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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl .

1 (2010) S1

Éditorial

F. Denisa,*, Y. Pointreaub
a Centre Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9 rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
b Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2 boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France

La délinéation des volumes cibles en radiothérapie onco- de traitement, mais une aide au contourage pour les cliniciens.
logique est au cœur de notre spécialité. Cette délinéation, ou Un comité scientifique et pédagogique a validé chaque cas avant
contourage, s’appuie sur de nombreux éléments d’appréciation mise en ligne sur le site.
comme l’anatomie, l’histoire naturelle du cancer, la biologie et, Le site a été complété en septembre 2009 par un module de
bien sûr, les essais thérapeutiques. radio-anatomie scanographique corps entier unique en son genre.
Les variations intra- et inter-opérateurs des volumes cibles Ce module développé par nos collègues d’Imaios (e-anatomy)
en radiothérapie sont un point qui fait débat et ont déjà fait spécifiquement pour notre communauté permet de visualiser
l’objet de nombreuses publications révélant les différences de toutes les structures anatomiques utiles en cancérologie (aires
pratiques. Il est en effet difficile, voire impossible, de déterminer ganglionnaires, segmentations pulmonaire et hépatique, radio-
des standards indiscutables et immuables tant les situations anatomie ORL, etc.)
cliniques sont nombreuses. Le succès de cet outil nous a incités à rédiger ce numéro
Des outils d’aide à la délinéation des volumes cibles appa- spécial de radio-anatomie en présentant chaque localisation
raissent peu à peu ainsi que des guidelines pour les principales tumorale par un article comportant les principes de la délinéa-
localisations tumorales. Ces outils reposent sur des atlas de tion des volumes cibles selon les guidelines internationaux. Le
radio-anatomie scanographique et remnographique. tout est illustré par de nombreuses coupes scanographiques
L’accès à ces outils n’est pas aisé (langue anglaise, journaux présentant les contours des volumes cibles et des cas cliniques.
scientifiques multiples, mises à jour rares…) et ils ne couvrent Il ne s’agit pas d’une revue exhaustive de la littérature et encore
pas toutes les localisations tumorales. moins de référentiels mais d’une présentation synthétique des
Nous avons élaboré avec la SFjRO (Société française des jeunes données actuelles.
radiothérapeutes oncologues) et l’Afcor (Association de formation Ce numéro s’adresse ainsi à nos jeunes collègues débutant
continue des oncologues radiothérapeutes) un site Internet ouvert dans notre spécialité, et aux médecins plus expérimentés qui
en novembre 2008 de radio-anatomie et d’aide à la délinéation souhaitent mettre à jour leur connaissance et homogénéiser
des volumes cibles accessible gratuitement aux professionnels de leur pratique.
l’oncologie radiothérapie (http://www.siriade.org). Ce site a reçu Nous espérons que ce numéro spécial trouvera une place près
le soutien de la Société française de radiothérapie oncologique de vos consoles de dosimétrie et participera à homogénéiser les
(SFRO) et du Syndicat national des oncologues radiothérapeutes pratiques dans vos centres.
(SNRO).
Ce site Internet élaboré par plus de 30 experts et jeunes
oncologues radiothérapeutes français permet d’accéder facile- Conflits d’intérêt
ment aux grands principes de la délinéation des volumes cibles
des principales localisations tumorales en les illustrant de cas Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
cliniques. Les cas présentés ne constituent pas des références cet article.

* Correspondance.
Adresse e-mail : f.denis@cjb72.org (F. Denis)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S2– S5

Site de radio-anatomie et d’aide à la délinéation (SIRIADE) :


présentation et bilan à un an
Radio-anatomy Atlas for delineation SIRIADE website: features and 1 year results

F. Denisa,*, Y Pointreaub
a Centre Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9 rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
b Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

La figure 6 est visible uniquement sur : La radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle s’appuie en grande partie sur la délinéation
http://www.sciencedirect.com/ des volumes cibles. Cette détermination fait notamment appel à des notions de radio-anatomie
complexes et difficilement accessibles actuellement. De plus, les sources des recommandations pour
Mots clés : la délinéation des volumes des différents types de tumeur sont disparates. Pour faciliter la formation
Délinéation à la délinéation, nous avons conçu un site internet de radio-anatomie et d’aide à la délinéation (http://
Radiothérapie www.siriade.org) accessible gratuitement aux professionnels. Ce site est un moteur de recherche des
Radio-anatomie principes de délinéation des principales localisations tumorales illustrés de cas cliniques. Son objectif
Atlas n’est pas d’être un référentiel, mais un support de formation iconographique avec des mises à jour
régulières. Nous présentons ici les modalités de sa création, les fonctionnalités de ce site et rapportons
les statistiques de connexion après une année d’existence.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

3-D conformal radiotherapy is based on accurate target volumes delineation. Radio-anatomy


Keywords:
Delineation knowledge’s are useful but sometimes difficult to obtain. Moreover, the sources of recommandations
Radiotherapy for volume definition are disparate. We thus developed a free radio-anatomy website dedicated to
Radio-anatomy volumes delineation for radiation-oncologists (www.siriade.org). This website is a search engine
Atlas allowing to access to delineation characteristics of main tumours illustrated with clinical cases. It dœs
not aim to provide guidelines. Its main purpose is to provide an iconographic training support with
frequent updatings. We present the features of this website and one year connexion statistics.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

* Correspondance.
Adresse e-mail : f.denis@cjb72.org (F. Denis)
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F. Denis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S2-S5 S3

1. Introduction (histoire clinique, coupes scanographie/TEP/IRM, doses prescrites,


organes à risque, volumes, dosimétries, champs d’irradiation,
La délinéation des volumes cibles en radiothérapie, cou- histogrammes dose-volumes, Beam Eye Views, etc.).
ramment appelée « contourage », est le cœur du métier de Les diaporamas devaient être validés par un conseil scientifi-
l’oncologue radiothérapeute. La définition de ces volumes fait que et un conseil pédagogique validés par le bureau de la Société
appel à de nombreux paramètres (biologie, clinique imagerie, française de radiothérapie oncologique (SFRO).
pronostic, résultats d’essais thérapeutiques, etc.) permettant Une fois la base de données créée, un moteur de recherche
de proposer un traitement personnalisé pour nos patients. Ces devait être intégré pour une recherche par localisation tumorale
nombreux paramètres induisent des différences de pratique et/ou par mots-clés.
importantes, bien supérieures aux incertitudes de reposition- La recherche des résultats devait être intuitive, rapide, simple,
nement du patient ou de prise en compte du mouvement des pour une utilisation pratique « près de la console de contourage ».
organes [5,12,15]. Des modules complémentaires de radio-anatomie scano-
Des outils d’aide à la délinéation ainsi que des recomman- graphique du corps entier ont été ajoutés (en collaboration
dations commencent à apparaitre mais leur accès n’est pas avec la société Imaios), ainsi que la possibilité de télécharger les
aisé (langue anglaise, journaux scientifiques multiples, mises à diaporamas sur n’importe quel support électronique (y compris
jour rares…) et ils ne couvrent pas l’ensemble des localisations les smartphones).
tumorales [2,4,6-8,11,13,14,16,17]. Afin d’homogénéiser les Enfin, des mises à jour régulières devaient pouvoir être
pratiques, des sociétés savantes, des groupes coopérateurs et réalisées et la date de ces mises à jour devait apparaitre.
des équipes ont proposé des outils d’aide à la définition et à la L’ensemble des étapes à nécessité plusieurs mois de travail
délinéation des volumes cibles et des organes à risques, telles et de coordination pour une ouverture officielle lors du congrès
que des recommandations décrivant les volumes à prendre en de la SFRO de 2008 sous la forme de flyers d’information et de la
compte, des atlas (imagerie en coupes de délinéation ou encore présentation d’un poster, ce dernier ayant été récompensé par
des logiciels d’autosegmentation). Cette utilisation d’atlas d’aide le premier prix décerné par la SFRO [3].
à la délinéation est considérée comme un des éléments de la
qualité du traitement car elle permet de réduire les déviations 3. Utilisation du site
liées à la variabilité de la délinéation des différentes équipes et
également au sein d’une même équipe. Le site internet a été développé avec le soutien de l’Afcor
Face à cette problématique et à une demande importante de (Association de formation continue en oncologie radiothérapie),
nos collègues juniors et séniors d’avoir un outil de radio-anatomie de la SFRO, du SNRO (Syndicat national des radiothérapeutes
scanographique et d’aide à la délinéation dédié à la radiothérapie, oncologues) et de la SFjRO (Société française des jeunes radio-
nous avons débuté en 2008 la création d’un site Internet dédié, thérapeutes oncologues), en partenariat avec les laboratoires
sécurisé et ouvert aux professionnels comportant une synthèse Novartis.
des principes de traitement par irradiation des principales localisa- Après sa présentation officielle en 2008, il s’est progressive-
tions tumorales. Nous rapportons ici le fonctionnement de ce site ment enrichi pour actuellement proposer un accès aux principes
internet et les résultats à un an des statistiques de connexion. du traitement des 20 localisations les plus fréquentes avec 30 cas
cliniques pour les illustrer.
2. Mise en œuvre Chaque recherche aboutit sous la forme d’un tableau com-
portant l’organe concerné, un résumé du cas clinique, un lien vers
Le site Internet devait remplir le cahier des charges suivant. le diaporama des principes de traitement de l’organe concerné,
Son contenu devait intéresser les oncologues radiothérapeu- un second diaporama d’un cas clinique, l’adresse électronique
tes en formation et les médecins séniors dans le cadre de leur de l’expert qui a validé les diaporamas, la date de mise en ligne
Formation médicale continue. La radiothérapie conformation- du cas clinique et la date de sa mise à jour (Figs. 1 à 4).
nelle avec ou sans modulation d’intensité était concernée. Les informations mises en ligne sont volontairement synthé-
Le site devait être sécurisé par un mot de passe, gratuit tiques afin de pouvoir être téléchargées rapidement et, si besoin,
et contenir une base de données de diaporamas concernant être imprimées. Les mises à jour sont effectuées régulièrement
les principes de la radiothérapie des principales localisations et de nouveaux cas peuvent être envoyés après validation par
tumorales illustrés par plusieurs cas cliniques. l’expert et, si nécessaire, par le conseil scientifique.
Des jeunes oncologues radiothérapeutes en cours de formation De plus, un module de radioanatomie scanner corps entier
encadrés par des experts devaient rédiger des diaporamas pour est intégré au site, permettant l’accès à des coupes illustrées
chaque localisation selon un plan et une mise en page prédéfinis comportant les structures anatomiques utiles en oncologie-
(classification, radioanatomie, indications de la radiothérapie radiothérapie (organes, vaisseaux, lymphonœuds, segmentation
selon le stade, arbre décisionnel des doses à délivrer, volumes hépatique…) comme illustré (Figs. 5 et 6), ainsi qu’un calculateur
cibles [volume tumoral macroscopique (GTV), volume cible ana- d’équivalence de dose.
tomoclinique (CTV), volume cible prévisionnel (PTV)] et organes
à risque à délinéer, protocole d’acquisition scanographique avec 4. Bilan depuis l’ouverture du site
ou sans fusion d’images, contraintes de doses, toxicités aiguë
et tardive). Les cas cliniques proposés devaient avoir été traités En ce qui concerne les statistiques de connexion des
selon les modalités décrites dans les principes du traitement et les 12 derniers mois, celles-ci montrent une augmentation conti-
modalités du traitement réalisées devaient apparaître clairement nue du nombre de visites (694 par mois en mars 2009, 1 210
S4 F. Denis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S2-S5

Fig. 1. Page d’accueil du site internet.


Website home page.

Fig. 3. Exemple de contenu de diaporama de principes Fig. 2. Moteur de recherche par localisation et affichage des requêtes sous forme d’un tableau.
de traitement (ici, les carcinomes bronchiques). Search engine by location and table of requests displayed.
Example of treatment principle slide show contents (here, lung
carcinomas).

en janvier 2010, pour les visiteurs ayant un code


d’accès) (Fig. 7). En un an, 117807 fichiers ont été
ouverts (uniquement avec une autorisation par
mot de passe) soit 76 giga octets de fichiers. Les
dix localisations les plus consultées (sur le mois
de janvier 2010) sont le poumon (16 %), la prostate
(15 %), le sein (10 %), la sphère ORL (10 %), le col
utérin (6 %), le rectum (6 %), l’endomètre (4 %), le
cerveau (3 %) et les lymphomes (3 %). L’origine des
connexions au site dépasse nos frontières (même si
le site n’est actuellement qu’en Français). En effet,
59 % des connexions viennent de France, 21 % sont
d’origine hors de France mais indéterminées, 8 %
viennent du Maroc, 8 % des États-Unis, 2 % d’Alle-
magne, 1 % du Canada et 1 % de la Belgique.

5. Conclusion et perspectives

Après 14 mois d’existence, le site internet


www.siriade.org est devenu un outil de formation
initiale et continue d’aide à la délinéation très
Fig. 4. Exemple de cas clinique : radiothérapie d’un carcinome bronchique.
consulté par les oncologues radiothérapeutes. Les
Example of clinical case: radiotherapy of lung carcinoma.
contourages présentés ne sont que des proposi-
tions de traitement pour un cas clinique précis et
ne constituent donc pas une référence de traitement. Ces outils viennent en complément du guide des procédures
Afin de permettre un accès à des articles plus détaillés sur de radiothérapie externe de 2007 et le numéro thématiques sur
les principes de traitement des principales localisations une les doses de tolérance à l’irradiation des tissus sains [8-10].
transposition du site sous la forme du numéro spécial du journal Nous espérons que le SIRIADE (sous toutes ses formes)
bleu actuel est réalisée sous la forme de « mises au point » (sur continuera à contribuer à la formation initiale et continue et
un modèle proche du numéro spécial précurseur de la revue gardera une bonne place près des consoles de dosimétrie des
Cancer/Radiothérapie publié en 2001) [1]. oncologues radiothérapeutes.
F. Denis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S2-S5 S5

Fig. 5. Atlas de radio-anatomie scanographique : aires


ganglionnaires cervicales.
CT radiological anatomy atlas: cervical lymph nodes.

[4] Dijkema IM, Hofman P, Raaijmakers CP, Lagendijk JJ, Battermann JJ, Hillen
B. Loco-regional conformal radiotherapy of the breast:delineation of
the regional lymph node clinical target volumes in treatment position.
Radiother Oncol 2004;71:287-95.
[5] Giraud P, De Rycke Y, Rosenwald JC, Cosset JM. Conformal radiotherapy
planning for lung cancer: analysis of set-up uncertainties. Cancer Invest
2007;25:38-46.
[6] Grégoire V, Daisne JF, Bauvois C, Coche E, Duprez T, Hamoir M, et al.
Sélection et délimitation des volumes – cibles anatomocliniques gan-
glionnaires dans les tumeurs de la sphère cervico-maxillo-faciale Cancer
Radiother 2001;5:614-28.
[7] Grégoire V, Levendag P, Ang KK, Bernier J, Braaksma M, Budach V, et
al. CT-based delineation of lymph node levels and related CTVs in the
node-negative neck: DAHANCA, EORTC, GORTEC, NCIC, RTOG consensus
guidelines. Radiother Oncol 2003;69:227-36.
[8] Grégoire V, Eisbruch A, Hamoir M, Levendag P. Proposal for the delinea-
tion of the nodal CTV in the node-positive and the post-operative neck.
Fig. 7. Statistiques de connexion de mars 2009 à janvier 2010 Radiother Oncol. Radiother Oncol 2006;79:15-20.
(nombre de visites par mois de visiteurs ayant un mot de passe). [9] Guide des procédures de radiothérapie externe 2007 – SFRO. Cancer
Connection statistics, March 2009 to January 2010 (number of visits per month
Radiother 2008;12.
by visitors with a password).
[10] Doses de tolérance à l’irradiation des tissus sains. Cancer Radiother
2010;14:161-226.
[11] Hennequin C, Quero L, Mineur L. Cancer de l’estomac : doses et volumes-
Conflits d’intérêts cibles Cancer Radiother 2008;12:659-62.
[12] Hurkmans CW, Borger JH, Pieters BR, Russell NS, Jansen EP, Mijnheer BJ.
Variability in target volume delineation on CT scans of the breast. Int J
Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
Radiat Oncol Biol Phys. 2001;50:1366-72.
cet article. [13] Lorchel F, Bosset JF, Bartholomot B, Baron MH, Mantion G, Pelissier EP et
al. Clinical target volume for preoperative radiotherapy of rectal cancers.
Cancer Radiother 2001;5:542-9.
Références
[14] Maingon P, Grégoire V. Recommendations for the definition of target
[1] Lartigau E, Kantor G, Taieb S, Vilain MO, Ceugnart L, Lagarde P, et al. volumes on computerized dosimetry in oropharyngeal cancers. Cancer
Definitions of target volumes in soft tissue sarcomas of the extremities. Radiother 2004;8:S68-72.
[15] Saliou MG, Giraud P, Simon L, Fournier-Bidoz N, Fourquet A, Dendale R et
Cancer/Radioth 2001;5:695-703.
al. Radiotherapy for breast cancer:respiratory and set-up uncertainties.
[2] Chapet O, Kong FM, Quint LE, Chang AC, Ten Haken RK, Eisbruch A, et al.
Cancer Radiother 2005;9:414-21.
CT-based definition of thoracic lymph node stations: an atlas from the
[16] Taylor A, Rockall AG, Powell ME. An atlas of the pelvic lymph node regions
University of Michigan. Int J Radiat Oncol Biol Phys. 2005;63:170-8. to aid radiotherapy target volume definition. Clin Oncol (R Coll Radiol)
[3] Denis F, Pointreau Y, Vieillot S, Leignel D, Fleury B, Barillot I, et al. Mise 2007;19:542-50.
en place d’un site Internet d’autoenseignement à la délinéation et à la [17] Vorwerk H, Beckmann G, Bremer M, Degen M, Dietl B, Fietkau R, et al. The
planification dosimétrique pour les oncologues radiothérapeutes. Cancer/ delineation of target volumes for radiotherapy of lung cancer patients.
Radiothérapie 2008;12:721. Radiother Oncol 200;91:455-60.
C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S6– S13

Segmentation automatique des images pour la planification dosimétrique


en radiothérapie
Automatic image segmentation for treatment planning in radiotherapy

D. Pasquiera,*, L. Peyrodieb,c, F. Denisd, Y. Pointreaue, G. Bérae, É. Lartigauf


a Centre Galilée, polyclinique de la Louvière, 69 rue de la Louvière, 59000 Lille, France
b Ecole des hautes études d’ingénieur, 13, rue de Toul, 59046 Lille, France
c Laboratoire d’automatique, génie informatique et signal (LAGIS), Cité scientifique, 59651 Villeneuve d’Ascq, France
d Centre Jean-Bernard, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
e Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 37044 Tours cedex 9, France
f Département universitaire de radiothérapie, Centre O. Lambret, Université Lille II, 3, rue F. Combemale, 59000 Lille, France

RÉSUMÉ

Mots clés :
L’essor de la radiothérapie conformationnelle et de la radiothérapie guidée par l’image a pour corollaire
Traitement d’images l’accroissement du temps consacré à la délinéation des volumes d’intérêt, qui est également le siège
Segmentation automatique d’une variabilité inter et intraobservateur. Les développements informatiques et du traitement
Radiothérapie conformationnelle d’images ont permis des progrès dans l’automatisation partielle ou totale de ces tâches. Cet article
Radiothérapie guidée par l’image détaille les grands principes de la segmentation d’images appliquée à la radiothérapie, ses applications
Atlas ainsi que ses résultats les plus récents dans un contexte clinique.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: One drawback of the growth in conformal radiotherapy and image-guided radiotherapy is the increased
Computer Assisted Image Processing time needed to define the volumes of interest. This also results in inter- and intra-observer variability.
Automatic segmentation However, developments in computing and image processing have enabled these tasks to be partially
Conformal radiotherapy or totally automated. This article will provide a detailed description of the main principles of image
Image-guided radiotherapy segmentation in radiotherapy, its applications and the most recent results in a clinical context.
Atlas © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Introduction Dans de nombreux domaines médicaux, une automatisation du


traitement des données a été développée, comme l’analyse des
La radiothérapie conformationnelle et la radiothérapie guidée signaux électrocardiographiques, électro-encéphalographiques,
par l’image impliquent un accroissement considérable du temps ou encore l’imagerie cardiaque et des maladies inflammatoires
nécessaire à la délinéation des volumes d’intérêt, ce qui rend neurologiques. Les développements informatiques et du trai-
souhaitable une automatisation au moins partielle de ces tâches. tement d’images ont permis plus récemment l’extension de
Cette délinéation est également le siège d’une variabilité inter et ces techniques d’automatisation à la radiothérapie. Cet article
intra-observateur, qui tend à être diminuée par les recomman- traite des méthodes et résultats de la segmentation d’images
dations internationales et les atlas de radio-anatomie comme morphologiques destinées à la planification dosimétrique (tomo-
SIRIADE (site de radio-anatomie et d’aide à la délinéation) [55]. densitométrie et remnographie). Il détaille les grands principes

* Correspondance.
Adresse e-mail : davidpasquier@free.fr (D. Pasquier)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13 S7

de la segmentation d’images appliquée à la radiothérapie, ses consiste en une succession d’une dilatation et d’une érosion. Les
méthodes d’évaluation, ses applications, et ses résultats les plus structures proches fusionnent avec le contour lors de la dilatation
récents dans un contexte clinique. et seules les fusions ponctuelles disparaissent lors de l’érosion,
permettant d’obturer ainsi les courts defects des contours.

2. Méthodes de segmentation automatique 2.3. Recalage élastique avec atlas, modèles déformables

La segmentation d’image est une opération de traitement D’autres méthodes ont été plus récemment développées et
d’images dont la finalité est de rassembler des pixels entre eux appliquées à la segmentation d’images en radiothérapie, avec
suivant des critères prédéfinis, le plus souvent les niveaux de des résultats prometteurs, comme le recalage élastique avec un
gris ou la texture. Les pixels sont ainsi regroupés en régions, qui atlas et l’application de modèles déformables.
constituent une partition de l’image. Il existe de nombreuses La première méthode consiste à construire un atlas qui va
méthodes de segmentation, que l’on peut schématiquement comporter les différentes structures à délinéer ; cet atlas peut
regrouper en deux principales catégories : segmentation par être créé à partir d’images de patients ou d’images synthétiques.
régions et segmentation par contours. Un recalage élastique, avec déformation de l’atlas, est ensuite
appliqué aux images à segmenter. Le recalage élastique est
2.1. Segmentation par régions souvent précédé d’un recalage rigide. Il existe différents algo-
rithmes de recalage élastique, qui vont déformer les structures de
La méthode la plus basique pour définir une région d’in- l’atlas, selon un mode non linéaire, de façon globale ou locale. Ces
tensité uniforme est le seuillage des niveaux de gris. Une autre algorithmes ne seront pas détaillés ici, mais nous pouvons classer
méthode consiste à diviser successivement l’image jusqu’à ce les méthodes de recalage en deux grandes catégories [36] :
que les voxels des sous-régions satisfassent à des propriétés de — l’approche géométrique, qui repose sur la recherche de primi-
similitude. Les sous-régions voisines sont ensuite examinées afin tives caractéristiques au sein des images puis sur l’appariement
d’effectuer d’éventuelles fusions (méthode de division-fusion ou de ces caractéristiques. Les primitives peuvent être des points,
split and merge). Cet algorithme a pour inconvénient d’intervenir des lignes ou des surfaces, et peuvent être sélectionnées
à un niveau moindre de détails que d’autres algorithmes, comme manuellement ou automatiquement. En imagerie médicale
par exemple l’agglomération de voxels (region growing). Cette et notamment cérébrale, les primitives les plus souvent
méthode consiste à rattacher à un voxel de départ les voxels employées sont les modèles surfaciques. Les méthodes d’ap-
voisins respectant des fonctions identiques, comme une faible pariement les plus souvent utilisées sont les splines de plaque
variation d’intensité. mince et la méthode des plus proches voisins itératifs (Iterative
Closest Point) [1] ;
2.2. Segmentation par contours — l’approche iconique est plus générale que l’approche géométri-
que, en étant basée sur l’ensemble des informations des images
La détection de contours consiste à rechercher les primitives recalées, et ne nécessite pas de prétraitement des images. La
au sein de l’image. Elles sont de plusieurs types, et peuvent mesure de similarité entre les deux séries d’images peut faire
consister en des lignes, des courbes ou des contours (détection intervenir notamment les critères d’erreur quadratique, le
des gradients d’intensité). Des filtres permettent de mesurer coefficient de corrélation, la variance d’intensité, l’entropie
des sauts d’intensité dans l’image. Un seuillage permet d’éli- (information mutuelle).
miner des voxels au sein desquels la variation d’intensité est La technique des atlas se heurte à la grande variabilité de
trop faible pour qu’ils puissent appartenir à un contour. Poussé la forme et du volume des structures à délinéer, notamment
au maximum, un seuillage peut donner une image binaire au pour les localisations pelviennes. Cette technique est utilisée
sein de laquelle tout voxel de l’image est un point de contour. pour la segmentation des structures cérébrales, pelviennes ou
Des réglages intermédiaires permettent de conserver certaines de la tête et du cou [5,15,16,25,47]. Pour certaines localisations
valeurs d’intensité. Un autre type de seuillage, par hystérésis, comme la tête et le cou, de multiples atlas ont été créés, afin
fait intervenir deux seuils : un seuil bas et un seuil haut. Tout que l’utilisateur puisse choisir celui qui se rapproche le plus du
voxel dont le module de contour est supérieur au seuil haut est patient dont les images doivent être segmentées [11].
considéré comme appartenant à un contour ; les voxels voisins La méthode des modèles déformables est basée sur l’évolu-
sont examinés dans la direction du contour et ajoutés au contour tion d’un contour fermé et permet de s’affranchir partiellement
si leur valeur est supérieure au seuil bas. des problèmes de bruits parasites et de chaînage. Cette technique,
Les caractéristiques d’un filtre détecteur de contour doivent dont le principe est de faire évoluer un contour initial vers une
permettre une détection et une localisation correctes, et une position d’équilibre, peut être assimilée à une segmentation par
réponse unique par contour. Parmi les plus utilisés, citons les contours. Le modèle peut être élaboré à partir d’une forme
filtres de Canny [7] et de Deriche [17]. Des opérations morpho- mathématique (sphère, ellipse) ou intégrer des connaissances
mathématiques peuvent être appliquées afin d’améliorer les relatives au volume d’intérêt à segmenter, comme la forme ou
contours, comme une érosion ou une dilatation. Une ouverture la texture. La première étape consiste à placer le modèle au sein
consiste à appliquer une érosion suivie d’une dilatation : les de l’image à segmenter. Le processus de déformation, souvent
petites structures et détails disparaissent lors de l’érosion et selon la normale, est lié à la minimisation d’une fonctionnelle
ne sont pas recréés lors de la dilatation. Une ouverture permet d’énergie. Les forces dépendent des informations présentes dans
ainsi d’éliminer des segments courts et bruités. Une fermeture l’image (gradient, intensité…) et des propriétés de régularité des
S8 D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13

contours. La déformation va se faire sous l’action de plusieurs


forces : une énergie propre ou interne, assimilable à une énergie
mécanique de tension et contrôlant l’aspect du contour, et une
énergie externe introduite pour répondre aux contraintes spé-
cifiques du volume d’intérêt et attirant le contour vers l’objet
dont on cherche à déterminer les frontières [26,49]. Le contour
actif va se déformer pour rechercher la position d’énergie
minimale en respectant au mieux les contraintes. Cette fonc-
tionnelle d’énergie peut être représentée sous la forme de
l’équation :
1 1
E =∫(α v'(s) +β v''(s) )ds−λ∫ ∇I(v(s)) ds
2 2

0 0
Energie interne Energie externe
dans laquelle α et β sont les coefficients d’élasticité et de
rigidité de la courbe. Les contraintes liées à l’énergie interne des
modèles peuvent limiter leur flexibilité géométrique et rendre
plus difficile leur application à des volumes présentant d’impor-
tantes irrégularités [32]. Diverses méthodes ont été proposées
pour améliorer et mieux automatiser le processus de segmen-
tation du contour déformable. Cohen et al. et Terzopoulos et al.
ont utilisé une force d’« inflation interne » rendant le modèle
Fig. 1. M-reps du rein, du foie et du pelvis masculin. Ligne supérieure : réseau
moins sensible aux conditions initiales de placement du modèle d’atomes centraux. Ligne centrale : réseau d’atomes avec leurs rayons. Ligne
au sein de l’image [13,49]. De nombreux auteurs ont intégré au inférieure : surface des modèles associées aux atomes, d’après Pizer [40].
M-reps for kidney, liver, and male pelvis. Top row: mesh of atom hubs; middle
modèle déformable des connaissances a priori, comme la taille, row; mesh atoms including spokes; bottom row: the implied boundaries shown
la forme, les variations de forme attendues, la localisation et with atom meshes from Pizer [40].

l’orientation du volume d’intérêt, ou encore la texture [18]. La


limite des modèles déformables est leur caractère surfacique
et l’absence de modélisation de la partie centrale des objets, volume d’intérêt à segmenter sur 3 coupes pour la prostate et
ce qui rend plus difficile leur représentation et l’établissement le rectum.
de relations inter-objets. Cette technique est employée pour la
segmentation des volumes d’intérêt pelviens (prostate, vessie,
têtes fémorales) et de la tête et du cou [2,3,21,28,37,39]. 3. Évaluation des outils de segmentation automatique
L’équipe de Pizer et Chaney a contribué au développement
des modèles déformables et à leur utilisation en radiothérapie, La littérature traitant du développement et de l’évaluation
en particulier en décrivant les « medial representations » ou m-reps des algorithmes appliqués à des images tests à type de fantômes
[33,40]. Les m-reps sont des modélisations d’objets solides, à la est très abondante et son étude dépasse le cadre de notre article,
fois de leur structure interne et de leur surface. La structure qui traite des résultats les plus récents dans le contexte d’une
interne est modélisée par un échantillonnage du plan médian évaluation clinique ou « préclinique ». De nombreuses méthodes
grâce à des atomes, reliés entre eux par des rayons. Chaque sont utilisables pour l’évaluation des résultats obtenus, et leur
atome contient comme informations : sa position spatiale, la multiplicité dans la littérature rend difficile la comparaison des
longueur des rayons qui le relient aux atomes voisins ou à la différents outils de segmentation automatique. La plupart des
surface, l’orientation des rayons, et sa distance avec le bord auteurs utilise les distances linéaires entre les contours définis
pour les atomes situés près des arêtes. Les volumes d’intérêt manuellement et automatiquement comme la distance radiale,
cylindriques comme le rectum sont représentés par des m-reps la distance entre deux points les plus proches, la distance à
en forme de tube comprenant une seule chaîne d’atomes partir de la normale de la surface et la distance de Hausdorff. La
comportant des rayons d’inégales longueurs afin de modéliser distance de Hausdorff représente la distance maximale entre
les sections non circulaires (Fig. 1). L’architecture des m-reps deux contours ou deux surfaces A et B ; elle est définie par
avec leurs interactions étroites entre les atomes permettrait l’équation :
une meilleure représentation des propriétés géométriques des dh (A, B) = Max{d (A, B), d (B, A) }
formes et de leur variation [11]. Les m-reps contiennent égale- Le calcul de la distance moyenne permet d’apprécier une simi-
ment des connaissances a priori sur l’apparence des objets, grâce litude plus globale entre les contours. Ces distances peuvent être
à une analyse statistique des images à la fois à l’intérieur et à calculées sur des contours, coupe par coupe, ou sur des volumes.
l’extérieur des modèles, ce qui permet à un objet d’appréhender La distance radiale est définie comme la distance entre deux points
son environnement et les structures voisines. Cette méthode a situés sur un même rayon tiré depuis le centre de gravité d’un
été appliquée à la segmentation des reins, de la prostate, de la volume. Elle est plutôt adaptée aux volumes sphériques mais
vessie et du rectum [33,40,42]. Les résultats sont encourageants, peut être prise en défaut, même pour la comparaison des volumes
avec néanmoins un certain degré d’interaction, l’utilisateur prostatiques, lorsque les contours sont asymétriques ou lorsque
devant par exemple déterminer manuellement les limites du les vésicules séminales sont incluses dans l’analyse (Fig. 2). Dans
D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13 S9

Vcd =Vm Va×100


Vm
Vcd = volume correctement délinéé ; Vm = volume manuel,
Va = volume automatique

— Indice kappa ou coefficient de similarité de Dice (CSD), défini


par l’équation :


Ki=2×Vm Va
Vm+Va
Fig. 2. Inconvénients des méthodes de comparaison linéaires
Ki = Kappa Index ; Vm = volume manuel, Va = volume automatique
dans le cas de contours non symétriques. La distance radiale (DR)
peut sur ou sous-estimer la distance si la droite n’est pas perpendiculaire
à l’un ou l’autre des contours. Les méthodes des distances des points Les évaluations basées sur les indices volumiques (VO, Vcd,
les plus proches (DPP) et de la surface normale (DSN) ne sont pas symétriques Ki) sont plus sensibles aux erreurs de recouvrement que les
et donnent des résultats différents en fonction du point de départ.
Disadvantages of line-based comparison methods when using asymmetric évaluations métriques. Par exemple, le VO de deux volumes se
contours. The radial distance (RD) may over- or underestimate the true distance recouvrant à 85 % ne sera que de 0,74. De la même manière le
if the straight line is not perpendicular to one or other of the contours.
The closest-point and surface normal distance methods are not symmetric VO de deux cubes de 10 × 10 × 10 voxels décalés de un voxel
and their outcomes vary as a function of the starting point. selon la diagonale du cube sera de 57 % seulement (729/1271)
alors que la distance moyenne entre les surfaces est d’environ
ce cas, le rayon n’est pas perpendiculaire aux deux surfaces et la 1 voxel [27].
distance est surestimée [45]. La distance entre les deux points Les résultats peuvent également être exprimés en termes de
les plus proches est une méthode utilisée notamment par Rao et sensibilité et de spécificité, et représentés sous la forme de
al. pour l’évaluation des m-reps [42]. Son inconvénient est d’être courbes ROC (Receiver Operating Characteristic). Le « vrai positif »
asymétrique, le résultat dépendant du point de départ (Fig. 2). Les (VP) représente le nombre de voxels communs aux segmenta-
auteurs y ont pallié en mesurant les distances les plus proches, tions automatique et manuelle, le « faux positif » (FP) représente
en interchangeant les rôles des points de départ et d’arrivée et les voxels délinéés à tort par rapport à la segmentation manuelle,
en poolant les valeurs [42]. Une autre méthode employée par le « faux négatif » (FN) les voxels non délinéés à tort, et le « vrai
Steenbakkers et al. et Deurloo et al. utilise la distance à partir de négatif » (VN) les voxels non délinéés à juste titre. La sensibilité
la normale de la surface [19,48]. De la même façon, cette méthode (Se) et la spécificité (Sp) peuvent être déterminées par les
n’est pas symétrique (Fig. 2) ; Steenbakkers et al. [48] contournent relations [16,25,47] :
cette limite en employant la méthode des points les plus proches si
Se= VP
la distance à partir de la normale de la surface dépasse une valeur VP+ FN
prédéterminée (2 cm dans le cas de la délinéation d’un volume
cible tumoral macroscopique pulmonaire). Un autre inconvé- Sp= VN
nient des méthodes linéaires est la perte des informations sur la
VN + FP
topographie des différences entre les contours (par exemple au L’indice kappa ou le coefficient de similarité de Dice peut
niveau de la base et de l’apex prostatiques). Van der Put et al. [50] alors s’écrire [16] :
ont élaboré une méthode de comparaison quantitative à partir de
Ki= 2VP
deux champs de vecteurs déterminés à partir des deux contours. 2VP+ FN + FP
La combinaison de ces deux champs de vecteurs permet de relier
les points correspondants de chaque contour. Leurs résultats Le contour manuel est considéré comme le « gold standard »
dans la délinéation prostatique montrent que la distance radiale alors que la variabilité inter et intra-observateur dans la délinéa-
surestime les distances essentiellement au niveau de l’interface tion des volumes d’intérêt a été largement étudiée en fonction
avec le rectum, et des vésicules séminales, régions ou la forme de des localisations tumorales et de l’examen d’imagerie employé
la prostate est la moins sphérique. [9,10,20,22,43,46,51,52,54]. Pour y pallier, Pallotta et al. ont
Les indices volumiques permettent d’apprécier relativement utilisé un fantôme numérique de géomètre connue afin de tester
et plus globalement les différences de délinéation. Les indices un algorithme de segmentation automatique de la prostate et des
suivants sont utilisés : volumes d’intérêt pelviens [35]. Ce fantôme numérique simulait
— rapport volumique (rapport des volumes automatique et des images tomodensitométriques comportant sept régions de
manuel, dont la valeur optimale est 1) niveaux de gris différents. Malgré l’ajout de bruit de Poisson
— Volume overlap (rapport du volume de l’intersection sur le homogène à ces images, le contraste entre les régions restait
volume de l’union, dont la valeur optimale est 1) comme défini différent des conditions cliniques, conduisant probablement
dans l’équation [27] : à une surestimation des capacités de l’algorithme de segmen-

Vo =Vm Va tation. Il n’existe pas de consensus sur les valeurs des indices
Vm Va

cités plus haut au-delà desquels les contours automatiques


VO = volume overlap, Vm = volume manuel, Va = volume automatique peuvent être considérés comme acceptables. L’évaluation des
outils de délinéation automatique dans un contexte clinique
— « Volume correctement délinéé » (pourcentage du volume de ou « préclinique », c’est à dire sans utiliser les contours obtenus
l’intersection sur le volume manuel dont la valeur optimale pour le traitement des patients, devrait donc être réalisée préfé-
est 100) comme défini dans l’équation [6,34] : rentiellement dans le cadre d’études multi-observateurs afin de
S10 D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13

s’assurer que les contours automatiques sont concordants avec radiale, relativement simple et adapté aux volumes réguliers ;
la variabilité interobservateurs. les résultats étaient satisfaisant chez les quatre patients, qui
Ces évaluations multi-observateurs devraient comporter un étaient atteints d’un méningiome. Des résultats de délinéation
nombre suffisant de patients et d’observateurs afin d’obtenir des automatique du cerveau, du cervelet et du noyau caudé avaient
résultats statistiquement fiables. Remeijer et al. ont modélisé été présentés auparavant par Dawant et al. [16]. Le coefficient
l’incertitude de la détermination de la variabilité intra et inte- de similarité de Dice (CSD) était respectivement de 0,95 et 0,97
robservateurs, à partir des données de Rasch et al., comparant pour le cerveau et le cervelet par rapport aux volumes définis
les contours prostatiques délinéés par trois médecins chez par deux observateurs, et de 0,85 pour le noyau caudé. Les
18 patients [43,45]. L’écart type de ces paramètres est inver- résultats inférieurs pour cette dernière structure étaient dus à
sement proportionnel à la racine carrée du nombre de patients l’association d’un petit volume et de la faible résolution d’IRM,
et au nombre d’observateur. Des différences systématiques rendant moins pertinent le CSD, la valeur de 0,85 correspondant
peuvent facilement être mises en évidence dans les régions pour à une différence de l’ordre du pixel. Bondiau et al. ont modélisé
lesquelles la variabilité intra et inter-observateurs est la plus un atlas destiné à la segmentation automatique du tronc cérébral
faible. À l’inverse les régions comme l’apex prostatique néces- à partir d’IRM artificielles [5]. Cet outil a été comparé au volume
sitent un effectif plus important pour déterminer avec précision défini à partir des contours des sept experts pour chacun des
les variabilités de délinéation. Par exemple, la précision de la six patients. Les résultats étaient fiables et reproductibles, et
détermination de la variabilité intra-observateur de l’apex (écart s’intégraient dans la variabilité inter-observateurs. Isambert et
type de 3,5 mm) est de 0,7 mm (19 %) à partir des données de al. ont présenté plus récemment les résultats de cet outil de
Rasch et al. [43]. Une précision de 5 % nécessiterait de multiplier délinéation automatique chez 11 patients [25] ; les contours
l’effectif par 9, soit près de 150 patients au total, ce qui devient obtenus sur des images remnographiques pondérées en T1 pour
plus difficilement réalisable [45]. les yeux, les nerfs optiques, le chiasma, l’hypophyse, le cervelet
Les outils de délinéation automatique doivent également et le tronc cérébral étaient comparés à ceux de deux experts.
être évalués en termes de réduction de temps passé pour Les CSD obtenus étaient élevés pour les structures les plus
la délinéation. L’évaluation de l’influence de ces outils sur la volumineuses (valeur moyenne de 0,81 à 0,85 pour les yeux, le
variabilité inter-observateurs paraît également être un champ cervelet et le tronc cérébral) mais de façon similaire aux résultats
d’investigation important, tout comme l’influence des contours de Dawant et al. [16] les CSD étaient nettement inférieurs pour
obtenus automatiquement sur les doses délivrées aux volumes les structures de plus petit volume (valeur moyenne de 0,3 à
cibles et organes à risque. 0,41 pour l’hypophyse, les nerfs optiques et le chiasma). Le CSD
était supérieur à 0.8 pour des volumes supérieurs à 7 cm3. Ces
résultats fiables et reproductibles permettaient l’utilisation de
4. Résultats cet outil de délinéation automatique pour les globes oculaires,
le cervelet et le tronc cérébral [25].
4.1. Cerveau
4.2. Voies aéro-digestives supérieures
Le cerveau a été l’une des premières localisations étudiées,
en raison du contraste élevé pour les tissus mous de l’imagerie L’élaboration d’un atlas à partir de données scanographiques
par résonance magnétique (IRM) employée communément de 45 patients est détaillée dans l’atlas de Commowick et al [14].
pour la délinéation des volumes d’intérêt. Les méthodes les plus Les volumes d’intérêt étaient les aires ganglionnaires cervicales
anciennes, basées sur le seuillage, permettent de segmenter II, III et IV selon la classification internationale, les glandes
des structures simples dans des régions contenant un fort parotides et sous-maxillaires. L’évaluation a été menée chez 12
contraste, comme le volume tumoral macroscopique (GTV) avec des 45 patients ayant servi à l’élaboration de l’atlas (les données
injection de produit de contraste ; elles ne seront pas détaillées de chaque patient étudié ont alors été exclues de l’atlas). La
ici. Mazzara et al. ont évalué deux méthodes de croissance de sensibilité et la spécificité étaient respectivement de 0,82 et 0,86.
régions pour la définition du volume tumoral macroscopique Des résultats plus détaillés de cet outil ont été publiés par Sims
chez 11 patients traités pour un gliome de haut grade [30]. Les et al. dans le cadre du projet Methods and Advanced Equipment
contours obtenus automatiquement étaient comparés à ceux for Simulation and Treatment in Radio Oncology (MAESTRO) [47].
définis par trois médecins d’après des IRM avec injection de Cette évaluation a concerné la délinéation du tronc cérébral, des
Gadolinium. Les résultats étaient évalués selon une méthode parotides et de la mandibule chez 13 patients. Les contours obte-
d’appartenance des pixels aux contours communs réalisés par nus étaient comparés à ceux d’experts appartenant à deux sites.
les médecins. Les volumes communs à la délinéation manuelle Les experts devaient définir les volumes d’intérêt manuellement
étaient pour les deux méthodes de segmentation de seulement (site 1) ou corriger si besoin les contours obtenus automati-
56 % ± 6 et 52 % ± 7, mais ces résultats étaient comparables à la quement (site 2). La délinéation automatique aboutissait à une
variation inter-observateurs. « sous-estimation » du tronc cérébral en raison d’une extension
Différentes équipes ont développé des méthodes de délinéa- crâniale insuffisante des images scanographiques ayant servi à
tion basées sur le recalage élastique avec un atlas. Cuadra et al. l’élaboration de l’atlas, et une « surestimation » des parotides
ont intégré dans la délinéation cérébrale la déformation induite qui sera corrigée par une opération morphomathématique
par la lésion tumorale [15]. Une information a priori de croissance d’érosion. La concordance avec les contours des experts était
tumorale était intégrée, à partir d’un point de départ défini par satisfaisante avec un CSD moyen de toutes les structures de
l’observateur. Il s’agit cependant d’un modèle de croissance 0,68 ± 0,25 et 0,82 ± 0,13 selon respectivement les sites 1 et 2.
D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13 S11

Les CSD s’étalaient de 0,58 ± 0,2 (tronc cérébral) à 0,78 ± 0,06 ont présenté les résultats d’une segmentation automatique
(mandibule) pour le site 1, et de 0,77 ± 0,07 (tronc cérébral) basée sur des modèles déformables de la vessie, du rectum et
à 0,86 ± 0,07 (parotide) pour le site 2 [47]. Ces erreurs systé- des têtes fémorales d’après des images tomodensitométriques
matiques dans la délinéation des glandes parotides semblent [39]. Les contours obtenus étaient comparés à ceux réalisés
avoir été corrigées dans la dernière version évaluable (version par un expert chez 40 patients pour le rectum et la vessie, et
4.2), comme l’a souligné un travail présenté en communication 15 patients pour une tête fémorale. Après correction manuelle
orale durant le congrès de la Société française de radiothérapie des écarts les plus importants, les distances moyennes et
oncologique (SFRO) en 2009 [41]. Ce travail portait sur 11 cas maximales entre les contours automatiques et manuels de la
de cancer des voies aéro-digestives supérieures et les aires II, vessie étaient respectivement de 1,47 ± 0,45 mm et 8 ± 1,5 mm.
III, IV et V et les parotides étaient délinées. Il existait une bonne Ces valeurs étaient respectivement de 1,6 ± 0,4 mm et 7,6 ± 1,8
corrélation entre les contours des trois oncologues radiothéra- pour le rectum, et de 0,93 ± 0,1 mm et 5 ± 1 mm pour une tête
peutes mais une discordance avec les volumes proposés par le fémorale. D’autres équipes ont utilisé un modèle déformable
logiciel. La différence portait essentiellement sur les niveaux de cette fois pour la délinéation de la prostate, notamment d’après
transition entre les aires ganglionnaires (différence supprimée des images remnographiques. Les rapports de volume, VO et Vcd
en cas d’unification des aires II, III et IV) et sur les aires V. La étaient respectivement de 1,13 ± 0,1, 0,78 ± 0,05 et 94,75 ± 3,3
délinéation des parotides était d’emblée acceptable. Par ailleurs, par rapport à la délinéation manuelle chez 24 patients dans [37].
les auteurs notaient l’absence de gain de temps compte tenu de Un VO moyen de 0,78 ± 0,05 correspond à un CSD de 0,88 ± 0,04
la somme des corrections nécessaires. [28,37]. Le contraste élevé des images remnographiques a permis
Zhang et al. ont présenté leurs résultats dans le cadre de la d’utiliser des méthodes d’extension de région pour le rectum
radiothérapie guidée par l’image [56]. Un atlas a été développé et la vessie. Pour le rectum, les rapports de volume, VO et Vcd
à partir des données de la scanographie de planification dosimé- étaient respectivement de 0,97 ± 0,1, 0,78 ± 0,06 et 86,52 ± 5, et
trique. Une évaluation a été réalisée chez sept patients et pour de 0,95 ± 0,03, 0,88 ± 0,03 et 91,3 ± 3 pour la vessie [37]. Has et al.
32 images. Les résultats obtenus pour le tronc cérébral, la moelle ont détaillé l’élaboration de leur méthode dans [23] ; les résultats
épinière, la mandibule, les parotides et les aires ganglionnaires spécifiques de la segmentation de la prostate, du rectum, de la
cervicales étaient reproductibles, avec un CSD variant pour vessie et des têtes fémorales d’après des images scanographiques
l’ensemble de ces structures de 0,65 à 0,9. Wang et al. ont mené sont présentés dans [24]. Une évaluation qualitative était réalisée
un travail similaire, en évaluant le recalage élastique entre les par six experts chez 39 patients. Les contours automatiques
examens de tomodensitométrie de planification et réalisés au devaient être classés comme excellents, bons, acceptables ou
cours du traitement (scanographe sur rail) [53]. Les contours non acceptables. Les contours prostatiques ont été considérés
obtenus étaient comparés à ceux définis manuellement ou comme bons, acceptables et non acceptables dans 45 %, 30 % et
simplement corrigés après délinéation automatique. L’analyse 15 % des cas respectivement. Les résultats étaient similaires
des résultats chez huit patients (100 images au total) montrait pour la vessie, avec 36 % et 42 % de contours considérés comme
un VO moyen de 73 à 86 % pour les parotides par rapport au excellents ou bons, mais étaient inférieurs pour le rectum et les
contour manuel et de 98 à 100 % par rapport aux contours têtes fémorales. L’évaluation quantitative menée par sept experts
corrigés. Le VO moyen variait de 94 à 97 % pour le volume cible chez sept patients montrait des résultats qui s’inscrivaient dans
anatomo-clinique par rapport aux volumes corrigés. Les résultats la variabilité inter-observateurs pour la prostate et la vessie, et
respectifs de plusieurs algorithmes de recalage élastique sont là encore inférieurs pour le rectum. Une méthode basée sur un
détaillés dans Castadot et al. [8]. atlas prostatique incluant les vésicules séminales a été proposée
par Klein et al. [28]. L’évaluation a été réalisée sur des images
4.3. Pelvis remnographiques chez 50 patients. Le CSD médian était de 0,85,
proche du CSD médian inter-observateurs de 0,87. Les auteurs
De nombreuses méthodes de segmentation automatique soulignaient l’importance de la constitution de l’atlas, qui doit se
ont été évaluées dans le cadre de la radiothérapie pelvienne. rapprocher des conditions cliniques et comporter des variations
Une méthode basée sur l’algorithme de la ligne de partage des anatomiques.
eaux a été présentée pour le rectum, la vessie et les vésicules
séminales d’après des images scanogaphiques avec des résultats 4.4. Autres critères d’évaluation
satisfaisants au vu de sa simplicité (1,2 à 1,7 mm de distance
moyenne entre les contours automatiques et manuels pour le L’un des principaux buts des outils de segmentation auto-
rectum et la vessie) [6]. Les résultats d’une segmentation par matique est de réduire le temps de délinéation. Pour Isambert
extension de région de la prostate, du rectum et de la vessie sur et al. [25], le temps moyen de segmentation automatique des
des images tomodensitométriques ont été publiés par Mazonakis structures cérébrales était de 7 à 8 minutes sans intervention
et al. [29], mais il ne s’agit pas à proprement parler d’une méthode humaine, contre environ trente minutes à une heure pour la
automatique, l’utilisateur devant choisir manuellement les seuils délinéation manuelle de ces mêmes structures. En ce qui concerne
de niveaux de gris. les localisations pelviennes un gain de temps peut également
Plus récemment plusieurs équipes ont présenté des résultats être obtenu [24,31,39]. La segmentation des organes à risque est
basés sur des modèles déformables et des atlas pour la déli- obtenue en dix à 15 minutes, interactions comprises [39], et en une
néation automatique de la prostate et/ou des organes à risque. minute pour la prostate et les organes à risque contre 25 minutes
Des modèles déformables ont été élaborés pour la délinéation manuellement [24]. Une segmentation rénale était obtenue en
prostatique sur des images échographiques [2,3,21]. Pekar et al. sept minutes dans [40,42]. Dans un contexte de radiothérapie
S12 D. Pasquier et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S6-S13

guidée par l’image Wang et al. ont rapporté des durées de deux de notre environnement et deviendront des aides précieuses
et trois minutes pour les localisations des voies aéro-digestives à la délinéation, sans toutefois pouvoir remplacer l’expertise
supérieures et thoraciques [53]. Il est parfois difficile dans la humaine ni la confrontation multidisciplinaire.
littérature de déterminer si le temps de correction et d’interaction
est comptabilisé dans la durée de segmentation automatique.
Peu de données sont disponibles concernant l’influence de la Conflits d’intérêts
segmentation automatique sur la variabilité inter-observateurs.
Chao et al. ont montré que cette variabilité pouvait être significa- Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
tivement diminuée entre huit médecins dans la délinéation des cet article.
volumes cibles anatomocliniques (CTV) et organes à risque chez
deux patients atteints d’une tumeur des voies aéro-digestives Références
supérieures avec envahissement ganglionnaire [12]. Les VO
moyens des différents volumes cibles anatomocliniques s’éta- [1] Besl P, McKay N. A method for registration of 3D shapes, IEEE Trans.
laient de 0,53 à 0,65 et de 0,91 à 0,93 respectivement sans et Pattern Analysis and Machine Intelligence 1992;14:239-55.
[2] Betrouni N, Palos G, Coulanges M, Vermandel M, Maouche S, Rousseau J.
avec segmentation automatique dans le cas de la tumeur de base A method to register intra-treatment ultrasound images to pre-treatment
de langue (p < 0,001). Ces valeurs étaient de 0,32 à 0,61 et 0,89 images of prostate. Conf Proc IEEE Eng Med Biol Soc 2004;3:1741-4.
[3] Betrouni N, Pasquier D, Dewalle AS, Jounwaz R, Dubois P, Lopes R et al.
à 0,92 dans le cas de la tumeur du cavum (p < 0,001). Dans les
Ultrasound image registration for patient setup in conformal radiotherapy
deux cas la concordance de la délinéation des organes à risque of prostate cancer. Conf Proc IEEE Eng Med Biol Soc 2006;1:3795-8.
était également améliorée. La segmentation automatique peut [4] Beyer GP, Velthuizen RP, Murtagh FR, Pearlman JL. Technical aspects and
evaluation methodology for the application of two automated brain MRI
également diminuer la variabilité de la délinéation de la glande
tumor segmentation methods in radiation therapy planning. Magn Reson
mammaire. Dans l’article de Reed et al. les volumes définis par huit Imaging 2006;24:1167-78.
médecins chez dix patientes d’après des images scanographiques [5] Bondiau PY, Malandain G, Chanalet S, Marcy PY, Habrand JL, Fauchon
F et al. Atlas-based automatic segmentation of MR images:validation
étaient comparés, avec et sans aide à la segmentation [44]. La
study on the brainstem in radiotherapy context. Int J Radiat Oncol Biol
délinéation de chaque médecin était confrontée à un volume Phys 2005;61:289-98.
« commun » à cinq des huit médecins. La distance moyenne était [6] Bueno G, Fisher M, Burnham K. Automatic segmentation of clinical struc-
tures for RTP: Evaluation of a morphological approach. In: Proceedings
réduite de 1,6 à 1 mm (p = 0,049) ; le CSD était augmenté de 0,92
of Medical Image Understanding and Analysis (MIUA ‘01). Birmingham,
à 0,94 (p = 0,049) et la durée de délinéation diminuée de 30 % UK: BMVA Press;2001; p. 73–6.
(p = 0,028). Une diminution de la variabilité inter-observateurs [7] Canny J. A Computational Approach To Edge Detection. IEEE Trans.
Pattern Analysis and Machine Intelligence 1986:8:679-714.
ne préjuge cependant pas d’une amélioration de la précision, des [8] Castadot P, Lee JA, Parraga A, Geets X, Macq B, Grégoire V. Comparison of
erreurs systématiques des outils de segmentation pourraient 12 deformable registration strategies in adaptive radiation therapy for the
conduire à s’écarter des recommandations de délinéation. La treatment of head and neck tumors. Radiother Oncol 2008;89:1-12.
[9] Cattaneo GM, Reni M, Rizzo G, Castellone P, Ceresoli GL, Cozzarini C et
finalité des aides automatiques est leur utilisation clinique et al. Target delineation in post-operative radiotherapy of brain gliomas:
quelques équipes ont publié des résultats préliminaires sur leur interobserver variability and impact of image registration of MR (pre-
évaluation dosimétrique. Les écarts de délinéation sont lissés par operative) images on treatment planning CT scans. Radiother Oncol
2005;75:217-23.
l’ajout de marges lors de la création du volume cible planifié ; [10] Cazzaniga LF, Marinoni MA, Bossi A, Bianchi E, Cagna E, Cosentino D
ces résultats dosimétriques sont dépendants des techniques de et al. Interphysician variability in defining the planning target volume
radiothérapie [4,38]. in the irradiation of prostate and seminal vesicles. Radiother Oncol
1998;47:293-6.
[11] Chaney EL, Pizer SM. Autosegmentation of images in radiation oncology.
J Am Coll Radiol 2009;6:455-8.
5. Conclusion [12] Chao KS, Bhide S, Chen H, Asper J, Bush S, Franklin G et al. Reduce in
variation and improve efficiency of target volume delineation by a com-
puter-assisted system using a deformable image registration approach.
Les développements informatiques ont permis de réaliser Int J Radiat Oncol Biol Phys 2007;68:1512-21.
[13] Cohen LD, Cohen I. Finite element methods for active contour models
récemment des progrès considérables dans l’évolution des
and balloons for 2D and 3D images. IEEE Trans. Pattern Anal. Machine
outils de segmentation automatique ; ces progrès ont été rendus Intelligence. 1993;15:1131–47.
nécessaires par l’essor de la radiothérapie conformationnelle [14] Commowick O, Grégoire V, Malandain G. Atlas-based delineation of
lymph node levels in head and neck computed tomography images.
et guidée par l’image. Les résultats cliniques sont pour la plu-
Radiother Oncol 2008;87:281-9.
part préliminaires. Dans la littérature, le degré d’interaction [15] Cuadra MB, Pollo C, Bardera A, Cuisenaire O, Villemure JG, Thiran JP. Atlas-
nécessaire est parfois peu détaillé ou important. Alors que based segmentation of pathological MR brain images using a model of
lesion growth. IEEE Trans Med Imaging 2004;23:1301–14.
la présence d’outils de délinéation automatique fait partie
[16] Dawant BM, Hartmann SL, Thirion JP, Maes F, Vandermeulen D, Demaerel
des arguments commerciaux mis en avant par les industriels P. Automatic 3D segmentation of internal structures of the head in MR
lors du choix d’une station de dosimétrie ou d’un système de images using a combination of similarity and free-form transformations:
Part I, methodology and validation on normal subjects. IEEE Trans Med
radiothérapie guidée par l’image, les résultats de ces outils sont
Imaging 1999;18:909-16.
parfois insuffisamment évalués. Ils nécessitent une évaluation [17] Deriche R. Using Canny’s criteria to derive a recursively implemented
rigoureuse préclinique, multicentrique, portant sur leur fiabilité, optimal edge detector. Int Journal of Computer Vision 1987;1:167-87.
[18] Derraz F, Peyrodie L, Pinti A, Taleb-Ahmed A, Chick L. Multiple sclero-
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gain de temps apporté et leur reproductibilité. Leur apport dans Science Press, ICCES.Phuket, Thaïlande 2009 janv;p557.
la réduction des écarts inter-observateurs paraît être un champ [19] Deurloo KE, Steenbakkers RJ, Zijp LJ, de Bois JA, Nowak PJ, Rasch CR
et al. Quantification of shape variation of prostate and seminal vesi-
d’investigation important. Leurs développements actuels laissent cles during external beam radiotherapy. Int J Radiat Oncol Biol Phys
penser que ces outils feront prochainement partie intégrante 2005;61:228-38.
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S14– S22

Gliomes cérébraux
Malignant gliomas

S. Haberer, A. Assouline, J.-J. Mazeron*


Service d’oncologie radiothérapique, centre des tumeurs, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France

RÉSUMÉ

Les tumeurs gliales représentent 2000 à 3000 nouveaux cas par an en France et 75 % d’entre elles sont
Mots clés :
Glioblastome de haut grade. Depuis quelques années, la biologie moléculaire de ces tumeurs est mieux comprise
Radiothérapie conformationnelle avec la découverte de l’importance pronostique de la codélétion 1p19q et de la méthylation du
Volumes cibles promoteur du gène de la MGMT. La radiothérapie a, elle aussi, beaucoup évolué avec les progrès
Atlas diagnostiques en imagerie qui permettent une meilleure définition des volumes cibles. Les progrès
thérapeutiques, quoique modestes, viennent de l’association de la radiothérapie avec le témozolomide
et de ceux des techniques d’irradiation tridimensionnelle et non coplanaire. La survie des patients
étant actuellement allongée, il est aujourd’hui nécessaire de prendre en compte les effets potentiels
à long terme de nos traitements.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: Glial tumors represent 2000 to 3000 new cases per year in France and 75 % of them are of high grade.
Glioblastoma Recent understanding of the molecular biology of these tumors revealed the importance of 1p19q
Conformal radiotherapy codeletion and mgMT promotor methylation. Radiotherapy also recently evolved with the progress
Target volumes in medical imaging which allows a better definition of the target volumes. Even modest, therapeutic
Atlas progress is based on chemoradiotherapy with temozolomide and on the development of non-coplanar
conformational radiotherapy. Knowledge and precise evaluation of potential late effects of our treatments
is necessary due to actual improvement of survival with chemoradiotherapy in glioblastoma.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie L’âge médian des patients lors du diagnostic est de 45 ans


pour les tumeurs gliales anaplasiques et de 55-60 ans pour le
Avec une prévalence d’environ 5 à 8 cas pour 100 000 glioblastome.
habitants et par an, les gliomes sont les plus fréquentes des Le seul facteur de risque reconnu est l’exposition aux radia-
tumeurs cérébrales primitives de l’adulte. On compte ainsi tions ionisantes mais les cas sont rares [8]. Aucune relation n’a pu
2 000 à 3 000 nouveaux cas par an en France. Soixante-quinze être clairement établie avec d’autres facteurs tels que l’exposition
pour cent des gliomes diagnostiqués sont de haut grade (III aux ondes électro-magnétiques, les antécédents de traumatismes
ou IV de la classifi cation de l’Organisation mondiale de la crâniens, l’alimentation ou les facteurs environnementaux. Plus
santé). récemment, plusieurs larges études n’ont pas retrouvé de relation

* Correspondance.
Adresse e-mail : jean-jacques.mazeron@psl.aphp.fr (J.-J. Mazeron)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22 S15

entre l’utilisation des téléphones portables et l’augmentation Il a ainsi été mis en évidence que la transformation maligne
d’incidence des tumeurs cérébrales malignes. [17,23]. des cellules gliales résulte d’une accumulation au cours du temps
Il existe quelques rares cas de tumeurs gliales (< 5 %) qui d’aberrations génétiques qui conduisent à une dérégulation du
surviennent dans le cadre d’une prédisposition génétique : cycle cellulaire (par inactivation de p53 par exemple) et une
syndromes de Li-Fraumeni, neurofibromatose de type 1 ou 2, dysrégulation de plusieurs voies de signalisation telles que celle du
syndrome de Turcot. VEGF-R (récepteur du Vascular Endothelial Growth Factor) [41].
Au niveau thérapeutique, la biologie moléculaire semble
pouvoir être utile aux cliniciens.
2. Classification
3.1. La codélétion 1p/19q
Les tumeurs gliales sont des tumeurs histologiquement
hétérogènes, dérivées des différentes cellules de la glie. La clas- La codélétion des bras chromosomiques 1p/19q est retrouvée
sification anatomo-pathologique de référence actuelle est fondée dans plus de 60 % des oligodendrogliomes et dans 15 à 20 % des
sur les critères de l’OMS de 2007. Elle distingue les gliomes en oligoastrocytomes. C’est une altération génomique qui survient
fonction de leur morphologie et de leur degré de malignité précocément dans l’oncogenèse de ces tumeurs. Elle est associée à
croissant (grade histopronostique côté de I à IV). un pronostic clinique plus favorable et c’est aussi un facteur prédictif
On distingue ainsi : pour la réponse à la radiothérapie et à la chimiothérapie par temo-
— les tumeurs astrocytaires dont il existe quatre grades pronos- zolomide ou PCV [procarbazine, lomustine (CCNU), et vincristine]
tiques : l’astrocytome pilocytique ou de grade I, l’astrocytome [39]. Le mécanisme de cette meilleure sensibilité aux traitements
diffus ou de grade II, l’astrocytome anaplasique ou de grade reste inconnu et par ailleurs, l’identification de ce marqueur n’est pas
III, l’astrocytome de grade IV ou glioblastome ; toujours aisée et la technique de référence reste à trouver.
Les protocoles des essais cliniques en cours dans les oligo-
— les tumeurs oligodendrogliales dont on distingue deux sous-
dendrogliomes tiennent compte de cette anomalie génétique,
groupes pronostiques :
qui est utile pour stratifier les patients.
• l’oligoastrocytome et l’oligodendriogliome bien différencié
ou de grade II,
3.2. Méthylation du promoteur du gène de la MGMT
• l’oligoastrocytome et l’oligodendriogliome anaplasique ou
de grade III.
La methylguanine-methyltransférase (MGMT) est une
Les tumeurs de grade III ou IV sont considérées comme
enzyme de réparation des lésions de l’ADN chimio-induites. La
malignes. Les gliomes de grade II sont des tumeurs lentement
méthylation des îlots CpG situés en 5’ du promoteur inhibe la
évolutives dont l’histoire naturelle est caractérisée par l’évolu-
transcription du gène et l’expression de la MGMT.
tion quasi inéluctable vers la malignité avec un délai variable,
Hegi et al. ont ainsi montré que chez les patients atteints
en général de plusieurs années.
de glioblastome traités dans l’essai de l’EORTC (European
En France, une deuxième classification, dite de Saint-Anne,
Organization for Research and Treatment of Cancer) 26981/22981,
est parfois utilisée. Elle est fondée sur l’analyse histologique et
la méthylation était associée à une meilleure réponse à l’associa-
les données de l’IRM. On distingue ainsi les oligodendroglio-
tion de radiothérapie et de temodal [14,15]. La durée médiane
mes et oligoastrocytomes de grade A (absence d’hyperplasie
de survie était ainsi de 21,7 mois en cas de methylation versus
endothéliale et de prise de contraste) ; les oligodendrogliomes 12,7 mois (p = 0,007) dans le cas contraire. Dans cette même
et oligoastrocytomes de grade B (présence d’hyperplasie et/ou étude, les patients chez qui le promoteur n’était pas méthylé ne
prise de contraste) ; les glioblastomes. tiraient pas bénéfice de la chimiothérapie concomitante.
Les facteurs de pronostic défavorable des tumeurs gliales Li et al ont par ailleurs montré une relation entre l’expression
malignes sont : l’âge avancé, le geste chirurgical incomplet, de p53 et la survie sans progression lorsque l’expression de
l’histologie (glioblastome) et l’état général altéré. L’examen cli- la MGMT était faible et qu’une chimio-radiothérapie concomi-
nique, le mini-mental status (MMS) et le compte rendu opératoire tante était délivrée pour un glioblastome [24].
permettent de caractériser les patients selon la RPA (recursive Les essais cliniques en cours dans le glioblastome sont diffé-
partitioning analysis modifiée par l’European Organization on rents selon l’état de méthylation du promoteur de la MGMT.
Research and Treatment of Cancer, EORTC) [28].

