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Digitized by the Internet Archive
in 2011 with funding from
University of Toronto
http://www.archive.org/details/histoiregnr02mour
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* *
(en préparation.)
A LA LIBRAIRIE DESCLEE :
FERNAND MOURRET
PROFESSEVR d'uISTOIRE AU SEMINAIRE DE SAINT-SULPICE
• •
PARIS
LIBRAIRIE BLOUD ET GAY
3, RUE GARANCIÈRK, 3
1921
Reproduction et traduction interdites.
I5Û3Z
Nihil obstat.
A. Berrué.
IMPRIMATUR
Parisiis, die 22 maii 1920.
Deux grands faits dominent la période deux fois séculaire dont Vue général»
sur
nous allons raconter l'histoire : tandis que l'empire romain, sous les les IV' et T*
ladécadenc«
cadre général de notre liistoire. Nous y verrons les derniers empe- de l'cmpira
reurs romains, dans leur commun dessein de sauver l'empire, faire romain.
Le second fait constitue une œuvre plus intérieure et plus profonde. Deuxième fait:
i'œuvrt
Des hommes de science et de vertu, que la postérité appellera les Pères restauratrice
de l'Eglise *, s'appliquent à développer le dogme, la morale et la des Pères
de l'Eglise.
vie ascétique du christianisme ; et leur action est si féconde, qu'ils
ont donné leur nom aux deux siècles qui se sont glorifiés de leurs
travaux. Par opposition à l'âge des martyrs, qui les a précédés, les
IV* et v* siècles de l'ère chrétienne sont, en effet, généralement dési-
gnés sous le nom d'âge des Pères de l'Eglise.
Tous les grands hommes à qui les chrétiens ont décerné ce titre CaractèreD
distinctifs
glorieux n'ont pas vécu dans cette période. Leur longue série remonte
de la
à saint Clément de Rome, qui vécut au temps des apôtres, et se littérature
patristiqu ^
poursuit jusqu'à saint Bernard, qui illustra le xu* siècle. Mais le des ive et v«
groupe des écrivains ecclésiastiques qui vécurent depuis ledit de siècles :
les esprits cultivés se portent avec une curiosité avide vers les grandes
spéculations religieuses élaborées par l'école d'Alexandrie. Utiliser la
langue et les concepts philosophiques de la science grecque pour
formuler les sublimes mystères de la foi : telle est leur grande ambi-
tion. Avec plus d'élan dans Alexandrie, avec une méthode plus posi-
tive dans Antioche, avec une tendance plus traditionaliste en Cappa-
doce, les Pères orientaux se distinguent d'abord dans ce mouvement de
science religieuse. L'activité latine ne donne son plein développement
que plus tard, et dans un ordre d'idées plus spécialement pratiques.
a" Elle se Tandis qu'en Orient, les Athanase, les Basile, les Grégoire et les
divise en deux
v>urants bien Cyrille scrutent la substance divine, élaborent une science de Dieu
déterminés:
et du Christ ; en Occident, les Ambroise. les Jérôme, les Hilaire et
le courant
oriental les Augustin, épris d'une ardeur passionnée pour les questions de
et le courant
occidental ;
morale et de discipline, travaillent à édifier une science de l'homme
et de l'Eglise. Un large courant d'idées circule d'ailleurs entre le
monde grec et le monde latin saint Athanase, saint Jérôme et saint
;
C'est encore un trait spécial de la patrologie des iv* et v* siècles. 3' Elle s'étend
. >
•
1 •
1
^ l'Eglise
d avoir eu un caractère plus universel qu aucun autre mouvement de
1
entière;
On conçoit que, dans de pareilles conditions, l'action des Pères de 4" Elle élucide
cette époque ail été immense et sans aucune proportion avec l'action pi^s orands
problèmes
{groupes d'écrivains qui
des " *
les ont précédés ou qui
'
les ont suivis. De
^ theologiques ;
Car « l'âge des Pères « a pu être aussi appelé a l'âge des grandes 5<» Elle
hérésies ». « Il faut qu'il y ait des hérésies, oportet haereses esse », au ^milieu
avait dit l'apôtre. Il le fallait, ne fût-ce que pour éveiller d'hérésies
l'activité
. . .. nombreuses
intellectuelle de 1 Eglise. Saint Hilaire commence son immortel et redoutables;
7?
.M8
4 INTRODUCTIOW
lions, les injures et les calomnies, l'Eglise attaquée dans ses dogme»
les plus essentiels, calomniée dans sa morale la plus pure ; mais de
cette crise, ils virent le dogme catholique sortir triomphant, précisé
et rajeuni.
