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lignes qui suivent, comment une conception morphologique de la langue évolue vers une

syntaxe.
Jacques Dubois, dit Sylvius, considéré comme un Donat français, est l’auteur d’une
grammaire dite Isagôge — Grammatica latino-gallica. Dans cet ouvrage latino-français il
s’emploie à transposer les catégories de la morphologie latine en français. Pour cela, il
découpe les énoncés non seulement en mots, mais aussi en des segments plus grands
dont il cherche les correspondants d’une langue à l’autre. On peut en déduire qu’il y a,
pour Sylvius, un fond d’universaux logiques communs à toutes les langues et qui sous-
tend les diverses constructions de chaque langue. Dans les schémas logiques ainsi
établis, Sylvius applique la méthode aristotélicienne (exposée dans l’Organon) de
hiérarchisation des parties du discours : plus importante est la partie qui possède plus
de modes d’être signifiés (ainsi, le nom et le verbe par rapport à la préposition et à la
conjonction). Dans le cadre de ces segments équivalents en latin et en français, Sylvius
souligne les signes qui constituent, qui soudent l’ensemble : article, pronom,
préposition. Établissant ainsi une équivalence fonctionnelle — qui est en même temps
logique — entre les termes d’un segment dans le français et les termes du même
segment dans le latin, Sylvius maintient la déclinaison en français : « Chez nous, comme
chez les Hébreux, de qui nous l’avons empruntée, la déclinaison est particulièrement
facile ; pour avoir le pluriel, il suffit d’ajouter un S au singulier et de connaître les
articles, dont le nombre est très limité, et que nous avons quêtés parmi les pronoms et
les propositions. » Voulant établir à tout prix l’équivalence avec la grammaire latine —
par souci d’équivalence logique entre les deux langues — Sylvius continue à employer
la notion de déclinaison pour décrire la grammaire française, tout en soulignant la
différence entre celle-ci et la grammaire latine : il est amené ainsi à valoriser le rôle de
la préposition et surtout de l’article comme agent de ce système français de déclinaison.
Avant d’aborder l’œuvre de celui qui, en continuant l’effort de Sylvius, finit par
imposer une attitude théorique et systématique sérieuse dans l’étude du langage,
remédiant ainsi aux défauts de l’empirisme, mentionnons la grammaire publiée en
Angleterre par Palsgrave, l’Esclarcissement de la langue francoyse (1530). Cet ouvrage
hérite de la tradition d’auteurs comme Linacre (De emendata structura), Érasme, Gaza,
et vise à définir les lois d’agencement d’une langue qui est encore loin d’être stabilisée.
Mais c’est bien l’œuvre de J.-C. Scaliger, De causis linguae latinae (1540), qui
marque la seconde moitié du XVIe siècle. Quoique consacré à la seule langue latine, cet
ouvrage dépasse son époque, et s’inscrit parmi les plus beaux exemples de rigueur
linguistique de son temps. Comme l’indique le titre, il s’agira pour le grammairien de
découvrir les causes (logiques) de l’organisation linguistique qu’il se donne pour tâche
de systématiser. Comme tous les humanistes, il tiendra surtout à l’usage et se fiera aux
données et aux faits ; mais il ne se souciera pas moins de la raison qui sous-tend et

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