 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'EXAMEN CLINIQUE
A C
B D
Fig. 3.21 Syndrome de Marfan, maladie à transmission autosomique dominante. A Grande taille avec un torse plus court que les jambes (noter
la cicatrice de chirurgie pour une dissection aortique). B Doigts longs. C Palais ogival. D Ectopie du cristallin. (A–D) Source : Forbes CD, Jackson WF.
Color Atlas of Clinical Medicine. 3rd edn. Edinburgh : Mosby ; 2003.
Causes lymphatiques
Habituellement, le liquide interstitiel retourne à la circulation
centrale par le système lymphatique. Toute obstruction du flux
lymphatique peut induire un œdème localisé (lymphœdème ;
fig. 3.23). Si l'atteinte persiste, une prolifération de tissu fibreux
dans l'espace interstitiel peut survenir ; la zone affectée devient
alors dure et ne prend plus le godet. Au Royaume-Uni, une des
causes les plus fréquentes de lymphœdème chronique des
membres inférieurs est le lymphœdème congénital primaire
(maladie de Milroy). Les atteintes du membre supérieur sur-
viennent généralement dans les suites d'un curage axillaire et/ou
d'une irradiation pour un cancer du sein. Le lymphœdème est Fig. 3.22 Gonflement de la jambe droite suggérant une thrombose
fréquent dans certains pays tropicaux du fait de l'obstruction veineuse profonde ou une inflammation. Une infection des parties molles
lymphatique liée aux filaires (éléphantiasis). et la rupture d'un kyste poplité font partie des causes à évoquer.
32 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'EXAMEN CLINIQUE
Causes inflammatoires
10. Masses et ganglions lymphatiques
Toute inflammation tissulaire, comme une infection ou une
blessure, libère des médiateurs (histamine, bradykinine et
Les patients se présentent souvent avec une masse ou une
cytokines), induisant une vasodilatation et une augmentation de
augmentation de la taille des ganglions lymphatiques (adé-
la perméabilité capillaire. Un œdème inflammatoire est accom-
nopathies) qui, bien que généralement bénignes, peuvent
pagné des éléments caractéristiques de l'inflammation (rou-
aussi annoncer un processus sous-jacent sévère d'origine
geur, sensibilité et chaleur) et est par conséquent douloureux.
infectieuse ou maligne. Parfois, vous découvrirez une masse
Causes allergiques lors de l'examen chez un patient qui ne connaissait pas son
Une réaction allergique aiguë s'accompagne d'une augmenta- existence.
tion de la perméabilité capillaire, par exemple lorsqu'un individu
est piqué par un insecte auquel il est allergique. La zone tou-
Nodules ou masses
chée est généralement rouge et prurigineuse (démangeaisons), Interrogez le patient sur la rapidité d'évolution de cette masse
du fait d'un relargage localisé d'histamine et d'autres média- et son association éventuelle avec une douleur, une sensibilité
teurs pro-inflammatoires, mais contrairement à l'inflammation, ou une modification de la coloration de la peau. Recherchez les
elle n'est pas douloureuse. éléments suivants (encadré 3.8).
L'angio-œdème est une forme sévère d'œdème allergique tou-
chant la face, les lèvres et la bouche, généralement liée à une Taille
piqûre d'insecte ou une allergie alimentaire ou médicamenteuse Mesurez la taille de tout nodule (idéalement avec un pied à
(fig. 3.24). Un gonflement peut s'aggraver rapidement et menacer coulisses).
le pronostic vital en cas d'atteinte des voies aériennes supérieures.
Position
L'origine d'un nodule est parfois évidente du fait de sa
position (sein, thyroïde, parotide, etc.), mais peut être plus
difficile à déterminer sur d'autres sites (comme l'abdomen).
Des nodules multiples peuvent survenir en cas de neurofibro-
matose (voir fig. 3.20), métastases cutanées, lipomatose ou
lymphome.
Fixation
Les nodules malins infiltrent généralement les tissus adjacents,
ce qui les rend immobiles et fixes à la palpation.
L'obstruction des canaux lymphatiques peut entraîner un
gonflement de la peau qui, en comblant les pores des follicules
pileux, pourra donner un aspect cutané en peau d'orange (voir
fig. 11.5). Cette atteinte est classique au cours des pathologies
tumorales qui, en atteignant les couches plus profondes (mus-
cle sous-jacent), vont aboutir à un tel aspect.
Consistance
La consistance d'une masse peut varier de molle à indurée
(consistance « pierreuse »). Les masses très dures sont géné-
Fig. 3.23 Lymphœdème du membre supérieur droit suite à une ralement d'origine maligne, ou calcifiées ou bien constituées
mastectomie droite et une radiothérapie. de tissu dense. Une fluctuation indique la présence de liquides
comme dans un abcès, un kyste, ou une cloque (fig. 3.25),
ou une tumeur molle encapsulée (lipome). Les bords peuvent
être bien délimitées ou mal définies, réguliers ou irréguliers,
Transillumination
Dans une pièce sombre, appliquez l'extrémité de votre lampe
de poche sur le côté de la tuméfaction. Un kyste, comme une
hydrocèle testiculaire, s'illuminera si le liquide est translucide, à
condition que le tissu de recouvrement ne soit pas trop épais 3
(voir fig. 15.9).
Étapes de l'examen
• Inspectez la masse et notez toute modification de la
couleur ou de la texture de la peau en regard.
Fig. 3.25 Cloque sur la jambe. • Définissez le site et la forme de la masse.
• Mesurez sa taille et notez les résultats de manière
tranchants ou arrondis. Les limites d'une organomégalie schématique.
(thyroïde, foie, rate ou rein) sont généralement mieux définies • Palpez doucement la lésion à la recherche d'une sensibilité
que celles d'une masse inflammatoire ou maligne. Des limites ou d'une modification de la température cutanée.
non identifiables suggèrent souvent un processus malin infil- • Touchez la masse quelques secondes pour rechercher une
trant ; a contrario des limites bien définies sont souvent en pulsatilité.
faveur d'un phénomène bénin. • Évaluez la consistance, la surface et les limites.
Surface et forme • Essayez d'attraper la peau sus-jacente afin de déterminer
si la masse est fixée à la peau.
La surface et la forme d'une tuméfaction peuvent être carac- • Essayez de mobiliser la masse dans différents plans
téristiques. Hépatomégalie, splénomégalie, globe vésical ou pour déterminer si elle est fixée aux structures plus
utérus gravide sont des exemples de masses abdominales profondes.
caractéristiques. La surface peut être douce ou irrégulière ; par • Comprimez la masse sur un côté et observez ou sentez
exemple, la surface du foie est souvent lisse en cas d'hépatite si un gonflement apparaît du côté opposé (fluctuation).
alors qu'elle sera souvent multinodulaire au cours d'une maladie Confirmez cette fluctuation sur deux plans. Elle indique
métastatique. généralement que la masse contient du liquide, même si
Pulsations, frémissements ( thrills) et souffles certains lipomes mous peuvent également donner cette
sensation.
Les dilatations artérielles (anévrismes) et les tumeurs très
• Auscultez à la recherche de souffles vasculaires.
vascularisées sont pulsatiles et grandissent au cours du
• Recherchez un caractère translucide.
temps du fait des pulsations artérielles répétées. D'autres
masses peuvent donner une sensation de pulsatilité si elles
recouvrent un vaisseau sanguin majeur. Une masse traversée
par un flux sanguin augmenté peut, à l'auscultation, laisser
entendre un souffle systolique. Parfois, si le flux sanguin est Ganglions lymphatiques
suffisant, un frémissement (thrill) sera palpé. Des souffles Des adénopathies palpables (ganglions lymphatiques péri-
seront également entendus en regard d'un anévrisme artériel phériques de volume augmenté) peuvent être isolées ou
ou de malformations artérioveineuses du fait des turbulences généralisées. Elles ont une valeur à la fois diagnostique
provoquées. et pronostique dans la stadification des maladies lympho-
prolifératives ou tumorales. Des ganglions peuvent aussi
Inflammation
être retrouvés chez des individus sains, en particulier au
Rougeur, douleur et chaleur évoquent une inflammation : niveau des aires axillaires, sous-mandibulaires et inguinales
• rougeur (érythème) : la peau en regard d'une lésion (fig. 3.26).
inflammatoire aiguë est habituellement rouge du fait de la Comme pour toute masse, notez leurs tailles, localisations
vasodilatation. En cas d'hématome, les pigments issus (un ganglion normal fait moins de 0,5 cm chez l'adulte) et
de l'extravasation sanguine peuvent produire la palette de évaluez leurs fixations aux tissus profonds (des adénopathies
couleurs d'une ecchymose ; fixées au plan profond suggèrent une origine maligne). Évaluez
• douleur : des nodules inflammatoires, comme un furoncle la consistance : un ganglion normal est mou à la palpation.
ou un abcès, sont généralement sensibles ou douloureux, Les ganglions sont classiquement « élastiques » au cours de
alors qu'un nodule non inflammatoire comme un lipome, la maladie de Hodgkin, « fluctuants » en cas de tuberculose et
une métastase cutanée ou un neurofibrome sont indurés en cas de cancer métastatique. Des infections virales
typiquement non douloureux ; ou bactériennes aiguës (comme une mononucléose infec-
• chaleur : des nodules inflammatoires et certaines tumeurs, tieuse, une angine ou une infection dentaire) sont responsables
en particulier en cas de croissance rapide, peuvent être d'une douleur et d'une augmentation de volume variable des
chauds du fait de l'augmentation du débit sanguin. ganglions.
34 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'EXAMEN CLINIQUE
Pré-auriculaire (prétragien)
Rétro-auriculaire (mastoïdien)
Occipital
Amygdalien Axillaire
Cervical supérieur
(jugulocarotidien haut)
Cervical postérieur
(jugulocarotidien bas)
Chaînes cervicales profondes
(en profondeur le long du Épitrochléen
muscle sternocléidomastoïdien)
Sus-claviculaire
Sous-maxillaire
Sous-mentonnier
(sous-mental)
Poplité
Chaîne horizontale
Chaîne verticale
A B C
Fig. 3.27 Palpation des ganglions cervicaux. A Examinez les ganglions du triangle antérieur en vous plaçant derrière et en utilisant vos deux mains.
B Recherchez les ganglions scalènes par derrière en plaçant votre index entre le muscle sternocléidomastoïdien et la clavicule. C Examinez les ganglions
du triangle postérieur en vous plaçant devant.
A B C
Fig. 3.28 Palpation des aires axillaires, épitrochléennes et inguinales. A Examen de l'aire axillaire droite. B Examen des ganglions épitrochléens
gauches. C Examen de l'aire inguinale gauche.
A C
D
Fig. 3.30 Éléments faciaux caractéristiques dans certaines pathologies. A Sclère bleue de l'ostéogenèse imparfaite. B Télangiectasies péribuccales
typiques de la maladie de Rendu-Osler. C Sclérodermie systémique avec un nez aminci et une peau tendue autour de la bouche. D Dystrophie myotonique
de Steinert avec calvitie frontale et ptosis bilatéral.
11. Diagnostics au premier coup d'œil • 37
Trisomie 21 (syndrome de Down – 47XX/XY + 21) talmiques, oculaires, endocrines et hématologiques nécessitant
d'être dépistées.
La trisomie 21 possède certaines caractéristiques physiques
typiques incluant une petite taille, une petite tête avec un Syndrome de Turner (45XO)
occiput plat, des fentes palpébrales obliques en haut et en
dehors, des plis épicanthiques, un petit nez avec une racine Le syndrome de Turner (fig. 3.32) est dû à la perte d'un chromo- 3
peu développée et de petites oreilles basses (fig. 3.31A). L'iris some sexuel. Il survient à raison d'un cas sur 2 500 naissances
présente des zones de dépigmentation blanches et grises de filles vivantes et est responsable d'un retard de puberté. Les
(taches de Brushfield ; fig. 3.31B). Les mains sont larges avec caractéristiques typiques sont une petite taille, un cou d'aspect
un sillon palmaire unique (fig. 3.31C), les doigts sont courts et palmé, un petit menton, des oreilles basses, une ligne de che-
le cinquième doigt courbé. La trisomie 21 est aussi associée à veux basse, un quatrième doigt court, un angle huméro-ulnaire
des atteintes cognitives, cardiaques, gastro-intestinales, oph- augmenté au coude et des mamelons largement espacés (tho-
rax « en bouclier »).
A B C
Fig. 3.31 Trisomie 21. A Aspect typique du visage. B Taches de Brushfield : zones de dépigmentation blanches et grises de l'iris. C Sillon palmaire
unique.
Fig. 3.32 Syndrome de Turner. Source : Henry M. Seidel, Jane Ball, Fig. 3.33 Enfant atteint d'achondroplasie. Source : Keith L. Moore,
Joyce Dain, G. William Benedict. Growth and measurement. In : Mosby's T. V. N. Persaud. Congenital Anatomic Anomalies or Human Birth Defects.
Guide to Physical Examination, 6th ed ; 2006. In : The Developing Human : Clinically Oriented Embryology, 8th ed ; 2008.
38 • ASPECTS GÉNÉRAUX DE L'EXAMEN CLINIQUE
Système cardiovasculaire
4
Le cœur 2 Système veineux périphérique 73
1. Anatomie et physiologie 42 1. Anatomie et physiologie 73
2. Anamnèse 42 2. Anamnèse 74
A. Symptômes fréquents 42 A. Symptômes fréquents 74
B. Antécédents 47 B. Antécédents 76
C. Traitements habituels 48 3. Examen physique 76
D. Antécédents familiaux 48
4. Explorations complémentaires 76
E. Mode de vie 48
5. ECOS exemple 1 : une douleur thoracique 77
3. Examen physique 48
A. Examen général 48 6. ECOS exemple 2 : examen cardiaque 77
B. Pulsations artérielles 49 7. Séquence d'examen intégré du système cardiovasculaire 78
C. Pression artérielle 53
D. Pression veineuse jugulaire et pulsations jugulaires 54
E. Précordium 56
4. Interprétation des résultats 64
5. Explorations complémentaires 64
A. Bilans biologiques 64
Système artériel périphérique 67
1. Anatomie et physiologie 67
2. Anamnèse 67
A. Symptômes fréquents 67
B. Antécédents 71
C. Traitements habituels 71
D. Antécédents familiaux 71
E. Mode de vie 71
3. Examen physique 71
4. Explorations complémentaires 73
LE CŒUR
1. Anatomie et physiologie séparent les oreillettes des ventricules. La valve pulmonaire pour
le cœur droit et la valve aortique pour le cœur gauche séparent
respectivement les ventricules des systèmes artériels pulmo
Le cœur est constitué de deux pompes musculaires travaillant
naires et systémiques. La contraction cardiaque est coordonnée
de façon coordonnées, recouvertes d'une couche séreuse (péri
par un groupe de cellules spécialisées. Les cellules du nœud
carde) lui donnant une liberté de mouvement à chaque batte
sinoatrial (ou nœud sinusal) agissent normalement comme un sti
ment cardiaque ou cycle respiratoire (fig. 4.1). Le cœur droit
mulateur cardiaque. La propagation des impulsions électriques
(oreillette [atrium] et ventricule droits) pompe le sang désoxygéné
dans le cœur garantit que la contraction atriale soit complète
arrivant des veines systémiques vers la circulation pulmonaire à
avant que la contraction ventriculaire (systole) ne commence. À
une pression relativement basse. Le cœur gauche (oreillette et
la fin de la systole, les ventricules se relâchent et les valves auri
ventricule gauches) reçoit le sang des poumons et le renvoi vers
culoventriculaires s'ouvrent, permettant leur remplissage par le
les tissus périphériques à une pression élevée (fig. 4.2). Les val
sang provenant des oreillettes (diastole).
ves auriculoventriculaires (tricuspide à droite, mitrale à gauche)
2. Anamnèse
Veine cave supérieure
Oreillette A. Symptômes fréquents
gauche
Aorte ascendante
Veines Les pathologies cardiovasculaires ont des présentations
Tronc pulmonaire pulmonaires cliniques variées ; les causes extracardiaques doivent égale
gauches ment être prises en considération (encadré 4.1).
Oreillette droite
Valve
Valve aortique
pulmonaire Douleur thoracique
Valve mitrale
Cordages Douleur thoracique intermittente
Valve tricuspide tendineux La douleur thoracique due à une ischémie myocardique inter
Ventricule droit Ventricule mittente (angor ou angine de poitrine) est typiquement une
gauche douleur sourde, souvent décrite comme une sensation de ser
Muscle papillaire
rement ou d'oppression en bande semblable à un poids sur
Veine cave inférieure la poitrine. Elle tend à s'étendre de manière diffuse sur la face
Fig. 4.1 Les cavités et valves cardiaques. antérieure du thorax et peut irradier vers le bas d'un ou des
Dyspnée (essoufflement) Une orthopnée, qui est une dyspnée liée au décubitus,
L'insuffisance cardiaque est la cause la plus fréquente de peut survenir au cours de l'insuffisance cardiaque dans le cas
dyspnée aiguë ou chronique d'origine cardiovasculaire d'une maladie avancée ou d'une décompensation aiguë. Le
(encadré 4.4). Les autres causes cardiovasculaires de dyspnée décubitus dorsal induit une augmentation du retour veineux
aiguë incluent l'embolie pulmonaire et les arythmies car pouvant favoriser l'œdème pulmonaire chez les patients pré
diaques. Les patients souffrant d'insuffisance cardiaque aiguë sentant une insuffisance ventriculaire gauche. La sévérité de
et d'œdème pulmonaire (accumulation de liquide dans les l'atteinte peut être évaluée par le nombre d'oreillers utilisés la
alvéoles) préfèrent généralement se tenir en position verticale nuit. Une dyspnée paroxystique nocturne est liée au même
(orthopnée), alors que ceux souffrant d'embolie pulmonaire phénomène se manifestant par un essoufflement brutal réveil
massive seront plus à l'aise en position allongée et perdent lant le patient endormi (fig. 4.3). Les patients peuvent avoir la
parfois connaissance (syncope) au passage en position assise. sensation d'étouffer ou de chercher de l'air, assis sur le bord
La dyspnée d'effort est le symptôme caractéristique de du lit, fenêtre ouverte dans l'attente d'une amélioration des
l'insuffisance cardiaque chronique. L'échelle d'évaluation de symptômes. L'orthopnée peut être confondue avec l'asthme,
la New York Heart Association (NYHA) permet de quantifier la qui peut également induire une dyspnée, une oppression tho
sévérité de la gêne causée par la dyspnée d'effort associée à racique, une toux et une respiration sifflante la nuit ; cependant,
l'insuffisance cardiaque (encadré 4.5). Une dyspnée liée à un les patients présentant une insuffisance cardiaque pourront
infarctus du myocarde peut s'observer au cours d'une « isché également présenter des expectorations mousseuses ou légè
mie silencieuse ». Elle peut s'associer ou non à une gêne thora rement hémoptoïques.
cique, en particulier chez les personnes âgées ou diabétiques. En cas de dyspnée aiguë, interrogez le patient sur :
Les facteurs déclenchants sont identiques à ceux observés au • la durée d'évolution ;
cours de l'angor de poitrine et elle peut être soulagée par la • des antécédents de dyspnée d'effort et la tolérance
prise de dérivés nitrés. habituelle à l'effort ;
2. Anamnèse • 45
Dyspnée
Mécanisme Caractéristiques Toux
Expectorations
Liquide redistribué dans Réabsorption du mousseuses
les poumons liquide des tissus Pâleur
vers la circulation Sueurs
Tachycardie
Crépitants
4
• les symptômes associés : douleur thoracique, syncope, • la chronologie des symptômes : la vitesse d'apparition ou
palpitations ou symptômes respiratoires (tels qu'une toux, de disparition ; la fréquence et la durée des épisodes ;
des crachats, une respiration sifflante ou des hémoptysies ; • les facteurs déclenchants ou améliorants ;
voir chap. 5, « Hémoptysie »). • les symptômes associés : lipothymie, syncope ou douleur
En cas de dyspnée chronique, interrogez le patient sur : thoracique ;
• les antécédents cardiaques.
• le lien entre les symptômes et l'effort ;
• le degré de limitation lié aux symptômes et le Toute personne en bonne santé est parfois consciente que
retentissement sur les activités de la vie quotidienne ; son cœur bat à un rythme sinusal normal, en particulier après
• le caractère positionnel des symptômes et/ou l'existence l'exercice ou dans des situations de stress comme avant un
d'épisodes de dyspnée paroxystique nocturne ; entretien d'embauche ou un examen. La sensation est plus
• les symptômes associés – œdème des membres inférieurs, fréquemment ressentie la nuit au lit et les personnes minces
toux, respiration sifflante ou expectorations. peuvent parfois la constater quand elles sont allongées sur le
côté gauche.
Palpitations Des battements isolés (extrasystoles) sont une cause
bénigne de palpitations au repos et disparaissent à l'exercice.
Les palpitations sont une perception inattendue ou désagréable Ce battement cardiaque prématuré produit un petit volume
des battements cardiaques dans la poitrine. Le recueil d'une systolique et une pulsation impalpable du fait du remplissage
histoire précise des symptômes peut aider à distinguer les diffé incomplet du ventricule gauche. A contrario, la pause com
rents types de palpitations (encadré 4.6). pensatoire qui va suivre induit un remplissage excessif du
Interrogez le patient sur : ventricule et une contraction énergique au battement suivant.
• les caractéristiques des palpitations. Les battements sont- En conséquence, les patients décrivent souvent un « batte
ils rapides, forts, irréguliers ? Le patient peut-il vous décrire ment manqué » parfois suivi d'un battement particulièrement
leurs rythmes ? intense (« choc » ou « coup »).
46 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
A B C
Fig. 4.4 Causes cardiaques d'emboles systémiques : images d'échocardiographie. A Volumineux thrombus apical dans le ventricule gauche (flèche).
B Myxome de l'oreillette fixé au septum interauriculaire (flèche). C Végétation sur la valve mitrale (flèche). L'ensemble de ces atteintes étant situées dans
le cœur gauche, les emboles susceptibles de se détacher migreraient vers la circulation générale (ou coronarienne) ; inversement, des emboles cardiaques
venant du cœur droit migreraient vers la circulation pulmonaire.