60 Elle La lutte contre les hérésies présentes ne fut pas la seule cause des
ce manifeste / » 1 1 r»< tn 1
70 Mais elle Tandis que toutes les sectes dissidentes, dans le schisme comme
prélude
le
dans l'hérésie, s'accordaient sur un seul point, la haine de l'Eglise
d'une éclaian le romaine, celle-ci, fidèle à ses plus anciennes traditions, méritait
restauration
de la foi
.
comme 1
au temps de Clément de Rome,
m » 1 t^ 1
le
, j. . ,. titre de « présidente
^ de la charité ». Tandis que
^ chacune de ces
la discipline
dans l'Eglise, secles se donnait le nom de son chef ou de la localité qui l'avait vue
naître, la voix commune des peuples réservait au seul groupement
rait les liens de sa hiérarchie. L Eglise romaine élail donc bien, dans
sa discipline comme dans son dogme, celle à qui Jésus avait prédit
que « les puissances de l'enfer ne prévaudraient point contre elle ».
Division
De3i3 à 379. sous des empereurs qui tantôt la protègent et tantôt
volume. et les Pères défendent énergiquement cette foi. soit contre les der-
niers assauts de l'erreur païenne, soit contre les attaques de cette
erreur demi-païenne qu'est la doctrine d Arius. C'est la Jin du
paganisme.
De 379 à 395, pendant que Théodose reprend et complète la
DOCUMENTS,
1900. Les actes relatifs à la période qui fait l'objet du présent volume
se trouvent presque tous aux tomes III et IV. Les Acta sanciorum
des BoLLANDiSTES, dout 63 volumes in-folio ont déjà paru, donnent
tous les documents qui se rapportent aux saints que l'Eglise honore.
hes Inscriptiones christianae urbis Romae de J.-B. de Rossi (2 vol.
in-Zi", 1857 et s.) reproduisent les inscriptions chrétiennes de Rome
antérieures au vu® siècle. Le Corpus inscriptionum latinarum et le
IV. — Les anciens textes liturgiques ont été réunis par Assemani,
dans son Codex litiirgicus Ecclesiae universalis, 12 vol., Rome, 1749-
1766 ; MuRATORi, dans romana vêtus, 2 vol. in-folio, Ve-
sa Liturg ia
vol., Anvers, 1786 Dom Cabrol et Dom Leclercq dans leurs Mo-
;
II
OUVRAGES.
VI. — Des éludes plus ou moins importantes ont été publiées sur
quelques-uns des Pères de celle époque. Nons devons signaler en
première ligne : Saint Jean Chrysostonie et les mœurs de son lempg,
par Aimé Puech, un vol. in-8°, Paiis, 1891 ; Saint Ambroise et la
Paris, 1895 ;
Saint Augustin, par l'abbé Jules Martin, un vol, in-8°,
Paris, 1901, publié dans la collection des Grands Philosophes. Voir
aussi : Barhal, Etude sur saint A thanase le Grand, Paris, i863 ;
191A.
Des articles importants sur les Pères de l'Eglise ont été publiés
dans le Kirchenlexilion en Allemagne et dans le Dict. de théol. ca-
tholique de Vacant en France. Parmi les plus remarquables, on
doit signaler l'article publié sur saint Augustin par le R. P. Por-
talié.
PREMIÈRE PARTIE
La fin du paganisme.
CHAPITRE PREMIER
(3i3-325).
a» Dans les Les philosophes, les lettrés, ne croyaient pas plus, sans doute,
spéculations
^^^ dieux homériques qu'à ceux de l'ancienne Rome, mais, sous le
•opliiques ; nom d'hellénisme, la plupart d'entre eux professaient un syncré-
tisme où toutes les spéculations religieuses de l'Orient s'étaient
3* Dans les La vie publique retenait plus fortement encore les éléments païens
institutions
publiques.
„^^j l'avaient
^ .
4. Dans les seules régions que baigne la Méditerranée ou que le Rhône met en
communication directe avec elle, de nombreuses inscriptions, trouvées à Nîmes,
Vence, Orange, Vaison, Valence, Ljon, etc., montrent les divinités locales, plus ou
moins associées à adoration des forces naturelles, identifiées avec les dieux romains
1
qui s'en rapprochent le plus. Corpus inscr. lai., t. XII, l\3, 35", 358, 1333, i3ii,
1567, 1669, 174/1, 1745, 1783, 3096-3103, 43a3, 4339,5687, 5864, 0953,
LA FIN DU PAGANISME 17
I. Th. de Régnom, S. J., Etudes de théologie positive sur la Sainte Trinité, t. III,
p. 199.
