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SÉRIE ESPAGNOLE
1. Théâtre des Mathurins Divines Paroles de Ramon del Valle Inclân, tra-
:
duction de M. E. Coindreau. Studio des Champs-Elysées : la Maison de
Bernarda de Frederico Garcia —
Lorca, adaptation de J.-M. Creach. Théâtre
Gharles-de-Rochefort Mariana Pineda de F. G. Lorca, traduction de —
M. Moussy.
:
94 CHRONIQUE DU THÉÂTRE
demander jusqu'à la dernière page à quel moment l'intrigue va
se
nouer,, mais il s'interroge sans impatience, et il se laisse retenir par
un déroulement d'images dont la fascination, disons-le en passant,
ne s'exerce parfois qu'à l'aide cle.moyens suspects.
Laureano est un affreux déchet, un idiot difforme, que sa famille
expose sur les chemins, dans les foires, en vue de soutirer à la pitié
publique des aumônes. Il représente un capital dont son oncle et
sa tante se disputent le revenu. Sa mort même n'apaise pas les
appétits.. Décomposé, mais • couronné de fleurs, le cadavre fait la
quête à la porte du cimetière, pour couvrir les frais de son enterrement.
Voilà le sujet, tout au moins le prétexte. On aperçoit sans peine
l'insidieux pouvoir qu'il,recèle.
L'homme n'est que trop disposé à subir l'envoûtement de l'hor-
rible. Le musée Dupuytren a ses fidèles. Si Valle Inclân s'était borné
à solliciter notre imagination, en lui décrivant le chariot où croupit
un monstre vicieux, son oeuvre ne nous retiendrait pas longtemps,
pour peu que nous demeurions attentifs à contrôler les mobiles de
notre curiosité.
Mais son propos est moins restreint : si c'est avec quelque complai-
sance qu'il a installé le nain Laureano au centre du récit, s'il a orga-
nisé en fonction de cette place les allées et venues des autres person-
nages, du moins a-t-il conçu, rassemblant des matériaux divers, un
édifice aux plans contrastés où la lumière pût jouer avec l'ombre.
Construction du genre gothique, dont la gargouille composerait le
motif le plus apparent, mais où l'homme et la femme, escortés de
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1: De Bernarda aux pères tyranniques de Molière, il n'y a pas si lcjin. ' '