Interrogez-le également sur : cyanose, trouble de la vigilance, etc.), adoptez initialement une
• les pathologies associées à une augmentation du risque approche du type ABCDE (voir chap. 18, « Approche ABCDE »)
cardiovasculaire comme une hypertension artérielle, un et reportez votre examen clinique détaillé au moment où la
diabète ou une dyslipidémie ; situation sera stabilisée. Chez un patient stable, réalisez un exa
• un rhumatisme articulaire aigu ou un souffle cardiaque men clinique détaillé et complet.
durant l'enfance ;
• une cause potentielle de bactériémie chez les patients A. Examen général
suspects d'endocardite infectieuse comme une infection
cutanée, un geste dentaire récent, une consommation Observez l'aspect général du patient. A-t-il l'air souffrant,
de drogues intraveineuses ou un traumatisme avec plaie apeuré ou en défaillance ? Existe-il des signes de dyspnée ou
pénétrante ; de cyanose ? Est-il en surpoids ou cachectique ? Existe-il des
• des maladies systémiques responsables de manifestations signes d'atteintes associées aux maladies cardiovasculaires
cardiovasculaires comme les connectivites (péricardites et comme le syndrome de Marfan, la trisomie 21, le syndrome de
syndrome de Raynaud), le syndrome de Marfan (dissection Turner, ou la spondylarthrite ankylosante ?
aortique), la dystrophie myotonique de Steinert (bloc Terminez par un examen détaillé de la peau à la recherche
auriculoventriculaire). de pétéchies, vérifiez la température et procédez à une analyse
d'urine. La fièvre est un signe d'endocardite infectieuse, de péri
C. Traitements habituels cardite et peut survenir au cours d'un infarctus du myocarde.
Un examen des urines est nécessaire afin de rechercher une
Les traitements peuvent causer ou aggraver des symptômes tels hématurie (endocardite, vascularite), une glycosurie (diabète) et
que la dyspnée, la douleur thoracique, les œdèmes, les palpitations une protéinurie (hypertension artérielle et néphropathies).
ou syncopes (voir encadré 4.7). Recherchez également la prise de
médicaments en vente libre comme les anti-inflammatoires non sté Mains
roïdiens (AINS), les médicaments à base de plantes et médecines
alternatives qui peuvent aussi avoir des effets cardiovasculaires. Étapes de l'examen
• Sentez la température des mains et mesurez le temps de
D. Antécédents familiaux recoloration cutanée.
• Examinez les mains à la recherche de traces de tabac (voir
De nombreuses pathologies cardiaques comme les cardiomyopa
fig. 5.8), d'une pâleur des plis cutanés (anémie) ou d'une
thies ont une composante génétique. Recherchez des antécédents
cyanose périphérique.
d'événements cardiovasculaires coronariens prématurés chez les
• Recherchez un hippocratisme digital (voir chap. 3) et des
parents au premier degré (< 60 ans chez les femmes et < 55 ans
hémorragies filiformes sous-unguéales : traces rouge brun
chez les hommes) ; une mort subite inexpliquée à un âge jeune
linéaires suivant l'axe de croissance des ongles (fig. 4.5B).
doit faire évoquer la possibilité d'une cardiomyopathie ou d'un
• Examinez la face d'extension des mains à la recherche de
trouble arythmique d'origine génétique. Les patients présentant
xanthomes tendineux : lésions cutanées jaunâtres, dures
une thrombose veineuse profonde peuvent avoir une thrombophilie
des tendons extenseurs des mains liés à des dépôts
familiale telle qu'une mutation du facteur V. L'hypercholestérolémie
lipidiques (fig. 4.6B).
familiale est associée à une maladie athéromateuse prématurée.
• Examinez la face palmaire des mains à la recherche de :
• lésions de Janeway : lésions maculaires érythémateuses
E. Mode de vie non douloureuses des éminences thénars/hypothénars
(fig. 4.5A) ;
Le tabac est le principal facteur de risque de coronaropathie ou • nodules d'Osler : nodules érythémateux douloureux,
d'artériopathie périphérique. Notez précisément les antécédents classiquement situés au niveau de la pulpe des doigts
de tabagisme (voir chap. 2). L'alcool peut induire une fibrillation (fig. 4.5C).
atriale et, en cas de consommation excessive, est associé à l'obé
sité, l'hypertension artérielle et la cardiomyopathie dilatée. Les dro Les mains sont habituellement sèches et chaudes à température
gues récréatives comme la cocaïne et les amphétamines peuvent ambiante. Le temps de recoloration cutanée est normalement infé
provoquer des arythmies, une douleur thoracique, des occlusions rieur ou égal à 2 secondes. Des extrémités froides ou un temps de
et des anévrismes artériels périphériques et parfois même des recoloration cutanée allongé sont le signe d'une mauvaise perfu
infarctus du myocarde. Les maladies cardiaques peuvent avoir sion périphérique pouvant survenir en cas de choc ou d'états chro
un retentissement important sur l'activité professionnelle. Les niques associés à un bas débit cardiaque (rétrécissement aortique
patients limités par des symptômes à l'effort peuvent être en dif serré, rétrécissement mitral, hypertension artérielle pulmonaire).
ficulté dans des emplois physiques. Enfin, certaines pathologies Une ou deux hémorragies filiformes sous-unguéales isolées
comme les cardiopathies ischémiques ou les arythmies cardiaques sont fréquentes chez des individus sains du fait de petits trau
peuvent contre-indiquer certaines activités mettant en jeu la sécu matismes, en particulier chez les travailleurs manuels. Elles sont
rité publique comme les conducteurs de véhicules ou les pilotes. retrouvées (fig. 4.5B) en cas d'endocardite infectieuse ou dans
certaines vascularites. Une éruption pétéchiale (liée aux vascu
larites) se situe généralement sur les jambes et les conjonctives
3. Examen physique (fig. 4.5E) ; elle est éphémère au cours d'une endocardite et
peut être confondue avec l'éruption d'une méningococcémie.
Adaptez la séquence et l'étendue de l'examen à l'état du Les lésions de Janeway et les nodules d'Osler (fig. 4.5A, C)
patient. Si vous suspectez que le patient est instable, en voie sont des signes d'endocardite, mais sont rarement observés
de détérioration ou dans un état critique (dyspnée, défaillance, de nos jours.
3. Examen physique • 49
B
4
D A
C E
Fig. 4.5 Signes périphériques pouvant être présents au cours
d'une endocardite infectieuse. A Lésions de Janeway au niveau
de l'éminence hypothénar (flèches). B Hémorragies filiformes sous-
unguéales. C Nodules d'Osler. D Taches de Roth au fond d'œil. E
Hémorragies pétéchiales conjonctivales. (B et E) Source : Walker BR,
Colledge NR, Ralston SR, Penman ID, eds. Davidson's Principles and B
Practice of Medicine. 22nd edn. Edinburgh : Churchill Livingstone ;
2014. (D) Source : Forbes CD, Jackson WF. Color Atlas of Clinical
Medicine. 3rd edn. Edinburgh : Mosby ; 2003.
Face
C
Au moment de prendre le pouls, évaluez : plus fréquentes de bradycardie sont les traitements, le condi
• la fréquence : nombre de pulsations par minute ; tionnement sportif et les dysfonctions sino-atriales ou auriculo
• le rythme : régularité ou non, séquence des pulsations ; ventriculaires. La cause la plus fréquente de tachycardie est la
• l'intensité : degré de perception des pulsations ; tachycardie sinusale (encadré 4.9).
• ses caractéristiques : une impression de l'onde ou de la Le pouls peut être régulier ou irrégulier (encadré 4.9). Un
forme du pouls. rythme sinusal est régulier (fig. 4.8A), mais la fréquence car
diaque peut varier avec le cycle respiratoire, particulièrement
La fréquence et le rythme sont habituellement mesurés au niveau
chez les enfants, les adultes jeunes et les sportifs (arythmie
de l'artère radiale ; utilisez les pouls plus gros (huméral, carotidien
sinusale). Durant l'inspiration, la stimulation parasympathique
ou fémoral) pour évaluer son intensité et ses caractéristiques.
diminue et la fréquence cardiaque augmente ; en expira
tion, la fréquence cardiaque diminue (encadré 4.10). En cas
Étapes de l'examen d'extrasystoles intermittentes (fig. 4.8B) ou de blocs auri
culoventriculaires du second degré, on peut constater une
Pouls radial régularité du pouls sous-jacent interrompue par des périodes
• Placez la pulpe de l'index et du majeur au niveau du
d'irrégularités (ce qui est parfois décrit comme une « régu
poignet droit, à côté du tendon fléchisseur radial du carpe
larité irrégulière »). Dans le cas de la fibrillation auriculaire, le
(fig. 4.7A).
pouls a un rythme irrégulier anarchique et est souvent décrit
• Évaluez le rythme des pulsations et comptez-les durant
comme « irrégulièrement irrégulier » (fig. 4.8C et encadré 4.11).
15 secondes ; multipliez le chiffre obtenu par quatre pour
La fréquence dépend du nombre de stimulations qui seront
obtenir les battements par minute (bpm).
transmises au ventricule par le nœud auriculoventriculaire.
• Recherchez un pouls de Corrigan : commencez par vérifier
Sans traitement, la fréquence des pulsations peut être très
que le patient n'ait aucune douleur des épaules ou du bras ou
rapide (supérieure à 200 bpm). La variabilité de la fréquence
de limitation de mouvement ; prenez le pouls du patient, puis
cardiaque, donc du remplissage ventriculaire, explique la
levez son bras verticalement au-dessus de sa tête (fig. 4.7B).
• Palpez les deux pouls radiaux simultanément et
recherchez un décalage entre les deux. Encadré 4.9 Causes de troubles du rythme
Pouls huméral ou de la fréquence cardiaque
• Placez la pulpe de l'index et du majeur au niveau de la fosse Anomalie Rythme sinusal Arythmie
antécubitale juste en dedans du tendon du biceps (fig. 4.7C).
Rythme rapide Exercice Fibrillation auriculaire
Évaluez l'intensité et les caractéristiques des pulsations. (tachycardie Douleur Flutter atrial
Pouls carotidien > 100 bpm) Excitation/anxiété Tachycardie
• Expliquez au patient ce que vous allez faire. Fièvre supraventriculaire
Hyperthyroïdie Tachycardie ventriculaire
• Installez le patient en position demi-allongée ; placez le
Traitements :
bout de vos doigts entre le larynx et le bord antérieur du
– bêta2-mimétiques
muscle sternocléidomastoïdien (fig. 4.7D). comme le
• Palpez le pouls doucement afin d'éviter un réflexe salbutamol
vagal et ne prenez jamais les deux pouls carotidiens – vasodilatateurs
simultanément. Rythme lent Sommeil Hypersensibilité sinusale
• Auscultez à la recherche de souffles anormaux à l'aide du (bradycardie Patient sportif carotidienne
diaphragme de votre stéthoscope en inspiration profonde. < 60 bpm) Hypothyroïdie Maladie sinusale
Traitements : Bloc auriculoventriculaire
Fréquence et rythme – bêta-bloquants du second degré
– digoxine Bloc auriculoventriculaire
Le pouls au repos bat normalement entre 50 et 95 bpm, mais – vérapamil, diltiazem complet
doit être analysé au regard du contexte clinique. Un pouls à Pouls irrégulier Arythmie sinusale Fibrillation auriculaire
40 bpm peut être normal chez un adulte jeune en bonne santé Extrasystoles Flutter atrial avec réponse
alors qu'un rythme à 65 bpm peut être anormalement bas en auriculaires variable
cas d'insuffisance cardiaque aiguë. La bradycardie est définie Extrasystoles Bloc auriculoventriculaire
comme une fréquence inférieure à 60 bpm ; la tachycardie est ventriculaires du second degré avec
une fréquence cardiaque supérieure à 100 bpm. Les causes les réponse variable
A B C D
Fig. 4.7 Pouls radial, huméral et carotidien. A Localisation et palpation du pouls radial. B Palpation d'un pouls radial filant. C Évaluation du pouls
huméral. D Localisation du pouls carotidien droit avec les doigts.
3. Examen physique • 51
Rythme sinusal
Encadré 4.10 Effets hémodynamiques de la respiration
Inspiration Expiration
Pouls/fréquence cardiaque Accélérés Ralentis
Pression artérielle systolique Diminuée (de plus Augmentée
C
Encadré 4.12 Causes d'augmentation
de l'intensité du pouls Flutter auriculaire
Physiologique
• Exercice • Augmentation de la
• Grossesse température
• Âge avancé
Pathologique D
• Hypertension artérielle • Régurgitation aortique Tachycardie ventriculaire
• Fièvre • Maladie de Paget
• Hyperthyroïdie • Shunt auriculoventriculaire
• Anémie périphérique
Le pouls paradoxal est une exagération de la variabilité normale intrapéricardique élevée. Cela peut survenir en cas d'épanchement
de la pulsatilité avec la respiration. L'intensité du pouls augmente péricardique important (tamponnade cardiaque ; fig. 4.11), mais
normalement en expiration et diminue en inspiration du fait des également, à un moindre degré, en cas de péricardite constrictive
changements de pression intrathoracique qui affectent le retour
veineux vers le cœur. Cette variabilité est exagérée lorsque le 200
remplissage ventriculaire diastolique est affecté par une pression
Insuffisance aortique
Pouls carotidien normal
Rétrécissement aortique
150
mmHg
100
50
0
Fig. 4.9 Coarctation de l'aorte. Image en IRM typique d'une coarctation
0 100 200 300 400
aortique située juste après l'origine de l'artère sous-clavière gauche (flèche).
Cela explique le synchronisme entre les deux pouls radiaux et le retard Millisecondes
radiofémoral. Fig. 4.10 Types de pulsations.
Agitation, sueurs
Augmentation de la PVJ
Extrémités froides,
temps de recoloration
cutanée allongé
B C
Fig. 4.11 Signes cliniques et échographiques d'une tamponnade cardiaque. A et B Images échocardiographiques prises en position sous-costale
en début de systole (A) et en début de diastole (B). Le ventricule droit (flèche) est collabé en phase précoce de diastole en raison de la pression péricardique
élevée ; il s'agit d'une constatation échographique importante en cas de tamponnade. Sur les deux images, il existe un volumineux épanchement péricardique
adjacent au ventricule droit. C Caractéristiques cliniques. PVJ : pression veineuse jugulaire.
3. Examen physique • 53
ou d'asthme aigu sévère. En cas de suspicion, un pouls paradoxal cardiovasculaire (insuffisance cardiaque, coronaropathies,
peut être confirmé en utilisant un tensiomètre (voir plus loin et maladies cérébrovasculaires et néphropathies chroniques).
fig. 4.12) ; un écart de plus de 10 mmHg entre la pression artérielle Elle est presque toujours asymptomatique, même si, rarement,
au brassard pour laquelle les bruits de Korotkoff sont audibles uni en cas d'hypertension artérielle sévère, des céphalées ou des
quement en expiration et la pression pour laquelle les bruits sont troubles visuels peuvent survenir. Chez la plupart des patients
audibles à tout moment du cycle respiratoire signe le diagnostic. hypertendus, il n'est pas retrouvé de cause identifiable – elle est
C. Pression artérielle
alors appelée hypertension artérielle essentielle. Les hyperten
sions secondaires sont rares et surviennent chez moins de 1 %
4
de la population hypertendue (encadré 4.14).
La pression artérielle (PA) est une mesure de la pression exercée par Chez le patient hypertendu, évaluez :
le sang circulant sur les parois artérielles. La pression systolique est • les causes potentielles sous-jacentes ;
la pression maximale produite au cours de la contraction ventriculaire • les lésions d'organes terminaux :
(systole). Durant le remplissage ventriculaire (diastole), la pression • cardiaque : insuffisance cardiaque ;
artérielle est maintenue à un niveau plus faible grâce à l'élasticité et à • rénal : néphropathie chronique, protéinurie ;
la compliance des parois vasculaires. La valeur la plus basse (pres • œil : rétinopathie hypertensive (voir fig. 8.18).
sion diastolique) est mesurée juste avant le cycle suivant.
La PA est généralement mesurée à l'aide d'un sphygmomano Bruits de Korotkoff
mètre (fig. 4.12). Dans certaines situations, telles que dans les unités
de soins intensifs, elle est mesurée de manière invasive à l'aide d'un Ces bruits sont produits lorsque la pression du brassard se
cathéter intra-artériel à demeure relié à un capteur de pression. situe entre la systolique et la diastolique du fait du collapsus de
La PA est mesurée en mmHg et enregistrée en tant que pres l'artère qui s'ouvre à nouveau à chaque battement cardiaque,
sion systolique/pression diastolique, avec une note indiquant le produisant un son de claquement (fig. 4.13). Le premier bruit
mode et la localisation de la mesure ; par exemple, PA : 146/92, détecté (phase 1) au dégonflement du brassard indique la
bras droit, position couchée. systole. Lorsque la pression diminue progressivement, les sons
La PA fournit des informations vitales sur l'état hémodynamique deviennent assourdis (phase 4), puis disparaissent (phase 5).
des patients présentant des pathologies ou blessures sévères. À
long terme, elle constitue également un signe important de risque
cardiovasculaire. La PA varie constamment et augmente avec le Encadré 4.13 Normes de la pression artérielle (PA)
stress, l'excitation et l'environnement. L'effet « blouse blanche »
selon la British Hypertension Society
est en lien avec une augmentation transitoire de la PA causée PA systolique PA diastolique
par le stress d'être pris en charge dans une structure de santé. PA (mmHg) (mmHg)
La mesure ambulatoire de la PA, en utilisant un appareil portatif Optimale < 120 < 80
prenant la PA à intervalles réguliers au cours de la journée et de la
Normale < 130 < 85
nuit, est plus efficace pour déterminer le risque cardiovasculaire.
Normale haute 130-139 85-89
Hypertension Hypertension artérielle
Bien que tout seuil permettant de distinguer une PA normale Stade 1 (faible) 140–159 90–99
d'une PA élevée soit quelque peu arbitraire, l'hypertension Stade 2 (modérée) 160–179 100–109
artérielle est généralement définie comme une pression systo Stade 3 (sévère) > 180 > 110
lique ≥ 140 mmHg et/ou une pression diastolique ≥ 90 mmHg
Hypertension systolique isolée
(encadré 4.13). L'hypertension artérielle est associée à une aug
mentation significative de la morbidité et de la mortalité d
'origine Stade 1 140–159 < 90
Stade 2 > 160 < 90
Reproduit avec l'aimable autorisation de la British and Irish Hypertension Society.
Pression
veineuse
jugulaire
A B C
Fig. 4.14 Pression veineuse jugulaire chez le sujet sain. A En position allongée : veines jugulaires dilatées, pulsations non visibles. B Incliné à
45 degrés : point de transition entre la veine dilatée et collabée que l'on peut habituellement voir battre juste au-dessus de la clavicule. C Position verticale :
la veine paraît collabée et le point de transition n'est pas visible.
1.
L'analyse de la PVJ correspond en pratique en France à la recherche d'une
turgescence jugulaire. (NdT)
2.
Le test d'occlusion jugulaire reste peu décrit et pratiqué en France. (NdT)
56 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
la PVJ n'est pas le reflet de la pression dans l'oreillette droite et la Des ondes « a » proéminentes sont causées par un remplissage
recherche d'un reflux hépatojugulaire sera négative. ventriculaire droit retardé ou restreint, comme dans une hyperten
Le signe de Kussmaul est une élévation paradoxale de la sion artérielle pulmonaire ou un rétrécissement tricuspide.
PVJ en inspiration observée en cas de péricardite constrictive, Des ondes « a » géantes (ondes canons) apparaissent en cas
d'insuffisance cardiaque droite sévère et de cardiomyopathie de contraction de l'oreillette droite contre une valve tricuspide
restrictive. fermée. Des ondes canons irrégulières sont observées en cas
de bloc complet de conduction avec une dissociation auriculo
ventriculaire complète. Des ondes canons régulières sont
Clavicule Veine Muscle
jugulaire interne sternocléidomastoïdien observées en cas de tachycardie jonctionnelle et dans certaines
tachycardies ventriculaires ou supraventriculaires.
Une insuffisance tricuspide induit une onde « v
» systo
lique proéminente pouvant fusionner avec c » produisant une
onde « cv » ; il peut s'y associer un gros foie pulsatile.
E. Précordium
Le précordium est la surface antérieure de la poitrine recouvrant
le cœur et les gros vaisseaux (fig. 4.16).
Apprenez l'anatomie de surface et les bases physiologiques
du cœur afin de comprendre l'origine et la séquence des bruits
et souffles cardiaques et les raisons pour lesquelles ceux-ci sont
mieux entendus en différents endroits et irradient dans des direc
A tions particulières (fig. 4.16 et 4.17). Les principaux sites ausculta
toires (aortique, pulmonaire, mitral et tricuspide) ne correspondent
pas à la localisation de la structure cardiaque d'intérêt, mais au site
où les bruits et souffles sont les mieux entendus (encadré 4.17). Il
Muscle sternocléidomastoïdien
est important de noter que les bruits cardiaques et certains souf
Haut de la pulsation veineuse jugulaire fles peuvent être entendus de façon diffuse au niveau du précor
dium ; cependant, ces sites correspondent aux localisations où le
souffle sera le plus fort ou le plus facile à entendre.
Angle sternal
B
Patient allongé à 45 degrés
C1
C2
Ventriculaire
Systole Diastole C3
3
a 1 2
a C4 6
c
c 4 5 8
v v C5 7
Pulsation
jugulaire C6
y y
x C7
C8
C9
C Temps
Fig. 4.15 Pression veineuse jugulaire. A Inspection de la pression = Valve aortique = Valve mitrale
veineuse jugulaire en vous plaçant du côté droit (la veine jugulaire interne = Valve pulmonaire = Valve tricuspide
descend en profondeur le long du muscle sternocléidomastoïdien).
B Mesure de la hauteur de la pression veineuse jugulaire. C Formes 1 Oreillette droite 5 Ventricule droit
des ondes veineuses pulsatiles descendant dans la veine jugulaire interne. 2 Appendice de l'oreillette droite 6 Ventricule gauche
a : systole auriculaire ; c : fermeture de la valve tricuspide ; v : pic de 3 Appendice de l'oreillette gauche 7 Apex cardiaque
pression dans l'oreillette droite juste avant l'ouverture de la valve tricuspide ; 4 Sillon auriculoventriculaire 8 Sillon interventriculaire antérieur
a–x : descente, due au déplacement vers le bas de l'anneau tricuspide
durant la systole ; v–y : descente au début du remplissage ventriculaire. Fig. 4.16 Anatomie de surface des cavités et valves cardiaques.
3. Examen physique • 57
Palpation
Le choc de pointe peut être observé à l'inspection, mais est
défini comme le point le plus latéral et inférieur auquel la pulsation
LMC cardiaque peut être ressentie. La pulsation cardiaque résulte du
déplacement du ventricule gauche vers l'avant qui vient frapper la
paroi thoracique durant la systole. Le choc de pointe est normale
ment situé au niveau du cinquième espace intercostal gauche au
4
A P niveau, ou en médialité, de la ligne médioclaviculaire (mi-distance
entre la fourchette sternale et l'articulation acromioclaviculaire),
mais peut être déplacé latéralement sur la ligne antérieure ou
médio-axillaire, ou en dessous du sixième ou septième espace
T
intercostal en cas de dilatation du ventricule gauche. Un soulève
M ment apexien est une pulsation cardiaque palpable qui soulève
notablement votre main. Un frémissement (thrill) est l'équivalent
tactile d'un souffle et correspond à une vibration palpable.
Étapes de l'examen
Fig. 4.17 Foyers auscultatoires. Foyers aux niveaux desquels les différents
• Expliquez que vous souhaitez examiner la poitrine
souffles sont le plus souvent, mais pas exclusivement, entendus. A : aortique ;
LMC : ligne médioclaviculaire ; M : mitral ; P : pulmonaire ; T : tricuspide. du patient et demandez-lui de retirer ses vêtements
au-dessus de la ceinture. Gardez la poitrine d'une femme
couverte avec un drap autant que possible.