L.\ FIN DU PAGANISME 19
II
I. Quand S. Epiphase, dans son Ancoratos, xliii, P. G., t. XLI, col. 817, dit que
Lucien niait l'intelligenc« humaine du Christ, il lui attribue vraisemblablement
une erreur dont la responsabilité tombe sur sesdisciples. On sait que la critique
dogmatique de saint Epiphane généralement empreinte de sévérité. Baronius,
est
qui, dans ses Annales (ad ann. 3ii, n. la, et 3i8, n. 76) cherche à laver Lucien
de tout soupçon d'hérésie, est obligé de reconnaître qu'il se servit d'expression»
improprvi dans sa polémique contre les sabelliens. Sur Lucien d'Anliodie et sa
théologie, voir GwATEi.N, Sludies of arlaniim, p. 18 et s. Harsack, Antiocherische
Schule, dins Real-Encyklopëdie, t. I, p. 591 -SgS; Kattenbusch, Dos apostolische
Symbol, t. 1, p. aSa et s., aâS et s., a66 et s., t. II, p. aoa et s., 739 Hefele- ;
Leclsrcq, Hist. des Conciles, t. I, p. Sa'-S^g 'Fixeront, Hist. des dogmes, t. II,
;
p. 21-aa.De toutes les études qui ont été publiées à ce sujet, il semble résulter que
saint Lucien d'Antioche a été un de ces maîtres qui, prompts à émettre dans leur
enseignement les hvpothèscs les plus originales, côtoient parfois l'hérésie dans leurs
paroles, mais restent toujours orthodoxes de cœur. Ainsi s'expliqueraient las
prétentions des ariens, les insinuations de saint Alexandre, les affirmations de saint
Epiphane, et, en même temps, la vénération dont l'Eglise a entouré la mémoire de
saint Lucien, les éloges qu'a faits de lui saint Jean Ghrysostome et la discrétion
respectueuse que saint Athanase, dans ses polémique!, a toujours gardée à son
endroit.
a. Saint Epiphane, parlant de lui à propos de l'élection d'Alexandre au siège
d'Alexandrie en 3ii, l'appelle un vieillard. Il devait avoir à cette époque, d'après
les calculs des historiens, environ soixante ans.
3. Hist.gén. de l'Eglise, t, 1. p. 4ai.
4. Le B.u-helet, au mot Arius, dans le Dicl. de théologie de Vacart-Mamge«ot,
t. I, col. 1780.
23 HISTOIRE GE:»ERALE DE L EGLISE
Vue sommaire n'étaient plus que de vains rêves ; l'économie du salut était rompue ;
de la doctrine
l'insondable abîme, creusé par les philosophes païens entre l'huma-
arienne.
nité misérable et l'inaccessible Divinité, se rouvrait, aussi formidable
Intervention Il fut bientôt avéré que le propagateur d'une pareille doctrine n'était
de saint
Alexandre,
autre que le curé de Baucale. Alexandre le manda auprès de lui, lui
évêque parla avec tous les égards dus à sa science et à sa bonne renommée,
d'Alexandrie.
et l'exhorta paternellement à mettre fin à des discours qui pouvaient
troubler profondément la foi des fidèles. Tel est, du moins, le sens
du récit de l'historien Sozomène ^, lequel s'accorde avec les assertions
de saint Epiphane. Arius répondit par desiaisonnemenls subtils, par
des paroles équivoques. Mêlant habilement ce qui convient à la nature
humaine du Christ avec ce qui appartient à sa divinité, il réussit à
I . S. Epiphamk, Haer., lui, i. Nous avons ici la preuve que la ville d'Alexan-
drie était alors, au point do vue religieux, régulièrement divisée en paroisses, diri-
gées par Cv que nous appelons aujourd'hui des curés.
a. Sozomène dit qu'Alexandre « traita d'abord Arius avec honneur ", à tel
point que « pluiieuri faisaient des reproches à l'évéque de son excessive tolérance y.
oozoMitiE, H
isl. ecclés., 1, I, ch. iv. P. G., LXVII, col. 904.
III
Mais le conflit ne tarda pas à éclater avec violence. Un jour Premitr 4cUt
résoudre. La théorie fut accueillie avec faveur par les esprits imbus
de philosophie païenne. La nouvelle doctrine séduisait, d'autre part,
les chrétiens faibles. En diminuant la majesté de la victime du
Calvaire, par suite la rigueur de la justice divine et l'horreur du
péché, elle était, pour les âmes sensuelles et légères, comme une
délivrance.
Parla facilité de sa propagation, comme par le vice de ses don-
nées essentielles, le péril de la doctrine prêchée par Arius était donc
un des plus redoutables qui eussent menacé l'Eglise jusqu'alors.