4. Indications de la radiothérapie
3. Biologie moléculaire
Tant qu’elle est techniquement possible et qu’il n’existe pas
La classification histologique de l’OMS des gliomes apporte de contre-indication anesthésique, la chirurgie maximale doit
des éléments importants en termes de diagnostic et de pronostic toujours être le premier traitement des tumeurs gliales malignes
mais souffre d’un manque de précision et de reproductibilité. En [4]. Elle a, de plus, une valeur pronostique positive si elle est
effet, un même sous-groupe histologique peut comprendre des macroscopiquement complète. Néanmoins, la chirurgie reste
tumeurs d’évolution et d’agressivité très variables. De nombreux insuffisante à cause de la nature infiltrante de ces tumeurs.
travaux récents concernaient la biologie moléculaire afin de La radiothérapie adjuvante est maintenant devenue un
mieux appréhender la diversité des gliomes, de mieux compren- standard. Ces modalités diffèrent selon la nature histologique
dre leur oncogenèse et d’adapter les traitements [7]. de la tumeur et les caractéristiques du patient :
S16 S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22

4.1. Glioblastome progression mais n’avait pas d’impact sur la survie globale par
rapport à une radiothérapie seule, y compris dans le sous-groupe
4.1.1. Chez les patients en bon état général des tumeurs ayant une codélétion des chromosomes 1p/19q.
et ayant moins de 70 ans L’adjonction du témozolomide en concomitance de la radio-
thérapie est en cours d’évaluation dans deux essais. Le premier
Radiothérapie focalisée de 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy est l’essai de phase III de l’EORTC CATNON (26053-22054) pour
associée à une chimiothérapie concomittante et adjuvante par les gliomes anaplasiques non délétés 1p/19q et le deuxième est
témozolomide [33,34]. En effet, l’essai conduit par l’EORTC et le l’essai de l’EORTC 26081-22086 pour les oligodendrogliomes et
NCIC (National Cancer Institute of Canada), rapporté par Stupp et al. tumeurs mixtes avec délétion 1p19q.
en 2005 [32], a démontré un bénéfice de survie avec la délivrance
d’une chimiothérapie concomitante par témozolomide à la dose 4.3. Tumeur gliale de bas grade (grade II)
de 75 mg/m² du premier au dernier jour de la radiothérapie, puis
de six cures de témozolomide (150-200 mg/m² pendant 5 jours La chirurgie d’exérèse maximale est essentielle. La radiothé-
tous les 28 jours) : 14,6 contre 12,1 mois de survie médiane rapie est indiquée en cas de tumeur évolutive, inopérable ou en
[Hazard Ratio (HR) = 0,63, p < 0,0001]. L’actualisation des données rechute après chirurgie. En effet, l’essai de Van Den Bent et al.
publiée en 2009 [35] a montré une amélioration de la probabilité n’a pas montré de différence de survie selon que la radiothérapie
de survie à cinq ans en faveur du bras expérimental : 9.8 % de était délivrée précocement en situation adjuvante ou lors de la
taux de survie à 5 ans avec la chimio-radiothérapie contre 1,9 % progression [38].
avec la radiothérapie seule (HR = 0,63, p < 0,0001) ; ce bénéfice Malgré les nombreux progrès de ces dix dernières années, le
était retrouvé dans tous les sous-groupes de patients et avec pronostic des tumeurs gliales reste néanmoins sombre avec un
quelques patients maintenant en vie à plus de sept ans. taux de survie à 5 ans d’environ 9 % en cas de glioblastome et de
20 % en cas de tumeur gliale de grade III. [26,35]
4.1.2. Chez les patients de plus de 70 ans et en bon état général

Il a été montré dans un essai randomisé de l’Anocef (Association 5. Examens complémentaires nécessaires
des neuro-oncologues d’expression francaise) un bénéfice, à la planification du traitement
quoique modeste, de durée médiane de survie (29,1 semaines)
par comparaison à des soins de confort (16,9 semaines) [21]. La L’IRM est actuellement le standard pour l’évaluation du
tolérance de la radiothérapie étant parfois plus mauvaise chez les volume tumoral et de l’œdème. Les séquences nécessaires sont
personnes âgées, une radiothérapie hypofractionnée accélérée leur T1, T2, T1 après injection de gadolinium, T2 flair. Si le malade a
est maintenant généralement proposée [16,25] : Roa et al. ont en été opéré, une IRM est demandée après cette opération.
effet démontré qu’un schéma de traitement de 40 Gy en 15 frac- Les techniques de fusion d’images et de recalage permettent
tions sur une période de 3 semaines était équivalent en termes de de réaliser une étude dosimétrique scanographique en intégrant
survie globale à une radiothérapie en fractionnement classique les données de l’IRM.
[30]. L’association de cette radiothérapie et du témozolomide est
en ce moment testée. Une autre alternative chez les sujets âgés est
une chimiothérapie par témozolomide sans radiothérapie, cette 6. Modalités de traitement
approche ayant montré des résultats encourageants en termes de
réponse et de qualité de vie [6,10]. La scanographie dosimétrique est réalisée chez un patient en
décubitus dorsal, avec un plan incliné sous la tête si la tumeur est
4.1.3. Chez les patients jugés inopérables frontale ou temporale. Un masque de contention thermoformé
est réalisé avant l’acquisition des images. L’injection de produit de
La chimioradiothérapie concomitante selon le protocole de contraste n’est pas nécessaire, sauf si la fusion des images de la sca-
Stupp et al. [34] doit être proposée. nographie dosimétrique avec une IRM récente n’est pas possible.
Dans un essai randomisé, l’implantation de pastilles impré- (Les modalités de traitement sont détaillées plus précisément
gnées de chimiothérapie (carmustine, gliadel®) dans le lit opéra- dans les cas cliniques ci-dessous.)
toire a montré un bénéfice contre un placebo chez 240 adultes
atteint d’un gliome malin de haut grade nouvellement diagnosti-
qué [42]. Cependant, la place du Gliadel® par rapport au schéma 7. Détermination des volumes cibles
dit de Stupp et al. [35] n’est pas clairement définie aujourd’hui
pour le traitement de première ligne. Le volume tumoral macroscopique (GTV ou Gross Tumor
Volume) est le volume tumoral visible sur l’imagerie. Le volume
4.2. Gliomes anaplasiques tumoral macroscopique est obtenu à partir de la masse visible
sur la scanographie avec injection mais surtout à partir de la prise
La radiothérapie adjuvante focalisée de 60 Gy en 30 fractions de contraste sur la séquence T1 après injection de gadolinium de
de 2 Gy est un standard thérapeutique. Deux études randomisées l’IRM [19]. Le volume tumoral macroscopique est parfois difficile
menées par l’EORTC et le RTOG (Radiation Therapy Oncology à définir quand une partie de la tumeur ne prend pas le contraste.
Group) [3,39] ont montré que la chimiothérapie adjuvante à base Dans ce cas, il est alors possible d’utiliser les images pondérées en
de nitroso-urées (PCV) augmentait la probabilité de survie sans T2 Flair. Mais il est souvent difficile, sur celles-ci, de différencier
S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22 S17

œdème et tumeur, qui sont parfois intimement liés. Ces difficultés chez les sujets de plus de 70 ans où une irradiation hypofraction-
peuvent être encore accentuées en situation postopératoire du fait née est le plus souvent préférée) [20]. L’utilisation de faisceaux
des remaniements occasionnés par le geste chirurgical. non coplanaires peut être nécessaire, notamment si la tumeur
Le volume cible anatomoclinique (CTV ou Clinical Target intéresse les lobes temporaux.
Volume) correspond à l’extension microscopique probable de la La radiochirurgie a des indications limitées dans le traitement
tumeur au-delà du volume tumoral macroscopique. Cette marge des tumeurs gliales puisqu’elles sont très infiltrantes. Elle peut
inclut une couronne de tissus apparemment sains et dans tous trouver sa place comme traitement de rattrapage de petites
les cas l’œdème en hypersignal en T2 ou T2 flair. lésions localisées [27,37].
La présence de barrières anatomiques estimées infranchissa- La modulation d’intensité peut aussi s’avérée utile mais
bles telles que les structures osseuses ou les méninges est prise l’escalade de dose au delà de 60 Gy reste du domaine de la
en compte pour affiner le volume cible anatomoclinique. recherche [5].
Le volume cible prévisionnel (PTV ou Planning Target Volume)
prend en compte les incertitudes dues au repositionnement du
patient. Il dépend des instruments de contention : 1 à 2 mm en 11. Toxicité aiguë
cas d’utilisation d’un cadre de stéréotaxie, 3 mm en cas d’utili-
sation d’une technique de guidage par l’image (IGRT), 5 mm en Durant la radiothérapie, une consultation hebdomadaire
cas de masque de contention classique. est nécessaire afin de surveiller l’apparition d’effets aigus et
d’adapter le traitement symptomatique. La toxicité attendue
est la suivante [13] :
8. Doses — L’asthénie, quasi constante, variable selon les sujets. Elle peut
persister plusieurs semaines après la fin du traitement.
Glioblastomes et tumeurs gliales de haut grade : — La majoration de l’œdème péri-tumoral qui peut être res-
— 60 Gy en 30 fractions de 2 Gy ou 59.4 Gy en 33 fractions de ponsable d’une hypertension intracrânienne. Elle est plus
1,8 Gy, parfois seulement 54 Gy selon les doses reçues par les fréquente en cas de gliome de haut grade et/ou inopérable.
organes à risque ; Le traitement repose sur une corticothérapie orale (voire
— 44-46 Gy dans la zone d’œdème péri-tumoral ; intraveineuse en hospitalisation si nécessaire), sans oublier
— Alternative chez les sujets âgés : 40 Gy en 15 fractions et les mesures associées à la corticothérapie au long cours.
3 semaines. — L’alopécie : dessinant les portes d’entrée des faisceaux, elle
Tumeurs gliales de bas grade : survient à partir de la 3e semaine de traitement. La repousse
— 45 à 54 Gy en fractions de 1,8-2 Gy. des cheveux est complète ou quasi-complète mais lente : elle
débute environ 3 mois après la fin de la radiothérapie.
— L’érythème cutané : traité par les soins locaux habituels.
9. Organes à risque et contraintes de doses — Les crises d’épilepsie : à craindre en cas d’antécédents au cours
de l’histoire de la maladie. En général, un traitement préventif
Les organes à risque à déterminer sont les suivants [11,13] : est instauré au début de la prise en charge.
— Encéphale sain : dose maximale de 60 Gy si irradiation par-
tielle de l’encéphale. Dose maximale de 45 Gy si irradiation
de l’encéphale en totalité. 12. Toxicité tardive
— Tronc cérébral : dose maximale de 50 Gy. Dans un volume très
limité, la dose peut atteindre 54-55 Gy. La toxicité tardive était jusqu’à présent peu considérée vu le
— Moelle épinière : dose maximale de 45 Gy en fractionnement pronostic défavorable des gliomes malins. Actuellement, la survie
habituel. Dans certains cas, cette dose pourra être dépassée des patients a été nettement allongée et des malades survivent à
dans un petit volume sous réserve d’une dosimétrie tridi- long terme. La toxicité tardive est donc importante à considérer
mensionnelle avec délinéation de la moelle, histogramme [29]. Plusieurs facteurs influencent le risque de toxicité tardive
dose-volume et contrôle du positionnement. cérébrale : le volume de tissus sains irradié, l’irradiation des
— Chiasma et nerfs optiques : dose maximale de 54 Gy. structures symétriques controlatérales qui empêchent le recours
— Conduit auditif, oreille moyenne et interne : dose maximale à la plasticité cérébrale, la dose totale et le fractionnement. Par
de 50-55 Gy sauf si le contexte carcinologique impose une ailleurs, l’âge avancé et une détérioration pré-existante des
dose supérieure. fonctions supérieures semblent être des facteurs de risque de
— Lobes temporaux : dose maximale de 60 Gy. troubles mnésiques radio-induits [22].
— Hypophyse : dose maximale de 45-50 Gy, mais selon le La toxicité tardive peut se manifester par des dégradations
contexte carcinologique une dose de 60 Gy ou plus pourra neurocognitives, une nécrose cérébrale, une leucoencéphalopa-
être acceptée si nécessaire. thie, des atteintes vasculaires et des troubles endocriniens. Elles
sont été décrites en détail par ailleurs [13].
Les nécroses radiques cérébrales sont devenues exception-
10. Balistique et dosimétrie nelles depuis l’amélioration des techniques de radiothérapie et
le respect des contraintes de doses des tissus sains avoisinant.
Le traitement standard est une radiothérapie conformatio- [20,26]. Elles surviennent classiquement 6 mois à 5 ans après la
nelle tridimensionnelle focale normalement fractionnée (sauf radiothérapie cérébrale et miment un processus intracérébral
S18 S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22

expansif. En scanographie et IRM, la radionécrose est très souvent — Délinéation des organes à risque (Fig. 2 et 3) : encéphale,
difficile à différencier d’une progression tumorale. La spectro- tronc cérébral, chiasma, yeux, nerf optique, oreille interne,
IRM, l’IRM de perfusion et la TEP (tomographie par émission de hypophyse, cristallin.
positons) peuvent aider au diagnostic. — Validation du plan de traitement : (Fig. 4, 5 et 6)
Les données prospectives sur les séquelles neuro-psychologiques Choisir la balistique qui permet d’obtenir la meilleure
de la radiothérapie cérébrale ont été obtenues surtout grâce à des couverture du volume cible prévisionnel [selon le rapport 62 de
séries pédiatriques [9,31,40]. Chez l’adulte, les données de la littéra- l’International Commission on Radiation Units and Measurements
ture sont contradictoires mais les séquelles fonctionnelles semblent (ICRU) 62 : 95 % < volume cible prévisionnel < 107 %] et un respect
minimes en cas d’irradiation focale de 50 à 60 Gy [2,13]. des contraintes de doses aux organes à risque. (cf. ci dessus). En
Une détérioration de l’audition et des fonctions hypophy- général, photons de 6 à 10 MV. En général, six à huit faisceaux au
saires peuvent survenir à distance de la radiothérapie cérébrale, total : trois ou quatre pour le volume initial, trois ou quatre pour
justifiant un suivi régulier [1,12,18]. le volume réduit. Tous les faisceaux sont utilisés chaque jour.
— Vérification en cours de traitement : imagerie embarquée (On
Board Imager, OBI®) tous les jours.
13. Cas clinique commenté n °1 : glioblastome inopérable

Il s’agissait d’une femme de 73 ans en bon état général qui 14. Cas clinique commenté n °2 : glioblastome opéré
avait comme antécédent une hypertension artérielle non traitée
et une hystérectomie pour fibrome. L’histoire de la maladie a Il s’agissait d’un homme de 44 ans, sans antécédent médical
débuté avec l’apparition progressive d’une hémiparésie droite ou chirurgical, qui a souffert de troubles de la marche puis
avec chutes à répétition. À l’examen clinique d’entrée, la patiente de l’équilibre en mai 2009 qui ont fait découvrir une masse
était en bon état général avec un indice de Karnofsky de 80 %. parenchymateuse intra-cérébrale, pariéto-calleuse gauche,
L’examen clinique a montré une hémiparésie droite. Il n’y avait mesurant 4 cm de grand axe sur l’IRM, dont l’aspect est for-
pas d’autre anomalie à l’examen clinique, notamment pas tement évocateur d’un gliome malin. Le patient a été opéré le
d’anomalie des paires crâniennes ni de syndrome cérébelleux. 25/05/2009. L’exérèse a été macroscopiquement incomplète et
Les examens complémentaires biologiques étaient normaux. Un l’IRM postopératoire montrait la présence d’une masse résiduelle
bilan d’imagerie par tomodensitométrie et résonance magné- L’analyse histologique finale retrouvait un glioblastome. Il a donc
tique a mis en évidence un volumineux processus thalamique été proposé au patient une chimioradiothérapie concomitante.
droit de 3 cm. La biopsie chirurgicale a permis de conclure à Selon le protocole de Stupp et al. : 60 Gy en 30 séances par
un glioblastome. Étant donné la localisation et la taille de la photons de 10 MV associés au témozolomide durant la durée de
lésion, il a été propose à la patiente une chimioradiothérapie la radiothérapie (modalités classiques). Le patient a ensuite reçu
exclusive : radiothérapie focalisée de 60 Gy en fractions de 2 Gy des cures de témozolomide pendant six mois [32,36].
associée à une chimiothérapie concomitante et adjuvante par En pratique :
témozolomide [32, 36]. — Simulation : idem que le cas clinique n°1.
En pratique : — Fusion avec IRM : fusion des images de la scanographie dosi-
— Simulation : scanographie dosimétrique : patient en decu- métrique avec les IRM pré et postopératoires.
bitus dorsal, plan incliné sous la tête si tumeur frontale ou — Délinéation des volumes cibles (Fig. 7) :
temporale, masque de contention thermoformé, alignement • Volume tumoral macrocopique : reliquat tumoral cor-
des lasers de positionnement et des marques sur les masques. respondant à la zone prenant le produit de contraste sur
Pas d’injection de produit de contraste (recommandée seule- l’IRM postopératoire en séquence T1 après injection de
ment si fusion avec IRM impossible). Epaisseur de coupes : gadolinium.
2,5 mm. • Volume cible anatomoclinique :
— Fusion avec IRM (séquences T1, T1 gado, T2, T2 flair) : fusion • o volume initial : volume tumoral macroscopique et marge
des images scanographiques avec une IRM récente. de 2,5 cm jusqu’à 44-46 Gy (après exclusion des barrières
— Délinéation des volumes cibles (Fig. 1 et 3) : anatomiques jugées infranchissables) Ce volume doit couvrir
• Volume tumoral macroscopique (défini au mieux sur la la cavité porencéphalique et l’œdème péritumoral visible sur
séquence IRM en T1 avec injection de gadolinium). les séquences T2 et T2 flair avec une marge d’un à deux cm
• Volume cible anatomo-clinique • o volume réduit : volume tumoral macroscopique et marge
• o volume initial : volume tumoral macroscopique et marge de 1,5 cm jusqu’à 60 Gy (après exclusion des barrières
de 2,5 cm jusqu’à 44-46 Gy (après exclusion des barrières anatomiques jugées infranchissables).
anatomiques jugées infranchissables, telles que l’os ou les • Volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique
méninges). Ce volume doit aussi couvrir toute la zone en + 5 mm
hypersignal sur la séquence IRM en T2 flair avec une marge — Délinéation des organes à risque (Fig. 8) : encéphale, tronc
de 1-2 cm. cérébral, chiasma, yeux, nerf optique, oreille interne, hypo-
• o volume réduit : volume tumoral macroscopique et marge physe, cristallin.
de 1,5 cm jusqu’à 60 Gy (après exclusion des barrières — Validation du plan de traitement : Choisir la balistique qui
anatomiques jugées infranchissables). permet d’obtenir la meilleure couverture du volume cible
Volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique prvisionnel (selon ICRU 62 ; 95 %< volume cible prévisionnel
+ 5 mm. < 107 %)) et un respect des contraintes de doses aux organes
S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22 S19

à risque. (cf. ci dessus). En général, photons de 6 à 10 MV. En Conflits d’intérêts


général, six à huit faisceaux au total : trois ou quatre pour le
volume initial, trois ou quatre pour le volume réduit (Fig. 9 et Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
10). Tous les faisceaux sont utilisés chaque jour. cet article.

Fig. 1. Délinéation du volume tumoral macroscopique (en orange) après fusion d’images. Images scanographiques et remnographiques en séquence T1
après injection de gadolinium fusionnées. Création du volume cible anatomoclinique (rouge) et du volume cible prévisionnel (jaune).
Delineation of gross tumor volume tumoral (orange) after image fusion. Fused CT and MRI images T1-weighted sequence after injection of gadolinium. Creation
of clinical target volume (red) and planned target volume (yellow).

Fig. 2. Délinéation des organes à risque grâce


aux différentes séquences d’IRM (nerfs optiques,
chiasma, tronc cérébral).
Delineation of at-risk organs based on different MRI
sequences (optic nerves, chiasma, brainstem).

Fig. 3. Reconstruction tridimensionnelle des organes cibles (volume tumoral Fig. 4. Balistique de traitement. Ici, quatre faisceaux.
macroscopique en orange) et des organes à risque (yeux, nerfs optiques, Treatment ballistics. Here, four beams.
chiasma, tronc cérébral).
3D reconstruction of target organs (gross tumor volume, orange) and at-risk
organs (eyes, optic nerves, chiasma, brainstem).
S20 S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22

Fig. 6. Obtention des histogrammes dose-volume.


Obtaining dose-volume histograms.

Fig. 5. Dosimétrie.
Dosimetry.

Fig. 7. Délinéation du volume tumoral


macroscopique (rouge) après fusion avec l’IRM
en séquence T1 après injection de gadolinium
et de l’œdème (bleu) après fusion avec l’IRM
en séquence T2 flair.
Delineation of gross tumor volume tumoral (red)
after fusion with T1-weighted MRI sequence after
gadolinium injection and edema (blue) after fusion
with MRI T2-weighted FLAIR sequence.
S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22 S21

Fig. 9. Dosimétrie.
Dosimetry.

Fig. 8. Reconstruction tridimensionnelle des organes cibles et des organes


à risque (yeux, nerfs optiques, chiasma, tronc cérébral).
3D reconstruction of target organs and at-risk organs (eyes, optic nerves,
chiasma, brainstem).

Fig. 10. Histogrammes dose-volume.


Dose-volume histograms.
S22 S. Haberer et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S14-S22

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Ca ncer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S23– S33

Cancers du cavum de l’adulte


Nasopharyngeal cancer

B. Fleury*, M.C. Biston, X. Montbarbon, P. Pommier


Département de radiothérapie, Centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard, 28, rue Laennec, 69008 Lyon, France

RÉSUMÉ

Mots clés : L’objectif de ce travail était de proposer des recommandations pour la délinéation des volumes cibles
Radiothérapie conformationnelle avec des cancers du nasopharynx, la planification de l’irradiation, et de décrire les résultats escomptés
modulation d’intensité en termes d’efficacité et de toxicité. Ces recommandations sont basées sur l’anatomie et l’histoire
Cancer du nasopharynx naturelle des ces tumeurs ainsi que sur les expériences de radiothérapie en modulation d’intensité
Volumes cibles publiées par différentes équipes.
Atlas © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords:
The main objective of this work was to propose recommendations concerning the delineation of the
Intensity modulated radiotherapy target volume of the nasopharyngeal cancers, the planification of the treatment, and describe the
Nasopharyngeal cancer expected results about the efficacity and the toxicities. Theses recommendations are based upon
Target volumes anatomy, natural history of theses tumors, and upon published experiences from different teams
Atlas working with IMRT.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie géographique ; le type III représente ainsi entre 65 % (Amérique


du nord) et 95 % (Chine) des cas [34].
L’incidence varie de 0,5-2/100 000/an dans les zones à faible Le pic se situe vers 40-50 ans, avec une distribution
endémie, à 30-80/100 000/an dans les zones de forte endémie : souvent bimodale (20-30 ans et après 50 ans) et l’homme
Asie du sud-est, en particulier dans la région cantonaise, Taiwan, est plus fréquemment touché que la femme (sex ratio : 2,5-3)
Vietnam, Malaisie, le Bassin méditerranéen et l’Afrique du nord, [5,6,42,43]. Il n’y a pas d’agent étiologique clairement iden-
les populations Esquimaux d’Alaska et du Groenland [5,6,42,43]. tifié. Le virus Epstein Barr est fréquemment retrouvé dans les
On distingue deux grands types histologiques : les carcinomes carcinomes indifférenciés, mais sa causalité n’a encore jamais
épidermoïdes, kératinisants ou non, qui réalisent les types I et II de été clairement établie. Des formes familiales ont été décrites,
l’OMS, et les carcinomes indifférenciés dits UCNT (Undifferenciated mais restent rares. Enfin, les nitrosamines présentes dans les
Carcinoma of Nasopharyngeal Type), qui constituent le type III. La salaisons et fumaisons participent vraisemblablement à la
prévalence respective des différents sous-types varie selon le lieu carcinogénèse [5,42].

* Correspondance.
Adresse e-mail : bxfleury@yahoo.fr (B. Fleury)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S24 B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33

2. Classification Tableau 2
Classification de l’AJCC et de Ho (identique entre les deux systèmes).
AJCC and Ho classifications (identical in two systems).
La classification de l’AJCC (American Joint Committee on
Cancer) [10,12] est la plus couramment utilisée en Europe et Stade 0 Tis N0 M0
en Amérique du nord, alors que la classification de Ho [40], Stade I T1 N0 M0
qui en diffère significativement, est utilisée en Asie. Elles sont Stade IIA T2a N0 M0
rapportées dans les Tableaux 1 et 2. Stade IIB T1 N1 M0
T2a N1 M0

T2b N0, N1 M0
3. Indications de la radiothérapie
Stade III T1 N2 M0

Le traitement de référence est la radiothérapie externe, T2a, T2b N2


associée à une chimiothérapie concomitante dans les formes T3 N0, N1, N2
évoluées [3,31,35]. En cas de récidive locale, une nouvelle radio-
Stade IVA T4 N0, N1, N2 M0
thérapie peut permettre d’obtenir le contrôle local ; il peut s’agir
Stade IVB Tout T N3 M0
d’une radiothérapie externe conformationelle, idéalement avec
modulation d’intensité [9,18,32] ou d’une curiethérapie de bas Stade IVC Tous T Tout N M1

voire de haut débit (pour des récidives limitées, superficielles, Tous T N3 M0


sans infiltration vers les espaces para et rétro-pharyngés ou vers Tous T Tous N M1
la base du crâne) [25,30].

Tableau 1
Classification de l’AJCC et de Ho.
AJCC and Ho classifications.

Stade T Classification de Ho Stade T Classification de l’AJCC

T1 Tumeur restreinte à la muqueuse nasopharyngée T1 Localisation limitée au nasopharynx


ou détectable uniquement par la biopsie
T2 Extension aux fosses nasales, à l’oropharynx, aux muscles T2 Extension aux parties molles de l’oropharynx et/ou aux
adjacents ou atteinte des nerfs cervicaux fosses nasales
T2a T2a : sans extension parapharyngée

T2b T2b : avec extension parapharyngée.

T3 Tumeur T2 avec T3 Atteinte des structures osseuses et/ou atteinte des sinus
maxillaires
T3a : envahissement osseux en-dessous de la base du crâne

T3b : envahissement osseux de la base du crâne

T3c : atteinte des nerfs crâniens

T3d : envahissement orbitaires, du larynx ou de la fosse


infra temporale

T4 T4 Extension intra crânienne, et/ou aux nerfs crâniens,


et/ou à la fosse infra temporale et/ou à l’hypopharynx
et/ou à l’orbite et/ou à l’espace masticateur

Stade N Stade N

N0 Pas d’adénopathie présente N0 Pas d’atteinte ganglionnaire démontrée


N1 Adénopathie(s) cervicale(s) supérieure(s) N1 Adénopathie(s) unilatérale(s), ≤ 6 cm de plus grand
au-dessus du larynx diamètre, au-dessus du creux sus claviculaire
N2 Adénopathie(s) cervicale(s) médiane(s) située(s) N2 Adénopathie(s) bilatérale(s), ≤ 6 cm de plus grand diamètre,
entre le larynx et le creux sus claviculaire au-dessus du creux sus claviculaire

N3 Adénopathie cervicale du tiers inférieur N3 Adénopathie(s) > 6 cm dans sa plus grande dimension
ou du creux sus-claviculaire ou dans le creux sus claviculaire
N3a Adénopathie(s) > 6 cm dans sa plus grande dimension

N3b Atteinte du creux sus claviculaire

Stade M Stade M

M0 Absence de métastase à distance M0 Pas d’atteinte métastatique démontrée

M1 Présence de métastase à distance M1 Présence de métastase (os, poumon, foie, ganglion


extra cervical.. (risque augmente avec l’atteinte N)
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33 S25

4. Modalités de traitement 4.2. Détermination des volumes cibles

4.1. Radio-anatomie – histoire naturelle 4.2.1. Volumes cibles tumoral primitif

4.1.1. Extension tumorale locale Les descriptions apportées dans ce chapitre sont basées sur
des articles décrivant l’utilisation de la RCMI. La très grande
L’analyse de l’extension locale des cancers du nasopharynx majorité de ces articles rapportait des séries de cancers du
requiert une bonne connaissance de l’anatomie ORL et de la nasopharynx localement évolués.
base du crâne. Le nasopharynx peut être décomposé en loges
anatomiques, certaines médianes (espace pharyngé muqueux, 4.2.2. Volume tumoral macroscopique primitif
espace rétropharyngé, espace prévertébral) et d’autres latéra-
les et paires (espaces parapharyngés, espace rétrostylien ou Le volume tumoral macroscopique (GTV) est communément
carotidien, espace masticateur) définies par des fascias plus ou défini comme la masse tumorale objectivable par l’examen cli-
moins résistants à l’extension de la tumeur (fascia prévertébral, nique et endoscopique et les modalités d’imagerie disponibles.
fascia pharyngo-basilaire, diaphragme stylien, aponévrose Notons que l’équipe du Queen Mary Hospital, à Hong Kong, inclut
masticatrice essentiellement) (Fig. 1) [15,24]. systématiquement la totalité du nasopharynx, y compris dans les
L’extension de la tumeur peut être décrite selon trois prin- formes localisés de stades T1-T2, dans un volume défini comme
cipaux axes [33]. « GTV » [22].
L’axe postérolatéral, dans 80 % des cas. Le fascia pharyngo-
basilaire, prolongement du muscle constricteur supérieur du 4.2.3. Volume cible anatomoclinique tumoral primitif
pharynx, fait obstacle mais présente une déhiscence appelée (Tableau 3)
sinus de Morgani, qui laisse passage au muscle élévateur du
palais et au torus tobarius, portion cartilagineuse de la trompe Le volume cible anatomoclinique (CTV) doit couvrir les voies
d’Eustache. Les troubles de perméabilité de la trompe peuvent d’extension précédemment décrites. Les différents auteurs
alors induire un dysfonctionnement de celle-ci : sensation s’accordent pour qu’il inclue :
d’oreille pleine, otite séreuse, épanchement des cellules — en haut : au moins la moitié inférieure du sinus sphénoïdal et
mastoïdiennes. En cas de franchissement, la tumeur peut alors l’étage moyen de la base du crâne (ce qui comprend donc les
atteindre : foramina ovale, épineux et lacerum) [11,22,23,27,28,33,39,41].
— l’espace parapharyngé, et diffuser alors dans son plan crânio- Certains auteurs incluent la fossette du ganglion de Gasser [33]
caudal (Fig. 2) ; ou le sinus caverneux [20] ;
— l’espace carotidien, la tumeur peut alors remonter au travers — en bas : le volume doit couvrir les extensions dans la
du foramen jugulaire ou du canal carotidien et devenir intra muqueuse oropharyngée (espace pharyngée muqueux) [33].
crânienne (Fig. 2). En bas et en arrière, le volume cible anatomoclinique tumoral
Plus loin, la tumeur peut envahir vers l’avant (et latérale- se fusionne avec les espaces ganglionnaires rétropharyngés
ment) les muscles ptérygoïdiens, puis la fosse ptérygomaxillaire [11,19,20,27,28,33,39,41] ;
et remonter vers l’orbite via la fissure orbitaire inférieure (Fig. 3, — latéralement : le volume cible anatomoclinique doit couvrir les
4 et 5) ; plus latéralement, elle peut envahir l’espace masticateur espaces parapharyngés et, pour plusieurs auteurs, les espaces
et remonter jusqu’au foramen ovale (Fig. 3, 4 et 5), pour envahir carotidiens [11,33]. Il est possible d’inclure ces espaces en
le ganglion de Gasser et le sinus caverneux ainsi que les nerfs à fonction de l’extension tumorale locale ou régionale (i.e. enva-
proximité (III, IV, VI). hissement des aires IIA). Dans tous les cas, il faudra couvrir
L’axe postero-inférieur, dans 20 % des cas : on observe une les voies d’extension le long de la trompe d’Eustache. Plus
atteinte de l’espace rétropharyngé et de l’espace prévertébral loin, l’inclusion des muscles ptérygoïdiens médiaux [22,23],
(Fig. 6), avec possibilité de coulée le long de l’axe cervical, en ou médiaux et latéraux [11] est systématique pour plusieurs
théorie jusqu’au médiastin [15]. Plus en arrière, la tumeur peut auteurs ;
s’infiltrer dans le canal vidien et se prolonger dans le foramen — en avant : le volume cible anatomoclinique inclut la partie
lacerum et le sinus sphénoïdal (Fig. 7a et 7b). postérieure des fosses nasales et, pour la plupart des auteurs, le
Enfin, l’axe supérieur direct est possible, par érosion osseuse tiers postérieur des sinus maxillaires [11,22,23,27,28,33,39,41].
de l’os sphénoïde. Il doit aussi inclure les fosses ptérygo-maxillaires, car elles
L’atteinte intra-crânienne est rare (< 10 %) [5]. constituent une voie d’extension importante (cf. supra)
[11,20,22,23,27,28,41] ;
4.1.2. Extension ganglionnaire — en arrière : le clivus est inclus par tous les auteurs [11,20,
22,23,27,28,33,39,41] ; de fait, les espaces pré-vertébraux sont
Le cancer du nasopharynx est extrêmement lymphophile. aussi systématiquement inclus.
L’atteinte ganglionnaire est présente lors du diagnostic dans 70 Le Tableau 3 fait la synthèse des descriptions du volume
à 90 % des cas et souvent bilatérale (50 % des cas), quelle que cible anatomoclinique faites par les différents auteurs. Les
soit la taille tumorale. Les aires les plus fréquemment envahies Figures 6 à 12 représentent le volume cible anatomoclinique
son les II, III, IV et rétropharyngées, mais toutes peuvent être conjuguant les descriptions faites par les équipes citées dans
concernées, notamment l’aire V [3,5,14,26]. ce paragraphe : les zones communes au plus grand nombre
S26 B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33

Tableau 3
Définition du volume cible anatomoclinique (CTV) par les équipes utilisant la modulation d’intensité.
Definition clinical target volume (CTV) by the teams using intensity modulation.

Article Equipe Limites du CTV tumoral

En haut En bas En avant En arrière Latéralement

Marcy et al., CAL, France Sinus sphénoidal Musculature Fosses nasales Espace Espaces
2005 [33] (moitié inférieure) pharyngée Fosses prévertébral parapharyngés
Base du crâne Voile du palais ptérygo-maxillaires Clivus espaces carotidiens
dont foramen Ogive amygdalienne Canal ptérygoïdien
lacerum, foramen Ganglions
ovale et ganglion rétropharyngés
de Gasser

Sultanem et UCSF, USA Sinus sphénoidal Ganglions Fosses ptérygomaxillaires Clivus Espaces
al., 2000 [39] inférieur rétropharyngés Tiers postérieur parapharyngés
Base du crâne des cavités nasales
et des sinus maxillaires

Lee et al., UCSF, USA Partie inférieure Ganglions Fosses ptérygo maxillaires Clivus Espaces
2002 [28] du sinus sphénoïde rétropharyngés - Tiers postérieur parapharyngés
Lee et al., Base du crâne des cavités nasales
2003 [27] et des sinus maxillaires

Eisbruch et U. Michigan, Sinus sphénoïdal Ganglions Apophyses ptérygoïdes Clivus Espaces


al., 2002 [11] USA Base du crâne rétropharyngés Tiers postérieurs parapharyngés
dont sinus caverneux, des cavités nasales (jusqu’à
foramen ovale, et des sinus maxillaires mi amygdales)
foramen épineux Muscles
ptérygoïdiens
Espaces carotidiens

Kwong et al., QMH, Sinus sphénoidal Moitié antérieur Tiers postérieur Clivus Espaces
2006 [22] Hong Kong Base du crâne dont du corps vertébral des cavités nasales Muscles parapharyngés
Kwong et al., pointe de l’os pétreux, de C1 et des sinus maxillaires prévertébraux Trompe d’Eustache
2004 [23] fissure orbitaire Muscles pré Muscles
inférieure, foramen vertébraux ptérygoïdiens
ovale, foramen médiaux
épineux, sinus
caverneux

Tham et al., NCC, Sinus sphénoïde Ganglions - Fosses ptérygo Clivus (moitié Espaces
2009 [41] Singapourg Sinus caverneux rétropharyngés maxillaires antérieure parapharyngés
Pointe des rochers - Tiers postérieur si intact,
Foramen ovale des cavités nasales en entier
et des sinus maxillaires si envahi)

Kam et al., PoWH, Sinus sphénoidal Ganglions - Fosses ptérygo Clivus (moitié Espaces
2004 [20] Hong Kong Sinus caverneux rétropharyngés maxillaires antérieure parapharyngés
pointe des rochers - Tiers postérieur si intact, entiers
des cavités nasales en entier
et des sinus maxillaires si envahi)

sont en rouge, les variantes plus larges sont en orange, celles 4.2.4. Volume cible prévisionnel tumoral primitif.
plus petites sont en jaune. Ces variantes concernent avant tout
l’inclusion des muscles ptérygoïdiens, des espaces carotidiens Les marges pour obtenir le volume cible prévisionnel (PTV)
et des sinus caverneux. Bien entendu, la délinéation du volume tumoral sont de l’ordre de 2 à 3 mm autour du volume tumoral
cible anatomoclinique dépend avant tout de l’extension locale macroscopique ou du volume cible anatomoclinique tumoral
de la tumeur. En se basant sur tout ce qui a été décrit, on selon les équipes [11,20,22,23,27,28,33,39,41]. Deux à trois
pourrait proposer de définir le volume cible anatomoclinique volumes cibles prévisionnels sont créés, en fonction des niveaux
en faisant une extension d’un centimètre autour du volume de doses prescrites. Le volume cible prévisionnel tumoral de
tumoral macroscopique et d’adapter secondairement le volume plus forte dose (PTV T1) est en général créé à partir du volume
créé à l’anatomie et aux zones à risque décrites dans ce para- tumoral macroscopique et un deuxième volume cible prévision-
graphe. Le volume minimal est le volume commun décrit par nel tumoral de dose plus modérée (PTV T2) est créé à partir du
les différents auteurs. volume cible anatomoclinique tumoral. Une équipe construit
un troisième volume cible prévisionnel, sur lequel sera prescrit
une dose intermédiaire entre les deux premiers, correspondant
au volume tumoral macroscopique plus 8 mm [41].
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33 S27

Fig. 2. Extension postéro-latérale : la tumeur peut envahir l’espace graisseux


parapharyngé, l’espace masticateur (muscle pétrygoïdien médial
sur cette coupe) et plus en avant atteindre la fosse ptérygomaxillaire.
Plus en arrière, la tumeur peut s’étendre à l’espace carotidien ( ou rétro stylien).
Fig. 1. Espaces anatomiques composant et bordant le nasopahrynx. Posterolateral extension : the tumor can invade the fatty parapharyngeal space,
Anatomical spaces making up and bordering the nasopharynx. the masticator space (medial pterygoidal muscle on this view) and farther
forward reach the pterygomaxillary fossa. Farther back, the tumor can extend
to the carotid (or retrostyloid) space.

Fig. 3. Voies d’extensions suivant l’espace Fig. 4. Voies d’extensions suivant l’espace Fig. 5. Voies d’extensions suivant la fosse ptérygo
masticateur et la fosse ptérygo maxillaire. masticateur et la fosse ptérygo maxillaire. maxillaire jusqu’à la fissure orbitaire inférieure.
Extension pathways following the masticator space Extension pathways following the masticator space Extension pathways following the pterygomaxillary
and the pterygomaxillary fossa. and the pterygomaxillary fossa. fossa to the inferior orbital fissure.

Fig. 6. Extension postéro inférieure.


Posteroinferior extension.
S28 B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33

Fig. 7a. Extension vers le foramen lacerum.


Extension toward the foramen lacerum.
Fig. 7b. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas).
Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom).

Fig. 8. Exemple d’un volume cible anatomoclinique


sur une scanographie normale, en suivant
les directives des principales équipes (du haut
vers le bas). Une équipe n’inclut dans le volume
cible anatomoclinique que la moitié antérieure
du clivus si celui-ci est intact [41].
Example of a clinical target volume on a normal scan,
following the directives of the main teams (from top
to bottom). One team only included half the clivus
in the clinical target volume if it was intact [41].
Fig. 9. Exemple d’un volume cible
anatomoclinique sur une scanographie normale,
en suivant les directives des principales équipes
(du haut vers le bas).
Example of a clinical target volume on a normal
CT scan, following the directives of the main teams
(from top to bottom).

Fig. 10. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas). La partie
intra-pétreuse de l’espace carotidien a été ici proposée comme variante, les différents auteurs ne précisant pas leurs limites supérieures.
Example of a clinical target volume on a normal scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). The intrapetrous part of the carotid space
was proposed here as a variant ; the different authors did not specify their upper limits.
Fig. 11. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas).
Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom).
Fig. 12. Exemple d’un volume cible anatomoclinique sur une scanographie normale, en suivant les directives des principales équipes (du haut vers le bas).
Une seule équipe inclut systématiquement la moitié antérieure de C1 [22, 23].
Example of a clinical target volume on a normal CT scan, following the directives of the main teams (from top to bottom). Only one team systematically included
the anterior half of C1 [22, 23].
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33 S29

4.2.5. Volume cible ganglionnaire 8. Contrôle tumoral

Etant données la topographie médiane du nasopharynx ainsi Dans les séries publiées, la majeure partie des récidives a lieu
que la richesse du drainage lymphatique, il convient d’inclure soit en plein volume irradié aux plus fortes doses, soit à distance,
systématiquement les aires jugulo-carotidiennes II, III, et IV, mais rarement en bordure (Tableau 4). Les récidives sont décrites
les aires spinales V et rétropharyngées des deux côtés dans le soit comme locales lorsqu’elles surviennent dans le site tumoral
volume prophylactique [13,14]. Un volume à plus forte de dose initial (poursuite évolutive ou récidive à distance du traitement),
sera créé au niveau des aires envahies. Il n’existe actuellement soit comme régionales lorsqu’elles surviennent dans les volumes
aucune donnée permettant d’envisager une adaptation des ganglionnaires, soit comme à distance, lorsqu’elles surviennent
volumes ganglionnaires à traiter en fonction de l’extension locale sous forme de métastases.
de la tumeur.

9. Toxicité aiguë
5. Doses prescrites
Dans les séries de RCMI, il s’agit essentiellement de radio-
La dose et le fractionnement de référence définis à partir des mucite d’intensité variable (grade II ou III, rarement de grade
séries de radiothérapie classiques sont de 70 Gy en fractionne- IV) [19,21,22,28,41], avec entre 5 et 10 % des patients requérant
ment de 2 Gy dans le volume cible tumoral et ganglionnaire et la pose d’une sonde naso-gastrique, les critères exacts de déci-
50 Gy dans les volumes prophylactiques (tumoraux et ganglion- sion de pose n’étant pas rapportés [19,23], de radioépithéliite
naires). Dans le cadre de la modulation d’intensité, il est possible [19,22,23], de dysgueusie, d’hyposialie [19,26,29,39,46]. Une
d’opter pour un boost intégré [37,39], et de définir trois niveaux toxicité hématologique se surajoute en cas de chimioradiothé-
de dose : au moins 70 Gy équivalents en fractions de 2 à 2,2 Gy rapique concomitante [23,26].
dans le volume tumoral à plus haut risque ainsi que dans les
aires ganglionnaires envahies, 60-70 Gy équivalents en fractions
de 1,8 à 2 Gy dans le volume tumoral à bas risque et de 54 Gy 10. Toxicité tardive
équivalents en fractions de 1,8 Gy dans le volume ganglionnaire
prophylactique [22,23,27,28,41,44]. L’équipe du National Cancer Étant donnée la complexité de la région anatomique traitée,
Center de Singapour définit un volume tumoral à risque intermé- les complications potentielles tardives sont nombreuses, mais
diaire, qui correspond au volume tumoral macroscopique plus restent rares, voire exceptionnelles en dehors de l’hyposialie.
5 mm, dans lequel est prescrite une dose de 66 Gy équivalente de Ainsi ont été décrites des hyposialies et xérostomies, avec 25 à
70 Gy [41]. Le Tableau 5 fait la synthèse des volumes tumoraux et 35 % d’asialies complètes [22], des trismus [27,28], une fibrose
doses prescrites par les différentes équipes ; les dose rapportées sous cutanée [1,27-29], des sténoses nasopharyngées [27], des
sont calculées en équivalence de 2 Gy en utilisant le modèle caries (imposant une protection fluorées), une hypoacousie de
linéaire-quadratique [36], en supposant un rapport alpha/béta transmission ou de perception [17,27,28], une nécrose du lobe
de 10 et en négligeant les différences d’étalement. temporal [20,23,28], des troubles cognitifs [8], une paralysie des
paires crâniennes [27], des vertiges centraux ou périphériques,
associés à une insuffisance vertébro-basilaire [45], des sténoses
6. Organes à risque et contraintes de dose carotidiennes [7] ou des pseudo-anévrismes carotidiens pouvant
être responsables d’épistaxis cataclysmiques [23,28] des troubles
Les données sont répertoriées dans le Tableau 6 et sont cognitifs, une insuffisance hypophysaire [38], ou des ulcérations
issues du Guide des procédures en radiothérapie externe 2007, en muqueuses ont été rapportés [4,16,26,29].
fractionnement de 2 Gy, à raison de 5 séances par semaine [2].

11. Cas clinique commenté


7. Balistique, dosimétrie
M. D. M., 25 ans, a été adressé pour carcinome du nasopha-
Le traitement peut être délivré soit dans deux volumes [22] : rynx. Ce patient n’avait pas d’antécédent médical ou chirurgical
— un volume tumoral, traité avec modulation d’intensité, et un particulier. Le tabagisme était estimé à une dizaine de cigarettes
volume sus-claviculaire, traité sans modulation par jour. Il travaillait comme chauffeur routier. Depuis mai 2009,
— soit dans un volume unique [20,27,28,41,44], traité avec il se plaignait d’une otalgie droite, puis gauche. Rapidement
modulation d’intensité. Le volume tumoral est généralement sont apparues des adénopathies cervicales. Un premier bilan
traité avec une balistique comportant de 5 à 9 faisceaux équi- comportant échographie et scanographie cervicale a été réalisé ;
distants. Une technique de pondération inverse est utilisée : celui-ci a confirmé l’existence d’adénopathies cervicales bilaté-
une optimisation propre à chaque centre et dépendante du rales mais ne s’est pas étendu jusqu’au cavum. M. M. a ensuite
type de logiciel de planification est élaborée. Celle-ci doit été adressé au chirurgien ORL. L’interrogatoire et l’examen
permettre au logiciel d’optimiser la distribution de dose pour clinique objectivaient alors une perte de 13 kg en deux mois
chacune des incidences de faisceau, afin d’obtenir une couver- (poids de forme : 110 kg), une polyadénopathie cervicale avec
ture optimale pour les différents volumes cibles prévisionnels atteinte clinique spinale gauche et sous-mandibulaire droite,
tout en préservant au mieux les organes à risque. et en nasofibroscopie une lésion du cavum qui a été biopsiée.
S30 B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33

Tableau 4
Résultats des principales équipes travaillant en RCMI.
Results of the main teams working in RCIM.

Référence Equipe Nombre Stade III-IV Suivi Contrôle Contrôle Contrôle à Survie Détails des récidives
patients (%) médian local ganglionnaire distance globale
(mois)

Sultanem et UCSF, USA 35 72 21,8 100 % 100 % à 4 ans 57 % 94 % 7 récidives à distance


al., 2000 [39] à 4 ans à 4 ans à 4 ans

Kwong et al., QMH, 33 0 24 100 % 92,3 % à 3 ans 100 % 100 % 1 poursuite évolutive
2004 [22] Hong Kong à 3 ans à 3 ans à 3 ans

Kwong et al., QMH, 50 100 25 90 % - 94,2 % 92,1 % 2 poursuites évolutives


2006 [23] Hong Kong à 2 ans à 2 ans à 2 ans et 3 récidives locales
en plein champ
2 récidives à distance

Lee et al., UCSF 67 70 31 97 % - 66 % 88 % 1 récidive locale


2002 [28] à 4 ans à 4 ans à 4 ans 1 récidive
ganglionnaire
17 récidives à distance

Tham et al., NCC, 195 63 36,5 89,6 % - 89,2 % 94,3 % 10 récidives locales
2009 [41] Singapourg à 3 ans à 3 ans à 3 ans 3 récidives
ganglionnaires
2 récidives
loco-régionales
19 récidives à distance

Wolden et MSKCC, 74 77 35 91 % 93 % à 3 ans 78 % 83 % 6 récidives locale dont


al., 2006 [44] USA à 3 ans à 3 ans à 3 ans 5 en plein champ
et & en bordure

Kam et al., PoWH, 63 57 29 92 % 98 % à 3 ans 79 % 90 % 4 récidives locales


2004 [20] Hong Kong à 3 ans à 3 ans à 3 ans 1 récidive
ganglionnaire
13 récidives à distance

Abréviations : MSKCC : Memorial Sloan Ketterin Cancer Center, NCC : National Cancer center, PoWH : Prince of Whales Hospital, QMH : Queen Mary Hospital
UCSF : University of California - San Francisco, U. Michigan : Université du Michigan

Tableau 5
Doses prescrites sur les différents volumes par les équipes ayant publié leur expérience en RCMI. Les doses sont données en équivalence pour des fractions de 2
Gy, en supposant un ratio alpha/béta de 10 et en négligeant les différences d’étalement.
Doses prescribed for the different volumes by teams that have published their experience on RCIM. The doses are given as equivalence for 2-Gy fractions, assuming an
alpha:beta ratio of 10 and ignoring the differences in extension.

Référence Equipe Définition PTV T1 Dose au PTV T1 Définition PTV T2 Dose PTV T2

Kam et al., 2004 [20] PoW GTV T + 2 mm 66 GyE CTV + 3 mm 59 GyE

Wolden et al., 2005 MSKCC GTV T + 10 mm 74 GyE CTV + 5 mm 54 GyE


[44] (5 mm en postérieur)

Kwong et al., 2004 [22] QMH GTV 68 - 70 GyE CTV + 2 mm 66 - 68 GyE

Kwong et al., 2006 [23] QMH GTV T 77 GyE CTV + 2 mm 70 GyE

Lee et al., 2002 [28] UCSF GTV T 70 GyE CTV 59 GyE

Lee et al., 2003 [27] UCSF GTV T 70,7 GyE CTV 59 GyE

Tham et al., 2009 [41] NCC GTV + 3 mm 70,7 GyE CTV + 3 mm 59 GyE

Abréviations : GyE : Gy en équivalent en fractions de 2 Gy, MSKCC : Memorial Sloan Kettering Cancer Center, NCC : National Cancer center, PoWH : Prince of
Whales Hospital, QMH : Queen Mary Hospital UCSF : University of California - San Francisco

L’analyse histologique a conclu à un carcinome de type III de notable. Un bilan et une mise en état dentaire ont été organisés
l’OMS (UCNT). L’IRM montrait une lésion envahissant les espaces pendant cette phase du traitement, ainsi qu’une prise en charge
parapharyngés et carotidiens et le muscle ptérygoïdien médial nutritionnelle.
du coté droit, mais sans infiltration de la base du crâne, une La réévaluation par IRM après deux cures a conclu à une
extension ganglionnaire qui confirmait les données cliniques réponse partielle. Une chimioradiothérapie concomitante (avec
mais intéressait aussi d’autres territoires (niveaux IV droit et du cisplatine toutes les trois semaines) a été organisée trois
gauche, sus-claviculaire gauche). La lésion a été classée T4N2c semaines après la troisième cure. Les volumes ont été construits
(Fig. 13 et 14). Une chimiothérapie néoadjuvante a été réalisée à partir de l’envahissement avant la chimiothérapie. Une tech-
(trois cures associant cisplatine et 5-fluoro-uracile) sans incident nique de boost intégré a été utilisée.
B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33 S31

Tableau 6 — PTV T60 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été pres-
Contraintes de dose. crits 60 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait
Restriction dose.
au volume cible antomoclinique (délinéé sur les bases de ce
Organe Contrainte(s) qui a été décrit plus haut) avec une marge de 3 mm.
Tronc cérébral Dose max : 50 Gy Volumes cibles ganglionnaires :
Nerf optique, chiasma Dose max : 54 Gy — PTV N66 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été pres-
Moelle épinière cervicale Dose max : 45 Gy crits 66 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait
Cerveau (lobe temporal) Dose max : 60 Gy aux niveaux ganglionnaires initialement envahis (niveau
Œil Dose moyenne < 35 Gy IIA droit, IV droit et gauche, V gauche) avec une marge de
Cristallin Dose la plus basse possible 5 mm ;
Parotide controlatérale V26 < 50 % — PTV N54 : volume cible prévisionnel dans lequel a été prescrit
Dose moyenne < 30 Gy
54 Gy en 30 fractions sur six semaines, qui correspondait aux
Parotide homolatérale Dose la plus basse possible aires IB, II, III, IV et rétropharyngées non couvertes par les deux
Articulation temporo Dose max : 65 Gy volumes précédents, avec une marge de 5 mm.
mandibulaire
Les organes à risque délinéés ont été : les lobes temporaux,
Cavité buccale (hors PTV) Dose max : 55 Gy
les oreilles internes (cochlée + vestibule), le tronc cérébral, la
Larynx sain Dose max : 20 Gy dans toute
partie du volume quant moelle épinière, le chiasma, les articulations temporo-mandi-
l’extension tumorale le permet bulaires, les globes oculaires, les nerfs optiques, les parotides,
Oreille interne Dose max : 60 Gy
la cavité buccale, le larynx et la trachée. Les contraintes de
Cochlée Dose max : 58 Gy dose recommandées dans le Guide des procédures 2007 de la
Thyroïde A documenter Société française de radiothérapie oncologiques (SFRO) ont été
appliquées.
Une balistique à sept faisceaux isopondérés équidistants a été
retenue. La Figure 17 donne une représentation de la distribution
Volumes cibles et doses dans la tumeur [le volume tumoral de dose.
macroscopique (GTV) et le volume cible anatomoclinique (CTV)
sont représentés sur les Fig. 15 et 16] :
— PTV T66 : volume cible prévisionnel dans lequel ont été Conflits d’intérêts
prescrits 66 Gy en 30 fractions sur six semaines (70 GyE), qui
correspondait au volume tumoral macroscopique initial avec Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
une marge de 3 mm ; cet article.

Fig. 14. IRM en coupe axiale transverse, en séquence T1 avec injection de


Fig. 13. IRM en coupe axiale transverse, séquence T1 avec injection de gadolinium. Atteinte ganglionnaire jugulocarotidienne bilatérale, dans le
gadolinium. Infiltration des espaces parapharyngés et carotidiens. tiers inférieur du cou.
MRI, transverse axial view, T1-weighted sequence with gadolinium injection. MRI, transverse axial view, T1-weighted sequence with gadolinium injection.
Infiltration of the parapharyngeal and carotid spaces. Bilateral jugulocarotid lymph node involvement in the inferior third of the neck.
S32 B. Fleury et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S23-S33

Fig. 16. Volumes cibles anatomoclinqiues (CTV) T66 et T60.


T66 and T60 clinical target volumes (CTVs).
Fig. 15. Volumes CTV T66 et CTV T60.
CTV T66 and CTV T60 volumes.

Références

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Cancer de l’oropharynx
Oropharyngeal Cancer

C. Lafonda,*, Y. Pointreaub,c,d,e, C. Debelleix f,g, F. Denisa, G. Calaisb, J. Bourhish, J. Thariati


a Centre Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
b Service de radiothérapie, Centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2, Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France
c Université François-Rabelais-de-Tours, génétique immunothérapie chimie & cancer, 37000 Tours, France
d CNRS, UMR 6239 « Génétique, Immunothérapie, Chimie et Cancer », 37000 Tours, France
e CHRU de Tours, Laboratoire de Pharmacologie-Toxicologie, 37000 Tours, France
f Service de radiothérapie-Centre Hospitalier Dax-Cote d’Argent boulevard Yves-du-Manoir, 40100 Dax, France
g Service de radiothérapie-Hôpital Saint André, CHU Bordeaux, 1, rue Jean-Burguet, 33800 Bordeaux
h Département de radiothérapie-oncologie, Institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, France
i Département de radiothérapie oncologie / IBDC CNRS UMR 6543, Centre de cancer Antoine-Lacassagne, Université Nice Sophia-Antipolis, 33, avenue Valombrose,

06189, Nice cedex 2, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 8b et 8c sont visibles Les cancers de l’oropharynx sont des lésions fréquentes. Leur traitement comporte généralement une
uniquement sur : http : //www. radiothérapie soit exclusive, associée ou non à la chimiothérapie, soit en postopératoire. La définition
sciencedirect.com/ des volumes cibles est rendue difficile par la complexité anatomique de cette zone. L’objectif de ce
travail était de préciser les principes de l’irradiation conformationnelle tridimensionnelle illustrés
Mots clés : par un cas clinique.
Cancer de l’oropharynx © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Radiothérapie conformationnelle Tous droits réservés.
Volumes cibles
Atlas
ABSTRACT

Keywords:
Cancers of the oropharynx are common lesions. Their treatment often includes radiation therapy
Oropharyngeal cancer either exclusively or in combination with chemotherapy or after surgery. The definition of target
Conformal radiotherapy volumes is made difficult by the complex anatomy of this area. The aim of this work is to clarify the
Target volumes principles of 3D conformal radiation illustrated by a case report.
Atlas © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie 2. Classification

Le cancer des voies aérodigestives est le 4e en France avec 2.1. Classification TNM de l’UICC de 2002
19 600 nouveaux cas en 2000 et 5600 décès chez les hommes
et 900 chez les femmes [1]. C’est cette classification qui est de loin la plus utilisée [2].
Les facteurs de risque sont l’alcool, le tabac et les virus dont les
Human Papilloma Virus. Le carcinome épidermoïde est de loin le plus 2.1.1. Tumeur : T
fréquent avec 85 à 90 % des cas puis suivent les lymphomes malins
et enfin les adénocarcinomes. D’autres tumeurs plus rares ont été — Tis : Carcinome in situ.
décrites mais ne seront pas abordées ici. De la même façon, les variants — T1 : Tumeur ≤ à 2 cm dans sa plus grande dimension.
du carcinome épidermoïde commun ne seront pas détaillés. — T2 : Tumeur ≥ à 2 cm et ≤ 4 cm.

* Correspondance.
Adresse e-mail : c.lafond@cjb72.org (C. Lafond)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42 S35

— T3 : Tumeur > 4 cm. profondeur. Ces différents volumes sont décrits dans les articles
— T4 : T4a : tumeur envahissant une des structures suivantes : de Lapeyre et al. et Eisbruch et al. [4,5].
larynx, musculature profonde ou extrinsèque de la langue,
muscle ptérygoïdien médian, palais osseux, mandibule. 2.4. Volumes cibles et organes à risque
— T4b : tumeur envahissant une des structures suivantes : muscle
ptérygoïdien latéral, apophyses ptérigoïdes, paroi latérale du Les volumes cibles et les contours des organes à risque sont
nasopharynx, base du crâne ou englobant l’artère carotide. déterminés à partir des coupes tomodensitométriques réalisées
avec un patient en position de traitement avec une contention
2.1.2. Ganglions : N thermoformée personnalisée à 3 ou 5 points (5 points en cas de
traitement avec modulation d’intensité) [6]. Typiquement, la
— N0 : pas de signe d’atteinte des ganglions lymphatiques scanographie est réalisé avec des coupes de 3 mm d’épaisseur
régionaux. tous les 3 mm, avec injection de produit de contraste iodé si
— N1 : métastase dans un seul ganglion lymphatique homolatéral possible et idéalement en double injection temps veineux et
inférieur ou égal à 3 cm dans sa plus grande dimension. artériel (en l’absence d’allergie ou d’altération de la fonction
— N2 : métastase unique dans un seul ganglion lymphatique rénale), en particulier dans le cas d’un traitement avec modu-
homolatéral supérieur strictement à 3 cm et inférieur ou égal à lation d’intensité. Des fusions d’images avec l’IRM ou la TEP
6 cm dans sa plus grande dimension, ou métastases ganglion- peuvent être utiles. Le malade est en décubitus bras le long du
naires multiples, toutes inférieures ou égales à 6 cm. corps, tête en hyper-extension dans une cale mousse adaptée à la
— N2a : métastase dans un seul ganglion lymphatique supérieur courbure du cou. Les épaules sont en position basse. Un espaceur
strictement à 3 cm mais inférieur ou égal à 6 cm. de langue, dans l’idéal personnalisé à l’arcade dentaire, permet
— N2b : métastases homolatérales multiples toutes inférieures l’épargne des glandes salivaires accessoires du palais pour les
ou égales à 6 cm. tumeurs de la langue mobile et de la base de langue.
— N2c : métastases bilatérales ou controlatérales toutes infé-
rieures ou égales à 6 cm. 2.5. Les volumes cibles
— N3 : métastases supérieures à 6 cm.
Le volume cible macroscopique (Gross Tumor Volume, GTV)
2.1.3. Métastase : M est défini d’après les données cliniques et para cliniques du bilan
pré thérapeutique (examen clinique, TDM, IRM et éventuellement
— M0 : pas de métastase à distance. TEP FDG) et se décompose en un volume tumoral et un volume
— M1 : présence de métastase(s) à distance. ganglionnaire. Le schéma initial de la lésion et la description de
la panendoscopie sont primordiaux à sa définition en particulier
2.1.4. Stadification dans le cas d’une chimiothérapie néo-adjuvante.
Le volume cible anatomoclinique (Clinical Target Volume, CTV)
— Stade 1 : T1N0M0. peut être décomposé en un volume à haut risque et un volume
— Stade 2 : T2N0M0. à bas risque eux-mêmes décomposés en volumes ganglionnaires
— Stade 3 : T1T2N1M0 ; T3N0M0. et tumoral :
— Stade 4 : correspond aux autres cas. — les CTV N, CTV N+R+ à haut risque et CTV N0 à bas risque pour
les aires ganglionnaires ;
2.2. Indications de la radiothérapie — et CTV T ou lit opératoire (CTV lit op) à haut risque et CTV T
et lit op à bas risque ;
Ce travail n’a pas pour but d’être exhaustif dans les indica- — le CTV T à haut risque consiste en une extension aux tissus
tions de la radiothérapie. Il présente les grandes indications. mous adjacents du GTV T, avec une marge de 3 à 10 mm en
Pour les tumeurs « superficielles » classées T1-3 NO-1, deux fonction de l’extension de la lésion et des barrières anatomi-
stratégies thérapeutiques sont équivalentes : une radiothérapie ques et modes de diffusion selon le site primitif [4] ;
de la tumeur et des ganglions et une chirurgie de la tumeur et — la dose prescrite est de 66 à 70 Gy [5,7].
des ganglions. En fonction de l’analyse anatomopathologique
de la pièce opératoire, une radiothérapie et(ou) une chimiothé- 2.6. En postopératoire
rapie peuvent être décidées. Pour les tumeurs classées T1 T2
N2 ou N3 et T3 T4 N0-N3, une radiothérapie externe peut être Le CTV lit op à haut risque correspond au lit opératoire
indiquée en première intention, le plus souvent en association avec une marge de 10 mm en cas de berges atteintes ou limites
à une chimiothérapie concomitante à base de sel de platine ou (< 5 mm) [5,7].
de cetuximab ou après la chirurgie, en cas de risque élevé de
récidive [3]. 2.7. Volumes ganglionnaires

2.3. Histoire naturelle des cancers de l’oropharynx Le GTV N est défini d’après les données cliniques et paracli-
niques du bilan préthérapeutique (examen clinique, TDM, IRM
L’extension locale des tumeurs de l’oropharynx se fait de proche et éventuellement TEP FDG).
en proche vers les structures avoisinantes, les tissus conjonctifs Le CTV N à haut risque (patient non opéré) consiste en une
et épithéliaux ainsi que vers les structures lymphoïdes puis en extension géométrique de 5 mm dans toutes les directions pour les
S36 C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42

adénopathies de taille inférieure ou égale à 3 centimètres. En effet En cas d’atteinte ganglionnaire du groupe II ou si la maladie et
d’après une étude anatomopathologique de S. Apisarnthanarax classé N2 ou N3, il est recommandé d’inclure l’espace rétrostyloï-
et al., [8] 98 % des cellules tumorales sont à moins de 5 mm de dien dans le CTV N0. S’il existe une atteinte du groupe IV ou Vb, il
l’adénopathie si sa taille est inférieure à 3 cm. Il n’y a pas de est recommandé d’inclure la fosse sous-claviculaire [9].
relation entre l’extension extra-capsulaire et la taille du ganglion En situation postopératoire, en cas d’atteinte ganglionnaire
pour les adénopathies n’excèdait pas 3 cm. Si le muscle en regard avec rupture capsulaire, il faut prendre toute l’aire ganglionnaire
de l’adénopathie est proche ou envahi, il faut inclure celui-ci sur avec une extension à la peau du patient [7].
au moins un centimètre [9].
2.8. Organes à risque
Le CTV N+R+ (patient traité après la chirurgie) consiste à
contourer la zone initialement atteinte avec une marge de 1 cm. L’irradiation de la sphère ORL est rendue difficile par la présence
Si le muscle en regard de l’adénopathie est envahi ou proche, il de nombreux organes à risque dont la moelle épinière, le tronc
faut inclure le muscle en question sur toute sa hauteur corres- cérébral, les nerfs optiques et le chiasma, qui sont des organes
pondant au niveau ganglionnaire atteint [9]. en série et pour lesquels les contraintes de doses doivent être
Le CTV T et lit op à bas risque correspond au risque d’atteinte respectées afin d’éviter des complications sévères, d’autant plus que
microscopique péritumorale et est faite à une dose de 50 à souvent la radiothérapie est associée à la chimiothérapie. D’autres
56 Gy. Ce volume dépend de l’histoire naturelle des cancers, organes à risque, tels que les parotides, le larynx, la cochlée, l’oreille
de la localisation tumorale et de l’extension tumorale (stade T). interne, l’œil et le cristallin, se trouvent également à proximité des
Des recommandations pour la définition des volumes ont été zones à traiter. D’autres organes à risque pourront être délimités en
publiées par Lapeyre et al. et Eisbruch et al. [4,5] (Tableau 1). fonction des techniques d’irradiations, comme le plexus brachial,
Le CTV N0 consiste à inclure les aires ganglionnaires en en s’aidant par exemple de l’article de Hall et al. [11].
fonctions de leur risque d’atteinte comme défini par le GORTEC Les contraintes de dose classiquement utilisées en France
(groupe d’oncologie et radiothérapie tête et cou). Leur délimita- sont répertoriées dans le Guide de procédures de la radiothé-
tion est définie par le consensus intergroupe qui édite un atlas rapie externe publié par la SFRO [12] et seront prochainement
des différents niveaux ganglionnaires [10,17]. actualisées :

Tableau 1
Oropharynx.
Volume péritumoral microscopique (CTV global) à délimiter selon les sous-localisations tumorales. Le principe repose sur le fait de prendre
au moins une structure anatomique (« CTV structure ») de contiguïté supplémentaire par rapport à la tumeur macroscopique. Le CTV global
est obtenu en additionnant les différents « CTVs structures » sélectionnés [4,5].
Oropharyngeal cancer.
Clinical target volumes according to tumour location. The aim is to include at least one adjacent anatomical area to CTV. Addition of “CTV structures” leads to global CTV [4, 5].