• Inspectez le précordium chez un patient assis à 45° avec les
Encadré 4.17 Auscultation cardiaque : meilleurs foyers épaules horizontales. Recherchez des cicatrices chirurgicales,
auscultatoires pour entendre des anomalies des pulsations visibles et une déformation thoracique.
Localisation Bruit • Placez votre main droite sur le précordium afin d'obtenir une
Mitral : apex cardiaque Premier bruit cardiaque impression générale de la pulsation cardiaque (fig. 4.18A).
Troisième et quatrième bruits • Localisez le choc de pointe en posant vos doigts sur la
cardiaques poitrine parallèlement aux espaces intercostaux ; si vous ne
Souffle mésodiastolique de pouvez pas le sentir, demandez au patient de se tourner
rétrécissement mitral sur son côté gauche (fig. 4.18B).
Tricuspide : bord inférieur gauche Souffle diastolique précoce • Évaluez les caractéristiques du choc de pointe et sa
du sternum d'insuffisance aortique ou localisation.
tricuspide • Appliquez fermement le talon de votre main droite au
Claquement d'ouverture en cas niveau du bord parasternal gauche et cherchez un
de rétrécissement mitral soulèvement du ventricule droit. Demandez au patient de
Souffle pansystolique de retenir son souffle en expiration (fig. 4.18C).
communication interventriculaire
• Palpez à la recherche d'un frémissement (thrill) à l'apex ou
Pulmonaire : bord supérieur gauche Deuxième bruit cardiaque sur les deux bords du sternum avec le plat de vos doigts.
du sternum Souffle venant de la valve
pulmonaire
Une pulsation apicale normale soulève brièvement vos doigts
Aortique : bord supérieur droit du Souffle éjectionnel systolique du
et reste localisée. Il ne devrait pas y avoir de soulèvement ou fré
sternum type rétrécissement aortique ou
missement parasternal. Le choc de pointe peut être impalpable en
cardiomyopathie hypertrophique
cas de surpoids, chez les patients musclés, ou ceux présentant
Axillaire gauche Irradiation d'un souffle
une hyperinflation pulmonaire en cas d'asthme ou d'emphysème.
pansystolique d'insuffisance
Il peut être déplacé de façon diffuse vers le bas et latéralement en
mitrale
cas de dilatation ventriculaire gauche comme après un infarctus du
Sous-claviculaire gauche Souffle continu à type de
myocarde ou une myocardiopathie dilatée, une insuffisance aor
« machinerie » d'un canal artériel
tique sévère ou un rétrécissement aortique serré en décompen
persistant
sation. En cas de dextrocardie, l'apex cardiaque est palpable du
côté droit ; cette atteinte est rare, avec une prévalence de 1/10 000.
carinatum (thorax en carène ; voir fig. 5.6C) peuvent influer sur la Une hypertrophie ventriculaire gauche, comme dans l'hyperten
position du cœur et modifier la palpation et l'auscultation. sion artérielle ou le rétrécissement aortique sévère, produit une
Une cicatrice médiale de sternotomie indique généralement pulsation cardiaque puissante mais non déplacée. Ce « soulève
un antécédent de remplacement valvulaire ou de pontage ment » apical dynamique est assez différent de la pulsation diffuse
coronarien généralement associé à une cicatrice liée au prélè d'une dilatation ventriculaire gauche. Une pulsation au niveau du
vement de la veine saphène ou de l'artère radiale. Une cicatrice bord parasternal gauche (soulèvement ventriculaire droit) indique
sous-mammaire gauche est généralement liée à une valvuloto une dilatation ou une hypertrophie ventriculaire droite, accompag
mie mitrale ou une implantation d'une valve aortique par voie nant le plus souvent une hypertension artérielle pulmonaire. Un
percutanée (TAVI ou transcatheter aortic valve implantation). choc apexien « tapotant » en cas de rétrécissement mitral équivaut
Une cicatrice sous-claviculaire sera observée après la pose à un premier bruit cardiaque palpable et n'est généralement pas
d'un stimulateur (pacemaker) ou d'un défibrillateur. L'appareil déplacé. Une double pulsation apicale est caractéristique de la
apparaîtra souvent sous la peau de manière évidente. myocardiopathie hypertrophique.
58 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
A B C
Fig. 4.18 Palpation cardiaque. A Utilisation de la main pour palper la pulsation cardiaque. B Localisez le choc de pointe avec votre doigt (si nécessaire,
tournez le patient en position latérale gauche). C Palpez de l'apex au sternum à la recherche de pulsations parasternales.
Le frémissement (thrill) le plus classique est lié au rétrécisse • Concentrez-vous tour à tour sur la systole (intervalle
ment aortique et est habituellement palpable au niveau du bord entre B1 et B2) et la diastole (intervalle entre B2 et B1).
sternal droit supérieur. Le frémissement provoqué par une com Recherchez des bruits surajoutés, puis des souffles. Un
munication interventriculaire est mieux senti sur les bords ster souffle diastolique doux est parfois décrit comme une
naux droit et gauche. Un frémissement diastolique est très rare. « absence de silence ».
• Tournez le patient sur son côté gauche. Écoutez au niveau
Auscultation de l'apex cardiaque en utilisant la cloche du stéthoscope
en appliquant une pression légère afin de détecter le souffle
L'identification et la caractérisation correcte des bruits cardiaques
mésodiastolique d'un rétrécissement mitral (fig. 4.19A).
normaux et des bruits et/ou des souffles surajoutés requièrent
• Demandez au patient de s'asseoir et de se pencher en avant,
une approche attentive et systématique de l'auscultation.
puis d'expirer totalement et de retenir son souffle (fig. 4.19B).
Le diaphragme du stéthoscope atténue toutes les fréquences
Écoutez au niveau du deuxième espace intercostal droit
de façon égale, rendant ainsi certains sons de basses fréquences
et sur le bord sternal gauche avec le diaphragme afin
moins audibles. Utilisez le diaphragme afin d'identifier le premier
d'entendre un souffle d'insuffisance aortique.
et le deuxième bruit cardiaque, et les sons aigus comme le souffle
• Notez les caractéristiques et l'intensité de tout souffle entendu.
diastolique précoce de l'insuffisance aortique. Écoutez aussi l'en
• Développez une routine pour l'auscultation vous
semble du précordium à la recherche d'un frottement péricardique.
permettant de ne pas passer à côté d'anomalies subtiles.
La cloche du stéthoscope transmet tous les sons correcte
Identifiez et décrivez les éléments suivants :
ment, mais un son de basse fréquence pourra être masqué par
• le premier et le deuxième bruits (B1 et B2) ;
un souffle de haute fréquence. La cloche est particulièrement
• des bruits surajoutés (B3 et B4) ;
utile au niveau de l'apex et du bord sternal gauche afin d'écou
• des sons surajoutés comme des clics ou claquements ;
ter un souffle systolique de rétrécissement mitral ainsi que les
• des souffles systoliques ou diastoliques (temps, durée,
troisième et quatrième bruits.
caractéristiques, tonalité, intensité, localisation et irradiation) ;
• un frottement péricardique.
Étapes de l'examen
Bruits du cœur
Assurez-vous que la pièce soit calme au moment de
Les valves cardiaques normales produisent un bruit à leur
l'auscultation. Le stéthoscope doit être placé confortablement
fermeture. Les « tap-poum » sont causés par la fermeture des
avec les écouteurs légèrement inclinés vers l'avant. La tubulure
valves auriculoventriculaires (mitrale et tricuspide) suivies des
doit mesurer environ 25 cm et être suffisamment épaisse pour
valves de sorties (aortique et pulmonaire).
réduire les bruits externes.
• Écoutez avec le diaphragme de votre stéthoscope au niveau : Premier bruit du cœur
• de l'apex ; Le premier bruit du cœur (B1), « tap », est causé par la fermeture
• du bord sternal inférieur gauche ; des valves mitrale et tricuspide au début de la systole ventricu
• des bords sternaux supérieurs droit et gauche. laire. Il est mieux entendu à l'apex du cœur (foyer mitral). En cas
• Écoutez avec la cloche de votre stéthoscope au niveau : de rétrécissement mitral, l'intensité du B1 est augmentée du fait
• de l'apex ; de l'augmentation de la pression atriale gauche (encadré 4.18).
• du bord sternal inférieur gauche.
• Auscultez les artères carotides (souffle d'éjection aortique Deuxième bruit du cœur
d'un rétrécissement aortique et bruits carotidiens) et l'aire Le deuxième bruit du cœur (B2), « poum », est causé par la fer
axillaire gauche (souffle pansystolique d'insuffisance mitrale). meture des valves aortiques et pulmonaires à la fin de la systole
• À chaque site, évaluez les bruits B1 et B2. Évaluez leurs ventriculaire et est le mieux entendu sur le bord sternal gauche. Il
caractéristiques et intensités ; notez tout dédoublement du est plus fort et plus aigu que le B1, avec une composante aortique
B2. Palpez le pouls carotidien afin de préciser le temps du plus forte que la valve pulmonaire. Un dédoublement physiolo
souffle. Le B1 précède à peine la pulsation carotidienne, gique du B2 peut survenir du fait de la contraction discrètement
alors que le B2 en est clairement dissocié. anticipée du ventricule gauche par rapport au droit, entraînant
3. Examen physique • 59
À noter : un B2 simple
Dédoublement B1 B2 en inspiration est
physiologique normal chez l'adulte
4
B1
Un dédoublement
du B2 réel fixé est
caractéristique
d'une communication
Dédoublement interauriculaire
fixé du B2 Une accentuation
A B1 du dédoublement
survient en cas de
bloc de branche
droit ou d'hypertension
artérielle pulmonaire ;
il n'est pas fixé
B1
Un dédoublement
Dédoublement inversé du B2 survient
inversé du B2 en cas d'obstacle
B1
à l'éjection ventriculaire
gauche ou de bloc
de branche gauche
B1 B2
B
Fig. 4.20 Dédoublement physiologique et pathologique du deuxième
Fig. 4.19 Auscultation. A Écoutez un souffle de rétrécissement mitral bruit cardiaque.
en utilisant la cloche du stéthoscope légèrement appliquée sur un patient en
position latérale gauche. B Écoutez un souffle d'insuffisance aortique en
utilisant le diaphragme avec le patient penché en avant.
Encadré 4.19 Anomalies du deuxième bruit cardiaque
Silencieux
Encadré 4.18 Anomalies de l'intensité • Faible débit cardiaque
du premier bruit cardiaque • Rétrécissement aortique calcifié
• Insuffisance aortique
Silencieux
Bruyant
• Faible débit cardiaque • Allongement de l'intervalle P-R
• Hypertension artérielle systémique (composante valvulaire aortique)
• Fonction ventriculaire gauche diminuée (bloc auriculoventriculaire du
• Hypertension artérielle pulmonaire (composante valvulaire pulmonaire)
• Insuffisance mitrale rhumatismale premier degré)
Dédoublement
Bruyant
Augmenté en inspiration
• Débit cardiaque élevé • Raccourcissement
(rehaussant le dédoublement physiologique)
• Volume d'éjection systolique élevé de l'espace P-R
• Rétrécissement mitral • Myxome de l'oreillette (rare) • Bloc de branche droit
• Rétrécissement pulmonaire
Variable
• Hypertension artérielle pulmonaire
• Fibrillation auriculaire • Bloc de conduction • Communication interventriculaire
• Extrasystoles auriculoventriculaire complet
Dédoublement fixé (non modifié par la respiration)
• Communication interauriculaire
une fermeture de la valve aortique avant la valve pulmonaire. Le
Augmenté en expiration (dédoublement inversé)
dédoublement augmente en fin d'inspiration du fait de l'aug
mentation du remplissage du ventricule droit, retardant encore • Rétrécissement aortique
la fermeture de la valve pulmonaire. Cette séparation disparaît • Cardiomyopathie hypertrophique
• Bloc de branche gauche
en expiration (fig. 4.20). À l'auscultation, vous entendez « tap-p-
• Stimulation ventriculaire (électro-entraînée)
poum » en inspiration et « tap-poum » en expiration.
La composante aortique de B2 est parfois diminuée ou
absente en cas de rétrécissement aortique calcifié et réduite Un dédoublement important du B2, avec une variation
en cas d'insuffisance aortique (encadré 4.19). La composante respiratoire normale, survient en cas d'atteinte retardant la
aortique de B2 est importante en cas d'hypertension artérielle, vidange ventriculaire droite comme le bloc de branche droit ou
et la composante pulmonaire est augmentée dans l'hyperten l'hypertension artérielle pulmonaire. Un dédoublement fixe du
sion artérielle pulmonaire. B2, c'est-à-dire sans variation avec la respiration, est un signe
60 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
B1 A2P2
Souffle d'éjection systolique
(souffle de flux pulmonaire)
Valve pulmonaire avec dédoublement fixe du B2
OG
Communication interauriculaire
OD
Valve tricuspide
B1 B2
Souffle diastolique
(souffle de flux tricuspide)
chez l'enfant
Fig. 4.21 Communication interauriculaire. OD : oreillette droite ; OG : oreillette gauche.
B1 B2 B3
Variante: clic mésosystolique/
souffle systolique tardif
(prolapsus valvulaire
mitral)
B1 CMS B2 B3
Fig. 4.23 Insuffisance mitrale. L'insuffisance mitrale est causée par une dilatation du ventricule gauche et une incapacité des feuillets valvulaires de se
fermer hermétiquement. Le souffle débute au moment où la valve se ferme et peut occulter le premier bruit cardiaque. Il varie peu d'intensité au cours de la
systole. En cas de prolapsus de la valve mitrale, le souffle débute en milieu ou fin de systole et peut être associé à un clic mésosystolique (CMS).
Dilatation aortique
B1 CE B2
Valve aortique
B4 B1 CE B2
Fig. 4.24 Rétrécissement aortique. Il existe un gradient de pression systolique au travers de la valve aortique sténosée. La résultante est un jet à haute
vitesse s'impactant sur la paroi aortique (flèche), qui sera le mieux entendu avec le diaphragme du stéthoscope au foyer aortique. Sinon, la cloche peut
également être placée au niveau de la fourchette sternale. Le souffle éjectionnel systolique suit un clic éjectionnel (CE).
Souffles systoliques
Encadré 4.21 Causes de souffles systoliques
Les souffles éjectionnels systoliques sont causés par une
Souffles éjectionnels systoliques augmentation du flux sanguin au travers d'une valve normale
• Augmentation de la vitesse du flux au travers d'une valve normale : (souffle innocent ou fonctionnel), ou par un flux turbulent au tra
• anémie sévère, fièvre, sportifs (bradycardie avec volumes vers d'une valve anormale comme en cas de rétrécissement
éjectionnels importants), grossesse aortique ou pulmonaire (encadré 4.21). Un souffle éjectionnel
• communication interauriculaire (souffle de flux pulmonaire) systolique est également un signe de cardiomyopathie obs
• autres causes de souffles de flux (augmentation du volume éjecté tructive hypertrophique et sera accentué à l'effort ou durant
en cas d'insuffisance aortique) la phase de pression des manœuvres de Valsalva. Une com
• Flux normal ou réduit au travers d'une valve sténosée :
munication interauriculaire se caractérise par un souffle de flux
• rétrécissement aortique
• rétrécissement pulmonaire pulmonaire durant la systole.
• Obstruction sous-valvulaire Un souffle de rétrécissement aortique est souvent audible
• cardiomyopathie hypertrophique obstructive sur tout le précordium (voir fig. 4.24). Il est dur, râpeux, aigu et
irradie vers le bord sternal supérieur droit, en sus-claviculaire et
Souffles pansystoliques
les artères carotides. Il est habituellement assez fort et peut être
• Insuffisance mitrale
associé à un frémissement (thrill).
• Insuffisance tricuspide
• Communication interventriculaire Les souffles pansystoliques sont généralement liés à une
• Prothèse avec fuite mitrale ou tricuspide insuffisance mitrale. Le souffle est souvent bruyant et soufflant,
entendu au foyer mitral et irradiant en axillaire. En cas de pro
Souffles en fin de systole (télésystolique)
lapsus de la valve mitrale, la régurgitation débute en milieu de
• Prolapsus de la valve mitrale
systole, produisant un souffle systolique tardif (voir fig. 4.23).
3. Examen physique • 63
Déroulement
aortique
4
Valve aortique
Oreillette gauche
Valve mitrale
Le souffle d'insuffisance tricuspide est entendu au bord sternal normalement en lien avec une insuffisance aortique (fig. 4.25), et
inférieur gauche ; s'il est significatif, il est associé à une onde « v » le mieux entendu au bord sternal gauche chez un patient penché
proéminente au niveau de la PVJ et un foie pulsatile. en avant retenant son souffle en expiration. La durée du souffle
Une communication interventriculaire provoque également un d'insuffisance aortique est inversement proportionnelle à sa
souffle pansystolique. Les petites communications congénitales gravité. Le sang ayant reflué dans le ventricule durant la dias
produisent un souffle bruyant audible au bord sternal gauche, tole devant à son tour être éjecté durant la systole suivante, une
irradiant au bord sternal droit et souvent associé à un frémisse insuffisance aortique significative augmente le volume systolique
ment (thrill). Une rupture du septum interventriculaire peut com et s'associe donc à un souffle systolique fonctionnel.
pliquer un infarctus du myocarde, produisant un souffle râpeux L'insuffisance pulmonaire est très rare. Elle peut être causée
pansystolique. Les diagnostics différentiels d'un souffle entendu par une dilatation de l'artère pulmonaire en cas d'hypertension
après un infarctus du myocarde comprennent les insuffisances artérielle pulmonaire (souffle de Graham Steel) ou d'agénésie
mitrales par rupture des cordages mitraux, le souffle fonctionnel congénitale de la valve pulmonaire.
de régurgitation mitrale causée par une dilatation ventriculaire Les souffles mésodiastoliques sont habituellement causés
gauche et le frottement péricardique. par un rétrécissement mitral. Il est de tonalité grave, roulant et
peut suivre un claquement d'ouverture (fig. 4.26). Il est mieux
Souffles diastoliques entendu avec la cloche du stéthoscope au foyer mitral chez
Le terme de souffle protodiastolique, qui signifie en début de un patient tourné sur son côté gauche. Le souffle augmente à
diastole, est trompeur car habituellement le souffle dure toute la l'effort. Le rythme ressemblerait à « tap-pou-poum-rrou » ; « tap »
diastole, bien qu'il soit plus fort dans sa première partie. Il est est le B1, « pou-poum » le B2 avec le claquement d'ouverture,
64 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
B1 Souffle B2
continu
Shunt de gauche à droite
de l'aorte à l'artère pulmonaire
L'ombre de l'artère pulmonaire
peut être élargie sur la radiographie thoracique
aVR aVL
4
V6
V5
V1 V2 V3 V4
N aVF
Onde T : repolarisation
ventriculaire
Onde P : T
activation atriale
P Q S
Fig. 4.28 Électrocardiogramme (ECG). A Position des électrodes pour un ECG 12 dérivations. B Complexe PQRST normal. C Ischémie myocardique
aiguë antérieure. Noter le sus-décalage du segment ST dans les dérivations V1–V6 et aVL et l'image en miroir avec un sous-décalage du ST en dII, dIII et aVF.
* *
Fig. 4.29 Tracé de Holter-ECG des 24 heures montrant un bloc auriculoventriculaire complet. Les flèches indiquent les ondes P visibles ; elles sont
parfois masquées par les complexes QRS ou les ondes T (*).
66 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
VG
OG
A B
CX
TCG
IVA
C D
Fig. 4.30 Imageries cardiovasculaires. A Insuffisance cardiaque en radiographie thoracique. L'image montre une cardiomégalie associée à un
syndrome alvéolaire radio-opaque diffus d'œdème pulmonaire et des lignes de Kerley B (engorgement lymphatique, flèche) en périphérie des deux poumons.
B Échocardiographie transthoracique en vue apicale deux cavités montrant un amincissement de l'apex du ventricule gauche. Il est le site d'un infarctus
myocardique gauche antérieur. OG : oreillette gauche ; VG : ventricule gauche. C Coronarographie. La flèche indique une occlusion brutale proximale de
l'artère interventriculaire antérieure. CX : circonflexe ; IVA : interventriculaire antérieure ; TCG : tronc commun gauche. D Imagerie par résonance magnétique
cardiaque. Image de rehaussement au Gadolinium montrant une prise de contraste localisée (flèches blanches) évocatrice d'une fibrose myocardique du
territoire de l'IVA.
2. Anamnèse • 67
Voir figure 4.31.
A. Symptômes fréquents
Artère brachiale
(humérale)
Douleur des membres inférieurs Aorte
Ischémie asymptomatique Artère radiale
Environ 20 % des personnes de moins de 60 ans dans les Artère ulnaire
pays développés ont une maladie artérielle périphérique (MAP),
mais seulement un quart sont symptomatiques. La pathologie
sous-jacente est habituellement l'athérosclérose affectant les
vaisseaux de grands et de moyens calibres.
Une ischémie des membres inférieurs hémodynami Artère fémorale
quement significative se définit par un index de pression
systolique (IPS ; rapport de la pression artérielle à la cheville
Artère poplitée
par rapport à la pression humérale) inférieur à 0,9 au repos
(voir plus loin). La plupart de ces patients sont asymptoma
tiques, soit parce qu'ils choisissent de limiter leur périmètre Artère tibiale postérieure
de marche, soit parce que leur tolérance à l'effort est limitée
par d'autres comorbidités. Bien qu'asymptomatiques, ces
patients ont une athérosclérose étendue les exposant à un
risque élevé d'événements cardiovasculaires majeurs, et Artère pédieuse
doivent être traités de façon optimale afin de réduire leur
risque de mortalité. En outre, les MAP peuvent affecter la Fig. 4.31 Le système artériel.
prise en charge d'autres pathologies médicales ou chirur
gicales. Par exemple, la capacité de cicatrisation peut être
diminuée aux membres inférieurs. Encadré 4.22 Classification de Leriche et Fontaine pour
Les MAP touchent les membres inférieurs huit fois plus sou les ischémies des membres inférieurs
vent que les membres supérieurs. Cela est en partie dû au fait
que l'athérosclérose affecte plus fréquemment les membres Stade Description
inférieurs, mais aussi parce que la circulation artérielle collatérale I Asymptomatique
des membres inférieurs est moins bien développée en raison de II Claudication intermittente
la masse musculaire plus importante. III Douleur de repos ou nocturne
La classification de Leriche et Fontaine décrit la progression
IV Perte tissulaire (ulcération/gangrène)
des symptômes observés au fur et à mesure de l'aggravation
68 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
intestinal responsable d'un taux de mortalité élevé. Rarement, la plupart des patients sont asymptomatiques jusqu'à ce que
un infarctus ou une ischémie rénale peut être responsable l'anévrisme se rompe.
d'une douleur paralombaire associée à une hématurie micro- Les signes cliniques classiques de rupture d'un AAA incluent
ou macroscopique. la douleur abdominale/lombaire, la masse abdominale pulsatile,
Tout patient présentant une suspicion d'ischémie viscérale la syncope et l'état de choc (hypotension), mais ils ne sont pas
devrait bénéficier d'un angioscanner en urgence. forcément tous présents. Il est donc important d'avoir un seuil
de suspicion faible et de savoir prendre rapidement un avis spé
Anévrisme de l'aorte abdominale
cialisé et/ou de réaliser une TDM.