L'évêque Alexandre ne paraît pas cependant en avoir compris, du
premier coup, toute la portée ^. Mais la Providence avait mis à côté
SaintAthanase de lui un jeune homme à l'esprit vif et clair, à l'âme droite, à la
(395-373).
volonté ferme, le diacre Athanase. Né dans la ville même d'Alexan-
drie, en 295 2, nourri dès son enfance dans les lettres profanes et sa-
crées, Athanase était entré de bonne heure dans le clergé et y avait
exercé pendant six ans l'office de lecteur, quand l'évêque d'Alexan-
drie l'appela au diaconat et le choisit comme son secrétaire. Petit de
taille et de chétive apparence, il devait être, sur ce point, l'objet
des railleries de Julien l'Apostat, qui frémissait de rage de voir ses
projets les plus chers entravés par cet « homunculew^. Mais ce faible
corps enfermait une âme indomptable. Quand Arius commença à
troubler la ville d'Alexandrie par ses doctrines suspectes, le diacre
Athanase, à peine âgé de vingt-quatre ans, avait déjà publié, contre
l'esprit païen et les erreurs émanées du paganisme, un important ouvrage
Son Discours d'une vigueur et d'une clarté peu communes, le Discours contre les
contre
lus Gentils
Gentils *. Dans cette œuvre de jeunesse, Athanase, « dont le carac-
(vors 3 18).
1. C'est ce qui ressortdu récit de Socrate, loc, cit., P. G., LXVII, col. 4^.
2. Nous suivons chronologie donnée par F. Cavallera, en tête de son Saint
la
Athanase, publié dans la collection « la Pensée chrétienne », un vol. in-ia, Paris,
1908, p. IX. Cf. G. Bardy, Saint Athanase, Paris, 191^, p. 1.
3. Mr^âl àvï|p, â'XX' avOtuTrtffXoc, dit Julien l'Apostat, lettre 5i.
a. Adversum génies libri duo c'est ainsi que saint Jérôme désigne l'œuvre de
saint Athanase dans son De viris illuslr., c. lxxxvu. A la suite des Bénédictins, qui
LA FIN DU PAGANISME 25
tère, dit Bossuet, fut d'être grand partout, mais avec la proportion
que demandait son sujet », analyse l'état intellectuel et moral de son
temps avec une sagacité qui étonne. Pour Athanase, la source de
toutes les erreurs qui troublent le monde à son époque, c'est l'ido-
ont donné un litre à chacun des deux livres : Discours contre les Grecs et Discours sur
l'Incarnalion [P. G., t. XXV, col. 8-96), la plupart des auteurs citent séparément
ces deux livres comme deux traités distincts mais dans ; la pensée de saint Atha-
nase, et en réalité, ils ne forment qu'un seul tout.
a6 inSTOinE GENERALE DE L EGLISE
frances et à sa mort.
Tel est, dans ses lignes principales, le magnifique traité publié par
le jeune diacre en l'année 3 18. Plusieurs indices ont fait supposer
qu'il fut composé, au moins en partie, dans la solitude de la Thé-
baïde *, peut-être sous les yeux du grand saint Antoine, dont l'ins-
piration serait visible en plus d'un endroit. L'hypothèse est plau-
sible. Aucun témoignage historique cependant ne vient la corroborer.
Nous savons seulement qu'Athanase mena quelque temps la vie
d' « ascète ». C'est sous ce titre qu'on l'acclama quand il fut élu au
siège épiscopal d'Alexandrie. Use glorifia souvent d'être l'ami d'An-
toine. Rien ne s'oppose à ce que les relations établies entre ces
deux grands hommes remontent à l'époque où le diacre composa son
Discours contre les Gentils.
IV
I. Dom Geillier, Hisl. gén. des auteurs sacrés, IV, ch. 11, art. 11, n. i. Dès le
début de son ouvrage, Athanase déclare « qu'il n'a pas sous la main les œuvres de
CB bienheureux maitres », c'est-à-dire des anciens écrivains ecclésiasiiques. Celte
phrase s'explique mieux s'il a écrit au désert.
a. Sur ce concile, tenu à Alexandrie en 3ao ou 3ai,voir Hefble-Leclercq, Wiil,
des conciles, t. I, p. 363-3'ja.
LA FIN DU PAGANISME 2"]
pas une créature comme les autres. C'est une créature parfaite, Dieu
ne pouvait en produire qui lui fût supérieure. Elle a grandi cepen-
Le Verbe n'a pas été seulement l'instrument de Dieu dans la créa- Son rôle
la création
a pris un corps humain, mais un corps sans âme, car une âme est et dans la
^^ ^'^^ '°""
inutile là où réside le Verbe *. L'humanité se sauvera en apprenant
de lui la véritéqu'il lui a transmise de la part de Dieu.
Quant au Saint-Esprit, Arius, très peu explicite sur ce point, en
admet la personnalité comme constituant avec le Père et le Fils
une trinité ; mais, d'après lui, il est infiniment séparé des deux
autres personnes. Arius paraît en faire une créature du Fils ^.
