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« EXISTE-T-IL QUELQUE CHOSE COMME UNE POLITIQUE

DELEUZIENNE ? »

Alain Badiou

Presses Universitaires de France | « Cités »

2009/4 n° 40 | pages 15 à 20
ISSN 1299-5495
ISBN 9782130572541
DOI 10.3917/cite.040.0015
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-cites-2009-4-page-15.htm
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« Existe-t-il quelque chose
comme une politique deleuzienne ? »1
ALAIN BADIOU

DOMINIC WILLSDON. — Nous accueillons Alain Badiou, un des philosophes


importants en France depuis plusieurs décennies, de plus en plus connu main-
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tenant que ses œuvres sont traduites en anglais, et que la littérature secondaire
sur sa philosophie se développe aussi en anglais. Parmi ses livres traduits ces
15
dernières années, on trouve Deleuze. La clameur de l’être, reçu comme une
importante interprétation hétérodoxe de Deleuze, une lecture puissante de la
philosophie de Deleuze. C’est donc un plaisir pour nous que d’accueillir « Existe-t-il
aujourd’hui Alain Badiou. quelque chose
comme une
ALAIN BADIOU. — [...] Ma question sera : Est-il possible d’identifier politique
quelque chose comme une politique deleuzienne ? La question est très deleuzienne ? »
difficile. Certes, bon nombre de militants politiques se réfèrent à des
concepts deleuziens comme le « devenir », le « désir », « minorités », etc.
Mais cela ne suffit pas pour qu’on puisse parler de « politique deleu-
zienne ». En fait, la question pose plusieurs problèmes. Le premier est que
Deleuze n’isole jamais la politique comme quelque chose qui devrait être
pensé per se, pour soi, comme une pensée spécifique. Dans Qu’est-ce que la
philosophie ?, Deleuze et Guattari dénombrent, comme on sait, trois types
de pensée : science, art et philosophie. La science pense les fonctions, l’art