Un anévrisme de l'aorte abdominale (AAA) est une dilatation
localisée de l'aorte d'au moins 150 % de son diamètre normal Ischémie digitale
(fig. 4.32). Il est souvent découvert fortuitement au cours d'une
Orteils bleus
TDM ou d'un autre examen réalisé pour un autre motif.
Le patient peut se présenter avec une douleur abdominale Le syndrome des orteils bleus (blue toes syndrome) est géné
et/ou lombaire, ou parfois avec des signes plus subtils comme ralement en lien avec un mécanisme d'athéro-embolisme d'un
une sensation de pulsatilité abdominale ou l'observation d'on AAA ou d'une autre source alternative d'embolie (anévrisme
dulations dans l'eau lorsqu'il est dans son bain. Cependant, poplité, plaque athéromateuse, etc.). Des décolorations
bleuâtres irrégulières apparaissent sur les orteils et l'avant-pied
d'un seul ou des deux pieds. Les pouls pédieux sont habi
tuellement présents. Bien que relativement peu pathogène, ce
symptôme doit être pris au sérieux comme étant un signe pré
curseur d'un phénomène embolique majeur qui pourrait entraî
ner une ischémie aiguë d'un membre voire une amputation.
Acrosyndromes
Le phénomène de Raynaud est une ischémie digitale favorisée
par le froid et l'émotion. Il a trois phases (fig. 4.33) :
• pâleur : due à un vasospasme et/ou une obstruction des
artères digitales ;
• cyanose : due à la désoxygénation du sang veineux
statique (cette phase peut être absente) ;
• rougeur : due à une hyperémie réactionnelle.
B
A
B
C
Fig. 4.33 Syndrome de Raynaud. A Phase aiguë syncopale, aspect
Fig. 4.32 Anévrisme de l'aorte abdominale. A Abdomen sans pâle très prononcé de l'extrémité d'un doigt. B Les syndromes de Raynaud
préparation montrant des calcifications (flèche). B Tomodensitométrie secondaires peuvent progresser vers des ulcérations pulpaires digitales voire
abdominale montrant un anévrisme de l'aorte abdominale (flèche). C une gangrène digitale. (A et B) Source : Forbes CD, Jackson WF. Color Atlas of
En laparotomie, l'aorte apparaît irrégulière et grossièrement dilatée. Clinical Medicine. 3rd edn. Edinburgh : Mosby ; 2003.
3. Examen physique • 71
Le phénomène de Raynaud peut être primitif (maladie de certains des signes directs ou indirects de maladie des artères
Raynaud) et provoqué par un vasospasme idiopathique des périphériques.
artères digitales, ou secondaire à d'autres pathologies (syn Réalisez un examen détaillé des pouls artériels.
drome de Raynaud) comme les connectivites, les syndromes
d'hyperviscosité, la consommation de certaines drogues ou Étapes de l'examen
de certains médicaments, ou l'utilisation d'outils mécaniques
vibrants. Bien que cette pathologie évolue spontanément favo
rablement pour la majorité des patients, une petite minorité pré
Procédez méthodiquement, en débutant par les mains, en
utilisant les principes habituels d'inspection, de palpation et
4
sente de véritables ulcérations. d'auscultation pour chaque zone.
Les patients de plus de 40 ans présentant un phénomène de Membres supérieurs
Raynaud unilatéral doivent être explorés à la recherche d'une • Recherchez les pouls radiaux et huméraux (voir fig. 4.7).
MAP, en particulier en cas de facteurs de risque cardiovascu • Mesurez la pression artérielle aux deux bras (voir fig. 4.12).
laires comme un diabète ou un tabagisme.
Cou
Accident vasculaire cérébral • Recherchez les pouls carotidiens (voir fig. 4.7).
L'accident vasculaire cérébral (AVC), qui correspond à un déficit Abdomen
neurologique localisé de cause vasculaire, est abordé au cha • Inspectez en vous positionnant sur le côté à la recherche
pitre 7 (« Accident vasculaire cérébral et accident ischémique d'une pulsatilité évidente.
transitoire ») • Palpez l'aorte abdominale. La bifurcation aortique est au
niveau de l'ombilic ; recherchez un AAA palpable dans
B. Antécédents le cadran épigastrique. Si vous sentez effectivement un
anévrisme, essayez d'évaluer sa taille approximative en
Le patient a-t-il des antécédents connus de maladie artérielle plaçant les doigts sur chacun de ses côtés.
périphérique ? Interrogez-le sur des explorations, opérations • Chez des patients minces, une aorte tortueuse mais
ou procédures vasculaires précédentes. A-t-il des antécédents de diamètre normal peut être palpable ; cependant, un
d'autres pathologies athéromateuses comme une coronaropa anévrisme aura tendance à être expansif plutôt que
thie ou une maladie cérébrovasculaire ? Interrogez-le sur ses simplement pulsatile. Une masse pulsatile en dessous de
facteurs de risque cardiovasculaires comme l'hypertension arté l'ombilic suggère la présence d'un anévrisme iliaque.
rielle, l'hypercholestérolémie et le diabète. Existe-t-il d'autres Par la position de l'aorte dans le fond de la cavité
comorbidités (cardiopathie ou maladie pulmonaire sévère) pou abdominale, l'examen clinique reste peu fiable pour la
vant fortement aggraver le risque d'une potentielle intervention recherche d'un AAA. En cas de doute, réalisez une échographie
voire la rendre futile ? de l'aorte afin de confirmer ou d'infirmer votre hypothèse.
Membres inférieurs
C. Traitements habituels • Inspectez et cherchez au niveau des jambes et des pieds des
modifications liées à une ischémie comme une modification
Listez tous les traitements utilisés en prévention secondaire
de température et de coloration (voir encadré 4.23), l'absence
et questionnez le patient sur son observance : antiagrégants
de pilosité, une peau fine et une fragilité unguéale.
plaquettaires, hypolipémiants, antihypertenseurs et antidia
• Notez la position, les limites, la profondeur et la couleur
bétiques. Les patients seront susceptibles de prendre des
des ulcères.
traitements vasoactifs, bien que leur efficacité reste discutable
• Regardez précisément entre les orteils et sur les talons à
(naftidrofuryl, cilostazol par exemple). Questionnez le patient sur
la recherche de signes d'ischémie (site d'escarre le plus
une prise d'antihypertenseurs ou d'autres traitements à visée
fréquent).
cardiaque qui, par leurs effets hypotenseurs ou inotropes néga
tifs, peuvent aggraver les symptômes de douleur de repos. Pouls fémoral
• Demandez au patient de s'allonger et expliquez-lui ce que
D. Antécédents familiaux vous allez faire.
• Placez le bout de votre index et de votre majeur sur l'artère
Renseignez-vous sur les antécédents familiaux de coronaropa fémorale. Si vous avez des difficultés à la sentir (chez un
thie prématurée ou d'autre maladie vasculaire (voir plus haut). Il patient obèse, par exemple), souvenez-vous que l'artère
existe une association familiale forte pour les AAA ; donc, le cas fémorale se situe au milieu d'une ligne inguinale allant de
échéant, une histoire familiale devrait être recherchée. l'épine iliaque antérosupérieure à la symphyse pubienne
(fig. 4.34).
• Bien qu'il soit possible d'entendre des bruits fémoraux en
E. Mode de vie utilisant le diaphragme du stéthoscope, la présence ou
l'absence de bruit est sans relation avec la probabilité ou la
Évaluez la consommation tabagique (voir chap. 2, « Tabagisme »).
sévérité d'une atteinte aorto-iliaque.
Demandez-lui sa profession et ses activités habituelles. Quel est le
• Palpez les pouls fémoraux et radiaux simultanément à la
retentissement des symptômes sur sa qualité de vie ou son emploi ?
recherche d'un retard radiofémoral (fig. 4.35A).
Pouls poplité
3. Examen physique • Allongez le patient et fléchissez son genou à 30°.
• Placez vos pouces sur la tubérosité tibiale et vos doigts sur
Suivez la séquence décrite pour le cœur, à la recherche de un point médial postérieur au niveau du creux poplité (2 à
signes d'anémie ou de cyanose, d'insuffisance cardiaque et 3 cm en dessous du pli cutané), et essayez de comprimer
de signes directs ou indirects de MAP. L'encadré 4.26 liste l'artère contre l'arrière du tibia (fig. 4.35B).
72 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
L'artère poplité est toujours difficile à palper ; donc, si elle La présence des pouls aux pieds n'exclut pas complètement
vous apparaît facilement palpable, envisagez qu'il puisse l'existence d'une MAP significative des membres inférieurs, bien
exister un anévrisme poplité. qu'ils soient, la plupart du temps, diminués ou absents. Si l'his
toire est évocatrice mais que les pouls sont présents, deman
Pouls tibial postérieur dez au patient de marcher sur un tapis roulant jusqu'à ce que
• Sentez-le 2 cm en dessous et en arrière de la malléole
la douleur apparaisse ; en cas de MAP avec diminution du flux
interne en utilisant le bout de vos doigts (index, majeur,
sanguin, les pouls disparaîtront et l'index de pression systolique
auriculaire) (fig. 4.35C).
diminuera (voir ci-dessous).
Pouls pédieux
• Sentez-le entre le 1er et le 2e métatarse en latéralité du
tendon du long extenseur de l'hallux, en utilisant le bout de
vos doigts (index, majeur, auriculaire) (fig. 4.35D).
Nerf fémoral
Artère fémorale
Veine fémorale
D
Fig. 4.35 Examen des artères fémorale, poplitée, tibiale postérieure
et pédieuse. A Examinez l'artère fémorale, en recherchant simultanément
le retard radiofémoral. B Palpez l'artère poplitée avec le bout de vos
doigts, en les incurvant dans le creux poplité. C Examen de l'artère tibiale
Fig. 4.34 Triangle fémoral : vaisseaux et nerfs. postérieure. D Examen de l'artère pédieuse.
1. Anatomie et physiologie • 73
Test de l'angle de Buerger compatible avec une claudication intermittente et une valeur infé
rieure à 0,4 indiquerait une ischémie critique du membre examiné.
Étapes de l'examen Les patients avec une ischémie critique de la jambe (douleur de
repos, perte tissulaire) ont typiquement une pression artérielle à la
• Installez le patient allongé sur le dos et placez-vous au cheville inférieure à 50 mmHg, et un test de l'angle de Buerger positif.
pied du lit. Levez les pieds du patient et soutenez les Les patients ayant une artérite des membres inférieurs, en parti
jambes à 45° en position horizontale durant 2 à 3 minutes.
• Observez une pâleur associée à une vidange et un aspect
culier ceux avec un diabète, ont souvent des artères crurales calci
fiées incompressibles donnant des résultats de pression artérielle
4
en gouttière des veines superficielles. au pied et d'IPS faussement rassurants. La mesure de la TcpO2
• Demandez au patient de s'asseoir et de laisser ses jambes peut être plus précise chez ces patients et peut être mesurée en
pendre au bord du lit. utilisant un appareil spécifique positionné au bout du gros orteil.
• Observez une hyperémie réactionnelle apparaissant en
position déclive due à l'accumulation de métabolites
vasoactifs ; le test sera positif en cas de disparition de la 4. Explorations complémentaires
pâleur et d'apparition d'une rougeur diffuse.
L'utilisation d'autres moyens d'explorations doit être déci
Index de pression systolique (IPS) dée avec pour objectif d'apporter le maximum d'informations
au moindre risque pour le patient et un coût raisonnable.
Rechercher l'état des pouls peut être peu fiable chez cer
L'échographie Doppler est souvent le premier type d'examen
tains patients souffrant d'obésité ou d'œdèmes. Réalisez des
choisi en cas d'atteinte unilatérale, alors qu'une atteinte bilaté
mesures répétées de l'index de pression systolique chez tous
rale pourra être explorée par un angioscanner ou une angio-IRM
les patients pour lesquels la recherche des pouls des membres
(encadré 4.27).
inférieurs est rendue difficile ou en cas de suspicion de MAP.
Le ratio entre les plus hautes pressions artérielles mesurées à
A B
Fig. 4.37 Maladies veineuses des membres inférieurs. A Varices associées à des dépôts cutanés d'hémosidérine. B Ulcère veineux.
(A) Source : Metcalfe M, Baker D. Varicose veins. Surgery (Oxford) 2008 ; 26(1) : 4–7.
4. Explorations complémentaires
Les tests d'évaluation d'une insuffisance valvulaire saphéno
fémorale, tels que le test de Schwartz ou le test de
Trendelenburg, sont devenus obsolètes et ont été remplacés
A par les appareils Doppler portatifs. Placez le patient en posi
tion debout, demandez-lui de déplacer son poids sur le pied
controlatéral et positionnez la sonde Doppler au-dessus de la
veine saphène ou de la jonction saphénofémorale (2 cm en
dessous et en dedans du point médio-inguinal). Comprimez
le muscle du mollet et écoutez le flux sanguin circuler le long
de la grande veine saphène. En cas de bon fonctionnement
valvulaire, vous entendrez simplement un bref reflux sanguin
(< 0,5 seconde) au relâchement du mollet ; ce bruit physiolo
gique est lié à la fermeture des valves. En cas d'insuffisance
valvulaire, vous entendrez un son prolongé en lien avec le
reflux sanguin revenant dans les veines.
Mme Nguyen est une patiente de 62 ans se présentant chez son médecin traitant pour une douleur thoracique intermittente.
Réalisez l'interrogatoire de la patiente
• Présentez-vous et lavez-vous les mains.
• Invitez la patiente à décrire ses symptômes en utilisant des questions ouvertes.
• Procédez à un interrogatoire minutieux sur les symptômes actuels en recherchant spécifiquement le site, le type et l'intensité de la douleur, les
4
facteurs aggravants ou améliorants, en particulier le lien avec l'effort. Déterminez la date de début, la durée, les conséquences fonctionnelles et les
modifications des symptômes.
• Recherchez les antécédents pertinents et les facteurs de risque cardiovasculaires comme l'hypertension artérielle, le diabète et les dyslipidémies.
• Recherchez les traitements habituels ou les intolérances médicamenteuses, en particulier aux traitements préventifs.
• Recherchez des antécédents familiaux de coronaropathie précoce chez les parents au premier degré.
• Interrogez-la sur son mode de vie (profession, tabagisme et consommation d'alcool).
• Conduisez une enquête systématique. En particulier, existe-t-il des symptômes associés comme des palpitations, une dyspnée, une orthopnée et des
œdèmes des membres inférieurs, ou y a-t-il eu des saignements ?
• Répondez à toutes les inquiétudes de la patiente.
• Remerciez la patiente et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
Mme Nguyen présente une gêne thoracique intermittente évoluant depuis 6 semaines. Elle décrit une douleur sternale sourde n'irradiant pas dans les
bras ou la mâchoire. Elle survient préférentiellement à l'effort, est aggravée à la marche dans le froid ou à la montée, et disparaît après quelques minutes
de repos. Les symptômes rendent difficile la pratique de son métier d'auxiliaire de vie. Elle n'a pas d'antécédents médicaux hormis une hypertension
artérielle et un diabète de type 2 pour lequel elle est traitée par metformine. Il n'y pas d'antécédents dans sa famille de pathologie coronarienne précoce
et elle n'a jamais fumé.
Proposez un diagnostic probable
Le diagnostic le plus probable est un angor stable.
Proposez des explorations complémentaires
Examen cardiovasculaire complet, mesure de la glycémie et du bilan lipidique et réalisation d'un électrocardiogramme 12 dérivations. Des symptômes
typiques nécessiteront la réalisation d'une épreuve d'effort ou d'une coronarographie.
M. Lannes, 82 ans, présente une dyspnée d'apparition progressive et des épisodes de lipothymies à l'effort.
Examinez son système cardiovasculaire
• Présentez-vous et lavez-vous les mains.
• Effectuez des observations générales : la dyspnée ou la gêne sont-elles présentes au repos ? Les mains sont-elles froides ?
• Prenez le pouls, la pression artérielle et la pression veineuse jugulaire (PVJ). L'intensité du pouls et la pression artérielle systolique sont-elles
diminuées ? La PVJ est-elle augmentée ?
• Palpez le précordium. Le choc de pointe est-il trop puissant ou déplacé ?
• Auscultez les foyers mitral, tricuspide, aortique et pulmonaire afin de déterminer les caractéristiques du B1 et du B2, la présence et les caractéristiques
de bruits ou souffles surajoutés. En cas de souffle, vers quel foyer irradie-t-il ?
• Examinez le thorax, les lombes et les membres inférieurs à la recherche de signes d'insuffisance cardiaque.
• Remerciez le patient et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
M. Lannes semble confortable. Sa fréquence cardiaque est de 80 bpm, avec une pulsatilité faible. La pression artérielle est de 110/60 mmHg. La pression
veineuse jugulaire n'est pas augmentée. Il existe un soulèvement apexien, sans déplacement du choc de pointe. Le premier bruit cardiaque est normal,
mais le deuxième est diminué. Il existe un souffle d'éjection systolique de grade 3 d'intensité maximale au foyer aortique, clairement audible et irradiant
dans les carotides. Des crépitants sont entendus en fin d'inspiration aux bases pulmonaires.
Proposez un diagnostic probable
Le diagnostic le plus probable est celui d'un rétrécissement aortique compliqué d'une insuffisance ventriculaire gauche responsable d'un tableau
d'insuffisance cardiaque.
Proposez des explorations complémentaires
Électrocardiogramme 12 dérivations, radiographie thoracique et échographie cardiaque transthoracique.
78 • SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE
• Positionnez le patient en décubitus dorsal et incliné à 45°, la tête reposant sur un oreiller.
• Observez son aspect général :
• Le patient est-il essoufflé, cyanosé, en sueurs ou en détresse ?
• Notez ses caractéristiques corporelles (surpoids ou cachexie), les éléments marfanoïdes, la présence de cicatrices de ponction radiale ou d'une
veine saphène.
• Vérifiez les mains, les pouls, la pression artérielle, le visage et le cou :
• mains : couleur et température, taches de tabac, hippocratisme digital, hémorragies filiformes sous-unguéales, lésions de Janeway ou nodules
d'Osler, ou xanthome tendineux ;
• pouls : fréquence, rythme, caractéristiques et synchronicité des pouls radiaux, pouls imprenable, intensité et caractéristiques des pouls huméraux et
carotidiens ;
• pression artérielle : pression artérielle humérale systolique et diastolique ;
• visage : cyanose centrale, xanthélasma, arc sénile de la cornée, pétéchies ;
• cou : aspect des ondes, séquence et anomalies de la pression veineuse jugulaire, bruits carotidiens.
• Examinez le précordium :
• inspection : recherchez une cicatrice de sternotomie ou sous-mammaire gauche, de stimulateur cardiaque, ou une pulsatilité visible ;
• palpation : définissez les caractéristiques et la localisation du choc de pointe, de soulèvement parasternal ou de frémissements (thrills) ;
• auscultation : écoutez aux foyers apical, tricuspide, pulmonaire et aortique, les artères carotides et au foyer axillaire. Écoutez avec le patient tourné
sur le côté gauche et penché en avant pendant l'expiration.
– Bruits du cœur : identifiez les premier et deuxième bruits du cœur (B1 et B2) et tout bruit du cœur surajouté (B3 et B4).
– Sons surajoutés : clics et claquements.
– Souffles systolique et/ou diastolique (temps, durée, caractéristique, tonalité, intensité, localisation et irradiation).
– Frottement péricardique.
• Autres :
• auscultez à la recherche de crépitants fins en fin d'inspiration ou d'un épanchement pleural aux bases pulmonaires ;
• examinez l'abdomen à la recherche d'une hépatomégalie ou d'une pulsatilité hépatique ;
• recherchez des œdèmes des membres inférieurs ou des lombes.
Système veineux et artériel périphérique
• Inspection des membres supérieurs et inférieurs :
• vérifiez la température et la couleur, le temps de recoloration cutanée, la décoloration cutanée, les ulcères, les varices et les cicatrices.
• Palpation :
• examinez l'abdomen à la recherche d'un anévrisme expansif de l'aorte abdominale ;
• identifiez les pouls fémoraux, poplités, tibiaux postérieurs et pédieux ;
• recherchez des œdèmes prenant le godet ;
• réalisez un test de l'angle de Buerger.
• Auscultation :
• écoutez à la recherche de bruits abdominaux ou artériels fémoraux.
J. Alastair Innes
James Tiernan
5
Système respiratoire
1. Anatomie et physiologie 80 4. Interprétation des résultats 94
2. Anamnèse 80 5. Explorations complémentaires 94
A. Symptômes fréquents 81 6. ECOS exemple 1 : anamnèse respiratoire 96
B. Antécédents 86
7. ECOS exemple 2 : examen respiratoire 96
C. Traitements habituels et allergies 86
D. Antécédents familiaux 87 8. Séquence d’examen intégré du système respiratoire 97
E. Mode de vie 87
F. Recherche systématique 87
3. Examen physique 88
A. Inspection 88
B. Palpation 92
C. Percussion 92
D. Auscultation 93
2. Anamnèse
1 Limites pleurales 4 Scissure oblique
2 Limites pulmonaires 5 Scissure horizontale Les patients utilisent un certain nombre de termes afin de
A 3 Incisure cardiaque 6 Trachée décrire les symptômes respiratoires (comme infection, crachats,
catarrhe, pleurésie, sifflement). Ces termes peuvent être ambigus
et nécessitent d'être définis précisément afin d'éviter tout malen-
tendu. Ainsi, « sifflement » peut être utilisé pour « essoufflement » ;
ou « j'ai eu une infection pulmonaire » peut témoigner d'un épi-
sode de dyspnée en réalité en lien avec une embolie pulmonaire.
Lobe supérieur droit Comme pour les autres systèmes, le recueil d'une anamnèse
doit débuter par des questions ouvertes, mais devra également
Lobe moyen s'intéresser à un ensemble d'éléments spécifiques soulignés
Lobe inférieur droit dans l'encadré 5.1.
• Avez-vous des expectorations quotidiennes abondantes • l'existence d'un facteur déclenchant (par exemple à la
jaunes ou verdâtres, parfois accompagnées de filets déglutition, l'exposition au froid, l'exercice) ;
de sang ? Cela peut être évocateur d'une dilatation des • le tabagisme. Cela augmente la probabilité de bronchite
bronches. chronique ou de cancer pulmonaire ;
• les signes cliniques associés :
Toux • sibilants : la toux peut être une manifestation de l'asthme ;
• brûlures gastrique ou reflux gastro-œsophagien : le
Le réflexe de toux est destiné à évacuer les corps étrangers et
reflux gastro-œsophagien est un facteur déclenchant
les sécrétions présents au niveau des voies aériennes centrales.
classique de toux ;
Il peut être provoqué par toute pathologie affectant l'arbre
• modification de la voix ou trouble de la déglutition :
bronchique. L'inspiration est suivie d'un effort expiratoire contre
rechercher une cause laryngée.
une glotte fermée. L'ouverture soudaine ultérieure de la glotte
• la prise médicamenteuse, en particulier la prise d'inhibiteurs
avec un débit expiratoire rapide produit un son caractéristique.
de l'enzyme de conversion.