1. Thalie (Stint Athakasb, le Livre des Synodes, i5 ; Discours contre les ariens, i,
5. 6^
a. Thalie (Discours contre les ariens, i, 5).
3. Epist. ad Alex. (Livre des synodes, 16); Thalie (Synodes, i5 ; Discours contre
les ariens, t, 5).
l^. TixERo:<T, Hisl. des dogmes, II, 27.
b. Id., ibid.
28 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
fini ; les simples fidèles par une fallacieuse conformité avec leurs
habitudes intellectuelles * ». Les esprits spéculatifs admiraient en
efiet, dans ce système, les plus séduisantes théories de l'école néo-
platonicienne et de la gnose, exposées avec tout l'appareil de la dia-
Arius travaille ^on Système une fois conçu, Arius consacra tous ses efforts à se
à se recruter recruter des partisans. Saint Alexandre, dans une de ses lettres, si-
trêve, depuis quinze ans, contre l'Eglise hiérarchique '. Arius comp-
tait aussi sur ses anciens compagnons d'études, les disciples de
Phénicie. Mais son ambition lui faisait rêver une situation plus pré-
pondérante. A force d'intrigues, il était parvenu à se faire nommer
évêque de Nicomédie, où résidait depuis Dioclétien la cour impériale.
Là il avait cherché à gagner les bonnes grâces de l'empereur Lici-
nius et s'était insinué autant qu'il avait pu dans l'intimité de l'impé-
ratrice Constantia, sœur de Constantin. Une de ses préoccupations
était d'essayer de diminuer, par tous les moyens en son pouvoir,
l'autorité des sièges d'Alexandrie et d'Antioche, au profit de celui
de Nicomédie, capitale de l'empire en Orient. Vaniteux et intrigant,
mais intelligent et habile, Eusèbe de Nicomédie pouvait être d'un
grand secours au novateur. Arius lui écrivit une lettre débutant par
ces mots : « Mon seigneur, très fidèle et très orthodoxe Eusèbe,
Arius, persécuté par l'évêque Alexandre, pour cette vérité chrétienne
dont vous êtes le défenseur, vous salue. Eusèbe s'empressa d'invi-
» Il adhère
ter Arius à venir auprès de lui à Nicomédie, et '.ette précieuse adhé- ,• jî\ •
col.ii53.
3. Le poète égyptien Solade, mal famé pour ses mœurs elTéminées, avait créé
ce genre. Voir Fialon, Sainl Athanase, étude littéraire, Paris, 1877, p. 63 et s.
Cf. G. Babdt, Saint Athanase, p. i3-i4.
LA FIN DU PAGANISME 3i
VI
comparable relief des lettres que signera plus tard le grand Âthanase,
expose, quoi qu'on en ait dit^ avec toute l'exactitude et toute la net-
teté désirables, les grandes lignes de la foi catholique sur le fond des
questions débattues.
Menées Beaucoup d'évêques d'Egypte, de Libye, de Syrie et d'autres
des ariens.
pays entendirent la A'oix d'Alexandre et souscrivirent à ses conclu-
l'empereur.
Interveution Le pape Sylvestre avait été mis au courant de l'affaire par l'évêque
de Constantin
d'Alexandrie, qui lui avait communiqué sa première lettre. Mais
(3a3?).
avant qu'il eût pris aucune mesure, l'empereur Constantin, poussé
sans doute par Eusèbe de Nicomédie, pressé d'ailleurs de mettre fin à
3. Hefele-Leclercq, t. I, p. 378-385.
LA FIN DU PAGANISME 33
5. Ibid.
l'a souvent prétendu une critique qui prend le doute pour la science,
col. 217 Mais raulhenticilc de ce document, fort bizarre d'ailleurs, n'est pas k l'abri
de toute critique.
3. Saint Epiphane, Haeres., lxvui. 4 P- G., t. XI. Il, col. 189,
;
i
Vie de Constantin, \. 111, ch. xn
; P. G., t. XX. col. io68.) Mais nous savonsd'au-
tre part qu'il consulta des prêtres et des évêques. Au nombre de ceux-ci dut être
l'évêque de Rome. D'ailleurs le fait que le pape saint Sylvestre envoya au concile
deux délégués implique de sa part une ratification de la convocation impériale.
Telle est l'explication admise par Bcllarmin. Hefele, Mazzella, Palmieri, Phillips.
Wernz, etc. Le D'' Fls^ [Kircliengescliichtliche Abhandlungen, t. I, p. Sg et s), a
accumulé bien des textes et des raisonnements pour démontrer que Constantin
agissait en son nom personnel et de son propre mouvement. La série des témoi-
gnages apporté» par le savant auteur n'annule pas ceux qui nous montrent Cons-
tantin consultant le clergé, et surtout n'empêche pas le fait de l'approbation tacite
et de la ratiBcation expresse du pape. —Le droit exclusif et absolu du souverain
pontife à convoquer un concile n'est pas discuté parmi les catholiques. Voir
Hefele-Leclercq, Hist. des conciles, t. I, p. 9-10, note ^0^-^07. Le Vl' concile
oecuménique, qui eut lieu on 680, dit « Constantin et Sylvestre convoquèrent
:
LE CONCrLE DE NICEE.