Sous-localisations Volumes à délimiter pour obtenir le CTV global

Pilier antérieur CTV amygdale et pilier postérieur, CTV pilier antérieur et sillon amygdaloglosse, CTV base de langue homolat.
(2 cm), CTV langue postérieure homolat. (2 cm), CTV plancher postérieur homolat. (2 cm), CTV glande
sous-mandibulaire homolat., CTV voile homolat., CTV joue (2 cm), CVT trigone rétromolaire homolat., gencive
postérieure homolat. (2 cm), muscle ptérygoïdien médial homolat.
Amygdale CTV amygdale et pilier postérieur homolat., CTV pilier antérieur et sillon amygdaloglosse homolat., CTV base
de langue homolat. (2 cm), CTV langue postérieure homolat. (2 cm), CTV voile homolat., CTV carrefour
des 3 replis homolat., CTV espace parapharyngé homolat., CTV foramen ovale homolat., CTV Gasser homolat.
Tumeur évoluée : prendre en plus : muscle ptérygoïdien médial homolat., branche montante de mandibule
homolat., CTV espace carotidien homolat., CTV sinus caverneux homolat., CTV rétropharyngé homolat., CTV cavum
homolat.
Pilier postérieur CTV paroi pharyngée postérieure homolat., CTV pilier postérieur et amygdale homolat., CTV voile homolat.,
CTV cavum homolat., CTV espace rétropharyngé homolat., repli pharyngoépiglottique homolat., CTV carrefour
des 3 replis homolat., CTV parapharyngé homolat.,
Voile CTV voile bilat., CTV amygdale et piliers bilat. (partie supérieure), CTV cavum homolat., CTV trigone rétromolaire
supérieur homolat., CTV espace parapharyngé homolat.
Tumeur avec extension supérieure : prendre en plus : muscle ptérygoïdien médial homolat., CTV sinus sphénoïdal
homolat., CTV foramen ovale homolat., CTV Gasser homolat.
Tumeur latéralisée : prendre en plus : CTV fosse ptérygomaxilllaire homolat.
Sillon amygdaloglosse CTV sillon amygdaloglosse et pilier antérieur homolat., CTV amygdale et pilier postérieur homolat., CTV base
de langue homolat., CTV langue et plancher* (1/3 postérieur) homolat., CTV vallécule homolat., CTV carrefour
des 3 replis homolat., CTV espace parapharyngé homolat.,
Base de langue CTV base de langue bilat., CTV vallécule homolat., CTV langue homolat. (2 cm), CTV sillon amygdaloglosse
homolat., CTVs amygdale et piliers homolat.
Tumeur évoluée : prendre en plus : CTV langue bilat., CTV racine de langue et plancher* bilat., CTV glandes
sous-mandibulaires bilat., CTV espace parapharyngé bilat., CTV espace carotidien bilat.
Vallécule CTV base de langue bilat., CTV vallécule bilat., CTV carrefour des 3 replis homolat., face linguale de l’épiglotte,
espace préépiglottique.
Tumeur latéralisée : prendre en plus : sinus piriforme (partie supérieure), paroi pharyngée latérale (2 cm)
Paroi pharyngée postérieure CTV paroi pharyngée postérieure (marge > 2 cm), CTV pilier postérieur de l’amygdale bilat., CTV espace
parapharyngé homolat.., CTV espace rétropharyngé homolat., CTV cavum homolat., CTV voile homolat.,

Homolat. : homolatéral ; bilat. : bilatéral ; CTV : volume cible anatomoclinique.


*muscles génioglosse, géniohyoïdien, mylohyoïdien et glandes sublinguales
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42 S37

— dose maximale à la moelle 45 Gy ; Il s’agit essentiellement d’épidermite, de mucite, d’hyposialie,


— nerf optique : dose maximale de 54 Gy ; de dysphagie, dont la fréquence, celles de grades 2-3, varie de
— chiasma : dose maximale de 54 Gy ; 25 % à 61 % en fonction de l’association à une chimiothérapie et
— tronc cérébral : dose maximale de 50 Gy ; de son type [13-15].
— œil : dose moyenne < 35 Gy ;
— cristallin : dose la plus basse possible ; 2.11. Toxicité tardive
— parotide controlatérale V26 < 50 %, dose moyenne < 30 Gy ;
— articulation temporo-mandibulaire, dose maximale < 65 Gy ; La séquelle la plus fréquente est l’hyposialie en raison de la forte
— larynx : dose maximale < 20 Gy ; sensibilité des glandes salivaires aux radiations ionisantes variant
— oreille interne : dose maximale de 60 Gy ; en fonction des auteurs de 14 % à 57 % de grade ≥ 2 [13, 16].s
— plexus brachial : dose maximale de 55 Gy.
Ces doses sont données pour un fractionnement et un étale- 3. Cas clinique
ment classiques de 5 fractions de 2 Gy par semaine.
Respecter toutes ces contraintes de doses est parfois difficile, Il s’agissait d’un patient de 61 ans, marié, père de 2 enfants,
en fonction des localisations et de la technique disponible. Il faut médecin, en parfait état général (classe 0 selon l’OMS), pesant 75 kg
donc faire un compromis en privilégiant le contrôle tumoral et pour 1,70 m, ayant perdu 3 kg depuis un mois, sans antécédent, en
les organes en série. particulier d’intoxication tabagique ou alcoolique. L’interrogatoire
retrouvait une dysgeusie depuis environ un an, avec une première
2.9. Balistique consultation auprès d’un chirurgien ORL ne retrouvant pas de lésion
primitive. Deux mois plus tard, le patient a reconsulté pour une
La balistique peut être assez simple en utilisant deux déviation de la pointe de la langue. Une scanographie cervico-
faisceaux latéraux et un faisceau antérieur pour le creux sus- thoracique a alors été réalisée et a mis en évidence une masse de
claviculaire avec une réduction à 40 Gy au niveau de la moelle la base de langue droite venant au contact de la vallécule droite
et deux faisceaux spinaux jusqu’à 50 Gy et deux faisceaux mesurant 22*32 mm, associée à une adénomégalie du groupe II
latéraux réduits en avant de la moelle. Mais le plus souvent elle droit de 32*22 mm (Fig. 1). Le bilan a alors été complété par une
est adaptée à chaque patient après avoir défini un isocentre pour IRM faciale qui a retrouvé une lésion de 30*42 mm, affleurant la loge
couvrir au mieux les volumes cibles et épargner les organes à hyo-thyro-épiglottique et envahissant le muscle génio-glosse, asso-
risques. Le complément jusqu’à 66-70 Gy utilisera des faisceaux ciée à une adénopathie nécrotique du groupe II droit de 37 mm (Fig.
de photons et/ou d’électrons. Des filtres en coin sont souvent 2). Une TEP a retrouvé la lésion primitive sans extension à distance
nécessaires pour obtenir une dosimétrie homogène. Dans le cas (Fig. 3). La biopsie était en faveur d’un carcinome épidermoïde. Le
d’un traitement avec modulation d’intensité, on utilise souvent dossier a été discuté en réunion de concertation pluri-disciplinaire
4 à 7 faisceaux équidistants. et une indication de chimioradiothérapie exclusive retenue après
pose préalable d’une gastrostomie. Les contours ont été réalisés
2.10. Toxicité aiguë après fusion avec l’IRM.
Une dose de 70 Gy a été prescrite aux CTV2 T et ganglionnaire
La radiothérapie de l’oropharynx entraîne des effets aigus et 50 Gy aux CTV1 T et N (Figs. 4-10). Le traitement a été réalisé
fréquents et invalidants pour les patients, d’autant plus que ce avec modulation d’intensité en deux temps (un temps de 50 Gy
traitement est couplé à la chimiothérapie. puis un complément de 20 Gy).

Fig. 1. Coupes transversales et sagittales de la scanographie diagnostique. Fig. 2. Coupe transversale de l’IRM.
Axial and sagital views on CT scan. Axial MRI view.
S38 C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42

Fig. 3. Images de la TEP.


PET-CT imaging.

Fig. 4. Contours du volume cible


anatomoclinique (CTV) 70 Gy T et N
(rouge), parotides droite et gauche
(vert).
CTV 70 Gy T and N (red), both parotid
glands (green).
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42 S39

Fig. 5. Contours du volumes cibles


anatomocliniques (CTV) 50 Gy T et
N (rose), parotides droite et gauche
(vert).
CTV 50 Gy T and N (pink), both parotid
glands (green).

Fig. 6. Contours des volumes


cibles prévisionnels (PTV) 70 Gy
(bleu) et 50 Gy (violet), CTV 50
Gy (rose).
PTV 70 Gy (blue) and 50 Gy (violet),
CTV 50 Gy (pink).
S40 C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42

Fig. 7. Balistique.
Radiation-therapy fields.

Fig. 8 a, b, c. Dosimétrie.
Dosimetry.
C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42 S41

Fig. 9 a, b. Histogrammes dose-volume : CTV (volume


cible anatomoclinique) 50 Gy (rose), hypophyse (vert),
PTV1 (volume cible prévisionnel) 50 Gy T et N droit et
gauche (bleu ciel), PTV2 70 Gy T et N droit (bleu foncé).
Dose volume histograms: CTV 50 Gy (pink), hypophysis
(green), PTV1 50 Gy T and right and left N (light blue),
PTV2 70 Gy T and right N (dark blue).

Fig. 10. Histogramme dose-volume : moelle (vert).


Dose-volume histogram of spinal cord (green).
S42 C. Lafond et al. / Cancer/Radiothérapie 14 (2010) S34-S42

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Ca ncer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S43– S51

Cancer de l’hypopharynx et du larynx : proposition de sélection


et délimitation des volumes cibles microscopiques péri-tumoraux
(aires ganglionnaires exclues)
Hypopharynx and larynx cancers: propositions for the selection and the delineation
of peritumoral microscopic disease volumes (lymph nodes excluded)

M. Lapeyrea, *, C. Baillyb, I. Toledanoa, A. Montalbanc, M. Russierc


a Département de radiothérapie, centre Jean-Perrin, 58 rue Montalembert, BP 5026, 63011 Clermont Ferrand cedex 1, France
b Département de radiodiagnostic, centre Jean-Perrin, 58 rue Montalembert, BP 5026, 63011 Clermont Ferrand cedex 1, France
c Département de chirurgie ORL, centre Hospitalier universitaire, hôpital Gabriel-Montpied, 58 rue Montalembert, 63003 Clermont Ferrand cedex 1, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Présenté au printemps de l’Afcor Cet article propose le concept de la sélectivité des zones péritumorales microscopiques à traiter
(Association pour la formation continue de principe (à une dose de 50 Gy ou 54-60 Gy pour une irradiation avec modulation d’intensité
des oncologues radiothérapeutes) le en un temps) dans les carcinomes épidermoïdes du larynx et de l’hypopharynx en se basant sur le
27 mars 2010, Ecquevilly 78920, France mode d’extension des cancers. Il présente les différentes délimitations des volumes cibles anatomo-
cliniques (CTV) péritumoraux, pour la réalisation d’une radiothérapie conformationnelle classique
Mots clés : ou avec modulation d’intensité (larynx sus-glottique, glottique, sous-glottique, sinus piriforme, paroi
Volume cible anatomo-clinique pharyngée latérale et postérieure et région rétrocricoïdienne). Il ne traite pas des indications de
CTV radiothérapie externe mais précise les volumes à traiter si une radiothérapie est retenue. Les volumes
Cancer cibles anatomo-cliniques sont illustrés sur des planches scanographiques.
Radiothérapie conformationnelle © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Larynx
Tous droits réservés.
Hypopharynx
Atlas
ABSTRACT

Keywords:
This article reviews the concept of selectivity in peritumoral microscopic disease to be included
Clinical target volume in the Clinical Target Volume (CTV) for elective treatment for larynx and hypopharynx squamous
CTV cell carcinoma (50 Gy or 54-60 Gy for SIB-IMRT), using the local tumoral spread. The objective
Conformal radiotherapy of the present article is to present the different delineations of the target volumes, required for
Cancer an appropriate application of 3-DCRT and IMRT (supraglottic larynx, vocal cord, subglottic larynx,
Larynx pyriform sinus, lateral and posterior pharyngeal wall and postcricoid pharynx). These propositions
Hypopharynx are for the delineation of microscopic peritumoral target volumes when external beam irradiation is
Atlas required. CTVs are illustrated on CT sections.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

* Correspondance.
Adresse e-mail : michel.lapeyre@cjp.fr (M. Lapeyre)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S44 M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51

1. Introduction peritumorales sont décrites [1,7,18,27,28,30,34]. La description


radio-anatomique s’applique à l’imagerie scanographique avec
La radiothérapie des cancers du larynx et de l’hypopharynx injection de produit de contraste qui est réalisée lors des acqui-
nécessite une bonne connaissance de la radio-anatomie et de sitions pour les simulations virtuelles. Les images choisies pour
l’histoire naturelle des cancers. L’anatomie de cette région est illustrer ce chapitre sont tirées d’une acquisition scanographique
complexe avec de nombreux organes critiques sensibles à l’irra- diagnostique. Leur nombre est volontairement réduit pour être
diation laissant des séquelles comme la dysphagie et la dysphonie le plus didactique, ce qui explique que toutes les structures
[2,4,9-11]. La radiothérapie conformationelle et en particulier des voies aéro-digestives supérieures n’y figurent pas. Les sites
avec modulation d’intensité (IMRT ou RCMI) permet de réduire les préférentiels de diffusion tumorale et les barrières anatomiques
effets secondaires. Elle a un intérêt dans l’irradiation des cancers sont rapportés localisation par localisation.
des voies aéro-digestives supérieures [5,8,23,24,26,29,32,33].
Ces techniques permettent une irradiation très ciblée et précise, 3.1. Larynx
ce qui impose de définir strictement et rigoureusement chaque
volume cible tumoral sur les images scanographiques pour la Le larynx comprend trois régions et sites anatomiques
préparation des traitements par simulation virtuelle. (Figs. 1, 2 et 3) :
L’objectif de ce document est de proposer une approche – le larynx supraglottique, comprenant deux régions, le larynx
de la délimitation sur images scanographiques des volumes sus-hyoïdien (épilarynx) et le larynx sous-hyoïdien (l’épiglotte
cibles anatomo-cliniques (CTVs) péritumoraux du larynx et infra-hyoïdienne, les bandes ventriculaires et les ventricules,
de l’hypopharynx (aires ganglionnaires exclues) susceptibles la loge pré-épiglottique et une partie de l’espace para-
de contenir des cellules cancéreuses non perceptibles par les glottique) ;
différents examens cliniques et paracliniques et qui doivent – Le larynx glottique ou étage glottique, comprenant les cordes
recevoir la dose dite « prophylactique » de 50 Gy. Cette dose de 50 vocales, l’espace para-glottique, la commissure antérieure et
Gy est délivrée en 25 fractions. En cas de RCMI en un temps, cette la commissure postérieure ;
dose est plus élevée pour garder une équivalence d’efficacité. Elle – Le larynx sous-glottique. Le bord supérieur du cartilage cricoïde
est de l’ordre de 54-60 Gy en 33-35 fractions [19]. correspond à la partie supérieure de la sous-glotte. Il se trouve
Ce document ne traite pas des indications de radiothérapie à 5 mm sous les cordes vocales dans leur partie postérieure et
externe mais précise les volumes à traiter si une radiothérapie 1 cm dans leur partie antérieure.
externe est retenue. Pour cette localisation, ce document se propose de résumer
les points servant à la délimitation des volumes. Il complète les
données déjà publiées en 2005 [3].
2. Rappel sur les volumes d’irradiation [6,20,21]
3.1.1. Zones de résistance
Pour définir le volume cible antomo-clinique devant recevoir
50 Gy, il faut délimiter dans un premier temps le volume tumoral Les principaux points de résistances à la progression tumo-
macroscopique (GTV) déterminé à partir de l’examen clinique rale sont le cartilage cricoïde et le cartilage thyroïde, le ligament
et des données des examens para-cliniques. Le volume tumoral hyo-épiglottique, le ligament et la membrane thyro-hyoidienne
macroscopique permet de réaliser un volume cible anatomoclini- et la membrane fibro-élastique sous muqueuse endolaryngée
que devant recevoir une dose totale de 70 Gy. Celui-ci correspond se terminant en sous-glotte par le cône élastique. Les cartilages
habituellement au volume tumoral macroscopique avec une marge laryngés de l’adulte ont une composante ossifiée et une non-ossi-
de 5 mm à 1 cm, voire plus, selon les barrières et zones de diffusions fiée. Seuls les cartilages aryténoïdiens et l’épiglotte sont le plus
préférentielles. Après chimiothérapie d’induction, même en cas souvent non-ossifiés. L’infiltration cartilagineuse est difficile à
de réponse complète, le volume cible anatomo-clinique devant mettre en évidence car l’ossification est hétérogène. Une érosion
recevoir 70 Gy doit être replacé en repérant les structures initiale- ou lyse, une condensation peuvent faire suspecter l’atteinte,
ment envahies [31]. En situation postopératoire, le volume tumoral mais bien souvent seule l’extension extra-cartilagineuse permet
macroscopique n’est plus présent. Dans ce cas, il est délimité un d’affirmer l’envahissement.
volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy soit d’emblée,
soit après avoir repéré un volume cible anatomo-clinique devant 3.1.2. Zones de faiblesse
recevoir une dose de 66 Gy en cas d’atteinte des tranches de section
ou de ganglions en rupture capsulaire. Il existe plusieurs points de faiblesse aux extensions des
La délimitation des volumes des aires ganglionnaires n’est tumeurs du larynx. La zone de fragilité glottique correspond à
pas abordée. Elle fait l’objet de plusieurs recommandations la région de la commissure antérieure qui est en étroit contact
[5,12-17,25]. avec le cartilage thyroïde par le tendon de Broyles. Il s’agit d’une
bande de tissus fibreux dont l’insertion est située à la partie
supérieure de l’angle rentrant du cartilage thyroïde. Il s’attache
3. Radio-anatomie scanographique et voies d’extension à trois formations ligamentaires (le ligament thyro-épiglottique,
des cancers le ligament thyro-aryténoïdien supérieur et inférieur). Les autres
zones de faiblesse sont les ligaments thyro-épiglottiques et
Il est fait un rappel sur l’anatomie et la radio-anatomie thyro-aryténoïdiens (supérieurs et inférieurs), le ligament et la
scannographique du pharyngo-larynx, puis les voies d’extensions membrane crico-thyroidienne, les zones ossifiées de certaines
M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51 S45

parties du cartilage thyroïde, les perforations de l’épiglotte sous- — en avant vers le pied de l’épiglotte ;
hyoïdienne et le fond du ventricule par son mince contact avec – en bas sur les ventricules.
l’espace para-glottique. Les lésions des ventricules s’étendent :
— latéralement vers l’espace para-glottique et les muscles
3.1.3. Espaces de diffusion intralaryngés intrinsèques du larynx, le mur pharyngo-laryngé et le cartilage
thyroïde ;
L’extension principale du cancer du larynx se fait vers – en avant vers le bord de l’épiglotte et la loge pré-épiglottique
l’espace para-glottique et vers la loge pré-épiglottique (espaces (en haut) ;
en communication). – en bas vers les cordes vocales et la sous-glotte après rupture
L’espace para glottique est un espace graisseux situé entre la du cône élastique.
muqueuse et les structures cartilagineuses laryngées. Il est pair Les lésions de la région aryténoïdienne ou du repli ary-
et symétrique. Il contient la musculature intrinsèque du larynx épiglottique s’étendent :
(muscles laryngés thyro-aryténoïdiens supérieurs et inférieurs, – en bas vers le muscle crico-aryténoïdien et fixent l’hémilarynx.
muscle crico-aryténoïdien latéral). Il est limité en haut par le La fixité de l’hémilarynx peut également être en rapport avec
repli ary-épiglottique, en avant la commissure antérieure et la l’atteinte du nerf laryngé supérieur qui passe à travers la
loge pré-épiglottique, avec laquelle il est en communication, en membrane thyro-hyoïdienne ou par une atteinte de l’espace
dedans la membrane fibro-élastique, en bas le cône élastique para-glottique. L’extension aux cartilages se fait plus tardive-
et en dehors la partie interne du cartilage thyroïde. Au niveau ment (thyroïde, épiglotte, cricoïde) ;
glottique, l’espace para-glottique est délimité médialement par le – latéralement vers le sinus piriforme ;
muscle thyro-aryténoïdien qui donne la forme des cordes voca- – en haut et en avant vers l’épiglotte puis la base de langue et
les, par le cartilage thyroïde et le cartilage cricoïde latéralement. les vallécules ou le zone des trois replis.
Au niveau de la région sus-glottique, l’espace para-glottique se
situe en profondeur des bandes ventriculaires et des membranes 3.1.5. Voies d’extension des lésions
élastiques. de l’étage glottique (Fig. 4)
La loge pré-épiglottique est antérieure et médiane. C’est
une zone graisseuse à forme pyramidale. Elle est limitée en Pour les lésions de la corde vocale, l’extension se fait :
avant par le ligament et la membrane thyro-hyoidienne et le – en avant et en superficie vers la commissure antérieure, puis
cartilage thyroïde, en arrière par le cartilage épiglottique, en va s’étendre vers la corde vocale opposée le long du tendon
haut par le ligament hyo-épiglottique, en bas par le ligament de Broyles ;
thyro-épiglottique et latéralement et en bas par les espaces – latéralement vers le plancher puis le fond du ventricule et
para-glottiques. l’espace para-glottique ;
– en arrière vers l’articulation crico-aryténoïdienne et la com-
3.1.4. Voies d’extension des lésions missure postérieure ;
de l’étage susglottique (Fig. 4) – vers le bas, sur la face inférieure de la corde vocale et la sous
glotte le long du cône élastique ;
Les lésions de la partie sus-hyoïdienne s’étendent : – en haut vers l’étage sus-glottique, via le ventricule et la bande
— en avant, à partir du bord libre de l’épiglotte, sur la face linguale ventriculaire.
de l’épiglotte, les vallécules puis la base de langue pour infiltrer Pour les lésions de la commissure antérieure, l’extension
en profondeur la partie supérieure de la loge pré-épiglottique se fait :
en traversant vers le bas le ligament hyo-épiglottique ; – vers le tendon de Broyles puis va infiltrer la loge pré-épiglottique
— latéralement vers la zone des trois replis, le repli ary- en franchissant le ligament thyro-épiglottique en haut ou plus
épiglottique, l’angle antérieur du sinus piriforme puis la paroi en avant vers le cartilage thyroïde puis les tissus pré-laryngés
pharyngée latérale ; en franchissant le ligament crico-thyroïdien vers le bas ;
— vers le bas le long de l’épiglotte. – vers le bas sur la sous glotte ;
Les lésions de l’épiglotte sous-hyoïdienne s’étendent : – en arrière vers les cordes vocales.
— vers l’avant à travers l’épiglotte dans la loge pré-épiglottique Les lésions avancées vont traverser le cartilage thyroïde puis
via les pores épiglottiques ou par infiltration de l’épiglotte s’étendre dans les tissus du cou et la glande thyroïde.
latéralement ;
— en bas vers la commissure antérieure et le ligament thyro- 3.1.6. Voies d’extension des lésions
épiglottique. Puis l’extension va progressivement se faire vers la de l’étage sous-glottique (Fig. 4)
glotte puis la sous-glotte. Les lésions peuvent également s’éten-
dre progressivement en avant vers la loge pré-épiglottique puis L’extension se fait :
progresser vers le haut, transfixier le ligament hyo-épiglottique, – vers l’anneau cricoïdien en priorité ;
et envahir la vallécule puis la base de langue ; – latéralement et en avant à travers la membrane crico-thyroidienne
— latéralement vers les bandes ventriculaires, les ventricules et dans le cou et vers la thyroïde, et latéralement et en arrière vers
les replis ary-épiglottiques ; la bouche œsophagienne ;
— en haut vers le bord libre de l’épiglotte. – en bas vers la trachée ;
Les lésions des bandes ventriculaires s’étendent : – en haut vers le plan glottique (plus rarement en raison de la
— en haut sur le repli ary-épiglottique et l’aryténoïde ; présence du cône élastique).
S46 M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51

3.2. Hypopharynx 3.2.2. Voies d’extension des lésions de la paroi pharyngée


latérale (Fig. 6)
L’hypopharynx comprend 3 régions (Figs. 3 et 5) :
– le sinus piriforme : il s’agit d’une structure paire et symétrique. La paroi pharyngée latérale de l’hypopharynx se prolonge
Le sinus piriforme s’étend du repli pharyngo-épiglottique à vers le haut sur l’oropharynx puis le rhinopharynx. Il n’y a pas de
la bouche œsophagienne. Il est limité latéralement par le limite anatomique nette entre les deux structures. L’infiltration
cartilage thyroïde, médialement par le repli ary-épiglottique, va se faire :
les aryténoïdes et le cricoïde ; – latéralement vers les muscles constricteurs du pharynx puis les
– la paroi pharyngée postérieure et la paroi pharyngée latérale : tissus du cou et l’espace vasculaire, puis la glande thyroïde ;
elles se situent entre, en haut, l’os hyoïde et en bas, le bord – en arrière et médialement vers la paroi pharyngée postérieure ;
inférieur du cartilage cricoïde. Elles vont du sommet d’un sinus – en avant vers l’aile thyroïdienne ;
piriforme à l’autre ; — dans la partie supérieure vers le repli pharyngo-épiglottique
– la région rétro-cricoïdienne : elle s’étend des cartilages aryté- puis secondairement, la vallécule et le sinus piriforme média-
noïdes et des replis voisins au bord inférieur du cartilage lement et en avant. L’extension supérieure se poursuit le long
cricoïde. des muscles pharyngiens jusqu’à la base du crane (Fig. 7). Elle
Les infiltrations superficielles des cancers de l’hypopharynx peut se faire également le long de la paroi pharyngée de l’oro-
sont difficilement visibles en imagerie scanographique et les pharynx et remonter dans le cavum tardivement (Fig. 7) ;
extensions sous-muqueuses sont fréquentes. Elles sont mieux – dans la partie inférieure jusqu’à la bouche œsophagienne.
repérées en endoscopie. Les manœuvres de Valsava permettent
une meilleure visualisation mais elles ne peuvent être utilisées 3.2.3. Voies d’extension des lésions de la paroi pharyngée
en radiothérapie pour la planification car elles sont non repro- postérieure (Fig. 6)
ductibles pendant les séances d’irradiation. Contrairement au
larynx, l’hypopharynx n’a pas de barrières nettes à l’extension L’évolution est souvent sous-muqueuse. Les lésions de la
des cancers. La limite entre l’oropharynx et l’hypopharynx n’est paroi pharyngée postérieure s’étendent :
que théorique pour les parois pharyngées et les limites entre — vers le haut le long de la paroi pharyngée de l’oropharynx et
les différentes régions sont plus des repères anatomiques que remonter dans le cavum tardivement. L’extension supérieure
de réelles barrières. peut se faire également le long des muscles pharyngiens
jusqu’à la base du crane (Fig. 7) ;
3.2.1. Voies d’extension des lésions du sinus piriforme (Fig. 6) — vers le haut et latéralement le long du pilier postérieur de
l’amygdale et atteindre le voile via le muscle palato-pharyngien
Les tumeurs du mur pharyngo-laryngé ou de l’angle antérieur (Fig. 7) ;
du sinus piriforme s’étendent : – en arrière vers les muscles pré-vertébraux qui forment une
– en avant et médialement pour infiltrer l’aryténoïde, puis les barrière solide ;
autres cartilages laryngés puis l’espace para-glottique et la – en avant et latéralement vers la paroi pharyngée latérale ;
loge pré-épiglottique ; – médialement pour franchir la ligne médiane et devenir
– vers le haut en direction de l’union des trois replis ; circonférentielles ;
– vers le bas le long de la membrane crico-thyroïdienne ; – dans la partie inférieure jusqu’à la bouche œsophagienne ;
– latéralement vers la paroi latérale du sinus piriforme ;
– en arrière sur le rétrocricoïde et vont atteindre le sinus piri- 3.2.4. Voies d’extension des lésions
forme opposé. de la région rétro-cricoïdienne (Fig. 6)
Les tumeurs de la partie latérale du sinus piriforme ont ten-
dance à envahir : L’invasion est le plus souvent sous-muqueuse. L’extension
– latéralement la partie postérieure du cartilage thyroïde et se fait :
rejoindre la paroi pharyngée latérale et les tissus mous du – caudalement vers la bouche œsophagienne ;
cou ; – en avant vers le cartilage cricoïde pour infiltrer l’endolarynx
– en avant l’espace para glottique ; via la région inter-aryténoïdienne ;
– médialement le mur pharyngo-laryngé. – en haut vers les aryténoïdes et les replis ary-épiglottiques ;
L’extension crânio-caudale se fait pour ces deux sous- – latéralement vers les sinus piriformes et les murs pharyngo-
localisations : laryngés.
— vers le haut le long du pilier postérieur de l’amygdale pour
atteindre le voile puis la base du crane via les des muscles
palato-pharyngiens, stylo-pharyngiens et salpingo-pharyn- 4. Propositions de volumes à délimiter
giens (Fig. 7) ;
– vers le bas vers la bouche œsophagienne. Les volumes cibles anatomo-cliniques sont définis à partir des
L’hémilarynx va se fixer lorsque le muscle vocal, le muscle modalités d’extension des cancers du larynx et de l’hypopharynx.
ou l’articulation crico-aryténoidienne seront envahis ou lorsque Il existe plusieurs propositions dans la littérature [3,7,27]. Ils
les nerfs laryngés seront infiltrés. doivent être adaptés au cas par cas selon le stade et l’extension du
M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51 S47

volume tumoral macroscopique. Ils comprennent un ensemble Pour les cancers de l’hypopharynx (hors rétrocricoïde), la
de structures ou de compartiments anatomiques de contiguïté limite supérieure n’a pas de barrière anatomique nette. Du fait
supplémentaires par rapport à la tumeur macroscopique des extensions sous-muqueuses mal visibles, la limite supérieure
permettant de traiter les zones d’infiltrations microscopiques du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (54-60
péritumorales à distance. pour la RCMI en un temps) peut être estimée à 2 cm au-dessus
En cas de doute sur une extension sous-muqueuse, il est du pole supérieur du volume cible anatomo-clinique devant
préférable d’agrandir les volumes pour limiter le risque de recevoir 70 Gy. En cas de tumeur du pharyngo-larynx avec
récidive. Les délimitations des volumes cibles anatomo-cliniques extension à l’oropharynx, les volumes cibles anatomo-cliniques
se trouvent dans une série de coupes scanographiques sélection- peuvent être agrandis selon les propositions publiées en 2005
nées à partir d’un examen réalisé avec injection de produit de sur les volumes cibles péri-tumoraux des cancers de la cavité
contraste. Lors d’une simulation virtuelle, comparativement à buccale et de l’oropharynx [22].
un examen scanographique diagnostique, les structures peuvent Les volumes cibles anatomo-cliniques du larynx sont repré-
avoir une projection différente sur les coupes réalisées en raison sentés dans la figure 8 et ceux de l’hypopharynx dans les figures
des différentes positions de la tête du patient (examen sans 7 et 9. Les tableaux I, II et III font une synthèse des limites des
manœuvre de Valsalva ou en hyper-extension par exemple). volumes cibles anatomo-cliniques.
Pour délimiter les volume à traiter, il est conseillé de repérer
dans l’ordre : volume tumoral macroscopique, volume cible anato-
mo-clinique devant recevoir 66 ou 70 Gy en situation postopéra- 5. Conclusion
toire en cas d’atteinte des tranches de section ou d’adénopathie en
rupture capsulaire et enfin volume cible anatomo-clinique devant Le concept de la sélectivité des zones péritumorales à traiter
recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps). de principe dans les carcinomes épidermoïdes du larynx et de
Pour être plus didactique, sur les figures 8 et 9, il a été rap- l’hypopharynx est une approche rigoureuse. En effet, par la tech-
porté le volume tumoral macroscopique (en rouge) et le volume nique classique en deux dimensions, ces volumes étaient jusqu’à
cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy (en bleu) d’une présent inclus automatiquement dans les volumes irradiés. La
tumeur latéralisée. Le volume cible anatomo-clinique devant radiothérapie conformationnelle et surtout la RCMI imposent la
recevoir 70 Gy correspond au volume tumoral macroscopique nécessité d’une procédure rigoureuse pour la délimitation des
plus une marge de 5 mm à 1 cm, voire plus, selon les voies de volumes cibles anatomo-cliniques péritumoraux, afin d’éviter
diffusions ou barrières anatomiques immédiates. Le volume cible tout « sous-dosage » des zones d’infiltrations microscopiques
anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy ne doit pas être modifié péritumorales et tout risque de récidive.
selon la réponse à une éventuelle chimiothérapie d’induction. Il
correspond aux structures anatomiques initialement atteintes
[31]. Le contourage des volumes cibles anatomo-cliniques devant
recevoir 50 Gy ou 54-60 pour la RCMI en un temps (en jaune) Conflits d’intérêts
correspond au volume cible anatomo-clinique devant recevoir
70 Gy avec une structure supplémentaire estimée à risque (selon Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
les barrières et les zones de diffusions plus éloignées). cet article.

Tableau I
Limites du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers des trois étages du larynx (Fig. 8)
Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for larynx cancers (Fig. 8)

limites CTV50 supérieure inférieure homolatérale controlatérale antérieure postérieure

supraglottique épiglotte, base bord inférieur os hyoïde, muscles os hyoïde, os hyoïde, cartilage épiglotte,
sus-hyoïdien de langue du cricoïde infrahyoïdiens muscles thyroïde et cricoïde cartilage
et sous- (1 cm au-dessus latéralement infrahyoïdiens muscles infrahyoïdiens thyroïde
hyoïdien du CTV70), au cartilage latéralement en avant de la loge pré- rétrocricoïde,
aryténoïdes thyroïde, cartilage au cartilage épiglottique aryténoïdes
cricoïde thyroïde, et du cartilage thyroïde
+élargissement cartilage cricoïde et cricoïde
au sinus piriforme
selon GTV
glottique épiglotte sous- bord inférieur idem supraglottique idem idem supraglottique idem
hyoïdienne, sommet du cricoïde +élargissement supraglottique supraglottique
de la loge pré- au sinus piriforme et
épiglottique (ligament à la glande thyroïde
hyo-épiglottique), selon GTV
os hyoïde, aryténoïdes
sous-glottique idem glottique limite idem supraglottique idem idem supraglottique rétrocricoïde,
supérieure +glande thyroïde supraglottique aryténoïdes,
du premier bouche
anneau trachéal oesophagienne
(selon GTV) selon le GTV

La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy (CTV 50 Gy) doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (CTV
70 Gy) (sauf barrière anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique (GTV). Cette limite peut être plus importante dans les
régions d’extension sans réelles barrières (exemple : base de langue).
S48 M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51

Tableau II
Limites du volume cible anatomo-clinique (CTV) devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers de l’hypopharynx : sinus piriforme et
rétrocricoïde (Figs. 7 et 9) ; GTV : volume tumoral macroscopique.
Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for hypopharynx cancers : piriform sinus and postcricoid pharynx (Fig. 7 and 9)

limites CTV50 supérieure inférieure homolatérale controlatérale antérieure postérieure

sinus piriforme épiglotte, union cartilage os hyoïde, muscles portions os hyoïde, muscles
des 3 replis, cricoïde, bouche infrahyoïdiens antérolatérales cartilage thyroïde pré-vertébraux
vallécule, base oesophagienne, latéralement de l’os hyoïde, et cricoïde, et paroi
de langue (2 cm sous le GTV) au cartilage thyroïde, du cartilage muscles pharyngée
(1 cm cartilage cricoïde, thyroïde et cricoïde, infrahyoïdiens postérieure
au-dessus axe carotidien, des muscles en avant de la loge unilatérale
du CTV70), glande thyroïde infrahyoïdiens pré-épiglottique
muscles (élargissement latéralement et du cartilage
pharyngiens* aux tissus mous au cartilage thyroïde thyroïde
(2 cm au-dessus du cou selon GTV) et au cartilage et cricoïde
du CTV70) cricoïde, corde
vocale et espace para
glottique, aryténoïde
rétrocricoïde épiglotte, union idem sinus piriforme, sinus piriforme, cartilage thyroïde paroi
des 3 replis, cartilage thyroïde, cartilage thyroïde, et cricoïde, loge pharyngée
vallécules, cartilage cricoïde, cartilage cricoïde, pré-épiglottique, postérieure
aryténoïdes glande thyroïde glande thyroïde bord postérieur de bilatérale
l’os hyoïde

La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (sauf barrière
anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique.
Cette limite peut être plus importante dans les régions d’extension sans réelles barrières (exemple : base de langue, paroi pharyngée).
* muscles pharyngiens : muscle stylo-pharyngien, salpingo-pharyngien et palato-pharyngien

Tableau III
Limites limites du volume cible anatomo-clinique (CTV) devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) des cancers de l’hypopharynx : paroi
pharyngée latérale et postérieure (Figs. 7 et 9) ; GTV : volume tumoral macroscopique.
Boundaries of the CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) for hypopharynx cancers : lateral and posterior pharyngeal wall (Figs. 7 and 9)

limites CTV50 supérieure inférieure homolatérale controlatérale antérieure postérieure

paroi épiglotte, union cartilage os hyoïde, muscles portions antérieures os hyoïde, cartilage muscles
pharyngée des 3 replis, cricoïde, bouche infrahyoïdiens de l’os hyoïde, thyroïde pré-vertébraux
latérale vallécule, base oesophagienne, latéralement du cartilage et cricoïde, et paroi
de langue (1 cm (2 cm sous le GTV) au cartilage thyroïde thyroïde et cricoïde, muscles pharyngée
au-dessus du et cartilage cricoïde, des muscles infrahyoïdiens postérieure
CTV70), muscles axe carotidien, infrahyoïdiens en avant de la loge bilatérale
pharyngiens* et glande thyroïde latéralement au pré-épiglottique
paroi pharyngée (élargissement cartilage thyroïde et du cartilage
postérieure, (2 cm aux tissus mous et au cartilage cricoïde thyroïde
au-dessus du du cou selon GTV) et cricoïde
CTV70)
paroi épiglotte idem idem loge pré-épiglottique, idem paroi idem
pharyngée sous-hyoïdienne, commissure pharyngée latérale
postérieure union des 3 replis, antérieure, cartilage sauf os hyoïde
vallécule, muscles cricoïde homolatéral
pharyngiens* (ligne médiane), paroi
et paroi pharyngée pharyngée postérieure
postérieure, et latérale
(2 cm au-dessus
du CTV70)

La limite du volume cible anatomoclinique 50 Gy doit prendre une marge de plus de 5 mm autour du volume cible anatomoclinique 70 Gy (sauf barrière
anatomique). Elle est adaptée à l’extension du volume tumoral macroscopique.
Cette limite peut être plus importante dans les régions d’extension sans réelles barrières (exemple : paroi pharyngée postérieure)
* muscles pharyngiens : muscle stylo-pharyngien, salpingo-pharyngien et palato-pharyngien
M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51 S49

Fig. 1. Vue latérale du larynx. Représentation simplifiée des points de faiblesse et de résistance (espace para glottique non représenté).
Lateral view of the larynx. Schematic representation of weakness and strength areas (paraglottic space excluded).
Fig. 2. Coupe frontale du larynx. Représentation simplifiée des barrières et zones de diffusion.
Frontal view of the larynx. Schematic representation of the tumor spread areas.

Fig. 3. Coupes scanographiques du pharyngolarynx et structures anatomiques.


CT scan slices and anatomic structures of the normal pharynx and larynx.
Fig. 4. Voies d’extension des cancers des trois étages du larynx sur coupes scanographiques. Les flèches
jaunes représentent les voies de diffusion préférentielles.
Local tumor spread of the larynx carcinomas on the CT scan. The yellow arrows indicate the local spread areas.

Fig. 5. Vue postérieure simplifiée du pharyngolarynx. L’hémipharynx


droit est ouvert et les structures sous muqueuses sont reportées
schématiquement.
Schematic posterior view of the pharynx (right pharynx opened with submucosal
structures)
S50 M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51

Fig. 7. Repères radio-anatomiques et volume cible anatomo-clinique


devant recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) : le volume cible
anatomo-clinique des muscles stylo-pharyngiens, salpingo-pharyngiens
et palato-pharyngiens (partie antérieure) est en jaune (pour les lésions
du sinus piriforme, de la paroi pharyngée latérale et postérieure) ; le volume
cible anatomo-clinique « paroi pharyngée postérieure » est en orange
(pour les lésions de la paroi pharyngée latérale et postérieure). Du fait
des infiltrations sous-muqueuses, la limite supérieure du volume cible
anatomo-clinique peut être estimée à 2 cm au-dessus du pole supérieur
du volume cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy.
Anatomic structures and CTV50 (or CTV54-60 for SIB-IMRT) : CTV
of the stylo, salpingo and palatopharyngeal muscles is yellow ; CTV of the posterior
pharyngeal wall is orange. The superior boundary of the CTVs can be estimated
to 2 cm upper the CTV70 due to the submucosal extension of the tumor.

Fig. 6. Voies d’extension des cancers de l’hypopharynx sur coupes Fig. 8. Volumes cibles anatomo-cliniques des cancers des trois étages
scanographiques. Les flèches jaunes représentent les voies de diffusion du larynx. Le volume tumoral macroscopique est en rouge, le volume
préférentielles. Les extensions latérales vers le voile correspondent cible anatomo-clinique devant recevoir 70 Gy en bleu, et celui devant
aux infiltrations le long des muscles stylo-pharyngiens, recevoir 50 Gy (ou 54-60 pour la RCMI en un temps) en jaune. Les flèches et
salpingo-pharyngiens et palato-pharyngiens (cf fig. 7). contours en pointillés représentent les variations de volumes selon le risque
Local tumor spread of pharyngeal carcinomas on axial CT slices. The lateral d’infiltration du volume tumoral macroscopique.
spread to the vellotonsillar region corresponds to the extension on the stylo, Larynx cancer CTVs. The GTV is red, the CTV70 is blue and the CTV50
salpingo and palatopharyngeal muscles (Fig. 7). (or CTV54-60 for SIB-IMRT) is yellow. The arrows and the dashed lines represent
the variations due to the local spread of the tumor.

supraglottique sus-hyoïdien A B glottique A B

A A

B B

C D C D
C C

D D

supraglottique sous-hyoïdien A B sous-glottique A B

A A

B B

C D C D
C C

D D
M. Lapeyre et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S43-S51 S51

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Fig. 9. Volumes cibles anatomo-cliniques des cancers de l’hypopharynx. 2003;57(1):49-60.
Le volume tumoral macroscopique est en rouge, le volume cible anatomo- [24] Lee NY, O’Meara W, Chan K, Della-Bianca C, Mechalakos JG, Zhung J, et
clinique devant recevoir 70 Gy en bleu, et celui devant recevoir 50 Gy al. Concurrent chemotherapy and intensity-modulated radiotherapy
(ou 54-60 pour la RCMI en un temps) en jaune. Les flèches et contours for locoregionally advanced laryngeal and hypopharyngeal cancers. Int
en pointillés représentent les variations de volumes selon le risque J Radiat Oncol Biol Phys. 2007;69(2):459-68.
d’infiltration du volume tumoral macroscopique. [25] Levendag P, Braaksma M, Coche E, van Der Est H, Hamoir M, Muller K,
Hypopharynx cancer CTVs. The GTV is red, the CTV70 is blue and the CTV50 et al. Rotterdam and Brussels CT-based neck nodal delineation com-
(or CTV54-60 for SIB-IMRT) is yellow. The arrows and the dashed lines represent pared with the surgical levels as defined by the American Academy of
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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S52– S60

Cancer des sinus de la face


Paranasal sinus carcinoma

S. Vieillot*, P. Boisselier, N. Aillères, M.H. Hay, J.B. Dubois, D. Azria, P. Fenoglietto


Département de cancérologie radiothérapie, Université Montpellier I, CRLC Val d’Aurelle - Paul-Lamarque, Rue Croix-Verte, 34298 Montpellier, cedex 5, France

RÉSUMÉ

Les cancers des sinus de la face sont des tumeurs rares, dont le traitement repose sur une approche
Mots clés :
Cancer des sinus multidisciplinaire. La chirurgie et la radiothérapie, plus ou moins associées à la chimiothérapie,
Radiothérapie conformationnelle permettent d’obtenir des taux de survie spécifique à cinq ans tous stades confondus de 60-70 %. Les
Volumes cibles progrès de la radiothérapie, avec notamment l’utilisation de l’imagerie tridimensionnelle pour une
Atlas approche conformationnelle, nécessitent une connaissance précise de la radioanatomie de ce type
de tumeur afin de déterminer les différents volumes d’intérêt. L’objectif de ce travail était de préciser
les particularités radioanatomiques et les modalités d’irradiation conformationnelle pour les cancers
du sinus, illustrées par un cas clinique.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: Cancers of the paranasal sinuses are rare tumors, with treatment based on a multidisciplinary
Sinus cancer approach. Surgery and radiation therapy, possibly associated with chemotherapy are used to obtain
Conformational radiotherapy 5 years specific survival rate of 60-70 %. Advances in radiotherapy, including the use of imaging for
Target volumes 3D conformal approach require precise knowledge of the radioanatomy for this type of tumor to
Atlas determine the different volumes of interest. Purpose of this study was to specify radioanatomy and
conformal radiation modalities for cancers of the sinuses, and is illustrated by a case report.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Introduction au tabagisme, ainsi qu’à certaines expositions profession-


nelles (chrome, isopropyl d’alcool, nickel et thorotrast).
Les cancers des sinus de la face ne représentent que 3 à L’atteinte du sinus ethmoïdal est liée dans plus de 80 % des
4 % des cancers des voies aérodigestives supérieures [19]. cas à l’exposition à la poussière de bois, et est considérée
Ils se développent préférentiellement aux dépens de la comme une maladie professionnelle. Les localisations les
muqueuse qui tapisse les cavités naso-sinusiennes et sont plus fréquentes sont le sinus maxillaire, puis l’ethmoïde. Les
dans 60 à 80 % des cas à des carcinomes épidermoïdes, dans atteintes des autres sinus étant rares, nous décrirons dans cet
10 à 20 % des cas des adénocarcinomes, plus rarement des article uniquement la radioanatomie de ces deux principaux
tumeurs neuronales, ou « esthésioneuroblastomes », le plus sites, et le cas clinique portera sur un adénocarcinome du
souvent situés au niveau de la cavité nasale. Ils sont associés sinus de l’ethmoïde.

* Correspondance.
Adresse e-mail : sabinevieillot@yahoo.fr (S. Vieillot)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60 S53

2. Présentation clinique deux modalités de traitement (taux de contrôle local à cinq ans
avec radiothérapie seule de 57 % contre 66 % avec l’association
La tumeur peut se développer longtemps avant de devenir de chirurgie et de radiothérapie), même si la comparaison était
symptomatique et est donc souvent évoluée au moment du biaisée car il y avait plus de tumeurs évoluées dans la population
diagnostic. Une obstruction nasale, le plus souvent unilatérale, traitée par irradiation exclusive [4].
une rhinorrhée ou un épistaxis, mais aussi une tuméfaction La chirurgie exclusive se discute uniquement pour les rares
du nez, de la joue ou de la cavité buccale, sont des symptômes tumeurs de stade T1, mais l’existence de tranches de section de
classiques. Des douleurs buccales persistantes ou une sinusite résection douteuses, d’une invasion périnerveuse, voire d’un
maxillaire chronique peuvent aussi révéler la maladie. L’atteinte contingent indifférencié, constitue alors un argument pour une
ophtalmologique, telle qu’une diplopie ou une exophtalmie, doit radiothérapie postopératoire [3].
faire craindre une atteinte plus évoluée. Jiang et al. ont rapporté un faible taux d’atteinte ganglion-
naire au moment du diagnostic pour les adénocarcinomes de
l’ethmoïde, de l’ordre de 3 à 7 %, ne justifiant pas la réalisation
3. Classification d’une irradiation prophylactique [12].
En ce qui concerne les cancers du sinus maxillaire, Lee et al.
La classification utilisée le plus couramment est la TNM de ont observé un taux de rechute ganglionnaire à cinq ans de 0 %
l’UICC de 2002 [21]. Elle est détaillée pour le cancer du sinus après radiothérapie contre 20 % en cas d’absence de radiothéra-
maxillaire et pour le cancer de l’ethmoïde dans le tableau 1. pie, et ces rechutes étaient pour 84 % d’entre elles homolatérales,
limitées aux zones I, II, III. Dans cette série rétrospective, le taux
de rechute ganglionnaire était lié au risque d’évolution métasta-
4. Indications de la radiothérapie tique (p = 0,02). Toutes les atteintes ganglionnaires concernaient
des tumeurs de stade T3 ou T4 [14]. Le taux de risque d’évolution
Les tumeurs des sinus de la face étant rares, nous ne disposons ganglionnaire a été évalué dans une autre série rétrospective de
essentiellement que de données rétrospectives sur un nombre 650 malades atteints d’un cancer du sinus maxillaire à 19 %, alors
limité de patients, aussi la meilleure stratégie thérapeutique est même qu’il était lors du diagnostic de moins de 10 % [11]. Ces
elle difficile à définir. Si la tumeur n’est pas résécable au moment auteurs recommandaient donc une irradiation prophylactique
du diagnostic, une radiothérapie exclusive est indiquée et la dose pour les cancers de stade T3 ou T4, en particulier les carcinomes
recommandée est de 70-72 Gy. Un effet de la dose totale a été épidermoïdes.
démontré, avec un seuil minimum de 65 Gy [6]. Cette irradiation L’efficacité de la chimiothérapie en association avec la radio-
peut aussi être préopératoire, si une réévaluation de la maladie thérapie a été démontrée pour les cancers de la tête et du cou
vers 56 Gy est réalisée, et que la chirurgie devient possible [6]. dans la méta-analyse MACH-NC (Meta-analysis of chemotherapy
Cette stratégie de réduction tumorale permet d’augmenter les in head and neck cancer), mais la plupart des essais excluaient
chances d’une résection complète et évite une chirurgie muti- les cancers des sinus [17]. Aucune étude de phase III n’a évalué
lante, telle qu’une énucléation. le bénéfice de la chimiothérapie pour les cancers des cavités
Si la chirurgie est possible d’emblée, elle est réalisée de nasosinusiennes, que ce soit en situation néoadjuvante, conco-
première intention lorsqu’elle ne constitue pas un geste morbide mitante, ou adjuvante. Quelques séries rétrospectives semblent
majeur. La radiothérapie postopératoire est alors presque tou- confirmer son intérêt, surtout pour des tumeurs évoluées, en
jours indiquée, compte tenu du bénéfice démontré dans plusieurs permettant une amélioration du taux des contrôles locaux et de
séries rétrospectives de cancers de tous stades [2,10,13]. survie globale et en autorisant des chirurgies moins mutilantes
Dulguerov et al. ont publié une méta-analyse en 2001 sur avec préservations orbitaires [14,18]. Sa place reste cependant
220 patients mettant en évidence le bénéfice de l’association des aujourd’hui discutée.

Tableau 1
Classification TNM de l’UICC de 2002 des cancers des sinus de la face (sinus maxillaire et ethmoïde).
2002 UICC TNM classification, facial sinus cancers (maxillary and ethmoid sinus).

Sinus maxillaire Sinus ethmoidal

T1 limité à la muqueuse, l’os est respecté un site de fosse nasale ou sinus éthmoidal avec ou sans atteinte osseuse
T2 érosion ou destruction osseuse 2 sites dans un seul siège ou envahissant un site voisin du complexe
naso-éthmoidal avec ou sans atteinte osseuse
T3 paroi osseuse postérieure du sinus maxillaire, tissu sous paroi interne ou plancher de l’orbite, sinus maxillaire, palais ou lame
cutané, plancher et/ou paroi interne de l’ orbite, fosse criblée
ptérygoide, sinus éthmoidal
T4 a : cavité orbitaire antérieure, peau de la joue, apophyses a : orbite antérieure, peau du nez ou de la joue, extension minime base
ptérygoides, fosse intratemporale, lame criblée, du crâne, apophyses ptérygoides, sinus frontal ou sphénoidal
sinus sphénoidal ou frontal b : toit de l’orbite, dure-mère, cerveau, étage moyen de la base du crâne,
b : toit de l’orbite, dure-mère, cerveau, étage moyen nerfs crâniens autre que V2, nasopharynx, clivus
de la base du crâne, nerfs crâniens (sauf division maxillaire
du V2), nasopharynx, clivus
S54 S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60

5. Résultats attendus Tableau 2


Probabilité de survie spécifique en fonction de l’histologie, du site tumoral,
du stade selon la classification TNM et du traitement.
Le pronostic de ces tumeurs varie en fonction de l’histologie, Cancer-specific survival probability by histology, tumor site, and stage in relation
de la localisation, du stade ou encore du traitement réalisé. Le to TNM classification and treatment.

tableau 2, issu de la méta-analyse de Dulguerov et al., rapporte Caractéristiques %


les taux de survie spécifique actuariels obtenus dans les essais
les plus récents [4]. Histologie
C. épidermoide 50
C. glandulaire 60
6. Algorithme décisionnel adénocarcinome 50
C. indifférencié 28
Chargari et al. ont publié récemment un algorithme décision- Site
nel pour la prise en charge des carcinomes du sinus maxillaires. S. maxillaire 45
Cette stratégie peut être appliquée aux cancers des autres sinus,
ethmoide 51
en dehors de l’irradiation ganglionnaire non retenue pour les
S. nasal 66
cancers de l’ethmoïde (Fig. 1) [3].
TNM
T1 90

7. Modalités de traitement T2 70
T3 44
7.1. Radioanatomie T4 28
Traitement
La tomodensitométrie avec injection de produit de contraste chirurgie 79
est indispensable, elle explore le massif facial de la base de crâne
radiothérapie 57
jusqu’au plancher buccal, et visualise les ganglions cervicaux.
radiothérapie+chirurgie 66
L’IRM est nécessaire pour apprécier l’extension vers la fosse
infratemporale, et les espaces parapharyngés [15]. Abréviations: C.: carcinome, S.: sinus, SSA: survie spécifique actuarielle

Fig. 1. Algorithme décisionnel selon Chargari et al. [3]


Decision tree according to Chargari et al. [3]
S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60 S55

Les voies de développement préférentielles des tumeurs endocrânien est consécutif au franchissement de cette méninge,
du sinus maxillaire et de l’éthmoïde sont décrites dans la qui constitue une barrière anatomique efficace. Cependant, au
fi gure 2 : pour les cancers du sinus maxillaire, l’extension niveau du toit des fosses nasales, la lame criblée est perméable
tumorale peut se faire en haut vers l’ethmoïde, car il n’existe jusqu’aux gouttières olfactives. En arrière, l’extension se fait
pas de barrière anatomique, vers l’orbite via le canal sous orbi- vers le sphénoïde. La tumeur s’étend également vers la graisse
taire et vers la fosse cérébrale moyenne à travers le foramen rétro-antrale, les muscles ptérygoïdiens et la fosse ptérygopa-
rond. Les extensions inférieures correspondent à l’invasion latine. En dehors, l’érosion de la lame papyracée est classique,
de l’os maxillaire et du palais osseux. La cavité nasale peut mais le périoste de l’orbite est résistant. En bas et en dehors,
être envahie via l’ostium. En arrière, la tumeur peut envahir l’extension se fait vers le sinus maxillaire et plus rarement la
la graisse rétroantrale, les muscles ptérygoïdiens et la fosse fosse ptérygomaxillaire.
ptérygopalatine. En cas d’indication d’irradiation ganglionnaire, les aires Ib,
Pour les cancers de l’ethmoïde, l’extension la plus fréquente II et III homolatérales et éventuellement controlatérales – si la
se fait via le méat moyen vers la cavité nasale. Une atteinte tumeur dépasse la ligne médiane – doivent être incluses dans le
bilatérale par l’intermédiaire de la cloison septale est plus volume cible. La figure 3 présente les différentes aires ganglion-
tardive. En haut, la méninge est facilement atteinte car le naires cervicales d’intérêt. Leurs limites radioanatomiques ont
toit de l’ethmoïde offre peu de résistance. L’envahissement été décrites par Grégoire et al. [7].

Fig. 2. Radioanatomie : coupes scanographiques des cavités nasosinusiennes


Radiological anatomy : CT slices of sinonasal cavities.

Fig. 3. Radioanatomie : coupes scanographiques des aires ganglionnaires cervicales


Radiological anatomy : CT slices of cervical lymph nodes.
S56 S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60

7.2. Détermination des volumes cibles 7.4. Contraintes de doses aux organes à risque

En radiothérapie conformationnelle, une scanographie de Les contraintes de dose doivent être conformes au guide
simulation avec injection de produit de contraste – en l’ab- de procédure de radiothérapie externe [22]. Pour la moelle, la
sence de contre-indication – est réalisée pour l’acquisition des dose maximale doit être inférieure à 45 Gy. Le tronc cérébral
données anatomiques du patient afin d’apprécier les limites ne doit pas recevoir plus de 50 Gy dans sa totalité et 55 Gy
géométriques de la tumeur et ses rapports avec les organes dans un volume très limité, les lobes temporaux plus de 60 Gy,
voisins. Le patient est en position de traitement : décubitus l’hypophyse plus de 55 Gy, les articulations temporomandibu-
dorsal, les bras le long du corps. Un masque individuel ther- laires plus de 60 Gy. Moins de 50 % de la parotide controlatérale
moformé 3 ou 5 points est réalisé, avec un angle orbitoméatal doivent recevoir 26 Gy et la dose moyenne acceptée est de
à 90 ° par rapport au plan horizontal de la table. Un abaisse- 30 Gy. Le chiasma et les nerfs optiques ne doivent pas recevoir
langue peut être utilisé. L’acquisition tomodensitométrique plus de 55 Gy. La dose moyenne tolérée par l’œil est de 35 Gy, et
consiste en des coupes de 3 mm du vertex jusqu’à 5 cm sous la dose au cristallin doit être la plus faible possible. Il n’y a pas
les clavicules [22]. de contrainte spécifique pour les glandes lacrymales. L’oreille
Selon les critères des rapports 50 et 62 de l’ICRU (International interne homolatérale ne doit pas recevoir plus de 50-55 Gy,
commission on radiation units and measurements) [8,9], les diffé- et l’objectif pour l’oreille interne controlatérale est la dose la
rents volumes suivants sont délinéés : plus faible possible. Enfin la dose maximale délivrée au larynx
– le volume tumoral macroscopique (GTV ou Growth Tumor est de 20 Gy. La thyroïde est délinéée, afin de renseigner sur
Volume) qui correspond à la tumeur. En situation adjuvante, la dose reçue.
ce volume n’existe pas ;
– le volume cible anatomoclinique (CTV ou Clinical Target 7.5. Balistique, dosimétrie
Volume) qui correspond au volume tumoral macroscopique
plus la zone à risque d’extension microsopique. Le sinus L’implémentation de la RT conformationnelle tridimen-
atteint est toujours inclus dans sa totalité ; les structures sionnelle a permis une amélioration de la distribution de la
adjacentes au sinus atteint sont prises en compte en fonction dose aux volumes d’intérêt, autorisant une réduction de la
de l’atteinte clinique et des zones anatomiques de vulnérabi- dose délivrée aux organes à risque, en particulier aux voies
lité. Le volume cible anatomoclinique n’inclut l’orbite qu’en optiques. La RCMI semble même offrir une épargne supé-
cas de franchissement périostique. Une effraction osseuse rieure [1,5]. L’énergie des faisceaux utilisés se situe entre 4 et
postérieure du sinus maxillaire implique l’inclusion de la 10 MV pour les photons et 9 à 10 MeV pour les électrons. Le
fosse ptérygomaxillaire et des muscles ptérygoïdiens [15]. nombre, l’angulation et de la pondération des faisceaux sont
Un volume cible anatomoclinique à haut risque, qui corres- optimisés en considérant le volume à irradier et les organes
pond au lit tumoral, et un volume cible anatomoclinique à à risque à protéger. Un collimateur multilame ou des caches
bas risque, pour l’extension vers les structures adjacentes, personnalisés sont utilisés. La prise en compte de la pénombre
peuvent être différenciés. Le volume cible anatomoclinique impose une marge entre le volume cible prévisionnel et le
ganglionnaire correspond aux aires Ib, II et éventuellement collimateur multilame.
III homolatérales, bilatérales s’il existe un franchissement Un exemple de plan de traitement avec modulation d’inten-
de la ligne médiane ; sité, est donné dans le cas clinique. Il correspond aux résultats
– le volume cible prévisionnel (PTV ou Planning Target Volume d’une étude menée dans notre centre, qui cherchait à définir la
ou) correspond au volume cible anatomoclinique augmenté meilleure balistique pour les cancers des sinus [20].
d’une marge de 1 cm, qui peut être diminuée à 3 à 5 mm en
RCMI.
8. Toxicité aiguë
7.3. Doses prescrites
Elle est fréquente et représentée essentiellement par une
En cas de radiothérapie exclusive, la dose recommandée est symptomatologie oculaire à type de conjonctivite et/ou de lar-
de 70 Gy pour la tumeur (et les ganglions métastatiques). Une moiement. Une rhinite, mucite et radiodermite sont également
dose de 50 à 66 Gy est délivrée aux zones à risque d’extension fréquentes.
microscopique. Aucune étude n’a montré le bénéfice d’un
fractionnement ou d’un étalement différents cinq fractions
de 1,8-2 Gy par semaine. Pour une irradiation postopératoire, 9. Toxicité tardive
la dose prescrite au lit tumoral est de 50 à 66 Gy, les reliquats
tumoraux et les ganglions en rupture capsulaire devant recevoir Les séquelles sont surtout visuelles, avec un syndrome sec,
au moins 60 Gy. Les contraintes à respecter, selon le rapport une baisse d’acuité visuelle. Les cataractes sont fréquentes. Les
62 de l’ICRU 62 [9] sont : le volume cible prévisionnel doit risques de rétinopathie et de névrite optique sont liés à la dose
recevoir au minimum 95 % de la dose prescrite, et au maxi- totale et apparaissent respectivement pour une dose supérieure
mum 107 %. Les critères de l’ICRU pour la RCMI (radiothérapie à 45 Gy 60 Gy [16]. De rares cas de nécrose cérébrale ont été
conformationnelle avec modulation d’intensité) sont en cours décrits. L’hyposialie, voire l’asialie, dépend de la dose reçue aux
d’élaboration. parotides.
S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60 S57

10. Cas clinique correspondait aux zones à risque d’extension microscopique,


le deuxième volume cible anatomoclinique au lit tumoral. Les
Il s’agit d’un patient de 71 ans, marié, trois enfants, qui a été volumes cibles prévisionnels ont été crées à partir des volumes
menuisier pendant 14 ans puis entrepreneur en maçonnerie. cibles anatomocliniques en ajoutant une marge automatique
Dans ses antécédents, on notait un double pontage en 1988, un de 4 mm.
pace-maker pour troubles du rythme cardiaque et un tabagisme Le plan de traitement avec modulation d’intensité utilisait
sevré depuis 1988 mais pas d’intoxication alcoolique. Des épis- cinq faisceaux isopondérés sans filtres de 6 MV. L’angulation a
taxis unilatérales récidivantes ont révélé une lésion ethmoïdale, été définie comme suit : 0 °, 70 °, 140 °, 210 °, 290 °
dont les biopsies étaient en faveur d’un adénocarcinome. La prise en compte de la pénombre a nécessité une distance
La scanographie faciale a mis en évidence une masse expan- de 6 mm entre les volumes cibles prévisionnels et le collimateur
sive ostéolytique aux dépens des cellules ethmoïdales semblant multilame. La technique du boost intégré a été utilisée, et la
détruire la lame papyracée sans extension intra-orbitaire, ni prescription de dose à l’isocentre a alors été la suivante : 56 Gy en
endo-crânienne, avec a priori un comblement frontal d’allure 33 fractions (1,69 Gy par fraction) au premier volume cible pré-
rétentionnelle et un comblement polypoïde du sinus maxillaire visionnel et 66 Gy en 33 fractions (2 Gy/fr) au deuxième volume
gauche. Il n’a pas été effectué d’IRM compte tenu du pace-maker. cible anatomoclinique, en six semaines et demi. La dosimétrie a
La lésion a été classée T3. été effectuée, et les figures 6 et 7 rapportent la couverture des
Une déclaration de maladie professionnelle a été faite. Le volumes cibles prévisionnels par l’isodose 95 %. Les histogram-
dossier a été présenté en réunion de concertation pluridiscipli- mes dose volume sont rapportés dans la figure 8.
naire, la lésion étant résécable d’emblée, une chirurgie première
a été réalisée : ethmoïdectomie para-latéro-nasale droite avec
ablation de la lésion intéressant le plancher de l’orbite, la paroi 11. Conclusion
interne, sans envahissement de la péri-orbite, l’éthmoïde antéro-
postérieur et la partie postéro-supérieure de la cloison nasale. Le traitement des cancers du sinus localisés est multimodal,
La rétention des sinus maxillaires et frontaux a été aspirée. Le associant chirurgie, radiothérapie et parfois la chimiothérapie.
sphénoïde était sain. Une reconstruction du plancher et de la L’enjeu est important tant en termes de contrôle local que de
paroi interne de l’orbite a été effectuée. Il s’agissait dun adé- séquelles, compte tenu de la proximité d’organes sains. Les
nocarcinome moyennement différencié muco-sécrétant et les avancées technologiques de la radiothérapie ont permis des
différentes recoupes étaient indemnes de lésion tumorale. progrès importants dans cette pathologie : la définition précise
Une radiothérapie adjuvante a été prescrite, à la dose de des volumes cibles, le choix de la balistique pour une dosimétrie
66 Gy en 33 fractions de 2 Gy dans le lit d’exérèse tumorale, et respectant les contraintes à la fois aux organes à risque et au
56 Gy en 33 fractions dans les zones à risque. Cette radiothérapie volume cible prévisionnel, dans le cadre d’une radiothérapie
a été effectuée avec modulation d’intensité pour permettre une conformationnelle, en particulier avec modulation d’intensité,
meilleure préservation des nerfs optiques. sont le gage d’un traitement de qualité.
La consultation d’annonce de radiothérapie a permis d’ex-
pliquer au patient les modalités de la radiothérapie, les objectifs
mais aussi les effets secondaires aigus et tardifs. Conflits d’intérêts
Une scanographie de simulation est réalisée, après fabrication
du masque personnalisé de contention, et les volumes d’intérêt Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
délnéés (Fig. 4 et 5). Le premier volume cible anatomoclinique cet article.
S58 S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60

Fig. 4. Contours
des volumes d’intérêt
Delineation of volumes
of interest.

Fig. 5. Volumes cibles


prévisionnels et organes à
risque, vue tridimensionnelle
supérieure.
Target volume plans and
organs at-risk, upper 3D view.
S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60 S59

Fig. 6. Dosimétrie : couverture du PTV1 (premier volume cible prévisionnel) Fig. 7. Dosimétrie : couverture du PTV2 (deuxième volume cible
par l’isodose 95 % prévisionnel) par l’isodose 95 %
(pour une prescription de 56 Gy. (pour une prescription de 66 Gy)
Dosimetry : PTV1 coverage by 95 % isodose (for a 56-Gy prescription). Dosimetry : PTV2 coverage by 95 % isodose (for a 66-Gy prescription).

Fig. 8. Histogrammes dose-volume.