Interrogez le patient sur les points suivants :
• la durée de la toux ; Une toux productive avec expectorations jaunes ou verdâtres
• sa présence quotidienne ou non ; suggère une infection bronchique. Des expectorations abon-
• si elle est intrusive/irrésistible ou si le patient tousse dantes de façon chronique sont évocatrices de bronchectasies.
délibérément pour se dégager d'une sensation L'hémoptysie est traitée ci-dessous.
d'obstruction des voies aériennes (raclement de gorge) ; La toux est un symptôme fréquent d'infection virale aiguë
• si elle est productive et, dans ce cas, quelle quantité et de des voies aériennes supérieures, se résolvant généralement de
quelle couleur ; façon spontanée en quelques jours ou semaines.
2. Anamnèse • 83
Une toux persistante après plusieurs semaines peut être un larynx où il se mêle aux sécrétions des voies aériennes supé-
signe de carcinome bronchique. Un antécédent personnel de rieures et à la salive avant d'être avalé. En cas d'infection aiguë
tabagisme augmente le risque de malignité, bien que la toux chro- ou chronique des voies respiratoires, l'accumulation de poly-
nique soit un symptôme non spécifique chez les fumeurs. D'autres nucléaires neutrophiles, de mucus et de sécrétions protéiques
explorations complémentaires dont une radiographie thoracique dans les voies aériennes est responsable d'une toux avec
sont souvent nécessaires afin de dépister précocement un cancer. expectoration de crachats. Renseignez-vous sur les caractéris-
La toux chronique est définie comme une toux persistant plus de tiques des crachats afin de préciser l'atteinte présentée. Des
8 semaines. Elle peut être délétère à la fois sur le plan physique et modifications de la couleur ou de la consistance, ou une aug-
social. Les causes de toux chronique ainsi que les signes cliniques mentation de la quantité des sécrétions peuvent être le signe 5
d'orientation sont résumés dans l'encadré 5.3. d'une infection dans le cadre d'une maladie chronique.
Les patients chez qui une tumeur maligne affecterait le hile
gauche peuvent avoir une atteinte du nerf récurrent gauche res- Couleur
ponsable d'une paralysie de la corde vocale gauche les empê- • Claire (mucoïde) : BPCO/bronchectasie (dilatation des
chant de fermer la glotte et de générer une toux explosive normale. bronches) sans infection active/rhinite.
La résultante est une expiration forcée rauque sans le caractère • Jaune (mucopurulent) : infection aiguë des voies aériennes
explosif initial lié à l'ouverture de la glotte qui peut être décrit selon le inférieures/asthme.
terme de toux soufflée ou feutrée. Il s'agit d'un symptôme d'alerte • Vert (purulent) : infection active-aiguë ou exacerbation
important, évocateur d'une possible atteinte hilaire maligne. d'une atteinte chronique, telle que la BPCO.
• Rouge/brun (rouille) : pneumopathie à pneumocoque
Expectorations (fig. 5.3B). Essayez de distinguer la différence entre une
En situation normale, l'arbre trachéobronchique est tapissé d'un couleur rouille et du sang véritable (voir ci-dessous).
mucus remontant grâce à l'ascenseur mucociliaire jusqu'au • Rosé (séreux/mousseux) : œdème aigu pulmonaire.
En cas de bronchectasie, la couleur des crachats peut être
utilisée pour évaluer la nécessité de prescription d'un traitement
Encadré 5.3 Causes de toux chronique et signes antibiotique (fig. 5.3A).
pouvant l'accompagner
Volume
Éléments évocateurs dans
Physiopathologie l'histoire/examen • Estimez la quantité produite en 24 heures : une petite
quantité dans un mouchoir, une cuillère, une tasse, un bol.
Inflammation des voies aériennes :
• Comparez le volume actuel avec le volume minimal ou le
Asthme – toux asthmatiforme Touche les enfants et certains
volume habituel produit par le patient.
adultes
Symptômes souvent présents Consistance
la nuit
Sibilants et atopie associés • Une exacerbation de dilatation des bronches peut se
manifester par une augmentation de l'épaisseur (viscosité).
BPCO Antécédent de tabagisme et
crachats intermittents • Le carcinome bronchiolo-alvéolaire, qui est une atteinte peu
fréquente, peut être évoqué devant de grandes quantités
Hyperréactivité bronchique Toux et expectorations de début
de sécrétions mousseuses évoluant depuis plusieurs
persistante suivant une bronchite récent
aiguë semaines/mois.
• Parfois, les patients asthmatiques excréteront des
Dilatation des bronches Crachats purulents quotidiens
expectorations correspondant à des bouchons muqueux
durant de longues périodes
Pneumopathie ou coqueluche (fig. 5.3C). Ils indiquent parfois également une aspergillose
dans l'enfance bronchopulmonaire allergique sous-jacente.
Hémoptysies récidivantes
Cancer pulmonaire Toux persistante, en particulier
Hémoptysie
chez le fumeur L'hémoptysie est une expectoration de sang provenant de
Toute hémoptysie l'arbre respiratoire. Elle peut compliquer une violente quinte de
Pneumopathie ne s'améliorant toux forcée, mais est le plus généralement observée en cas d'in-
pas après 4 à 6 semaines
fection aiguë ou chronique des voies respiratoires. Une hémop-
Rhinite avec jetage postérieur Éternuements chroniques, tysie peut aussi être le signe d'une embolie pulmonaire ou d'un
obstruction/écoulement nasal
cancer pulmonaire. Ne présumez jamais qu'une hémoptysie est
Reflux gastro-œsophagien Brûlures rétrosternales ou reflux d'origine bénigne avant d'avoir envisagé et éliminé les hypo-
acide postprandial, penché en thèses malignes.
avant ou en position allongée
Renseignez-vous sur le mode d'apparition de l'hémoptysie,
Toux nocturne et diurne
la quantité, les signes associés et la durée de l'épisode.
Effets secondaires médicamenteux Patient sous inhibiteurs de
• Le sang venait-il effectivement des poumons ? Du sang
l'enzyme de conversion
dans la bouche peut avoir été vomi, provenir du nez par
Maladies interstitielles pulmonaires Toux sèche persistante le biais d'une épistaxis, ou survenir chez des patients
Crépitants inspiratoires fins des
présentant des gingivopathies suite à un brossage de dents
bases
ou à la mastication.
Toux idiopathique Histoire longue sans signe associé • Une histoire récente de stries de sang associées à des
et explorations négatives –
expectorations purulentes est évocatrice d'une bronchite
diagnostic d'exclusion
aiguë.
84 • SYSTÈME RESPIRATOIRE
MUCOÏDE
MUCOPURULENT
PURULENT
1 cm
C
A
Fig. 5.3 Aspect des expectorations en cas de maladie. A Échelle des couleurs des crachats au cours des bronchectasies. B Crachats couleur rouille au cours
d'une pneumopathie à pneumocoque. C Bouchon muqueux chez un patient asthmatique. (A) Remerciements à Medical Photography, NHS Lothian.
• Un épisode brutal d'hémoptysie de faible abondance inspiratoire. A contrario, les voies aériennes de gros calibre sont
associée à une douleur pleurale et une dyspnée est comprimées durant l'expiration, du fait de la pression positive
évocateur d'embolie pulmonaire. au sein du parenchyme pulmonaire l'entourant, conduisant à
• Des épisodes répétés de stries de sang dans des crachats des sibilants expiratoires ou stridor fixés. Un rétrécissement des
clairs doivent faire rechercher rapidement un cancer voies aériennes de gros calibre à l'entrée dans la cage thora-
pulmonaire. cique (par exemple lors d'une compression trachéale liée à un
• Des épisodes répétés de stries de sang dans des goitre volumineux) peut être responsable d'un stridor aux deux
sécrétions purulentes depuis plusieurs semaines suggèrent temps expiratoire et inspiratoire. En cas de stridor, des explora-
une possible tuberculose ou une surinfection d'un cancer tions et un traitement rapides sont indispensables.
sous-jacent ; si les épisodes existent depuis plusieurs
années, on évoque une dilatation des bronches. Douleur thoracique
• Des hémoptysies de grande quantité (> 20 ml) sont Une douleur thoracique peut être d'origine musculosqueletti-
évocatrices de causes spécifiques : que, respiratoire, cardiovasculaire et gastro-intestinale.
• cancer pulmonaire érodant des vaisseaux pulmonaires ; Déterminez :
• bronchectasies (comme dans la mucoviscidose) ;
• la localisation et la sévérité ;
• maladies en lien avec des excavations pulmonaires
• ses caractéristiques : une douleur vive est évocatrice de
(saignement lié à un aspergillome) ;
douleur pleurale ;
• vascularite pulmonaire ;
• le début : progressif ou rapide ?
• malformation artérioveineuse pulmonaire.
• les facteurs aggravants ou améliorants : une aggravation
à la toux ou à l'inspiration profonde est évocatrice d'une
Stridor origine pleurale ;
Ce bruit respiratoire dur et râpeux est lié aux vibrations de la • les symptômes associés : essoufflement, fièvre et toux sont
paroi de la trachée ou des bronches souches lorsque la lumière évocateurs d'une cause infectieuse.
des voies aériennes est sévèrement réduite par un phénomène Une embolie pulmonaire massive peut être responsable d'une
compressif, une tumeur ou l'inhalation d'un corps étranger. douleur thoracique à type d'angor (voir chap. 4), en raison de l'aug-
L'inspiration entraîne une diminution de la pression au niveau mentation du travail ventriculaire droit associé à une diminution de
de la trachée extrathoracique ; une diminution sévère du calibre la libération coronarienne d'oxygène du fait d'une hypotension et
de la lumière de la trachée à ce niveau-là induit donc un stridor d'une hypoxémie, résultant en une ischémie myocardique droite.
2. Anamnèse • 85
• travail nocturne ou horaires décalés : cela peut perturber le piration souvent accompagnées d'un changement de position,
bon fonctionnement du sommeil ; puis une répétition de ce cycle.
• se réveille-t-il reposé ou fatigué ? Les patients souffrant Une échelle validée d'évaluation de la somnolence (échelle
d'apnée du sommeil se réveillent épuisés le matin ; de somnolence d'Epworth : http://epworthsleepinessscale.
• a-t-il des difficultés à rester éveillé pendant la journée, par com/) peut être utilisée afin de quantifier la somnolence diurne,
exemple au travail ou au volant ? et est utile si vous souhaitez adresser votre patient à un centre
Il est essentiel de conseiller au patient de ne plus conduire durant spécialisé dans les troubles du sommeil.
la période d'exploration en cas de suspicion d'apnée du sommeil.
Idéalement, recherchez une description de n'importe quel B. Antécédents
trouble respiratoire nocturne auprès de son (sa) partenaire. En
cas de SAS, le partenaire peut constater des périodes d'arrêt Les antécédents médicaux en rapport avec une pathologie respira-
de la respiration accompagnées d'une augmentation des efforts toire sont résumés dans l'encadré 5.4. Ceux-ci incluent les maladies
respiratoires, suivies d'une reprise brutale et bruyante de la res- respiratoires qui peuvent récidiver ou provoquer des symptômes
à long terme, et les maladies affectant d'autres organes pouvant
causer, se compliquer ou se présenter par des symptômes respi-
Encadré 5.4 Antécédents de maladies pouvant être ratoires, telles que les maladies thrombo-emboliques, cardiovascu-
en lien avec l'épisode respiratoire actuel laires, hématologiques, cancéreuses ou auto-immunes.
Notez les traitements à visée pulmonaire prescrits dans le passé
Antécédents Implications actuelles (ainsi que les hospitalisations en unités de soins intensifs) et l'inten-
Eczéma, rhinite allergique Terrain allergique en faveur d'un sité des symptômes chroniques en relevant le rythme habituel des
asthme exacerbations, le nombre de prescriptions et les hospitalisations.
Asthme dans l'enfance Une grande partie des enfants
présentant des sibilants n'auront C. Traitements habituels et allergies
pas d'asthme à l'âge adulte, mais
beaucoup d'adultes asthmatiques
Notez tous les traitements actuels, y compris les inhalateurs,
ont eu des sibilants durant
les aérosols de bronchodilatateurs, la prescription d'oxygène au
l'enfance
domicile, les traitements sans ordonnance ainsi que la consom-
Coqueluche, rougeole, corps Causes reconnues de
mation de drogues. Contrôlez les noms et posologies des diffé-
étranger inhalé bronchectasies, en particulier si
rents traitements à partir de sources distinctes.
compliquées d'une pneumopathie
Les traitements prescrits pour d'autres indications peuvent
Pneumopathie, pleurésie Causes reconnues de
fréquemment être responsables d'effets secondaires respira-
bronchectasies
Des épisodes récidivants peuvent toires ; ceux-ci sont résumés dans l'encadré 5.5.
être des manifestations de
bronchectasies
Tuberculose Réactivation en l'absence de Encadré 5.5 Atteintes pulmonaires secondaires
traitement dans le passé à une exposition médicamenteuse
Une insuffisance respiratoire peut
compliquer une thoracoplastie Atteinte respiratoire Médicament
Un aspergillome dans une caverne Bronchoconstriction Bêta-bloquants
pulmonaire peut se manifester par Opioïdes
une hémoptysie Anti-inflammatoires non stéroïdiens
Connectivite, par exemple Les atteintes pulmonaires en sont Toux Inhibiteurs de l'enzyme de conversion
polyarthrite rhumatoïde des complications reconnues, de l'angiotensine
par exemple fibrose pulmonaire,
épanchement, dilatation des Bronchiolite oblitérante D-pénicillamine
bronches Maladie pulmonaire Agents cytotoxiques : bléomycine,
Les traitements parenchymateuse diffuse méthotrexate
immunosuppresseurs utilisés Agents anti-inflammatoires :
dans ces pathologies peuvent sulfasalazine, D-pénicillamine, sels d'or,
être responsables de toxicité aspirine
pulmonaire ou exposer les patients Agents cardiovasculaires : amiodarone,
aux infections respiratoires hydralazine
Antécédent de tumeur maligne Récidive, maladie métastatique/ Antibiotiques : nitrofurantoïne
pleurale Mésusage de drogues intraveineuses
Certaines chimiothérapies sont Embolie pulmonaire Œstrogènes
responsables de fibrose pulmonaire Hypertension artérielle Œstrogènes
Fibrose pulmonaire post-radique pulmonaire Dexfenfluramine, fenfluramine
Voyage récent, immobilité, cancer Embolie pulmonaire Épanchement pleural Amiodarone
Chirurgie récente, perte de Inhalation d'un corps étranger, du Nitrofurantoïne
conscience contenu gastrique Phénytoïne
Pneumopathie, abcès pulmonaire Méthotrexate
Embolie pulmonaire Pergolide
Pathologie neuromusculaire Insuffisance respiratoire Dépression respiratoire Opioïdes
Aspiration Benzodiazépines
2. Anamnèse • 87
des symptômes respiratoires ou compliquant une pathologie induisent, quant à elles, des poumons rigides et de petites
respiratoire, comme un cancer ovarien se présentant par un tailles, une diminution des volumes pulmonaires et une augmen-
épanchement pleural. tation de la fréquence respiratoire de repos.
Les déformations thoraciques (fig. 5.6) peuvent être congé-
nitales, comme en cas de pectus excavatum, ou acquises,
3. Examen physique comme dans le cas d'un pectus carinatum. Ce dernier est lié
à un déplacement en dedans des côtes les plus basses asso-
Le patient devrait être allongé sur une table d'examen ou un lit cié à un sternum proéminent, dû à un syndrome obstructif
avec le dossier incliné à 45°, le thorax exposé et la tête posée sévère chez le jeune enfant, lorsque la cage thoracique est en
sur un oreiller. développement. Une asymétrie de la cage thoracique peut être
secondaire à une scoliose, à une rétraction d'un poumon cica-
A. Inspection triciel après une infection tuberculeuse, ou à un antécédent de
résection chirurgicale pulmonaire et/ou costale.
Beaucoup d'informations concernant le fonctionnement respira-
toire peuvent être glanées par une inspection attentive. L'aspect Étapes de l'examen
normal et les mouvements respiratoires de la paroi thoracique • Notez la présence de nébuliseurs ou d'inhalateurs (indiquant
sont significativement modifiés par l'hyperinflation accom- une maladie pulmonaire obstructive), d'oxygénothérapie,
pagnant les maladies respiratoires obstructives chroniques une cyanose et contrôlez le pot à crachats.
(fig. 5.5). Ces atteintes entraînent également un allongement • Recherchez une asymétrie du thorax, des déformations,
du temps d'expiration en comparaison au temps inspiratoire et, des cicatrices de chirurgie et de drainage thoracique.
par moments, une expiration à « lèvres pincées ». L'inspiration Souvenez-vous que les cicatrices de thoracotomie
forcée par les grands volumes respiratoires pulmonaires peut peuvent être uniquement visibles sur les faces postérieures
provoquer un tirage intercostal en milieu d'inspiration et égale et latérales du thorax.
ment entraîner le recrutement de muscles normalement non • Silencieusement, observez et comptez la fréquence
impliqués dans la respiration (« muscles accessoires »). Ceux-ci respiratoire (par exemple le nombre de cycles respiratoires
incluent les muscles sternocléidomastoïdiens soulevant le ster- en 15 secondes × 4) sans attirer l'attention du patient,
num et les muscles trapèzes et scalènes soulevant la ceinture car cela pourrait provoquer une modification du rythme.
scapulaire. Les patients s'assiéront parfois en position penchée Une solution facile à ce problème consiste à faire mine
en avant ou les bras appuyés sur une table, ce qui leur permet de mesurer la fréquence cardiaque par la prise du pouls
d'utiliser les grands pectoraux pour tirer les côtes vers l'exté- radial, tout en regardant la fréquence respiratoire.
rieur durant l'inspiration. A contrario de l'hyperinflation obser- • Inspectez le reste de la peau à la recherche d'anomalies
vée dans les maladies obstructives, les maladies interstitielles pertinentes.
Distance
cricosternale
Mouvement
normale
des côtes vers
A Normal le haut et vers
Le cœur provoque l'extérieur
une matité au bord
sternal gauche
Mouvement
des côtes
inférieures
vers l'extérieur
Expiration Inspiration
Distance cricosternale
réduite (hauteur du sternum) Mouvement des côtes
vers l'extérieur réduit
B Hyperinflation
La lingula recouvre le cœur Mouvement paradoxal
– perte de la matité vers l'intérieur
cardiaque des côtes inférieures
Diaphragme aplati et bas dû à l'aplatissement
du diaphragme
Fig. 5.5 Mouvements respiratoires des côtes, du sternum et du diaphragme. A Chez l'adulte normal. B En cas d'hyperinflation pulmonaire chronique
au cours d'une maladie respiratoire obstructive. L'hyperinflation est responsable d'un déplacement vers le haut du sternum et des clavicules, d'une augmentation
du diamètre antéropostérieur de la cage thoracique, d'une disparition de la matité cardiaque au bord sternal inférieur gauche, et d'un aplatissement des coupoles
diaphragmatiques entraînant un mouvement vers l'intérieur des côtes inférieures à l'inspiration.
3. Examen physique • 89
A B
C D
Fig. 5.6 Déformations de la cage thoracique. A Hyperinflation thoracique avec élévation du sternum et de la ceinture scapulaire. B Cyphoscoliose.
C Pectus carinatum avec coup de hache sous-mammaire (flèche). D Pectus excavatum.
Au repos, la fréquence respiratoire se situe normalement rale et longitudinale de l'ongle (voir fig. 3.8), décollant le lit de
entre 12 et 15 cycles/minute ; les patients anxieux peuvent avoir l'ongle de l'os sous-jacent. Une pression à la base de l'ongle
15 à 20 cycles par minute, mais une fréquence supérieure à vous permettra à la palpation de constater une mobilité ano-
20 par minute est anormale chez l'adulte. male du lit de l'ongle (voir fig. 3.9C). Les causes les plus fré-
Chez l'adulte en bonne santé en altitude, la personne âgée quentes d'hippocratisme digital d'origine respiratoire sont les
et l'insuffisant cardiaque, une séquence typique d'alternance maladies pulmonaires purulentes chroniques (dilatation des
entre des périodes de respiration profonde et superficielle peut bronches), les cancers pulmonaires et les fibroses pulmonaires
être observée. Elle est connue sous le nom de respiration de (voir encadré 3.4).
Cheyne-Stokes et serait en lien avec un effet rétroactif anormal Une autre complication rare des cancers pulmonaires est
des chémorécepteurs carotidiens sur le centre de la respiration. l'ostéoarthopathie hypertrophiante pneumique de Pierre Marie,
Des métastases sous-cutanées d'un cancer pulmonaire au cours de laquelle il est observé un gonflement douloureux
(fig. 5.7A) peuvent être observées et offrent la possibilité d'une biop- des poignets et chevilles accompagné d'un hippocratisme digi-
sie diagnostique rapide. Au niveau des jambes, des lésions rouges, tal marqué. Une radiographie des avant-bras et des jambes
foncées, douloureuses, caractéristiques d'un érythème noueux montrera des appositions périostées correspondant à des néo-
(fig. 5.7B), peuvent être évocatrices d'une sarcoïdose sous-jacente, formations osseuses apposées sur la corticale des os longs.
ou un œdème unilatéral indiquer une maladie thrombo-embolique. Les autres signes importants de maladies respiratoires au
niveau des mains sont :
Mains et membres supérieurs • la cyanose ;
L'hippocratisme digital est lié à un épaississement des tissus • les taches de nicotine sur les doigts liées à la
mous de la dernière phalange augmentant la courbure laté- consommation de tabac (fig. 5.8) ;
90 • SYSTÈME RESPIRATOIRE
B
Fig. 5.7 Lésions cutanées en rapport avec des maladies
Fig. 5.10 Position des mains afin de rechercher un astérixis en cas
respiratoires. A Métastases d'un cancer pulmonaire. B Érythème
d'hypercapnie.
noueux prétibial au cours d'une sarcoïdose.
Visage
Les maladies respiratoires peuvent être responsables de
signes importants sur le visage. Une obstruction de la
veine cave supérieure provoque un œdème généralisé de la
tête, du cou et du visage (fig. 5.11) associé à un œdème
sous-conjonctival (ressemblant à une larme immobile sur la
Fig. 5.8 Taches de tabac au niveau des doigts. face interne de la paupière inférieure) ; cela indique généra-
lement l'existence d'une tumeur envahissant le médiastin
• l'amyotrophie des petits muscles (voir fig. 13.23), pouvant supérieur. Les tumeurs de la base du cou peuvent affecter
indiquer une lésion nerveuse radiculaire de T1 par une les voies nerveuses sympathiques menant à l'œil qui che-
tumeur apicale pulmonaire ; minent du segment rachidien thoracique supérieur via les
• rarement, des décolorations jaune brun des ongles au ganglions spinaux pour ensuite remonter le long des artères
cours du syndrome des ongles jaunes (fig. 5.9). carotides. Ces lésions sont responsables d'un ptosis, d'un
myosis et d'une énophtalmie unilatérale (syndrome de Claude
Étapes de l'examen Bernard-Horner).
