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La qualité physique d’une eau d’irrigation est fonction principalement de sa charge en éléments solides
et de sa température. La qualité chimique est fonction de sa salinité totale, de sa sodicité et de sa
concentration en minéraux toxiques. Enfin la qualité bactériologique dépend du nombre de bactéries
dans l’eau. Regardons cela un peu plus en détail. La qualité physique est d’abord caractérisée par la
concentration en sédiments dans l’eau : on les classe par diamètre de particules en sable, limon ou argile.
Ce problème concerne particulièrement les eaux de surface ou les eaux usées traitées. Les problèmes
qu’induit une mauvaise qualité physique de l’eau sont principalement liés aux infrastructures de
transport de l’eau : ensablement des canaux, pompes abîmées, goutteurs bouchés. En fonction du type
d’irrigation, différentes techniques seront mises en place pour limiter ou éliminer les particules présentes
dans l’eau. Ensuite, un autre aspect de la qualité physique de l’eau est sa température. Dans certaines
régions du globe, l’eau trop chaude doit ainsi être refroidie pour éviter de brûler les plantes. On trouve
par exemple dans le désert tunisien des systèmes pour refroidir l’eau chaude en la faisant tomber et
se mélanger avec l’air plus froid, ou encore en la faisant serpenter doucement pour qu’elle baisse en
température.
La salinité et la sodicité sont deux facteurs-clés pour la qualité chimique d’une eau d’irrigation. Il faut
savoir qu'aujourd'hui, 30 % des terres irriguées souffrent de la salinisation et que celle-ci réduit les
zones actuellement irriguées de près de 2 % par an. On identifie souvent le problème de salinité par
une croûte blanchâtre à la surface du sol. Mais d’où vient ce problème ? Lorsqu’on irrigue, l’eau et les
sels dissouts s’infiltrent dans le sol. La plante extrait l’eau du sol ainsi qu’une petite partie des sels. Par
ailleurs, l’eau du sol s’évapore aussi de par l’action du soleil mais pas les sels. Petit à petit la
concentration en sel va alors augmenter dans le sol. Cet effet sera donc renforcé par une
évapotranspiration élevée et un drainage faible ou nul. Cette accumulation va avoir plusieurs effets
néfastes pour le sol et la plante. Tout d’abord une accumulation de sel va diminuer le potentiel
osmotique de l’eau du sol. En d’autres termes, cela signifie que l’eau sera d’autant plus difficile à
extraire pour la plante. Plus la concentration sera élevée, plus le potentiel osmotique sera négatif. Si le
potentiel de l’eau du sol pour une eau peu salée est de par exemple -0,1 MPa ou -1 bar
(ECsw=2mmhos/cm=2mS/cm)., il pourrait atteindre -0.7MPa ou -8 bar pour de l’eau salée
(ECsw=15mmhos/cm). La concentration en sel pourrait devenir tellement grande qu’à un certain
moment, la plante sera incapable d’extraire l’eau du sol, et souffrira de sécheresse même si le sol est
gorgé d’eau. Certaines plantes ont la capacité d’ajuster leur potentiel osmotique et sont plus tolérantes
à la salinité. On voit par exemple que l’orge ou le coton sont peu sensibles alors que le lin l’est
beaucoup plus. Un problème souvent associé à la salinité est la sodicité de l’eau, ou sa trop grande
concentration en sodium. Ce cation monovalent va s’accumuler sur le complexe d’échange du sol, ce qui
va peptiser les argiles et dégrader sa structure. Le résultat est un sol complètement déstructuré, sans
plus d’agrégats et peu perméable. On retrouve alors un sol sensible à l’engorgement, saturé en
condition humide et encroûté à l’état sec. En résultent des problèmes d’anoxie et de compacité qui
handicapent gravement l’émergence et la croissance de la culture.
Afin de caractériser la qualité chimique d’une eau d’irrigation, on mesurera sa conductivité électrique
(en mS/cm ou en mmhos/cm), une mesure facile à réaliser qui donne une excellente estimation du taux
de sels dissous. Concernant la sodicité, on utilise le sodium adsorption ratio défini comme sur la dia de
présentation. Toute eau d‘irrigation peut être classée à partir de ces deux mesures, en utilisant -par
exemple- le tableau que vous voyez sur la dia et proposé par le service américain d’agriculture. On
considère les classes 1 comme bonne, 2 comme moyenne et au-delà, la gestion de l’irrigation doit être
adaptée. La qualité de l’eau est cruciale pour l’irrigation.