(325.)
d'hui, pour bien des raisons, il m'a semblé utile de réunir un concile
dans la ville de Nicée, en Bithynie. L'accès en sera plus facile aux
évêques d'Italie et d'Europe ; la salubrité de son climat ne laisse rien
mande ma volonlé, qui est que vous vous rendiez sans délai dans la
susdite ville de Nicée. Chacun de vous se préoccupera d'éviter tout
retard, afin d'assister effectivement de sa personne aux délibérations.
Dieu vous garde, frères très chers K »
Comme naguère, pour le concile d'Arles-, les a voitures publiques » Le service
des « Noitures
se mirent en mouvement. Grâce à l'admirable système de ^oirie par publiques ».
lequel l'empire romain avait fortement relié à son centre tous les
pays domptes par ses armes, chaque évêque, en suivant une de ces
voies romaines pavées de larges dalles dont de nombreux restes nous
attestent encore l'admirable solidité, put trouver, d'étape en étape,
des chariots, des coches, des bêtes de selle et de somme, des servi-r
des scènes touchantes. Unis par une même foi et par des épreuves
communes, mais séparés par les mers et les montagnes, ils ne con-
naissaient les uns des autres que leurs mérites et leurs souffrances...
de l'Eglise, I, ^^g.
3. llist. fjén.
3. Elsèbe, Vie de Constantin, !. III, ch. vi, ix P. G., t. XX, col. 1060, io64.
;
Sur le service de la poste impériale à celte époque, voir L. Maurt, les Postes ro-
maines, un vol. in-i8, Paris, 1890.
EusèBE, //. E., 1. m, ch. VI.
4.
Vraisemblablemenl le ao mai. Voir la discussion critique de celte date dans
5.
IIepele Leclercq, I, 4i6-4i9.
6. Saint Athana^e parle à plusieurs reprises d'environ trois cents évêques. Dans
sa lettre ad Afros, ch. 11 P. G., t. XXVI, col. io3i, il dit formellement trois
;
qui son grand âge n'avait pas permis de se déplacer. Elle était com-
posée de deux prêtres. Vite et Vincent, et dirigée par l'ami de
Constantin, la lumière deTEspagne, Osius de Cordoue. Enfin deux
Barbares, un Perse, Jean, et un Goth, Théophile, complétaient celte
réunion du genre humain. C'était un mélange d'accents et même
d'idiomes divers qui faisait ressortir dune manière plus touchante la
a prendre en
1
mam sa cause, on comprend
1
'^
païens
que plusieurs d'entre eux se soient prêtés de tout cœur à cette œuvre. i Nicée.
Une hérésie chrétienne pouvait leur paraître une heureuse issue pour
la vieille idolâtrie païenne, menacée de toutes parts. Dans la doc-
trine d' \riiis, Jésus apparaissait, en somme, comme un demi-dieu.
S'il était plus noble et plus pur que ceux de la vieille mythologie
grecque, la superstition populaire pourrait, à côté ou au-dessous de
lui, en placer d'autres, plus ou moins adaptés îux formes diverses de
son idéal ; et l'équivoque séduirait beaucoup de chrétiens ignorants.
Ils discutent Mais ces philosophes. Arius lui-même, comptaient sans la clair-
du concile,
voyance et la dialectique du jeune diacre^, que l'éveque d'Alexandrie
avait amené avec lui pour prendre part au concile. Dès le début,
<( Athanase apparut à tous, dit Socrale, comme l'adversaire le plus
vigoureux des ariens ^ ». Ils comptaient aussi sans la foi éclairée des
vénérables Pères du concile, dont la grande majorité devait refuser
de soumettre à la critique de la seule raison les fondements d'un
dogme qui relevait avant tout d'une révélation surnaturelle. Un
curieux récit du temps, qui, par ses amplifications littéraires et par le
.,,,.,
tiens. Comme un serpent, il échappait a toutes les preuves qu on lui
, . , •
«
I. Gélase de Ctzique (Mansi, II, après lui, Hefele ([Iefele-Leclercq,
808) et,
I, 4i5;, lui donneiitle titre d'archidiacre. Sur ce litre, voir la dissertation de Dom
LECLERCQdans le Dlct. d'arch. chrét., t. I, col 2783 et s.