• Examinez les mains à la recherche d'un hippocratisme
digital (voir fig. 3.9), de taches de nicotine, des
décolorations des ongles et une cyanose.
• Demandez au patient de tenir ses bras tendus en avant
Étapes de l'examen
avec les poignets en extension (fig. 5.10). • Vérifiez la conjonctive d'un œil à la recherche d'une
• Contrôlez les pouls au moment de l'examen des mains. anémie, et la couleur de la langue pour une cyanose
• Recherchez une sensibilité à la palpation des centrale (fig. 5.12).
avant-bras. • Recherchez un ptosis et une asymétrie pupillaire.
3. Examen physique • 91
Étapes de l'examen
Fig. 5.11 Syndrome cave supérieur. Visage et cou gonflés et
foncés, dilatation des veines superficielles collatérales sur la cage • Installez la tête du patient sur un oreiller avant d'examiner
thoracique. Source : Midthun DE, Jett JR. Clinical presentation of lung le cou, afin de faciliter la relaxation des muscles
cancer. In Pass HI, Mitchel JB, Johnson DH, et al. (eds). Lung Cancer : sternocléidomastoïdiens.
Principles and Practice. Philadelphia : Lippincott-Raven ; 1996, p. 421. • Examinez la PVJ (voir chap. 4, « Pression veineuse jugulaire
et pulsations jugulaires »).
• Recherchez une déviation trachéale en palpant doucement
avec un doigt au-dessus et au milieu de la fourchette
sternale (fig. 5.13). Si le bout du doigt rencontre le centre
de la trachée, elle n'est pas déviée.
• Contrôlez la distance cricoïdosternale (distance verticale
entre la fourchette sternale et le cartilage cricoïde qui est
la première proéminence rigide sentie au-dessus des
anneaux trachéaux). En situation normale, cette distance
correspond à trois travers de doigts.
• Examinez les ganglions cervicaux en vous plaçant derrière
le patient assis et penché en avant, tel que décrit au
chapitre 3.
A B
Fig. 5.15 Infiltration sous-cutanée d'air (emphysème sous-cutané)
Fig. 5.14 Évaluation de l'expansion de la cage thoracique de devant. observée au niveau du cou et de la cage thoracique sur une
A Expiration. B Inspiration. radiographie thoracique (flèche).
3. Examen physique • 93
A B C
Fig. 5.16 Percussion du thorax. A Technique. B Sites de percussion antérieur et latéral. C Sites postérieurs.
Chez le patient en bonne santé, la percussion antérieure de la gros calibre apparaissent plus clairs et plus sonores au niveau
poitrine est symétrique excepté au niveau de la zone immédiate de la zone atteinte (souffle tubaire). De la même façon, un son
ment en latéralité du bord inférieur gauche du sternum où le murmuré (« dites trente-trois, trente-trois »), d'origine laryngée,
ventricule droit provoque une matité ; cette « matité cardiaque » est normalement atténué par le poumon sain, mais sera claire-
disparaît chez les patients en hyperinflation pulmonaire chez qui ment audible à la paroi thoracique au niveau d'une condensa-
la lingula vient recouvrir le cœur (voir fig. 5.5). Un tympanisme tion ou d'une fibrose grâce à la meilleure conduction du son au
net est habituel en cas de pneumothorax ; cependant, le pou- travers du poumon malade.
mon sain étant rempli d'air, la différence entre le poumon normal En cas d'atélectasie pulmonaire en rapport avec une obstruc-
et un pneumothorax peut être assez subtile. Un tympanisme à tion bronchique proximale, les signes diffèrent de ceux d'une
la percussion associé à une absence de murmure vésiculaire simple condensation. Les signes habituels sont une diminution
unilatéral indique un pneumothorax. de l'expansion thoracique, parfois associée à une asymétrie de
la cage thoracique due à la diminution du volume pulmonaire,
une matité à la percussion au niveau du poumon atélectasié
D. Auscultation
et une diminution du murmure vésiculaire et de la résonance
Pour comprendre l'auscultation pulmonaire, il est nécessaire vocale.
de comprendre l'origine des bruits respiratoires. L'arbre tra- Lorsqu'il existe une séparation physique entre le tissu pul-
chéobronchique présente 23 divisions entre la trachée et les monaire et la paroi thoracique par une interposition d'air (pneu-
alvéoles. Il en résulte une augmentation exponentielle du nombre mothorax) ou de liquide (pleurésie ou épanchement pleural
de voies aériennes et donc de la section transversale cumulée liquidien), la conduction du son est fortement diminuée, et le
des voies aériennes se dirigeant vers les alvéoles. Durant un murmure vésiculaire est généralement aboli. Ces deux causes
effort respiratoire maximal, la même capacité vitale (environ d'absence de murmure vésiculaire sont facilement distinguables
5 litres d'air chez l'adulte sain) passe au travers de chaque divi- par la percussion qui sera tympanique en cas de pneumothorax
sion des voies aériennes. Au niveau du larynx et de la trachée, et complètement mate en cas d'épanchement liquidien.
ce volume passe entièrement au travers d'une section transver-
sale relativement petite de quelques cm2 et, par conséquent, Utilisation du stéthoscope
le flux d'air rapide cause des turbulences avec vibration de la Assurez-vous de porter votre stéthoscope en plaçant les écou-
paroi des voies aériennes, ce qui génère un bruit. Dans les voies teurs vers l'avant afin qu'ils soient alignés avec votre conduit
aériennes distales, la très grande superficie des sections trans- auditif. Le murmure vésiculaire normal étant relativement peu
versales cumulées des multitudes de bronchioles permet aux bruyant, la grande surface offerte par le diaphragme du sté-
5 litres d'air de passer facilement à faible débit ; ainsi, le flux thoscope est habituellement la mieux adaptée à l'auscultation
est normalement presque insonore. Le bruit trachéobronchique thoracique. Les deux exceptions les plus fréquentes sont :
« rude » généré par les voies aériennes supérieures peut être
• les patients avec une paroi thoracique cachectique et des
entendu en écoutant avec le diaphragme du stéthoscope appli-
espaces intercostaux creux où il serait impossible d'obtenir
qué sur le larynx (essayez sur vous-même).
un contact à plat complet entre la peau et le diaphragme ;
La plupart des sons entendus à l'auscultation pulmonaire
• les patients avec une pilosité abondante au niveau de
proviennent des voies aériennes de gros calibre, mais sont
la poitrine, pour lesquels le frottement des poils avec le
étouffés et amortis par leur passage au travers du tissu alvéo-
diaphragme pourrait facilement être confondu avec des
laire rempli d'air qui les recouvre ; ceci, associé à la petite
crépitants alvéolaires. Dans ces situations, utilisez la cloche
contribution des voies aériennes de taille moyenne, résulte
du stéthoscope afin d'écouter le murmure vésiculaire.
en un bruit respiratoire « normal » à l'auscultation pulmonaire,
plus habituellement appelé « murmure vésiculaire ». Lorsqu'une
Murmure vésiculaire
condensation apparaît dans un poumon sain (en lien avec une
pneumopathie ou un épaississement) ou une rigidité (dans le Comme pour la percussion, l'intensité et les caractéristiques du
cas d'une fibrose), la conduction du son est augmentée, et les murmure vésiculaire sont très variables d'un individu à l'autre en
bruits trachéobronchiques générés par les voies aériennes de fonction de l'épaisseur, de la musculature et de l'épaisseur de la
94 • SYSTÈME RESPIRATOIRE
graisse sous-cutanée de la paroi thoracique. Par conséquent, le sécrétions purulentes dans les voies aériennes comme en cas
caractère symétrique des sons est un élément clé. de pneumopathie ou de dilatation des bronches. Des crépitants
inspiratoires sont également souvent entendus dans des zones
où le poumon est mal déployé comme au niveau d'un épan-
Étapes de l'examen chement pleural.
Un frottement pleural est un son rauque et grinçant survenant
• Auscultez les apex, en comparant droite et gauche, en à chaque inspiration, relativement superficiel, juste en dessous
utilisant la cloche du stéthoscope lorsque le diaphragme du stéthoscope, comme deux feuillets d'un papier de verre
ne permet pas un contact à plat avec la peau. frottant l'un contre l'autre. Il indique une inflammation pleurale,
• Demandez au patient de respirer lentement et généralement due à une infection. Il est souvent accompagné
profondément de façon répétée avec la bouche ouverte. d'une douleur thoracique de type pleurale.
Auscultez la paroi thoracique antérieure du haut vers le
bas, en comparant toujours en miroir la droite et la gauche
Résonance vocale
avant de passer à un niveau inférieur.
• Utilisez la même séquence d'examen que pour la Le murmure vésiculaire révèle normalement la présence d'une
percussion (voir fig. 5.16B, C). Ne perdez pas de temps à condensation ou d'une fibrose (bruits trachéobronchiques/
écouter plusieurs cycles respiratoires à chaque localisation, souffle tubaire) ou d'un épanchement d'air ou de liquide
sauf si vous suspectez une anomalie que vous cherchez à (absence de murmure vésiculaire). Ces signes peuvent être
confirmer. confirmés en demandant au patient de générer des sons laryn-
• Notez si le murmure vésiculaire est doux et assourdi, gés (« S'il vous plait, dites trente-trois, trente-trois à chaque fois
absent ou sonore et dur (bruits trachéobronchiques que je change mon stéthoscope de position ») et en écoutant
comme ceux entendus au niveau du larynx). Recherchez au niveau de la paroi thoracique avec la même séquence que
et notez toute asymétrie ainsi que les bruits surajoutés (voir pour les bruits respiratoires. Les bruits parlés sont assourdis et
ci-dessous), en déterminant lequel des côtés est anormal. étouffés au niveau d'un poumon sain, mais seront clairement
• Auscultez la paroi thoracique latérale sur la ligne médio- audibles et sonores au stéthoscope en cas de condensation
axillaire, en comparant de nouveau droite et gauche avant ou de poumon fibreux cicatriciel. De la même façon que pour
de changer de niveau. le murmure vésiculaire, la résonance vocale est absente ou for-
tement diminuée en cas de pneumothorax ou d'épanchement
pleural.
La « pectoriloquie aphone » peut être utilisée pour confirmer
Bruits surajoutés
ces mêmes modifications de la conduction du son. Une voix
Il existe classiquement trois types de bruits surajoutés : les sibi- murmurée est étouffée voire inaudible sur un poumon sain à
lants, les crépitants et les frottements. Le sibilant est un son l'auscultation, mais peut être entendue en cas de poumon
musical de sifflement accompagnant le flux d'air, et provient condensé ou cicatriciel.
généralement de petites voies aériennes rétrécies. Il est le plus
souvent expiratoire du fait du rétrécissement dynamique des
voies aériennes en expiration, mais peut également survenir
en inspiration. Généralement, plusieurs sibilants sont entendus
4. Interprétation des résultats
simultanément (sibilants polyphoniques) ; ce signe est classique
en cas d'asthme, de bronchite et d'exacerbation de BPCO. Rassemblez l'ensemble des éléments et signes positifs que
Un sibilant isolé présent de façon constante à chaque respira- vous avez constatés. En associant l'anamnèse à l'examen phy-
tion et ne s'améliorant pas après la toux suggère un obstacle sique, vous devriez avoir une idée générale de la catégorie de
bronchique fixe, ce qui peut être un signe important de cancer pathologie respiratoire à laquelle vous êtes confronté. Comme
sous-jacent. pour chaque organe, estimez au fur et à mesure les types de
Les crépitants accompagnant une inspiration profonde sont maladies les plus probables et en quoi ceux-ci modifient la pré-
considérés comme en lien avec l'ouverture brutale des petites sentation. Cette approche est résumée dans l'encadré 5.6.
voies aériennes mais peuvent également indiquer la présence de
sécrétions dans les voies aériennes ou une fibrose pulmonaire
sous-jacente. Chez une personne en bonne santé, la compres- 5. Explorations complémentaires
sion des bases pulmonaires par la gravité provoque souvent la
présence de quelques crépitants lors des premières inspirations Le choix des explorations adaptées dépend des problèmes
profondes ; ils n'ont aucune signification pathologique. Les cré- cliniques révélés par l'anamnèse et l'examen physique. Les
pitants persistants après quelques inspirations profondes et ne explorations sont coûteuses et peuvent comporter des risques
disparaissant pas après une petite toux volontaire sont patho- de complications ; il vous faut donc choisir les plus à même de
logiques. Ils sont qualifiés de « fins », ce qui correspond à de distinguer les diagnostics les plus probables et donner la prio-
nombreux crépitants doux, ou de « gros » en cas de crépitants rité aux diagnostics les plus décisifs. Au cours des pathologies
gras ayant tendance à changer à chaque inspiration. Une pluie respiratoires, l'imagerie des poumons est fondamentale, mais il
de crépitants fins durant l'inspiration, ressemblant au bruit fait est également important de réaliser des explorations fonction-
par un ruban Velcro® que l'on détache (ou au bruit de pas sur nelles respiratoires afin de distinguer les maladies obstructives
la neige), est caractéristique d'une fibrose interstitielle pulmo- des voies aériennes des pathologies restrictives observées au
naire et sont prédominants au niveau des bases en postérieur cours de nombreuses maladies du parenchyme, et de quantifier
et sur les côtés. Des crépitants fins sont également entendus la sévérité de l'atteinte. Un résumé des explorations de première
en cas d'œdème pulmonaire et dans certaines pneumopathies intention adaptées aux types de tableaux respiratoires est pro-
virales. Les gros crépitants surviennent généralement en cas de posé dans l'encadré 5.7.
5. Explorations complémentaires • 95
Encadré 5.6 Catégories de pathologies respiratoires et signes associés à l'anamnèse et l'examen physique
Catégorie de pathologie respiratoire Signes évocateurs à l'anamnèse Signes évocateurs à l'examen physique
Infection Fièvre
Bronchite aiguë Sibilants, toux, crachats Sibilants
Exacerbation de BPCO Dyspnée aiguë sur chronique Hyperinflation pulmonaire
Pneumopathie Douleur pleurale, crachats couleur rouille, frissons Si lobaire, matité à la percussion et souffle
tubaire 5
Tumeur maligne Début insidieux, perte de poids, douleur ou toux Adénopathies cervicales, hippocratisme digital,
persistante signes d'atélectasie pulmonaire ou lobaire
± épanchement
Fibrose pulmonaire Dyspnée d'aggravation progressive Tachypnée, crépitants fins des bases à
l'inspiration, cyanose
Épanchement pleural Dyspnée d'aggravation progressive Matité basale unilatérale et diminution du
murmure vésiculaire
Embolie pulmonaire
Massive Dyspnée sévère brutale Murmure vésiculaire normal
Moyenne Épisodes de douleur thoracique, hémoptysies Frottement pleural, œdème d'un membre
inférieur en cas de TVP, crépitants en cas
d'infarctus pulmonaire
Minime Dyspnée d'aggravation progressive Augmentation de la PVJ, soulèvement
ventriculaire droit, B2 pulmonaire bruyant
Asthme Atopie, rhinite allergique, propriétaire d'animaux, Sibilants polyphoniques expiratoires, eczéma
sibilants fluctuants, troubles du sommeil
BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; PVJ : pression veineuse jugulaire ; TVP : thrombose veineuse profonde.
(Suite)
96 • SYSTÈME RESPIRATOIRE
BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; CRP : protéine C réactive ; EFR : explorations fonctionnelles respiratoires ; EP : embolie pulmonaire ;
IgE : immunoglobulines E ; NFS : numération formule sanguine ; TDM : tomodensitométrie.
Mme Fleurie, 55 ans, se présente en consultation de pneumologie avec des symptômes de toux et de sifflements.
Réalisez l'anamnèse
• Présentez-vous et lavez-vous les mains.
• À l'aide d'une question ouverte, demandez-lui pourquoi elle s'est présentée en consultation de pneumologie.
• Explorez chaque symptôme signalé par la patiente :
• Toux :
– Début, durée ?
– Caractère productif ? Si oui, caractérisez le volume, la couleur des crachats et la présence de sang
– Facteurs déclenchants ? Cela a-t-il débuté au cours d'une infection respiratoire ? Est-ce provoqué par l'effort ou un environnement particulier ?
– Horaires – caractère nocturne (évocateur d'asthme ou de reflux) ?
– Lien avec les inhibiteurs de l'enzyme de conversion ?
• Sifflement :
– Qu'est-ce que la patiente entend par « sifflement » ?
– À quel moment surviennent-ils – la nuit ou à l'effort ?
– Facteurs déclenchants – infection, environnement, contact avec les animaux, poussière, bêta-bloquants ?
– Facteurs améliorants – traitements inhalés ?
– Symptômes respiratoires associés – essoufflement, douleur thoracique, fièvre/frissons, perte de poids.
• Recherchez des antécédents de pathologies respiratoires, en particulier d'asthme ou de sibilants dans l'enfance, de rhinite allergique ou des
antécédents de traitements ou d'hospitalisations pour des motifs respiratoires.
• Recherchez des antécédents de maladies non respiratoires ; par exemple un eczéma (évocateur d'atopie), une hypertension artérielle ou un angor
(sous bêta-bloquant), d'autres antécédents importants.
• Notez tous les traitements prescrits dont les inhalateurs et nébuliseurs, la consommation de drogues.
• Recherchez des allergies.
• Notez son mode de vie : tabagisme, profession, contact avec les animaux.
• Établissez s'il existe des antécédents familiaux de maladie respiratoire (y compris d'asthme).
• Demandez à la patiente si elle a d'autres sources d'inquiétude.
• Remerciez la patiente et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
Mme Fleurie est une cuisinière de 55 ans qui présente une histoire de respiration sifflante évoluant depuis 6 mois perturbant son sommeil, associée à une
toux sèche. Ses symptômes varient d'un jour à l'autre et rendent parfois la montée d'escaliers difficile. Elle fume 10 cigarettes par jour et a un tabagisme
évalué à 20 paquets-année.
Proposez des hypothèses diagnostiques
Le diagnostic le plus probable est un asthme (variabilité, symptômes nocturnes) et le principal diagnostic différentiel est une bronchopneumopathie
chronique obstructive.
Proposez des examens de première intention
Explorations fonctionnelles respiratoires avec test de réversibilité, un suivi journalier du débit expiratoire de pointe (peak-flow), une radiographie thoracique,
une numération formule sanguine à la recherche d'une hyperéosinophilie, un dosage des immunoglobulines sériques, et des tests cutanés allergiques.
• Examinez les mains : hippocratisme digital, taches de tabac, amyotrophie des mains.
• Recherchez un astérixis ou un flapping.
• Comptez discrètement sa fréquence respiratoire.
• Examinez le visage : anémie, cyanose, syndrome de Claude Bernard-Horner et syndrome cave supérieur.
• Examinez le cou : pression veineuse jugulaire, déviation de la trachée et distance cricoïdosternale.
• Examinez la paroi thoracique antérieure :
• palpation : choc de pointe, soulèvement ventriculaire droit, expansion de la cage thoracique supérieure et inférieure ;
• percussion : en comparant droite et gauche du haut vers le bas, puis en axillaire ;
• auscultation : inspirations profondes, en comparant droite et gauche, du haut vers le bas, puis en axillaire. Répétez la même séquence en
recherchant la résonance vocale. 5
• Examinez la paroi thoracique postérieure :
• demandez au patient de s'asseoir, penché en avant ;
• inspectez le dos à la recherche de cicatrices, d'une asymétrie, etc. ;
• palpation : ganglions cervicaux ; expansion thoracique inférieure et supérieure ;
• percussion : demandez au patient de replier ses bras en avant afin d'écarter les omoplates, comparez droite et gauche du haut vers le bas ;
• auscultation : inspirations profondes, en comparant droite et gauche, du haut vers le bas, puis en axillaire. Répétez la même séquence en
recherchant la résonance vocale.
• Recherchez des œdèmes prenant le godet au niveau des lombes et du sacrum.
• Remerciez le patient et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
Le patient a un hippocratisme digital, une augmentation de la fréquence respiratoire, et une diminution de l'expansion thoracique en base droite associée à une
matité à la percussion et une abolition du murmure vésiculaire. Il existe également une petite cicatrice cutanée suggérant une ponction pleurale antérieure.
Proposez des hypothèses diagnostiques
Ces éléments sont compatibles avec un volumineux épanchement pleural droit.
(À l'écart du lit du patient) Un épanchement unilatéral important avec un hippocratisme digital fait évoquer une néoplasie sous-jacente. Les
diagnostics différentiels incluent un empyème chronique et une pleurésie tuberculeuse.
Proposez des examens de première intention
Une radiographie thoracique confirmera l'épanchement et montrera possiblement une tumeur sous-jacente. L'échographie peut être utile pour confirmer un
épanchement liquidien, le localiser et guider une ponction. Une ponction pleurale diagnostique permettra des analyses cytologiques, bactériologiques et biochimiques.
A
1. Anatomie et physiologie
Le système gastro-intestinal comprend le tube digestif, le foie,
la vésicule et les voies biliaires, le pancréas et la rate. Le tube
digestif s'étend de la bouche jusqu'à l'anus et comprend l'œso- 1 3
phage, l'estomac, l'intestin grêle (incluant le duodénum, le jéju-
num et l'iléon), le côlon (ou gros intestin) et le rectum (fig. 6.1 et 2 4
6.2 et encadré 6.1).
L'abdomen peut être divisé en neuf régions par l'intersection
entre deux lignes verticales et deux horizontales (fig. 6.1C).
2. Anamnèse 1 Foie
2 Vésicule biliaire
3 Rate
4 Pancréas
A. Symptômes fréquents 7
6
12
8
Symptômes buccaux
Une mauvaise haleine (halitose) due à une infection gingivale,
1 Œsophage 7 Cæcum
dentaire ou pharyngée et une sécheresse buccale (xérostomie) 2 Estomac 8 Appendice (en position pelvienne)
sont des symptômes buccaux fréquents. Rarement, le patient 3 Antre gastrique, pylore 9 Côlon ascendant (ou côlon droit)
se plaint d'une perturbation du goût (dysgueusie) ou d'un mau- 4 Duodénum 10 Côlon transverse
vais goût dans la bouche (cacogueusie). 5 Angle duodénojéjunal (de Treitz) 11 Côlon descendant (ou côlon gauche)
6 Iléon terminal 12 Côlon sigmoïde
Anorexie et perte de poids
L'anorexie se définit comme une perte de l'appétit et/ou un C
manque d'intérêt pour la nourriture. En plus d'interroger le
patient sur son appétit, demandez-lui : « Appréciez-vous tou- HD E HG
jours autant de manger ? »
Une perte de poids isolée est rarement associée à une patho- RO
logie organique sévère. Demandez au patient combien de poids FD FG
il a perdu et en combien de temps. Une perte de moins de 3 kg
sur les six derniers mois est rarement significative. Une perte de
FID FIG
poids est généralement le résultat d'une réduction des apports
H
énergétiques et non d'une augmentation des dépenses. Elle
n'est pas spécifique des maladies GI mais sera souvent pré-
sente, notamment en cas de pathologie maligne ou de maladie
hépatique. Les besoins énergétiques quotidiens sont d'environ Fig. 6.1 Anatomie de surface. A Positions anatomiques à la
2 500 kcal chez l'homme et 2 000 kcal chez la femme. La baisse surface abdominale des organes abdominaux en dehors du tube
des apports énergétiques est généralement en lien avec un digestif. B Positions anatomiques à la surface abdominale du tube
régime, une perte d'appétit, une malabsorption ou une malnu- digestif. C Quadrants de l'abdomen. E : épigastre ; FD : flanc droit ;
trition. Une augmentation des dépenses énergétiques survient FG : flanc gauche ; FID : fosse iliaque droite ; FIG : fosse iliaque gauche ;
en cas d'hyperthyroïdie, de fièvre ou d'adoption d'un mode H : hypogastre ; HD : hypocondre droit ; HG : hypocondre gauche ;
de vie plus consommateur en énergie. Un déficit calorique net RO : région ombilicale.
de 1 000 kcal par jour est responsable d'une perte approxima-
tive de 1 kg par semaine (7 000 kcal ≈ 1 kg de graisse). Une jours est évocatrice de pertes liquidiennes résultant de vomis-
perte de poids plus importante dans les premières phases d'un sements, d'une diarrhée ou de la prise de diurétiques (1 litre
régime restrictif est généralement liée aux pertes hydrosodées d'eau = 1 kg). Vérifiez les poids actuel et antérieur du patient afin
et à la diminution du stockage hépatique en glycogène, et non de confirmer une perte de poids apparente à l'examen clinique
à une perte de graisse. Une perte rapide de poids en quelques (vêtements flottants, par exemple).