Les problèmes liés à la salinité en particulier représentent une menace importante pour les sols irrigués
et doivent être gérés dès l’implantation du système. En effet, lorsque le processus de salinisation des
sols est trop avancé, il n’existe quasi aucune solution pour le remettre en état. On peut traiter le
problème de différentes manières : en choisissant une eau de bonne qualité, en augmentant la dose
d’irrigation pour favoriser un drainage profond, ou encore en travaillant le sol ou en y ajoutant des
amendements pour neutraliser l’alcalinité ou déplacer le sodium adsorbé. Enfin, un aspect particulier
auquel il faut faire attention en termes de qualité est la présence d'éléments toxiques pour la plante.
D'où provient l'eau que vous utilisez et quelles sont ses propriétés ?
Pour l'irrigation des cultures en serre, nous utilisons principalement de l'eau de
pluie, que nous recueillons sur les toitures des serres et que nous stockons ensuite
dans un grand bassin d'eau. La partie restante de l'irrigation est complétée par de l'eau recyclée. Nous
cultivons sur substrat ici, donc plus dans le sol. Et chaque fois qu'on irrigue, nous donnons un peu plus
d'eau pour éviter l'accumulation de sels. Nous collectons à nouveau l'eau excédentaire et la réutilisons.
Nous pouvons donc irriguer nos cultures avec une quantité limitée d'eau. Pour les cultures en plein air,
nous utilisons principalement de l'eau de pluie et de l'eau recyclée. Donc, en fait, l'eau nutritive qui a
circulé dans les serres et que nous ne pouvons plus utiliser, est utilisée après sur les champs pour
l'irrigation.
Quelles sont les différentes étapes à suivre pour utiliser l'eau pour l'irrigation et y a-t-il une différence entre
la serre et le sol en plein air ?
Pour l'irrigation des cultures de serre, nous commençons de toute façon dans le bassin d'eau. Là, nous
voulons empêcher le développement d'algues dans l'eau. C'est de l'eau stagnante. Des algues peuvent
causer beaucoup de problèmes au niveau de la qualité de l'eau et de l'engorgement des systèmes
d'irrigation. C'est pourquoi nous avons commencé à couvrir le bassin d'eau avec une voile flottante. De
cette façon, nous empêchons le développement d'algues. Après cela, l'eau de pluie est filtrée et ensuite
stockée sous terre dans la cave avant d'être utilisée. De plus, il y a l'eau nutritive recyclée qui revient
des serres. Celle-ci est d'abord filtrée avec un filtre à sable, puis purifiée ou désinfectée par un
désinfectant UV. Ensuite, elle est à nouveau stockée dans la grande citerne et ensuite nous mélangeons
les deux sources d'eau. Nous analysons la composition de l'eau et puis l'eau est prête pour l'irrigation.
Pour l'extérieur, pour l'irrigation des cultures en plein air, l'eau part également du bassin d'eau et nous
la filtrons une fois pour qu'à l'extérieur l'irrigation goutte à goutte ou les arroseurs ne soient pas
colmatés.
Quels sont les problèmes de qualité les plus courants et leurs solutions ?
L'un des problèmes les plus courants en ce qui concerne la qualité de l'eau dans les serres est le
développement de biofilms. Un biofilm se développe à l'intérieur des tuyaux d'irrigation, qui peuvent
atteindre plusieurs centaines de mètres de long. Les bactéries peuvent commencer à proliférer dans ce
biofilm, et celles-ci peuvent alors affecter les plantes. Nous sommes confrontés, par exemple, à une
bactérie : Crazy Roots, qui cause actuellement beaucoup de problèmes. Que faisons-nous à ce sujet ?
Nous désinfectons l'eau par exposition aux UV. C'est une désinfection ponctuelle. En outre, nous allons
également ajouter des peroxydes qui peuvent être transportés dans tout le système et donc attaquer
ces biofilms.
Y a-t-il des points d'intérêt spécifiques lors de la culture de légumes, qui sont donc moins importants pour
les grandes cultures ?
Comme il s'agit d'un système de recirculation, les exigences de qualité sont très élevées. Comme je l'ai
déjà dit, la teneur en sodium est très importante. Il ne faut certainement pas qu'elle soit trop élevée.
L'eau souterraine, par exemple, n'est pas autorisée dans plusieurs régions parce qu'elle peut avoir une
teneur en sodium trop élevée. Aussi la charge bactérienne ou les virus doivent être très faibles.