1. Titre général de la conférence « Immanent Choreographies Deleuze and Neo-Aesthetics : A


Tate Modern Public Programme », Modern Tate, Londres, 21-22 septembre 2001. Participants :
Alain Badiou, Alexander Garcia Düttman, Iain Mackenzie. Conférence et discussion en anglais.
Cités 40, Paris, PUF, 2009
pense les « percepts » et les affects, la philosophie est création de concepts.
À première vue, il n’y a pas place, dans cette classification, pour la poli-
tique. Le deuxième problème est de nature subjective. On ne peut pas vrai-
ment dire que Deleuze était très intéressé par la politique. Sans doute, dans
un grand nombre de textes écrits avec Guattari, on peut trouver des
« conceptions politiques ». Mais lorsque Deleuze écrit seul, il ne dit jamais
que sa création philosophique se fait sous conditions de la politique. Sartre,
Althusser, parfois Derrida, ou Lyotard, ou Nancy, peuvent écrire que la
philosophie a une destination politique. Mais pas Deleuze. Deleuze écrit,
par exemple, dans Pourparlers : « Ce qui m’intéresse, ce sont les relations
entre les arts, la science et la philosophie. » Mais Deleuze n’a jamais écrit
que ce qui l’intéressait, c’était les relations entre politique et philosophie.
Néanmoins, nous savons tous que Deleuze parle de politique. Quelle est
donc cette « politique » au sujet de laquelle Deleuze parle ou écrit ? Dans
Pourparlers, par exemple, il y a cinq parties : la première, sur L’Anti-Œdipe
et Mille plateaux ; la seconde, sur le cinéma ; la troisième, sur Michel
Foucault ; la quatrième, sur la philosophie ; et la cinquième, sur la poli-
tique. Mais, et c’est là le troisième problème, dans la partie consacrée à la
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politique, trouvons-nous des considérations concrètes à propos d’orienta-
16 tions politiques ? Non. Nous trouvons, sous le nom de politique, deux
types de choses. D’abord une théorie, ou philosophie, de l’histoire, qui
propose trois étapes dans l’histoire universelle. D’abord, les « sociétés de
Dossier :
Deleuze souveraineté », ensuite, après la Révolution française, les « sociétés de disci-
politique pline », enfin, se développant de nos jours, les « sociétés de contrôle ». C’est
en fait un grand schéma historique, une sorte de reconstruction posthégé-
lienne du devenir global des sociétés humaines. Mais, et c’est le second
point, Deleuze ne montre pas là un véritable souci d’historien. Il y a, dans
sa philosophie, comme chez Nietzsche, un violent anti-historicisme. La
distinction cruciale passe entre « histoire » et « devenir ». Pour moi, ce texte
est fondamental : « Le devenir n’est pas une partie de l’histoire [...] ; il s’y
agit de créer quelque chose de nouveau. » Après cela vient l’exemple type de
Deleuze : Mai 68 fut une démonstration, une irruption de devenir à l’état
pur. Et donc le devenir à l’état pur ne fait pas partie de l’histoire. Si la poli-
tique n’est rien d’autre que la gestion de la direction des affaires, le gouver-
nement de la Cité, alors elle relève de l’histoire, elle fait partie de l’histoire.
Nous devons dire : la politique, sauf dans une période comme Mai 68, ne
fait pas partie de l’histoire, parce que la politique a à être la création de
quelque chose de nouveau.
Pour autant, la difficulté reste très grande. D’abord, il y a des textes dans
lesquels Deleuze soutient le contraire, des textes dans lesquels il soutient
que la politique n’est pas création pratique, mais analyse théorique. Par
exemple, lorsqu’il déclare que « la philosophie politique doit se tourner vers
l’analyse du capitalisme et des moyens par lesquels il s’est développé ». De
ce point de vue, la politique est l’analyse du capitalisme, et non pas la créa-
tion de quelque chose de nouveau. Mais y a-t-il un lien entre ces deux défi-
nitions ? C’est le cœur du problème. Si la philosophie politique est l’ana-
lyse du capitalisme, la philosophie politique fait partie de la philosophie de
l’histoire. Mais la politique en tant que création n’est pas une partie de l’his-
toire. Il y a là une grande tension entre la précondition de la politique, d’un
côté (capitalisme, distinction entre les différents types de sociétés recensés
ci-dessus), et, comme en Mai 68, le devenir à l’état pur. Je crois pourtant
qu’il est possible d’expliquer entièrement cette difficulté.
La « maxime politique » chez Deleuze énonce que « le devenir est plus
important que l’histoire ». Vous devez créer quelque chose de nouveau. La
société de contrôle est seulement l’organisation de l’interdiction du
devenir. Ainsi, la politique – la vraie politique – est la libération du désir
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et du devenir. Cependant, la création elle-même n’est pas la politique. La
création est art (création de percepts), science (création de fonctions), 17
philosophie (création de concepts). Nous pouvons donc dire que, si la