Dose-volume histograms.
S60 S. Vieillot et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S52-S60

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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S61– S73

Cancer bronchique non à petites cellules


Non small cell lung cancer

D. Leignel Argoa, P. Giraudb,*


a Service d’oncologie radiothérapie, Hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France
bService d’oncologie radiothérapie, Université Paris-Descartes, Hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 4, 8, 12, 23, 24 et 28 sont L’objectif était la rédaction d’un document décrivant la technique d’irradiation conformationnelle
visibles uniquement sur : http://www. tridimensionnelle d’un cancer pulmonaire non à petites cellules. Les principes et recommandations
sciencedirect.com concernent la prise en charge de patients atteints de cancer pulmonaire localisé au thorax et
inopérables ou devant bénéficier d’une irradiation postopératoire. Ils ont été établis à partir des
Mots clés : données actuelles de la science après une analyse de la littérature et d’accords d’experts. Les principes
Radiothérapie conformationnelle et recommandations proposés concernent les différentes étapes d’une irradiation conformationnelle
Cancer pulmonaire non à petites cellules thoracique pour un cancer pulmonaire non à petites cellules : le centrage et le contourage des volumes
Volumes cibles à traiter ou à protéger, le calcul de la distribution de la dose, le traitement et la surveillance pendant
Atlas le traitement.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords:
The objective was the drafting of a document describing the technique of tridimensional conformal
Conformal radiotherapy irradiation of a non small cell lung cancer (NSCLC). Principles and recommendations concern patients
Non small cell lung cancer affected by lung cancer localized in the thorax and inoperable or patients who must undergo
Target volumes postoperative irradiation. They have been developed according to the current scientific data from an
Atlas analysis of the literature and professional agreements. Principles and recommendations describe :
the centering and the contouring of tumor volumes and organs at risk, the calculation of the dose
distribution, the treatment and the surveillance during the treatment.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie incidents. En 2000, il y a eu 27 743 nouveaux cas, dont 83 %


d’hommes et la mortalité était de 27 164 cas dont également
Le cancer bronchique est le premier cancer au monde, que 83 % d’hommes. Il se situait au 4e rang en termes d’incidence
ce soit en incidence ou en mortalité ; en 1990, il était classé et au premier rang en termes de mortalité, représentant ainsi
au dixième rang des causes de mortalité tous pays confondus 18,1 % de l’ensemble des décès par cancer en France. Les taux
[31]. En France, avec 30 651 nouveaux cas estimés de cancers de mortalité standardisés étaient de 42 chez l’homme et de 9,4
du poumon en 2005 dont 78 % survenant chez l’homme, le chez la femme, le sex-ratio étant de 3,6. Plus de 9 nouveaux
cancer du poumon représente 9,6 % de l’ensemble des cancers cas sur 10 estimés en 2005 étaient diagnostiqués à 50 ans ou

* Correspondance.
Adresse e-mail : philippe.giraud@egp.aphp.fr (P. Giraud)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S62 D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73

plus. Les âges moyens au moment du diagnostic chez la femme sont décidées en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP)
et chez l’homme sont respectivement de 64 ans et de 65 ans au cas par cas. Les marqueurs n’ont aucune indication sauf le
tandis que celui au décès est de 68 ans. Chez l’homme, le taux CYFRA 21-1 qui peut avoir pour certains un intérêt pronostique
d’incidence des cancers broncho-pulmonaires, standardisé à dans les carcinomes épidermoïdes. Une médiastinoscopie peut
la population mondiale a augmenté en moyenne annuelle de être demandée pour préciser l’atteinte médiastinale. L’écho-
0,2 % entre 1980 et 2005 et diminué de 0,5 % entre 2000 et endoscopie par voie bronchique (EBUS) ou œsophagienne (EUS)
2005. Celui lié à la mortalité a, quant à lui, diminué de 0,1 % représente une nouvelle technique d’expertise médiastinale
et 1,7 % pendant les mêmes périodes. Chez la femme, au cours prometteuses [18,35,44].
de ces mêmes périodes, le taux d’incidence a respectivement Les cancers du poumon non à petites cellules sont classés
augmenté en moyenne annuelle de 5,1 % et 5,8 % au moment où selon leurs stades TNM. Cette classification, actualisée en 2009
la mortalité augmentait également de 3,5 % et 4,2 % [34]. (7e édition) par l’UICC (Union internationale contre le cancer),
Le facteur de risque de loin le plus important, et le mieux permet d’orienter la stratégie thérapeutique initiale (Annexes 1
connu, est bien sûr le tabac. Environ 83 % des cancers du poumon et 2).
sont attribuables au tabac chez les hommes et 69,2 % chez les
femmes. Le risque relatif d’avoir un cancer du poumon pour
un fumeur par rapport à un non-fumeur est de 9,9. On note 3. Indications de la radiothérapie
une diminution du risque de cancer 5 à 9 ans après l’arrêt du
tabac chez les anciens fumeurs par rapport aux fumeurs actuels ; Les indications thérapeutiques sont présentées dans les
néanmoins, les anciens fumeurs conserveront toujours un risque Standards-Options-Recommandations (SOR) publiées en 2007,
plus élevé de cancer du poumon. D’autres facteurs de risque dont la nouvelle mise à jour doit paraître début 2010 [35].
environnementaux sont aussi connus, comme l’exposition au Sur le plan respiratoire, des épreuves fonctionnelles respi-
béta-carotène, à l’arsenic, au radon, à l’amiante et aux rayon- ratoires complètes avec étude de la diffusion du monoxyde de
nements ionisants. Le rôle de la pollution atmosphérique reste carbone (DLCO) doivent être réalisées avant la radiothérapie. Il
discuté. Sur le plan professionnel, l’amiante, la silice, le cadmium, est déconseillé d’effectuer une irradiation thoracique classique
le chrome VI, le nickel, le cobalt, les hydrocarbures aromatiques sans technique d’asservissement respiratoire ou stéréotaxique
polycycliques et le béryllium sont reconnus comme des facteurs si le volume expiré maximal en une seconde (VEMS) est infé-
de risque de cancer. L’exposition commune à plusieurs facteurs rieur à 40 % de la valeur théorique ou si le rapport DLCO/VA
est très fréquente et multiplie probablement le risque de cancer (capacité de diffusion du monoxyde de carbone par unité de
du poumon [34]. volume alvéolaire) est inférieur à 60 % de la valeur théorique
[17,35].

2. Classification TNM et par stade


4. Stades I et II
Les signes cliniques évocateurs d’un cancer du poumon sont
très nombreux et souvent peu spécifiques. Ils incluent en par- Le traitement standard repose sur la chirurgie. Pour les
ticulier des symptômes d’obstruction bronchique (toux surtout patients non opérables, une irradiation externe conformation-
chronique et persistante, sifflement, hémoptysie, pneumonie), nelle à visée curative avec un fractionnement classique doit
des symptômes d’envahissement local (douleur pariétale, dysp- être réalisée si l’état respiratoire du patient le permet. Il est
née, syndrome cave supérieur, dysphonie) et des symptômes liés recommandé de n’irradier que les volumes tumoraux envahis.
à la présence de métastases (cérébrales, osseuses, hépatiques, Pour les cancers de stade I, une radiothérapie en conditions
cutanées, surrénaliennes…). Une altération de l’état général, stéréotaxiques constitue une alternative à la radiothérapie
une perte de poids et/ou des symptômes liés à un syndrome classique. Un traitement par radiofréquence pourra également
paranéoplasique (hippocratisme digital, thrombophlébite, hyper- être proposé. Pour les cancers de stade II, une irradiation peut
calcémie, syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone…) être discutée en complément de la chirurgie et de la chimio-
peuvent également être présents. Le cancer du poumon peut thérapie en cas d’atteinte pariétale ou d’exérèse incomplète.
aussi être découvert fortuitement sur une radiographie standard Dans le cas particulier où la tumeur se présente sous une forme
du thorax [18]. endobronchique exclusive, une curiethérapie peut constituer
Le bilan initial systématique comprend un bilan biologique une alternative à la radiothérapie externe [18,35].
complet, une radiographie thoracique standard, une scanogra-
phie thoracique et de l’abdomen supérieur, et une fibroscopie
bronchique avec biopsies et/ou lavage si possible ou tout autre 5. Stade III
technique de prélèvement (médiastinoscopie, ponction biopsi-
que sous scanographie ou thoracoscopie…) pour confirmation Les cancers de stades III doivent être séparés en ceux de
histologique. Le bilan préthérapeutique comprend le bilan stade IIIA, résécables et éligibles à un traitement chirurgical,
d’extension (scanographie thoraco-abdominale et cérébrale, une et ceux de stades IIIA et IIIB, non résécables, pour lesquels la
scintigraphie osseuse) et un bilan général et d’opérabilité si indi- chimioradiothérapie est le traitement de référence.
qué (épreuves fonctionnelles respiratoires [EFR], scintigraphie de En pratique, pour les cancers de stades IIIA, il n’existe pas à
ventilation-perfusion, bilan cardiaque…). La tomoscintigraphie ce jour d’attitude thérapeutique standardisée. La prise en charge
par émission de positons (TEP) et la remnographie (IRM) cérébrale doit être discutée dans le cadre d’une réunion de concertation
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pluridisciplinaire. Elle repose sur un traitement multimodal, ou un simple repose-bras pour améliorer la reproductibilité, les
associant la chimiothérapie et la radiothérapie, voire la chirurgie. bras le long du corps en cas de tumeur apicale ou au dessus de
Pour les cancers de stade IIIB, le traitement de référence repose la tête dans tous les autres cas, avec une injection de produit
sur une chimioradiothérapie concomitante. de contraste après vérification de la clairance de la créatinine
La prise en charge est cependant guidée par l’évaluation [18,39]. L’acquisition doit couvrir l’ensemble des structures
du score de performance. Pour les patients dont le score est 0 anatomiques d’intérêt (poumons en totalité, cœur, œsophage…).
et 1, une chimioradiothérapie concomitante comprenant une Habituellement, la limite d’acquisition supérieure est la glotte et
bithérapie à base de sels de platine (plutôt du cisplatine) et la limite inférieure est l’interligne L1-L2. L’épaisseur des coupes
une radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle (RT3D) doit être inférieure à 5 mm ; une épaisseur de 2,5 mm est un
doivent être proposée. Il est recommandé de n’irradier que les bon compromis entre qualité et nombre de coupes [2,39]. Un
volumes tumoraux envahis. En cas de contre-indication à la dispositif d’asservissement respiratoire est recommandé, notam-
chimioradiothérapie concomitante, une chimioradiothérapie ment pour les lésions tumorales situées à la partie moyenne ou
séquentielle peut être proposée. Pour les patients dont l’indice inférieure du thorax [14,39].
de performance selon l’OMS est 2 ou plus, il n’y a pas d’attitude Des examens d’imagerie complémentaires peuvent être
standard. Une radiothérapie exclusive peut être proposée. fusionnées ou recalées à la scanographie de planification pour
En situation postopératoire chez les patients atteints de préciser les contours des volume-cibles. Une IRM peut être
cancer classé pN2, une irradiation médiastinale est discutée. Les réalisée pour les tumeurs de l’apex et en cas d’envahissement
inclusions dans un essai en cours (Lung Art pour Lung Adjuvant de la paroi ou des espaces prévertébraux avec suspicion d’infil-
Radiotherapy Trial) doivent être encouragées afin de déterminer
tration des trous de conjugaison (tumeur de Pancoast-Tobias).
son bénéfice dans cette indication [18,35].
La TEP couplée à la scanographie est intéressante, non pas pour
délinéer directement les volumes tumoraux, mais pour décider
du caractère néoplasique d’une image tomodensitométrique
6. Stade IV
(valeur prédictive négative élevée : une adénomégalie dont
le plus petit diamètre est  1 cm sur la scanographie et non
Une métastase unique synchrone à un cancer de stade T1-3,
fixante lors de la TEP n’est pas considérée comme spécifique)
N0-1 doit bénéficier d’un traitement à visée curative (chirurgie
ou pour préciser le contour tumoral en cas d’atélectasie
ou radiothérapie). Chez un malade opéré, l’apparition ultérieure
[8,24,39,43,44].
d’une métastase unique (cérébrale, pulmonaire ou surrénalienne)
est une indication à une chirurgie et/ou une radiothérapie à
7.2. Détermination des volume-cibles
visée curative. L’existence de deux ou trois métastases céré-
brales (synchrones ou métachrones) doit conduire en réunion
Seules les structures ou volumes anatomiques considérés
de concertation pluridisciplinaire à la discussion d’un éventuel
comme tumoraux sont irradiés. Ainsi, seuls les ganglions patho-
traitement à visée curative. Une irradiation complémentaire de
logiques, notamment médiastinaux, sont pris en compte dans le
l’encéphale en totalité ou du lit opératoire peut être réalisée après
volume cible macroscopique ou GTV (Gross Tumor Volume). L’aire
neurochirurgie ou radiothérapie en conditions stéréotaxiques.
sus-claviculaire ne devra être irradiée à titre prophylactique
La radiothérapie hypofractionnée est le traitement de
qu’en cas de tumeur de l’apex ou d’atteinte massive des aires
référence des symptômes associés à des métastases osseuses
symptomatiques ou cérébrales multiples (plus de trois). ganglionnaires médiastinales hautes sous-jacentes (aires 1 et
Un traitement désobstructif endobronchique peut être indi- 2) [25,42]. Une chimiothérapie néo-adjuvante est de plus en
qué dans les obstructions proximales graves. Une radiothérapie plus prescrite avant la radiothérapie. En l’absence de données,
thoracique hypofractionnée à visée palliative peut être délivrée le volume-cible macroscopique correspond au volume tumoral
en cas de symptômes thoraciques importants [18,35]. avant la chimiothérapie. Les marges « idéales » proposées ci-
dessous seront bien sûr réduites en fonction des histogrammes
dose-volume (HDV) finaux [19,39,42].
7. Modalités du traitement
7.2.1. Volume tumoral macroscopique
Les modalités techniques de la radiothérapie conforma-
tionnelle tridimensionnelle ont déjà été publiées en grande Le volume tumoral macroscopique correspond à la tumeur
partie dans plusieurs articles de Cancer/Radiothérapie et dans pulmonaire (GTVT) et aux adénopathies visibles à l’imagerie
le Guide de radiothérapie des tumeurs de la Société française de (GTVN). Il est important de bien définir la fenêtre de contourage
radiothérapie oncologique (SFRO) [5,17,25]. Nous reprendrons optimale pour la scanographie. Les valeurs « optimales » rete-
ici les points les plus importants. nues pour la visualisation de la tumeur intra-parenchymateuse
sont un niveau de -600 UH (unités Hounsfield) et une fenêtre
7.1. Acquisition des données anatomiques de ± 1600 UH. Pour la visualisation du médiastin, les valeurs
optimales sont un niveau de + 20 UH et une fenêtre de ± 400 UH
L’acquisition des données anatomiques doit être la plus [13]. Il n’y a pas encore de valeur recommandée pour la TEP, une
précise et soigneuse possible. Elle est réalisée à l’aide d’une sca- attention particulière doit donc être apportée à ces réglages. Un
nographie en position de traitement : en décubitus dorsal, avec ganglion est considéré comme pathologique si son petit diamètre
un système d’immobilisation personnalisé de type alpha-cradle est supérieur à 1 cm, s’il fixe sur la TEP ou, a fortiori, si l’atteinte
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histologique est confirmée (médiastinoscopie, écho-endoscopie Cependant, cette dose apparaît comme la dose minimale à attein-
par voie bronchique…) [39,43,44]. dre ; il a été publié que la dose de 60 Gy ne permettait d’obtenir
seulement un qu’un taux de contrôle local de 20 % à un an [38].
7.2.2. Volume cible anatomoclinique De même, Vijayakumar et al. ont montré à partir de différentes
séries de la littérature une forte relation entre l’augmentation
Le volume cible anatomoclinique ou CTV (Clinical Target de la dose totale et le taux de contrôle local [45].
Volume) inclut le volume tumoral macroscopique augmenté de L’irradiation médiastinale prophylactique des aires non
la maladie infraclinique. macroscopiquement envahies de 46 Gy a tendance à disparaître,
CTVT : les marges à ajouter autour du GTVT doivent tenir car le taux de récidive en dehors du volume irradié n’est que de 8
compte de l’envahissement tumoral microscopique non visible à à 9 %, et cette irradiation prophylactique représente un obstacle
l’imagerie. Cet envahissement varie en fonction de l’histologie : à l’escalade de dose [10,37,42]. Un récent essai randomisé a
il est de 8 mm pour un adénocarcinome, 6 mm pour un cancer comparé une irradiation du seul volume tumoral et une irra-
épidermoïde, et en l’absence d’étude spécifique, de 5 mm pour diation du volume tumoral et prophylactique de l’ensemble du
les autres types histologiques [11]. médiastin. Aucune différence n’a été mise en évidence en termes
CTVN : en situation postopératoire, il est déterminé des régions de survie et les taux de réponse objective ont été supérieurs pour
ganglionnaires – définies selon la classification de Mountain et le bras expérimental avec une moindre toxicité [47]. L’irradiation
Dresler – à « haut risque » en fonction du site tumoral initial prophylactique des aires ganglionnaires non envahies n’est
[26,29]. Le drainage du lobe supérieur droit se fait préférentiel- donc pas recommandée [35]. D’ailleurs, la dose reçue par les
lement dans les aires 7 puis 4R et parfois 8 et 9 ; pour le lobe ganglions adjacents au volume cible est non négligeable ; ces
moyen droit, dans les aires 7 et 4R ; pour le lobe inférieur droit, ganglions sont donc traités involontairement dans la plupart
dans les aires 4R, 2R et plus rarement 7 ; pour le lobe inférieur des cas [10,20].
gauche, surtout dans l’aire 7, puis 4L et 2L, moins souvent dans
l’aire 5 et au-delà 4R et 2R ; enfin pour le lobe supérieur gauche, 7.3.2. Radiothérapie postopératoire
dans les aires 4L, 2L et 3 [29,36]. Autour des ganglions envahis,
il est recommandé une marge pour définir un CTVN de 3 mm si Les indications de radiothérapie postopératoire sont plus
le plus petit diamètre du ganglion est inférieur à 2 cm et 8 mm rares et non complètement validées [31]. En cas de résection R1,
au-delà [16]. une dose de 60 à 66 Gy est préconisée dans la zone en exérèse
incomplète. Pour les lésions de stade pT3, notamment celles
7.2.3. Volume cible prévisionnel situées au contact de la paroi thoracique, une dose de 46 à 56 Gy
est indiquée [17].
Le volume cible prévisionnel comprend une marge « techni- Pour les patients atteints de cancer de stade pN2, il est
que » qui s’ajoute au volume cible anatomoclinique en raison des habituel de proposer une irradiation médiastinale de 46 à 54 Gy
incertitudes liées aux mouvements des organes et du patient. en fractionnement classique. Cependant, la dernière méta-
Dans le rapport 62 de l’International Commission on Radiation analyse PORT (Postoperative Radiotherapy) a remis en question
Units ans Measurements (ICRU) 62, ce volume a été scindé en deux cette indication [31]. Il faut ainsi encourager l’inclusion de ces
selon les causes d’incertitudes [19]. Les mouvements internes patients dans l’essai LUNG ART (Lung Adjuvant Radiotherapy Trial)
des organes permettent de définir un volume cible interne ou ITV randomisant les patients atteints de cancer de stade pN2 entre
(Internal Target Volume). Le passage du volume cible interne au abstention et irradiation médiastinale de 54 Gy.
volume cible prévisionnel s’effectue par l’addition d’une marge Le délai optimal pour commencer la radiothérapie est de
de mise en place (set-up margin). Il est important que chaque six à huit semaines après la chirurgie et d’un mois après une
centre détermine la valeur de ces marges en fonction de sa chimiothérapie adjuvante [22,23,28].
propre technique ou procédure de traitement. Le plus souvent,
le volume cible prévisionnel inclut une marge de 5 à 10 mm 7.4. Organes à risque et contraintes de doses
autour du volume cible anatomoclinique [25,39].
Pour réduire le volume cible interne, notamment pour les Un numéro spécial de Cancer/Radiothérapie reprend en
tumeurs des lobes moyen et inférieurs, il est conseillé d’utiliser détails l’ensemble des organes à risque et les contraintes de doses
une technique d’asservissement respiratoire, plutôt en blocage pour l’irradiation thoracique. Succinctement, les principaux
volontaire ou actif en inspiration profonde de la respiration organes à risque pour l’irradiation pulmonaire comprennent
[14,39]. les deux poumons, le cœur, l’œsophage et la moelle épinière
[5,39]. L’ensemble de ces organes doit donc apparaître sur les
7.3. Doses prescrites histogrammes dose-volume (HDV) (Tableau 1).

Les doses de prescription varient selon que la radiothérapie 7.4.1. Poumon


est délivrée en exclusivité ou après la chirurgie [35].
L’ensemble des deux poumons doit être délinéé [39]. Les
7.3.1. Radiothérapie exclusive recommandations de la littérature sont hétérogènes, prenant
en compte parfois les deux poumons, parfois ce volume pul-
La dose totale à délivrer en fractionnement classique varie monaire total moins le volume cible prévisionnel ou le volume
entre 66 à 70 Gy ; l’escalade de dose est en voie de recherche. tumoral macroscopique, etc. Classiquement, on analyse le
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Tableau 1 7.4.5. Plexus brachial


Principales contraintes de dose pour une irradiation thoracique.
Main dose restrictions for thoracic irradiation.
La dose maximale doit être inférieure à 55 Gy. Durant tout
Organes Rapport Dose/ Dose Dose le traitement, le patient est vu chaque semaine par l’oncologue
Volume (HDV) moyenne Maximum
radiothérapeute, qui évalue et cote la toxicité aiguë (Criteria for
Poumon* V5  42 % 15 à 20 Gy Adverse Events [CTCAE]) [17,35,41].
V13  40 %
V20  30 %
V30  20 % 7.5. Balistique et dosimétrie : rayonnement
Cœur V40  30 %
D100  30 Gy
La dosimétrie doit être réalisée avec un système de pla-
Œsophage L40  15 cm
V50  35 % nification des doses qui prend en compte les hétérogénéités
de dose rencontrées dans le thorax. Compte tenu de ces
Moelle 45 Gy
hétérogénéités et de l’élargissement de la pénombre qui en
résulte, des photons de 6 à 10 MV au maximum doivent être
*Volume des 2 poumons moins le volume cible prévisionnel (PTV).
Vx  y % : le volume de l’organe recevant la dose x doit être inférieur ou égal privilégiés [4,39].
à y % de cet organe. Pour une meilleure distribution de dose, il est recommandé
L : longueur ; D : dose.
de réaliser une balistique avec de trois à cinq faisceaux d’emblée
sans réduction. Cette balistique est à adapter en fonction de la
risque de complications à partir du volume des deux poumons taille, de la localisation tumorale et aux contraintes de dose
auquel on retrait le volume du volume cible prévisionnel. Les décrites ci-dessus.
contraintes sont alors les suivantes : V20 (volume des deux La dose doit être prescrite au point ICRU, 95 % du volume cible
poumons – volume cible prévisionnel recevant une dose d’au prévisionnel devant recevoir au moins 95 % de la dose prescrite,
moins x, ici 20 Gy) : < 30 ou 35 % et V30 < 20 % [2,9,15]. En cas 98 % du volume au moins 90 % de la dose et 3 % du volume ne
de poumon unique, les données sont encore moins nombreuses. doivent pas recevoir plus de 107 % de la dose prescrite [19].
On recommande que le V20 soit < 20 % [17]. D’autres données Une image de contrôle des faisceaux d’irradiation (imagerie
attirent l’attention sur les doses moyennes avec des limites du portale) doit être réalisée selon un protocole établi afin de
V5 < 42 % et V13 < 40 %. La dose moyenne pourrait également être détecter les erreurs systématiques et aléatoires de position-
prédictive avec un seuil entre 15 et 20 Gy [40,46]. Enfin, pour nement [17].
les systèmes de planification des doses (TPS pour Treatment
planning system) qui permettent de calculer les valeurs du
NTCP (Normal Tissue Complications Probability ou probabilité 8. Toxicité de la radiothérapie
de complications des tissus sains), les valeurs de 15 ou 18 %
sont habituellement retenues [33,40,46]. Les effets aigus sont les manifestations survenant jusqu’au
90e jour de la fin de la radiothérapie. Elles sont fréquentes mais,
7.4.2. Cœur en général, mineures. Les effets tardifs sont les manifestations
survenant plus de trois mois de la fin de la radiothérapie [7].
Le volume cardiaque doit être délinéé jusqu’à l’émergence Ces effets peuvent être très tardifs mais le délai moyen de leur
des gros vaisseaux (aorte et artères pulmonaires). Bien que les survenue est de deux ans. Ils ne sont pas forcément précédés de
données soient limitées, il est recommandé de ne pas dépasser manifestations aiguës bruyantes. Les principaux effets aigus et
40 Gy dans le tiers du volume cardiaque (V40 < 30 %) et 30 Gy tardifs sont repris dans le numéro spécial de Cancer/Radiothérapie
dans tout le cœur [D100 (dose reçue dans 100 % du cœur) < 30 Gy], sur les organes à risque [48].
en étant particulièrement prudent en cas de coronaropathie ou La principale complication, et la plus crainte, reste la pneu-
de risque d’insuffisance cardiaque [12]. mopathie radique aiguë (PRA) [3,5]. La pneumopathie radique
aiguë survient dans la majorité des cas entre 6 et 12 semaines
7.4.3. Œsophage après la fin de l’irradiation [27]. Toutefois, des formes suraiguës
survenant en cours d’irradiation ont également été observées.
Le risque d’œsophagite de grades 3 et 4 semble plus corrélé Sa fréquence est d’environ 10 à 15 %. La symptomatologie clini-
avec l’association de chimioradiothérapie concomitante qu’à la que est aspécifique. La toxicité pulmonaire aiguë se manifeste
longueur d’œsophage irradiée. par une dyspnée et une toux améliorée par la corticothérapie ;
Les contraintes générales sont les suivantes : pas plus de dans les formes plus graves, le patient peut souffrir d’un tableau
40 Gy ne doivent être délivrés sur plus de 15 cm de longueur de détresse respiratoire aigue [3,5,27]. La toxicité pulmonaire
d’œsophage (L40 < 15 cm). Le volume de l’œsophage recevant au tardive apparaît comme le développement d’une insuffisance
moins 50 Gy doit être inférieur à 35 % du volume œsophagien respiratoire de sévérité variable [27]. La douleur thoracique et
total (V50 < 35 %) [1,5,21]. l’hémoptysie, quoique beaucoup plus rares, ont également été
décrites. L’examen clinique peut noter l’existence de crépitants
7.4.4. Moelle auscultatoires ou d’un souffle pleural. La biologie montre
l’existence d’un syndrome inflammatoire non spécifique. Les
La dose maximale doit rester inférieure à 45 Gy en un point signes radiologiques sont habituellement plus parlants, bien
et inférieure à 40 Gy sur un segment. que non spécifiques. Le cliché radiographique montre le plus
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souvent la coexistence d’images alvéolaires et interstitielles une synchronisation respiratoire (quadridimensionnelle) a été
d’allure confluente, classiquement situées dans le volume réalisée ; les contours du volume cible et des organes à risque
irradié. La tomodensitométrie retrouve le plus souvent des sont présentés figure 22. La marge définie autour du volume
opacités en verre dépoli non systématisées. Plus rarement, tumoral macroscopique était de 8 mm (adénocarcinome) ; celle
les images radiologiques prennent une allure extensive et autour du volume cible interne de 3 mm (après analyse de la
se mettent à déborder largement les volumes irradiés pour scanographie quadridimensionnelle) et la marge de positionne-
s’associer à de véritables syndromes de détresse respiratoire ment de 2 mm. La dose prescrite était de 66 Gy, à raison de cinq
aiguë (SDRA) [3]. Les explorations fonctionnelles respiratoires fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le traitement a été réalisé avec
associent l’existence d’un trouble ventilatoire restrictif et une des photons de 4 MV, par quatre faisceaux isopondérés (latéral
altération de la diffusion du monoxyde de carbone. Le lavage droit, oblique postérieur droit, oblique postérieur gauche, et
broncho-alvéolaire (LBA), s’il est fait, retrouve souvent une lym- postérieur) (Fig. 23). La dosimétrie et les histogrammes dose-
phocytose de l’ordre de 30 %. Elle est constituée essentiellement volume sont présentés figures 24 et 25.
de lymphocytes T CD4+. En l’absence de critères diagnostiques
pathognomoniques, le diagnostic de pneumopathie radique 10.2. Cas clinique n°2 (T2N2M0)
aiguë reste, à l’heure actuelle, un diagnostic d’élimination. Une
fois le diagnostic posé, l’évolution de la pneumopathie radique M. P, âgé de 81 ans, a consulté en pneumologie suite à un
aiguë est habituellement favorable, soit spontanément, soit épisode d’hémoptysie. La fibroscopie bronchique montait une
sous corticothérapie [3]. lésion suspecte localisée dans la bronche lobaire inférieure droite.
La toxicité cardiaque est également fréquente et peut entraî- Il s’agissait d’un carcinome épidermoïde bien différencié. Une
ner des complications multiples, par atteinte de ses différentes scanographie thoraco-abdominale, une TEP et une IRM cérébrale
composantes anatomiques : insuffisance cardiaque, péricardite, ont été réalisées et permettaient de classer la lésion T2N2M0
ischémie myocardique. Leur mise en évidence peut être difficile (adénomégalies hyperfixantes hilaire droite et sous carénaire).
en raison de leur évolution à bas bruit [12,32]. La tumeur était donc de stade IIIA. Le bilan d’opérabilité du
L’œsophagite radique aiguë a vu sa fréquence augmenter patient permettait une prise en charge chirurgicale (résécable et
depuis l’apparition de l’association d’une chimiothérapie opérable). Une lobectomie inférieure droite associée à un curage
concomitante, elle apparaît en cours d’irradiation et se manifeste médiastinale a ainsi été réalisée ; l’analyse histologique de la
essentiellement par une dysphagie. Les symptômes sont liés à pièce opératoire a permis de classe la tumeur pT2N2, R0. Compte
l’atteinte de la muqueuse œsophagienne. L’œsophagite radique tenu de l’envahissement massif des ganglions médiastinaux,
tardive est moins fréquente, est liée à une atteinte de la paroi l’indication d’une irradiation médiastinale postopératoire a donc
musculaire, la présentation clinique est celle d’une sténose, voire été posée en réunion de concertation pluridisciplinaire. Une
de perforation œsophagienne [30]. scanographie dosimétrique en respiration libre a été réalisée ;
les contours du volume cible anatomoclinique (CTV) et des
organes à risque sont présentés figure 26. La dose prescrite
9. Iconographie de radio-anatomie était de 54 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy.
Le traitement a été réalisé avec des photons de 4 et 10 MV, par
Les figures. 1 à 13 représentent les recommandations quatre faisceaux (antérieur, oblique antérieur gauche, oblique
de contours du cœur et de l’œsophage établies lors du STIC antérieur droit, et postérieur) (Fig. 27). La dosimétrie et les
(Programme de soutien aux techniques innovantes coûteuses) histogrammes dose-volume sont présentés figures 28 et 29.
sur la radiothérapie asservie à la respiration. Les figures. 14 à 21
affichent des exemples de segmentation des principales aires 10.3. Cas clinique n°3 (stade IIIA)
ganglionnaires (selon Servois) [6].
M. W, âgé 79 ans, tabagique à 80 paquets-année sevré
depuis dix ans était suivi pour un flutter auriculaire traité par
10. Cas cliniques commentés Préviscan®. En 2009, un épisode d’hémoptysies a amené la
réalisation d’une scanographie thoracique qui a montré un
10.1. Cas clinique n°1 (T2N0M0) nodule lobaire supérieur droit associé à des adénopathies de
la loge de Baréty (4R) et du médiastin antérieur. La fibroscopie
M. M, 80 ans, tabagique à 50 paquets-année non sevré, bronchique était non contributive. La médiastinoscopie a mis en
a consulté pour une majoration d’une dyspnée d’effort. Une évidence un carcinome épidermoïde bien différencié et confirmé
radiographie thoracique puis une scanographie thoracique ont l’atteinte ganglionnaire médiastinale (N2). Le bilan d’extension
mis en évidence une opacité spiculée de quatre centimètres était négatif (pas de fixation extrathoracique sur la TEP, ni de
lobaire inférieure droite. Une biopsie sous fibroscopie bron- lésion à l’IRM cérébrale). La tumeur a été classée T2N2M0, de
chique a confirmé la présence d’un adénocarcinome d’origine stade IIIA. Mr W. n’était pas opérable en raison de ses antécé-
bronchique. Le bilan d’extension comprenant une TEP et une dents médicaux ; il a été adressé pour une chimioradiothérapie
IRM cérébrale a éliminé la présence d’une atteinte ganglion- concomitante avec asservissement respiratoire de type blocage
naire médiastinale ou à distance. La tumeur a donc été classée volontaire en inspiration. Une scanographie dosimétrique avec
T2N0M0. La chirurgie a été écartée en raison de l’état général du asservissement respiratoire (RAR) a été réalisée, les contours du
patient (non opérabilité), ainsi l’irradiation exclusive est retenue. volume cible et des organes à risque sont présentés figure 30.
Une scanographie dosimétrique en position de traitement avec Le GTVT et GTVN ont été délimités. Une marge de 6 mm est
D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73 S67

appliquée entre le GTVT et le CTVT (carcinome épidermoïde). Conflits d’intérêts


Les marges complémentaires du volume cible anatomoclinique
pour aboutir au volume cible prévisionnel étaient de 7 mm P. Giraud : Essais cliniques : en qualité d’investigateur prin-
au total (2 mm pour le volume cible interne compte tenu du cipal, coordonnateur ou expérimentateur principal (Laboratoires
dispositif d’asservissement respiratoire, 5 mm pour la marge Lilly) ; Essais cliniques : en qualité de co-investigateur, expéri-
de positionnement). La dose prescrite au point ICRU était de mentateur non principal, collaborateur à l’étude (Laboratoires
66 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 2 Gy. Le Lilly) ; Conférences : invitations en qualité d’intervenant
traitement a été réalisé avec des photons de 4 MV, par quatre (Laboratoires Astra Zeneca) ; Conférences : invitations en qualité
faisceaux (antérieur, oblique antérieur droit, oblique postérieur d’auditeur (frais de déplacement et d’hébergement pris en charge
droit, et postérieur) (Fig. 31). La dosimétrie et les histogrammes par une entreprise : Laboratoires Lilly et Pfizer).
dose-volume sont présentés figures 32 et 33. D. Leignel Argo : aucun.

Fig. 1 à 6. Recommandations de contours


du cœur établies lors du Programme de soutien
aux techniques innovantes coûteuses (Stic)
sur la radiothérapie asservie à la respiration
(V. Servois, Radiologie, institut Curie).
Guidelines for heart delineation established
during the Support Program for Costly Innovative
Techniques (Programme de Soutien aux Techniques
Innovantes Coûteuses, STIC) on respiratory
radiotherapy (V. Servois, Radiologie, Institut Curie).
S68 D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73

Fig. 7 à 13. Recommandations de contours


de l’œsophage établies lors du Programme
de soutien aux techniques innovantes coûteuses
(Stic) sur la radiothérapie asservie à la
respiration (V. Servois, Radiologie, institut Curie).
Guidelines for esophagus delineation established
during the Support Program for Costly Innovative
Techniques (Programme de Soutien aux
Techniques Innovantes Coûteuses, STIC) resiratory
radiotherapy (V. Servois, Radiologie, Institut Curie).

Fig. 14. Schéma des principales aires


ganglionnaires médiastinales et hilaires
selon [26].
Main mediastinal and hilar lymph nodes according
to [26].
D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73 S69

Fig. 15 à 21. Exemples de segmentation des principales aires ganglionnaires (V. Servois, Radiologie,
institut Curie) selon [6].
Examples of segmentation of the main lymph nodes (V. Servois, Radiologie, Institut Curie) according to [6].

Fig. 22. Cas clinique n °1 : contours.


Case 1: delineation.
S70 D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73

Fig. 25. Cas clinique n° 1 : histogrammes dose-volume. Fig. 26. Cas clinique n °2 : contours.
Case 4: dose-volume histograms. Case 2: delineation.

Fig. 27. Cas clinique n °2 : balistique avec quatre faisceaux. Fig. 29. Cas clinique n °2 : histogrammes dose-volume.
Case 2: ballistic with 4 beams. Case 2: dose-volume histograms.

Fig. 30. Cas clinique n °3 : contours.


Case 3: delineation.
D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73 S71

Fig. 31. Cas clinique n °3 : balistique avec quatre faisceaux.


Case 3: ballistic with 4 beams.
Fig. 32. Cas clinique n °3 : dosimétrie.
Case 3: dosimetry

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D. Leignel Argo et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S61-S73 S73

ANNEXE 1
Classification TNM publiée en 2009 (7e édition) par l’UICC (Union ANNEXE 2
Centrale Contre le Cancer). Classification par stades.
TNM classification published in 2009 (7th edition) by the International Union Classification by stage.
Against Cancer (UICC).
Cancer occulte TX N0 M0
T – Tumeur primitive
TX : tumeur ne peut être évaluée ou est démontrée par la présence de
Stade 0 Tis N0 M0
cellules malignes dans les expectorations ou un lavage bronchique sans
visualisation de la tumeur par des examens endoscopiques ou d’imagerie
Stade IA T1a,b N0 M0
T0 : pas d’évidence de tumeur primitive
Tis : carcinome in situ
T1 : tumeur de 3 cm ou moins dans sa plus grande dimension, entourée Stade IB T2a N0 M0
par le poumon ou la plèvre viscérale, sans évidence bronchoscopique
d’invasion plus proximale que la bronchique lobaire (c’est-à-dire pas la T1a,b N1 M0
bronche souche) T2a N1 M0
Stage IIA
T1a : tumeur de 2 cm ou moins dans sa plus grande dimension
T1b : tumeur de plus de 2 cm sans dépasser 3 cm dans sa plus grande T2b N0 M0
dimension
T2 : tumeur de plus de 3 cm sans dépasser 7 cm dans sa plus grande T2b N1 M0
dimension ou présentant une des caractéristiques suivantes* : Stade IIB T3 N0 M0
– atteinte de la bronche souche à 2 cm ou plus de la carène ;
– invasion de la plèvre viscérale ; T1, T2 N2 M0
– présence d’une atélectasie ou d’une pneumopathie obstructive s’étendant
à la région hilaire sans atteindre l’ensemble du poumon. Stade IIIA T3 N1, N2 M0
T2a : tumeur de plus de 3 cm sans dépasser 5 cm dans sa plus grande T4 N0, N1 M0
dimension
T2b : tumeur de plus de 5 cm sans dépasser 7 cm dans sa plus grande T4 N2 M
dimension Stade IIIB
*les tumeurs avec ces caractéristiques sont classées T2a si leur dimension Tout T N3 M0
est de 5 cm ou moins
T3 : tumeur de plus de 7 cm ; ou envahissant directement une des Stade IV Tout T Tout N M1
structures suivantes : la paroi thoracique (y compris la tumeur de
Pancoast), le diaphragme, le nerf phrénique, la plèvre médiastinale,
pleurale ou pariétale ou le péricarde ; ou une tumeur dans la bronche
souche à moins de 2 cm de la carène sans l’envahir ; ou associée à une
atélectasie ou d’une pneumopathie obstructive du poumon entier ; ou
présence d’un nodule tumoral distinct dans le même lobe
T4 : tumeur de tout taille envahissant directement une des structures
suivantes : médiastin, cœur, grands vaisseaux, trachée, nerf laryngé
récurrent, œsophage, corps vertébral, carène ; ou présence d’un nodule
tumoral distinct dans un autre lobe du poumon atteint

N – Ganglions lymphatiques régionaux


NX : les ganglions ne peuvent pas être évalués
N0 : pas de métastase ganglionnaire lymphatique régionale
N1 : métastase dans les ganglions lymphatiques intrapulmonaires,
péribronchiques et/ou hilaires ipsilatéraux, y compris par envahissement
direct
N2 : métastase dans les ganglions lymphatiques médiastinaux ipsilatéraux
et/ou sous-carinaires
N3 : métastase dans les ganglions lymphatiques médiastinaux
controlatéraux, hilaires controlatéraux, scalènes ou sous-claviculaires
ipsilatéraux ou controlatéraux

M – Métastase à distance
MX : les métastases à distance n’ont pas pu être évaluées
M0 : absence de métastase à distance
M1 : métastase à distance
M1a : nodule (s) tumoral distinct dans un lobe controlatéral ; tumeur avec
nodules pleuraux ou épanchement pleural (ou péricardique) malin
M1b : métastase à distance
C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S74– S83

Cancer de l’œsophage
Esophageal cancer

O. Dupuisa, *, G. Ganema, G. Bérab, Y. Pointreaub, O. Pradierc, P. Martind, X. Mirabele, F. Denisa


a Centre Jean-Bernard, clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
b Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry S. Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France
c Département de radiothérapie, CHU de Morvan, 5, avenue Foch, 29200 Brest, France
d Centre Bourgogne 144, avenue de Dunkerque, 59800, Lille, France
e Département universitaire de radiothérapie, centre Oscar-Lambret, 59000 Lille, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 3b, 6a, 6d, 7a, 11a et 11c sont Les cancers de l’œsophage sont des lésions hautement malignes et d’un pronostic souvent très sévère,
visibles uniquement sur : http : //www. en dehors des lésions minimes traitées par chirurgie. La radiothérapie, ou plutôt l’association de
sciencedirect.com/ radiothérapie et de chimiothérapie concomitante est la modalité thérapeutique la plus souvent utilisée,
seule ou avec l’œsophagectomie. La définition des volumes cibles profite actuellement de la possibilité
Mots clés : d’utiliser en routine les nouvelles techniques d’imagerie [Tomographie par émission de positons
Cancer de l’œsophage (TEP) en particulier]. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités radio-anatomiques, les
Radiothérapie conformationnelle modes d’extension des cancers de l’œsophage et les principes de l’irradiation conformationnelle
Volumes cibles tridimensionnelle illustrés par un cas clinique.
Atlas © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: Esophageal cancers are highly malignant tumours with often a poor pronostic, except for minimal
Esophageal cancer lesions treated with surgery. Radiation therapy, or combined radiation and chemotherapy is the most
Conformal radiotherapy used therapeutic modality, alone or before oesophagectomy. The delineation of target volumes is now
Target volumes more accurate owing the possibility to use routinely the new imaging techniques (mainly PET). The
Atlas aim of this work is to precise the radio-anatomical particularities, the pattern of spread of esophageal
cancer and the principles of 3D conformal radiotherapy illustrated with a clinical case.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie fortes disparités régionales : en Basse-Normandie et en Bretagne,


l’incidence est le triple de la moyenne française.
Le cancer de l’œsophage atteint chaque année en France plus La majorité des cancers de l’œsophage sont encore des carci-
de 5 000 nouvelles personnes. La France a une des incidences nomes épidermoïdes (72 à 96 %), liés à la consommation d’alcool
les plus élevées en Europe malgré une forte régression dans les et de tabac. Néanmoins, l’incidence des adénocarcinomes est
deux dernières décennies. Il atteint surtout les hommes (sex- en forte augmentation, atteignant maintenant 20 à 25 % des cas
ratio de 12) et augmente avec l’âge après 60-65 ans. Il existe de [12]. Cette dernière forme histologique survient généralement

* Correspondance.
Adresse e-mail : o.dupuis@cjb72.org (Dr Olivier Dupuis)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83 S75

au niveau du tiers inférieur de l’œsophage, et a comme facteur 2.5. Classification AJCC 2010
étiologique reconnu l’endobrachyœsophage [16].
T - Tumeur primitive
— T0 = pas de tumeur primitive
2. Radio-anatomie et modes d’extension — Tis = carcinome in situ, dysplasie de haut grade
— T1 = tumeur envahissant la lamina propria, la muscularis
2.1. Définition des régions anatomiques mucosae ou la sous-muqueuse
— T1a = tumeur envahissant la lamina propria ou la muscularis
L’œsophage s’étend de la bouche de Killian au cardia et mucosae
comporte les segments cervical, thoracique et abdominal : • T1b = tumeur envahissant la sous-muqueuse
— œsophage cervical : du bord inférieur du cartilage cricoïde à — T2 = tumeur envahissant la musculeuse propre
l’entrée dans le thorax, vers 19 cm des arcades dentaires. — T3 = tumeur envahissant l’adventice
— T4 = tumeur envahissant les structures adjacentes
— œsophage thoracique :
• T4a = tumeur résécable envahissant plèvre, péricarde,
• tiers supérieur : de l’orifice supérieur du thorax à la bifurca-
diaphragme, péritoine adjacent
tion trachéale, à 25 cm des arcades dentaires environ ;
• T4b = tumeur non résécable envahissant d’autres structures
• tiers moyen : sous la bifurcation trachéale, de 25 à 32 cm
(aorte, corps vertébral, trachée …)
des arcades dentaires environ ;
N - Adénopathies régionales qui ne dépendent plus de la
• tiers inférieur, incluant l’œsophage abdominal : de 32 à
localisation tumorale
40 cm des arcades dentaires environ.
Le N concerne les ganglions dans le territoire de drainage
œsophagien, y compris les ganglions cœliaques et cervicaux,
2.2. Drainage lymphatique (Fig. 1a & 1b) sauf les ganglions sus-claviculaires (classés M1).
- Nx = ganglions non évaluables
Les aires ganglionnaires lymphatiques de drainage sont celles — N0 = pas d’envahissement des ganglions régionaux
du médiastin postérieur et du médiastin moyen, prolongées — N1 = 1 à 2 ganglions envahis
par les aires sus-claviculaires puis cervicales vers le haut et — N2 = 3 à 6 ganglions envahis
gastriques supérieures puis cœliaques vers le bas. Il existe par — N3  6 ganglions envahis
ailleurs un très riche réseau lymphatique sous-muqueux qui M - Métastase
draine essentiellement longitudinalement : la circulation se — M0 = pas de métastase à distance
fait principalement vers le haut puis les aires sus-claviculaires — M1 = présence de métastase à distance
pour la moitié supérieure de l’oesophage et vers le bas puis les — le Mx disparaît
ganglions coeliaques pour la moitié inférieure [8].
2.6. Ajout du grade histologique G
2.3. Modes d’extension des cancers de l’œsophage
G1 = bien différencié
Le réseau lymphatique sous-muqueux explique la possi- G2 = moyennement différencié
bilité d’extension très à distance de la tumeur primitive, soit G3 = peu différencié
directement, soit sous la forme de véritables métastases lym- G4 = indifférencié
phatiques. Les études sur pièces chirurgicales montrent une Les stades correspondants sont indiqués dans les tableaux 2
extension moyenne de plus d’un cm et jusqu’à 3 cm dans 94 % et 3 et prennent en compte pour les carcinomes épidermoïdes
la localisation de la tumeur primitive.
des cas [4]. L’extension en périphérie, facilitée par l’absence
de séreuse et l’envahissement de structures telles que l’arbre
trachéo-bronchique, la plèvre, le péricarde, les nerfs récurrents,
3. Indications de la radiothérapie
peut être précoce. Bien que la diffusion ganglionnaire des cancers
de l’oesophage puisse se faire sur l’ensemble des sites décrits
La radiothérapie était jusque dans les années 1980 le
plus haut, des études principalement japonaises ont mesuré
traitement des cancers de l’œsophage inopérables, soit du fait
le risque d’atteinte ganglionnaire en fonction de la localisation
de l’extension, soit à cause du terrain du patient. Néanmoins,
primitive (Tableau 1). Ainsi pourrait-on parfois limiter quelque rapidement, l’association à une chimiothérapie par 5-fluoro-
peu l’étendue des zones à irradier [6]. uracile puis par cisplatine a démontré sa supériorité sur
l’irradiation exclusive, au prix d’une toxicité accentuée [9].
2.4. Classifications des cancers de l’œsophage Cette modalité thérapeutique est devenue alors le traitement
standard des cancers évolués inopérables ou des lésions moins
La classification pré-thérapeutique utilise les résultats des étendues chez des patients atteints de « comorbidités » rendant
examens para-cliniques et essentiellement l’écho-endoscopie, la solution chirurgicale difficile à envisager. Compte tenu du
qui visualise avec le plus d’acuité l’extension en profondeur de la pronostic défavorable des tumeurs de stade T3 ou atteignant
lésion tumorale [18]. Une nouvelle classification TNM est à notre les ganglions (N+), la recherche clinique a exploré les options
disposition depuis le début 2010 et peut-être utilisée, même s’il de chimioradiothérapie pré-opératoire [5]. Cette stratégie a
s’agit d’une classification établie après la chirurgie [19]. montré une amélioration de la survie par rapport à la chirurgie
S76 O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83

Tableau 1
Risque d'atteinte des aires ganglionnaires en fonction de la localisation tumorale (%) [8].
Risk of lymph node involvement depending on tumor location (%) [8].

Sus-clav. D Sus-clav. G Paratrachéale Sous la carène Médiastin inf. Para-cardiale/ Cœliaque


gastriques sup.

Œsophage supérieur 26,7 13,3 46,7 18,4 16,3 28,6 2


Oesophage moyen 21,1 17,5 42,1 25,7 16,1 34,1 6,9
Oesophage inférieur 16,7 0 33,3 18,7 24,6 66,4 17,2

Tableau 2
Classification pronostique des carcinomes épidermoïdes selon l’AJCC (American Joint Comittee on Cancer) [19].
AJCC prognostic staging of epidermoid carcinomas [19].

Stade T N M Grade Localisation tumorale Survie à 5 ans

Stade IA 1 0 0 1,X Toute 70 %


Stade IB 1 0 0 2,3 Toute 60 %
2,3 0 0 1,X 1/3 inférieur
Stade IIA 2,3 0 0 1,X 1/3 sup et moyen 50 %
2,3 0 0 2,3 1/3 inférieur
Stade IIB 2,3 0 0 2,3 1/3 sup et moyen 40 %
1,2 1 0 Tout Toute
Stade IIIA 1,2 2 0 Tout Toute 25 %
3 1 0 Tout Toute
4a 0 0 Tout Toute
Stade IIIB 3 2 0 Tout Toute < 20 %
Stade IIIC 4a N1,N2 0 Tout Toute
4b Tout N 0 Tout Toute

Tout T N3 0 Tout Toute

Stade IV Tout T Tout N 1 Tout Toute

Tableau 3
Classification pronostique des adénocarcinomes selon l’AJCC (American Joint de cancérologie digestive) comparant la chirurgie précédée de
Comittee on Cancer) [19]. chimioradiothérapie et la chimioradiothérapie exclusive n’a pas
AJCC prognostic staging of adenocarcinomas [19].
montré de différence de survie globale entre ces deux approches
Stade T N M Grade Survie à 5 ans chez des patients atteints de tumeur de stade T3, en situation de
réponse à la chimioradiothérapie [2]. Les malades opérés avaient
Stade IA 1 0 0 1,2,X 80 %
Stade IB 1 0 0 3 60 %
une mortalité précoce plus importante, une durée d’hospitalisa-
2 0 0 1,2,X tion plus longue mais moins de récidives locorégionales. Dans
Stade IIA 2 0 0 3 50 % un essai allemand, la randomisation se faisait avant le début du
Stade IIB 3 0 0 Tout 40 % traitement : cet essai a confirmé l’équivalence des stratégies avec
1,2 1 0 Tout ou sans chirurgie sur la survie globale, avec un contrôle local
Stade IIIA 1,2 2 0 Tout 25 % amélioré par la chirurgie et une mortalité liée au traitement plus
3 1 0 Tout importante dans ce cas [17]. Il convient d’essayer d’optimiser
4a 0 0 Tout l’usage de ces deux options thérapeutiques.
Stade IIIB 3 2 0 Tout < 20 % Actuellement la radiothérapie est souvent utilisée dans le
Stade IIIC 4a N1,N2 0 Tout traitement des cancers de l’œsophage :
4b Tout N 0 Tout — radiothérapie exclusive chez des patients trop fragiles pour
Tout T N3 0 Tout être opérés et pour supporter la chimioradiothérapie, ou à titre
Stade IV Tout T Tout N 1 Tout palliatif pour diminuer la dysphagie même chez des patients
atteints de cancer métastatique ;
— radio-chimiothérapie exclusive en cas de cancer évolué, a
fortiori sus-carinaire, ou d’un cancer moins évolué chez un
patient inopérable ;
seule [7]. Cet effet est peut-être restreint aux adénocarcinomes — chimioradiothérapie préopératoire pour des cancers évolués
et aux populations non asiatiques [10]. Puis, a été étudiée la (de stade T3 ou atteignant les ganglions), opérables : la
possibilité de se dispenser de la chirurgie pour les cancers évo- difficulté consiste à déterminer quels patients bénéficient
lués opérables : l’essai 9102 de la FFCD (Fédération française de la chirurgie. Les patients en situation de réponse partielle
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83 S77

4. Modalités de la radiothérapie conformationnelle

4.1. Définition des volumes cibles

Les volumes cibles et les contours des organes à risque sont


déterminés à partir des coupes tomodensitométriques réalisées
avec un patient en position de traitement. Typiquement, la scano-
graphie est réalisée avec des coupes de 3 mm d’épaisseur tous les
trois mm, sans injection si les possibilités de fusion avec des images
Fig. 1a & 1b. Délimitation tomodensitométrique des zones ganglionnaires tépographiques le permettent. Toutefois, l’injection de produit de
thoraciques et abdominales supérieures concernées par les cancers contraste iodé (en l’absence d’allergie ou d’altération de la fonction
de l’œsophage.
Abréviations adaptées de la classification de l’AJCC (American Joint Comittee
rénale) peut être proposée si elle est jugée utile et réalisable. La
on Cancer) : Oe, œsophage & g. péri-œsophagiens ; PTCd, paratrachéal position du malade dépend de la localisation à traiter : bras le long
cervical droit ; PTCg, paratrachéal cervical gauche ; SCd, sus-claviculaire
droit ; PTSd, paratracheal supérieur droit ; PTSg, paratracheal supérieur
du corps pour les cancers de l’oesophage cervical ou thoracique
gauche ; PTId, paratrachéal inférieur droit ; MH, médiastinal haut ; PV, haut, bras au dessus de la tête pour les localisations moyennes
pré-vasculaire (pré-aortique) ; SC, sous-carénaire ; PHd, péri-hilaire droit ;
ou basses (le but étant de dégager les régions sus-claviculaires
PHg, péri-hilaire gauche ; PVe, pré-vertébral ; PAd, para-aortique droit ;
PC, péri-cardial ; RAo, rétro-aortique ; Spl, splénique ; Coe, cœliaque ; GaG, dans le premier cas et de permettre des faisceaux latéraux dans le
gastrique gauche.
deuxième cas). La position du patient et des bras peut être modifiée
CT delimitation of thoracic and upper abdominal lymph node regions involved
in esophagus cancers. au décours du premier temps de traitement en particulier lors de
Abbreviations adapted from AJCC classification: Oe, esophagus and la poursuite ou de la reprise de la radiothérapie pour la phase de
periesophageal lymph nodes; PTCd, right cervical paratracheal; PTCg,
left cervical paratracheal; SCd, right supraclavicular; PTSd, right superior complément de dose dans un volume plus réduit, mais dans ces
paratracheal; PTSg, left superior paratracheal; PTId, right inferior paratracheal; cas, il peut être difficile d’obtenir des histogrammes dose-volume
MH, upper mediastinal; PV, prevascular (preaortic); SC, subcoronary; PHd,
right perihilar; PHg, left perihilar; PVe, prevertebral; PAd, right paraaortic; PC, (HDV) totalement fiables. Une contention par masque à trois ou
pericardial; RAo, retroaortic; Spl, splenic; Coe, celiac; GaG, left gastric. cinq points est recommandée pour les tumeurs hautes.
— Le volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume, GTV)
seraient probablement les meilleurs candidats : les patients est délinéé en repérant la zone d’épaississement de la paroi
en situation de réponse complète ont de bonnes probabilités oesophagienne et/ou d’infiltration de la graisse médiastinale,
de contrôle local sans oesophagectomie et le rattrapage d’un assez facile à voir pour les tumeurs évoluées. Les données de la
échec de la radiothérapie est probablement illusoire ; fibroscopie sont utiles, mais il faut rester très critique à cause
— une chimioradiothérapie postopératoire sur le modèle du de la faible précision sur la localisation des limites tumorales.
traitement des cancers de l’estomac peut être discutée pour Pour les très petites tumeurs, des clichés fibroscope en place
des adénocarcinomes du cardia étendus vers le bas. voire des clips posés au décours de l’examen aideront aux
S78 O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83

repérages de la tumeur. Des clichés après déglutition barytée à deux cm dans le sens crânio-caudal et de cinq mm dans les
sont des solutions classiques mais plus approximatives. La autres directions en se limitant aux barrières anatomiques,
fusion avec une TEP est très utile pour les tumeurs moins associé aux adénopathies envahies.
évoluées et pour mieux définir l’extension en hauteur de la
lésion, voire des extensions sous muqueuses ou des « skip 4.2. Dose prescrite & fractionnement
lesions » [14] ; par ailleurs, cet examen aide à l’identification des
adénopathies envahies (en l’absence de TEP, les adénomégalies Le schéma considéré comme standard encore actuellement
dont le plus petit diamètre dépasse 1 cm sont généralement est celui dit d’Herskovic et consiste en une irradiation à raison
considérées comme atteintes) : de cinq séances de 2 Gy par semaine, jusqu’à une dose totale de
— le volume cible anatomo-clinique (Clinical Target Volume, 50 Gy en 5 semaines [9]. Un fractionnement de 1,8 Gy par séance
CTV) peut être décomposé en un volume tumoral (CTVt) et jusqu’à 50,4 Gy est admis. L’escalade de la dose n’est pas recom-
un volume ganglionnaire (CTVg). Le CTVt doit tenir compte de mandée hors essai thérapeutique car pour le moment, la seule
l’extension possible le long de la paroi œsophagienne et une étude ayant comparé 50,4 Gy à 64,8 Gy a conclu en l’absence
marge crânio-caudale de quatre à cinq cm du volume tumoral d’amélioration (l’effet délétère, parfois évoqué n’est néanmoins
macroscopique est considérée comme suffisante. Pour des pas démontré car l’excès de décès iatrogéniques survenait avant
localisations très distales, cette marge n’est pas applicable : que la dose de 50 Gy ne soit atteinte) [13]. Une chimiothérapie
en haut, la limite supérieure est souvent la bouche œsopha- par 5-fluoro-uracile en perfusion continue (1 000 mg/m²/j, j1-4)
gienne, sauf en cas de signe d’extension à la paroi pharyngée et cisplatine (75 mg/m², j1) les première et quatrième semaines
postérieure ; en bas, le volume cible anatomoclinique inclut de radiothérapie y est associée (deux cycles supplémentaires de
le cardia sans aller au-delà [12,13]. La marge circonférentielle chimiothérapie sont décrits dans l’article princeps mais ne sont
dépend des structures adjacentes et ne devrait pas être une pas toujours réalisables).
simple expansion géométrique du volume tumoral macrosco-
pique : par exemple, le médiastin autour du volume tumoral 4.3. Organes à risque et contraintes de dose
macroscopique est à risque mais l’extension se fait d’abord
sur la circonférence de la paroi aortique et non son épaisseur. Bien que la dose totale à délivrer soit peu élevée, la proxi-
Le volume cible anatomoclinique comprend les aires gan- mité de l’œsophage avec des organes à risque et la grande
glionnaires à risque, dont la topographie dépend du siège de étendue des faisceaux dans le sens longitudinal accroissent
la tumeur mais sont souvent déjà incluses dans le CTVt. Les les difficultés. La moelle épinière représente le principal organe
aires ganglionnaires médiastinales immédiatement adjacentes critique et le strict respect des contraintes de dose à son niveau
à la tumeur oesophagienne sont incluses de principe dans le s’avère parfois délicat : en cas de tumeur de l’oesophage cervical
volume cible anatomoclinique. Les aires sus-claviculaires sont ou cervicothoracique, la balistique prévoit habituellement des
traitées si les aires ganglionnaires médiastinales supérieures faisceaux obliques après 40-45 Gy et la marge est souvent mince
sont atteintes ou si la tumeur concerne l’œsophage cervical par rapport au canal médullaire. De même, pour une tumeur très
ou thoracique supérieur sus-carinaire. Les ganglions cervicaux étendue en hauteur, les différences d’épaisseur entre la région
homolatéraux (niveau III) sont traités en cas d’atteinte sus- cervico-thoracique et la région thoracique moyenne créent un
claviculaire. L’aire ganglionnaire gastrique supérieure est gradient de dose défavorable vers le haut. Enfin, l’association
incluse dans le volume cible anatomoclinique si la tumeur à la chimiothérapie doit rendre très prudent. Le parenchyme
primitive concerne l’œsophage au-dessous de la carène pulmonaire irradié est réduit au minimum possible mais pose
(± 24 cm des arcades dentaires). La région cœliaque est incluse problème pour les tumeurs les plus étendues en hauteur ou très
dans le volume cible anatomoclinique en cas d’atteinte de volumineuses. L’irradiation du coeur concerne les lésions des
l’aire gastrique supérieure et pour les lésions du bas œsophage tiers moyen et inférieur surtout. Le foie est un organe à risque
(± 32 cm des arcades dentaires). Pour les lésions étendues de pour les tumeurs sous-carénaires et du cardia. L’analyse des
part et d’autre de la carène, le volume cible anatomoclini- histogrammes dose-volume doit être très pertinente.
que comprend les aires ganglionnaires médiastinales et les Les contraintes de dose classiquement utilisées en France
ganglions sus-claviculaires en cas d’atteinte ganglionnaire sont répertoriées dans le Guide de procédures de la radiothérapie
sus-carinaire et les ganglions gastriques supérieurs en cas externe publié par la SFRO (Société française de radiothérapie
d’atteinte ganglionnaire sous-carinaire ; oncologique) [15] :
— les volumes cibles prévisionnels (Planning Target Volume, PTV) — dose maximale à la moelle : 45 Gy ;
sont obtenus en créant une marge par expansion automatique — pourcentage de volume pulmonaire total recevant 20 Gy ou
autour des volumes cibles anatomocliniques. Cette marge plus (V20) idéalement inférieur ou égal à 30 % ;
dépend des caractéristiques physiques des faisceaux utilisés volume hépatique recevant 30 Gy ou plus (V30) < 50 % ;
et des techniques de repositionnement. Au mieux, elle est irradiation de la totalité du coeur < 35 Gy et minimisation
déterminée après évaluation individualisée des mouvements du V40 (volume recevant 40 Gy) ;
du volume cible. Habituellement, cette marge est de cinq à Enfin, dans les lésions cervicales, le larynx et la thyroïde
dix mm. La planification du traitement prévoit généralement jouxtent la bouche oesophagienne et peuvent recevoir l’ensem-
une réduction du volume traité après 30 à 40 Gy environ : ble de la dose prescrite : le respect d’éventuelles contraintes est
le volume qui reçoit le complément de dose est défini par le alors impossible. Il faudra surveiller l’évolution de la fonction
volume tumoral macroscopique oesophagien étendu sur un thyroïdienne avec des dosages biologiques réguliers.
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83 S79

4.4. Balistique canadienne un taux de 16 % chez des survivants à long terme


après chimioradiothérapie exclusive [1]. Elle impose en cas de
La balistique peut être assez simple pour des lésions étendues dysphagie trop importante, des dilatations itératives, voire la
avec atteinte ganglionnaire, se limitant souvent en deux faisceaux mise en place d’une prothèse.
antérieur et postérieur pour traiter les grands volumes jusqu’à La toxicité pulmonaire « tardive » se traduit essentiellement
40 Gy environ, avec un complément par des faisceaux latéraux : par un risque plus élevé de pneumopathie post-opératoire
cet agencement est celui qui protège au mieux les poumons. [Syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) ou pneumopathie
Néanmoins, au vu des résultats de la plupart des études cliniques infectieuse] : une étude a montré une corrélation avec un volume
et de l’expérience qui ne retrouvent pas d’amélioration pour des recevant 10 Gy (V10 Gy) > 40 % et un recevant 15 Gy (V15 Gy)
irradiations très étendues, une économie du volume traité est > 30 %, avec un risque de complication passant de 10 à 30 % [11].
souvent possible, permettant de prévoir trois à quatre faisceaux En ce qui concerne le cœur, toute irradiation thoracique augmente
non opposés d’emblée (cf. cas clinique). Pour les cancers touchant le risque de pathologie péricardique, coronarienne et myocardique
la région cervico-thoracique, le complément est souvent réalisé et particulièrement ici du fait du tabagisme fréquemment associé.
par des faisceaux obliques antérieurs (300°, 60°), les épaules Les études essayant de mesurer spécifiquement cet effet sont
représentant un obstacle relatif. rares et les données des essais cliniques assez pauvres : il a été
rapporté dans une série un taux de risque de 27 % d’épanchement
péricardique [21,22], dans une autre une réduction de 6 % de la
5. Toxicité aiguë fraction d’éjection ventriculaire [20].

La chimioradiothérapie des cancers de l’œsophage est un


véritable défi : grand volume d’irradiation, chimiothérapie, 7. Cas clinique
patient souvent fragilisé. Le risque de complication grave est
important avec la chimioradiothérapie (taux de 20 % dans Le patient de 68 ans, marié, était atteint d’un psoriasis, une
l’étude d’Herskovic). La prise en charge nutritionnelle précoce épilepsie, une artérite des membres inférieurs avec sténose très
est indispensable afin de permettre de mener à bien le traitement serrée de l’artère iliaque commune droite et lésion fémorale gauche
sans interruption. La surveillance attentive tout au long des cinq (indication prochaine de Stent), une coronaropathie. Une dyspha-
semaines de traitement et jusqu’à la disparition des effets aigus gie s’accentuait progressivement depuis quelques mois avec perte
est fondamentale, afin de réagir le plus rapidement possible. de 6 kilos (poids habituel de 72 kg pour 1,61 m). La fibroscopie a
Les patients souffrent souvent d’une mucite œsophagienne, qui révélé une sténose circonférentielle à 30 cm des arcades dentaires,
débute généralement après 20 Gy et qui accentue la dysphagie étendue sur 5 cm et correspondant histologiquement à un carci-
déjà présente. Une épithéliite parfois intense peut se développer nome épidermoïde peu différencié. La scanographie a montré une
vers 30-40 Gy et est plus marquée en cas d’irradiation des régions lésion tumorale sous-carénaire assez peu importante mais une
cervico-sus-claviculaires. Les symptômes sont souvent aggravés volumineuse adénopathie para-œsophagienne inférieure droite.
par une infection mycosique surajoutée. Le risque de toxicité La TEP montrait un foyer hypermétabolique œsophagien étendu
hématologique concerne en premier les plaquettes à cause de du tiers moyen de l’œsophage avec une fixation ganglionnaire
la toxicité du cisplatine conjuguée au nombre important de coeliaque. Il n’y avait pas de signe d’extension à distance. L’état
vertèbres incluses dans les faisceaux, et est accentuée par le général restait bon, avec un indice de performance selon l’OMS
terrain (hépatopathie, toxicité de l’alcool). La toxicité sur la lignée de 1. L’alimentation était essentiellement semi-solide. Le patient
blanche peut néanmoins être marquée et être compliquée par des ne signalait pas d’autres symptômes. Il n’a pas eu de douleurs
épisodes fébriles. Une neutropénie sévère est particulièrement thoraciques depuis l’épisode survenu il y a quelques mois.
dangereuse sur ce terrain : « comorbidités », risque d’inhalation À l’examen clinique il n’y avait pas de signe d’extension de la
maximum en cas de sténose haute… S’ajoutent les possibilités maladie. En réunion de concertation pluridisciplinaire, il a été
d’insuffisance rénale aiguë qui survient typiquement chez des proposé une chimioradiothérapie exclusive sous couvert d’une
patients isolés, très dysphagiques, mal hydratés, et qui minimi- hospitalisation du fait des antécédents cardiovasculaires. Les
sent souvent leurs difficultés pour éviter l’hospitalisation. contours ont été réalisés après fusion avec une TEP (Fig. 2 à 5).
Un premier volume comprenant le médiastin moyen et inférieur
ainsi que les ganglions coeliaques a été traité par quatre faisceaux
6. Toxicité tardive de 25 MV jusqu’à 41,4 Gy, puis 9 Gy ont été délivrés par trois
faisceaux dans un volume réduit (Fig. 6-11).
La séquelle la plus fréquente est probablement la sténose
œsophagienne : elle est liée à la cicatrisation fibreuse de la
paroi oesophagienne dont la structure a été détruite par la Conflits d’intérêts
tumeur. L’estimation de son incidence est difficile à chiffrer
mais la persistance d’une certaine dysphagie est assez fréquente Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts pour
pour les tumeurs évoluées : il a été rapporté dans une série cet article.
S80 O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83

Fig. 2. Fusion de TEP et de scanographie dans les plans horizontal, sagittal et Fig. 3 a, b, c. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV tumeur)
coronal. (mauve), du volume tumoral macroscopique ganglionnaire (orange),
Figure 2. PET-CT fusion in horizontal, sagittal, and coronal planes. du volume cible anatomoclinique (CTV) (bleu) et du volume cible
prévisionnel (rouge) à différents niveau de coupe horizontale.
Gross tumor volume (GTV) delineation, lavender; lymph node GTV, orange;
clinical tumor volume (CTV), blue; planning target volume, red at different levels
of horizontal view.