2. Anamnèse • 101
Estomac
Vésicule biliaire
Pancréas
Intestins
Aorte
Rachis B
Fig. 6.3 Pathologies responsables d'une douleur buccale. A Lichen
plan. B Ulcération aphtoïde (flèche).
Côte
Foie • type de douleur : brûlure ;
Glande surrénale gauche • irradiation : vers le haut ;
Rein droit • facteurs favorisants : décubitus dorsal ou penché en avant ;
Fig. 6.2 Tomodensitométrie (TDM) normale de l'abdomen au niveau • symptômes associés :
de L1. • hypersalivation (apparition brutale de liquide dans la
bouche en raison d'un réflexe de salivation consécutif à
Douleur un reflux gastro-œsophagien ou, plus rarement, en cas
d'ulcère gastroduodénal) ;
Douleur buccale • goût acide apparaissant dans la bouche dû au reflux ou
Les causes d'ulcérations des lèvres, de la langue ou de la à la régurgitation.
muqueuse buccale incluent : Lorsque le pyrosis est le principal symptôme, un reflux
• déficits : fer, acide folique, vitamine B12 ou vitamine C ; gastro-œsophagien est le diagnostic le plus probable.
• atteintes dermatologiques, telles que le lichen plan
(fig. 6.3A) ;
Dyspepsie
• chimiothérapies ; La dyspepsie est une douleur ou un inconfort localisé à la partie
• aphtes (fig. 6.3B) ; supérieure de l'abdomen. Elle diffère de l'« indigestion », terme
• stomatites infectieuses ; couramment utilisé par les patients pour des symptômes mal
• maladies inflammatoires chroniques intestinales et la définis de la partie haute du tube digestif.
maladie cœliaque – associées à des ulcérations buccales. Interrogez le patient sur les points suivants :
• site de la douleur ;
Pyrosis et reflux gastro-œsophagien • type de douleur ;
Le pyrosis est une sensation inconfortable de chaleur et de brû- • facteurs aggravants et améliorants, tels que l'alimentation
lure rétrosternale. et les protecteurs gastriques ;
Afin de différencier un pyrosis d'une douleur thoracique car- • symptômes associés : nausées, éructations, ballonnement,
diaque, interrogez le patient sur les caractéristiques suivantes : satiété précoce.
102 • LE SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL
Fig. 6.4 Douleur abdominale. La perception de la douleur abdominale est située en épigastre, péri-ombilical ou hypogastre, selon l'origine embryologique
de l'organe affecté.
cancer colorectal, une maladie diverticulaire ou un ulcère gas- absents au cours d'une maladie intra-abdominale avancée. Les
troduodénal), une rupture d'anévrisme de l'aorte abdominale ou douleurs abdominales en lien avec un syndrome de l'intestin
un infarctus mésentérique. irritable, une diverticulose colique ou un cancer colorectal sont
Une torsion du cæcum ou du sigmoïde (volvulus) se présente généralement associées à des troubles du transit. D'autres
par une douleur abdominale brutale associée à une occlusion signes tels qu'une dyspnée ou des palpitations suggèrent une
intestinale aiguë. origine non digestive (encadré 6.3).
Une hypotension et une tachycardie apparaissant suite à une
Type de douleur
douleur suggèrent une hémorragie ou une infection intra-
Une douleur de colique dure peu de temps (secondes abdominale ; par exemple, un ulcère gastroduodénal, une rup-
ou minutes), disparaît puis revient. Elle provient des organes ture d'un anévrisme aortique ou une grossesse extra-utérine.
creux, comme dans le cas d'une occlusion de l'intestin grêle ou
du côlon, ou de l'utérus pendant le travail. Rythme
6
Les « coliques » hépatiques ou néphrétiques sont mal nom- Durant les une ou deux premières heures suivant une perforation
mées puisque la douleur est rarement à type de colique ; la digestive, un intervalle silencieux peut survenir lorsque la douleur
douleur augmente rapidement jusqu'à un pic et persiste durant abdominale se résout transitoirement. La péritonite chimique
plusieurs heures avant de régresser progressivement. Une dou- initiale peut s'améliorer avant que la péritonite bactérienne ne
leur sourde, permanente, vague et mal localisée est plus typique s'installe. Par exemple, en cas d'appendicite aiguë, la douleur
d'un processus inflammatoire ou d'une infection, comme la sal- est initialement péri-ombilicale (douleur viscérale) et se déplace
pingite, l'appendicite ou la diverticulite (encadré 6.2). ensuite vers la fosse iliaque droite (douleur somatique) lorsque
l'inflammation péritonéale est constituée. En cas de rupture
Irradiations
de l'appendice, une péritonite généralisée peut se développer.
Une douleur irradiant de l'hypocondre droit vers l'épaule ou la Parfois, un abcès appendiculaire localisé peut se former, avec
région interscapulaire peut être le reflet d'une irritation diaphrag- une masse palpable et une douleur de la fosse iliaque droite.
matique, comme dans la cholécystite aiguë (voir fig. 6.5). Une Un changement des caractéristiques des symptômes sug-
douleur lombaire irradiant vers l'aine et les organes génitaux gère que le diagnostic initial était erroné, ou que des complica-
est typique d'une colique néphrétique. Une douleur abdomi- tions sont apparues. En cas d'occlusion intestinale aiguë, une
nale épigastrique irradiant vers le dos, partiellement soulagée modification de la douleur de colique typique vers une douleur
par une position penchée en avant, est évocatrice de pancréa- persistante avec défense abdominale suggère une ischémie
tite. Une douleur abdominale diffuse, ayant tendance à migrer digestive (comme en cas de hernie étranglée, ce qui est alors
secondairement vers la fosse iliaque droite est classique en cas une indication à une prise en charge chirurgicale en urgence).
d'appendicite aiguë. L'association d'une douleur dorsale sévère Une douleur abdominale persistant des heures ou des jours
et d'une douleur abdominale peut indiquer une rupture ou une suggère une atteinte inflammatoire, comme en cas d'appendi-
dissection d'un anévrisme de l'aorte abdominale. cite aiguë, de cholécystite ou de diverticulite.
Encadré 6.4 Caractéristiques cliniques typiques chez un patient avec un « abdomen chirurgical aigu »
Pathologie Histoire Examen clinique
Appendicite aiguë Nausées, vomissements, douleur abdominale péri- Fièvre, défense, contracture ou masse palpable en fosse iliaque
ombilicale migrant en fosse iliaque droite droite, péritonite pelvienne au toucher rectal
Péritonite sur perforation Vomissement initial associé à une douleur aiguë brutale Respiration superficielle avec mouvements abdominaux
d'ulcère gastroduodénal intense, antécédent de dyspepsie, maladie ulcéreuse, minimes, défense ou contracture abdominale, ventre de bois,
traitements par AINS ou corticoïdes distension abdominale et disparition des bruits hydroaériques
Pancréatite aiguë Anorexie, nausées, vomissements, douleur épigastrique Fièvre, ecchymoses péri-ombilicales ou des lombes, défense
intense continue, antécédent d'alcoolisme ou de lithiase
biliaire
épigastrique, contracture variable, bruits hydroaériques diminués
ou absents
6
Rupture d'anévrisme Douleur d'apparition brutale, déchirante, du dos, des Choc et hypotension, masse abdominale pulsatile, sensible,
aortique lombes, abdominale, hypotension et antécédent de maladie pouls fémoraux asymétriques
vasculaire et/ou d'hypertension artérielle
Ischémie mésentérique Anorexie, nausées, vomissements, diarrhée sanglante, Fibrillation atriale, insuffisance cardiaque, pouls périphériques
douleur abdominale continue, antécédents de maladie asymétriques, disparition des bruits hydroaériques, défense ou
vasculaire et/ou d'hypertension artérielle contracture abdominale
Occlusion intestinale Douleur abdominale diffuse à type de colique, nausées, Cicatrices de chirurgies, hernies, masse, distension abdominale,
vomissements et arrêt des matières et des gaz péristaltisme visible, augmentation des bruits hydroaériques
Grossesse extra-utérine Femme non ménopausée ; retard de règles, hypotension, Défense sus-pubienne, ecchymoses péri-ombilicales, douleur
rompue douleur en fosse iliaque unilatérale, douleur pleurétique de et défense au toucher vaginal (sensibilité du col de l'utérus),
l'épaule, pertes vaginales noirâtres gonflement/plénitude du cul-de-sac de Douglas au toucher
vaginal
Maladie inflammatoire Femme jeune sexuellement active, antécédent d'infection Fièvre, pertes vaginales, péritonite pelvienne responsable d'une
pelvienne sexuellement transmissible, geste gynécologique récent, douleur au toucher rectal, défense en hypocondre droit (péri-
grossesse ou utilisation de matériel contraceptif intra-utérin, hépatite), douleur/défense au toucher vaginal (sensibilité du col
règles irrégulières, dyspareunie, douleur abdominale péri- utérin), gonflement/plénitude du cul-de-sac de Douglas au toucher
ombilicale ou pelvienne, douleur du dos, douleur pleurétique vaginal
de l'hypocondre droit (syndrome de Fitz-Hugh-Curtis)
Constipation
Précisez ce que le patient entend par constipation. Utilisez
l'échelle de Bristol (fig. 6.7) pour décrire les selles. La constipation
est une diminution de la fréquence d'évacuation de selles dures.
Interrogez le patient sur :
• le début : ancien ou récent ;
• la fréquence des selles : combien de fois le patient va-t-il à
la selle chaque semaine et combien de temps lui faut-il ?
• la forme des selles ; par exemple petites boules ;
• les symptômes associés, comme une douleur abdominale,
une douleur anale à la défécation ou des rectorragies ;
Fig. 6.6 Distension abdominale en lien avec une ascite. • les traitements pouvant être responsables de constipation.
2. Anamnèse • 107
Un saignement digestif haut abondant peut être responsable • la consommation de drogues illicites ou intraveineuses ;
de l'évacuation de selles pourpres, ou, rarement, de sang frais. • la sexualité ;
• les antécédents de transfusion sanguine ;
Rectorragies • les traitements récents.
Déterminez si le sang paraît mêlé aux selles, juste à la surface
La bilirubine non conjuguée est insoluble et se lie à l'albumine
de selles normales, ou observé sur le papier toilette ou dans la
plasmatique ; elle n'est donc pas filtrée par le glomérule rénal.
cuvette. Un saignement rectal frais (rectorragie) est en géné-
En cas d'ictère lié à une augmentation de la bilirubine non conju-
ral en rapport avec une atteinte du canal anal, du rectum ou
guée, les urines sont de couleur normale (ictère acholurique ;
du côlon. Malgré tout, au cours d'un saignement digestif haut
encadré 6.7).
massif, du sang peut descendre le long de l'intestin sans être
La bilirubine est conjuguée dans le foie pour former le diglu-
altéré, causant une rectorragie. Les causes classiques de rec-
curonide de bilirubine, et excrétée dans la bile, lui donnant sa
torragies comprennent les hémorroïdes, la fissure anale (sang
couleur verte caractéristique. Une augmentation de la bilirubine
sur le papier toilette ou dans la cuvette), la diverticulose colique
conjuguée dans le sang entraîne des urines foncées du fait de
compliquée, le cancer colorectal ou les polypes coliques, les
la présence de diglucuronide de bilirubine. Dans le côlon, la
maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, la colite isché-
bilirubine conjuguée est métabolisée par les bactéries en ster-
mique et les télangiectasies coliques.
cobilinogène et en stercobiline qui contribuent à la couleur mar-
ron des selles. Le stercobilinogène est absorbé par l'intestin et
Ictère excrété dans les urines en urobilinogène, qui est un composant
L'ictère est une coloration jaunâtre de la peau, de la sclère incolore et hydrosoluble.
(fig. 6.8) et des muqueuses due à une hyperbilirubinémie (enca-
dré 6.6). Il n'existe pas de niveau absolu au-delà duquel l'ictère Ictère préhépatique
est détecté, mais, avec un bon éclairage, la plupart des clini- Au cours des troubles hémolytiques, la pâleur liée à l'anémie
ciens détecteront un ictère lorsque le taux de bilirubine dépasse combinée avec l'ictère peut produire un teint de couleur « citron
50 μmol/l (2,92 mg/dl). pâle ». Les selles et les urines sont de couleur normale. Le
Interrogez le patient sur : syndrome de Gilbert est classique et entraîne une hyperbiliru-
• les symptômes associés : douleur abdominale, fièvre, perte binémie non conjuguée. Les taux sériques d'enzymes hépa-
de poids, prurit ; tiques sont normaux et l'ictère reste modéré (bilirubine sérique
• la couleur des selles (normales ou décolorées) et des urines < 100 μmol/l [5,85 mg/dl]), mais augmente en cas de jeûne
(normales ou foncées) ; prolongé ou d'épisode fébrile.
• la consommation d'alcool ;
• les antécédents de voyage et de vaccinations ; Ictère hépatique
Les pathologies hépatobiliaires entraînent une hyperbilirubiné-
mie mixte, à la fois conjuguée et non conjuguée. La bilirubine
conjuguée est responsable de l'aspect marron foncé des urines.
Les selles sont de couleur normale.
Ictère posthépatique/cholestatique
En cas d'obstruction des voies biliaires, la bilirubine conju-
guée dans la bile n'est pas libérée dans le tube digestif, ce qui
entraîne une décoloration des selles. Un ictère obstructif peut
être accompagné d'un prurit (démangeaisons généralisées) dû
aux dépôts sous-cutanés de sels biliaires. Un ictère obstructif
accompagné d'une douleur abdominale est généralement dû
à une lithiase biliaire ; en cas de fièvre et de frissons associés
(triade de Charcot), une angiocholite aiguë est probable. Un
ictère obstructif sans douleur associée est évocateur d'une
Fig. 6.8 Conjonctive jaune dans le cadre d'un ictère. obstruction des voies biliaires d'origine maligne, comme dans
le cholangiocarcinome ou le cancer de la tête du pancréas. Un
ictère obstructif peut être dû une cholestase d'origine intra- ou
Encadré 6.6 Causes classiques d'ictère
Augmentation de production de bilirubine
• Hémolyse (hyperbilirubinémie non conjuguée)
Encadré 6.7 Analyse des selles et des urines au cours
Altération de l'excrétion de bilirubine d'un ictère
• Congénitale : • Cholestase intrahépatique :
• syndrome de Gilbert • traitements Urine Selles
(non conjuguée) • cirrhose biliaire primitive Couleur Bilirubine Urobilinogène Couleur
• Hépatocellulaire : • Cholestase extrahépatique : Bilirubine non Normale – ++++ Normales
• hépatite virale • calculs biliaires conjuguée
• cirrhose • cancer : pancréas,
• médicaments cholangiocarcinome Hépatocellulaire Foncée ++ ++ Normales
• hépatite auto-immune Obstructive Foncée ++++ – Décolorées
2. Anamnèse • 109
Yeux
• Ictère
Abdomen
• Splénomégalie
• Hépatomégalie
(mais le foie peut être petit)
• Circulation veineuse
collatérale
péri-ombilicale
B Leuconychie
Génital
Mains
• Atrophie testiculaire
• Leuconychie
(ongles blancs) (B)
• Érythème palmaire (C)
• Hippocratisme digital
Membres inférieurs
• Œdème
• Diminution de la pilosité
Général
• Pigmentation cutanée
• Diminution de la pilosité
corporelle
C Érythème palmaire • Ecchymoses
Fig. 6.9 Signes d'hépatopathie chronique.
paroi abdominale se déplace vers l'extérieur et le foie ; la rate et aspect en « tête de méduse ». Le nombril peut apparaître bleuté
les reins se déplacent vers le bas. L'ombilic est généralement et distendu du fait des varices ombilicales. En revanche, une
creux. hernie ombilicale correspond à une éversion et une distension
de l'ombilic, impulsive à la toux, qui n'est pas d'origine vas-
Peau culaire. Des veines tortueuses, dilatées, avec un flux sanguin
Chez les patients âgés, des verrues séborrhéiques, allant du se dirigeant vers le haut du corps correspondent à des veines
rose jusqu'au marron noir, et des angiomes cerises (taches de collatérales dues à une obstruction de la veine cave inférieure.
Campbell de Morgan) sont classiques et normaux. Notez les Rarement, une obstruction cave supérieure peut engendrer une
vergetures, les ecchymoses ou les lésions de grattage. dilatation veineuse abdominale de ce type, mais le flux sanguin
se dirigera alors vers le bas.
Circulation veineuse superficielle
Des veines sous-cutanées abdominales anormalement visibles Gonflement abdominal
sont le signe d'une circulation veineuse collatérale évocatrice Un gonflement abdominal diffus peut être dû à une ascite
d'hypertension portale ou d'obstruction de la veine cave. En ou à une occlusion intestinale. Un gonflement localisé peut
cas d'hypertension portale, la recanalisation de la veine ombili- être en lien avec une rétention urinaire, une masse, ou une
cale le long du ligament rond entraîne une dilatation des veines augmentation de volume d'un organe comme le foie. En cas
péri-ombilicales se drainant loin de l'ombilic et donnant un d'obésité, l'ombilic est inhabituellement enfoncé ; en cas
112 • LE SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL
Masse de l'hypocondre
et du flanc gauche :
• Rate ?
Bord
Rate normale non palpée
Se déplace vers la fosse iliaque
droite à l'inspiration
Masse épigastrique Matité à la percussion entre
• Cancer de l'estomac la 9e et la 11e côte sur la ligne
• Cancer du pancréas médio-axillaire
• Anévrisme aortique Crénelée
• Rein ?
Arrondi 6
Hépatomégalie Peut être palpé (normal)
• Un foie palpable n'est pas Se déplace vers le bas en inspiration
toujours augmenté de volume Tympanisme à la percussion
• Percutez toujours le bord supérieur Mobilisable
• Vésicule biliaire palpable
Sensibilité à la palpation
• Péritonite ?
Distension abdominale globale Défense
• Graisse (obésité) Douleur à la décompression
• Liquide (ascite) Absence de bruits hydroaériques
• Gaz (obstruction/iléus) Contracture
• Selles (constipation) • Occlusion ?
• Fœtus (grossesse) Distension, météorisme abdominal
Bruits hydroaériques exagérés
Péristaltisme visible
Masse en fosse iliaque droite : Masse en fosse iliaque gauche
• Cancer du cæcum • Cancer du côlon sigmoïde
• Maladie de Crohn • Constipation
• Abcès appendiculaire • Masse diverticulaire
Fig. 6.12 Anomalies palpables de l'abdomen.
Hépatomégalie Percussion
Rebord costal
Rebord costal
6
Bord hépatique
Pointe de rate
Hépatomégalie
minime Splénomégalie
Hépatomégalie modérée
modérée
Hépatomégalie Splénomégalie
importante importante
A B
Fig. 6.15 Caractéristiques d'une augmentation progressive du volume du foie et de la rate. A Direction prise par l'augmentation de la taille du foie.
B Direction prise par l'augmentation de la taille de la rate. La rate se déplace vers le bas et le milieu à l'inspiration.
Encadré 6.11 Classification des encéphalopathies Encadré 6.12 Différencier une rate palpable du rein
hépatiques (West Haven) gauche
Stade État de conscience Élément de distinction Rate Rein
0 Pas de changement de personnalité ou du comportement Masse de forme régulière Plus probable Des reins polykystiques
Pas d'astérixis (flapping tremor) et lisse sont des masses
1 Trouble de la concentration et des capacités d'attention bilatérales irrégulières
Troubles du sommeil, dysarthrie Masse descendant en Oui, se déplace Oui, se déplace
Euphorie ou dépression inspiration superficiellement en profondeur et
Astérixis présent et en diagonale verticalement
2 Léthargie, somnolence, apathie ou agressivité Encoche palpable sur son Oui Non
Désorientation, comportement inapproprié, dysarthrie bord antérosupérieur
3 Confusion et désorientation, comportement bizarre Masse palpable bilatérale Non Parfois, par exemple
Somnolence ou stupeur reins polykystiques
Astérixis généralement absent
Percussion tympanique Non Parfois
4 Coma sans réponse aux ordres oraux au niveau de la masse
Réponse minime ou absente aux stimuli douloureux
Masse s'étendant Parfois Non (excepté en cas de
au-delà de la ligne reins en fer à cheval)
Source : Conn HO, Leevy CM, Vlahcevic ZR, et al. Comparison of lactulose and neomycin
in the treatment of chronic portal-systemic encephalopathy. A double blind controlled
médiane
trial. Gastroenterology 1977 ; 72(4) : 573. Reproduit avec l'autorisation de Elsevier Inc. Encoche palpable sur son Oui Non
bord médial
supplémentaires d'encéphalopathie qui peut être classée sera en faveur d'une obstruction extrahépatique, comme
(encadré 6.11). un cancer du pancréas ou, très rarement, d'une lithiase
Un tympanisme en regard du 5e espace intercostal droit est biliaire (signe de Courvoisier). En cas de vésicule biliaire
en faveur d'une hyperinflation pulmonaire ou parfois de l'inter- lithiasique, celle-ci peut être douloureuse mais impalpable
position du côlon transverse entre le foie et le diaphragme (signe du fait d'une fibrose de la paroi vésiculaire (vésicule
de Chilaiditi). scléro-atrophique).
Chez un patient avec une douleur de l'hypocondre
droit, recherchez un signe de Murphy (voir encadré 6.9) ;
sa positivité augmente modérément la probabilité d'une Splénomégalie
cholécystite aiguë. Une augmentation de volume palpable Le volume de la rate doit tripler avant de devenir palpable ; une
de la vésicule est rare et se caractérise par une forme glo- rate palpable est donc toujours le signe d'une splénomégalie.
buleuse. Elle résulte soit d'une obstruction du canal cys- Elle descend alors en dessous du rebord costal inférieur gauche
tique, du fait d'une mucocèle ou d'un empyème biliaire, vers le bas et en médial vers l'ombilic (fig. 6.15B). Une encoche
soit d'une obstruction de la voie biliaire principale avec un caractéristique peut être palpable vers le point médian de son
canal cystique perméable, comme en cas de cancer du bord principal, pouvant aider à la différencier d'une néphromé-
pancréas. Chez un patient ictérique, une vésicule palpable galie gauche (encadré 6.12).