politique, entendue comme maxime politique (le devenir passe avant
« Existe-t-il
l’histoire) n’est pas une forme de pensée séparée, à part, c’est parce que la quelque chose
politique est une maxime, non pas pour la politique, mais pour l’art, la comme une
science ou la philosophie. Deleuze pense qu’il y a une politique de l’art, politique
une politique de la science et une politique de la philosophie. Mais, si je deleuzienne ? »
puis m’exprimer ainsi, Deleuze ne pense pas qu’il y ait une politique de la
politique. C’est que pour lui la politique est une maxime de création, mais
pas une création en soi. Quand la politique n’est pas une maxime pour
l’art, la science ou la philosophie, elle ne peut être autre chose qu’une
analyse du capitalisme. Voyez-vous, il y a deux définitions de la politique :
la première est « création de quelque chose de nouveau » ; créer quelque
chose de nouveau est l’expérience globale du comportement humain. La
seconde est que « la politique est l’analyse des nouvelles formes du capita-
lisme ». C’est une définition spécifique, mais ce n’est pas une maxime
pour l’action. L’analyse du capitalisme est une sorte de théorie de l’his-
toire, et non une irruption pure, une pure création de quelque chose de
nouveau.
Et donc, lorsque nous parlons de « politique deleuzienne », nous
parlons de deux choses différentes. C’est à la fois la difficulté et la solution
de la difficulté. D’abord, la maxime nietzschéenne de création, et la
critique radicale de l’histoire : mais ce genre de politique n’est pas une
pensée spécifique. C’est bien plutôt la politique de l’art, de la science, de
la philosophie – politique de la pensée elle-même, en tant que création
vitale de quelque chose de nouveau. Deuxièmement, la politique est
analyse des nouvelles formes du capitalisme, analyse des sociétés, théorie
de l’histoire. La politique est spécifique dans ce cas, parce que la philo-
sophie politique seule est l’analyse du capitalisme moderne. Mais elle n’est
pas une pensée créative. Maintenant : ou bien la politique est partout, et,
comme en Mai 1968 en France, nous dirons que l’expérience humaine
tout entière fait partie de la politique, et qu’il y a de la politique dans la
sexualité, politique dans l’art, politique dans la vie courante ; ou bien la
politique est spécifique, et elle est, et n’est que, l’analyse philosophique de
l’histoire et des nouvelles formes de l’histoire.
Mais qu’est-ce qu’une maxime politique de l’action qu’enveloppent les
créations humaines prises dans leur totalité ? Qu’est-ce qu’une maxime
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politique, si la maxime est dans l’art, dans la sexualité, dans le devenir de
18 l’être humain ? Je pense que c’est en fait une maxime éthique, bien plus
qu’une maxime politique. Deleuze écrit : « Ce qui manque le plus est la
croyance dans le monde. Nous avons quasiment perdu le monde. Il nous
Dossier :
Deleuze a été retiré. Si vous croyez dans le monde, vous précipitez les événements,
politique sous une forme qui échappe au contrôle. » Selon moi, il est clair que croire
en le monde, précipiter les événements, échapper au contrôle, sont les
maximes éthiques de Deleuze. Nous pouvons distinguer la maxime néga-
tive ( « échapper au contrôle » ), la maxime subjective ( « croire au
monde » ), et la maxime créative ( « précipiter les événements » ).
L’éthique, selon moi, doit relier ces trois maximes. Il y a, dans la politique
deleuzienne, une brillante analyse du capitalisme, pour laquelle la partici-
pation de Guattari a été déterminante. Mais il y a aussi une éthique deleu-
zienne sous le nom de « politique », parce qu’il y a, chez Deleuze, un
nouveau nœud de la révolte, de l’affirmation et de la subjectivité. Révolte
contre la société de contrôle, c’est-à-dire révolte contre la communication.
Affirmation de l’événement. Création de quelque chose de nouveau
– quelque chose de petit ou de grand, mais quelque chose de nouveau. Et
croyance dans le monde comme nouvelle subjectivité. Et il me semble que
le lien des trois constitue complètement l’éthique de Deleuze.
Depuis quelques semaines, nous sommes tous soumis à l’effrayante
affirmation de la mort, du pouvoir de la mort. Et la question, pour nous,
est maintenant de savoir s’il est possible d’opposer à la mort quelque chose
de nouveau ? Quelque chose qui ne soit pas une autre mort. Non pas la
mort contre la mort. Eh bien, l’éthique deleuzienne nous dit : nous avons
à créer quelque chose de nouveau qui ne soit pas une mort pour une autre
mort. Nous avons à créer les nouveaux liens de la vie : nouvelles néga-
tions, nouvelles affirmations, nouvelles subjectivités. Nous expérimen-
tons, tous, la nécessité absolue de créer quelque chose qui ne soit pas le
combat entre deux sortes de mort. Après tout, oui, c’est bien là une ques-
tion éthique, mais aussi une question politique.
Je vous remercie de votre attention.