Fig. 4. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (mauve), du volume cible anatomoclinique large (violet) et du volume cible anatomoclinique (CTV)
réduit dans les plans coronal (4a) et sagittal (4b) (vert).
Gross tumor volume (GTV) delineation (lavender), wide clinical tumor volume (purple), and reduced clinical tumor volume (CTV), (green) in the coronal (4a)
and sagittal (4b) planes.

Fig. 5. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (mauve), du volume cible prévisionnel large (PTV) (en rouge) et du volume cible prévisionnel réduit
(en jaune) dans les plans coronal (5a) et sagittal (5b).
Gross tumor volume (GTV) delineation (lavender), wide planning target volume (PTV) (red), and reduced planning target volume (yellow) in coronal (5a) and sagittal
(5b) planes.
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83 S81

Fig. 6 a, b, c, d. Vue des faisceaux (Digitally Reconstructed Radiographs, DRR) et du volume cible prévisionnel (PTV) large.
View of digitally reconstructed radiographs (DRR) and wide planning target volume (PTV).

Fig. 7 a, b, c. Vue des faisceaux (Digitally Reconstructed Radiographs, DRR) et du volume cible prévisionnel (PTV) réduit.
View of DRR and reduced planning target volume (PTV).
S82 O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83

Fig. 9. Orientation des faisceaux réduits : 70 °, 180 ° et 290 °.


Fig. 8. Orientation des quatre premiers faisceaux : 110 °, 180 °, 270 ° et 330 °. Orientation of reduced beams: 70°, 180°, and 290°.
Orientation of first four beams: 110°, 180°, 270°, and 330°.

Fig. 10. Histogramme dose-volume : poumons (brun), coeur (rose),


moelle (kaki), CTV 1&2 (vert), PTV1 & 2 (bleu).
Dose-volume histogram: lungs (brown), heart (pink), spinal cord (olive green),
CTV 1 & 2 (green), PTV1 & 2 (blue).

Fig. 11a, b, c. Isodoses de traitement (Gy).


Treatment isodoses (Gy).
O. Dupuis et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S74-S83 S83

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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S84– S93

Cancer de l’estomac
Gastric cancer

L. Mineura,*, E. Jaeglea, Y. Pointreaub, F. Denisc


a Unité de cancérologie digestive, Institut Sainte Catherine, Chemin du Lavarin, 84000 Avignon cedex, France
b Clinique d’oncologie radiothérapie, Centre Henry-S.-Kaplan, CHU Bretonneau, 2, boulevard Tonnellé, 37044, Tours, France
c Centre Jean-Bernard, Clinique Victor-Hugo, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France

RÉSUMÉ

La chimioradiothérapie a été évaluée dans un large essai contrôlé et a apporté une amélioration
Mots clés :
Cancer de l’estomac significative des probabilités de survie et de contrôle local dans une population de patients opérés d’un
Radiothérapie conformationnelle cancer gastrique. Elle n’est cependant plus largement appliquée et ce pour plusieurs raisons : manque
Volumes cibles d’expérience des oncologues radiothérapeutes dans la définition des volumes cibles, crainte de la
Atlas toxicité et surtout la chimiothérapie néoadjuvante à base de 5-fluoro-uracile de cisplatine avec ou sans
épirubicine est un nouveau standard pour les cancers gastriques résécables sur la base de l’imagerie. Cela
justifie que la stratégie thérapeutique soit discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire avant et
aussi après la chirurgie. Cette mise au point a pour objectif de définir les conditions de la mise en œuvre
de la radiothérapie gastrique et d’aborder ses aspects techniques dans le cadre des indications retenues
lors des réunions de concertation multidisciplinaire et du respect des recommandations nationales.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous
droits réservés.
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ABSTRACT

Radiochemotherapy Gatrointestinal intergroup study have demonstrated a convincing local control


Keywords:
Gastric cancer and overall survival benefit. Oncologists and GI workshops have in the present not had a major
Conformal radiotherapy interest in the radiotherapy treatment of gastric cancer due to a number of factors. Primary because
Target volumes toxicities may be severe, second physicians may have low experience in definition of clinical target
Atlas volume and in third perioperative chemotherapy is widely used in this indication. In Summary this
issue should be used as guides for defining appropriate radiation planning treatment for the adjuvant
postoperative therapy of gastric cancer.
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1. Épidémiologie à 5 ans des patients atteints d’un adénocarcinome gastrique


opéré restent médiocres mais semblent s’améliorer depuis
On estime à 7 300 le nombre de nouveaux cas de cancers 20 ans pour atteindre un taux de 45 % après une exérèse à
gastriques chaque année en France. Le nombre diminue depuis visée curative [3,7,14,23,27]. Les cancers de l’estomac sont dans
25 ans. Le cancer gastrique représente 3 % des nouveaux cas 31 % des cas dans le tiers supérieur, dans 14 % le tiers moyen
de cancers chaque année. L’incidence, estimée à 15,6/100 000 et dans 26 % le tiers inférieur. Dans 10 %, des cas la tumeur est
atteint 142/100 000 vers l’âge de 85 ans. Les chances de survie pangastrique.

* Correspondance.
Adresse e-mail : Laurent mineur@isc84.org (L. Mineur)
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L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93 S85

2. Radio-anatomie et modes d’extension examen dont la sensibilité et la spécificité sont mauvaises, et la


classification pTNM à partir des données histopathologiques.
2.1. Définition des régions anatomiques Des groupes pronostiques ont été définis dans la classification
de l’American Joint Committee on Cancer (AJCC) (Tableau 3).
L’estomac est un réservoir mobile divisé en une partie ver-
ticale et une horizontale limitée en haut en avant par le cardia 2.3.1. Classification de l’AJCC de 2009 [9]
et en bas par le pylore, faisant la jonction avec le duodénum.
La partie verticale comprend la grosse tubérosité (fundus) et T - Tumeur primitive
le corps gastrique, la portion horizontale représente l’antre. — T0 = pas de tumeur primitive
L’estomac se prolonge au-delà du pylore par le duodénum. Le — Tis = carcinome in situ,
duodénum comporte deux portions, dont la première n’est pas — T1 = tumeur envahissant la lamina propria, la muscularis
accolée au pancréas et est séparée du pancréas par le prolonge- mucosae ou la sous-muqueuse
ment de l’arrière-cavité des épiploons, qui s’étend jusqu’à l’artère — T1a = tumeur envahissant la lamina propria ou la muscularis
gastroduodénale. Cette partie du duodénum est intéressée dans mucosae
la plupart des gastrectomies. Le petit épiploon est un feuillet • T1b = tumeur envahissant la sous-muqueuse
péritonéal tendu en pont du pédicule hépatique à la petite — T2 = tumeur envahissant la musculeuse propre ou la sous
courbure gastrique. Le petit épiploon comporte trois parties : la séreuse, le ligament gastro colique, gastro hépatique, le petit
pars vasculosa, qui correspond au pédicule hépatique et à l’arc ou grand épiploon si absence de perforation du péritoine
artériovasculaire de la petite courbure gastrique ; la pars flacida viscéral.
qui correspond à une zone avasculaire ; et enfin la pars condensa — T3 = tumeur envahissant le péritoine viscéral (séreuse) sans
correspondant à la partie supérieure du petit épiploon, allant du envahissement d’organes adjacents
lobe gauche du foie à la portion verticale de la petite courbure. — T4 = tumeur envahissant les structures adjacentes
Le petit épiploon forme la limite supérieure droite de l’arrière • T4a = tumeur envahissant toute la séreuse
cavité des épiploons. Le chirurgien accède par son ouverture au • T4b = tumeur envahissant les structures adjacentes
tronc cœliaque, qui donne naissance à l’artère gastrique gauche,
formant une crosse allant le long de la petite courbure, l’artère 2.3.2. Ganglions N
hépatique commune et l’artère splénique. L’artère hépatique
commune donne naissance à l’artère hépatique propre et gastro- Les ganglions régionaux sont les ganglions périgastriques
duodénale se terminant en artère gastro-épiploique droite. le long de la petite courbure ou grande courbure gastrique et le
long de l’artère gastrique gauche, l’artère hépatique commune,
2.2. Définition des territoires ganglionnaires. splénique et du tronc cœliaque. Le curage doit contenir au moins
15 ganglions lymphatiques. L’envahissement des autres ganglions
La classification japonaise est retenue [19]. Les ganglions les fait considérer comme des sites métastatiques (ganglions
sont définis par des numéros 1 à 16 (Fig. 1). retropancréatiques, mésentériques, para-aortiques…)
— Nx = ganglions non évaluables
2.3. Classification des cancers de l’estomac. — N0 = pas d’envahissement des ganglions régionaux
— N1 = 1 à 2 ganglions envahis
Le stade selon la classification TNM des cancers gastriques — N2 = 3 à 6 ganglions envahis
est évalué à partir de l’imagerie disponible, soit la scanographie — N3a = 7 à15 ganglions envahis
thoraco-abdomino-pelvienne et l’écho-endoscopie, qui reste un — N3b = 16 ganglions et plus envahis
— M - Métastase
— M0 = pas de métastase à distance
— M1 = présence de métastase à distance

3. Indications de la radiothérapie

La chimioradiothérapie postopératoire améliore la probabilité


de survie. Le Southwest Oncology Group (SWOG), sur un total de
556 malades ayant eu une résection d’un cancer gastrique ou du
cardia, a conduit un essai randomisé comparant la chimioradiothé-
rapie adjuvante concomitante et la chirurgie seule. Le traitement
adjuvant comprenait 425 mg/m²/j de 5-fluoro-uracile et 20 mg/m²/j
d’acide folinique, pendant cinq jours, puis une radiothérapie
de 45 Gy 28 jours après. Deux cycles de chimiothérapie étaient
administrés pendant la radiothérapie. Un cycle était administré
Fig. 1. Représentation des sites de drainage ganglionnaire de l’estomac. la première semaine de la radiothérapie avec 400 mg/m²/j de
Classification japonaise des groupes ganglionnaires.
5-fluoro-uracile et 20 mg/m² d’acide folinique pendant cinq jours
Lymph node drainage sites of the stomach. Japanese classification of lymph node
groups. et la dernière semaine pendant trois jours. Un mois après la fin de
S86 L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93

la radiothérapie, deux cycles de 5-fluoro-uracile de 425 mg/m²/j pen- • si l’envahissement ganglionnaire est N2 ou N3 quel que soit
dant cinq jours et 20 mg/m²/j d’acide folinique étaient administrés le type de curage réalisé.
à 28 jours d’intervalle. La durée médiane de survie était dans le Pour les formes superficielles T1, la mucosectomie peut être
groupe chirurgie seule de 27 mois et dans le groupe chimio- discutée (accord d’experts).
radiothérapie de 36 mois [24]. Trois patients (1 %) sont décédés Le schéma de chimiothérapie préopératoire retenu peut
de la toxicité de la chimiothérapie. Une toxicité hématologique être un schéma ECC (épirubicine, cisplatine, capécibatine) ou
ou gastro-intestinale de grade 3 ou 4 est survenue respectivement LV5FU2 (leucovorine – 5-fluoro-uracile) -cisplatine (accord
chez 54 % et 33 % des malades dans le groupe chimioradiothérapie. professionnel).
Les autres effets secondaires étaient rares. La probabilité de survie La chimiothérapie du protocole Mac Donald peut être rem-
globale à 3 ans était de 50 % pour le bras chimioradiothérapie placée par un protocole LV5FU2 (accord professionnel).
postopératoire contre 41 % dans le bras chirurgie seule (p = 0,005). En cas d’envahissement ganglionnaire N1 et de curage gan-
Les auteurs ont conclu qu’une chimioradiothérapie postopératoire glionnaire D1 ou D2, une chimioradiothérapie doit être discutée
devait être envisagée chez tous les malades atteints d’un cancer de au cas par cas selon l’état général, nutritionnel du malade et son
l’estomac ou du cardia à haut risque de récidive, après résection avis après information claire (accord d’experts).
à visée curative. Cette étude a été critiquée du fait d’un curage à
minima dit D0 ne comprenant pas tous les ganglions de la lym-
phadénectomie D1 [4]. Cependant, la probabilité de survie à 5 ans 4. Modalités de la radiothérapie conformationnelle
du groupe chimioradiothérapie était de près de 45 % malgré un
curage D0 réalisé dans 54 % des cas et une atteinte ganglionnaire 4.1. Technique de radiothérapie et ballistique
dans 84 %. La survie de ce groupe de patients avec curage limité,
atteinte ganglionnaire fréquente, est proche de celle des patients La position en décubitus dorsal est utilisée avec les bras
chez qui le curage était plus étendu et l’atteinte ganglionnaire au-dessus de la tête. La radiothérapie asservie à la respiration
moins fréquente [6]. De plus, le curage D0 ne permet d’analyser peut être utilisée afin de diminuer les marges du volume cible
qu’un nombre moindre de ganglions. Une sous-évaluation du prévisionnel (PTV). Le patient peut être traité à jeun tout en
stade est donc probable. Le taux de complications imputables tenant compte de l’aspect nutritionnel. Une coque est réalisée
au traitement a également été critiqué [1]. Trente pour cent dans les meilleures conditions avant la chirurgie et conservée
des patients n’ont pas terminé le traitement en raison d’une afin d’effectuer un recalage de la scanographie dosimétrique pré-
toxicité hématologique, digestive ou autre. L’utilisation de et postopératoire. Une acquisition scanographique de données
faisceaux multiples et l’amélioration du protocole de chimio- anatomiques avec injection d’iode et transit œsogastroduodénal
thérapie devraient permettre de diminuer significativement ce avant et après chirurgie est réalisée avec des coupes de 3 mm.
taux de complications [11,16,18,30,33]. La chimioradiothérapie Pour l’opacification du grêle et du jéjunum, 20 ml de sulfate de
adjuvante semble donc améliorer la probabilité de survie des baryum peuvent être administrés vingt minutes avant l’examen.
patients en cas d’atteinte ganglionnaire, que le curage soit Une injection de 150 ml d’Omnipaque 300 est ensuite faite avant
étendu ou pas. C’est un traitement standard aux États-Unis. La l’acquisition des coupes scanographiques de D2 à S1. Le volume
chimiothérapie péri-opératoire a montré dans deux essais un cible anatomoclinique (CTV) est défini dans les meilleures condi-
bénéfice de survie globale [8]. La place de la chimioradiothérapie tions à partir de la scanographie dosimétrique préopératoire et un
postopératoire chez les patients en situation de non-réponse à recalage d’images effectué avec la scanographie postopératoire
une chimiothérapie préopératoire reste à définir, de même des peut être fait (Figs. 2 et 3).
stratégies de chimiothérapies préopératoires associées à une Une modification du volume cible anatomoclinique sur
chimioradiothérapie préopératoire. la scanographie postopératoire est réalisée afin d’inclure les
Le thésaurus de la société nationale française de gastro- anastomoses dans le volume cible anatomoclinique.
entérologie (SNFGE) [34] recommande : La technique a été initialement décrite dès 1983 et les
— une discussion du dossier du patient en réunion de concerta- volumes à irradier sur l’analyse des sites de récidives faite par
tion avant chirurgie ; Gunderson et al. [16]. La dose est de 45 Gy avec un fractionne-
— une proposition d’une chimiothérapie péri-opératoire à tous ment de 1.8 Gy par jour cinq jours par semaine. Le traitement
les malades atteints de cancer de stade supérieur à I. (niveau est délivré sur cinq semaines.
de la recommandation : grade A) de type ECF (épirubicine La chimiothérapie est concomitante à la radiothérapie et
– cisplatine -5-fluoro-uracile) (grade B) ou 5-fluoro-uracile selon le schéma FUFOL (5-fluoro-uracile – acide folinique)
- cisplatine (grade B). semaine 1 et 5 de la radiothérapie ou LV5FU2 j1 j14 j28 avec un
La résection chirurgicale (niveau de la recommandation : profil de tolérance semblant meilleur [12]. Le 5-fluoro-uracile
grade A) et le curage ganglionnaire (niveau de la recommanda- « protracté » semble être mieux toléré dans les irradiations sous
tion : grade B) doivent être proposée selon les modalités décrites diaphragmatiques [28, 29].
dans les recommandations.
Une chimioradiothérapie postopératoire doit être proposée 4.2. Définition du volume cible anatomoclinique (CTV)
(niveau de la recommandation : grade B) aux malades n’ayant pas
eu, quelle qu’en soit la raison, de chimiothérapie péri-opératoire Cette définition s’appuie sur les études documentant les
ou dont le dossier n’a pas été discuté avant la chirurgie : sites de récidives et les sites d’atteinte ganglionnaire qui est
• s’il s’avère que le curage est D0 et que la tumeur est de stade fonction du siège de la tumeur (Tableaux 1 et 2). La résec-
supérieur à I ; tion chirurgicale considérée comme curative s’accompagne
L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93 S87

lit opératoire, sur le moignon gastrique ou l’anastomose, reste


le site de récidive le plus fréquent (Tableau 2).
Le volume cible anatomoclinique doit donc comprendre
l’anastomose œso-jéjunale ou gastro-jéjunale, le moignon
gastrique, le lit gastrique reconstruit à partir d’une scanographie
préopératoire et les aires de drainage ganglionnaire. Une recons-
truction du positionnement de l’estomac avant l’intervention est
recommandée si une scanographie dosimétrique préopératoire
n’est pas disponible. Idéalement, des clips sont mis en place par
le chirurgien afin de délimiter le mieux possible le lit opératoire,
le siège initial de la tumeur et les sites à risque de rechute (résidu
macroscopique, résection avec adhérences suspectes, groupes
ganglionnaires fixés). Pour les tumeurs du fundus, la coupole
diaphragmatique gauche sera incluse dans le volume cible anato-
moclinique. Le moignon gastrique est visualisé par l’ingestion de
Fig. 2. Image de contrôle du recalage de la scanographie de repérage baryte de même l’anastomose. Si la scanographie est utilisée pour
préopératoire et postopératoire. (contour des structures osseuses (bleu).
Image of CT adjustment for preoperative and postoperative identification la définition des volumes cibles, elle a l’avantage de rechercher
(delineation of bony structures, blue). des signes précoces d’une carcinose ou de métastases hépatiques
contre-indiquant la chimioradiothérapie [9]. Une atteinte du
mésentère est recherchée. En effet, l’extension tumorale précoce
peut se faire le long des fascias mésentériques (gastrocoliques
ou mésocoliques). Ces fascias réalisent de véritables ponts
anatomiques entre l’estomac, le pancréas et le colon transverse.
Une fixité anormale des anses grêles, une augmentation de la
densité du mésentère ou des parois digestives sont des signes à
rechercher. Pour la plupart des cancers gastriques, L3 représen-
tera la limite inférieure du volume cible anatomoclinique. Cette
limite inférieure permet d’inclure les ganglions n °5, 6, 7, 8, 9, 12
(Fig. 1). Les ganglions des territoires 10 et 11 seront inclus dans
Fig. 3. Image de contrôle du recalage de la scanographie de repérage le volume cible anatomoclinique dans les situations suivantes :
préopératoire et postopératoire avec contrôle de la respiration (contour tumeur du fundus (tiers supérieur de l’estomac), atteinte des
jaune représentant le contour du foie de la scanographie préopératoire).
Image of CT adjustment for preoperative and postoperative identification using ganglions paracardiaux droits (groupe 1), des vaisseaux courts de
breath control (yellow line represents the delineation of the liver l’estomac (groupe 7), des vaisseaux gastro-épiploïques gauches
on the preoperative CT).
(territoires 3, 4). Fréquemment, la proximité du lit opératoire
(totalité de l’espace occupé initialement par l’estomac) et du
hile splénique assure une couverture de ces aires ganglionnaires.
généralement d’un taux d’envahissement ganglionnaire de
Pour les ganglions aortiques (territoires 16a, 16b, 16c), Kunisaki
plus de 50 % [6,31] et un taux de récidive locale et métastatique
et al. ont démontré en analyse multifactorielle que l’atteinte des
respectivement de 67 % et 87,8 % [16,17]. Landry et al. ont
rapporté une série de 130 patients opérés d’un adénocarci- ganglions péri aortiques est corrélée avec l’atteinte des ganglions
nome gastrique et suivis pendant cinq ans [21]. Le taux de du hile et de l’artère splénique (territoire 10 et 11). De même,
récidive loco-régionale était de 37 % avec 16 % des patients l’atteinte des ganglions des territoires 10 et 11 est corrélée avec
en situation de récidive loco-régionale isolée. Les sites de l’atteinte des ganglions de la petite courbure et des vaisseaux
récidive loco-régionale étaient l’anastomose, le moignon courts de l’estomac et des ganglions paracardiaux droits (ter-
gastrique, et les territoires ganglionnaires 1 à 11 selon la clas- ritoires 1,3,7) [20]. La majorité des équipes chirurgicales n’ef-
sification japonaise en incluant les ganglions para-aortiques. fectue pas de curage péri-aortique et splénique. Il semble donc
Les récidives loco-régionales apparaissaient pour plus de la nécessaire d’inclure dans le volume cible anatomoclinique les
moitié des patients lorsque la séreuse était atteinte. La récidive ganglions para-aortiques si les ganglions de la petite courbure,
loco-régionale était plus fréquemment isolée en cas d’enva- des vaisseaux courts et/ou des territoires 10, 11 sont envahis.
hissement ganglionnaire. La récidive ganglionnaire isolée était Pour les tumeurs du fundus ou de la jonction œsogastrique,
rare : 8 % de la totalité des cas, 5 % des tumeurs stade I et II l’inclusion des ganglions des territoires 5, 6, 13 dans le volume
(tumeurs T1T2T3N0 ou N1), 3 % si la séreuse était respectée. cible anatomoclinique est optionnelle s’il existe une atteinte
Lorsque la séreuse était atteinte, une récidive ganglionnaire ganglionnaire limitée. Cette situation permet de limiter la dose
survenait dans 7 % des cas et une récidive loco-régionale dans délivrée à la région duodéno-jéjunale et donc la toxicité digestive
39 %. Gunderson et al. ont rapporté une série de 107 malades et rénale droite. Pour les tumeurs du tiers moyen de l’estomac
ayant été réopérés. Cinquante pour cent des patients atteints tout le corps gastrique est inclus.
de cancer de stade pT2 pN+ étaient en situation de récidive En résumé, le volume cible anatomoclinique correspond
loco-régionale et 71 % de ceux atteints d’un cancer de stade au volume tumoral macroscopique (GTV) et aux volumes
pT3, pT4 pN+ [17]. En conclusion, ces études montrent que le suivants.
S88 L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93

Tableau 1
Atteinte ganglionnaire en pourcentage selon Maruyama et al. en fonction du site tumoral (adénocarcinome gastrique classé pT3 de 5 cm de diamètre) [25].
Lymph node involvement in percentage according to Maruyama et al. in relation to tumor site (pT3-stage gastric adenocarcinoma 5 cm in diameter) [25].

Risque cardia Petite Sus et sous Coronaire Artère Tronc Hile Artère
d’atteinte courbure pylorique stomachique hépatique coeliaque et artère hépatique
ganglionnaire grande commune splénique propre
en % courbure

Classification 1-2 3-4 5-6 7 8 9 10 et 11 12


Japonaise
Fundus 50-25 20-60 0 à 7-0 à 9 27 à 48 10 25 10 à 20 0à6
Corps 30-10 40 à 70-20 à 80 0 à 17-10 à 25 40 10 à 33 20 0 à 17 0
Antre 20-0 50 à 60-30 à 85 7 à 15-60 à 85 30 à 50 20 à 46 0 à 36 0 à 10 0 à 14

Tableau 2
Fréquence des récidives locorégionales et des métastases après chirurgie.
Frequency of locoregional recurrence and metastasis after surgery.

Effectif RLR seule RLR et Métastases RLR Totales Métastases


% % % Seules %

Gunderson et al. 1982 [17] 107 27 25 52 11


Landry et al. 1990 [21] 130 16 22 38 30
Bonenkamp et al. D1 1999 [6] 380 13 23 36 7
Bonemkamp et al. D2 1999 [6] 331 11 16 27 16
Macdonald et al. chirurgie 2001 [24] 275 29 NP NP 18
Macdonald et al. RTCT 2001 [24] 281 19 NP NP 33
Baeza et a.l 2001 [5]* 52 13 9 22 32

RLR : récidive loco-régionale ; *Chimioradiothérapie postopératoire ; NP données non précisées.

Tableau 3
Classification pronostique de l’AJCC des adénocarcinomes gastriques 7e — Pour les adénocarcinomes du fundus et sous cardiaux : estomac
edition [9].
AJCC prognostic staging of gastric adenocarcinomas, 7th edition [9]. et une marge de 3 mm autour, petit épiploon. La moitié de la
coupole diaphragmatique gauche est incluse dans le volume
STADE T N M
cible anatomoclinique. Les ganglions péri-œsophagiens
STADE IA 1 0 0
dans le médiastin inférieur sont inclus dans le volume cible
STADE IB T1 N1 0
anatomoclinique jusqu’à 4 cm sous la carène. Les groupes
2 0 0
ganglionnaires 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11 sont inclus dans le
STADE IIA T2 N1 0
volume cible anatomoclinique (classification Japonaise). Les
STADE IIB T4a N0 0
T3 N1 0
autres groupes ganglionnaires sont inclus s’ils sont suspects
STADE IIIA 3 2 0 en écho-endoscopie ou au scanner.
T2 N3 0 — Adénocarcinomes de la petite courbure ou de la grande cour-
4a 1 0 bure : estomac et marge de 3 mm, petit épiploon. Groupes
ganglionnaires 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11.
STADE IIIB T3 N3 0
— Adénocarcinomes de l’antre : estomac et marge de 3 mm, petit
T4b N0-1 0
épiploon. Les groupes ganglionnaires 1 à 16.
T4a N2 0
— Situations particulières :
STADE IIIc T4a N3 0
Les ganglions des territoires 10 et 11 sont inclus dans le
T4b N2-3 0
STADE IV Tout T Tout N 1
volume cible anatomoclinique pour les situations suivantes :
tumeur du fundus (tiers supérieur de l’estomac envahissement
des ganglions 10,11 dans 10 à 20 % des cas pour les tumeurs de
stade T3), atteinte des ganglions paracardiaux droits (groupe 1)
Quel que soit le siège du cancer gastrique – en dehors des des vaisseaux courts de l’estomac (groupe 7), des vaisseaux
tumeurs du cardia - tout l’estomac est inclus dans le volume gastro-épiploïques gauches (territoires 3, 4).
cible anatomoclinique avec les anastomoses. Il semble nécessaire d’inclure dans le volume cible anatomo-
— Pour les adénocarcinomes du cardia sans extension au fundus clinique les ganglions para-aortiques si les ganglions coronaires
ou à l’œsophage : cardia, petit épiploon, médiastin inférieur stomachiques sont suspects et si la tumeur est dans le tiers infé-
(limite supérieure 2 cm sous la carène). Grosse tubérosité rieur de l’estomac ou intéresse tout l’estomac, de même pour les
gastrique en totalité, piliers du diaphragme, ganglions 1, 2, tumeurs gastriques supérieures ou égales à 90 mm de grand axe.
3, 7, 8 et 9. En dehors de la grosse tubérosité, l’estomac n’est Pour les tumeurs du tiers supérieur de l’estomac, les ganglions
pas inclus en totalité. para-aortiques sont inclus s’il existe un doute sur l’atteinte des
L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93 S89

ganglions de la petite courbure ou des ganglions spléniques. Le rein gauche est rarement épargné notamment si la tumeur
Dans toutes ces situations il existe une corrélation étroite entre siège sur la grande courbure. Il faut s’assurer de la fonctionnalité
ces variables, ce qui implique d’inclure dans le volume cible relative des deux reins au mieux avec une scintigraphie rénale
anatomoclinique les ganglions para-aortiques [20]. Les aires au 99mTc-dimercapto-succinyl acid (DMSA). La fonction de
ganglionnaires para-aortiques situées en dessous de l’artère chaque rein est alors mieux appréciée et permet d’objectiver
mésentérique inférieure ne sont pas incluses dans le volume à une hypertrophie rénale compensatrice, de mesurer la clairance
irradier, sauf si doute en imagerie puisqu’ils n’appartiennent pas séparée de la créatinine pour chaque rein. La fonction rénale
au curage chirurgical para-aortique (Figs. 4 à 8). doit donc être connue avec précision surtout chez les patients à
risque (diabète, hypertension artérielle, terrain vasculaire…). La
toxicité aiguë ou tardive potentielle de la radiothérapie est ainsi
4.3. Définition du volume cible prévisionnel (PTV, planning mieux appréhendée chez les patients à risque (hypertension
target volume) artérielle, diabète, population âgée en rappelant que 50 % des
patients opérés ont plus de 70 ans). Dewitt et al. ont montré que
La marge définissant le volume cible prévisionnel (planning l’irradiation de la totalité d’un rein diminuait la fonction glo-
target volume) est de 2 cm [26]. Cette marge correspond aux mérulaire et tubulaire de 60 % mais la clairance de la créatinine
erreurs de positionnement, aux mouvements des organes les uns ne diminuait que de 20 % [13]. Pour Smalley et al., la toxicité
par rapport aux autres. Les déplacements médians des organes rénale est rare quand les trois quarts d’un rein sont conservés ou
critiques sont de 6 mm dans un axe crânio-caudal et 2 mm dans quand en termes de volume l’équivalent d’un rein est exclu du
les autres directions. Wysocka et al. ont recommandé une marge volume de radiothérapie [33]. De même, l’irradiation de la moitié
crânio-caudale de 1 cm et une marge de 5 mm dans les autres d’un rein semble préserver la fonction rénale. La clairance de la
axes avec une approche individuelle pour les patients avec une créatinine semble diminuée de moitié quand plus de la moitié
grande amplitude respiratoire [36]. Caudry et al. ont proposé d’un rein est irradiée, quelle que soit la dose [35].
de réduire également cette marge à 10 mm sous condition d’un Pour un rein, 70 % de ce rein reçoit moins de 20 Gy (V20
contrôle rigoureux de la mise en place des patients (contention, < 70 %). Trente pour cent du rein controlatéral reçoivent moins
laser, décubitus dorsal, imagerie portale) [10]. La radiothérapie de 20 Gy (V20 < 30 %).
asservie à la respiration doit également limiter les marges du Moins de 30 % du cœur recevront 40 Gy [24].
volume cible prévisionnel à 10 mm dans l’axe crânio-caudal et Pour l’intestin grêle, pour Caudry et al., la limite est fixée à
5 mm dans les autres. 45 Gy dans 25 % du volume total [10].

4.4. Dosimètrie 4.6. Balistique. Place de la radiothérapie de conformation

Un plan de traitement en trois dimensions est réalisé Elle apporte probablement un bénéfice non négligeable
avec correction des inhomogénéités. Le plan de traitement dans la diminution des effets secondaires digestifs et une
doit être conforme aux recommandations des rapports 50 meilleure protection des organes critiques (reins, foie, intestin).
et 62 de l’international commission on radiation units and L’utilisation de techniques multifaisceaux permet de diminuer
measurements (ICRU). Les histogrammes dose-volume de significativement la toxicité. Vingt-deux pour cent des patients
chaque volume sont réalisés. Quatre vingt quinze pour cent souffraient d’une toxicité grade 4 si une technique à deux fais-
du volume cible prévisionnel reçoit plus de 95 % de la dose ceaux était utilisée contre 4 % pour une technique à au moins
prescrite. Les inhomogénéités de dose seront acceptées avec quatre faisceaux (p = 0,045) [26]. L’optimisation des plans de
un intervalle compris entre pour les points chauds +7 % de traitement apportée par la radiothérapie conformationnelle
la dose prescrite et les points froids -5 % (volume de calcul doit permettre également d’améliorer la couverture du volume
inférieur à 1.8 cm3). cible, la distribution de dose par rapport aux organes critiques
définis (foie, reins, intestin, duodénum). Une technique à quatre
4.5. Organes à risque et contraintes de dose ou cinq faisceaux semble améliorer la balistique en diminuant la
toxicité en améliorant le facteur de conformation (pourcentage
Les poumons, les reins, le foie, le cœur et la moelle épinière du volume cible prévisionnel recevant une dose ≥ 45 Gy), la
sont délinéés et définis comme organe à risque. Des recomman- protection des tissus sains (rapport du volume de tissu sain
dations ont été faites dont celles issues du groupe de l’European recevant une dose ≥ 45 Gy sur le volume de l’isodose 45 Gy).
Organization on Research and Treatment of Cancer (EORTC) en Une standardisation de la balistique à quatre ou cinq faisceaux
situation préopératoire [26]. a été proposée. Une technique à quatre faisceaux orthogonaux
La dose maximale à la moelle ne doit pas dépasser 45 Gy. peut être utilisée ou mieux une technique à cinq faisceaux
Le pourcentage de volume pulmonaire total recevant 20 Gy avec certaines variabilités incitant à proposer deux types de
ou plus (V20) est idéalement inférieur ou égal à 30 %. balistique standardisés [30] (Tableau 4).
Le foie représente également un organe critique. Le volume
hépatique recevant 30 Gy ou plus (V30) est inférieur à 30 % ; la
dose moyenne au foie inférieur à 21 Gy. Si des faisceaux latéraux 5. Toxicité aiguë
sont utilisés, ils apportent une dose limitée ≤ 20 Gy. L’analyse
de l’essai de Macdonald suggérait que 60 % du foie ne devaient Le statut nutritionnel des patients opérés d’un cancer gastri-
pas recevoir plus de 30 Gy [24]. que reste un problème majeur [2]. Quatre-vingts pour cent des
S90 L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93

Fig. 4. Délimitation tomodensitométrique des territoires ganglionnaires sous-diaphragmatiques concernés par les cancers de l’estomac sur l’imagerie
préopératoire et postopératoire. 7 Coronaire stomachique (Cs), 8 artère hépatique commune (Hc), 9 tronc coeliaque, 11 ganglions artère splénique, 12 artère
hépatique propre (Hp), Ao Aorte descendante, Rd Rein droit, Rg Rein gauche, F foie, E estomac.
CT delimitation of the subdiaphragmatic lymph node territories involved in stomach cancers on preoperative and postoperative CT. 7, left gastric artery (Cs) ;
8, common hepatic artery (Hc) ; 9, celiac trunk ; 11, splenic artery lymph nodes ; 12, hepatic artery (Hp). Ao, descending aorta ; Rd right kidney ; Rg, left kidney ; F liver.

Fig. 5 à 8. Repositionnement de l’estomac sur la scanographie postopératoire après recalage (pointillé marron) et repérage des territoires ganglionnaires.
Coupes avec représentation des territoires 3,4 (petite et grande courbures 7 (coronaire stomachique), 10,11 (artère et hile splénique).
Repositioning of the stomach on the postoperative CT after adjustment (brown dotted line) and identification of lymph node territories, views with representation of
areas 3, 4 (small and large curvature, 7 (left gastric artery) 10,11 (splenic artery and hilum)).
L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93 S91

patients atteints d’un cancer du tractus digestif supérieur ont avec le pancréas. La scanographie thoracique était normale, la
perdu du poids et cette perte sera aggravée par les traitements scanographie abdomino-pelvienne montrait un épaississement
mis en route (chimiothérapie, radiothérapie…) [22]. La perte du corps gastrique de 20 mm sans adénopathie, ni métastases
de poids a lieu souvent avant la chirurgie et est révélatrice de hépatiques ou péritonéales. L’ACE était de 7 et le CA199 de
la maladie dans 62 % des cas. Cette perte de poids s’aggrave 70 U/ml. La tumeur a été classée T3N+ M0. Il a été décidé d’une
fréquemment après la chirurgie. Trente pour cent des patients chimiothérapie néoadjuvante par trois cures d’ECC (épirubicine,
recevant une chimioradiothérapie adjuvante après gastrectomie cisplatine, capécitabine) et une scanographie avec contention
souffriront d’une toxicité digestive de grade 3 ou 4. La stomatite, (coque de repérage et tatouage avant chirurgie). La chirurgie a
les nausées (majorées par la chimiothérapie et les opiacées), la consisté en une gastrectomie des trois quarts pour un cancer
diarrhée contribuent à l’aggravation de la perte de poids déjà médio-gastrique et une cholécystectomie. La pièce opératoire
présente. Un suivi nutritionnel régulier est indispensable et com- a permis de retrouver une tumeur de 65 mm de hauteur, hémi-
porte au minimum un calcul de l’indice de masse corporel, du circonférentielle, la marge latérale était de 8 mm, il y avait
Nutritionnal risk index à partir de l’albumine et une consultation des emboles lymphatiques et vasculaires, un ganglion de la
de diététique afin de calculer et adapter la ration calorique prise faux de l’artère hépatique était sain, dix des 16 ganglions de la
par le patient. faux de la coronaire stomachique et du tronc cœliaque étaient
atteints, les six ganglions paracardiaux étaient sains, les trois
ganglions de la petite courbure haute étaient atteints, de même
6. Cas clinique que quatre des 16 ganglions de la grande courbure et six des
16 de la région sous -pylorique. La pièce de cholécystectomie
Il a été découvert chez un homme souffrant d’une perte était normale. Le patient est sorti à j18. L’état nutritionnel était
de poids de 3 kg, d’une anorexie grade 1 et de douleurs satisfaisant avec une ration calorique de 1 700 kcal, un indice
ulcéreuses à l’endoscopie œsogastrique une lésion indurée de masse corporel de 21 et un nutritional risk index de 101. Il
infiltrante et micro-érosive en selle de cheval entre la face a été décidé en réunion de concertation multidisciplinaire une
antérieure et la face postérieure étagée sur environ 7 cm, chimioradiothérapie postopératoire. (Figs. 8 à 11).
laissant cependant l’antre libre ainsi que la partie haute de
l’estomac. L’écho-endoscopie montrait une tumeur du corps
gastrique de 70 mm de diamètre, sans contact avec le pancréas, Conflit d’intérêt
deux ganglions de la petite courbure de 5 mm et un de 5 mm
du tronc cœliaque. Il n’y avait pas d’autres images suspectes. Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
La tumeur a été classée T3us. Il n’y avait pas de contact étroit article.

Tableau 4
Balistiques à 4 ou 5 faisceaux après optimisation dans le traitement des cancers gastriques en situation postopératoire. Deux groupes de patients possibles. Le
groupe 2 représente 75 % des situations et le groupe 1 25 % [30].
Balistics with 4 or 5 beams after optimization in gastric cancer treatments in the postoperative situation. Two groups of patients possible. Group 2 accounts for 75 % of
the situations and group 1 25 % [30].

Obliquité des faisceaux Faisceau 1 Faisceau 2 Faisceau 3 Faisceau 4 Faisceau 5

cardia
Groupe 1 180° 135° 93° 42° 338°
Groupe 2 180° 90° 45° 349° 329°
Corps gastrique
Groupe1 180° 90° 44° 0° 325°
Groupe 2 181°+-5 135°+-2 93°+-4 43°+-12 333°+-7
antre
Groupe 1 181°+-5 134°+-1.6 93°+-4.8 43°+-12 335°+-4
Groupe 2 180° 94°+-9 47°+-8 353°+-11 307°+-26
S92 L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93

Fig. 8 à 11. Dosimétrie avec cinq faisceaux après avoir


inclus l’ensemble des ganglions des territoires 1 à 11.
Les critères dosimétriques sont respectés malgré une
courbe dose-volume histogramme défavorable sur le
rein gauche.
Dosimetry, 5 beams after including all lymph nodes
in territories 1–11. Dosimetric criteria are respected
despite unfavorable DVH on the left kidney.
L. Mineur et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S84-S93 S93

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C ancer/ R adiot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S94– S102

Cancer du pancréas
Pancreatic cancer

F. Hugueta, *, A. Orthuona, E. Touboula, R. Marseguerraa, F. Mornexb


a Service d’oncologie radiothérapie, hôpital Tenon, Assistance-Publique-Hôpitaux de Paris, Université Paris VI, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France
b Service de radiothérapie, Centre hospitalier Lyon-Sud, Hospices Civils, 165, chemin du Grand-Revoyet, 69495 Pierre-Bénite, France

RÉSUMÉ

Mots clés : On estime qu’environ 7 200 nouveaux cancers du pancréas exocrine ont été diagnostiqués en France en
Cancer du pancréas 2005. Au moment du diagnostic, 20 % des patients sont atteints d’une tumeur jugée opérable, 30 % d’une
Radiothérapie conformationnelle tumeur localement évoluée inopérable, et 50 % d’une maladie métastatique. Après exérèse chirurgicale,
Volumes cibles la durée médiane de survie des patients opérés n’est que de 12 à 20 mois en raison de la fréquence
Atlas des récidives. La place de la radiothérapie chez les patients atteints de cancer du pancréas opérable ou
localement évolué est actuellement controversée. En situation adjuvante, le traitement standard est une
chimiothérapie par acide folinique et 5-fluoro-uracile ou gemcitabine pendant six mois. En association
avec une chimiothérapie concomitante, la radiothérapie postopératoire permettrait d’améliorer la
probabilité de survie des patients en situation de résection tumorale incomplète. Ceci reste à démontrer
dans un essai prospectif. La chimioradiothérapie néo-adjuvante est une approche prometteuse mais non
validée à ce jour. Pour les tumeurs localement évoluées, il n’existe pas de standard thérapeutique. Une
chimiothérapie première par gemcitabine suivie chez les patients en situation de non-progression d’une
chimioradiothérapie représente une stratégie thérapeutique séduisante qui est en cours de validation. Alors
que dans les premiers essais de radiothérapie pancréatique étaient utilisés de grands faisceaux d’irradiation,
la tendance actuelle est à la réduction des volumes traités afin d’améliorer la tolérance. La définition des
volumes cibles a été améliorée par l’utilisation de la scanographie de simulation. L’objectif de ce travail
était de préciser les particularités radio-anatomiques, les modes d’extension des cancers du pancréas et
les principes de l’irradiation conformationnelle tridimensionnelle illustrés par un cas clinique.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: About 7200 new cases of pancreatic adenocarcinomas are diagnosed each year in France. At the time
Pancreatic cancer of diagnosis, an efficient carcinologic surgery will not be possible for nearly 80 % of patients, in relation
Conformal radiotherapy to loco-regional extension or metastatic dissemination. After surgical resection, the median survival
Target volumes of resected patients ranges from 12 to 20 months, with a high rate of relapses. Currently, the use of
Atlas radiotherapy for patients with pancreatic cancer is controversial. In adjuvant setting, the standard
treatment is six months of chemotherapy with FUFOL or gemcitabine. Chemoradiation (CRT) may
improve the survival of patients with incompletely resected tumors (R1). This must be validated in
a prospective trial. Neoadjuvant CRT is a promising treatment but always under evaluation. For the
treatment of patients with locally advanced tumors, there is not a standart treatment. A strategy of
initial chemotherapy followed by CRT for non progressive patients is under evaluation. Whereas in the
first trials of CRT large fields were used, the current trend is to reduce the treated volumes to improve
tolerance. The delineation of target volumes has been improved by the use of simulation CT. The aims
of this work are to precise the radio-anatomical particularities, the pattern of spread of pancreatic
cancer and the principles of 3D conformal radiotherapy illustrated with a clinical case.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : florence.huguet@tnn.aphp.fr (F. Huguet)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102 S95

1. Préambule gène BRCA2 est de l’ordre de 15 %. En pratique, on considère


que la survenue d’un cancer chez au moins deux apparentés au
Les données présentées dans ce chapitre doivent être inter- premier degré doit faire évoquer une susceptibilité familiale.
prétées avec nuances et adaptées à chaque patient en fonction La majorité des cancers du pancréas sont des adénocarci-
de son état spécifique. nomes canalaires.

2. Épidémiologie 3. Radio-anatomie

On estime qu’environ 7700 nouveaux cancers du pancréas 3.1. Définition des régions anatomiques [27]
exocrine ont été diagnostiqués en France en 2009 [11]. Ce cancer
est plus fréquent chez l’homme avec un sex ratio de 1,6. Les Le pancréas est à la fois une glande endocrine et exocrine ;
taux d’incidence en 2005 étaient de 7,7 pour 100 000 habitants il est étroitement lié à la voie biliaire et au duodénum. C’est
chez l’homme et 4,7 pour 100 000 chez la femme [2]. Ils sont en un organe profond, en avant de la première et de la deuxième
augmentation depuis deux décennies, plus nettement chez la vertèbre lombaire. Son grand axe est oblique en haut, à gauche et
femme (3,8 % par an) que chez l’homme (2 % par an). Le risque de en arrière. C’est un organe fixe, accolé à la paroi abdominale pos-
voir se développer un cancer du pancréas est faible jusqu’à 50 ans térieure par le fascia de Treitz. Il est solidaire du cadre duodénal.
(moins de 5 % des cas) puis augmente avec un pic de fréquence Ses dimensions sont de 15 cm de longueur, 6 cm de hauteur et
entre 65 et 75 ans. C’est la cinquième cause de décès par cancer 2 cm d’épaisseur. Il pèse environ 80 g. Il est constitué de quatre
avec 8 623 décès observés en 2007 en France (5,3 % des décès structures dénommées de droite à gauche, la tête, l’isthme, le
par cancer). Le taux de mortalité est stable chez l’homme et corps et la queue. La face antérieure du pancréas est tapissée
en légère augmentation chez la femme. Les facteurs de risque par le péritoine pariétal postérieur. Le bord inférieur du corps
du cancer du pancréas sont assez mal connus. L’exposition aux est longé par la racine du mésocôlon transverse, qui recouvre
amines aromatiques est associée à une augmentation du risque la partie inférieure de la tête. La presque totalité du pancréas
de cancer du pancréas. Le facteur de risque le mieux connu est est donc en situation sus-mésocolique et recouverte par le péri-
le tabagisme par le biais des amines aromatiques contenues toine. Ses canaux excréteurs sont au nombre de deux. Le canal
dans la fumée de cigarette. De nombreuses études prospectives de Wirsung est le canal excréteur principal parcourant toute la
ont montré une association entre le tabagisme et le cancer du glande de gauche à droite, de trois mm de diamètre, recevant une
pancréas, confirmant ce qui avait été mis en évidence dans des multitude de petits canaux latéraux. Il s’accole au bord inférieur
études animales et sur des séries autopsiques. Des études cas- du cholédoque dans la tête du pancréas et il se termine par deux
témoins ont observé un risque relatif de cancer du pancréas de orifices juxtaposés à la partie moyenne du bord interne de D2,
1,3 à 5,5 chez les fumeurs [9]. Il existe aussi probablement une dans une cavité (ampoule de Vater) sous un repli muqueux
augmentation du risque de cancer du pancréas dans certaines (grande caroncule). Un appareil musculaire complexe entoure
catégories de travailleurs exposés aux amines aromatiques, leur terminaison : le sphincter d’Oddi. Le deuxième canal est le
dans l’industrie chimique et pétrochimique. L’association entre canal de Santorini. C’est un canal excréteur plus petit, qui parcourt
alimentation riche en viandes et poissons cuits et cancer du la tête du pancréas et vient rejoindre le duodénum au bord interne
pancréas peut être expliquée par les propriétés mutagènes et de D2, 3 cm au-dessus de la grande caroncule. Son orifice d’entrée
carcinogènes des amines aromatiques hétérocycliques formées dans le deuxième duodénum est recouvert de la petite caroncule.
lors de la cuisson par pyrolyse. En revanche, la consommation La veine porte est au contact du pancréas : dans les cancers du
de fruits et de légumes a un effet protecteur vis-à-vis du cancer pancréas, son envahissement est précoce. Au-delà du plan du
du pancréas probablement grâce aux effets anti-oxydants de la confluent veineux portal, les rapports se font avec une région très
vitamine C qu’ils contiennent. Les rôles du café et de l’alcool ont profonde et riche en éléments vasculaires : les pédicules rénaux et
été longtemps controversés mais semblent aujourd’hui écartés. la face antérieure de l’aorte. En arrière et à distance, les rapports
Dans 5 à 10 % des cas, on retrouve chez les patients une histoire se font avec la face antérieure de l’aorte, la naissance de l’artère
familiale de cancer pancréatique [13]. Schématiquement, on mésentérique supérieure, la veine rénale gauche, qui passe dans
distingue les cancers s’intégrant dans un syndrome génétique la pince aorto-mésentérique, la face antérieure de la veine cave
déterminé et ceux, plus fréquents, survenant dans un contexte inférieure, qui reçoit les veines rénales droite et gauche et plus en
d’agrégation familiale non syndromique. Dans le premier groupe, dehors, les bassinets droit et gauche et les hiles rénaux.
on trouve des affections à expression phénotypique variée :
syndromes des cancers du sein et de l’ovaire familiaux (mutation 3.2. Drainage lymphatique
du gène BRCA2), mélanome familial multiple (CDKN2A/p16),
syndrome de Peutz-Jeghers (STK11/lKB1), pancréatite chronique Le réseau ganglionnaire lymphatique régional comprend
héréditaire (PRSS1), syndrome de Lynch (MLH1, MSH2, MSH3) ou plusieurs groupes. Il existe des groupes supérieurs et inférieurs,
encore syndrome de Li-Fraumeni (TP53). Dans le second groupe, situés au-dessus et en dessous de la tête et du corps du pancréas.
les cancers surviennent par agrégation dans certaines familles. En avant, se trouvent les ganglions pancréaticoduodénaux
Le taux d’incidence standardisé varie de 5 à 30 selon le nombre antérieurs et mésentériques supérieurs proximaux. La tête du
d’apparentés atteints. La recherche d’une mutation germinale est pancréas est drainée par les ganglions pyloriques ainsi que par
actuellement souvent négative, sauf dans les familles comprenant le groupe cœliaque. En arrière, il existe les ganglions pancréati-
de nombreux cas. Ainsi, lorsqu’il existe trois apparentés atteints coduodénaux postérieurs, mésentériques proximaux et le long
ou plus, la probabilité de trouver une mutation germinale du du canal cholédoque. De plus, le drainage lymphatique se fait
S96 F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102

aussi par le groupe splénique situé au niveau du hile de la rate rechuter, localement ou à distance, et le taux de survie est de
et de la queue du pancréas. moins de 20 % à cinq ans. Les années 1980 ont vu l’apparition
des premières chimioradiothérapies. Le premier essai randomisé
4. Classifications des cancers du pancréas mené à la fin des années 1970 aux États-Unis par le Gastrointestinal
Tumor Study Group (GITSG) comparait chez 43 patients une
4.1. Classification de l’AJCC (American Joint Committee exérèse chirurgicale seule ou suivie d’une chimioradiothérapie
on Cancer) de 2002 [1] avec du 5-fluoro-uracile en bolus [16]. Les taux de survie globale
et de survie à deux ans étaient significativement supérieurs dans
T – Tumeur primitive : le bras chimioradiothérapie (20 mois contre 11 mois et 43 %
– T0 : pas de tumeur primitive ; contre 18 %, respectivement ; p = 0,005). L’essai de l’European
– Tis : carcinome in situ ; Organization for Research and Treatment of Cancer (EORTC) n’est
– T1 : tumeur limitée au pancréas inférieure ou égale à 2 cm pas venu confirmer le bénéfice de la chimioradiothérapie adju-
dans son plus grand diamètre ; vante [17]. Cet essai comparait chez 218 patients ayant eu une
– T2 : tumeur limitée au pancréas supérieure à 2 cm dans son duodénopancréatectomie céphalique le même schéma de chimio-
plus grand diamètre radiothérapie adjuvante et une surveillance. Les taux de survie
– T3 : tumeur s’étendant au-delà du pancréas mais sans envahir globale à deux ans étaient identiques entre les deux bras (51 %
le tronc cœliaque ni l’artère mésentérique supérieure ; dans le bras chimioradiothérapie contre 41 % ; p = 0,2). Alors que
– T4 : tumeur étendue au tronc cœliaque ou à l’artère mésen- les États-Unis ont admis comme traitement standard une chimio-
térique supérieure. radiothérapie postopératoire, les résultats de l’essai de l’EORTC
N – Adénopathies : n’ont pas permis de considérer ce traitement adjuvant comme un
– Nx : renseignements insuffisants pour classer les adénopathies standard en Europe. L’essai ESPAC-1 (European Study Group for
régionales ; Pancreatic Cancer) comparait chez 289 patients après chirurgie une
– N0 : pas de métastase ganglionnaire régionale ; surveillance et une chimioradiothérapie ou une chimiothérapie
– N1 : envahissement des ganglions lymphatiques régionaux. [23]. La chimioradiothérapie était une radiothérapie en split-
M – Métastases viscérales : course (irradiation par séries de deux semaines espacées de deux
– M0 : pas de métastase à distance semaines) associée à du 5-fluoro-uracile en bolus, identique à
– M1 : présence de métastase(s) à distance celle du bras expérimental de l’essai du GITSG. La chimiothérapie
Stades : adjuvante était composée de six cycles de 5-fluoro-uracile en
– Stade 0 : Tis N0M0 ; bolus et acide folinique (FUFOL selon le schéma de la Mayo Clinic).
– Stade IA : T1, N0, M0 ; L’analyse des résultats a conclu à probabilité de survie moins
– Stade IB : T2, N0, M0 ; bonne chez les patients ayant reçu une chimioradiothérapie
– Stade IIA : T3, N0, M0 ; en comparaison avec ceux n’en ayant pas reçu (15,9 mois contre
– Stade IIB : T1-3, N1, M0 ; 17,9 mois ; p = 0,05). En revanche, les patients ayant reçu une
– Stade III : T4, tout N, M0 ; chimiothérapie avaient une survie significativement plus longue
– Stade IV : M1 quel que soit T et N. que ceux n’en ayant pas reçu (20,1 mois contre 15,5 mois ;
Cette classification est peu utilisée. En pratique, on dis- p = 0,009). Il est possible que l’absence de critère de qualité de
tingue trois groupes de prise en charge et pronostic distincts. la radiothérapie dans cet essai ait entraîné des irradiations de
Premièrement, les tumeurs résécables (stades I et II), pour grand volume potentiellement toxiques, d’autant plus que la dose
lesquelles le traitement de référence est l’exérèse chirurgicale. initialement prévue de 40 Gy pouvait être augmentée à 60 Gy à la
Deuxièmement, les tumeurs localement évoluées (stade III), non discrétion des investigateurs. Plus récemment, une méta-analyse
métastatiques mais non résécables en raison d’un envahissement sur données publiées a montré qu’il existait un bénéfice de la
vasculaire pour lesquelles il n’existe actuellement pas de standard chimioradiothérapie adjuvante pour le sous-groupe des patients
thérapeutique. Troisièmement, les tumeurs métastatiques (stade en situation de résection incomplète (R1) [28].
IV) pour lesquelles le seul traitement est la chimiothérapie. Par ailleurs, l’étude allemande de phase III CONKO-1 a montré un
allongement de la durée médiane de survie sans récidive (13,4 mois
5. Indications de la radiothérapie contre 6,9 mois, p < 0,001) chez les malades traités par gemcitabine
pendant six mois par rapport à ceux n’ayant pas de traitement adju-
Au moment du diagnostic, environ 20 % des patients sont vant [25]. Un effet bénéfique était rapporté quel que soit le statut
atteints d’une tumeur jugée opérable, 30 % d’une tumeur locale- des tranches de résection, R0 ou R1. Un gain significatif en termes de
ment évoluée inopérable, et 50 % d’une maladie métastatique. survie globale a été rapporté en 2008 lors de la réactualisation des
résultats de cette étude (22,8 mois dans le bras gemcitabine contre
5.1. Cancers du pancréas résécables : traitement adjuvant 20,2 mois dans le bras contrôle, p = 0,005). L’essai ESPAC-3 a com-
paré chez 1088 patient une chimiothérapie adjuvante par FUFOL
Le seul traitement potentiellement curatif d’un cancer du pendant six mois et six cycles de gemcitabine administrée selon
pancréas est l’exérèse chirurgicale, le plus souvent par duodé- le schéma de Burris [24]. La durée médiane de survie globale était
nopancréatectomie céphalique (DPC) pour les tumeurs de la identique entre les deux bras (23 mois dans le bras FUFOL contre
tête du pancréas ou par splénopancréatectomie gauche, pour les 23,6 mois dans le bras gemcitabine, p = 0,39). La durée médiane de
tumeurs de la queue. Celle-ci est réalisable chez 20 % des patients survie sans progression était aussi identique entre les deux bras. La
au moment du diagnostic. Parmi les cancers opérés, 80 % vont tolérance était meilleure dans le bras gemcitabine. Très récemment
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102 S97

ont été communiqués les résultats d’un essai de phase II randomisé Une équipe du M. D. Anderson Cancer Center a inclus
mené par l’EORTC, la FFCD (Fondation francophone de cancérologie 86 patients dans un essai de phase II associant une chimio-
digestive) et le Gercor ayant comparé après exérèse chirurgicale thérapie par gemcitabine de 400 mg/m2 et une radiothérapie
chez des patients après résection classée R0 une chimiothérapie par préopératoire de 30 Gy en dix fractions de 3 Gy [7]. Cinquante-
quatre cycles de gemcitabine et une chimiothérapie par deux cycles trois pourcent des patients ont été hospitalisés en cours de la
de gemcitabine suivis d’une radiothérapie avec chimiothérapie chimioradiothérapie pour toxicité. Parmi les 86 patients inclus,
concomitante par gemcitabine [33]. La survie sans progression et 74 ont été jugés opérables lors du bilan d’évaluation quatre à six
la survie globale étaient identiques dans les deux bras. Un essai de semaines après la fin de la chimioradiothérapie. Soixante-quatre
phase III de plus grande envergure serait nécessaire pour conclure patients (74 %) ont finalement pu avoir une duodénopancréatec-
sur le rôle de la chimioradiothérapie en situation adjuvante. En tomie. Parmi les patients opérés, les tranches de sections étaient
l’état actuel des connaissances, en cas d’atteinte de tranche de envahies dans 11 % des cas (R1) et les ganglions dans 38 %. Le
section (résection R1), peut se discuter après trois à six mois de taux de complications postopératoires sévères était de 9 % avec
chimiothérapie, une chimioradiothérapie. un décès lié à un lâchage de sutures. La durée médiane de survie
des 64 patients opérés était de 34 mois avec un taux de survie à
5.2. Cancers du pancréas résécables : cinq ans de 36 %. Le taux de rechute locale était de 11 %.
traitement néo-adjuvant Etant donné le taux élevé de rechute à distance dans cet
essai, la même équipe du M. D. Anderson Cancer Center a
Plusieurs arguments théoriques viennent plaider en faveur ajouté au schéma précédemment décrit une chimiothérapie
de la réalisation d’un traitement néo-adjuvant : par gemcitabine et cisplatine avant la chimioradiothérapie afin
– la possibilité de délivrer la totalité du schéma thérapeutique d’essayer d’agir plus efficacement sur une potentielle maladie
à une plus grande proportion de patients. En effet, on estime micro-métastatique [34]. Cet essai de phase II a inclus 90 patients.
qu’environ 20 % à 30 % des patients opérés ne peuvent pas avoir Cinquante-un pourcent des patients ont été hospitalisés en
un traitement adjuvant, en raison de la survenue de complica- cours de chimioradiothérapie pour toxicité. Soixante-dix-neuf
tions postopératoires et du délai nécessaire pour retrouver un patients ont reçu le traitement complet. Parmi ces 79 patients,
état général compatible avec ce type de traitement ; 52 (66 %) ont eu une duodénopancréatectomie. Parmi les patients
– la possibilité d’une réévaluation préopératoire permettant opérés, les tranches de section étaient envahies dans 4 % des
d’épargner une chirurgie lourde aux patients en situation de cas (R1) et les ganglions dans 58 %. Le taux de complications
progression rapide de la maladie ; postopératoires sévères était de 9,6 %. La durée médiane de
– la fréquence de l’envahissement des tranches de section, survie des 52 ayant bénéficié d’une résection était de 31 mois
suggérant que la chirurgie seule n’est pas suffisante pour alors qu’elle était de 10,5 mois pour les patients non opérés. Le
assurer le contrôle local ; taux de rechute locale était de 25 %. L’ajout d’une chimiothérapie
– une meilleure radiosensibilité tumorale, l’irradiation survenant première à la chimioradiothérapie néo-adjuvante ne semblait
sur des tissus non disséqués et donc mieux oxygénés. pas allonger la survie des patients. Ces différents résultats sont
Ces trois dernières années, les résultats de plusieurs essais de prometteurs, la chimioradiothérapie néo-adjuvante permettant
phase II de chimioradiothérapie néo-adjuvante ont été publiés. d’obtenir une survie de longue durée chez les patients opérés.
En France, l’essai 97-04 de la FFCD et de la SFRO (Société française L’étape suivante consiste peut-être en l’identification précoce
de radiothérapie oncologique) portant sur 41 patients ayant reçu des patients atteints d’une maladie micrométastatique d’emblée
un traitement néo-adjuvant (irradiation de 50 Gy avec 5-fluoro- pour lesquels chirurgie et chimioradiothérapie sont inutiles. Tant
uracile et cisplatine en concomitance) a montré la faisabilité de ce que la chimioradiothérapie néo-adjuvante n’a pas été comparée
protocole : 90 % des patients avaient reçu une dose d’irradiation à la chimiothérapie adjuvante dans un essai randomisé, celle-ci
d’au moins 46 Gy et 73 % des patients avaient reçu au moins 75 % doit se faire uniquement dans le cadre d’essai thérapeutique.
de la dose totale de chimiothérapie [20]. Vingt-six patients (63 %)
ont eu une exérèse chirurgicale à visée curative avec un taux de 5.3. Cancers du pancréas localement évolués
réponse histologique majeure de 50 % et une réponse complète.
La gemcitabine ayant d’une part montré sa supériorité Pour les cancers du pancréas localement évolués, c’est-à-dire
par rapport au 5-fluoro-uracile pour les tumeurs évoluées et non résécables et non métastatiques (stade III), il n’y a pas de
d’autre part fait la preuve d’un fort pouvoir radiosensibilisant, standard thérapeutique [15]. Il y a deux options, la chimiothérapie
il était logique de l’associer à la radiothérapie préopératoire. par gemcitabine et la chimioradiothérapie. Deux méta-analyses
Talamonti et al. ont étudié dans un essai de phase II l’association récentes sur données publiées ont conclu à l’absence de supé-
d’une chimiothérapie par gemcitabine de 1000 mg/m2 et d’une riorité de la chimioradiothérapie sur la chimiothérapie [29,35].
radiothérapie préopératoire de 36 Gy en 15 fractions de 2,4 Gy Plus récemment, chimiothérapie et chimioradiothérapie ont
[31]. Parmi les 20 patients inclus, 95 % ont reçu tout le traitement été comparées dans un essai de phase III mené par la FFCD et
prévu, 85 % ont eu une résection chirurgicale. Chez les patients la SFRO (5). Cet essai a comparé la survie de 119 patients traités
opérés, les tranches de section étaient envahies dans 6 % des soit après chimiothérapie seule (par gemcitabine telle que dans
cas (R1) et les ganglions dans 35 %. Le taux de complications le schéma de Burris), soit après chimioradiothérapie de 60 Gy
postopératoires sévères était de 24 %. La durée médiane de survie avec 5-fluoro-uracile et cisplatine. Dans les deux bras, la chimio-
des 17 patients opérés était de 26 mois. Dix cancers ont présenté thérapie de maintien était de la gemcitabine jusqu’à progression
une rechute en médiane huit mois après la chirurgie. La rechute ou toxicité inacceptable. La durée médiane de survie était plus
était métastatique dans 80 % des cas. courte dans le bras chimioradiothérapie (8,6 mois contre 13 mois,
S98 F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102

p = 0,03). Le taux de toxicité de grade 3-4 était plus élevé dans Même si le nombre de patients inclus dans cet essai est peu
le bras chimioradiothérapie, que ce soit pendant la phase initiale important, ses résultats viennent contredire ceux de l’essai de
de traitement (36 % contre 22 %) ou pendant la chimiothérapie Chauffert et al. [5].
d’entretien (32 % contre 18 %). Ce taux de toxicité élevée était Plutôt que de continuer à opposer chimiothérapie et chimio-
probablement dû au schéma de chimioradiothérapie utilisé avec radiothérapie, plusieurs équipes ont développé une stratégie
une dose élevée (60 Gy alors que la dose recommandée est de thérapeutique consistant à associer chimiothérapie et chimiora-
50 à 54 Gy) et une chimiothérapie concomitante par 5-fluoro- diothérapie avec une durée médiane de survie de 12 à 17 mois
uracile et cisplatine, moins bien tolérée que le 5-fluoro-uracile [14,18,19]. En effet, quel que soit le mode de traitement utilisé,
seul. Dans le même temps, l’Eastern Cooperative Oncology Group environ 30 % des cancers progressent durant les trois premiers
(ECOG) amené un essai de phase III presque similaire [21]. mois de traitement. Une chimiothérapie première pourrait donc
Une chimiothérapie par sept cycles de gemcitabine seule (de permettre de sélectionner les patients pouvant potentiellement
1000 mg/m2 J1, J8, J15) était comparée à une chimioradiothérapie bénéficier ensuite d’une chimioradiothérapie. L’essai de phase
de 50,4 Gy avec gemcitabine concomitante (de 600 mg/m2/sem) III LAP07 mené par le Gercor, la FFCD et la FNCLCC (Fédération
suivie de cinq cycles de gemcitabine seule. Plus de 300 patients nationale des centres de lutte contre le cancer) vient de débuter
devaient être inclus or l’essai a été clos après 74 inclusions en pour confirmer cette hypothèse. Dans cet essai international
raison de la lenteur des inclusions. Le taux de réponse objective sont inclus des patients atteints d’un cancer du pancréas loca-
était de 2,7 % dans le bras chimiothérapie contre 8,8 % dans le lement évolué. Pendant les quatre premiers mois de traitement,
bras chimioradiothérapie. La durée médiane de survie était plus ils reçoivent une chimiothérapie d’induction par gemcitabine
longue dans le bras chimioradiothérapie (11 mois contre 9,2 mois, associée ou non avec de l’erlotinib. Les patients ayant une tumeur
p = 0,022). Le taux de toxicité de grade 4 était beaucoup plus élevé contrôlée après cette première phase de traitement sont ensuite
dans le bras chimioradiothérapie (41,2 % contre 5,7 %, p < 0,001). randomisés entre poursuite de la chimiothérapie pour deux cycles

Fig.1. Contours du volume tumoral macroscopique (GTV) (rouge), du volume cible prévisionnel (PTV) (bleu), du foie (jaune), de la moelle (orange), des reins
droit (rose) et gauche (vert) sur la scanographie de simulation.
Delineation of GTV (red), PTV (blue), liver (yellow), bone marrow (orange), right kidney (pink), left kidney (green) on simulation CT.
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102 S99

et chimioradiothérapie (radiothérapie conformationnelle de 54 Gy 14 mm (6-25). Dans les coupes sagittales, les mouvements moyens
avec chimiothérapie concomitante par capécitabine). Les patients des marges antérieure et postérieure étaient de 6 mm [2-13] et 4 mm
ayant été randomisés initialement dans le bras gemcitabine- (0-9). Les mouvements latéraux étaient négligeables. Les auteurs
erlotinib reçoivent ensuite un traitement d’entretien par erlotinib ont conclu que les mouvements des tumeurs du pancréas étaient
jusqu’à progression. très variables entre les patients, avec une déformation importante
liée à la respiration. Une autre étude avait pour buts de quantifier
les mouvements du pancréas avec la respiration et d’évaluer si l’uti-
6. Modalités de la radiothérapie conformationnelle lisation de marges personnalisées en fonction de ces mouvements
permettait de réduire la dose aux organes à risque [12]. Les scano-
6.1. Définition des volumes cibles graphies de simulation étaient acquises en respiration libre calme,
en expiration et en inspiration. Les mouvements du pancréas étaient
Dans les premiers essais de chimioradiothérapie, de grands volu- évalués à partir du déplacement d’un point reproductible dans le
mes d’irradiation étaient traités par une technique à quatre faisceaux pancréas dans toutes les directions. Les déplacements moyens du
(antérieur et postérieur, latéraux ou obliques). Le volume traité était pancréas dans les sens inférosupérieur, médio-latéral et antéro-
défini par les limites suivantes : limite supérieure au niveau des dis- postérieur étaient respectivement de 15,3 mm ± 4,3, 5,2 mm ± 3,5
ques D10-D11, limite inférieure au niveau des disques L3-L4, limite et 9,7 mm ± 6,1. L’utilisation de marges personnalisées permettait
postérieure à mi-disque vertébral de D11 à L3, limite antérieure de réduire le volume cible prévisionnel moyen de 33,5 % (p = 0,005).
deux cm en avant du volume cible anatomoclinique (CTV). Avec la Les réductions proportionnelles du pourcentage de rein recevant une
généralisation de l’irradiation conformationnelle en trois dimensions, dose de plus de 10 Gy, de l’intestin grêle recevant une dose de plus de
le volume traité a diminué. Des données récentes sont en faveur d’une 45 Gy et du foie recevant plus de 30 Gy s’élevaient respectivement à
irradiation limitée à la tumeur sans irradiation prophylactique des 63,7 % (p = 0,005), 29,3 % (p = 0,01) et 29,2 % (p = 0,01).
aires ganglionnaires. Van der Geld et al. ont estimé que les récidives
ganglionnaires étaient rares (0-5 % des cas) et recommandé de ne 6.2. Volume tumoral macroscopique
pas inclure les ganglions lymphatiques régionaux non envahis [32]. (Gross Tumor Volume ou GTV)
Dans une étude dosimétrique de faisabilité d’escalade de dose avec
modulation d’intensité, Brown et al. ont rapporté l’impossibilité de Pour les tumeurs localement avancées, le volume tumoral
réaliser une escalade de dose sans dépasser les contraintes de dose macroscopique inclut la tumeur primitive et les adénopathies de
aux organes à risque (OAR) tout en incluant les ganglions lympha- plus d’1 cm désignées comme envahies par le radiologiste sur la
tiques régionaux [3]. Une irradiation limitée au volume tumoral scanographie. Le volume tumoral macroscopique n’inclut pas les
macroscopique (GTV), sans irradiation prophylactique des ganglions aires de drainage ganglionnaires du pancréas en l’absence d’enva-
lymphatiques régionaux, a été signalée dans une étude rétrospective hissement. En effet, le bénéfice de l’irradiation prophylactique des
et un essai prospectif [10,22]. Dans une étude rétrospective, Murphy aires ganglionnaires n’a jamais été prouvé, le site principal de rechute
et al. ont évalué la faisabilité d’une chimioradiothérapie avec de la étant la masse elle-même. Par contre, il a été montré que la toxicité
gemcitabine (1000 mg/m2/semaine) avec une dose totale de 36 Gy augmente avec le volume irradié [10,22]. Il n’est pas nécessaire
en 15 fractions [22]. Le volume cible prévisionnel (PTV) comprenait d’inclure la totalité du pancréas. Le volume tumoral macroscopique
le volume tumoral macroscopique avec une marge limitée à 1 cm. est délinéé sur la scanographie de simulation coupe par coupe en
Les taux de survie sans progression locale à un an et à deux ans utilisant un logiciel de planification en trois dimensions.
étaient respectivement de 64 % et 38 %. Quatre cancers (5 %) ont
rechuté dans les ganglions lymphatiques péripancréatiques (trois 6.3. Volume cible anatomo-clinique
dans le volume traité et un à la limite du volume traité). La rechute (Clinical Target Volume ou CTV)
locale était un facteur prédictif significatif pour la survie globale
(p = 0,007). Le volume cible prévisionnel était corrélé avec la toxicité En situation adjuvante, le CTV1 inclut jusqu’à 40-45 Gy le lit
gastro-intestinale (p = 0,007). Un essai prospectif de phase II avec opératoire défini par la scanographie préopératoire. Dans le CTV1
une chimioradiothérapie par 5-fluoro-uracile a utilisé des marges sont aussi inclus les aires ganglionnaires de drainage pancréati-
similaires pour le volume cible prévisionnel (10). Les auteurs de ques, cœliaques, mésentériques supérieures, le hile hépatique et
ces deux études ont rapporté les mêmes taux de récidive locale que éventuellement le hile splénique pour les tumeurs de la queue
dans les précédentes études publiées. Par ailleurs, les mouvements [6,26]. Le CTV2 est réduit au lit opératoire uniquement et reçoit
du pancréas induits par la respiration doivent être pris en compte généralement 5 à 10 Gy supplémentaires. La présence de clips
dans la définition du volume cible prévisionnel. Bussels et al. ont chirurgicaux peut aider à définir le CTV2.
évalué ces mouvements chez 12 patients en utilisant une iIRM Pour les tumeurs localement évoluées, les aires ganglionnai-
dynamique [4]. Les mouvements les plus importants étaient dans res régionales ne sont pas incluses, il n’y a donc pas de volume
le sens crânio-caudal (23,7 ± 15,9 mm). Les mouvements selon les cible anatomoclinique.
axes antéro-postérieur et médiolatéral étaient moins prononcés
(respectivement 12,1 ± 9,0 mm et 6,0 ± 3,4 mm). Dans une autre 6.4. Volume cible prévisionnel
étude, 17 patients atteints d’un cancer du pancréas non résécable (Planning Target Volume ou PTV)
ont eu une IRM dynamique avec respiration libre [8]. Les tumeurs
pancréatiques se déplaçaient en bas et en avant avec l’inspiration. Des marges, prenant en compte les incertitudes de repo-
Dans les coupes coronales, les mouvements moyens des marges sitionnement et les mouvements potentiels des organes, sont
supérieure et inférieure étaient respectivement de 13 mm (8-22) et ajoutées autour du volume cible anatomoclinique afin de générer
S100 F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102

Fig. 3. Histogrammes dose-volume du volume cible


macroscopique (GTV) (rouge), du volume cible prévisionnel
(PTV (bleu), du foie (jaune), de la moelle (orange), des reins
droit (rose) et gauche (vert).
Dose-volume histograms : GTV (red), PTV (blue), liver (yellow),
bone marrow (orange), right kidney pink), left kidney (green).