II
4. TiLLEMONT, Mémoires, éd'il. de i73a, t. VI, p. 356. Cette opinion, admise par le
duc de Broglie et par Mgr Ductiesne, a été combattue par de bons arguments dans
une élude de F. Cavallera, selon cpii \i discours d'ouverture du concile aurait été
prononcé par saint Eustache d'Antioche. Voir F. Cavallera, le Schisme d'Antioche,
Paris, 1905, p. 34-35.
42 HISTOIRE GENERALE DE L EGLISE
de peine que tout le reste... Pour que mes vœux soient comblés, il
faut donc que vos cœurs soient unis, et que l'on voie régner parmi
vous la paix dont votre consécration à Dieu vous fait un devoir d'être
ches ou primats et qui avaient déjà une autorité incontestée sur leurs
collègues ^ mais il ne s'ensuit pas que le concile de Nicée ait eu
;
plus au courant que lui delà controverse arienne. Tous ces motifs le
adversaires.
Comparution Arius, quoique n'ayant pas le droit de siéger comme membre de
Anus.
l'assemblée, se tenait prêt à discuter devant elle. On ne tarda pas à
11 compromet
"^
\
sa cause par l'y appeler. Il s'y rendit plein de confiance. Le bruit fait autour de
sesalhrinatioiis
^^^ nom, les grands espoirs
r qu'avaient
t.
fait naître en lui les intrigues
o
audacieuses. .
«Il soutint hautement que le Verbe n'était pas Dieu, qu'il n'avait pas
toujours existé, qu'il était sorti du néant comme toute créature, que
ce nom de Verbe qu'on lui donnait n'était lui-même qu'un nom reçu
par grâce, que cette prétendue Sagesse était incapable de connaître le
Tous cco blasphèmes sont mis par saint Alhanase dans la bouche même d'Arius
parlant devant le concile. TaOta xai TOiaOta ^é-^wv è Aps'.oç.. ev t>^ xits Nîxaiïv '
col. 913.
3. TnéoDonET, liisl. ecch's 1, I, ch. P. G., m,
t. LXWII, coi. yO^. ;
LA FIN m PAGANISME A5
III
lesdiscussiong.
attention la discussion des problèmes. Il reprenait les assertions
émises en les corrigeant ou en les adoucissant, de manière à empêcher
les dissertations de dégénérer en conflits. Il témoignait de la bienveil-
lance à tous. Son afl'abilité gagnait les cœurs. Ceux qu'il ne pouvait
rait pas y avoir eu de vole proprement dit, mais, comme au sénat romain, les mem-
bres du concile se rangeaient d un côté ou de l'autre, selon qu'ils étaient partisan»
ou adversaires de la résolution proposée.
3. McEHLER, Atfianasius, t. I, p. 339.
II. EtsÈBE, Vie de Constantin, I. 111, ch. xiu ; P. G., t. XX, col. 1069.
5. Hepele-Leclercq, L (iag.
46 HISTOIRE GÉNÉRALE DE l'ÉGLISE
pas convaincre, il les faisait rougir par la force de ses paroles. Quand
quelqu'un parlait judicieusement, il lui donnait des éloges. Il prêchait
à tous la concorde. Il arriva à ses fins et il mit tous les esprits d'accord
sur le point en litige ^. » L'historiographe de Constantin exagère
peut-être un peu le rôle de son héros, mais il n'en dénature certaine-
ment pas le caractère : tout ce que nous savons jusqu'ici de Cons-
tantin, nous le montre comme désireux de rétablir avant tout l'ordre
et la paix.
duc de Broglie, pas une assemblée libre ne s'était réunie sur un point
de l'empire, pas une voix sortie de la conscience ne s'était fait
I, EusÈBE, op. cit., 1. III, cl). XIII P. G., t. XX. col. 1069.
;
Bien plus précis dans ses formules, bien plus profond dans ses Le diacre
difficulté, ou, mieux encore, exposer, dans la vérité attaquée, le point discussion,
centrai d'où tout dépend, et y faire jaillir ces flots de lumière qui
éclairent la foi en même temps qu'ils démasquent l'hérésie. Arius
dans son système, s'était placé au point de vue de la transcendance
eellus von Ancyra, Golha, 1867 Tixerost, Hist. des dogmes, 11. 38-/13.
;
^*^"]'œuvre ^^ Verbe incarné pour racheter les hommes et pour les rendre
rédemptrice enfants de Dieu. Mais comment pourrait-il les diviniser s'il n'était
tion divine, même adoplive, s'il n'était Fils de Dieu par nature ? »
Puis, attaquant de front la doctrine hérétijque : « Si le Verbe est
Son argument créé, disait-il, comment Dieu, qui l'a créé, ne pouvait-il pas créer le
fondamental •»o- i J ,., ,, at •• i • ' -i
contre
monde i
P Si le monde i
a ete crée par le Verbe, pourquoi n aurait-ii
l'arianismc. j)as été Créé par Dieu ? » Pendant toute sa vie, Athanase enrichira ces
points de vue d'aperçus nouveaux, mais ils resteront l'inspiration
fondamentale de toute sa polémique et de toute sa théologie*.