116 • LE SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL
A B
Fig. 6.16 Palpation de la rate. A Palpation initiale du bord splénique en se déplaçant en diagonale de l'ombilic vers l'hypocondre gauche. B Si la rate
est impalpable par la méthode indiquée en A, utilisez votre main gauche pour tirer la cage thoracique vers l'avant et soulever la rate, ce qui la rend plus
susceptible d'être palpable par la main droite.
6
A B C
Fig. 6.17 Percussion à la recherche d'une ascite. A et B Percutez vers les flancs à la recherche du passage d'un tympanisme à une matité. C Puis
demandez au patient de se tourner du côté opposé. En cas d'ascite, la percussion devient alors tympanique.
Épine iliaque
antéro-
supérieure Orifice
inguinal
profond
Ligament Orifice
inguinal inguinal
superficiel
Symphyse Cordon
pubienne spermatique
Artère
fémorale
Veine
fémorale
Fig. 6.20 Hernie inguinale droite.
Sac herniaire
Étapes de l'examen Contenu du sac
recouvert
(intestin grêle
• Examinez l'aine du patient en position debout. dans cet exemple) de péritoine
• Inspectez les canaux fémoraux et inguinaux et le scrotum
à la recherche de toute masse ou de tout bombement.
• Demandez au patient de tousser ; recherchez un caractère
pulsatile à la toux au niveau des canaux fémoraux et Fig. 6.21 Hernie : structure anatomique.
inguinaux et du scrotum.
• Identifiez les rapports anatomiques entre la tuméfaction, Une hernie inguinale directe se forme au niveau d'une zone de
l'angle du pubis et le ligament inguinal afin de distinguer faiblesse musculaire au niveau de la paroi postérieure du canal
une hernie inguinale d'une hernie crurale. inguinal et descend rarement jusqu'au scrotum. Ces hernies sont
• Palpez l'orifice inguinal superficiel et le long du canal plus fréquentes chez les hommes et femmes âgés (fig. 6.20).
inguinal à la recherche d'une faiblesse musculaire Une hernie crurale se projette au travers de l'anneau fémoral
(toucher scrotal). Demandez au patient de tousser afin de (anneau crural) et dans le canal fémoral. Les hernies inguinales
rechercher une pulsatilité à la toux. sont palpables au-dessus et de façon médiale par rapport à
• Demandez à présent au patient de s'allonger et l'angle du pubis. Les hernies crurales sont palpables en des-
déterminez si la hernie se réduit spontanément. sous du ligament inguinal et de façon latérale par rapport à
• Dans ce cas, appuyez avec deux doigts au niveau de l'angle du pubis.
l'orifice inguinal profond au niveau du point médio-inguinal Le contenu d'une hernie réductible peut être replacé dans
et demandez au patient de tousser ou de se lever pendant la cavité abdominale, spontanément ou par une manipulation ;
que vous maintenez une pression à ce niveau. Si la hernie dans le cas contraire, la hernie est irréductible. Une hernie
réapparaît, il s'agit d'une hernie directe. Si ce geste empêche abdominale est recouverte d'un sac péritonéal et le collet de la
sa réapparition, il s'agit d'une hernie inguinale indirecte. hernie est une zone classique de compression de son contenu
• Examinez le côté opposé afin d'éliminer la possibilité d'une (fig. 6.21). Si la hernie contient du tube digestif, une occlusion
hernie controlatérale asymptomatique. peut survenir. Si la hernie est étranglée, la vascularisation de
Une hernie inguinale indirecte (ou oblique externe) est une son contenu (intestin ou omentum) est limitée. Dans ce cas, la
tuméfaction passant par l'orifice inguinal profond et suivant le tuméfaction est tendue, douloureuse et non impulsive à la toux.
trajet du canal inguinal. Elle peut s'étendre au-delà de l'orifice Il peut exister une occlusion digestive et, plus tard, des signes
inguinal superficiel et descendre dans le scrotum. Les hernies de sepsis ou de choc. Une hernie étranglée est une urgence
indirectes représentent 85 % de l'ensemble des hernies et sont chirurgicale qui, sans traitement, entraînera un infarctus intesti-
plus fréquentes chez les hommes jeunes. nal et une péritonite.
3. Examen physique • 119
D. Toucher rectal
L'examen digital du rectum est important (encadré 6.15). Ne
l'évitez pas sous prétexte que vous ou votre patient trouvez
cela désagréable. Cependant, le consentement oral du patient
est nécessaire et il devrait être réalisé en présence d'une tierce
personne.
Le rectum normal est habituellement vide et à paroi lisse,
avec le coccyx et le sacrum sur sa face postérieure. Chez Fig. 6.23 Toucher rectal. Méthode correcte d'insertion de l'index pour un
toucher rectal.
l'homme, la face antérieure du rectum est en rapport, de bas
en haut, avec l'urètre membraneux, la prostate et la base de
la vessie. La prostate normale est lisse et ferme, avec deux
lobes latéraux et un sillon médian. Chez la femme, la face • Recherchez des lésions de la peau, des hémorroïdes
antérieure du rectum est en rapport avec le vagin et le col de externes, une fissure ou une fistule anale.
l'utérus. La limite supérieure du canal anal est définie par le • Utilisez un lubrifiant à appliquer sur le bout de votre index.
muscle puborectal, qui est facilement palpable et se contracte • Placez la pulpe de votre index sur la marge anale et
de façon réflexe à la toux ou par la contraction volontaire du appliquez une pression légère sur le sphincter afin de
patient. Au-delà du canal anal, le rectum suit la courbure du pousser votre doigt doucement au travers du canal anal
sacrum, en arrière et vers le haut. vers le rectum (fig. 6.23).
Un spasme du sphincter anal externe est fréquent chez • En cas de spasme anal, demandez au patient d'inspirer
les patients anxieux. S'il est associé à une douleur localisée, profondément et de se relâcher. Si besoin, utilisez un
il est probablement dû à une fissure anale (déchirement de la anesthésique local en suppositoire ou en gel avant
muqueuse). Si vous suspectez une fissure anale, donnez au de réessayer. Si la douleur persiste, un examen sous
patient un antalgique topique par suppositoire 10 minutes avant anesthésie générale peut parfois être nécessaire.
l'examen afin de réduire la douleur et les spasmes et de favori- • Demandez au patient de serrer votre doigt avec les
ser la bonne réalisation de l'examen. muscles anaux et notez toute faiblesse de la contraction
sphinctérienne.
• Palpez systématiquement toutes les parois du rectum ;
Étapes de l'examen notez toute anomalie et examinez toute masse éventuelle
• Expliquez ce que vous allez faire, pourquoi cela est (fig. 6.24). Notez le pourcentage de la circonférence rectale
nécessaire et demandez la permission de le faire. touché par la maladie et la distance à l'anus.
Expliquez au patient que l'examen peut être inconfortable • Identifiez le col de l'utérus chez la femme et la prostate
mais ne devrait pas être douloureux. chez l'homme ; évaluez la taille, la forme et la consistance
• Proposez la présence d'une tierce personne ; notez le refus et notez toute sensibilité ou douleur.
éventuel du patient. Notez le nom de la tierce personne. • Si le rectum est rempli de matières fécales et que vous
• Positionnez le patient en position latérale gauche avec les avez un doute sur l'existence d'une masse, répétez
fesses au bord du lit, les genoux repliés sur la poitrine et l'examen après que le patient a déféqué.
les talons à distance du périnée (fig. 6.22). • Retirez doucement votre doigt. Examinez la couleur des
• Mettez des gants et examinez la peau autour de l'anus, en selles et la présence de sang ou de glaires sur le gant
utilisant une source de lumière efficace. (encadré 6.16).
120 • LE SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL
A B C D
Fig. 6.24 Examen du rectum. A et B Insérez votre doigt, puis faites une rotation avec votre main C L'élément le plus proéminent chez la femme est le
col de l'utérus. D L'élément le plus proéminent chez l'homme est la prostate.
A B
Fig. 6.25 Pancréatite aiguë. A Ecchymoses des flancs (signe de Grey-Turner). B Ecchymoses péri-ombilicales (signe de Cullen).
4. Explorations complémentaires • 123
A
B
C
Fig. 6.26 Radiographie standard des maladies gastro-intestinales.
A Poche d'air sous-diaphragmatique (pneumopéritoine) sur une
radiographie thoracique due à une perforation d'ulcère duodénal. B
B Dilatation des anses grêles due à une occlusion intestinale aiguë. Fig. 6.28 Fibroscopie œso-gastro-duodénale. A Ulcère gastrique.
C Boucle dilatée du côlon dans un contexte de volvulus du sigmoïde. B Varices gastriques.
124 • LE SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL
M. Debove est un homme de 29 ans présentant une anorexie évoluant depuis 6 mois, une perte de 7 kg, une douleur abdominale et une diarrhée (selles
liquides). Il a eu une appendicectomie il y a 4 mois suite à une douleur sévère en fosse iliaque droite.
Examinez son système digestif
• Présentez-vous au patient et lavez-vous les mains.
• Commencez par une inspection générale : condition physique, signes de déshydratation, fièvre, pâleur.
• Inspectez les mains : érythème palmaire, hippocratisme digital, leuconychie, koïlonychie, taches de tabac, gonflement des articulations des doigts ou
des poignets.
• Inspectez le visage : signes d'anémie (pâleur, stomatite angulaire), gonflement des lèvres, aphtes buccaux.
• Inspectez la peau : érythème noueux ou pyoderma gangrenosum.
• Inspectez l'abdomen : cicatrices de laparotomie ou fistules cutanées.
• Palpez la fosse iliaque droite à la recherche d'une douleur ou de la présence d'une masse ferme non douloureuse.
• Proposez d'examiner la marge anale pour détecter la présence d'une coloration bleu foncé, d'acrochordons (excroissances bénignes de la peau), de
fissures, fistules ou ulcérations anales.
• Remerciez le patient et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
Cet homme de 29 ans a une anamnèse associant une perte de poids et une diarrhée. Il semble peu altéré mais est assez mince. Il présente une cicatrice
d'appendicectomie récente, une légère sensibilité péri-ombilicale et de la fosse iliaque gauche, ainsi que des bruits hydroaériques normaux.
Proposez des hypothèses diagnostiques
Les hypothèses diagnostiques sont la maladie de Crohn et le syndrome de l'intestin irritable.
Proposez des explorations complémentaires
Numération formule sanguine, protéine C réactive, bilan hépatique, urée, créatinine, ionogramme sanguin, bilan martial, vitamine B12 et folates, coloscopie
totale avec iléoscopie, entéro-IRM, calprotectine fécale.
4. Explorations complémentaires • 125
M. Allard est un homme de 61 ans, ancien commercial retraité, présentant une asthénie et une perte de poids s'aggravant progressivement depuis
4 mois. Il y a 2 semaines, il a remarqué que ses urines étaient foncées et ses selles décolorées. Ses proches ont remarqué que ses yeux étaient devenus
jaunes. Il avait l'habitude de consommer 1 litre de whisky par jour depuis 5 ans, même s'il a essayé d'arrêter récemment. Il consomme actuellement une
bouteille de whisky tous les 3 jours.
Veuillez examiner l'abdomen du patient
• Présentez-vous et lavez-vous les mains.
• Sauf indication contraire, procédez à un examen périphérique avant de vous concentrer sur l'abdomen.
•
•
Débutez par une inspection générale : condition physique, signes de malnutrition, pâleur, ictère.
Inspectez les mains : érythème palmaire, hippocratisme digital, leuconychie, maladie de Dupuytren.
6
• Recherchez un astérixis.
• Inspectez le visage : télangiectasies, xanthélasmas, parotidomégalie bilatérale et ictère (coloration jaune des conjonctives et de la peau).
• Repérez une odeur d'alcool ou de fœtor hépatique.
• Inspectez le cou et le thorax à la recherche d'angiomes stellaires, d'une gynécomastie ; cherchez une diminution de la pilosité axillaire ou thoracique.
• Inspectez l'abdomen à la recherche d'une distension abdominale, d'un ombilic éversé, d'une circulation veineuse collatérale avec un aspect en tête de
méduse (dilatation des veines péri-ombilicales qui vont se drainer loin de l'ombilic) ou de cicatrices de ponctions percutanées récentes.
• Palpez et percutez l'abdomen à la recherche d'une hépatomégalie et d'une splénomégalie.
• Percutez à la recherche d'une matité déclive.
• Auscultez à la recherche d'un souffle hépatique.
• Recherchez des œdèmes des membres inférieurs.
• Remerciez le patient et lavez-vous les mains.
Réalisez une synthèse
Ce patient présente un ictère avec plusieurs angiomes stellaires sur la poitrine et l'abdomen. Il a un gonflement abdominal généralisé avec une matité
déclive et un bord hépatique dur palpable à 2 cm du rebord costal.
Proposez des hypothèses diagnostiques
Les principales hypothèses diagnostiques sont une cirrhose alcoolique, une hépatite chronique et une tumeur hépatique.
Proposez des explorations complémentaires
Bilan hépatique, ferritine, sérologies virales, numération formule sanguine, taux de prothrombine, urée, créatinine, ionogramme sanguin, alpha-
fœtoprotéine, échographie abdominale, fibroscopie œso-gastro-duodénale (à la recherche de varices œsophagiennes).
• Positionnez le patient : allongé et confortablement installé sur la table d'examen. Exposez l'abdomen de la xiphoïde sternale à la symphyse pubienne.
• Inspection : débutez par une inspection globale, puis observez la peau, le visage, le cou et le thorax et enfin l'abdomen.
• Palpation :
• débutez par une palpation légère superficielle à distance des zones douloureuses, puis répétez avec une palpation profonde ;
• décrivez toute masse et déterminez s'il existe une organomégalie.
• Palpation à la recherche d'une hépatomégalie :
• demandez au patient d'inspirer profondément par la bouche et sentez le bord hépatique descendre à l'inspiration ;
• déplacez votre main progressivement vers le haut de l'abdomen, entre chaque inspiration, jusqu'à atteindre le rebord costal ou le bord hépatique.
• Percussion pour confirmer une hépatomégalie :
• demandez au patient de retenir son souffle en expiration complète ;
• percutez à la recherche d'une matité hépatique et mesurez la distance en centimètres avec le rebord costal.
• Palpation et percussion à la recherche d'une splénomégalie :
• débutez avec votre main au niveau de l'ombilic en la déplaçant en diagonale vers le haut et à gauche afin de sentir le bord splénique quand il
descend, et remontez progressivement entre chaque inspiration.
• Recherchez une ascite (matité déclive) :
• percutez de la ligne médiane vers les flancs à la recherche d'une matité ;
• gardez vos doigts en zone de matité sur les flancs et demandez au patient de se tourner du côté opposé, puis percutez de nouveau. Si la zone de
matité est à présent tympanique, il existe une matité déclive.
• Recherchez un signe du flot :
• placez la paume de votre main gauche à plat sur le côté gauche de l'abdomen et donnez de petits coups avec les doigts de la main droite sur le
côté droit de l'abdomen. Si vous sentez des ondulations contre votre main gauche, un flot liquidien est présent.
• Auscultation :
• écoutez à la droite de l'ombilic à la recherche de bruits hydroaériques, au-dessus de l'ombilic pour un souffle aortique, sur les côtés de l'ombilic
pour des souffles de sténose des artères rénales et en regard du foie pour un souffle hépatique.
• Recherchez des œdèmes périphériques.
• Envisagez un examen rectal (si possible en présence d'une tierce personne).
Richard Davenport
Hadi Manji
7
Système nerveux
1. Anatomie et physiologie 128 6. Système sensitif 153
2. Anamnèse 128 A. Anatomie 153
A. Symptômes fréquents 128 B. Symptômes fréquents 154
B. Antécédents 132 C. Modalités sensitives 155
C. Traitements habituels 132 7. Nerfs périphériques 158
D. Antécédents familiaux 132 A. Nerf médian 158
E. Mode de vie 132 B. Nerf radial 158
3. Examen physique 133 C. Nerf ulnaire 158
A. Évaluation du niveau de conscience 133 D. Nerf fibulaire commun (sciatique poplité externe) 158
B. Irritation méningée 133 E. Nerf cutané latéral de la cuisse (fémorocutané) 158
C. Parole 133 8. Interprétation des éléments cliniques 159
D. Dysphasies 134 9. Explorations complémentaires 159
E. Fonction corticale 134 A. Explorations initiales 159
4. Nerfs crâniens 136 B. Explorations spécifiques 159
A. Nerf olfactif (I) 136 10. ECOS exemple 1 : une histoire de céphalée 161
B. Nerfs optique (II), oculomoteur (III), trochléaire (IV)
et abducens (VI) 137 11. ECOS exemple 2 : un tremblement 161
C. Nerf trijumeau (V) 137 12. Séquence d’examen intégré du système nerveux 162
D. Nerf facial (VII) 139
E. Nerf cochléo-vestibulaire (VIII) 141
F. Nerf glossopharyngien (IX) et nerf vague (X) 141
G. Nerf accessoire (XI) 142
H. Nerf hypoglosse (XII) 142
5. Système moteur 143
A. Anatomie 143
B. Posture et démarche 144
C. Inspection et palpation des muscles 146
D. Tonicité/tonus 147
E. Force musculaire 148
F. Réflexes tendineux 150
G. Réflexes primitifs 152
H. Coordination 152
Sillon central
Gyrus précentral
Gyrus postcentral (aire motrice)
(aire sensitive)
Lobe pariétal
Lobe temporal 7
Cervelet
Pont (protubérance)
Bulbe rachidien (moelle allongée)
Nerf spinal
mixte Dendrites
Dure-mère
Fourreau dural
Fissure médiane
centrale Corps
cellulaire
B Motoneurone Axone
spinal
sin, des mouvements latéraux plutôt que des flexions/exten- les vomissements, l'épilepsie ou l'altération précoce de l'état
sions et une absence de confusion post-critique. La possibilité de conscience. L'AVC hémorragique est plus fréquent dans
de filmer les crises à l'aide d'un téléphone peut s'avérer très utile les populations asiatiques. Les infarctus médullaires sont très
pour les caractériser. rares ; les patients présentent alors typiquement une paralysie
bilatérale brutale, dont l'étendue est fonction du niveau de la
Accident vasculaire cérébral et accident moelle atteint. Le syndrome de l'artère spinale antérieure est
ischémique transitoire plus fréquent et provoque une perte des fonctions motrices et
de la sensibilité thermo-algique, avec une conservation relative
Un accident vasculaire cérébral (AVC) se manifeste par un
de la sensibilité proprioceptive et pallesthésique en dessous du
déficit neurologique focal d'installation rapide d'origine vas-
niveau lésionnel.
culaire. Un accident ischémique transitoire (AIT) correspond à
AVC résolutif en moins de 24 heures. La survenue d'un AIT est
Étourdissement et vertiges
un facteur de risque majeur de survenue d'un AVC de façon
imminente et nécessite une prise en charge en urgence. Une
7
Les patients utilisent le terme « étourdissement » pour la
hémiplégie survenant après une occlusion de l'artère céré- description de multiples sensations. Des « sensations verti-
brale moyenne est un exemple typique d'AVC ; cependant, gineuses » récidivantes affectent environ 30 % des patients
les symptômes sont en rapport direct avec le territoire vas- de plus de 65 ans et peuvent être dues à une hypotension
culaire atteint. Une grande partie des hémisphères cérébraux orthostatique, une pathologie cérébrovasculaire, une aryth-
est vascularisée par la circulation antérieure (les artères céré- mie cardiaque ou une hyperventilation en rapport avec une
brales antérieures et moyennes naissent à partir de l'artère anxiété ou des attaques de panique. Un vertige (sensation
carotide interne), alors que les lobes occipitaux et le tronc
cérébral sont vascularisés par la circulation postérieure (ver-
tébrobasilaire) (fig. 7.2). Artère cérébrale antérieure
Un système simple et utile de classification des AVC est pro-
Artère communicante antérieure
posé dans l'encadré 7.3.
Des vertiges isolés, une amnésie ou une perte de connais- Artère carotide interne
Polygone de Willis
sance transitoire sont rarement, voire jamais, liés à la survenue
d'un AVC. Dans les pays développés, environ 80 % des AVC Artère cérébrale moyenne
sont ischémiques et seulement 20 % sont hémorragiques. Les Artère communicante
postérieure
éléments de l'anamnèse ou de l'examen physique qui augmen-
tent la probabilité d'une lésion hémorragique sont la prise de Artère cérébrale
traitements anticoagulants, l'association avec une céphalée, postérieure
Tronc basilaire
Artère vertébrale
Encadré 7.2 Caractéristiques permettant de différencier
une syncope vasovagale d'une crise épileptique
Syncope Fig. 7.2 Circulation artérielle cérébrale (polygone de Willis).
Caractéristique vasovagale Épilepsie
Facteur Typiquement Souvent aucun (manque de
déclenchant douleur, maladie, sommeil, alcool, drogues)
émotion
Encadré 7.3 Classification clinique des accidents
Prodromes Sensation Début focal (pas vasculaires cérébraux
d'étourdissement, systématique)
nausée, Infarctus total dans le territoire de la circulation antérieure
acouphènes, baisse • Hémiparésie, hémianopsie et atteinte corticale haute (par exemple
de vision dysphasie ou héminégligence)
Durée de la perte < 60 secondes 1 à 2 minutes Infarctus partiel dans un territoire de la circulation antérieure
de conscience • Deux des trois composantes du syndrome précédent
Convulsions Peuvent Habituelle, tonicoclonique 1 • Ou déficit isolé de fonctions corticales hautes
survenir, mais à 2 minutes • Ou déficit moteur/sensitif plus restreint que dans un syndrome
habituellement lacunaire (voir ci-dessous)
brèves myoclonies Infarctus dans un territoire de la circulation postérieure
Couleur Pâle/gris Rouge/cyanosé, peut être • Paralysie d'un nerf crânien ipsilatéral avec déficit moteur et/ou
pâle sensitif controlatéral
Blessure Inhabituelle, parfois Morsure latérale de la • Ou déficit moteur et/ou sensitif bilatéral
morsure du bout de langue, céphalée, myalgies • Ou trouble du mouvement conjugué des yeux
la langue généralisées, douleur du dos • Ou dysfonctionnement cérébelleux sans déficit ipsilatéral des voies
(parfois fracture-tassement longues
vertébral), fracture-luxation • Ou déficit isolé du champ visuel homonyme
de l'épaule (rare) Syndrome lacunaire
Récupération Rapide, sans Progressif, plus de • Moteur pur > 2/3 visage, bras, jambe
confusion 30 minutes ; patient souvent • Ou sensitif pur > 2/3 visage, bras, jambe
confus, parfois agité/agressif, • Ou sensitivomoteur pur > 2/3 visage, bras, jambe
amnésie • Ou hémiparésie ataxique
132 • SYSTÈME NERVEUX