Fig. 2. Isodoses de traitement (Gy).


Treatment isodoses (Gy).
F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102 S101

le volume cible prévisionnel. En situation adjuvante, une marge – foie : une dose de 30 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de
d’1 à 2 cm est ajoutée au volume cible anatomoclinique. Pour les 50 % du volume du foie (V30 ≤ 50 %) avec une dose maximale
tumeurs localement avancées, on recommande que le volume dans la totalité du foie de 26 Gy ;
cible prévisionnel comprenne le volume tumoral macroscopique – reins : dose maximale de 20 Gy dans un volume cumulé équiva-
avec une marge de 2 cm dans les directions antérieure, postérieure lent à un rein entier sur des reins fonctionnellement normaux ;
et latérale et une marge de 3 cm dans les directions crâniale et – estomac, duodénum : dose maximale de 45 Gy. En raison de
caudale pour prendre en compte les mouvements respiratoires. la proximité de la tête du pancréas et du duodénum, une dose
Ces marges doivent être adaptées en fonction de l’anatomie du un peu plus élevée (54 Gy) est autorisée dans un petit volume
patient pour ne pas irradier inutilement un volume hépatique ou (V45 ≤ 10 %) ;
rénal trop important. – intestin grêle : c’est un organe extrêmement mobile d’un
jour sur l’autre et souvent difficile à visualiser et délinéer
6.5. Dose prescrite et fractionnement sur les scanographes de dosimétrie. Plutôt que d’essayer de
le délinéer anse par anse, il est recommandé de définir un
La dose recommandée est de 50 Gy au point ICRU (International volume « intestin grêle » comprenant le contenu abdominal,
Commission on Radiation Units and Measurements) en situation après soustraction du volume cible prévisionnel, des autres
adjuvante et d’environ 55 Gy en situation localement évoluée. organes à risque et des corps vertébraux, avec une limite
Un fractionnement de 1,8 à 2 Gy par séance, à raison de cinq postérieure à la face dorsale des corps vertébraux lombaires
séances par semaine, est recommandé. La prescription de la dose et excluant l’espace rétropéritonéal (32). La dose maximale est
doit être conforme au rapport 50 de l’ICRU. de 45 Gy, une dose un peu plus élevée (54 Gy) est autorisée
L’escalade de la dose n’est pas recommandée hors essai dans un petit volume (V45 ≤ 10 %). Dans un grand volume, il
thérapeutique car n’ayant jamais apporté de bénéfice. Une est recommandé de ne pas dépasser 40 Gy.
chimiothérapie par 5-fl uoro-uracile en perfusion continue
(250 mg/m²/j) pendant toute la durée de l’irradiation est 6.7. Balistique
le traitement de référence. La gemcitabine, puissant radio-
sensibilisant, ne doit pas être utilisée en concomitance à la L’irradiation doit être planifiée de manière conformationnelle
radiothérapie en dehors d’un essai thérapeutique. en trois dimensions. Une technique isocentrique est conseillée. Le
choix de la balistique est libre, cependant elle doit comprendre
6.6. Organes à risque et contraintes de dose plus de deux faisceaux. Des caches personnalisés ou réalisés grâce
à un collimateur multilame permettent de réduire la dose reçue
Ce sont les organes sains dont la radiosensibilité peut influen- par les tissus sains et les organes à risque. L’angle des faisceaux
cer la planification du traitement et/ou la dose prescrite. Dans la doit être choisi afin de minimiser la dose reçue par les organes à
région pancréatique, les organes à risque sont principalement la risque. Tous les faisceaux doivent être traités chaque jour.
moelle épinière, le foie, les reins, le tube digestif (estomac, duode-
num, intestin grêle, colon). Les contraintes de dose classiquement 7. Conclusions
utilisées en France sont répertoriées dans le Guide de procédures
de la radiothérapie externe publié par la SFRO [30] : La place de la radiothérapie dans le traitement des cancers du
– moelle épinière : dose maximale de 45 Gy en fractionnement pancréas est débattue depuis plus de 30 ans. Pendant longtemps, il
classique ; y avait d’un côté les Américains considérant la chimioradiothérapie

Fig. 4. Vue des faisceaux antérieur et latéral gauche (DRR).


View of anterior and left lateral beams (DRR).
S102 F. Huguet et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S94–S102

comme un standard thérapeutique que ce soit en adjuvant ou pour pancreatic adenocarcinoma in GERCOR phase II and III studies. J Clin Oncol
les cancers localement avancés, et de l’autre les Européens plus 2007;25:326-31.
[15] Huguet F, Girard N, Guerche CS, Hennequin C, Mornex F, Azria D. Chemoradiotherapy
partisans de la chimiothérapie. En situation adjuvante, les résultats in the management of locally advanced pancreatic carcinoma: a qualitative sys-
de l’essai ESPAC-1, bien que contestés, suivis de ceux de l’essai tematic review. J Clin Oncol 2009;27:2269-77.
CONKO-1, ont amené à considérer la chimiothérapie postopératoire [16] Kalser MH, Ellenberg SS. Pancreatic cancer. Adjuvant combined radiation and
chemotherapy following curative resection. Arch Surg 1985;120:899-903.
comme un standard thérapeutique. La chimioradiothérapie est [17] Klinkenbijl JH, Jeekel J, Sahmoud T, van Pel R, Couvreur ml, Veenhof CH, et
recommandée pour les patients en situation de résection incomplète al. Adjuvant radiotherapy and 5-fluorouracil after curative resection of can-
(R1). En ce qui concerne les traitements néo-adjuvants, on attend cer of the pancreas and periampullary region: phase III trial of the EORTC
gastrointestinal tract cancer cooperative group. Ann Surg 1999; 230:776-
toujours l’essai de phase III, qui comparera chimioradiothérapie 82;discussion 82-4.
néo-adjuvante et chimiothérapie adjuvante. Pour les tumeurs [18] Ko AH, Quivey JM, Venook AP, Bergsland EK, Dito E, Schillinger B, et al. A Phase
localement évoluées, le débat continue même si la stratégie II Study of Fixed-Dose Rate Gemcitabine Plus Low-Dose Cisplatin Followed by
Consolidative Chemoradiation for Locally Advanced Pancreatic Cancer. Int J
consistant à associer une chimiothérapie première suivie d’une Radiat Oncol Biol Phys 2007;68:809-16.
chimioradiothérapie en l’absence de progression tumorale paraît [19] Krishnan S, Rana V, Janjan NA, Varadhachary GR, Abbruzzese JL, Das P, et al.
séduisante. L’essai de phase III LAP07 en cours a été conçu pour Induction chemotherapy selects patients with locally advanced, unresect-
able pancreatic cancer for optimal benefit from consolidative chemoradiation
valider cette attitude. Sur le plan technique, la tendance actuelle est therapy. Cancer 2007;110:47-55.
à la réduction des volumes irradiés afin d’améliorer la tolérance. [20] Le Scodan R, Mornex F, Girard N, Mercier C, Valette PJ, Ychou M, et al. Preoperative
chemoradiation in potentially resectable pancreatic adenocarcinoma: feasibil-
ity, treatment effect evaluation and prognostic factors, analysis of the SFRO-
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R. Marseguerra : aucun Full-dose gemcitabine and concurrent radiotherapy for unresectable pancreatic
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F. Mornex : essais cliniques : en qualité de co-investigateur, [23] Neoptolemos JP, Dunn JA, Stocken DD, Almond J, Link K, Beger H, et al. Adjuvant
expérimentateur non principal, collaborateur à l’étude ; essais chemoradiotherapy and chemotherapy in resectable pancreatic cancer: a ran-
cliniques : en qualité d’investigateur principal, coordonnateur ou domised controlled trial. Lancet 2001;358:1576-85.
[24] Neoptolemos J, Buchler M, Stocken DD, Ghaneh P, Smith D, Bassi C, et al.
expérimentateur principal ; interventions ponctuelles : rapports ESPAC-3 (v2) : A multicenter, international, open-label, randomized, control-
d’expertise ; conférences : invitations en qualité d’intervenant. led phase III trial of adjuvant 5-fluorouracil/folinic acid (5-FU/FA) versus gem-
citabine (GEM) in patients with resected pancreatic ductal adenocarcinoma. J
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S103– S110

Tumeurs primitives hépatiques


Primary liver cancer

M. Quivrina,*, F. Mornexb, C. Enachescub, E. Martina, A. Ligey-Bartolomeua, E. Nouhauda,


J. Chamoisa, P. Maingona, G. Créhangea
aDépartement de radiothérapie, Centre Georges-François-Leclerc, Dijon, France
bDépartement de radiothérapie, Centre hospitalier Lyon-Sud, Lyon-Pierre-Bénite, France

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 1, 11, 13 et 14, ainsi que les L’incidence croissante des cancers primitifs hépatiques et leur pronostic défavorable représentent
tableaux 1 à 7 sont visibles uniquement un défi diagnostique et thérapeutique. Pour les petites tumeurs localisées, les traitements à visée
sur : shhtp://www.sciencedirect.com/ curative de référence sont la résection chirurgicale et la transplantation hépatique ; les possibilités
thérapeutiques sont limitées pour les cancers localement évolués ou métastatiques. Au total, moins
Mots clés : de 20 % des malades sont éligibles à une prise en charge chirurgicale. Le dépistage précoce chez les
Carcinome hépatocellulaire patients à risque et l’éviction des facteurs favorisants sont des éléments privilégiés de la prise en
Radiothérapie conformationnelle charge. La radiothérapie est une alternative non invasive très prometteuse pour les patients non
Volumes cibles opérables, son ambition est de rendre curable des tumeurs de pronostic défavorable.
Atlas © 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords:
Due to its increasing incidence and a grim prognosis, primary liver cancer remains a diagnostic and
Hepatocarcinoma therapeutic challenge. For small localized tumors, surgical resection and liver transplantation are
Conformal radiotherapy standart treatments with a curative-intent. Therapeutic options for locally advanced or metastatic
Target volumes diseases are limited. Globally, surgery fits less than 20% of patients. Early detection in high-risk patients
Atlas and prevention of risk factors remain the key points in the standard care. External radiotherapy is
a non invasive treatment with encouraging results for non operable patients. Emerging stereotactic
radiotherapy yields high rates of local control without compromising toxicity. Tumors with bad
prognostic factors could be cured with this approach.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie du foie était supérieur à 670 000, dont 70 % d’hommes. Plus


de 80 % des cancers hépatiques surviennent dans les pays en
En 25 ans, l’incidence des cancers primitifs hépatiques a voie de développement. L’incidence est bien plus faible dans les
considérablement progressé en France avec 6 433 nouveaux pays développés, environ trois pour 100 000 habitants par an en
cas en 2005, (5 104 hommes et 1 329 femmes) contre 1 408 en Europe. Le pronostic reste très défavorable avec une durée de
1980. L’âge moyen au moment du diagnostic était de 65 ans. Au survie moyenne autour d’un an. Il s’agit de la troisième cause de
plan mondial, en 2005, le nombre de nouveaux cas de cancer mortalité par cancer dans le monde [17].

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : Magali.quivrin@gmail.com (M. Quivrin)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S104 M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110

2. Classification d’irradiation thoracique basse ou abdominale. La radiothérapie


peut être associée à une chimiothérapie artérielle ou à une
2.1. Histologique chimio-embolisation séquentielle [24].

Les cancers primitifs du foie appartiennent à deux principales


catégories histologiques : 4. Modalités de traitement
– le carcinome hépatocellulaire (CHC) ou hépatocarcinome dont
la forme la plus fréquente est développée aux dépens des 4.1. Radio-anatomie
hépatocytes dans un contexte d’hépatite chronique (hépatite
B ou C), de fibrose ou de cirrhose ; Un nodule hépatique est souvent découvert à l’échographie
– le cholangiocarcinome est moins fréquent, il se développe sur abdominale trans-pariétale, néanmoins, les examens de réfé-
l’épithélium des canaux biliaires intrahépatiques. Dans les rence pour le caractériser sont la scanographie hélicoïdale, avec
pays développés, il peut aussi compliquer l’évolution d’une acquisition artérielle, parenchymateuse et portale. L’imagerie par
cirrhose biliaire cholestatique. résonance magnétique (IRM) est optionnelle mais peut aider pour
définir les limites tumorales si le scanner est peu contributif. Un
2.2. Pronostic nodule hypervascularisé au temps artériel précoce, avec lavage
(wash-out) tardif au temps portal est évocateur d’un carcinome
Il n’existe pas de consensus sur la classification pronostique hépatocellulaire [3, 20] (Fig. 1). Des nouvelles techniques
à utiliser [8, 19]. Plusieurs classifications ont été validées et d’imagerie ultrasonique transpariétale (SonoView®) permettent
sont utilisées en routine, en fonction des pays ou des équipes. de réaliser des reconstructions tridimensionnelles avec visuali-
Cependant les critères de Milan sont souvent employés pour sation de la circulation normale et tumorale. L’ensemble de ces
orienter la décision thérapeutique : un « petit » carcinome examens d’imagerie doivent amener é préciser la vascularisation
hépatocellulaire est défini comme un nodule unique de moins de tumorale, le segment(s) hépatique(s) envahi(s) et les rapports
5 cm ou comme deux ou trois nodules de moins de 3 cm chacun avec la vascularisation normale.
[10]. Toute autre situation correspond à un « gros » carcinome
hépatocellulaire. La classification TNM [21] est peu utilisée 4.2. Détermination des volumes cibles
(Tableau 1). La classification de l’American Joint Committee on
Cancer (AJCC) reprend la classification TNM (Tableau 2). La Dans le cas d’une irradiation hépatique partielle, les volumes
classification Child Pugh (Tableau 3) et la classification d’Okuda cibles sont définis sur la scanographie dosimétrique. Il est possible
permettent d’évaluer la fonction hépatique selon des paramètres de réaliser une fusion multimodale avec une IRM avec injection
clinico-biologiques [19] (Tableau 4). La classification du CLIP de gadolinium récente (datant de moins d’un mois). Cette fusion
(Cancer of the Liver Italian Programme) reprend le score de Child devient particulièrement nécessaire quand la scanographie de
Pugh (Tableau 5). planification a été réalisée sans injection (contre-indication a
l’iode) ou trop tardivement par rapport à l’injection.
L’acquisition peut être schématiquement représentée par
3. Indications de radiothérapie trois types possibles d’acquisition des images : cas n° 1 : une
acquisition classique tridimensionnelle en respiration libre
Actuellement, les traitements à visée curative de référence (volume cible prévisionnel, PTV, le plus large car incertitude
pour les petits carcinomes hépatocellulaires (localisés) sont la de repositionnement la plus grande) ; cas n° 2 : scanographie
transplantation hépatique, la résection chirurgicale et la des- quadridimensionnelle en respiration libre (le volume cible
truction percutanée par radiofréquence ou alcoolisation. Pour interne, ITV, qui en découle permet de réduire l’incertitude de
les cancers localement évolués ou métastatiques, on dispose de repositionnement et donc la marge (setup margin) associée pour
thérapeutiques dites palliatives : chimio-embolisation artérielle, créer le volume cible prévisionnel final) ; cas n° 3 : acquisition
traitement médicamenteux et plusieurs essais thérapeutiques quadridimensionnelle en respiration bloquée si une technique
sont en cours. Les tumeurs primitives hépatiques ont longtemps de gating respiratoire est utilisée pour le traitement.
été considérées comme radiorésistantes. Cette théorie ancienne En cas d’acquisition quadridimensionnelle, les critères du
vient de la mauvaise tolérance hépatique observée après des rapport 62 de l’International Commission on Radiation Units and
irradiations du foie entier à doses élevées. Pour le carcinome Measurements (ICRU) doivent être utilises, faisant intervenir la
hépatocellulaire d’origine primitive, une irradiation non invasive notion de volume cible interne. Le volume cible prévisionnel
est indiquée pour des tumeurs localisées ou localement évoluées, doit associer une marge pour le volume cible interne qui prend
non résécables ou non accessibles aux traitements percutanés. en compte les mouvements de la tumeur (situation idéale) ou
La non-opérabilité peut être liée à des caractéristiques tumo- de l’organe contenant la tumeur et la marge [« set-up margin »
rales (multifocalité, taille importante de la tumeur, thrombose (SM)] pour les incertitudes de repositionnement. Le volume
portale), ainsi qu’aux « comorbidités » du patient. Cependant, cible interne tient compte des mouvements interne des orga-
il existe des contre-indications relatives à la radiothérapie nes au cours du cycle respiratoire (le foie bouge d’1 à 3 cm
hépatique [11] : une atteinte multifocale avec trois lésions ou en moyenne dans le sens crânio-caudal [23]). Ce type d’ac-
plus envahissant les deux lobes, un stade Child Pugh B ou C, une quisition par ciné-imagerie permet d’optimiser le traitement
dénutrition avec apports de moins de 1500 kcal par jour, des en réduisant le volume cible prévisionnel par réduction du
antécédents d’infarctus du myocarde de moins de trois mois et volume cible interne grâce aux techniques dites de « gating »
M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110 S105

respiratoire et réduction de la marge par l’application de des histogrammes dose-volume et de la tolérance des tissus
systèmes de contention efficaces (compression abdominale, sains [12] (Tableau 6) :
Blue-bag… Fig. 13). Ainsi, le bénéfice du traitement peut être L’étude rétrospective de Seong et al., a inclus 158 malades
optimisé et permettre de réaliser une escalade de dose tout atteints de carcinome hépatocellulaire localement évolués dont
en diminuant ou minimisant la dose délivrée au foie sain 107 avaient bénéficié d’une embolisation trans-artérielle de
(diminution de la probabilité de complications des tissus première intension [19]. Les patients avaient reçu 40 à 60 Gy
sains, NTCP) [1,23,25]. en mode conformationnel. Le taux de réponse était de 67 %,
Dans le cas ou l’acquisition scanographique de planification la durée médiane de survie de dix mois et le taux de survie à
ainsi que les séances de traitements sont réalisés avec une deux ans de 20 %. D’autres études rétrospectives ont montré la
technique de « gating » respiratoire, le volume cible prévisionnel reproductibilité de ces résultats [16].
devient le plus petit possible et permet ainsi la plus grande Une étude prospective française de phase II [15], portant
épargne de parenchyme hépatique sain. sur 27 patients atteints d’une cirrhose hépatique compliquée
Le volume tumoral macroscopique (Gross Tumor Volume d’un carcinome hépatocellulaire de petite taille, non éligibles
ou GTV) correspond au volume tumoral qui prend le contraste aux traitements de référence, a montré l’intérêt d’une escalade
(Fig. 2). de dose de radiothérapie conformationnelle seule jusqu’à 66Gy,
Le volume cible anatomoclinique (Clinical Target Volume ou avec un taux de réponse tumorale élevé (78 %).
CTV) inclut une marge de 1 cm dans toutes les directions autour Néanmoins, bien que la toxicité hépatique soit jugée accep-
du volume tumoral macroscopique (Fig. 2). table, les résultats doivent attirer l’attention sur l’importance du
Les marges pour définir le volume cible prévisionnel (Planning respect des contraintes et de la sélection des patients.
Target Volume ou PTV) sont de 5 mm pour les incertitudes de En situation antalgique palliative, il est possible de délivrer
repositionnement et de trois à 30 mm (principalement dans l’axe une dose comprise entre 27 et 30 Gy dans l’ensemble du foie
crânio-caudal) pour les mouvements selon le cycle respiratoire sur un mode bifractionné, avec des fractions de 1.5 Gy, dix fois
et la localisation de la tumeur, soit un total de à huit à 35 mm par semaine [2,18].
pour le volume cible prévisionnel (Fig. 2).
4.4. Organes à risque et contraintes de dose (Tableau 7,
4.3. Doses prescrites figs. 3, 5, 9, 10) :

Avec une technique conformationnelle tridimensionnelle, La moelle épinière ne doit pas recevoir plus de 45 Gy, le
une irradiation hépatique partielle à haute dose devient pos- cœur tolère une dose maximale de 35 Gy dans l’ensemble de
sible. Plusieurs études ont montré des résultats significatifs et sa structure. Pour les poumons (droit et gauche), une dose de
reproductibles en matière de survie globale et de tolérance en 20 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 35 % du volume
pratiquant une escalade de dose comprise entre 54 et 66 Gy, (V20 ≤ 35 %) et une dose de 30 Gy ne doit pas être délivrée dans
par fractions de 1,8 à trois Gy, à condition de sélectionner les plus de 20 % du volume (V30 ≤ 20 %). L’œsophage peut recevoir
patients, de considérer leurs « comorbidités » et de tenir compte une dose maximale de 40 Gy sur une longueur de 15 cm. En
ce qui concerne l’estomac ou le duodénum, la dose maximale
recommandée est de 45 Gy, elle est de 50 Gy pour l’intestin
grêle. Au niveau des reins, la dose maximale est de 20 Gy dans
un volume cumulé équivalent à un rein entier avec un fonction-
nellement normal [11]. Les contraintes de dose au niveau du foie
pour un traitement normalement fractionné sont particulières, il
faut tenir compte du volume de foie sain non irradié, un volume
de 700 cc de foie sain doit recevoir moins de 15 Gy, on observe
des complications dans 50 % des cas à 66 Gy, quand le volume du
foie total moins le volume cible prévisionnel est supérieur à 30 %
du volume hépatique total, à 36 Gy, quand le volume du foie total
moins le volume cible prévisionnel est supérieur aux deux tiers
du volume hépatique total, et à 50 Gy, quand le volume du foie
sain épargné est intermédiaire [13]. Si ces contraintes ne peuvent
être respectées compte tenu d’un volume tumoral important,
une réduction peut être envisagée après 46 Gy seulement en
cas de bonne réponse tumorale (diminution de la taille et de la
vascularistion en IRM ou Sonoview®).

4.5. Balistique et dosimétrie

Dans le cas d’une irradiation hépatique partielle, la technique


tridimensionnelle conformationnelle autorise une escalade de
Fig. 2. Contourage des volumes cibles (volume tumoral macroscopique,
volume cible anatomoclinique et volume cible prévisionnel).
dose, avec une bonne couverture du volume cible prévisionnel
Delineation of GTV, CTV, and PTV. et une protection acceptable des organes à risque (Figs. 3, 4, 5,
S106 M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110

7, 9, 12, 14, 15, 16, 18). La RCMI n’a pour l’instant pas montré hépato-cellulaire, il faut redouter la néphropathie radique, la
de supériorité significative pour la couverture des volumes péricardite radique et le grêle radique. L’estomac et le duodénum
cibles, ni pour la tolérance du traitement [5]. La multiplication peuvent encore saigner plusieurs années après une irradiation
des faisceaux doit être évitée. Idéalement si la tumeur peut être hépatique.
irradiée par une balistique simple, comme par deux faisceaux Une surveillance post thérapeutique est recommandée tous
(antéro-postérieur et postéro-antérieur ou obliques), cela permet les trois mois pendant deux ans (examen clinique, scanographie
de diminuer la dose délivrée au foie sain, qui doit être épargné thoraco-abdomino-pelvienne et bilan biologique hépatique avec
le plus souvent possible. À la différence d’autres situations cli- dosage de l’alpha-fœtoprotéine, endoscopie digestive si méléna
niques, l’organe malade (le foie sain) doit être considéré comme ou douleurs d’ulcère), puis tous les six mois.
un organe a risque dans lequel on recommanderait de délivrer
une dose nulle. Une optimisation des conditions de traitement
avec une meilleure contention, une bonne connaissance de la 7. Iconographie (Figs. 2, 3, 4, 5, 7, 9, 12, 14, 15, 16, 18).
tolérance des tissus sains en fonction des « comorbidités » [9], une Cas clinique : carcinome hépato-cellulaire traité
meilleure gestion des mouvements respiratoires avec différents par irradiation conformationnelle tridimensionnelle
systèmes de ciné-imagerie actifs ou passifs, permet une escalade Il s’agit d’un patient, âgé de 75 ans, ayant comme principaux
de dose et un traitement hypofractionné en conditions stéréo- antécédents une hémorragie digestive sur ulcère gastrique, une
taxiques (Figs. 6, 8, 10, 11, 13, 17, 19, 20). Ces techniques sont infection par le virus de l’hépatite C, une arythmie cardiaque avec
réservées aux tumeurs uni- ou bifocales (primitive ou métasta- fibrillation auriculaire traitée par fluindione et une intoxication
tique). Le repérage tumoral doit être très précis pour permettre œnolique. Il bénéficiait d’un suivi régulier dans le cadre d’une
de délivrer une dose totale comprise entre 36 et 60 Gy en trois infection par le virus de l’hépatite C. Lors d’une échographie
à six fractions. Une étude de phase I, a été récemment publiée abdomino-pelvienne, il a été découvert un nodule de 45 mm
par l’équipe de l’université du Michigan portant sur 41 patients de grand axe, de contenu hétérogène cerclé d’une couronne
atteints de « grosses tumeurs hépatiques », (volume médian de hypo-échogène, situé dans le lobe droit, et associé à des signes
293 cm3) pour lesquels une dose totale de 57 Gy en six fractions de cirrhose (signe d’hypertension portale). À l’examen clinique,
était délivrée [6,7]. Les résultats en termes de contrôle local et l’état général était légèrement atteint (classé 1 selon l’OMS), et il
de tolérance étaient prometteurs (aucune hépatite radio-induite y avait des signes d’insuffisance hépatique. L’IRM hépatique avec
n’a été observée). injection de gadolinium a retrouvé le nodule avec un wash out au
En situation antalgique palliative, l’ensemble du volume temps artériel. Le bilan biologique a montré une concentration
hépatique est traité par deux faisceaux antéro-postérieur et d’alpha-fœtoprotéine de 310 μg/l, un taux de prothrombine de
postéro-antérieur. 75 %, une albuminémie de 30 g/l, une bilirubinémie de 30 μmol/l,
une concentration de transaminases (ALAT et ASAT) de 1,5 fois
la normale, de phosphatases alcalines de deux fois la normale.
5. Toxicité aiguë Il s’agissait selon la classification de Milan d’un petit carcinome
hépato cellulaire sous la forme d’un nodule unique de moins de
La toxicité aiguë la plus sévère est l’hépatite radio-induite, 5 cm de stade A de Child Pugh. Le patient n’était pas éligible aux
c’est un syndrome comparable à la maladie veino-occlusive des traitements de référence, en raison de plusieurs « comorbidités »
hémopathies. L’hépatite radio-induite est une complication sub- qui constituaient des contre indications. La résection chirurgicale
aiguë qui survient dans les deux à huit semaines suivant la fin était contre-indiquée du fait de la localisation profonde du foie
de l’irradiation et se caractérise par l’apparition d’une hépato- droit et de l’hypertension portale. La destruction percutanée était
mégalie anictérique, associée à de l’ascite et à une élévation des aussi contre-indiquée car le nodule était trop volumineux pour
enzymes hépatiques, notamment des phosphatases alcalines, à la radiofréquence et l’alcoolisation difficilement réalisable du
deux fois la valeur normale. C’est une complication de pronostic fait du traitement anticoagulant. Après discussion en réunion de
très défavorable, qui peut évoluer en fibrose hépatique sévère ou concertation pluridisciplinaire, l’indication d’une radiothérapie
en défaillance d’organe fulgurante. Les facteurs prédictifs pour externe à visée curative a été retenue.
l’hépatite radio-induite sont une cirrhose hépatique sévère et La scanographie dosimétrique a pu être fusionnée avec une
une co-infection de l’hépatite B [4,14]. Les autres effets aigus, IRM hépatique datant de moins d’un mois :
plus classiques en situation d’irradiation abdominale, concernent – volume tumoral macroscopique : volume tumoral prenant le
la tolérance digestive et peuvent se manifester par une gastrite contraste à l’imagerie ;
ou une entérite radique, ainsi qu’une majoration des risques de – volume cible anatomoclinique : volume tumoral macroscopi-
cholécystite. Dans la situation d’un traitement hypofractionné en que plus une extension microscopique de 1 cm autour ;
conditions stéréotaxiques, la principale complication digestive – volume cible prévisionnel : volume cible anatomoclinique plus
est l’ulcère gastroduodénal ou l’ulcère colique. une marge de 1 cm.
Les organes à risque suivant sont repérés :
– volume de foie sain (volume foie total – volume cible
6. Toxicité tardive prévisionnel) ;
– poumon droit ;
La toxicité tardive est rarement rapportée dans la littérature – poumon gauche ;
du fait d’un faible de survivants à long terme à cette maladie. – reins ;
Néanmoins en dehors de la fibrose hépatique et de l’insuffisance – moelle épinière ;
M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110 S107

– intestin grêle ; vingt quinze pour cent du volume cible prévisionnel (en
– cœur ; orange) recevaient 95 % de la dose prescrite. La dose maximale
– estomac ; délivrée à la moelle (en marron) était de 25 Gy. Cinquante
– duodénum. pour cent du foie sain recevaient 45 Gy. Cinquante cinq pour
La dose a été prescrite au point d’ICRU, de 66 Gy, en 33 frac- cent du poumon droit (en turquoise) recevaient 20 Gy, 20 %
tions de 2 Gy, en six semaines et demi (dose qui n’est délivrée du poumon gauche (en bleu) 2 Gy, 20 % des poumons droit et
que si la contrainte au foie sain est respectée). La dosimétrie a gauche moins de 30 Gy. La dose maximale au rein droit (en
été réalisée selon une technique d’irradiation conformationnelle vert) était de 6 Gy.
tridimensionnelle (Fig. 17). Deux balistiques sont proposées : La comparaison des deux balistiques permettait néanmoins
deux faisceaux antéropostérieurs ou trois faisceaux de photons X de se rendre compte que deux faisceaux antéropostérieurs,
de 18 MV, un oblique antérieur droit, un oblique postérieur parallèles et opposés, permettaient d’augmenter le volume de
droit et un oblique postérieur gauche, en utilisant des lames foie sain non irradié et de diminuer le volume de foie irradié à
dynamiques. hautes doses (Fig. 20). On préfère des dosimétries comportant
le moins de faisceaux possible afin de protéger au mieux le foie
7.1. Histogrammes dose-volume sain, en effet, on considère que chaque faisceau altère la zone
de parenchyme hépatique sain traversé. Il faut donc « sacrifier »
Une balistique à trois faisceaux a été proposée (Fig. 18, dans le moins de tissu sain possible et préserver un volume maximal
laquelle le volume cible anatomoclinique est en rose). Quatre de foie sain en appliquant une contrainte à 0 Gy.

Fig. 3. Contourage de volumes cibles et organes à risque.


Delineation of target volume and at-risk organs.

Fig. 4. Contourage de volumes cibles et organes à risque.


Delineation of target volume and at-risk organs.

Fig. 5. Contourage des volumes cibles et organes à risque. Fig. 6. Dosimétrie de radiothérapie en conditions stéréotaxiques.
Delineation of target volume and at-risk organs. Dosimetric technique for stereotaxic radiosurgery.
S108 M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110

Fig. 7. Faisceaux de traitement avec une technique conformationnelle Fig. 8. Faisceaux de traitement avec technique stéréotaxique.
tridimensionnelle. Treatment beams with stereotaxic technique.
Treatment beams with 3D conformal radiation technique.

Fig. 9. Histogramme dose-volume pour une technique conformationnelle Fig. 10. Histogramme dose-volume avec technique stéréotaxique, volume
tridimensionnelle, volume cible anatomoclinique (CTV) en rose, volume cible tumoral macroscopique (GTV) en rose, volume cible anatomoclinique (CTV)
prévisionnel (PTV) en orange, moelle en marron, foie sain en rouge. en bleu et volume cible prévisionnel (PTV) en rouge, foie sain en jaune.
DVH for 3D conformal technique, CTV (pink), PTV (orange), blood marrow DVH with stereotaxic technique, GTV (pink), CTV (blue), PTV (red), healthy liver
(brown), healthy liver (red). (yellow).

Fig. 12. Fusion multimodale d’une scanographie et d’une IRM hépatiques Fig. 15. Contourage des volumes cibles sur la scanographie dosimétrique.
pondérées en T1 Delineation of target volume and at-risk organs on dosimetric CT scan
Multimodal fusion of hepatic CT and T1-weighted MRI.
M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110 S109

Fig. 16. Contourage des volumes cibles à l’aide de l’image de fusion, volume
tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomoclinique (CTV)
en rose, volume cible prévisionnel (PTV) en orange.
Delineation of target volumes using image fusion; GTV (red), CTV (pink), PTV
(orange). Fig. 17. Exemple de dosimétrie en technique stéréotaxique
Example of dosimetry in stereotaxic technique.

Fig. 18. HDV en technique conformationnelle. Volume cible anatomoclinique Fig. 19. Exemple d’histogramme dose volume en technique stéréotaxique
(CTV) en rose, volume cible prévisionnel (PTV) en orange, foie sain en rouge. Example of DVH, stereotaxic technique
HDV conformal technique. CTV (pink), PTV (orange), healthy liver (red).

Fig. 20. Comparaison de


deux plans de traitement, en
technique conformationnelle,
par un faisceau postérieur
et deux obliques ou par des
faisceaux antéropostérieurs.
Comparison of two treatment
planes with conformal
technique, with posterior beam
and two diagonals or with
anteroposterior beams.
S110 M. Quivrin et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S103–S110

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Ca ncer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S111– S119

Le cancer du rectum
Rectal cancer

P. Blancharda, A. Levyb, J. Breunotb, S. Michaudb, V. Delmasc, C. Hennequinb,*


a Département de radiothérapie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France
b Service de cancérologie radiothérapie, hôpital Saint Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France
c Service d’Urologie, hôpital Bichat, Paris, France

RÉSUMÉ

Les cancers du rectum sont une entité fréquente avec une incidence annuelle en France
Mots clés :
Cancer de du rectum d’environ 12000 nouveaux cas par an. La chimioradiothérapie concomitante préopératoire à
Radiothérapie conformationnelle base de fluoropyrimidine suivie d’une chirurgie avec exérèse totale du mesorectum est devenue
Volumes cibles le standard thérapeutique des tumeurs localement évoluées (classées T3-4) ou atteignant les
Atlas ganglions (N+ ) du bas ou du moyen rectum. Les modalités d’irradiation varient selon le siège de
la tumeur (bas/moyen) et son extension locale. Le volume cible anatomoclinique (CTV) couvre
toujours l’ensemble du mesorectum, qui s’étend de la ligne de réflexion péritonéale (à hauteur
de S3) au plan des muscles releveurs de l’anus, ainsi que les aires ganglionnaires iliaques internes
jusqu’à la bifurcation iliaque interne - iliaque externe. L’objectif de cet article est de rappeler les
particularités épidémiologiques, anatomiques, radiologiques et de pronostic des cancers du rectum
essentielles à la définition des modalités optimales de l’irradiation conformationnelle. La définition
des volumes cibles et des organes à risque, les doses à prescrire et les contraintes de dose sont
abordées. Ces propos sont illustrés par un cas clinique concernant une tumeur du moyen rectum.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous
droits réservés.
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ABSTRACT

With 12,000 new cases each year in France, rectal cancers are a frequent entity. Concurrent
Keywords:
Gastric cancer fluoropyrimidin-based chemoradiation followed by a surgery including total mesorectal excision is
Conformal radiotherapy the standard of care for locally advanced (T3-4) or node positive cancers of the mid and lower rectum.
Target volumes Modalities of irradiation depend on tumour location (mid versus lower rectum) and its local extension.
Atlas Nevertheless, the clinical target volume (CTV) always encompasses the entire mesorectum, that goes
from the peritoneal reflexion line (facing the third sacral vertebrae) to the levator ani muscles. The
internal iliac lymph nodes are as well always included in the CTV. The aim of this article is to review the
main epidemiological, anatomical, radiological and prognostic factors that are meaningful to define the
optimal modalities of conformal radiation of rectal cancers. Definition of target volumes and organs at risk
will be discussed, as well as doses and dose-constraints. A case report will be used to illustrate this article.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.
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* Correspondance.
Adresse e-mail : christophe.hennequin@sls.aphp.fr (C. Hennequin)
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S112 P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119

1. Épidémiologie 4. Modalités du traitement

Les données récentes épidémiologiques font état de 4.1. Anatomie du rectum


36 000 nouveaux cas de cancer colorectal par an en France [6,8].
La difficulté provient du fait qu’il n’y a pas d’information fiable Le rectum se divise en trois portions. Le haut rectum, situé
permettant une distinction entre cancer colique et rectal dans au-delà de 10 cm de la marge anale, est recouvert de péritoine ;
ces données épidémiologiques. On peut estimer l’incidence les tumeurs qui s’y développent se traitent de la même manière
annuelle des cancers du rectum à environ 12 000 nouveaux que les tumeurs du côlon sigmoïde. Dans sa portion sous-
cas par an et la mortalité annuelle autour de 5 000 [4,6]. Les péritonéale, le rectum chemine au travers d’un tissu cellulo-
taux de rechute obtenus par chirurgie seule (sans exérèse graisseux, le mésorectum. L’essentiel des ganglions de drainage
totale du mésorectum) vont de 10 à 70 % selon la profondeur du rectum est situé dans le mésorectum, d’où le risque accru de
de l’envahissement pariétal, le statut ganglionnaire et la marge récidive si la chirurgie ne résèque pas en entier cette structure.
de résection circonférentielle [3]. Deux améliorations majeu- Le mésorectum est donc le site-clé des rechutes des cancers du
res ont modifié la prise en charge des cancers du rectum : la rectum. Les limites anatomiques du mésorectum sont :
chirurgie d’exérèse totale du mésorectum et l’avènement de — latéralement : lames sacro-recto-génito-pubiennes ;
la chimioradiothérapie préopératoire, qui ont fait régresser les — en arrière : fascia rétrorectal (aponévrose présacrée, sous
taux de rechute locale. Actuellement, quatre rechutes sur cinq S3) ;
sont métastatiques [2,3,5,7]. — en avant : vessie et vagin (femme : cloison recto-vaginale) ou
prostate (homme : aponévrose de Denonvilliers) ;
— en dessous : insertion des releveurs de l’anus (Fig. 1)
2. Classification

La classification actuelle de référence est celle établie par


l’UICC en 2002, qui regroupe les tumeurs en différents stades.
Ainsi on distingue :
— stade I : envahissement jusqu’à la musculeuse rectale ;
— stade II : envahissement de la graisse périrectale et au-delà ;
— stade III : envahissement ganglionnaire (N+ , au mieux évalué
sur 12 ganglions) ;
— stade IV : maladie métastatique (M+ ).
On distingue également les tumeurs selon leur position par
rapport à la marge anale :
— bas rectum : 0 à 5 cm ou mieux < 2 cm du bord supérieur du
sphincter ;
— moyen rectum : 5 à 10 cm ou mieux 2 à 7 cm du bord supérieur
du sphincter ; Fig. 1. Schéma de l’ampoule rectale.
Rectal ampulla.
— haut rectum : 10 à 15 cm ou mieux plus de 7 cm du bord
supérieur du sphincter.

4.2. Anatomie radiologique : l’IRM est l’examen « clé »


3. Indications de la radiothérapie
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) pelvienne
La radiothérapie est au mieux réalisée avant la chirurgie, est l’examen clé pour évaluer l’extension locale des tumeurs
en combinaison avec une chimiothérapie concomitante par rectales. Elle permet l’appréciation de la marge de résection
5-fluoro-uracile ou capécitabine. Elle s’adresse à toutes les circonférentielle et d’évaluer le statut ganglionnaire. À défaut
tumeurs classées T3-4 (de stade II) ou TxN1 (de stade III) du bas une écho-endoscopie rectale peut informer sur l’extension en
ou du moyen rectum. Les tumeurs du haut rectum ne relèvent profondeur mais est moins précise pour dépister des adénopa-
pas d’un traitement par irradiation, sauf si elles descendent sur thies du mésorectum. La tomographie par émission de positons
le moyen rectum ou sont fixées à des organes de voisinages par n’a pas de place à l’heure actuelle dans le bilan d’extension locale
une extension de contiguïté [1]. En cas de tumeur avec facteurs des tumeurs du rectum [13].
histologiques de risque de récidive locale (T4, N+, résection Pour améliorer la visualisation des volumes cibles, la
incomplète), mais n’ayant pas été irradiées avant la chirurgie, scanographie dosimétrique doit être réalisé en position de
une chimioradiothérapie postopératoire doit être réalisée [1]. traitement (en décubitus ventral avec bras autour de la tête
ou en décubitus dorsal avec bras sur la poitrine). La contention
utilise une cale sous les pieds ou les genoux, un matelas de
contention est possible mais on déconseille l’utilisation d’un
moule thermoformé.
L’acquisition va de L4-L5 jusqu’à sous les petits trochanters
en coupes de 2 à 5 mm d’épaisseur, et peut comporter une
P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119 S113

opacification rectale ou l’injection de produit de contraste conservatrice), alors il faut définir un volume tumoral macros-
pour améliorer la visualisation de la tumeur primitive et des copique qui prenne en compte (Fig. 2) :
structures ganglionnaires. Le repérage de la marge anale est — la tumeur macroscopique (opacification rectale nécessaire) ;
recommandé. Un rectum anormalement distendu doit faire — les adénopathies macroscopiques immédiatement péri-
refaire l’acquisition [11]. tumorales.

4.3. Détermination des volumes cibles 4.4. Doses prescrites

La détermination du volume cible est liée aux voies d’ex- Le standard actuel en France est une radiothérapie déli-
tension tumorale (transpariétale, via le mésorectum, chaînes vrant 45 Gy en fractionnement classique, avec éventuellement
iliaques internes), à la localisation tumorale (bas/moyen rectum, un complément de 5,4 Gy dans la tumeur macroscopique. La
extension aux organes de voisinage, à la marge anale…) et aux chirurgie intervient alors cinq à sept semaines après l’irradiation.
sites de prédilection de récidive locale (pelvis inférieur et région L’alternative est un schéma hypofractionné délivrant 25 Gy en
présacrée) [9,10,11,14]. cinq fractions et cinq jours dans le même volume, suivi par la
chirurgie une semaine après [2,5,7].
4.3.1. Volume cible anatomoclinique (CTV) des tumeurs
du moyen rectum 4.5. Organes à risque et contraintes de dose

— Régions périrectale, présacrée, iliaque interne. Les organes à risque sont principalement l’intestin grêle, la
— Couvrant l’ensemble du mésorectum jusqu’à au moins vessie, les têtes et les cols fémoraux. Les contraintes de dose
deux centimètres sous le volume tumoral macroscopique posent peu de problème dans l’irradiation des tumeurs rectales
(GTV). car la dose totale délivrée reste modérée [11]. On retiendra :
— Limites : — intestin grêle : dose maximale de 50 Gy dans quelques dizaines
• en haut : jonction rectosigmoïdienne ou deux cm au-dessus de cm³, sans dépasser 40 Gy dans un grand volume ;
de la tumeur macroscopique ; — vessie : la dose de 60 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de
• en bas : un cm sous la jonction anorectale (insertion 50 % du volume vésical (V60 < 50 %) ;
des muscles releveurs de l’anus = limite inférieure du — têtes, cols fémoraux et grands trochanters : la dose de 50 Gy
mésorectum) ; ne doit pas être délivrée dans plus de 10 % d’un volume osseux
• latéralement : le fascia recti. délinéé par convention du sommet des têtes fémorales au petit
trochanter exclu (V50  10 %) ;
4.3.2. Volume cible anatomo-clinique des tumeurs du bas — La dose au canal anal est à documenter même s’il n’existe pas
rectum actuellement de contrainte de dose précise [12].

— Régions périrectale, présacrée, iliaque interne. 4.6. Balistique, dosimétrie


— Couvrant l’ensemble du mésorectum.
— Limites : Habituellement la balistique fait appel à trois ou quatre
• en haut : jonction moyen-haut rectum ; faisceaux :
• en bas : un cm sous la jonction anorectale (insertion des — trois faisceaux : deux latéraux et un postérieur ;
releveurs de l’anus = limite inférieure du mésorectum) : — quatre faisceaux (à préférer en cas de tumeur à développement
inclusion de la partie haute du canal anal ; antérieur) : deux latéraux, un antérieur et un postérieur.
• prise en compte des fosses ischio-rectales (donc inclusion Le bénéfice de la radiothérapie tridimensionnelle confor-
des muscles releveurs de l’anus), plus ou moins profondé- mationnelle réside dans la possibilité d’épargner au mieux les
ment selon l’extension de la tumeur ; organes à risque et de documenter la dose qui leur est délivrée
• latéralement : le fascia recti. par les histogrammes dose-volume.

4.3.3. Volume cible anatomoclinique ganglionnaire 4.7. Toxicité aiguë et tardive

— Systématiquement : aires iliaques internes (prendre jusqu’à La toxicité aiguë est essentiellement marquée par une
la bifurcation iliaque interne-externe). rectite radique aiguë en général modérée. La toxicité tardive
— Pas d’irradiation systématique des ganglions iliaques externes est modérée en raison :
ou inguinaux. — de la limitation des doses à environ 45-50 Gy ;
— Irradiation élective des ganglions : — de l’irradiation en situation préopératoire :
• iliaques externes : extension au-delà du fascia du méso- • le rectum est enlevé par la suite ;
rectum, extension aux organes adjacents (prostate, vagin, • le rectum refoule les anses grêles hors du volume cible ;
utérus, vessie) ; • la mobilité grêle est améliorée en l’absence de chirurgie
• ganglions inguinaux : à discuter en cas d’extension au canal antérieure.
anal, ou au tiers inférieur du vagin. On peut observer cependant de rares cas de grêle radique.
Si un complément d’irradiation est prévu (en vue d’aug- Des fractures post-radiques tardives peuvent également être
menter la régression tumorale et de permettre une chirurgie observées.
S114 P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119

5. Cas clinique commenté préopératoire délivrant 45 Gy en fractions de 1,8 Gy et de


chimiothérapie concomitante à base de 5-fluoro-uracile suivie
Il s’agissait d’un homme de 65 ans, en bon état général cinq semaines après d’une chirurgie avec exérèse totale du
(indice de performance de 1 selon l’OMS), ayant comme seul mésorectum. La délinéation des volume-cibles et la dosimétrie
antécédents un glaucome chronique traité par ß-bloquant sont présentées (Fig. 4).
en collyre. Des rectorragies et des troubles du transit étaient Le traitement a été réalisé en décubitus ventral par quatre
associés à une perte de cinq kg en six mois (70 kg à ce jour), qui faisceaux. Il a été privilégié quatre faisceaux et non trois en raison
ont fait découvrir une tumeur du moyen rectum. La coloscopie du développement antérieur de la tumeur. La couverture du
a trouvé une tumeur sténosante débutant à six cm de la marge volume cible anatomoclinique aurait été imparfaite en l’absence
anale, remontant sur dix cm, sans autre lésion sur le cadre coli- de faisceau antérieur. La technique conformationelle permettait
que. Il s’agissait d’un adénocarcinome lieberkühnien infiltrant un traitement optimal dans le cas de ces tumeurs évoluées, en
moyennement différencié. À l’examen clinique, il n’existait protégeant les organes à risque. Ici la vessie était proche de la
pas d’argument en faveur d’une extension à distance, les aires tumeur, mais a pu être largement protégée.
ganglionnaires étaient libres et le toucher rectal retrouvait la
lésion décrite par l’endoscopiste. Le bilan d’extension à distance
(tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne avec injec- Conflit d’intérêts
tion) était normal, l’IRM pelvienne a permis de classer la tumeur
T3N1 (Fig. 3). Le traitement proposé en réunion de concertation Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
pluridisciplinaire reposait sur une association radiothérapie article.

Fig. 2. Volume-cible et organes à risque dans le cas d’une tumeur du moyen rectum. Volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible
anatomoclinique (CTV) en violet mauve, vessie en jaune, tube digestif en vert, têtes fémorales droite en bleu et gauche en jaune pâle.
Target volume and at-risk organs in a tumor of the mid-rectum. Gross tumor volume (GTV), red; clinical target volume, light purple; bladder, yellow; digestive tube,
green; right femoral heads, blue; left femoral head, light yellow.
P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119 S115

Fig. 2. (suite) Volume-cible et organes à risque dans le cas d’une tumeur du moyen rectum. Volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible
anatomoclinique (CTV) en violet mauve, vessie en jaune, tube digestif en vert, têtes fémorales droite en bleu et gauche en jaune pâle.
Target volume and at-risk organs in a tumor of the mid-rectum. Gross tumor volume (GTV), red; clinical target volume, light purple; bladder, yellow; digestive tube,
green; right femoral heads, blue; left femoral head, light yellow.
S116 P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119

Fig. 3. IRM pelvienne : Adénocarcinome rectal classé T3N1.


Pelvic MRI: T3N1 rectal adenocarcinoma.

Fig. 4. Contourage des volume-cibles et des organes à risque : volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomo-clinique (CTV) en violet,
canal anal en vert, vessie en jaune, intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace et
histogrammes dose-volume.
Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral heads, orange.
Dosimetry in three planes and dose-volume histograms.
P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119 S117

Fig. 4. (suite) Contourage des volume-cibles et des organes à risque : volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible anatomo-clinique (CTV) en
violet, canal anal en vert, vessie en jaune, intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace
et histogrammes dose-volume.
Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral heads, orange.
Dosimetry in three planes and dose-volume histograms.
S118 P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119

Fig. 4. (suite) Contourage des volume-cibles et des organes à risque :


volume tumoral macroscopique (GTV) en rouge, volume cible
anatomo-clinique (CTV) en violet, canal anal en vert, vessie en jaune,
intestin grêle en vert pomme, sigmoïde en rose, têtes fémorales en
orange ; dosimétrie dans les trois plans de l’espace et histogrammes
dose-volume. La première et la dernière coupe présentées sont
respectivement la coupe inférieure et la coupe supérieure du volume
cible anatomo-clinique. Balistique et histogramme dose-volume.
Delineation of at-risk organ volume : GTV, red; CTV, purple; anal canal
green; bladder, yellow; small intestine, bright green; sigmoid, pink; femoral
heads, orange. Dosimetry in three planes and dose-volume histograms.
The first and the last view presented are inferior and superior views,
respectively, of the clinical target volume. Treatment beams and dose-
volume histograms.
P. Blanchard et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S111–S119 S119

Fig. 4. (suite) Dosimétrie et balistique


Dosimetry and treatment beams.

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Cancer/ R adi ot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S120– S126

Cancer du canal anal


Anal cancer

M. Fesneaua, É. Champeaux-Orangea, b, C. Hennequinc,*


a Service de radiothérapie, Centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2 Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France.
b Service d’oncologie-radiothérapie, Centre hospitalier régional d’Orléans 14 avenue de l’hôpital 45100 Orléans, France.
c Service de cancérologie-radiothérapie, hôpital Saint-Louis, 1 avenue Claude-Vellefaux 75475 Paris, France.

RÉSUMÉ

Les cancers du canal anal représentent 1,2 % des cancers digestifs, et 6 % des cancers ano-rectaux.
Mots clés :
Cancer du canal anal Lorsqu’ils sont localisés, le traitement de référence repose sur la radiothérapie associée ou non à la
Radiothérapie conformationnelle chimiothérapie par 5-fluoro-uracile et cisplatine ou mitomycine selon le stade. La dose préconisée est
Volumes cibles de 45 Gy dans le canal anal, le mésorectum, les ganglions pararectaux, les ganglions inguinaux droits
Atlas et gauches. Un complément de dose de 15 à 20 Gy est ensuite délivré dans la tumeur résiduelle en cas
de bonne réponse. Dans le cas contraire, une chirurgie de type amputation abdomino-pelvienne est
envisagée. Les organes à risque à prendre en considération sont la vessie, les têtes fémorales, l’intestin
grêle et la vulve. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques, radio-
anatomiques, le pronostic de ce type de tumeur et les modalités de l’irradiation conformationnelle,
illustrés par un cas clinique.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Anal canal epidermoid carcinomas represent 1.2% of digestive cancers and 6% of ano-rectal cancers.
For localized diseases, the treatment is based on radiotherapy with or without chemotherapy (5-FU
Keywords: and cisplatin or mitomycin), according to tumour and nodal extension. The recommended treatment
Anal cancer dose is 45 Gy in the anal canal, the mesorectum, pararectal lymph nodes, and inguinal lymph nodes.
Conformal radiotherapy
An additional dose of 15 to 20 Gy is delivered in the initial tumour for good responders. Salvage
Target volumes
surgery is necessary in case of poor response. The organs at risk to be considered are bladder, femur
Atlas
heads, small intestine and vulva. The objective of this work is to summarize the epidemiological and
radio-anatomic and prognostic characteristics of this tumour. The conformal radiotherapy technique
is illustrated by a case report.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Généralités – Épidémiologie le meilleur taux de contrôle local en conservant un sphincter


fonctionnel.
Le canal anal est la partie terminale du tube digestif mesurant Les cancers du canal anal sont rares, ils prédominent chez
trois à quatre centimètres située entre le rectum et la peau de la la femme (sex ratio de 0,4 à 4,4 en France) [2]. Ils représentent
marge de l’anus. Les tumeurs de la marge anale sont classées avec 1,2 % des cancers digestifs, et 6 % des cancers ano-rectaux et leur
les tumeurs cutanées (selon l’OMS). Le traitement vise à obtenir incidence est en augmentation [2,17]. Deux tiers des patients ont

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : christophe.hennequin@sls.aphp.fr (C. Hennequin)
Les Drs Fesneau et Champeaux-Orange ont participé à part égale au travail en tant que co-auteurs de cet article.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126 S121

plus de 65 ans [9]. Les carcinomes épidermoïdes représentent 3. Indications de la radiothérapie


95 % des cas de cancers du canal anal. Seuls 5 % sont métastati-
ques au moment du diagnostic [9]. La radiothérapie à visée curative des cancers du canal anal
Outre le sexe féminin et l’âge, l’homosexualité, les infections avec conservation du sphincter a été développée, entre autres,
par le virus de l’immunodéficience humaine et le tabagisme sont par Papillon, dans les années 1980. Elle a montré sa capacité à
des facteurs de risque. contrôler efficacement la maladie locale, et donc à garder un
sphincter fonctionnel. Par rapport au traitement chirurgical,
elle offre une survie globale comparable mais avec de meilleurs
2. Anatomopathologie ; classification TNM résultats fonctionnels. Ainsi, depuis ces résultats, la radiothéra-
pie est le traitement standard à visée curative des carcinomes
On distingue les carcinomes épidermoïdes des autres épidermoïdes du canal anal [1,3,8,12,18,20,21,26,28].
formes : Celle-ci se déroule en deux temps, un premier consistant en
— cancers épidermoïdes : une irradiation pelvienne large, un deuxième en un complément
• à grandes cellules kératinisant ; localisé à la tumeur selon plusieurs modalités.
• non kératinisant (transitionnel) ; L’efficacité d’une chimioradiothérapie à visée curative a été
• basaloïde ; démontrée en termes de survie sans rechute et de survie sans
— adénocarcinomes colostomie dans des séries rétrospectives [4,5,11,13-16,19,23-25]
• de type rectal - glandes anales ; et dans trois études prospectives randomisées avec l’association
• sur fistule anorectale ; 5-fluoro-uracile et mitomycine [1,10,28]. La chimioradiothérapie
— carcinomes à petites cellules ; concomitante est considérée comme un standard thérapeutique
— carcinomes indifférenciés ; des formes localement évoluées (classées T3–T4, T2 ≥ 4 cm de
— autres tumeurs (sarcomes-lymphomes-mélanomes…). longueur, ou tout T avec envahissement ganglionnaire).
Les carcinomes épidermoïdes, plus ou moins différenciés et En ce qui concerne l’intérêt d’une chimiothérapie néo-
kératinisants représentent 60 à 80 % des cas. Les cancers cloacogé- adjuvante et d’une escalade de dose pour le traitement des
niques (ou transitionnels ou basaloïdes) naissant de la muqueuse carcinomes épidermoïdes du canal anal localement évolués, les
transitionnelle constituent 8 à 10 % des cas. Ils ne semblent pas résultats préliminaires de l’essai accord 03 ont été présentés en
avoir un pronostic plus défavorable que les autres types histologi- 2008 [22]. Cette première analyse ne montrait pas de bénéfice
ques. Les adénocarcinomes, représentant 7 à 9 % des cas, naissent à en termes de contrôle local et de survie.
partir d’îlots glandulaires de la muqueuse. Les formes évoluées sont
difficiles à distinguer des adénocarcinomes rectaux à extension
canalaire. Sont encore plus rares, les carcinomes adénosquameux, 4. Modalités de la radiothérapie
les carcinomes colloïdes muqueux à forme fistuleuse et les mélano-
mes malins. La classification TNM est résumée dans le tableau 1. 4.1. Acquisition des données anatomiques

Tableau 1
Elle doit être réalisée de façon conformationnelle en trois
Classification TNM (UICC 6e édition 2002) dimensions avec simulation virtuelle. La scanographie de dosimé-
trie est réalisée en décubitus dorsal, mains croisées sur la poitrine
Tumeur primitive
avec cale-pieds et billot sous les genoux, avec injection de produit
T1 : tumeur  2 cm dans sa plus grande dimension de contraste sous réserve d’une clairance correcte de la créatinine.
T2 : tumeur > 2 cm mais  5 cm dans sa plus grande dimension Il est souhaitable d’opacifier le grêle par l’ingestion d’un faible
(de 21 mm à 50 mm)
T3 : tumeur > 5 cm dans sa plus grande dimension volume d’eau. Un repère est placé au niveau de la marge anale.
T4 : tumeur, quelle que soit sa taille, qui envahit un ou plusieurs organes L’acquisition scanographique est faite de L3 jusqu’à un cm sous
adjacents (vagin, urètre, vessie) à l’exception du rectum, de la peau
périnéale, du tissu cellulaire sous-cutané et du sphincter. les petits trochanters en coupes jointives de 2,5 à 5 mm. En cas de
distension rectale, la scanographie doit être répétée.
Adénopathies régionales (N)

Nx : ganglions non évalués 4.2. Détermination des volumes cibles


N0 : pas de métastase ganglionnaire
N1 : ganglions périrectaux
N2 : ganglions iliaque interne et/ou inguinal unilatéraux Les volumes cibles sont le canal anal et les aires ganglion-
N3 : ganglions périrectaux et inguinaux et/ou iliaques internes bilatéraux naires pararectales, iliaques internes et externes et inguinales
et/ou inguinaux bilatéraux.
NB : nombre de ganglions à examiner histologiquement : au moins 12 droites et gauches. Le volume tumoral macroscopique (GTV)
sur un curage péri-rectal et pelvien ou au moins 6 sur un curage inguinal. correspond à la tumeur, à ses extensions macroscopiques locales
Si les ganglions examinés sont indemnes, même si ce nombre n’est pas
atteint, classer pN0. et aux adénomégalies visualisées sur l’imagerie. Le volume cible
anatomoclinique (CTV) correspond au canal anal en totalité et
Métastases à distance (M)
aux aires ganglionnaires ilio-obturatrices bilatérales et inguina-
MX : non évaluées les bilatérales. Une marge d’un cm (pour obtenir le volume cible
M0 : pas de métastase
prévisionnel, PTV) est requise dans toutes les directions mais ces
M1 : métastases à distance
extensions restent variables selon les centres.
S122 M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126

4.3. Doses prescrites aux points ICRU (International 4.5. Dosimétrie


Commission on Radiation Unists
and Measurements) Le traitement doit être réalisé aux photons > 10 MV avec
protection des organes à risque par caches personnalisés ou
L’irradiation se déroule en deux temps : le premier temps utilisation du collimateur multilame.
consiste en une radiothérapie externe de la tumeur et des aires Il comporte en règle deux temps :
ganglionnaires. Le deuxième temps d’irradiation, réalisé trois à — 1er temps : volume pelvien incluant le canal anal et les aires
quatre semaines après la fin du premier temps, est réalisé par ganglionnaires ilio-obturatrices, et inguinales bilatérales ;
curiethérapie ou par radiothérapie externe. Ce délai permet la — 2 e temps : complément limité à la tumeur et aux
régression tumorale et la cicatrisation des tissus sains au niveau adénomégalies.
du périnée. Pour le volume pelvien, la technique habituellement retenue
Les doses habituellement recommandées sont de 45 à est isocentrique, avec optimisation de la balistique et des pon-
50 Gy dans le pelvis et les aires ganglionnaires ilio-obtu- dérations en considérant la dose aux volumes à irradier et les
ratrices. Un complément de 15 à 20 Gy est délivré dans la contraintes de dose aux organes à risque. Pour le complément
tumeur résiduelle (volume réduit). En ce qui concerne les d’irradiation, la même technique peut être utilisée avec des
aires ganglionnaires inguinales, l’irradiation prophylactique faisceaux réduits ou bien une curiethérapie.
est de 45 Gy avec un complément de 15 Gy en cas d’atteinte
macroscopique.
Le fractionnement est classique, 1,8 à 2 Gy par fraction, cinq 5. Toxicité de la radiothérapie
fractions hebdomadaires. Selon les recommandations de l’ICRU,
95 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au moins 95 % 5.1. Toxicité aiguë
de la dose, 98 % du volume cible prévisionnel doivent recevoir au
moins 90 % de la dose et 3 % du volume ne doivent pas recevoir Ce sont les manifestations survenant jusqu’au 90e jour de la
plus de 107 % de la dose. fin de la radiothérapie (définition du Radiation Therapy Oncology
Group). Elles sont fréquentes mais, en général, mineures. Sont
4.4. Organes à risque et contraintes de doses [24,25] concernés par la toxicité : les muqueuses, la peau, le système
digestif et urinaire. Par conséquent, la toxicité précoce la plus
Les organes à risque sont l’intestin grêle, la vessie, la vulve fréquemment rencontrée est une épithéliite, une anite, une
et les grandes lèvres, la tête, les cols fémoraux et les grands mucite, une diarrhée et les troubles urinaires à type de cystite.
trochanters.
5.2. Toxicité tardive
4.4.1. Intestin grêle
Ce sont les manifestations survenant plus de trois mois
C’est l’un des organes à risque important à protéger. Sa de la fin de la radiothérapie (définition du Radiation Therapy
protection est d’autant plus importante qu’une chimiothérapie Oncology Group, RTOG). Ces effets peuvent être très tardifs mais
est associée. C’est un organe extrêmement mobile d’un jour le délai moyen de leur survenue est de deux ans. Ils ne sont
sur l’autre et souvent difficile à visualiser et à délinéer sur les pas forcément précédés de manifestations aiguës bruyantes.
scanographies de dosimétrie. La dose maximale est de 50 Gy Il s’agit essentiellement des complications cutanées à type de
dans quelques dizaines de cm3. Dans un grand volume, il est nécrose ou d’ulcération. Ils sont actuellement en diminution
recommandé de ne pas dépasser 40 Gy. grâce à l’amélioration des techniques de radiothérapie. Deniau
et al. ont rapporté en 2003 et 2006 des taux respectivement de
4.4.2. Vessie 3 et 6 % [6,7]. Des rectites accompagnées de rectorragies ont
aussi été décrites. Enfin, une altération sévère de la fonction
La dose de 60 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 50 % sphinctérienne anale est possible, liée aux dommages provoqués
du volume vésical (V60 ≤ 50 %). Cette dose ne devrait pas être par la radiothérapie et la lésion tumorale primitive, ce d’autant
atteinte dans cette procédure. L’urètre et le méat urinaire doivent que la lésion initiale est volumineuse. Dans la série de Deniau
être protégés chez la femme. et al. publiée en 2006, le taux de conservation du sphincter était
de 23 % pour les tumeurs classées T4 [7].
4.4.3. Vulve et grandes lèvres La CTCAE [27] (Tableau 2) (Common Terminology Criteria for
Adverse Events version 3), est actuellement volontiers utilisée
La vulve et les grandes lèvres, qui sont habituellement sans besoin de différenciation entre la toxicité aiguë et la toxicité
en dehors du volume cible, doivent être protégées au tardive.
maximum.