IV
i6, 89; II, a4, a6, /40, 69. Cf. Voisin, la Doctrine chrislologique de saint Alha-
nase, dans la Revue d'histoire ecclésiastique, t. 1 (1900), p. aaG-aiS,
L'ordre de ce qui suit est conjectural. Nous le donnons à peu près tel que
2.
les meilleurs historiens du concile, le duc de Broglie, Hefele, Tixeront, l'ont com-
pris. Les procès-verbaux du concile, s'il en a été dressé, ne se sont pas conservés.
Le symbole, les vingt canons et le décret synodal, sont les seules pièces officielles
qui nous restent. Mais les récits d'Eusèbe, de Socrate, de Sozomène, de Thcodoret,
de Riifin et les données fournies par saint Athanase dans son Discours sur les décrets
de Nicée et sa Lettre aux évêques d'Afrique, permettent d'établir, avec de grandes
probabilités, les principaux jalons de l'histoire du concile. Sur les sources de cette
histoire, voir tlEFELr-'.ECLERCQ, t. 1, p. 38G-4oa.
L\ FIN DU PAGANISME à9
que ces expressions seraient assez générales pour permettre une inter-
« Tout n'est-il pas de Dieu, disaient-ils, nous et toutes les autres adopte»" des
formules
créatures.^ Saint Paul n'a-t-il pas dit: « Tout est de Dieu -^
», équivoques.
<i Dieu de qui est tout * » ? Les Pères, pour mieux préciser leurs
pensées, avaient ajouté : « Le Verbe est la vertu de Dieu, l'éternelle
image du Père, parfaitement semblable au Père, immuable et vrai
et s.
La taetique Pour couper court à ces interprétations abusives, les Pères décla-
rèrent que le Verbe était « de l'essence même de Dieu, i/. r/j; où'jiàz
est'déioifée
zov 6iOÙ ». Mais n'abuserait-on pas encore de cette expression P
pour exDrimer
'avantage d avoir ete positivement condamne par 1 eveque de INico-
l'identiié médie. « Si vous reconnaissez le Fils de Dieu incréé, s'était écrié un
entre le P' e J*^*^'"
'® chef du tiers parti, autant vaut le proclamer tout de suite
et le Fils. consubstantiel au Père '^. » Comment le parti eusébien oserait-il
condition qu'ils fussent distincts l'un de l'autre, « car, dira plus tard
saint Basile, une chose n'est jamais consubstantiel le à elle-même.
Histoire mais toujours à une autre ' ». L'expression, enfin, n'était pas nou-
e ce mo .
yelle. Eusèbe de Césarée déclare que « plusieurs évêques, écrivains
savants et illustres, s'en étaient déjà servi 8». Paul de Samosate avait
même essayé de l'accréditer comme expression de sa doctrine, mais
il l'avait expliquée de telle sorte que le troisième concile d'Antioche
en avait réprouvé l'emploi ^. « En disant que le Fils est omooiisios
I. I Cor., XI, 7.
a. Joël, II, a3.
deux mystères, ne sauvegardant le dogme de l'unité divine que par ^Je foi*^
I. S. Athabase, Sur les décrets de Nicée, xx ; Lettre à Sérupion, m, 5-6 ; Sur les
synodes, Sg, 43, 48-54.
3 SocRATK, //. E., I. P. G., t. LXVII, col. 6o et s.
I. ch. VIII ;
l. XXV, col. 74i et s ^ mais saint Hilairc, de son côté, déclare que saint Atha-
;
de Nicée.
« Nous croyons en un seul Dieu, Père tout-puissant, créateur des
choses visibles et invisibles, et en un Seigneur Jésus-Christ, Fils de
Mansi, t. 916. Nous verrons plus tard les additions successivement appor-
II, col.
tées à ce symbole et qui lui ont donné la forme sous laquelle l'Eglise le fait aujour-
d'hui réciter dans la cérémonie de la sainte Messe.
l^. Philostorge, Supplsm., P. G., t. LXV, col. Ga^.
LA FIN DU PAGA.MSME 53
signatures des trois évêques comme sincères. Cet acte, s'il ne fit pas
à tout désaccord, n'est pas l'œuvre des hommes c'est une œuvre ;
semblent être, sur ce point, les simples échos d'un bruit probable-
ment calomnieux ^. Mais ce qui est incontestable, c'est que l'évêque de
Lycopolis, non content de violer ouvertement les règles les plus pré-
cises du droit canonique le plus certain, avait méprisé les observa-
377.
L\ FIN DU PAGANISME