Question dans la salle — [...] Le 11 septembre était-il un événement au


sens de Deleuze ?
A. B. — Un événement est la création de quelque chose de nouveau.
Quelle est la création ici ? C’est une création de mort. Et la mort n’est pas
création. La création enveloppe toujours la vie. Et tout spécialement pour
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Deleuze, parce que chez lui « vie » est le nom de l’ « être » lui-même. Et
donc, c’est un fait, un fait effrayant, mais ce n’est pas un événement. La 19
question est la suivante : après la mort, quel est le devenir ? Je ne pense
donc pas que le terme « événement » soit approprié pour la mort.
« Existe-t-il
[...] Chez Deleuze, il y a deux formes de mort, et pas une. Il y a une quelque chose
mort sur la ligne de l’histoire, et une mort sur la ligne du devenir. Ce n’est comme une
pas la même mort. La mort sur la ligne de l’histoire est une mort du politique
devenir lui-même. C’est l’impossibilité du devenir. Mais la mort sur la deleuzienne ? »
ligne du devenir est la mort immanente à la vie, la mort « de » la vie, sans
doute, mais au sens où la mort fait partie de la vie. Cette distinction est
très difficile, je l’accorde. En effet, l’identification du pur devenir fait
problème. Deleuze dit que le pur devenir est sous la forme d’une irrup-
tion. C’est une rupture de la ligne de l’histoire. Et donc, dans des périodes
comme Mai 1968, vous voyez l’interruption, vous voyez l’irruption du
devenir. Le devenir s’arrache à l’histoire. Le devenir n’est pas dans le
temps, à strictement parler. C’est un fragment d’éternité. Deleuze est un
véritable spinoziste. Il y a pour lui quelque chose de l’éternité dans la vie.
Et l’éternité de la vie, c’est le devenir lui-même. Mais le devenir lui-même,
avec son éternité, a aussi sa propre mort, qui lui est immanente. Et donc,
la question se pose toujours de la distinction entre deux formes de mort,
l’une qui est la mort à proprement parler, sur la ligne de l’histoire, la
seconde qui est la mort « de la vie », nom paradoxal, « mort immanente à
la vie ». Et les analyses que fait Deleuze de Melville, ou de Beckett, sont
des analyses de la seconde forme de mort. Bartleby ( « Je préférerais ne
pas » ), c’est le devenir pur, le devenir le plus pur, qui ne contient rien
d’autre que le devenir lui-même. Et c’est une forme de mort, sans doute,
mais la mort immanente au désir, la réciprocité de la mort et du désir.
Question dans la salle — Bartleby serait donc le véritable révolutionnaire ?
A. B. — Oui (rires). Pour Deleuze, il est tout à fait plausible de voir en
Bartleby la forme la plus pure du désir, plus pure que toute forme poli-
tique du désir. Les véritables héros de Deleuze sont Bartleby, Molloy, etc.
Question dans la salle — La vie peut se poursuivre sous des formes non
humaines : je peux nourrir des vers sur ma carcasse, ou retourner à un état
inorganique. Où est ici la possibilité d’une « éthique » de la vie ?
A. B. — Il y a là une grande difficulté. Une difficulté spinoziste. Que
peut être l’éthique lorsque nous ne sommes qu’une pièce de la totalité ?
Du « grand animal » ? Deleuze dit que le monde est un grand animal.
Nous sommes quelque chose comme une pièce de ce grand animal. La
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pièce du grand animal a une éthique, et en effet c’est un problème diffi-
20 cile. Je pense que l’éthique est le moment où la pièce de l’animal est la
même chose que l’animal en sa totalité – comme lorsque, chez Spinoza,
nous savons que nous sommes Dieu. Une part de Dieu, mais une part qui
Dossier :
Deleuze est Dieu lui-même. Chez Deleuze, c’est la même chose. Le devenir pur est
politique la vie pure. Et la vie pure est la totalité, l’Un. Et nous sommes l’Un quand
nous sommes devenir pur. C’est une sorte de rédemption. Deleuze dit que
Spinoza est le Christ de la philosophie. Pourquoi dit-il cela ? Parce que,
quand le devenir pur est une possibilité pour nous, une pure possibilité,
une pure possibilité impersonnelle, pas une possibilité pour un sujet, mais
une possibilité en soi, nous expérimentons l’éternité, l’éternité de la capa-
cité créative de la vie. C’est cela, l’éthique, et pas du tout une question de
« respect » des autres, et ce genre de choses. Pas du tout. Pour Deleuze,
autrui est aussi une pièce de la totalité. De ce fait, la discussion ou le débat
sont toujours quelque chose de faux. Nous sommes ici en train de faire
quelque chose de faux. Le débat, la discussion, ce n’est rien du tout. Et
pourtant, nous continuons. Continuer fait aussi partie de la vie.
Traduit de l’anglais par Charles Ramond.

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