4.4.4. Têtes, cols fémoraux et grands trochanters 6. Cas clinique commenté

La dose de 50 Gy ne doit pas être délivrée dans plus de 10 % M. B., 49 ans, a consulté pour des douleurs anales et des
d’un volume osseux, délinéé par convention du sommet des têtes rectorragies évoluant depuis plusieurs mois. Il avait comme
fémorales au petit trochanter exclu (V 50 ≤ 10 %). seuls antécédents une appendicectomie et une intoxication
M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126 S123

musculaire antérieure (disparition localisée de l’espace inter


Tableau 2
rectoprostatique droit) et deux adénomégalies infra-centimétri-
Classification CTCAE v3.0 .
ques (présacrée et avant du promontoire). Un bilan d’extension
Grade 0 Pas de symptomatologie comprenant une scanographie thoraco-abdomino-pelvienne
Grade 1 N’affecte pas l’activité quotidienne habituelle du patient.
n’a pas retrouvé de localisation secondaires a distance. Enfin,
Signes ou symptômes ne nécessitant le plus souvent aucun le dosage du SCC (squamous cell carcinoma) retrouvait une
traitement.
concentration de 2,1 ng/ml pour une normale inférieure à 1,5.
Grade 2 Perturbe l’activité quotidienne habituelle du patient. Il s’agissait donc d’un cancer de stade T3 N0 M0 pour lequel une
nécessite le plus souvent un traitement médical radiothérapie associée à une chimiothérapie concomitante par trois
ambulatoire sans interruption du traitement par
irradiation. cycles de 5– fluroro-uracile et mitomycine ont été recommandées.
La radiothérapie est réalisée sur un mode conformationnel
Grade 3 Empêche l’activité quotidienne du patient. Nécessite
un traitement avec hospitalisation et/ou un arrêt du avec simulation virtuelle à l’aide d’une scanographie de dosi-
traitement supérieur ou égal à 4j métrie injectée en coupes jointives de 2,5 mm. Les contours des
volumes d’intérêt et des organes à risque sont présentés (Figs. 1
Grade 4 Menace le pronostic vital. Impose des mesures de
réanimation et 2). La dose prescrite au point ICRU était de 45 Gy, le volume
cible incluait le canal anal, mésorectum, ganglions pararectaux,
Grade 5 Toxicité responsable du décès
inguinaux droits et gauches.
Le traitement est réalisé à raison de cinq séances de 1,8 Gy
alcoolo-tabagique non sevrée. Le toucher rectal retrouvait une par semaine par des photons de 25 MV pour le faisceau antérieur
lésion du canal anal de 4 cm de hauteur, à droite, occupant les et 6 MV pour le faisceau postérieur. Le volume a été traité par
trois-quarts de la circonférence. Des explorations ont alors été deux faisceaux, antéro-postérieurs, couvrant le même volume
réalisées : la coloscopie a mis en évidence une lésion ulcéro- (volume cible prévisionnel tumoral et ganglionnaire). La dosimé-
végétante sus-anale droite hémi-circonférentielle étendue sur trie et les histogrammes dose-volume sont présentés (Fig. 3).
3 à 4 cm de hauteur dont les biopsies étaient en faveur d’un Les contraintes de dose pour la vessie, les têtes fémorales et
carcinome épidermoïde moyennement différencié non kérati- l’intestin grêle ont été respectées avec une bonne couverture du
nisant infiltrant. volume cible prévisionnel.
Une IRM rectale a montré la présence d’une lésion circonfé- Quatre semaines après la fin de ce traitement, un complé-
rentielle du bas rectum mesurant 5,1 cm de hauteur et descen- ment d’irradiation de 15 Gy a été délivré dans la tumeur par
dant jusqu’à trois centimètres de la marge anale avec effraction curiethérapie de débit pulsé.
S124 M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126

DDA faisceau antérieur DDA faisceau postérieur

Fig 1. Délinéation des volumes cibles et DRR (digital reconstructed radiography) des champs pelviens incluant les aires ganglionnaires.
Target volumes delineation and DRR of the pelvic fields including the lymph nodes.
M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126 S125

vue sagittale vue coronale


sagittal view coronal view

vues axiales Fig 2. Dosimétrie.


axial view Dosimetry.

Fig 3. Histogrammes dose-volume.


Dose-volume histograms.
S126 M. Fesneau et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S120–S126

[11] Gérard JP, Ayzac L, Hun D, Romestaing P, Coquard R, Ardiet M, et al.


7. Conclusion Treatment of anal canal carcinoma with high dose radiation therapy and
concomitant fluorouracil– cisplatinum. Long-term results in 95 patients.
Radiother Oncol 1998;46:249–56.
La radiothérapie, associée à la chimiothérapie pour les
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Cancer/ R adi o t hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S127– S135

Cancer du sein sans atteinte ganglionnaire axillaire


Early breast cancer without axillary lymph node involvement

I. Ghorbela,b, S. Kanouna,c, A. Kallela,d, A. Belaida,b, F. Azourya, S. Heymanna, C. Pichenote,


R. Verstraete, H. Marsigliaa,f, C. Bourgiera,*
a Département de Radiothérapie, Unité fonctionnelle de Sénologie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France.
b Service de Radiothérapie Carcinologique, institut Salah-Azaiz. Tunis, Tunisie.
c Service de Radiothérapie, hôpital Farhat-Hached, Sousse, Tunisie.
d Service de Radiothérapie, clinique Ennasr, Tunis, Tunisie.
e Département de Physique, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France.
f Université de Florence, Italie.

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 1, 8, 10, 11, 12, 14, 16, 17, Le cancer du sein est le premier cancer chez la femme en France (incidence en l’an 2000 : 88,9 pour
18, 19, 21, 22, 23, 26, 28, 29, 31, 32, 100,000 femmes). Grâce au dépistage, le diagnostic des cancers du sein est plus précoce, permettant
34, 36 sont visibles uniquement sur : ainsi la réalisation d’un traitement local conservateur par tumorectomie, ganglion sentinelle/
http : //www.sciencedirect.com/ curage axillaire et irradiation. Cette dernière consiste en l’irradiation de l’ensemble de la glande
mammaire de 50 Gy avec un complément (« boost ») dans le lit de tumorectomie de 16 Gy. L’irradiation
Mots clés : tridimensionnelle conformationnelle est indispensable pour optimiser l’irradiation des volumes
Cancer du sein cibles (glande mammaire et lit de tumorectomie) et pour épargner les tissus sains (poumon, cœur).
Radiothérapie conformationnelle L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques et radio-anatomiques, les
Volumes cibles facteurs pronostiques et enfin, les modalités de l’irradiation conformationnelle du cancer du sein sans
Atlas atteinte axillaire ; illustrés par un cas clinique.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: Breast cancer is the most common cancer in women. In France, breast cancer incidence was 88.9 per 100,000
Early breast cancer women in 2000. Early detection of breast tumours by screening mammography allows a breast conserving
Conformal irradiation treatment, i.e., breast irradiation preceded by a lumpectomy and a sentinel node biopsy. The standard
Target volumes irradiation of early breast cancers consists in delivering 50 Gy to the whole breast in 2 Gy fractions over a
Atlas five-week period followed by an additional dose targeting the tumour bed of 16 Gy in eight fractions. The
3D-conformal treatment planning optimizes dose distribution to the whole breast and to the tumour bed
and lessens the normal tissue irradiation (heart and ipsilateral lung). The aim of this article is to describe
epidemiologic, radio anatomic and prognostic features of early stage breast cancer and to propose guidelines
for 3D-conformal treatment planning in early breast cancers. This review is illustrated by a case report.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All
rights reserved.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

* Correspondance.
Adresse e-mail : bourgier@igr.fr (C. Bourgier)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S128 I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135

1. Épidémiologie 2.1. Indications de la radiothérapie

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la 2.1.1. Facteurs de risque de récidive locale
femme avec plus d’un million de nouveaux cas par an dans le
monde, soit 22 % de l’ensemble des cancers diagnostiqués chez La récidive loco-régionale est un facteur de risque indépendant
la femme et un taux d’incidence standardisé sur la population de survenue de métastases à distance et de mortalité par cancer.
mondiale de 88,9 pour 100 000 femmes. Il s’agit du cancer le C’est par conséquent une des complications les plus redoutées après
traitement conservateur [54]. De nombreux paramètres cliniques
plus fréquemment observé, avec une incidence de 35,7 % des
et histologiques ont été jusqu’à présent décrits comme facteurs de
cancers féminins en 2000 [51]. En France, l’incidence augmente
risque de récidive locale, dont les principaux sont la jeunesse de la
avec 42,000 nouveaux cas de cancers du sein invasifs en 2000
patiente, les marges d’exérèse incomplètes, une composante intra-
contre 35,000 en 1995 [40, 51].
canalaire extensive [3, 22, 4, 34], mais aussi un grade histologique
Il représente la première cause de décès par cancer dans
élevé, la présence d’engainements périnerveux ou d’emboles vas-
le monde avec plus de 370,000 par an, soit 14 % des décès par
culaires, la taille tumorale [13, 25, 28, 38]. Toutefois, aucun d’entre
cancer chez les femmes avec un taux de mortalité standardisé sur eux ne permet actuellement d’individualiser une population à haut
la population mondiale de 19,7 pour 100,000 [2, 51]. En France, risque de récidive locale. Il en est de même pour l’utilisation de
c’est également la première cause de décès par cancer chez la nomogramme (IBTR, Ipsilateral Breast Tumor Reccurence) qui n’est
femme, avec 11,637 en 2000 [51]. Le taux de mortalité augmente correct que pour la population à faible risque de récidive [45, 52].
en particulier dans la tranche d’âge 50-80 ans avec un rapport D’autres outils sont nécessaires, en particulier, des outils prédictifs
incidence/mortalité de 3,7 [40]. Ce rapport incidence/mortalité et pronostiques biologiques. Récemment, la classification intrinsè-
reflète l’amélioration du dépistage et des thérapeutiques [40]. que par Tissue-Micro-Array, i.e. cancers du sein de type luminal A et
En France, le dépistage par mammographie du cancer du sein B, basal-like ou surexprimant l’oncoprotéine Her2, met en exergue
a débuté en 1980 et ne concernait que certains départements un risque de récidive locale plus grand dans le sous-type basal-like
pour finalement se généraliser depuis 2004 [46]. Ce dépistage ou surexprimant Her2 [41]. D’autres signatures génomiques, telles
systématique concerne les femmes âgées de 50 à 74 ans et que « Wound Signature », permettraient également d’individualiser
une population à haut risque de récidive locale [42].
consiste en une mammographie de contrôle tous les deux ans
[46] avec des indices de performance proches des recommanda-
2.1.2. Irradiation de l’ensemble de la glande mammaire
tions du programme Europe contre le cancer [18, 47] : en 2003,
le taux de prévalence des carcinomes intracanalaires était de
Depuis de nombreuses années, le traitement de référence des
14,3 % et celui d’incidence de 14,5 % avec des recommandations
cancers du sein de stade précoce est le traitement conservateur par
européennes de l’ordre de 10 à 20 % des cancers [18, 47]. En
tumorectomie, ganglion sentinelle/curage axillaire et irradiation
2003, le programme de dépistage a permis de détecter 35,3 % postopératoire de l’ensemble de la glande mammaire de 50 Gy,
des cancers invasifs de taille inférieure ou égale à dix millimètres en 25 fractions et cinq semaines [14]. De nombreux essais ont
parmi tous les cancers diagnostiqués, dont 71 % de cancers sans comparé traitement conservateur et mastectomie tels que le B06
atteinte ganglionnaire [18, 47]. La détection précoce des cancers du NASBP (National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project) et
du sein grâce à la politique du dépistage systématique contribue l’essai randomisé mené par Veronesi et al. Ces essais ne montrent
à la baisse de la mortalité spécifique du cancer du sein [9] en plus aucune différence en termes de survie globale à 20 ans [24, 53].
de l’amélioration des possibilités thérapeutiques. La radiothérapie adjuvante des cancers de petit stade joue un
rôle majeur dans leur contrôle local en réduisant le risque relatif de
récidive locale de 66 %. Ainsi, ce gain de 20 % sur le risque de récidive
2. Classification locale à 15 ans se traduit par une diminution du taux de mortalité
spécifique de 5.1 %. Plus concrètement, pour quatre rechutes locales
La nouvelle classification clinique TNM/AJCC des cancers du après cinq ans, un décès sera évité après 15 ans [14].
sein de 2002 [47] tient compte de la clinique et de l’histologie.
La classification clinique est résumée dans le tableau 1. La 2.1.3. Irradiation du lit de tumorectomie
classification histopathologique est individualisée par le préfixe
Historiquement, d’après des modélisations mathématiques, il
« p » : (i) pT pour tumeur primitive dont la classification pT est
a été montré dès 1985 qu’au-delà de 35 Gy délivrés dans le sein,
superposable à la classification T et ne mesure que la taille de la
l’apport d’un complément de dose de 15 Gy diminuait de 2/3
tumeur avec une composante invasive. Par exemple, s’il existe
le risque de récidive locale des cancers du sein [5]. Plus récem-
une tumeur de grande taille mais avec une faible composante
ment, l’essai de l’EORTC (European Organization for Research and
invasive (< 5 mm), la tumeur est alors codée pT1a. En cas de
Treatment of Cancer) 22881-10882 a démontré qu’un complément
chimiothérapie néo-adjuvante le préfixe « y » est utilisé ; (ii) pN d’irradiation de 16 Gy dans le lit de tumorectomie permettait
pour adénopathies régionales (Tableau 2) dont la classification est un meilleur contrôle local. En effet, à tout âge, cette irradiation
réalisée d’après l’analyse de l’exploration ganglionnaire axillaire focalisée sur le lit de tumorectomie diminuait de 50 % le risque de
(curage axillaire avec ou sans exploration du ganglion sentinelle). récidive locale à cinq et dix ans (à cinq ans, taux cumulatifs d’in-
Si seule l’exploration du ganglion sentinelle a été effectuée, on cidence de rechute locale de 7,3 % contre 4,3 % pour les patientes
lui assigne les lettres (sn) pour « ganglion sentinelle ». respectivement sans et avec boost [8] et à 10 ans, taux de récidive
I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135 S129

Tableau 1
Classification TNM
TNM classification.

Tumeur primitive (T)

Tx La tumeur primitive ne peut être évaluée

T0 Absence de tumeur primitive


décelable
Tis Carcinome in situ

T1 T1 mic micro-invasion ≤ 0,1 cm dans sa plus grande dimension


Soit, T ≤ 2 cm
dans sa plus grande dimension T1a 0,1 cm < T ≤ 0,5 cm dans sa plus grande dimension

T1b 0,5 cm < T ≤ 1 cm dans sa plus grande dimension

T1c 1 cm < T ≤ 2 cm dans sa plus grande dimension

T2 2 cm < T ≤ 5 cm dans sa plus grande dimension

T3 T > 5 cm dans sa plus grande dimension

T4 T4a extension à la paroi thoracique sans inclusion du muscle pectoral


Soit, tumeur de toute taille avec extension
directe à la paroi thoracique (a) T4b œdème (y compris peau d’orange) ou ulcération de la peau du sein
ou à la peau (b) ou nodule de perméation cutané localisé sur le même sein
T4c association T4a et T4b

T4d carcinome inflammatoire

Adénopathies régionales (N)

Nx Les adénopathies régionales ne peuvent être évaluées

N0 Absence d’adénopathie régionale métastatique

N1 Adénopathie(s) métastatique(s) axillaire(s), homolatérale(s) mobile(s)

N2 N2a Adénopathies métastatiques axillaires homo latérales fixées entre elles ou à une autre structure
Adénopathies métastatiques
axillaires homolatérales
fixées N2b Adénopathies métastatiques mammaires internes homo latérales mis en évidence au travers des techniques
entre elles ou indurées d’imageries (sauf lympho-scintigraphie)
N3 N3a Adénopathies métastatiques infra-claviculaires homo latérales avec ou sans adénopathies métastatiques
Adénopathies métastatiques axillaires ou adénopathies métastatiques mammaires internes
infra claviculaires homo- N3b Adénopathies métastatiques mammaires internes homo latérales avec adénopathies métastatiques axillaires
latérales
N3c Adénopathies métastatiques supra-claviculaires homo latérales

Métastases à distance (M)

Mx Les métastases à distance ne peuvent être évaluées

M0 Absence de métastases à distance

M1 Existence de métastases à distance

locale de 10,2 % contre 6,2 % respectivement avec et sans boost [17, de traitement avec un pas de coupes de 2 à 4 mm, allant de la
23, 44]. La différence était plus forte pour les patientes de moins mandibule jusqu’en dessous des coupoles diaphragmatiques.
de 40 ans [8, 17, 23]. L’étude « Young boost », en cours, compare des
boosts de 26 Gy et de 16 Gy chez les patientes de mois de 50 ans 2.2.2. Radio anatomie du sein et du lit de tumorectomie –
atteintes de cancer du sein à haut risque de récidive locale [7]. Détermination des volumes cibles

2.2. Modalités de l’irradiation tridimensionnelle 2.2.2.1. La glande mammaire en totalité (Fig. 1)


conformationnelle dans les cancers du sein de stade
précoces Le volume mammaire est défini cliniquement et radiolo-
giquement. Les contours cliniques du sein sont repérés par la
2.2.1. Positionnement de la patiente et acquisition des images palpation et matérialisés par des fils radio-opaques (Fig. 1), repè-
pour la planification de l’irradiation tridimensionnelle res utiles facilitant la délinéation de la glande mammaire sur les
conformationnelle coupes scanographiques [27]. Le volume cible anatomoclinique
(CTV, Clinical Target Volume) de la glande mammaire (Figs. 2-6)
La position de traitement de la patiente consiste à placer est délimité par :
celle-ci en decubitus dorsal sur un plan incliné, les deux bras — (I) en avant, 5 mm en dessous du contour cutané ;
relevés au-dessus de la tête. Une scannographie dosimétrique — (II) en arrière, la face supérieure du muscle pectoral et des
sans injection de produit de contraste est alors réalisée en position côtes ;
S130 I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135

Tableau 2
Classification histopathologique du statut ganglionnaire.
Histopathologic node involvement classification.

pNx Les adénopathies régionales ne peuvent être évaluées


pN0 Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée
pN0(i–) Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, IHC négative
pN0(i+) Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, IHC positive, absence de groupe IHC+ >
0,2 mm : cellules isolées
pN0(mol–) Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, technique moléculaire négative
pN0(mol+) Absence d’adénopathie régionale métastatique histologiquement démontrée, technique moléculaire positive
pN1 Métastases atteignant 1 à 3 ganglions axillaires et/ou mammaires internes avec atteinte microscopique mis en évidence par biopsie
du ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement
pN1mi Micro-métastases 0,2 < mi < 2 mm
pN1a Métastases atteignant 1 à 3 ganglions axillaires
pN1b Métastases atteignant les ganglions mammaires internes avec atteinte microscopique mis en évidence par biopsie du
ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement
pN1c Métastases atteignant les ganglions axillaires et mammaires internes avec atteinte microscopique mises en évidence par
biopsie du ganglion sentinelle mais non apparente cliniquement
pN2 Métastases atteignant 4 à 9 ganglions axillaires.

pN2a Métastases atteignant 4 à 9 ganglions axillaires (avec au moins un foyer tumoral > 2 mm)
pN2b Métastases atteignant les ganglions mammaires internes de façon cliniquement apparente sans atteinte métastatique
des ganglions axillaires
pN3 Métastases atteignant au moins 10 ganglions axillaires
pN3a Atteinte métastatique ≥ 10 ganglions axillaires (avec au moins un foyer tumoral > 2 mm) ou métastases ganglionnaires
infra-claviculaires
pN3b Métastases cliniquement apparentes dans les ganglions mammaires internes homo latéraux avec présence d’au moins
1 ganglion axillaire positif ou métastases atteignant plus de 3 ganglions axillaires et ganglions mammaires internes avec
atteinte microscopique mis en évidence par biopsie du ganglion sentinelle mais non cliniquement apparente
pN3c Métastases atteignant les ganglions supra-claviculaires homo-latéraux

— (III) en dedans, la racine interne clinique (matérialisée par un 2.2.3. Détermination des organes à risque – cœur et poumon
fil radio-opaque) et radiologique ; homolatéral
— (IV) en dehors, la racine externe clinique (matérialisée par un
fil radio-opaque) et radiologique ; Le contour du cœur est délimité en haut sur la coupe passant par
— (V) en haut, la limite supérieure clinique et prolongement axillaire l’artère pulmonaire et en bas sur la coupe passant par la pointe car-
de la glande mammaire (matérialisée par un fil radio-opaque) ; diaque (Figs. 15-24). Les stations de délinéation sont généralement
— (VI) en bas, la limite inférieure clinique et sillon sous-mam- équipées d’une délinéation automatique des poumons.
maire (matérialisée par un fil radio-opaque). Le volume cible
prévisionnel (PTV, Planning Target Volume) est une expansion 2.2.4. Planification du traitement : dose/fraction,
du volume cible anatomoclinique de 5 mm dans toutes les dose totale et contraintes de dose des volumes cibles
directions de l’espace. et des organes à risque

2.2.2.2. Le lit de tumorectomie (Figs. 7-14) 2.2.4.1. Fractionnement, dose totale, étalement classique

Le lit tumoral est préférablement repéré sur la scanographie Selon les dernières recommandations de Saint Paul de Vence
dosimétrique par : et de Saint Gallen, après traitement chirurgical conservateur des
— (I) l’existence d’un remodelage cicatriciel intramammaire cancers du sein de petit stade, une irradiation de l’ensemble de
postopératoire ; la glande mammaire de 50 Gy et un complément d’irradiation
— et/ou (II) d’une cavité de sérum postopératoire et préférentiel- du lit tumoral de 10 à 16 Gy sont indispensables, étalés sur six
lement par la mise en place de clips chirurgicaux placés aux et demi à sept semaines.
quatre extrémités du lit de tumorectomie [1,21,36].
En effet, le repérage clinique est insuffisant et peut être source 2.2.4.2. Organes à risque et contrainte de dose
d’erreur [10]. D’autres outils radiologiques peuvent être utilisés
pour repérer le lit de tumorectomie telles que l’échographie qui — Lors d’une planification bidimensionnelle, deux paramètres
visualise nettement la cavité chirurgicale immédiatement après sont à prendre en considération : la CLD, Central Lung Distance,
l’opération. Cependant, cet examen est moins fiable à distance qui doit être au maximum de deux centimètres ; et la MHD,
de la chirurgie [36]. Maximum Heart Distance qui doit être inférieure ou égale à
un cm. Lorsque la CLD est mesurée à 2 cm, le volume pulmo-
naire moyen irradié est de 10 à 12 % [15].
— Lors d’une planification tridimensionnelle conformationnelle :
le volume du poumon homolatéral qui reçoit plus de 20 Gy
I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135 S131

doit être inférieur à 15 % du volume pulmonaire (V20 Gy 97-13 du Radiation Therapy Oncology Group (RTOG) [26]. Seule
< 15 %) et le volume qui reçoit une dose égale ou supérieure l’étude menée par Pommier et al. a montré l’efficacité du Calendula
à 30 Gy inférieure à 10 % (V30 Gy < 10 %). En ce qui concerne officinalis dans la prévention de la toxicité de grades 2 et 3 [43].
l’irradiation cardiaque, il est primordial que la dose moyenne
et maximale soit la plus faible possible [15]. 3.2. Toxicité tardive

2.2.4.3. Balistique (Fig. 25-30) 3.2.1. Facteurs de risque de survenue d’effets secondaires tardifs

L’irradiation du sein se fait par deux faisceaux tangentiels Différents facteurs sont impliqués dans la genèse de ces
opposés, en technique distance source-peau (DSP) ou distance complications tardives radio-induites. Ils sont soit dépendants
source-axe (DSA) dont la balistique est adaptée et personnalisée du patient :
en prenant en compte les contraintes dosimétriques énoncées — (I) génétiques tels que le déficit de la réparation de l’ADN
ci-dessus. Les limites des faisceaux tangentiels sont : [11, 35] ;
— (I) en haut, l’extrémité inférieure de la clavicule, qui peut être — (II) ou peuvent être liés à des « comorbidités » préexistantes
matérialisée par un fil radio-opaque si besoin ; telles que l’obésité, les anomalies de la vascularisation (hyper-
— (II) en bas, 1 à 2 cm sous la glande mammaire ; tension artérielle, diabète) ou maladies du collagène ;
— (III) en dehors, 1 cm en dehors de la racine externe de la glande — (III) et enfin l’âge de la patiente.
mammaire ; Il existe également des facteurs de risque liés au traitement :
— (IV) en dedans, 1 cm en dedans de la racine interne de glande — (I) par irradiation, tels que la dose totale, la dose par fraction,
mammaire. le volume traité [19, 33, 48-50] ;
Le complément d’irradiation sur le lit de tumorectomie est — (II) les antécédents de chirurgie ;
délivré soit par deux faisceaux tangentiels de photons, opposés — (III) l’association concomitante de chimiothérapie ou hormo-
ou non, en technique DSP ou DSA, ou par un faisceau direct nothérapie [6, 20, 37].
d’électrons.
3.2.2. Toxicité cutanée et sous-cutanée
3. Toxicité de la radiothérapie
La toxicité cutanée et sous-cutanée est de type télangiectasies,
L’ensemble de la toxicité est classé à l’aide de l’échelle de hyperpigmentation ou dépigmentation. Elle peut se manifester
toxicité CTCAE v4 (Common Terminology Criteria for Adverse par de la fibrose sous-cutanée et/ou graisseuse, pouvant aller de
Events, version 4.0) (http : //ctep.cancer.gov/protocoldevelop- la simple induration du lit de tumorectomie à une rétraction de
ment/electronic_applications/docs/ctcaev4.pdf). la glande mammaire. Le taux d’incidence de cette fibrose radio-
induite dépend essentiellement du degré d’hétérogénéité au sein
3.1. Toxicité aiguë de la radiothérapie du volume mammaire, allant de 6 % chez les patientes ayant un
petit volume mammaire à 39 % chez les patientes ayant un volume
La toxicité aiguë est essentiellement cutanée sous la forme mammaire important [39]. Les télangiectasies surviennent après
d’érythème qui survient à partir d’une dose de 25 à 30 Gy, rare- une toxicité cutanée aiguë sévère telle que la desquamation
ment plus sévère à type de desquamation humide ou sèche [17, exsudative et sont très souvent localisées dans le sillon sous-
23], et n’entraîne qu’exceptionnellement une perte de substance mammaire [23]. Les facteurs de risque sont essentiellement
(Tableau 3). Le maximum de dépôt de dose pour les rayonnements une dose totale et des doses par fractions fortes dans un large
de haute énergie est situé à 0,5 à 4 cm de la surface cutanée. Ceci volume mammaire. La radiothérapie peut favoriser la survenue
permet de limiter les réactions aiguës au cours de la radiothérapie de cytostéatonécrose (15-25 %) en induisant des lésions des petits
en étalement et fractionnement classiques jusqu’à 66 Gy. vaisseaux avec occlusion de leur lumière centrale et induire ainsi
Il n’existe pas à l’heure actuelle de recommandation concernant des lésions ischémiques des tissus avoisinants. Cependant, la
la prise en charge de cette toxicité aiguë, que ce soit en situation survenue de cytostéatonécrose est multifactorielle, associant le
préventive ou en curative [12]. La Biafine® ne semble pas prévenir traumatisme chirurgical et la radiothérapie [16].
l’apparition de ces effets aigus de la radiothérapie d’après l’étude
3.2.3. Toxicité cardiovasculaire
Tableau 3
Échelle d’évaluation de la toxicité cutanée aiguë selon la CTCAE v4.0
Dermatitis radiation scale according to the CTCAE v4.0 La toxicité cardiovasculaire survient essentiellement après
Grade 0 Absence de toxicité irradiation des cancers du sein gauche [30]. Cette toxicité se mani-
Grade 1 Érythème débutant, épithélite desquamative sèche feste par divers symptômes : péricardite chronique obstructive,
Grade 2 Érythème modéré à intense, dépilation, oedème modéré, myocardite, atteinte coronarienne, valvulopathies, troubles de la
épithélite exsudative limitée aux plis cutanés conduction et survient après un délai médian de 10-15 ans [31]. La
Grade 3 Épithélite exsudative confluente, ou en dehors des plis méta-analyse de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists Collaborative
cutanés, oedème important, saignement provoqué par
un traumatisme modéré ou une abrasion cutanée Group) a rapporté que l’excès de mortalité cardiaque secondaire à
Grade 4 Nécrose cutanée, ulcération de toute l’épaisseur la radiothérapie est estimé à 4 % après un recul de plus de 15 ans.
du derme, saignement spontané dans les champs Toutefois, cette estimation a été effectuée chez des patientes
d’irradiation
traitées dans les années 1980 avec des techniques d’irradiation qui
Grade 5 Décès
sont de nos jours dépassées [14]. Cet excès de mortalité cardiaque
S132 I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135

sera probablement inférieur grâce à l’avènement des nouvelles canalaire infiltrant de 12 mm, de grade E.E. I (2.2.1), dont 100 %
technologies. La toxicité cardiaque est directement liée au volume des cellules exprimaient des récepteurs aux estrogènes, 90 % ceux
cardiaque irradié, à la dose délivrée, à la technique de traitement, à la progestérone, mais n’exprimaient pas Her2, sans atteinte
à l’énergie et à l’association de chimiothérapie [15]. ganglionnaire (1GS-/1GS). L’indication d’une radiothérapie
adjuvante a été posée et prévoyait de délivrer :
3.2.4. Toxicité pulmonaire — 50 Gy en 25 fractions dans l’ensemble de la glande mammaire
droite ;
La toxicité pulmonaire, sous forme de fibrose qui apparaît 6 à — suivi de 16 Gy en huit fractions dans le lit de tumorectomie
24 mois après le traitement et s’accompagne d’une réduction limitée (quadrant inféro-interne).
mais irréversible de la fonction respiratoire [29]. L’incidence varie Lors de la planification du traitement, la patiente a été infor-
de 9 à 30 % avec comme principaux facteurs favorisants, le volume mée des effets secondaires aigus et tardifs de la radiothérapie :
irradié, la fonction respiratoire avant la radiothérapie, le territoire fibrose mammaire, cytostéatonécrose, pneumopathie, second
pulmonaire irradié et l’antécédent de chimiothérapie [32]. cancer… Le repérage dosimétrique a été effectué à l’aide d’un
scanographe dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan
3.2.5. Second cancer incliné en décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de la
glande mammaire, des fils radio-opaques ont été apposés à la
L’incidence des cancers radio-induits est rarissime (< 2/1 000) et se peau, délimitant cliniquement le volume de la glande mammaire,
caractérise par l’apparition d’un nouveau cancer de type histologique l’induration postopératoire, la cicatrice de tumorectomie.
différent du cancer primitif dans les territoires irradiés. La dernière La planification tridimensionnelle conformationnelle a
méta-analyse de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists Collaborative commencé par la délinéation de la glande mammaire, du lit
Group) a montré une augmentation du risque de second cancer de tumorectomie visualisé par la mise en place de quatre clips
après radiothérapie, en particulier de cancer du poumon [Hazard chirurgicaux aux quatre points cardinaux de la tumorectomie
Ratio (HR) = 1,61], de cancer de l’œsophage (HR = 2,06), de leucémie (Figs. 1-14) et aussi la délimitation des organes à risque, à savoir
(HR = 1,71) et de sarcome des tissus mous (HR = 2,34) [14]. le cœur et les poumons (Figs. 15-24).
La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de traite-
4. Cas clinique ment en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes cibles
et des organes à risque (Figs. 25-30). Elle a ensuite été optimisée
Mme F., patiente âgée de 62 ans, nulligeste, était ménopausée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répartition de la
depuis l’âge de 51 ans avec comme principal antécédent person- dose dans la glande mammaire. La distribution de la dose était,
nel un traitement hormonal substitutif pendant sept ans, arrêté conformément au rapport 62 de l’International commission on
depuis quatre ans. Dans le cadre du dépistage systématique, il radiation units and measurements (ICRU), comprise entre la 95 %
a été découvert une opacité spiculée de 10 mm du quadrant et la 107 % (Figs. 31-38).
inféro-interne du sein droit dont la cytoponction conclut à
la présence de cellules adénocarcinomateuses. Elle a eu une Conflit d’intérêt
tumorectomie droite – ganglion sentinelle (GS) dont l’étude Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
anatomopathologique définitive a mis en évidence un carcinome article.

Figs 2 à 6. Contours de la glande mammaire


(rose).
Mammary gland delineation (pink).
I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135 S133

Figs 8 à 14. Délimitation du lit de tumorectomie


(vert).
Lumpectomy cavity delineation (green).

Figs 15 à 24. Délimitations du poumon homolatéral (jaune), controlatéral (vert) et du cœur (rouge).
Organs at risk delineation (ipsilateral lung in yellow, controlateral lung in green and heart in red).

Fig. 25. Planification tridimensionnelle conformationnelle de l’irradiation de Fig. 27. Planification tridimensionnelle conformationnelle de la
la glande mammaire : faisceau tangentiel interne, TGI (jaune). surimpression du lit de tumorectomie : faisceau d’irradiation interne par
3D-conformal treatment planning: Internal whole breast photon beam (yellow). photons (bleu foncé).
3D-conformal Treatment Planning: Mini-Internal boost photon beam (blue).
S134 I. Ghorbel et al./ Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S127–S135

Fig. 31 à 34. Dosimétrie de l’ensemble de la glande mammaire et du


complément d’irradiation du lit de tumorectomie, coupes transverses.
Dosimetry of whole mammary gland and boost of lumpectomy cavity, axial
CT-slices.
Fig. 30. Planification tridimensionnelle -conformationnelle : Visualisation à
la peau du faisceau d’irradiation de la glande mammaire : tangentiel externe,
TGE (bleu) ; et du complément d’irradiation du lit de tumorectomie : mini-
tangentiel externe (bleu).
Visualization of External whole breast photon beam and of mini-External boost
photon beam on virtual patient view (blue).

Fig. 37. Histogramme Dose – Volume du poumon homolatéral (rose) avec


V20 Gy (Volume recevant 20 Gy et plus) = 5 %, du cœur (jaune) V30 Gy (Volume
recevant 30 Gy et plus) < 1 % et du lit de tumorectomie (vert) D99 % > 65 Gy.
Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (pink) V20 Gy=5 %, heart (yellow)
V30 Gy<1 % and lumpectomy cavity (green) D99 %>65 Gy.

Fig. 35. Dosimétrie de l’ensemble de la glande mammaire et du complément


d’irradiation du lit de tumorectomie, coupe sagittale.
Dosimetry of whole mammary gland and boost of lumpectomy cavity, saggital
CT-slices. Fig. 38. Dose moyenne délivrée au poumon homolatéral, au poumon
controlatéral et au lit de tumorectomie.
Mean ipsilateral and controlateral lung dose and mean boost dose (lumpectomy
cavity).
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Cancer/ R adi ot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S136– S146

Cancer du sein avec atteinte ganglionnaire axillaire


Breast cancer with axillary lymph node involvement

A. Belaida,b, S. Kanouna,c, A. Kallela,d, I. Ghorbela,b, F. Azourya, S. Heymanna, C. Pichenote,


R. Verstraete, H. Marsigliaa,f, C. Bourgiera,*
aDépartement de radiothérapie, Unité fonctionnelle de Sénologie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France.
bService de radiothérapie Carcinologique, institut Salah-Azaiez, Tunis, Tunisie.
cService de radiothérapie, hôpital Farhat-Hached, Sousse, Tunisie.
dUnité de radiothérapie, clinique Ennasr, Cité Ennasr 2, Tunisie.
eDépartement de physique, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France.
fUniversité de Florence, Italie.

INFO ARTICLE RÉSUMÉ

Les figures 2, 3, 5, 7, 8, 10, 12, 14, 16, Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme dans les pays occidentaux avec plus
18, 21, 25, 26, 29, 32, 34, 35, 40 sont d’un million de nouveaux cas par an dans le monde (22 % des cancers diagnostiqués chez la femme)
visibles uniquement sur : http://www. et plus de 370 000 décès par cancer du sein par an (14 % des décès par cancer chez les femmes). Plus
sciencedirect.com/ de la moitié des cancers du sein atteignent les ganglions axillaires lors du diagnostic. La radiothérapie
postopératoire joue un rôle essentiel dans le traitement de ces cancers du sein, en diminuant le
taux de risque de récidive locorégionale de 17 % à 5 ans. Cette réduction du risque de récidive
locorégionale se traduit par une diminution significative de la mortalité spécifique de 5,4 % à 15 ans.
L’irradiation tridimensionnelle conformationnelle inclut comme volumes cibles, la paroi thoracique
Mots clés :
(après mastectomie) ou la glande mammaire et le complément dans le lit de tumorectomie (en cas
Cancer du sein
Radiothérapie conformationnelle
de chirurgie conservatrice) et les aires ganglionnaires de drainage du sein (sus et sous-claviculaire
Volumes cibles ± mammaire interne, ± axillaire). Les principaux organes à risque sont le poumon homolatéral, le
Atlas cœur et le plexus brachial. L’objectif de ce travail est de préciser les particularités épidémiologiques,
radio-anatomiques, le pronostic et les modalités d’irradiation conformationnelle du cancer du sein
avec envahissement ganglionnaire axillaire.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords: Breast cancer is the most frequent cancer of women in western countries. There are one million
Breast cancer new cases per year in the world which represents 22% of all female cancers, and more than 370.000
Conformal irradiation deaths due to breast cancer per year (14% of cancer mortality). More than half of breast cancers are
Target volumes associated with axillary nodal involvement. Post-operative radiation therapy (XRT) is a crucial part of
Atlas locoregional treatment in axillary nodal involvement breast cancer owing to a 15-years risk reduction
of locoregional recurrence of 70% and to a 5.4% risk reduction of specific mortality. In 3D-conformal
irradiation in such breast cancers, target volumes are chest wall when mastectomy was performed

* Correspondance.
Adresse e-mail : bourgier@igr.fr (C. Bourgier)
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146 S137

or breast and boost of tumor bed in case of breast conservative surgery, and supra-clavicular and/or
axillary and/or internal mammary node areas. The main organs at risk are ipsilateral lung, heart and
brachial plexus. The aim of this article is to describe epidemiologic, radio anatomic and prognostic
features of axillary nodal involvement breast cancer and to propose guidelines for 3D-conformal
treatment planning in locally advanced breast cancers. This review is illustrated by a case report.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

1. Épidémiologie 3.2. Facteurs de risque de récidive locorégionale

Le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme dans les 3.2.1. Après chirurgie conservatrice
pays occidentaux. En France, l’âge médian des patientes est de 61
ans avec un taux d’incidence qui croît régulièrement entre 30 et En l’absence de radiothérapie des aires ganglionnaires, les
60 ans [62]. Plus d’un million de nouveaux cas sont annuellement principaux sites de récidives locorégionales chez les patientes
diagnostiqués dans le monde et représentent 22 % de l’ensemble atteintes d’un cancer du sein colonisant les ganglions axillaires
des cancers diagnostiqués chez la femme. Le cancer du sein est sont principalement la glande mammaire (57 %) puis les aires
à l’origine de 14 % des décès par cancer chez les femmes, soit ganglionnaires (25 %) [38]. La jeunesse de la patiente et l’atteinte
plus de 370 000 décès par an dans le monde [1]. L’incidence des tranches de section chirurgicales sont les principaux facteurs
des cancers du sein est de 4 à 10 fois plus élevée dans les pays de risque de récidive locorégionale avec un Hasard Ratio (HR)
occidentaux (États-Unis et Europe du nord principalement) en respectivement de 2,3-2,9 et 1,5-3,5 [2,3,17,29,67] ; mais aussi,
comparaison avec l’Asie et avec l’Afrique [54]. Globalement le un grade histologique élevé, la présence d’engainements périner-
taux standardisé pour la population mondiale varie de 10 à 100 veux ou d’emboles vasculaires et la taille tumorale [10,20,21,39].
pour 100 000 femmes [19]. Aucun de ces facteurs de risque, isolés ou associés ne permet
Plus de la moitié des cancers du sein atteignent les ganglions actuellement d’individualiser une population à haut risque
lors du diagnostic. L’analyse des essais I-IX de l’International Breast de récidive locale. L’apport des outils biologiques, tels que la
Cancer Study Group Trials montre que les cancers du sein d’une classification intrinsèque par Tissue-Micro-Array, i.e. cancers du
taille inférieure à 2 cm envahissent les ganglions axillaires dans sein de type luminal A et B, basal-like ou surexprimant l’onco-
54 % des cas et ceux de plus de 2 cm dans plus de 60 % [32]. protéine Her2, ou la « Wound Signature » pourrait permettre
d’individualiser à l’avenir des populations à haut risque de
récidive locorégionale, et ainsi de proposer à ces patientes des
2. Classification traitements personnalisés (radiothérapie et chimiothérapie
concomitantes…) [43,45].
La classification TNM de l’UICC de1997, révisée en 2002, est
la plus utilisée [55], ses définitions sont décrites dans l’article 3.2.2. Après mastectomie et curage axillaire
de Ghorbel et al. de ce numéro spécial [70].
Après mastectomie, le site de récidive locale est essentiel-
lement pariétal [44,46,47]. Classiquement, après mastectomie
3. Indications de la radiothérapie et curage axillaire, on distingue trois populations à risque de
récidive locorégionale : population à faible risque de récidive
3.1. Généralités locorégionale (taux estimé à moins de 10 %) correspondant
le plus souvent aux cancers du sein sans envahissement
Le traitement standard thérapeutique de ces cancers du sein ganglionnaire ; population à risque intermédiaire de récidive
avec atteinte ganglionnaire, que la chirurgie soit conservatrice locorégionale (taux estimé entre 10 et 20 %) et population à haut
ou non, comprend une chimiothérapie et/ou hormonothérapie risque de récidive locorégionale (taux estimé à plus de 20 %) [48].
et/ou thérapies ciblées, dont les modalités dépendent des carac- L’atteinte ganglionnaire axillaire est le principal facteur de risque
téristiques histologiques définitives. Le traitement locorégional de récidive locorégionale, et plus particulièrement le nombre de
comporte systématiquement une irradiation adjuvante. Après ganglions atteints et le rapport de nombre de ganglions atteints
traitement conservateur, celle-ci diminue significativement le sur celui de ganglions prélevés. La jeunesse de la patiente, la taille
taux de risque de récidive locorégionale de 30,1 % à cinq ans, tumorale, la présence d’emboles vasculaires ou d’engainements
se traduisant par une diminution de la mortalité spécifique de péri-nerveux, le grade tumoral élevé, l’absence d’expression de
7,2 % à 15 ans. Après mastectomie, celle-ci diminue significati- récepteurs hormonaux, la surexpression de l’oncoprotéine Her2
vement le risque de récidive locorégionale de 17,1 % à cinq ans sont également d’autres facteurs de risque de récidive locoré-
se traduisant par une diminution de la mortalité spécifique de gionale [31,32,35,60,63,69]. Bien que ces facteurs pronostiques
5,4 % à 15 ans [11]. cliniques et histologiques soient quotidiennement pris en compte
pour déterminer et définir les indications de radiothérapie après
mastectomie, ils restent insuffisants pour définir son indication.
En effet, les cancers du sein sont composés de plusieurs entités
S138 A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146

[57,64,65] avec des pronostics différents les uns des autres. Ainsi, patientes avec un phénotype luminal (exprimant des récepteurs
à terme, l’utilisation de signature génomique (« bon » contre hormonaux mais non Her2) en se traduisant par une amélioration
« mauvais » profil génomique) pourrait être un outil intéres- du taux de survie globale [35].
sant dans l’aide à la décision des traitements locorégionaux.
Par exemple, chez les patientes traitées par mastectomie sans 3.3.3. Conclusion
radiothérapie adjuvante pour un cancer du sein atteignant de un
à trois ganglions axillaires, le taux de contrôle local est de 100 % Pour conclure, l’indication de radiothérapie après mastecto-
à cinq ans si la signature génomique « de bon profil » contre 47 % mie reste un standard chez les patientes chez qui plus de trois
si elle est « de mauvais profil » [9]. ganglions axillaires sont atteints ; elle est encore débattue dans
le cas contraire. Probablement que l’aire de la biologie nous
3.3. Irradiation après mastectomie permettra de mieux individualiser les groupes de patientes qui
seront traités par irradiation adjuvante.
Les pratiques sont assez disparates en fonction des pays [7] :
autant pour les patientes chez qui plus de quatre ganglions sont
envahis lors du curage axillaire, l’indication de radiothérapie 4. Modalités de l’irradiation tridimensionnelle
pariétale est un standard, en revanche elle est un sujet de conformationnelle dans les cancers du sein
controverse si un à trois sont atteints. de petit stade

3.3.1. Un à trois ganglions axillaires atteints 4.1. Positionnement de la patiente et acquisition des images
pour la planification de l’irradiation tridimensionnelle
Les grands essais randomisés évaluant l’apport de la radio- conformationnelle
thérapie adjuvante après mastectomie montrent une nette
diminution du taux de risque de récidive locorégionale dans cette Une scanographie dosimétrique en vue de la planification
population, de 30 % sans radiothérapie à 7 % après radiothérapie de la radiothérapie est réalisée en position de traitement, i.e. la
[44,46,47,50,51]. Toutefois, l’indication de radiothérapie dans ce patiente est placée en décubitus dorsal sur un plan incliné, les
sous-groupe de patientes est contestée en raison du caractère deux bras relevés au dessus de la tête. Une scanographie dosi-
considéré comme incomplet du curage axillaire (nombre médian métrique sans injection de produit de contraste est alors réalisée
de ganglions prélevés de sept) et avec un taux de risque de réci- en position de traitement avec un pas de coupes de 2 à 4 mm,
dive axillaire nettement inférieur dans les essais avec un curage allant de la mandibule jusqu’en dessous des coupoles diaphrag-
axillaire satisfaisant. Se pose alors la question du rôle curatif de matiques. Des repères métalliques (fil de plomb) peuvent être
la chirurgie si celle-ci était complète. Il en est de même en ce placés sur la patiente afin d’aider le repérage des structures
qui concerne les traitements systémiques, qui sont considérés anatomiques telles que les racines de la glande mammaire, la
aujourd’hui comme insuffisants ou obsolètes dans ces essais. cicatrice de tumorectomie/mastectomie… [27].
L’analyse des essais randomisés comprenant une chirurgie
complète et des traitements systémiques optimaux montre un 4.2. Radio anatomie et détermination des volumes cibles
taux de risque de survenue de récidive locorégionale de 13-16 % (Figs. 1-20)
[33,53,59,68]. Après analyse multifactorielle, l’indication dimi-
nue significativement le taux de risque de récidive locorégionale Les volumes cibles d’intérêt sont ici la glande mammaire suivie
lorsque le rapport du nombre de ganglions atteints sur celui d’un complément d’irradiation du lit de tumorectomie et/ou la
de ganglions prélevés dépasse 50 % [31,32,35,60,63,69]. Pour paroi thoracique ; les aires ganglionnaires (la chaîne mammaire
conclure, est-il éthique ou non d’accepter un taux de risque de interne, l’aire sus et sous-claviculaire ± l’aire axillaire). La radio-
récidive locale de 13-16 % en l’absence de radiothérapie après anatomie de la glande mammaire et du lit de tumorectomie est
mastectomie dans ce sous-groupe de patientes ? développée dans l’article de Ghorbel et al. de ce numéro.

3.3.2. Plus de trois ganglions axillaires atteints 4.2.1. Paroi thoracique

La radiothérapie adjuvante est dans cette population un La cicatrice de mastectomie doit être délimitée et dessinée
standard thérapeutique car elle réduit de 80 % le taux de risque dans son intégralité grâce à la mise en place d’un fil de plomb.
relatif de récidive locorégionale et augmente d’une part, les taux La glande mammaire controlatérale est de préférence délimitée
de survie sans récidive métastatique (HR = 0,78) et de survie par un fil de plomb apposé à la peau. Le volume cible anato-
spécifique [44,46,47,50,51]. Il est important de rappeler que moclinique (CTV, Clinical Target Volume) représente l’ancien
les aires de traitements dans ces essais comprenaient la paroi emplacement de la glande mammaire : (I) en avant, 5 mm en
thoracique, l’aire axillo-sus-claviculaire et la chaîne mammaire dessous du contour cutané ; (II) en arrière, la face supérieure du
interne. Cependant, est-ce vraiment une certitude ? Récemment, muscle pectoral et des côtes ; et en miroir de la glande mammaire
Kyndi et al. ont rapporté, après analyse des blocs tumoraux par controlatérale ; (III) en dedans, la racine interne clinique (maté-
Tissue Micro-Array, que la radiothérapie n’avait aucun impact rialisée par un fil radio-opaque) et radiologique ; (IV) en dehors,
en termes de taux de contrôle local ni de survie globale dans la racine externe clinique (matérialisée par un fil radio-opaque)
le sous-groupe basal-like (RH-/Her2-), alors qu’elle diminuait et radiologique ; (V) en haut, la limite supérieure clinique et
significativement le taux de risque de récidive locorégionale des prolongement axillaire de la glande mammaire (matérialisée
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par un fil radio-opaque) ; (vi) en bas, la limite inférieure clinique cardiaque (Figs. 20-24). Les stations de délinéation sont géné-
et sillon sous-mammaire (matérialisée par un fil radio-opaque). ralement équipées d’une délinéation automatique concernant
Le volume cible prévisionnel (PTV, Planning Target Volume) est les poumons.
une expansion du volume cible anatomoclinique de 5 mm dans
toutes les directions de l’espace. 4.6. Planification du traitement : dose/fraction, dose totale
et contraintes de dose des volumes cibles et des organes
4.2.2. Aire ganglionnaire sus-claviculaire [34,40] (Figs. 1-6) à risque

Le volume cible anatomoclinique est délimité (I) en avant par 4.6.1. Fractionnement, dose totale, étalement classique
une ligne située à 5 mm en dessous du contour cutané, (II) en arrière
par les apophyses vertébrales latérales et la plèvre, (III) en dedans Les modalités d’irradiation des cancers du sein classés
par le tendon du muscle sterno-cléido-mastoïdien, le bord externe pN0i+ et pN1mi ne sont pas traitées dans cette revue, ni les
du lobe thyroïdien, la trachée et l’œsophage, (IV) en dehors par la modalités d’irradiation après chimiothérapie néo-adjuvante.
jonction des deux tiers internes et du tiers externe de la clavicule, (V) Après traitement chirurgical conservateur, une irradiation de
en haut par un plan parallèle à la clavicule, dont la limite supérieure l’ensemble de la glande mammaire à la dose totale de 50 Gy et
correspond à l’articulation acromio-claviculaire (en dessous du un complément dans le lit tumoral de 10 à 16 Gy sont indis-
cartilage cricoïde) et (VI) en bas par un plan parallèle à la clavicule pensables, étalés sur 6,5 à 7 semaines. Après chirurgie radicale,
à hauteur du bord de l’articulation sterno-claviculaire. l’irradiation de la paroi thoracique est prescrite à la dose totale
de 50 Gy en 25 fractions.
4.3. Aire ganglionnaire sous-claviculaire [34,40] (Figs. 7-11) En ce qui concerne l’irradiation des aires ganglionnaires, si le
curage axillaire est considéré comme suffisant, i.e. si plus de dix
Elle correspond au drainage lymphatique allant de la dis- ganglions ont été prélevés, l’irradiation des aires ganglionnaires
section axillaire chirurgicale au sommet de l’aisselle. Le volume intéresse l’aire sus / sous-claviculaire et la chaîne mammaire
cible anatomoclinique est délimité : (I) en avant par le muscle interne à la dose totale de 50 Gy en 25 fractions. L’irradiation
pectoral ; (II) en arrière par le muscle de la fosse antérieure axillaire peut être indiquée : (I) lorsque le curage axillaire est
de l’omoplate ; (III) en dedans par la paroi thoracique ; (IV) en insuffisant ; (II) lorsque le curage axillaire n’a pas été réalisé
dehors par l’aire ganglionnaire axillaire ; (V) en haut par le bord en raison du grand âge de la patiente ou de la présence de
inférieur de la clavicule ; et (VI) en bas par la limite supérieure « comorbidités » faisant craindre un retentissement majeur de
du curage axillaire repéré par des clips chirurgicaux. cette chirurgie axillaire sur la qualité de vie et si la connaissance
du statut ganglionnaire ne modifiera pas le traitement posto-
4.4. Aire ganglionnaire axillaire (Figs. 12-17) pératoire [66].

Le volume cible anatomoclinique est délimité : (I) en avant 4.6.2. Volumes cibles, contraintes de dose
par le muscle pectoral ; (II) en arrière par le muscle de la fosse
antérieure de l’omoplate ; (III) en dedans par la paroi thoracique Les volumes cibles (glande mammaire ou paroi thoracique
(muscle grand dentelé, côtes et plèvre) ; (IV) en dehors par un plan et aires ganglionnaires) doivent recevoir 100 % ± 5 % de la dose
allant du muscle dorsal au pectoral (5 mm en dedans du contour prescrite [24].
cutané, si celui-ci se situe à proximité du contour cutané) ; (V) en
haut par le bord inférieur de la clavicule, dans le prolongement 4.6.3. Organes à risque et contrainte de dose (Figs. 36 et 37)
de l’aire sous-claviculaire et (VI) en bas par la limite supérieure
du prolongement axillaire de la glande mammaire. 4.6.4. Le poumon

4.4.1. Aire ganglionnaire de la chaine mammaire interne Lors d’une planification tridimensionnelle conformation-
[6,34] (Figs. 17 à 20) nelle, l’épaisseur maximale de poumon incluse dans les faisceaux
tangentiels doit être inférieure à 2,5 cm [14,37]. Le pourcentage
Elle se situe autour des vaisseaux de la chaine mammaire du volume pulmonaire homolatéral qui reçoit plus que 20 Gy
interne. Le volume cible anatomoclinique est délimité (I) en (V20 Gy) et plus de 30 Gy (V30 Gy) et la dose moyenne reçue par la
avant par la face postérieure du muscle pectoral, (II) en arrière totalité du poumon homolatéral (DM) sont des facteurs prédictifs
par la plèvre pariétale, (III) en dedans par le bord externe du pour la toxicité pulmonaire [23,52]. Le V20 Gy doit être inférieur à
sternum, (IV) en dehors par l’angle du triangle cellulo-graisseux 31 %, le V30 Gy inférieur à 18 % et la DM inférieure à 20 Gy [52].
formé par le muscle pectoral et la paroi thoracique, (V) en haut
par le bord inférieur de la tête de la clavicule et (VI) en bas par 4.6.5. Le cœur
le troisième espace intercostal.
L’épaisseur maximale de cœur incluse dans le champ d’irradia-
4.5. Détermination des organes à risque – cœur et poumon tion (MHD) est un paramètre prédictif pour la mortalité cardiaque
homolatéral tardive. Une MHD de 11 mm est associée à un taux de risque de
mortalité cardiaque tardive de moins de 1 % [28]. La dose moyenne
Le cœur est délimité en haut sur la coupe passant par l’ar- et maximale reçue par le cœur doivent être la plus faible possible
tère pulmonaire et en bas sur la coupe passant par la pointe (100 % du cœur doivent recevoir moins de 35 Gy) [24].
S140 A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146

4.6.6. Le plexus brachial libre du muscle trapèze ; (II) en inférieur, 1 cm sous l’articulation
sterno-claviculaire ; (III) en dedans, en dedans de la tête de la
Le plexus brachial est un organe à risque à considérer et à clavicule, soit 1 cm en dehors de la ligne médiane ; (IV) en dehors,
repérer en cas d’irradiation sus-claviculaire. La dose maximale débord de 5 mm sur la tête humérale. Les limites du faisceau
délivrée à ce niveau doit être de moins de 55 Gy [56]. axillo-sus-claviculaire postérieur sont (I) en haut, le long du bord
supérieur de la clavicule ; (II) en bas, 1 cm sous l’articulation
4.6.7. Balistique sterno-claviculaire, en limitant la divergence et d’éventuelle
recoupe avec les faisceaux tangentiels ; (III) en dedans, le long du
L’irradiation du sein ou de la paroi se fait par deux faisceaux gril costal en laissant 1 cm de poumon ; (IV) en dehors, débord
tangentiels opposés (inclinaison de l’angle ± 40 à 60 °), en tech- de 5 mm sur la tête humérale. Il est nécessaire d’ajouter des
nique distance source-peau (DSP) ou distance source-axe (DSA) caches afin de protéger le reste de la tête humérale, l’articulation
dont la balistique sera adaptée et personnalisée en prenant en acromio-claviculaire, le larynx, la thyroïde et la moelle épinière.
compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Les Le point de prescription de ce faisceau est à mi-épaisseur.
limites des faisceaux tangentiels sont (I) en haut, l’extrémité
inférieure de la clavicule, qui peut être matérialisée par un fil
radio-opaque si besoin ; (II) en bas, 1 à 2 cm sous la glande 5. Toxicité aigue de la radiothérapie [41]
mammaire ou de la limite inférieure de la paroi thoracique ;
(III) en externe, 1 cm en dehors de la racine externe de la 5.1. Radiodermite
glande mammaire ou de la paroi thoracique ; (IV) en interne,
1 cm en dedans de la racine interne de glande mammaire ou Elle se manifeste vers la 3e-4e semaine de traitement par un
de la paroi thoracique. Le complément d’irradiation du lit de érythème, un œdème et une diminution des sécrétions sébacées.
tumorectomie est délivré soit par deux faisceaux tangentiels À la 5e semaine (vers 45 Gy), il peut exister une desquamation
de photons, opposés ou non, en technique DSP ou DSA, soit un sèche puis exsudative. La ré-épithélialisation débute en général
faisceau direct d’électrons [41]. sept à dix jours après la fin de l’irradiation.
L’irradiation de la chaîne mammaire interne [4] (Figs. 27-30,
32, 40, 43) se fait par un faisceau direct (inclinaison de l’angle ± 0 5.2. Œsophagite
à 15 °), en technique DSP dont la balistique est adaptée et per-
sonnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétriques Elle apparaît à la 2e semaine de traitement lorsque l’œso-
énoncées ci-dessus. Les limites du faisceau de la chaîne mam- phage est inclus dans le champ d’irradiation. Elle se manifeste
maire interne sont (I) en haut, 0,5 cm en dessous du faisceau par une dysphagie plus ou moins importante. Elle se répare
sus-claviculaire antérieur ; (II) en bas, le quatrième espace plus rapidement que la radiodermite et peut être traitée par
intercostal ; (III) en dehors, jointif avec le faisceau tangentiel l’administration d’anti-acides.
interne ; (IV) en dedans, 1 cm en dehors de la ligne médiane du
côté opposé. Le traitement du volume de la chaîne mammaire 5.3. Pneumopathie aigue
interne est un mixage photons et électrons.
L’irradiation des aires ganglionnaires sus et sous-clavicu- Elle apparaît deux à quatre mois après la radiothérapie,
laire (Figs. 26, 30) se fait par un faisceau direct de photons souvent asymptomatique et de découverte radiologique. Elle
(inclinaison de l’angle + /- 10 à 15 ° afin d’épargner la moelle peut s’accompagner de signes fonctionnels (toux, dyspnée,
épinière), en technique DSP dont la balistique sera adaptée et fièvre). Dans les cas les plus sévères, un tableau de pneumopathie
personnalisée en prenant en compte les contraintes dosimétri- interstitielle diffuse peut survenir, faisant intervenir un œdème
ques énoncées ci-dessus. Les limites du faisceau sus-claviculaire interstitiel pulmonaire avec réduction de l’espace alvéolaire
sont (I) en haut, le sommet de la clavicule, soit 1 cm sous le bord favorisant les surinfections.
libre du muscle trapèze ; (II) en bas, 1 cm sous l’articulation
sterno-claviculaire ; (III) en dedans, en dedans de la tête de 5.4. Péricardite aigue
la clavicule, soit 1 cm en dehors de la ligne médiane ; (IV) en
externe, 1 cm en dedans de la tête humérale. Il est nécessaire Elle est observée pendant ou peu après la radiothérapie,
d’ajouter des caches afin de protéger la tête humérale, le larynx, et est marquée par une douleur thoracique, une fièvre et des
la thyroïde et la moelle épinière. Le point de prescription de signes électrocardiographiques. La survenue d’un épanchement
ce faisceau est généralement de 2 à 3,5 cm de profondeur en péricardique n’est pas constante.
fonction de l’épaisseur du creux sus / sous-claviculaire de la
patiente [40].
Lorsque l’irradiation axillaire est indiquée (Figs. 38, 39, 41,42), 6. Toxicité tardive
celle-ci se fait par deux faisceaux opposés antéro-postérieurs
(faisceau antérieur incliné de ± 10 à 15 ° afin d’épargner la moelle 6.1. Facteurs de risque de survenue d’effets secondaires
épinière et faisceau postérieur incliné de 180 °), en technique tardifs
DSA dont la balistique est adaptée et personnalisée en prenant
en compte les contraintes dosimétriques énoncées ci-dessus. Différents facteurs sont impliqués dans la genèse de ces
Les limites du faisceau axillo-sus-claviculaire antérieur sont (I) complications tardives radio-induites. Ils sont soit dépendants
en haut, le sommet de la clavicule, soit 1 cm en dessous du bord du patient : (I) génétiques tels que le déficit de la réparation
A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146 S141

de l’ADN [8,30] ; (II) ou peuvent être liés à des « comorbidités » risque de complications cardiaques radio-induites [22] et l’asso-
préexistantes telles que l’obésité, les anomalies de la vascula- ciation de chimiothérapies cardio-toxiques, même administrées
risation (hypertension artérielle, diabète) ou les maladies du à distance de la radiothérapie, peut accroître la gravité de ces
collagène ; (III) et enfin l’âge de la patiente. Il existe également complications.
des facteurs de risque liés au traitement : (I) par irradiation, tels
que la dose totale, la dose/fraction, le volume traité [15,26,58,61] ; 6.6. Cancer radio-induit
(II) antécédent de chirurgie ; (III) association concomitante de
chimiothérapie ou hormonothérapie [5,16,36]. L’incidence des cancers radio-induits, c’est à dire de cancers
de type histologique différent du cancer primitif dans les territoi-
6.2. Toxicité cutanée et sous-cutanée res irradiés est très faible (< 2/1000). La dernière méta-analyse
de l’EBCTCG (Early Breast Cancer Trialists’Collaborative Group)
Elle se traduit par une peau atrophique, sèche, dépigmentée a montré une augmentation du risque de second cancer après
et parsemée de télangiectasies. Elle est souvent associée à une radiothérapie, en particulier de cancer du poumon (HR = 1,61),
fibrose sous-cutanée. Elle s’observe pour des doses de plus 60 Gy. de cancer de l’œsophage (HR = 2,06), de leucémie (HR = 1,71),
Le principal risque est la nécrose cutanée, qui se manifeste par de sarcome des tissus mous (HR = 2,34) [11]. Le risque de cancer
une ulcération atone de cicatrisation difficile et pouvant nécessi- bronchique radio-induit pourrait être augmenté, notamment en
ter dans les cas extrêmes une greffe ou une plastie cutanée [41]. cas de tabagisme associé (HR = 3,08) [49].
Le taux d’incidence de la fibrose mammaire après traitement
conservateur du sein a été évalué à 20,8 % dans une étude 22881- 6.7. Toxicité neurologique
10882 de l’European Organization for Research and Treatment of
Cancer [13]. Les principaux facteurs de risque identifiés sont La plexite radique se manifeste par des douleurs et/ou des
l’existence d’un œdème ou d’un hématome postopératoire dans déficits sensitivo-moteurs et peut survenir pour une dose de
le sein, la chimiothérapie concomitante, la dose totale délivrée plus de 55 Gy délivrée en cinq semaines [41,56].
dans la glande mammaire et la faible énergie des photons utilisée
(≤ 6MV). 6.8. Toxicité osseuse

6.3. Lymphœdème Les ostéonécroses s’observent pour une dose totale de 60 à


70 Gy. Leur fréquence et leur gravité sont liées à l’importance du
Il se manifeste par une augmentation de la circonférence volume osseux irradié. Des fractures spontanées de côtes ou de
du bras homolatéral au sein traité. Le taux d’incidence du la clavicule peuvent s’observer pour une dose de 65 Gy [41].
lymphœdème du membre supérieur après curage axillaire de
niveau I ou II, suivie ou non de radiothérapie est d’environ 4 %. Le
principal facteur de risque impliqué dans ce cas est l’irradiation 7. Cas clinique 1
axillo-sus-claviculaire [12].
Mme… R., patiente de 54 ans, sans antécédents familiaux
6.4. Toxicité pulmonaire particuliers, ménarche à l’âge de 15 ans, mère de deux enfants
âgés de 22 et 25 ans, ménopausée à l’âge de 45 ans, n’ayant
Elle se manifeste à la fin de la première année suivant le trai- jamais pris de traitement hormonal substitutif, s’est autopalpée
tement et se traduit par une perte de l’élasticité pulmonaire avec un nodule du quadrant supéro-externe du sein droit. À l’examen
dyspnée et altération progressive des fonctions respiratoires. La clinique (taille du soutien gorge : 85 B), il y avait un nodule
radiographie pulmonaire montre un syndrome interstitiel. Les d’environ 30 × 20 mm du quadrant supéro-externe du sein droit
signes évoluent progressivement en un à deux ans, avant de se et les aires ganglionnaires étaient libres. Une biopsie de ce nodule
stabiliser. Leur fréquence et leur intensité sont proportionnelles a mis en évidence un carcinome canalaire infiltrant de grade
au volume pulmonaire irradié, à la dose totale [18,42], à la dose II (3,2,1). Une chimiothérapie néo-adjuvante a été proposée,
par fraction (le risque augmentant rapidement au-dessus de 2 mais après discussion, la patiente a opté clairement pour une
Gy). Les lésions pulmonaires sont de plus favorisées par une mastectomie totale droite et curage axillaire sans traitement
bronchite chronique ou un emphysème et par certains agents systémique initial. L’examen anatomo-pathologique définitif
de chimiothérapie [37,41]. a conclu à la présence d’un carcinome canalaire infiltrant de
21 mm, de grade II (2,2,2), les tranches de section chirurgicales
6.5. Toxicité cardiaque étaient saines, 90 % des cellules exprimaient des récepteurs
aux estrogènes, 100 % des récepteurs à la progestérone, il n’y
Il s’agit essentiellement de cardiopathies ischémiques, avait pas de surexpression de Her2 et un ganglion axillaire
d’insuffisances cardiaques et de valvulopathies [25]. Le risque était envahi sur 18. La patiente a reçu trois cycles de FEC100
de maladies cardio-vasculaires après irradiation est 1,3 fois (épiribicine-5-fluoro-uracile cyclophosphamide) suivis de trois
supérieur à celui de la population générale. L’irradiation mam- cycles de Taxotère®. Trois à quatre semaines après le dernier
maire interne augmente significativement le risque d’affection cycle de chimiothérapie, a été débutée une radiothérapie 50 Gy
coronarienne de 7 à 18 % et celui d’infarctus du myocarde de 3 à en 25 fractions et cinq semaines de la paroi thoracique droite, de
9 % [63]. Par ailleurs, la dose totale, la technique d’irradiation, la chaîne mammaire interne droite et du creux sus-claviculaire
une anatomie défavorable de la patiente sont des facteurs de droit. Lors de la planification du traitement, la patiente a été
S142 A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146

prévenue du risque de survenue d’éventuels effets secondaires récepteurs hormonaux étaient exprimés (dans 40 % des cellules
aigus et tardifs de la radiothérapie. pour les estrogènes et 20 % pour la progestérone), il n’y avait pas
Le repérage dosimétrique a été effectué par un scanographe de surexpression de Her2, 16 ganglions sur 17 étaient atteints,
dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan incliné en dont dix avec rupture capsulaire.
décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de la cicatrice La patiente a reçu quatre cycles de FEC100 (épiribicine ;
de mastectomie et de la glande mammaire controlatérale, des fils 5-fluoro-uracile cyclophosphamide) suivis de quatre cycles
radio-opaques ont été apposés à la peau, délimitant cliniquement de Taxotère®. Trois à quatre semaines après le dernier cycle
la cicatrice de mastectomie et le volume de la glande mammaire de chimiothérapie, a été débutée une radiothérapie de 50 Gy
controlatérale. en 25 fractions et cinq semaines de l’ensemble de la glande
La planification tridimensionnelle conformationnelle (Fig. 25) mammaire gauche suivie d’un complément de 16 Gy dans le lit
a compris la délinéation des différentes aires ganglionnaires de tumorectomie, et de 50 Gy en 25 fractions et cinq semaines
(sus-claviculaire, sous-claviculaire, chaîne mammaire interne, des aires ganglionnaires (chaîne mammaire interne gauche
(Fig. 1-11) et 17-20 (Fig. 18) ainsi que la délimitation des organes et aire axillo-sus-claviculaire gauche). Lors de la planifica-
à risque, à savoir le cœur et les poumons (Fig. 21-24). tion du traitement, la patiente a été prévenue du risque de
La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de trai- survenue d’éventuels effets secondaires aigus et tardifs de la
tement en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes radiothérapie.
cibles et des organes à risque (Fig. 36-40). Elle a ensuite été Le repérage dosimétrique a été effectué à l’aide d’un scano-
optimisée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répar- graphe dédié sur lequel la patiente a été installée sur un plan
tition de la dose au sein de la paroi thoracique et en pondérant incliné en décubitus dorsal. Afin de faciliter la visualisation de
la prescription en profondeur du creux sus-claviculaire et de la glande mammaire, des fils radio-opaques ont été apposés à la
la chaine mammaire interne. La dose a été, conformément peau, délimitant cliniquement le volume de la glande mammaire,
au rapport 62 de l’International commission on radiation units l’induration postopératoire, la cicatrice de tumorectomie.
and measurements (ICRU), comprise entre la 95 % et la 107 % La planification tridimensionnelle conformationnelle a
(Fig. 31-35,41-45). compris la délinéation des différentes aires ganglionnaires
(sus-claviculaire, sous-claviculaire, axillaire, mammaire interne)
(Fig. 1 à 20), la délinéation de la glande mammaire, du lit de
8. Cas clinique 2 tumorectomie visualisé par la mise en place de quatre clips
chirurgicaux aux quatre points cardinaux de la tumorectomie
Mme… G., patiente de 51 ans, sans antécédents familiaux [70] ainsi que la délimitation des organes à risque, à savoir le
particuliers, ménarche à l’âge de 13 ans, mère d’un enfant âgé cœur et les poumons (Fig. 21 à 24).
de 26 ans, ménopausée à l’âge de 50 ans, n’ayant jamais pris de La dosimétrie a consisté à positionner les faisceaux de trai-
traitement hormonal substitutif, a consulté pour une rétraction tement en fonction de l’anatomie de la patiente, des volumes
rétro-mamelonnaire. cibles et des organes à risque (Fig. 36 à 38). Elle a ensuite été
À l’examen clinique (taille du soutien gorge : 90 B), il y avait optimisée par des filtres en coin afin d’homogénéiser la répar-
un nodule de 20 mm dans le quadrant inféro-externe du sein tition de la dose au sein de la paroi thoracique et en pondérant
gauche et une adénopathie axillaire gauche de 15 mm mobile la prescription en profondeur du creux sus-claviculaire et de
(T2N1). la chaîne mammaire interne. La dose a été, conformément au
Une biopsie de ce nodule a mis en évidence un carcinome rapport 62 de l’ICRU, comprise entre 95 % et la 107 % (Fig. 39
canalaire infiltrant de grade II (3,2,2). Une tumorectomie gauche à 41).
et un curage axillaire ont été réalisés et l’examen anatomo-
pathologique définitif a conclu à la présence d’un carcinome
canalaire infiltrant de 25 mm, de grade III (3,3,3) ; l’exérèse Conflit d’intérêt
était complète (avec une marge de plus de 10 mm), il y avait
de nombreux emboles tumoraux vasculaires et lymphatiques Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
venant au contact de la berge profonde de la pièce opératoire, les article.
A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146 S143

Fig. 31 à 34. Dosimétrie de l’ensemble de la


glande mammaire et du complément d’irradiation
du lit de tumorectomie, coupes transverses.
Dosimetry of whole mammary gland and boost of
lumpectomy cavity, axial CT-slices.

droite

Fig. 37. Dose moyenne délivrée au poumon homolatéral, au poumon


controlatéral, au cœur et à la chaîne mammaire interne.
Mean ipsilateral and controlateral lung dose and mean heart and IMC dose.

Fig. 36. Histogramme dose-volume du poumon homolatéral (rose) avec


V20 Gy (volume recevant 20 Gy ou plus) < 30 % et V30 Gy (volume recevant
30 Gy ou plus) < 20 %, du cœur (vert) V30 Gy < 1 % et de la chaîne mammaire
interne avec D 95 % (dose dans 95 % du volume) > 45 Gy (vert).
Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (pink) V20 Gy<30% and V30 Gy<20%,
heart (green) V30 Gy<1% and IMC with a D95%>45 Gy (green).

Fig. 39. Planification tridimensionnelle conformationnelle du faisceau


axillaire postérieur (jaune).
3D-conformal treatment planning: posterior axilla photon beam (yellow).

Fig. 38. Planification tridimensionnelle conformationnelle du faisceau axillo-


sus-claviculaire antérieur (jaune).
3D-conformal treatment planning: axillo-supraclavicular photon beam (yellow).
S144 A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146

Fig. 41. Dosimétrie des faisceaux axillo-sus-claviculaire antérieur et


postérieur, coupe transverse. Fig. 42. Dosimétrie des faisceaux axillo-sus-claviculaire antérieur et
Dosimetry of axilla, supra and infra-clavicular fields, axial CT-slice. postérieur, coupe frontale.
Dosimetry of axilla, supra and infra-clavicular fields, coronal CT-slice.

Fig. 44. Histogramme dose-volume du poumon homolatéral (jaune) avec


V20 Gy (volume recevant 20 Gy ou plus) < 30 % et V30 Gy (volume recevant
30 Gy ou plus) < 20 %, du cœur (rouge) V30 Gy < 1 % ; D99 % (dose dans
99 % du volume) chaîne mammaire interne > 45 Gy (vert), D99 % du lit de
tumorectomie (jaune) > 65 Gy.
Dose-Volume Histogram of ipsilateral lung (yellow) V20 Gy<30% and
V30 Gy<20%, heart (red) V30 Gy<1% ; IMC D99%>45 Gy (green) and lumpectomy
cavity (yellow) D99%>65 Gy.
Fig. 43. Dosimétrie des faisceaux de la chaîne mammaire interne et de la
glande mammaire, coupe transverse.
Dosimetry of IMC and whole mammary gland field, axial CT-slice.

Fig. 45. Dose moyenne délivrée au poumon homolatéral, au poumon


controlatéral, au cœur, à la chaîne mammaire interne et au lit de
tumorectomie.
Mean ipsilateral and controlateral lung dose and mean heart, IMC and
lumpectomy cavity dose.
A. Belaid et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S136–S146 S145

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Cancer du col utérin


Cervix cancer

Y. Pointreaua,b,c,d, A. Ruffier Loubièrea, F. Denise, I. Barillota,f,*


a Service de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2 Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France
b Université François-Rabelais de Tours, GICC, Tours, France
c CNRS, UMR 6239 « Génétique, Immunothérapie, Chimie et Cancer », Tours, France
d CHRU de Tours, laboratoire de pharmacologie-toxicologie, Tours, France
e Centre Jean-Bernard, 9 rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
f Université François-Rabelais, Tours, France

RÉSUMÉ

Mots clés : Les cancers du col de l’utérus, bien qu’en nette régression dans la majorité des pays développés ces
Cancer du col utérin dernières années, restent la troisième cause de décès par cancer chez la femme dans le monde. Un
Radiothérapie conformationnelle bilan précis, fondé sur l’examen clinique, une IRM abdomino-pelvienne, une éventuelle TEP et un
Volumes cibles éventuel prélèvement ganglionnaire, est nécessaire pour adapter au mieux la stratégie thérapeutique.
Atlas Les traitements des tumeurs de moins de 4 cm sans envahissement ganglionnaire sont très souvent,
en France, basés sur les associations de chirurgie et de radiothérapie, alors que les tumeurs de plus
de 4 cm ou avec envahissement ganglionnaire sont traitées par des associations de radiothérapie et
de chimiothérapie. À partir d’un cas clinique commenté, les indications, les modalités du contourage,
la dosimétrie et les complications attendues de ce traitement seront exposées.
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ABSTRACT

Cervix cancers declined in most developed countries in recent years, but remain, the third worldwide
Keywords:
Cervix cancer leading cause of cancer death in women. A precise staging, based on clinical exam, an abdominal
Conformal radiotherapy and pelvic MRI, a possible PET-CT and a possible lymph node sampling is necessary to adapt the best
Target volumes therapeutic strategy. In France, the treatments of tumors of less than 4 cm without nodal involvement
Atlas are often based on radiotherapy followed by surgery and, whereas tumors larger than 4 cm and involved
nodes are treated with concurrent chemoradiotherapy. Based on an illustrated clinical case, indications,
delineation, dosimetry and complications expected with radiotherapy are demonstrated.
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1. Introduction endocervicales exclusives, le diagnostic est obtenu par une


cytologie cervicale, qui doit nécessairement être complétée
Les cancers du col de l’utérus sont actuellement la dixième par une biopsie dirigée. Pour les lésions macroscopiquement
cause de cancer chez la femme en France, mais restent la visibles ou évoluées, le diagnostic se fait sur des fragments
deuxième cause de mortalité des femmes dans les pays en biopsiques prélevés lors d’un examen gynécologique (parfois
voie de développement. Dans les formes infra-cliniques ou réalisés sous anesthésie générale). La réalisation complémentaire

* Correspondance.
Adresse e-mail : i.barillot@chu-tours.fr (I. Barillot).
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S148 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S147–S153

d’une IRM abdomino-pelvienne permet de préciser l’extension Les adénocarcinomes, contrairement aux carcinomes
locorégionale de la lésion, qui est indispensable pour décider épidermoïdes, sont associés à un taux plus élevé d’évolution
la meilleure stratégie thérapeutique. Les tumeurs de moins de métastatique.
4 cm, sans envahissement ganglionnaire sont principalement Le bilan nécessaire pour une classification complète et précise
traitées par chirurgie et irradiation, alors que les tumeurs plus de la tumeur comporte, en parallèle de l’examen gynécologique
évoluées sont prises en charge par chimioradiothérapie conco- complet (avec toucher vaginal et rectal, réalisé conjointement
mitante. L’objectif de cet article est de présenter les bases du par l’oncologue radiothérapeute et le chirurgien), une IRM abdo-
contourage et de la dosimétrie dans le cadre d’une radiothérapie mino-pelvienne (une scanographie abdominale peut être réalisée
conformationnelle des cancers du col en situation préopératoire en complément d’une IRM pelvienne), et selon les possibilités
ainsi que sa principale toxicité. d’accès aux techniques, une TEP (intéressante notamment pour
la détection des adénopathies pelviennes et lomboaortiques,
mais qui reste en cours d’évaluation, et qui ne doit en aucun cas
2. Rappels généraux retarder la prise en charge thérapeutique) [17].
Le stade tumoral est rapporté selon les critères de la
2.1. Épidémiologie classification de l’International Federation of Gynecology and
Obstetrics (FIGO) dans la plupart des centres et non pas selon
Les cancers invasifs du col utérin sont actuellement la la classification TNM de l’UICC de 2002. La classification de la
dixième cause de cancer chez la femme en France avec 3068 FIGO a été actualisée en 2009 et corrigée en 2010 [8,18] et fait
nouveaux cas en 2005. Son incidence ne cesse de régresser suite à la version précédente datant de 2000 [3]. Toute lésion
depuis près de trois décennies, ce qui est le cas dans la plupart macroscopique étant considérée au moins comme de stade IB
des pays industrialisés (3387 cas en 2000, au huitième rang des (Tableau 1).
causes de cancer féminin). En Europe, grâce à la généralisation Le pronostic de ces tumeurs est conditionné par le stade
du dépistage, l’incidence diminue progressivement (30 000 tumoral, le diamètre maximal de la tumeur, l’envahissement
nouveaux cas par an), mais reste responsable de 13500 décès ganglionnaire, et l’étalement du traitement qui ne doit pas excé-
par an. der 55 jours [19]. D’autres facteurs comme l’hypoxie tumorale
En revanche, ce cancer représente le deuxième cancer avec et la concentration d’hémoglobine jouent également un rôle
près de 500 000 nouveaux cas par an et correspond à la troisième important.
cause de mortalité dans le monde, après les cancers du sein et
du poumon, avec 270 000 décès chaque année, dont 85 % des 2.3. Indications de la radiothérapie fondées
cas survenant dans les pays en voie de développement [2,6]. sur la classification de la FIGO de 2000
L’âge moyen au moment du diagnostic est de 55 ans. Le principal
facteur de risque de développement de lésions cervicales de 2.3.1. Traitement des cancers du col utérin in situ et micro-
haut grade est l’infection par les Human Papilloma Virus 16 et 18, invasif (stades IA1 et IA2)
transmise par voie sexuelle. Ces lésions sont donc plus fréquen-
tes en cas de partenaires sexuels multiples et de précocité des Il repose de manière standard sur la chirurgie par conisation
premiers rapports sexuels. D’autres facteurs de risque de cancer ou hystérectomie, parfois associée à une lymphadénectomie en
du col sont également reconnus tels que l’infection par le virus cas d’emboles. À noter que dans les rares cas où il existerait une
de l’immunodéficience humaine et le tabac. contre-indication opératoire, une curiethérapie utéro-vaginale
pourrait être envisagée (avec radiothérapie ganglionnaire pour
2.2. Anatomopathologie et classification les cancers de stade IA2).

Les cancers du col utérin prennent généralement naissance 2.3.2. Traitement des cancers invasifs à extension intra-
dans la zone de transition entre l’épithélium cylindrique et pelvienne (stades IB, II, III, IVA)
l’épithélium malpighien.
On considère qu’en France, près de 80 % des cancers invasifs Les cancers de stades IB, IIA, IIB proximaux de pronostic
du col sont des carcinomes épidermoïdes (malpighiens à grandes favorable (de diamètre de moins de 4 cm, sans envahissement
cellules kératinisantes ou non, définissant ainsi une bonne ou ganglionnaire après vérification chirurgicale) sont souvent trai-
moyenne différenciation). Les autres types histologiques retrouvés tés par une association radiochirurgicale de première intention
sont majoritairement des adénocarcinomes mucineux (de type comprenant une curiethérapie utérovaginale (permettant de
endocervical ou intestinal), et beaucoup plus rarement des car- délivrer une dose de 60 Gy) et une chirurgie par colpohysté-
cinomes verruqueux, condylomateux, de type lympho-épithélial, rectomie élargie.
des adénocarcinomes endométrioïdes ou papillaires séreux, et de Les cancers de stades IB, IIA, IIB proximaux de pronostic
façon anecdotique, des tumeurs mésenchymateuses [15,20]. défavorable (de diamètre excédant 4 cm ou avec envahissement
L’évolution reste longtemps locorégionale, avec une exten- ganglionnaire) et ceux de stades IIB distaux, III et IVA sont traités
sion cervicale dite de « proche en proche ». Le franchissement de de manière standard par irradiation pelvienne (et lombo-aortique
la membrane basale définit alors le stade invasif du cancer, avec en cas d’envahissement macroscopique) de 45 Gy avec chimio-
extension possible vers les paramètres, l’espace para-cervical, thérapie concomitante, suivie d’une curiethérapie utérovaginale.
les ganglions locorégionaux et dans 15 % des cas une extension Cette stratégie a permis d’observer une amélioration significative
métastatique à distance. des taux de contrôle local et de la survie globale. La chirurgie
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S147–S153 S149

Tableau 1
Critères de la classification de l’International Federation of Gynecology and Obstetrics (FIGO)
Criteria of classification from International Federation of Gynecology and Obstetrics (FIGO)

Stades FIGO 2009 FIGO 2000

0 Carcinome in situ

I Carcinome limité au col Strictement limité au col utérin


IA Carcinome invasif préclinique L’invasion est limitée à l’invasion stromale mesurée ne dépassant
pas 5 mm en profondeur et 7 mm en largeur
IA1 Invasion du stroma inférieur à 3 mm en profondeur et inférieur L’invasion mesurée dans le stroma ne dépasse pas 3 mm en
à 7 mm horizontalement profondeur et 7 mm en largeur.
IA2 Invasion du stroma entre 3 et 5 mm en profondeur et inférieur L’invasion mesurée dans le stroma est comprise entre 3 et 5 mm
à 7 mm horizontalement en profondeur et ne dépasse pas 7 mm en largeur
IB Tumeur limitée au col mais supérieure à un IA2

IB1 Tumeur limitée au col de moins de 4 cm Lésions cliniques de taille ne dépassant pas 4 cm
IB2 Tumeur limitée au col de plus de 4 cm Lésions cliniques de taille supérieure à 4 cm
II Tumeur dépassant le col mais n’atteignant pas la paroi pelvienne ni Le carcinome de Stade II s’étend au-delà du col, mais sans atteindre
le tiers inférieur du vagin les parois pelviennes. Il affecte le vagin, mais pas au-delà de ses deux
tiers supérieurs.
IIA Sans envahissement du paramètre Pas d’atteinte paramétriale évidente. L’invasion touche les deux tiers
supérieurs du vagin
IIB Avec envahissement du paramètre Atteinte paramétriale évidente, mais la paroi pelvienne n’est pas
touchée
III Lésion atteignant la paroi pelvienne et/ou le tiers inférieur du vagin Le carcinome de Stade III s’est étendu à la paroi pelvienne
et/ou présence d’une hydronéphrose
IIIA Lésion atteignant le tiers inférieur du vagin sans atteindre la paroi Pas d’extension à la paroi pelvienne, mais atteinte du tiers inférieur
pelvienne du vagin
IIIB Lésion atteignant la paroi pelvienne et/ou présence d’une Extension à la paroi pelvienne, hydronéphrose ou rein muet
hydronéphrose
IV Tumeur dépassant le pelvis ou atteignant la vessie ou le rectum Le carcinome de stade IV s’est étendu au-delà du petit bassin ou
a envahi la muqueuse de la vessie et/ou du rectum
IVA Lésion atteignant la vessie ou le rectum Extension de la tumeur aux organes pelviens adjacents
IVB Métastase à distance Extension aux organes distants

de clôture par colpohystérectomie élargie est optionnelle (mais fonction des relais ganglionnaires et des volumes étudiés (marge
souvent réalisée) en cas de résidu tumoral six semaines après la inférieure ou égale à 1 cm). Les limites de faisceaux les moins
fin de la curiethérapie. adaptées étaient la limite postérieure (espace S2-S3), mais aussi
parfois la limite antérieure (symphyse pubienne) avec un volume
2.3.3. Le traitement des cancers invasifs à extension utérin qui n’était pas forcément correctement couvert. L’étude
extrapelvienne de Finlay et al., plus axée sur la couverture des relais ganglion-
naires confirmait ces données [9], puisque dans 79 % des cas la
Il n’existe pas de standard mais les options chimiothérapie bifurcation iliaque était mal couverte en deux dimensions. Les
ou radiothérapie peuvent être proposées. limites latérales étaient jugées inadéquates dans 70 % des cas en
raison d’une couverture insuffisante surtout au niveau des relais
2.4. Modalités de la radiothérapie iliaques externes ou à l’inverse les marges considérées étaient
trop généreuses. L’utilisation d’une technique conformationnelle
2.4.1. Acquisition des données anatomiques s’est donc imposée comme la référence pour traiter la tumeur,
les volumes à risque et ganglionnaires en totalité, tout en épar-
Elle se faisait classiquement par la réalisation de clichés gnant au mieux les organes à risques. Bien que cette technique
radiologiques standards orthogonaux du bassin mais est main- conduise constamment, pour mieux couvrir le volume cible, à
tenant abandonnée puisque le standard d’acquisition repose sur une augmentation de la largeur des faisceaux antéropostérieurs
la scanographie afin de réaliser un traitement conformationnel, et latéraux par rapport à la technique bidimensionnelle, elle
éventuellement avec simulation virtuelle. En effet, les études de permet néanmoins de mieux épargner les organes à risque en
Kim et al. [13,14] ont montré les insuffisances de la réalisation diminuant le volume traité de 7 %. En moyenne, la conformation
d’une technique dite « en boîte » par deux faisceaux antéro- permet de diminuer de 34 % le volume vésical et de 15 % le
postérieurs et deux faisceaux latéraux, dont les limites étaient volume d’intestin grêle recevant 70 % de la dose prescrite.
systématiquement prédéfinies et basées sur des repères osseux, La scanographie de dosimétrie est réalisée en décubitus
identiques, chez chaque patiente. Ainsi, dans une population de dorsal, mains croisées sur la poitrine avec cale-pied et billot sous
52 patientes ayant bénéficié d’une scanographie de planification les genoux, et possible utilisation d’un matelas ou d’un masque
pour définir les volumes tumoraux et ganglionnaires à traiter, pelvien de contention. Une injection de produit de contraste est
cette équipe a montré que les limites définies en deux dimen- souhaitable (si la fonction rénale le permet), de même qu’une
sions n’étaient pas correctes dans près de 39 % à 50 % des cas en opacification digestive avec un faible volume d’eau. La vessie doit
S150 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S147–S153

être pleine (pas de miction dans l’heure précédent l’acquisition) de réduire les incertitudes de repositionnement de l’ordre de
et le rectum doit théoriquement être vidé juste avant l’examen trois mm dans cet axe mais finalement ce qui restait peu intéres-
mais n’est pas réalisé en pratique. L’acquisition scanographique sant en terme de coût-efficacité. Une autre manière de réduire
est réalisée en coupes jointives de 3 à 5 mm dont la hauteur les marges pour tenir compte des incertitudes de positionnement
sera fonction des volumes de traitement. La limite supérieure repose sur la vérification en temps réel du repositionnement
dépend du traitement de la région lombo-aortique ou non et la à chaque séance. Cette méthode permet de considérer qu’une
limite inférieure devra descendre jusqu’à 2 cm en dessous des marge de 3 à 5 mm est suffisante pour assurer la reproductibilité
creux inguinaux en cas d’irradiation vaginale in toto. En cas de tout au long du traitement [23]. L’importance de la réplétion des
distension rectale, la scanographie doit être répétée. organes à risque est également à prendre en compte lors de la
À noter que l’injection de produit de contraste peut ne pas définition du volume cible prévisionnel. Buchali et al. ont réalisé
être nécessaire en cas d’utilisation de la scanographie de la TEP
deux scanographies chez 29 de leurs patientes (atteintes de
réalisée en position de traitement. En effet on estime que la
tumeur du col ou de l’endomètre) avec soit vessie et rectum vides,
sensibilité et la spécificité de cet examen pour la définition des
soit pleins. La mobilité du corps utérin liée au degré de réplétion
volumes ganglionnaires est de 75 % et 92 %. Les données de l’IRM,
des organes à risques variait en médiane de 7 mm dans l’axe
faite dans le bilan d’extension, seront elles aussi nécessaires à la
crânio-caudal et 4 mm dans celui antéro-postérieur ; la mobilité
définition du volume cible tumoral.
du col utérin était de l’ordre de 4 mm dans l’axe crânio-caudal, la
vessie pleine étant le meilleur compromis pour qu’elle reçoive la
2.4.2. Détermination des volumes cibles
dose minimale [4]. Pendant les semaines de traitement, l’utérus
Le volume tumoral macroscopique (GTV) correspond à la va pouvoir changer de position, voire d’orientation (passage
tumeur ainsi qu’à son extension macroscopique ganglionnaire de rétroflexion à l’antéflexion et inversement) et la tumeur
clinique et en imagerie. changer de taille. Dans la publication de Huh et al., 66 patientes
Le volume cible antomoclinique (CTV) tumoral comprend en ont eu une IRM avant le traitement et pendant la troisième ou
plus du volume tumoral macroscopique et systématiquement, la quatrième semaines. Parmi les 44 patientes ayant un utérus
le col en totalité, le corps utérin et les paramètres en totalité. Il initialement antéversé, cinq ont vu leur utérus passer en position
est recommandé d’inclure 2 cm de vagin sain sous l’extension rétroversée et les tumeurs de petit volume pouvaient réduire de
tumorale macroscopique. 8 mm en médiane alors que les plus grosses lésions régressaient
Le volume cible antomoclinique ganglionnaire dépend du de 18 mm [12]. La technique de radiothérapie guidée par l’image
statut ganglionnaire : tridimensionnelle a incontestablement un intérêt majeur pour le
— en l’absence d’atteinte ganglionnaire, seules les aires iliaques choix des marges du volume cible prévisionnel lors de l’irradia-
internes et externes sont incluses ; tion des cancers gynécologiques. L’étude de van Bunt et al., qui
— les aires iliaques primitives sont irradiées en cas d’atteinte des ont réalisé une IRM en position de traitement chaque semaine
ganglions iliaques externes et/ou internes. En pratique, elles chez 20 patientes, montre bien la nécessité de considérer des
seront très souvent incluses dans les volumes irradiés ; marges inhomogènes [24]. En moyenne, la marge autour du
— les ganglions lombo-aortiques ne sont irradiés qu’en cas volume tumoral macroscopique permettant d’intégrer toutes les
d’extension macroscopique car l’irradiation prophylactique incertitudes de positionnement et de mouvements des organes
reste aujourd’hui controversée suite aux essais thérapeutiques pendant les cinq semaines de traitement doit être de l’ordre de
réalisés qui n’ont pas formellement démontré son utilité 12, 14, 11, 4 et 8 mm en avant, en arrière, latéralement, en haut
[21,22]. L’essai du 90-01 du Radiation Therapy Oncology Group
et en bas. Si l’on considère le volume cible prévisionnel, ces
(RTOG) [7] a aussi montré qu’une association de chimiothérapie
marges passent à 24, 17, 13, 11 et 8 mm.
et d’irradiation pelvienne était plus efficace qu’une irradiation
Ainsi, la marge habituelle de 10 mm permet de couvrir
ganglionnaire étendue en termes de prévention de l’évolution
correctement le volume tumoral macroscopique, mais il est
locorégionale et métastatique.
indispensable de faire une évaluation des marges réelles néces-
Jusqu’à récemment il y avait peu de données permettant
saires dans chaque centre en fonction des modalités techniques
de définir incontestablement la marge nécessaire à considérer
de la radiothérapie et des systèmes de contention.
pour définir le volume cible prévisionnel (PTV). La marge « rai-
sonnable » habituellement appliquée autour du volume cible
anatomoclinique est de 10 mm, en sachant que, dans les cas les
2.4.3. Doses prescrites aux points ICRU (International
plus défavorables selon les mouvements de l’utérus, elle devrait Commission on Radiation Units and Measurements)
atteindre jusqu’à 20 mm. Ces marges d’expansion systématiques
font suite à l’étude des erreurs de repositionnement et de la Il est habituellement délivré de 45 à 50,4 Gy au point ICRU
mobilité à la fois du volume cible et des organes à risque. Les (point d’intersection des quatre faisceaux) [5,25], dans le pelvis
systèmes de contention ont été étudiés et semblent améliorer la (tumeur et aires ganglionnaires). Un complément de 15 Gy est
qualité du repositionnement lors des irradiations pelviennes. La alors délivré dans le volume cible anatomoclinique à risque inter-
publication de Mitine et al. rapportait les résultats obtenus chez médiaire par curiethérapie utérovaginale. Selon la contribution
30 patientes traitées sans ou avec une contention rigide (deux de la curiethérapie, un complément d’irradiation de 10 à 15 Gy
types évalués) et mettait en évidence une nette amélioration peut être délivré dans les paramètres et les ganglions envahis.
de la reproductibilité notamment dans l’axe tête-pieds avec la Le fractionnement est classiquement de 1,8 à 2 Gy par séance
contention [16]. L’apport du système de contention permettait et de cinq séances par semaine.
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S147–S153 S151

2.4.4. Organes à risque et contraintes de doses 3. Cas clinique commenté

Les organes à risques sont le rectum, le sigmoïde, la vessie, Mme B., 45 ans, en excellent état général (grade 0 selon
l’intestin grêle et les têtes fémorales. Le canal anal et le vagin l’OMS), qui avait comme antécédent deux accouchements est
(lorsqu’il est indemne de toute extension) doivent être délinées venue consulter pour l’apparition de douleurs pelviennes et
pour documenter les doses reçues. L’ensemble de ces paramètres de métrorragies. À l’examen clinique, il a été retrouvé un gros
doit donc apparaître sur les histogrammes dose-volume. col tumoral avec, au toucher rectal, un doute sur une atteinte
Les contraintes de doses à respecter sont rapportées dans paramétriale droite. Il n’y avait pas d’envahissement vaginal
le guide des procédures 2007 de la Société française de radio- clinique. Plusieurs examens complémentaires ont été réalisés :
thérapie oncologique et seront actualisés en 2010 dans cette — l’IRM a retrouvé une tumeur de 6 cm ayant une extension
même revue [10,11]. supra-isthmique et il y avait un doute sur extension para-
métriale droite. Il y avait de plus des adénomégalies iliaques
2.4.5. Dosimétrie pelviennes bilatérales ;
— la concentration sérique de SCC (squamous cell carcinoma)
L’irradiation se fait par des photons de 10 à 25 MV, les était de à 6,8 ng/ml ;
organes à risque étant protégés par des caches personnalisés — la TEP a montré une fixation du col avec un SUV (Standard
et/ou les lames du collimateur. Le traitement se fait en général Uptake Value) maximal à 3,9 ainsi qu’une fixation iliaque
par quatre faisceaux orthogonaux, les pondérations de chacun pelvienne bilatérale.
étant déterminés en fonction des doses aux volumes à irradier La tumeur s’étendait donc au-delà de l’utérus, avec un
et des contraintes de dose aux organes à risque. vraisemblable envahissement du paramètre droit et a donc été
La chimiothérapie associée est préférentiellement du cispla- classé de stade IIB, d’après la classification de la FIGO de 2010.
tine, en cure hebdomadaire de 40 mg/m2, semaines 1 à 5, avec Sa taille supérieure à quatre cm et son extension ganglionnaire
fin de la perfusion deux heures avant la radiothérapie. iliaque en faisaient alors un stade IIB de pronostic défavorable. Le
À noter que l’étalement total du traitement ne doit pas traitement proposé a été une chimioradiothérapie concomitante
excéder plus de 55 jours [19], et que la curiethérapie doit donc de 45 Gy avant une curiethérapie utérovaginale. La radiothérapie
être réalisée le plus tôt possible, lorsqu’elle est indiquée, après a été réalisée sur un mode conformationnel à l’aide d’une scano-
la radiothérapie externe. graphie de dosimétrie en coupes jointives de 3 mm et couplée à
D’après les recommandations du rapport 62 de l’ICRU [25], l’imagerie TEP réalisée en position de traitement. L’acquisition
la distribution de dose est acceptable si tout point du volume a été faite vessie pleine et rectum vide. Les contourages des
cible prévisionnel reçoit une dose comprise entre 95 et 107 % volumes d’intérêt et des organes à risque sont rapportés Fig. 1. Le
de la dose prescrite. volume tumoral macroscopique ganglionnaire a été défini grâce
À noter que l’irradiation conformationnelle avec modulation au recalage entre la scanographie et la TEP. La dose prescrite au
d’intensité se développe actuellement et permettrait de diminuer point ICRU était de 45 Gy, à raison de cinq fractions hebdoma-
significativement les toxicités aigues urinaires, digestives, et daires de 1,8 Gy. Le traitement est réalisé par des photons de 25
hématologiques [1]. MV. Les marges autour du volume cible anatomoclinique pour
définir le volume cible prévisionnel étaient de 10 mm.
2.5. Toxicité de la radiothérapie Le volume pelvien a été irradié jusqu’à 45 Gy par quatre
faisceaux orthogonaux, antérieur, postérieur et latéraux droit
2.5.1. Aiguë en cours ou au décours du traitement et gauche. La dosimétrie et les histogrammes dose-volume
sont présentés respectivement Figs. 2 et 3. Ceux-ci montrent
Il s’agit principalement d’effets digestifs, urinaires et une couverture adéquate du volume cible prévisionnel, du
muqueux, qui se manifestent habituellement dès la dose de 15 volume cible tumoral et ganglionnaire, ainsi que du volume
à 20 Gy : cible anatomoclinique. Les contraintes de dose pour le rectum
— diarrhées (environ 60 %) ; et les têtes fémorales ont été respectées. Les contraintes pour
— nausées et vomissements (également liés aux sels de la vessie n’étaient pas respectées car il existait près de 66 % du
platine) ; volume vésical recevant 45 Gy. Au décours, la patiente a été prise
— cystites et cystalgies (environ 25 à 30 %) ; en charge par curiethérapie utérovaginale puis un complément
— mucites ; de traitement par irradiation externe a été délivré aux ganglions
— toxicité hématologique en cas de chimioradiothérapie avec et aux paramètres initialement envahis.
anémie, thrombopénie, leuconeutropénie.

2.5.2. Tardive à distance de la fin du traitement 4. Conclusion

Elle est rarement décrite ou mal évaluée mais son taux Le cancer du col de l’utérus est un cancer très souvent curable
varierait entre 10 et 15 % : avec un taux de survie de près de 85 % aux stades I et II, et
— urinaires : saignements, cystalgies, incontinence ; de plus de 50 % en cas de tumeur évoluée. Le taux de contrôle
— digestives : saignements, colites, diarrhées, incontinence ; locorégional s’est amélioré ces dernières années grâce au schéma
— vaginales : saignements, sécheresse, sténose, mucite ; de chimioradiothérapie et à l’optimisation de la curiethérapie
— vasculaires : lymphœdème, lymphocèle. utérovaginale. Un meilleur bilan d’extension et de meilleures
S152 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S147–S153

planifications des traitements, avec l’intégration de nouvelles cette irradiation pelvienne tout en augmentant la dose délivrée
techniques d’imagerie (IRM, TEP) devraient encore améliorer aux volumes cibles et pourrait devenir un nouveau standard de
ce taux. traitement dans les années à venir.
Le traitement des cancers localement évolués, de pronostic
favorable ou non (stades Ib, IIa, IIb), est dorénavant la chimiora-
diothérapie, avec utilisation de cisplatine hebdomadaire. D’autres Conflit d’intérêt
schémas sont toujours en cours d’étude, avec utilisation d’autres
drogues. La radiothérapie conformationnelle avec modulation Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
d’intensité semble permettre de réduire les effets secondaires de article.

Fig. 1. Volumes d’intérêts GTV-T et GTV-N en rouge, CTV en rose, PTV en bleu, vessie en jaune, rectum en bleu.
GTV-T and GTV-N volumes of interest, red; CTV, pink; PTV, blue; bladder, yellow; rectum, blue.

Fig. 2. Dosimétrie.
Dosimetry.

Fig. 3. Histogramme dose-volume du volume cible


anatomoclinique tumoral et ganglionnaire (CTVT
et N) en rose, volume cible prévisionnel (PTV)
en violet, rectum en bleu, vessie en jaune, têtes
fémorales en orange.
HDV CTV T and N, pink; PTV, purple; rectum, blue;
bladder, yellow; femoral heads, orange.
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Cancer/ R adi ot hérapie 14 Suppl . 1 (2010) S154– S160

Cancer de l’endomètre
Endometrial cancer

Y. Pointreaua,b,c,d, G. Bernadoua, F. Denise, I. Barillota,f,*


a Service de radiothérapie, centre régional universitaire de cancérologie Henry-S.-Kaplan CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 2 Boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France
b Université François-Rabelais de Tours, GICC, Tours, France
c CNRS, UMR 6239 « Génétique, Immunothérapie, Chimie et Cancer », Tours, France
d CHRU de Tours, laboratoire de pharmacologie-toxicologie, Tours, France
e Centre Jean-Bernard, 9, rue Beauverger, 72000 Le Mans, France
f Université François-Rabelais Tours, France

RÉSUMÉ

Mots clés :
Les cancers de l’endomètre sont fréquents et concernent principalement les femmes ménopausées.
Cancer de l’endomètre Ils sont majoritairement diagnostiqués précocement d’où un excellent pronostic. La chirurgie est
Radiothérapie conformationnelle le traitement de référence. Elle permet de préciser le stade selon la classification internationale
Volumes cibles de gynécologie-obstétrique (FIGO) et ainsi de guider les indications de traitement adjuvant. L’extension
Atlas tumorale, le grade, l’invasion myométriale et l’atteinte ganglionnaire sont discriminants dans le choix
thérapeutique. La prise en charge des tumeurs de stades I et II a été récemment modifiée par l’European
Society of Medical Oncology (ESMO) avec une surveillance, une curiethérapie et une radiothérapie
avec curiethérapie respectivement pour les groupes à faible, intermédiaire et haut risques ; ces
recommandations restent discutables et doivent être confirmées. La présentation des cancers les plus
évolués est hétérogène et la chirurgie doit être proposée si elle est réalisable avant la radiothérapie
voire la chimiothérapie. À partir d’un cas clinique commenté, les indications, les modalités de
contourage, la dosimétrie et les complications attendues de ce traitement sont exposées.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS.
Tous droits réservés.

ABSTRACT

Keywords:
Endometrial cancers are frequent and affect mainly postmenopausal women. They are mostly
Endometrial cancer diagnosed at an early stage with an excellent prognosis. Surgery is the reference for a precise FIGO
Conformal radiotherapy staging who guide adjuvant treatment. Tumor extension, grade, myometrium invasion and involved
Target volumes lymph nodes will be discriminating in therapeutic strategy. The management of stages I and II
Atlas has been recently amended by ESMO, who proposed surveillance, brachytherapy, and radiation
therapy followed by brachytherapy for respectively low, intermediate and high risk groups. These
recommendations are controversial and must be confirmed. Locally advanced stages represent a
heterogeneous population in which surgery should be proposed if it is feasible then followed by
radiotherapy and/or chemotherapy. Based on an illustrated clinical case, indications, delineation,
dosimetry and complications expected with radiotherapy are demonstrated.
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS.
All rights reserved.

* Correspondance.
Adresse e-mail : i.barillot@chu-tours.fr (I. Barillot).
© 2010 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160 S155

1. Introduction régionales et à distance et par conséquent sont de pronostic


moins favorable.
Les cancers de l’endomètre représentent la 3e localisation des Le bilan d’extension pré-thérapeutique comprend, en paral-
tumeurs malignes chez la femme après les cancers du sein et les lèle de l’examen gynécologique complet (avec toucher vaginal
cancers colorectaux. Quatre-vingts pour cent des femmes sont et rectal, réalisé conjointement par l’oncologue radiothérapeute
ménopausées au moment du diagnostic. L’incidence élevée de ces et le chirurgien), une hystéroscopie, une échographie pelvienne,
tumeurs dans les pays à haut niveau socio-économique souligne une IRM abdomino-pelvienne systématique (la scanogarphie
le rôle de l’environnement (hyperœstrogénie, obésité). abdominale peut être réalisée en complément d’une IRM pel-
La majorité des cancers de l’endomètre est diagnostiquée vienne) permettant de classer la tumeur, mais c’est réellement la
alors qu’ils sont localisés (85 % de stade I) et ont un pronostic très chirurgie qui permet de préciser le stade et d’établir les facteurs
favorable. Les adénocarcinomes endométrioïdes représentent pronostiques (nombreux facteurs histologiques).
le type histologique le plus fréquent. Le diagnostic est évoqué Le stade tumoral est rapporté selon les critères de la
devant des métrorragies post-ménopausiques. L’échographie classification de l’International Federation of Gynecology and
confirme l’épaississement de l’endomètre et le diagnostic de cer- Obstetrics (FIGO) dans la plupart des centres et non pas selon la
titude histologique est posé grâce à une biopsie ou un curetage. La classification TNM de l’UICC de 2002. La classification de la FIGO
chirurgie est le traitement de référence. Elle permet d’établir les a été actualisée en 2009 [12] et fait suite à la version précédente
facteurs histo-pronostiques (principalement le type histologique, datant de 2000 [5] (Tableau 1).
le grade tumoral et le degré d’infiltration du myomètre) qui vont En effet, l’évaluation des facteurs pronostiques constitue
guider les traitements complémentaires. La radiothérapie est le une étape majeure de la prise en charge. Elle permet d’adapter
principal traitement adjuvant, les traitements médicaux n’étant le traitement adjuvant afin de ne pas surtraiter les formes de
réservés qu’aux cancers localement évolués ou métastatiques. pronostic favorable et à l’inverse d’optimiser le traitement des
formes à risques de récidive.
Ainsi, on peut retenir comme principaux facteurs
2. Rappels généraux pronostiques :
— le degré d’infiltration du myomètre ;
2.1. Épidémiologie — le grade histologique : le grade 3 a une valeur pronostique
péjorative. Il est lié aux autres facteurs pronostiques et repré-
Les cancers de l’endomètre sont actuellement au 3e rang des sente un des facteurs principaux de récidive ;
cancers féminins avec 5064 nouveaux cas pour l’année 2000 — le type histologique : les carcinomes papillaires séreux, adénosqua-
et 1809 décès. En France, l’incidence est estimée à 25/100 000 meux et à cellules claires sont de pronostic moins favorable ;
femmes. L’âge moyen de survenue est de 63 ans. — l’âge : le pourcentage de décès et de récidives augmente avec
L’adénocarcinome endométrioïde est le type histologique l’âge. De plus, le pronostic est lié à l’opérabilité qui diminue avec
le plus fréquent, favorisé par l’hyperœstrogénie, qui stimule la l’âge, alors que les taux de formes indifférenciées augmentent ;
prolifération des cellules endométriales. — le stade clinique (atteinte du col et degré d’extension de la
Les facteurs de risque principaux sont l’âge, l’obésité, le lésion en dehors du corps de l’utérus) ;
diabète, l’hypertension artérielle et les traitements hormonaux — la cytologie péritonéale : tous stades confondus, on trouve dans
substitutifs ou encore le tamoxifène. la littérature 12,4 % de cytologies positives. Elle est étroitement
Les formes héréditaires représentent 2 à 5 % des cancers de corrélée aux autres facteurs et aux taux de récidives.
l’endomètre. On les observe principalement dans le syndrome La positivité de la cytologie péritonéale dans les stades I et II
de Lynch (cancer colorectal héréditaire sans polypose, cancer n’intervient pas dans les indications de traitement adjuvant :
de l’endomètre, de l’estomac, de l’intestin grêle, pancréatique, — l’envahissement ganglionnaire : pelvien et lombo-aortique ;
ovarien, hépatobiliaire). — d’autres facteurs : emboles vasculaires ; taille de la tumeur ;
récepteurs hormonaux…
2.2. Anatomopathologie et classification De nombreux auteurs ont démontré que ces facteurs étaient
le plus souvent étroitement corrélés entre eux.
L’hyperplasie de l’endomètre précède habituellement le
cancer de l’endomètre et est classée selon le grade de l’atypie 2.3. Indications de la radiothérapie basée sur la classification
cytologique. Le grade tumoral quantifie le degré de différencia- de la FIGO de 2000
tion et influe considérablement sur le pronostic. Il s’agit le plus
souvent d’un adénocarcinome endométrioïde. Les autres formes 2.3.1. Stades I et II
histologiques sont représentées par les carcinomes mucineux, le
carcinome à cellules claires, le carcinome papillaire séreux, les Alors que les stratégies de traitement adjuvant des cancers
sarcomes et carcinosarcomes. Le carcinome à cellules claires et le localement évolués ont été bien codifiées depuis de nombreuses
carcinome papillaire séreux sont considérés comme de grade 3 et années, celles de ceux de stade I ont été très controversées jusqu’en
sont des formes d’emblée agressive. Les sarcomes représentent 2008, notamment lorsque l’on discutait la place des différentes
environ 5 % des tumeurs malignes de l’utérus et comprennent modalités d’irradiation. L’analyse de la littérature a permis à l’ESMO
les tumeurs mixtes du mésoderme, les léiomyosarcomes et de proposer une classification de ces tumeurs limitées au corps de
les sarcomes de l’endomètre (stroma). Les sarcomes sont plus l’utérus en trois catégories pronostiques, ce qui permet d’argumen-
agressifs, provoquent plus fréquemment des métastases locales, ter de façon plus pertinente les décisions thérapeutiques [3].
S156 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160

Tableau 1
Critères de la classification de l’International Federation of Gynecology and Obstetrics (FIGO).
Criteria of classification from International Federation of Gynecology and Obstetrics (FIGO).

Stade FIGO de 2009 FIGO de 2000

0 Carcinome in situ
I Carcinome limité au corps utérin ou atteinte glandulaire de l’endocol Carcinome limité au corps utérin
quelque soit le grade
IA Absence ou moins de 50 % du myomètre envahi Strictement limité à l’endomètre
IB Invasion de 50 % ou plus du myomètre Invasion de moins de 50 % du myomètre
IC Invasion de plus de 50 % du myomètre
II Invasion du stroma cervical mais sans extension en dehors de l’utérus Carcinome envahissant le col
IIA Atteinte glandulaire de l’endocol
IIB Atteinte stromale du col
III Extension locale et/ou régionale de la tumeur Carcinome étendu hors de l’utérus, limité au pelvis
IIIA Atteinte de la séreuse et/ou des annexes Atteinte de la séreuse, des annexes, cytologie péritonéale positive
IIIB Atteintes vaginales et/ou paramétriales Atteintes vaginales par extension ou métastatiques
IIIC Métastases ganglionnaires pelviennes et/ou lombo-aortiques Métastases pelviennes, atteinte ganglionnaire lombo-aortique
IIIC1 Métastases ganglionnaires pelviennes
IIIC2 Métastases ganglionnaires lombo-aortiques avec ou sans atteintes
pelviennes
IV Lésion atteignant la vessie, le rectum ou avec métastases à distance Carcinome avec métastases à distance
IVA Lésion atteignant la vessie et/ou le rectum Atteinte de la vessie et/ou rectum
IVB Métastases à distance incluant les métastases abdominales et Métastases à distance, atteinte ganglionnaires abdominales
inguinales

Le groupe à faible risque comprend les adénocarcinomes l’épaisseur du myomètre de grade 3 et les carcinomes papillaires
endométrioïde sans envahissement myométrial ou avec un séreux, à cellules claires ou indifférenciés limités au corps utérin.
envahissement limité à moins de 50 % du myomètre de grade On peut discuter d’y ajouter les patientes atteintes de carcinome
1 ou 2. Les études rétrospectives et un essai randomisé Suédois avec envahissement myométrial limité de grade 3, si des emboles
publié en 2009 ont toutes confirmé que, bien que la curiethérapie lymphatiques sont retrouvés sur la pièce, en raison de l’impact
de la voûte vaginale soit une thérapeutique bien tolérée, elle n’a pronostique de la présence de ces emboles [6]. Pour ces patientes,
pas d’impact significatif sur le contrôle local. Aucun traitement on propose systématiquement une radiothérapie externe pel-
adjuvant ne peut donc être justifié pour ces patientes qui ont vienne et une curiethérapie de la voûte vaginale, qui ne permet
un risque de récidive vaginale faible, estimé à moins de 3 %, ce cependant pas de réduire le risque de récidive à moins de 10 %.
d’autant que ces récidives sont accessibles à un traitement de Chez ces patientes, le taux d’évolution métastatique est aussi
rattrapage par irradiation [23]. élevé, ce qui fait discuter les chimioradiothérapies concomitan-
Le groupe à risque intermédiaire est constitué des adénocarci- tes suivies de chimiothérapie adjuvante [10]. La comparaison de
nomes endométrioïde sans envahissement myométrial ou avec un cette stratégie de traitement et de la radiothérapie pelvienne
envahissement limité à moins de 50 % du myomètre de grade 3, et suivie de curiethérapie est l’objectif de l’étude PORTEC 3.
des carcinomes envahissant plus de 50 % de l’épaisseur du myo- Les modalités thérapeutiques des cancers qui présentent une
mètre de grades 1 et 2 auxquels on peut adjoindre les carcinomes atteinte du stroma du col utérin (stade II) s’inscrivent maintenant
qui présentent une extension superficielle à l’endocol de grade 1 dans la stratégie de prise en charge des formes évoluées.
et 2. La curiethérapie vaginale est le traitement adjuvant standard
des carcinomes sans envahissement du myomètre de grade 3 [14]. 2.3.2. Stades III-IV formes évoluées
Quatre essais thérapeutiques ont démontré que chez les autres
patientes du groupe, la radiothérapie pelvienne améliorait le taux Moins de 15 % des cancers de l’endomètre sont diagnostiqués
de contrôle local pelvien de la maladie mais n’avait pas d’impact au stade III et les thérapeutiques doivent être plus agressives. Ils
sur l’évolution métastatique ni sur la survie [1, 9, 20, 24]. Ceci a fait constituent un groupe très hétérogène, réunissant des lésions
discuter l’intérêt de cette irradiation face à une curiethérapie seule localisées à l’utérus avec cytologie péritonéale positive ou enva-
potentiellement aussi efficace et moins toxique. Cette question a hissement ganglionnaire, des atteintes vaginales localisées ou
été posée par l’essai PORTEC (Post Operative Radiation Therapy in des extensions abdominales massives.
Endometrial Carcinoma) 2. La présentation des résultats prélimi- On propose la chirurgie lorsqu’elle est possible car, associée
naires à trois ans suggérait que les deux modalités thérapeutiques à la radiothérapie, elle permet de meilleurs résultats qu’une
avaient une efficacité similaire en termes de survie sans récidive irradiation exclusive.
et de survie globale bien que le taux de récidive pelvienne soit un Dans les formes évoluées ou à haut risque de récidive,
peu plus élevé dans le bras curiethérapie (3,6 %) que dans le bras des essais incluant une chimiothérapie, soit exclusive, soit
radiothérapie externe (0,7 %) [21]. concomitante à une irradiation, ont été conduits ces dernières
Le groupe à haut risque de récidive inclut les adénocarci- années. Les résultats de ces différents essais ont permis de
nomes endométrioïdes avec envahissement de plus de 50 % de montrer l’intérêt potentiel de la chimiothérapie pour diminuer
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160 S157

le risque de métastases à distance dans les formes à haut risque envahissement ganglionnaire, le volume cible anatomoclinique
de récidive [15,19]. Cependant ces résultats demandent à être comprend les deux tiers supérieurs du vagin avec une expansion
confirmé par des essais de phase III, c’est pourquoi la population d’1 cm dans toutes les directions, les ganglions inter-iliaques et
cible de l’essai PORTEC 3 inclut aussi des patientes atteintes de la partie basse des iliaques primitifs.
cancer de stades IIB, IIIA et IIIC. Pour les cancers plus évolués, le volume cible anatomocli-
nique tumoral prend en compte l’extension cervicale, vaginale
2.4. Modalités de la radiothérapie et ganglionnaire. Comme pour les cancers du col, la règle
est d’inclure dans le volume cible anatomoclinique le relais
2.4.1. Acquisition des données anatomiques ganglionnaire qui est sus-jacent à celui qui est colonisé par la
tumeur et de n’irradier les ganglions lombo-aortiques que s’ils
Jusqu’à la fin des années 1990, cette irradiation pelvienne sont atteints par la tumeur.
était le plus souvent délivrée par l’intermédiaire de deux fais- La marge préconisée pour définir le volume cible prévisionnel
ceaux antéro-postérieurs, ce qui signifiait que pour irradier un (PTV) est de 10 mm. Elle est essentiellement liée à l’incertitude
volume cible limité au plancher pelvien et aux ganglions, l’en- de repositionnement de ces patientes souvent obèses. Le vagin
semble des structures pelviennes recevait une dose significative. et les ganglions sont des structures que l’on peut considérés
Après hystérectomie, le pelvis contient une quantité souvent comme fixes, cependant, en cas d’irradiation avec modulation
importante d’intestin grêle, qui a tendance à s’insinuer dans d’intensité, les américains propose de réaliser une scanographie
l’espace laissé vide après l’ablation de l’utérus et des annexes. vessie vide puis vessie pleine pour définir un volume cible
La radiothérapie conformationnelle par quatre faisceaux réalisée interne (ITV) autour du vagin et de la voûte vaginale. Le volume
avec des caches personnalisés chez une patiente avec une vessie cible prévisionnel est construit en ajoutant une marge de 7 mm
pleine permet d’exclure une grande partie de l’intestin grêle, autour de ce volume cible interne. L’importance de la réplétion
notamment des faisceaux latéraux [8]. Ce constat et la conclusion des organes à risque est également à prendre en compte lors de
de l’étude de Finlay et al. montrant que l’acquisition des don- la définition du volume cible prévisionnel.
nées anatomiques par scanographie permettait une meilleure
couverture des aires ganglionnaires [13], ont conduit à ce que 2.4.3. Doses prescrites aux points ICRU (International
la technique conformationnelle se soit imposée comme celle Commission on radiations Units and Measurements)
de référence permettant de traiter de façon optimale le volume
anatomoclinique (CTV) postopératoire, tout en épargnant, au Les doses totales à délivrer pour traiter la maladie microscopi-
mieux les organes à risques. que varient de 45 Gy à 50,4 Gy au point ICRU (point d’intersection
Le scanner de dosimétrie est réalisé en décubitus dorsal, des quatre faisceaux) [7, 26].
mains croisées sur la poitrine avec cale-pied et billot sous les Le fractionnement est classiquement de cinq séances de
genoux, et possible utilisation d’un matelas ou d’un masque 1,8 Gy par semaine. Tous les faisceaux sont traités à chaque
pelvien de contention. Cependant, certaines équipes préconisent séance.
de positionner les patientes en procubitus sur un « belly board »,
car cette position permet de refouler l’intestin grêle des faisceaux 2.4.4. Organes à risque et contraintes de doses
en fabriquant un système de contention abdominal [11, 22].
Une injection de produit de contraste est souhaitable (selon Les organes à risques sont le rectum, le sigmoïde, la vessie,
la fonction rénale), de même qu’une opacification digestive l’intestin grêle et les têtes fémorales. Le canal anal et le vagin
avec un faible volume d’eau. La vessie doit être pleine (pas de (lorsqu’il est indemne de toute extension) doivent être délinéés
miction dans l’heure précédent l’acquisition) et le rectum doit pour documenter les doses reçues. L’irradiation de l’intestin grêle
théoriquement être vidé juste avant l’examen mais n’est pas en situation postopératoire est particulièrement pourvoyeuse
réalisé en pratique. L’acquisition scanographique est réalisée en de réactions digestives aiguës invalidantes. C’est pourquoi diffé-
coupes jointives de 3 à 5 mm dont la hauteur est fonction des rentes stratégies ont été mises en œuvre pour déplacer l’intestin
volumes de traitement. La limite supérieure dépend du traite- grêle hors des faisceaux d’irradiation. Nous avons déjà cité les
ment ou non de la région lombo-aortique et la limite inférieure techniques positionnelles utilisant le « belly board », mais il existe
doit descendre jusqu’à deux cm en dessous des creux inguinaux aussi des techniques chirurgicales invasives qui permettent de
en cas d’irradiation vaginale in toto. En cas de distension rectale, fixer l’intestin grêle en dehors du pelvis par des mèches absor-
la scanographie doit être répétée. bables [25] ou à le repousser vers le haut en mettant un « tissu
expander » dans la cavité abdominale [18].
2.4.2. Détermination des volumes cibles Les contraintes de doses à respecter sont rapportées dans le
guide des procédures de 2007 de la Société française de radio-
Au cours de la prise en charge des cancers de l’endomètre, thérapie oncologique (SFRO) et actualisées en 2010 [16, 17].
l’irradiation exclusive est exceptionnelle. C’est dans ce seul cas
où l’on définit un volume cible macroscopique qui correspond à 2.4.5. Dosimétrie
la tumeur ainsi qu’à son extension macroscopique ganglionnaire
clinique et en imagerie. Le traitement est réalisé par des photons de 10 à 25 MV de
Dans la majorité des cas, c’est une irradiation postopératoire l’accélérateur linéaire et permet des irradiations relativement
qui est délivrée avec délinéation exclusivement d’un volume cible homogènes de volumes larges, les organes à risque étant protégés
anatomoclinique. Pour les cancers limités au corps utérin sans par des caches personnalisés et/ou les lames du collimateur.
S158 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160

La technique est en général isocentrique avec des faisceaux Le traitement proposé a été une chirurgie par hystérecto-
multiples, le plus souvent au nombre de quatre. Une dosimétrie mie totale non conservatrice et curage sous-veineux. L’analyse
tridimensionnelle sur coupes scanographiques est réalisée avec anatomopathologique a mis en évidence un adénocarcinome
calcul des courbes histogrammes dose-volume pour le volume endométrioïde de grade III, avec emboles, infiltrant moins de
cible et pour les organes critiques. 50 % du myomètre, sans extension ganglionnaire et avec cytolo-
L’irradiation peut être délivrée de manière concomitante gie péritonéale négative, classant la lésion de Stade Ib (selon la
avec une chimiothérapie, notamment pour les carcinomes autres classification de la FIGO de 2000 et celle de 2009) et de grade III.
qu’endométrioïdes et pour ceux de stade III [15]. Le traitement adjuvant proposé a été une radiothérapie pelvienne
D’après les recommandations du rapport 62 de l’ICRU [26], postopératoire (car présence d’emboles) suivie d’une curiethérapie
la distribution de dose est acceptable si tout point du volume de la voûte vaginale.
cible prévisionnel reçoit une dose comprise entre 95 et 107 % La radiothérapie a été réalisée sur un mode conformationnel
de la dose prescrite. à l’aide d’une scanographie de dosimétrie en coupes jointives de
L’irradiation conformationnelle avec modulation d’intensité 3 mm après injection de produit de contraste. Les marges autour
est en cours d’évaluation pour limiter la toxicité aux organes à du volume cible anatomoclinique pour définir le volume cible
risque notamment à l’intestin grêle. Cette technique permet prévisionnel étaient de 10 mm.
également une meilleure couverture du volume cible [2,4]. Les contours des volumes d’intérêt et des organes à risque
sont rapportés figure 1. La dose prescrite au point ICRU était de
2.5. Toxicité de l’irradiation 45 Gy, à raison de cinq fractions hebdomadaires de 1,8 Gy. Le
traitement a été réalisé par des photons de 25 MV.
2.5.1. Aiguë en cours ou au décours du traitement Le volume pelvien a été traité jusqu’à 45 Gy par quatre
faisceaux orthogonaux, antéro-postérieurs et latéraux. La
Il s’agit principalement d’effets digestifs, urinaires et dosimétrie et les histogrammes dose-volume sont présentés
muqueux, qui se manifestent habituellement dès la dose de 15 respectivement figures 2 et 3. Ceux-ci montrent une couverture
à 20 Gy : adéquate du volume cible prévisionnel, du volume cible tumoral
— diarrhées (environ 60 %) ; et ganglionnaire, ainsi que du volume cible anatomoclinique.
— nausées et vomissements (également liés aux sels de Les contraintes de dose pour le rectum et les têtes fémorales
platine) ; sont respectées. Les contraintes pour la vessie n’étaient pas
— cystites et cystalgies (environ 25 à 30 %) ; respectées car il existait près de 58 % du volume vésical rece-
— mucites ; vant 45 Gy. Au décours, la patiente a été prise en charge par
— toxicité hématologique en cas de chimioradiothérapie avec curiethérapie vaginale.
anémie, thrombopénie, leuconeutropénie.

2.5.2. Tardive, à distance de la fin du traitement 4. Conclusions

Elle est rarement décrite ou mal évaluée mais son taux Le cancer de l’utérus est un cancer très souvent curable avec
varierait entre 10 et 15 % : un excellent taux de survie aux stades I et II. Les tumeurs plus
— urinaires : saignements, cystalgies, incontinence ; évoluées ayant un pronostic variable compte tenu de l’hétéro-
— digestives : saignements, colites, diarrhées, incontinence ; généité de cette population.
— vaginales : saignements, sécheresse, sténose, mucite ; La prise en charge de ces tumeurs a récemment été revue
— vasculaires : lymphœdème, lymphocèle. afin de ne pas surtraiter les formes de pronostic favorable et à
l’inverse d’optimiser le traitement des formes à risque de récidive.
La curiethérapie de la voûte vaginale, bien que n’ayant pas d’impact
3. Cas clinique commenté sur la survie globale, la survie sans métastase et le contrôle pelvien
reste indiquée dans certains groupes pour le contrôle local. La
Mme C., 58 ans, en excellent état général (classé 0 selon chimiothérapie doit encore trouver sa place, notamment chez les
l’OMS), qui avait comme antécédents une appendicectomie et patientes atteintes de cancer à risque (de petit stade à haut risque
la prise d’un traitement hormonal substitutif pendant dix ans, a ou évolué) et être validée par des essais thérapeutiques.
consulté pour l’apparition de métrorragies post-ménopausiques. La chirurgie première reste le traitement de référence de
À l’examen clinique, il a été retrouvé un saignement extériorisé ces tumeurs. La radiothérapie postopératoire de type conforma-
par le col, mais ce dernier était normal à l’inspection. Le toucher tionnelle est le standard lorsqu’elle est indiquée et sa réalisation
vaginal et le toucher rectal étaient normaux. La palpation des avec modulation d’intensité semble permettre de réduire les
aires inguinales était aussi normale. Plusieurs examens complé- effets secondaires.
mentaires sont réalisés pour préciser le stade :
— hystéroscopie avec curetage ;
— échographie pelvienne, qui a montré un épaississement du Conflits d’intérêts
myomètre, mesuré à 13 mm ;
— IRM pelvienne, qui a confirmé ces données ; Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts pour cet
— TEP normale. article.
Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160 S159

Fig. 1. Volumes d’intérêts. Volumes cibles


anatomocliniques tumoral et ganglionnaire (CTV-T et
CTV-N) en rouge, volume cible prévisionnel (PTV) en
rose, sigmoïde en bleu foncé, vessie en jaune, grêle en
bleu turquoise, rectum en bleu clair, vagin en orange.
Volumes of interest. CTV-T and CTV-N, red; PTV, pink;
sigmoid, dark blue; bladder, yellow; small intestine,
turquoise; rectum, light blue; vagina, orange.

Fig. 2. Dosimétrie volumes cibles anatomocliniques


tumoral et ganglionnaire (CTV-T et CTV-N) en rose,
volume cible prévisionnel (PTV) en bleu, sigmoïde en
vert clair, vessie en jaune, rectum en vert foncé, vagin
en violet.
Dosimetry. CTV-T and CTV-N, pink; PTV, blue; sigmoid,
light green; bladder, yellow; rectum, dark green; vagina,
purple.
S160 Y. Pointreau et al. / Cancer/Radiothérapie 14 Suppl. 1 (2010) S154–S160

Fig. 3. Histogramme dose-volume. Volume cible


anatomoclinique (CTV) en rose ; volume cible
prévisionnel (PTV) en bleu ; Sigmoïde en vert ; Vessie
en jaune ; Rectum en vert foncé ; vagin en violet.
Dose-volume histograms. CTV, pink; PTV, blue; Sigmoid,